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La logistique du commerce électronique

Introduction

La dimension logistique de l’activité de commerce électronique sur l’internet a


longtemps été sous-estimée, l’attention des experts se portant essentiellement
sur les questions de paiement sécurisé et sur le degré de réintermédiation des
processus commerciaux proposés par les sites. Pourtant, elle n’a pas tardé à
devenir le goulet d’essoufflement de nouveaux entrants, appelés « pure
players » du commerce sur l’internet. Ce nouvel obstacle, bien plus radical que
l’impact psychologique des questions de paiement, a transformé le point de
vue sur la question logistique, faisant de cette dernière la pierre de touche du
commerce électronique dit B to C.

Traditionnellement au sein du commerce électronique on distingue une


différence fondamentale entre les activités ne nécessitant pas de logistique
(billetterie, services financiers, téléchargement en tous genres, etc.) et les
activités proposant un mode de distribution directe de produits physiques
(produits de consommation courante, places de marchés, etc.). Dans le premier
cas, la « distribution » des produits se résume à la question de l’accessibilité,
c’est-à-dire ici à la qualité technique du réseau d’échange d’information et à
celle des interfaces et des systèmes informatiques (bande passante, montée en
charge des serveurs etc.). Dans le second cas, cette « distribution directe »
implique une organisation logistique ad hoc variant fortement en fonction des
produits proposés, notamment en raison des différences volumétriques de ces
produits mais aussi en raison des relations des vendeurs avec leurs
fournisseurs.

L’accent ici va seulement être posé sur des activités supposant un service
logistique et en posant comme hypothèse que l’enjeu de la logistique du
commerce électronique sur l’internet n’est rien moins que la capacité d’un
marchand à mettre en place un système de distribution directe de biens matériels
dans des conditions d’organisation efficaces.
Chapitre I : les contraintes de la e-logistique et solution
mise en place
I- Les contraintes de la e-logistique
Les difficultés de la logistique dédiée à la vente par Internet sont liées
à la fois à la préparation de commande et à la distribution physique. Elles
émanent principalement des caractéristiques du client internaute qui sont
résumées ci-dessous:
−c’est un client final, d’où la multiplicité des lignes de commandes par
rapport à une commande faite par un industriel ou un distributeur ;
−c’est un client universel et qui souhaite être livré à domicile ;
−c’est un client qui a une attente forte en matière de service dans le cadre
d’une relation qu’il souhaite personnalisée en fonction de ses propres
contraintes, et ce d’autant qu’il a payé son produit d’avance ;
−c’est enfin, un client qui génère des retours pour lesquels il souhaite
qu’une solution convenable lui soit proposée car la vente sur le net relève de la
même réglementation que la vente à distance et le client a, entre autres
protections, la possibilité de se rétracter dans un délai de 7 jours après l’achat.
La logistique se caractérise par deux familles de contraintes ou difficultés :
− Celles liées à la préparation de commande
− Celles liées à la distribution physique

1. Difficultés liées à la préparation de


commande

Dans le modèle du e- commerce, c’est le préparateur de commande (du


cyber-marchand ou du prestataire auquel il a confié cette activité) qui va
prélever les produits, à l’unité, dans les rayonnages de l’entrepôt. Cette
nouvelle offre induit les changements suivants :
− Modification de l’unité logistique traitée : on passe en effet de
conditionnements de type palettes/ cartons à des conditionnements
cartons/ unités. Cette contrainte est d’autant plus importante que le
nombre de références traitées est important.
− le problème du fractionnement des commandes : dans la majorité
des cas, les commandes sont composées de plusieurs articles
différents. Certains d’entre eux peuvent avoir des délais de disponibilité
très longs. Le cyber-commerçant peut, pour de raisons évidentes de
service au client, choisir de livrer une partie de la commande. Il peut
également choisir de réserver les produits disponibles pour ne pas
risquer des délais supplémentaires. Naissent alors dans le système
logistique des informations d’une nature nouvelle, commandes
"partiellement servies " et "stocks mis en rétention". Le
foisonnement de ces cas particuliers a tendance à parasiter le système de
préparation de commandes et être à l’origine d’erreurs dues à la co-
existence de plusieurs espaces de préparation de commande et à la prise
en charge d’une même commande successivement par plusieurs
préparateurs.

2.Difficultés liées à la distribution


finale
La principale caractéristique du B to C est la nécessité de livrer
individuellement des clients finaux. Du coup se pose le problème du « last
mile » ou dernier kilomètre à parcourir pour acheminer un petit colis vers
son destinataire final. Le commerce électronique introduit ainsi de nouvelles
contraintes : fractionnement des commandes, atomisation de l’aval,
exigences de service élevés, difficultés d’approche relatives à la livraison à
domicile des particuliers. Les difficultés liées à cette nouvelle forme de
distribution peuvent être résumées en 4 points :

 La livraison à domicile

Outre les obstacles classiques à la livraison en zone urbaine (problèmes de


circulation et difficultés de stationnement), l’acheminement des colis au
domicile du client pose plusieurs problèmes spécifiques, à savoir :

− la fenêtre de temps restreinte où le client est à son domicile ;


− les difficultés d’accès au domicile (adresse incomplète ou erronée, pas
d’ascenseurs, digicode, etc.) ;
− l’impossibilité de livrer parce que le client n’est finalement pas à son
domicile ;

 Le fractionnement des commandes


S’agissant de livraisons à des clients finaux, et encore plus en phase de
démarrage de l’activité, les volumes à livrer sont relativement faibles et
imposent une livraison de type Express, alors que les entreprises étaient
habituées à la culture du "camion complet". L’entreprise est donc amenée à
gérer une flotte beaucoup plus importante de véhicules de petite taille
(camionnettes), le plus souvent spécifiques comme c’est le cas des véhicules de
livraison en cyber-épicerie qui sont à trois compartiments selon les
températures de transport (ambiant, frais et surgelé).
 L’étendue géographique
L’étendue géographique du marché ouvert aux cyber-commerçants est, a
priori, mondiale. En ce sens, Internet modifie les règles de la concurrence,
puisque « le cadre spatial de la concurrence n’agit plus comme une
contrainte ». Cependant, cette évolution de la zone de chalandise ne signifie
pas que les cyber- commerçants occupent tout l’espace qui leur est désormais
ouvert. En effet, comme dans ce type de commerce il faut livrer un client
unitaire, la plupart des sites limitent leur offre de livraison (gratuite ou
forfaitaire) à des espaces géographiques nationaux ou régionaux. Ainsi,
comme le souligne G.Marouseau, « la présence géographique d’un cyber-
commerçant s’exprime en termes de proximité logistique ». Cette restriction
est, dans la majorité des cas, temporaire (construction progressive des réseaux
logistiques).
 L’exigence de service

Le client Internaute est en attente d’une relation de service particulièrement


privilégiée. La majorité de ses attentes relèvent de la maîtrise, par le site
marchands, de sa logistique et des flux d’information qui y sont associés.
En, effet, le client souhaite :

- que le délai de livraison soit conforme à l’urgence du besoin qu’il a du


produit ;
- que ce délai soit fiable ;
- connaître à chaque moment l’avancement de la prise en compte de sa
commande ;
- être informé, au moment de la passation de commande, de la
disponibilité du produit.

Le site marchand doit donc investir dans des systèmes d’information et


se doter d’une véritable compétence en « Infogistique ». Ce nouveau terme
a été introduit pour préciser qu’au delà des prestations logistiques, le
commerce électronique suppose le développement de prestations d’intégration
informationnelle, qu’il s’agisse de l’intégration :
- de l’aval à travers les systèmes de tracking (suivi temps réel) des
commandes ;

- ou de l’amont pour la mise à disposition des clients des


informations sur la disponibilité des produits à partir des systèmes de
gestion des stocks.
II. Les solutions mises en place
La qualité de l’offre logistique (ou ce qu’on pourrait qualifier de front-office)
et de l’organisation mise en place (ou le back office) figurent en tous cas parmi
les axes majeurs de la structuration de la e-logistique.

La qualité de l’offre logistique concerne:

- l’offre de livraison qui prend en compte le délai promis au client et le


mode (lieu et horaire) de livraison. Le délai de livraison dépend pour
une grande part de l’organisation mise en place, c’est à dire du «
back-office ». Le mode de livraison concerne la possibilité d’être livré
à domicile, au bureau ou à un point relais ainsi que la possibilité de
choisir ou non son horaire de livraison.

- le prix de la livraison qui est un facteur très sensible pour le client


internaute. La fixation de ce prix est d’autant plus problématique que le
client n’a en réalité pas conscience du coût induit par ses propres
déplacements pour faire des courses en magasin (essence, temps passé,
stationnement, etc.).

Quant aux organisations mises en place, elles concernent la manière dont les
entreprises e- business organisent leur réseau logistique pour concrétiser
l’offre logistique faite au client, c’est à dire, l’offre de délai, de mode, de
tarif et d’horaire de livraison. C’est le back-office qui constitue la partie la
plus importante. Ici se sont décrites selon deux axes :

- organisation logistique dédiée au e- business vs organisation


s’appuyant sur le réseau traditionnel : les entreprises disposant déjà
d’un réseau logistique sont tentées de s’appuyer dessus pour la vente
sur Internet. Ce choix n’est pas sans inconvénient car il y
cannibalisation entre les deux types d’activités, ce qui crée de la
confusion et détériore le service client.

- internalisation vs externalisation de l’activité logistique : la tendance la


plus lourde est en faveur de l’externalisation, tant des transports
terminaux que des entrepôts et plate-formes. Cette externalisation s’est
dans un premier temps faite en faveur des prestataires logistiques
traditionnels, mais petit à petits de nouveaux acteurs, plus agiles, et plus
efficaces dans la gestion type e- logistique apparaissent.
Une troisième dimension d’analyse concerne le choix de la supply chain
sur Internet, à savoir :

- la possession de stocks pour livrer les clients ;

- la livraison sur la base des commandes clients directement à


partir des stocks fournisseurs, appelée drop-shipping.

1. La qualité de l’offre logistique

La caractérisation de l’offre logistique se situe au niveau de l’organisation de


la livraison (mode de livraison et délai promis au client) et du tarif facturé au
client. Il l’existence de nombreuses options dans la constitution de l’offre de
livraison et la combinaison de ces options crée une variété de situations qui
peut être difficile à assumer « logistiquement ». Elle donne donc naissance à
des coûts logistiques qui grèvent (c’est souvent le cas) lourdement les coûts
opérationnels et donc la rentabilité des sites. Ceci est d’autant plus vrai que,
pour ne pas dissuader les clients, les tarifs facturés reflètent rarement (voire
jamais) les contraintes logistiques induites par l’offre de livraison.

1.1. L’offre de livraison

Elle concerne à la fois le délai de livraison promis au client et le mode (lieu et


horaire) de livraison. Le délai de livraison dépend essentiellement de la
proximité géographique et logistique ainsi que de la réactivité du système de
préparation de commande. En d’autres termes, il dépend de l’organisation
mise en place en back-office. Quant au mode de livraison, il est caractérisé
par :

- la possibilité d’être livré à domicile ou à un point de livraison (commerçant,


entrepôt, bureau de Poste, loge de concierge) ;

-les horaires du rendez vous de livraison qui sont fixés par le client ou par le
cyber- marchand.

1.2. Le prix de la livraison


Concernant la logistique le prix est l’un des plus sensibles pour le client. En
effet, un prix de livraison jugé trop élevé peut dissuader d’un achat et ce
quelque soit l’intérêt porté au produit. Conscients de ce poids et dans une
volonté évidente de « populariser » le commerce en ligne, beaucoup de cyber-
commerçants avaient commencé par offrir une livraison gratuite.
Malheureusement , le potentiel du commerce électronique à
révolutionner le commerce traditionnel a été largement sur-dimensionné et
les raisonnements selon lesquels il induirait une recomposition de la chaîne
de valeur en supprimant tous les intermédiaires et conduirait à économies se
traduisant par un baisse substantielle des prix, tous ces raisonnements se
sont révélés trop optimistes. Chaque cyber-commerçant sait aujourd’hui que la
suppression des magasins n’a pas induit les économies supposées couvrir le
coût de la préparation de commande et du « last mile », par conséquent, le
choix de gratuité de la livraison n’est pas viable à long terme Cette pratique
continue cependant d’exister, mais elle concerne plus particulièrement les sites
commercialisant les produits à forte marge.
D’un autre côté, sachant l’impact du facteur « prix de la livraison » sur la
concrétisation ou non de la vente, les cyber-commerçants n’ont pas d’autre
ressource que de proposer des prix acceptables par les clients, qui dans la
majorité des cas s’avèrent bien en deçà du coût réel et génère des pertes
d’exploitation assez importantes. La fixation de ce prix est d’autant plus
problématique que, le client n’a en réalité pas conscience du coût induit par
ses propres déplacements pour faire des courses en magasin (essence, temps
passé, stationnement, etc.).

2. Organisations mises en place

Nous entendons ici par « organisation logistique », la manière dont les


entreprises e-business organisent leur réseau logistique pour concrétiser l’offre
logistique faite au client, c’est à dire, une offre de délai, de mode, de tarif et
d’horaire de livraison. C’est en d’autres termes, ce que l’on nomme le back-
office et qui constitue c’est à dire la partie la plus importante.

Plusieurs axes sont susceptibles de structurer la description de ces


organisations. Nous en retiendrons deux :
− organisation logistique dédiée au e-business vs organisation s’appuyant
sur le réseau traditionnel
− internalisation vs externalisation de l’activité logistique

2.1. Structure dédiée vs structure traditionnelle

Généralement lorsqu’un cyber-commerçant dispose d’infrastructures


logistiques dans son activité hors commerce électronique, il commencera par
s’appuyer sur elles pour réaliser ses ventes sur Internet. Ces
infrastructures peuvent être des lieux de stockage et préparation de
commande dans des entrepôts, plate-formes ou magasins, ou bien des lieux
de picking pour les clients, notamment dans les magasins.
Les exemples de ce type sont nombreux parmi les enseignes de la grande
distribution qui utilisaient leurs points de vente (super et hypermarchés)
déjà depuis longtemps pour le portage à domicile des courses (le client
remplit son chariot et se le fait livrer moyennant une participation forfaitaire).
Avec l’arrivée du commerce électronique , ce qui change
significativement dans ce cas, c’est que c’est le commerçant qui remplit le
chariot , ce qui techniquement ne pose pas de problème particulier tant que
le nombre de commandes n’est pas trop élevé.

Lorsque les volumes concernés par ce type de préparation de commande qui,


somme toute, cannibalisent le magasin augmentent, il peut se poser plusieurs
difficultés, parmi lesquelles :

- l’engorgement des allées du magasin par les préparateurs,

- la non disponibilité des produits sur les rayons pour les clients
traditionnels

Pour éviter ce problème, deux solutions sont possibles :

- on réserve un espace de l’entrepôt aux stocks et préparation de


commandes du commerce électronique. Cet espace peut rapidement
devenir trop important vu le nombre de références gérées par un
hypermarché.

- On fait le picking dans les mêmes stocks que le magasins avec une zone
de préparation de commande réservée. Dans ce cas, ce sont les
approvisionnements du gestionnaire de stock qui sont perturbés, car il a
l’habitude de gérer l’alimentation des rayons et ses
réapprovisionnements par unité logistique regroupant plusieurs unités
produit (cartons et palettes) et là, les préparateurs pour le commerce
électronique « éclatent » cette unité pour servir leurs clients.
2.2 Internalisation vs externalisation
une entreprise de e-commerce peut opter pour une structure logistique dédiée.
Dans ce cas, il se pose pour elle la question du « faire ou faire faire ». En
générale la tendance la plus lourde est en faveur de l’externalisation, tant des
transports terminaux que des entrepôts et plate-formes.
Chapitre II : Typologie de l’offre des logisticiens
La logistique, notamment dans sa phase livraison, constitue le seul contact
concret entre un webmarchand et son client. Cela signifie que derrière la
virtualité de la prise de commande, la qualité de la réception du produit vaut
comme le contact en magasin. De ce point de vue, tout échec à la livraison, tout
retard, toute erreur dans les produits livrés par rapport à ceux commandés, tout
problème de retour, etc. sera interprété par le client comme une mauvaise qualité
de service du marchand. La singularité de ce phénomène tient au fait que le
vendeur, dans la plupart des cas, délègue sa logistique et donc la part
relationnelle physique de son activité commerciale. Cette situation rend le
webmarchand vulnérable et dépendant. La gamme de services à sa disposition
étant large.

Quatre grands cas de figure existent : les postes, les intégrateurs, les logisticiens-
transporteurs et les coursiers. Chacun d’entre eux a ses particularités fortes qui
se traduisent dans leurs offres logistiques. Alors que les postes disposent d’une
offre de service « large spectre », les trois autres catégories se distinguent par
des offres de service « sur mesure » à même de répondre à un cahier des charges
particulier. Ainsi, la force des premiers en matière tarifaire ne limite en rien
celles des autres en matière de personnalisation du service.

I-Quatre grands types d’acteurs


1. Les postes

Les postes nationales sont des acteurs très compétitifs au niveau national. Le
coût de timbrage en fait d’une certaine manière le service par défaut. Depuis
quelques années, elles connaissent un double mouvement de diversification des
services proposés et d’internationalisation, par prises de participations
capitalistiques ou partenariats. Leur force nouvelle réside donc dans la
diversification de la gamme de services et l’élargissement de la couverture
territoriale.

2. Opérateurs de messagerie express (intégrateurs)

Très tôt, les opérateurs de messagerie express comme UPS, FedEx ou DHL se
sont positionnés comme des interlocuteurs privilégiés des webmarchands. Ils ont
dès les années 1980 investi lourdement dans les systèmes de tracing-tracking, ce
qui leur a permis d’être les premiers à proposer cette valeur ajoutée
informationnelle qui intéresse aujourd’hui le consommateur final.Par ailleurs, la
rapidité de livraison, en J+1 pour les grands axes, coïncide avec l’image de la
vente sur l’internet, image sur laquelle elles ont capitalisé.Enfin, la qualité de
leur desserte internationale et leurs accords de dédouanement rapide en font des
acteurs de poids pour les expéditions hors des frontières.

Toutefois, le coût de la prestation logistique d’un intégrateur pèse lourdement


sur de nombreux achats par l’internet, réduisant d’autant l’intérêt de ce service
haut de gamme pour les marchands qui ne font pas de l’international leur zone
de chalandise prioritaire. Afin de ne par arriver à une part exorbitante des coûts
logistiques sur le prix des produits, les marchands doivent souvent recourir à
d’autres solutions.

3. Logisticiens et transporteurs

Les logisticiens-transporteurs sont traditionnellement des spécialistes de la


fonction logistique externalisée des entreprises. Leur savoir-faire et leur degré
de spécialisation en font des acteurs privilégiés pour toute une gamme de
services demandant la maîtrise de la gestion de gros volumes et du « juste à
temps ». L’offre de services est ici pléthorique, mais elle est surtout adaptée aux
demandes du commerce entre entreprises. Il y a fort à parier que cet ensemble
d’acteurs va bénéficier de la croissance des échanges B to B soutenus par le
développement du commerce électronique, des places de marché virtuelles, de
l’e-procurement, etc.

Inversement, les logisticiens transporteurs ayant une activité de « Messagers »


investissent le marché du petit colis (autrement appelé « monocolis ») et
s’intéressent au développement du commerce électronique B to C comme Mory
Team, ou Calberson. Afin de monter en puissance sur ce marché où la
distribution est la clé du succès, ils établissent des partenariats pour proposer un
réseau territorial plus maillé. Ils complètent parfois leur offre avec la mise en
place de systèmes d’information interopérables avec l’internet à l’attention de
leurs clients, comme, par exemple, pour les Bons de Livraison (BL) chez Hays
logistics.

4. Coursiers

Comme tels, les coursiers personnifient, au niveau local et urbain, la possibilité


d’associer rapidité de la prise de commande avec rapidité de la livraison. Ce
secteur fortement atomisé connaît encore peu de sociétés spécialisées sur le
créneau de la vente sur l’internet. Historiquement, elles sont spécialisées dans
les échanges entre entreprises et non dans les livraisons B to C.

Il est probable que ce type d’acteurs, s’ils arrivent à créer un réseau de plusieurs
agglomérations, pourrait s’imposer sur le marché de la course B to C, marché
initié d’une certaine manière par le développement de la livraison à domicile de
pizzas, médicaments, cassettes vidéo, etc., secteur qui reste encore très atomisé.
II-Autres acteurs attendus : les vépécistes et la grande
distribution
1. Les grands vépécistes

Se sont des acteurs qui disposent d’un savoir-faire complet dans la vente directe
aux particuliers. Les grands vépécistes ont plusieurs atouts :

 ils excellent sur l’offre logistique en aval (gestion des retours, services
clients, etc.) ;
 ils capitalisent sur une clientèle habituée à la vente directe, même si celle-
ci n’est pas nécessairement équipée ;
 ils ont enfin une expérience acquise de la prise de commande par Minitel.

Autant, lorsque certains d’entre eux annoncent aujourd’hui ouvrir leur offre de
service à d’autres acteurs du commerce électronique, c’est-à-dire mettre à
disposition leur organisation logistique à des tiers, de nombreux observateurs
estiment que ces « nouveaux entrants » pourraient à l’avenir proposer un haut
niveau de qualité de service. Si ces acteurs peuvent concurrencer La Poste sur la
livraison de colis, ils ne disposent toutefois pas d’un réseau maillé. La
répartition des flux de Mondial Relay par exemple, qui fait un tiers en livraison
directe, un tiers en livraison en points relais, et un tiers en livraison par voie
postale, témoigne de la nécessaire diversification des modes de livraison pour
atteindre une cohérence territoriale.

2. La grande distribution

La grande distribution dispose d’un savoir-faire logistique très performant dans


les processus de réapprovisionnement et de gestion des relations avec de
multiples fournisseurs. Elle fut pionnière en matière d’équipement en systèmes
EDI destinés à fluidifier les relations clients-fournisseurs.

Sur toute la gamme des produits de consommation courante, et désormais sur un


nombre croissant de produits et services (comme les voyages par exemple), ils
ont une position de leader. Il est donc normal que face au développement du
commerce électronique, ils s’interrogent sur les risques et les opportunités que
celui-ci représente pour leur activité.

3. Nouveaux entrants

On entend par « nouveaux entrants » les acteurs qui se spécialisent sur la partie
« système d’information » du commerce électronique sur l’internet. On les
appelle parfois les e-logisticiens ou les « infomédiaires ». Ces acteurs ont des
origines très différentes. Ce type des entreprises ont toutes en commun de
travailler sur l’adaptation des fonctions logistiques traditionnelles à celles du
commerce en ligne. Elles permettent généralement de restituer jusqu’au client
final une information fiable sur le suivi logistique, détail fortement apprécié à en
juger par la part de ceux qui interrogent les systèmes de suivi après avoir passé
une commande. Elles permettent également au vendeur de proposer à ses clients
le suivi logistique à partir de son site sans renvoyer sur les sites web des
logisticiens avec lesquels il travaille. Enfin, leur rôle de « prescripteur
transport » est loin d’être négligeable lorsqu’elles ont des accords tarifaires avec
les transporteurs.

III-La question de la distribution finale


Le fait de choisir un prestataire logistique implique une alternative en matière de
distribution. Il s’agira de choisir entre une livraison à domicile et une livraison
en points relais. Entre ces deux solutions, de nouvelles offres encore
expérimentales de « boîte à colis électroniques » font leur apparition.

1. Distribution avec livraison à domicile

Si la livraison à domicile semble a priori la plus adaptée aux commandes


passées sur l’internet, deux remarques peuvent être toutefois faites à ce sujet. La
première c’est que le client est rarement prêt à payer le prix réel de cette
distribution si le montant de sa commande ne le justifie pas. La deuxième c’est
que la livraison à domicile rencontre de nombreux obstacles, notamment en zone
urbaine, comme par exemple l’absence de la personne à l’heure de la livraison,
les digicodes, l’engorgement de la circulation urbaine, les problèmes de
stationnement, les difficultés à trouver des adresses, etc.

Une « livraison à domicile » peut donc parfois se transformer en une « attente de


livraison à domicile » et le logisticien, tout comme le client, en fait les frais. Le
développement de la livraison par prise de rendez-vous, avec des facilités
notamment liées au téléphone portable, fait néanmoins évoluer ce mode de
distribution dans un sens favorable. Mais le traitement au « cas par cas » rend
plus difficile une rationalisation en tournées, celles-ci permettant d’effectuer des
économies d’échelle sur la distribution en limitant le coût de livraison en même
temps qu’il augmente le taux de placement des colis. Cette solution qui est dans
le jargon postal appelée « livraison express par exprès », est également la plus
ancienne historiquement puisque c’est celle qui fut adoptée aux origines des
postes.

2. Distribution avec livraison hors du domicile


Le deuxième mode de distribution exploite toute la gamme des possibilités des
points relais. Ce type de distribution est pratiqué depuis de nombreuses années
par les grands vépécistes. Dans certains pays comme l’Allemagne, elle prend
même la forme du voisinage où c’est un habitant du quartier qui sert de point
relais en échange d’avantages commerciaux ou de rémunération.

De nombreux acteurs aujourd’hui réfléchissent à la mise à disposition de leurs


réseaux de magasins pour le dépôt de colis. Ces points relais pourraient ainsi
apparaître dans les stations-service (BP), les kiosques à journaux (Zendis), sur le
lieu de travail, voire dans des « casiers électroniques » gérés par des entreprises.
Encore à l’état d’annonce, certaines de ces offres pourraient devenir réalité dans
les mois et années à venir.

3. Du « last mile » au « last yard »

Les logisticiens s’accordent à dire que la gestion du « dernier kilomètre » (last


mile) est la condition du succès de la logistique du commerce électronique. Ici
on peut dire que c’est peut-être de plus en plus celle du « dernier mètre » (last
yard) qui prime.

En effet, dans un contexte d’inflation des transports en zone urbaine, la


croissance de la distribution aux particuliers va dans le sens d’une augmentation
des engorgements des villes et des nuisances. Prophétiser l’explosion du
commerce électronique revient donc, d’une certaine manière, à annoncer la
sombre perspective de villes où les livreurs viendraient saturer davantage un
trafic urbain déjà à la limite de l’asphyxie. Un dispositif logistique permettant de
limiter ces effets négatifs, et pour le moins inattendus, du commerce
électronique reste donc à inventer.

Loin de l’idée du commerce électronique conçue comme une vente à distance


internationale, celui-ci s’orienterait vers une représentation plus attrayante, plus
rassurante aussi, d’un commerce proche de ses clients, et dont le point de
contact n’aurait plus les déficiences inhérentes à la livraison à domicile puisqu’il
serait assuré par un commerçant.

Conclusion
Finalement on peut dire que le commerce électronique sur l’internet a face à lui
un modèle d’organisation logistique de type « grande distribution » d’une
efficacité redoutable : en échange de produits à bas prix, les hypermarchés
transforment le client en « logisticien de distribution idéal ».

En effet, comment rivaliser avec un tel logisticien que la problématique de la


logistique du commerce sur l’internet nous révèle dans toute son ampleur ? En
regardant de plus près, nous pouvons décomposer les phases logistiques que le
client assure : il achète et entretient son propre véhicule, il va « à la demande »
jusqu’au stock situé en périphérie pendant ses temps libres, il assure lui-même le
picking dans les étalages, il prépare son caddie individualisé correspondant
exactement à sa commande, il assure la mise sous film plastique des produits
achetés, il garantit le paiement immédiat de manière totalement sécurisée, il
assure le point de rupture de charge entre le caddie et son véhicule sans délais, il
va au lieu de livraison en connaissant parfaitement l’itinéraire, il passe tous les
obstacles urbains (embouteillages, digicodes, étages, etc.), il rentre chez son
client avec sa propre clé, il sort les produits des emballages, les range dans les
placards et le frigidaire et ne demande pas de remboursement si un produit
arrive brisé. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la logistique du commerce
électronique sur l’internet va avoir du mal à être meilleure à peu de frais ! A
moins, bien sûr, que le commerce électronique fasse rimer la personnalisation de
ses offres avec une logistique moins personnalisée que personnelle, proche des
individus avec une relation de confiance sans laquelle elle risque de se heurter à
l’obstacle de la distance.

Si le commerce électronique doit développer un nouveau mode de distribution, il


devra donc sans doute le faire en se montrant capable de proposer des solutions
logistiques adéquates, compétitives, avantageuses tant pour le marchand que
pour le client et à un coût qui puisse, comme aujourd’hui, se fondre avec la part
des coûts de distribution du prix du produit.

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