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Chapitre 1 : La séparation horizon-

tale des pouvoirs


I. La séparation des pouvoirs, un mythe constitutionnel
A. Théorie et pratique de la séparation des pouvoirs : l’in-
fluence de Montesquieu
De l’esprit des lois (1748) : Montesquieu s’inspire de Locke.
Finalité : limiter le pouvoir et l’arbitraire.

Horizontale : entre les pouvoirs constitutionnels. Idée chez Montesquieu de lier les pouvoirs : “tout homme
qui a le pouvoir est tenter d’en abuser” “Par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir”.
Il ne parle jamais de séparation mais division.

3 fonctions d’Etat : puissance législative, exécutive, de juger.


• Puissance exécutive confiée au monarque.
• De juger : nulle dans la mesure où le juge n’est que “la bouche qui prononce les paroles de la loi”. Tradi-
tion de se méfier des juges => faire exister l’idée d’un pouvoir judiciaire.
• La puissance législative : confiée à deux chambres : celle du peuple et celle de l’aristocratie. Forment en-
semble la puissance législative.

Montesquieu prône la coopération, l’équilibre des pouvoirs, les pouvoirs doivent aller de concert : trois puis-
sances doivent être séparée organiquement et ne s’absorbe pas totalement dans l’exercice de leur fonctions :
la puissance exécutive n’exerce pas tout le pouvoir exécutif, pareil pour le législatif. Mais sont liés dans leur
action.

Statuer : le droit d’ordonner.


Empêchement : rendre une résolution nulle : empêcher la promulgation d’une loi, censurer un ministre.

Idéal : Le roi sanctionne la loi + les chambres peuvent censurer le gouvernement : régime parlementaire cen-
sitaire, doivent aller de concert.

Théorie appliquée aux USA dans la Constitution de 1787 : l’exécutif est dans les mains du président et le lé-
gislatif dans les mains du Parlement : le président peut bloquer une loi et le Parlement peut empêcher nomi-
nation président (régime présidentiel). les juges sont élus localement (méfiance) : collaboration nécessaire
des pouvoirs pour assurer leur équilibre (checks and balances) : contrebalancent l’influent de l’autre pouvoir.

En France, malgré art. 16 de la DDHC, domination de l’Assemblée et confusion des pouvoirs + collaboration
qui tourne à l’affrontement (P. Mazeau).

B. La distribution contemporaine du pouvoir, une distribu-


tion éloignée du schéma de Montesquieu
Maintien de la distinction entre les trois organes :

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Organe exécutif : bicéphale avec le roi et le gouvernement au fur et à mesure le roi s’efface au profit du
gouvernement (parlementarisme dualiste). Aujourd'hui bicéphalisme apparent, avec président de la Répu-
blique élu par le Parlement et où le chef du gouvernement a le pouvoir.
Plus rarement l’exécutif peut être unitaire (USA) ou collégial (Suisse).
Législatif : bicamérisme avec une chambre basse qui représente le peuple et la chambre haute l’aristocratie :
au fur et mesure démocratisation des chambres. Dans les Etats fédéraux : bicamérisme avec chambre qui re-
présente la fédération dans son unité et l’autre qui représente les entités fédérés. Dans les Etats unitaires,
deux chambres avec attributions similaires (Sénat français) ou la deuxième chambre a une compétence infé-
rieure (Espagne).

Débat autour du bicamérisme : utilité de la seconde chambre ? Antidémocratique (mode de scrutin indirect
du Sénat français) ?
Garant d’un certain équilibre démocratique pour d’autres.
Difficulté de la représentation des intérêts dans le bicaméralisme.

En France : le gouvernement n’est plus responsable devant le Sénat. Renouvellement par tiers pq gage de la
sérénité : base du bicamérisme. Opère un contrôle du gouvernement. Consensus pour maintenir le Sénat. En-
quête possible sur le fonctionnement des institutions mais pas sur les faits directement. Pas une séparation ri-
gide des pouvoirs : collaboration et contrôle mutuel.

La justice est devenue un pouvoir à part entière : la justice tire sa légitimité de la Constitution vs c’est une
fonction, une autorité indépendante qui ne fait qu’appliquer la loi, décidée par le Parlement et politique pé-
nale décidée par le Parlement. Magistrats du siège (ceux qui juges) inamovibles vs du parquet soumis à la
hiérarchie : nommés par le Garde des Sceaux avec avis du CSM : le gouvernement le suit depuis 2010 :
l’avis est devenu une coutume.
Intervention de la justice dans les affaires politiques : quand peut elle intervenir (dans les élections…). La
justice est devenue un pouvoir important.
Indépendance, inamovibilité des juges.

La fonction législative a été largement absorbée par le pouvoir exécutif :


• Transferts de compétences du législatif à l’exécutif (décrets, ordonnances…) qui s’institutionnalisent.
• Causes : crises économiques et transformation du rôle de l’Etat : interventionnisme de l’Etat, crise des an-
nées trente, démocratisation de la vie politique, phénomène partisan (émergence de partis, leaders)
• Conséquences : dessaisissement partiel du Parlement, qui n’exerce plus seul la fonction législative, déléga-
tion du pouvoir législatif (traités…), fonction de contrôle politique plus limitée.
• Le Parlement conserve un rôle irréductible : rôle de représentation, de contrôle politique (commissions
d’enquête, questions…), tribune pour l’opposition, vivier du personnel gouvernemental.

Autres pouvoirs : le juge constitutionnel et les médias (pouvoir d’influence) en donnant dans priorités à l’in-
formation en pesant sur l’agenda politique : fixé ainsi parles médias (ex de l’affaire Benalla). Proposition de
constitutionnaliser le CSA en 1992. Pluralisme des médias fondements de la démocratie.

Multiplication des pouvoirs (M. Aurioux) : distinction pouvoir éco (Etat et puissances privées) et politique;
distinction pouvoir civil et militaire; distinction pouvoir exécutif et administratif; séparation du pouvoir tem-
porel et du pouvoir spirituel; existence d’un pouvoir financier qui résulterait de la globalisation des échanges
(influence des prêteurs); pouvoir supranational (pouvoir européen); émergence d’un pouvoir des collectivités
territoriales (révision Constitution du 28 mars 2003).

II. Un mythe fondateur de la classification des régimes po-


litiques
A. La distinction traditionnelle : régime parlementaire / ré-
gime présidentiel

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La séparation des pouvoirs est à l’origine de la classification des régimes politiques : parlementaires vs prési-
dentiels (inventé par la doctrine française).
Modèle britannique vs gouvernement présidentiel des USA.

Régime parlementaire (UK) : séparation souple des pouvoirs : au départ parlementarisme dualiste pq le
gouvernement est responsable devant le roi et devant le Parlement. Va devenir moniste car le gouvernement
plus responsable devant le roi. La Chambres des lords se scinde avec la chambre des communes. Le Bill of
rights renforce le pouvoir des Parlements.
Se constitue par la suite un cabinet avec des ministres qui vont gérer le pays, solidaire et responsable devant
le Parlement. Les ministres sont responsables individuellement et pénalement. 1782 : Démission de North :
règle adoptée en 1941.
Droit de dissolution du roi, puis du 1er ministre. Le roi voit ses pouvoirs se réduire.
Démocratisation du suffrage 1918 et 1945.
Déclin de la chambre des Lords : plus d’attribution constitutionnelle avec simple rôle de justice.
Consolidation des Conservateurs et des Libéraux puis des Travaillistes.
Passage au parlementarisme moniste car démocratisation du suffrage, déclin de l’institution monarchique, bi-
partisme et diffusion du modèle parlementaire.
Régime français impérial => instauration du suffrage universel ne joue plus qu’un rôle second.

Régime présidentiel (USA) : nécessaire division du pouvoir pour éviter l’arbitraire : indépendance orga-
nique des trois pouvoirs.
Répartition des fonctions : le président dispose de tout le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif dispose de
tout le pouvoir législatif mais check and balances : le président a le droit de véto. Le Sénat peut destituer le
président (impeachement) en cas de manquement pénal. Si le président a une majorité au Congres il est très
puissant. Est élu au suffrage universel direct ou indirect.
Risque de conflit écarté car l’exécutif n’est pas responsable devant le Parlement.
Bipartisme régulateur; rôle de la Cour suprême, qui arbitre les conflits entre le législatif et l’exécutif; prépon-
dérance présidentielle.

Régime présidentiel définit par deux caractères : séparation stricte entre un organe exécutif monocéphale et
un organe législatif; et une spécialisation fonctionnelle des organes avec faculté d’empêcher l’autre d’agir.

B. Les avatars du régime parlementaire


Maurice Duverger les définit;
Parlementarisme majoritaire : alternance de deux grandes forces politiques, majorités stables. UK : le Par-
lement ne joue plus le rôle de contrepoids au gouvernement, le gouvernement est assuré du soutien de la
Chambre des communes pendant toute la législature, devenue simple relais entre le Cabinet et l’opinion pu-
blique.

Parlementarisme non majoritaire : multipartisme, le gouvernement s’appuie sur de coalitions incertaines :


instabilités : Parlement est un contrepoids, le gouvernement n’est pas assuré de la confiance totale de la
Chambre, qui n’est pas un relais entre le gouvernement et l’opinion, les citoyens ne sont pas consultés (ex de
la 4ème République).

Parlementarisme rationalisé (B. Mirkine-Guetzévitch) : technique qui garantissent au gouvernement la


maitrise du processus législatif + procédures qui limitent les possibilités d’un renversement (défiance
constructive : nouvelle majorité qui désigne son successeur).
En France 49-3 : le gouvernement engage sa responsabilité sur un texte : motion de censure doit être votée à
la majorité des inscrits par l’Assemblée pour renverser le gouvernement, sinon le gouvernement reste en
place.
But maitrise du processus législatif et stabilité gouvernementale.

Régime d’assemblée : l’assemblée gouvernerait (exécutif collégial pas responsable devant l’assemblée et
qui ne peut la dissoudre, est élu pour quatre an) : régime directorial car l’assemblée gouverne à travers ce
conseil fédéral (démocratie de concordance)

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C. Les avatars du régime présidentiel : les régimes semi-pré-
sidentiels
Régimes semi présidentiels : “Le Président de la République est élu au suffrage universel, dispose de pou-
voir propres importants mais a en face de lui un Premier ministre et des ministres qui possèdent le pouvoir
exécutif et gouvernemental, et qui ne peuvent rester en fonction que si le Parlement ne leur manifeste pas sa
défiance.” (Maurice Duverger)
En Europe de l’Ouest : neutralisation de la Présidence de la République : Autriche : 1929 : président au suf-
frage universel direct qui pouvait révoquer le Premier ministre.
Après le nazisme => volonté que le président n’ai aucun pouvoir; pareil au Portugal, en Islande et en Fin-
lande.
Pour que l’élection présidentielle entraine une dynamique politique, il faut que l’élection soit compétitive
avec des chefs politiques et charismatiques.
Modèle diffusé grâce à la France, notamment en Afrique noire : président élu au suffrage universel direct et
Art. 16. Mais globalement les présidents ont vu leurs rôles se dévaluer.
Sauf dans le démocraties de l’Est : Pays Baltes, ex-Yougoslavie…à l’exception de la Bulgarie, de la Croatie,
de la Lituanie et dans une moindre mesure la Pologne .

Une règle juridique posée n’a pas forcément d’effets juridiques.

D. Les fluctuations du régime présidentiel : les régimes dits


“présidentialistes”
La doctrine française l’a théorisé. Pas une réelle vérité commune juridique. Ne rend compte de rien. On en a
parlé pour le Brésil, Côte d’Ivoire. Séparation apparente des pouvoirs mais réelle hégémonie du président.
Autoritarisme. Droit de veto législatif, le président peut édicter des décrets-lois et dispose de l’initiative des
lois.
Cas de la Russie : élu au suffrage universel pour 4 ans renouvelable une fois consécutivement. Chef suprême
des Armées, préside le conseil de sécurité. Nomme et révoque tous les membres du gouvernement et les
hauts fonctionnaires. Droit de veto suspensif, initiative des lois, large pouvoir réglementaire, peut légiférer
par ordonnances, accorder l’asile et la nationalité et suspendre les actes administratifs jugés inconstitution-
nels.

Relativité des typologies, nécessité d’une certaine valeur scientifique (M. Troper) et veiller à ne pas utiliser
d’arguments tautologique : régime parlementaire = régime anglais…

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