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DROIT ADMINISTRATIF 2

Etude de l’action de l’Administration.

L’Administration agit.
Elle agit en utilisant notamment des techniques juridiques, à savoir les actes administratifs
unilatéraux, puissant levier de l’action de l’Administration, mais aussi les contrats.
L’Administration peut aussi agir en dehors de tels actes, de façon donc matérielle.
On va envisager ces différents aspects de l’action de l’Administration.

Chapitre 2 : étude de la police administrative.


Régime juridique des contrats administratifs.

Chapitre 3 : Les actions dommageables de l’Administration, le responsabilité de


l’Administration.

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CHAPITRE 1 : LA SOUMISSION DE L’ACTION DE
L’ADMINISTRATION AU PRINCIPE DE LEGALITE

L’Administration peut se soumettre spontanément, volontairement, au respect de la légalité.


L’Administration peut par ailleurs être contrainte, forcée par des tiers, des administrés, au
respect de la légalité, et ce par un recours spécifique que l’on appelle le recours pour excès
de pouvoir, qui est un recours permettant l’annulation par le juge administratif d’un acte
administratif ne respectant pas la légalité.

SECTION 1 : LA SOUMISSION VOLONTAIRE DE


L’ADMINISTRATION AU PRINCIPE DE LEGALITE

L’Administration se doit bien sur, parce que son action est en principe soumise au respect de
la légalité, de prendre les décisions initialement légales.
Mais tel n’est pas toujours le cas.
La décision prise par l’Administration est parfois initialement illégale, dès la naissance de la
décision, dès son origine. « illegal ab initium »

Ou la décision administrative devient illégale, au fil du temps, soit en raison de modification


des circonstances de fait, ou de modification des circonstances de droit.

Et donc pour rétablir la légalité, pour apurer l’ordonnancement juridique, l’Administration


peut mettre en œuvre deux techniques juridiques qui sont d’une part l’abrogation, et
d’autre part le retrait, de l’acte.

§1 : L’ABROGATION DES ACTES ADMINISTRATIFS UNILATERAUX

Ici le terme abrogation a une signification bien précise.


Il y a abrogation lorsque l’Administration fait disparaitre un acte administratif sans porter
atteinte aux effets juridiques qu’il a déjà produits.
En d’autres termes l’abrogation ne concerne que l’avenir, elle n’a pas d’effet rétroactif.

Cette abrogation qui pendant longtemps n’a été qu’une possibilité, qu’une faculté pour
l’Administration, est devenu pour elle une véritable obligation.

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A) De la faculté d’abroger les actes administratifs illégaux

La jurisprudence s’agissant les actes administratifs illégaux a opéré une distinction entre les
règlements devenus illégaux, et ceux illégaux dès leur origine c'est-à-dire illégaux « ab
initium ».

L’abrogation des actes administratifs concerne le plus souvent des actes administratifs
règlementaires.
Mais elle peut aussi sanctionner des actes créateurs de droit, donc non règlementaires.

a) L’abrogation des règlements devenus illégaux

La jurisprudence qui demeure encore de principe, c’est l’arrêt du CE du 10 janvier 1930


Despujol.
Cette affaire Despujol concernait la contestation d’arrêtés municipaux qui instauraient un
stationnement payant dans les rues de la commune de Chaumont sur Loire.
Un particulier insatisfait de devoir s’acquitter d’une redevance pour stationner a contesté
cet acte.
Cet arrêt met en évidence que des actes administratif règlementaires peuvent devenir
illégaux, soit parce qu’il y a changement des circonstances de fait, soit parce qu’il y a
modification des circonstances de droit.
Cette distinction importante a été effectivement opérée dans cet arrêt.
S’il y a modification des circonstances de fait, l’arrêt Despujol reconnait la possibilité pour
tout intéressé de demander à l’auteur de l’acte la modification ou la suppression de l’acte, et
ceci à toute époque, c'est-à-dire sans condition de délai.
L’arrêt précise que l’administré, s’il se heurte à un refus de l’autorité administrative peut
contester ce refus devant le juge administratif, mais cette fois dans le délai du recours
contentieux qui est don en principe de deux mois, à partir du moment ou la décision de refus
est institué par une décision implicite ou explicite de refus de l’Administration.

Par la suite d’autres jurisprudences sont intervenues :

CE 10 janvier 1964 Ministre de l’agriculture contre Simonnet.


Cet arrêt a complété la jurisprudence Despujol à propos de la modification des circonstances
de fait.
La décision administrative faisant l’objet d’une contestation était un arrêt de 1933, qui avait
procédé à une répartition d’un contingent de production de rhum entre les différentes
sucreries de la Guadeloupe, répartition faite en fonction des différentes sucreries de façon
antérieure au délai.
Mais en 1956 le décret était toujours appliqué, avec le même contingent de répartition de
production de rhum, alors que la production de sucre en Guadeloupe avait été multipliée par
3, donc la situation de fait ne correspondait plus.
Donc le juge va ici appliquer la jurisprudence Despujol dans le domaine de l’économie, ici
l’économie dirigée, ce qui n’avait jamais été fait.

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Mais compte tenu des spécificités économiques le CE limite la faculté ouverte par l’arrêt
Despujol au cas ou « le changement des circonstances (de fait) a revêtu pour des causes
indépendantes de la volonté des intéressés le caractère d’un bouleversement tel qu’il ne
pouvait entrer dans les prévisions de l’auteur de la mesure, et qu’il a eu pour effet de retirer
à celle-ci son fondement juridique ».
Cette solution particulière dégagée, a été confirmée par la suite à plusieurs reprises, CE 2
avril 1985 entreprise maritime Léon Vincent, ou encore CE 30 janvier 1987 Gestin.

Si le règlement devient illégal par modification des circonstances de droit, situation juridique
nouvelle, comme par exemple une nouvelle loi.
L’arrêt Despujol reconnaissait à l’intéressé la possibilité à l’intéressé de demander par un
recours direct contre l’acte pour son annulation.
Recours devait intervenir dans un délai de deux mois après la publication de la loi créant une
situation juridique nouvelle.
Complété par un arrêt du 10 janvier 1964 Syndicat national des cadres de bibliothèque.
Cet arrêt de 1964 à la différence de l’arrêt Despujol, offrait simplement la faculté à
l’intéressé de demander la modification du règlement pour l’avenir.

b) L’abrogation des règlements illégaux dès leur origine

Le juge a tout d’abord considéré que l’Administration n’est pas tenu d’abroger un règlement
illégal, et ce alors même qu’elle ne doit pas appliquer un règlement illégal, ce qu’à souligné
un arrêt du CE du 14 décembre 1958 Ponard.
Et que par ailleurs l’exception d’illégalité est permanente contre les règlements.
Sur cette absence de l’obligation d’abroger, CE 6 novembre 1959 coopérative laitière de
Belfort.

Par la suite le juge a admis l’existence d’une telle obligation d’abroger, apparue dans son
arrêt du 12 mai 1976 Leboucher et Tarandon.

Puis le CE est ensuite revenu sur cette obligation, dans son arrêt du CE 30 janvier 1981
société Afrique France Europe transaction.
Hésitation du juge administratif, finalement pas d’obligation d’abroger.
Logique de faculté, de possibilité d’abroger.

B) A l’obligation d’abroger

La jurisprudence dans un 1er temps a fait obligation à l’Administration de ne pas faire


application des règlements illégaux, ce qu’illustre l’arrêt du 14 novembre 1958 Ponard.

L’obligation d’abroger les règlements illégaux à ensuite été mise en évidence par un décret,
et cette obligation a été consolidée par la jurisprudence.
Obligation réitérée par la loi.
Enfin pour les actes créateurs de droit, qui nécessairement ne sont pas des actes
règlementaires, l’obligation d’abroger est à nuancer.

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a) Le décret du 2 novembre 1983

Important, car l’obligation d’abroger est expressément apparue avec l’article 3 de ce décret
de 1983 disposant que : « l’autorité compétente est tenue de faire droit à toute demande
tendant à l’abrogation d’un règlement illégal, soit que le règlement ait été illégal dès la date
de sa signature (ab initium), soit que l’illégalité résulte de circonstances de droit ou de faits
postérieurs à cette date ».

b) La consolidation jurisprudentielle de l’obligation

Cette consolidation est le fruit de la jurisprudence CE 3 février 1989 All’italia.


Jurisprudence aux termes de laquelle il apparait que « l’autorité compétente saisie d’une
demande tendant à l’abrogation illégal, est tenue d’y déférer, soit que ce règlement ait été
illégal dès la date de sa signature, soit que l’illégalité résulte de circonstances de droit ou de
fait postérieures à cette date ».
Le juge considère ç travers cet arrêt que l’obligation d’abroger est un principe général du
droit, donc comme une obligation supradécrètale qui ne pourrait donc être remise en cause
que par une loi.

Arrêt du CE 7 février 2003 GISTI : à l’origine de cette affaire il y a une demande d’abrogation
formulée par le GISTI, visant un décret-loi de 1939 relatif aux interdictions dont peuvent
faire l’objet les publications étrangères.
En résumé le décret loi de 1939 accordait au ministre de l’intérieur le pourvoir d’interdire
une publication étrangère, mais le décret reste muet sur les motifs de cette action.
Le GISTI y a vu une violation de la CEDH, violation de la liberté d’expression et droits de la
presse.
Le 1er ministre a gardé le silence, donc décision implicite de refus d’abrogation, recours
devant le CE.
Le CE a fait droit au GISTI, considérant que ce décret-loi viole les stipulations de la CEDH, et
fait donc une injonction au 1er ministre d’abroger ce décret-loi.

c) Une obligation d’abroger réitérée par la loi du 20 décembre 2007

Cette loi du 20 décembre 2007 est relative à la simplification du droit, et a eu pour effet
d’introduire un article nouveau dans la loi du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans
leurs relations avec les Administrations.
Cet article nouveau dispose que : « l’autorité administrative est tenue d’office, ou à la
demande d’une personne intéressée, d’abroger tout règlement illégal ou sans objet, que
cette situation existe depuis la publication du règlement, ou qu’elle résulte de circonstances
de droit ou de fait postérieure à cette date ».

« Pourquoi ne rien voter quand on peut voter une loi inutile ? », Bertrand Seiller.
AJDA 2008 n°8 page 402 et suivantes.

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d) L’abrogation des actes créateurs de droits

Question relativement peu traitée par la doctrine, quelques lignes dans les commentaires du
GAJA.

Pour Pierre Delvolvé : « l’abrogation d’un acte créateur de droits illégal est possible dans les
mêmes conditions que son retrait ».
Donc selon lui cette abrogation est possible dans les 4 mois à partir de la prise de décision,
lorsqu’elle est explicite, et ce en application de la jurisprudence Ternon de 2001.

La jurisprudence du CE du 6 novembre 2002 Soulier met en évidence que lorsque les


conditions qui ont conduit l’Administration à accorder un avantage pécuniaire disparaissent,
elle peut supprimer pour l’avenir l’avantage accordé.

Si l’acte créateur de droits est légal, il ne peut pas en principe être remis en cause par
l’Administration, et ce en application du principe d’intangibilité des effets individuels des
actes juridiques.
Limite à ce principe : celle dite de l’abrogation par acte contraire.
Le cas le plus fréquent étant celui de la révocation d’un fonctionnaire qui a pour effet de
mettre fin pour l’avenir à la situation créée par sa nomination initiale.

§2 : LE RETRAIT DES ACTES ADMINISTRATIFS UNILATERAUX

Le retrait à la différence de l’abrogation, à un effet rétroactif, autrement dit il remet en


cause les effets passés de l’acte.

Le retrait est donc très déstabilisateur, pour ne pas dire dangereux.

Déstabilisateur car il contredit le principe de non rétroactivité des actes administratifs, et il


porte atteinte à la stabilité des situations juridiques, porte atteinte à la sécurité juridique.
Exemple lors du retrait d’un permis de construire, ce qui entraine en principe la démolition
de l’immeuble construit.

Le caractère déstabilisateur du retrait explique largement que la jurisprudence s’est surtout


préoccupée de préciser le régime juridique du retrait des actes créateurs de droits.

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A) Le retrait des actes créateurs de droits

Concernant le régime juridique du retrait des actes créateurs de droit, on distingue le régime
issu de l’arrêt Dame Cachet de 1922 et celui issu de l’arrêt Ternon précité de 2001.

a) Le régime juridique issu de l’arrêt Dame Cachet

CE 3 novembre 1922 Dame Cachet.


Madame Cachet avait obtenu de l’Administration une indemnité pour perte de loyer d’un
montant de 121,50 francs.
Cette indemnité était versée par l’Administration à des propriétaires qui louaient des biens à
des montants faibles ne correspondant pas à des montants du marché.
Cette dame pensait que le montant de cette indemnité était insuffisant, elle demande une
indemnisation plus grande à l’Administration.
Mais l’Administration a supprimée cette indemnité injustement allouée.
Elle a contesté cette décision de l’Administration, et c’est à l’occasion de ce contentieux que
le juge précise lé régime juridique.

Le retrait d’une décision créatrice de droit n’est possible que si la décision objet du retrait
est illégale.
CE 26 mars 1990 Epoux Clochette contre commune de Mesnil Saint Per.
Affaire de permis de construire, et plus précisément le retrait d’un permis de construire
tacite, et donc le retrait de ce permis de construire tacite est jugé illégal par le conseil d’état,
car le permis de construire retiré n’était entaché d’aucune illégalité.
Illustration de ce que l’Administration ne peut retirer que des actes administratifs illégaux.

CE 14 décembre 1994 Gouvernement Suisse : affaire relative au retrait des décrets


d’extradition concernant deux présumés terroristes iraniens, et ont juste expulsé ces deux
terroristes vers leur pays.
Les autorités suisses ayant contesté les décrets d’extradition, le juge a jugé que les décrets
d’extradition en cause étaient légaux, que leur retrait était donc illégal.

2ème condition au retrait : la décision retirée ne doit pas être devenue définitive.
Ce qui signifie que le retrait n’est possible que dans le délai du recours contentieux, c'est-à-
dire en principe deux mois.

Aménagement à ce principe : l’Administration peut encore retirer sa décision si elle fait


l’objet d’un recours devant le juge administratif, tant que le juge n’a pas statué.
Cela signifie en pratique que le délai de retrait dépasse largement les deux mois.
Cette 2ème condition du retrait dans l’affaire Dame Cachet le juge a constaté que le délai de
recours contre la décision était expiré, délai de recours spécial car de 15 jours et non 2 mois,
et ce en vertu de la loi de 1918 appliquée en l’espèce, en conséquence de quoi le CE a estimé
que le retrait de la décision même illégale n’était plus possible, donc le retrait a été jugé
illégal, et la Dame Cachet a gardé la somme qui lui avait été allouée.

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Par la suite la jurisprudence a offert à l’Administration des possibilités de retrait dans des
délais plus longs, en particulier lorsque la décision en cause n’avait pas fait l’objet d’une
publicité adéquate.

CE 6 mai 1966 Ville de Bagneux : affaire de permis de construire.


Le CE considère dans cet arrêt qu’un permis de construire notifié à l’intéressé, au
demandeur donc, mais n’ayant pas fait l’objet d’une publicité vis-à-vis des tiers, peut être
retiré à tout moment.
Solution défavorable pour le bénéficiaire du permis, relativisée.

Dans d’autres cas le juge s’est montré plus soucieux de l’intérêt des bénéficiaires de la
décision en bénéficiant les possibilités de retrait, c’est ce qu’illustre l’arrêt du CE du 14
novembre 1969 Eve.
Selon cet arrêt Eve de 1969, pour les décisions implicites d’acceptation, dont l’existence ne
fait pas l’objet de mesures organisées d’information (de publicité), le retrait n’est pas
possible.
Dans ce cas en l’absence de mesures d’information des tiers, le délai ne pouvant pas
commencer, le retrait aurait toujours été possible, donc ennuyeux.
Dans cette affaire il s’agit d’une autorisation tacite de cumul d’une exploitation agricole, puis
appliquée aussi aux autorisations tacites de création de lotissements, d’exploitation de
carrières, des certificats de conformité des permis de construire.
Cette jurisprudence Eve ne s’appliquait pas en matière permis de construire tacite, implicite,
car ce permis de construire tacite était une décision administrative tacite faisant l’objet
d’une publicité vis-à-vis des tiers.
Publicité qui résulte de l’affichage par le bénéficiaire sur le terrain du courrier attestant du
dépôt d’une demande complète, dossier complet de demande de permis de construire.

Pour protéger les administrés de retraits intempestifs et déstabilisateurs le juge est


intervenu en 1997, CE 24 octobre 1997 Madame De Laubier.
Le décret du 28 novembre 1983 relatif aux relations entre Administrations et administrés
dispose notamment que les délais de recours ne sont opposables qu’à la condition d’avoir
été mentionnés ainsi que les voies de recours dans la notification de la décision.
Sans quoi elle ne peut nous opposer le délai de recours.

Pour éviter qu’une administration rusée voir malveillante en ne précisant pas les délais et
voies de recours se ménage une possibilité de retrait indéfini, le CE précise dans l’arrêt De
Laubier que le fait de ne pas indiquer dans la décision notifiée les délais de recours,
n’autorise pas l’Administration de retirer l’acte à tout moment, le retrait est seulement
possible dans un délai de 2 mois à compter de la notification.

Toujours dans un souci de protection de l’administré, il a été jugé qu’une collectivité locale
ne peut se fonder sur l’absence de publication et de transmission au préfet d’une décision
de titularisation d’un agent pour retirer cette décision au-delà du délai de 2 mois. Jugé par la
CAA de Bordeaux 8 mars 1999 centre sanitaire et scolaire de Saint Clar.
Cet arrêt est un arrêt important, car il marquait l’abandon de l’arrêt ville de Bagneux de
1966.

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La loi du 12 décembre 2000 dispose que : « lorsqu’aucune mesure d’information des tiers n’a
été mise ne œuvre, le retrait peut être prononcé dans le délai de 2 mois à compter de la
date à laquelle est intervenue la décision ».
Alors que dans le cadre de la jurisprudence Eve il n’y avait pas de retrait possible, donc
remise en cause de cette jurisprudence par le législateur.

b) Le régime du retrait de la jurisprudence Ternon

Arrêt du CE du 26 octobre 2001.


Affaire complexe. Monsieur Ternon était un agent contractuel de niveau attaché, du conseil
régional du Langue doc Roussillon.
Cet agent contractuel attaché à cherché à pérenniser sa situation (contrat est l’exception
dans l’Administration, recrutement surtout par concours).
Il a fait l’objet de deux titularisations successives, parce que la 1 ère a été contestée, donc 2ème
tentative de titularisation, les deux ont été contestées devant le juge administratif.
Par la suite vu que les deux titularisations ont échouées, il a été renommé agent contractuel
par le président du conseil régional.
Une nouvelle tentative d’obtenir une titularisation a été engagée par Mr Ternon, lequel s’est
heurté à un refus d’une nouvelle titularisation opposée par le nouveau président du conseil
régional élu, et finalement il a fait l’objet d’un licenciement.
Succession de décisions.
Il faut retenir 2 décisions : une de 1983, il s’agit de la titularisation de Mr Ternon par le 1 er
président du conseil régional à être intervenu dans cette affaire, l’autre est celle du 25 mars
1988 étant la décision refusant la titularisation de Mr Ternon.
La décision de 1988 de refus de titularisation est considérée comme s’analysant en un retrait
de la décision de 1983, qui est jugée créatrice d’un droit à titularisation au profit de Mr
Ternon.
Et c’est à propose de ce retrait que le juge va modifier la logique de son arrêt Dame Cachet
en affirmant que : « l’Administration ne peut retirer une décision individuelle explicite
créatrice de droits, si elle est illégale que dans le délai de 4 mois suivant la prise de cette
décision ».
Cela revient sur la jurisprudence Dame Cachet.

Ce qui demeure de la jurisprudence Dame Cachet c’est que le retrait concerne les décisions
illégales.
Par contre ce qui change fondamentalement c’est le délai dans lequel peut s’opérer le
retrait, à savoir 4 mois.
Donc avec cet arrêt Ternon on assiste à un découplage du délai de retrait et du délai de
recours contentieux.
Le délai de 4 mois cour à compter de l’adoption de la décision, et non de la publicité dont
elle doit faire l’objet.
Cette solution innovante ne s’applique qu’aux décisions individuelles créatrices de droits
explicites.
Elle ne s’applique pas lorsque le retrait est demandé par l’intéressé.
Et enfin le législateur de même que le pouvoir règlementaire peuvent éventuellement
retenir des solutions différentes.

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Dès son apparition cette solution a suscité de nombreuses critiques, du professeur Yves
Godemet : « faut-il retirer l’arrêt Ternon ? »

L’arrêt Ternon prend le contrepied de la loi du 12 avril 2000 qui pour les décisions implicites
d’acceptation sans publicité pour les tiers fixent un délai de retrait de 2 mois à compter de la
prise de décision.
Délai de retrait qui est aussi de 2 mois s’il y a publicité comme par exemple un permis de
conduire.
Délai de retrait qui est celui de l’instance, de la durée de l’instance, si un recours est formé
contre la décision.
Donc critique que parfois le délai est de 2 mois, et parfois de la durée de l’instance, donc
complexification.

En ce qui concerne les décisions implicites d’acceptation un avis du 12 octobre 2006 Cavallo
du CE est venu préciser la portée de la loi du 12 avril 2000 en indiquant qu’en cas de recours,
le retrait est possible pendant la duré de l’instance que la mesure ait fait l’objet ou non
d’une publicité.
La jurisprudence Dame Cachet loin d’être more s’applique encore intégralement aux
décisions implicites de rejet, comme en témoigne l’arrêt du CE 26 janvier 2007 SAS Kaefer et
Wanner.

B) Le retrait des actes non créateurs de droits

Ils ont seulement des effets de droit.

a) L’acte non créateur de droit régulier

La jurisprudence admet la possibilité de retirer cet acte pour opportunité.


En ce sens CE 27 juin 1947 Société Duchet et compagnie : affaire relative à un rejet
d’autorisation non créateur de droits au profit des tiers.

Aussi CE 20 mai 1955 Syndicat national autonome du cadre de l’Administration générale des
colonies : arrêt relatif à la décision d’ouvrir un concours pour simple opportunité.

Cette solution reposant sur des arrêts anciens a été nuancée par la suite.
Ainsi le retrait des actes règlementaires pour opportunité n’est possible que s’ils n’ont
donné lieu à aucune application effective, ce que souligne l’arrêt du CE du 21 octobre 1966
Société Graciet, et CE 15 avril 1988 Société civile Le Tahiti.

b) L’acte non créateur de droit irrégulier

L’acte non créateur de droit irrégulier peut être retiré à toute époque, ce que souligne l’arrêt
du CE du 29 novembre 2002 Assistance publique hôpitaux de Marseille a propos de décisions
obtenues par fraude.
Arrêt du 6 novembre 2002 Soulier à propos de mesures de liquidation.

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Ce retrait est une technique qui n’est pas aussi rare que cela, communément utilisée.
Exemple : banale affaire de retrait de point du permis de conduire se terminant au final par
un retrait de permis.
La décision de retrait de point du permis de conduire étant une décision défavorable pour
l’administré, est considérée comme étant une décision qui est non créatrice de droits.
Dans cette affaire un conducteur avait commis plusieurs excès de vitesse lui valant des
retraits de point successifs, il reçoit donc un courrier du ministère de l’intérieur lui indiquant
que son permis n’était plus valide.
Mais pour plusieurs des infractions commises le conducteur n’avait pas été informé que
l’infraction se traduisait pour lui par des retraits de points, et ceci en violation de l’article
L123-1 du code de la route qui prévoit la nécessité d’une telle information.
Il a donc porté son affaire devant le TA d’Orléans.
Le jugement du TA d’Orléans fait apparaitre que le défaut d’information constituait une
illégalité, le ministère a fait droit aux conclusions du requérant en ne retenant plus qu’une
infraction qui elle avait fait l’objet d’une information effective, donc restitution de points au
conducteur en question.
Le TA analyse la restitution des points opérée par le ministère comme résultant d’un retrait
des décisions antérieures procédant à des retraits de points.
Ce retrait est fondé sur une illégalité, conformément à la jurisprudence Dame Cachet, le
délai du retrait est resté dans l’ombre, car pour un acte non créateur de droits le retrait est
possible à toute époque.
TA d’Orléans 15 novembre 2007 Monsieur Legrand.

SECTION 2 : LA SOUMISSION FORCEE DE L’ADMINISTRATION


AU PRINCIPE DE LEGALITE : LE RECOURS POUR EXCES DE
POUVOIR

Recours permettant à l’administré de contester une décision de l’A devant le juge A pour en
obtenir l’annulation.
Recours d’une importance considérable, en France un des piliers de l’Etat de droit.
Les grands auteurs classiques comme Gaston Jèze qui écrivait à propos du recours pour
excès de pouvoir : « la plus merveilleuse création des juristes, l’arme la plus efficace, la plus
pratique, la plus économique qui existe au monde pour défendre les libertés ».

SOUS-SECTION 1 : LES MOYENS DE LEGALITE


On n’obtient bien sur pas l’annulation à chaque fois.
Le juge administratif n’annulera que si l’acte est entaché d’illégalité.
Il faut mettre en évidence aux yeux du juge administratif que l’acte en question est entaché
d’illégalité, c'est-à-dire exciper des moyens de légalité.

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Ces moyens de légalité font l’objet de différentes classifications, c’est ainsi qu’il existe des
moyens qui sont ou ne sont pas d’ordre public.
C’est ainsi que n’est pas d’ordre public le moyen que la partie à l’instance qui entend s’en
prévaloir doit invoquer, c'est-à-dire que le juge ne relèvera pas d’office.
En revanche est d’ordre public le moyen que le juge relèvera d’office précisément, même si
le requérant a omis de s’en prévaloir.

Parmi ces moyens d’ordre public il y a par exemple l’incompétence des moyens d’ordre
public, l’auteur de la décision administrative.
Ou encore la méconnaissance du champ d’application de la loi, ou encore l’inexistence
juridique d’un acte.

La classification la plus judicieuse est celle qui distingue les moyens de légalité externe et les
moyens de légalité interne.
Donc un requérant contestant un acte administratif devant le juge administratif peut
invoquer soit l’illégalité externe de cet acte, soit son illégalité interne, soit les deux à la fois.

§1 : LES INEGALITES EXTERNES

Il existe différentes illégalités externes. On peut distinguer 3 moyens :


 L’incompétence
 Le vice de procédure
 Le vice de forme

A) L’incompétence

Un acte administratif est entaché d’incompétence lorsque l’autorité administrative auteur


de l’acte n’a pas la qualité pour prendre cet acte.
L’incompétence de l’auteur de l’acte peut prendre différentes formes.

a) L’incompétence matérielle

Autrement dit l’incompétence en raison de la matière, ou incompétence « ratione


materiae ».
Cela correspond au cas où une autorité administrative prend une décision dans une matière
qui est étrangère à ses attributions.
Par exemple un conseil municipal qui prendrait une mesure de police administrative, alors
que seul le maire est autorité de police administrative, est compétent en cette matière, il y a
incompétence matérielle, à raison de la matière du conseil municipal.

CE 15 février 1961 Alfred Jospeh : affaire relative à la révocation d’un garde champêtre par
un préfet, alors que cette matière relevait en vertu des textes de la seule compétence du
sous-préfet, donc décision du préfet entachée d’incompétence matérielle.

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b) L’incompétence territoriale

Incompétence en raison du lieu, incompétence « ratione loci ».


Cette incompétence territoriale peut éventuellement prendre une 1 ère forme à savoir qu’il y
aura incompétence territoriale si l’autorité administrative exerce ses fonctions dans un lieu
autre que celui ou elle doit siéger.
Situation plus que rare, hypothèse d’école, le président de la république peut signer des
décrets ou il veut sans que cela entache ses décisions d’incompétence.

Aussi il y a surtout incompétence territoriale lorsqu’une autorité administrative prend une


décision qui est destinée à s’appliquer à un territoire qui ne relève pas de sa compétence,
qui ne relève pas de son autorité.
Ce sera par exemple un maire qui prendra une mesure de police qui est destinée à
s’appliquer sur le territoire de la commune voisine qui ne relève pas de l’autorité du maire
d’une autre commune.
Même chose pour un préfet qui prendrait une mesure de police concernant une personne
qui réside dans un département autre que le sien.
Ou un inspecteur des impôts qui notifie un redressement fiscal à un contribuable qui n’est
pas domicilié dans sa circonscription, CE 6 juillet 1990 Baptistin.

On peut penser qu’elle est très rare, mais en pratique il existe un certain nombre de
situations pour lesquelles des difficultés peuvent apparaitre.

Tout d’abord le cas des voies publiques, qui bien souvent délimitent le territoire de deux
communes, qui sont à cheval entre les deux communes, ce qui est de nature à compliquer la
règlementation de la circulation sur ces voies publiques.
Qui est compétent pour prendre les arrêtés de police pour fixer la règlementation de la
circulation sur cette voie publique.
La règlementation est faite soit par des arrêtés distincts mais concordants par les deux
maires des deux communes.
Soit par un arrêté unique pris conjointement.

Une autorité administrative peut être propriétaire de biens qui sont en dehors de son
territoire.
Comme pour les cimetières, les terrains de camping.
Dans ces cas il y a compétence du maire pour prendre des décisions concernant ces biens
même s’ils ne sont pas sur le territoire de sa commune.

Les communes situées en bord de mer, le maire de la commune ne peut prendre des
mesures de police que dans une zone qui s’étend jusqu’à 300 mètres du rivage.
Par exemple arrêté municipal règlementant l’usage des engins à moteur.
Au-delà de cette zone de 300 mètre le préfet devient territorialement compétent, le pouvoir
passe donc dans d’autres mains.

c) L’incompétence temporelle

13
Incompétence en raison du moment, incompétence « ratione temporis ».
C’est la date de la décision, à laquelle la décision a été prise qui est en cause.
L’acte est entaché d’illégalité « ratione temporis » si à la date de la décision l’autorité
administrative n’était pas encore compétente pour prendre cette décision.

CE 27 avril 1973 Demoiselle Serre : dans cette affaire a été entachée d’incompétence
temporelle la décision d’un préfet nommé en conseil des ministres mais pas encore installé
dans ses fonctions, il ne peut prendre des décisions qu’à partir du moment où il est entré en
fonction.

Autre incompétence temporelle possible : lorsque l’autorité administrative auteur de la


décision n’était plus compétente au moment de la prise de la décision.
Cela peut se rencontrer avec l’expiration d’un mandat électif, ou encore d’un délai imparti,
pour prendre certains actes.
Délai dont dispose le gouvernement pour agir par voie d’ordonnance, au-delà de ce délai il
devient incompétent pour « légiférer » par voie d’ordonnance.

B) Le vice de procédure

Il y a vice de procédure lorsque l’autorité administrative auteur de l’acte ne respecte pas la


procédure d’élaboration d’une décision.

Parfois certains vices de procédure sont assimilés à l’incompétence, et c’est le cas en


particulier lorsque le gouvernement ne respecte pas l’obligation de ne prendre une décision
qu’après avis du conseil d’état.
CE 10 septembre 1992 Meyet.

C’est encore le cas lorsque l’autorité administrative ne respecte pas son obligation de ne
décider que sur avis conforme d’un organisme consultatif.
CE 5 février 1990 Dame Brancourt.

En dehors de ces cas particuliers d’assimilation, le vice de procédure est un vice original, un
moyen d’illégalité externe indépendant du vice de compétence.

a) Le nécessaire respect des règles de procédure choisies (par l’autorité administrative)

L’autorité administrative peut ne pas être tenue de respecter une certaine procédure.
Dans ces cas elle peut choisir éventuellement et librement de se soumettre au respect d’une
certaine procédure.
Dans ce cas de libre choix par l’Administration, le fait de s’être librement imposé le respect
d’une procédure, ne saurait dégager l’autorité administrative de l’obligation de respecter
scrupuleusement la procédure qui a été choisie.

René Chapus : « la liberté est une chose, la fantaisie en est une autre ».

14
En ce sens CE 15 octobre 1982 société affichage Jidaury : dans cette affaire le maire d’une
commune sans y être obligé avait décidé de suivre et de respecter la procédure de l’appel
d’offre pour la conclusion d’un contrat, et donc l’arrêt met en évidence que ce maire doit se
conformer scrupuleusement à cette procédure d’appel d’offre, sous peine d’irrégularité du
contrat.

Les procédures doivent être respectées scrupuleusement, sous peine que les actes soient
entachés d’irrégularité.

Il n’est pas non plus excessivement formaliste.

b) Les limites du formalisme

Bien souvent les procédures prévues, organisées par les textes, sont des procédures
complexes.
C’est sans doute ce qui conduit le juge a considérer qu’un vice véniel de procédure
n’entache pas la décision concernée d’illégalité.

Ainsi au terme de la jurisprudence il apparait que ne provoque pas l’illégalité de l’acte le non
respect d’une procédure sans incidence sur la décision à prendre, et qui ne confère aucun
garantie à ceux que la décision concernera.
On se trouve en présence de ce que la jurisprudence et la doctrine appellent des formalités
non substantielles.

CE 28 juillet 1984 Baillout : arrêt relatif à une simple obligation d’informer ou de rendre
compte du déroulement d’une procédure, qui n’a pas été considéré comme un vice de
procédure entachant la décision d’illégalité.

CE 7 mars 1975 association des amis de l’Abbaye de Fontevraux : extension d’un camp
militaire proche de l’abbaye, avec des exercices de tir, ils ont contesté les décisions relatives
à l’extension de ce camp militaire, en invoquant un vice de procédure, mais le CE dit qu’en
l’espèce l’omission de prendre un avis en temps utiles n’a pas constitué en vice de procédure
substantiel, donc il n’entraine pas l’illégalité, l’annulation de l’acte.

CE 6 janvier 1989 Simard : le CE conclue à l’absence de caractère substantiel de l’irrégularité,


irrégularité tenant à l’absence d’un des membres de la commission ayant assistée à la classe
d’un instituteur stagiaire qui attendait sa titularisation, et qui donc devait faire l’objet d’une
inspection par cette commission.
Pas de vice de procédure substantiel selon le CE.

Il existe des cas ou le juge administratif reconnait qu’il y a des vices de procédure
substantiels.

CE 20 janvier 1989 Demoiselle Stickel : la convocation des personnes sur le cas desquelles
une commission doit statuer est une formalité substantielle, qui si elle n’est pas respectée
pourra entrainer l’annulation de la décision prise par la commission.

15
Ceci dit il n’y a pas vice de procédure lorsque le respect de la procédure est par exemple
impossible, ce qui est le cas lorsqu’un organisme consultatif refuse de se prononcer sur un
projet qui lui est soumis.
C’est encore le cas si cet organisme consultatif n’a pas encore été constitué, mis en place.

De même il a été jugé qu’il n’y a pas de vice de procédure si le respect de la procédure est
inutile.
CE 19 novembre 1948 Razungles-Bassout : le CE a conclu qu’il était inutile de tenter,
d’organiser une procédure d’accord amiable avant réquisition dans le cadre de la loi de 1938
sur les réquisitions, l’intéressé ayant fait savoir qu’il n’accepterait aucun accord amiable.

C) Le vice de forme

Le vice de forme et le vice de procédure ont été souvent confondus, surtout au 19 ème siècle.

Le principal vice de forme qui peut entacher un acte administratif est le défaut de signature
de l’acte par l’auteur de l’acte.

Souplesse introduite par la jurisprudence.


Elle admet qu’une copie d’un acte administratif notifiée à la personne intéressée peut ne pas
être signée, sans considérer qu’il peut y avoir vice de forme.
CE 11 juin 1982 Le Duf.

Autre exemple : le défaut de contreseing des actes du président de la république soumis à


contreseing est un vice de forme.
De même le défaut de contreseing des actes du 1er ministre.

Autre vice de forme possible : le défaut de motivation de l’acte administratif.


Il existe une loi du 11 juillet 1979 qui fait obligation à l’Administration de motiver ses actes,
lorsque l’A ne respecte pas les obligations de motiver les actes administratifs qui lui sont
faites par la loi de 1979 cela constitue un vice de forme.

§2 : L’ILLEGALITE INTERNE

L’illégalité interne connait 3 grandes modalités.


L’acte administratif peut être illégal en raison de son contenu, il peut encore être illégal au
regard de ses motifs, il peut enfin être illégal au regard de ses buts.

A) L’illégalité résultant du contenu de l’acte

16
Certains auteurs parlent d’illégalité relative à l’objet de l’acte.
Cette illégalité consiste en ce que la mesure attaquée est illégale en elle-même, c'est-à-dire
qu’elle ne pouvait pas être prise.
Plus concrètement elle ne pouvait pas être prise parce qu’elle constitue une violation de la
loi.
On peut l’appeler plus explicitement la violation de la loi.
Cette violation de la loi existe bien sur lorsque l’acte administratif est en contradiction avec
un texte de loi formel, avec les dispositions d’une loi formelle, mais la violation de la loi va
beaucoup plus loin que la violation des simples termes d’une loi.
C’est la violation de la légalité environnante, c'est-à-dire la violation d’un Principe Général du
Droit, la violation d’un décret par exemple par un arrêté, la violation des stipulations d’un
traité International ou d’un acte de droit communautaire.
Cela signifie violation de toute norme juridique supérieure à l’acte contesté.
C’est un moyen d’obtenir l’annulation d’un acte administratif.

B) L’illégalité résultant des motifs de l’acte

Cette forme d’illégalité est assez complexe qui comprend tout d’abord l’erreur de droit.

a) L’erreur de droit

Là encore l’erreur de droit est une situation assez fréquente.


Elle peut être tout d’abord une erreur commise par l’Administration sur le droit applicable.
Par exemple un maire refuse un permis de construire sur le fondement d’un plan
d’urbanisme (un plan local d’urbanisme, PLU), mais plan d’urbanisme qui n’a pas encore été
publié, et qui n’ayant pas encore été publié est inopposable aux tiers.
Le maire a donc commis une erreur sur le droit applicable.
En ce sens CE 7 juillet 1976 Epoux Arnaud.

Il y a encore erreur de droit si l’autorité administrative a pris une décision sur le fondement
d’une règlementation illégale.
En ce sens CE 25 avril 1979 Ciaudo : dans cette affaire il avait été mis fin aux fonctions d’un
agent public sur le fondement d’une circulaire, mais d’une circulaire à caractère
règlementaire donc illégale car prise par une autorité incompétente car les ministres n’en
disposent pas.

L’erreur de droit peut encore résulter d’une mauvaise interprétation d’un texte par l’auteur
de l’acte.
En ce sens CE 28 mai 1954 Barel : arrêt du candidat malheureux au concours de l’ENA, mais
sa participation a été refusée par le ministre sans que les motifs aient été développés, il a
donc contesté cette décision de refus, le juge a cherché et donc trouvé que c’était le fils d’un
important responsable communiste de l’époque.
Le ministre avait donc commis une erreur de droit, ce qui signifie que le ministre a mal
interprété les dispositions textuelles existantes relatives à la fonction publique, considérant
qu’il pouvait empêcher une personne de devenir haut magistrat en raison de ses opinions
politiques.

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CE 27 juillet 1990 université de Paris Dauphine : dans cet arrêt le CE souligne qu’un président
d’université et un jury de concours ont crus pouvoir refuser l’inscription d’étudiants en se
fondant sur des motifs d’ordre quantitatif et apprécier l’aptitude physique d’un candidat, le
juge considère que ces différentes décision sont illégales car entachées d’erreurs de droits.

b) L’erreur dans la qualification juridique des faits

Une décision administrative peut être entachée d’une erreur dans la qualification juridique
des faits.
Le contrôle exercé par le juge administratif sur l’erreur de l’Administration dans la
qualification juridique des faits.
Ce contrôle a été inauguré par le CE dans un vieil arrêt du 4 avril 1914 Gomel : Mr Gomel
s’était adressé à l’autorité administrative compétente, le préfet de police de Paris, pour
obtenir un permis de construire un immeuble, qu’il envisageait de faire construire place
Beauvau. Le préfet de police refuse le permis de construire, refusé par l’Administration aux
motifs que la place Beauvau constitue une perspective monumentale, votre projet
d’immeuble porterait atteinte à cette perspective monumentale, en conséquence de quoi le
permis est refusé.
Dans cette affaire il y a donc une qualification juridique des faits opérée par l’Administration,
qui consiste à dire que la place Beauvau est une perspective monumentale.
De même que dire que cette place ne serait pas une place monumentale relèverait aussi
d’une qualification juridique des faits.
Il y a un fait, qualifié juridiquement par l’Administration.
Au final le CE va considérer que l’Administration a commis une erreur dans la qualification
juridique des faits, car cette place n’est pas une perspective monumentale.

Cela est souvent évoqué depuis dans la jurisprudence, ce contrôle est souvent exercé.

Est-ce qu’un site est un site pittoresque au sens de la loi ?


Oui ou non, c’est de la qualification juridique des faits.
CE 2 mai 1975 Dame Ebri.

Est-ce qu’une organisation syndicale est une des plus représentatives sur le plan national ?
Quelle que soit la réponse de l’A c’est une qualification juridique des faits.
CE 17 avril 1970 CFDT.

Est-ce qu’un projet de construction mérite la qualification d’habitation bourgeoise ?


CE 28 janvier 1977 Epoux Agopyam.

Est-ce que la tenue d’une réunion, d’une manifestation, est de nature à troubler gravement
l’ordre public ?
CE 19 mai 1933 Benjamin.

Est-ce qu’une publication présente un danger pour la jeunesse en raison de son caractère
licencieux ?

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Si l’Administration dit qu’elle l’est, elle doit être retirée des kiosques, elle motive sa décision
par une certaine qualification juridique des faits.
CE 20 décembre 1985 SARL édition du Pharaon.

Est-ce qu’un film à un caractère pornographique ou d’incitation à la violence ?


Il doit être donc classé X.
CE 30 juin 2000 Association promouvoir.
c) L’erreur de faits

Toute autorité administrative motive ses décisions au regard de certains faits.


Le juge administratif opère un contrôle sur la matérialité des faits qui ont motivé la décision
administrative.

Ce contrôle sur la matérialité des faits est apparu dans la jurisprudence avec l’arrêt CE 14
janvier 1916 Camino : arrêt étonnant, loufoque.
Le point de départ de l’affaire, du recours, est une décision de révocation d’un maire d’une
commune, révocation motivée par les faits suivants. Il était reproché à ce maire de n’avoir
pas veillé à la décence d’un convoi funèbre.
Un cortège funèbre devait se rendre à l’intérieur du cimetière communal, mais la porte du
cimetière était cadenassée, donc impossible de rentrer.
Il a donc fallu descendre le cercueil du corbillard et la faire passer par-dessus le mur du
cimetière.
Mais il y avait une brèche dans le mur qui a permis de rentrer.
On a reproché au maire d’avoir organisé cette situation pour porter atteinte à la décence de
ce convoi funèbre, suite à une querelle avec le mort, donc révocation.
Contestation de cette décision de révocation.
Il conteste les faits qui lui sont reprochés.
A cette occasion le CE exerce un contrôle sur la matérialité des faits qui motive toute
décision administrative.
Il constate l’inexactitude des faits reprochés à ce maire, et donc il annule la sanction, la
révocation.
Inauguration par le juge du contrôle de la matérialité des faits.

Contrôle exercé régulièrement depuis, CE 9 juin 1978 Centre psychothérapique de la Haute


Vienne : histoire de révocation d’une infirmière, et là aussi le juge constate l’irréalité des
faits reprochés à cette infirmière qui avaient motivés la révocation.

CE 30 novembre 1979 Léon : il s’agissait d’un marin jugé inapte à la navigation en raison des
crises d’épilepsies dont il souffrait selon la commission l’ayant examiné.
Contestation de la décision, le CE conclue à l’illégalité des faits ayant motivé la décision dans
cette affaire.

CE 17 octobre 1984 Dame Judlin : il s’agissait d’une résiliation du contrat d’un agent qui était
motivée par la réorganisation du service (placé sous l’autorité du 1er ministre), le CE constate
l’irréalité de la réorganisation du service, donc du fait ayant motivé la décision.

19
C) L’illégalité résultant des buts de l’acte

Un acte administratif résulte du ou des buts poursuivis par cet actes, qui sont conformes à la
légalité.
Décision entachée de détournement de pouvoir.
L’Administration ne peut poursuivre que des buts légaux.
Le but de tout acte administratif est censé être l’intérêt général, en conséquence de quoi il
est évident qu’une autorité 1 qui prendrait une décision uniquement dans le but de satisfaire
un intérêt personnel, cette autorité A commettrait un détournement de pouvoir.

a) L’illégalité des buts privés

Lorsqu’une autorité administrative poursuit un but d’intérêt privé, personnel, on se retrouve


en présence d’un détournement de pouvoir qualifié de primaire.
On en rencontre assez régulièrement des cas, la jurisprudence l’illustre, mais ce n’est pas le
plus fréquent.

CE 16 novembre 1900 Maugras : le maire d’une commune révoque un agent de police


municipale, en sa qualité de chef des agents municipaux, et le révoque aux motifs que cet
imprudent avait dressé un procès verbal à la parente d’une domestique du maire.
Présence d’un détournement de pouvoir.

CE 3 avril 1991 Commune de Basse Ointe : affaire de licenciement d’agents communaux, qui
sont contestés, et le juge découvre qu’ils ont été licenciés pour des motifs politiques.
Détournement de pouvoir grossier, pour favoriser de nouveaux agents plus proches de lui
politiquement, ce que l’on appelle le clientélisme.

CE 14 mars 1934 Demoiselle Rault : maire d’une commune qui utilise son pouvoir de police
pour ordonner la fermeture d’un débit de boisson, parce que lui-même était tenancier d’un
café et avait constaté que dans la semaine les affaires ne marchaient pas fort.
Annulation de cet arrêté de police municipal mettant en évidence un grossier détournement
de pouvoir.

CE 11 mai 1984 maire de Calacuccia : maire d’une commune de corse qui avait utilisé son
pouvoir de police pour interdire la circulation des véhicules devant une maison, et ce dans le
seul intérêt du propriétaire de la maison.
Détournement de pouvoir.

CE 13 octobre 1976 Boucher : expropriation engagée par une commune concernant un


château, et elle apparait comme étant motivée par la création à terme d’un musée
communal à l’intérieur du château.
En réalité le juge découvre que si la commune a engagée cette mesure d’expropriation c’est
pour éviter qu’un étranger rachète ce château.

Il peut y avoir détournement de pouvoir alors même que l’autorité administrative poursuit
un intérêt public.

20
b) L’illégalité de certains buts d’intérêts publics

A la différence des cas précédemment évoqués, l’autorité administrative ne poursuit pas un


but d’intérêt privé, elle poursuit un but d’intérêt public, mais le problème est que l’autorité
administrative utilise un pouvoir qui lui appartient pour poursuivre et pour atteindre un but
qu’elle ne pouvait pas poursuivre en utilisant ce pouvoir.

Ainsi il y a détournement de pouvoir si l’autorité administrative utilise ses pouvoirs de police


dans l’intérêt des finances de la personne publique.

CE 26 novembre 1875 Pariset et Laumonnier-carriol : point de départ est une loi de 1872
portant nationalisation des fabriques d’allumettes.
L’objectif de cette loi étant la création d’un monopole d’Etat de fabrication et de vente
d’allumettes.
Elle prévoyait que les entreprises privées seraient indemnisées pour les propriétaires des
entreprises, indemnités prévues.
Mais pour réduire le montant de ces indemnités le ministre des finances de l’époque avait
ordonné au préfet de procéder à la fermeture d’un certain nombre d’établissements, de
certaines usines, pour violation de la législation sur les établissements dangereux,
incommodes, ou insalubres.
En d’autres termes le ministre avaient demandé aux préfets de faire usage de leur pouvoir
de police, l’indemnisation donc soit disparaissait soit était fortement réduite, car elle perdait
de sa valeur.
Le but poursuivi est la préservation des finances publiques de l’Etat.
Mais cela est sanctionné par le juge car il constate que l’autorité administrative a utilisé un
pouvoir qu’elle détient pour atteindre un but qu’elle ne peut pas rechercher en utilisant ce
pouvoir.
L’autorité de police ne peut légalement utiliser ses pouvoirs de police que dans des buts de
police administrative.
Le but de toute mesure administrative de police ne peut être que le maintien de l’ordre
public dans toutes ses composantes, sécurité, salubrité, tranquillité, moralité.

CE 4 juillet 1924 Beaugé : le maire de Biarritz qui a l’époque a pris un arrêté de police
municipale pour obliger les baigneurs de la grande plage à utiliser les cabines de bain situées
au bord de la plage.
Cette obligation faite d’utilise les cabines de bain a été contestée par les baigneurs, car
c’était payant.
Le CE donne raison au requérant, il estime que l’arrêt de police est illégal et entaché de
détournement de pouvoir.
Le maire à fait cela parce que les cabines sont payantes, ce qui fait rentre de l’argent dans
les caisses de la commune, même si c’est un but financier louable, il ne peut être poursuivi
par ces pouvoirs de police.
C’est du détournement de pouvoir.

Encore si l’autorité use de ses pouvoirs de police pour mettre fin à un différent à son profit.

21
CE 19 janvier 1979 Ville de Viry-Châtillon : le maire d’une commune avait utilisé ses pouvoirs
de police spéciale en matière d’édifices menaçant ruine pour obtenir l’évacuation d’une
association qui occupait un immeuble communal avec laquelle la commune était en litige.
La commune trouve plus rapide de dire que l’on prend un arrêté de péril, utilisation des
pouvoirs de police autre que dans un but de police, ici pour régler un litige.

Il y a encore détournement de pouvoir si l’autorité administrative utilise ses pouvoirs pour


mettre en échec l’autorité de la chose jugée.
Illustré par CE 27 octobre 1961 Bréart de Boisanger : administrateur de la comédie française,
avec un mandat de 6 ans.
Mais il a été décidé par l’autorité de tutelle de la comédie française, l’Etat, le ministère de la
culture dirigé par Malraux.
Cette décision mettant fin à ses fonctions a été contestée par l’intéressé qui a obtenu
l’annulation de cette décision, et c’est alors sous l’impulsion de Malraux que le
gouvernement s’engage dans une modification du statut de la comédie française pour
rendre possible à l’avenir l’interruption des fonctions à tout moment du mandat de
l’administrateur.
Sur le fondement de ce statut on vire à nouveau Bréart de Boisanger.
Ces dispositions du statut, nouvelles, ont été annulées par le conseil d’état pour
détournement de pouvoir car le CE a reproché à l’autorité administrative d’avoir fait ces
modifications juste pour …

3 février 1978 ministre de l’agriculture: le CE constate l’illégalité de la modification de


l’organisation du remembrement rural pour surmonter les contraintes résultant d’un
jugement.
Le juge sanctionne cette volonté de l’Administration.

c) Le problème de la pluralité des buts

Par une même décision l’Administration peut chercher à satisfaire des intérêts différents,
peut poursuivre une pluralité de buts.
Dans ce cas la légalité de la décision dépend de la légalité du but principalement poursuivi
par l’Administration.
CE 11 janvier 1957 Louvard : une expropriation pour cause d’utilité publique est poursuivie
en vue d’assurer à titre principal le fonctionnement d’un service public, peut néanmoins
accessoirement tenir compte de l’intérêt financier de l’Etat, sans que cela entache l’acte
d’illégalité.

CE 20 juillet 1971 Ville de Sochaux : expropriation poursuivie pour établir une déviation
destinée à faciliter la circulation automobile entre 2 villes, cette déviation profitait
également à une entreprise privée (Peugeot), donc absence de détournement de pouvoir,
donc possibilité de conjonction entre l’intérêt général et un intérêt privé.

En revanche le juge a considéré qu’est entachée de pouvoir la déclaration d’utilité publique


destinée en apparence de permettre l’extension d’une station d’épuration communale, mais

22
ayant en réalité pour seul but de faire prendre en charge par la commune le financement du
traitement des rejets provenant d’un complexe industriel dont le maire était le PDG.
En ce sens TA de Dijon 14 novembre 1999 association de protection de l’environnement de
Vénizy.

d) La nécessaire assimilation du détournement de procédure au détournement de


pouvoir

Maurice Hauriou a présenté le détournement de procédure comme un moyen original


distinct du détournement de pouvoir.
Le détournement de procédure étant à ses yeux le fait de mettre en œuvre une procédure
dans un but autre que celui en vue duquel elle est instituée.

Par exemple la mise en œuvre de la procédure d’alignement des voies publiques alors que la
procédure d’expropriation aurait du être utilisée, cette procédure dite d’alignement des
voies publiques se révèle beaucoup plus avantageuse pour l’Administration car elle a un cout
bien moins élevé que la procédure d’expropriation.

La notion de détournement de procédure apparait parfois dans la jurisprudence.


CE 23 mars 1979 Commune de Bouchemaine.

Expression critiquée par Chapus : « si l’autorité administrative a cru de bonne foi qu’elle
pouvait mettre en œuvre une certaine procédure et pas une autre, il y a simplement erreur
de droit. Par contre si l’Administration est de mauvaise foi, si elle savait que la procédure est
inadéquate il n’y a pas autre chose au fond qu’un détournement de pouvoir ».

Pour René Chapus l’expression de détournement de procédure n’apporte rien.

Le juge peut conclure en disant que la décision est entachée d’excès de pouvoir, et qu’en
conséquence elle est annulée.
Cette expression d’excès de pouvoir à une signification très large, c’est un synonyme de
décision administrative illégale, cela ne renseigne en aucun cas sur le moyen d’illégalité qui
est soulevé, pas de sens juridique précis, pas de précision sur quel type d’illégalité.
Les arrêts n’utilisent pas forcément les termes d’erreur de droit, ou détournement de
procédure …

Le juge parfois est tenté lorsqu’il qualifie l’illégalité d’utilise certains termes plutôt que
d’autres.
Il préfèrera utiliser le terme erreur de droit que détournement de pouvoir, car c’est une
notion infamante pour l’Administration.
D’où une tentation du juge administratif de dire que l’administration a commis une erreur de
droit, ce qui est moins délicat à dire.

23
SOUS SECTION 2 : LES CONDITIONS DE RECEVABILITE DU
RECOURS

Est-ce que le recours présenté devant le juge est recevable ?


En matière d’excès de pouvoir c’est la 1ère question que se pose le juge.

Une fois que le recours est recevable le juge regarde le fond, et les différents moyens de
légalité.

Certaines conditions sont liées à la personnalité du demandeur.

§1 : LES CONDITIONS LIEES A LA PERSONNALITE DU DEMANDEUR

A) Les conditions liées à l’évidence

Le recours doit contenir des indications permettant d’identifier l’auteur du recours ; cela
signifie qu’il n’est pas possible de former un recours pour excès de pouvoir anonyme.

L’auteur du recours doit avoir la capacité d’ester en justice, sans quoi il doit être représenté
par son représentant légal par exemple.

Le recours doit être écrit en français, c’est ce qui a été affirmé par la jurisprudence
tardivement.
CE 1985 Quillevert : recours formé par un administré. Le recours de requérant était rédigé
en breton, invité à le reformuler, mais il a persisté dans son recours rédigé en breton.
Considérant que le recours n’est pas rédigé en français, le recours n’est pas recevable.
Conclusions de Latournerie.

B) L’intérêt à agir

Pour qu’un recours soit recevable, il faut que le requérant ait un intérêt à agir.
L’idée est que le requérant doit avoir un intérêt personnel à obtenir ce qu’il demande
(l’annulation de la décision).
Exigence qui peut paraitre lourde, mais qui en pratique a été considérablement assouplie par
le juge.

a) Un intérêt personnel largement compris

24
CE 29 mars 1901 Casanova : affaire se déroule en Corse. Un conseil municipal avait décidé de
rémunérer un médecin pour soigner gratuitement tous les habitants de la commune.
Un autre médecin installé dans cette commune a contesté cette décision.
Le CE a estimé que ce médecin installé dans la commune avait un intérêt à agir contre la
décision, car concurrence directe.
Cet intérêt à agir à été reconnu en tant que contribuable de la commune.
Ce médecin paye des impôts locaux, une partie de ces impôts sera affecté au paiement de ce
médecin, et donc il a intérêt en tant que contribuable à contester cette décision.
Cet arrêt reconnait que la qualité de contribuable donne un intérêt à agir contre toutes les
décisions qui supposent que les finances communales vont jouer un rôle.

A l’inverse la qualité de contribuable de l’Etat elle ne donne pas intérêt à agir contre les
décisions administratives qui impliquent des financements étatiques.
Le juge a estimé que si on l’admettait ce serait ouvrir la voie à des cataractes de recours.

CE 21 décembre 1906 Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix de


Seguey-Tivoli : présence d’un recours formé contre la décision supprimant une ligne de
tramway qui desservait ce quartier.
Arrêt intéressant car à travers celui-ci il a été reconnu que l’usager d’un service public à un
intérêt à agir contre toute décision relative à l’organisation ou au fonctionnement du service.
Possibilités de recours considérables.
Derrière ce recours il y avait parmi ce syndicat Léon Duguit.

CE 14 février 1958 Adisset : Le juge considère qu’un campeur a intérêt à agir contre un
arrêté municipal pris par un maire en vertu de ses pouvoirs de police interdisant le camping.
Cette personne présentée comme un campeur à un intérêt à agir, alors même qu’il n’avait
jamais tenté de camper sur le territoire de la commune concernée, sans qu’il ait même
jamais l’intention d’aller y camper un jour.

CE 28 mai 1971 Damasio : Affaire concernant un hôtelier d’une station thermale ayant formé
un recours contre l’arrêté ministériel fixant les dates des vacances scolaires, car il estimait
que le calendrier ne favorisait pas les hôteliers, il a donc intérêt à agir, donc son recours est
recevable.

b) L’admission d’un intérêt moral

La lésion d’intérêts spirituels et moraux permet de donner qualité au requérant pour


intenter un recours pour excès de pouvoir.
Exemple des ministres du culte, ou des fidèles formant des recours contre les mesures qu’ils
jugent contraires à la liberté religieuse.
En ce sens CE 8 février 1908 Abbé Deliard.

CE 13 juillet 1948 société des amis de l’école polytechnique : recours formé par cette
association contre des nominations considérées comme illégales, de nature à porter atteinte
au renom de l’école polytechnique.

25
Recevabilité de ce recours.

c) L’acceptation de l’intérêt collectif

L’intérêt du requérant n’est pas seulement individuel il est aussi collectif.


En conséquence de quoi il y a recevabilité du recours exercé par les groupements comme les
associations, les amicales, les sociétés.
L’admission du recours exercé par les groupements comme les associations contestant des
décisions lésant des intérêts collectifs.
CE 28 décembre 1906 Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges.

Si la décision contestée est un règlement, la réalité de l’intérêt collectif lésé apparait


nettement lorsque ce règlement intervient dans le domaine d’action du groupement, de
l’association.

Si la décision contestée est individuelle, les choses sont plus compliquées.


En ce sens qu’une décision positive lèse l’intérêt collectif lorsqu’elle a des conséquences
défavorables sur des personnes autres que le destinataire de la décision.
Exemple d’une nomination dans la fonction publique qui est considérée comme aggravant
les conditions de concurrence en matière d’avancement.

En ce qui concerne les décisions individuelles négatives telles que le refus d’un avantage
sollicité, ou les sanctions dans la fonction publique encore, la jurisprudence considère qu’il
n’y a d’incidence défavorable que sur les destinataire, ce qui signifie concrètement que eux
seuls peuvent en demander l’annulation au juge administratif par la voie de l’excès de
pouvoir.
Ce n’est pas le syndicat dont l’individu peut être membre qui peut faire le recours car pas
d’intérêt collectif en jeu, simplement un intérêt individuel.
Ils ne pourront intervenir qu’à l’appui du recours, pas les seuls auteurs du recours.

§2 : LES CONDITIONS DE RECEVABILITE INDEPENDANTES DE LA


PERSONNALITE DU DEMANDEUR

A) Les délais de recours

a) Le délai de recours de droit commun

En principe le délai de recours dont dispose le requérant est un délai de 2 mois.


Le délai de recours commencera à courir si l’on est en présence d’une décision explicite à
partir de la publication, ou de l’affichage, ou de la notification de la décision en cause.
En présence d’une décision règlementaire le délai de recours est déclenché par l’affichage.
En présence d’une décision individuelle le délai commence à courir à partir de la notification.

26
Si l’on est en présence d’une décision implicite le délai de droit commun de 2 mois court à
partir du moment où la décision implicite de rejet est constituée, formée.
La règle est que lorsqu’un administré forme une demande à l’Administration, si elle garde le
silence pendant 2 mois, à compter de ces 2 mois se forme une décision implicite de rejet.
Dès que cette décision implicite de rejet est formée commence à courir le recours de 2 mois.

Le permis implicite de construire peut faire l’objet d’un recours par les tiers, avec aussi un
délai de droit commun de deux mois.

Ce délai de droit commun de 2 mois est un délai franc, ne sont comptés ni le jour du
déclenchement du délai ni celui auquel le délai cesse de courir.
Une décision est publiée, ou notifiée un 21 avril, c jour ne compte pas, le délai de recours
commence à courir le 22 avril à 00h00.
La fin du délai de 2 mois est considéré comme recevable jusqu’au 22 juin à 24h00.

En pratique c’est très important, respect du délai de recours, car si le délai est expiré, le
requérant est considéré comme forclos, il n’y a rien à faire, le délai est irrecevable.
2 mois c’est en pratique extrêmement court.

b) Les augmentations possibles du délai de recours

Possibilité des prorogations des délais de recours.


La principale prolongation c’est lorsque le délai de recours expire un dimanche ou un jour
férié.
Le recours est encore recevable jusqu’à la fin du recours ouvrable suivant.
Entre aussi dans la catégorie des prolongations des délais de recours les délais de distance.
Ils s’appliquent notamment un département ou un territoire d’outre mer, et qui ont besoin
de former un recours qui est situé en métropole.
Délai supplémentaire qui est de 3 mois.
Ce délai de distance profite aussi aux métropolitains ayant besoin de former un recours dans
un DOM ou un TOM.
c) Les recours auprès de l’Administration

Possibilité de former un recours gracieux ou hiérarchique.


Le recours gracieux est formé auprès de l’autorité administrative dont émane l’acte
contesté.
Dans le recours hiérarchique le requérant saisi le supérieur hiérarchique de l’auteur de l’acte
administratif contesté.

Le délai de recours de 2 mois qui par définition a commencé à courir se trouve interrompu
par ce recours administratif.
Et le délai de recours ne recommencera à courir qu’à partir du moment où l’autorité
administrative saisie aura répondue au requérant.

Elle répond soit expressément dans un délai raisonnable.


Soit l’Administration va garder le silence, ce qui vaudra rejet.
A un moment donné on se retrouve avec une décision administrative.

27
Le délai de recours va donc recommencer à courir pour sa totalité, on repart pour 2 mois
pendants lesquels on peut encore former le recours pour contester la décision initiale et la
décision de refus confirmant la décision initiale.

Dès lors que l’on est destinataire d’une décision administrative de refus, il ne faut pas se
priver de former un recours gracieux ou administratif, et le jour où l’on à la réponse explicite
ou implicite on dispose à nouveau d’un délai de 2 mois.

Illustration dans le cadre du référé préfectoral.


CE 25 janvier 1991 Brasseur : tout administré peut demander au préfet de saisir de saisir le
tribunal administratif.
On s’est trouvé en présence d’un administré qui a demandé au préfet de saisir le tribunal
administratif.
La juge a dit que à partir du moment où le préfet avait dit non à ce particulier, à partir de
cette décision de refus le particulier a bénéficié d’un délai de recours de 2 mois, le préfet
ayant refusé de le faire.

L’exception d’illégalité se révèle très utile.


C’est un mode de contestation oblique d’une décision qui est pourtant devenue définitive.
Dans le cadre d’une instance, l’intéressé, le requérant, va invoquer l’illégalité de la décision
définitive sur le fondement de laquelle a été prise la décision contestée.
Aucun recours n’est formé dans le délai du recours contentieux.
2 ou 3 ans plus tard une décision individuelle est prise en application de ce décret, et son
destinataire estime qu’elle est entachée d’illégalité, et veut la contester devant le juge
administratif.
Il pourra demander l’annulation de cette décision individuelle en invoquant l’illégalité d’un
décret intervenu plusieurs années auparavant pour obtenir l’annulation de la décision
administrative plus récente prise sur son fondement.
Dans le respect des délais de recours.

L’illégalité des règlements est invocable à toute époque.


L’exception tirée de l’illégalité des règlements est perpétuelle.

Situation différente pour les décisions non règlementaires devenues définitives, car le juge
manifeste un souci de sécurité juridique plus importante.
Sauf si la décision non règlementaire se révèle dommageable.
CE 3 décembre 1952 Dubois dont il résulte que lorsqu’un fonctionnaire fait l’objet d’une
révocation illégale mais qui n’est pas contestée dans le délai du recours, et qui est donc
devenue de ce fait définitive.
Dans ce cas l’intéressé peut invoquer 2 ans après son illégalité à l’appui d’un recours en
réparation du préjudice causé par cette décision.

Si le principe est que tous les actes administratifs peuvent faire l’objet d’un recours pour
excès de pouvoir, certains actes administratifs sont néanmoins insusceptibles de faire l’objet
d’un tel recours.
Il y a des actes contre lesquels le REP n’est pas recevable.
Ces actes sont de différents types :

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 La catégorie des actes de gouvernement. S’agissant des actes de gouvernement, c’est
la question de la compétence du juge administratif pour en connaitre qui est en
cause, et non pas la recevabilité du recours.
Le juge administratif se juge incompétent pour connaitre d’un recours contre ces
actes.
On ne peut pas former un tel recours contre un acte de gouvernement.

 Les mesures d’ordre intérieur, le REP n’est pas recevable contre celles-ci :

Elles sont la traduction d’une certaine vie intérieure de l’Administration.


Principe longtemps appliqué selon lequel le REP n’était pas recevable contre ces mesures
d’ordre intérieur.
Ces mesures ont tendance à diminuer, à se réduire, suite à une évolution jurisprudentielle.
Tournant pris en 1995 dans 2 arrêts, CE 17 février 1995 Hardouin, et Marie.
La 1ère affaire concernait un marin, le timonier Hardouin.
Permission de minuit accordée lors d’une escale à l’étranger, il revient en état d’ébriété, 10
jours d’arrêt infligés, il a voulu contester cette décision.
Est-ce une simple mesure d’ordre intérieur contre lequel le REP n’est pas recevable ?
La punition des arrêts constitue une mesure disciplinaire faisant grief, et donc susceptible
d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir.
L’affaire Marie concernait un détenu qui s’était vu infliger une punition de cellule de
8 jours.
Contestation de la décision, le juge dit que cette punition constitue une décision faisant
grief.

SOUS-SECTION 3 : L’ETENDUE DU CONTROLE OPERE PAR LE


JUGE ADMINISTRATIF

Un acte administratif est susceptible de faire l’objet d’un contrôle de légalité d’une intensité
variable.
Si tous les actes administratifs peuvent effectivement faire l’objet d’un recours pour excès
de pouvoir et donc dans le cadre de ce REP d’un contrôle de légalité, il n’a pas le même
niveau d’intensité dans tous les cas.
On a un niveau de contrôle de légalité qui peut être assez faible.
La doctrine parle de contrôle restreint ou minimum.
Puis au dessus le contrôle normal.
Puis enfin le contrôle maximum, le plus poussé.

A chacun de ces niveaux de contrôle correspondent certains moyens de légalité qui ont été
précédemment évoqués.

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§1 : LE CONTROLE MINIMUM OU RESTREINT

Ce contrôle dit minimum a évolué au fil du temps, dont le contenu a évolué au fil du temps.
Tournant jurisprudentiel opéré en 1960.

A) Avant 1960

Avant 1960 dire qu’un acte administratif faisait l’objet d’un contrôle minimum cela signifiait
que le juge administratif se bornait à vérifier la compétence ou l’incompétence de l’auteur
de l’acte.
Il contrôlait aussi le but poursuivi par l’acte administratif, si l’acte était entaché de
détournement de pouvoir.
Il contrôlait aussi la forme de l’acte, et donc essentiellement le vice de forme.
Mais aussi l’erreur de fait, l’erreur de droit, et aussi le vice de procédure.
Donc dans le contrôle minimum il opérait un assez grand nombre de contrôles touchant à la
légalité interne ou externe de l’acte.
Ce qui le caractérisait c’est que le juge ne contrôlait pas la qualification juridique des faits,
cela caractérisait le contrôle minimum.

Nous avons vu que c’est avec l’arrêt Gomel de 1914 que le juge administratif à procédé pour
la 1ère fois au contrôle de la qualification juridique des faits opéré par l’Administration.
Ce contrôle juridique des faits n’était pas systématiquement opéré dans toutes les matières,
selon les domaines qu’il touchait, il pouvait accepter ou refuser de l’opérer.
Lorsqu’il n’opérait pas ce contrôle, on parlait de contrôle minimum.

Exemple d’une de ces matières : en matière d’éloignement des étrangers.


Lorsqu’un étranger faisait l’objet d’une mesure d’expulsion, cette expulsion était en général
motivée par une atteinte à l’ordre public résultant de la présence de ces étrangers sur le
territoire national.
C’est une qualification juridique des faits. La présence de Mr X sur le territoire national et
l’atteinte à l’ordre public qui fonde la décision est une qualification juridique.
Il n’opère aucun contrôle sur cette qualification juridique des faits.
Il vérifiait juste si l’autorité était compétente pour le faire.

B) Depuis 1960

A partir de 1960, le contrôle minimum s’est enrichi, et il s’est précisément enrichi de ce


qu’on appelle le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation.

a) Le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation

30
C’est à partir de 1960 que la jurisprudence du CE fait apparaitre ce qui ressemble à un
nouveau critère de contrôle de la légalité des actes administratifs, c’est celui de l’erreur
manifeste d’appréciation.
C'est-à-dire qu’un acte administratif donné peut être annulé s’il est entaché d’une erreur
manifeste d’appréciation.
L’utilisation de cette nouvelle formule d’erreur manifeste d’appréciation, son apparition se
fait dans un arrêt du CE 2 mars 1960 Jessbert. CE 15 février 1961 Lagrange.

La formule erreur manifeste d’appréciation a eu un grand succès, on la retrouve dans


beaucoup d’autres arrêts importants, CE 26 juillet 1978 Vinolay : c’est la 1ère fois que le juge
1 a appliqué le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation en matière de détermination et
de contrôle des sanctions disciplinaires dans la fonction publique.
CE 27 mai 1990 Kiener : gendarme ayant été révoqué, sanction suprême, révoquée par une
faute personnelle, il avait commis un vol dans un supermarché.
Le juge a estimé que cette sanction est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation,
autrement dit la révocation est trop grave pour un gendarme voleur.

Cette expression en elle-même ne veut pas dire grand-chose.


Cette erreur manifeste d’appréciation sanctionnée par le juge.
Le juge sanctionne une erreur manifeste dans la qualification juridique des faits. Ce que le
juge sanctionne c’est une erreur dans la qualification juridique des faits opérée par
l’Administration.
Depuis 1960 le contrôle de la qualification juridique des faits, fait l’objet d’un contrôle
minimum dans certains cas, dans certaines matières.
Dans des domaines ou précédemment le juge considérait qu’il n’avait à opérer aucun
contrôle de la qualification juridique des faits, il accepte d’opérer un contrôle qui se traduit
par cette expression.

b) Les matières auxquelles s’applique le contrôle de l’erreur manifeste

En matière d’interdiction des publications étrangères.


CE 2 novembre 1973 Société librairie François Maspero : dans cette affaire une publication
publiée par cette librairie a été qualifiée par le ministère de l’intérieur de publication
étrangère, et surtout il a interdit cette publication.
Cette interdiction de publication visant cette publication étrangère tait motivée par des
considérations d’ordre public, le ministère a estimé au regard du contenu de cette
publication qu’elle était de nature à porter atteinte à l’ordre public.
Traditionnellement sur cette qualification juridique des faits, le juge administratif n’opérait
aucun contrôle.
A partir de 1973 le juge va accepter d’exercer un contrôle minimum sur cette qualification
juridique des faits.
Il accepte de censurer, d’annuler une décision d’interdiction dont il estimerait qu’elle est
entachée d’une erreur manifeste d’appréciation touchant à la qualification juridique des
faits opérée par l’Administration.

31
Mesures de police relatives à l’interdiction des publications dangereuses pour la jeunesse,
une police spéciale, détenue par le ministre de l’intérieur.
CE 29 juillet 1994 Sidos : lorsque le ministre dit que c’est dangereux pour la jeunesse, c’est
une qualification juridique, que le juge accepte maintenant de contrôler.

Contrôle de l’erreur manifeste en matière de décisions relatives à la notation des


fonctionnaires.
CE 26 octobre 1979 Leca.

Les sanctions dans la fonction publique, leur détermination, contrôle de l’erreur manifeste
de l’appréciation.
CE 5 mai 1990 Kiener.

La matière des nominations au tour extérieur, moyen utilisé pour caser des amis.

Décision de retrait de passeport.


CE Fouéré.

Les mesures d’éloignement concernant les étrangers, tel que reconduites à la frontière ou
expulsions.
CE 3 février 1975 Pardov.

§2 : LE CONTROLE NORMAL

A) Avant 1960

Avant 1960 on parlait déjà de contrôle normal, lorsque le juge procédait au contrôle de la
qualification juridique des faits.
Ce n’était pas le cas dans tous les domaines, domaines dans lesquels il n’opérait.

B) Après 1960

a) Le contrôle normal de l’erreur manifeste d’appréciation

Le juge ne se contente pas de censurer une erreur.


Il y a contrôle normal lorsque le juge ne se contente pas de contrôler une erreur manifeste
d’appréciation dans la qualification juridique des faits, mais censure une erreur (tout court),
qu’on serait tenté de qualifier d’une erreur normale, banale, simple, donc tout le contraire
d’une erreur manifeste ou grossière.

Le contrôle normal est aujourd’hui un contrôle plus poussé de la qualification juridique des
faits opéré par l’Administration.

b) Les matières auxquelles s’applique le contrôle normal

32
Appliqué en matière de droit des étrangers communautaires.
CE 24 octobre 1990 Ragusi.

Le contrôle normal a également été appliqué à la matière déjà évoquée à l’instant, celle des
publications étrangères, et plus précisément de leur interdiction.
CE 1973 Maspero : dans cet arrêt le juge n’avait opéré qu’un contrôle minimum de la
qualification juridique des faits.
Mais quelques années plus tard, dans CE 1997 Ekin concernant une interdiction de
publication étrangère, le juge est entré dans une logique de contrôle normal, il a estimé que
la qualification juridique des faits opérée par le ministère de l’intérieur était entaché d’une
erreur (tout court).
En l’espèce publication étrangère du Pays Basque de propagande de l’action de l’ETA, d’où
l’interdiction, car menace pour l’ordre public.
Plusieurs décisions dans cette affaire.

Les décisions qui refusent à un candidat à un concours de la fonction publique l’autorisation


de participer aux épreuves : contrôle normal depuis CE 18 mars 1983 Mulsant.

§3 : LE CONTROLE MAXIMUM

Contrôle exercé par le juge administratif sur les déclarations d’utilité publique.
Expression aussi de contrôle normal approfondi selon Chapus.
Il se traduit par la mise en œuvre d’une appréciation de la qualification juridique des faits
plus exigeante que dans le cadre d’un contrôle dit normal.
Ce degré supérieur de contrôle porte encore sur la qualification juridique des faits.
Dans le cadre d’un tel contrôle le juge ne s’interdit pas de contrôler tous les autres points de
légalité interne ou externe.
Mais sur le terrain de la qualification juridique des faits il pousse son contrôle plus loin que le
contrôle normal.

A) Le contrôle opéré par le juge administratif sur les déclarations d’utilité


publique (DUP)

CE 28 mai 1971 Arrêt ville nouvelle est : affaire concernant la réalisation d’une ville nouvelle,
dont le nom de code fut longtemps ville nouvelle est, située à l’est de Lille.
Il a fallu exproprier des propriétés privées, nombreuses, pour réaliser ce projet.
Ils ont cherché à contester la procédure d’expropriation, qui est longue et complexe, et l’un
de ses temps forts est la déclaration d’utilité publique qui déclare que le projet X ou Y est
d’utilité publique.

33
Les expropriés ont donc contesté cette déclaration d’utilité publique, car c’est un acte
contestable.
Juge : « une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes
à la propriété privée, le coût financier, et éventuellement les inconvénients d’ordre social ou
l’atteinte à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à
l’intérêt qu’elle présente ».
Ce raisonnement suivi par le CE dans son arrêt ville nouvelle est dégage les concours de ce
que l’on appelle la théorie du bilan coûts/avantages, qui signifie que lorsqu’il a à se
prononcer, à contrôler l’utilité publique d’un projet, il doit mettre en avant les coûts et les
avantages du projet.
Au final l’arrêt va reconnaitre la légalité des expropriations entreprises pour mener à bien ce
projet.

Bilan coûts/avantages opéré sur la qualification juridique des faits, car dire qu’un projet est
d’utilité publique c’est de la qualification juridique des faits, un contrôle qui apparait comme
particulièrement poussé.

Cette théorie connait depuis 1971 connait de très régulières applications :


CE 20 octobre 1972 Société civile immobilière Sainte Marie de l’assomption
Une DUP d’un terrain qui appartenait à un hôpital psychiatrique privé pour réaliser une
bretelle d’autoroute.
Le juge fait un bilan coûts/avantage, et dit que si le projet est réalisé les conditions
d’hospitalisation seront gravement troublées par cette bretelle autoroutière.
De plus privation presque totale d’espaces verts pour cet hôpital, qui était de plus le seul à
répondre des demandes dans ce département.
Là le juge considère que le bilan est négatif en ce qui concerne l’utilité publique du projet,
DUP annulée.

CE 27 juillet 1979 Demoiselle Draxel Dathgren : était poursuivi par l’Administration


l’expropriation d’un hôtel particulier en vue d’y installer à titre provisoire l’Ecole Nationale
des Ponts et Chaussées.
Contestation de la propriétaire, bilan cout avantage, le juge considère que le cout
d’acquisition plus cout d’aménagement de l’immeuble qui au final ne répondrait pas aux
besoins de l’école, cela conduit le juge a annuler la DUP qui est illégale.

CE 25 novembre 1988 Epoux Perez : l’expropriation aurait eu pour effet de priver les
propriétaires d’une villa de la quasi-totalité de leur jardin, alors que la commune qui
expropriait ce terrain en vue de réaliser un espace vert disposait de nombreux espaces verts.
Bilan coûts/avantages négatif, l’atteinte à la propriété est jugé excessif au regard des intérêts
publics qui en résulteraient, bilan négatif, DUP annulée.

Le juge administratif apprécie quasiment l’opportunité du projet qui est déclaré d’utilité
publique.
Le juge se substitue quasiment à l’Administration dans l’appréciation qui est faite de l’utilité
publique du projet, on en a le sentiment.

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Le juge entre dans le détail de l’opération enclenchée, et jugement précis sur l’utilité
publique ou non du projet.
Quasi substitution du juge à l’appréciation opérée par l’Administration, qui témoigne d’un
degré particulier de contrôle sur la qualification juridique des faits.

B) Le contrôle de certaines mesures de police

CE 1933 Benjamin : affaire jugée en 1933 qui concernait une réunion publique qui devait se
tenir dans la ville de Nevers, conférence publique que devait tenir René Benjamin écrivain.
Les instituteurs laïcs locaux ont adressés des messages clairs aux autorités de police (maire,
préfet) signifiant que si Benjamin l’infâme venait à Nevers il y aurait des manifestations.
Cela en raison de ses positionnements politiques, proche de l’action française, extrême
droite, les instituteurs se plaignaient de ce qu’il avait insulté les instituteurs.
Interdiction de la réunion.
Contestation de la décision interdisant la réunion de se tenir.
Le CE lui a donné raison en estimant que la décision était entachée d’illégalité.
Elle est entachée d’illégalité car pour le juge l’autorité administrative a opérée une mauvaise
qualification juridique des faits, erreur dans cette qualification.
Le juge administratif n’hésite pas à rentrer dans un certain niveau de détail.
Il explique que l’autorité administrative aurait pu assurer le maintien de l’ordre public
autrement qu’en annulant la réunion, compte tenu des menaces qui pesaient sur l’ordre
public.
Contrôle maximum opéré par le juge.
Qualification juridique des faits qui consiste à dire que la réunion de Benjamin menace
l’ordre public à un niveau tel qu’il faut l’annuler.
Le juge dit que l’Administration s’est trompée, certes les instituteurs ont menacé de
perturber la réunion, mais l’autorité de police n’apporte pas la preuve qu’elle n’aurait pas pu
agir autrement que d’annuler la réunion pour protéger l’ordre public.
Don on peut penser qu’il aurait pu assurer la sécurité de la réunion sans l’annuler.

SOUS-SECTION 4 : LES DEMANDES ACCESSOIRES POUR UN


RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR

Réforme du référé administratif depuis la loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les
juridictions administratives a pris le nom de référé suspension.
Entrée en vigueur à partir du 30 juin 2001.

§1 : LE SURSIS A L’EXECUTION

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En matière de REP le principe est celui de l’effet non suspensif du REP, car les actes et
décisions administratifs ont un caractère exécutoire, ce caractère étant qualifié par le CE de
« règle fondamentale du droit public ».
On la trouve dans l’arrêt du CE 2 juillet 1982 Huglo.

L’intérêt de la procédure du sursis à l’exécution, c’est que ce sursis permettait de faire échec
au caractère exécutoire des décisions administratives en obtenant le sursis à exécution, que
l’on appelle aujourd’hui la suspension de l’exécution de la décision.

Concernant ce que l’on appelait le sursis à exécution avant 2001 :

A) Les conditions de recevabilité des demandes de sursis

a) Le caractère accessoire des demandes de sursis

Cela signifie que la recevabilité d’une demande de sursis était subordonnée à l’exercice
effectif d’un recours pour excès de pouvoir.
Sans en même temps demander l’annulation au fond de cette décision.
Donc recevabilité de la demande de sursis s’il y avait recevabilité du recours en annulation.

b) L’irrecevabilité de la demande de sursis dirigée contre une décision de rejet

Ce principe a été posé par le juge, le CE, dans un arrêt du 23 janvier 1970 Amoros.
Dans cet arrêt de 1970 le juge nous expliquait que les juridictions administratives ne peuvent
en principe ordonner le sursis à l’exécution d’une décision qui leur est déférée que si cette
décision est exécutoire.
En revanche elles n’ont le pouvoir d’ordonner qu’il sera sursis à l’exécution d’une décision de
rejet.
Sauf dans le cas ou le maintien de cette décision entrainerait le maintien de cette décision
entrainerait une modification dans une situation de droit ou de fait telle qu’elle existait
antérieurement.
N’étaient pas recevables les demandes de sursis formées contre les décisions administratives
de rejet, sauf les décisions finales.

B) Les conditions de fond d’octroi du sursis

Ces conditions de fond étaient au nombre de 2.


La 1ère est que le risque de conséquence en cas d’exécution de la décision devait être
difficilement réparable.
Cette condition a été durcie par le juge, car il fallait comprendre au terme de la
jurisprudence conséquence « difficilement réversible dans les faits ».
On doit donc être en présence d’une difficulté de faire disparaitre en faits les conséquences
de la décision.
CE 12 novembre 1938 Chambre syndicale des constructeurs de moteurs d’avions.

36
La 2ème condition pour que la demande de sursis aboutisse, est qu’il fallait invoquer devant le
juge un moyen sérieux.
Cela signifie que le requérant devait invoquer devant le juge un moyen de légalité, ou des
moyens de légalité de nature à justifier l’annulation de la décision pour laquelle le sursis
était demandé.
Là aussi le juge s’est montré particulièrement exigeant, concernant cette condition de
moyens sérieux.
Le ou les moyens invoqués devaient être considérés sinon comme fondés, du moins très
probablement fondés.
Ce qui rendait très difficile l’obtention du sursis.
Il fallait littéralement convaincre le juge dès le stade de la demande de sursis que la décision
dont on demandait simplement le sursis à exécution, que cette décision était illégale.
En pratique, lorsque le juge accordait le sursis à exécution, et que plusieurs mois ou années
après il examinait au fond la légalité de la décision, en général il annulait effectivement la
décision, car elle était illégale.
A l’inverse lorsqu’il refusait le sursis et qu’il examinait au fond, il considérait que la décision
était parfaitement légale, raison pour laquelle on avait refusé le sursis à exécution.
Au niveau de la demande de sursis à exécution, il y avait un véritable pré jugement au fond,
très rares les cas ou il y avait une divergence entre la décision de sursis et le jugement au
fond.

§2 : LES REFERES D’URGENCE

L521-1 du code de justice administrative concerne le référé suspension

A) Le référé suspension de l’article L521-1

Il remplace le défunt sursis à exécution.

L521-1 : « Quand une décision administrative même de rejet fait l’objet d’une requête en
annulation, ou en réformation, le juge des référés saisi d’une demande en ce sens peut
ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets lorsque
l’urgence le justifie, et qu’il ait fait état d’un moyen propre à créer en l’état de l’instruction
un doute sérieux quand à la légalité de la décision ».

De ces termes résultent des changements qui sont des changements importants par rapport
au régime antérieur du sursis à l’exécution.

Par les termes décision administrative même de rejet, se trouve condamnée la jurisprudence
précédemment citée Amoros de 1970, dont il résultait que les demandes de sursis n’étaient
pas recevables contre des décisions de rejet.

37
Ce qui change aussi ce sont les conditions pour obtenir la suspension de la décision
administrative litigieuse.
Certes deux conditions sont toujours exigées, mais ce ne sont plus les mêmes que
précédemment.
Dans le cadre du sursis c’était un risque de conséquence non réparable, plus un moyen
sérieux de nature à justifier l’annulation.
Désormais dans le cadre du référé suspension il faut répondre à la condition d’urgence
(référés d’urgence), et puis il faut invoquer un moyen propre à créer un doute sérieux quand
à la légalité de la décision.

Concernant la condition d’urgence on peut dire qu’elle n’était sans doute pas absente dans
le cas du sursis à l’exécution, dans la mesure où le juge avait tendance à considérer qu’il était
urgent d’accorder le sursis lorsque des conséquences difficilement réparables pouvaient être
mises en évidence.
Dans le cadre de l’article L521-1, la condition d’urgence acquiert une autonomie qu’elle
n’avait pas dans le cadre du sursis à exécution.
Autonomie rapidement mise en évidence par la jurisprudence.

Ordonnance du CE 19 janvier 2001 (ordonnance de référé) confédération des radios libres.


Dans cette ordonnance le juge écrit : « la condition d’urgence doit être regardée comme
remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment
grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant, ou aux intérêts qu’il
entend défendre. Il en va ainsi alors même que cette décision n’aurait un objet ou des
répercussions que purement financiers et qu’en cas d’annulation ces effets pourraient être
effacés par une réparation pécuniaire ».

La notion d’urgence s’apprécie de manière très concrète, l’urgence s’apprécie au regard des
intérêts qui sont en jeu, qu’il s’agisse d’intérêts publics ou d’intérêts privés d’un requérant.

2ème condition touchant à la légalité de la condition dont la suspension est demandée.


Changement important aussi par rapport au sursis à l’exécution.
Il fallait que ce requérant apporte quasiment au juge la preuve de l’illégalité de la décision
dont il demandait la suspension.
Or aujourd’hui l’article L521-1 dit qu’il faut simplement créer en l’état de l’instruction un
doute sérieux quand à la légalité de la décision.
Certes c’est toujours difficile, mais moins qu’auparavant.

B) Article L521-2 du code de justice administrative

Il définit les contours du référé liberté.


Cet article est une variante du référé suspension qui à vocation à être utilisé lorsqu’il est
porté à une atteinte grave à une liberté fondamentale ou à la propriété privée par
l’Administration.

38
Dans ce cas là il est donc également possible de demander au juge de suspendre la décision
qui porte atteinte gravement à une liberté fondamentale ou à une liberté privée.
Là aussi il faut la condition d’urgence, une atteinte grave à une liberté fondamentale ou à la
propriété privée, et vu cela le juge doit se prononcer dans les 48h de sa saisie.
Alors que dans le référé suspension pas de délai mais il va vite tout de même.

CHAPITRE 2 : La police administrative

SECTION 1 : LA DISTINCTION ENTRE POLICE


ADMINISTRATIVE ET POLICE JUDICIAIRE

§1 : UNE DISTINCTION NECESSAIRE MAIS DELICATE

Distinction car juridictions administratives compétentes pour juger des affaires concernant la
police administrative.

Le contentieux de la police judiciaire relève de la compétence des tribunaux judiciaires.


Ajouter à cela une complication.
Arrêt de la cour de cassation de 1956 Docteur Giry : médecin réquisitionné pour intervenir et
constater le décès de deux personnes retrouvées mortes dans un bar.
C’est dans le cadre de cette intervention qu’il a été victime d’un dommage causé par cette
explosion.
La réparation de ce dommage relevait de la compétence des juridictions judiciaires, car ce
médecin réquisitionné a été amené à collaborer à une opération de police judiciaire.
Le juge judiciaire qui se penche sur la demande en réparation, la cour de cassation en
l’occurrence précise que si le juge judiciaire est bien compétent, il doit faire application des
principes de la puissance publique tels qu’il sont dégagés par le juge administratif.
Parfois le juge judiciaire applique le droit administratif.

Si cette distinction est importante c’est aussi que la police judiciaire est une activité étatique,
qui relève de la compétence de l’Etat.
Et donc en cas de contentieux la personne responsable c’est l’Etat.

39
Ce sera donc à l’Etat de réparer les conséquences dommageables d’une opération de police
judiciaire.

En revanche la police administrative est une police exercée soit par l’Etat, soit par une
autorité étatique, soit par une autorité départementale, soit par des autorités communales.
De ce fait la responsabilité des dommages liés à son exercice incombe selon les cas à des
personnes différentes.
Il faut savoir quelle autorité a pris la décision en cause dans l’affaire.

A) Le critère de la distinction police administrative / police judiciaire

a) Le critère du but de la décision

Ce critère du but poursuivi par l’autorité de police résulte de la combinaison de deux arrêts
de 1951.
CE 11 mai 1951 Consorts Beaud, et TDC 7 juin 1951 Dame Noualek.

De ces deux décisions il résulte qu’il y a police judiciaire si la décision ou les décisions, ou si
les opérations à qualifier sont en relation avec une infraction pénale déterminée.
C’était le cas dans l’affaire Beaud, présence d’une personne qui avait été mortellement
blessée au cours d’une opération accomplie en vue de rechercher et d’appréhender des
malfaiteurs.
En revanche il y a police administrative si la décision en cause ou l’opération en cause n’est
pas en relation avec une infraction pénale déterminée, ce qui était le cas dans l’affaire
Noualek, puisque présence d’une personne qui se trouvait à sa fenêtre qui s’est trouvée
blessée par un coup de feu tiré dans le cadre d’une opération de maintien de l’ordre public.
Considéré comme une opération de police administrative.

C’est à partir de ces deux affaires dont les solutions ont été reprises régulièrement qu’une
distinction a été établie au sein de la doctrine qui souligne le caractère plutôt préventif de la
police administrative, que l’on oppose au caractère plutôt répressif en matière de police
judiciaire.
Notamment en ce sens qu’elle a pour objet de prévenir des atteintes qui pourraient entraver
à l’ordre public.

b) Applications concrètes du critère conduisant à la qualification de police judiciaire

TDC 27 juin 1955 Dame Barbier : il s’agissait d’une opération de police ayant pour but de
prendre en flagrant délit des trafiquants d’or, avec la mise en place d’une souricière, mais
échec de cette opération, et donc opération qualifiée par le TDC d’opération de police
judiciaire, même si en l’espèce l’infraction n’a pas pu être constatée.

40
TDC 15 juillet 1968 Consorts Tayeb : un passant avait attiré l’attention d’un policier sur un
individu qui lui paraissait suspect, qu’il allait commettre en délit.
Cet individu suspect est interpelé par le policier, prend la fuite devant son policier, qui fait
usage de son arme de service, le fuyard est mortellement blessé.
Le TDC dit que c’est un acte de police judiciaire, car compte tenu de l’éventualité d’une
infraction qui suffit au TDC pour dire qu’il y a une relation avec une infraction pénale.

CE 19 mai 1982 Volbrecht : personne poursuivie par des gendarmes, qui l’ayant vu prendre
la fuite l’ont prise pour un délinquant, usage de l’arme de service, le CE dit que la victime est
victime d’une opération de police judiciaire.

CE 18 mai 1981 Consorts Ferran : véhicule envoyé à la fourrière, le policier ayant cru que la
véhicule était en stationnement irrégulier alors que ce véhicule se trouvait en stationnement
régulier.
Le juge considère nonobstant ces considérations qu’il y a opération de police judiciaire, alors
même qu’aucune infraction n’a été commise, et le simple fait que le policier a pensé au
moment de l’enlèvement qu’une infraction a été commise, suffit à qualifier cela de police
judiciaire.

c) Applications du critère conduisant à la qualification de police administrative

TDC 22 avril 1985 Chadeyras : intervention de la police à la suite d’un différent entre voisin,
rétablir le calme, le juge qualifie cette opération d’opération de police administrative.

TDC 26 mars 1990 Devossel : personne accidentellement blessée par un gardien de la paix
opérant une ronde de surveillance, sans qu’elle ait commis d’infraction.

TDC 19 octobre 1998 Madame Bolle veuve Laroche : oncle de l’enfant, le sieur Laroche,
remise en liberté du père de l’enfant assassiné qui était convaincu de la culpabilité de
Laroche et qui l’a tué d’un coup de fusil.
La protection, en l’occurrence mal assurée, d’une personne, serait-elle mise en examen,
relève de la police administrative.
Le juge administratif est compétent pour juger de l’affaire, et juger des réparations à verser
pour compenser cette mauvaise exécution.

Selon les circonstances on peut avoir des cumuls et des changements de nature des
opérations de police.

B) Cumuls et changements de nature des opérations de police

a) Cumul d’opérations de police administrative et de police judiciaire

41
TDC 29 octobre 1990 Demoiselle Morvan : double mission, effectuer des rondes de nuit dans
le cadre d’une opération de surveillance générale, et de surcroit interception d’individus à
l’origine d’une rixe, lesquels s’étaient enfuis à bord d’un véhicule.
Au cours de l’interpellation de ces individus, de l’arrestation un des individus à subit des
dommages, et donc le juge a estimé que cette personne interpelée a subit des opérations de
police judiciaire, mais coexistence entre police administrative et police judiciaire.

b) Glissements de la police judiciaire à la police administrative

CE 18 mai 1981 Consorts Ferran : véhicule mis en fourrière, le juge souligne que cette mise
en fourrière s’analyse en une opération de police judiciaire jusqu’à la mise en fourrière du
véhicule.
Après le dépôt du véhicule en fourrière il s’agit d’une opération de police administrative.
Opération de police judiciaire durant le temps que l’on emmène le véhicule à la fourrière.

CE 5 avril 1991 Société européenne de location et de services : un cas de dommages causés à


un véhicule, dont le propriétaire doit être considéré comme une opération de police
administrative.
Compétence pour attribuer des dommages et intérêts à la victime.

c) Le glissement d’une opération de police administrative à une opération de police


judiciaire

TDC 5 décembre 1977 Demoiselle Motsch : sur la croisette de Cannes les forces de police
procèdent à une opération de contrôle d’identité qui s’analyse aux yeux du juge comme une
opération de police administrative.
Distinction peu évidente.
Une voiture force le barrage de police, 1ère infraction, à laquelle s’ajoute diverses infractions
car elle est prise en chasse. Elle tente même d’écraser un des policiers qui tentait de la
dépasser, la police finit par faire usage de ses armes, et c’est la passagère mademoiselle
Motsch qui est blessée.
Elle a été victime d’une opération de police judiciaire selon le juge.
Ce qui n’était qu’une banale opération de police administrative de contrôle des papiers s’est
transformé en opération de police judiciaire dès la commission d’une infraction.

TDC 12 juin 1978 Société le profil : la caissière d’une société sort d’une banque sous escorte
policière avec de l’argent.
En dépit de la présence de cette escorte elle est attaquée, et la mallette volée sans que les
agents de l’escorte puissent intervenir.
L’opération de protection de cette caissière s’analyse en une opération de police
administrative qui a pris fin au moment de l’attaque.
Donc l’inaction de ces agents de police relève de la police judiciaire, a partir du moment où
l’infraction est commise.
Dont l’inaction dommageable des agents de police, dommageable pour la société, relève de
la police judiciaire.
La société qui demandait réparation à l’Etat invoquait une double faute, une faute tout

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d’abord dans l’organisation de la protection de la caissière mal organisée, et une 2 ème faute
résultant de l’inaction de l’escorte policière.
Question de savoir si cette société allait devoir intenter une double action.
Une devant le juge administratif, l’autre devant le juge judiciaire, car deux opérations de
nature différente.
Le TDC estime que le dommage subit par la société Le Profil est pour l’essentiel le résultat de
la mauvaise organisation de la protection, et donc le juge conclue à la compétence du juge
administratif.

§2 : L’OBJET DE LA POLICE ADMINISTRATIVE

La police administrative a pour objet le maintien de l’ordre public.


Mais que faut-il entendre par ordre public ?
On peut se tourner vers la doctrine, car selon Maurice Hauriou l’ordre public au sens de la
police est l’ordre matériel et extérieur considéré comme un état de fait opposé au désordre.

A) Les composantes légales de la notion d’ordre public

Elles apparaissent plus précisément dans l’article L2212-2 du code général des collectivités
territoriales.
Article ancien du code des communes apparu à la fin du 19ème siècle.
Cet article défini les contours de la police municipale.
La maire est une autorité de police administrative très importante, en principe la seule.
L’article dit que « la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sureté, la
sécurité, et la salubrité publique ».

Les composantes légales de l’ordre public sont d’une part la sécurité publique, la tranquillité
publique, salubrité publique.
Tryptique qui ressort de cet article.

a) La sécurité publique

On parle de sureté et de sécurité, deux formules proches l’une de l’autre, donc redondance.
Pour assurer la sécurité publique, les autorités administratives détenant le pouvoir de police
doivent prendre des mesures, des décisions, ou mener des actions de nature à prévenir le
risque d’accident, à prévenir les dommages aux personnes ou aux biens.
L’un des grands domaines ou s’exerce le pouvoir de police tendant à assurer la sécurité
publique, c’est celui de la circulation routière.
Les autorités de police détenant ce genre de prérogatives peuvent prendre des mesures
pour assurer la sécurité publique, instaurer une limitation de vitesse, mettre un sens
interdit…

43
Si dans une commune un étang se révèle dangereux pour la baignade, le maire pourra
prendre un arrêté de police interdisant la baignade.
But de respect de la salubrité publique.
Pareil pour une côte ou une falaise.

b) La tranquillité publique

Il s’agit pour l’autorité de police de lutter contre les risques de désordre comme ceux
résultant de tapages nocturnes, se déroulant sur la voie publique.
Il n’est pas rare de voir l’autorité de police intervenir par voie d’arrêté pour règlementer
l’usage des tondeuses à gazon.
Aussi arrêtés municipaux concernant la sortie des poubelles.
Aussi au titre de la tranquillité évoquer les arrêtés anti mendicité, dont l’objectif des de faire
en sorte que leur tranquillité ne soit pas troublée par l’exercice de la mendicité.

c) La salubrité publique

Les autorités de police doivent veiller à la protection de la salubrité publique, se qui se


traduira par des mesures tendant à prévenir les risques de maladie.
Veille à la salubrité des eaux distribuées, de la salubrité des denrées alimentaires vendues
sur les marchés, prévention des épidémies et des épizooties.

B) Les composantes jurisprudentielles de l’ordre public

Au fil de sa jurisprudence la juge administratif a enrichi cette trilogie issue du code des
collectivités territoriales, il y a ajouté des composantes.

a) La moralité publique

Maurice Hauriou, « l’ordre public au sens de la police est l’ordre matériel et extérieur
considéré comme un état de fait opposé au désordre ».
Il ajoute « la police n’essaye point d’atteindre les causes profondes du mal social, elle se
contente de rétablir l’ordre matériel (…). En d’autres termes elle ne poursuit pas l’ordre
moral dans les idées et dans les sentiments, elle ne pourchasse pas les désordres moraux,
elle est pour cela radicalement incompétente ; si elle l’essayait, elle verserait
immédiatement dans l’inquisition et dans l’oppression des consciences (…) la police
n’intervient que pour empêcher de passer à l’exécution des actes dangereux ou nuisibles ».
Dans ce passage Hauriou nous dit que la police administrative ne poursuit pas l’ordre moral
dans les idées et dans les sentiments, et donc on pourrait penser que la protection de la
moralité ne serait pas une compétence de l’ordre public, protégée par les autorités de
police.
Or la jurisprudence dit que c’est le cas.
Mais ce n’est pas une contradiction avec la jurisprudence.
Hauriou dit qu’elle peut intervenir, agir, dans l’hypothèse ou le désordre moral aurait des

44
conséquences matérielles et extérieures, sans entrer dans les consciences individuelles, dans
le secret des consciences.
On ne peut pas se livrer à ces exercices sur la voie publique, on ne peut délirer que chez soit
sans atteinte à l’ordre public.

La moralité publique peut être considérée comme une 4ème composante de l’ordre public.
Le souci du juge de protéger la moralité publique est apparu il y a bien longtemps.

CE 7 novembre 1924 Club indépendant sportif du Challonet : dans cette affaire l’autorité de
police, en l’occurrence municipale, le maire, avait interdit un combat de boxe devant se
dérouler sur le territoire de la commune, organisé par cette association, aux motifs que ce
match de boxe serait contraire à l’hygiène morale.

CE 13 février 1953 De Ternay : dans cette affaire de Ternay, une autorité de police
administrative, un maire avait refusé d’autoriser un spectacle forain dans l’intérêt
notamment de la moralité publique.

CE 30 septembre 1960 Jeauffray : arrêt concernant la fermeture d’une maison meublée.

Le CE a eu l’occasion de mettre en évidence que l’autorité de police à le pouvoir d’interdire


les dénominations données à une voie publique qui seraient contraires à l’ordre publique et
aux bonnes mœurs.

CE 19 juin 1974 Broutin.

Il convient d’ajouter le pouvoir accordé aux maires par le juge administratif d’interdire dans
leur commune la projection d’un film.
Ce pouvoir illustrant bien la possibilité de sauvegarder la moralité publique par l’usage du
pouvoir de police administrative.
Un film avant d’être projeté est contrôlé, visionné par le ministère de la culture, qui délivre
un visa d’exploitation, qui traduit l’exercice d’une police spéciale, c’est la police spéciale du
cinéma.
Ce film bien qu’ayant obtenu le visa ministériel, peut faire l’objet d’une interdiction de
projection dans la commune par le maire de la commune.
Le maire peut interdire la projection du film à raison du caractère immoral du film, et de
circonstances locales particulières.

CE 18 décembre 1959 Société Les films Lutécia.


CE 14 octobre 1960 Société les films marceau.

b) Le respect de la dignité de la personne humaine

Le conseil d’état dans un arrêt de 1995 a précisé que le respect de la dignité humaine est
une des composantes de l’ordre public.

45
Et donc l’autorité de police municipale peut, même en l’absence de circonstances locales
particulières, interdire une attraction qui porte atteinte au respect de la dignité de la
personne humaine.

CE 27 octobre 1995 Commune de Morsant sur Orges : activité de lancer de nain, dont le
commissaire du gouvernement explique que le lancer de nain aurait été inventé en
Australie.
L’arrêté municipal a été déclaré légal par le juge.
En dehors du lancer de nain la logique mise en œuvre dans cet arrêt est susceptible à être
mise en œuvre dans d’autres solutions.
Comme pour la prostitution par exemple.
Un maire peut prendre un arrêté municipal en ce sens.

c) La protection l’esthétique ?

La protection de l’esthétique ne peut plus être considérée comme une composante de


l’ordre public, au sens de la police administrative.
Mais dans le passé la jurisprudence du CE s’est fait l’écho d’une velléité d’extension de
l’ordre public à la sauvegarde de l’esthétique.

CE 3 juin 1938 Société des usines Renault : le CE avait conclu à la légalité d’une
règlementation municipale des enseignes publicitaires dans l’intérêt de l’esthétique.

CE 14 mars 1941 Compagnie nouvelle des chalets de nécessité : le CE concluait à la légalité


d’une règlementation municipale qui réservait l’affichage aux concessionnaires de l’affichage
municipal pour raison d’esthétique.
A travers cette jurisprudence on pouvait avoir le sentiment que ke juge faisait de la
protection de l’esthétique un composante de l’ordre public pouvant être protégé par
l’autorité administrative.

Mais la jurisprudence a abandonné cette orientation.

CE 18 février 1972 Chambre syndicale des entreprises artisanales du bâtiment de la haute


Garonne : le CE concluait à l’illégalité d’une règlementation municipale déterminant les
types de monuments funéraires acceptés dans le cimetière de la commune pour des
considérations esthétiques.

CE 9 juillet 1975 Commune de Janvry : un arrêté municipal est annulé, qui prononçait
l’enlèvement d’un dépôt de vieux véhicules car il n’y avait aucun risque pour la sécurité, la
tranquillité ou la salubrité publique.
Le CE se contente de citer la trilogie issu du code des communes.

SECTION 2 : LES AUTORITES DE POLICE

46
§1 : LES AUTORITES DE POLICE GENERALE

A) Le 1er ministre

Il à la pouvoir de prendre des règlements de police applicables sur l’ensemble du territoire,


étant précisé que l’origine de ce pouvoir se trouve dans l’arrêt Labonne.

a) La jurisprudence Labonne

CE 8 août 1919 Labonne : recours d’un automobiliste contre la décision de retrait de son
permis de conduire, pris en application d’un décret de 1889 édictant le 1 er code de la route.
A l’occasion de cela le juge dit que « il appartient au chef de l’Etat, en dehors de toute
délégation législative, et en vertu de ses pouvoirs propres de déterminer les mesures de
police applicables dans l’ensemble du territoire ».
Il reconnaissait l’existence d’un pouvoir règlementaire autonome au profit du président de la
république, et plus précisément la reconnaissance d’un pouvoir règlementaire de police
dans les mains du président de la république.
Cela a changé sous la 4ème république, ce pouvoir est passé dans les mains du président du
conseil, actuel 1er ministre.
CE 13 mai 1960 restaurant Nicolas : relatif à la contestation d’un décret du président du
conseil.

b) La confirmation de la jurisprudence Labonne

CE 2 mai 1973 Association culturelle des israélites nord africains de Paris : décret
règlementant l’abattage rituel des animaux dans l’intérêt de la salubrité publique.
LE 1er ministre dispose du pouvoir de prendre un tel décret dont la légalité est mise en
évidence.

CE 22 décembre 1978 Union des chambres syndicales d’affichage : décret qui règlementait la
publicité et les enseignes visibles des voies publiques, et ce dans l’intérêt de la sécurité
publique.

CE 22 janvier 1982 Association auto-défense : contestation de la légalité du décret imposant


le port de la ceinture de sécurité.

B) Les préfets

Seuls détenteur du pouvoir de police dans les départements avant 1982.

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Depuis 1982 les présidents de conseil généraux peuvent aussi intervenir en matière de
police.
Les préfets demeurent tout de même la principale autorité de police dans le département,
car la compétence du président du conseil général reste limitée, car il ne dispose que des
pouvoirs de police afférant à la gestion du domaine départemental, en particulier en ce qui
concerne la circulation sur ce domaine départemental, routes départementales hors
agglomération.

a) Les pouvoirs ordinaires du préfet

Les textes en vigueur prévoient que le préfet est l’autorité de police en vigueur dans le
département.
Il lui appartient de mettre ne œuvre les opérations de secours en cas de catastrophe
intervenant sur le territoire du département, conséquence du pouvoir de police du préfet.

Les préfets sont également chargés de prendre les mesures nécessaires au maintien de la
sécurité de la sécurité publique sur les routes nationales hors agglomération.
Il est seul compétent pour prendre au nom de l’Etat toutes les mesures de police dans le but
d’assurer la sécurité.

Assurer un des trois critères de la trilogie, ou encore la moralité publique, ou la protection


de la dignité de la personne humaine, il veille au respect de toutes les composantes de
l’ordre public.

Si le maire d’une commune n’exerce pas correctement, c’est le préfet qui pourra se
substituer au maire et prendre les mesures de police nécessaires.

Ce pouvoir de substitution est rarement mis en œuvre car l’autorité municipale utilise ce
pouvoir comme il faut, ils l’exercent plutôt trop que trop peu.
LE risque est le trop plein.
Donc ce pouvoir de substitution est rarement mis en œuvre.

Il existe aussi vis-à-vis du président du conseil général, le préfet peut également le mettre en
demeure d’exercer son pouvoir faute de quoi il prend les mesures à sa place.

b) Les pouvoirs particuliers du préfet dans les communes dites à police d’Etat

Les communes de plus de 20 000 habitants, les communes chefs lieux de département,
communes ou ensemble de communes dont le nombre d’habitants dépasse 20 000, et aussi
celles qui se font remarquer par les caractéristiques de la délinquance, susceptibles d’entrer
dans cette catégorie de communes à police d’état.

Dans ces communes certains des pouvoirs de police du maire sont transférés au préfet.

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Ces transferts concernent les mesures relatives au maintien de la tranquillité publique en
particulier en cas de grand rassemblement occasionnel de personnes, manifestations, rixes,
tumultes dans les lieux publics, ameutements, tapages nocturnes.
Ce qui signifie que pour les rassemblements habituels tel que les marchés, foires, défilés
traditionnels, bruits de voisinage, la compétence reste au maire.

TA Orléans 7 avril 1987 Maire de Dreux : compétence du maire de Dreux pour une foire
traditionnelle annuelle.

CE 28 avril 1989 Montgeron : compétence du préfet pour l’interdiction d’une manifestation,


qui n’étais pas traditionnelle.

C) Le maire

Dans les communes le pouvoir de police est détenu par le maire et par lui seul.
Le maire exerçant ce pouvoir de police au nom de la commune.

Chargé d’assurer sur le territoire se commune la sécurité, la tranquillité, la dignité, …

Si on s’en tient à la règlementation de la règlementation de la sécurité routière, le maire


peut prendre des mesures pour la voierie communale.
Mais il peut prendre des mesures sur les portions de routes nationales ou départementales
qui se situaient à l’intérieur des agglomérations.
A partir de la limite de la commune, le maire est compétent.

A Paris le maire détient des pouvoirs de police, il est autorité de police municipale, mais ses
pouvoirs de police sont beaucoup plus limités que dans d’autres villes.
Paris est la capitale de la France, siège du gouvernement, tradition frondeuse.
D’où historiquement un traitement singulier de Paris, se traduisant que la ville de Paris
n’avait pas de maire.

Doit assurer la salubrité des voies publiques, ainsi que le bon ordre dans les foires et
marchés.
Mais tout ce qui relève du maintien de l’ordre, de la police de la circulation, demeurent à la
charge de la préfecture de police de Paris.

D) Les établissements public de coopération communale (EPCI)

Les EPCI ont une fiscalité propre, telles que les communautés urbaines, les communautés
d’agglo, communauté de communes, le président peut se voir conférer un pouvoir de police.
Mais cela suppose une proposition d’un maire, ou de plusieurs maires de communes d’EPCI,
et au final il faut l’accord de tous pour qu’existe un pouvoir partagé en matière de police, qui

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se traduira par des arrêtés de police pris conjointement par les maires, et le président de
l’établissement public de coopération intercommunale.

Par ailleurs ce partage du pouvoir de police n’existe pas de manière générale, seulement 5
activités concernées, l’assainissement, les déchets, les gens du voyage, manifestations
culturelles et sportives, et voierie.
Ces dans ces 5 domaines en pratique importants que le pouvoir de police peut être
éventuellement partagé si tous les maires sont d’accord.

Mais assez rare car les maires tiennent à leur pouvoir de police.

E) Les concours de pouvoirs de police général

Le pouvoir de police général est détenu par des autorités administratives diverses
Mais les limites territoriales dans lesquelles ces autorités agissent, se superposent.
Les communes se trouvent dans les limites d’un département, qui sont des parties du
territoire national.
Dès lors se pose le problème des concours de pouvoirs de police, c'est-à-dire la prise de
mesures de police par des autorités différentes sur un même territoire.
Ces concours de police sont possibles, c'est-à-dire que différentes autorités de police
peuvent prendre pour un territoire donné, des mesures de police qui seront également
applicables.

En d’autres termes si une mesure de police est prise par le 1er ministre, prise pour l’ensemble
du territoire national, cela n’empêche pas un préfet, un président de conseil général, ou un
maire, de prendre des mesures de police relatives au même objet mais sur le territoire
relevant de leur compétence.

Néanmoins le principe est que la mesure de police prise par l’autorité administrative
inférieure ne peut être que plus sévère que celle prise par l’autorité administrative
supérieure, plus rigoureuse.

C’est ainsi qu’un maire pourra parfaitement réduire la vitesse autorisée sur certaines voies
publiques, malgré qu’elle soit fixée par une autorité supérieure.
Mais impossible de modifier vers le haut les vitesses pour les autorités administratives
inférieures.

Ces concours de police, cette possibilité prévue dès l’arrêt Labonne de 1919 sus-évoqué.
CE 23 octobre 1959 Doublet : arrêté de police préfectorale sur le camping, et cet arrêté
règlementaire préfectoral avait été aggravé par le maire d’une commune plus rigoureux,
plus limitatif que celui prévu par le préfet.

§2 : LES POLICES SPECIALES

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A) Les critères permettant d’identifier une police spéciale

Plusieurs critères :
Il y a police spéciale lorsque l’autorité de police se voit conférer une compétence originale.

a) Le critère de la compétence originale

Il y a police spéciale si l’autorité qui exerce le pouvoir de police concerné n’est pas celle qui
aurait pu être compétente, au regard de la répartition des compétences de police générale.

Exemple de la police des gares et aérodromes :


Logiquement on pourrait penser qu’elle relève de la compétence du maire sur le territoire
duquel se trouve la gare ou l’aéroport, mais ce n’est pas le cas.
Elle n’appartient pas au maire, mais au préfet du département.

Lorsqu’un pouvoir de police est confié à une autorité administrative qui en dehors de ce cas
précis n’a pas de pouvoir de police, ne détient pas le pouvoir de police général.
Exemple la police spéciale du cinéma, qui est exercée par le ministre de la culture.
En dehors de ce cas particulier le ministre de la culture n’est pas une autorité de police.

La police des publications étrangères est placée dans les mains du ministre de l’intérieur, qui
en dehors de ces cas n’est pas une autorité de police générale.
Il a une autorité sur les policiers de France, mais n’est pas une autorité de police générale.

b) Le critère de la mise en œuvre d’une procédure particulière

C’est le signe d’une police spéciale.

La police des édifices menaçant ruine qui suppose la prise d’un arrêté de péril, pris au terme
d’une procédure prévoyant la mise en demeure de l’édifice menaçant ruine, procédure au
terme de laquelle le maire pourra prescrire des travaux au propriétaire.
Procédure organisée par des textes, qui traduit l’existence d’une police spéciale.

Aussi la police des installations classées, en raison de leur caractère incommode, insalubre,
nuisible.

c) Le critère de l’objet particulier de la police spéciale

L’objet de la police générale est le maintien de l’ordre public dans toutes ses composantes.

S’agissant de police spéciale les objets sont différents et spécifiques.


Ainsi concernant la police de l’affichage, police spéciale, ayant pour objet la sauvegarde de
l’esthétique.

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Police de la chasse, police spéciale dont on ne mesure pas suffisamment qu’elle a pour objet
la protection du gibier.
Même chose pour la police de la pêche.

B) Les détenteurs des polices spéciales

Les autorités détentrices des polices spéciales sont les mêmes que précédemment, mais la
répartition se fait par les textes.

a) Les ministres

Ministre de la culture pour la police du cinéma.

Ministre de l’intérieur pour la police des étrangers.

Ministre de l’agriculture en ce qui concerne les autorisations de cultiver des OGM.


TA de Toulouse 18 janvier 2005 préfet de la Haute-Garonne contre commune de Bax.

b) Les préfets

La police des gares et des aérodromes détenue par le préfet.


CE 25 mars 1987 Commune de Colombier Saugnieu : le CE souligne que seul le préfet peut
autoriser l’exploitation de taxis pour la desserte des aérodromes en vertu des pouvoirs qui
lui sont conférés par cette police spéciale.

Police des installations classées.

Police de la pêche, de la chasse.

c) Les maires

Police des édifices menaçant ruine.


Police des enseignes.

C) Les concours de police

a) Les concours de police générale et spéciale

L’existence d’une police spéciale ne fait pas obstacle à l’exercice du pouvoir de police
générale, sauf texte contraire.

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C’est ainsi que le préfet dispose de la police des installations classées, mais cela n’empêche
pas l’édiction de mesures de police par le maire usant de son pouvoir de police générale s’il y
a péril imminent.
CE 15 janvier 1986 Société Pec-engeenering.

Ce concours possible entre police spéciale et police générale en cas de péril imminent,
s’observe dans TA Toulouse 18 janvier 2005 préfet de la Haute-Garonne contre commune de
Bax : dans ce jugement le TA de Toulouse souligne que le régime d’autorisation de la
dissémination d’OGM relève de la compétence exclusive relève de compétence du ministre
de l’agriculture détenteur d’un police spécial.
En l’absence de danger imminent, le maire de la commune n’a pas pu se substituer au
ministre en faisant usage de son police général.

CE 10 avril 2002 Ministre de l’équipement des transports et du logement : le ministre des


transports chargé de l’aviation civil est détenteur d’un pouvoir de police spécial, qui s’est
trouvé à un pouvoir de police général d’un maire ayant pris un arrêté de police pour
règlementer l’évolution des avions au dessus de la commune.
Le CE considère que cet arrêté municipal pris en vertu de pouvoirs de police spécial est
illégal, car la règlementation de l’aviation civile relève du pouvoir de police spécial
appartenant au ministre, et que faute de péril imminent le maire ne pouvait pas prendre un
tel arrêté.

Lorsque le pouvoir de police spécial est exercé, l’autorité de police générale ne peut prendre
que des mesures plus restrictives là aussi.

Le ministre de la culture exerce son pouvoir de police, il délivre un certain type de visa
d’exploitation, et ensuite l’autorité locale interdit la projection du film.

b) Les concours de police spéciale

Chaque police spéciale doit être exercée en vue de l’objet et selon les procédures qui lui sont
propres.
En principe il ne doit pas y avoir de concours de police spéciale, car chacune à un objet
particulier.
L’autorité de police doit veiller à ce qu’il n’y ait pas substitution d’une police spéciale à une
autre police spécial, ou d’empiètement de l’une sur l’autre.

SECTION 3 : LE CONTROLE DE LEGALITE DES MESURES DE


POLICE ADMINISTRATIVE

53
Les principales illégalités qui peuvent entacher des mesures de police administrative.
Puis illustration des mesures particulière de contrôle par le juge administratif.

§1 : LES PRINCIPALES ILLEGALITES DES MESURES DE POLICE


CENSUREES PAR LE JUGE ADMINISTRATIF

A) L’abstention de l’autorité de police

Si l’autorité de police s’abstient de prendre une mesure de police, mais aussi si elle prend
une mesure insuffisante, tout cela constitue une illégalité qui sera censurée par le juge.

a) L’obligation de prendre des mesures de police initiales

L’autorité de police doit prendre une mesure de police lorsqu’une situation est de nature à
troubler l’ordre public.
A condition que cette mesure soit indispensable pour faire cesser un péril grave qui résulte
d’une situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public.

CE 27 avril 1979 Leduc : était contesté par un requérant le refus d’un maire d’interdire la
circulation des poids lourds sur une voie publique de la commune.
Le CE a conclu à la légalité du refus opposé par le maire en l’absence de péril grave.

CE 1er juin 1973 Demoiselle Ambrigot : refus de prendre un arrêté de péril.


Refus légal là encore en l’absence de péril grave.

CE 8 juillet 1972 Ville de Chevreuse : le maire a refusé de prendre un arrêté, l’autorité de


police a manquée à ses obligations au regard de l’importance de l’atteinte portée à la
tranquillité publique résultant de ces tirs quasi permanent provenant de ce club de tir.
Le juge a estimé qu’il y avait péril grave pour l’ordre public.

b) L’obligation d’appliquer une règlementation de police existante

Si une règlementation de police existe, l’autorité de police doit en assurer l’effectivité.


Cette obligation pèse sur l’autorité auteur de la mesure de police.
CE 3 avril 1968 Jardin : maire qui avait refusé de prendre des mesures pour assurer le
respect de l’arrêté municipal qu’il avait pourtant pris interdisant la sortie des poubelles
pendant la nuit.
Le juge considère que ce refus est entaché d’illégalité, car l’autorité de police doit assurer
l’effectivité de son arrêté de police.

CE 20 octobre 1972 Marabout : le CE souligne l’obligation qui pèse sur le préfet de police de
Paris de faire respecter une interdiction de stationnement dont il est l’auteur.

54
L’obligation pèse aussi sur l’autorité de police inférieure qui doit assurer l’effectivité d’une
mesure prise par une autorité supérieure.
CE 14 décembre 1962 Doublet.

B) Les interdictions générales et absolues

a) Les fréquentes censures des interdictions générales et absolues

Très régulièrement la jurisprudence met en évidence l’illégalité d’une mesure de police à


raison de son caractère trop général et trop absolu.

CE 4 mai 1984 Guez : une interdiction des activités musicales et des infractions de toute
nature sur les voies et zones de Paris réservées au piéton.
Interdiction jugée illégale car elle a un caractère trop général, trop absolu.

CE 16 janvier 1987 Auclair : contestation d’une interdiction prise par le préfet de la vente de
crèmes glacées en vrac sur l’ensemble du domaine public et des plages du département.
Interdiction jugée illégale car trop absolue et générale.

TA de Pau 22 novembre 1995 Mr Couvennes et association sortir du fond : arrêté anti-


mendicité pris par le maire de Pau, le TA dit que le maire de Pau n’a pas le pouvoir de
prononcer l’interdiction au surplus sans aucune restriction dans le temps d’une part de la
mendicité dans tout le centre de la ville, et d’autre part dans tous les lieux publics de la
commune, des quêtes non autorisées et de la consommation de boissons alcoolisées, en
dehors des terrasses de café et de restaurant, aires de pique nique, et lieux de manifestation
locales.

TA de Poitiers 19 octobre 1995 commune de La Rochelle : le maire ne pouvait légalement.

Mesure pas générale et absolue donc pas entachée d’illégalité.

CE 27 février 1995 syndicat national des pilotes professionnels d’ULM : le CE souligne que ne
prend pas une mesure d’interdiction générale et absolue le préfet qui se borne en raison de
la gène causée par le bruit des moteurs à fixer des horaires d’utilisations.

Ordonnance du CE 9 juillet 2001 Préfet du Loiret : arrêté couvre feu des mineurs pris par le
maire, qui dit que les mineurs ne doivent pas se trouver seuls dans la rue de 22h à 6h du
matin.
Arrêté contesté par le préfet du département du Loiret usant de son pouvoir de contrôleur
de la légalité des actes des collectivités territoriales.
CE consulté en référé liberté, car liberté en cause.
Le juge a considéré que cet arrêté couvre feu des mineurs n’était pas illégal car d’abord il a
pour objet d’assurer la sécurité publique, la sécurité des mineurs, il a donc donné acte au
maire que ce que l’objet poursuivi par le maire était la sécurité publique.

CE 9 juillet 2003 Lecomte.

55
Le juge administratif n’aime pas les arrêtés de police qui posent des règles générales et
absolues.

b) La possibilité d’interdiction générale et absolue

Il n’est pas impossible pour une autorité administrative de prononcer une interdiction
générale et absolue.
La chose est possible si l’ordre public exige une telle interdiction.

CE 13 mars 1968 Epoux Leroy : dans cette affaire l’interdiction qui avait été prononcée par
l’autorité de police était une interdiction d’exercer la profession de photo filmeur sur la
portion de route nationale conduisant au Mont Saint-Michel.
L’autorité de police avait pris cette décision pour des raisons de sécurité publique, car
compte tenu de l’affluence de touristes, elle a estimé qu’on ne pouvait pas laisser cette
activité s’exercer, car susceptible de gêner la circulation et dangereux.
Interdiction générale et absolue, mais le juge considère qu’elle est légale car le juge admet, à
l’instar de l’Administration, qu’elle était le seul moyen d’assurer l’ordre public.

CE 1995 Commune de Morsant sur Orges : concernant le lancer de nain c’est aussi une
interdiction générale et absolue, mais elle est légale compte tenu de la dégradation pour la
dignité humaine.

C) L’illégalité des mesures de police non nécessaires

Compte tenu des risques que les mesures de police présentent pour les libertés publiques,
une mesure de police doit être nécessaire pour la sauvegarde ou le rétablissement de l’ordre
public.
En 1917 le commissaire du gouvernement Corneille : « la liberté est la règle, et la restriction
de police est l’exception ».

Le juge va donc vérifier que la mesure de police prise est nécessaire.


Nécessaire, et plus précisément qu’elle est adaptée et proportionnée à la menace pesant sur
l’ordre public.
Ainsi est jugée illégale une interdiction de réunion publique si la menace de désordre née de
cette réunion n’est pas d’une gravité justifiant l’interdiction.
CE 19 mai 1933 Benjamin.

CE 15 décembre 1961 Chiaretta : interdiction de la projection de publicité sur les nuages,


dont le juge précise qu’elle n’est pas justifiée par la nécessité d’assurer la sécurité la
circulation automobile.

CE 14 mai 1982 Association internationale pour la conscience de Krisna : dans cet arrêt le CE
conclue à l’illégalité d’une interdiction de cérémonie religieuse compte tenu du caractère
excessif de l’atteinte ainsi portée à la liberté des cultes.

56
Dans d’autres affaires le juge conclue à la légalité de la mesure de police, il considère donc
que la mesure de police était nécessaire, l’interdiction était nécessaire à la sauvegarde de
l’ordre public.

CE 21 janvier 1966 Legastellois : procession traditionnelle devant emprunter un certain


parcours sur les voies publiques de la commune, la maire avait interdit le passage de ce
défilé dans certaines rues.
Le juge a considéré qu’en l’espèce la mesure de police était justifiée, légale, et nécessaire.

CE 22 juin 1984 Société le monde du tennis : interdiction de vente et de distribution des


journaux aux abords d’un stade (Rolland Garros) pour des raisons de sécurité publique,
interdiction jugée nécessaire par le juge administratif.

§2 : ILLUSTRATIONS PARTICULIERES DE CONTROLE DES MESURES


DE POLICE

A) Les mesures de police relatives aux réunions publiques

a) Une liberté publique (liberté de réunion) fortement protégée

CE 19 mai 1933 Benjamin : René Benjamin, écrivain, devait tenir une conférence à Nevers
consacrée à deux auteurs comiques.
Cela a entrainé des menaces de contre manifestation par les instituteurs syndiqués, car il
était proche de l’Action Française.

Décret 13 février 1936 prononçant la dissolution de l’action française.


Mais avant ce décret devait se tenir un banquet à Lyon sous la direction de Charles Mauras
chef de l’action française.
Interdiction par le maire de ce banquet.
Mais cette décision a fait l’objet d’une annulation, le CE soulignant que le préfet disposait
des forces de police suffisantes pour maintenir l’ordre public.
CE 2 février 1938 Xavier Vallat.

Ont été jugées légales certaines interdictions, 23 décembre 1936 Bucart.


CE 29 juillet 1953.

TA Strasbourg 10 mars 1992 : considérant que la décision litigieuse n’a pas été motivée par
l’Administration des propriétés publiques, mais par le refus de laisser s’installer à l’intérieur.

57
Le juge va vérifier qu’existe une menace de troubles, des menaces écrites explicites.

La qualification juridique des faits, d’abord opérée par l’Administration consiste à dire, cette
réunion compte tenu de ses caractéristiques et compte tenu des menaces proférées, va
troubler gravement l’ordre public.
A cette occasion le juge administratif contrôle, le juge vérifie si l’interdiction est
proportionnée à la menace pesant sur l’ordre public.
Vérification que l’Administration ne pouvait pas faire autrement qu’interdire, vérification
qu’elle ne disposait pas des forces de police suffisantes permettant de maintenir l’ordre
public.
Si le juge estime que l’autorité de police disposait des forces de police suffisantes,
l’interdiction trahi une erreur commise par l’Administration dans la qualification juridique
des faits.
Le juge a estimé que la réunion en question ne menaçait pas l’ordre public, ou du moins ne
le menaçait pas au point d’interdire la réunion.
Le juge procède de manière poussée au contrôle de proportionnalité, aussi qualifié de
contrôle de l’opportunité, équivalent du contrôle maximum.
Le juge va très loin dans ses contrôles, car c’est loin d’être une science exacte.

B) La police relative aux films

a) L’exercice de la police spéciale du cinéma

Depuis que le cinéma existe, il existe une police du cinéma.


Liberté cinématographique non illimitée.

Cette police spéciale est dans les mains du ministre de la culture, et se traduit par la
délivrance de visas, d’exploitation, d’exportation.

Les visas d’exploitation sont délivrés.


Tous les films sont visionnés par une commission de contrôle des films, composée de
spécialistes, de juristes, et cette commission après avoir visionné tous les films va se
prononcer sur le type de visas délivrés.
Par exemple visa avec autorisation pour tous publics.
Visa d’exploitation aux mineurs de -12 ans, 16 ans, 18 ans, décrits dans un décret de 1990.
Au-delà de 18 ans on entre dans les films X, classé X donc exploitation en salle presque
impossible, puis fiscalité lourde très pénalisante.

L’interdiction totale du film.


Le ministre peut retarder la délivrance du visa lorsque le film s’inspire d’une affaire
criminelle qui n’est pas encore jugée.
En ce sens CE 8 juin 1979 Chabrol et société anonyme films la boétie.

Jusqu’en 1975 le juge n’exerçait sur les décisions ministérielles délivrant tel ou tel visa qu’un
contrôle minimum sur la qualification juridique des faits.

58
Contrôle normal de la qualification juridique des faits.

CE 13 juillet 1979 Société les productions du Chesne : le CE annule classement X d’un film
aux motifs que ce films ne contenait pas de scènes présentant un caractère pornographique.

CE 22 juin 2000 Association promouvoir : Contestation du visa d’exploitation d’un film,


relative au film « baise moi ».
Ce film a obtenu un visa d’exploitation assorti d’une interdiction aux mineurs de moins de 16
ans, avec obligation en salle d’affichage a l’entrée des salles que le film contenait des scènes
de sexe et de violence.
L’association a estimé que le visa était insuffisant, car pour elle le film ne devait pas être vu
par des mineurs, or cette interdiction avait disparue.
La question principale qui se posait : est-ce que le film compte tenu de ses caractéristique
est un film à caractère pornographique qui aurait du être classé X.
Le commissaire du gouvernement a rappelé les critères utilisés par le juge pour classer un
film X.
Le 1er critère est le critère objectif : c’est que le film contient des scènes de rapports sexuels
non simulés, réels.
2ème critère subsidiaire : le juge tient compte de la qualité du film, de la qualité de la
réalisation, du message que le film veut faire passer.
Le critère le plus important étant le critère objectif.
Le critère subsidiaire peut permettre de sauver un film du X.
Le juge va estimer que le film aurait du être classé X, en raison du caractère pornographique
du film.
La conséquence du Xage est que le film a été retiré de salles et n’a pas pu être exploité.

Recueil Lebon 2000 page 267.

b) Les mesures de polices prises par les autorités locales

Possibilité d’interdiction par un maire de la projection d’un film dans sa commune qui
pourtant a obtenu un visa d’exploitation du ministère.
Reconnu par CE 18 décembre 1959 Les films Lutécia : arrêt qui précise que le maire d’une
commune peut interdire la projection d’un film en invoquant deux motifs.
Le 1er motif d’interdiction c’est la menace de troubles sérieux, c'est-à-dire le risque de
manifestations violentes organisées par des personnes ayant manifesté leur hostilité vis-à-vis
d’un film. Menace à l’ordre public.
Le maire ne pourra interdire ce film que s’il ne dispose pas de moyens de police nécessaires
pour faire face à cette menace, à la situation.
Mis en évidence par CE 19 avril 1963 Ville de Dijon.
Le 2ème motif pouvant être invoqué par le maire : l’interdiction de projection est considérée
comme légale lorsque la projection du film est susceptible d’être, à raison du caractère
immoral dudit film, et de circonstances locales particulières, préjudiciable à l’ordre public.
C’est l’apport de l’arrêt de 1959.

59
Dans cet arrêt il s’agissait d’une interdiction du film « le feu dans la peau », interdiction
légale en l’espèce, interdiction possible.
Le caractère immoral du film n’était pas contesté ni contestable, puis circonstances locales
justifiant l’interdiction.
En l’espèce le maire de Nice s’était contenté d’invoquer « une vague d’immoralité ayant
déferlée sur la ville de Nice » dont le juge administratif s’est contenté.

CE 14 octobre 1960 société les films Marceau : arrêt par lequel le juge a annulé l’interdiction
à Nice du film « la neige était sale ».
Toujours à propose de Nice, CE 23 décembre 1960 Union générale cinématographique 23
décembre 1960 : le CE a rejeté le recours formé contre l’interdiction de projection à Nice du
film « avant le déluge ».

Ces différents arrêts ont apporté des précisions sur la notion de circonstances locales, le CE
au départ ne s’était pas montré très exigent sur cette condition avec ces arrêts de 1963, en
explicitant que les circonstances locales pouvaient s’entendre de la composition particulière
de la population d’une commune, et le juge se montrait sensible au nombre élevé
d’établissements scolaires sur le territoire d’une commune.
Il a également rangé les protestations émanant de milieux locaux divers, ou encore l’attitude
prise par divers personnalités représentant ces milieux.
Comme pour la ville de Lourdes par exemple.

CE 25 février 1966 Société nouvelle des établissements Gaumont.


Par cet arrêt le CE a prononcé l’annulation de l’interdiction de ce film épouvantablement
immoral qu’est « la jument verte » par le maire de Versailles, mais annulation de
l’interdiction de la projection de ce film.

Annulation par le CE de l’interdiction d’un film « la main chaude » à Nice, CE 23 février 1966
Société franco London film et société les films Gibe.

TA Amiens 10 avril 1973 Chambre syndicale des producteurs de films français : jugement par
lequel le TA d’Amiens a prononcé l’annulation d’un arrêté du maire de la ville de Saint-
Quentin interdisant toute projection de film à caractère érotique, pornographique ou
licencieux.

Le juge administratif censure les interdictions générales et absolues.

CE 26 juillet 1985 Ville d’Aix en Provence contre société Gaumont distribution : le CE dans
cet arrêt a prononcé l’annulation de l’interdiction du film « le pull-over rouge ».

TA de Bordeaux 13 décembre 1990 : annulation de l’interdiction du film « la dernière


tentation du christ » par le maire d’Arcachon.

Le contentieux autour des interdictions de films n’a pas totalement disparu.


Pas d’exemple récent, respect de la liberté d’expression cinématographique.
Par l’arrêt Association promouvoir de 2000 et de 2002 le contentieux se déporte sur le
terrain de la police spéciale du cinéma, contestation du visa.

60
Contentieux aussi porté devant le juge judiciaire, assez souvent sollicité par des requérants
qui demandaient qu’un film ne soit pas projeté.
Sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile, le président du TGI à le droit
de prescrire en référé l’interdiction de projeter un film, lorsque cette projection causerait un
dommage illicite à une ou plusieurs personnes.
Dans les années 80 c’est par ce biais que des requérants ont demandé l’interdiction de
projection du film « je vous salue Marie » « la dernière tentation du Christ », l’interdiction de
l’affiche du film « Larry Fint », avec des résultats décevants car le juge judiciaire n’a pas
accordé l’interdiction des films ou de l’affichage des films.

C) La police des étrangers

a) Le contrôle par le juge des arrêtés de reconduite à la frontière

Les arrêtés de reconduite à la frontière sont la mesure d’éloignement d’un étranger du


territoire la plus utilisée.

Pas de baisse.
On a ajouté aux arrêtés de reconduite à la frontière et aux mesures d’expulsion, des
obligations de quitter le territoire français (OQTF).

Ces arrêtés sont pris par l’autorité compétente en la matière que sont les préfets.
Ces arrêtés de reconduite sont pris à l’encontre des étrangers qui sont en situation
irrégulière sur le territoire français.

Avant 1991 le juge administratif n’exerçait sur ces arrêtés qu’un contrôle minimum se
traduisant par un simple contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation concernant la
qualification juridique des faits.

CE 20 juillet 1990 Cavdar : Le CE annule un arrêté de reconduite à la frontière visant l’époux


d’une femme dont le juge souligne qu’elle était enceinte et de santé fragile, dans l’attente
d’une décision d’admission de sa demande au statut de réfugié.
Le juge estime que cet arrêté de reconduite à al frontière est entaché d’une erreur manifeste
d’appréciation.

CE 28 septembre 1990 Madame Ermiser : Le juge soulignant une erreur manifeste


d’appréciation conclu à l’illégalité d’une mesure de reconduite à la frontière d’une femme
enceinte qui au vu d’un certificat médical ne pouvant supporter un voyage sans danger.

Le contrôle du juge s’est accentué concernant ces mesures, on est entré dans une logique de
contrôle normal qui concrètement s’est traduite par l’application par le juge des stipulations
de la CEDH et de son article 8 concernant le droit de mener une vie familiale normale.
Le juge va vérifier que l’arrêté de reconduite ne porte pas atteinte de manière excessive à la
vie familiale de l’étranger au sens de l’article 8 de la CEDH.

61
L’accentuation de ce contrôle a été opérée avec CE 19 avril 1991 Babas : Tout en accentuant
son contrôle sur le mesure d’éloignement, contrôle normal, le juge a conclu à la légalité en
l’espèce de l’arrêté de reconduite à la frontière.

CE 23 juin 1995 Sylla : Le CE conclue à l’illégalité d’une reconduite à la frontière visant un


requérant venu en France à l’âge de 17 ans, et dont le juge souligne qu’il n’a plus aucune
attache familiale dans son pays d’origine.
Violation de l’article 8 de la CEDH.

Illustre aussi cela les stipulations de l’article 3 de la CEDH qui en substance prohibe les
traitements inhumains ou dégradants.

TA de Lyon 12 juin 1996 Madame Condé : dans cette affaire Condé, une femme de
nationalité Guinéenne faisait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière car elle était en
situation irrégulière en France, ainsi que ses deux filles, pris par le préfet.
2ème décision fixant le pays de retour de cette personne étant la Guinée.
Il faut distinguer l’arrêté de reconduite, et la décision fixant le pays de renvoi.
En l’espèce les deux étaient contestés.
Dans cette affaire ce qui a été annulé c’est la décision fixant le pays de renvoi.
Donc en tout état de cause l’arrêté de reconduite sans avoir été annulé est neutralisé.
Annulation de la décision car le juge estime que si cette femme est renvoyée dans son pays
d’origine avec ses deux filles mineures, ses filles vont être exposées à un traitement
inhumain et dégradant qu’est l’excision.

b) Le contrôle par le juge des mesures d’expulsion visant les étrangers

Les mesures d’expulsion sont des mesures beaucoup plus rares que les arrêtés de reconduite
à la frontière.
A peu près une centaine de personnes par an.
Elles peuvent être prises par les préfets, et aussi par le ministre de l’intérieur sous certaines
conditions.
En matière d’expulsion on peut distinguer deux mesures d’expulsion : la mesure d’expulsion
ordinaire, et l’expulsion extraordinaire, aussi appelée expulsion en urgence absolue.
Ces deux mesures sont utilisées pour sanctionner une atteinte grave à l’ordre public,
contrairement à l’arrêté de reconduite à la frontière qui sanctionne juste une irrégularité de
la situation.
Menace à l’ordre public car ils ont commis des activités délictuelles importantes, ou des
activités terroristes.
Cela vise des personnes considérées comme menaçant gravement l’ordre public.

Là aussi il fut un temps ou le juge ne contrôlait que l’erreur manifeste d’appréciation.


Sur cette qualification juridique des faits opérée par l’Administration juste un contrôle
minimum.

CE 3 février 1975 Pardov .

62
Le juge administratif a accentué son contrôle sur ces mesures de police, dont on aurait pu
penser qu’elles auraient pu rester à l’écart, car c’était une atteinte très grave.
Mais le juge administratif n’a pas hésité à entrer dans un contrôle entier, normal.

Virage pris avec CE 19 avril 1991 Belgacem : le juge contrôle la légalité de la mesure
d’expulsion en vérifiant qu’il n’y a pas de violation de l’article 8 de la CEDH.
En l’espèce il va constater qu’il y a violation de l’article 8.
Ressortissant algérien qui s’était rendu coupable de vol, mais dont le juge constate qu’il n’a
aucune attache familiale en Algérie, cette personne assure une partie de la charge de sa
famille et compte tenu de son comportement depuis les faits, le juge considère que la
mesure d’expulsion prise viole l’article 8 de la CEDH.

L’expulsion en urgence absolue suppose comme le disent les textes, qu’il y ait une nécessité
impérieuse pour la sureté de l’Etat ou la sécurité publique.
Vocation essentiellement antiterroriste.
Le contrôle du juge s’exerce pleinement.

CE 11 octobre 1991 Diouri : Les liens reprochés à un étranger avec des organisations
terroristes pro palestiennes en 1975, plus ses relations avec des services secrets étrangers
en 1985 et 1987, plus un voyage à Bagdad et en Jordanie, tous ces évènements auraient
justifié l’urgence d’une mesure d’expulsion en 1991 (guerre du Golf), mais pas en juin 1991
alors que cette guerre était terminée.
Cela ne justifiait plus une expulsion en urgence absolue.

TA de Lille 10 novembre 1994 Zitouni : Le juge administratif annule l’expulsion en urgence,


soulignant l’absence de nécessité impérieuse pour la sureté de l’Etat.
Cela visait un ressortissant algérien qui reconnaissait avoir prêté sa voiture en avril 1993 à un
« dénommé Brahim » alors qu’il ne connaissait pas les activités de trafiquant d’arme de cet
homme.
Possible complicité, le juge administratif considère qu’il est plausible qu’il n’y ait pas de
complicité.

TA de Lille 25 octobre 1994 Magri : Affaire concernant un algérien qui se livrait à « la
diffusion de revues prônant l’action armée et violent » qui par ailleurs avait apporté un
soutient logistique actif à des représentants d’un mouvement menaçant la France.
Expulsion en urgence jugée légale.

Même pour des expulsions en urgence absolue, le juge utilise également l’article 8 de la
CEDH il va donc vérifier que l’expulsion ne porte pas atteinte à son droit de mener une vie
familiale normale.
CE 1991 Faker : l’étranger ayant fait l’objet d’une mesure d’expulsion était un diplomate
travaillant dans une ambassade, a fait l’objet d’un arrêté d’expulsion, mais le juge met en
évidence que cet arrêté ne viole pas l’article 8 de la CEDH, car il pouvait poursuivre une vie
familiale normale en quittant la France.

CE 10 juillet 1995 Haddouche : Commission d’infractions de gravité croissante, recel…


Donc l’arrêté ne porte pas atteinte à son droit de mener une vie familiale normale.

63
Contentieux de masse pour les contentieux relatifs aux étrangers, surtout pour les tribunaux
administratifs, mais tout de même contrôle entier.

64
CHAPITRE 3 : Les contrats administratifs

SECTION 1 : LA CONTESTATION DES CONTRATS


ADMINISTRATIFS DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF

§1 : LA CONTESTATION DES CONTRATS ADMINISTRATIFS DEVANT


LE JUGE DE L’EXCES DE POUVOIR

A) Le principe de l’irrecevabilité du recours pour excès de pouvoir contre


les contrats

a) Avant 1905

Le principe qui s’est imposé dans la jurisprudence, dans le dernier tiers du 19 ème siècle, c’est
que le REP est irrecevable contre le contrat lui-même, mais aussi contre les actes
administratifs même unilatéraux qui ont pu préparer le contrat.
On parle alors d’une théorie du « tout indivisible » qui signifie que le REP est irrecevable
contre le contrat lui-même et aussi les actes administratif unilatéraux qui ont contribué à la
conclusion du contrat, que l’on appellera les actes détachables du contrat.

Avant d’être conclu, le contrat qu’une commune va conclure avec un particulier ne va pas
l’être du jour au lendemain, il faut préparer les conditions, puis le conseil municipal doit
délibérer pour autoriser le maire à conclure ce contrat.
Dans la théorie du tout indivisible le REP n’était pas recevable contre la délibération du
conseil d’administration.

Les auteurs se sont efforcés de justifier ce principe d’irrecevabilité avec de faibles


arguments.
L’un de ces arguments évoqués à consisté à dire que le REP est un procès fait à un acte, sous
entendu à un acte administratif unilatéral.

A la fin du 19ème siècle des arrêts admettent la recevabilité du REP contre les contrats.

65
Incompatibilité entre contrat et REP, mais parfois admis par la jurisprudence avant d’être
interdit par le juge administratif.

2ème argument : l’existence d’un recours parallèle devant le juge du contrat.


Le juge du contrat administratif est toujours le juge administratif.
Mais il n’intervient pas en qualité de juge de l’excès de pouvoir, mais en qualité de juge du
plein contentieux.
Les tiers au contrat ne peuvent pas saisir le juge du contrat administratif.

Soucis de sécurité juridique.

A la fin du 19ème siècle explosion des contrats administratif, délégations de services publics.
Si on laisse la possibilité de REP contre les contrats, ces recours vont se multiplier, les tiers
aux contrats vont multiplier les recours contre les contrats qui pourront être annulés, il en
résulterait une insécurité juridique forte.

b) A partir de 1905

Arrêt Martin rendu sous les conclusions du commissaire du gouvernement Romieu.


Martin était un conseiller général du département du Loir et Cher.
Il contestait plusieurs délibérations prises par le conseil général dont il était membre,
relatives à des concessions de tramway.
En application de la jurisprudence antérieure qui s’était établie, il était clair qu’il n’y avait pas
de REP possible contre ces délibérations, puisque le juge avait décidé qu’il n’était pas
possible de former un REP contre les contrats eux-mêmes, ni contre les actes préparatoires
aux contrats.
Le CE admet la recevabilité du REP formé par ce conseiller général le sieur Martin.
Désormais le REP des tiers au contrat est recevable contre les actes préparatoires du contrat,
et plus largement contre ce que l’on appelle à partir de là les actes détachables du contrat.
L’annulation des actes détachables du contrat n’entraine pas nécessairement la remise en
cause du contrat.
L’arrêt Martin réduit l’irrecevabilité du REP en reconnaissant la notion d’acte détachable du
contrat.
C’est donc la fin de la théorie dite du tout indivisible, désormais on accepte de distinguer le
contrat et les actes détachables du contrat.
Mais cet arrêt Martin en mettant fin à la théorie du tout indivisible, confirme également que
le REP est irrecevable contre le contrat lui-même, qui demeure à l’abri du REP.

Et cette irrecevabilité du REP contre le contrat sera très souvent illustrée par la
jurisprudence.

CE 13 avril 1986 Compagnie luxembourgeoise de télévision.

CE 17 décembre 1986 Syndicat de l’Armagnac et des vins du Gers.

66
67
B) Les limites de l’irrecevabilité du REP en matière contractuelle

a) Les actes détachables du contrat préalables à sa conclusion

Ces actes peuvent faire l’objet d’un REP, c’est précisément tout l’apport de l’arrêt Martin de
1905, car étaient contestées des délibérations d’un conseil général précédant la conclusion
d’un contrat par la voie du REP.

Est considéré comme acte détachable tout acte antérieur à la conclusion définitive du
contrat, y compris l’acte par lequel l’autorité administrative décide ou refuse de conclure le
contrat.
Précisé par CE 30 mars 1973 Ministre de l’aménagement du territoire contre Schwezoff.
Ces actes détachables peuvent concerner aussi bien des contrats administratifs que des
contrats de droit privé.

Si l’on imagine qu’une personne publique conclue un contrat de droit privé, il est possible de
contester devant le juge administratif la légalité des actes détachables de ce contrat privé.

CE 26 novembre 1954 Syndicat de la raffinerie de souffre française.

CE 7 octobre 1994 Epoux Lopez : dans cette affaire le contrat en cause était un contrat de
vente d’un immeuble appartenant à une commune. Et cette commune louait cet immeuble à
un particulier.
Le locataire de cet immeuble avait fait savoir à la commune que si la commune décidait de le
vendre, lui serait acheteur de cet immeuble.
Un jour la commune a vendu l’immeuble, puisque la commune a vendu l’immeuble non pas
au locataire, mais à une tierce personne, qui avait des relations amicales avec le maire.
Le maire n’avait pas précisé à son conseil municipal que le locataire serait candidat à l’achat.
Contestation donc du contrat de vente.
Ce contrat de vente est un contrat de droit privé car le bien en cause appartenait au
domaine privé de la commune.
Ce que le juge admet dans son arrêt, c’est la recevabilité du REP formé par le locataire
contre la délibération ayant autorisé le maire à conclure le contrat de vente de la maison.
Le CE a confirmé l’annulation de l’acte détachable prononcé auparavant par un TA, parce
que la délibération était entaché d’une illégalité résultant d’un défaut d’information du
conseil municipal.
Le REP formé contre ces actes détachables qui précèdent la conclusion du contrat peut être
intenté par tout intéressé, c'est-à-dire par des tiers intéressés au contrat, par exemple le
contribuable d’une collectivité locale.
Sont considérés également comme des tiers pouvant former un REP les membres de
l’assemblée délibérante que ce soit un conseil municipal, général, régional.

Mais de surcroit il a été admis que les cocontractants, les parties au contrat, peuvent aussi
former un REP contre les actes détachables préalables à la conclusion du contrat.
Mais seulement de rares affaires.

68
CE 4 février 1955 Ville de Saverne.
S’agissant d’un REP dirigé contre des actes détachables d’un contrat, il ne peut être fondé
que sur une illégalité d’un acte détachable du contrat.
Cette illégalité peut être propre à l’acte détachable, mais l’illégalité de l’acte détachable peut
aussi venir du contrat lui-même, contrat dont on peut dire à l’appui du recours dirigé contre
l’acte détachable qu’il contient des clauses illégales, irrégulières, violant une règle de droit.
CE 13 janvier 1988 Mutuelle générale des personnels des collectivités locales.

On pourra dire que le contrat porte sur une matière qui ne peut pas donner lieu à un
contrat, comme par exemple la police pour obtenir l’annulation du contrat.
CE 8 mars 1985 Association les amis de la Terre.
On n’est pas loin de contester le contrat.

b) Les actes détachables du contrat postérieurs à sa conclusion

Après la conclusion du contrat, différentes mesures unilatérales peuvent être prise qui sont
donc relatives à l’exécution du contrat.
Il s’agira de décisions portant modification des obligations contractuelles.
Ici la distinction des tiers par rapport au contrat et des parties au contrat est tout à fait
essentielle.
A savoir que les tiers au contrat peuvent intenter un REP contre les actes administratifs
unilatéraux qui concernent l’exécution du contrat.
Illustré par CE 21 décembre 1906 Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier
croix de Savoie Tivoli.
CE 2 février 1987 Société TV 6.
Les cocontractants ne peuvent pas utiliser cette voie du REP, ils pourront néanmoins
demander des réparations en espèce sonnantes et trébuchante devant le juge du contrat.

c) Les clauses règlementaires du contrat

Un contrat administratif contient des clauses contractuelles, lesquelles clauses


contractuelles régissent les relations des parties au contrat.
Mais un contrat administratif contient aussi souvent des clauses règlementaires, lesquelles
clauses règlementaires régissent la situation des tiers au contrat, étant bien souvent les
usagers d’un service public, et non pas les cocontractants.
Ces clauses règlementaires sont divisibles des autres stipulations du contrat, ce qui rend
possible pour un tiers au contrat de demander par la voie du REP l’annulation de ces clauses
règlementaires.
CE 10 juillet 1996 Cayzeelle :
Une société privée chargée du service du ramassage des ordures ménagères, conclu ce
contrat avec une personne publique.
Dans ce contrat il y avait une clause l’acquisition par les usagers de nouvelles poubelles,
certains usagers ont contesté.
REP contre une clause contenue dans le contrat, en principe pas REP contre cela.

69
Mais le juge fait évoluer sa jurisprudence, pour la 1ère fois il admet que l’on puisse diviser les
clauses réglementaires et contractuelles, et qu’un tiers puisse former un REP contre une
clause règlementaire du contrat, car elle s’imposait aux usagers du service, tiers au contrat.
Le juge au fond a estimé que la clause n’était pas illégale.

d) Le déféré préfectoral

REP particulier que peut utiliser le préfet que dans le cadre du contrôle des activités des
collectivités territoriales.
Contrôle de légalité organisé depuis la loi de décentralisation de 1982, les principaux actes
de la vie des collectivités territoriales doivent être soumis aux préfectures qui va contrôler la
légalité de ces actes.
La loi de 1982 en matière de contrat aux préfets la possibilité de demander l’annulation d’un
contrat par le biais du REP.
En ce sens CE 28 juillet 1991 Commune de Sainte Marie.

e) Le REP contre les contrats des agents des collectivités publiques.

CE 30 octobre 1998 Ville de Lisieux.


Un conseiller municipal contestait un contrat conclu entre une ville et 5 agents de la ville
recrutés par voie contractuelle, contrats administratifs.
Considérant que, eu égard à la nature particulière des liens qui s’établissent entre une
collectivité publique et ses agents non titulaires, les contrats par lesquels il est procédé au
recrutement de ces derniers sont au nombre des actes dont l’annulation peut être
demandée au juge administratif par un tiers y ayant un intérêt suffisant.
Le juge a annulé ces contrats conclus par le maire sans délibération du conseil municipal
pour la création des emplois en cause.

Le principe d’irrecevabilité existe toujours, même s’il existe de nombreuses limites, car il se
refuse encore à ouvrir en grand la vanne du REP en matière contractuelle, dans un souci de
sécurité juridique.
On apporte des exceptions au cas par cas notamment en matière d’embauche quand il y à
nécessité, pour éviter les dérives.

70
C) Les effets de l’annulation de l’acte détachable du contrat sur le contrat

a) Le principe classique du caractère « platonique » de l’annulation de l’acte détachable

Après 1905 le juge admet que contre les actes détachables du contrat, notamment les actes
préalable, s’il est possible de former un REP, et donc d’obtenir l’annulation d’un acte
détachable illégal.
Une fois que l’on a obtenu l’annulation de l’acte détachable du contrat, quel sera l’effet de
cette annulation sur le contrat ?

La réponse a longtemps été absence d’effets sur le contrat, ce que Romieu appelait effet
platonique de l’annulation de l’acte détachable sur le contrat.
Cela n’entraine pas remise en cause du contrat.
Cela notamment pour la raison suivante : une fois que l’acte détachable est annulé par le
juge de l’excès de pouvoir, il n’a aucune compétence pour de sa propre autorité tirer les
conséquences sur le contrat de l’annulation de l’acte détachable.

Le juge qui pourrait tirer les conséquences de cet acte détachable est le juge du contrat, une
autre formation de jugement, qui ne peut être saisi que par les parties au contrat.
Cela signifie que pour que l’annulation d’un acte détachable ait des effets sur le contrat, il
aurait fallu que le juge du contrat ait été saisi, car il est le seul habilité pour dire si
l’annulation de l’acte détachable remet en cause le contrat.
Or les parties au contrat n’ont aucun intérêt à le faire, car le contrat continu à vivre, ce qui
est leur intérêt, ils ne vont pas se tirer une balle dans le pied.

b) La remise en cause nuancée du principe

Opérée par CE 1er octobre 1993 Société le yacht club international de Bornes les Mimozat.
Arrêt peu significatif, mais conclusions du commissaire du gouvernement (rapporteur public
maintenant) qui le sont.
Marcel Pochard en ce qui concerne les actes détachables du contrat : « l’acte détachable
annulé n’est susceptible d’entrainer la nullité du contrat que si son motif d’annulation
justifie un tel effet ».
Il met en évidence que si l’annulation de l’acte détachable résulte de l’illégalité des
stipulations du contrat, elle doit entrainer la nullité du contrat.
Si l’acte détachable n’est entaché que d’un vice qui lui est propre, son annulation ne doit pas
nécessairement entrainer la nullité du contrat.
La conséquence de l’annulation dépend alors du degré de relation existant entre l’acte
détachable et le contrat en cause.
Si la relation de l’acte détachable avec le contrat est directe, la nullité devra le plus souvent
être constatée, encore que cette solution ne soit d’ailleurs pas systématique.
Si la relation entre l’acte détachable et le contrat n’est qu’indirecte, l’annulation pourra fort
bien demeurer dans de nombreuses hypothèses sans incidence la validité du contrat.

71
Ce raisonnement témoigne d’une évolution substantielle de la jurisprudence, car dans
certains cas le juge considèrera que l’illégalité de l’acte détachable conduire à la nullité, la
remise en cause du contrat.

Mais il n’en demeure pas moins que pour que le contrat soit remis en cause à la suite de
l’illégalité de l’acte détachable, encore faut-il que le juge compétent soit saisi.
Le juge du contrat est compétent, c’est un juge du plein contentieux et non pas un juge de
l’excès de pouvoir.
Or les parties n’ont aucun intérêt à saisir ce juge qui va annuler leur contrat, car elles veulent
le contrat, donc paradoxe.

Jurisprudence complétée par la jurisprudence Lopez.

c) L’amélioration de la saisine du juge du contrat

Amélioration opérée par CE 7 octobre 1994 Epoux Lopez :

Contestation de la remise en cause de la vente d’une maison.


Il l’a fait en demandant au tribunal administratif d’annuler la délibération du conseil
municipal qui avait autorisé le maire à vendre la maison.
Il a obtenu l’annulation de cette délibération qui a été jugée illégale devant le tribunal A car
elle a été votée avec des informations incomplètes.
L’ancien locataire saisi le CE pour lui demander en substance de faire quelque chose, que
l’annulation de l’acte détachable prononcée plusieurs années auparavant par un tribunal
administratif ne reste pas lettre morte.
Le CE va innover, car pour la 1ère fois il va ordonner à l’une des parties au contrat de saisir le
juge du contrat.
Il adresse à cette commune une injonction d’avoir à saisir le juge du contrat dans un certain
délai, délai de 2 mois, faute de quoi la commune serait condamnée à verser une astreinte
d’un certain montant par jour de retard.
Il fait application de la théorie de l’apparence et annule le contrat.

d) L’absence d’effet systématique de l’annulation de l’acte détachable sur le contrat

Service d’assainissement de l’eau de la ville de Grenoble.


Affaire de 1989 qui n’a trouvée une solution qu’en 2001.
La ville de Grenoble décide d’abandonner sa régie municipale de l’eau et de l’assainissement
pour confier ces deux services publics à deux délégataires filiales de la société lyonnaise des
eaux.
Quelques temps plus tard on s’est aperçu que ce contrat de service public s’est conclu dans
des circonstances pénalement répréhensibles.
Le maire de Grenoble a fait un scandale, bénéficié d’avantages pour la conclusion de ce
contrat, un appartement à Paris, pénalement répréhensible.
Lorsque le scandale a été découvert, un certain nombre d’élus de Grenoble ont demandé à
ce que soient remis en cause ces contrats de délégations de service public.
Le plus virulent était Mr Avriller.

72
CE 1er octobre 1997 Avriller :
Par cet arrêt de 1997 le CE a annulé la délibération de 1989 autorisant les délégations de
l’eau et de l’assainissement, estimant que les conseillers municipaux de la ville de Grenoble
n’avaient pas été informés des motifs réels et sous jacents de la délibération, à savoir les
largesse accordées par le délégataire au maire.
Le CE a annulé une délibération qui s’analyse en un acte détachable des contrats de
délégation de service public, sans indiquer qu’elles devraient avoir de conséquences sur le
contrat lui-même.

Cette absence de conséquences a été confirmée par le CE dans une réponse à une demande
d’éclaircissement formulée par le ministre de l’intérieur.
Eclaircissement sur le sens et la portée de l’arrêt pour en mesurer toutes les conséquences.
Le CE : « que l’irrégularité ainsi relevée (de la délibération annulée) tenant non au contrat
lui-même, mais à un vice propre à la délibération attaquée, la décision du CE doit, eu égard à
ce motif, s’interpréter come n’impliquant pas nécessairement que la ville de Grenoble
saisisse le juge du contrat en vue de demander rétroactivement la nullité ou procède elle-
même à cette résiliation ».
Réponse du 3 décembre 1997, qui s’inspire très largement développé par le commissaire du
gouvernement dans ses conclusions sur l’affaire … les mimosas.
Le CE souligne que si l’acte détachable a été annulé c’est en raison d’un vice qui lui est
propre, et non des illégalités qui concernent le contrat.
Donc compte tenu du motif d’annulation, il n’y a pas lieu à obliger la commune de Grenoble
à saisir le juge du contrat.
Les contrats pouvaient continuer à vivre leur vie.
La remise en cause à l’initiative de la commune a pu être facilitée par le changement de
municipalité.
Le nouveau maire avait tout misé sur ce scandale, après on s’est donc aperçu que remettre
en cause un contrat c’est très facile pour une personne publique de le faire car elle dispose
d’un pouvoir exorbitant du droit commun de résilier unilatéralement le contrat.
Mais cela n’interdit pas la communauté qui résilie le contrat d’indemniser son cocontractant.
Négociation avec le délégataire pour mettre fin au contrat à l’amiable, ce que l’on appelle
communément une transaction.
Au terme de cette transaction il a été mis fin au contrat de délégation, mais moyennant une
indemnisation de la société qui avait obtenu le contrat.
Monsieur Avriller a contesté cette transaction.
D’où CE 14 mai 2001 Avriller : « qu’à la suite de l’annulation d’un acte détachable de la
passation d’un contrat, il appartient à l’Administration selon les circonstances propres à
chaque espèce et sous le contrôle du juge de déterminer les conséquences à tirer de cette
annulation, la ville de Grenoble pouvait compte tenu des circonstances de l’espèce décider
d’avoir recours à une résiliation négociée, et non à la saisine du juge du contrat en vue d’en
faire constater la nullité ».
Le CE a validé cette transaction opérée entre la ville de Grenoble et son délégataire, car il a
dit que si la ville de Grenoble avait résilié unilatéralement les indemnisations auraient été
plus importantes.

73
§2 : LA CONTESTATION DES CONTRATS ADMINISTRATIFS DEVANT
LE JUGE ADMINISTRATIF NE STATUANT PAS EN QUALITE DE JUGE
DE L’EXCES DE POUVOIR

A) Les pouvoirs du juge du contrat

a) Le principe de l’absence de pouvoir d’annulation du juge du contrat

En principe le juge administratif saisi par les parties au contrat d’un litige le plus souvent
relatif à l’exécution du contrat, n’a pas le pouvoir de prononcer l’annulation des mesures
prises par la personne publique partie au contrat.
Selon une formule jurisprudentielle, il lui appartient seulement de rechercher si ces mesures
ont été décidées dans des conditions qui seraient de nature à ouvrir un droit à indemnité au
profit du cocontractant.
Autrement dit en disant cela le CE a posé la règle de l’irrecevabilité des conclusions
d’annulation devant le juge du contrat.
Cette irrecevabilité a été posée il y a longtemps par CE 20 février 1868 Goguelot.
CE 5 novembre 1969 Guyllomard.
18 avril 1989 société des transports urbains d’Angers.
CE 3 novembre 1995 Société Lyonnaise des eaux Dumez.

b) Les limites traditionnelles du principe

On constate que depuis longtemps le juge administratif a posé quelques exceptions au


principe d’impossibilité de l’annulation.
Il a admis parfois la recevabilité des conclusions d’annulation devant le juge du contrat.
Le principal cas dans lequel le juge a admis la recevabilité des conclusions d’annulation, c’est
dans le cas ou le contrat est une concession de service public et de travaux publics, contrats
qui se sont multipliés de façon exponentielle dans le dernier tiers du 20 ème siècle.
CE 20 janvier 1905 Compagnie départementale des eaux.
CE 29 octobre 1926 Ville de Saint-Etienne.
Recevabilité des conditions d’annulation dans le cadre d’un marché d’entreprise de travaux
publics (METP).
CE 26 novembre 1971 Sima.

Dans le cadre des concessions minières : CE 1967 Sté l’union économique continentale.

CE 13 juillet 1968 Etablissements Serfati.

74
c) Une nouvelle limite

Nouvelle limite résultant de CE 16 juillet 2007 Société Tropiques travaux signalisation


Guadeloupe.
Un aéroport situé en Guadeloupe conclue un contrat pour effectuer des travaux de
signalisation sur les pistes de l’aéroport.
Mais une société concurrente qui estime que l’on aurait du faire appel à elle cherche à
contester le contrat, lequel a été conclu.
Le CE fait évoluer sa jurisprudence a travers ce considérant : « indépendamment des actions
dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la
conclusion d’un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un
recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat.
Un tiers au contrat peut saisir le juge du contrat, car le concurrent évincé peut saisir le juge
du contrat.
Ne sont concernés que les concurrents évincés, reconnaissance de cela pour la 1 ère fois.
Le juge du contrat saisi est un juge du plein contentieux, recours de pleine juridiction, ce qui
bien sur le distingue d’un REP.
Mais néanmoins le juge reconnait que dans le cadre de ce recours qui en principe sert à
obtenir une indemnisation, il est possible de contester la validité d’un contrat ou de
certaines de ses clauses.
C’est bien pour en obtenir l’annulation.
On peut contester la conclusion de contrats.

B) Les pouvoirs du juge des référés

Arrêt Sté tropique et signalisation, on se trouve en présence d’une contestation par un


concurrent évincé d’un contrat.
La contestation du contrat est aussi possible avant la conclusion du contrat, et cette
contestation du contrat avant que n’intervienne la conclusion peut se faire par une
procédure que l’on appelle le référé précontractuel.
Il est apparu dans les textes au début des années 1990, organisé à l’époque par les articles L
22 et L 23 du code des tribunaux administratifs.
Ce code est devenu le code de justice administrative et donc le référé précontractuel décrit
par ces deux articles est désormais décrit par les articles L 551-1 et L 551-2 du code de
justice administrative.
Deux procédures distinctes qui s’appliquent dans deux circonstances différentes.
Article L 551-1 est le plus souvent amené à être utilisé par les concurrents qui se sentent
évincés de la conclusion du contrat.
Ce référé précontractuel sera mis en œuvre par un concurrent évincé si ce concurrent évincé
estime que les règles de publicité mises en concurrences qui doivent être respectées par les
personnes publiques qui envisagent de conclure un contrat, si la société, le concurrent
évincé estime qu’elles n’ont pas été respectées, il va pouvoir demandé à ce juge des référés
d’empêcher la conclusion du contrat car il y a eu violation des règles de publicité et de mise
en concurrence, président du TA.

75
Dès lors que le contrat est conclu le juge des référés ne peut plus rien.

Le président du TA ou le magistrat qu’il délègue peut être saisi en cas de manquement des
obligations de publicité … Article L 551-1.
Le 1er arrêt rendu est CE 10 juin 1994 Commune de Cabourg contre société Casanostra.

Conclusion d’un contrat suspendue, s’en est suivi une guérilla judiciaire qui a définitivement
empêché la conclusion du contrat entre la ville de Cabourg et la société Casanostra.

§3 : LA QUALIFICATION DES CONTRATS PAR LE JUGE


ADMINISTRATIF

Identification de ces contrats.

Différents modèles de contrats administratifs, concessions, affermages, marchés publics de


travaux, de services.
Les parties au contrat sont en général libres de choisir, de conclure tel ou tel type de contrat,
liberté contractuelle.
Etant précisé que ce choix n’est pas innocent, pas sans conséquences, car chaque type de
contrat à ses caractéristiques propres.
Certaines choses sont possibles dans le cadre de certains contrats mais ne le sont pas dans le
cadre d’autres types de contrats.
En général lorsque les parties signent un contrat, elles qualifient ce contrat.
En cas de contentieux, le juge administratif n’est pas lié par la qualification qui a été donnée
par les parties.
Donc le juge administratif pourra procéder lui-même à une requalification du contrat, avec
les conséquences qui en découlent.
Si les parties disent c’est une DSP, le juge pourra dire c’est un contrat de marchés publics,
donc le code des marchés s’applique.

A) Les contrats administratifs classiques

a) La concession de service public

C’est dans le cadre de ces concessions de services publics qu’ont été mis en place au 19 ème
siècle les ré&seaux de distribution d’eau, de distribution de gaz, de distribution d’électricité,
puis les réseaux de chemin de fer.
On parle aussi de travaux publics.

Il y a concession de service public lorsqu’une personne publique que l’on appelle l’autorité
concédante confie contractuellement la charge d’assurer pendant une période déterminée

76
(généralement assez longue de l’ordre de 20 ans) l’exécution d’un service public à une
personne privée (voir publique mais moins souvent).
Personne privée qu’elle a librement choisie et que l’on appelle le concessionnaire.
Le contrat de concession et de travaux public car lorsqu’une personne publique conclue un
contrat de ce type, ce qu’elle demande au concessionnaire c’est de mettre en place, de créer
les ouvrages qui sont nécessaires à l’exploitation du service public qu’on lui demande de
surcroit d’exploiter.
Si on prend le cas de la distribution de l’eau, on fait appel à des sociétés pour réaliser les
ouvrages, les usines, les réseaux de canalisation qui n’existaient pas pour distribuer l’eau.
Il fallait d’abord confier à ces concessionnaires la construction de travaux publics.
Puis dans un 2ème temps on leur confiait la réalisation du service public dont l’ouvrage était le
support.

On parlait plutôt de concession de travaux publics au 19ème siècle, mais l’appellation a


évoluée au 20ème siècle et on parle donc de concession de services publics, et parfois on a
associé les deux termes dans la jurisprudence, il s’agit de la même chose.

Une des grandes caractéristiques de ce contrat est que la personne publique demande au
concessionnaire, au cocontractant, de réaliser la totalité des ouvrages nécessaires à
l’exploitation du service.
C’est ce que l’on appelle la prise en charge par le concessionnaire des frais de premier
établissement.
Les travaux ne peuvent intervenir que pour des activités qui n’existent pas encore, et que
l’on cherche à développer.
A partir du moment où ces ouvrages ont été réalisés, affermage si il y a concession.

b) L’affermage

L’affermage est un type de contrat administratif qui est apparu plus récemment, plus récent
que la concession.
Le terme apparait dans la doctrine pour la 1ère fois sous la plume de Marcel Waline en 1948,
celui-ci ayant publié un article dans la revue du droit public consacré à une catégorie
particulière qui était la notion de régie intéressée, et à cette occasion il va faire des
comparaisons entre différentes catégories de contrats administratifs.

Un contrat d’affermage : il y a affermage lorsqu’une personne publique que l’on appelle


l’autorité affermante confie contractuellement la charge d’assurer pendant une période
déterminée (assez longue) l’exécution d’un service public à une personne privée qu’elle a
librement choisie et que l’on appelle le fermier.
Différence avec la concession : lorsque la collectivité publique recours à un fermier c’est
parce que les réseaux nécessaires à l’exploitation du service ont déjà été réalisés.
Un contrat un jour de concession de service public, si on poursuit dans une logique de
délégation de service public (DSP) avec un nouveau contractant privé, ne pourra pas rester
un contrat de concession mais devra se transformer en contrat d’affermage car une fois les
travaux réalisés on ne demande plus au contractant que d’exploiter le service public,
d’entretenir les ouvrages, mais on ne lui demande pas de construire les ouvrages nécessaires
au service car ils existent déjà.

77
En ce sens CE 29 avril 1987 Commune D’Elancourt : il s’agissait de qualifier un contrat conclu
pour assurer la distribution d’eau dans la commune d’Elancourt.
A l’occasion du conflit né entre la commune et la société privée avec laquelle elle avait passé
un contrat, le juge a du qualifier ce contrat, et pour le juge administratif saisi en 1 er ressort ce
contrat était un contrat de concession.
Le CE qui a été saisi en appel dans cette affaire, a jugé lui qu’il s’agissait d’un contrat
d’affermage.
Affermage car dans la concession le cocontractant doit prendre en charge la plus grande
partie des frais dits de premier établissement.
Le mode de financement de la personne publique.
Comment est rémunéré le cocontractant de la personne publique ?
Dans le cadre d’une concession ou d’un affermage la plus grande par de la rémunération du
cocontractant doit être assurée par l’exploitation du service.
La rémunération provient de l’exploitation du service, elle est assurée par les usagers du
service public, qu’il s’agisse d’un SP concédé ou d’un SP affermé.
La personne publique ne rémunère pas son cocontractants ou très peu, les ressources
proviennent de l’exploitation et donc des usagers.

c) Les marchés publics

Les marchés publics sont également des contrats administratifs très classiques, anciens.
Code des marchés publics : « les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux
entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l’article 2 et des opérateurs économiques publics
ou privés pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fourniture, ou de
services ».

Si on est en présence de DSP la conclusion de ce marché est soumise à des contraintes, la loi
Sapin de 1993.
En revanche en présence de marchés publics on obéit aux règles des marchés publics.
Critère de la rémunération des contractants pour distinguer les deux.
Le prix est la contrepartie directe de la prestation fournier par l’entreprise partie au contrat.
Ce n’est pas l’exploitation qui produit la rémunération du cocontractant, c’est le paiement
par la personne publique.

B) Les contrats administratifs plus originaux

Apparus plus récemment, et par ailleurs utilisés moins fréquemment.

a) La régie intéressée

CE 6 avril 1895 Deshayes : contrat qualifié de régie intéressée par le juge, l’arrêt est
effectivement totalement muet en ce qui concerne les critères d’identification de cette régie
intéressée.

Distinction entre la concession et la régie intéressée, le critère fondamental est constitué par
la prise en charge ou non des risques et périls de l’exploitation.

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Ce que souligne Waline c’est que dans la CSP c’est le concessionnaire qui assure les risques
et périls de l’exploitation du service public qui lui est confié.
Alors que le régisseur intéressé (régie intéressée) qui est un cocontractant privé, n’exploita
pas à ses risques et périls.
Il ajoute que le régisseur n’est pas rémunéré par des redevances perçues sur les usagers.
« La régie intéressée est un contrat de courte durée (plusieurs années) ayant pour objet de
confier la gestion et l’entretien d’un service public, aux risques et périls de la collectivité
déléguante à une personne physique ou morale moyennant une rémunération limitée dans
son ensemble et composée d’une prime de base fondée sur les résultats de l’exploitation
qu’il soit financier (participation aux bénéfices ou aux déficits notamment), qualitatif ou
quantitatif ».

C’est la personne publique qui rémunère son cocontractant comme dans un marché, mais
les éléments qui permettent de le faire sont incertaines ;
On parle de prime de gestion, donc de performances.

b) La gérance

CE 9 oct 1968 Sieur Pigalle : contrat qualifié de contrat de gérance sans expliquer ce que
c’est.
Selon la commissaire du gouvernement c’est une notion juridique introuvable dans un arrêt
du CE de 1999.

c) Le marché d’entreprise de travaux publics (METP)

Dans un arrêt du 26 novembre 1971 : le contrat en question dans cette affaire avait été
qualifié de marché d’entreprise de travaux publics, pour dire que le contrat en question
n’était pas une concession de service public, et le CE ne donne toujours pas les clés pour
identifier ce qu’est un METP.

Repris plus tard dans CE 28 juillet 1985 Sté Lyonnaise des eaux et de l’éclairage :
CE : « la convention conclue entre l’Etat et la Sté lyonnaise des eaux qui avait pour objet la
réalisation et l’exploitation d’équipements permettant la réalimentation d’un site aquifère
est un contrat de droit public mais ne présente pas les caractères de concession de service
public mais d’un marché d’entreprise de travaux publics ».
Peu d’importance tant que le METP est resté un contrat dont on peut dire qu’il est plutôt
exotique, extrêmement rare que les parties le qualifie de METP car elles ne savaient pas ce
que c’était.

Mais l’intérêt de la qualification de contrat de METP s’est développé au début des années
1990, car à cette époque on a vu un certain nombre de collectivités publiques recourir de
manière importante à ce contrat rare qu’était le METP.
Du METP en masse de la part des collectivités.
Ce fut le cas de l’Ile de France qui a recouru à cela pour assurer l’entretien et la rénovation
des lycées de la région.
Car les régions sont encore en charge des lycées pour l’instant.

79
La région Ile de France a signé des contrats avec des entreprises qualifiés systématiquement
de METP.
Certains ont trouvé ces contrats particulièrement intéressants, car le METP n’est pas une
DSP, il n’est donc pas soumis aux règles contraignantes de la loi Sapin.
Ce n’est pas non plus un marché public, donc pas de respect du code des marchés publics.
Encouragement par les juristes donc, mais dérive.
Mais le CE n’est pas de cet avis, il va donc mettre en évidence que même si ce METP est un
contrat un peu singulier, il entre dans la catégorie des marchés publics, il doit donc respecter
les contraintes de ce code des marchés publics.
Le critèe de distinction est encore la façon dont le cocontractant est rémunéré.
La rémunération dans le METP vient de ce que la collectivité verse au cocontractant, qui est
donc rémunéré par un prix.
Mais ce prix contrairement à ce qui se passe dans un marché public ordinaire dans lequel le
prix est versé rapidement par la collectivité dès que la prestation est réalisée, c’est que le
METP permettait un paiement échelonné du prix sur plusieurs années, les collectivités ne
devaient plus payer directement le prix de la chose.

d) Les contrats de partenariat

Pas très original car les autres sont aussi un peu des partenariats.
Contrat spécifique créé par l’ordonnance du 17 juin 2004 dans laquelle le législateur dit que
les contrats de partenariat sont des contrats administratif, mais ce ne sont ni des DSP ni des
marchés publics.
Cela ne signifie pas qu’ils ne pourraient pas être conclus sans modalités particulières, car ce
sont des contrats A par lesquels l’Etat ou un établissement public de l’Etat ou les CT et leurs
établissements publics confie à un tiers pour une période déterminée en fonction de la
durée d’amortissement des investissements retenus, une mission globale relative au
financement d’investissements immatériels d’ouvrages ou d’équipements nécessaires au
service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements ainsi qu’à
leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et le cas échéant à
d’autres prestations de services concourant à l’exercice par la personne publique de la
mission de service public dont elle était en charge.

SECTION 2 : L’EXECUTION DES CONTRATS

§1 : LA CONCLUSION DES CONTRATS

A) La volonté de contracter

80
Pour être régulier, le contrat administratif suppose l’existence d’une volonté de contracter, il
suppose comme pour tout contrat le consentement des parties, qui doit être éclairé et libre.
Evidemment si ce consentement n’a été donné que par erreur, ou si encore il résulte d’un
dol, ou s’il a été obtenu par la violence, on se trouve en présence de vices du consentement
qui entrainent la nullité des dispositions affectées par ces vices, et la nullité du contrat.
Les vices du consentement trouvent aussi à s’appliquer en droit administratif, pour les
contrats administratifs.

TA de Paris 21 avril 1971 Ville de Paris : affaire de dol.


CE 19 janvier 1945 Société des aéroplanes voisins : arrêt qui illustre un cas de violence.
CE 26 mars 1951 Domergue : illustration d’erreur commise par l’Administration sur la
personne du cocontractant.

Les vices du consentement existent en matière de contrats administratifs, mais pas de


jurisprudence surabondante, elle est rarissime.
Il n’en demeure pas moins que le dol est un vice du consentement qui connait un certain
nombre de jurisprudences.

B) Le choix du cocontractant

a) Le principe de la liberté de choix du cocontractant par la personne publique

Cette liberté dont dispose l’Administration pour choisir son cocontractant a été mise en
évidence dans le cadre de ce que l’on appelle les contrats de DSP, donc affermages, marchés
de travaux public, concessions de SP, donc très gros contrats.
C’est le principe de l’intuitu personae.

Même liberté pour des contrats plus petits, comme les contrats de marchés publics de
travaux, moins de 4000 euros.

b) Une liberté encadrée

Liberté de choix depuis de nombreuses années encadrée que ce soit par le code des marchés
publics, par la loi Sapin de 1993 relative aux DSP.
Si la liberté de choix de l’Administration apparait aujourd’hui encadrée, c’est que
l’Administration est tenue de respecter des obligations de publicité et de mise en
concurrence.
Lorsqu’une personne publique veut conclure un contrat, elle doit respecter ces deux
obligations, qui varient en fonction des contrats en cause.
Pour des très grands contrats de marchés publics elle devra faire une publicité non
seulement au niveau national, mais aussi au niveau européen.
Si elles ne sont pas respectées elles peuvent donner lieu à des référés précontractuels, ou à
des recours de plein contentieux.

81
§2 : LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES AU CONTRAT

A) Les prérogatives de l’Administration

Prérogatives de la personne publique partie au contrat.

a) Le pouvoir de contrôle et de direction

L’Administration peut vérifier que son cocontractant se comporte conformément aux clauses
du contrat.
Et elle peut ce faisant imposer certaines modalités d’exécution en adressant des ordres de
service à son cocontractant, notamment dans les marchés publics de travaux, elle pourra
ordonner la réfection de travaux lui paraissant défectueux.

b) Le pouvoir de sanction

La personne publique partie au contrat peut imposer à son cocontractant des sanctions pour
méconnaissance des clauses du contrat, ou pour inobservation des instructions reçues, des
fameux ordres de service.
Sanctions le plus souvent pécuniaires, comme les pénalités pour retard d’exécution,
lesquelles pénalités sont d’ailleurs en règle générale systématiquement introduites dans les
clauses du contrat.

Si la personne publique n’est pas satisfaite du travail réalisé par son cocontractant, la
personne publique peut, sans rompre le contrat initial, faire appel à un tiers, lequel tiers va
se substituer au cocontractant initial, et assurer donc l’exécution du contrat.
Mais ce tiers va assurer l’exécution du contrat aux frais et risques du premier cocontractant.
Cette possibilité qui n’est que rarement utilisée en pratique, peut être utilisée en matière de
travaux publics, ce que l’on appelle la mise en régie du marché (même si c’est un terme
infondé), ou aussi dans le cadre d’une délégation la mise sous séquestre de la concession.

c) Le pouvoir de modification unilatéral des obligations du cocontractant

La partie publique au contrat peut aggraver les obligations de son partenaire en modifiant
unilatéralement ses obligations.
C’est ce que l’on a coutume d’appeler le principe de mutabilité du contrat, principe qui a été
affirmé par un arrêt ancien du 11 mars 1910 Compagnie des tramways (GAJA), rendu sur les
conclusions de Léon Blum commissaire du gouvernement.
Dans cette affaire le préfet du département des Bouches du Rhône avait demandé à la
compagnie concessionnaire du tramway d’augmenter le nombre de rames de tramway, pour
faire face aux besoins accrus de la population, surtout pendant la période d’été.
Ce surplus de service avait été demandé à la société concessionnaire, alors que la chose
n’avait pas été prévue dans le contrat de concession.
La partie publique au contrat pouvait-elle demander unilatéralement de modifier ses
obligations contractuelles ?

82
Léon Blum a estimé dans ses conclusions que « l’Etat ne peut pas se désintéressé du SP de
transports une fois concédé, il est concédé sans doute, mais il n’en demeure pas moins un
service public (…) ; l’Etat interviendra donc nécessairement pour imposer le cas échéant au
concessionnaire une prestation supérieure à celle qui était prévue strictement (…) en usant
du pouvoir qui lui appartient en tant que puissance publique ».
Dans ces mêmes conclusions, Blum mettait en évidence l’existence d’un « droit de
règlementation » qui est indépendant du contrat puisqu’il à pour objet final d’assurer quoi
qu’il en ait été convenu, quoi qu’il arrive, l’exécution normale du service public.
Le CE dans sa formation de jugement s’est montré très favorable à cette analyse, car la
juridiction parlera d’un « droit de prescrire les modifications et les additions nécessaires
pour assurer dans l’intérêt du public la marche normale du service ».
Evidemment elle perçoit une contrepartie financière.

d) Le pouvoir de résiliation unilatérale du contrat par la partie publique au contrat

L’Administration dispose du pouvoir de procéder à une résiliation unilatérale du contrat.


Signification : l’A peut résilier unilatéralement, d’elle-même le contrat sans saisir
préalablement le juge du contrat, ce que ne peut pas faire la partie privée au contrat,
laquelle pourra obtenir la résiliation du contrat en s’adressant au juge du contrat si elle à de
bonnes raisons de l’obtenir.
Ce pouvoir peut paraitre exorbitant, voir effrayant, mais l’Administration ne peut pas le
mettre en œuvre uniquement selon son bon plaisir.
L’Administration peut certes résilier unilatéralement, mais il faut pour ce faire qu’elle
invoque un motif légitime de résiliation, qui sera le plus souvent le non respect par la partie
privée au contrat de ses obligations contractuelles, autrement dit la défaillance grave de la
partie privée au contrat.
La personne publique dispose à l’intérieur de ce pouvoir exorbitant d’un pouvoir encore plus
exorbitant quoi est celui de résilier pour motif d’intérêt général.
Ce motif d’intérêt général est contrôlé par le juge administratif, de même que la défaillance
est placée sous le contrôle du juge du contrat.
Quand bien même après contrôle cette résiliation unilatérale est intervenue légalement, cela
ne dispense pas la personne publique d’indemniser son cocontractant, son droit à
indemnisation reste intact, entier.

B) Les droits et obligations du cocontractant

a) Des droits essentiellement pécuniaires

Le cocontractant privé de l’Administration à droit au paiement des prix convenus en


règlement des prestations, étant précisé que le code des marchés publics fixe des délais de
paiement, et qu’en cas de retard l’entrepreneur privé à droit à des intérêts de retard.
CE 4 mars 1988 centre hospitalier Robert Ballanger.

Les droits pécuniaires apparaissent de manière plus remarquable en cas de résiliation du


contrat, puisque même en cas de résiliation parfaitement justifiée du contrat, le droit à
indemnisation du cocontractant reste entier.

83
Il à le droit à la réparation de l’intégralité des préjudices qui résultent pour lui de la remise
en cause du contrat.
La résiliation jugée pourtant régulière de la concession de la chaine de télévision France 5 a
donné lieu au versement de 193 millions de francs d’indemnité, arrêt de la CAA de Paris du
25 avril 1996 Société France 5.

b) L’obligation d’exécuter le contrat

Le cocontractant de la personne publique est tenu de s’acquitter de ses obligations


contractuelles sous peine d’encourir des sanctions ou d’engager sa responsabilité
contractuelle, mais plus précisément il a été mis en évidence par la jurisprudence que sauf
cas de force majeure ou fait de l’Administration le mettant dans l’impossibilité d’exécuter le
contrat, le cocontractant ne peut pas suspendre l’exécution du contrat, même pour riposter
à un comportement fautif de la partie publique.
Autrement dit il n’est pas possible pour la partie privée au contrat, comme cela l’est dans un
contrat privé, d’opposer l’exception d’inexécution.
En ce sens CE 7 janvier 1976 Ville d’Amiens.
CE 3 novembre 1982 Forma.

C) La théorie du fait du prince

On parle effectivement d’une théorie du fait du prince, qui joue au profit du cocontractant
lorsque les conditions d’exécution du contrat sont aggravées, autrement dit lorsqu’il y a
rupture de l’équilibre entre les charges et les profits, au vu desquels le cocontractant avait
accepté de contracter.
Cette théorie dite du fait du prince est susceptible de jouer dans différents cas de figure.

a) L’aggravation résultant d’une personne publique tiers au contrat

L’aggravation est ici le fait du prince, intervention d’une loi ou d’un décret ayant une
incidence sur l’exécution de contrats, il peut s’agir la règlementation des prix, ou des textes
imposant la prohibition de certains produits utilisés dans le cadre d’un contrat.
Dans ce cas de figure la jurisprudence fait apparaitre que le cocontractant n’a pas de droit au
rétablissement de l’équilibre financier du contrat, toutefois cette même jurisprudence fait
apparaitre que peut naitre une obligation pécuniaire pour l’Administration, si ce texte
entraine un bouleversement de l’économie du contrat.
Dans ce cas la théorie de l’imprévision est susceptible de jouer.

b) L’aggravation résultant de la personne publique contractante agissant en une qualité


autre que celle de partie au contrat

Un maire d’une commune qui établit des rues piétonnes en usant de son pouvoir de police,
ces décisions ayant des conséquences sur le service de transport en commun, délégué par la
collectivité à une sté privé.

84
Si les effets de ces mesures frappent la cocontractant, celui-ci à le droit au rétablissement de
l’équilibre financier du contrat.

c) L’aggravation décidée par l’Administration contractante, en qualité de partie au


contrat

CE 21 mars 1910 Compagnie française des tramways :


Le juge avait reconnu l’existence d’un pouvoir de modification unilatérale des obligations de
la partie au contrat, principe de mutabilité du contrat.
Mais ce principe a été équilibré par un principe d’équation financière, qui signifie que si
l’Administration peut demander plus à son cocontractant, celui a droit au rétablissement de
l’équilibre du contrat, et donc au paiement des prestations supplémentaires qui lui ont été
demandées.

D) La théorie de l’imprévision

a) Les conditions de l’état d’imprévision

Conditions fixées par CE 30 mars 1916 Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux :


De cet arrêt il résulte que l’état d’imprévision ne peut résulter que d’un évènement
imprévisible au moment de la conclusion du contrat, et cet évènement doit entrainer un
bouleversement de l’économie du contrat, et donc pas seulement une rupture de son
équilibre financier.
L’évènement en question doit être étranger à la volonté des parties.

Ces évènements à l’origine de la mise en œuvre de la théorie de l’imprévision sont divers et


variés.
Dans l’affaire dite du gaz de Bordeaux, il s’agissait d’une hausse du prix du charbon qui
résultait de la guerre.
Or lé charbon servait à fabriquer le gaz d’éclairage à l’époque.
Compte tenu de l’explosion du prix du charbon et donc du gaz, la société concessionnaire du
l’éclairage de Bordeaux courait à la ruine, d’autant plus que le contrat ne permettait pas une
augmentation des tarifs qui aurait permis d’équilibrer les pris du charbon et du gaz.

Aussi catastrophes naturelles, inondations, sécheresse, séisme, ou même s’agir d’une


mesure émanant d’une personne publique autre que la partie au contrat.
CE 4 mai 1949 Ville de Toulon : en l’espèce le juge a admis l’état d’imprévision résultant des
mesures décidées par l’autorité militaire pendant la guerre, ces mesures étant des mesures
qualifiées de mesures d’obscurcissement.
La société en charge de l’éclairage au gaz a eu des difficultés considérables.
CE 15 juillet 1949 ville d’Elbeuf : l’état d’imprévision a été reconnu, résultant de l’édiction
par l’Etat de mesures de règlementation des prix et des tarifs publics.

b) Les conséquences de l’imprévision

85
L’existence de l’état d’imprévision fait obligation à l’Administration contractante d’aider
financièrement le cocontractant à exécuter le contrat, en lui versant une indemnité que l’on
appelle une indemnité d’imprévision.
L’Etat d’imprévision ne libère pas le cocontractant de ses obligations contractuelles, le
cocontractant doit continuer l’exécution du contrat même s’il est en grande difficulté.
Et il doit continuer l’exécution du contrat sous peine de perdre son droit à l’obtention d’une
indemnité d’imprévision.
En ce sens CE 5 novembre 1982 Société Propétrole.
L’aide apportée sous forme d’une indemnité pour imprévision doit permettre au
cocontractant de faire face à une difficulté temporaire.
Ce qui signifie que si la situation financière du cocontractant est définitive, n’est plus viable,
la résiliation du contrat sera prononcée.
En ce sens CE 9 décembre 1932 compagnie des tramways de Cherbourg.
La partie privé a cherché à obtenir l’aide de la partie publique contractante, mais le Ce a vu
que la seule solution était la résiliation du contrat.
Cette situation financière dégradée a été analysée en un cas de force majeure justifiant
l’annulation du contrat.

L’indemnité d’imprévision peut être accordée même si le contrat a pris fin.


CE 27 juillet 1951 Commune de Montagnac.

L’existence d’une clause de variation des prix n’est pas un obstacle à l’obtention d’une
indemnité d’imprévision comme le souligne CE 19 février 1992 Société anonyme dragage et
travaux publics.

Théorie qui entretien des liens étroits avec le principe de continuité du service public.
En effet c’est pour que ce principe de continuité du SP soit respecté, que la théorie de
l’imprévision a été inventée.
Elle constitue un moyen d’assurer la continuité du SP qui serait compromise si le
cocontractant public ne venait pas en aide avec son indemnité au cocontractant privé.
Théorie qui a joué dans des circonstances exceptionnelles, notamment pendant la guerre, la
jurisprudence se fait plutôt rare en la matière.

86
CHAPITRE 4 : La responsabilité de la puissance
publique

SECTION 1 : PRINCIPES GENERAUX EN LA MATIERE

§1 : LES CONDITIONS DU DROIT A REPARATION

A) Le préjudice

La victime d’un préjudice à la charge de faire la preuve du préjudice qu’elle a subi, du


dommage qu’elle a subi.

a) Le caractère certain du préjudice

Un préjudice certain peut être aussi bien actuel que futur.


Ne sont pas certains les préjudices dont la réalisation n’est qu’une éventualité.
Par exemple des parents réclamant des dommages et intérêts pour compenser l’aide que
leur aurait apporté dans l’avenir leur enfant, qui ne pourra pas le faire car il est mort dans un
accident.

Néanmoins la jurisprudence considère que la perte d’une chance peut être considérée
comme un préjudice certain, si l’on se trouve en présence d’une chance sérieuse, si le juge
estime qu’on est en présence perte de chance sérieuse.
Ainsi le juge a admis qu’ouvre droit à réparation la perte de chance sérieuse de réussir à un
examen ou à un concours, ou d’une chance sérieuse de bénéficier d’un avancement.
CE 3 novembre 1971 Demoiselle Cannac.
CE 17 mars 1972 Demoiselle Jarrige.

Aussi signaler la perte d’une chance sérieuse d’obtenir un contrat.


CE 19 avril 1985 Commune de Vitrol.

Ou encore la perte d’une chance sérieuse d’éviter une infirmité ou une opération.
CE 6 février 1974 Gomez.

87
b) L’égale réparabilité de tous les préjudices

Ouvrent droit à réparation les préjudices non seulement matériels, mais aussi les préjudices
moraux.

S’agissant des préjudices matériels il s’agira aussi bien de dommages corporels résultant
d’un accident, que de dommages aux biens résultant de la détérioration d’un bien.

Avec les dommages moraux on entre dans un domaine beaucoup plus subjectif qui est celui
des sentiments.
Pendant longtemps le juge refusait de les indemniser, considérant qu’il était impossible de
les indemniser.
Abandon de l’idée que la douleur ne se monnaye pas.
Autrement dit aujourd’hui les larmes ont un prix.

Sont ainsi réparables différents types de préjudices moraux :


Atteinte à l’honneur ou à la réputation d’une personne.
CE 1957 Demoiselle Artus : dans cette affaire le juge estime qu’une injonction injustifiée de
se soumettre à des examens médicaux sur le dépistage des maladies vénériennes, injonction
adressée à une jeune femme, est à l’origine d’un préjudice moral qui est réparable, dont il
appartient au juge administratif en l’espèce d’en connaitre car adressée à un agent public.

CE 3 avril 1936 Sudre : affaire dans laquelle le juge accepte de prendre en compte et de
réparer le préjudice causé à la réputation d’un artiste du fait de l’Etat d’abandon de la
fontaine monumentale que cet artiste avait réalisé pour une commune.

Le juge depuis longtemps déjà a pris en compte et accepté de réparer les souffrances
physiques qui sont éprouvées par la victime d’un accident corporel.
Souffrances physiques à la fois objective et subjective, qui est à la fois dans les deux camps,
mais classée ici dans les préjudices moraux.
Pareil pour les opérations chirurgicales nécessaires pour réparer les conséquences de
l’accident.
CE 24 avril 1942 Morell.

Le juge accepte encore de prendre en compte au titre du préjudice moral consécutif à la vue,
ou à la pensée des atteintes portées à son intégrité physique et à son harmonie corporelle.
CE 27 octobre 1965 Kankowsky.

Acceptation de réparer le préjudice moral résultant de la naissance d’un enfant atteint de


trisomie 21 à la suite de l’échec d’une amniocentèse, destiné à détecter cela.
CE 14 février 1997 CHR de Nice contre époux Quarez.

Font l’objet d’une réparation au titre du préjudice moral les troubles dans les conditions
d’existences tel que les obligations de changer ses habitudes, son mode de vie,
d’interrompre ses études, abstention d’activité sportive.

88
Réparation de la douleur morale résultant du décès d’un proche, douleur morale que les
juges se sont longtemps refusés à prendre en compte, considérant que le slarmes ne se
monnayent pas.
Revirement opéré en 1961 par le juge administratif.
CE 24 novembre 1961 Letisserand.
Sur cette question le juge administratif était en retard sur le juge judiciaire, mais pendant
longtemps a perduré une différence dans les sommes attribuées, le juge judiciaire se
montrant plus généreux que le juge administratif.
Décalage ayant tendance à s’estomper ces dernières années.
Il existe une sorte de barème de la douleur morale, qui conduit le juge administratif à allouer
des sommes allant de 5000 à 7000 euros pour le décès d’un parent proche tel que père mère
ou conjoint, la somme étant moindre en ce qui concerne un frère ou une sœur.

c) Quelques dommages ne pouvant faire l’objet de réparations

C’est le cas des dommages qui sont liés aux modifications apportées à la circulation
générale, plus précisément résultant de changements effectués dans l’assiette ou dans la
direction des voies publiques, ou résultant de la création de voies nouvelles.
CE 2 juin 1972 Société les vedettes blanches :
Existence d’une route établie sur le barrage de la Rance, usine de production d’électricité,
surmonté d’une route à 4 voies.
Le barrage a fait tomber en désuétude les bacs.
La société a demandé donc réparation, victime de la création de cette voie publique
nouvelle, pas d’indemnisation.

Les servitudes d’urbanisme n’ouvrent aucun droit à indemnité.


CE 8 janvier 1993 Société compagnie fermière de Font-Romeu.

La naissance d’un enfant en conséquence de l’échec de l’avortement demandé par la mère


« n’est pas génératrice d’un préjudice de nature à ouvrir à la mère un doit à réparation, sauf
circonstances ou situations particulières ».
CE 2 juillet 1982 Demoiselle R.
Ces circonstances particulières ont été jugées présentes dans un arrêt postérieur, CE 27
septembre 1989 Dame Karl.
Le juge dans des circonstances analogues a jugé l’existence de graves infirmités causées au
fœtus.

89
B) La relation de cause à effet

La responsabilité d’une personne publique à qui réparation est demandée ne peut être
engagée que si le fait qu’on lui impute a été la cause directe du préjudice.

a) Le juge administratif fait application de la théorie de la causalité adéquate

Elle se distingue de la théorie de l’équivalence des conditions qu’elle consiste à considérer


que tout est la cause de tout.
La réalisation d’un dommage est attribuée par le juge, à celui des faits dont on peut estimer
qu’il avait une vocation particulière à provoquer le dommage.
Cela peut donner lieu à des appréciations déraisonnables.
CE 14 octobre 1966 Marais : l’affaire se passe sur une voie publique, une chaussée subi un
affaissement.
Un camion qui passe sur cette voie publique, subi un choc en passant au niveau de cet
affaissement qui conduit le conducteur à s’arrêter.
Mais il estime qu’il peut repartir, quelques kilomètres plus loin le camion tombe en panne.
Le juge va considérer qu’il n’existe qu’un lien indirect entre l’affaissement de la chaussée et
la surchauffe du moteur.
Pour le juge le fait qui est directement à l’origine du dommage n’est pas les dégâts subis par
le camion, la cause est que le conducteur a remis en marche, et est reparti sans avoir
constaté que le radiateur du moteur n’avait pas subi de dégâts.

CE 7 mars 1969 Etablissement Lassailly et Bichebois : la victime du dommage était un


exploitant d’un cinéma, ayant effectué un remplacement des moquettes de sa salle, et il a
constaté un jour que la moquette toute neuve était maculée de taches de goudron, et que
chaque jour les choses empiraient.
Le juge dans cette affaire a mis en évidence que si l’exploitant subissait ce dommage, c’est
en raison de la réfection de la place publique proche de cette salle.
Le juge a estimé que l’exploitant de la salle subissait un préjudice dont la cause directe était
le regoudronage de cette place publique, cause directe du préjudice étant les travaux publics
réalisés sur cette place.

La causalité est d’autant plus évidente aux yeux du juge que le dommage suit de peu dans le
temps la survenance des faits qui en sont la cause.
CE 21 mars 1969 Dame Montreer : dans lequel le CE souligne l’absence de causalité directe
entre la délivrance d’une autorisation de détention d’arme, et l’utilisation de cette arme 3
ans après la délivrance de l’autorisation pour commettre un meurtre.

CE 20 novembre 1985 Dame Ramade : absence de causalité directe entre la faute à l’origine
de l’évasion d’un détenu lors d’un transfert et les meurtres commis par ce détenu en cavale
48 jours plus tard.
Pas de causalité directe selon le CE.

La solution retenue dans une autre affaire montre la difficulté d’appréciation.

90
CE 29 avril 1987 Banque populaire de la région économique de Strasbourg :
Vol a main armée commis par des détenus permissionnaires, vols commis deux mois après
leur non retour à la prison.
La juge a considéré qu’on était dans une association de malfaiteurs constituée en quelques
jours, et le vol prenait la suite de diverses agressions, lesquelles constituaient une chaine
ininterrompue de méfaits assurant un lien direct entre le non retour des permissionnaires et
le vol.

b) Les causes étrangères

La personne publique responsable, dont la victime estime qu’elle est responsable, a pu ne


pas jouer seule un rôle dans la survenance du dommage.
Causes étrangères possibles, dont la 1ère est le comportement de la victime, donc une faute
commise par la victime peut être à l’origine du dommage, ou à tout le moins à l’origine
d’une partie du dommage.
Il peut aussi y avoir une force majeure, un évènement de force majeure.

Est constitutif de force majeure un élément qui combine les 3 caractéristiques :


- Extériorité par rapport au défendeur
- Imprévisibilité dans la survenance de l’évènement
- Irrésistibilité, dans ses effets

La force majeure est prise en compte par le juge administratif.


CE 26 juin 1963 Calkus : dans cet arrêt le CE nous parle de pluie d’orage ayant, à raison de
leur durée et de leur intensité exceptionnelle, et de leur imprévisibilité un caractère
exceptionnel, un évènement de force majeure.

A l’inverse CE 25 mars 1988 Territoire de Nouvelle Calédonie : arrêt dans lequel le CE


souligne que n’ont pas le caractère d’un évènement de force majeure s’agissant de pluies
cycloniques, très abondantes, survenues dans le cadre d’un cyclone, eu égard à leur
caractère prévisible dans la région.

Cette force majeure doit être distinguée du cas fortuit.


Le cas fortuit est certes imprévisible, irrésistible, mais il n’est pas étranger au défendeur, de
ce fait il n’est pas une cause étrangère.
CE 28 mai 1971 Département du Var contre entreprise Bec frères.
CE 22 octobre 1971 Ville de Fréjus.
Affaire de la rupture dans les années 50 d’un barrage d’EDF ayant entrainé la mort de
plusieurs centaines de personnes.
La cause de la rupture du barrage n’était pas extérieure au barrage, expulsion de roche à
l’aval du barrage, donc pas en l’espèce de force majeure.
Pas de vice de conception de l’ouvrage, pas de vice de construction, ni de défaut d’entretien,
présence donc d’un cas fortuit, qui est une cause inconnue.
Ce cas fortuit établit l’absence de faute du défendeur (EDF), et à donc un effet exonératoire
si l’on se trouve dans le cadre d’une responsabilité pour faute, mais sans conséquence en cas
de responsabilité sans faute.

91
S’il y a faute de la victime ou force majeure, si le dommage provient exclusivement de l’une
ou l’autre de ces causes, le défendeur est exonéré de toute responsabilité.
Si une de ces causes à seulement contribuée au dommage, la responsabilité du défendeur
est engagée dans l’exacte mesure ou son fait a causé le dommage.
Si l’on est en présence d’un fait du tiers, et dans le cadre d’une responsabilité pour faute, il a
pour effet une exonération totale ou partielle.
Si l’on est dans le cadre d’une responsabilité sans faute le fait du tiers est sans conséquences
sur la responsabilité du défendeur.

C) Les exigences concernant la victime

La victime d’un dommage peut ne pas avoir droit à réparation dans différents cas :

a) S’il est possible de lui opposer l’exception d’illégitimité

La victime se trouve ici dans une situation irrégulière, et du fait de cette irrégularité elle n’a
pas de droit à réparation.
CE 20 juin 1980 Commune d’Ax les termes.
Dans cette affaire présence d’un occupant irrégulier du domaine publique, sans titre.
Lequel se présentait comme victime des mesures prises par l’Administration pour mettre fin
à son occupation irrégulière.

CE 7 mars 1980 SARL 5 7 : affaire d’une boite de nuit dans laquelle un incendie s’est
déclenché, et dans laquelle des dizaines de gens ont péri les issues de secours étant
bloquées.
Le CE en 1980 met en évidence que les exploitants de cet établissement n’avaient pas
respecté la règlementation visant à assurer la règlementation du public, ne peuvent se
prévaloir des fautes, même lourdes, commises par l’Administration.

« On ne peut pas invoquer sa propre turpitude »

b) L’exception de précarité

Le titulaire d’une autorisation précaire d’occupation du domaine public, auquel on lui


demande pour l’exécution de travaux publics sur ce domaine public, de déplacer ses
installations.
Dans ce cas le titulaire d’autorisation précaire d’occupation du domaine public n’a pas droit
à réparation, le juge lui opposera cette exception de précarité.

c) L’exception de risque accepté

Exception opposée à des acquéreurs de logements ne pouvant ignorer qu’ils auraient dans
leur voisinage des voies de circulation bruyantes.
En ce sens CAA de Paris 9 juillet 1991 Syndicat des copropriétaires de la résidence de la
défense.

92
Personne ayant acheté une propriété au bord d’une rivière, mais ne pouvant ignorer que le
cour de cette rivière allait être modifié.
CE 13 décembre 1985 Monnerie.

CE 10 décembre 1967 Chambellan : il s’agissait d’un aviculteur qui s’était installé à proximité
d’un gros chantier de travaux publics, et dont le juge a dit qu’il ne pouvait ignorer que le
bruit du chantier pouvait perturber la ponte de ses volailles.

§2 : L’ETENDUE DE LA REPARATION

Le principe est que la victime à droit à la réparation intégrale de ses préjudices.

A) La date d’évaluation du préjudice

Pendant longtemps le juge administratif a considéré que le dommage subi par la victime
devait être évalué à la date de réalisation du dommage, ce qui avait pour effet pour le juge à
n’allouer que des dommages et intérêts insuffisants.
Cette position de principe a été abandonnée par une série d’arrêts, que l’on a coutume
d’appeler les arrêts des veuves, 3 arrêts concernant des veuves.
Ces arrêts des veuves opèrent un changement de jurisprudence qui s’appuie sur une
distinction entre dommages aux biens, et dommages aux personnes.

a) Les dommages aux biens

CE 21 mars 1947 Veuve Pascal : dans cet arrêt de 1947 le CE part du principe de l’évaluation
à la date de réalisation du dommage, il assorti le principe d’un certain nombre de correctifs.
Le CE indique que si pour une cause indépendante de sa volonté, la victime n’a pas été en
mesure de faire procéder sans délai aux travaux de réparation, l’évaluation du dommage est
reportée à la date ou l’exécution de ces travaux est devenue possible.
Etant précisé qu’avant 1947 cette impossibilité de réparer pouvait être d’ordre technique ou
juridique seulement, et à partir de 1947 cette impossibilité peut être une impossibilité
d’ordre financier, apport de l’arrêt Pascal, ce qui en pratique est plus fréquent.
Dans ce cas le juge admet que l’évaluation du dommage se fait beaucoup plus tard, reporté
à la date ou l’exécution des travaux est possible.

b) Les dommages aux personnes

CE 21 mars 1947 Veuve Aubry et veuve Lefèvre : il résulte que l’évaluation du préjudice se
fait à la date de la décision rendue par le juge, ce qui permet de mieux réparer le préjudice,
car le juge pourra prendre en compte les conséquences pécuniaires d’une incapacité de
travail, du coût de la vie.

93
B) Les déductions

Le juge a le souci d’éviter que les dommages et intérêts dépassent le préjudice à réparer.
Raison pour laquelle le juge procède à certaines déductions comme celle des sommes
versées à la victime par des organismes de sécurité sociale ou des organismes d’assurance,
les sommes reçues sont déduites des dommages et intérêts.

Cas particulier : lorsque le fait dommageable emporte des conséquences favorables à la


victime.
On le rencontre dans le cadre des travaux publics, chantier ayant une influence néfaste sur le
fonctionnement d’un hôtel, mais une fois ce chantier achevé il est possible qu’il en résulte
pour le propriétaire de l’hôtel une plus value, qui sera déduite par le juge si elle est directe
et spéciale.

SECTION 2 : LA RESPONSABILITE POUR FAUTE DE LA


PUISSANCE PUBLIQUE

En principe la responsabilité de la puissance publique est engagée si et seulement si une


faute a été commise.
Certes il existe des cas de responsabilité sans faute, exceptions.

§1 : LA NOTION DE FAUTE

Marcel Planiol a propos de la faute disait qu’elle est « un manquement à une obligation
préexistante, il y faute lorsqu’une personne ne s’est pas comportée comme elle l’aurait du ».
Cette définition de la faute reste incontournable.

A) La relation faute / Illégalité

Ces deux notions entretiennent en droit administratif une relation complexe.


En cas de dommage résultant d’un fait matériel, les deux notions se distinguent assez
nettement.
Si la chaussée d’une voie publique n’a pas été réparée correctement, il s’agit là de faits
matériels fautifs qui ne constituent pas des illégalités.
A l’inverse si le dommage résulte d’une décision administrative, les deux notions de faute et
d’illégalité apparaissent comme étant très liées, car si la décision est illégale elle est fautive.
Si la décision dommageable est légale, elle n’est pas fautive.
CE 26 avril 1985 Entreprise maritime Léon Vincent : arrêt dans lequel on pouvait lire « le
refus ministériel n’étant pas entaché d’illégalité, la responsabilité pour faute de l’Etat ne
saurait être engagée ».

94
B) L’établissement de la faute

C’est la victime qui à la charge de l’Administration de la preuve de la faute qu’elle invoque.


Cela place la victime dans une situation qui est difficile.
Car cette charge de la preuve de la faute est tout de même facilitée par le caractère
inquisitorial de la procédure, ce qui signifie que le juge administratif peut prescrire à
l’Administration de verser au dossier tous les éléments d’appréciation qu’elle détient.
Ce qui est une 1ère aide pour la victime.
Mais surtout la victime est aidée par des mécanismes de présomption de faute.
Pour la victime, l’intérêt de ces mécanismes est très important car elle renverse la charge de
la preuve, elle impose au défendeur qui est dans ce cas une personne publique, de prouver
qu’aucune faute lui étant imputable n’est à l’origine du dommage.
S’il y parvient le défendeur sera exonéré de responsabilité, il y arrive rarement.

On rencontre ces mécanismes dans différents domaines.


Le 1er domaine est celui des dommages de travaux publics.
Plus précisément les usagers d’un ouvrage public qui sont victimes du disfonctionnement de
cet ouvrage public, bénéficient d’une présomption de faute, faute du maitre de l’ouvrage.
Jurisprudence extrêmement abondante, relative au défaut d’entretien normal de l’ouvrage
public.
Imaginons un piéton qui tombe dans un ouvrage public, ou une voiture tombe dans une
tranchée.
Dans ce cas la victime de l’accident n’aura pas à prouver que la personne publique
responsable de l’ouvrage n’a pas correctement entretenu, pas à prouver le défaut
d’entretien de l’ouvrage.
La victime dans toutes ces affaires bénéficie d’une présomption de faute.
CE 5 octobre 1966 Del Carlo : dérèglement d’un appareil de signalisation à l’entrée d’un pont
à voie unique.
CE Communauté urbaine de bordeaux : Nappe de mazout sur une chaussée qui a provoqué
un accident, défaut d’entretien normal de la voie publique qui est présumé.

Aussi présomption de faute dans le domaine hospitalier, qui bénéficie aux personnes en
traitement dans les hôpitaux publics.
Ce mécanisme joue lorsque les soins donnés, ont des conséquences dommageables,
anormales, ou inattendues.
Dans ces cas le juge considère que ces conséquences dommageables ne peuvent s’expliquer
que par une faute commise dans l’organisation ou le fonctionnement du service.
Ce sera au service hospitalier de prouver éventuellement qu’aucune faute n’a été commise.
CE 22 décembre 1976 Dame Derridj : acte de soin courant et de caractère bénin, injection
intra musculaire, ayant entrainé une paralysie des membres inférieurs.

95
§2 : LA RESPONSABILITE POUR FAUTE LOURDE ET SES
EVOLUTIONS

Dans ces cas nombreux, la responsabilité de la puissance publique ne peut être engagée sur
le seul fondement d’une faute simple.
Romieu utilisait faute lourde et caractérisée indifféremment.

L’exigence de la faute lourde se rencontre dans le cadre d’activité de la puissance publique


dont on peut considérer qu’elle présentent des difficultés particulières d’exercice.

A) Les principales activités concernées par l’exigence de la faute lourde

a) Les services de secours et de lutte contre l’incendie

Exigence par le juge d’une faute lourde.


CE 21 février 1964 ville de Wattrelos : dans cet arrêt le CE conclue à une faute lourde
résultant de l’utilisation de matériel défectueux, et de la sous estimation des risques de
l’incendie.

CE 23 mai 1980 compagnie d’assurance la Zurich : Dans cet arrêt le CE souligne des
négligences et imprudences constitutives d’une faute lourde, ayant provoqué un incendie à
l’occasion des secours portés à un automobiliste bloqué dans sa voiture.
Faute lourde.

CE 22 juin 1983 Commune de Roches : Service de lutte contre l’incendie, le juge considère
qu’il y a faute lourde résultant de l’insuffisance de la pression et du débit d’eau à la sortie
des bouches d’incendie.
Relevé assez souvent par le juge.

b) L’activité du service pénitentiaire

Difficile de surveiller des prisonniers dans une prison, mais pour engager la responsabilité de
l’Administration pénitentiaire il faut qu’une faute lourde ait été commise.

CE 3 octobre 1958 Rakotoarinovy : le CE conclu à une faute lourde résultant de l’envoi


irrégulier d’un détenu à l’extérieur de la prison pour réaliser des travaux, détenu qui a
profité de l’absence de surveillance pour commettre un vol.

Le juge va caractériser comme fautes lourdes des défauts de surveillance aboutissant à la


mort de détenus, notamment par suicide.

CE 14 novembre 1973 Dame Zanzi : Le juge nous parle de négligences constitutives de fautes
lourdes s’agissant d’un détenu à tendances suicidaires connues ayant mis fin à ses jours.

96
CE 26 mai 1978 Consorts Wachter : faute lourde dans la surveillance d’un détenu dangereux
qui en allumant un incendie a provoqué le décès d’un codétenu.

CE 16 novembre 1988 Epoux Deviller : négligence grave des surveillants qui n’ont pas donné
l’alerte après avoir découvert un détenu inanimé dans se cellule.

c) Les activités de contrôle

Les activités de contrôle sont par définition difficiles à exercer, d’où l’exigence de la
commission d’une faute lourde.
Exigence apparue en matière de contrôle de tutelle sur les collectivités locales.
CE 27 décembre 1948 Commune de Champigny sur Marne : arrêt dans lequel le juge
souligne des négligences ayant parmi des détournements de fond par le receveur de la
commune.

Egalement en matière de contrôle de la navigation aérienne.


CE 26 juillet 1982 Société Spantax.

Egalement en matière de contrôle aux frontières :


CAA de Paris 17 octobre 1991 SA Hellot :

Contrôle et surveillance de l’exploitation des carrières souterraines.


CE 19 octobre 1988 Veillard :

d) Activités de police administrative

Pendant très longtemps a prévalu le principe d’irresponsabilité de la puissance publique,


principe qui est clairement exprimé dans un arrêt ancien : « l’Etat n’est pas en tant que
puissance publique, et notamment en ce qui touche les mesures de police responsables de la
négligence de ses agents », CE 13 janvier 1899 Lepreux.

Ce principe d’irresponsabilité de la puissance publique en matière de police a été remis en


cause par l’arrêt du CE du 10 février 1905 Tomaso Grecquo : affaire du taureaux furieux
d’une ville de Tunisie, pour l’arrêté plusieurs coups de feux furent tirés, dont l’un blessa le
sieur tomaso grecquo.
Pour la 1ère fois le CE admettait que la responsabilité de l’Etat pouvait être engagé par
l’action fautive des services de police.
Mais le recours fut rejeté car on n’a pas pu établir que le coup de feu qui a blessé avait été
tiré par un gendarme, et donc qu’une faute du service serait à l’origine du dommage.

CE 13 mars 1925 Clef : le commissaire du gouvernement Rivet dans cet arrêt avait eu ces
mots pour justifier l’exigence d’une faute lourde en la matière « pour s’acquitter de la lourde
tache de maintenir l’ordre dans la rue, les forces de police ne doivent pas voir leur action
énervée par des menaces permanentes de complication contentieuse.

97
e) L’activité fiscale, détermination et recouvrement des créances publiques

Ce 21 décembre 1962 Dame Husson-Chiffre.

Ce 27 janvier 1989 Chun ; le juge exigeait qu’une faute lourde soit commise, mais que rares
étaient les cas de reconnaissance d’une faute lourde.

CE 11 juillet 1984 Société industrielle de Saint Ouen.

f) Le fonctionnement du service public de la justice

La justice est une fonction régalienne par excellence, on a donc longtemps pensé que
l’activité de justice ne pouvait pas engager la responsabilité de l’Etat.
Principe d’irresponsabilité, qui a été remis en cause par la loi du 8 juin 1895 relative aux
erreurs judiciaires en matière criminelle ou correctionnelle.
Par cette loi on admettait que l’erreur judiciaire était possible.

Loi du 5 juillet 1972 qui dispose : « l’Etat est tenu de réparer le dommage causé par le
fonctionnement défectueux de la justice, elle n’est engagée que pour une faute lourde ou un
déni de justice ».

Pour un cas de faute lourde admise, cour de cassation assemblée plénière 23 février 2001
Bolle et Laroche (affaire du petit grégory) : arrêt dans lequel la cour de cassation souligne
qu’une faute lourde a été commise résultant de la succession de plusieurs anomalies dans
l’instruction d’une affaire criminelle.

Concernant la justice administrative, CE 29 décembre 1978 Darmont : arrêt dans lequel le CE


nous dit « en vertu des principes généraux régissant la responsabilité de la puissance
publique, c’est une faute lourde qui peut engager la responsabilité de l’Etat lorsqu’est
contesté l’exercice de la fonction juridictionnelle. L’autorité qui s’attache à la chose jugée
s’oppose à la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat dans le cas où la faute lourde alléguée
résulterait du contenu même d’un jugement devenu définitif ».

B) La régression de la faute lourde dans ses différentes activités

a) Les services de secours et de lutte contre l’incendie

Concernant ces services tournant pris en 1998.


CE 29 avril 1998 Commune de Hannapes : arrêt qui concernait un service de lutte contre
l’incendie, et le juge considère qu’un retard de 30 ou 40 minutes dans la mise en marche
d’une moto pompe est constitutif d’une faute de nature à engager la responsabilité de la
commune.
La novation en l’espèce résulte du fait que le juge parle d’une faute tout court sans la
qualifier, ce que précédemment il n’aurait jamais manqué de faire.
Le juge considère donc qu’une faute simple est susceptible d’engager la responsabilité de ce
service public.

98
Même solution retenue s’agissant d’un service de secours du secours en mer, CE 13 mars
1998 Amèon :

b) Activités du service pénitentiaire

CE 23 mai 2003 Chabba : Concernant le suicide d’un détenu placé en détention provisoire
pour 4 mois.
Le jour ou expirait sa détention provisoire de 4 mois, il a protesté de façon extrêmement
vigoureuse contre ce qu’il qualifiait de détention arbitraire, ignorant faute de notification
que cette détention provisoire avait été prolongée par une ordonnance du juge instructeur
parvenue au greffe de la prison.
Face à ces protestations d’une rare violence, les gardiens n’ont rien vérifié.
Quelques minutes plus tard il se pend dans sa cellule.
Pour le juge ce suicide est la conséquence d’une succession de fautes.
Tout d’abord l’omission de la notification de la détention provisoire.
Faute par abstention de vérification au greffe de la prison.
Puis absence de surveillance particulière du détenu compte tenu de la véhémence de sa
protestation.
Le juge dans cette affaire considère qu’une faut a été commise, et que cette faute engage la
resp du service pénitentiaire, donc la responsabilité de l’Etat.
Le juge se contente désormais d’une faute simple, pas de qualification de faute lourde.
Occasion de souligner la relativité de la distinction entre faute lourde et faute simple.

c) Les activités de contrôle

On observe aussi que certaines activités de contrôle échappent à l’exigence de la faute


lourde.
C’est ainsi qu’en matière de licenciement des salariés protégés, la faut simple de l’inspecteur
du travail suffit.
CE 9 juin 1995 Lesprit :

De même en matière de surveillance des forêts, le juge a conclu à l’absence d’exigence d’une
faute lourde concernant une mission de surveillance des forêts incombant à l’ONF.
CE 25 mars 1994 Commune de Kintzheim.

CE 9 avril 1993 D G B : arrêt relatif à la responsabilité de l’Etat en matière de sida post
transfusionnel, le CE a précisément souligné que « la responsabilité de l’Etat peut être
engagée pour toute faute, eu égard à l’étendue des pouvoirs détenus, le juge faisant
référence aux pouvoirs détenus par l’Etat en ce qui concerne l’organisation générale du
service public de la transfusion sanguine, et le contrôle des centres de transfusion ».
Situation ou le juge a estimé que compte tenu de la puissance des contrôles exercés par
l’Etat, il convenait de considérer que la responsabilité de l’Etat pouvait être engagée pour
toute faute.

CE 13 mars 1998 Amèont : Le contrôle technique des navires assuré par l’Etat, soue son
contrôle, peut engager la responsabilité de l’Etat pour faute simple.

99
Concernant le contrôle de la navigation aérienne évolution jurisprudentielle en faveur de la
faute simple.
CA de Versailles 11 septembre 2007 consorts Cyrot :

d) L’activité de police administrative

Le juge a adopté une position nuancée, tenant compte des circonstances de l’espèce.
Distinction entre l’activité de règlementation, et les opérations de police sur le terrain.
Partant de cette distinction, il a estimé que dans le 1er cas la faute simple suffit le plus
souvent (donc pas toujours), tout simplement parce que le juge part de l’idée qu’adopter
une règlementation en matière de police n’est pas très difficile, par contre en cas d’action
sur le terrain la faute lourde est généralement exigée, car agir sur le terrain est souvent plus
difficile que d’adopter une règlementation dans son bureau.
CE 13 mai 1983 Mme Lefebvre : concernant une abstention du maire d’une commune de
prendre les mesures règlementaires de nature à assurer la sécurité des usagers d’une
baignade.

Faute simple lorsque cette puissance s’est abstenue de prendre une mesure de police.
CAA de Bordeaux du 29 mars 2005 Ministre de l’intérieur contre Mr et Mme Asnar : dans cet
arrêt la CAA dénonce la carence fautive du maire et du préfet dans l’exercice de leurs
pouvoirs de police, et ce à propos de l’installation dans un quartier de la ville de Pau de plus
de 20 débits de boissons entre 1993 et 1996.
Lesquels portaient atteinte à la tranquillité publique.
Précisément l’arrêt reconnait des carences fautives, il est reproché au préfet de ne pas avoir
pris les mesures de police qu’il aurait pu prendre pour assurer la fermeture des débits à une
certaine heure, le juge y voit une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat, faute
simple.
Faute encore dans l’exercice de ses pouvoirs répressifs, en retenant cette faute on peut
considérer que le juge fait progresser la faute simple en matière d’opération sur le terrain.
Aussi faute du maire de Pau qui n’a pas pris les mesures sur le stationnement, donc
responsabilité de la commune aussi engagée.

A partir de la.
e) L’activité fiscale

Comme en matière de police, on a observé que le juge administratif a adhéré à la distinction


entre ce qui est facile et ce qui est plus difficile.
CE 27 juillet 1990 Bourgeois : on peut lire ce propos significatif : « les erreurs relevées à la
charge de l’Administration fiscale ont été commises lors d’opérations qui, si elles se
rattachent aux procédures d’établissement et de recouvrement de l’impôt, ne comportent

100
pas de difficultés particulières tenant à l’appréciation de la situation des contribuables, et
sont constitutifs d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat ».
Si opération plus complexe, exigence de la faute lourde.

CE 29 décembre 1997 commune d’Arcueil.

f) Fonctionnement du service public de la justice

Concernant la justice judiciaire, le code de procédure pénale assure sans condition de faute,
l’indemnisation des personnes qui après avoir été placées en détention provisoire ont
bénéficié d’une décision de non lieu, de relaxe ou d’acquittement.
Logique de responsabilité sans faute.

Concernant la justice administrative, le recul de la faute lourde n’est pas spectaculaire, mais
l’arrêt du CE du 28 juin 2002 Garde des sceaux contre Magiera qui met en évidence une
responsabilité de l’Etat pour faute simple en cas de délai de jugement non raisonnable.

C) Persistance de la faute lourde

Certes la tendance est à la régression de la faute lourde, cependant elle persiste dans
certains domaines.

a) Le contrôle de l’autorité de tutelle sur les collectivités territoriales

La solution persiste car le CE a souligné que le contrôle de légalité exercé par le préfet en
application de la loi de 1982, et plus exactement son mauvais exercice, n’engage la
responsabilité de l’Etat qu’en cas de faute lourde.

CE 21 juin 2000.
CE de Saint Florent.

Autre persistance à propos du pouvoir de substitution dont dispose le préfet en matière de


police, en cas de carence du maire de l’utilisation de son pouvoir de police.
Le juge a considéré que sa non mise en œuvre ne peut engager la responsabilité de l’Etat en
cas de faute lourde.
CE 18 novembre 2005 Société fermière de Campo Loro

b) Le fonctionnement de la justice

S’agissant de la justice administrative, la jurisprudence d’Armont n’a pas été encore


clairement remise en cause.
Néanmoins jurisprudence Magirat de 2002.

CE 7 décembre 1990 SCI Les Mouettes : qui conclu à l’absence de faute lourde.

101
Concernant le juge judiciaire cour de cassation 23 février 2001 Bol et Laroche.

TGI de Paris, 2 jugements dans lesquelles des fautes lourdes ont été mises en évidence.
TGI de Paris 5 janvier 2000 Mme Dasquet : à propos de l’omission en violation de la loi
d’établir la copie des pièces d’une procédure, ce qui a provoqué une perturbation de
l’instruction.
TGI de Paris 21 février 2001 Affaire du tueur de l’est parisien : faute lourde résultant de
l’absence d’information judiciaire, et négligence dans la recherche de l’auteur d’une
agression et d’un viol, qui en a donc commis plusieurs.

D) L’activité médicale en milieu hospitalier public

Evolution importante résultant de la loi du 24 mars 2002 dite Kouchner.


Distinction entre un avant et un après loi du 4 mars 2002.
L’une des grandes nouveautés de cette loi de 2002 est que l’activité médicale exercée en
milieu public est désormais soumise à des règles et des principes communs, tout en
continuant à relever de la compétence de juges différents.
Les contentieux de l’activité médicale en milieu hospitalier public relèvent de la compétence
du juge administratif.

1) Avant la loi du 4 mars 2002

a) L’exigence de la faute lourde pour les actes médicaux

Les actes médicaux définis par le code de la santé publique, doivent s’entendre de ceux qui
ne peuvent être exécutés que par un médecin ou un chirurgien.
Diagnostic, exécution d’un traitement, opération chirurgicale.
S’ajoutent les actes pouvant être exercés par les auxiliaires médicaux (infirmières) mais
uniquement sous la responsabilité et la surveillance d’un médecin, comme certaines
injections ou perfusions.
De longue date le juge administratif a exigé la commission d’une faute lourde.
CE 8 novembre 1935 Veuve Loiseau et Dame Philipponeau : qui affirme la nécessité d’une
faute lourde.

Plus récemment, régulièrement le juge administratif a reconnu que l’admission d’une faute
lourde.
CE 1957 Assistance publique de Marseille: « l’omission de 5 corps étrangers dans l’abdomen
d’un patient constitue une faute lourde ».
Commise par le médecin engageant la responsabilité de l’hôpital.

CE 28 juillet 1985 Epoux Lahier : le CE considère une mise en œuvre injustifiée d’une
méthode d’investigation trop dangereuse, faute lourde.

CE 11 décembre 1991 Assistance publique de Paris : faute lourde pour erreur de diagnostic.

b) Présomption de faute dans l’organisation et le fonctionnement du service

102
La présomption de faute est apparue en matière médicale dans le contexte des vaccinations
obligatoires qui parfois sont causes de dommages.
CE 7 mars 1958 Dejous : vaccination anti tuberculeuse qui a provoqué chez le patient en
cause un abcès tuberculeux.
La victime bénéficie d’une présomption de faute.
Cette jurisprudence a perdu de son intérêt, car loi du 1er juillet 1964 qui institue un régime
de responsabilité sans faute de l’Etat en la matière fondé sur le risque.
La logique de cet arrêt sera conservée pour les actes non médicaux, plus précisément
lorsque des soins prodigués avaient des conséquences dommageables, anormales, ou
inattendues, le juge considérait qu’ils ne pouvaient s’expliquer que par une faute commise
dans l’organisation du service.
Et donc dans ce cas il n’appartient pas au patient de prouver qu’une faute a été commise,
c’est à l’hôpital de prouver qu’il n’a pas commis de faute.
Illustré par CE 22 décembre 1976 Dame Derridj : à propos d’une injection.

CE 15 avril 1983 Epoux Rousseau : concernant un enfant de 4 ans atteint de troubles


cérébraux qui avait été couché dans un lit dépourvu de barrières de sécurité, dont il est
tombé.
Le juge considère que cela révèle un défaut dans l’organisation du service présumée.

CE 1983 Rolland : malade d’un hôpital psychiatrique qui s’est emparé dans les cuisines d’un
couteau et a poignardé un voisin de l’hôpital dont il s’est échappé.

Le juge a une tendance à user de cette présomption de faute pas seulement pour des actes
clairement non médicaux, pour des actes se situant dans le contexte immédiat des actes
médicaux.
CE 9 décembre 1988 Cohen : une infection méningée à l’origine de la paralysie de la moitié
du corps du patient, provoquée lors d’une exploration radiologique ou de l’intervention
chirurgicale qui l’a suivie, révèle une faute dans l’organisation ou le fonctionnement du
service.
On voit se dessiner que les infections nosocomiales traduisent l’existence d’une faute, en
tout cas le juge considère ici qu’il y a présomption de faute.

c) Apparition de la faute simple pour les actes médicaux

Apparition de la faute simple, fruit du CE 10 avril 1992 Epoux V.


Histoire d’un accouchement catastrophique.
La patiente souffre d’hypotension, tension artérielle trop basse.
Pour rectifier cela le médecin responsable de l’accouchement ordonne l’injection d’un
produit destiné à faire remonter cette tension.
Mais ledit produit dans les circonstances de l’espèce produisait l’effet inverse à celui
recherché, donc aggravation de l’état de la patiente.
Le médecin ordonne donc une transfusion sanguine avec une poche de sang mal
décongelée, le choc thermique l’ayant plongée dans le coma, elle en sort avec des séquelles.

103
Succession d’erreurs dont le cumul aurait pu conduire le juge à parler de faute lourde, mais
le juge considère que ces erreurs constituent une faute médicale de nature à engager la
responsabilité de l’hôpital.
Contrairement à la jurisprudence établie de 1935, une faute simple.

14 février 1997 CHR de Nice : arrêt concernant un examen chromosomique insuffisant


n’ayant pas permis de détecter une trisomie 21.
A cela s’ajoutait un défaut d’information des parents.
Le juge conclu que le CHR de Nice a commis une faute tout court.
Abandon encore de l’exigence de la faute lourde.

d) L’apparition de la responsabilité sans faute pour les actes médicaux

CE 9 avril 1993 Bianchi : l’examen pratiqué en l’espèce était une artériographie vertébrale,
nécessitant l’injection d’un produit de contraste à base d’iode.
A l’issue de cela le patient reste tétraplégique.
Dommage considérable, une faute a-t-elle été commise lors de cet examen ?
Des experts mettent en évidence que le produit de contraste à base d’iode n’a joué aucun
rôle dans la survenance des troubles, pas d’allergie.
Les experts soulignent qu’aucune faute technique ne peut être relevée dans l’exécution de
l’artériographie procédée par le médecin.
S’appuyant sur les dires d’experts, le juge souligne que la cause vraisemblable de l’accident
est « une occlusion secondaire à l’artériographie au niveau de l’artère, vascularisant la
moelle cervicale provoquée par une petite bulle ou un petit caillot libéré au cours de
l’exploration (…) et qu’il s’agit d’un risque inhérent à ce genre d’examen ».
Donc cas où un risque, certes faibles, s’était concrétisé.
En d’autres termes le patient a été victime d’un aléa thérapeutique.
On peut aussi dire un accident médical.
Dans ce type de situation le patient aurait donc du être débouté, car jusqu’à l’arrêt dont
nous parlons, l’aléa thérapeutique pouvait faire l’objet de réparations.
Mais précisément le juge va faire évoluer sa jurisprudence et rendre possible la réparation
de l’aléa thérapeutique, et ceci en faisant l’application d’un régime de responsabilité sans
faute.
Juge administratif : « Lorsqu’un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du
malade présente un risque dont l’existence est connue mais dont la réalisation est
exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit
particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si
l’exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l’état initial du
patient comme avec l’évolution prévisible de cet état, et présente un caractère d’extrême
gravité ».

A partir de 1998 la responsabilité sans faute est illustrée par la loi du 19 mai 1998 relative à
la responsabilité du fait des produits défectueux, loi qui crée un régime de responsabilité
sans faute au profit des victimes.
La loi de 1998 prévoyant en substance que le producteur est responsable du dommage
causé par un défaut de son produit.

104
Tout autre fournisseur professionnel (donc les hôpitaux) est responsable du défaut de
sécurité du produit dans les mêmes conditions que le producteur.

CE 9 juillet 2003 Assistance publique des hôpitaux de paris contre Mme Marzouk : le juge
conclue à la responsabilité sans faute de l’APHP résultant de la défaillance d’un respirateur
artificiel ayant entrainé la mort d’un patient.
Dans cet arrêt rendu en 2003 le juge ne fait pas référence à la loi de 1998, car les faits
étaient antérieurs.

CE 15 juillet 2004 Mr Dumas : le juge nous parle de la rupture d’une tige phémoro tibiale en
titane utilisée dans le cadre d’une arthrodèse genoux, ayant entrainé l’amputation au niveau
de la cuisse.
Responsabilité sans faute, référence à la loi de 1998 ici.

2) Après la loi de 2002

a) L’exigence de la faute caractérisée

La faute caractérisée est exigée dans le cadre bien précis des demandes d’indemnité
formées par les parents dont un enfant est né avec un handicap non décelé pendant la
grossesse.
Article 1er de la loi du 4 mars 2002 qui régit cette question qui est devenu l’actuel article L
114-5 du code de l’action sociale et des familles, et cet article nous dit : « lorsque la
responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des
parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une
faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul
préjudice ».
Les parents peuvent demander réparation du préjudice qui résulterait pour eux, à la suite
d’une faute caractérisée d’un professionnel de santé, si leur enfant est né avec un handicap
non décelé.
Le CE a considéré que l’inversion des résultats d’une amniocentèse, après laquelle on a
expliqué que l’enfant n’avait pas de risque, or l’enfant qui est né en était atteint.
Le juge voit dans cette inversion des résultats qui a privée les parents de recourir à un IVG, le
juge y voit une faute caractérisée, et le CE alloue en l’espèce une indemnité de 50 000 euros.
CE 19 février 2003 APHP contre Mr et Mme Maurice.

Dans d’autres affaires le juge n’a pas reconnu l’existence d’une faute caractérisée :
CAA de Paris 24 janvier 2005 Mr et Mme H : concernant une trisomie 18 non décelée,
compte tenu des circonstances de l’espèce, le juge conclue à l’absence de faute caractérisée.

CAA de Bordeaux 8 février 2005 C et autres.


CE 9 février 2005 Centre hospitalier Emile Roux du Puis en Velay : le fait de ne pas informer
sur la marge d’erreur de l’échographie n’est pas une faute caractérisée.

Cette faute caractérisée doit s’entendre d’une faute présentant un degré de gravité
particulier, et donc très proche de la faute lourde, synonyme de la faute lourde.

105
b) L’exigence de la faute simple

L’exigence de la faute simple est mise en évidence par l’article 1 er de la loi de 2002 qui
commence par « nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance ».
Dispositif anti arrêt Perruche.
« la personne née avec un handicap du à une faute médicale peut obtenir la réparation de
son préjudice lorsque l’acte fautif a provoqué directement le handicap ou l’a aggravé ou n’a
pas permis de prendre les mesure susceptibles de l’atténuer ».
La faute dont il est ici question, est bien sur à défaut de qualification particulière, une faute
simple.
L’exigence de la faute simple est de plus mise en évidence par l’article L 1142-1 I) du code de
la santé publique issu aussi de la loi du 4 mars 2002, article qui dispose que « les
professionnels de santé (…) ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels
sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostics ou de soins, ne sont
responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention de diagnostic ou de
soins qu’en cas de faute ».
Faute simple, le principe est celui de la responsabilité pour faute et pour faute simple.
Ce qui n’exclue pas la responsabilité sans faute.

c) La responsabilité sans faute

Elle apparait sans être expressément formulée, dans l’article L 1142-1 II) du code de la santé
publique qui dispose que « lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement,
service ou organisme mentionné au I) ou d’un producteur de produits n’est pas engagé un
accident médical, une affection iatrogène, ou une infection nosocomiale, ouvre droit à la
réparation des préjudices du patient et en cas de décès de décès de ses ayants droits au titre
de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention
de diagnostics ou de soins, et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au
regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un
caractère de gravité fixé par décret ».
Le législateur a entendu faire face aux conséquences dommageables de l’aléa thérapeutique,
régime de responsabilité sans faute, mm si le terme n’est pas utilisé.

La loi de 2002 ouvre droit à réparation au titre de la solidarité nationale, les dommages
résultants d’infections nosocomiales, résultant d’un taux d’incapacité permanente
supérieure à 25%.

d) Le mécanisme d’indemnisation issu de la loi de 2002

L’indemnisation des dommages prévue par le II de l’article L 1142-1 est assurée par l’Office
national d’indemnisation des accidents médicaux des infections iatrogènes et des infections
nosocomiales.
C’est un établissement public à caractère administratif, un EPA.
L’OGNAM joue un rôle essentiel, mais il n’est pas le seul intervenant, puisqu’avant lui doit
intervenir une commission régionale de conciliation et d’indemnisation, une CRCI, présidée
par un magistrat administratif ou de l’ordre judiciaire.

106
Cette commission régionale comprend également des professionnels de santé ainsi que des
représentants des usagers du système de santé, et des malades.
Lorsque le taux d’incapacité fixé par l’article L 1142-1 est atteint, la CRCI émet un avis dans
un délai de 6 mois à compter de sa saisine.
Cette commission émet un avis sur les circonstances, les causes, mais aussi la nature et
l’étendue des dommages, ainsi que sur le régime d’indemnisation qui est applicable.
Cet avis est transmis aux personnes intéressées, c'est-à-dire à la personne ayant saisi la CRCI,
mais aussi à l’OGNAM, et aussi aux professionnels de santé ou aux établissements de
santé si la CRCI estime que leur responsabilité est engagée sur le terrain de la faute.
Lorsque l’on se trouve dans les cas prévus par cet article, donc que l’on est en présence d’un
de ces cas, l’OGNAM adresse à la victime ou à ses ayants droits une offre d’indemnisation
dans le délai de 4 mois suivant la réception de l’avis produit par la CRCI.
Etant précisé que l’acceptation de l’offre est une transaction au sens de l’article 2044 du
code civil.
Le paiement doit intervenir dans le mois qui suit l’acceptation de l’offre d’indemnisation, en
cas de refus de l’offre l’action en indemnisation relève de la juridiction compétente.
Si le cas ne relève pas de l’article en cause, les choses vont se passer différemment, c’est
l’assureur qui doit faire une offre d’indemnisation 4 mois après l’avis de la CRCI et non plus
l’OGNAM.
L’acceptation de l’offre vaut transaction aussi.
Si l’assureur estime que la personne responsable n’est pas celle qu’il assure, l’assureur
dispose d’une action subrogatoire soit contre le tiers responsable, soit contre l’OGNAM.

SECTION 3 : LA RESPONSABILITE SANS FAUTE DE LA


PUISSANCE PUBLIQUE

L’avantage de ce régime de responsabilité est que la victime n’à pas à prouver de faute.
Deux grands types de responsabilité sans faute, la responsabilité pour risque, responsabilité
pour rupture de l’égalité devant les charges publiques.

§1 : LA RESPONSABILITE POUR RISQUE

Si l’on parle de responsabilité pour risque, c’est pour souligner que dans le cadre de ce
régime de resp sans faute, le dommage est le résultat de la réalisation d’un risque.
La jurisprudence distingue 3 grandes catégories de risques.

A) La responsabilité sans faute au profit des victimes d’un risque spécial


de dommages

a) Les victimes de choses dangereuses

107
Comme les explosifs, qui font courir des risques spéciaux de dommages.
Victimes spéciales de dommages, devant bénéficier d’un régime de responsabilité sans
faute.

CE 21 octobre 1966 SNCF : concernant l’explosion dans une gare d’un wagon de munitions.

Font également courir des risques spéciaux de dommages, les armes et engins dangereux.
Règlementation de l’usage des armes de service.

Autre catégorie : les ouvrages publics dangereux.


CE 1973 Dallo : le CE a estimé qu’une route nationale, RN1 située sur l’ile de la réunion,
présentait le caractère d’un ouvrage public exceptionnellement dangereux.
S’il a retenu cette qualification, c’est parce que se produisaient régulièrement des
éboulements provoquant des accidents graves, donc les victimes d’accidents sur cette route
devaient se voir appliquer un régime de responsabilité sans faute.

CE 5 juin 1992 Epoux Cala : caractère exceptionnellement dangereux d’une route.

b) Les victimes de méthodes dangereuses

Jurisprudence Touzelier de 1956.


Critique des méthodes libérales de rééducation en milieu semi ouvert, et l’un des
adolescents de cet établissement a commis des dommages à l’extérieur de cet
établissement, les victimes doivent donc bénéficier d’un régime de responsabilité sans faute,
l’A de l’éducation surveillée en utilisant ces méthodes libérales fait courir un risque aux tiers.

CE 9 mars 1966 Trouillet : abandon de l’exigence de voisinage.

Jurisprudence de 1956 étendue aux établissements psychiatriques.


CE 13 juillet 1967 département de la Moselle.

Egalement application à l’Administration pénitentiaire, ou des méthodes libérales ont été


introduites, avec les permissions de sortie.
CE 2 décembre 1981 Theys.

Jugement du TA de Grenoble 4 novembre 1991 Dame Colombier : skieuse qui avait été


violemment heurtée par un inspecteur de police qui faisait du ski, étant chargé de suivre les
membres de la famille royale du Danemark.
Elle a bénéficié d’un régime de responsabilité sans faute.

Affaires concernant la responsabilité hospitalière, car certaines méthodes d’investigation


présentent un risque.

c) Les situations dangereuses

Elles peuvent être illustrées par l’arrêt du CE 19 octobre 1962 Perruche.

108
Cet arrêt concernait le consul de France en Corée, dont le poste se situait sur une partie du
territoire coréen allant devenir la Corée du Nord.
Son administration de tutelle lui a demandé de rester à son poste.
Il en est résulté quelques dommages, pillage de ses biens, il a cherché à obtenir réparation.

CE 16 octobre 1970 Epoux martin.

CE 6 novembre 1968 Dame Saulze : personne qui a contracté une rubéole au sein de
l’établissement dans lequel elle travaillait, femme enceinte.
L’enfant est né gravement handicapé, spécialement exposée à la contagion en raison de ses
obligations professionnelles, le juge fait application d’un régime de responsabilité sans faute.

TA Paris 20 décembre 1990 Epoux B : le TA de paris assure l’indemnisation du mari d’une
infirmière qui a contaminée son mari après avoir été elle-même contaminée par le virus du
sida dans l’exercice de ses fonction.
Le fait pour une infirmière d’être exposée aux dangers de la contagion, comporte pour son
mari, lorsque la maladie contagieuse se transmet notamment à l’occasion de relatons
sexuelles, un risque spécial, et anormal.

B) La responsabilité sans faute au profit des collaborateurs occasionnels


des services publics

a) Les fondements de cette responsabilité

CE 1995 Cames : ouvriers sérieusement blessé par un éclat de métal projeté par un marteau
pilon.
Pour réparer le dommage subit par cet ouvrier, alors qu’aucune faute ne pouvait être mis à
la charge de l’employeur, de l’Etat, donc responsabilité sans faute.

b) Les collaborateurs occasionnels du service public

Il peut s’agir d’habitants d’une commune, qui vont aider spontanément le service de lutte
contre l’incendie.
CE 30 novembre 1946 Faure :

CE 17 avril 1943.

CE 25 septembre 1970 commune de Batz sur mer.

CE 1987 Commune de Grigny : concernant un médecin blessé sérieusement en portant


secours à une personne victime d’une intoxication par le gaz.

Habitant d’une commune auquel le maire a demandé de tirer les feux d’artifices, victimes de
l’explosion d’une fusée.

109
CE 22 novembre 1946 Commune de Saint Priest la Plaine :

Il peut s’agir d’élus locaux, comme un maire qui décide lui-même d’aménager le terrain de
foot communal, victime d’un accident.
CE 27 novembre 1970 Consorts Appert-Collin :

Conseiller municipal mortellement blessé alors qu’il travaillait sur des buts mobiles situés sur
un terrain de foot.
CE 1988 époux allain.

CAA d’appel de Lyon 27 janvier 2005 Commune de Choranche : un radio amateur


collaborateur occasionnel du service public communal de secours.

c) Les conditions devant être réunies pour bénéficier de cette responsabilité sans faute.

La jurisprudence a abandonné la distinction qu’elle avait un temps opéré, distinction entre


collaborateur requis, collaborateur sollicité, collaborateur spontané, étant précisé qu’à
l’origine la responsabilité sans faute ne jouait qu’au profit des collaborateurs requis, c'est-à-
dire au profit de personnes ayant fait l’objet d’une procédure de réquisition en bonne et due
forme.

Une personne tombe au fond d’une excavation dans son jardin, pas blessé, mais ne peut plus
ressortir, son sauveteur devait être considéré comme collaborateur occasionnel du service
pub de secours, et devait donc bénéficier d’un régime de responsabilité sans faute.

CE 1981 Guinnard : dans le hall de l’hôpital il avise qu’une ambulance arrive à l’entrée, le
malade attendant de sortir va aider les infirmiers pour sortir le brancard, il se blesse en
courant, mais le juge dit qu’il n’est pas collaborateur occasionnel du SP hospitalier, son
intervention n’était pas utile.

CE 16 juin 1989 Pantalonie : Nouvelle Calédonie, proche du Vanuatu, jeune Etat devenu
indépendant.
Les français présent au Vanuatu étaient en danger, propriétaire d’un gros bateau, a été
porter secours aux français en danger.
Il approche des cotes du Vanuatu, mais la marine du Vanuatu a intercepté et confisqué son
bateau.
D’où son recours pour obtenir réparation.
Il doit être considéré comme un collaborateur de l’armée française selon ses avocats, non
selon le CE, pas collaborateur d’n SP, l’Etat français disposant déjà de moyens d’intervenir au
Vanuatu si des français avaient été en danger.

Autre condition pour être considéré en tant que tel : il faut un service public.
Parfois des difficultés, CE 13 janvier 1993 Mme Galtié : victime d’un accident alors qu’elle
accompagnait un groupe d’élèves d’un lycée franco hellénique, géré par une association
hellénique.
Le CE considère qu’il fallait considérer que cette association était en charge d’une mission de
SP, donc bien traité comme une collaboratrice occasionnelle du SP.

110
Enfin le juge a décidé en 1977 que le lien de parenté existant entre un collaborateur,
sauveteur et bénévole, et la personne à laquelle il porte secours, ce lien de parenté est
indifférent.
CE 1er juillet 1977 commune de Coggia .
Par cet arrêt le CE a coupé cours à un débat doctrinal qui faisait apparaitre un cas ou le
sauveteur à un lien de parenté avec la victime, qui doit intervenir dans une situation
désespérée de laquelle il ne peut lui-même pas se sortir.
On y va sans réfléchir si c’est de sa famille.

C) Une responsabilité sans faute pour les tiers victimes de dommages de


travaux publics

CE 7 novembre 1952 Gros : téléphoniste qui avait été électrocutée à la suite d’une dérivation
électrique provoqué par une mine ayant explosé.
Responsabilité sans faute car cette personne est tiers par rapport au chantier de travaux
publics.
CE 1973 Lenart : personne électrocutée par un arc électrique formé sous une ligne à haute
tension.
Tiers par rapport à l’ouvrage public (la ligne à haute tension), bénéficie d’un régime de
responsabilité sans faute.

D) Les victimes des attroupements et rassemblements

La responsabilité en la matière a d’abord été une responsabilité des communes.


Puis abandonné cette responsabilité communale, pour une responsabilité de l’Etat,
responsable depuis une loi du 7 janvier 1983.
Compétent pour connaitre des demandes de réparation résultant des attroupements.
Puis compétence des tribunaux administratifs après la loi du 9 janvier 1986, leur confiant ces
contentieux.
Cette responsabilité est encourue de plein droit « à raison du risque social que font courir
ces attroupements et rassemblements.
Responsabilité sans faute et pour risque, risque social.

§2 : RESPONSABILITE SANS FAUTE POUR RUPTURE DE L’EGALITE


DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES

L’égalité devant les charges publiques est un PGD, et même plus, car c’est un principe à
valeur C.
Ce régime de responsabilité sans faute à une double caractéristique :
- Les dommages n’ont pas ici un caractère accidentel

111
- Le dommage doit être spécial et anormal, il ne doit concerner que certaines
personnes, des catégories, ou personnes individuelles

A) Les dommages permanents de travaux publics

CE Société algérienne des automobiles renault 1957 : fermeture provisoire d’un magasin
résultant de travaux de voierie.
Resp sans faute pour rupture de l’égalité devant les charges publiques.

CE 1968 Société pour l’aménagement de la Bretagne : affaire de commune concernant un


café restaurant ayant subi une réduction de recettes importante, à la suite de travaux
effectuées sur le littoral, qui ont eu pour effet d’éloigner le café restaurant du rivage.
Dommage permanent de travaux publics, rupture de l’égalité devant les charges publiques,
réparation, régime de responsabilité sans faute.

B) Les victimes de décisions administratives régulière

On accepte de réparer les dommages causés par les décisions administratives régulières.

a) Les décisions individuelles

Arrêt de principe CE 30 novembre 1923 Couitéas : Le sieur couitéas était un très important
propriétaire terrien en Tunisie, et donc sur ses terres, sur une partie, campait une tribu
nomade, il a cherché à obtenir le départ de ceux qui étaient à ses yeux des occupant sans
titre de sa propriété.
Le juge judiciaire a rendu une décision favorable à Couitéas, qui étant propriétaire était en
droit de le demander.
Mais cela n’a eu aucune conséquence.
Il s’est donc tourné vers l’autorité administrative, à laquelle il a demandé l’appui de la force
publique pour que soit exécutée la décision de justice, pour que force reste à la loi.
Le gvt sollicité a refusé l’appui de la force publique pour une raison de bon sens, car pour les
faire déguerpir il aurait fallu envoyer l’armée et engager une guerre avec ces tribus.
Alors il a cherché à obtenir réparation du préjudice résultant pour lui du maintien de ces
tribus sur ces terres qui ne pouvait que se prolonger.
L’arrêt Couitéas souligne que la décision prise par l’Administration refusant l’appui de la
force publique était légale, décision individuelle, dans la mesure où l’autorité administrative
est en droit de refuser au bénéficiaire d’un jugement le concours de la force publique,
l’exécution forcée de la décision, si cette exécution forcée porte une atteinte grave à l’ordre
public, ce qui était le cas en l’espèce.

TA de Paris 16 décembre 1983 Société Ballande-Vanuatu : refus de concours de la force


publique pour l’exécution d’un jugement prononçant l’expulsion de tribus occupant un
domaine agricole.

112
Cette jurisprudence couitéas fait l’objet d’applications plus ordinaires.
C’est ainsi que peuvent bénéficier de cette logique les bénéficiaires de jugements qui
prescrivent l’expulsion de grévistes qui occupent indument un lieu de travail.
Le droit de la grève permet de ne pas travailler, mais n’autorise pas l’occupation des lieux de
travail.
Le juge rend des décisions qui leurs sont favorables.

CE 3 juin société cartonnerie saint Charles.


CE 8 juillet 1992 SA des automobiles peugeot.
Grand champ d’application de la jurisprudence couitéas.

Aussi bénéficiaires les propriétaires de logements occupés par des occupants sans titre, mais
qui faute de payer leur loyer deviennent des occupants sans titre.
Soit un propriétaire de logement qui ne paye plus son loyer.
S’il ne paye pas il doit partir, donc pas de force à la décision de justice.
Il demande donc l’appui de la force publique, parfois il l’obtiendra, mais souvent
l’Administration renoncera à expulser le locataire.
Donc aggravation du préjudice dans le temps, la jurisprudence peut jouer pour lui.
CE 1992 Compagnie immobilière de la région parisienne.

b) Les décisions administratives règlementaires

Décision règlementaire régulière qui peut être source de dommages.


CE 1963 Commune de Gavarni : Arrêté de police municipale, arrêté qui règlementait la
circulation sur les chemins de montagne.

C) La responsabilité du fait des lois et des conventions internationales

Pendant longtemps on a considéré que la loi ne peut mal faire.


La loi ne peut mal faire car elle est l’expression de la volonté générale.
Un jour on s’est rendu compte que la loi pouvait provoquer des dommages, et qu’ls devaient
être réparables.
La responsabilité de l’Etat du fait des lois a été admise par un arrêt du CE du 14 janvier 1938
Société des produits laitiers Lafleurette.
La société lafleurette s’était spécialisée dans la fabrication d’un produit.

Application toujours rare de cette jurisprudence.


CE 30 juillet 2003 Association pour le développement de l’aquaculture en région centre.
Loi de 1976 qui protège notamment les cormorans, et qui induit des dommages.

Le traité la convention I est la loi des Etats.


Donc pas de resp des convention I.
Mais cela a changé : CE 30 mars 1966 compagnie générale d’énergie radioélectrique.
En 1940 la société de radiodiffusion a été réquisitionnée par l’armée allemande, donc
préjudice pour cette société de radiodiffusion, préjudice prolongé par la signature par la

113
France de différentes conventions I à la fin de la 2nde guerre mondiale qui reportaient à plus
tard l’examen des réparations de guerre à la charge de l’Allemagne.

SECTION 4 : LA RESPONSABILITE DES AGENTS PUBLICS

Les faits dommageables de la puissance publique sont avant tout le fait de personnes
physiques, de fonctionnaires, d’agents de la puissance pub.
C’est de la responsabilité de ces agents publics et de ses rapports avec celle de la puissance
pub, autrement dit de leur employeur, dont il sera question ici.
La responsabilité personnelle des agents publics ne peut être recherchée que si l’agent a
commis une faute personnelle.

§1 : LA DISTINCTION FAUTE PERSONNELLE FAUTE DE SERVICE

A) Les origines de la distinction

a) La décision pelletier

CE 30 juillet 1873 Pelletier : cette affaire concernait la saisie d’un journal dont Pelletier
assurait la publication opérée au début de l’année 1973 sur le fondement de la loi alors en
vigueur sur l’état de siège.
Contexte de la guerre franco prussienne, de la commune de Paris.
Recours contre le préfet de police.
A l’appui de son recours il souligne la saisie illégale du journal, demande la restitution des
exemplaires, la condamnation des défendeurs au versement de dommages et intérêts.
C’est dans ce contexte que le juge va opérer une distinction entre faute de service et faute
personnelle, en mettant en évidence que les personnes poursuivies par Pelletier n’ont pas
commis de faute personnelle.
L’interdiction et la saisie du journal ordonnée par le général constitue une mesure
préventive de haute police administrative.
Considérant que la demande de Peletier se fonde exclusivement sur cet acte de haute police
administrative, qu’en dehors de cet acte il n’impute aux défendeur aucun fait personnel de
nature à engager leur responsabilité personnelle, et qu’en réalité la poursuite est dirigée
contre cet acte lui-même, dans la personne des fonctionnaires qui l’ont ordonné, ou qui y
ont coopéré.
Distinction entre les deux fautes par le TDC.
Seule la faute personnelle permet de rechercher la responsabilité de l’agent public, du
fonctionnaire, cette recherche devant s’opérer devant le juge judiciaire.
Si l’agent n’est l’auteur que d’une faute de service, il faudra alors rechercher la seule
responsabilité de la personne publique, et ce devant le juge administratif.

b) La distinction par Laferrière

114
Membre éminent du CE dans le dernier tiers du 19ème siècle, et de surcroit l’auteur d’un
ouvrage qui reste de référence, traité de la juridiction administrative et des recours
contentieux en 1887.
Traité dans lequel il aborde la distinction faute personnelle faute de service.
« Si l’acte dommageable est impersonnel, s’il révèle un administrateur, un mandataire de
l’Etat, plus ou moins sujet à erreur, et non l’Homme avec ses faiblesses, ses passions, ses
imprudences, l’acte reste administratif et ne peut être déféré aux tribunaux. Si au contraire
la personnalité de l’agent se révèle par des fautes de droit commun, par une voie de fait, un
dol, alors la faute est imputable à cet agent. De même que le magistrat qui rend une décision
illégale ne tombe pas sous le coup de la prise à partie, de même l’administrateur qui fait un
acte irrégulier, n’encoure pas de plein droit une responsabilité personnelle. La responsabilité
civile ne s’ajoute à la responsabilité administrative que si l’irrégularité commise par le
fonctionnaire constitue en même temps une faute lourde, excédant les risques ordinaires de
la fonction ou si elle révèle une intention mauvaise ».

B) Illustrations de la faute personnelle

a) Les fautes personnelles commises en service

Commise dans l’exercice de ses fonctions.


Caractérisée lorsqu’un agent poursuit dans l’exercice de ses fonctions des préoccupations
d’ordre privé.

Décision du TDC du 14 décembre 1925 Navarro : préfet qui avait fait délivrer à une personne
une carte spéciale ouvrant droit à des réductions très importante sur le réseau ferré
national.
Mais ce préfet avait fait délivrer cette carte en sachant pertinemment que la personne ne
bénéficiant pas des conditions nécessaires à l’obtention de cette carte, ferait l’objet de
poursuites au 1er contrôle.
Intention de nuire manifeste, comportement étonnant considéré comme une faute
personnelle commise dans l’exercice de ses fonctions.

CE 21 avril 1937 Demoiselle Quesnel : reproché à cette receveuse des postes un


détournement de fonds, faute personnelle.

CE 1953 Oumar Samba : gardien de prison qui organisait des vols avec des prisonniers
choisis, invités à profiter de commettre des vols lors de leur sortie temporaire de prison.
Faute personnelle de ce gardien de prison.

Excès de comportement que l’on constate, comme l’excès de boisson dans l’exercice des
fonctions, à l’origine d’excès de vitesse, d’accidents.
TDC 9 octobre 1974 Commune de Lusignan.

La faute personnelle prend aussi fréquemment la forme d’excès de langages, tels que propos
diffamatoires.
TDC 2 avril 1881 Calla : commissaire de police s’étant emporté contre un ancien magistrat

115
CE 1908 Girodet contre Morizot : concernant des instituteurs auxquels il était reproché
d’avoir tenu des propos injurieux, orduriers et obscènes devant leur classe.

Les violences physiques commises dans l’exercice des fonctions :

TDC 1953 Delettre : reproché à un policier d’avoir asséné de violents coups de poing à un
facteur étant le mari d’une concierge dans laquelle un étudiant avait trouvé refuge lors
d’une manifestation et d’une charge de policiers.

TDC 1987 Kessler : facteur ayant violenté un usager du service.

CE 4 juillet 1990 Société d’assurances le Sou médical : le CE souligne que se rend coupable
d’une faute personnelle un médecin de garde refusant de se rendre au chevet d’un malade
malgré des appels répétés soulignant l’état inquiétant du malade, lequel est décédé peu
après.

Cour de cassation chambre criminelle 2 octobre 1958 : affaire qui concernait un médecin
accoucheur qui s’était enfui de la salle d’accouchement au moment ou par maladresse la
sage femme qui l’accompagnait avait déclenché un incendie, abandonnant la patiente qui
était attachée.
Le juge pénal a souligné que ce médecin avait commis une faute personnelle.

TDC 9 juillet 1953 Veuve Bernadas : Son époux en danger de mort car poursuivi par des
malfaiteurs, avait trouvé refuge dans un commissariat pendant un certain temps.
Il a été décidé de faire raccompagner ce monsieur à son domicile par deux agents de police
non armés, lesquels ont prix la fuite dès que les malfaiteurs qui attendaient sa sortie se sont
rapprochés, ont abattu le sieur Bernadas, et donc le juge a estimé que ces policiers s’étaient
rendus coupables d’une faute personnelle.

CE 12 avril 2002 Maurice Papon : Maurice Papon a été sous l’occupation secrétaire général
de la préfecture de Gironde, et à ce titre il a participé à la déportation de juifs vers Bordeaux.
Pour cela il a été jugé, et condamné à une peine de 10 ans de prison pour complicité de
crime contre l’humanité.
Le CE a eu l’occasion de se prononcer sur cette affaire, s’est-il rendu coupable d’une faute
personnelle ou d’une faute de service ?
Le juge considère que son comportement constituait une faute personnelle, mais aussi une
faute de service à l’origine.

Parfois des négligences graves ne sont pas qualifiées de fautes personnelles par le juge, ce
qui montre qu’il dispose d’une certaine latitude dans la qualification des fautes, et ici de la
faute personnelle.

CE 9 juillet 1957 Adolph : le juge a estimé qu’un soldat qui fumait en manipulant des
munitions, lesquelles ont explosé, en faisant cela il ne s’est pas rendu coupable d’une faute
personnelle.

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TDC 6 décembre 1937 Consorts Cornu : le gardien d’une poudrière pour éloigner un enfant
de là l’a mis en joue, et l’a tué accidentellement.
En dépit de la gravité du préjudice le juge a estimé qu’il ne s’est pas rendu coupable d’une
faute personnelle.

b) Les fautes personnelles commises en dehors du service, mais non dépourvues de lien
avec le service, les fonctions

Il peut s’agir de fautes commises à l’occasion de l’accomplissement du service.


Le cas typique est celui d’un chauffeur (souvent militaire), qui utilise un véhicule qui lui a été
confié par le service, mais ce chauffeur a utilisé ledit véhicule à des fins personnelles.
Dans ces affaires le juge considère que le chauffeur a commis une faute personnelle, et que
cette faute personnelle n’est pas commise dans le cadre du service, partant de l’idée que
celui-ci quitte l’itinéraire normal, il n’est donc plus en service, néanmoins le véhicule a été
confié par le service, donc la faute a été commise à l’occasion du service.

CE 1981 Commune de Chonville-Malaumont : en l’espèce pompier auquel il était reproché


de s’être écarté de son itinéraire normal pour aller rechercher du matériel oublié, et ce
pompier a déclenché un incendie en jetant son mégot.

CE 1er octobre 1954 Bernard : policier chargé du maintien de l’ordre public au cours d’une
fête, qui s’était enivré, et donc abandonné son poste, sa mission de maintien de l’ordre
public, entré dans un café, se querelle avec des clients, et blesse une personne avec son
arme de service.
Faute personnelle commise à l’occasion du service, il n’est plus exactement dans son service,
mais lien avec le service.

Dans d’autres cas présence d’une faute personnelle comme n’étant pas dépourvue de tout
lien avec le service, mais qui cette fois est clairement commise en dehors du service.

CE 26 octobre 1973 Sadoudi : un policier a nettoyé son arme de service chez lui, et a tué
accidentellement son collègue en faisant cela.
Le juge considère qu’il a commis une faute personnelle, car si cet accident est arrivé c’est
qu’il n’a pas respecté les consignes de sécurité à respecter.
Le juge considère qu’elle n’est pas commise à l’occasion du service, mais pas dépourvue de
tout lien avec le service, car c’est l’arme de service qui est en cause, et que le règlement du
service préconisait au policier de conserver son arme de service même quand il n’est pas en
service.

CE 18 novembre 1988 Epoux Raszewski : gendarme assassin ayant échappé aux recherches
menées par ses collègues, a donc commis plusieurs crimes, grâce aux informations qu’il
recueillait auprès de ses collègues dans l’exercice de ses fonctions.

c) La faute personnelle commise en dehors du service et dépourvue de lien avec le


service

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Présence de ce que l’on appelle la faute « purement personnelle ».

CE 23 juin 1954 Veuve Litzler : douanier qui avait utilisé son uniforme pour arrêter la voiture
d’une personne avec laquelle il avait un différent d’ordre privé, le douanier tue le
conducteur avec lequel il avait un différent.
Le juge y voit une faute personnelle dépourvue de lien avec le service, nonobstant le fait
qu’il a utilisé son uniforme et son arme de service.

CE 12 mars 1975 Pothier : gendarme ayant utilisé son arme de service pour assouvir un désir
de vengeance, crime passionnel.

CE 13 mai 1991 Société d’assurance les mutuelles unies : concernant un pompier pyromane
qui allumait des incendies en dehors de son service.
Pure faute personnelle commise en dehors du service.

C) L’absence de confusion (nécessaire distinction) entre faute personnelle


et infraction pénale

Lorsque la faute de l’agent public est constitutive d’une infraction pénale, elle n’a pas
nécessairement le caractère d’une faute personnelle.

Précisé par TDC 14 janvier 1935 Thépaz : la victime était dans cette affaire un cycliste ayant
été renversé par le chauffeur du camion militaire circulant au sein d’un convoi de camions
militaires.
Dans cette affaire s’est posé la question de savoir si le militaire condamné pénalement par
un tribunal correctionnel, devait-il également être condamné aux réparation pécuniaires
réclamées par la victime ?
Ou bien est-ce que sur le plan de la responsabilité civile, seule la responsabilité de l’Etat
devait être engagée ?
Ce que pensait d’ailleurs l’Etat.
La faute pénale commise par le militaire est-elle une faute personnelle engageant sa seule
responsabilité pénale et civile, ou bien est-ce que cette faute s’analyse en une faute de
service engageant la seule responsabilité civile de l’Etat.
Pour le TDC il s’agissait en l’espèce d’une faute de service : « considérant que dans les
conditions ou il s’est présenté, le fait imputable à ce militaire dans l’accomplissement d’un
service commandé, n’est pas constitutif d’une faute se détachant de l’exercice de ses
fonctions. Que d’autre part la circonstance que ce fait a été poursuivi devant la juridiction
correctionnelle (…) ne saurait en ce qui concerne les réparations pécuniaires (…) justifier la
compétence de l’autorité judiciaire saisie d’une poursuite civile exercée accessoirement à
l’action publique ».
Avant cette décision de 1935 le juge considérait que la faute d’un fonctionnaire, d’un agent
public, lorsqu’elle était constitutive d’un crime ou d’un délit, était toujours une faute
personnelle.
Or cette décision dit exactement le contraire.

118
Avec cette décision est donc consacré le principe selon lequel il est des délits pénaux qui ne
constituent pas une faute personnelle.
La cour de cassation plus tard admettra aussi qu’une infraction pénale peut être une faute
de service.
En ce sens Cour de cassation chambre criminelle 23 avril 1942 Leroutier.

La jurisprudence Thépaz a connu diverses applications depuis, mais aussi une application
plus remarquable dans l’affaire Papon de 2002, car dès que Papon a été condamné à 10 ans
de réclusion, s’est aussi posée la question de la réparation financière des préjudices
occasionnés par son crime.
Son avocat a développé la thèse selon laquelle certes il devait être condamné à 10 ans de
prison, mais concernant la réparation financière c’était à l’Etat de le faire, application de la
jurisprudence Thepaz.

§2 : LES CONSEQUENCES POUR LA VICTIME DE LA DISTINCTION


FAUTE PERSONNELLE / FAUTE DE SERVICE

Si à l’origine du dommage il y a une faute de service, la victime ne peut obtenir réparation


que de la personne publique, et il faudra la rechercher devant la juridiction administrative.
Le juge administratif est le seul compétent.

En cas de faute personnelle pure, la responsabilité personnelle de l’agent peut être engagée,
et doit être recherchée devant le juge judiciaire.

En pratique les choses sont plus compliquées, rare qu’il y ait une pure faute personnelle ou
pure faute de service.
C’est ce que traduit l’existence de cumuls de responsabilités.

A) Les cumuls de responsabilités

a) Des cumuls de responsabilités en cas de cumuls de faute

Le principe, CE 3 février 1911 Anguet : usager du service public des postes, entré dans un
bureau de poste, et voulant en ressortir il n’a pas pu car la porte était fermée à clef.
Un agent le fait sortir par derrière, ce qu’il fait, mais dans l’arrière boutique il tombe sur
d’autres agents qui s’étonnent de le voir, le jettent en dehors du bureau, il tombe et se
blesse.
Il cherche à obtenir réparation, et le CE dit que le dommage a été provoqué par un cumul de
fautes.
A l’origine du dommage il y a une faute de service, et une faute personnelle.
La faute de service résulte du fait que le bureau de poste a été fermé avant l’heure
règlementaire.
Faute personnelle commise par deux agents du bureau de poste, qui n’auraient pas du le
blesser, d’utiliser la force physique.

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Cumul de fautes qui conduit le juge à considérer qu’il y a cumul de responsabilités.
Cela signifie concrètement que la victime peut demander réparation de la totalité du
préjudice subi à la personne publique.
La personne publique est toujours solvable.

b) Le cumul des responsabilités sans cumul de fautes

CE 26 juillet 1918 Epoux Lemonnier : dans une commune une fête locale est organisée, et
l’une des attractions est un tir à la carabine sur une cible flottante.
Un certain nombre de promeneurs ont entendu des balles siffler à leurs oreilles.
Elles ont été voir le maire, qui n’a rien fait, et donc Mme Lemonnier a été frappée par une
balle.
Le maire de la commune a commis une grave imprudence, il a donc clairement commis une
faute personnelle, mais commise dans l’exercice de ses fonctions.
Face à cette situation le juge a estimé que là aussi il convenait de permettre à la victime, de
lui offrir le choix d’obtenir réparation de la personne publique ou de l’agent, étant précisé
qu’en offrant ce choix on lui offre le choix d’obtenir réparation de l’intégralité du préjudice
par la seule personne publique, même s’il y a une faute personnelle à l’origine.

CE 18 novembre 1949 Demoiselle Mimeur : le juge a admis qu’il peut y avoir cumul de
responsabilités, même si la faute personnelle a été commise en dehors du service, mais cette
faute personnelle n’est pas dépourvue de tout lien avec le service.

De cette évolution jurisprudentielle il résulte que seules les pures fautes personnelles, c'est-
à-dire celles commises en dehors du service et dépourvues de tout lien avec le service,
engagent la seule responsabilité de l’agent.
Souci d’assurer au mieux la réparation du dommage subi par la victime.

B) Les substitutions de responsabilité résultant de lois

Evoquer certaines dispositions législatives qui imposent aux victimes d’agir contre les
personnes publiques, même si l’on est présence d’une faute personnelle commise en dehors
des fonctions mais ayant un rapport avec.

Loi du 5 avril 1937 concernant les actions en responsabilité fondées sur une faute d’un
membre de l’enseignement, qui fait obligation à la victime de rechercher la responsabilité de
l’Etat devant le juge judiciaire, ce qui n’empêche néanmoins pas les poursuites pénales.

Loi du 31 décembre 1957 relative aux dommages causés par des véhicules, qui fait obligation
à la victime de rechercher la responsabilité de la personne publique qui à la garde du
véhicule et la loi fait aussi obligation à la victime de rechercher cette responsabilité de la
personne publique devant le juge judiciaire, dans un souci de simplification.

Ordonnance du 22 décembre 1958 portant statut de la magistrature, disposant que les


magistrats judiciaires ne sont responsables que de leur faute personnelle, et leur

120
responsabilité ne peut être engagée que par une action récursoire de l’Etat, qui doit être
portée devant une chambre civile de la cour de cassation.

§3 : LES RELATIONS ENTRE LA PERSONNE PUBLIQUE EMPLOYEUR


ET SON AGENT

A) Les droits de la personne publique contre son agent

Si la personne publique a été condamnée à réparer les conséquences dommageables d’une


faute de service, la personne publique ne peut rien demander à son agent, pas demander le
remboursement des dommages et intérêts versés.

Le problème ne se pose que lorsque l’Administration a été condamnée à réparer les


conséquences dommageables d’une faute personnelle commise par l’agent soit dans
l’exercice de ses fonctions, soi même en dehors de ses fonctions, non dépourvue de lien
avec l’exercice des fonctions, avec le service.
Dans ce cas de figure de plus en plus fréquent, on a tout d’abord connu une situation
scandaleuse de l’irresponsabilité des agents.

a) L’irresponsabilité originelle de l’agent

Jusqu’en 1951, sauf disposition législatives spéciales (loi de 1935), une personne publique ne
pouvait engager contre son agent une action récursoire, autrement dit une action tendant
au remboursement des dommages et intérêts versés en raison de la faute personnelle.

CE 28 mars 1924 Poursines : dans lequel l’Etat réclamait à un officier de l’armée le


remboursement des dommages et intérêts qu’il avait versé aux ayants droits d’une personne
fusillée sur son ordre.
Ordre en l’espèce constitutif d’une faute personnelle, mais l’Etat n’a pas pu se retourner
contre son officier pour demander remboursement.

b) L’avènement de l’action récursoire

CE 28 juillet 1951 Laruelle et Delville : en l’espèce dommages occasionnés par des chauffeurs
de véhicules, le CE a jugé que si les fonctionnaires et agents des collectivités publiques ne
sont pas pécuniairement responsables envers lesdites collectivités des conséquences
dommageables de leurs fautes de service, il ne saurait en être ainsi lorsque le préjudice
qu’ils ont causé à ces collectivités est imputable à des fautes personnelles détachables de
l’exercice de leur fonction.
Si le dommage à pour cause unique une faute personnelle, une action récursoire est possible
pour le tout, ce qui n’a d’intérêt que si l’agent public est solvable, jeu d’assureurs.
S’il y a un cumul de fautes, la personne publique ne peut demander le remboursement que
d’une partie, pour la faute de service.

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S’il y a faute personnelle de plusieurs agents, la personne publique ne peut pas demander le
remboursement à une seule personne, la division s’impose.

B) Les droits de l’agent contre la personne publique

Cas assez rare de l’agent condamné à tort par une juridiction judiciaire à réparer
financièrement les conséquences dommageables d’une faute de service.
Cet agent a le droit d’obtenir de l’Administration le remboursement des sommes versées par
lui.
Si à l’origine du dommage il y a exclusivement une faute de service, le remboursement
intégral de l’agent par la personne publique est possible, s’il y a cumul de fautes,
remboursement partiel possible.

Dans l’affaire Papon le juge administratif a estimé au final que l’Etat était responsable pour
moitié, car une faute personnelle et une faut de service aussi.

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