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La parodie

Une fiche rédigée par Amélie de GUILLEBON, juriste de la société

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La parodie

Selon l’article L. 122-5, 4° du Code de propriété intellectuelle, lorsqu’une œuvre a été


divulguée, l’auteur ne peut ne peut interdire : “ la parodie, le pastiche et la caricature,
compte tenu des lois du genre ”. Ces trois termes sont plus ou moins synonymes. D’après
la doctrine (et principalement Desbois), ces trois termes se distinguent d’après le genre
de l’œuvre qu’ils visent. Ainsi, la parodie concernerait plutôt l’œuvre musicale, le pastiche
l’œuvre littéraire, et la caricature l’œuvre artistique. La loi pose une limite à la parodie
d’une œuvre ; elle doit respecter les lois du genre.

1. La parodie doit avoir une intention et un effet humoristique.


A défaut, elle constituerait une contrefaçon. Selon la Cour d’appel de Versailles, “ le
pastiche, imitation de manière et de style permise par la loi, existe lorsque se produit, par
une telle imitation, un effet de dérision, de contradiction inattendue ou de brocard, le
piquant qui en résulte conférant dans la forme à l’imitation un caractère humoristique
parfaitement compatible avec une intention de fond étrangère à tout humour ” (Cour
d’appel de Versailles, 1ere chambre, 17 mars 1994, RIDA, avril 1995, p. 350).

Ainsi, pour autoriser la parodie d’une publicité pour une marque de tabac, la Cour d’appel
de Versailles a considéré qu’en retournant contre l’utilisateur du tabac l’imagerie
publicitaire de Philip Morris, l’auteur de la parodie avait introduit “ un élément d’humour
caractérisé, en évitant tout risque de confusion entre l’œuvre imitée et l’œuvre imitante ”
(décision précitée)

A ce titre, la Cour d’appel de Riom a également jugé que la représentation du bonhomme


Michelin en homme préhistorique avec un slogan représentant l’entreprise comme en
retard dans le domaine social constituait bien une parodie au sens de l’article L. 122-5
(Riom, 15 septembre 1994, Dalloz 1995, Jurisprudence, p. 429).

Mais la parodie peut aussi avoir un dessein plaisant : elle peut viser à rendre hommage à
l’auteur ou à l’œuvre parodiée dans la mesure où elle ne crée pas de risque de confusion
et où le public comprend clairement qu’il n’est pas en présence de l’œuvre elle-même. A
cet égard, la Cour d’appel de Paris a admis le pastiche d’une chanson de Prévert par
Jacques Faizant dans le but de rendre hommage à Yves Montand lors de son décès : “
tout en permettant l’identification immédiate de l’œuvre parodiée par la reproduction de sa
phrase titre “ Les feuilles mortes se ramassent à la pelle ” et par la mention “ d’après

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Prévert ” apposée à la suite de sa signature, Jacques Faizant en retourne totalement le
sens pour en faire de manière humoristique un hommage à la mémoire de son interprète,
écartant ainsi tout risque de confusion ” (Cour d’appel de Paris, 1ère chambre, 11mai
1993, RIDA, juillet 1993, p.340).

Enfin, un simple clin d’œil au public n’est pas suffisant pour constituer l’exception de
parodie. Dans l’affaire de La bicyclette bleue, la Cour de cassation a jugé inopérant le
motif avancé par l’auteur selon lequel son œuvre constituait une sorte de pastiche de
l’œuvre de M. Mitchell, la “ volonté ludique ” de l’auteur et la recherche d’une “ complicité
amusée ” avec ses lecteurs étant insuffisants à qualifier l’œuvre seconde de parodie (Civ
1ere, 4 février 1992, Dalloz 1992, Jurisprudence, p. 182).

2. La parodie ne doit créer aucun risque de confusion avec l’œuvre de l’auteur


parodié .
Ainsi, dans la décision précitée (17 mars 1994), la Cour d’appel de Versailles relève que “
le risque de confusion n’existe pas puisque l’antinomie du slogan et d’une publicité faite à
des cigarettes écarte tout amalgame entre l’œuvre pastichée et le pastiche, observation
devant d’ailleurs être faite que l’évidence de l’imitation, caractérisée en l’espèce, est de
toute manière nécessaire à l’existence d’un pastiche ”.

Dans l’affaire Douces Transes ( Cass. Civ., 1ere, 12 janvier 1988, RIDA, juillet 1988,
n°137, p. 98), la Cour de cassation a autorisé la parodie d’une chanson de Charles Trénet
par Thierry Le Luron. Or ce dernier avait repris l’air de la chanson, se bornant à en
changer les paroles. Par cette décision, la Cour de cassation a admis qu’un tiers puisse
reprendre telle quelle la musique d’un auteur sans qu’on le taxe de contrefaçon, dès lors
qu’il en change les paroles dans le cadre d’une parodie.

Dans un arrêt du 3 juin 1997, la Cour de cassation a refusé d’admettre l’exception de


parodie dans le cas de l’utilisation de la photographie d’une scène du film Le Corniaud
pour illustrer un article sur l’assurance automobile (Dalloz 1998, Jurisprudence, p. 166,
note Daverat). La Cour se contente de relever qu’aucune “ modification ” ou aucun “
travestissement ” de l’œuvre n’avaient été opérés. Comme le souligne Xavier Daverat, la
Cour exige par là un “ acte positif tangible qui altère dans un dessein comique l’œuvre
visée ”.

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3. La parodie ne doit pas viser à nuire.
Ainsi, la Cour d’appel de Versailles (décision précitée du 17 mars 1994) a estimé que
l’utilisation de la parodie d’une publicité pour du tabac dans le but de lutter contre sa
consommation excessive ne saurait révéler une quelconque intention de nuire. Ce choix
ne vise qu’à “ déconseiller la consommation de cigarettes en général, et non à un
dénigrement ou à une discrimination fautive à l’égard de la marque ”.

En outre, la parodie ne doit pas revêtir un caractère dégradant pour son auteur. La
parodie ne doit pas être insultante ou calomnieuse (Affaires Douces Transes, Civ, 12
janvier 1988). Dans ce cas, ce sont les droits de la personnalités qui s’appliquent, avec la
possibilité d’engager une action en diffamation.

Dans le cas d’hommes politiques ou de personnes publiques, leur caricature est tolérée
par les usages, bien qu’elles puissent constituer des atteintes aux droits de la
personnalités, particulièrement lorsqu’elles sont outrancières ou diffamatoires. Leur
diffusion peut alors être empêchée par une action en référé.

La jurisprudence se montre plutôt libérale à l’égard des parodies dénaturant des œuvres
de manière obscène. Elle admet la parodie lorsque la distance entre les deux œuvres est
manifeste et que n’apparaissent ni risque de confusion, ni volonté de nuire (cf. article de
M. Ristich de Groote, Les Personnages de l’esprit, , RIDA 1986, n°130).

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