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1re Parution: 25 novembre 2019
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Par Avi Bitton, Avocat.
LES DÉLITS DE FAUX ET USAGE DE FAUX.

Quels sont les éléments constitutifs des délits de faux et usage de


faux ?

Quelle sont les sanctions pénales encourues ?

Définition.
L’article 441-1 du Code pénal dispose que  : «  constitue un faux toute
altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et
accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre
support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir
pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des
conséquences juridiques.  »
Le faux et l’usage de faux sont des infractions distinctes. Ainsi,
l’auteur d’un faux, condamné pour cette infraction, peut également
être condamné pour l’usage de ce faux (Crim., 30 mars 1854).

I. Elément matériel.
A. Le faux.
1. Le support du faux.
Il ne peut y avoir de faux que sur un support écrit ou un support
d’expression de la pensée. Le support écrit peut être manuscrit ou

dactylographié. Le support d’expression de la pensée renvoie à tous les
supports informatiques tels que les DVD, les CD, mais aussi les bandes
magnétiques ou les films.

2. La valeur probatoire du faux.


Le faux n’est constitué que dès lors que le document falsifié à une valeur
probatoire, c’est-à-dire qu’il peut servir de «  preuve d’un droit ou d’un fait
ayant des conséquences juridiques  ».
Ainsi, des écrits soumis à vérification et discussion, tels que des notes, des
factures, ne constituent pas des faux au titre de l’article 441-1 (Crim. 12
déc.1977). De même, de simples déclarations établies par un prévenu en sa
propre faveur ne représentent que ses seules affirmations sujettes à
vérification (Crim., 7 mars 1972).
A contrario, des décomptes de remboursement de prestations sociales
établies sur papier, à partir de données erronées introduite de manière
frauduleuse dans le système informatique constituent des faux documents
(Crim., 24 janv. 2001). Tel est également le cas d’un document fabriqué puis
produit en justice sous forme de photocopie, au cours d’une instance civile,
dès lors que le document a été versé aux débats, donc susceptible d’avoir
une valeur probatoire et entraînant des effets juridiques (Crim., 16 nov.
1995).
3. L’altération de la vérité.
L’article 441-1 du Code pénal ne donne aucune précision sur les moyens
utilisés pour falsifier le document, indiquant seulement qu’elle est
«  accomplie par quelque moyen que ce soit  ».
En pratique, la jurisprudence effectue une distinction entre le faux matériel
et le faux intellectuel.
a) Le faux matériel.
Le faux matériel renvoie à la falsification physique d’un support écrit. Cette
falsification peut être constituée par l’apposition d’une fausse signature
(Crim., 11 janv. 1956), l’imitation d’une signature (Crim., 2 oct. 2001), le fait
de guider la main du signataire dépourvu de lucidité (Crim., 30 nov.1971).
Ainsi, l’altération des feuilles de paye de salariés d’une entreprise (Crim., 13
mars 1968), du rapport d’un commissaire aux comptes (Crim., 12 janv.
1981), d’un relevé bancaire (Crim., 25 nov. 1975) sont des faux.
Le faux matériel peut également être constitué par la fabrication d’un
document. Tel est également le cas lors de l’établissement de bons constant
des livraisons fictives (Crim, 5 janv. 1978), de la reproduction du papier à
entête d’une société (Crim., 7 févr. 1973).
Le fait que les énonciations du document ainsi fabriqué soient en partie
exactes n’écarte pas la qualification de faux (Crim., 31 janv. 1994).
b) Le faux intellectuel.
Le faux intellectuel ne modifie pas le support mais le contenu du document
falsifié. C’est donc la véracité et non pas l’authenticité du document qui est
atteinte. Tel est le cas d’une fausse position comptable, d’une omission
intentionnelle de certaines écritures ou de l’inscription d’écritures inexactes
dans les comptes d’une entreprise (Crim., 25 janv. 1982).
La distinction entre faux matériel et faux intellectuel peut être parfois
difficile à faire. Tel est le cas lorsque des clauses sont ajoutées sur un
document. Cet ajout atteint l’authenticité du document mais aussi sa
véracité.
4. Le préjudice résultant de l’altération.
Le faux, matériel ou intellectuel, n’est punissable que s’il peut en résulter un
préjudice, qu’il soit actuel ou éventuel (Crim., 15 juin 1962). La jurisprudence
a retenu une définition très extensive du préjudice, qui peut être matériel,
moral, affecter un intérêt privé ou social (Crim., 5 nov. 1903).
Le faux est donc une infraction formelle, le résultat n’a pas à être atteint
pour que l’infraction soit constituée.
B. L’usage de faux.
L’article 441-1 du Code pénal ne donne aucune précision sur l’usage de faux.
L’infraction est constituée dès lors que l’auteur utilise en connaissance de
cause un document falsifié, susceptible de causer un préjudice à un tiers.

II. Elément moral.


L’élément moral du faux matériel résulte de la conscience, pour l’auteur, de
l’altération de la vérité, dans un document susceptible d’être utilisé comme
élément probatoire ou ayant des conséquences juridiques (Crim., 3 mai
1995). En matière de faux matériel, l’élément moral est constitué par la
conscience de la fausseté des déclarations par leur auteur.

III. Répression.
A. Les personnes physiques.
Le faux et l’usage de faux ainsi que la tentative sont punis de trois ans
d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.
Les personnes physiques encourent également des peines complémentaires,
telles que l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, l’interdiction
d’exercer une fonction publique ou une profession, l’exclusion des marchés
publics, la confiscation de la chose qui a servi à commettre l’infraction ou
qui en est le produit. Les étrangers coupables de faux encourent également
l’interdiction du territoire français.
B. Les personnes morales.
L’article 441-12 du Code pénal prévoit que les personnes morales (sociétés,
associations,…) peuvent être déclarées coupables du délit de faux et d’usage
de faux. Elles encourent une amende dont le montant est porté au quintuple
de celui prévu pour les personnes physiques, ainsi que les peines prévues
par l’article 131-39 (dissolution, interdiction d’exercer une activité
professionnelle, exclusion des marchés publics, confiscation de biens,...).

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