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LES 5 ÉTAPES DE L'INGÉNIERIE PÉDAGOGIQUE

Le concept d'ingénierie vient des sciences de l'ingénieur. Il sous-tend l'idée d'une activité


scientifique rigoureuse de conceptualisation et de production d'ouvrages dans le respect de
la conformité à des règles de bonnes pratiques.

L'ingénierie pédagogique suppose une approche méthodique, rationnelle et progressive.

D'après Guy LE BOTERF, dans le chapitre 18 du Traité des Sciences et Techniques de la Formation,
le concept d'ingénierie pédagogique, non stabilisé, évolue de l'ingénierie séquentielle vers l'ingénierie
concourante en ce qui concerne la construction de dispositifs de formation :

L’ingénierie séquentielle :

Consiste à suivre de façon linéaire un ensemble d’étapes successives, balisées et planifiées, 


pour produire un dispositif ; cela suppose un contexte relativement stable, et  fonctionne bien dans un
milieu protégé. Suppose également une claire distinction entre les acteurs.

L’ingénierie concourante :

Apparait dans les années 90 : nouvelle approche de l’ingénierie pédagogique émergeant par la
nécessité croissante de fonctionnement en réseau (NTIC), un contexte d’incertitude (environnement
complexe et instable) et d’innovation permanente, une perte de la « frontière » entre maitre d’ouvrage
et maitre d’œuvre.

Elle consiste à avancer par compromis progressifs (paliers) entre acteurs et métiers. Le chef de
projet a un rôle majeur, il est garant du maintien de sa cohérence au cours de son évolution ; il s'agit
d'un processus « chemin faisant », plus souple, capable de s'ajuster aux évolutions du contexte ; on
parlera ici de pilotage plutôt que contrôle ; la conduite de projet se fera généralement en
pluridisciplinarité (par exemple avec des informaticiens, des infographistes, ...).

La méthodologie est la condition de la construction d'un dispositif de qualité, pertinent et adapté au


public cible.

On définit, selon le modèle ADDIE (Analysis Design Development Implementation Evaluation), 5


étapes dans la conception et la réalisation d'un dispositif pédagogique :

 le diagnostic
 le design
 le développement
 la conduite
 l'évaluation

Dans une ingénierie concourante, ces 5 phases ne se déroulent pas de façon linéaire et
chronologique mais s'ajustent mutuellement de façon permanente et plus ou moins simultanée.
1. LE DIAGNOSTIC

Il s'agit de l'analyse de la demande de formation. Elle permet de faire le point sur la situation, du
point de vue des différents interlocuteurs concernés (commanditaire, entreprise, public cible).

A l'aide d'entretiens, d'audits, l'ingénieur pédagogique pourra analyser les besoins de


compétences et formuler des hypothèses générales qui seront soumises aux commanditaires pour
être validées.

C'est une phase essentielle car d'elle dépend l'adéquation du dispositif au public et à l'appel d'offre.

Elle comprend plusieurs phases :

 la finalisation des objectifs de formation  : ils sont basés sur les résultats attendus
en termes de performance ou de compétences. Ils incluent les modalités d'évaluation.

 l'analyse du public cible : ses caractéristiques sociodémographiques, psychosociales,


voire motivationnelles.

 le bilan des ressources et des contraintes du projet : évaluation des moyens


(budget, locaux, équipements, moyens humains internes et externes). Identification des
différents interlocuteurs, leur contexte, les stratégies, les enjeux. A ce stade, une négociation
peut être nécessaire avec le commanditaire sur les finalités et les moyens financiers en vue
de parvenir à une adéquation entre les moyens et les objectifs de formation.

L'ARCHITECTURE D'UNE SITUATION


PROFESSIONNELLE
La méthode MATCHA est une méthode d'analyse d'un métier afin d'en identifier la ou
les MISSION(S). Pour chaque mission, on identifiera des ACTIVITÉS, lesquelles seront déclinées
en TÂCHES, en regard desquelles  on repérera les CONNAISSANCES DÉCLARATIVES,
les HABILETÉS PROCÉDURALES et les ATTITUDES COMPORTEMENTALES nécessaires à
l'exercice du métier.
 
Cette méthode est un préalable à la construction d'un référentiel d'activités et, par conséquent, à un
référentiel de formation.
Elle permet d'identifier les besoins de compétences d'un professionnel ou d'une équipe de travail ; elle
est un outil au service de la gestion prévisionnelle des compétences, en particulier en termes de
politique de formation.

EXEMPLE : LE MÉTIER DE SERVEUR


La mission principale du serveur de restaurant est d'assurer, en liaison avec la cuisine,  le service
complet d'un restaurant, depuis la préparation de la salle et des tables jusqu'au départ du
client.

De la qualité de sa prestation dépend pour une grande part l'image que garde la clientèle.

Il peut être, selon la taille du restaurant et sa propre expérience, serveur, chef de rang, maître d'hôtel
ou tout à la fois et, dans ce cas, organiser et superviser le travail en salle.

2. LE DESIGN
C’est le cahier des charges pédagogique, un document contractuel entre le donneur d’ordre
(ingénieur de formation) et le chef de projet (ingénieur pédagogique). Il s'agit de transformer des
données issues du diagnostic en projet pédagogique cohérent.

Il comprend 4 éléments :

a.  Le rappel des conclusions du diagnostic.

b.  Les objectifs pédagogiques : transformation des objectifs de formation (exprimés en


termes de compétences) en objectifs spécifiques relevant du domaine des acquis visés en situation
pédagogique ; un objectif pédagogique doit répondre à 4 critères (tout en gardant une certaine
souplesse) :

 Il est énoncé de manière univoque : en vérifier la bonne compréhension


 Décrit un résultat observable : à formuler avec un verbe d’action (voir taxonomies de Bloom,
taxonomie des apprentissages de type affectif, taxonomie des apprentissages de type
psychomoteur, taxonomie des apprentissages de type cognitif

 Précise les conditions de manifestation de l’action : il est contextualisé

 Annonce les critères de son évaluation (seuils, critères et indicateurs).

c.   Le choix du dispositif : doit faire l’objet d’une réflexion spécifique. Il fixe le cadre
spatiotemporel et technologique des modalités de l’action pédagogique (organisation des temps
individualisés, travail en sous-groupe, en séance plénière, intervenants, en présentiel/ à distance,
etc…)

d.   Les moyens pédagogiques : ensemble des procédés et ressources utiles à l’action du


formateur : face à face pédagogique, travail en groupe restreint en autonomie, simulation, e-learning,
cours magistraux, … On parlera d’outils et de supports pédagogiques

3. LE DÉVELOPPEMENT
C'est l'étape de construction proprement dite du dispositif sur la base du cahier des charges
préalablement conçu et validé.

Il s'agira d'élaborer le parcours de formation, avec un choix de programmes, de contenus, de


méthodes pédagogiques, d'outils, voire  la conception-même de ces outils (par exemple, un module e-
learning).

Les actions seront planifiées dans le temps (par exemple, déterminer le rythme de l'alternance école-
stage, e-learning / présentiel) selon un calendrier cohérent.

Les différents prestataires, internes ou externes, seront choisis et contactés. Interviendra la


négociation sur le tarif des prestations.

A cette étape, parfois, il s'agira de construire un référentiel de formation, en lien avec un référentiel
d'activités professionnelles.

La phase de développement peut être relativement simple ou au contraire complexe s’il s’agit de
construire un outil comme un module e-learning (comportant un investissement humain et financier
important).

Lorsque le parcours est élaboré, il s'agira de construire les séquences pédagogiques.

On procédera en 3 étapes :

a.      Sélection du contenu à médiatiser,

b.      Scénarisation des activités selon un modèle pédagogique (inductif ou déductif),

c.       Fabrication ou production des ressources (en interne ou par sous-traitance)


d'après cours Ingénierie Pédagogique, P. CARRE
ET TOUJOURS SE RAPPELER LES 4 PRINCIPES DE
CHOIX D'UN OUTIL :
 Relativité : il n'existe pas un outil meilleur qu'un autre ! Tout dépend de l'utilisation qu'on en
fait...

 Redondance : plusieurs outils valent mieux qu'un ! il est important de varier les moyens

 Auto-formation : un outil n'est efficace que si le sujet se l'approprie

 Productivité : un outil doit répondre à un bon rapport coût-efficacité

4. LA CONDUITE
C'est l'acte de formation en lui-même. C'est la rencontre avec l'apprenant autour de la transmission du
savoir, l'animation du groupe d'apprenants et de la séquence pédagogique.

L’animation renvoie aux modes d’intervention pédagogique ; on trouvera plusieurs modèles ou


classifications :

 La notion de « style pédagogique » (M. ALTET), basée sur les dimensions personnelle


(manière d'être dominante de l'enseignant, posture privilégiée) , relationnelle (manière
dominante d'entrer en relation avec l'apprenant) et didactique de l’action pédagogique
(manière de faire, d'organiser la situation pédagogique)

 Les « modes de travail pédagogique » de type transmissif, incitatif ou appropriatif (M.


LESNE) : MTP1 (mode de travail pédagogique de type transmissif, à orientation normative),
MTP 2 (mode de travail pédagogique de type incitatif)  et MTP3 (mode de travail de type
appropriatif, centré sur l'insertion sociale de l'individu)

 Les « modalités de communication pédagogique » (LECLERCQ), basées sur des théories


de la formation explicatives (expliquer quelque chose à quelqu'un (MCP1)), constructivistes
(mettre autrui en position de s'expliquer quelque chose à lui-même (MCP2)) ou dialogiques
( "s'expliquer quelque chose avec autrui" (MCP3))

 Les « perspectives sur l’enseignement » de PRATT

               - transmission : enseigner un contenu, modèle traditionnel, béhavioriste


               - compagnonnage : pédagogie du modèle, learning by doing
            - développement : pédagogie de la situation problème, l'apprenant interagit avec la situation
et avec les autres
          - facilitation : pédagogie du projet ; le formateur guide l'apprenant qui est acteur de sa
formation, responsabilisation de l'apprenant, autoformation
              - réforme sociale : l'apprentissage vise le changement de représentations et l'engagement

Il n’y a pas forcément de modèle qui prévaut par rapport à un autre : ce qui importe, c’est
l’optimisation entre les attitudes du formateur et les dispositions de l’apprenant.  

5. L'ÉVALUATION
On cherchera ici à apprécier l’efficience de la formation à travers des facteurs de résultat et de
coût :

a.    Les facteurs de résultat : taux de participation ou d’assiduité, satisfaction des usagers, niveaux


d’acquisition, transfert de compétences, effets  globaux de la formation sur l’organisation.

b.    Les facteurs de coût : frais visibles (coûts directs : factures, salaires des formateurs, équipement
et matériel) et frais masqués (coûts indirects : salaires des stagiaires, frais de déplacement,
hébergement, coûts de structure (secrétariat, locaux, …))

Ces facteurs, affectés de leur coefficient de pondération respectif, permettent d’apprécier la


« productivité pédagogique » d'un dispositif.

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