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LA MAINTENANCE

Les programmes de maintenance


aéronautique : méthodologie
de création et cadre réglementaire
Philippe Chenevier (67)

La maintenance d’un avion de transport est réalisée sous Pour un avion moderne comme
la responsabilité de l’exploitant selon un programme qu’il doit l’A340-500/600, cela met en jeu
élaborer et faire approuver par l’aviation civile de son pays. 70 participants, pendant dix-huit mois,
et près de quarante-cinq mille heures
Cette règle découle des accords régissant le transport commercial de travail.
international tel que recommandé par l’OACI.
Pour permettre à leurs clients de satisfaire à ces obligations avec
Présentation générale
le meilleur niveau possible de sécurité, les constructeurs préparent
des programmes d’entretien qu’ils proposent aux exploitants. Un opérateur d’avion de transport
Le processus d’élaboration suit une méthodologie rigoureuse, est responsable de son programme
perfectionnée au fil de l’expérience acquise et en conformité d’entretien et doit le faire approuver
avec une réglementation spécifique qui, elle-même, s’est renforcée par son aviation civile; ce programme
découle du programme du construc-
d’une génération d’avion à l’autre. teur (MPD, voir figure 1).
Le MPD du constructeur est la syn-

L A PREMIÈRE règle d’entretien


aéronautique fut édictée en
1930 : “ les instruments et les
équipements devront être révisés à
intervalles suffisants pour assurer leur
thèse de trois sources différentes :
• le MRB (Maintenance Review Board),
processus principal,
• les règles de certification de type et
les exigences opérationnelles,
fonctionnement correct à tout moment.” • la surveillance en exploitation de
La méthodologie actuelle repose l’avion, retour d’expérience donnant
sur une approche par analyse logique, lieu à des tâches complémentaires
par examen des conséquences des spécifiques pour le maintien de la
défaillances fonctionnelles et par un navigabilité de l’avion.
programme d’entretien par tâches.
Ces programmes sont réalisés par Assurer un niveau de sécurité
un comité directeur à l’échelon de
l’industrie entière et appuyé par des
mondial
groupes de travail spécialisés. Les par- Les exigences réglementaires sont
ticipants sont des professionnels des établies pour satisfaire le niveau de
compagnies aériennes, des spécialistes sécurité établi par l’OACI au niveau
des aviations civiles nationales, des mondial.
ingénieurs du bureau d’étude du Chaque pays édicte ses règles de
constructeur et des fabricants d’équi- navigabilité, mais les deux plus impor-
pements et enfin, des spécialistes des tantes sont les JAR (Joint Aviation
programmes de maintenance. Requirements) établis par les JAA (Joint

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Figure 1 Le processus
général MRB
FAR 21/FAR 39 La réglementation
(AD, CN) impose l’établissement
Service par le constructeur d’un
MRB PROCESS (FAR 121) Bulletins
programme de mainte-
nance.
Evaluation
MRB Operators Les constructeurs
Methods
Report Approved ont développé une
(MSG-3)
Maintenance
MPD Program
méthode appelée le
MSG-3 pour dévelop-
TYPE CERTIFICATION PROCESS per ce programme et
(FAR 25) les tâches de mainte-
nance correspondantes.
Systems CMRs Structure ALIs
25.1309 SSA 25.571 & 25.603
Le MSG-3 est l’ul-
25.1529 Appx H 25.1529 Appx H MPD time évolution d’un pro-
Section 9 cessus commencé en
Safe Life items 1930 par le Transport
25.1529 Appx H airline inspection service,
ancêtre de la FAA dans
son Aeronautical Bulletin
7E section 5 :
Aviation Authorities, 33 pays européens) Les instructions de maintien de la “ Instruments and accessories shall be
et les FAR (Federal Aviation Regulations) navigabilité (appendice H des JAR 25) overhauled at suitable intervals. ”
établis par la FAA américaine. visent à assurer que les instructions et Ce concept restera en vigueur pen-
Ces règles de navigabilité portent limites de maintenance sont bien éta- dant quarante ans. Nous allons voir
non seulement sur la conception de blies en relation avec les travaux de la que d’importants progrès ont été réa-
l’avion, mais aussi sur les opérations certification de type. Elles doivent être lisés depuis cette première règle bien
et la maintenance pendant toute la préparées par le constructeur avant la limitée.
durée de l’exploitation commerciale première livraison commerciale. En 1967, un document de United
de l’avion. Elles comportent deux paragraphes Airlines résumait les travaux de l’in-
Les exigences à respecter intègrent importants : dustrie en vue de développer l’utili-
des éléments de la certification de • le paragraphe H 25.3 : a) Manuel de sation de “ Diagrammes de décision
type de l’avion, des instructions pour maintenance avion, b) instructions de pour l’analyse logique des programmes
le maintien de la navigabilité en exploi- maintenance, c) à g) portes d’accès, de maintenance ”.
tation (JAR 25 appendice H) et des inspections techniques, traitement de En juillet 1969, le processus MSG-
exigences découlant de la réglemen- protection, fixations structurales, 1 (MSG… Maintenance Steering Group)
tation opérationnelle (JAR OPS 1, JAR outillages spéciaux, fut approuvé par la Conférence
OPS 66, JAR 145 et JAR 147). • le paragraphe 25.4 : limitations de Interairline du B747, et fut utilisé pour
Les exigences de la certification navigabilité, éléments à vie-sûre, ALI développer le programme de main-
de type s’assurent que la conception et CMR. tenance du B747.
est conforme aux niveaux de sécurité Les exigences opérationnelles visent La méthodologie MSG évoluera
recherchés. à s’assurer que les caractéristiques en trois étapes suivantes :
La démonstration de conformité inhérentes de fiabilité de l’avion sont • MSG-2 (Airline-Manufacturer
doit être faite avant que le certificat maintenues pendant l’exploitation Maintenance Program Planning
de type ne soit délivré. commerciale. Elles sont établies par le Document) publié le 25 mars 1970
Cinq chapitres sont concernés : pays d’immatriculation de chaque par le sous-comité R & M de l’Air
• la résistance au dommage et le avion. Transport Association américaine et
comportement en fatigue de la struc- Elles comprennent 4 sections : qui fut utilisé pour le DC10 et le
ture (JAR 25.571), • JAR OPS1, section 1, sub M (pour Lockheed 1011 ;
• les matériaux utilisés (JAR 25.603), maintenance), • EMSG (European Maintenance
• l’accessibilité des zones de l’avion • JAR 66, personnel de certification System Guide) préparé en 1972 et
(JAR 25.611), (maintenance), publié en février 1973 par
• les équipements, systèmes et leur • JAR 145, organisation approuvée l’Association of European Airlines. Il fut
installation (JAR 25.1309), de maintenance, utilisé pour l’A300B2 et B4, le
• les instructions de maintien de la • JAR 147, organisation approuvée Concorde et le VFW614 ;
navigabilité (JAR 25.1529). de formation à la maintenance. • enfin le MSG-3 (Airline-

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Manufacturer Maintenance Program Programme moteurs Chaque cause de défaillance est
Development Document) publié le et systèmes ensuite évaluée en suivant l’arbre
30 septembre 1980 par une task force d’analyse logique du MSG-3.
MSG-3 de l’Air Transport Association Les évaluations selon la métho- Il comporte deux niveaux : d’abord
américaine. Ce document fut amendé dologie MSG-3 sont fondées sur les l’examen de chaque défaillance fonc-
en 1988 (révision 1) et en 1993 (révi- défaillances fonctionnelles et les causes tionnelle selon quatre questions pour
sion 2). Il sert pour tous les avions de ces défaillances. déterminer la Failure Effect Category
les plus récents : A310, A300-600, Avant que le processus MSG-3 puisse (FEC), puis la prise en compte des
A319-320-321, A330-340, B757-767- commencer il faut identifier les causes de la défaillance pour déter-
777. Maintenance Significant Items (MSI). Ceci miner à travers cinq questions le type
Le MSG-3 est découpé en trois est fait par une étude du Constructeur de tâche à appliquer.
sections spécifiques : faisant appel au jugement technique La figure 2 montre l’arbre d’analyse
• Programme moteurs et systèmes de ses spécialistes. La sélection de MSI logique et les cinq catégories dans les-
(SPP) établi avec les analyses MSI, identifie les points qui : quelles elles peuvent être classées :
• Programme structure établi avec les • peuvent mettre en jeu la sécurité évidente critique, évidente opéra-
analyses SSI, (au sol ou en vol), ou tionnelle, évidente économique, cachée
• Programme d’inspection de zone • peuvent rester non détectés pen- critique, cachée non critique.
(ZIP) établi avec les analyses zonales. dant l’exploitation, ou Le deuxième niveau d’analyse
Pour développer le premier pro- • en dernier lieu, peuvent avoir un détermine quel type de tâche de
gramme d’inspection et de mainte- impact important sur la disponibilité maintenance doit être assigné à cet
nance d’un nouveau type d’avion, l’in- opérationnelle ou l’économie de item en prenant en compte les causes
dustrie met en œuvre la procédure l’avion. de la défaillance.
du Maintenance Review Board décrite Cette première analyse donne la Cinq types de tâches sont définis :
par la FAA dans une Advisory Circular liste des MSI sélectionnés, matière • lubrification-réfection des
(AC 121-22). Une organisation à trois première du processus MRB et de niveaux,
étages est mise en place : l’analyse MSI. • vérification visuelle ou opéra-
• un comité directeur (Industry Le rapport d’analyse MSI com- tionnelle,
Steering Committee), présidé par les prend les informations liminaires clas- • inspection ou vérification fonc-
compagnies aériennes, siques d’un document technique (liste tionnelle,
• des groupes de travail communs des pages et numéro de date de publi- • remise en état,
constructeur-compagnies aériennes cation, liste et raisons des révisions • remplacement.
(Maintenance Working Group) prési- du document, applicabilité – modèles L’analyse permet de sélectionner
dés par le constructeur. Ils travaillent d’avions concernés par le document). la ou les tâches de maintenance ainsi
dans six domaines : mécanique- Sont également décrits les com- que la périodicité d’application pour
hydraulique, environnement et inté- posants du système, leur fiabilité l’item considéré.
rieur, moteur-carburant, électricité- (MTBF et MTBUR), les redondances Les résultats de ces analyses sont
avionique, structure, zonal inspection, du système ainsi que l’expérience regroupés dans des feuilles de syn-
• et un Conseil supérieur accumulée sur d’autres programmes thèses qui doivent être validées par
(Maintenance Review Board) où ne siè- similaires. le comité directeur (ISC) avant de
gent que les autorités de certifications Vient ensuite la description de pouvoir être approuvées par le conseil
et qui approuve les travaux réalisés l’item lui-même : architecture du supérieur (MRB).
qui seront publiés sous forme d’un système, ses composants, les fonc- Pour compléter leur travail, les
Maintenance Review Board Report. tions recherchées, les défaillances groupes de travail doivent détailler
Les autorités de certification (JAA fonctionnelles, etc., qui doivent être chaque tâche suffisamment pour que
et FAA) participent également à l’ISC analysées. les rédacteurs de la documentation
et aux Maintenance Working Groups. L’ensemble de ces données sont d’entretien puissent la traduire en
Il est remarquable que ces tra- regroupées dans une DATA SHEET A. procédure d’entretien tout en res-
vaux sont élaborés en commun entre L’analyse commence par identi- pectant les intentions du groupe de
les trois parties concernées par la fier quatre points : les fonctions (points travail.
sécurité : autorité, constructeur et caractéristiques en fonctionnement Enfin, pour tirer bénéfice du pro-
exploitants. normal), les défaillances fonction- gramme d’inspection de zone (ZIP,
Les groupes de travail utilisent les nelles (quelles défaillances fonction- voir plus bas), les tâches d’entretien
directives regroupées dans un Policy nelles peuvent se produire), les effets qui préconisent une inspection visuelle
& Procedures Handbook (PPH) édité des défaillances (quel est le résultat générale peuvent être transférées
pour chaque type d’avion et regrou- de ces défaillances fonctionnelles), et vers le ZIP, dès lors que leur fré-
pant les informations les plus récentes enfin les causes (pourquoi la défaillance quence d’application est respectée.
tant réglementaires que provenant de fonctionnelle s’est produite). Ces points Ceci permet d’éviter des duplica-
l’expérience en service. sont détaillés dans une DATA SHEET B. tions inutiles.

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La sélection des SSI
Figure 2
dépend de deux facteurs :
• les conséquences de la
Analyse MSI : arbre de décision défaillance (emplace-
ments critiques) : on
identifie les emplace-
• Premier niveau : défaillance fonctionnelle ments qui contribuent
significativement à passer
1) La défaillance fonctionnelle apparaît-elle de manière évidente à l’équipage les charges et dont la tolé-
pendant la conduite normale des opérations ? rance au dommage ou la
vie-sûre ont besoin d’être
Oui Non confirmées ;
2) La défaillance fonctionnelle ou les
• la probabilité de
3) La sécurité des opérations est-elle mise défaillance, déterminée
dommages secondaires qui en découlent en péril par la combinaison de cette
mettent-ils en péril selon la connaissance des
défaillance fonctionnelle cachée et d’une
la sécurité des opérations ? applications de charge, de
autre défaillance dans un système voisin ou
l’environnement et l’iden-
d’une fonction de secours ?
Oui Non tification des emplace-
Oui Non ments qui, les premiers,
4) La défaillance fonctionnelle
développeront des dom-
met-elle en péril la capacité
Effet critique Effet non critique mages selon l’une des
opérationnelle ?
8 9 trois causes de dommage
Oui Non (dommage accidentel,
détérioration due à l’en-
Effet critique Effet opérationnel Effet économique
vironnement et dom-
5 6 7 mage de fatigue).
Typiquement, les
points exposés à ces dom-
mages et qui entrent dans
Les exigences découlant • le CMR** (CMR two stars) : tâches cette catégorie sont : les assemblages
de la certification (CMR) d’entretien dont les opérateurs peu- de sous-ensembles majeurs, les joints
vent modifier la périodicité d’appli- statiques nécessitant des graissages,
Les travaux de certification de type cation selon les procédures d’évolu- les zones sensibles à la fatigue telles
de l’avion identifient, entre autres, tion approuvées dans leur pays. que points de concentration de charge,
des tâches de maintenance. Par ailleurs Les CMR sont publiés dans un discontinuités, assemblages en ten-
les autorités de l’aviation civile intro- document annexé en complément au sion ou alternant tension et com-
duisent des exigences spécifiques. rapport MRB. pression, ferrures majeures, découpes
Notamment, le constructeur doit faire dans panneaux, portes et hublots, etc.
une analyse de sécurité des systèmes Sont concernées aussi les zones expo-
(SSA) requise par le paragraphe JAR Programme structure sées à la corrosion (telles que toilettes,
25.1309. galleys, fonds de fuselage et zones de
Dans certains cas, pour obtenir le La structure de l’avion est analy- corrosion sous tension). Également
niveau de fiabilité nécessaire, des tâches sée pour déterminer les points néces- prises en compte les zones vulnérables
de maintenance doivent être prescrites. sitant une surveillance ; on distingue aux chocs extérieurs accidentels ou
Ces travaux sont conduits par un deux grandes catégories : aux erreurs de maintenance (telles
comité spécifique : le Comité de coor- Les items significatifs (SSI, Structural que seuils d’entrée, zones fréquem-
dination certification et maintenance Significant Items) qui entreront dans ment concernées par des actions de
qui examine les exigences découlant le programme structure. Entrent maintenance ou exposées à des écla-
de la certification ou CMR (Certification dans cette catégorie les items qui boussures et fuites de liquides corro-
Maintenance Requirements), qui retient contribuent significativement aux sifs). Enfin dernière catégorie, les items
la liste définitive et les classe en deux charges de vol, charges au sol, pres- à vie-sûre.
catégories : surisation et contrôle de trajectoire,
• les CMR* (CMR one star) : tâches et dont la défaillance menace l’inté- L’analyse MSG-3 appliquée
d’entretien dont les intervalles d’ap- grité de la structure et la sécurité de à la structure
plication ne pourront pas être modi- l’avion.
fiés par les opérateurs sans l’accord Et les autres points à surveiller qui Comme pour les systèmes et
préalable du constructeur et de l’au- seront pris en compte dans le pro- moteurs, une méthodologie d’ana-
torité de certification ; gramme de surveillance de zone. lyse logique est appliquée aux items

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SSI. Un arbre de décision logique a Chaque item est évalué en fonc- Les “ ALI ”
été adapté à l’analyse des SSI qui tion de son exposition, du type de (Airworthiness Limitation Items)
conduit à : corrosion susceptible de se déve-
• distinguer les items tolérants au lopper et les résultats classés en fonc- Sont regroupés dans cette catégo-
dommage et les items à vie-sûre, tion de leur sévérité afin de déter- rie tous les items de fatigue critiques
• pour les items tolérants au dom- miner les intervalles d’inspection et ceux liés aux cycles de vol ainsi
mage et les zones exposées aux nécessaires. que les items critiques de corrosion.
dommages environnementaux ou Trois niveaux de sévérité sont Ces tâches liées à la fatigue et la
accidentels, déterminer la faisabi- internationalement reconnus : tolérance au dommage sont très stric-
lité et le type de technique de sur- • niveau 1 de corrosion : corrosion tement encadrées. Les seuils de pre-
veillance. apparaissant entre deux inspections mière inspection et les intervalles de
L’analyse conduit à trois résultats et qui peut être traitée dans les tolé- répétition ne peuvent pas être modi-
possibles, soit le retour au bureau rances admises, ou corrosion dépas- fiés par les opérateurs ou leur avia-
d’étude pour renforcer la résistance sant les limites admises mais ne se tion civile sans l’accord du construc-
structurale, soit le classement dans produisant pas dans les conditions teur et de son autorité de certification.
l’une des deux listes du programme d’utilisation normales de l’avion, Le document regroupant les ALI est
structure : • niveau 2 de corrosion : corrosion un élément constitutif du programme
• liste des Airworthiness Limitations apparaissant entre deux inspections d’entretien structure.
Items (ALI), dont le traitement dépasse les Les opérateurs doivent obligatoi-
• programme consolidé d’entretien limites admises et nécessitant une rement faire un compte rendu au
structural. réparation ou un renfort structural, constructeur pour toute découverte
Chaque analyse est supportée par • niveau 3 de corrosion : corrosion de dommage sur un item de la catégorie
un dossier individuel (SSI Analysis). découverte lors d’une inspection, Airworthiness Limitation. Un formu-
L’approbation du programme pro- considérée comme menaçant la laire est inclus dans le rapport MRB.
posé par le groupe de travail suit la sécurité de la structure et nécessi-
même procédure que pour les sys- tant une réparation immédiate.
tèmes et moteurs : présentation et cri- Les règles du MSG-3 dans sa révi- Programme d’inspection
tique par l’Industry Steering Committee, sion 2 de 1993 demandent qu’un de zone (ZIP)
soumission au Maintenance Review programme de prévention et de
Board aboutissant à l’approbation du contrôle de la corrosion (CPCP, Principes généraux
programme structure intégré dans le Corrosion Prevention and Control
MRB Report. Programme) soit établi par le construc- Le programme d’inspection par
teur pour permettre de contenir la zone (ZIP, Zonal Inspection Program)
Analyse des dommages corrosion au niveau 1. fournit les exigences d’inspection
accidentels Airbus a appliqué cette exigence visuelle de l’ensemble de l’avion, par
non seulement pour ses nouveaux zones successives et couvrant les sys-
Airbus a comme politique de ne avions, mais aussi rétroactivement tèmes, les moteurs et la structure pour
pas créer de tâches d’entretien cou- à toute sa gamme. Le CPCP est désor- s’assurer de leur bon état général et
vrant les dommages accidentels. mais incorporé comme partie inté- maintenir la sécurité.
Les items sont donc analysés pour grante du programme de mainte- Chaque zone est clairement défi-
évaluer leur impact éventuel sur le nance structure. nie, avec des frontières facilement
comportement en fatigue ou la résis- Les composites nécessitent la prise identifiables ; toutes les trappes d’ac-
tance à la corrosion. Si l’impact est en compte de facteurs spécifiques : cès sont ouvertes pour ces inspec-
significatif, il est pris en compte dans d’autres sources de dégradation peu- tions.
l’analyse SSI correspondante et se vent les endommager, telles que les L’avion est découpé en huit zones
traduit, si nécessaire, par des tâches actions de décapage ; par ailleurs, majeures :
d’inspection structurale supplé- les chocs peuvent réduire brutale- • fuselage inférieur jusqu’à la cloison
mentaires. ment la résistance d’un composite pressurisée arrière,
sans détection apparente. • fuselage supérieur jusqu’à la cloison
Analyse des dommages dus Airbus prend en compte ces pressurisée arrière,
à l’environnement aspects au niveau de la conception : • section arrière et empennage,
les défauts mettant en péril la résis- • moteurs, pylônes et nacelles,
Les structures métalliques sont tance de la pièce en composites doi- • aile droite,
exposées à de multiples variétés de vent être apparents de l’extérieur ; • aile gauche,
corrosion : corrosion sous tension, des tests sont réalisés pour démon- • train d’atterrissage et trappes de
galvanique, intergranulaire, filiforme, trer que les dommages non visibles train,
microbiologique, par frottement, n’ont pas une importance critique • portes d’embarquement passagers
piqûres ou même étendue. pour la résistance de la structure. et cargo.

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quences de programmation sont
Figure 3
cohérentes, elles sont reportées
sur le programme ZIP. Ceci évite
les duplications de tâches tout en
répondant aux exigences de ces pro-
grammes d’entretien.

Analyse de tâche ZIP


Comme pour les autres volets du
programme d’entretien, une méthode
logique d’analyse est appliquée pour
déterminer les intervalles des tâches
ZIP.
Trois paramètres sont pris en
compte :
• la densité
selon que les éléments installés dans
la zone sont très rapprochés, l’ins-
pectabilité de chacun d’entre eux et
de la structure en est affectée ;
• l’importance
l’importance de chaque composant
en termes de sécurité ou de coût de
fonctionnement est évaluée. On
prend également en compte les dom-
mages qu’une défaillance peut pro-
voquer sur les éléments adjacents de
Ces zones majeures sont divisées nage) des équipements, harnais, la zone ;
en zones plus petites pour faciliter la conduits, tubulures, poulies, etc., • l’environnement
réalisation des travaux d’inspection. • l’état des capots, carénages, pan- on évalue l’exposition à la chaleur,
Des conventions de numérotation per- neaux ouverts ou démontés pour aux vibrations ou aux dommages
mettent un repérage logique entre accéder à la zone. accidentels.
zones symétriques ainsi qu’entre zones Les seuils de première inspection Ces trois paramètres sont ensuite
voisines. et les intervalles de répétition utili- combinés selon une logique de déci-
La figure 3 donne un exemple des sent les mêmes unités de program- sion pour déterminer l’intervalle sou-
repérages pour les moteurs gauches d’un mation que les autres opérations d’en- haitable d’inspection.
A340 (moteurs 1 et 2). tretien : check A (500 heures) et Ces évaluations font appel au juge-
Il n’y a qu’un type de tâche dans multiples de A, check C (quinze mois) ment personnel des spécialistes, au
le programme ZIP : inspection géné- et multiples de C, cinq ans et dix ans. retour d’expérience sur les flottes en
rale visuelle. Les seuils et intervalles les plus service avant d’arrêter la décision
Chaque zone est analysée pour courts visent les points affectés par des découlant de l’analyse logique. C’est
identifier les types de détériorations dommages accidentels ou ayant des ainsi qu’on peut aboutir à un pro-
ou dommages susceptibles d’appa- conséquences sur la fiabilité de l’avion; gramme d’inspection qui soit à la fois
raître en service. ils nécessitent peu d’accès et à des zones praticable et réaliste.
Toutefois, l’inventaire n’a pas la pré- bien spécifiques. Les seuils et inter-
tention d’être exhaustif ; on considère valles plus longs exigent un niveau Le rapport MRB
que le technicien réalisant l’inspection d’accès plus approfondi et visent des
doit avoir une bonne connaissance de dommages qui se sont propagés pen- Ce rapport fournit aux opérateurs
la construction de l’avion et des sys- dant l’utilisation à un point tel qu’ils le programme minimum et initial de
tèmes situés dans la zone qu’il inspecte. sont détectables par une inspection l’avion, avec les tâches et leur fré-
Les tâches d’inspection ZIP vérifient : générale visuelle. quence d’application pour les moteurs,
• les parties visibles de la structure et On a vu précédemment que des les systèmes et la structure. L’objectif
recherchent les dégradations telles que tâches peuvent être transférées des de ce document est de servir de base
dommage accidentel, corrosion, frot- programmes d’entretien structure et à l’élaboration par chaque opérateur
tements et interférences, fuites, fissures moteurs systèmes. Dès lors que les de son propre programme de main-
et état général des rivets et fixations, tâches sélectionnées sont des inspec- tenance qui sera approuvé par les
• le bon état d’installation (et le frei- tions générales visuelles et que les fré- autorités de son pays.

22 AVRIL 2001 – LA JAUNE ET LA ROUGE


L’organisation du rapport reflète Les principes mis en œuvre font
l’organisation des travaux dont il appel à une logique relativement
regroupe les résultats : simple, qui trouve sa puissance dans
• Introduction, la rigueur de son application et le
• Règlements généraux applicables à détail des analyses.
tout programme d’avion, Il est fait appel constamment à
• Programme systèmes et moteurs, l’expérience acquise, la compétence
• Programme structures, et la connaissance détaillée de l’avion
• Programme d’inspection de zone, détenues par tous les acteurs : non
• et un chapitre spécifique : seulement les ingénieurs concepteurs
Exigences spécifiques américaines. (le bureau d’étude), mais aussi les
S’y ajoutent les deux annexes : techniciens de l’après-vente du construc-
• CMR (exigences découlant de la teur, des spécialistes de compagnies
certification) et Limitations de navi- aériennes, et ceux des aviations civiles.
gabilité (ALI), La collaboration entre ces trois
• Diagramme de zone, Glossaire, parties (constructeur, compagnies et
Abréviations, etc. aviation civile) se fait à la fois dans
l’interactivité (groupe multiparties)
LE MPD et dans l’alternance des pouvoirs
(Maintenance planning (approbations en deux étapes, par les
compagnies puis par les aviations
document) civiles).
Comme indiqué ci-dessus, le rap- Enfin, la responsabilité ultime
port MRB ne donne que le programme revient à la compagnie aérienne.
initial d’entretien de l’avion, au moment Conformément au droit aérien inter-
de la première mise en exploitation national, chaque pays étant souve-
commerciale. Le MPD est destiné à rain, le constructeur fournit les don-
prendre la suite de ce document ini- nées nécessaires aux exploitants mais
tial pour incorporer les évolutions n’exerce pas une tutelle sur eux.
durant la vie de l’avion qui peut durer Il reste que la complexité et la
trente ans ou plus. longue accumulation d’expériences
Ces évolutions sont tirées de cinq nécessaires pour élaborer ces pro-
sources différentes : les consignes de grammes de maintenance font que
navigabilités imposées par les auto- peu d’aviations civiles et peu de com-
rités de certification, les SIL (Service pagnies se sentent qualifiées pour
Information Letters) du constructeur, décider d’elles-mêmes d’écarts impor-
les services bulletins pour inspection, tants par rapport aux recommandations
les services bulletins pour modifica- du constructeur.
tion et les évolutions de vie-sûre. Leurs Ainsi, une certaine cohérence mon-
impacts sur les tâches de maintenance diale est réalisée : les principes géné-
et leur périodicité sont incorporés en raux utilisés en début de processus
permanence dans le MPD. sont uniformes et suivent les recom-
mandations de l’OACI. Et en bout de
Conclusion processus, les programmes indivi-
duellement appliqués par les exploi-
De la description de ces proces- tants sont très proches les uns des
sus d’élaboration des programmes autres, tant il est complexe de s’écar-
d’entretiens d’avions, on retiendra ter du programme recommandé par
plusieurs points fondamentaux. le constructeur. ■
La méthodologie moderne a trouvé
ses fondements à la fin des années
soixante, succédant à quarante ans
d’empirisme et de tradition ; elle a
ensuite progressé au cours des années
1970 à 2000 parallèlement aux pro-
grès techniques des avions et en per-
fectionnant les méthodes précé-
demment utilisées.

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