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Chapitre 9

Le droit de propriété sur les biens corporels

Place du chapitre dans le programme

Thème 4 – Quels sont les droits reconnus aux personnes ?


Plan du chapitre Capacités Notions
1. Identifier les attributs du • Identifier les attributs du droit de • « usus », « fructus »,
droit de propriété propriété « abusus »

2. Identifier les caractères • Identifier les caractères du droit • Caractères absolu, exclusif et
du droit de propriété de propriété perpétuel du droit de propriété

3. Qualifier un trouble • Qualifier un trouble anormal du


• Trouble anormal du voisinage
anormal du voisinage voisinage

Avant la classe (p. 107)


Quelles raisons peuvent motiver l’achat d’un bien immobilier ?
Certaines achètent un bien immobilier pour s’y loger et ne plus avoir à payer un loyer, d’autres
investissent dans un appartement ou une maison pour mettre le bien en location et se procurer un
revenu, d’autres encore peuvent se constituer un patrimoine immobilier pour l’exploiter de façon
agricole, viticole, etc.

Réponses aux questions sur la(les) situation(s)

1. Identifier les attributs du droit de propriété (p. 108-109)


1. Quel est l’attribut du droit de propriété qui a été mis en œuvre par le vendeur de la
propriété viticole ? (Doc. 1)
Vendre un bien relève de l’abusus, la faculté du propriétaire de disposer de la chose.
2. Quels attributs du droit de propriété l’acheteur chinois pourra-t-il exercer sur sa
propriété viticole ? Illustrez par des exemples. (Doc. 1)
Le nouveau propriétaire disposera d’abord de l’usus. Exemple : valoriser sa propriété par des
techniques viticoles nouvelles. Il aura aussi le fructus. Exemple : vendre le vin issu de ses vignes.
Enfin, il aura l’abusus. Exemple : il pourra revendre la propriété quand il voudra ou la laisser à ses
héritiers.
3. Quel type de fruits un viticulteur exploite-t-il ? Justifiez votre réponse. (Doc. 1 et Doc. 2)
Le raisin de la vigne constitue des fruits industriels, car sa production nécessite le travail de l’homme.
4. Qui est juridiquement fondé à décider de la date des vendanges ? En vertu de quelle
prérogative attachée au droit de propriété ? (Doc. 1 et Doc. 2)
C’est l’exploitant du vignoble qui est fondé à choisir la date des vendanges. Il met en œuvre cette
décision en vertu du fructus, qui lui permet d’exploiter son bien.

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 111
5. Par quelle opération juridique l’acquéreur et le vendeur de cette propriété viticole se
partageront-ils la propriété du bien ? (Doc. 3)
L’opération juridique envisagée est une vente en viager. L’acquéreur de la propriété viticole aura
immédiatement la nue-propriété, le vendeur se réservant l’usufruit (probablement jusqu’à son décès).
6. Le nu-propriétaire d’un bien peut-il le donner en location ? Et l’usufruitier ? Justifiez
vos réponses. (Doc. 3)
Le nu-propriétaire ne peut pas mettre son bien en location, car il n’en a ni l’usage ni le droit de le faire
fructifier. C’est exactement le contraire pour l’usufruitier, qui lui a ces deux attributs de la propriété.

Allez plus loin ! Mais combien ça vaut, l’usufruit ? (p. 109)


1. Rappelez comment se répartissent les attributs du droit de propriété entre l’usufruitier et le
nu-propriétaire.
L’usufruitier dispose de l’usus et du fructus, du droit de se servir de la chose, de la faire fructifier et de
bénéficier des fruits. L’abusus revient au nu-propriétaire, qui a le droit de disposer matériellement et
juridiquement de la chose.
2. Dans quelle situation faut-il connaître la valeur de l’usufruit, et celle de la nue-propriété ?
C’est pour le calcul des impôts frappant les cessions et transmissions (vente, donations et successions)
qu’il faut connaître la valeur de l’usufruit et celle de la nue-propriété.
3. Quelle est la logique du calcul de ces valeurs retenue par le fisc ?
Le fisc prend en compte les deux démembrements pour déterminer l’impôt dû par le donataire ou par
l’héritier. La logique est de donner à l’usufruit une valeur qui diminue avec l’âge de celui qui le
détient. De façon symétrique, la valeur de la nue-propriété est d’autant plus importante.
Par exemple, le bénéficiaire d’une donation qui reçoit immédiatement la nue-propriété d’un bien de
ses parents recueille une grande valeur si les donateurs sont très âgés… car il n’aura pas longtemps à
attendre pour obtenir l’usufruit au décès de ses parents.

2. Identifier les caractères du droit de propriété (p. 110-111)


7. Quelle est la contrainte pesant sur tout propriétaire désirant construire sur son terrain ?
(Doc. 4)
Il lui faut obtenir un permis de construire. Cela va à l’encontre du caractère absolu du droit de
propriété.
8. Comment se justifie cette atteinte au caractère absolu du droit de propriété ? (Doc. 4)
Chaque propriétaire doit respecter des normes de sécurité et d’esthétique et toute nouvelle construction
doit respecter l’environnement, y compris visuel. Le permis de construire y veille.
9. Quel point commun et quelle différence y a-t-il entre acheter un vignoble en pleine
propriété et acquérir des parts de GFV ? (Doc. 5)
L’acheteur en pleine propriété comme le détenteur de GFV exercent le droit de propriété, avec ses
attributs, mais le premier est seul à détenir ces prérogatives, alors que le second les partage avec
d’autres.
10. Par quelle opération la copropriété peut-elle se transformer en propriété ? (Doc. 5)
Si un des copropriétaires rachète les droits des autres copropriétaires, il devient l’unique propriétaire.
11. Qu’advient-il d’une exploitation viticole au décès de son propriétaire ? En quoi cela
illustre-t-il le caractère perpétuel du droit de propriété ? (Doc. 6)
L’exploitation est transmise aux héritiers. En conservant sa spécificité, la propriété reste ce qu’elle
était.
12. Qu’est-ce qui peut justifier l’expropriation d’un propriétaire viticole ? (Doc. 6)

112 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


L’expropriation d’un immeuble privé, une exploitation viticole ou autre, ne peut se faire que pour
cause d’utilité publique : construction d’une voie ferrée, élargissement d’une route, édification d’un
pont, etc.
13. Quelle règle de droit atténue l’apparente injustice d’une expropriation ? (Doc. 6)
La loi prévoit le principe de l’indemnisation « juste et préalable » de la personne expropriée.

Allez plus loin ! Pas trop haut les arbres ! (p. 111)


1. Quelles sont les règles limitant les droits du propriétaire en matière de plantation des arbres ?
Certaines limitations peuvent être prévues par des dispositions municipales, voire par des usages
locaux. À défaut, les règles du Code civil s’appliquent : sauf exception, les arbres, haies ou arbustes
dont la hauteur dépasse 2 mètres doivent être plantés à une distance minimale de 2 mètres de la ligne
qui sépare les propriétés. Les plantations dont la hauteur est inférieure ou égale à 2 mètres doivent être
plantées à une distance minimale de 50 cm de la limite de la propriété.
2. Quel caractère du droit de propriété subit ainsi une atteinte ? Qu’est-ce qui la justifie ?
Le caractère absolu du droit de propriété est limité par cette réglementation, puisque le propriétaire ne
peut pas agir totalement à sa guise. Mais, on peut dire que chacun en profite : les propriétaires sont
aussi les bénéficiaires de ces règles. En effet, c’est ce qui empêche chacun des voisins d’être victime
de plantations trop proches et/ou trop hautes, avec des désagréments, tels que la privation
d’ensoleillement ou des débordements de branches.
3. Quelles sont les situations qui autorisent à conserver des arbres de grande hauteur ?
Comment se justifient-elles ?
Dans certains cas il est possible de conserver des arbres de grande hauteur :
– s’il existe un titre qui autorise à ne pas respecter les distances légales  ; dans ce cas, une règle
spécifique prime sur la règle générale ;
– en cas de servitude par destination du père de famille, c’est-à-dire si l’arbre se trouve sur une
propriété qui a été divisée en plusieurs lots ; dans ce cas, c’est la division qui explique la situation de
l’arbre, qui était antérieure à la séparation actuelle des propriétés ;
– si l’arbre a fait naître un droit par prescription trentenaire, c’est-à-dire si un arbre planté à moins de
deux mètres de la ligne séparative des propriétés dépasse deux mètres de haut depuis plus de 30  ans :
l’ancienneté des faits, sans réaction des voisins, impose le respect de la situation, en écartant la règle
de droit écrite. On peut dire que le droit s’aligne sur les faits.

3. Qualifier un trouble anormal du voisinage (p. 112-113)


14. Est-il juridiquement exact qu’un propriétaire peut user de sa propriété comme bon lui
semble ? Justifiez votre réponse. (Doc. 7)
On ne peut pas tout faire de son bien : la limite est dans le respect de l’intérêt des voisins. C’est la
condition d’une vie sociale harmonieuse, puisque cette restriction à la propriété s’impose à tous.
15. Quel attribut et quel caractère du droit de propriété trouvent leur limite dans la notion
de trouble anormal du voisinage ? (Doc. 7)
L’attribut limité par cette notion est l’usus, puisque l’usage du bien n’est pas totalement libre. Quant
au caractère atteint par les restrictions, c’est le caractère absolu de la propriété.
16. Qu’est-ce qui différencie les deux types de troubles anormaux du voisinage ? Qu’est-ce
qui les rapproche ? (Doc. 7)
L’abus du droit de propriété est sciemment nuisible, l’inconvénient anormal ne l’est pas. Tous deux
causent un trouble excessif et donnent lieu à des mesures réparatrices et/ou à des dommages et
intérêts.
17. Sur quel fondement juridique le voisin d’une exploitation bio « dé-convertie » en
viticulture classique pourrait-il agir en justice ? (Doc. 7 et Doc. 8)

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 113
Le voisin de l’exploitation bio « dé-convertie » peut faire état de nuisances excessives, car son
environnement présente désormais des risques qui n’existaient pas auparavant.

114 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


18. Cette action aurait-elle des chances d’aboutir, selon vous ? Justifiez. (Doc. 8)
Deux points à considérer : le juge dira-t-il que les apports sur un terrain agricole non bio causent des
nuisances excessives ? La dé-conversion a-t-elle été réalisée après l’installation des voisins ou avant ?
Remarque : le premier point renvoie à l’appréciation des juges, dont on peut penser qu’elle a évolué
avec le développement des thèses environnementales contemporaines. Le second point est une
évidence : on peut seulement se plaindre du développement d’un inconvénient anormal du voisinage
si on ne s’est pas installé en connaissance de cause.
19. Quelle serait la sanction si le procès était gagné par le voisin du viticulteur ? (Doc. 7 et 8)
Il est impossible d’imposer un mode d’exploitation bio ! La sanction est donc des dommages et
intérêts.
20. Pourquoi ne serait-on pas en présence d’un abus du droit de propriété ? (Doc. 7 et Doc.9)
Choisir de revenir à une méthode agricole traditionnelle ne révèle pas d’intention de nuire aux voisins.
21. Cherchez un exemple d’abus du droit de propriété dans le monde rural. Argumentez.
(Doc. 9)
Gêner son voisin en édifiant une haie anormalement haute marquerait bien l’intention de nuire !

Allez plus loin ! Des grenouilles condamnables ! (p. 113)


1. Quel est le type d’inconvénient au cœur de ce litige ?
Il s’agit d’un inconvénient lié à la vie à la campagne : des personnes se plaignaient de la présence de
nombreuses grenouilles dans une mare située chez leur voisin, mais près de chez eux, et des bruits que
causait leur coassement, en particulier au printemps.
2. Quels sont les éléments qui ont amené les juges à considérer cet inconvénient comme
« anormal » ?
Le caractère récurrent – « à chaque printemps » – de la gêne causée par le coassement des grenouilles
et crapauds a été un élément déterminant, tout comme le nombre important des batraciens et le niveau
sonore élevé de leur coassement sont les éléments qui différencient cette situation du cas banal d’une
mare accueillant quelques grenouilles à la campagne.
3. Dans quelle situation cet inconvénient n’aurait-il pas été jugé anormal ?
Dans cette affaire, les voisins, qui ont obtenu gain de cause en justice, se plaignaient depuis plus de
douze ans. S’ils s’étaient établis dans leur maison alors que la mare existait avec ces hôtes bruyants, ils
n’auraient pas pu faire état d’un inconvénient anormal de voisinage, car tout trouble préexistant à
l’installation du voisin est supposé connu et accepté.

22.

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 115
Corrigés des applications

1. Testez vos connaissances (p. 114)


1. L’usus est, pour le propriétaire,  Vrai  Faux
le droit de faire fructifier la chose.
7. La copropriété peut s’appliquer
 Vrai  Faux aussi bien à des immeubles qu’à des
2. Les fruits industriels désignent les meubles.
loyers.  Vrai  Faux
 Vrai  Faux 8. Nul ne peut être contraint de
3. C’est en vertu de l’abusus qu’un demeurer en indivision et chaque
propriétaire peut détruire un bien indivisaire peut demander le
qui lui appartient. partage.
 Vrai  Faux  Vrai  Faux
4. Le caractère absolu du droit de 9. L’abus du droit de propriété
propriété signifie qu’il est opposable consiste en des violations des règles
à tous. d’urbanisme qui gênent les voisins.
 Vrai  Faux  Vrai  Faux
5. Le caractère perpétuel de la 10. Les troubles de voisinage ne sont
propriété signifie que ce droit ne sanctionnés que s’ils dépassent les
s’éteint pas par non-usage. inconvénients normaux de la vie en
société.
 Vrai  Faux
 Vrai  Faux

6. Personne ne peut jamais être privé


de son droit de propriété par une
décision administrative.

2. Distinguer les attributs de la propriété (p. 114)


Pour chacune des situations ci-après, dites si elles relèvent de l’usus, du fructus ou de
l’abusus de la propriété.
1. Le don de vêtements à une association caritative.
Abusus : on dispose du bien, en le cédant à titre gratuit.
2. La mise à la décharge de vieux meubles.
Abusus : on dispose du bien en l’abandonnant.
3. L’habitation occasionnelle d’une maison de campagne.
Usus : on se sert du bien personnellement.
4. L’installation d’amis en vacances dans une dépendance de la propriété.
Usus : on se sert du bien en le mettant gracieusement à disposition de tiers.
5. La perception des loyers d’un local commercial.
Fructus : on perçoit des fruits civils.
6. L’attribution d’un tableau à un parent par testament.
Abusus : on dispose du bien, en faisant un legs.
7. La récolte des fruits du verger.

116 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


Fructus : on perçoit des fruits industriels.
8. La consommation des fruits cueillis dans le verger.
Abusus : on dispose du bien en le détruisant.
9. L’abandon d’un loyer pour aider un locataire en difficulté.
Abusus : on dispose du bien en l’abandonnant.
10. La mise en sommeil de l’exploitation d’un champ (la mise en jachère).
Usus : on se sert du bien… en ne s’en servant pas pour un temps.

3. Apprécier la portée de la défense du droit de propriété (p. 115)


1. Qualifiez les faits à l’origine du litige.
Un propriétaire constate un empiètement sur sa propriété consécutif à la construction d’un pilier de
portail par son voisin.
2. Pourquoi les juges du fond ont-ils considéré que l’action en justice constituait ici un abus
du droit de propriété ?
Les juges du fond ont relevé que l’empiètement existait mais qu’il était minime. Ils en déduisent que le
propriétaire qui se plaint et agit en justice ne le fait que pour nuire à son voisin et non pas pour
défendre de façon légitime son droit de propriété.
3. Quel est le sens de l’arrêt de la Cour de cassation ?
En cassant ce jugement, l’arrêt de la Cour de cassation rappelle le caractère absolu du droit de
propriété. Pour les juges du droit, aussi minime que soit l’empiètement, il constitue une atteinte au
droit du propriétaire, qui a le droit de s’en plaindre en justice.
4. Dans quelle mesure cette décision permet-elle de faire la différence entre le caractère
absolu du droit de propriété quand il est défendu par son titulaire et l’abus de droit
possible quand le droit de propriété est exercé par son titulaire ?
Selon la Cour de cassation, « défendre son droit de propriété ne saurait dégénérer en abus ». Aucune
action en justice ne doit être interprétée comme relevant de la volonté de nuire aux voisins quand elle
émane d’un propriétaire qui a subi une atteinte dans son droit.
En revanche, celui qui exerce son droit de propriété est parfois dans un comportement répréhensible.
S’il ne met en œuvre son usus que dans l’intention de nuire aux voisins, il commet un abus de droit.
Ainsi, alors que la jurisprudence reconnaît depuis longtemps l’abus du droit de propriété « actif », on
peut dire qu’elle écarte l’abus du droit de propriété « passif ».

4. Justifier une atteinte au caractère absolu du droit de propriété


(p. 115)
1. Dans quelle situation un propriétaire peut-il imposer à un de ses voisins de lui accorder
un droit de passage ?
La situation en question est clairement énoncée par l’article 682 du Code civil : elle concerne le
propriétaire dont le terrain est enclavé, c’est-à-dire entouré de toutes parts par d’autres propriétés, et
qui n’a aucun accès ou un accès insuffisant à la voie publique. Cette absence d’accès l’empêche
d’envisager toute exploitation de sa propriété (exploitation agricole, industrielle ou commerciale) ou
l’empêche de réaliser toute construction ou tout lotissement.
2. Comment se justifie l’atteinte au droit du propriétaire contraint d’accorder cette
servitude ?
L’enclavement d’une propriété lui fait perdre toute valeur et tout intérêt. À l’inverse, le droit de
passage accordé ne constitue qu’une gêne relative pour le voisin. De plus, la loi précise qu’il doit être

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 117
indemnisé de façon proportionnée à son dommage. La servitude imposée semble donc équilibrée au
regard des intérêts des différents propriétaires.
3. Dans quelle mesure cette règle est-elle aussi une affirmation du caractère absolu de la
propriété ?
Un terrain enclavé ne permet pas à son propriétaire de « jouir et disposer de son bien de la manière la
plus absolue », pour reprendre la formule du Code civil. En lui donnant les moyens juridiques de se
désenclaver, la loi rétablit son droit dans toutes ses dimensions, quitte à écorner quelque peu le droit
de propriété d’un voisin.

5. Distinguer les obligations de l’usufruitier


et celles du nu-propriétaire (p. 116)
1. Citez deux situations donnant naissance à l’usufruit d’un bien.
1 exemple : un homme décède en laissant par testament l’usufruit de tous ses biens à sa femme et la
er

nue-propriété à ses enfants.


2e exemple : une personne cède la nue-propriété de sa maison à un acquéreur qui accepte par contrat
que le vendeur conserve l’usufruit du bien jusqu’à son décès.
2. Pourquoi dit-on que l’usufruit permet « de transmettre en douceur son patrimoine » ?
Le démembrement de propriété constitué par l’usufruit comporte des attributs importants de la
propriété : l’usus et le fructus. Il est possible de céder ces éléments, par exemple à un enfant, tout en
conservant la nue-propriété. Mais le plus souvent, c’est la vente de la nue-propriété qui est faite en
premier, les cédants conservant l’usufruit. Dans ce cas, il est convenu que cet usufruit sera recueilli
ultérieurement par le nu-propriétaire, soit à une date déterminée, soit au décès de l’usufruitier.
Ainsi, la transmission de la propriété se fait en deux temps, les vendeurs n’étant pas privés de l’usage
de leur bien. La seule contrainte qu’ils doivent accepter est l’impossibilité de le céder à un tiers.
3. Comment les charges d’un immeuble en usufruit sont-elles réparties entre l’usufruitier
et le nu-propriétaire ?
La répartition des charges s’opère en distinguant les grosses réparations et les réparations d’entretien.
L’usufruitier doit assumer les réparations d’entretien. Le nu-propriétaire doit supporter les frais
occasionnés par les grosses réparations.
Une particularité cependant : si les grosses réparations sont rendues nécessaires par le défaut
d’entretien de l’usufruitier, c’est à lui qu’incombent les frais qu’elles entraînent.
4. Qui devra payer le remplacement de la chaudière ?
Dans l’exemple cité, le remplacement de la chaudière constitue une grosse réparation. En principe, ce
serait donc au nu-propriétaire de payer. Mais l’usufruitier n’ayant jamais assuré l’entretien de cette
chaudière, il est tenu de payer son remplacement.
Remarque : la solution est logique car on peut supposer que l’absence d’entretien a accéléré le
vieillissement de la chaudière.
5. Donnez des exemples de dépenses d’entretien et de grosses réparations.
– Exemples de dépenses d’entretien : peinture des murs intérieurs, remplacement des tapisseries,
révision périodique de la chaudière du chauffage.
– Exemples de grosses réparations : réparation du toit, des murs ou des clôtures, remplacement des
appareils de chauffage, réfection de la façade, remplacement des canalisations.
Remarque : au-delà des exemples, on peut citer aux élèves la formule de la Cour de cassation, qui
permet de classer les réparations dans les deux catégories : « Les réparations d’entretien sont celles
qui sont utiles au maintien permanent en bon état de l’immeuble tandis que les grosses réparations
intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale. »

118 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


6. Comprendre la notion d’inconvénients anormaux du
voisinage (p. 116)
1. Qualifiez les faits et les parties concernées par le litige.
En 1988 la société civile immobilière (SCI) Les Maisons Guislain a acquis un immeuble qu’elle a
loué dans le cadre d’un bail commercial. Par ailleurs, la SCI souhaitait transformer un bâtiment
de cet immeuble pour créer des appartements ; ce que la mairie a refusé en raison de la présence à
moins de cinquante mètres d’un élevage porcin et bovin appartenant à la société X... La SCI a
considéré qu’il y avait là un inconvénient anormal du voisinage, dont elle a demandé réparation à
la société X…
2. Quel est le sens de l’arrêt de la cour d’appel rappelé par la Cour de cassation ?
La cour d’appel a estimé que la demande de la SCI était fondée : il avait lieu de retenir l’existence
d’un inconvénient anormal du voisinage portant atteinte au droit de propriété du demandeur.
3. Quels sont les éléments de fait qui ont été déterminants dans cette décision ?
La SCI a mis en avant, et cela a été retenu par la cour d’appel, que les installations de l’élevage
porcin et bovin devaient être mis en conformité avec les règles légales et réglementaires. La cour
d’appel a également relevé que des mesures devaient impérativement être mises en œuvre pour
faire cesser des troubles de voisinage dépassant la norme admissible.
4. Cet arrêt signifie-t-il, selon vous, qu’un inconvénient anormal du voisinage ne peut
exister qu’en cas de violation de la loi ou des règlements d’urbanisme ? Justifiez.
Selon la Cour de cassation, dans l’arrêt rendu par la cour d’appel « les seuls motifs » de l’atteinte à la
propriété du voisin manifestant un trouble de voisinage manifestement illicite suffisaient pour
condamner l’auteur de ce trouble. On peut donc en déduire que le motif de la condamnation est
l’existence de ce trouble anomal de voisinage. Celui-ci peut certes résulter d’une violation de la loi ou
d’un règlement d’urbanisme, mais rien n’indique que c’est l’origine du trouble qui est déterminante.
Une activité tout à fait légale (agricole ou industrielle, par exemple) peut donc parfaitement engendrer
un inconvénient anormal du voisinage (excès de bruit, odeurs nauséabondes, privation
d’ensoleillement, etc.). L’auteur de ce trouble devra en assumer les conséquences, quand bien même
aucune faute ne peut lui être reprochée.

7. Se préparer au bac – Identifier la ou les règles applicables,


indiquer la ou les solutions possibles et rédiger la réponse
(p. 117)
1. Dans le litige évoqué dans le document 1, qualifiez la situation au plan juridique :
déterminez les faits et les parties en présence.
Le litige trouve son origine dans l’absence d’entretien d’une haie séparative entre deux propriétés
voisines. Pour Mme X…, demanderesse à l’action en justice, ses voisins, les époux Y…, se sont
montrés négligents et ont laissé leur haie végétale se développer de façon anarchique et causer des
dommages à sa propriété (dégradation de murs). Il faut ajouter un fait important  : la haie est implantée
chez les époux Y… mais son entretien du côté de la propriété de Mme X… n’a pu être fait car elle
refusait tout passage sur son terrain à ses voisins.
2. Identifiez les deux solutions juridiques opposées qui s’offraient aux juges du fond pour
trancher ce litige. Justifiez chacune d’elles.
1 solution : les juges pouvaient retenir l’existence d’un inconvénient anormal du voisinage subi par
re

Mme X… En effet, voir sa propriété endommagée par le développement d’une haie séparative ne
constitue pas un inconvénient normal et acceptable entre voisins.

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 119
2e solution : les juges pouvaient relever que Mme X… n’avait pas accepté de respecter la « servitude
de tour d’échelle » qui aurait permis aux époux Y… d’entretenir normalement leur haie et d’empêcher
qu’elle ne prenne une dimension gênante et envahissante. Cette attitude constitue un abus du droit de
propriété.
3. Indiquez la solution juridique retenue par la cour d’appel.
L’arrêt de la cour d’appel a réglé le litige en déboutant Mme X… de sa demande de faire changer la
nature de la haie. Les juges ont retenu l’existence d’un abus du droit de propriété dans son refus de
respecter la servitude de tour d’échelle, qui a contribué au développement préjudiciable de la haie
controversée.
4. Rédigez en quelques lignes la réponse apportée par les juges à la demande de Mme X…
Le tribunal constate que le développement de la haie séparative des propriétés de Mme X… et de ses
voisins, les époux Y…, a effectivement pris des dimensions préjudiciables à Mme X…, dont les murs
de la maison ont subi des dégâts. Toutefois, l’inconvénient anormal de voisinage ne saurait être retenu.
En effet, la demanderesse a contribué au dommage dont elle se plaint, en ne respectant pas le droit de
ses voisins à exercer leur servitude de tour d’échelle, ce qui est constitutif d’un abus du droit de
propriété.

120 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


Corrigé de la synthèse

1. Identifier les attributs du droit de propriété


Selon les termes du Code civil, le droit de propriété est le droit de jouir et disposer des
choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois
ou par les règlements. Les trois attributs du droit de propriété sont l’usus (le droit de se
servir de la chose), le fructus (le droit de faire fructifier la chose) et l’abusus (le droit de
disposer de la chose).

2. Identifier les caractères du droit de propriété


Le caractère absolu du droit de propriété permet au propriétaire de faire respecter son
droit, même si, dans certains cas, ce droit est limitée par la loi (cas de la législation restrictive
des armes, des règles d’urbanisme au service de la sécurité, de l’hygiène, de l’esthétique, etc.
Le caractère exclusif du droit de propriété signifie qu’à un bien est attaché un seul
propriétaire, sauf deux exceptions :
– la copropriété, où un bien (la plus souvent un immeuble ou une partie d’immeuble)
appartient à plusieurs personnes ;
– l’indivision, où un bien appartient – en principe de façon provisoire – à plusieurs personnes,
par exemple à des cohéritiers dans le cadre d’une succession.
Le caractère perpétuel du droit de propriété signifie que ce droit perdure tant que son objet
existe et qu’il n’est pas perdu par le non-usage.
Toutefois, le propriétaire peut perdre son bien (contre indemnisation), s’il en va de l’intérêt
général, comme en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique.

3. Qualifier un trouble anormal du voisinage


Le propriétaire qui cause un trouble anormal du voisinage à un tiers (un voisin) doit réparer
le préjudice qu’il a provoqué. Il faut distinguer deux situations :
– l’abus du droit de propriété existe quand le propriétaire cause un dommage en agissant
avec l’intention de nuire à autrui (priver de soleil son voisin par une construction inutile). La
sanction est double : des mesures pour remettre les choses en l’état et des dommages et
intérêts ;
– les inconvénients anormaux du voisinage quand un dommage est causé par un
propriétaire sans intention de nuire, mais par légèreté, inconscience ou négligence. Si les
nuisances dépassent les inconvénients habituellement supportables, le propriétaire devra
cesser le trouble ou l’atténuer et réparer éventuellement le préjudice.

120 / Thème 4 Quels sont les droits reconnus aux personnes ? © Nathan


L’essentiel

1. Les attributs du droit de propriété


Selon les termes du Code civil, le droit de propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la
manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les
règlements. Derrière les termes « jouir » et « disposer » se cachent les attributs de ce droit
fondamental.

A. L’usus, le fructus et l’abusus


Les trois attributs du droit de propriété sont l’usus, le fructus et l’abusus.
1. L’usus
L’usus est le droit de se servir de la chose, de choisir l’usage qu’on en fait, pour soi-même ou pour
autrui, que cet usage soit utile, rentable ou qu’au contraire il ne soit pas profitable à la chose.
2. Le fructus
Le fructus désigne le droit de faire fructifier et de disposer des fruits provenant de la chose : fruits
naturels provenant de la chose sans l’intervention de l’homme (fruits des arbres), fruits industriels
obtenus de la chose grâce au travail de l’homme (récoltes) ou fruits civils, constitués par les revenus
tirés de la chose (loyers).
3. L’abusus
L’abusus désigne le droit de disposer juridiquement de la chose (la vendre, la donner) et le droit d’en
disposer matériellement (l’aménager, la modifier, voire la détruire).

B. L’usufruit et la nue-propriété
Il existe des démembrements de la propriété, constitués par un ou des attributs revenant à une
personne qui ne dispose pas du droit de propriété tout entier.
L’usufruit regroupe l’usus et le fructus sans l’abusus, tandis que la nue-propriété consiste dans
l’abusus sans l’usus ni le fructus.
Les situations qui voient naître ces démembrements sont diverses. C’est le cas dans certaines
successions où la loi attribue l’usufruit à un type d’héritier (conjoint, par exemple) et la nue-propriété
à d’autres (enfants, par exemple). C’est aussi le cas dans les ventes dites « en viager », où le vendeur
d’un bien – immobilier, en principe – cède la nue-propriété et se réserve l’usufruit, généralement
jusqu’à son décès.

2. Les caractères du droit de propriété


A. Le caractère absolu de la propriété
Le caractère absolu du droit de propriété donne à son titulaire le pouvoir de faire respecter par toute
personne les prérogatives attachées à son droit. Cependant, dans l’intérêt de tous, ce droit connaît des
limites. L’article 544 du Code civil énonce : « […] pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par
les lois ou par les règlements. »
Dans certains cas, le droit du propriétaire peut être limité sans pour autant être perdu. C’est le cas, par
exemple, de la législation restrictive appliquée aux choses dangereuses comme les armes ou à certains
animaux. C’est encore le cas de l’ensemble des règles d’urbanisme qui créent des contraintes telles
que l’obligation d’obtenir un permis de construire pour défendre la sécurité, l’hygiène, l’esthétique,
etc.

B. Le caractère exclusif du droit de propriété

© Nathan Chapitre 9 Le droit de propriété sur les biens corporels / 121
Le caractère exclusif du droit de propriété signifie qu’à un bien est attaché un seul propriétaire, qui
cumule ainsi les trois pouvoirs constitués par l’usus, le fructus et l’abusus.
Ce caractère exclusif connaît cependant deux exceptions :
– la copropriété : un bien déterminé, un immeuble le plus souvent, mais éventuellement un meuble,
peut appartenir à deux ou plusieurs personnes. C’est le cas des « parties communes » de certains
immeubles d’habitation ;
– l’indivision : un bien appartient en même temps – mais provisoirement en principe – à plusieurs
personnes, par exemple à des cohéritiers dans le cadre d’une succession. Mais l’indivision n’a pas
vocation à durer indéfiniment et chaque indivisaire (propriétaire en indivision) peut demander à
« sortir de l’indivision » en imposant le partage du bien.

C. Le caractère perpétuel de la propriété


En vertu du caractère perpétuel du droit de propriété, la durée de ce droit est identique à la durée
d’existence de la chose qui en est l’objet. En conséquence, le droit n’est pas perdu par le non-usage et,
d’autre part, la propriété est transmise aux héritiers par voie de succession.
Toutefois, dans certaines situations, le propriétaire peut perdre tout ou partie de son bien, dès qu’il en
va de l’intérêt général. C’est le cas de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; le propriétaire
est alors indemnisé par l’administration de la perte de son droit ; cela arrive à l’occasion de la
construction d’une route ou d’un aménagement urbain, par exemple.

3. Les troubles anormaux du voisinage


A. Le droit de propriété et le respect du voisinage
Le droit concilie l’intérêt du propriétaire avec l’intérêt de la collectivité. Ainsi, le propriétaire qui, par
l’usage de son droit de propriété, cause un trouble anormal du voisinage à un tiers doit réparer le
préjudice qu’il a provoqué. Le cas échéant, l’auteur du dommage est obligé de le faire cesser.
Cependant, il faut distinguer deux situations, selon que l’origine du trouble anormal causé au voisin se
trouve dans un comportement volontaire ou dans un agissement involontairement nuisible.

B. L’abus du droit de propriété


Il y a abus du droit de propriété lorsque le propriétaire cause un dommage en agissant avec
l’intention de nuire ; son comportement est alors dépourvu d’intérêt légitime et sérieux. Par exemple,
celui qui édifie une fausse cheminée sur son toit pour priver de soleil son voisin abuse de son droit de
propriété. La sanction est double : des mesures pour remettre les choses en l’état et des dommages et
intérêts.

C. Les inconvénients anormaux du voisinage


Il existe des inconvénients anormaux du voisinage quand un dommage est causé par un propriétaire
sans intention de nuire, mais par légèreté, inconscience ou négligence. Dès lors que les nuisances
dépassent les inconvénients habituellement supportables selon une appréciation coutumière, il y a
possibilité pour le voisin de se plaindre. Par exemple, celui qui perturbe le sommeil de son voisin par
la mise en marche très matinale d’une machine cause un inconvénient anormal. La demande est alors
d’imposer des mesures pour faire cesser le trouble ou de l’atténuer et/ou de réparer le préjudice par le
versement de dommages et intérêts.

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Ressources numériques
 www.legifrance.gouv.fr/
– Code civil : la consultation du Code civil peut être particulièrement utile pour approfondir ou
illustrer le thème des servitudes. On peut renvoyer les élèves aux articles 640 et suivants pour leur
faire analyser les diverses servitudes, et en particulier leur origine. L’abondance des textes oblige
cependant à un tri préalable. Il est conseillé de renvoyer à des articles assez faciles à lire et
représentatifs du droit des servitudes (par exemple, les articles 640, 646, 649, 651, 653, 655, 663, 681,
682, 683 et 686).
– Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : l’étude de quelques articles de ce code
permet de faire rechercher les conditions de l’expropriation, celles de l’indemnisation des
propriétaires. On peut renvoyer aux articles L. 11-1-I, L. 11-2, L. 12-1, L. 13-1, L. 13-13, L. 13-14 et
L. 14-1.

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