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Section 9 

: Les thèmes, les réseaux lexicaux

I/ Thème :
1- Définition :

Il est question d’un sujet abordé dans un texte ou dans une œuvre donnée. A titre
illustratif, on peut relever les thèmes suivants : l’amour, l’angoisse, le spleen, la
fuite du temps, le voyage, l’ambition, l’absurde, l’argent…

2- Intérêt de l’étude d’un thème ou des thèmes :

L’étude des thèmes est intéressante dans la mesure où elle permet d’apprécier
comment un même sujet a été traité différemment dans les lettres françaises.
L’étude des thèmes permet donc, par comparaison avec d’autres œuvres
similaires, une meilleure caractérisation de l’ouvrage étudié par les
ressemblances et les différences, par l’appui sur une tradition ou au contraire par
la force de novation.

3- Comment étudier un thème : question de méthodologie

D’abord, il convient de définir avec précision le sens des termes que l’on
emploie. Il est nécessaire de bien faire attention au fait que les mots évoluent et
changent de sens suivant les époques. Par exemple, la notion du concept
« l’honnête homme » du XVIIème siècle est différente de celle du XVIIIème siècle.

4- La critique thématique :

Selon la critique thématique, les thèmes peuvent prendre des formes


particulières (idée, sujets, descriptions, images) qui reviennent très souvent. Ces
thèmes, par exemple, la nature, l’amour, la mort, etc., peuvent se succéder et
s’entrelacer comme des motifs musicaux pour former la contexture de l’œuvre.
Cette critique s’intéresse essentiellement à relever ces thèmes, à étudier leur
fréquence, leurs rapports et leurs significations, etc., et essaie d’en dégager des
vues soit sur la structure de l’œuvre, soit sur la configuration de l’univers
mythique de l’auteur en question. Il s’agit donc de découvrir un mythe personnel
de l’auteur. Selon Roland Barthes : «Le thème est itératif, c’est-à-dire qu’il est
répété tout au long de l’œuvre […]. Il constitue, par répétition même,
l’expression d’un choix existentiel […]. Le thème supporte tout un système de
valeurs : aucun thème n’est neutre, et toute la substance du monde se divise en
états bénéfiques et en états maléfiques […]. Il s’associe à d’autres thèmes pour

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constituer « un réseau organisé d’obsessions », « un réseau de thèmes » qui
nouent entre eux des rapports de dépendance et de réduction1. »

II/ Les réseaux lexicaux:


1- Le champ lexical :

Ensemble de mots que l’on associe à une notion donnée. Par exemple, Voltaire
dans le Poème sur le désastre de Lisbonne utilise le champ lexical de
l’affectivité douloureuse : malheureux, déplorable, douleurs, infortunée,
lamentables, horreur…

Série de termes (noms, adjectifs, verbes, adverbes) qui exprime une même
idée, une même notion. Par exemple, le champ lexical de la nature dans la
première strophe du poème Le dormeur du val de Rimbaud : verdure, rivière,
herbes, soleil, montagne et val.

On va du signifié au signifiant [ 1 signifié= X signifiants]. Cette démarche porte


le nom d’onomasiologie (onoma : nom).

NB :

Il existe une différence entre le champ lexical et le champ sémantique.

Le champ sémantique :

C’est un ensemble des significations que peut prendre un mot. Pour construire
un champ sémantique, on part du signifiant et on identifie les divers signifiés [1
signifiant= X signifiés], en déterminant les effets sens du mot, diachroniquement
(Exemple : évolution du sens du mot charme) ou synchroniquement (Exemple :
étude du verbe poser). Cette démarche porte le nom de sémasiologie. Par
exemple : le mot nature au XVIIIème siècle peut représenter un objet de
description (le paysage), un cadre privilégié pour éprouver certains états d’âme
(d’où le sentiment de la nature), un modèle que doit imiter l’art, les qualités qui
correspondent à l’essence de l’homme (la nature humaine), la pureté innocente
d’un état (état de nature) non encore perverti par la civilisation et la culture.

L’isotopie : redondance sémantique

Procédé sémantique qui désigne la présence d’un même sens dans plusieurs
termes d’un texte, ce qui permet de les relier entre eux. Elle peut regrouper

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Roland, Barthes, Michelet par lui-même, Ed. du Seuil, 1954

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plusieurs champs lexicaux et organise ainsi des réseaux sémantiques qui fondent
la cohérence d’un passage.

Exemple de deux isotopies antinomiques dégagées du poème Le dormeur du val


de Rimbaud

Isotopie de la vie : « verdure », « chante », « rivière », « herbes », « soleil »,


« luit », « rayon », « jeune », « frais », « lumière », « chaudement »,
« souriant », « parfum ».

Isotopie de la mort : trou (connote l’idée de la mort et qui a pour synonyme


fosse dont le sens est aussi : « trou creusé en terre pour l’inhumation des morts »
(Petit Robert), le trou est une métonymie de la mort), « nue », « dort »
(métonymie de la mort), « étendu », pâle, « il a froid », « rouges »

NB :

Observer et relever les mots d’un texte ou d’une œuvre pour constituer les
champs lexicaux dominants est une étape importante de l’analyse littéraire.
Cette étape permet de saisir la cohésion lexicale de l’œuvre et d’en dégager le
thème ou les thèmes importants.

2- Combinaison des champs lexicaux :

Il est possible que plusieurs champs lexicaux s’associent dans un même texte.
Parfois, les champs lexicaux s’entrecroisent sans appartenir au même niveau de
signification du texte. Un champ lexical donne le thème, les autres interviennent
à titre de comparaison ou bien de métaphore.

3- D’autres ensembles lexicaux :

Les mots d’un texte peuvent s’organiser en ensembles lexicaux dont le point
commun est la nature du vocabulaire employé et sa valeur. On peut regrouper
ces réseaux lexicaux selon différents modes de classement et distinguer
notamment les ensembles que forment l’abstrait et le concret ; l’affectif et
l’appréciatif.

4- L’analyse des réseaux lexicaux :

4-1/ La succession de réseaux lexicaux :

3
Cette succession donne des informations sur la progression thématique du texte,
sur l’évolution d’un personnage ou d’une situation. Le passage d’un réseau à un
autre souligne un moment important du texte.

4-2/ L’association de réseaux lexicaux :

Cette association renseigne sur l’imaginaire de l’auteur, sa vision personnelle.


Elle peut rapprocher, par un jeu sur les images, deux univers distincts. Elle peut
aussi, par l’emploi de connotations appréciatives, souligner l’état d’esprit de
celui qui s’exprime.

4-3/ L’opposition de réseaux lexicaux :

Elle crée une atmosphère, une tension révélatrice des luttes et conflits mis en jeu
par le texte. Elle peut aussi provoquer un effet poétique par un jeu sur les
contrastes.

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