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Des connexions sémantiques de Tesnière aux dépendances sémantiques dans


la théorie Sens-Texte

Chapter · January 2009

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2 authors:

Aleksandra Dziadkiewicz Izabella Thomas


University of Franche-Comté University of Franche-Comté
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Izabella Thomas, Aleksandra Dziadkiewicz
Centre de Recherche en Linguistique et TAL L. Tesnière
Université de Franche-Comté, Besançon
izabella.thomas@univ-fcomte.fr
aleksandra.d@hotmail.fr

DES CONNEXIONS SEMANTIQUES DE TESNIERE


AUX DEPENDANCES SEMANTIQUES DANS LA THEORIE SENS-
TEXTE

ABSTRACT. This paper outlines the correspondences between two theories: the first one, precursory, by Tesnière,
founder of the notion of dependency in syntax, and the second one, called Meaning Text Theory, by Mel’čuk, which
develops the approach of Tesnière. We focus on semantic considerations of Tesnière in order to demonstrate their
impact on the theory of semantic dependency proposed by Mel’čuk.

KEYWORDS: Tesnière; structural syntax theory; Meaning-Text theory; dependency grammar; semantic relations;
semantic dependency.

1. Introduction
Cet article met en lumière les correspondances entre deux théories : celle, précurseur, de
Lucien Tesnière, fondateur de la notion de dépendance en syntaxe, et celle d’Igor Mel’čuk, appelée
« Théorie Sens-Texte », qui reprend et développe l’approche proposée par Tesnière.
L’objectif en est double : d’une part, souligner l’héritage de Tesnière, que l’on peut
considérer comme l’un des plus grands linguistes de notre époque, mais dont la théorie, quelque peu
‘effacée’ par la prédominance de la grammaire de constituants, n’est restée longtemps que
faiblement exploitée par la communauté linguistique, à l’exception de chercheurs allemands et
russes (notamment Mel’čuk).
D’autre part, nous voulons présenter l’impact de la théorie de Tesnière dans le
développement de l’approche Sens-Texte de Mel’čuk, qui est connue par certains de ses aspects
(notamment, les Fonctions Lexicales), mais méconnue en ce qui concerne, par exemple, le
développement des représentations de divers niveaux d’analyse d’un texte.
Comme il nous est impossible de présenter ne serait-ce que les grandes lignes de ces deux
théories, nous avons choisi de mettre l’accent sur les considérations sémantiques de Tesnière (il est
vrai, très peu développées dans sa théorie, mais néanmoins constitutives de ses notions
élémentaires) pour démontrer leur rôle dans l’élargissement de la théorie de la dépendance à la
sémantique proposé par Mel’čuk.
Par conséquent, dans la première partie, nous allons revenir sur quelques postulats de base
de Tesnière pour montrer l’impact de la sémantique sur sa propre théorie et sur le développement de
la théorie de la dépendance par Mel’čuk, pour ensuite parler plus spécifiquement de la dépendance
sémantique dans la théorie Sens-Texte.

2. Relation entre la syntaxe et la sémantique chez Tesnière et son reflet


chez Mel’čuk
La syntaxe structurale de Tesnière est d’abord une théorie syntaxique, dans laquelle, a priori,
le niveau syntaxique est bien distinct du niveau sémantique :

« La distinction entre le plan structural et le plan sémantique est d’importance capitale


pour la bonne compréhension de la syntaxe structurale » (TESNIERE 1959 : 40)

Mais même si TESNIERE postule d’une part, au niveau théorique, l’indépendance du plan
structural et du plan sémantique, d’autre part il affirme que « dans la pratique les deux plans sont
en fait parallèles, parce que le plan structural n’a d’autre objet que de rendre possible l’expression
de la pensée, c’est-à-dire du plan sémantique. Entre les deux, il n’y a pas d’identité, mail il y
parallélisme » (1959 : 42). Ceci le mène à une affirmation beaucoup plus forte, à savoir « il n’existe
jamais de connexion structurale sans connexion sémantique » (1959 : 44), tandis que le contraire
est possible : il peut exister des connexions sémantiques sans connexions structurales, comme en
atteste, par exemple, le phénomène d’anaphore.
Puisque chaque connexion structurale présuppose l’existence d’une connexion sémantique,
cette dernière n’a pas besoin d’être marquée explicitement dans le stemma1:
(1) Certains grands savants aiment vos discours grandiloquents.

aiment

savants discours

certains grands vos grandiloquents

Par contre, la relation de dépendance sur le plan sémantique s’exerce en sens inverse par
rapport au plan de la syntaxe. Tandis que sur le plan structural, la dépendance va du régissant au
subordonné (de haut en bas sur le stemma), sur le plan sémantique le sens du subordonné porte sur
celui du régissant dont il dépend (du bas en haut) :

(2) Exemple de TESNIERE (1959 : 43)

ruisseaux ruisseaux ruisseaux

petits petits petits

stemma non-marqué incidence incidence


structurale sémantique

Bien que le raisonnement de Tesnière ne puisse être tenu jusqu’au bout, puisque toutes les
dépendances sémantiques ne s’exercent pas du subordonné au régissant (c’est notamment le cas du
verbe et de ses actants), il peut être considéré comme précurseur d’un développement proposé plus
tard par Mel’čuk et reposant sur le calcul des prédicats. De manière générale, le fait que la
dépendance sémantique puisse s’exercer dans l’autre sens que la dépendance syntaxique justifie en
soi la construction de deux représentations indépendantes pour chacun de ces niveaux.
1
Les traits continus, représentant les connexions structurales, se superposent aux traits en pointillé, qui correspondent
aux connexions sémantiques. Ces dernières sont, par conséquent, invisibles.
Ainsi, dans la représentation de la dépendance sémantique de Mel’čuk, qui prend la forme
des graphes orientés 2 , nous retrouvons exactement la même inversion de dépendance entre la
structure syntaxique (profonde, notée DSyntS) et la structure sémantique (SemS) :

(3) Exemple de MEL’CUK ((b) : 12)

nice little hotel renewed (for its comfort)

DSyntS (Deep Syntactic Structure) SemS (Semantic Structure)

hotel nice little renewed

ATTR ATTR ATTR 1 1 1

nice little renewed hotel

Cette inversion s’explique chez MEL’CUK par la notion de prédicat sémantique, sur lequel
est décidée la direction de la dépendance sémantique :

« A (semantic) predicate is a ‘binding’ meaning, which is somehow incomplete without


other meanings – it has open ‘slots’ where other meaning should be inserted. » (2004 : 4)

Ainsi, ce qui constitue un modifieur (ou Synt-attribute, MEL’CUK 2004 : 50) d’un mot au
niveau de la DSyntS, est son gouverneur sémantique au niveau de la SemS. L’exemple prototypique
de cette inversion est la structure Adj N ou V Adv :

(4) DSyntS (Deep Syntactic Structure) SemS (Semantic Structure)


gentil garçon gentil  garçon
rouler vite rouler  vite

3. De la notion de nucléus à l’éclatement des niveaux d’analyse


Par ailleurs, Mel’čuk emprunte à Tesnière la dénomination de sémantème, celle-ci
intrinsèquement liée à la notion de nucléus. Tesnière, conforme à son affirmation qu’il n’existe pas
de connexion structurale sans connexion sémantique, définit la notion de nucléus comme un
ensemble portant un certain nombre de fonctions, dont au moins deux fonctions obligatoires : la
fonction nodale (ou structurale), portée par le régissant, dont le rôle consiste à « nouer en un seul
faisceau les différentes connexions qui unissent à lui ses divers subordonnés » (TESNIERE 1959 : 39)
et la fonction sémantique :

« Il ne peut y avoir de nucléus sans fonction sémantique, puisque le structural n’a de raison
d’être que dans le sémantique, et que par conséquent un nucléus purement structural
n’aurait pas de raison d’être. » (1959 : 46)

Un nucléus peut être composé d’un seul mot qui porte les deux fonctions (tel que ‘Alfred’
dans ‘Alfred est arrivé’) ou d’un ensemble de mots, chacun portant une fonction différente (tel que
‘est arrivé’ dans ‘Alfred est arrivé’). Dans ce dernier exemple d’un nucléus, appelé ‘dissocié’ par

2
La représentation syntaxique en arbre de dépendance n’a pas besoin d’être orienté, puisque la dépendance dans cette
représentation bi-dimensionelle va toujours de haut (régissant) en bas (subordonné).
Tesnière, le mot ‘est’ porte la fonction structurale, alors que le mot ‘arrivé’ porte la fonction
sémantique, et, par conséquent, est appelé ‘sémantème’ :

(5)

Est arrivé nucleus dissocié


Est arrivé est

Alfred Alfred arrivé

Seuls les mots pleins (qui sont de quatre type chez Tesnière : substantif, adjectif, verbe et
adverbe) peuvent porter la fonction sémantique, donc sont, par définition, des sémantèmes3.
C’est la mise en place de ce « quadrilatère de base » qui constitue l’une des intuitions les
plus ingénieuses (mais en même temps les plus confuses) chez Tesnière. Définie sur des critères
sémantiques, elle est par la suite ‘poussée’ et ancrée dans la syntaxe, perdant quelque peu, dans les
développements de la théorie, son caractère sémantique. Expliquons cela brièvement.
Prenons par exemple la définition du substantif :

« Les substances sont les choses perçues par le sens et conçues par l’esprit comme douées
d’une existence distincte, p. ex. cheval, table, quelqu’un. Les mots pleins exprimant l’idée
d’une substance sont appelés substantifs. » (TESNIERE 1959 : 61)

Cette définition ne fait aucunement appel à des critères syntaxiques. Cependant, comme
TESNIERE (1959 : 49) affirme que « les catégories grammaticales (…) ont d’étroits rapports avec
le plan sémantique », il attribue à celle de substantif le rôle d’actant (syntaxique) dans une phrase.
Nous voilà donc avec une double casquette pour chaque catégorie : les substantifs sont aussi des
actants (syntaxiques), les adverbes prennent le rôle de circonstants, les adjectifs celui des épithètes
et les verbes du noyau central de la phrase autour duquel s’articulent les autres fonctions. Si l’on
ajoute à cela le fait que les catégories sont elles-mêmes définies de façon dynamique4, présupposant
donc au niveau statique l’existence d’autres catégories 5 , nous comprendrons alors les multiples
niveaux de représentations assumés par un stemma, ainsi que les compromis et les omissions qui
peuvent en résulter ! Par conséquent, et tout naturellement, le stemma « unique » de Tesnière se
trouve ‘décomposé’ en plusieurs représentations distinctes dans la théorie Sens-Texte, avec une
spécification de relations de dépendance à chacun de ces niveaux. Cet ‘éclatement’ peut être déjà
pressenti dans la théorie de la translation de Tesnière, qui a pour objectif d’expliquer comment les
mots passent d’une catégorie statique à une catégorie dynamique. Par exemple, dans le syntagme le
livre de la fille, la fille, initialement substantif, est translaté en adjectif à l’aide de la préposition de
et joue donc le rôle d’épithète par rapport au livre. Chaque processus de translation implique trois
facteurs : le transférende, c’est-à-dire le nucléus soumis à la translation (la fille), le translatif, qui est

3
« Les mots pleins sont (…) ceux dont la forme est associée directement à une idée, qu’elle a pour fonction de
représenter et d’évoquer » (TESNIERE 1959 : 6).
4
Les catégories de substantif, adverbe, verbe et adjectif sont définies chez Tesnière aussi bien de façon statique (en
dehors de la phrase) que de façon dynamique, c’est-à-dire dans un contexte phrastique. Dans sa conception de syntaxe
dynamique, un élément qualifié de verbe peut prendre la fonction substantivale dans une phrase, par exemple dans
Partir me semble indispensable. On y distingue déjà la division entre ce qui va être appelé plus tard par Mel’čuk la
syntaxe de surface et la syntaxe profonde (respectivement, syntaxe statique et syntaxe dynamique chez Tesnière).
5
Le passage d’une catégorie statique à la catégorie dynamique se fait à l’aide des translations, voir TESNIERE (1959 :
381- 626).
l’outil de translation et le mot vide6 par définition (de) et le transféré, c’est-à-dire ce même nucléus
après que la translation l’a fait passer dans une nouvelle catégorie (de la fille). En voici la
représentation graphique, avec le fameux Т de translation :

(6)

Le livre Le transféré : représente la


catégorie dynamique du groupe
par rapport au nucléus régissant
‘le livre’ (Adjectif)
nucléus transféré
A

de la fille

Le transférende : représente la
catégorie statique du nucléus
avant la translation (Substantif)

Le translatif

Ce qui est vraiment important et ce qui préfigure la distinction entre la syntaxe profonde et
la syntaxe de surface est l’affirmation que le nucléus transféré se comporte comme transféré dans
ses connexions supérieures et comme transférende dans ses connexions inférieures. Grosso
modo, la relation du nucléus transféré à son nucléus supérieur (régissant) reflète la relation
syntaxique profonde entre ses deux éléments, tandis que la relation entre le translatif et le
transférende reste au niveau de la surface et permet à ce dernier d’entretenir d’autres relations
syntaxiques ‘permises’ pour sa catégorie :

(7) Le livre de la jolie fille


Le livre

de la fille (substantif)

jolie (adjectif)

Comme nous l’avons déjà mentionné, la multitude de niveaux de représentations contenues


dans un stemma se trouve ‘décomposée’ et spécifiée en plusieurs représentations distinctes dans la
théorie Sens-Texte, entre autres la représentation de la structure sémantique, la représentation de la
structure syntaxique profonde et la représentation de la structure syntaxique de surface.
L’introduction de ces divers niveaux d’analyse a pour objectif de faciliter le passage du sens, c’est-
à-dire de la structure sémantique d’une phrase qui est multidimensionnelle, à la structure linéaire du
texte. Cette opération existe déjà chez TESNIERE, qui affirme que « parler une langue, c’est

6
« Les mots vides sont ceux qui ne sont pas chargés d’une fonction sémantique » (TESNIERE 1959 : 6).
transformer l’ordre structural en ordre linéaire » (1959 : 19). Cependant, les stemmas manquent
terriblement de précisions pour pouvoir effectuer cette opération, si on ne connaît pas auparavant
son résultat 7 . Par contre, chaque niveau intermédiaire de représentations de Mel’čuk est censé
faciliter la démarche vers la linéarisation.

4. Dépendance sémantique dans la théorie Sens-Texte

La représentation de la structure sémantique d’une phrase ne concerne que les dépendances


sémantiques entre les mots, c’est-à-dire les relations prédicats – arguments, que Mel’čuk, se basant
sur la nomenclature initiée par Tesnière, appelle les actants sémantiques, pour les différencier des
actants syntaxiques profonds et les actants syntaxiques de surface. Cette notion est étendue à tout
type de mots ayant la nature prédicative, c’est-à-dire laissant ‘un trou’ à remplir dans leur
signification ; ainsi non seulement les verbes, mais aussi les adjectifs, les adverbes et même les
prépositions possèdent des actants sémantiques. La démarche de définir les actants sur les bases
purement sémantiques n’est pas commune8 : la plupart du temps, on recherche des indices formels
(syntaxiques, morphologiques) pour définir les actants et pour les différencier ensuite des
circonstants, qui ne sont, eux, dans aucune relation de dépendance sémantique avec le verbe.
Pour définir l’actant sémantique, Mel’čuk fait appel à la notion de la situation linguistique et
de ses participants. Sans entrer dans les détails de cette définition, signalons sa ressemblance avec
celle de TESNIERE, qui définissait lui aussi les actants comme des participants à un procès :

« Les actants sont les êtres ou les choses qui, à un titre quelconque et de quelconque façon
que ce soit, même au titre de simples figurants et de la façon la plus passive, participent au
procès. » (1959 :102)

La situation linguistique n’est en aucun cas le reflet d’une quelconque situation réelle : il
s’agit plutôt d’un ensemble de faits et d’entités liés par des relations de dépendance en une structure
unifiée à laquelle on se réfère en utilisant un prédicat (MEL’CUK 2004 : 10). Par conséquent, un
actant sémantique peut être défini comme un argument obligatoire d’un prédicat sémantique, donc
un participant obligatoire d’une situation linguistique.
La notion d’obligation n’équivaut pas à la possibilité d’omettre l’expression linguistique
d’un actant dans un énoncé réel. Par exemple, le prédicat ‘louer’ (MEL’CUK 2004 : 10) implique
quatre actants sémantiques : X loue Y à Z pour une période W contre une somme d’argent V. Dans
des énoncés, plusieurs de ces actants peuvent être omis :
Marie a loué une voiture (omission de Z, de W et de V)
Cependant, même si certains actants sémantiques ne sont pas exprimés, leur existence est
présupposée : si la notion d’argent est enlevée de cette définition, la situation linguistique change
complètement et correspond plutôt à celle exprimée par le prédicat « emprunter » (X emprunte Y à
Z pour une période W (sans donner de l’argent en échange)) ; si l’on enlève la période, on a affaire
au prédicat « acheter » (X achète Y à Z pour une somme d’argent (mais pas pour une période
déterminée)). Ainsi, la détermination du nombre d’actants d’un prédicat s’appuie sur l’analyse de sa
signification et bouleverse quelque peu la distinction ‘classique’ entre les actants et circonstants, et
surtout celle de Tesnière, fondée uniquement sur la correspondance d’avec les fonctions
dynamiques des mots dans une phrase. Ainsi, un nucléus à la fonction adverbiale, donc présupposé
circonstant chez Tesnière, serait un actant dans la théorie Sens-Texte, comme dans l’exemple
suivant :

7
Voir la même critique chez ROUSSEAU 1995.
8
Voir THOMAS, DZIADKIEWICZ 2009.
(8)

Marie est allongée sur le sol.

est allongée ALLONGER

1 I II
E
Marie
sur le sol MARIE SOL

Qui plus est, un élément obligatoire à la surface n’est pas forcément un actant
sémantique (MEL’CUK 2004 : 45) :

(9)
On lui a fait des funérailles magnifiques (luxueuses).
vs.
*On lui a fait des funérailles le 1 avril (à Paris).

En résumé, bien que les éléments de surface doivent être analysés pour établir le nombre
d’actants d’un prédicat sémantique9, la dépendance sémantique ne doit être aucunement confondue
avec la dépendance syntaxique, ni même morphologique entre les éléments d’une langue donnée.

5. Conclusion
La théorie Sens-Texte formalise explicitement le niveau d’analyse sémantique en tant qu’un
des quatre niveaux de description d’une langue naturelle. Si la définition des ‘dépendances
sémantiques’ proposée par Mel’čuk se nourrit du calcul des prédicats, on peut y voir également des
traces des « connexions sémantiques », et, de manière plus générale, de la théorie de dépendance
développée par Tesnière. Bien que cette dernière soit orientée vers l’analyse syntaxique, on
retrouve des analogies fortes entre, respectivement, les notions de nucléus (qui remplit
obligatoirement une fonction sémantique) et de « mot plein » chez Tesnière, et les notions de
« nœud » d’un graphe orienté dans la structure sémantique et de « sémantème » utilisées dans la
théorie Sens-Texte.

Références

(a) MEL’CUK I. (2004), Actants in Semantics and Syntax, I, II, Linguistics, 42:1, 1-66; 42:2, 247-
291.

(b) MEL’CUK I. (à paraître), Dependency in Linguistic Description ; texte téléchargé à partir de :


olst.ling.umontreal.ca/textes-a-telecharger/

TESNIERE L. (1959), Eléments de syntaxe structurale, Editions Klincksieck, Paris.

9
Pour plus de détails, voir par exemple la notion d’ « exprimabilité » : un prédicat ouvre une position pour un actant
sémantique seulement si cet actant est ‘exprimable’ dans une langue ((a) MEL’CUK 12-27).
ROUSSEAU A. (1995), « Le graphe de Tesnière : origine et originalité », in: Madray-Lesigne F.,
Richard-Zappella J. (1995), Lucien Tesnière aujourd’hui, Editions Peeters, Louvain – Paris.

THOMAS I., DZIADKIEWICZ A. (2009), « Convergences et divergences dans les structures


prédicatives du français et du polonais : autour de la question d’actance », in: Bogacki K., J.
Cholewa et A. Rozumko (éds), Methods of lexical analysis : theoretical assumptions and practical
applications, Wydawnictwo Uniwersytetu w Bialymstoku, 361-370.

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