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Je ne ferai plus de l’art ennuyeux, John Baldessari.

Recherche par : Oumaima Haitof 

Qui est John Baldessari ?


John Baldessari (né en 1931 à National City et mort en 2020 à Venice, Californie) est
une figure de proue de l’art conceptuel et l'un des artistes les plus influents des
quarante dernières années. Depuis le spectaculaire « Cremation Project » de 1970 qui
a consisté à brûler toutes les peintures qu'il avait réalisées entre 1953 et 1966, son
travail porte sur les relations entre langage et image, en tant que formes
d'expression. Dans ses peintures, photographies, films et vidéos, collages, etc.,
Baldessari a interrogé depuis ses débuts les mécanismes de représentation
médiatique, aussi bien que le sujet de la production artistique elle-même, à partir
d'une gigantesque archive d'éléments iconographiques et textuels provenant de la
publicité, du cinéma et de la presse qu'il manipule, décline et intègre sous différentes
formes dans ses œuvres. Depuis 1980, Baldessari a poursuivi son travail sur les
contenus narratifs en développant principalement des séries d'images et de
photographies d'où les éléments textuels sont absents, les fonctions du langage étant
évoquées en creux, sous les couches de peinture, entre les vides, dans les intervalles.

Pourquoi ce choix ?

Je découvrais les œuvres de l’art conceptuel pour ma recherche afin de pouvoir


choisir un artiste dont l’œuvre m’intéresserait. Et je suis tombée sur les œuvres de
Baldessari, et magiquement toutes m’ont marqué et ont provoqué ma curiosité. L’une
qui a suscité mon intérêt plus que les autres est cette phrase écrite sur un mur, I Will
Not Make Any More Boring Art (« Je ne ferai jamais plus d’art ennuyeux »).

Je ne ferai plus de l’art ennuyeux : Crématorium et biscuits


A première vue, cette phrase prend la forme d’une punition scolaire. Baldessari, a
souvent choisi d’associer les lettres et les mots à son art. Ce dernier arrive à
expérimenter grâce aux lettres, aux couleurs, aux matériaux qui sont à sa disposition
pour créer quelque chose d’unique. « Je me suis lassé de la peinture parce qu’il me
semblait que, quoi que je fasse, il était toujours question de recombiner des couleurs
sur un rectangle de toile. » John Baldessari

Baldessari conteste une façon éculée de transmettre l’art. Il tend vers un changement
de paradigme dans la pédagogie artistique. Il ne veut plus incarner l’image du maître
mais bien celle de l’artiste au travail. Baldessari va privilégier le partage d’expérience
et non l’unique transmission de savoirs. Dès ses débuts, son travail met le regardeur à
contribution … en l’intrigant.

Après s’être consacré à ce qu’il nomme des peintures narratives (lettres peintes) et


des fichues allégories (photos légendées), John Baldessari organise en 1970 un
happening où il fait brûler ses œuvres précédentes (Crematorium Project) et se
débarrasse ainsi de son passé pictural. Une partie des cendres sera exposée dans une
urne, l’autre cuisinée en cookies ! Son action vise à se détacher de tout formalisme
artistique et tenter de nouveaux supports.

Un geste radical réoriente son œuvre : en 1970, il met le feu à 13 années de peinture
abstraite. Aidé par quelques étudiants, il passe un faire-part de décès dans le journal
et se rend au crématorium de San Diego avec ses toiles réalisées entre 1953 et 1966,
soit à l’époque quasiment l’ensemble de son œuvre. Avec les cendres, il fabrique des
biscuits qu’il enferme dans un bocal et met le reste des cendres dans une urne :
l’œuvre consiste alors en la recette des biscuits et une plaque de bronze avec les
dates de naissance et de mort des tableaux incinérés. Geste duchampien et
autodestructeur, The Cremation Project est aussi une œuvre salvatrice. Avec elle,
l’artiste rompt avec l’expressionnisme abstrait des peintres de l’époque (Jackson
Pollock, Mark Rothko), se catapulte dans l’art conceptuel et tente une autre voie, par
l’utilisation de photos et de textes sur toile. Il se forge aussi une sacrée réputation.
Tout en faisant table rase du passé, le nouveau Baldessari fait aussi mine de se
flageller, avec une œuvre désopilante : sur une feuille, il copie en 1971 à la chaîne la
phrase I Will Not Make Any More Boring Art (« Je ne ferai jamais plus d’art
ennuyeux ») comme la promesse du mauvais élève indiscipliné, en plein repentir. Il
déclinera ensuite cette œuvre humoristique en vidéo, en installation et en papier
peint.
Baldessari invente un art du jeu et de l’énigme

Dès les années 1960, le texte alimente son œuvre. Pourfendeur de la


commercialisation croissante de l’art des sixties, il professe des conseils aux jeunes
artistes pour mieux vendre leurs œuvres qu’il inscrit sur des toiles (Tips for Artists
Who Want to Sell). Avec malice, il leur recommande de peindre des Madones, des
bouquets de fleurs ou des natures mortes. Pour Baldessari, les mots et les images ont
le même poids et doivent fonctionner de concert. Sur une toile où il se demande
« qu’est-ce que la peinture ? » il écrit : «  L’art est une création pour les yeux et ne peut
être évoqué qu’avec des mots.  » Grâce à ses juxtapositions, il invente un art du jeu et
de l’énigme, sollicitant le spectateur par un dialogue constant.

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