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Sujet 

: « déficits budgétaires et dette dans un contexte de crise des finances sociales
(compensation et retraites) »

De nos jours, on constate que l'aspect important qui caractérise les finances publiques est la
tendance des autorités, dans la plupart des pays, à recourir de manière croissante à
l'emprunt pour financer la progression persistante de leurs dépenses.
Ce recourt accru à l'endettement a fait coulé beaucoup d'encre ces dernières années suite à
la crise de la dette souveraine dans bon nombre de pays.
Dans ce registre, le Maroc, comme la plupart des pays en voie de développement,
n'échappe pas à cette crise d'endettement. En effet, les dernières décennies ont été
marquées par la mise en place d'une panoplie de projets visant à relancer la croissance ;
des projets dont la concrétisation s'est faite au détriment des équilibres macroéconomiques,
notamment à travers la chute des recettes, l'accroissement des dépenses et de ce fait
l'accroissement des déficits publics engendrant ainsi un gonflement de la dette publique.
Dans ce cadre, et vue les inquiétudes grandissantes qui commencent à se profiler en relation
avec la crise des finances sociales (compensation et retraite) et leurs répercussions néfastes
sur le budget de l'Etat et le cadre macroéconomique, le gouvernement actuel a décidé de
reconsidérer ses politiques publiques sur la base de réformes structurelles à travers un
nombre de mesures restrictives visant à stabiliser le cadre macroéconomique et réduire le
ratio de la dette du Trésor.
Ceci étant, il sera question dans ce qui suit de traiter ce sujet à travers trois grands axes :
*L'état des lieux des déficits budgétaires et la situation de la dette de l'Etat ;
*La crise des finances sociales et ses effets sur les déficits publics ;
*Les mesures gouvernementales pour réguler la situation.

L'étude de l'évolution des déficits budgétaires peut être divisée en quatre phases
essentielles :
*une période antérieure à 1974 : cette phase de post­colonisation a été marquée par
une croissance assez modeste et donc des déficits modérés tourant autour de 3% du
PIB ;
*1974­1982: cette période a connu un accroissement important du déficit budgétaires
(11% du PIB en moyenne) vue les politiques expansionnistes engagées par le
royaume pour améliorer la croissance économique;
*1983­2009: Suite à l’application du PAS, il y a eu une tendance à la baisse des
déficits budgétaires dont la part dans le PIB va s’établir aux alentours de 3 à 4% du
PIB pendant les années 90, voire même deux excédents enregistrés en 2007 et 2008;
*2010­2013: période de post­crise internationale où les déficits budgétaires
commencent à s’aggraver atteignant 4,7% du PIB en 2010, 6,1% en 2011 et 7,3% en
2012; soit un niveau jamais atteint depuis plus de 20 ans (et les statistiques de 2013
estiment un déficit d’environ 6% du PIB).

L’aggravation des déficits publics annuels de l’Etat n’est pas sans conséquences sur le
niveau de la dette du Trésor.
En effet, la dette publique, étant l’ensemble des engagements financiers pris sous forme
d’emprunts par l’Etat, n’est autre que le cumul des déficits budgétaires annuels.
Sur ces dix dernières années, l’encours de la dette du Trésor marocain n’a cessé
d’augmenter pour se situer aux alentours de 62,5% du PIB en 2013.
Ceci s’explique par l’augmentation continue de la dette intérieure (depuis le PAS), mais
aussi la hausse de la part de la dette extérieure ces quatre dernières années.
Cette situation qui commence à inquiéter les bailleurs de fonds étrangers, n’est autre que le
produit de nombre de problématiques touchant l’efficience des finances de l’Etat, et à leur
tête on trouve “la problématique des finances sociales (compensation et retraite)”.

S’agissant de la caisse de compensation, elle présente un grand risque d’insoutenabilité
creusant encore plus le déficit budgétaire.
En effet, la charge de la compensation s’est alourdie ces dernières années passant de 1%
du PIB entre 1990 et 2005 à 6% en 2011. Ces charges avoisinnent les 42 milliards de
dirhams en 2013.
En plus d’être insoutenable, la caisse de compensation est aussi injuste.
A cet égard, cette caisse, conçue au départ dans le but de sauvegarder le pouvoir d’achat
des démunis, a profité surtout aux riches, aux industriels et aux grandes entreprises qui
détournent les produits subventionnés destinés à l’usage domestique vers un usage
purement industriel.
C’est donc un système tout aussi intenable sur le plan budgétaire qu’indéfendable sur le plan
de l’équité sociale.

Pour ce qui est de la problématique du régime des retraites, elle fait aujourd’hui l’objet d’un
débat d’ordre public au Maroc. Le gouvernement actuel est en train de revoir ce système,
surtout que les caisses s’acheminent vers des situations de cessation de paiement si rien
n’est fait d’ici là.
Le fond du problème des retraites est que le financement des pensions se fait en suivant un
système dit par “répartition” accusant d’importants déséquilibres financiers.
Une autre limite se pose avec acuité; il s’agit de la faiblesse du taux de couverture (à peu
près 30% de la population active), ce qui prive les caisses d’une importante assiette
financière conduisant ainsi à une détérioration du rapport démographique des caisses
(rapport entre le nombre des cotisants et celui des bénéficiaires), une situation qui sera plus
affectée dans l’avenir en raison du vieillissement de la population.

Dans ce contexte, et de peur que les déficits n’atteignent des niveaux insoutenables
conduisant ainsi le pays vers un nouveau PAS, il est urgent de reconsidérer les politiques
gouvernementales pour réguler cette situation préoccupante.
A ce niveau la réforme du système de compensation s’avère prioritaire en vue de procéder
d’une autre manière au lieu d’une distribution aveugle qui profite surtout aux nantis.
Le gouvernement actuel qui a entamé ce chantier de décompensation selon une approche
graduelle en réduisant la subvention du fioul industriel, et compte la  réformer la structure des
prix des produits de première nécessité subventionnés et soutenir le pouvoir d’achat des plus
démunis à travers un système d’aides directes et ciblées. Toutefois, cette dernière mesure
pourra pervertir l’incitation des citoyens à travailler, sans oublier son poids sur les finances de
l’Etat. D’où la nécessité d’une approche globale où l’on ne distribue pas des aides
seulement, mais on ouvre en outre les marchés à la concurrence.

Quant au problème des caisses de retraite, le gouvernement affirme avoir un scénario prêt
pour la durabilité des régimes de retraite.
Ce scénario comprend une série de mesures qui portent sur:
*Le relèvement de l’âge du départ à la retraite;
*L’élargissement de l’assiette des cotisants aux professions libérales, comme les
médecins et les avocats;
*L’augmentation de la cotisation patronale des salariés;
*...
Le gouvernement envisage ainsi un ensemble de mesures visant à réformer le système de
retraite à moyen terme et ce à travers l’adoption d’un régime à deux pôles (public et privé)
comptant chacun un régime obligatoire plafonné et un autre complémentaire, et ce dans la
perspective de converger vers un système unique au niveau national.
Selon Monsieur Mohamed Boussaid, ministre de l’économie et des finances, la réforme de
retraite, dont l’urgence n’est plus à démontrer, devra être concrétisée en 2015, alors que
l’année en cours sera consacrée à l’adoption des projets de lois relatifs à ce chantier et à la
détermination du scénario de réforme approprié.

Depuis des décennies, le Maroc a maintenu une politique expansionniste marquée par un
niveau élevé de l’investissement public et des subventions croissantes visant à générer une
croissance assez confortable tout en maintenant  les déficits courant et budgétaire à un
niveau modéré et soutenable. Or, ces dernières années ont été marquées par une
détérioration prononcée des équilibres internes et externes, un déséquilibre trouvant sa
justification, non seulement dans la crise des finances sociale traitée ci­dessus, mais aussi
dans la faiblesse structurelle de l’économie marocaine (forte dépendance de la production
vis­à­vis des aléas climatiques, vulnérabilité des exportations à l’égard des cours
internationaux particulièrement des phosphates, etc.), ajoutant à cela la conjoncture
internationale défavorable (cours élevé du pétrole, flambée du dollar, hausse des taux
d’intérêts, etc.).
D’où l’urgence de mettre en oeuvre un ensemble de mesures à tous les niveaux (budgétaire,
monétaire et fiscale) ainsi que des réformes d’ordre structurel pour éviter les remous sociaux,
garder à l’abri les grands fondamentaux macroéconomiques et réduire au maximum le degré
de vulnérabilité de l’économie marocaine.

Amina CHIGUER.

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