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Note de recherche mémoire

Semestre 5

9 janvier 2022

POUPPEVILLE Hadrien

Promotion 2019/ 2022

Référent pédagogique : Cécile FLOQUET

Référent mémoire : Nora MERNIZ


Introduction :

Dans le cadre de ma formation d’infirmier à l’IFSI des Diaconnesses, je dois effectuer


pour la fin de mes études un mémoire qui s’appuie sur une situation dont j’ai été
l’acteur et qui m’a interrogé.

La note de recherche que je remets aujourd’hui fait part de mon choix de travailler
sur la prise en charge de la douleur qui revient en partie à l’infirmier. A plusieurs
reprises et dans des contextes différents, j’ai été confronté pendant mes stages à
des personnes douloureuses. La prise en charge de la douleur me questionne et me
fait douter. C’est pour cette raison que j’entame un mémoire sur ce sujet pour
essayer d’y répondre avant d’être diplômé et d’assumer les responsabilités
d’infirmier.

Dans un premier temps, ma note de recherche présentera ma situation d’appel et


son analyse. J’exposerai ensuite ma question de départ. De celle-ci, je tirerai les
principaux concepts et les définirai en m’appuyant sur mes premières recherches.
Pour finir, j’évoquerai la façon dont j’envisage de faire l’enquête exploratoire.

Situation d’appel et analyse:

Ma situation d’appel s’est déroulée pendant mon stage du semestre 4 dans le


service de chirurgie générale et digestive d’une clinique parisienne.

Mme L. âgée de 76 ans vient au sein de la clinique pour se faire poser une prothèse
totale de hanche dans le contexte d’une coxarthrose au niveau de la hanche droite.

A son entrée en clinique, la veille de l’opération, Mme L. est très anxieuse. Mme L.
est très douloureuse à sa hanche et montre beaucoup de difficultés à se déplacer
dans sa chambre. En échangeant avec elle, je comprends qu’elle a beaucoup
souffert et qu’elle attend de l’opération d’en être libérée. Elle dit redouter des
douleurs post-opératoires mais aussi des douleurs persistantes après son retour à la
maison. Du coup, l’arrivée des brancardiers pour la descendre au bloc opératoire est
une source d’angoisse. Après que j’en aie parlé à l’anesthésiste, celui-ci lui a prescrit
un anxiolytique pour la calmer afin qu’elle aborde l’opération plus sereinement.
Le lendemain, Mme L. descend au bloc opératoire vers 8h30 et en revient vers
12h45. L’opération s’est bien passée. Vers 18h30, alors que j’étais dans le poste de
soins à regarder la planification, j’entends la sonnette de la chambre de Mme L. Je
m’y rends. Mme L. que je n’avais pas vue depuis son départ au bloc semble aller
bien. Je l’interroge sur le motif de son appel. Elle me dit qu’elle a mal.

Selon la définition officielle de l’Association Internationale pour l’Etude de la Douleur,


la douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée,
ou ressemblant, à celle liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle. » Des textes
du ministère des solidarités et de la santé précisent qu’« aucun examen n’est
capable d’objectiver la douleur. La douleur se définit comme une expérience
sensorielle réelle ou potentielle que seul celui qui le vit peut exprimer ce qu’il ressent
». « Les patients sont les acteurs actifs de leur prise en charge, eux-seuls sont
capables d’indiquer aux soignants ce qu’ils ressentent. Leur participation est
essentielle pour évaluer l’intensité de la douleur et l’efficacité des traitements,
médicamenteux ou non. Aucun examen, aucune prise de sang, aucun scanner ne
permet d’objectiver la douleur : la parole peut être un signal pouvant faire évoluer la
prise en charge. Ils doivent donc être informés et écoutés par les professionnels de
santé.  « La loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé du
4 mars 2002 reconnaît le soulagement de la douleur comme un droit fondamental de
toute personne. La lutte contre la douleur est également une priorité de santé
publique inscrite dans la loi de santé publique de 2004. »

La douleur ayant donc une dimension subjective, je cherche à l’objectiver avec la


participation de la patiente en pratiquant l’Echelle Numérique. Je lui demande
d’évaluer sa douleur sur l’Echelle Numérique de 0 à 10 après lui avoir expliqué que 0
correspond à aucune douleur, 5 à une douleur modérée et 10 à une douleur
insupportable. Elle est très calme et me dit l’évaluer à 9. Je suis surpris par la
hauteur de son évaluation car selon ce que j’ai appris, la douleur à ce degré
s’exprime par de l’agitation, des crispations dans le visage, des cris, des pleurs. Je
lui demande alors de me confirmer son évaluation après avoir pris soin de lui
réexpliquer ce que représente chacun des échelons. La patiente maintient son
évaluation. J’en prends note et lui dit que je vais voir avec l’infirmière quoi lui donner
pour la soulager.
A l’infirmière je rapporte que Madame L. souffre en évaluant sa douleur à 9 alors
qu’elle n’a aucun signe apparent de douleurs insupportables. Je lui confie mon
doute quant à l’intensité de la douleur ressentie par la patiente. Selon le protocole de
soulagement de la douleur post-opératoire établi par l’équipe pluridisciplinaire de la
clinique, on donne de la morphine à partir de 3 sur une échelle de 10. Je me suis
demandé si dans ce cas la médication était appropriée car, en l’absence de signes
physiques de douleur, cet antalgique morphinique de palier 3 me paraissait
disproportionné. En effet, selon le cours « Douleurs et traitements », « Dépression
respiratoire, bradypnée, rétention urinaire, constipation, nausées vomissement et
prurit » de David Bouaziz, infirmier au GH des Diaconesses, nous sommes avertis
des effets indésirables et des risques potentiels de la morphine. De même, on nous
apprend que cet antalgique est utilisé en dernier recours après avoir donné d’abord
un antalgique de palier 1, puis un de palier 2 en fonction des réponses du patient au
médicament.

A partir de son expérience, l’infirmière m’explique que Mme L. craignant de fortes


douleurs peut les anticiper. Elle me dit de ne pas « prendre à la lettre » cette
évaluation à 9 en l’absence de signes physiques. Elle m’incite à la réévaluer en
m’appuyant sur mes observations sans pour autant nier la douleur exprimée par la
patiente. En formulant ce jugement de valeur, l’infirmière remet en cause la parole du
patient et suggère de ne pas suivre le protocole. Craignant que la patiente ait
surévalué sa douleur, je décide par prudence de poser en première intention un
paracétamol avec un Acupan pour vérifier son efficacité sur la patiente avant
d’utiliser des antalgiques de palier supérieur.

Cette situation montre que la représentation de la douleur de la patiente par le


soignant peut ne pas coïncider avec le ressenti exprimé de la patiente. Cette
différence d’appréciation conduit le soignant à ajuster l’antalgique en fonction de son
expérience et non du protocole.
Questionnement

Cette situation questionne ma pratique professionnelle d’étudiant infirmier sur


l’ensemble des facteurs à prendre en compte pour se représenter la douleur du
patient et y remédier. Elle en interroge les bonnes pratiques.

Par sa fréquentation régulière du patient, l’infirmier est l’interlocuteur auquel celui-ci


se confie et remet le soulagement de sa douleur. L’infirmier porte de ce fait une
grande responsabilité.

Pour formuler ma question de départ, j’ai recherché tout ce qui m’interpellait et me


dérangeait dans la situation initiale. J’en retiendrai mon doute sur la réalité de la
douleur évaluée à 9 par Madame L. en l’absence de signes physiques, compte tenu
aussi de l’appréhension qu’elle avait de l’opération. J’étais partagé. D’un côté, ne
pas remettre en question l’évaluation de Madame L me conduisait à lui poser des
antalgiques de palier 3 tel que le préconisait le protocole de l’établissement alors que
je connaissais les risques et les effets indésirables graves potentiels de la morphine.
De l’autre, en me fiant à mon expérience acquise et celle de la soignante, je me
mettais en défaut par rapport au protocole de l’établissement et par rapport au devoir
d’écoute du patient.

Cette situation pourrait conduire à s’interroger ainsi :

- L’anticipation de la douleur post opératoire par le patient pouvait elle


influencer celle-ci?
- Est-ce que le soignant peut ne pas écouter le patient et se fier à son
expérience ?
- Est-ce que se fier à son expérience n’est pas un dépassement de
compétence ?
- Quels sont les risques pour l’infirmier de ne pas respecter un protocole
medical ?
Cependant au vu des éléments en tension dans cette situation et de leurs
conséquences sur la prise en charge de la douleur, j’en arrive à tirer la question de
départ suivante :

En quoi la représentation de la douleur par le soignant peut s’opposer au


protocole de soulagement d’une douleur post-opératoire ?

Je retiendrai de la situation d’appel ces trois concepts :

- Douleur post-opératoire
- Représentation de la douleur
- Protocole de soins
-

Définition des concepts

- Douleurs post-opératoires

Il s’agit de douleurs qui sont induites par l’intervention chirurgicale.

« La section et le traumatisme des tissus, nécessaires à toute intervention


chirurgicale, lèsent de multiples ramifications nerveuses sensitives et libèrent des
substances qui, par effet local ou répercussion sur le système nerveux central,
engendrent de la douleur. La durée de celle-ci est très variable (de 24 heures à
plusieurs jours), comme son intensité, qui dépend de nombreux facteurs :

- siège de l'intervention : les interventions sur l'abdomen, le thorax, le squelette et les


viscères sont plus douloureuses que celles pratiquées sur la tête et le cou ;

- importance de l'intervention et de la dissection des tissus ;

- causes psychologiques (ce qui explique que, pour une même intervention, certains
opérés souffrent plus que d'autres).

La technique opératoire, la préparation psychologique, le contact humain, les


explications préalables fournies au malade permettent d'atténuer les douleurs
postopératoires ; les médicaments (analgésiques, notamment) sont très efficaces,
bien que leur usage soit toujours limité par leurs effets indésirables. Des techniques
d'exception peuvent être employées dans les cas les plus difficiles : injection
péridurale de morphine après les grandes interventions sur l'abdomen ou les
membres inférieurs ; auto-injection de substances morphiniques effectuées par
l'opéré, en fonction de sa douleur, à l'aide d'une petite pompe. » Article extrait du
Larousse médical.

Selon le Larousse médical, on peut déduire que la douleur post-opératoire est définie
par une douleur induite par l’intervention chirurgicale, à la suite des lésions et des
traumatismes sur le corps. C’est une douleur qui dure, 24 heures à plusieurs jours,
mais ne doit pas s’instaurer dans le quotidien du patient comme une douleur
chronique.

Elle dépend de différents facteurs ;

- Localisation de l’intervention
- Qualité de réalisation des gestes chirurgicaux ;
- Causes psychologiques diverses

L’attribut de cette définition en lien avec ma situation est l’aspect psychologique car
Mme L était très anxieuse avant l’opération.

- Représentation de la douleur

La représentation de la douleur pour le soignant se construit à partir de l’évaluation


par le patient grâce à L’EN, de l’observation des signes physiques, de ses
connaissances, des échanges informels avec le patient sur son vécu de la douleur,
et à partir de son expérience de prise en charge de la douleur des patients.

- Protocole de soins 
Selon le dictionnaire, le protocole est un document regroupant un « ensemble de
règles et de questions définissant une opération complexe » ou « description précise
des conditions et du déroulement d'une expérience, d'un test, d'une opération
chirurgicale. »

Le protocole de soins infirmier est une conduite à tenir dans un document créé par
une autorité médicale qui permet à l’infirmier de pouvoir agir sans l’accord du
médecin, dans des conditions très précises qui sont décrites à l’intérieur.

Selon l’Has, les protocoles peuvent faciliter le travail des infirmiers :

- « Faciliter le travail en équipe à un niveau local ou territorial.


- Améliorer l’articulation entre les soins de premier et de deuxième recours.
- Améliorer et faciliter l’appropriation des bonnes pratiques.
- Participer à l’introduction des bonnes pratiques professionnelles dans le
dossier patient informatisé et partagé. »

L’infirmier doit connaître les différents protocoles du service afin d’assurer la


continuité des soins. Il peut également participer à l’élaboration d’un protocole, lors
d’une réunion d’équipe pluridisciplinaire. Comme indiqué dans l’article R 4311-3 du
Code de Santé Publique autorise l’infirmier à « élaborer, avec la participation des
membres de l’équipe soignante, des protocoles de soins infirmiers relevant de son
initiative ».

Dans la définition du protocole de soins selon l’HAS l’attribut qui est relatif à ma
situation est : « Améliorer et faciliter à l’introduction des bonnes pratiques ».

Dans ma situation de départ, alors que j’étais partagé entre approche objective et
subjective de la douleur, le protocole aurait pu jouer son rôle de guide pour lever
mon doute sur la prise en charge de la douleur.
Article consulté en relation avec le doute qui saisit le soignant dont l’évaluation de
la douleur entre en contradiction avec celle exprimée par le patient.:

« Evaluation de la douleur chez la personne âgée » par Bernard Pradines, médecin


gériatre à l’hôpital d’Albi. Article paru le 8 avril 2021

Bernard Pradines traite son sujet sous la forme d’un chapitre qu’il aborde en trois
temps : la détection, l’évaluation proprement dite et le résumé.

En préalable, il distingue la détection de la douleur spontanée ou provoquée du


patient par lui-même de celle perçue par son entourage quel qu’il soit. Il souligne la
difficulté de cette évaluation lorsqu’il y a des troubles mnésiques. Ceux-ci rendant la
communication avec autrui difficile, la douleur des patients mnésiques est plus
souvent sous-évaluée que pour une personne en possession de ses moyens
cognitifs. En conséquence leur douleur est souvent insuffisamment traitée parce que
mal détectée. En vue de réduire le risque de sous-traitance de la douleur chez ces
personnes, B. Pradines s’est penché sur les moyens d’évaluation à disposition et les
améliorations à y apporter.

La détection d’une possible douleur chez ces patients à travers un échange verbal
exige de s’inspirer des techniques de communication avec des personnes en
difficulté pour communiquer. Le temps, le silence environnant, l’articulation, des
phrases courtes et positives simples sont requis. La plainte lors des soins contribue
au repérage de la douleur.

Une fois la douleur détectée chez ces patients mnésiques, l’évaluation repose
surtout sur l’usage d’une échelle appropriée. Après une énumération critique des
échelles à disposition, il privilégie l’échelle numérique et plus encore l’échelle
verbalement simple.

L’évaluation s’enrichit aussi des informations données par la famille sur les
antécédents douloureux du patient tout comme elle se nourrit des observations des
soignants et des bénévoles. La prise en compte des variations du comportement sur
un séjour long et un examen clinique approfondi y
Cet article entre en résonnance avec ma problématique car il exprime le doute qui
saisit le soignant lorsqu‘il doit évaluer et remédier à la douleur d’un patient âgé dont
les facultés cognitives ici sont atteintes. L’exploration des pistes proposées pour une
meilleure évaluation de la douleur chez ces personnes est une source d’inspiration
pour les soignants qui sont en proie au doute lorsque leur évaluation de la douleur
entre en contradiction avec le ressenti de tout patient.

Méthode d’exploration :

J’envisage d’enquêter au sein d’un hôpital ou d’une clinique auprès d’une infirmière
qui travaille dans un service de chirurgie où elle est confrontée au quotidien à des
patients avec des douleurs post-opératoires. Mes questions porteront sur la façon
dont elle se représente la douleur, sur la position qu’elle adopte par rapport au
protocole lorsqu’il y a divergence d’appréciation de la douleur par le patient et par
elle. L’enquête sera sous la forme d’un entretien en posant des questions préparées
à l’avance de façon directive.

Conclusion

Ces recherches m’ont permis de commencer à définir les concepts en lien avec ma
situation, et réfléchir plus en avant sur le thème de mon mémoire. Le texte de
Bernard Pradines « Evaluation de la douleur chez la personne âgée » me donne
également des idées pour approfondir ma question de départ qui me permettront de
poursuivre mon mémoire de fin d’études.
Bibliographie

https://www.has-sante.fr/jcms/c_2680226/fr/elaboration-des-protocoles-
pluriprofessionnels-de-soins-de-premier-recours

https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/prises-en-charge-specialisees/
douleur/article/la-douleur

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000410355

https://www.geriatrie-albi.com/Douleurevaluation.htm

https://www.inserm.fr/dossier/douleur/

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