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HISTOIRE GENERALE
DES
AUTEURS
ET ECCLÉSIASTIQUES.
ARRAS. — TYPOGRAPHIE DE E. LEFRANC.
HISTOIRE GIÎNÉRALE
DES
AUTEURS SACRÉS
ET ECCLÉSIASTIQUES
QUI CONTIENT
l'histoire DES CONCILES TANT GÉNÉRAUX QUE PARTICULIERS, ET LES ACTES CHOISIS DES MARTYRS,
NOUVELLE ÉDITION
SOIGNEUSEMENT REVUE, CORRIGÉE, COMPLÉTÉE ET TERMINÉE PAR UNE TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES,
Des encouragemenis de plusieurs Vicaires Généraux, Directeurs de Séminaires et d'un grand nombre de personnages distingués
TOME DEUXIEME.
PARIS
CHEZ LOUIS VIVES, LIBRAIRE -ÉDITEUR,
5j RUE DELAMBUE, 5.
1859.
M 1 6 1933
5
TABLE
DES CHAPITRES, ARTICLES ET PARAGRAPHES
Art. XIII. Traité de la Chair de Jésus-Christ . . 41 CHAP. X. Confession de saint Acace, évêque en
Art. XIV. Traité de la Résurrection de la chair . 45 Orient (l'an 250), et martyre de quelques au-
Art. XV. Les cinq livres de Tertullien contre Mar- tres (en 251, 252) 117
cion • 45 CHAP. XI. Saint Alexandre, évêque de Jérusalem
Art. XVI. Apologie du Manteau 50 et martyr (l'an 252) 122
Avis à Scapula 30 CHAP. XII. Saint Corneille, pape et martyr (l'an
Traité de la Monogamie 52 252 )
1 24
Art. xvli. Traité des Jeûnes 53 CHAP. XIII. Origène, prêtre et confesseur. Père de
Traité de la Pudicité 55 l'Eglise grecque (né en 185 et mort en 255) . 130
Art. xviii. Traité contre Praxéas 58 Art. I. Histoire de sa vie 150
Art. XIX. Livre de la Couronne du soldat. ... 62 Art. II Des écrits d'Origène sur l'Ancien-Testa-
» Cest par erreur qu'on a mis CHAPITRE IX, il faudrait CHAPITRE VUI. Mais il ne manque rien.
,
g II. Du Périarchon ou livre des Principes . . 172 confesseur (l'an 256 ou 266) 594
g III. Traité de la Prière 174 CHAP. XVIII. Saint Denys, évêque d'Alexandrie et
§iv. Traité d'Origéne sur le martyre .... 177 confesseur (l'an 2G4) 596
g V. Des huit livres d'Origéne contre Celse . , 179 Art. I. Histoire de sa vie • 596
Art. v. Des Lettres d'Origéne, de quelques-uns Art. II. Des écrits de saint Denys 401
de ses ouvrages qui sont perdus et de ceux CHAP. XIX. Bérylle, évoque de Boslres, el Try-
qu'on lui a faussement attribués 195 phon, disciple d'Origéne 420
Art. VI. Doctrine d'Origéne 202 CHAP. XX. Saint Etienne, pape et martyr (l'an 256) 421
Art. vu. Jugement des écrits d'Origéne; Catalo- CHAP. XXI. Les Actes du martyre de saint Laurent,
gue des éditions qui en ont été faites. . . . '2oO diacre de Rome, el des martyrs d'Ulique, ap-
CHAP. XIV. Saint Cyprien, docteur de l'Eglise, évo- pelés la Masse-Blanche (l'an 258) 423
que de Carthage et martyr ( vers l'an 258), CHAP. XXII. Novatien. prélre de Rome 426
Père de l'Eglise latine 257 CHAP. XXIII. Saint Sixte II, pape et martyr ; Népos,
Art. 1. Histoire de sa vie 257 évoque d'Egypte ; Basile, évoque de Pentapole,
Art. 11. Des écrits de saint Cyprien 268 et Malchion, prélre d'Antioche 430
g I. De son livre à Donat et de son traité sur CHAP. XXIV. Saint Eusèbe, confesseur (l'an 269),
la Vanité des idoles 268 et saint Anatole , évêque de Laodicée ( après
§ II. Les trois livres des Témoignages à Quirin, l'an 282) 452
contre les Juifs 271 CHAP. XXV Saint Firmilien , évoque de Césarée
§ 111. Traité de saint Cyprien : Comment les en Cappadoce (vers l'an 269) 435
Vierges doivent se conduire 272 CHAP. XXVI. Saint Grégoire le Thaumaturge, évê-
§ IV. Traité de l'Unité de l'Eglise catholique. . 274 que de Néocésarée (vers l'an 270) 437
§ y. Traité de ceux qui étaient tombés pendant Art. I. Histoire de sa vie 457
la persécution 2"6 Art. II. Des écrits de saint Grégoire le Thauma-
§ VI. Traité de l'Oraison Dominicale. .... 279 turge 439
g vu. Traité de la Mortalité .281 § I. Discours en l'honneur d'Origéne. .... 439
§ viii. De l'Exhortation au martyre 283 § 11. Symbole de saint Grégoire 440
§ IX. Traité de saint Cyprien contre Démétrien. t?85 § III. Des Lettres de saint Grégoire le Thauma-
g X. Traité de l'Aumône 287 turge 444
g XI. Traité de saint Cyprien : Du Bien de la pa- g IV. De la Paraphrase de saint Grégoire sur
tience 289 l'Ecclésiasle et de quelques autres ouvrages
g XII. Traité de la Jalousie et de l'Envie . . . 291 qui portent son nom 446
Art. m. Des Lettres de saint Cyprien 292 CHAP. XXVII. Saint Denys, pape (l'an 268) ... 448
Art. IV. De quelques écrits de suint Cyprien qui CHAP. XXVIII. Théognoste d'Alexandrie, contem-
sont perdus, el de ceux qui lui sont fausse- porain de saint Denys 450
ment attribués 340 CHAP. XXIX. Archélaiis, évoque de Cascare dans
§ I. Des lettres de saint Cyprien qui sont per- la Mésopotamie (l'an 277), 453
dues 340 CHAP. XXX. Saint Yictorin, évêque de Pettau
g II. Traité des Spectacles, du Bien de la pudi- martyr; Piérius, prêtre d'Alexandrie; Théonas,
cilé, de la Louange du martyre, du Discours martyr, et saint Athénogène, martyr (dans la
CHAP. XXXIII. Actes des sept martyrs de Samo- pour Origène 524
sate, Hipparque, Philotée, Jacques, Paragrus, Art. m. Ouvrages de saint Pamphile pour la cor-
Habibe, Romain et Lollien (l'an 287) .... 469 rection des saintes Ecritures ; son Abrégé
CHAP. XXXIV. Actes de saint Maurice et des au- des Actes des Apôtres ; ses Lettres; jugement
tres martyrs de la Légion Thébaine (l'an 288 . 471 de ses écrits 528
CHAP. XXXV. Actes de saint Donatien et de saint CHAP. XLII, Des conciles tenus dans les trois pre-
Rogatien, martyrs à Nantes (eu 287) 4-7.^ miers siècles de l'Eglise. 529
CHAP. XXXVI. Les Actes du martyre de saint Bo- Art. I. Du concile des Apôtres (l'an 50 ou 51) . 531
niface (en 290), de saint Victor et de saint Art. II. Des conciles contre les monianistes (sur
Maximilien ( l'an 295) 476 la fin du II' siècle) 537
CHAP. XXXVII. Les Actes du martyre de sainte Art. m. Des conciles au sujet de la Pâque (sur
Stratonice et de Séleueus, son époux, à Cyzi- la fin du Ile siècle) 540
que en Mysie (en 297), et ceux du saint prêtre Art. iv. Des conciles tenus au sujet du baptême
Eusèbe (en 297), 481 des hérétiques (dans la première moitié du
Art. I. Martyre de sainte Stratonice et de Séleu- Ille siècle) 544
eus ^.
. . 481 Art. v. Des conciles d'Alexandrie, de Lambèce,
Art. II. Martyre du saint prêtre Eusèbe ( sous d'Arabie, d'Asie cl d'Achaïe (de l'an 231 à
Dioclétien et Maximien) 48ô 246)
CHAP. XXXVIII. Actes du martyre de saint Marcel, Art. VI. Des conciles de Carthage, de Rome et
centenier, martyr à Tanger, et de saint Cas- d'Antioche (de l'an 249 à 254 555
sien, greffier et martyr au même lieu (l'an 298) 484 CHAP. XLIII. Des Canons apostoliques (Ille siècle) 573
CHAP. XLIV. Des Constitutions apostoliques (Ille
ou IVe siècle) 689
QUATRIÈME SIÈCLE.
CHAP, XLV. Des conciles tenus au IV» siècle. . . 602
CHAP, XXXIX. Arnobe, orateur (après l'an 305). 486 Art. I. Des conciles tenus k Elvire (l'an 500 ou
Art. I. Histoire de sa vie. . . . • 486 301) 002
Art. II. Des écrits d'Arnobe contre les païens. . 486 Art. II. Concile d'Alexandrie au sujet de Mélèce
Art. m. De la doctrine d'Arnobe 490 (vers l'an 301) 615
CHAP. XL. Lactance, orateur et défenseur de l'E- Art. III. Du faux concile de Sinuesse (en 303) 616 .
glise (vers l'an 325) 494 Art. IV. Du concile de Cirthe (en 305) .... 619
Art. 1 Histoire de sa vie 494 Art. V. Du conciliabule de Carthage (en 311 ou
Art. II. Des écrits de Lactance 495 312) 621
§1. Livre de l'Ouvrage de Dieu 495 Art. VI. Du concile de Rome touchant l'affaire de
§ 11. Livre des Institutions divines 496 Cécilien (en 315) 624
J m. Du livre de la Colère de Dieu 503 Art. VII. Du concile d'Arles touchant les dona-
g IV. Du livre de la Mort des persécuteurs, at- tistes (en 314) 627
tribué à Lactance 504 Art. VIII. Du concile d'Ancyre en Galatie (vers
g y. Ecrits de Lactance que nous n'avons plus l'an 314) 635
et de ceux qui lui sont faussement attribués. .'iO? Art. IX. Du concile de Néocésarée et du faux
Art. m. Doctrine de Lactance; jugement de ses concile de Rome (en l'an 315) 640
écrits; catalogues des éditions qu'on en a Supplément 645
faites 508 Table analytique 651
CHAP. XLI. Saint Pamphile, prêtre de l'Eglise de Table des additions faites par l'Editeur 695
Cé&arée et martyr (l'an 309) 522 Table des notes principales ajoutées par l'Editeur . 697
Art. I. Histoire de sa vie 522 Errata et addition 701
Art. II. Ecrits de saint Pamphile, son Apologie
) 31
.D3
V. X
HISTOIRE GENERALE
DES
AUTEURS SACRÉS
ET ECCLÉSIASTIQUES.
AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES,
[suite du nie siècle]
CHAPITRE I.
^
ilvécut pendant quelque temps sans aucune grecque, en laquelle il composa quelques ou-
lumière et sans connaissance du vrai Dieu, vrages.
prenant plaisir aux divertissements de l'am- 2. La constance '*des martyrs dans les Sa conver-
sion avant
200 de
phithéâtre ^ et se moquant ' des maximes du tourments les plus cruels, le pouvoir que les l'an
Jésus-Chrijt
5 Hierouym., in Catalogo , cap. 53. — 2 ijern, neque tune alia carne ad continent iam eniti. Idem,
ibid., et TertuU., Apologet., cap. 9. ^ idem, ibid. — lib. de Resurrect carn., cap. 59 il —
Lactant., lib. V
— * TerluU., lib. de vetand. Virg., cap. 17, et Lac- Insfit., cap. 1.
tant. , lib. V Institut., cap. 1. 12 Euseb., lib. II Hist., cap. 2. Tertullianus, vir le-
cœci sine Domini luce. TertuU., Apologet., cap. 18. tres Cujas et Scultet, ont pris sujet de ces parolesd'Eu-
6 Nemo hœc omnia (il parle des jeux de théâtre), sèbe, pour que TertuUien était jurisconsulte et
dire
flenius exprimere potest, nisi qui adhuc spectut. Malo pour quelques ouvrages de cette science,
lui attribuer
non implere quarn rueminisse. TerluU., lib. de Spec- qui sont attribués dans le droit à un nommé Tertyl-
tac, cap. 19. —
Hœc et tios risimus aliquando ; de
''
lien mais ce sentiment est aujourd'hui abandonné
;
vestris fuinius ; fiunt, non nascuntur Christ iani. Idem, de tout le monde. D'ailleurs, ce Tertyllien est re-
Apologet., cap. 18. connu pour auteur de plusieurs écrits qu'aucun des
* Peccator enim omnium notarum cum sim, nec uUi anciens n'a cités sous le nom de Septimius Tertullia-
rei nisi pœnitentia natus. Idem, de Pœnitentia, cap. 12. nus. —
1^ TertuU., lib. de Baptismo, cap. 15.
* Eam pœnitentiam tu peccator mei similis, imo ** Quisque tantam tolerantiam spectans, ut aliquo
II.
,
engagèrent TerluUien à qiiiller ses erreurs et TertuUien lui-même le fait assez connaître
pour enihrasscr la religion chrétienne. Ou dans le livre « de r Aine, on il se distingue
ne sait ni le temps ni les circonstances de sa des laïques. On ne sait au juste l'année de
conversion. Mais il est certain (lu'il était déjà son ordination, et ce qu'on en peut dire ,
même dejtuis quel- c'est qu'il était prêtre « avant l'an 205 de
chrétien, et qu'il l'était
ques années, lorsqu'il composa son Apologie, Jé.'us-Christ. Un
auteur dit qu'il fut
ancien '
On ne peut douter qu'elle n'ait aussi clé chré- tuUien composa pour linstruction des fidèles, le
tienne, puisqu'il l'avertit dans un de ces livres pour la défense de la vérité calholi(|ue contre
pour l'Eglise contre
que, si Dieu l'appelait avant elle, et qu'en ce les hérésies et ji.stifier
d'épouser un chrétien, saint Paid ne permet- time, l'affcclion et le respect de tout le monde,
tant les secondes noces qu'à cette condition. et rendirent son nom celèliredansla bouche'"
Terlullien était sans doute eucore assez jeune, de toutes les Eglises; mais il ne persévéra pas,
puisque sa femme était elle-même en âge de et Dieu " permit qu'im si grand homme, qui
pouvoir penser à se remarier, afin d'avoir des parai.ssait la plus ferme colonne du Christia-
V Oraison^, écrit vers le même temps, il se met apporte point d'autres que l'envie «Mes ecclé-
» Quid isto opère manifestivs? quid hac probatione avait demeuré parmi les prêtres de cette Église. Eu-
fidelius ? simpUcilas veritaiin in medio est etiam sèbe lemarque plus expressément que saint Jérôme,
de corporibus nostro imperiu excédant inviti et dolen- en disant que Terlullien a été l'un des plus grands
tes et vobis prœsenlibm erubescentes. Idein, Apologet., hommes qui aient paru à Uonie, lôiv [xaÀtcTa im
'Po)ar,t; lauTrpôjv, Kuseb., lib. II Hist.. cap. 2. Enfin
cap. 23.
istam disciplinam metu prœdicatijudlcii Terlullien dit lui-même qu'il avait été à Home Gem-
* Ad tratis- :
volamus. Idem, lib. de Anima, cap. 2. — ^ j^os nul- marum quoque nobilitatem vidimus Romœ do fastidio
lius loci hominex. TertuU., dcOrat., cap. U. Pai'ihorum et Medorum. cœterorumque genti/ium suo-
Ecdesiœ rnm corum riiutronis crubescenicm. TertuU., lib. I de
* Hic usque ad mediam œlalem preabijter
de TertuUien, marquant en même temps qu'il était omnium Ecdesiarum sernione celebrulur. Euseb., la
auparavant prêtre de l'Eglise callioli(iue. Uic usque Chronicis, ad ann. 10 Seveii.
11 Vincent de Lérius, en parlant de la chute de
ad mediam œtalcm presbyter Ecdesiœ permansU. Hie-
ronym., in Catalogo, cap. 53. TertuUien, dit que Dieu a voulu éprouver et comme
' Contra monttmistas scripsit Tcrtullianus,
quoi tenter la foi de l'Eglise, et voir si l'on s'allacliait aux
pi-esbyler Curthoginensis, Vradestmati audor, cap. 26. hommes on à la vérité inébranlable et infaillible de
8 Le témoi;jnage du Prédestinutus que nous ve- la parole de Dieu. Et ipse quoque TertulHanus fuit in
nons de citer et qui appelle Terlullien prélre de Ecdesia mngna teulalio Quod si quando aliquis
Cartilage, es-l rejeté par les plus liatiilcs, parce que ecdesiosticus magister a fide aberraverit, od ienlatio-
cet atiteuf est pi in de fautes. U'ailleur.s quoique ncni ni nosiram fieri providentia dwina patiatur,
firent souffrir. On croit encore, avec assez de deux livres aux Nations, les Traités des Spec-
vraisemblance, que Procule, fameux défenseur tacles et de ridolât7''/e,den'S. Livres à sa Femme,
du montanismCv et dont Tertullien loue l'é- ' 'Exhortation aux Martyrs, un traité intitulé :
loquence et la vertu, ne contribua i)as peu à Del'Hahit des femmes, un autre des Ornements
l'attirer dans un parti d'autant plus sédui-
- des Femmes, les Traités de la Chair de Jésus-
sant, que ceux qui en étaient les chefs fai- Christ et de la Résurrection, un livre contre
saient une profession extérieure d'une vie plus les Valentiniens , cmq contre Marcion, un contre
austère et il'une continence plus parfaite que Hermogène, im contre Proxéas, les livres de
les catholiques mêmes. VAme, de la Fuite, des Prescriptions, le Scor-
6. Tertullien était alors dans la ^ moitié de piaque,un traité contre les Juifs un livre à ,
sou âge, c'est-à-dire, qu'il avait environ qua- Scapula, un de la Monogamie, un des Jeûnes,
rante-cinq ans; car on croit qu'il vécut jusqu'à un autre de la Pudicité, celui du Voile des
l'extrême vieillesse; ce qui revient à l'an de Vierges,de la Couronne du Soldat, du Manteau,
Jésus-Christ 245 *. Depuis sa chute, on le vit du Témoignage de l'Ame et l'Exhortation à la
insulter sans cesse aux catholiques comme à Chasteté. Outre ces ouvrages, il en avait com-
des gens ^ charnels, grossiers et sans lumières, post plusieurs autres qui sont perdus. Un sur
qui n'étaient pas assez spirituels pour dis- les difficultés et les peines du Mariage, un
cerner les opérations du Saiut-Espiit. Mais il contre des Hérétiques nommés Apelliens, un
ne fut pas plus constant dans l'erreur, qu'il autre contre Apollonius, les livres de V Extase
dans la vérité; et, après .avoir suivi
l'avait été et de l'Origine de l'Ame.8:mit Jérôme dit que,
quelque temps les montanistes ^, il les quitta dans la table des écrits de Tertullien, il y en
pour former mie secte à part, appelée de son avait un intitulé : Sur les Vêtements d'Aai^on ;
nom les Tertullianistes '. Il tenait * ses as- il semble lui en attribuer aussi un sur la Tri-
semblées dans une basilique où le peuple nité, un sur les Animaux mondes et immondes,
venait l'écouter. Saint Augustin ^ que les dit un autre de la Circoncision, et quelques petits
tertullianistes durèrent jusqu'à son temps, ouvrag(is sur la Virginité. Dans l'index du
mais en diminuant toujours ; qu'ils avaient manuscrit d'Agobard, on en trouve un qui a
encore alors leur glise dans Carthage, et ( pour titre De l'humilité de l'Ame, et un, de la
:
celui de Philippe, vers l'an 245. Ce fut lui qui trance àun Sénateur Consul qui avait aban-
découvrit l'hérésie que Praxéas semait con- donné le vrai-Dieu pour retourner au paga-
tre la foi de la Trinité, et qui la combattit nisme, un traité sur la Trinité, un autre inti-
le premier dans im excellent traité que nous tulé: Des Viandes des Juifs, ai le livre de Gen-
avons encore. Les autres ouvrages qui nous nade, qui a pour titre : Des Définitions de la
restent de Tertullien sont:le \iwvedu Baptême, Foi.
était à Rome
sous le pontificat de Zépliirin, et qu'il enseignaient que les âmes des méclinnt.s étaient
J Ils
ne participait pas à l'erreur de quelques autres mon- changées en démons après leur séftaration du corps;
tanistes, qui enseignaient que le Fils était le miôme que les âmes étaient engendrées avec les corps. {L'é-
que Père; de quoi Tertullien était tout-à-fait éloi-
le diteur.)
gné, comme il paraît par son livre contre Praxeas, 8 Augustin., Hœres. 86. — ^ Idem, ibid.
Voyez Euseb., lib. YI Hist., cap. 20. 1" Ferturqiie vixisie ad decrepttam œtatem. Hieron.^
' Hic usque ad mediam œtafem presbyter Ecclesiœ in Catalogo, cap. 53.
permansit. Hieronym., in Catalogo, cap. 53.
HISTOIRE r.ÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ARTICLE II. baptême ; car, en purifiant le corps de ses ta-
ches, elle lave l'àme de ses inicpiités. Or, ces
ÉCRITS DE TERTULLIEN; SON TRAITÉ T)i: BAPTÊME. deux s(dislances avaient également besoin
de ce bain salutaire; toutes deux, en effet, (mt
TraitiS 4ii Nous ne voyons rien qui puisse fixcx* l'é-
\. concouru au crime, l'esprit en faisant agir la
Baptême.
Analyse
poque du livre du Baptême ; mais il est ceitain chair, et la chair eu accomi)lissant les désirs
lie
iMit.
ce liuité,
l'uiis,
que Tcrtuliien le composa avant sa chute, de l'esprit. Chez les païens mômes,
ne l'eau
1696.
puisqu'on n'y trouve rien que de très-catho- laissait pas d'être d'im usage très-commun
lique, m'entreprit contre une femme nom- dans leurs cérémonies; ils s'en .servaient pour
Cip. I. mée Quintille, de l'hérésie des caïnites. Celte initier aux mystères de leurs dieux, pour
femme, faussement persuadée qu'nno chose purilier leurs villes, leurs temples, leurs mai-
aussi simple qu'est le baptême, ne pouvait sons; aux jeux d'Apollon et dEleusine, ils se
conférer kl vie éternelle, se mit à combattre faisaient plonger dans l'eau, prétendant obte-
la nécessité de ce sacrement et infecta de ses nir par là l'impunité de leurs crimes; enfin
erreurs plusieurs personnes de la ville de c'était la coutume chez les anciens de se la-
Carthage. Poiir détruire son préjugé, Tcrtul- ver après avoir commis quehpie homicide ;
iien relève les avantages de l'eau, en rappe- si donc on s'est imaginé qiuî l'eau pouvait, par
)II. lant qu'à la création du monde le Saint-Esprit une vertu purement naturelle, nettoyer notre
était porté sur les eaux, comm.) si cet élé- âme du péché, il n'est pas incroyable qu'elle
ment lui eût été plus agréable que les autres : produise ce même effet par la volonté de
ce sont les eaux qui ont affermi le monde, en Dieu.
y mettant un équilibre parfait; ce sont elles 3. Selon l'opinion vulgaire, plusieurs es-
qui ont produit les animaux; elles ont même prits immondes étaient répandus sur les eaux
concouru à la création de lliomme; ainsi il pour nuire aux hommes; mais TertuUien sou-
n'est pas étonnant que, sanctifiées par le Sainl- tient qu'il est plus probab'e que le pouvoir
Esprit, elles aient aujourd'hui la vertu de don- sur les eaux a été accordé aux bons anges, et
ner la vie à notre âme, et que Dieu, qui les a qu'ils les rendent salutaires ; ce qu'il prouve
employées pour tous ses ouvrages, les fasse par l'exemple de l'ange de la Piscine probati-
IV. encoi'e servir à ses sacrements. Au reste, que, qui, en remuant l'eau, guérissait les ma-
ajoute TertuUien, il n'y a * point de différence lades. Il ajoute qu'à mesure que la grâce est
entre le b;iptême ailministré dans la mer, devenue plus abon(lantc,la vertu des eaux s'est
dans un étang, une rivière, une fontaine, une accrue et en même temps le pouvoir de l'ange
mare, un bassin; il n'y a * point de différence qui y préside; autrefois elles n'opéraient que
entre ceux que saint Jean a baptisés dans le le salut du corps, maintenant elles donnent
Jourdain, et ceux que saint Pierre a baptisés la vie élernelle en effaçant le péché; et l'homme,
dans le Tibre, parce que toute eau a la force recouvrant sa première ressemblance avec
de sanctifier, par l'invocation de Dieu et par Dieu, recouvre en même temps le Saint-Esprit
le Saint-Esprit qui descend sur elle etluicom- qu'il avait reçu dès le commencement par le
municfue sa vertu. souffle de Dieu, mais qu'il avait perdu par sa
2. TertuUien passe aux proprii'tés de l'eau prévarication. TertuUien s'expliquc,etdit qu'il ctp
et soutient qu'elle a plus de rapport qu'aucun n'entend pas par là que le Saint-Esprit nous
autre élément aux desseins de Dieu dans le soit donné * par l'eau « C'est^ dit-il que l'eau
:
' Nu/la distinctio est. mari quis an stagna, flumine prœparavit;ita et Angélus, baptismi arhiter, superven-
an fonte, lacu an alveodiluatur. Nec quicquaii refert turo Spiritui Sancio vias dirigit ablutione dclidorum,
in ter eos qvos J vannes in Jordane, et quos Petrus in quam fides impetrat obsignata in Paire et Filio et
Tiberi tinxit ; nisi et itle S/iudo,qnem P/ulippus inter Spiritu Sancto. Nam si in tribus testibus stabit omne
vias forluita aqua tinxit, plus sa/vtis aut minus re- verbum, quanto magis dumhuhemusper bened ictionem
tulit. Igitur omnes oquœ de pristina orif/iris prœro- eosdern arbitras fidei, quos etsponsares sululcs-, sufficit
gativa, sacramentum sanctificationis conseqnuntur, in- ad fiduciam spei nostrœ etiam numerus naminum di-
vocafo Deo, supervenit eniin slutim Spiritus de cœlis, vmorum ?.... exinde egreisi de lo.vncro, perungimur
et aquis superest, sonclificnns ens de semetipso, et ita l/enedicta uncttane, quœ ncbis carnaliter currit,
ut in
sanclificatœ^vim sanctificandi conihiLunt. Lih.,de Dapt., sic spiritunliter proficit....dehinc manus imponitur
cap. 4. per benedictionem udvomns et invitons Spiritum Sanc-
* Aon quod aquis Spiritum Sancfum consequamur, fum... Tune ille sanclissimus Spirifus super ernundata
sed in aqua emundatt, sub Angelo, Spfitui Sancto prœ- et benedicta corpara libens a pâtre descendit super bap-
paramur, quemadmodum enim Joannes viam Domino tismi aquas, tanquam piistinam sedem recognoscens
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 5
nous purifiant de tous nos crimes par la foi que répond : « S'il n'est pas certain que les Apôtres
nous professons au Père, au Fils et au Saint- aient tous recule baptèm<^, on ne peut douter
ne l'aient désiré; paraît ,par l'Ecriture, ^ap. xm.
»P- "•• Esprit, nous prépare à le recevoir; car, inconti- qu'ils il
nent api es èlre sortis de l'eau, on nous donne qu'ils avaient été baptisés soit(Ui baptême de
vui- l'onciion, d'où vient le nom de cliretieu; Jésus-Christ, soit du baptême de saint Jean;
ensuite on l'ait lïmposition des mains, accom- mais, supposé qu'ils n'aient reçu ni l'un ni
pagnée de prières et de bénédictions pour atti- l'autre,on ne doit pas,pour cela,révoquer en
rer sur nous le Saint-Esprit alors ce : même Es- doute leur salut ni rien conclure contre la
prit qui descendit sur Jésus-Christ après son nécessité du baptême, parce que Jésus-Christ
baptême, sous la l'orme d'une colombe, vient a pu leur conférer l'elïet de ce sacrement sans
en nous et nous apporte la paix de Dieu. » aucun acte extérieur, comme il lit au para-
IX. 4. Il montre ensuite eu combien de manières lytique, dont ilremit les péchés sans le bap-
le baptême était figuré dans la loi ancienne ; ténie. » 11 réfute en passant ceux qui disaient
puis il propose quelques questions sur ce que les Apôtres avaient été baptisés lorsqu'ils
X. sacrement. La première est celle que Jésus- faillirent être submergés dans la mer, et il ré-
Christ proposa aux Pharisiens, savoir si le : pond à l'objection tirée de l'exemple d'Abra-
baptême de saint Jean était de Dieu ou des ham, en disant qu'il ne suit point que ]e bap-
hommes. Terlullien répond qu'il était deDieu, tême ne soit pas nécessaire sous la loi nou-
c'est-à-dire, que Dieu l'avait commandé , mais velle, parce qu'il nel'était pas sous l'ancienne.
qu'il n'y avait attaché aucune vertu; car, quoi- Ensuite en prouve la nécessité par le préceitte
il
que saint Jean fût envoyé de Dieu, c'était seu- de Jésus-Christ Allez et baptisez, et par la
:
lement pour préparer les hommes à la grâce menace de ne point entrer au royaume de
et non pour la leur donner; c'est pourquoi son Dieu sans ce sacrement.
baptême ne conférait ni le Saint-Esprit, ni la 6. Dans la ti'oisiême question, Tertullien xv.
rémission des péchés, ainsi qu'il l'avoue lui- prouve l'unité du baptême par les endroits
même, en disant aux Juifs que celui qui de- du Nouveau Testament où il est dit qu'il n'y
vait venir après lui, les baptiserait dans le a qu'un bai)tême, de même qu'iln'y a qu'un
XI. Saint-Esprit et dans le feu . Les Apôtres ne Dieu qu'une Eglise ainsi ^
et : les hérétiques
commencèrent à donner ce dernier baptême '
n'ayant ni le même Dieu que nous, ni le même
qu'après la descente du Saint-Esprit; aupara- Christ, leur baptême est illégitime, et par
vant, ils administraient le baptême de saint conséquent nul. Outre le baptême de il l'eau, xvi.
Jean, Jésus-Christ n'ayant promis de leur en- en reconnaît un second, qui est le baptême '
voyer son Saint-Esprit qu'après sou ascen- de sang, unique comme le premier. Tous deux
sion. sont sortis de la plaie qui au côté de était
xu 5. La seconde question est sur la nécessité Jésus-Christ. Le baptême de sang supplée au
du baptême que les camites combattaient
, défaut du baptême de l'eau et même le ré- ,
conquiescit. Lib. de bupt., cap. 6, 7 et 8. le même Père ni le même Fils ; ainsi il a suivi par
1 Itaque tinguebant discipuli ejus ut ministri, ut avance la déc'sion du Concile de Nicée, can, 9, qui
Joanne9,ante prœcursor, eodem baptismo Joannis, etc., ordonne que ceux d'entre les paulianistes qui re-
cap. 11. viendront à l'Eglise, seront baptisés de nouveau,
2 Hœretici aiUem mdluin hahent consortium nostrœ ' Est quidern nobis etiam secundum lavaci'um, unum
disciplinœ, quos extraneos utique teslaiur ipsa ademp- et ipsum, sangmnis scilicet, de quo Dominus : habeo,
tio communicationis. Non debeo tu illis cognoscere inquit, baptismo tingui, cum jom tinctus fuisset. Vé-
quod mihi prœceptum, quia non idem Deus rtstna-
est nérât enim per aquametsanguinem,sicutJoannesscrip-
bis et illis,necunus Christus, id est idem,ideoque,nec sit ut aqua tingueretur, sanguine glorificaretur, proinde
baptismus unus, quia non idem ; quem cum rite non nos j'aceret aqua vocatos, sanguine elecios. Hos duos
haheant, sine dubio 7ion tiabent : nec capit numerari, baptismos de vulnere perfossi lateris emisit ; quate-
quod non liabetur. lia 7iec possunt accipere, quia non nusqui in sanguinemejus crederent, aqua lavarentur ;
hubent. Lib. c/e /J«y;<.,cap. 15. Tertullien parie eu cet qui aqua iavissent, etiam sanguinem potarent. Hic est
endroit des hérétiques de son temps, qui,la plupart, baptismus, qui luvacrum et non accepium rcprœsentat,
usaient d'une autre forme de baptême, ou l'enten- et perditum reddit. Lib. de Bapt., cap. 16.
daient autrement que les catholiques, ne croyant ni
« HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'on an temps de Tortullien dans
ol)sorvait aux femmes de prêcher et de baptiser, lui qui
l'admiiiistration du haplùme. Le droit tie ]jap- h.'ur soiiilÏT, à peine la permission do se faire
tiser' était, pour l'ordinaire, réservé à l'évêque; instruire? Que les femmes se taisent, dit-il; et,
mnis les prêtres elles diacres pouvaient aussi lorsqu'elles sont à la maison, qu'elles consul-
conférer ce caci-cmcid i)ar l'onlre dt; l'évêqne, tent leurs maris.»
«afin, dit Tertulliiin, d'honorer rKi;li>e dans 8. L'auteur exip;e une extrême précaution Cap. xvn
son chef, d'où dépend le maintien de la paix. de ceux qui sont chaigés d'administrer le
Les laïques ont le même droit dans le cas baptême. « Il est vrai, dit-il, que l'Eunuque
de nécessité; celui qui y manque doit être ( dont il est parlé dans les Actes des Apôtres )
reî^ardé comme cou[)able do la perte d'un et saint Paul lurent Ijaptisés sans délai, mais
homme. » Riais on a cru que Tertullien était Dieu avait donné des marques sensibles de
aux femmes ce pouvoir; voici ses paroles : sa volonté. Pour l'ordinaire , il est mieux de
« L'insolence ' de la femme est allée, dit-il, différer le baptême ',seloii les dispositions de
jusqu'à usurper mais je
le droit d'enseigner; la personne, la condition, lage, surtout à re-
pense qu'elle n'ira pas jns(iu'à s'arroger celui gard des enfants; car pouripioi exposer les
de baptiser, à moins qu'il ne paraisse une parrains au péril de leur manquer par la mort,
nouvelle bête semblable à la première (il parle ou d'être trompés par leur mauvais naturel?
de Qnintille), c'est-à- dire que, comme celle-ci Qu'ils viennent lorsqu'ils sont en âge d'être
s'est mêlée de prêcher contre la nécessité du enseignés, afin qu'ils puissent connailre Jé-
baptéme, une autre s'ingère à baptiser d'elle- sus-Christ avant de devenir chrétiens. A quoi
même. Si elles se prévalent d'î la permission bon presser le baptême dans cet âge encore
de prêcher et de baptiser, qu'elles pourraient innocent ? U faut aussi différer les adultes jus-
prétendre avoir reçue de saint Paul, qu'elles qu'à ce qu'ils se marient ou qu'ils soient
sachent que le livre où cette permission leur fortifiés dans la continence. Si l'on comprend
est donnée n'est pas de saint Paul, mais d'un bien l'importance du baptême, on craindra
certain prêtre d'Asie, qui, ayant avoué qu'il plutôt de le recevoir trop tôt que de le diffé-
l'avait composé sous le nom de cet apôtre,par rer. La foi parfaite assure notre salut. »
amour pour lui, a été déposé de son rang. En 9. Le * jour solennel du baptême est celui xix.
effet, est-il croyable que saint Paul permette de Pâques, et ensuite tout l'intervalle jusqu'à
l^isi episcopi jam , aut presbijteri, aut diaconi vocan- ( Quintilla ) baptismum auferebat ita ahqua pT se ,
cium episcopatus.... Sufficiat scilicet, in nécessitât ibus sitione , etiam œtate cuncfatio baplismi utiiior est :
utaris, sicubi aut loci, aut temporis, aut personœ con- prœcipue tamen circa parvulos. Quid enim necesse est
ditio compellit. Hune enim constant ia succurrentis exci- sponsores etiam periculo ingeri ? quia et ipsi per mor-
pitur, cum urget circumstantia periclitantis. Quoniam talitaiem destitucre promissiones suas possunt, et pro-
reus erit perdiii hnniinis, si supersederit prœstave quod ventu malœ indolis falli.Ait quidem Dominus, «nolite
libère potuit. Ibid., cap. 17. illos prohibere ad me venire.n Veniant ergo dum ado-
* Petuluntia auteni mulieris, quœ usurpavit docere, Icscunt ; veniant dum discunf, dum quo veniant do-
utique non cliom tinguendi jus sibi pariet : rr'si si centur ;
fiant Christiani cum Christum nosse potuerint.
quœ nota bestia evenerit similis pristinœ : ut quemad- Quid festinat innocens aitas ad remissioncm peccato-
modum illa baptismum auferebat, ita aliqua pjer se rum ?.... non minore de causainnupii quoque procras-
eum conférât. Quod si quœ Paulo perperam adscripta tinandi donec aut nubant, aut continentiœ corro-
sunt, ad licentiam muherum dicendi, tinguendique de- borentur. Si qui pondus intelligard baptismi, magis.
fendunt, sciattt in Asia presbytcrum qui eain scriptu- timebunt consecutionem quam dilationem : fides in-
ram construxit, quasi titulo Pauli de suo cumulons, tégra secura est de salute. Lib. de Baplism., cap. 18.
conviclum atque confessvm id se amore Pauli fecisse, * Diem baptismo solemniorem Pascha prœsiat...
loco decessisse. Quam enim fidei proximum viderelur, Exiride Pentecoste ordinandis lavacris latissimum spa-
ut is dùcendi et tinguendi daret feminœ potestalem, tium Cœterum omnis dies Domini est, omnis
est....
qui ne discere quidem. constantev mulieri permisit : hora, omne tempus habile baptismo : si de solemni-
Taceant, inquit, et demi maritos suos consulant. Ibid. tate interest, de gratia nihil refert. Ibid,, cap. 19.
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLÎEN.
la Pentecôte; mais on peut le donner en tout de distinguer œuvres qui ont besoin de pé-
les
Cap. XX
temps heure. Cn doit se oisposerà ce
et à toute nitence. Ces actions sont généralement tout Cap. m.
sacrement' par de fréquentes oraieons, par des ce qui se fait contre la loi de Dieu, soit par le
jeûnes, des veilles, des génufl<^xioiis et par corps, soit par l'esprit, ou par la pensée, ou par ,
la confession de tous les péchés passés: c'est la volonté. La volonté seule suffit pour nous
beaucoup, selon lui, de ne les pas confesser rendre coupables, lors même qu'il se rencon-
publiquement. Il finit ^>n priant les catéchu- tre quoique ol;stacle à l'exécution; car Jésus-
mènes de se souvenir dans leurs prières du Christ ne condamne pas seulementradultère,
pécheur ïertullien,l(jrsque,sortisdu bain sacré mais encore le désir de le commettre. Au reste, iv.
qui doit les faii-e renaître, ils étendront, pour Dieu nous ordonne la pénitence, il nous y ex-
la première fuis, les mains ^ dans l'église, avec horte, il nous y excite parla vue de la récom-
le reste des fidèles, pour implorer les grâces pense et du salut ; mais on ne doit point se
du Seigneur '. prévaloir de sa bonté pour l'otTenser; car si v.
On ne peut douter que Tertullien ne l'ait com- pare au baptême, comme étant le sujet prin-
posé avant sa chute, puis([u'il '^
reconnaît ex- cipalde son ouvrage. Plusieurs catéchumènes,
pressément le pouvoir (pe Jésus-Christ a donné dans la confiance de recevoir la rémission de
à. l'Eglise de remettre les péchés; ce qu'd nia leurs péchés par le baptême, voulaient profi-
depuis, comme l'on voit dans son Traité de'^
ter du temps qui restait pour pécher plus li-
la Pudicité. brement, comme s'ils eussent espéré d'obtenu*
2. Dans le livre de la Pénitence, l'auteur le j)ardon de leurs fautes, sans les expier par
traite d'abord de cette veiiu en général, qu'il la pénitence; mais Tertullien leur représente
définit: «Une passion de l'âme causée par le re- l'irrégularité d'une pareille conduite. « Dieu,
pentir d'une action précédente.» Il remarque dit-il, ne s'est pas obligé de donner sa grâce
que les païens en avaient une idée si peu juste, à tous ceux qui reçoivent le baptême; il garde
qu'ils ne se repentaient,pour Tordinaire, que son trésor et n'en laisse pas approcher les in-
de leurs bonnes œuvres, comme d'avoir fait dignes : parce qu'on est reçu au rang des au-
du bien à quelqu'un, lorsque celui-ci n'eu diteurs,on ne doit point se fiatter d'avoir la
était pas reconnaissant. Il prend de là occasion permission de pécher; la counaissance de Dieu
1 Ingressuros baptismum, orationibus crebris, jeju- turgique, et le rit du baptême y est décrit avec
niis et geniculationibus, et pervigilhs orare oportet, beaucoup de détail. [L'éditeur.)
et cum confessione ornnium rétro delictorum... Nobis *Pacianus. Epist. 3, tom. IV Bibl. Pair., pag.314.
gratulandum est, si non puhlice confdemur iniquita- Collocavit Dominus in vestibulo pœnitentiam se-
s
tes aut turpitudines nosfras. Ibid., cap. 20. cundam quœ pulsantibus patefaciat ; sed j'am semel,
2 Igitur benedicti quos gralia Dei exspectat, cum de quia jam secundo... Verum non stalim succidet^dus ac
illo sanctissimo lavacro novi natalis ascenditis, et pri- subruendus est animus desperatione, si secundœ guis
mas manus apud matrem cum fratribus aperitis pœnitentiœ debitor fuerit; pigeât sane peccare rursus,
(c'était la coutume de prier, les mains éteudues), pe- sed rursus pœnitere non jngeaf —
Iteratœ valetudinis
tite de Pâtre, petitede Domino... Tuntum oro ut cume iteranda medicina est.... Offendisti, sed reconciliari
petitis Tertulliam p ccatoris meminerilis. Ibid. — ' Cet adhuc potes.. Id si dubitas, évolue quœ Spiritus Eccle-
écrit est fort imponant pour la tradiliou dogmatique. siis dicat... Stuprutn et idolothytorum esum Thiatire-
L'idée de l'essence et de l'action des sacrements, nis exprobrat... Et tamen omnes ad pœnitentiam corn-
ditMœlher, y est développée avec clarté et netteté ; movet. TertuU., lib.de Pœnit., cap. 7.— «Idem, lib.
on y retrouve notre terminologie dogmatique et li- de Pudicit., cap. 1.
,
c»|i. VII. i. Il passe à la pénitence qui suit le bap- le plus souvent nourrir ses prières par les
tême et témoigne qu'il en parle à regret et jeûnes, gémir, pleurer, crier jour et nuit vers
avec répuf>nance. Il appelle cette pénitence son Dieu, se prosterner devant les prêtres, se
une dernière espérance, et il souhaite qne les mettre à genoux devant amis de Dieu,
les
chrétiens n'en connaissent point d'autre que charger tous les frères de nous secourir de
lapremière et craint qu'en parlant d'un se- leurs prières. »
cond remède, il ne semble montrer encore un 5. Après cela, il n'est pas étonnant que plu- Cap. x.
espace où il soit libre de pécher. Dieu, con- par honte, soit par la crainte des
sieurs, soit
naissant la malice du démon et les efforts incommodités corporelles, refusassent la pé-
continuels qu'il fait pour rentrer dans les nitence ou la difïérassent de jour en jour.
droits qu'il avait sur nous avant le baptême, Tertullien condamne leur conduite, et il tâche
nous a donné ouverture au pardon par une de rassurer les premiers par ces paroles: «En-
seconde pénitence, pour une fois seulement. tre des frères et des conserviteurs, où tout
C'est assez qu'il veuille nous rendre encore doit être commun , l'espérance, la crainte
une fois ce qu'il nous avait déjà donné et que la joie, la tristesse, la douleur pensez-vous ,
nous avions perdu par notre faute. « Si donc, qu'un autre fasse ce que vous ne feriez pas
ajoute-t-il, quelqu'un a besoin de la seconde vous-même en pareille occasion? Le corps ne
pénitence, il ne faut pas, pour cela,qu'il perde peut se réjouir de la maladie d'un de ses mem-
courage ou qu'il se désespère. Il est honteux bres; au contraire,tous les antres s'en attris-
de pécher, mais non de se repentir; ime nou- tent et s'empressent à sa guérison. L'Église
velle maladie demande de nouveaux remè- est dans les fidèles, et Jésus-Christ est l'Église;
des ; vous obligerez Dieu en vous servant de lorsdonc que vous vous prosternez aux ge-
v,ir. celui qu'il vous ofire. » Tertullien rapporte les noux de vos frères, c'est Jésus-Christ que vous
endroits de l'Écriture où Dieu témoigne ai- touchez, c'est lui que vous priez. Et lorsque
mer mieux la conversion du pécheur que sa vos frères pleurent sur vous, c'est encore lui
mort; à l'occasion de la parabole de l'enfant qui souffre et qui prie son Père pour vous. La
prodigue, il excite le pécheur, à son exemple, demande d'un fils est toujours facilement
à recourir à Dieu par une humble confession exaucée. Lequel vaut mieux d'être condamné
de ses fautes, ce qui les diminue autant que en secret, ou d'être absous publiquement ? >)
l'obstination à les cacher les agrandit; l'un Il excite les uns et les autres par l'exemple de
est une marqua de repentir, l'autre est une ceux qui courent les charges et les honneurs,
preuve de la volonté à persévérer dans le mal. sans se rebuter des peines et des affronts qu'Us
IX. Puis il déduit les exercices et les travaux de sont obligés d'essuyer ; enfin il leur repré-
^"'
cette seconde et unique pénitence: «Plus sente que le seul moyen de salut qui reste au
primitur et frequentatur, Exomologesis est, qua de- potum jjura plerumque vero jejuniis pjreces
nosse :
lictum Domino nosti-um confitemtir, non quidem ut alere, ingcmiscere, lacrgmari, mugire dies noctesque ad
ignaro, sed quutenus sutisfactio confessions disponitur, Dominurn Deumsuum, Presbyteris advolvi, et caris Dei
confessiojie pœnitentia nascitur. ptenitentia Deus miti- adgeniculari omnibus fratribus legationes deprecatio-
,
pécheur est YFxomologèse,\^aT laquelle Nabu- Dieu, ajoute-t-il, ne s'était encore manifesté
chodouosor est rentré dans ses États, et Adam à personne sous de Père, pas même à
le nom
dans le paradis. Moise, quoiqu'il lui eut demandé son nom;
mais il a bien voulu nous le révéler par son Fils.
ARTICLE IV. 3. Dans la seconde, nous demandons à Dieu Cap m-
Traité de 1 . Cc fut eucore avant sa chute que Tortul- sa grâce attend encore ; par là nous satisfai-
1 SI Prière
lieu composa sou Traité de la Prière', au moins sons au précepte de prier pour tous les hom-
on n'y voit rien qui se ressente de l'hérésie mes, même pour nos ennemis. Nous ajoutons:
'v.
de Montau l'auteur y parle avec honneur
:
' « Que votre volonté soif faite dans le ciel et sur
du livre d'Hermas ou du Pasteur, et le place la terre,r> non que cette volonté puisse être em-
même entre les Écritures canoniques ; tandis pêchée par aucun obstacle; mcis nous prions
qu'étant devenu montaniste, il le compte pour qu'elle s'accomplisse en nous sur la terre, afin
un livre ^
de nulle autorité. De plus , il n'y qu'elle soit un jour accomplie dans le ciel, et
fait mention que du ' jeune qui précédait la encore qu'il nous donne le salut dans cette
®
fête de Pâques or,il est certain que Montan
;
vie et dans l'autre, parce que sa volonté est
en avait ordonné deux, outre celui-là,et Ter- que ceux qu'il a adoptés soient sauvés. vQue v.
tuUien lui-même les autorise dans * son Traité votre règne arrive;» c'est-à-dire, venez régner
du Jeûne. Saint Hilaire ^, après avoir loué cet on nous. Si donc c'est la volonté de Dieu et
ouvrage comme très-utile , ajoute que Ter- notre propre avantage que ce règne arrive au
reur dans laquelle son auteur se laissa de- plus tôt, comment quelques-uns demandent-
puis entraîner, en avait beaucoup diminué ils que la fin du momie soit reculée, puisque
l'autorité , aussi bien que de ses autres c'est là seulement qu'il doit commencer?
écrits. 4. Jusque-là Jésus-Christ ne nous apprend vi.
soit, après une espèce de préface assez courte, nez-nous aujourd'hui notre pain de tous les
où il relève les avantages de l'Oraison Domi- jours;» ce qui peut encore s'entendre, et
nioalecomme ayant Jésus-Christ même pour même plus proprement, d'une manière spiri-
auteur et étant en quelque façon l'abrégé de tuelle, puisque c'est Jésus-Christ qui est le
ni andes eu particulier. Sur la première il dit nous croyons que son corps est dans le pain,
qu'elle est un témoignage de notre foi en Dieu comme il nous l'a enseigné lui-même, en di-
et en même temps une preuve de s i bouté et sant « Ceci est mou corps ; » ainsi nous deman-
:
11. de sa puisssance : en adressant nos vœux à dons par cette prière la persévérance en Jésus-
Dieu le Père, nous invoquons pareillement le Christ et de n'être jamais séparé de son corps.
Fils et l'Église notre JNlère, c'est-à-dire, le 11nous enseigne ensuite à demander la l'émis-
Saint-Esprit; car, selon lui ', l'Eglise est éta- sion de nos fautes, sachant que lui seul est
blie sur les trois personnes de la sainte Tri- sans péché ; puis à prier Dieu qu'il ne nous vu.
nité, mais principalement surle Saint-Esprit : induise point dans la tentation, c'est-à-dire,
1 TertuU., lib. de Orat., cap. 12. ' Idem, lib. de— magis dura habemus per benedictionem eosdem arbi-
Pudicit., cap. 10. — » Idem, lib. de Orat., cap. 14.— ad fiduciam
tros fidei quos et sponsores salidis, sufficit
* Idem, lib. de Jejun., cap. 1. spei nostrœetiam numerusnomiiiumdivinorum ? quimi
5 Hilar, in cap. v Matth., de orationis autem sacra- autem sub tribus et festatio fidei et sponsio salutis pi-
mento necessitate commenlandi Cyprianus, vir sanctœ gnerentur, necessario adjicitur Ecclesiœ mentio : quo-
memoriœ, liberacit.. Quanquam et TertuUianus hinc niam ubi très, id est Pater, et Filius, et Spiritus Sanc-
volumen aptissimum scripserit consequens er- : sed ius, ibi Ecclesia,(juœ trium corpus est. TertuU., lib. de
ror hominis detvaxit scriptis probabilibus audorita- Bapt.jCap. 6, et lib. de Pudic., cap. 21. Nom et Eccle-
sonne; et lor.Mju'il onioiuia à Ahiahain (le lui le jour de Pâques, c'est-à-dire le Vendredi
sacrifier son fils, il ne le fit pas pour tenter ce Saint, (|ui était aussi ap]'elé Pàcpies. Quelques-
saint patriarche mais pour éprouver sa foi
, unss'ahstenaient aussi du baiser quand ils jeii-
et nous nioutrei-, par son exemple, que nous naient en particulier. Il condainncî cet usage,
ne devons rien pri'férer à L'ieu, La dernière comme celui de s'absenter des prières du sa-
demaude n'est qu'une explication de la pré- crifice les jours de station, sous prétexte que
cédente. la station devait finir après avoir reçu, le corps
IX. L'auteur avertit ensuite qu'il est permis,
o. de Jésus-Christ. « Vous pouvez, dit-il, rece-
seloii les dillérentes circ;)nstanccs, d'u-er de voir riùicbarislie et la réserver pour un au-
lori'iules de inières autres que l'Oraison Do- trc temps; ainsi vous participerez au sacrifice,
minicale, mais qu'elle doit toujours les pré- et votre jcùue sera entier *.»
Turtullien .i
concilier sans délai. Eiiliu, l'oraison doit être les deux Livres à sa Femme, que pour lui dé- sa remmc.
faite avec un esprit libre de confusion et clarer ses dernières volontés, il parait néan-
de trouble. moins qu'il encore assez jeune alors, puis-
était
SI. 6. Ensuite il reprend quelques pratiques su- qu'il ne tombadans l'hérésie que vers le milieu*
perstitieuses qui s'étaient introduites parmi desouâge,et que, selon toutes les apparences,
les chrétiens. Quelques-uns n'osaient com- il coin posa les livres dont il s'agit,, étant encore
meucer la prière si, auparavant, ils ne s'étaient catholique; car il y leconnait expressément
lavés tout le corps, ou du moins les mains, eu qu'un chiétieu peut fuir dans la persécution,
^
mémoire de ce que fit Pilate lorstpi'il livra et que les secondes noces sont ' permises,
'i"-
Jésus-Christ aux Juii's. D'autres mettaient tandis qu'étant devenu montaniste,il nia l'un®
bas leurs manteaux pour prier,ou s'asseyaient et l'autre^, comme nous le verrons dans la
dès que la prière était finie, quoique ce- suite.
lui qui y* présidait lut encore debout, comme S.Lebut du premierlivre estde persuader à Analyse
ilii livre I".
s^ils eu.«sent voulu faire un reproche à Dieu de sa femme de ne point se remarier, s'il meurt
Tertull ,
ce qu'ils se trouvaient latigués par la prière, le premier il lui fait envisager qu'il lui
: lili I ad U-
xortin, «ap.
Tertullien recherche quelle pouvait être l'o- donne ce conseil pour son propre avantage, I. )iag. 161.
rigine de ces observations, et remarque que la non qu'il y ait aucun intérêt, id qu'il se sente
plupart étaient venues des païens ; ce qui,se- aucune répugnance à ce qu'elle en épouse un
loniui,étaitune raison suffisante pour les faire autre après sa mort, puisqu'au temps de la
xiiicixii. rejeter : puis il marque les disposiitons exté- résurrection, où nous serons tous semblables
rieuresqu'on doit apporter à l'oraison avoir : aux auges, il n'y aura plus de distinction de
les mains * un peu élevées et étendues en sexe, ni par conséquent plus de mariage,
forme de croix, sans toutelois les éloigner beau- Selon l'ordre établi de Dieu dès le commen- Cap. n.
coup Tune de l'autre; prier les yeux baissés et à cément, le mariage doit être unique, et il en
voix basse, crainte d'interrompre ses voisins, apporte pour exemple celui d'Adam et Eve.
•Siquidem irreverens est assidere sub conspectu con- ciam erecto.,.. Sonos etiam vocis subjectos esse opor-
traque conspedum ejus quem quant maxime reverea- tet. Ibid., cap. 13.
ris ac vénérer is : quanio ntagis sub compectu Deivivi, ' Sic et die Pascliœ quo communis etquasi publica
angelo adhuc orationis adstante fuduni istum irrcli- jejunii religio est, merito depontmus osculum. Ibid.,
giosum est, nisi exprobramus Deo quod nos oratio fati- cap. 14.
gaverit. Lib. de Orat., cap. 12. * Cet écrit, dit Mœlher, d'une petite étendue, est
Les patriarches ont eu plusieurs femmes, Paul, de ne pas élever à l'épiscopat celui qui
mais c'était par une pure tolérance, qui n'a avait eu deux femmes, ou de recevoir dans
plus de lieu dans la loi nouvelle. le ministère celle qui avait été mariée plus
Cap. m. 3, Au reste, Tertullien recouuait, avec saint d'une fois; preuves que les secondes noces
Paul, que les secondes noces sont permises; mais étaient regardées comme peu convenables à
sur ces paroles du même apôtre, « qu'il est du Cliristia-
la pureté de la foi et à la sainteté
nisme. Enfin, il parle si avantageusement de Cap.vin.
meilleur de se marier que de brûler,» il soutient
que les noces ne sont bonnes qu'autantqu'elles l'état des veuves, qu'il semble presque vouloir
heureux qui se signalent par une glorieuse travail.» Eu dernier lieu, il de ne re-
l'avertit
>v. confession de son nom. Il est donc mieux de chercher que des entretiens dignes de Dieu,
ne pas se marier et de ne pas brûler. « La et d'éviter la compagnie des femmes vicieuses,
faiblesse de la nature, ajoute-t-il, vous sert comme n'étant propres qu'à la corrompre et
d'excusp, la concupiscence de la chair, la jeu- à détourner du veuvage.
la
nesse, la beauté du corps, tout cela vous dit 5. Dans le second hvre, Tertullien, instruit ,
Analyse
qu'un mari vous est nécessaire pour doimer par expérience combitu û est ditncue a une ^.^ ^^
quelque autorité à votre sexe, pour votre con- jeune veuve de ne plus penser au mariage, oap.i.v.iee!
solation et pour vous mettre à couvert des laisse à sa femme la liberté de se remarier,
mauvais bruits; munissez -vous, ma très- pourvu un chrétien ce n'est
qu'elle épouse ;
chére sœur en Jésus-Christ, contra ces con- plus un conseil, mais un précepte de l'Apôtre,
seils tlattenrs, par l'exemple de nos sœurs, qui, qui défend tout commerce avec les infidèles.
après avoir perdu leur mari, ont méprisé ces Quelques-unes, néaiunoias, contractaient des n.
avantages,ahn de n'avoir plus que Dieu pour alliances illicites avec eux, fondées apparem-
époux. D'un autre coté, la concupiscence du ment sur ce passage dumèmc Apôtre: 'Si quel-
siècle, c'est-à-dire, l'amour de la gloire, des qu'un des frères a une femme infidèle, et
richesses et des autres avantages de ce monde qu'elle consente d'habiter avec lui, ne doit
il
vous porte au mariage ; mais aucune de ces point la quitter;» c'est pourquoi Tertulheu
vues ne convient à un chrétien, qui doit éga- en explique le sens et fait voir qu'il doit
lement renoncer aux plaisirs et aux honneurs s'entendre des deux personnes qui se sont
V. du siècle. Enfin, si vous prétextez le désir d'a- mariées étant encore dans l'infidélité, mais
voir des enfants, c'est un avantage qui nous dont l'une a été ensuite amenée à la foi par
doit peu toucher, puisque, lorsque nous en la grâce. Car saint Paul ne dit pas Si quel- :
avons, nous souhaitons de les envoyer de- qu'un épouse une femme infidèle, «mais
vant nous , en vue des malheurs qui nous si quelqu'un des frères a une femme infi-
fournit à TertulUen une raison pressante pour cause d'adultère mais aucune de ces raisons
:
engager sa femme à en \iser de même ; mais, n'excuse celle qui épouse un infidèle ; bien
afin de la toucher par des exemples plus con- loin de sanctifier son mari, elle se souille
nus, il lui fait remarquer que plusieurs d'en- elle-même en prostituant à un impur et à
tre les chrétiens s'engageaient à la continence un étranger les membres de Jésus-Christ. Il m.
aussitôt après leur baptême, et que plusieurs est donc constant que ceux qui contractent de
la gardaient même dans le mariage, d'un con- pareils mariages sont coupables de fornica-
VII. sentement mutuel. Il lui représente encore tion et doivent ' être séparés de la commu-
la discipline de l'Église et la défense de saint nion des frères, en sorte que, suivant le pré-
1 Hœc cum ita sint, fidèles Gentilium matrimmia subeuntes, stupri reos esse constat, et arcendos ab omni
42 HISTOIRK r,i::M'H.\LF, DES AUTEURS ECCLi;:SI ASTIQUES.
cepte derApôtro, on ne niuniic pas même avec S'il fïmt donner qnel(in<î chose, le f^renier, la
eux. cave, tout sera fermé. Quand itiême mari ^^p. v.
le
^P '*
(». En v{]\>\, combien t!'inconv(^nicnts nais- païen consentirait à tout, c'est un mal '^
d'ê-
sent ' (le ces alliances illicites? La femme tre obligée à lui faire confidence des pratiques
chrétienne rendra à son mari païen des devoirs de la vie cluélienne. Vous cacherez-vous de
de païenne la beauté, la parure, une pro-
: bu en faisant hî signe de la cjoix sur votre
preté mondaine et des caresses honteuses, lit, sur votre cor[)s; ensoufïlant,i)Our chasser
principalement dans les devoirs secrets ; or,il quelque chose d'immonde, vous levant même
n'en est pas ainsi cliez les saints, où tout se la nuit pour prier, et ne croira-t-il pas que
passe avec reti-nne et avec moilestie, comme c'est quelque opération magique? Ne saura-t-
soas les yeux de Dieu. « Comment pourra-t- il point ce que vous prenez en secret avant
elle sei'virDieu, avant à ses côtés un serviteur la nourriture? et , s'il sait que c'est du paiu,
du démon, charge par son maître de l'eu em- ne croira-t-il pas qu'il est tel que Tondit?
pêcher ? S'il faut aller à l'église pour une sta- Dans les solennités païennes, elle sera obligée VI.
tion, il lui donnera rendez-vous au bain plus de mettre sur la porte de sa maison des lam-
tot qu'à l'ordinaire. S'il faut jeûner il don- , pes et une couronne de laurier, et d'accom-
nera à manger le même jour. S'il faut sortir , pagner son mari dans les festins souvent ,
jamais les domestiques ne seront plus occu- même dans les cabarets, et alors que chantera-
pés. Souilrira-t-il que sa femme aille de rue t-elle avec lui ? Elle entendra quelques chau-
cn rue visiter les frères, et dans les plus p>au- sons de théâtre ou de cabaret ; il n'y aura ni
vres maisons? qu'elle quitte son lit pour assis- mention de Dieu, ni invocation de Jésus-Christ,
ter aux assemblées de la nuit? Souffrira-t-il ni lecture des Ecritures pour nourrir sa foi,
tran(|uillement qu'elle découche,àla solennité ni bénédiction divine.»
de raquc.s?La laissera-t-il aller, sans sou[)çon, 7. Il n'en est pas même de celle qui a em- vu.
à la table du Seigneur si décriée parmi eux ? brassé la foi depuis son mariage : comme elle
Trouvera-t'il bon qu'elle se glisse dans les pri- n'y demeure uue par l'ordre de Dieu, tous ses
sons pour baiser les chaînes des mai-tyrs? empêchements lui tournent en bien, parce
qu'elle lave leurs pieds , qu'elle leur offre qu'il l'aide de sa grâce; de plus, son mari,
avec empressement à boire et à à manger ,
témoin des merveilles que Dieu a opérées en
qu'elle pense aux absents, et qu'elle en soit elle, et de ce qu'elle est devenue beaucoup
occupée? S'il vient un frère étranger, comment meilleure, commence lui-même à concevoir
sera-t-il logé dans une maison étrangère ? des sentiments de crainte envers Dieu, et de-
conimunicatwne fraternitaiis, ex litterin Apostoli di- tijris reptare patietur ? jam vero alieni fratrum ad
centiscum ejusmodi ne cibum quidern sumendum. osculum convenire ? aquam Sanctorumpedibus offhre ?
Lib. II ad Uxor., cap. 3. de cibo, de poculo invadere, desiderare, in mente ha-
1 Hecenseamus wnic cœtera pericula cur ruinera, ut bere. Si peregre frater adveniat, quod i?i aliéna domo
dixi, fidei ab Aposlolo provisa, non ca.rni tantum, ve- hospilimn ? Si cui largienduni erd, horreum proma ,
rumetiarn ipsi sp'ritui molestissirna. Quis enim dabi- lirnclusa sunt. Tertull., lib. Il ad Uxor., cap. 3 et 4.
tet oblUerari qvotidie fidem commercio infidcli ? Quœ- * Sed aliquis sustinet nostra , nec obstrepit. Hoc est
vix mulier fidelis Dominum observet necesseest, et igitur delictum quod gcntiles nostra noverunt.... la-
quornodo potcst duoijus dondnis servire. Domino et ma- tebisne tu cum lectaium, cum corpusculum tuum si-
nte, adde gentili. Gentilem enim observando gentilia gnas, cum aliquid immundum flutu explodis, cum
exhibebit, formum, exfructionem, munditias sacula- etiam per noctem exurgis oratum ? et non magiœ ali-
res, blanditias ti rpiorcs, ipsa etiam sécréta matrimo- quid videberis operari ? Non sdet maritus qui secrcto
monii maculosa ; non ut pênes sanctos officia sexus, an le omnem cibum gustes ? et si sciverit panem, non
cum honore ipsius necessitatis,tanquum sub oculis Dei illum crédit esse qui dicitur ?... Moratur Dei ancilla
modeste et mudcrate trausiguutur....Si statio facienda cum l'iriljvs alienis, itder illos omnibus nominibus
est, maritus de die conducut ad balnea.;si jejuniu ob- dœmonum, omnibus solemnibus rerum, incipiente anno,
servando si'ut, maritus eadem die conviviœ exerceat ; incipiente mense, nidore thuris agitabitur ; et proce-
si jjrocedendum erit, nunquam magis familiœ occupa- det de janua loureata et luceniata ; discumbet cum
tio obveniat. Quis autctn sinut conjugem suam visi- morito in sodalitiis, sœpe in popinis : et ministra-
tandorum fratrum grati:i,viratim aliéna et quidem pau- bit nonnunquam iniquis, solda quondayn sanctis minis-
periora quœque tuguria circumire ? quis nocturnis trare. Cujus manum desiderabit ? de cujus poculo
convocationibm, si ita ojiorluerit, a latere suo adimi jiarticipabit ? Quid maritus suus illi, vel marito quid
li/jenter feret ? quis déni que solemnibns Paschœ ob- illa canfabd ? quœ Dei mentio ? quœ Christi invoca-
noctaniem securiis sustinebit ? quis ad. convivium illud tio ? ubi fomenta fidei de Script urarurn interjectio7ie?
dominicum, quod infamant, sine sua suspicione di- ubi spiritus? ubi refrigerium ? ubi divina benedictio?
mittet ? quis in carcerem ad osculanda vincula mat- Tertull., lib. Il ad Uxor., cap. 5 et 6.
[ITI'' SIÈCLE.] CHAPITRE I. - TERTULLIEN. 13
vient par là plus facile à gagner à la foi. C'est car il n'y parle nulle part de son faux Paraclet;
ainsi que Tertullieii réfute l'objection qn'il au contraire, il se fait gloire d'être en com-
s'était lui-même proposée. Il fmit eu repré- munion avec toutes les Eglises aposloliqui-s,
sentant le bonheur d'im mariage chrétien. même avec celle de Rome, dont il parle avec
« L'ÉjAlise *
en fait le traité, l'cblation le con- de grands éloges. L'eùt-il faitaprès sa chute,
firme, la bénédiction en est le sc^au, les anges dont la jalousie des clercs de l'Eglise romaine
le rapportent au Père éternel, qui le latitie. fut l'origine ? D'ailleurs, il n'est pas croyable
Deux iidèles portent ensemble le même joug; qu'il ait écrit dans h» schisme un ouvrage
ils ne sont qu'une chair et Uii esprit; ils prient qui détruit, par des raisons si fortes et si
ensemble, ils se prosternent ensemble, ils puissantes toutes les hérésies et tous les schis-
,
ensemble à l'église et à la table de Dieu ; dans 2.Mais,en quelque temps que ce livre ait été Analyse
de ce livre
les persécutions et le soulagement ils ne se composé, au jugement d'un habile écri-
c'est,
Cap. i,
cachent rien et ne s'incommodent pas l'un vain *,un des plus utiles de Tertullien ^.L'au- pag. 202.
l'autre. On visite librement les malades; on teur avertit d'aho.''d qu'on nedoitpasse scan-
fait l'aumône sans contrainte ; on assiste aux daliser de voir des hérésies, puisqu'elli'S ont
sacrifices sans inquiétude ; ils chantent en- été prédites; mais qu'on doit plutôt travailler de
semble les psaumes et les hymnes ; ils s'ex- tout son pouvoir à en empêcher le progrès;
citent à prier Dieu ^.n Jésus-Christ seul étant impeccable, il n'y a
pas lieu de s'étonner que plusieurs de ceux
ARTICLE VI. mêmes qui se distinguaient dans l'Eglise par
la grandeur de leur foi, se laissent ensuite
LIVRE DES PRESCRIPTIONS.
entraîner dans l'erreur « car enfin, dit-il, si : Cap. m
I.ivro (les 1 . Les différentes sectes d'hérétiques anciens un évêque ou un diacre, une veuve, une vierge,
Prescrip-
tions. et nouveaux qui régnaient du temps de Ter- un docteur ou même un martyr, s'écarte de
tullien, le portèrent à écrire son Traité des la règle de la fui, croira-t-on pour cela que la
Prescriptions. Ce terme est tiré des juriscon- vérité est du côté des hérétiques? juge-t-on de
sultes, en latin ce qu'en matières
et signifie la foi par les personnes, ou bien des personnes
d'aôaires nous appelons fins de non-recevoir par la foi? Judas, qui traliit Jésus-Christ, était
par lesquelles on se décharge d'une pour- du nombre des Apôtres.» Il montre ensuite que iv.
suite, sans entrer dans le fonds de la question. ceux (}ui annoncent un évangile corrompu,
Cet ouvrage est antérieur à tous les autres que sont les loups ravissants et les faux prophè-
Tertullien composa sur la même miitièie ;
tes contre lesquels Jésus-Christ nous avertit
mais il n'est pas facile d'en fixer l'époiiue. Ce de nous précautionner ;
que leurs hérésies we, v.
qu'on en peut dire, c'est qu'il parut avant que laissent pas d'être de quelque utilité à l'Eglise,
son auteur eut abandonné le foi de l'Eglise ;
de même que leurs persécutions, d'autant
1 Vnde sufficiamus ad enarrandam felicitatem ejus ^Malgréces raisons,D.Lumper estd'un avis contraire,
matrimonii quod Ecctcsia concitiat, et confirmât ol)la- M. Blanc {Cours d'histoire ecc/ei). soutient l'opinion de
tio, et obligat benedictio ; angeli renmitiant, Pater D. Geillier,qui est aussi la plus commune. Us'appuie
rato httbet ? quale jugum fidelium duorum unius spei, sur cette raison : au cliap. 22, Tertullien prouve, par
unius voti, xiniuf!ejusdem servitutis ?
disciplinœ, ces paroles de Jésus-Christ : Adhuc niulta liubeo di-
ambo fratres, ambo conservi, nulla spirilm carnisvc ccre vobis, que Apôtres avaient tout appris de
les
discretio. Sinmloront, simul volutantur et simul je- Jésus-Christ par le Saint-Esprit, que rien ne leur
junia Iransigimt, alterutro ducentes, alterutro liorlan- avait été caché. Un homme sensé, integrœ mentis, ne
tes, allerut.o sustinentes. In Ecdesia Deipariter utri- saurait en douter, selon lui. Sa thèse montaniste était
que, pariter in convivio Dei, parifer in angusiUs, in toute supposait une révélation pro-
contraire; elle
persecutionihus, in rejrigeriis. Litière œger visitatur, gressive, et Tertulliens'appuyait sur ces mêmes
indigens sustentatur. Eleemosijnœ sine iormenfo, sa- paroles du Sauveur. Voyez de Monog. cap. 1. Or, on
crificia sine Sonant inter duos psatmi et
scrupulo. ne peut guère supposer qu'un homme semé, integrœ
hymni et mutuo provocant quis melius Deo suo can-
, mentis, se couîrcdise à ce point. {L'éditeur.)
tet. Ibid., cap ^ FIeury,///ç/. Eccl. ,lom. II.
8. p. 56.
2 Le Ion le plus modéré, dit Mœlher, règne dans 5 II est certainement, quant au plan, à l'exécution,
cet écrit; les arguments qui, sous quelques rapports, au contenu, le plus parfait, le plus spirituel et leplus
ont une gr.'nde valeur historique, sont tirés de l'E- précieux de Tertullien. Le principe qu'il y développe
criture saii.Le, et, quoiqu'ils ne soient pas toujours est incontestablement, dit Mœlher, le boulevard le
d'une grande exactitude exégétiquc, ils sont du moins plus inexpugnable pour l'Eglise contre toute espèce
toujours bien appliqués. (L'^rfî7eur.) d'hérésie. {L'éditeur.)
u HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
fiu'elles servent à faire connailro les vrrita- pour donner aux bons la vie bienheureuse,
Itlcs chrétiens. Suivant rélyuioio.^ic du nom et condamner les méchants au feu éternel,
c«p M. grec, il entend par fiercsie le choix ; [parce après que les uns et les autres auront été res- Cap. xiv.
queriiérétique choisit eflcctivement la doctrine suscités avec leur corps. Cette règle, ajoute-
qu'il invente ou qu'il adopte;] « c'est pour- t-il, établie par Jésus-Christ, ainsi que nous
quoi, ajur.to-t-il,rii'Jr('ti(pi(' est d(''jà condamné, le ferons voir, ne souflre aucune difiieulté, si
parce (pi'il a l'ait choix de ce qui doit le faire ce n'est de la pai^t des hérétiques mais cela ;
condamner. Pour nous,il ne nous est pas per- même les rend hérétiques. Au reste, si, en la
mis d'introduire rieu de nouveau, ni de rece- conservant toujours dans sou ordre et dans .sa
voir ce qu'un autre a inventé de lui-même; forme, il y a quehpie chose qui paraisse obscur
nous avons pour auteurs les Apôtres, ([uiont ou équivoque, nous avons des frères qui ont
enseigné seulement ce qu'ils avaient appris reçu le don de science, auprès desquels on peut
V". de Jésus-Christ.» Selon TertuUien, c'est la phi- s'instruire. » xv.
losophie humaine qui a fourni la matière des Après avoir ainsi exposé la doctrine de
4.
héIé^ies; c'est elle qui a inventé ces fahles, l'Eglise, il fait voir que les hérétiques ne doi-
ces généalogies sans lin, ces questions infruc- vent pas être admis à disputer contre la foi
tueuses que l'Apôtre nous interdit, nous aver- sur l'autorité des Ecritures: 1» parce qu'elles xvi.
tissanten même temps de nous donner de ne leur api^artiennent pas; 2" parce que l'A-
garde de la philosophie car qu'y a-t-il de
; pôtre leur ôte le droit de dispute, nous ordon-
^"'* commun entre l'Académie et l'Eglise, entre nant defuirun hérétique après l'avoir averti;
les hérétiques et les chrétiens ? Noire curiosité 3° paice que les disputes ne peuvent être xvn.
ne doit pas s'étendre plus loin, maintenant d'aucune utdité; car les hérétiques ne reçoi-
que nous connaissons JésusClirist; après l'E- vent pas quelques-unes de nos Ecritures, ou
vangile, nos recherches sont inutiles. ne les reçoivent pas entières. Us y ajoutent et
3. Les héiétiques disaient « Il est écrit
: : en retranchent ce qu'il leur plait, pour les a«;- xtx.
Cherchez et vous trouverez. «TertuUien répond commoderà leur système; ou, s'ils les reçoi-
que ces paroles s'adressaient aux Juifs, qui, vent entières, ils les expliquent à leur mode ;
doutant encore si Jésus-Christ était le Messie, de sorte qu'au lieu de pouvoir rieu gagner
pouvaient s'en instruire par la loi et par les dans ces disputes, il est à craindre que les
Prophète?; mais Jésus-Christ ayant déterminé faibles n'en soient ébranlés. Quand même ils
jx. ce que nous devons croire, il n'est pas hesoin en agiraient autremeut, il faudrait examiner
de pousser nos recherches plus loin. Si, né- avant toutes choses de quel côté est la foi et
anmoins, il y avait quelque chose à chercher, à qui appartiennent les Ecritures; de qui, par
t- nous devrions le chercher chez nous, c'est-à- qui, quand et à qui est venue ladoctrine qui
dire, dans l'Eglise, pour résoudre les ques- fait les chrétiens; car, où cette doctrine et
". tions que nous pouvons former sans violer les cetîe foi se rencontrent, là est aussi la vérité
XII ei XIII. règles de la foi. Il marque en ces termes des Ëcritures,descxplications et des traditions.
quelle est cette règle inviolable : « Croire 5. Un autre argument de prescription, c'est xx.
qu'il n'y a qu'un seul Dieu, créateur de ce qu'il est constantque Jésus-Christ a choisi
monde; qui a tiré toutes choses du néant jiar douze apôtres pour enseigner toutes les na-
son Verbe, produit lui-même avant toutes les tions; qu'après avoir reçu le Saint-Esprit qui
créatures; que ce Verbe, appelé Fils de Dieu, leur avait été promis, ils ont d'abord prêché
est celui qui s'est fait voir sous difîérentes la foi dans toute la Judée et y ont établi des
figures aux Patriarches, qui a parlé dans les Eglises; qu'ensuite ils se sont dispersés par
Prophètes, (jui eit descendu en dernier lieu tout le monde, où ils ont annoncé cette même
dans la Vierge Marie, qui s'est incarné dans loi et ont fondé des Eglises dans certaines vil-
son sein, qui est né d'elle et a vécu parmi les, d'où les autres ont pris la semence de la
nous sous le nom de Jésus; que ce même doctrine et la pieiment tous les jours, à me-
Jésus-Christ, après avoir prêché et fait plu- sure que les Eglises se forment; c'est pourquoi
sieurs miracles, a été attaché à la croix; ipi'il on compte ans- i pour Eglises apostoliques,
les
est ressuscité le troi>ièmejour, qu'il est monté et toutes ensemble ne ïout qu'une même
au ciel, qu'il est assis à la droite de son Père, Eglise , par la communication de la paix fon-
etque, pour suppléer à sa pr3seuce,ila envoyé dée sur l'unité de la doctrine. Là-dessus, voici
. le Saint-Esprit sur les fidèles, afin de les gou- comment Tertullieu raisonne, pour prouver
'^ verner; enlin qu'il viendra, dans sa gloire. que les hérétiques ne doivent pas être écou-
fiii^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLIEN. 15
Ciip.xM. tés. «Jésus-Christ, dit-il, n'a révélé qu'à ses circoncis lui-même son disciple Timothée. n
Apôtres h\ doctrine qu'il avait reçue de son 7. Le second argument
un passage
^ des luTétiaues
'et
dans lequel saint Paul
,^^p- ^^^
XXVI.
Père nous ne pouvons savoir quelle est
, et porte sur
cette doctrine que par le moyen des Eglises recommande à ce même disciple de garder le
qu'ils ont fondées et qu'ils ont instruites, soit dépôt qui lui avait été confié; d'où ils infé-
de vive voix, soit par écrit. Suivant ce prin- raient que les Apôtres n'avaieut découvert la
cipe, il est incoutesta])le que toute doctrine vérité qu'à quelques-uns. C'est pourquoi Ter-
qui s'accorde avec celle des Eglises apostoli- tuUien explique ces paroles et fait voir, par
ques est la véritable, comme étant celle que les ce qui suit et ce qui précède, qu'elles ne si-
Églises ont reçue des Apôtres . les Apôtres de gnifient autre chose, sinon que Timothée ne
Jésus-Christ, et Jésus-Christ de Dieu même. devait pas prodiguer inconsidérément la doc-
Or, notre croyance est la même que celle des trine de l'Evangile, de peur de jeter les per-
Églises apostoliques : la preuve,c'est que nous les devant les pourceaux et de donner les
communiquons avec elles; donc notre doc- choses saintes aux chiens. Du reste, les Apô-
trine est la véritable. » tres n'avaient aucune raison de tenir caché
XXII. 6. A ce raisonnement qui les embarrassait ce qu'ils avaient appris de Je -.us-Christ ; ils
tous, les hérétiques n'opposaient rien de so- avaient reçu ordre de publier sur les toits ce
llle. Ils répondaient que les Apôtres n'avaient qu'ils lui avaient ouï dire en secret, et rien
pas tout su, ou que, sachant tout, ilsne l'a- ne pouvait les empêcher de le faire, ni la
vaient pas enseigné à tous, sans prendre crainte des Juifs, ni les violences des païens.
garde que ce reproche retombait sur Jésus- Les hén'étiques répliquaient que les Eglises xxvu.
Christ même, qui aurait envoyé des hom- avaient mal compris la prédication des Apô-
mes peu instruits ou peu sincères. Mais Tcr- tres, et ils apportaient pour preuve les re-
tidlien les justifie sur l'un et l'autre de ces proches de saint Paul aux Galates et aux Co-
chefs. Il soutient qu'il n'est pos sensé de croire rinthiens. Mais Terlullien réfute en peu de
qu'ils aient ignoré même un iota de la science mois en disant c/u'ils devaient
cette objection,
du salut, puisque le Sauveur, qui les avait croire que ces Eglises en étaient devenues
choisis pour ses compagnous et pour ses dis- meilleures; qu'au surplus, elles étaient unies
ciples, leur développait les choses les plus de communion avec celles dont la foi, la
obsci.rjs et les mystères les plus cachés, qu'il science et la bonne conduite donnaient tant
n'annonçait aux autres qu'en parabole. «Piiirre de joie à l'Apôtre.
ignoriiil-il quelque chose, lui .que Jésus-Christ 8. Tertullien prouve ensuite la vérité de xxvm, xxix,
""''' '"""'
aiipelle la pierre sur laquelle il devait fonder notre religion par le consentement unanime
son Eglise, qui a lecu les clefs du royaume de toutes les Eglises en une même croyance,
des ciei.x et la puissance de lici" et de délier et parlanouveautédcs hérésies. 1" Il n'est—
dans le ciel comme sur la terre ? Qu'y avait-il pas vraisemblable que tant d'Églises, et si nom-
de caché pour Jean, qui reposa sur la poi- breuses, se soient accordées à recevoir l'er-
trine lin Seigneur et à qui seul il fit connaî- reiir ; si leur doctrine eiît été fausse, elle au-
tre le traître Judas? Enfin le Saint-Esprit.étaut rait dû Ce qui se trouve être le même
vai ier.
descendu sur tous les Apôtres le jour de la chez plusieurs n'est pas une erreur, mais
Pentecôte, dissipa les ténèbres de leur igno- une tradition. —
2° Notre doctrine a précédé
rance et leur enseigna toute vérité, suivant les hérésies ,
puisqu'elle les a toutes prédites
la promesse qui leur en avait été faite par et qu'elles sent sorties d'elle. Or, suivant l'or-
XXUI. Jésus-Christ. Il est vrai que Pierre a été re- dre naturel, il que la doctrine qui a
est clair
pris j>nr Paul, mais c'était pour une faute de été annoncée la première vient de J''sus-
conduite, et non de doctrine car il ne prê- ; Clirist, et par conséquent qu'elle est la véri-
chait pas un autre Dieu que le Créateur, table, tandis que celle qui est venue ensuite
ni un autre Christ que celui qui est né de est fausse. Car, en supposant qu'on se fîil
Marie, ni une autre espérance que celle de trompé d'abord, il s'en suivrait que l'erreurau-
XXIV. la résurrecti(>n. Donc , selon la différence rait régné partout,etqueleshéréli(pies seraient
des temps des personnes et des raisons
, , les venus pour délivrer la vérité. Jusque-là on xxix.
Apôtres reprenaient ce qu'ils eussent fait prêchait m.al, on croyait mal; tant de milliers
eux-mômes dans d'autres circonstances. Ainsi de chrétiens ont été mal baptisés tant de ;
Pierre aurait pu remontrer à Paul que sacrements et tant d'œuvres de foi mal ad-
défendant la circoncision, il avait néanmoins ministrés ; tant de prodiges et tant de mira-
\G HISTOIRE r.ÉNi': RALE DES AUTEUUS ECCLl'SIASTIQUES.
clés mal opérés, tant de sacerdoces et de mi- ne pouvant prouver leur succession légitime,
uislères mal exeicés, tant de martyrs enfin c'est avec raison qu'ils ne sont pas reçus à la
mal couronnés. Il précise ensuite le temps paix et à la communion par les Eglises apos-
où les principaux hérétiques avaient com- toliqnes.
mencé à doi^inatiscr ;
puis, s'adressant tout-à- Pressant ses adversaires p ir de nouveaux
*.). Cnp xxxm.
coup à Ni,t;idius et à llermot-éni', il leur do- arguments, il établit pour principe que toute
mande des preuves de leur mission. « Qu'ils doctrine rejetée par les Apôtres est absolu-
fassent voir, dit-il, qu'ils sont de nouveaux ment fausse. Par là il convainc d'erreur
apôties, et qu'ils produisent, à cet effet, les tous les hérétiques de son temps, et ceux qui
miracles qu'ils ont opérés. .Je vois en eux de niaient la résurrection, et ceux qui rejetaient
grandes merveilles, mais d'une nature bien lemariage, et ceux qui enseignaient des opi-
diflerente de celles que les Apôtres ont ac- nions condamnées dans les Lettres que les Apô-
complies. Ceux-ci ressuscitaient les morts, et très ont écrites aux Eglises. Ildonc mxm.
conseille
eux lont mourir les vivants. » Il poursuit •: de recourir à ces Eglises apostoliques où l'on
(iap. xxxn. « Si quelques héréticjues se disent du temps voit encore, à leur place, les mêmes chaires
des Apôtres, afin de paraître par là avoir reçu des Apôtres, et où on lit encore leurs Lettres
d'eux leur doctrine, voici ce que nous leur originales, qui suppléent à leur voix et à leur
répondons Qu'ils montrent les origines de
: présence. En Achaïe, dit-il, vous avez Co-
«
leurs Eglises, l'ordre et la succession de leurs rinthe ; en Macédoine, Philippes et Thessa-
évèques, en sorte qu'elle remonte à un apô- louique ; en Asie, Ephèse ; en Italie, vous
tre ou au moins à quelqu'un des hommes avez Rome, dont nous reconnaissons aussi
apostoliques qui ait persévéré avec eux jus- l'autorité. Qu'elle est heureuse cette Eglise
qu'à la fin. Ainsi l'Eglise de Smyrne rapporte où les Apôtres ont répandu toute leur doc-
quc Polycarpe y fut établi par Jean; ainsi trine avec leur sang! où Pierre a souffert
l'Eglise romaine montre Clément ordonné comme le Sauveur, où Paul a été couronné
par Pierre *. De même les autres Eglises pro- comme Jean-Bapliste; où l'apôtre Jean, après
duisent les noms de ceux que les Apôtres lem* avoir été plongé dans l'huile sans en souffrir
ont donnés pour évèques, et c'est de leurs de mal, a été relégué dans une ile! n
mains qu'ils ont reçu la semence de la doc- iO. Grâce à tous ces arguments que nous «"vn.
trine apostolique. Que les hérétiques suppo- n'avons pu qu'esquisser, Tertullien prétend
sent une pareille succession car qu'y a-t-il ( avoir prouvé la proposition qu'il avait d'abord
qui ne leur soit permis, après leurs blasphè- avancée, que les hérétiques n'ont pas droit
mes?);mais ils n'avanceraient rien en la sup- de se servir de nos Ecritures. Ca:-, étant hé-
posant ; leur doctrine, comparée avec celle rétiques (comme on le démontre sajis le se-
des Apôtres, prouve, par la diversité et la cours même des Ecritures), ils ne sont plus
contrariété de l'une avec l'autre, qu'ils n'ont chrétiens, et par conséquent ils ne peuvent
pour auteur ni un apôtre, ni un successeur rien fonder sur les Ecritures, qui n'appar-
des Apôtres. » Il conclut que les hérétiques tiennent qu'aux chrétiens. Il ajoute à ces XXXVlIl.
• Cœlerum, si quce [hœreses) audent interserere se ci.... omnes hœreses adutramque formnm a nostris
Ita
atati ApostoliccB, ut icleo videantur ah Apostolis ira- quaqua putant nposto-
Ecclesiis provocatcr, probent se
difœ , quia sub A})Ostolis fuerunt. possumus dicere : licas. Sed adeo nec sunt, nec probare possunt quod
Edant ergo origines Ecclesiarum suarum, evo/vanior- non sunt, nec recipiuntur in pacem et communicatio-
dinem episcoporum suotum, ita lier surcessionem ah nem ab Ecclesiis quoquomodo apostolicis. Scilicet ob
initio decurrenicin, ut prinnis ilte episco/nis aliquem diversitalem sacramenli nullo modo apostolicœ. Tertul-
ex apostolis, tel aposto/icis viris, qui tamen cum Apos- liau., lib.de Prœscript.
tolis perseveraverit,hcbuerit auctorem et antecessorem. * D'après divers témoiguages des anciens, on pour-
Hoc enim modo Ecclesiœ apostolicœ sen.ms suos dé- rait dire que saint Pierre, ne pouvant résider perpé-
férant : sicut Snnjrnœorum Ecclesia Polgcurpum a tuellement à Rome, ni suffire à tous les soins de l'a-
Joanne collocatum refert ; sicut Romanorum Clemen- postolat dans cette partie de l'Occident, se choisit
tem a Pefro ordinatum itidem. Pennde ntique et cœ- trois coadjuteurSjSaint Lin, saint Clet et saint Clément.
terœ exht/ient, quos ah Apostolis in cpiscopatum cons- Peut-être même saint Clément fut ordonné le pre-
titutos ApostoUci seminis traduces hahent. Confingant mier , à saint Lin et à saint Ciel le gouver-
et céda
taie aliquid hœretici. Quid enim illis post hlasphemiam nement de l'Efilise de Rome, et no la gouverna
illicitum est ? Sed etsi confiiixerint, nihil promove- qu'après eux. Voyez TdU-inont, tom. II de ses Mé-
bunt : ipsa enim doctrina eorum cum apostolica com- moires et Baillet, Vie des Saints, 25 novembre.
,
preuves celle qu'il tire de la corruption des cre, sera demain prêtre, et celui qui est prê-
Écritures, fuite par les hérétiques. Selon lui, tre, sera demai)i laïque; car ils accordent
cette altération ne peut avoir pour cause que aussiaux laïques les fonctions sacerdotales.
l'envie, qui est toujours postérieure et étran- Mais que dirai-je de leur manière d'adminis-
gère à ia chose enviée. Ainsi il est certain trer la parole, puisqu'ils se font une affaire,
que les hérétiques sont les auteurs de cette non pas de convertir mais de per-
les païens,
corruption ; un homme sai^e ne croira jamais vertir les nôtres? C'est pour cela seulement
qu'elle puisse venir de nous, qui sommes les qu'ils sont humbles, flatteurs et soumis ; du
premiers possesseurs, reste, ils n'obéissent pas même à leurs chefs ;
p. xLi. 11, 11 vient ensuite à la morale des héréti- et ce qui fait presque point de
qu'il n'y a
ques, qu'il représente comme n'étant pas schisme chez eux, c'est que, lors(pi'il y en a,
mieux réglée que leur doctrine, c'est-à-dire ils ne paraissent point, le schisme leur tenant
méprisable, terrestre, humaine, sans gravité, heu d'unité. Ils varient entre eux, s'écartant
sans autorité et sans discipline. Premiè- « de leurs propres règles ; chacun tourne à sa
rement, dit-il *, on ne sait qui est chez eux fantaisie la doctrine qu'il a apprise, comme
catéchumène ou iidèle. Ils entrent sans dis- si celui de qui ils l'ont reçue, l'avait compo-
tinction , écoutent et prient de même : ils sée à sa fantaisie : les valeutiniens et les
admettent même les païens ; ils traitent de marcionites ont autani; de droit d'innover
simplicité le renversement qu'ils fout de la dans la foi que Valentin et Marcion. Si l'on y
discipline, et d'affectation rattachement que regarde, on troTivera que toutes les hérésies
nous lui portons. Ils donnent indifféremment s'écartent en plusieurs points des sentiments
la paix à tous, sans s'embarrasser des opinions de leurs auteurs. La plupart n'ont point d'É- Cap. xuii.
différentes ; combattent la
il suffit qu'elles glises et sont errants et vagabonds, sans
vérité. Tous sont enflés et prometteut la vé- rcère, sans demeure fixe, sans foi. Les héré-
rité ; leurs catéchumènes sont parfaits avant tiques sont encore notés par le commerce
d'être instruits. Quelle est l'insolence de leurs qu'ils ont avec les magiciens, les charlatans,
femmes? Elles osent bien enseigner, dispu- les astrologues, les philosophes. Par leurs
ter, exorciser, promettre des guérisous, peut- mœurs, on peut juger de leur foi : ils disent
être même baptiser. Leurs ordinations sont qu'il ne faut point craindre Dieu; aussi se
téméraires, légères, inconstantes; tantôt ils donnent-ils toute liberté. »
ordonnent des néophytes, tantôt des person- 12. Enfin Tertulheu rappelle les héréti- xi.vi.
nes encore attachées au siècle, tantôt de nos ques au jugement futur, où nous devons tous
apostats, afin de les retenir par la vaine assister devant le tribunal de Jésus-Christ
gloire, ne pouvant se les attaclier par la vé- pour y rendre compte de nos actions, et sur-
xLii. rite. Aujourd'hui ils ont un évéque, demain tout de notre foi. «Que répondront alors ceux
un autre ; le même qui est aujourd'hui dia- qui ont corrompu cette foi qui leur avait été
1 In primis qttis catechiimenus, quis fidelis, incertum non ethnicos convertendi, sed nostros evertendi...ad hcec
est : panier adeunt, pariter audiunt, pariter orant : solummodo opéra humiles et blandi et summissi agunt
etiam eUmici si super cène rint sanctuni canibus,etpor- cceterum nec suis prœsidibus revereniiam noierunt, et
cis margaritas, licet non verasjactabunt. Simpltcita- hoc est quod schismata apud hœreticos fere non sunt :
tem volant esse jrrostrationem disciplinée cujus pênes quia cum sint non patent ; schisma est unitas ipsis.
nos curam lenocinium vocant. Pacem quoque passim Mentior si non etiam a suis regulis variant inter se,
cum omnibus miscent. Nihil enim ititerest Mis , licet dum unusquisque proinde suo urbitrio modulatur quœ
diversa tractantibus, dwn ad unius venfatis expugna- accepit : quemadniodum de suo arbitrio ea composuit
tionem conspirent. Omnes tument, omn'es scientiani ille qui tradidit.,.. Idem licuitvalentinianis quod
pollicentur . perfedi catec/iumeni quam
Ante surit Valentino, idem tnarcionitis quod Marcioni, de arbi-
edocti. Ipsœ nmlieres hœreticœ quam procaces ! quœ trio suo fidem innovare. Denique penitus inspectée hœ-
audeant doçere, contendere, exorcismos agere, curatio- reses omnes, in multis cum auctoribus suis dissentien-
nes repronattere, forsitan et tingere. Ordinationes eo- tes deprehenduntur. Plerique nec ecclesias habent
rum temerariœ, levés, inconstarites. Nunc ncophytos soie matre, sine fide, orbi fide, extorres sine lare va-
conlocant, nu7ic sœcido obstrictos, nunc apostutus nos- guniur. ISotuJa sunt etiam commercia hœreticorum
tros, ut gloria eos obligent, quia veritate nonpossunt. cum inagis quam pluribus, cmn circulatonbus, cum
Nusquam facdius proficitur, quant in custris rehel- aslrologis, cum philosophis, curiositati sctlicet dedttis.
lium, ubi ipsum esse illic promereri est. Itaque alius Quœrite ut invemetis ubique meminerunt. Adeo et de
hodie episcopus crus alius hodie diaconus, qui cras
, ;
génère conversatioms quulitas fidei œstimari potest :
lector twdie presbyter, qui cras làicus ; num et laïcis
: doctrinœ index disciplina est. Negant Deum timen-
sacerdotalia munera injungunt. De verbi auteni admi- dum : itaque libéra sunt illis omnia et soluta. Lib. de
nistratione quid dicam ? cum hoc sit ne^otiurn illis Prœscript., cap. 41, 42 et 43.
II.
18 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
donnée vicrc^e par Jésus-Cbrisi? S'exciiscront- ch.nsser de l'Eglise: au contraire, il le loue
ils sur ce (jue les Apôtres ne les ont point i)ré- de sa conlinenco. —
2° Ce catalogue ne fait
lîiunis conti'es les fausses doctrines, ou sur auct ne nientiou de l'hérésie d'Hermogène
raiitoriti' de celui dcuit ils ont suivi les er- quoiiiue Tertullien le nomme expressément
reurs ? Liiront-ils (ju'i'u conliruiatioa de sa d;ins li's Prescriptions, et qu'il ait faitensuite
docirine, il a ressuscité des morts, guéri des un ouvrage exprès pour le réfuter. — 3° Il est
malades, prédit l'avenir; comme sM n'était bien vrai que les montanistcs sont mis dans
pas que plusieurs viemlront opérant de
»>crit ce Calaloi:ue au nombre des hérétiques, mais
grandes meiveilles, pour appuyer la fausseté leurs erreurs n'y sont pas réfutées; de sorte
Cap. XLV.
de leur prédication? «A la lin de cet oiivraf>e, qu'on ne peut guère y rapporter ce que dit
l'auteur promet des traités particuliers contre saint Augustin. Il est plus vraisemblable qu'il
certains par ces paroles
hérétiques, et finit : a voulu indiquer les livres de Tertullien à sa
a La paix et la grâce de notre Seigneur Jé^us- Femme, où il reconnaît pour légitimes les
Clirist soient à jamais avec ceux <iui liront ceci secondes noces; ce que niaient les monta-
dans la vérité de la foi. » nistes.
Cataloene Id^ede
d«s béieti- manière de parler ordinaire à ceux
13. Cette 1 4. Quoiqu'il en soit,rau4eur de ce Catalogue, Catalogii
qnes L". u-
teur en est qui finissent un ouvrage, fait croire, avec assez en passant s(ms silence les hérétiques sortis de
iucertaiD.
de fo:idenient,que leciitalogue des liéréliques, la Synagogue des Juifs, comme DosithéedeSa-
imprimé à la fin du livre des Prescriptions, est marie,le premiert|ui avait osé nieri'insi)iration
une pièce ajoutée en effet, il ne se trouve pas
:
des P.'"opliéles; les sadducéeus, les pharisiens,
dans l'exemplaire d'Agobard, qui est très-an- les hérodieus, traite de ceux qui avaient paru
'
Lib
cien. Maisonle dans d'autres manuscrits,
voit depuis l'Evangile. Il met à la tête Simon le Prsescrii
cap. XLYJ
quoi(jue placé «lifféremment, tantôt au com- Magicien, ensuite Ménandre, Saturnin, Basi- seq.
mencement du livre des Prescriptions, tantôt liile, Nicolas, un des sept diacres, les opliitcs,
à la fin. Aussi les sentiments, ausujetde l'au- Carpocrate,Cériuthe,
les cainites, les sélhiens,
teur de ce Catalogue, sont-ds partagés. Quel- Ebiou, ValentiU, Ptolomée, Second, Héracléon,
ques-uns l'atti jhuent à Terluliien , fondés Marc, Colorbase, Cerdon, Marcion, Lucain,
princii)alement sur ce que dit de hii saint Apelles, Tatien , les catai)hryges , dont les
Augustin, qu'étant pas^é du côté des cata- uns étaieut disciples de Proculus,et les autres
phryges'ou des montanisles,qu'"il avaitd'ahord d'iE-chines; en dernier heu, Blaslc, Théodore
combattus, il s'était déclaré contre les secon- de Bysauoe, Praxéas et Victorin. Le portrait
des noces, quoique permises, sepmla doctrine qu'il fait de ces hérétiques est peu d;fîerent
de l'Apôtn;; car il ne parait pas que Tertullien de celui que saint Irénée nous en alai-sé dans
ait réfuté ces héiéticjues ailleurs que dans le son premier livre contre Les Hérésies; ainsi l'on
Catalogue dont il s'agit. D'autres prétendent peut y avoir recours. Il y en a,toutefois,quel-
qu'il n'est pas deTertuUien, et ils en donnent ques-uns des derniers nommés qui ne s'y trou-
des raisons plausibles; lesvoici. — d" L'auteur vent pas. Mais nous aurons occasion d'en
de ce Catalogue nous apprend que Maicion parler dans la suite, à l'exception de Victorin,
fut chassé de l'Eglise pour avoir corrompu qui est entièrement inconnu.
une vierge cependant Tertullien,qui n'aurait
:
^ Tertullianus fr onsiem odcntnphryjas, quos rni matjistri Alexandriam secessit. Lib. adv. Marc,
ante destruxcrai. cœjdt etium secundas nuplms contra cap. i.
aposlolicam doctrinam tanquam stupra damriure. Ans-, ' Selon l'auteur du catalogue, les bérodiens se
lib de Hœr.Jiter 86. nommaient ainsi, parce qu'ils reconnaissaient Hérode
* Si et Apellis stemma retractandum est tam vêtus pour le Christ, prœtermitto pharisœos cum fiis
ipse,quam Marcion institutor. Sed lapsus m feminam, etiatn herodianos,qui CkristumHerodem esse dixerunt
comme ou le approuve * la
voit en ce qu'il des martyrs Scillitains, que la persécution
fuite dans la persécution, et par les grands commença en AJrique.On pourrait néanmoins
sentiments (rhumilité qu'il y montre ; car il former quehiiie ditïiculté sur ce que l'auteur
y parle de lui-même comme d'un homme cite dans cet ouvrage ses livres contre Mar-
dénué de tout bien et témoigne n'entrepren-
, cion; mais ii faut remarquer qu'avant ceux
dre qu'avec peine de parler de la patience, qui nous restent aujourd'hui et qui ne paru-
depenr, que mesa.;tions ne démentent
dit-il, rent que vers 207^ Tertullien en avait * com-
mes paroles. Entré en matière, il prouve posé, contre ce même hérétique, deux autres
la nécessité de cette vertu, propose pour mo- que nous n'avons plus ^. Celui dont il s'agit
dèle non les philosophes, mais Dieu même, n'est souillé d'aucune des erreurs de Montan;
qui fait part de ses dons à ceux qui en sont au contraire,rauteur y reconnaît « que Jésus-
hidignes comme à ceux qui en sont dignes; Christ, donnant à saint Pierre les clefs du
qui a bien voulu naître d'une femme, qui s'est royaume des Cieux, c'est-à-dire, la puissance
laissé couronner iiidignemeut et qui a consenti de lier et de délier, les avait aussi données
à mourir sur la croixdu supplice des scélérats. par lui à l'Eglise; ce qu'il nia depuis, quand il
Tous ces exemples et baucoup d'autres qu'il fut devenu moutaniste '. Saint Jérôme parle
nous a donnés, montrent que la patience est avec éloge du Scorpiaque, et il le cite contre^
l'essentiel de la nature divine. C'est par Vigilance, pour autoriser le culte que l'on
Lib. de
l'impatience que le premier homme se sépara rendait, aux reliques des martyrs. En effet, Scorp , cap.
1, paj.îSS.
de Dieu, que Cain tua son frère, que les Is- TertuUien l'avait écrit contre les valentiniens
raélites adorèrent les idoles et qu'ils firent et autres gnostiques; eu particulier, contre les
mourir les Prophètes, Au contraire, la patience caïnites qui tous niaient la nécessité du mar-
éprouve notre foi, comme elle éprouva celle tyre. Il donna à son ouvrage le litre de Scor-
d'Abraham en le disposant à sacrifier son fils piaque, comme qui dirait: Conlre-poison con-
unique; nous donne Dieu pour Père, sui-
elle tre les piqûres des scorpions ,
parce que
vant ces paroles de Jésus-Christ: «Priez pour les hérétiques, profitant du trouble que la vio-
vosperséciitet!rs,afinaue vous soyez les enfants lence de la persécution apportait dans r£-
de votre Père céleste.» Il montre ensuite qu'un glise, tâchai(uit de persuader aux simples que,
chiétien ne peut jamais avoir de justes raisons Jésus-Christ ayant souffert pour nous déli-
de s'impatienter, perde ses biens, soit
soit qu'il vrer de la mort, le martyre était inutile; en
qu'on l'attaque dans son honneur, soit qu'il lui quoi ils imitaient les scorpions qui répan-
arrive qaelqu'autre accident semblable. Enfin, dent leur venni pendant la plus grands cha-
après avoir fait un grand éloge de la patience leur de l'été.
chrétienne, il finit en la distinguant de celle des 3.Pourprouver que le martyre est agréable Gap, n et
111.
païens, qui les rendait esclaves de leurs fem- à Dieu, l'auteur rapporte plusieurs endroits
mes ou qui en faisait d'infàrnes parasites, à de l'Écriture où l'idolâtrie est condamnée et
l'épreuve de toutes les indignités qu'on pou- punie de la peine de mort; d'où il suit que le
vait leur faire suuft'rir '. martyre estni'cnssaire, comme le seul remède
2. La persécution était ' violente à Rome, contre l'idolâtrie. Il montre la bonté du mar- Iv et r.
mais elle ne se faisait pas encore sentir en tyre, parce que Dieu, qui le commande, est
Afrique,lorsqueTertullienfit paraîlres on livre bon, parce qu'il est opposé à un mal, savoir
Scorpiaque ; ainsi on peut en fixer l'époque
(\\\ à l'idolâtrie, et que ce qu'il a de rigoureux
vers l'an de Jésus-Christ 200, puisque ce fut nous est salutaire. La fin en est bonne, puis- vi
en cette année, comme le témoignent les Actes qu'il nous donne la victoire sur le diable, qui
1 Si fuga urgeat, adversu3 incommoda fugae caro nata venatio, de longinquo obsidemur. Tertull., lib. de
militât, patientiae viribus. Tertull., lib. de Patient., Scorpiac, cap. 1. * —
Idem, lib. I adv. Marcion.,
cap. 13. cap. 1.
* Cet ouvra/^e est écrit du ton le plusdoux, leplus D'autres prétendent que cet écrit est venu après
^
modéré, le plus agréable, et TertuUien s'est surpassé la chute do TertuUien: il est certain qu'il respire par-
lui-même. [Véditeur.) tout une excessive rigueur. [L'éditeur.)
3 Nunc prœserdia rerum est medtus ardor, ipsa ca- 6 Si ad/mc c/ausum pntas cœlum , mémento claves
niculu persecutionis ab ipw scilicet Cynocepfialo. Alios ejus hic Dominum Petro, et per eum Lcclesiœ reli-
ignis, alios r/ladius, alios bestiœ Christianos probaue- quisse. Tertull., lib. de Scorpiac, cap. 10.
runt. Alii fustibus intérim et ungulis insuper deyustata >
Idem, lib. de Pudicit., cap. 21, — s
Hieronym,,
martyria in carcere esuriunt. Nos ipsi ut lepores desti' m Vigilant., pag. 285.
20 HISTOIRE r,Iî:NÉRALE DES AUTEURS ECCTJ'SIASTI QUES.
est notre ennemi. Les gens du siècle s'exer- confession, c'est-à-dire, snr la terre. Autre-
centà la lutte dans la paix lu plus jirofonde, ment, il faudra que les clirétiens soient encore
et on propose même un prix pour le victorieux, pcrséciités dans le ciel, pour avoir lieu de nier
sans (pi'un trouve» à reprocher à celui qui ou de confesser Jésus-Chiist. » Il contirme le Caip. xi,
préside à ces exercices d'exposer ics hommes précepte du martyre par plusieurs autres :
rail-il indigne de Dieu, de produire les siens Apôtres, et ajoute que ceux-ci étaient bien
en spectacle aux hommes et aux anges, afin persuadés de la vérité qu'ils enseignaieut, i
de faire éclater leur constance? sans cela, puisqu'ils avaient eux-mêmes scellé leur doc-
comment y uur;iit-il plusieurs demeures dans trinc de leur sang. Parlant des divers genres
pour la diversité des méri-
le ciel, si ce n'est de maux qu'ils avaient soufferts, il dit i que
Dieu avait prévu la chute de
tes? » D'ailleurs, saint Pierre avait été crucifié à Rome, et que j
plusieurs après leur baptême, et, poiir leur saint Paul avait été martyrisé, ou, comme il
j
fournir un second moyeu de salut, il leur a dit plus haut, divisé dans ses membres, sous
accordé le baptême du sang, qui n'est plus en Néron, premier des empereurs qui fit mou-
le
danger d'ètn; souillé : les martyrs y sont lavés Il manjue dans im autre en-
rir les chrétiens.
de toutes leurs fautes, puisqu'ils y laissent leur droit que les païens criaient souvent dans le
propre vie. cirque: « Juscpies à quand souffrira-t-on cette
Cap. T„. A. Mais, disaient les giiostiques. Dieu est troisième espèce, » c'est-à-dire, les chrétiens;
donc homicide, puisqu'il demande le sang des car ils se comptaient eux-mêmes pour la pre-
hommes. —a Oui, répond Tertvdhen,il est ho- mière espèce, et les Juifs pour la seconde,
micide, et il est même plus qu'homicide, .^. Ilya lieu de s'étonner qu'un nouvel* d,.Tl,ùl
puisqu'il tue ses propres enfants. Mais, ô non- écrivain ait voulu ôter à Tertidlien les deux
veau genre de parricide il ne tue que pour ! livres aux Gentils, puisque saint ' .^érôme et
empêcher de mourir ; d'où vient que nous saint * Augustin les lui attribuent expres-
célebrons avec joie la mort des martyrs. Que sèment, et qu'ils se trouvent sous son nom
ne puis-je moi-même mourir ainsi, afin de dans l'ancien manuscrit d'Agobard et dans un
T«i. devenir son fils! » Il continue à faire voir la autre beaucoup plus correct que j'ai vu dans
nécessité du martyre en montrant (]ue les jus- l'abbaye de Munster, à Luxembourg *. D'ail-
tes ont soullert persécution dès que le culte de leurs le sujet, les preuves, le style, les pàro-
Dieua commeiu'é Abel est mis à mGit,David
: les mêmes, donne tant de res-
toiit cela leur
est persécuté, Elle est chassé, Jèrémie lapidé, semblance avec son Apologétique, que l'on
Zacharie tué. Isaie Jean a la tête coupée,
scié, ne peut douter raisonnablement qu'ils ne
les trois enfants sont mis dans la fournaise, et. soient d'une même main. Pourquoi donc lui
IX. Daniel dans la fosse aux lions. Enfin Jésus- disputer cet ouvrage, sur une simple conjec-
Christ a établi la nécessité du martyre dans ture, qui va également à prouver que l'Apo-
la loi nouvelle,en déclarant qu'd ne co, fes- de lui? Car ne pourrait-on
logctique n'est pas
sera devant son Père que ceux qui l'auront pas dire de ce deruier ce que Hoornebekius
X. confessé devant les hommes. A ce propos l'an- dit*' du premier, qu'il ne paraît pas avoir
teurréfute les rêveries des valenliniens, qui di- Tertullien pour auteur, mais quelqu'un de
saient que la confession commandée par Jésus- ses admirateurs, qui, écrivant sur la même
Chiist ne devait se que les
faire qu'après matière, a voulu imiter son style? Mais ce
âmes seraient sorties des corps, non en pré- style est-il imitable? On dit encore que, dans
sence des hommes, mais devant les puissan- le premier livre' aux Gentils, l'auteur compte
ces qu'ils imaginaient dans les divers étages environ deux cent cinquante ans depuis la
de leur nXr'oeoua. « Il n'est pas écrit, dit-il : naissance <ie Jésus-Christ, tandis que Tertul-
Celui qui me confessera dans le ciel; mais : Où lien en marque environ deux cent soixante
est la percécutiou, là aussi se doit faire la dans son J'raité * de la onoy amie. Celte diUé- M
Quod Petrus cœditur.... quod Paulus distrahitur, « Hoornebekius , lit). I de Theolog. Patrum, cap. 1,
ipsûruTu sanguine script a sunt.... vitas Cœsarum legi- pag. 106.
mus, orientem fidem Roniœ primus Nero cruentavit. 3 Hieronj-rn,. Epist. 83 ad Magn. —
* Augustin.,
tune Petrus ab altero cingitur, cum crucis ndstringi- lib. VII Cit;i7.,cap. î. — ^ Semler avouiu aussi ravir
tur : tune Paulus civitatis Romanœ consequiiur nattvi- cet ouvrage à Tertullicu. {L'éditeur.)
tatem, cum illic martyrii renascitur generositate. ^ Hooroebekius, uiti sup. — ''
Cap. 7.-8 Cap. 3.
rence de calcul prouverait quelque cho.^e si l'on fére de là la nécessité d'adoucir celle qui or-
supposait que ces ouvrages ont été écrits en donnait do punir les chrétiens sans autre
même temps, ou bien si l'auteur se suivait lui- prouve. Venant ensuite aux crimes d'inceste Cap. vu.
même clans sa manière de calculer; mais, dans et de repas de chair humaine, que l'on re-
le même livreoù il écrit qu'il n'y a pas encore piocliait aux chrétiens, il montre que ces
deux cent cinquante ans depuis la naissance de accusations ne sont i'ondées que sur des bruits
Jésus-Christ , il ne fait pas difficulté de dire populaires, et défie les païens d'en apporter
ensuite que '
l'ancienneté de la religion clivé- aucune preuve ; il ajoute qu'il n'était pas
tieune ne remontait pas encore jusqu'à trois croyable qu'une religion qui promettait la
cents ans. vie éternelle à ses sectateurs et qui mena-
6. Les deux livres a?.'a?ut'nif<7s parurent à peu çait les profanes de supplices sans fin, se
près en même temps que ['Apologétique, vex's souillât de pareilles abominations. Il tourne thi
l'an 200; ce qui le prouve, c'est que la défaite en ridicule un conte des païens, qu'un enfant
de Peseennius Niger et d'Albin , qui se révol- élevé par une femme muette prononçait
tèrent sous Sévère, et dont le prcinier fut dé- pour première parole Bekko? , c'est-à-dire, en
faiten Syrie, et l'autre dans les Gaules, près langue phrygienne, pain; d'où ils concluaient
de Lyon, y est représentée * comme toute ré- que les Phrygiens étaient la première espèce
cente. Il y a, toutefois, lieu de croire que les d'hommes, et par conséquent beaucoup plus
deux livres aux Geniils précédèrent VApolo- anciens que les chrétieus,qu'ils ne comptaient
géiique.— 1° Tertullien promet' dans ces li- que pour la troisième.
vres de traiter ailleurs le dugnie de la résur- 8. On réjetait ordinairement sur les chrétiens ix.
rection.— 2°.Après avoir détruit les calomnies la cause de toutes les calamités publiques ;
des païens contre les chrétiens, il s'oblige * à Tertullien fait tomber ce reproche sur les
prouver encore ailleurs la fausseté de ces païens elles accuse d'avoir eux-mêmes aban-
accusations . — dans un autre
3° Il dit *
donné la religion de leurs pères. Il attaque x.
poètes ont chanté de leurs dieux n'est que , que les chrétiens n'étaient pas les seuls qui
fable. —
4" Il promet ^ de convaincre les leur eussent rehisé le culte profane et bizarre
païens du même crime dont ils accusaient qu'on leur rendait. Les Romains eux-mêmes,
les chrétiens c'est -à- dire, de tuer leurs
, et ceux qui les avaient précédés, avaient fait
propres enfants. Or, on trouve toutes ces ma- paraître en plusieurs occasions le peu de cas
tières traitées dans di-vers endroits de V Apo- qu'ils faisaient de ces divinités sans nombre ;
logétique ''.
à ce propos,il rapporte les bons mots de leurs
donc mettre ces deux livres de
7. 11 faut philosophes et la manière peu respectueuse
Tertullien vers l'an 208. Le but de l'auteur dont Homère et les poètes qui l'ont suivi ont
est d'y justifier l'innocence des chrétiens ; il parlé des dieux, quand il les représentent
reproche aux païens qu'ils n'agissaient con- comme des hommcG sujets aux passions et aux
tre eux que par haine, qu'ils les traînaient en accidentsde cette vie. Il justifie desuite leschré- xi»t soq.
justice et les condamnaient seulement à cause tiens, sur le reproche qu'on leur faisait d'avoir
de leur nom, sans vouloir les écouter; il avoue pour dieu une tête d'àne et d'adorer le soleil;
que les mœurs des chrétiens n'étaient pas puis, après avoir chargé les pfiïens des crimes xTctxvi.
également pures et que quelques-uns se d'inceste, d'homicide de leurs propres enfants
laissaient aller à l'avarice et à l'impureté ; et de lèse-majesté, dont ils accusaient les
mais il soutient que l'on ne devait pas faire chrétiens, il défend même ces derniers sur
retomber sur tous la kaine de ces crimes, leur constance dans les tourments; car on leur xvn,
puiscjue tous n'en étaient pas coupables, ni en encore un crime. Il fait vo'.r qu'elle xvmetxix
faisait
YI. même le plus grand nombre. Il cite les lois non d'une sotte vanité, mais de
était l'effet
des empereurs, qui défendaient de condam- l'espérance certaine qu'ils avaient de la ré-
ner quelqu'un sans l'avoir convaincu; et in- surrection et de la récompense qu'ils atten-
*
ce qu'il avance au sujet des dieux des philo- sus-Christ 200, lorsque Sévère était encore
5
sophes, il rapporte les opinions différentes de occupé à poursuivre ceux qui avaient favorisé
la plupart d'eiitre eux sur la divinité ; d'où il la révolte de Niger et d'Albin. On quecroit
conclutqu'ils l'ont ignorée, ou du moins qu'ils Tertullien l'écrivit à Carthage ; au moins ne
'^' n'en ont pas été persuadés. Il poursuit sa cri- fut-ce pas à Rome, puisqu'après " avoir rap-
tique sur ' l'origine des dieux en général, et porté les iiihumanités qui se commettaient
ne manque pas de relever,coinme une impiété dans cette ville en l'honneur de Jupiter, et la
envers eux, la différence que Varron faisait coutume barbare des Scythes de dévorer leurs
xei seq.
^leg dieux douteux et des dieux choisis. Puis, propres parents après leur moi t, il ajoute :
venant en particulier à ceux qui étaient ado- « JNlais il ne faut pas aller si loin, nous avons
rés chez les Romains, il montre qu'ils n'é- au milieu de nous l'usage de ces cérémonies
taient que des hommes, et décrit leur nais- barbares. Les prêtres de Bellone,qui répandent
sance, leurs mariages, leurs généalogies, leurs leur propre sang pour le consacrer à cette
actions, le tout d'un style moqueur et pi- déesse, après l'avoir recueilli dans lecreuxde
quant. son récit du témoignage
Il apj)uie la main, le donnent à ceux qui participent à
d'une ancienne Sibylle, très-célèbre chez les leurs mystères. » Cnmmp_La persi^cul inn était
païens, qui avait écrit l'origine de Saturne. géiiéralCjiiljîSt^à croire qa'ii adi!cssa son apo-
Cela supposé, prouve qu'ils n'ont rien fait
il l ogie à tous les magistrats de l'entpire. En
qui doive honorer comme dieux après
les faire effet,en quelques endroits il parle " aux séna-
**'• leur mort. Les iiaïens prétendaient, au con- teurs romains; ailleurs,il fait mention des pro-
traire, qu'ils avaient mérité cet lionneur, soit consuls ', qui n'étaient certainement que pour
pour avoir mis au jour plusieurs choses né- les provinces; et c'est sans doute au commun
cessaires à la vie, soit pour avoir accru la di- des magistrats qu'il s'adresse, lorsqu'ayant re-
gnité de l'empire romain. « Pourquoi donc, présenté que les lois ordonnaient <Ie découvrir
répond Tertullien, n'avez-vous pas rendu ce les méchants et non pas de les cacher, il
même honneur à Gaton, qui apporta à Rome ajoute »: « Ce sont les règles établies parl'au-
' Il dit que c'était le patriarche Joseph, que les et qui nunc scelestarum partium socii aut plavsores
Egyptien? adoraient sous le nom du grand dieu Sé- quotidie revelantur, post oindemiam parricidarum va-
rapis. Lib. II ad. Gent., cap. 8. cer/iatio supersles, quam recentissimis et ramosissimis
* Cet ouvrage est, comme [' Aploogétique , rédigé laureis posfei prœst)'vebQ7it.Apo\og.,cap. 35. Au reste,
avec péuélraliou, esprit et chaleur. 'L'éditeur.) quoique Sévère ne fût pas alors à Rome, mais oc-
* Tertullien, ayant adressé l'Apologétique au sénat, cupé à la guerre de Syrie, on ne laissait pas de re-
aux gouverneurs des provinces et autres magistrats chercher par son ordre les restes des conjurés qui
de l'empire ne peut ra%oir écrite avant l'an 200 de
, s'étaient Joints h Pesceunius Niger Inter fuec, dit:
Jésus-Christ, parce que Saturnin, proconsul d'Afri- Spartien,ri<. Set'.,pag. 6!i,Pencennianas reliquias,au(>
que en cette année, est le premier qui ait répandu tore Plautiano.perscquebatur.
le saug des chrétiens. * TertuU., Apolog., cap. 9. — « Ibid., cap. 21. —
* C'est le sens de ces paroles de Tertullien : Sed ''
Ibid., cap. 45. — * Ibid., cap. ult.
1
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE L — TERTULLIEN. 23
torité de votre sénat et par les constitutions cher notre vie car Pline II, gouverneur de
;
de vos princes; ce sont les maximes qui .«ont l'Asie après avoir condamné à mort plu-
,
en usage dans l'exerciee de la puissance dont sieurs chrétiens, étoimé de ce que sa sévérité
vous êtes les ministres; car l'autorité de votre n'ea faisait pas diminuer le noml)re, consulta
magistiature est légitime, et non pas tyrauni- Trajan pour savoir de quelle façon il devait
qiîeT"» Lois donc qu'Euscbe dit ' que cette se gouverner à leur égard il lui mandait, :
apologie fut adressée au Sénat romain, il faut qu'outre leur ferme résolution de ne point sa-
entendre qu'elle lui fut adressée [irincipale- crifier aux dieux, il n'avait découvert autre
meat comme étant le corps le plus respecté chose de leur religion , sinon qu'ils s'assem-
et le plus considérable dans l'empire, duquel blaient avant le jour pour chanter les louanges
on tirait ordinairement des gouverneurs et de Jésus-Christ et de Dieu, et pour s'exciter
des préfets pour les autres |irovinces. mutuellement à conserver la discipline établie
2. Plusieurs croieni que Tertullieu n'avait pas parmi eux. Trajan répondit ne fallait
qu'il
mis son nom à cet ouvrage, parce qu'il n'était point rechercher ces sortes de gens, mais
pas permis ^ aux chi'étieus de se défendre eu qu'il était à propos de les punir lorsqu'ils se-
public; mais cette raison n'est pas convain- raient déférés en justice. « jugemeutenve-
cante,puisqu'il a mis son nom à la tète de ses loppé dans une confusion nécessaire s'écrie !
livres aux Gentils et de son livre « Scapula, TertuUien: «Si vous jugez que nous méritons
où il entreprend également la défense des d'être punis, pourquoi n'upprouvez-vous pas
chrétiens. Quoi qu'il en soit, Lactance, Eusébe que l'on recherche notre vie? Cette passion
et saint Jérôme citent V Apologétique sous le injuste qui vous trouble si malheureusement
nom de TertuUien; et, dans des manuscrits la raison, vous doit être suspecte et doit vous
très -anciens, elle porte son nom. Cette pièce a faire penser y a quelque violence secrète
qu'il
été si estimée que, dès le temps d'Eusèbe, on qui agit dans vos esprits et qui vous fait pro-
l'avait déjà traduite du latin en grec. 11 serait céder, en notre cause, contre l'ordre et la na-
seulement à souhaiter qu'il y eût un peu plus ture des jugements, et contre les lois. »
d'arrangement dans les matières. Du reste, 4. La haine du nom chrétien était telle chez Cap. in.
l'auteur y fait paraître partout beaucoup de les païens, que, lors même qu'ils étaient obli-
modestie et d'humilité, et on n'y voit rien qui gés de rendre témoignage à la probité d'un
ne soitdigne d'un écrivain catholique s, clii'étien, ne manquaient pas d'y mêler
ils
3. Comme on avait ôté aux chrétiens la li- quelque reproche contre son nom: «Un tel est
berté de se défendre devant les juges, Tertul- homme de bien, disaient-ils; c'est dommage
lieu entreprend de prouver leur innocence qu'il soit chrétien.» TertuUien montre donc :
par écrit. D'abord il se plaint de ce qu'on con- 1» que le nom seul ne peut être criminel
;
damnait les chrétiens sans vouloir les enten- 2° que celui de chrétien n'a rien de barbare,
dre; «caril est cerlain,dit-il,que l'aversionque rien de déshonnête ou de mauvais augure
l'on avaitpour eux était fondée seulement sur dans sa signification ; 3° qu'il est inoui qu'on
l'ignorance où l'on était de leurs maximes et ait jamais condamné aucune secte pour le
de leur discipline.» 11 se plaint encore de ce nom seulement. Quant aux lois qu'on oppo-
que l'on renversait l'ordre naturel de la jus- sait aux ciirétiens, il rappelle que les lois hu-
tice dans leur cause. Tout autre accusé peut maines sont faillibles: pour preuve, il en cite
se défendre par la bouche d'un avocat et plusieurs qu'ils avaient eux-mêmes abrogées,
prendre son conseil on ne le condamne qu'a-
: et il ajoute que ce n'est ni l'antiquité des lois,
près un mùr examen du crime et de ses cir- ni la dignité de leur auteur qui les rend re-
constances. Les chrétiens sont les seuls à qui commandables, mais la justice seule. Quelle
d'informer les juges des cho-
l'on ôte la liberté que soit leur autorité, si elles sont reconnues
ses qu'ils doivent nécessairement savoir pour pour injustes, on a raison de les rejeter. Il
que leurs jugements ne puissent être accusés ne suffît pas même que la loi soit juste, il
d'injustice. La confession de notre nom suffît faut de plus qu'elle soit reconnue pour telle
pour nous faire condamner; elle seule nous par ceux à qui elle s'adresse, pour les obliger
expose à la haine publique. Nous lisous à s'y soumet tie. Il fait voir ensuite que les t.
même qu'il a,autrefois, été défendu de reclier- plus sages des empereurs avaient été favora-
* Euseb., lib. V Hist., cap. 5.— * Apolog., cap. 1. sur la vie des premiers chrétiens et sur l'organisa*
s Cet ouvrage est riche en remarques intéressantes lion de l'Église primitive. {L'éditeur.)
21 HISTUIHK r.ÉNÉHALt; DES AlJTElJFiS KCCLt'SlASTIQUES.
bles aux chrëtioiis. «Tibère, tlit-il, sous le- des boudins de saniç d'animaux, comme
faits
quel le nom
de cbn^tien commenc^a à se l'aire étant bien inlormés que les choses dans les-
connaitre, ayant ai)piis,i)ar les avis quilui Al- quelles lis les accusaient de pécher, étaient
Cap, II.
reni ilonnés de Palestine, les merveilles que très-élroitcment délendues parmi eux. Sur les
Jésus-Chri-t y avait opérées, et (pii étaient incesles dont on les cbarf^eait, il dit que la
des j)rcuves de sa divinité, proposa au Sénat chasteté exacte dont ils faisaient profession,
de le recevoir au uonibre des dieux; le Sénat les mettait à couvert de ces désordres; pour
rejeta la proposition ; mais Tibère demeura les éviter plus sûrement, plusieurs vivaient
ferme dans sa résolution, i\t menaça de punir dans la virginité, jusqu'à la vieillesse la plus
ceux qui entrepren«lraienl d'accuser les chré- avancée, et conservaient dans cet âge l'iimo-
tiens. Lisez vos registres, vous
y apprendrez cence de l'enfance: en même temps il charge
que Néron premier des empereurs qui
est le lespaiens des mêmes crimes qu'ils reprochaient
ait pei'séciité notre religion ; Domitien entre- si injustement aux chiétiens. Puis il vient aux *
piit la même chose, mais il se porta de lui- accusations plus manifiîstes, et dont les chré-
mème à nous rendre la paix qu'il nous avait tiens ne se défendaient pas: on les accusait de
ôtée, et rappela ceux (ju'il avait bannis. En- ne point adorer les dieux et de ne point leur
fin nous n'avons jamais été poursuivis que par oilVir des sacrifices pour les empereurs; les
des princes dont vous condamnez vous-mêmes païens traitaient l'un d'impiété et l'autre de
la mémoire et les actions. Au contraire, ceux crime delést-majesté.
qui, i)ar la vertu, se sont acquis l'amour des G. Tertullien détruit le preniierclief enfai-
peuples, nous ont été favorables. Marc-An- sant voir que les dieux étaient indignes du culte
rèle, prince très-sage, a été notre protecteur, qu'on exigeait des chrétiens; qu'ils n'étaient
comme on peut le voir par les lettres qu'il que des hommes dont la naissance, les actions
écrivit au sujet de l'extrèine incommodité que et même le lieu de la sépulture étaient connus;
souflfrit son armée pendant qu'il faisait la ce qu'il prouve en particulier de Saturne et
guerre en Germanie. Il y témoigne que les de Jupiter, dont il rapporte l'histoire, sur le
soMals chrétiens qui étaient dans ses troupes, témoignage des plus anciens historiens du
avaient obtenu du ciel cotte pluie favorable paganisme et sur les monuments publics que
qui éteignit la soif dentelles étaient pressées. l'on conservait en Italie. 11 ajoute qu'après xicts
Quelles sont donc, ajoute-t-il, ces lois que les leur mort les peuples s'étaient accordés à leur
impies seuls font valoir contre nous? Trajan les rendre les honneurs divins, mais sans avoir
arenversées en partie, et on ne voit pas qu'elles aucun égard au mérite, puisqu'ils laissaient
aient été confirmées par Adrien, par Vespa- dans les enfers des personnages beaucoup plus
sien,parAntonin le Pieux, niparMarc-Aurèle.» célèbres: un Socrate, un Aristide, unThémis-
Cap.yi. Les i)aiens prétendaient avoir droit de
5. tocleet tant d'autres si fameux pour leursgran-
pérsécuter la religion chrétienne, parce qu'elle des qualités; tandis qu'ils adoraient une
était contraire à celle des anciens. Tertullien Tarentine , femme publique et un Simon ,
détruit ce prétexte et fait voir que les païens magicien, au(]uel ils avaient dressé une statue
eux-mêmes n'étaient pas si scrupuleux à l'é- avec cette inscription: Le Dieu saint. Quant
gard des anciennes lois, qui retranchaient les aux idoles, elles ne sont dignes que d'un
dépenses superflues, l'ambition, le vin, le di- extrême mépi-is; les païens eux-mêmes n'en
vorce, les superstitions vaines et déshonnêtes, faisaient pas grand cas, puisqu'ils ne leur of-
et décrit au loîig le faste et le luxe des Romains fraient, pour l'ordinaire, que les extrémités
de son temps, si peu conformes à la simplicité inutiles des victimes et ce qu'ils avaient de
et à la frugalité de leurs pères. Il vient aux plus mauvais; ce mépris des dieux paraissait
calomnies des enfants tués, des repas de chair partout dans leurs poètes dans leurs philoso-
,
humaine et des incestes, et montre que non- phes, mais surtoutdans les spectacles publics,
seulement on n'en a point de i»reuves, mais où ils représentaient librement les actions les
que ces accusations ne sont pas même vrai- plus honteuses de leurs divinités; jusque dans
semblables ; les chrétiens sont si éloignés les temples, commettait des adultères et
il se
de se souiller de sang humain, qu'ils s'abs- autres actions encore plus criminelles: il nest
tiennent même dans leurs repas de celui des donc pas aisé de décider de qui les dieux doi-
animaux; ce que les païens n'ignoraient pas, vent plus se plaindre, ou des païens ou des
puisqu'entre les épreuvesqu'ils faisaient pour chrétiens,
connaître les chrétiens, ils leur présentaient 7. Les païens, de leur côté, reprochaient aux xti.
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE 1. TERTULLIEN. 25
chrétiens d'adorer une lète d'àne ; et, depuis est le seulDieu qui doit un jour récompenser
peu, un misci-able du nombre de ceux qui se ses adorateurs de la vie éternelle, et punir
louaient pour combattre les bêtes, avait ex- les infidèles d'un feu qui ne finira jamais,
posé à Cai'thage un tableau avec cette ins- après qu'il aura ressuscité tous ceux qui sont
cription Le Dieu des chrédem, race d'une. Il
:
morts dès le commencement. Ces hommes
avait des oreilles d'àne, un pied rond, un li- inspirés se nomment prophètes, et leurs li-
vre à la main, un manteau à la romaine. vres ont été traduits de ITiebreu en grec par
Voici, selon TertuUien, ce qui avait donné du plus savant des Ptolémées, sur-
les soins
occasion à cette fable. Corneille Tacite, dans nommé Pbiladelphe on montre encore au-
:
les passions et les préjugés d'une fausse reli- en qualité d'étrangers. La sainte parole qui
gion, toutes les fois quelle rentre en elle- leur avait prédit ces malheurs leur marquait
même, le nomme par le seul nom de Dieu : en même temps que, vers la fin des siècles.
Grand Dieu bon Dieu ce qui plaira à Dieu ;
! ! Dieu se choisirait de toutes les nations, de
Dieu le voit ; je le recommande à Dieu'; Dieu tous les peuples et de tous les lieux,des ado-
me le rendra. Témoignage de l'âme naturel- rateurs plus fidèles, sur lesquels il répandrait
lement chrétienne ; et, en disant cela, elle ne une plus grande abondance de grâces, à pro-
xviii. regarde pas le Capitule, mais le ciel. Pour portion du mérite de celui qui devait être
nous faire connaître ses volontés et se mani- leur Chef et leur iMaître, c'est-à-Jire, de Jé-
fester à nous. Dieu nous a donné le secours sus-Christ, Fils de Dieu, ce Messie si long-
des Ecritures, et il a envoyé des hommes temps désiré des Juits, mais que leur aveu-
rempUs du Saint-Esprit, afin d'auuoncer qu'il glement leur a fait méconnaître, tellement
26 jnSTOlRE GÉNÉUALE DES AUTEURS ECCLÉSIAST[QUES.
qu'ils sont encore dans l'attente de son arri- qui font leur séjour dans l'air, connaissant,
véo. A celte occasion, Tei tulli-n t'Xi)li(juo la par le voisinage des astr.'s et par la proxi-
nature du A'eihe, sa {génération, son unité mité des nuages, la disposition des cieux,
de substance avec le Père. Il établit claire- promettent aux liommes les pluies qui sont
ment sa ilivinité, son incarnalion.et rapporte prêtes à tomber et qu'ils sentent déjà lors-
ensuite SCS miiacles, les persécutions (piïl qu'ils les promettent. Certes, il faut avouer
mort
avait soullertes de la part des Juifs, sa qu'ils sont d'un grand secours dans les ma-
et les merveilles qui raccompagnèrent, et ladies ; comme ce sont eux qui font le mal,
qui i)arurent si remarquables, même aux après que l'on s'est servi des remèdes qu'ils
païens, qu'on en inséra la relation dans les ordonnent, ils cessent d'affliger les corps, et
archives de la ville de Rome. Il marque en- alorson croit qu'ils les ont guéris. Par ces
core sa résurrection et son ascension ;
puis moyens, ils ont autorisé l'idolâtrie et se sont
il cœur,
ajoute: «Pilate, déjà chrétien dans le faiteux-mêmes adorer comme des dieux.
donna avis à Tibère, qui régnait alors, de Mais que l'on amène ici devant vos tribunaux
tout ce qui ccmcernait Jésus-Christ : les em- quelqu'un qui soit reconnu pour possédé du
pereurs métnes y auraient cru, s'ils n'étaient démon ; que le premier venu des chrétiens
pas nécessairesau monde, ou s'ils pouvaient commande à cet esprit de parler, il avouera
être empereurs et chrétiens. » qu'il est véritablement un démon, et qu'ail-
9. Après avoir établi la vérité du Christia- il se dit faussement
leurs un dieu. Que l'on Cap, xxm.
nisme, il passe à l'origine des fausses reli- amèno encore quelqu'un de ceux que l'on
gions, qu'il attribue aux ruses et aux artifi- croit être agités par quelque dieu; qui, ou-
ces des démons. Il décrit ainsi les opérations vrant la bouche sur les autels, reçoit la divi-
et la nature de ces esprits :« Ils n'agissent, nité avec la fumée ;
qui parle avec effort et
dit-il, sur les hommes que pour les perdre ; comme hors d'haleine ceux qui l'agitent
: si
ils affligent les corps de maladies et les iont ne confessent qu'ils sont des démons^ n'osant
tomber dans de fâcheux accidents ; ils exci- pas mentir à un chrétien, répandez sur-le-
tent aussi dans les âmos<ies troubles violents cbarap le .sang de ce chrétien téméraire. »
et des agitations extraordinaires; ils leur ins- Et ensuite « Quand nous conjurons vos
:
pirent des pensées folles et honteuses, et les dieux au nom de Jésus-Christ, demandent-ils
entraînent dans une infinité d'erreurs, dont qui est ce Jésus-Christ? nomment-ils fable
la principale est le culte des faux dieux. Voici l'histoire de sa vie? disent-ils qu'il était homme
par quelle voie ils trompent les hommes : de même condition que les autres? qu'il était
Tout esprit est agile comme un oiseau ; et, magicien ? qu'après sa mort ses disciples ont
parce que les anges et les démons sont des enlevé secrètement son corps du tombeau, et
esprits, ils se trouvent en un moment partout qu'il est maintenant dans les enfers? Ne di-
où ils veulent. De cette sorte, il leur est aisé sent-ils pas plutôt (ju'il est dans les cieux,
de savoir ce qui se fait par toute la terre ; ils qu'il en doit descendre avec l'eiïroi de tout
l'annoncent sans délai, et c'est ce qui les fait le monde, avec l'horreur de l'univers, avec
passer pour des dieux, parce que l'on ignore les larmes de tous les hommes, excepté des
la nature de leur substance. Ainsi ils veulent chrétiens, et qu'il viendra sur la terre tout
souvent paraitre auteurs de ce qu'ils annon- plein de majesté, comme la vertu de Dieu,
cent; et, en effet, i!s le sont quelquefois du l'esprit de Dieu, le Verbe, la sagesse, la rai-
mal, mais jamais du bien. D'adleurs, ils ap- son et le Fils de Dieu? Or, c'est Jésus-Christ
prenaient autrefois de la bouche des Prophè- qui nous donne cette puissance sur eux;
tes les choses que la Providence éternelle comme ils le craigent, ils sont soumis aux or-
avait arrêtées, et maintenant ils les puisent dres de ses serviteurs ; de sorte que, par le
dans les Ecritures saintes; c'est de là qu'ils .seulat'ouchement de nos mains, par le seul
tirent les conjectures sur lesquelles ils jugent souffle de notre bouche, les démons, saisis
de l'avenir. Ils y remarquent les changements d'épouvante à la vue des flammes qui les en-
arrivés dans la suite des temps, et ils tâchent vironnent, sont contraints de nous obéir, de
de paraitre semblables à Dieu, en faisant des sortir malgré eux et avec plaintes des corps
prédictions dont ils ne sont pas les auteurs. qu'ils possèdent, et de souffrir cette honte en
Ils travaillent surtout à envelopper leurs ora- votre présence. »
cles de termes ambigus, afin de les accom- dO.C'cst ainsique Tertullienjustifie les chré- XXIT.
moder à tout événement. De plus, les démous. tiens du crime de lèse-majesté divine, par le
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 27
témoignage même des faux dieux; car puis- d'injustice à traiter les chrétiens d'ennemis
que^de leur propre aveu, ils ue sout pas dieux, publics, parce qu'ils célébraient les jours de
il n'y a point d'impiété à ne les pas honorer réjouissances plutôt parles sentiments de leur
comme tels. Au contraire, les Romains sont cœur que par débauche, comme si c'eût
la
coupables de ce crime, eux chez qui l'on a droit été donner de grands témoignages d'affection,
c«p. XXV.
^g ^Q^j^ adorer, hors le vrai Dieu. Il réfute que d'allumer des feux au milieu des rues,
ensuite l'erreur des païens, qui attribuaient d'y dresser des tables, de faire des festms dans
aux faux dieux grandeur de l'empire ro-
la les lieux publics, de changer la face de la
main, comme la récompense des honneurs ville en celle d'un cabaret, de répandre le viu
qu'ils y recevaient, et montre que ce vain sur le pavé, et de courir en troupe pour com-
éclat ne leur venait ni des dieux étrangers^ mettre des insolences. Toutes démonstrations
ni des dieux adorés à Rome. Les premiers de joie très-équivoques et qui souvent cou-
n'avaient aucun intérêt d'agrandir les Ro- vraient des résolutions violentes contre les
mains, leurs ennemis; les autres n'ont reçu empereurs mêmes, amsi qu'on l'avait vu tout
de grands honneurs à Rome que depuis l'a- nouvellement dans la révolte de Niger et
grandissement de remjjire. d'Albin, qui sacrifiaient pour l'empereur et
xxTui. 11.11 vient au crimede lèse-majesté humaine juraieutpar son génie au moment qu'ils cher-
si odieux chez les païens, qu'ils se parjuraient chaient les moyens de le dépouiller de l'em-
beaucoup plus volontiers après avoir juré par pire; et plus particulièrement encore en ceux
tous les dieux, que par le seul génie de César. que l'on découvrait tous les jours avoir favo-
Le reproche qu'on en faisait aux chrétiens était risé le parti de ces rebelles, car ils avaient
fondé sur ce qu'ils n'otTraie.it point de sacri- donné des marques d'une joie extraordinaire,
xxu. fices pour empereurs ; c'est pour-
le salut des lorsque Sévère était rentré victorieux dans
quoi ïerlullien montre que ces sacrifices sont Rome, après de Niger et d'Albin. Ce Cap xxxvi.
la défaite
absolument inutiles, et que des hommes morts n'est donc pas,continueTertullien, dans ces de-
ne peuvent cont'ùbuer à la con?ervation des voirs que consistent la pieté la lidéhté et le res-
vivants, eux qui ont besoin de gardes et de pect dus aux empereurs, mais plutôt daus l'e-
soldats pour mettre à couvert d'uisultes leurs xercice des bonnes œuvres que les chrétiens
"*"• statues et leurs teinples . « Nous prions sont tenus de pratiquer, autant pour l'empe-
dit-il, pour le salut aes empereurs, le seul reur en particulier,que pour tout le monde eu
Dieu véritable et éternel empe-
, dont les général. Au reste, leur patience dans la per- xxxvii.
reurs eavent qu'ils ont reçu l'empire. Nous le sédition était une preuve convaincante de
prions les yeux élevés vers le ciel, les mains leur fidélilé; souvent le peuple, sans aucun
étendues, la tète nue, corps chaste, l'âme
le ordre, leur jetait des pierres ou mettait le feu
innocente: voilà la victime qu'il veut qu'on à leurs maisons; dans la fureur des baccha-
''X'"- hd consacre; car il nous est ordonné de prier nal(!S, les païens n'épargnaient pas même les
pour nos persécuteurs, et nommément pour chrétiens morts; ils les tiraient de leurs sépul-
les empereurs, les rois, les princes, les puis- cres et les mettaient en pièces. «Qu'avons-nous
ixxii. sauces. D'ailleurs, nous sommes engagés à fait,dit Tertullien, pour nous venger de tant
faire des vœux pour
conservation de l'em-
la d'injustices? Une seule nuit, avec des flam-
pire, parce que nous savons que la fin du beaux, pourrait nous satisfaire abondamment.
monde, avec les malheurs dont
nous me- elle Si nous voulions vous faire une guerre ou-
nace, est retardée par le cours de l'empire verte, manquerions-nous de forces et de trou-
romain. Nous jurons, non par le génie do pes ? Les Maures les Marcomans , les Parthes
,
César, mais par sa santé, plus auguste que mêmes , ou quelque nation que ce soit, est-
tous les génies, qui ne sont que des démons, elle nombreuse que toutes les nations
plus
xxxiii. En un mot, nous respectons l'empereur, du monde? Nous ne sommes que d'hier, et
d'autant plus que nous savons qu'il est établi nous remplissons tout vos villes, vos îles,
:
par notre Dieu, qu'ainsi il est plus à nous qu'à vos châteaux, vos bourgades, vos camps, vos
xxxiv. vous; néanmoins je ne le nommerai pas dieu, tribus, le palais, le séna', la place ; nous ne
parcequeje ne sais point mentir etquejeleres- vous laissons que vos temples. Ne serions-
pecte trop pour me moquer de lui mais je le : nous pas bien propres à la guerre, même à
nommerai Seigneur, pourvu qu'on ne me con- force inégale, nous qui nous faisons tuer si
traigne pas de dire Seigneur, pour dire Dieu.» volontiers, si ce n'était une de nos maximes
xxxT. 12.11 fait voir ensuite qu'il n'y a pas moins de souffrir la mort plutôt que de la donne? »
28 HISTOIRE GÉNÉRAL!-: DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
il ajoute qu'un nioyon suffisant aux clu-étiens un sujet de nous blâmer. Voyez, disent-ils,
de.sevcuger,s('rait iral)au(loui)(;rr(-ini)ire pour connue ils s'entr'aiment; cela les étonne
[
se retirer en (juelfjue coin du moudi!, et de parce qu'ils se haïssent entre eux. Voyez,
laisser leurs ennemis sous la tyrannie du dé- disent-ils encore, comme ils sont tout piétsà
mon ,
dont ils les délivraient tous les jours mo'irir les uns pour les autres; quanta eux,ils
sans aucune rccoiuiicnse.
sontplusdisposésàs'entre-tuer;etjecroisqu'ils
Cap. mix 13. Poi,.. donnei-
une idée de la religion des trouvent seulement à redire au nom de
frères
chrétiens et montrer que leurs assemblées que nous nous donnons, parce (pie, chez eux,
n'étaient rien moins que lactieuses, il décrit les noms de parenté marquent une
amitié dé-
ce qui s'y passait. Nous faisons, dit-il, un
« guisée. Comme nous n'avons tous qu'un
seul corps, parce que nous avons la même même esprit, nous ne craignons pas de nous
religion , la même
morale les mêmes espé- , communiquer nos biens : tout est commun
rances. Nous nous assemjdons pour prier Dieu, entre nous, dors les femmes il ne faut donc
;
comme si nous voulions le forcer à nous ac- pas s'étonner si une telle amitié produit des
corder nos demandes; cette violence lui est repas communs. »
agréable. Nousle prions pour les empereurs, 4 Ces repas se
i . nommaient agapes, du mot
pour leurs ministres, pour les magistrats, grec àyaTryi, qui veut dire charité. Les pauvres
pour l'Etat, pour la tranquillité de l'empire, comnae les riches
y étaient admis; tout s'y
pour le retardement de la tin du monde. Nous passait dans la modestie et l'honnêteté : avant
choisissons des divines Ecritures ce qui con- de se mettre à table, on faisait la prière, en-
vient au temps, soit pour prémunir, soit pour suite chacun mangeait à son appétit
buvait et
confirmer les fidèles; car cette sainte parole de même
sans nuire à la pureté. On ne se
,
nourrit notre foi, relève notre espérance, fixe rassasiait point jusqu'à oublier que, pendant
notre confiauce. Là se font les exhortations, la nuit, on devait encore vaquer à la prière,
les chatiment.s,les censures, et l'on on s'entretenait comme sachant que Dieu
y juge avec et
beaucoup de circonspection, car on est bien était présent. Les mains lavées et les
lampes
certain que Dieu est présent: c'est doue un allumées, chacun était invité à chanter les
fâcheux préjugé, pour le jugement futur, si louanges de Dieu, qu'il tirait des saintes
quelqu'un a péché jusqu'à être privé de la Écritures, ou qu'il composait de lui-même.
communication des prières des assemblées et Par là on connaissait la sobriété de chacun
de tout notre saint commerce. Ceux qui pré- des convives. Enfin le repas finissait comme
sident sont des vieillards d'une vertu éprou- il avait commencé, c'est-à-dire, par la prière,
vée, qui sont parvenus à cet honneur , non et on se séparait avec pudeur et modestie.
par argent, mais par le bon témoignage de 45. Telles étaient les assemblées des chré-
leur vie car,dans l'Eglise de Dieu, rien ne se
; tien.s,silbrtdécriées narmi les infidi'les.Tertul-
faitpar argent. S'il y a chez nous quelque es- lien se contente de ce récit pour lesjustitier. Il
pèce de trésor , il ne fait pas honte à la reli- montre ensuite que lespaïens méritaient à
gion; ce que l'on
y apporte,n'étant ni un tribut, plus juste titre le nom de factieux, eux qui,
ni un prix pour participer à sa sainteté. sous vain prétexte des malheurs publics,
le
Chacun y contribue d'une somme modique à conjuraient tous les jours contre la vie des
la fin du moins, ou quand il veut, supposé ^'"
chrétiens. Si le Tibre débordait et causait
des
qu'il veuille et qu'il puisse, car personne n'est inondations, si le Nil s'obstinait à rester dans
contraint de donner. Ce qui s'amasse ainsi est son lit, si la pluie manquait , s'il
arrivait un
comme un dépôt de la piété des fidèles. Nous tremblement de terre,une famine, une peste,
ne le dissipons point en festins inutiles, mais aussitôt on criait Les chrétiens aux lions,
:
nous le faisons servir à l'entretien et à la sé- comme si, avant eux, il n'était pas arrivé
de
pulture des pauvres, au soulagement des or- semblables accidents et de plus grands en-
phelins, des vieillards, de ceux qui ont fait core. « L'innocence, dit-il, dont ils font
pro-
naufrage, qui travaillent dans les mines, qui fession, a diminué les iniquités du monde, et
sont relégués dans des îles, ou qui soufi'rent ils ont commencé à fléchir,par leurs prières,la
dans les prisons pour la cause de Dieu, afin juste veugeance de Dieu. Dans les nécessités
que, tandis qu'ils souffrent pour la confession
publiques, tandis que vous invoquez inutile-
de sou nom, ils soient nourris de la substance ment l'assistance de vos dieux,sans rien retran-
de son Eglise. Il est étrange que cette charité cher de vos débauches ni de vos plaisirs, les
qui est entre nous, soit en quelques-uns
chrétiens se mortifient par les jeûnes par la con-
[iii^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLIEN. 29
tinence, dans le sac et la cendre; et en cet et d'un plus grand prix, à ensevelir les chré-
état,il.s frappent le ciel de leurs cris; et,après tiens, qu'à eucensor les dieux. Si les revenus
qu'ils ont comme forcé la misériconle de des temples diminueni, parce que nous n'y
Dieu d'exaucer leurs prières, vous rendez mettons rien, la républiiiue y gagne ; car nous
grâces à votre Jupiter. N'est-ce pas le mépris distribuons plus de bien dans chaciue rue, que
que vous faites du véritable Dieu, qui est vous dans vos temples. Et si l'on examine no- t;ap. xm».
Cop.xu. cause des calamités qui arrivent? Autrement, tre fidélité à payer les tributs, on trouvera
vos dieux sont injustes de vous punir à cause qu'ils augmentent autant par notre bonne foi,
des chrétiens. Vous me direz : Le vôtre l'est qu'ils diminuent par vos fraudes et par vos
donc aussi; car vous vous sentez comme nous fausses déclarations. »
des maux publics. C'est, répond TertuUien, 17. De là il conclut qu'il est contre le bien xuv.
que vous ne savez jias qu'il diffère à la tin du de république défaire mourir les chrétiens,
la
monde le discernement des bons et des mé- d'autant plus que , parmi le grand nombre de
cliants; cependant il les traite tous égale- malfaiteurs que l'on condamnait tous les jours
ment, avec cette différence néanmoins, que pour leurs crimes, il ne se trouvait pas un seul
les malheurs de cotte vie sont pour vous des chrétien, si ce n'était à cause de son nom. Il n.v.
châtiments, tandis qu'ils ne sont que des attribue cette innocence à la sainteté de leurs
épreuves pour nous autres, qui ne souhaitons lois , et parce que les païens ne voulaient pas
rien tant que de sortir au plus vite de ce les reconnaître pour divines, mais qu'ils les
monde. D'ailleurs, nous savons que ce sont les confondaient avec celles des autres sectes des
désordres de votre vie qui attirent les maux philosophes. Pourquoi donc, <iit TertuUien,
«
j^vi.
dont la terre est affligée; en retombe et, s'il ne nous laisse-t-on pas la même liberté qu'à
quelque partie sur nous , d'autant que nous ces philosophes? Car on ne les contraint pas
sommes mêlés avec vous, c'e.^t plutôt pour comme nous à sacrifier et à allumer des lam-
nous un sujet de joie, parce qu'ils nous re- pes en plein jour; au contraire, on leur applau-
mettent devant les yeux la vérité des saintes dit lors([u'ils déclament eu pubhc contre nos
Ecritures : ils augmentent notre confiance, superstitions; cependant ils n'ont rien dans
fortifient notre foi et assurent nos espéran- leur secte qui égale la grandeur du Christia-
ces. nisme ; leur nom ne suffit pas pour chasser
xLii. 16.((0!î dit encore que nous sonimesinutiles les démons; leurs opinions sur la divinité sont
au commerce de la vie. Comment le peut-on pleines d'incertitude, et leurs mœurs fort dé-
dire, puisque nous vivons avec vous, quenous réglées. Il est vrai qu'il s'en trouve aussi
usons de la même nourriture, des mémos ha- parmi nous qui s'écartent de nos règles;
bits, des mêmes meubles? Nous ne rejetons mais dès là même nous cessons de les tenir
rien de ce que Dieu a créé seulement nous ; pour chrétiens; chez vous, au contraire, les
en usons aveo. modération, rendant grâces à philosophes gardent le nom de sages et sont
Celui qui en est l'auteur. Nous nous trouvons trouvés comme tels même au milieu de leurs
partout avec vous, dans vos places publiques, dérèglements. »
dans vos mai'chés, dans vos bains, dans vos 1 8. Comme TertuUien avait prouvé plus haut j^^„
foires, dans vos comptoirs, dans vos hôtelle- l'antiquité des saintes Ecritures, il soutient
ries. Nous naviguons, nous portimsles armes, que c'est d'elles que les poètes et les philoso-
nous cultivons la terre, nous trafii[uons avec phes ont emprunté la plupart de leurs dog-
vous nos métiers sont les mêmes, nous pro-
: mes, et ce qu'il sont dit du jugement de Minos,
. duison? nos ouvrages à l'usage du public. Si des Heuves de feu où les méchants seront tour-
je ne fréquente par vos cérémonies, je ne mentés, et des champs élysées pour les bons.
laisse pas. de vivre ce jour-là et de dépenser Il ajoute qu'ils ont enseigné toutes ces choses
pour pour la table. Je ne me couronne
le bain, par l'instigation des esprits d'erreur, afin d'ô-
point de fleurs, mais je ne laisse pas d'en acbe- ter croyance aux chrétiens, lorsqu'ils vien- i
ter; que vous importe pour quel usage? Je ne draient à prêcher un jugement dernier, im en-
vais point aux spectacles, mais si je désire me fer, un paradis. Il attaque ensuite la métemp- x^vin
procurer ce qui s'y vend, rien ne m'empêche sycose de Pythagore, et tâche d'établir sur ses
d'aller l'acheter à la place. Il est vrai que nous ruines la résurrection générale des corps. Les -*
n'achetons point d'encens; mais si les mar- raisons qu'il en donne, sont celles-ci : Tous
chands d'Arabie s'en plaignent, ils doivent sa- les hommes doivent être présents au jugement
voir que l'on consume plus de leurs denrées dernier, pour y recevoir la récompense ou le ^
:j(» HISTOIUE GKNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rhAtiinont de leurs actions; l'àme ne peut sire de souffrir pour se réconcilier à Dieu,
souilVir sans le corps. A l'égard de la possibi- pour racheter, par son sang, le pai don de tous
lité, il la prouve par ce raisonn(;meul, que la ses péchés. De là vient que nous vous rendons
môme puissance qui a créé l'homme peut aussi grâces de vos jugements; car, lorsque vous
le ressusciter. U ajoute qu'ai)rès cette résur- nous condamnez. Dieu nous absout, tant sa
rection il n'y t-n a plus à attendre, parce que les conduite est contraire à celle des hommes !»
19. Mais, disaient les païens, qu'avez-vous à Tertullien composa s(m livre du Témoignage dfi Je rame.
vous plaindre? vous ne souffrez que parce que
vous le voulez bien.Tertullien répond, en com-
l'âme; mais
Apologie et
il
11
|»araît qu'il l'écrivit
parant les chrétiens aux soldats qui se plai- Jésus-Christ, par conséquent entre 203 et 207.
gneutd'étre obligés d'aller au combat, mais qui, Au reste, nous n'avons d'autre raison de le
dans l'action, combattent de toutes leurs forces joindre -kV Apologétique, que la conformité du
et même
avec joie, lorsqu'ils se voient sur le suji't; car il traite ici plus au long ce qu'il
point de remporter la victoire, a Vous nous avait dit dans ' cet ouvrage, du témoignage
traitez, dil-il, de désespérés, à cause du mé- que l'àme rend naturellement à l'existence
pris de la mort, qui toutefois a couvert de d'uu seul Dieu. Le dessein eu est aussi le
gloire Scévola, Régulas, Empédocle, Auaxar- même, puiscjue c'est pour la défense de la re-
que et tant d'autres, parce qu'ils sont morts ligion chrétienne. En effet Tertullien, voyant Cap.i.pag
64.
pour leur patrie,pour l'empire, pour l'amitié : que tant d'apologies publiées pour le Christia-
il n'y a que de mourir pour Dieu qui vous nisme n'avaient pu vaincre la dureté et l'o-
parait une folie. » U finit son apologie par ces piniàlreté des païens, et que le témoignage
paroles, qu'il adresse à tous ceux qui avaient même de leurs poètes et de leurs piiilosophes
autorité dans l'empire: «Continuez, leur dit-il, aux
était inutile, lorsqu'il se trouvait favorable
magistrats pleins d'intégrité, plus justes en- chrétiens, crut qu'un meilleur moyen de com-
core que l'opinion de lapopidace,si vous im- battre ses adversaires, serait de les convain-
molez les chrétiens à sa fureur. Tourmentez- cre d'erreur et d'mjustice par le propre té-
nous tant qu'il vous plaira, votre injustice est moignage de leur cous'îience. Dans cette vue
la preuve de notre innocence. Deriiièrement,eu il fait parler l'àme, non après qu'elle s'est for-
condamnant une chrétienne à un lieu infâme, mée dans dans les disputes de
les écoles et
plutôt qu'au lion, vous avez reconnu qu'il n'y l'Acadéuiie, mais l'âme dans toute la rudesse
a point de peine ni de genre de mort qu'un et dans toute la simplicité de sa nature. Cette <i-
* On l'infère de ce qu'il dit qu'il avait prouvé ail- mus, ad fidem earum demonstrandam. Ce qui a rap-
leurs l'antiquité des divines Ecritures. At enim cum port à Y Apologétique, cap. 19
divinœ Scripturœ,quœ pênes nos vel Jiuiceossuni multo * Le livre du Témoignage de l'âme y est cité dans
sCBCularibus litteris.... antecedant,ut suo loco edocui- cet ouvrage. — ^ Apolog., cap. 17.
il
[iri« SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLIEN. 31
la croyance des chrétiens au sujet de cesmau- ïes martyrs auxquels il s'adresse dans cehù-ci,
Cap. IV.
D'un autre côté,ajouic-t-il,le soin
ygjg esprits. étaient prisonniers à Cartilage ou dans quel-
que nous prenons des morts, le désir de nous que ville de sa dépendance; en effet, il y fait
faire uunom après notiemort,i)arleiué{)risde mention de ^ proconsuls qui n'étaient que pour
la mort même, par des ouvrages de littérature, les provinces, comme nous avons déjà dit plus
par l'intégrité de nos mœurs, ou même par la haut. D'abord il [trie les martyrs de ne pas Cap. i.pay
magnificence des sépulcres, tout cela prouve trouver mauvais que, tandis qu'ils recevaient
que l'homme a naturellement l'idée d'une au- la subsistance du corps de la part des fidèles,
tre vie après celle-ci; car l'àme ne s'inquié- il leur fournisse, de son côté, de quoi nourrir
terait point de l'avenir si elle n'en avait au- leur esprit Il les exhorte ensuite à ne pas
.
cune connaissance. Une preuve aussi qu'elle attrister, par leur chute, le Saint-Esprit qui est
a une idée, quoiqu'iraparfaite,de la résurrec- entré avec eux dans la prison, et sans l'assis-
tion, c'est que si l'on nous demande ce que tance duquel ils n'y seraient pas dem'îurés ;
fait un tel; ne sachant pas qu'il est mort, nous piàs, pour leur en rendre les incommodités net m.
répondons,sans y penser, comme si nous étions plus supportables, il leur représente les dan-
'• persuadés qu'il est allé faire un voyage. Au gers continuels auxquels ils seraient exposés
reste, si ces sentiments iiitérieurs, cesmaniè- dans le monde. « Vous ne voyez point, dit-il,
res de parler qui nous échappent comme mal- des dieux étrangers, vous ne rencontrez point
gré nous, ne sont pas naturelles, on ne peut leurs images; vous n'êtes point mêlés aux so-
au moins nier qu'elles ne soient venues de nos lennités des païens, ni frappés de l'odeur
Écritures, qui s(mt les plus anciennes ainsi : impure de leurs sacrifices, ni des cris de leurs
c'est toujours Dieu qui en est l'auteur; qu'im- spectacles pleins de cruauté, de fureur ou
porte que ce soit par lui-même ou par ses Écri- d'impureté; vos yeux ne tombent point sur
^»- tures ? TertuUien finit en invitant les païens les lieux publics de débauche. » Il tache en- iv, vetvi.
à se rendre à ces témoignages d'autant plus core de les excitera la patience par la vue de
forts, qu'ils sont les mêmes parmi toutes les l'obhgation qu'ils ont contractée dans le bap-
cations, nonobstant la différence de leurs tême, de combattre pour le service de Dieu.
mœurs et de leur religion '. Enfin leur met devant les yeux l'exemple
il
^- -^^ ii'vve adressé aux Martyrs semble de plusieurs païens qui avaient enduré avec
arr/A"""
Analyse
^voli ité écrit daus Ics mêmes circonstances constance les tourments et la mort, par le
cet ou-
que V Apologétique et les deux livres aux Na- seul motif de la gloire, et conclut qu'un chré-
tions, c'est-à-dire dans le temps que Sévère tien ne doit pas souffrir avec moins de force
recherchait encore * ceux qui avaient suivi le pour la vérité ''.
parti de Niger et d'Albin. L'auteur était en- 3. La douzième année de l'empire de Sévère, Traité de»
^p''""''''-
core catholique, comme il paraît par ces pa- de Jésus-Christ ^204, il fut ordonné par le Sénat
roles: «Ceux s, dit-il, qui n'ont pas la paix de que l'on célébrerai' cette
année les jeux sécu- de tet^la-
^''^^''''
l'Eglise, ont coutume de la demander aux laires. Ou croit généralement que ces céré-
martyrs; c'est pourquoi vous devez l'avoir mouies donnèrent cccasionaTertuUien d'écrire
en vous-même, l'y entretenir et l'y garder son livre intitulé: Des Spectacles. Les spectacles
soigneusement, afin que vous puissiez la com- qui se représentaient en tout temps chez les
muniquer aux autres. » Ailleurs * il loue la paiens,étaient pourtaut,il est vrai, unmotif suf-
piété des fidèles qui fournissaient aux besoins fisantpour le porter à combattre le penchant
de ceux qui souffraient daus les prisons pour naturel que l'homme a pour ces sortes de plai-
la foi de Jésus-Christ. Mais lorsqu'il eut ad- sirs. Quelques-uns veulent que TertuUien
héré à Montau, il se moqua de ces saintes ait étémontaniste lorsqu'il composa cet ou-
pratiques, comme on peut le voir dans* vrage, parce qu'il y paraît approuver ceux
quelques-uns de ses ouvrages. On croit que qui demandaient 'des révélations. Mais ne sait-
1 Ecrit, dit Mœlher, d'une faible étendue, mais ex- rint. Lib. nd Martyr., cap. 6.
trêmement précieux, plein de pensées belles et pro- * Tertull., ibid., cap. 1. — * Idem, ibid.
fondes. {L'éditeur.) ' Lib de Pudic, cap. 22, et lib. deJejun., cap. 12.
* Ad hoc quidem vel prcesentia vobis tempora docu- ^ Judicia denique non proconsulis, sed Dei sustinet.
menta sint quaniœ qualesque personœ inopinatos nata/i- Lib. ad Martyr., cap. 2.
bus, et dignitatibus, et corporibus, et wlatibus suis ^
Quœ major voluptas quant fasiidium ipsius volup-
exitus referunt, tiorninis causa : aut ab ipso, si contra tatis.... quod dœmonia expeliis... quod revolationes pe-
eum fecerint, aut ab adversariis ejus, si pro eo stete- tis. Tertull., lib. de Spect., cap. 29,
32 HISTOIRE Gl'NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
on pas que los inrirtyrs de TERlise catholique leurs on cachait avec plus de soin. En un Cap xviii
en (iernandaient cux-niémes, ooninic on voit mot, le théâtre représentant des actions cri-
par les Actes des saintes Perpétue et Féli-
*
minelles, ne nous est pas permis d'écouter
il i
cité, qui se lisaient publiquement dans l'E- ni de voir ce qu'il nous est défendu de faire.
glise du temps de saint Augustin, et par
* On ne doit pas être cruel, ni par conséquent x"«
samt ' Cyprien, qui assure expressément que se plaire à voir tuer des hommes dans l'am-
les Coni'e.-seurs étaient souvent avertis, par pliithéàtre , d'autant moins que le condamné
Ctp.i.pag. visions, de leur prochain martyre? Quoi qu'il est peut-être innocent.
en soit, son but, dans cet écrit, est d'éloigner 4. Après avoir détruit quelques mauvaises "». xïi
des s])ectai'les les fidèles, et même les caté- raisons qui servaient à excuser les spectacles
chumènes, en faisant voir aux uns et anx au- et montré qu'il était absurde de les estimer,
tres qu'ils sont contraires à la vraie piété et tandis qu'on en méprisait les acteurs, jusqu'à
au culte sincère que nous devons à Dieu. les noter d'infamie, il attaque ceux qui, à l'i- xx"»-
m. Après avoir réfuté l'objection ridicule des mitation de Saturne, d'Isis et de Bacchus, se
païens, que tout ce qui servait au théâtre était rasaient la bai'be, faisaient le métier de bouf-
l'ouvi-age de Dieu, il vient auxchréticns qui, fon, montaient sur des cothuri;es *, se mas-
pour s'interdire les spectacles, demandaient quaient et contrefaisaient leur sexe, non-seu-
une défense des Écritures. TertuUien avoue lement dans les habits, mais encore dans la
qu'il u'y en a point de formelle; mais il sou- voix et les manières. 11 cite contre ces der-
tient qu'elle est renfermée dans ces paroles niers la malédiction portée par la loi contre
IV. du Prophète: Bienheureux celui qui ne s'est
« les hommes qui prennent des habits de fem-
V. pas trouvé dans l'assemblée des impies » Il ! mes. Puis, pour convaincre les chrétiens que »»iv.
leur rappelle de plus la promesse qu'ils avaient les spectacles leur étaient interdits, en ap- il
faite dans le bapième de renoncer au diable, pelle aux païens mêmes, qui ne demandaient
VI, à ses pompes et à ses anges; et, supposant que pas d'autre preuve de la conversion des leurs
vil. ces pompes de Satan consistaient surtout dans à la religion chrétienne, que l'abstention des
l'idolâtrie, il montre qu'elle régnait partout spectacles; de sorte que renoncer à cette mar-
vin. dans les spectacles, qui n'avaient été institués que à laquelle on reconnaissait un chrétien,
u. tJ'JG pour honorer les faux dieux. Il ne prétend c'était nier publiquement qu'on le fût. Il rap- xxvi.
pas néanmoins que, hors les temps des specta- porte un exemple dont il prend Dieu à témoin :
cles,uu chrétien ne puisse aller au cirque pour une femme qui avait été au théâtre, en revint
une cause innocente ; mais ildécide que c'est la possédée du démon. Comme, dans l'exor-
même chose d'y aller pour voir, comme d'al- cisme, on reprochait à l'esprit immonde d'a-
X, XI cl XII. 1er aux temjiles pour sacrifier. Du cirque il voir osé attaquer une fidèle, il répondit har-
vient au théâtre consacré particulièrement à diment: «J'ai eu raison, je l'ai trouvée chez
Vénus et à Bacclius puis aux combats d'a- ,
moi.» Uneautx'e avait assisté à une tragédie;
thlètes consacrés chacun à quelque divinité ; la nuit suivante on lui montra un linge, en
et enfin aux gladiateurs qui tiraient leur ,
lui reprochant le nom de l'acteur, et elle ne
origine des pompes funèbres et qui donnaient vécut pas plus de cinq jours. Il exhorte donc xxvin.
XV. leurs spectacles dans l'amphithéâtre. 11 dé- les chrétiens à vivre dans les pleurs tandis ,
taille ensuite les autres raisons de fuir les que les païens s'abandonnaient aux plaisirs,
spectacles danger de nous priver du Saint-
: le et à n'avoir point de désirs plus pressants que
xTi. Esprit, en excitant nos passions; la perte du celui de sortir de ce monde pour aller à leur
temps, défendue à un chrétien; les injures, Dieu. Enfin, au lieu des spectacles du cirque xxx.
les malédictions, les calomnies que l'on en- et de l'amphithéâtre, il leur propose des ob-
tendait dans le cirque contre les princes jets plus (lignes de l'attention d'un chi'étien :
xMi. mêmes ; l'impudicité du théâtre, où Ton pro- les combats des martyrs, la passion de Jésus-
duisait en public toutes les hifamies qu'ail- Christ, son prochain avènement, le jugement
' Tune dixit mihi frater meus : Domina soror, jam * Les cothurnes étaient une cliaussure avantageuse,
in marjua di'jniiate es, et tania, ut postules visionem, dont on se servait sur le théàlre pour donner un
et ostendalur tdn, an passio s>t, an commeatus.... et plus grand air aux aoteurs quelques femmes s'en
;
postulavi, et ostensum est mihi hoc, etc. Act. siuc. servaient aussi, afin de paraître plus grandes qu'elles
Ruin., pag. 87. n'étaient elTectivement, etc'est apparemment ce que
s AugUit., Serm. 280.— 3 Cypr., Epist. 11 et 16. ïerluUien reprend ici.
[lir SIÈCLE. CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 33
dernier, les peines éternelles des impies, la un jour juger : «à vous aussi, leur ^
Car c'est
5. Le traité intitulé Des Ornements des fem- : qu'alors votre substance votre sexe ne sera pas
,
mes, fait mention de celui des Spectacles ; • autre que celui des hommes: or,de quel front
Tauteur y dit * qu'il avait vu à Rome l'éclat oserez-vous prononcer contre ceux dont vous
des perles perdre son prix et comme rougir aurez si fort dons? » Tertutlien
recherché les
*^*P' "''
en présence des Parthes, des Mèdes et des
la avait pris du livre d'Enoch ce qu'il dit ici
autres peuples, qui ne témoignaient pas les des anges, et il fait tout son possible poiu' en
estimer, parce qu'elles venaieut de leur pays. établir l'autorité ; car plusieurs le regardaient
Ce récit peut avoir rapport aux fêtes et aux comme apocryphe, ainsi qu'il le reconnaît
,^«"«'î-
maguiiicenc.es qui se Tirent à Rome, quand lui-même. Après cela, il fait voir que l'or,
Sévère y fut revenu, en la dixième année de l'argent, les pierreries, n'avaient pas été créés
son empire, de Jésus-Christ 203, après avoir de Dieu pour servir à la vanité des femmes;
vaincu plusieurs nations orientales et pillé que les couleurs que l'on donne aux étoffes,
la capitale des Parthes. Ou peut aussi conclure si elles ne sont pas naturelles, sont adultères,
de là que Tertulhen n'était plus à Rome lors- d'autant que les matières que l'on emploie
qu'il écrivait ce traité. Il est divisé en deux pour cela n'ont pas été destinées de Dieu à
livres ' qui, selon d habiles * critiques, sont cet usage.
deux ouvrages distincts et composés même 7. Dans le second livre il se plaint des duiivïe'/r'®
en différent temps; mais il y a pins d'appa- femmes chrétiennes, aussi soigneuses à pa- ^^
p"»- le-
rence que ce sont deux parties d'un même raitre belles, païennes mêmes pri-
que les
ouvrage. La division est marquée dans le ' vées de la connaissance du vrai Dieu, et
chapitre iv du premier livre, et elle revient par conséqutîut de la vraie chasteté. Ce "•
assez au titre de l'Habit des femmes, pour le désir de plaire par leur beauté , ne mar-
premier livre, et à celui de l'Ornement des fem- que pas une intention pure; il est contraire à
mes, pour le second, marqué dans les ancien- la charité, qui nous défend d'être aux autres
nes éditions que M. de Tillemont a cru devoir une occasion de chute. Elles devraient plutôt
suivre et sur lesquelles il se fonde principale- chercher à obscurcir leur beauté naturelle en
ment pour séparer cet ouvrage en deux. la négligcanl, afin de se mettre à couvert des
D'ailleurs, dans celui que l'on suppose av^oir insultes et de la violence des hommes; leur "'etiv.
été composé le dernier, TertuUienne fait au- unique soin doit être de plaire à leur mari,
cune mention du premier, contre sa méthode et le vrai moyen d'y réussir, est de négliger
ordinaire de citer ses écrits précédents, lors- la parure affectés, pour marque qu'elles ne
que l'occasion s'en présente. cherchent pas à plaire à d'autres; une chré-
6. Voici le contenu du premier livre: Si les tienne ne doit se glorifier dans sa chair que
femmes chrétiennes se rappelaient leur condi- quand elle est déchirée pour Jésus-Christ. Il v, vi et vu.
tion, si elles vivaient avec ce souvenir conti- déclame ensuite contre le fard, les couleurs
nuel, qu'elles appartiennent au sexe qui causa empruntées pour paraître blonde, ou pour
en Eve la perte de tout le genre humain, rendre les cheveux noirs, lorsque l'âge les a
elles travailleraient à réparer crttc iguominio, blanchis; contre les faux cheveux qui étaient
en vivant dans la plus grande modestie, et peut-être la dépouille d'une tête impure et
éviteraient de rechercher la magnificence ou destinée au feu éternel. blâme surtout les
Il vm.
la beauté dans leurs habits. Les ornements hommes qui, par une envie de plaire peu
dans lesquels elles mettaient toute leur gloire, convenable à leur sexe, se laissaient aller à
avaient pour auteur les mauvais anges des- de semblables faiblesses, comme de se raser
cendus du ciel pour l'amour des femmes; c'é- ou de s'arracher la barbe, d'ajuster avec art
taient ces mêmes anges auxquels elles avaient leurs cheveux, de les teindre, d'aller à toute
renoncé dans le baptême et qu'elles devaient heure se présenter à un miroir. S'adressant ix.
' Avec de légères modifications, cet ouvrage sem- tum etornatum. Cultum dicimus, quem mundum mu-
blerait écrit pour nos théâtres modernes. {L'édi- liebrem vocu7it ; ornatum, quem immundummuliebreni
n
3i HISTOIRE CENl-RALE DES AUTEURS ECCLI-SIASTIQUES.
(le nouveau aux femmes, il veut que si Imu-s
ARTICLE X.
richesses, leur naissance ou leur dignité tle-
LIVRES CONTRE LES JUIFS, CONTRE HERMOGÈNE ET
maudent qu'elles paraissent en public avec
CONTRE LES VALENTINIENS.
pompe, elles modèrent ce mal autant qu'elles
pourront, sans lâcher la bride à la licence, 1 Saint '^
Jérôme , Vincent ' de Lérins et I.ivra
trelesJ
sous prétexte de nécessité , mais suivant le l'auteur * des Questions tirées de l'Ecriture,
précepte de l'Apôtre, qui nous ordonne d'user attribuées à saint Augustin, citent le livre
de ce monde comme n'en usant point. Il leur contre les Juifs ^. On ne sait pas bien en quel
propose à ce sujet l'exemple de ceux qui se temps mais il est certain qu'il pa-
le placer ;
privaient volontairement du mariage, du vin rut avant que les Romains eussent " soumis
et de la chair des animaux (quoique tout cela toute la Grande-Bretagne, et par conséquent
Cap.x.
gagner le ciel. Puis, après
fût permis), afin de avant 208, puisque Sévère, ayant fait passer
une courte récapitidation de ce qu'il avait dit son armée dans cette lie, la soumit entière-
dans son premier livre au sujet de l'or, des ment aux Romains l'année suivante, au rap-
xu pierreries et des couleurs artificielles, il mon- port de Dion. Tertullien semble y condam-
tre clairement qu'une chrétienne ne devant ner ' le service des armées, ce qui fait croire
aller ni aux temples, ni aux spectacles, ni aux à plusieurs qu'il était alors montaniste ; mais
fêtes des Gentils, mais seulement visiter quel- comme il n'est pas moins rigide sur cet arti-
que frère malade, assister au sacrifice ou à la cle dans ® son livre de la Patience , qui passe
parole de Dieu, elle n'a pas de sujet de sortir constamment pour avoir été écrit dans le
Zll. si parée. Si la bienséance ou l'amitié l'oblige temps qu'il était catholique, nous ne faisons
à rendre quelque visite à des païennes, c'est pas difficulté de mettre de ce nombre celui
alors qu'elle doit se servir d'habits plus mo- dont il s'agit ici.
destes, afin qu'il paraisse de la différence en- 2. Ce qui l'occasionna fut la dispute d'un Aa
de cet i
tre les servantes du vrai Dieu, et celles du chrétien avec un prosélyte juif. Elle dura
Ca
diable. ne convient pas à des prêtresses
Il tout un jour, sans qu'on pût convenir de rien lag.l»
ornements. Quelqu'une dira peut-être : «Qu'ai- par prouver la supériorité du peuple chrétien,
je besoin de l'approbation des hommes, Dieu dont Jacob était la figure, au-dessus des Juifs
voit mes intentions ?» — «Mais, répond Tertul- figurés dans Esaii. Leur loi n'était pas si né- iletiii.
lien, l'Ecriture vous ordonne de faire vos ac- cessaire que, sans elle, on ne pût être sauvé,
tions à la vue des hommes; c'est afin que vous comme Enoch et plusieurs autres qui avaient
serviez d'exemple aux méchants : il ne suffit vécu avant elle ; la circoncision n'était qu'un
pas à une chrétienne d'être chaste, il faut de signe pour les distinguer des autres peuples;
plus qu'elle paraisse telle. Je ne sais, ajoute- l'observation du sabbat n'était que pour un IV et se
t-il en finissant cet ouvrage, si les mains ac- temps, et les sacrifices de la loi devaient être
coutumées à des bracelets pourront souffrir abolis, parce que d'un côté eUe défend de
les menottes; si une jambe ornée de bande- sacrifier en un antre lieu qu'à Jérusalem, et
lettes s'accommodera des entraves. Je crains que, d'ailleurs, le prophète Malachie promet
qu'une tète si chargée de fils de perles et d'é- un sacrifice qui s'offrira partout le monde. Il
meraudes, ne donne pas de place à l'épée. » prouve ensuite que le Messie est venu, en
Il parlait ainsi eu égard à la persécution pré- faisant voir l'accomplissement de la prophé-
sente '. tie d'Isaïe,qui dit que les nations croiront
en Marquant à ce sujet l'étendue de l'E-
lui.
« La manière sombre dont Tertullien parle du * Britannorum inaccessa Ramanis loca,Christo vero
monde en cet ouvrage, est outrée. {L'éditeur.) subdita. Tertull., lib. adv. Judœos, cap. 7.
' Hieronym., in cap. ix Daniel. ' Vincent. Li-— ''
Quis enseoperabitur, et non contraria lenitati et
rin., Comment. 1. —
* Auctor Quœst., fom. III Oper. justitiœ excrcet ? Tertull., lib. adv. Jud., cap. 9.
Aug., Append.jÇag. 41. 8 Patientia Domini in Malcho vulnerata est, itaque
* Semler a fort mal à propos douté de l'authenti- et fjladii opéra maledixit in posterum. Idem, lib. de
cité de cet écrit. Vid.Mœlher. {L'éditeur.) Patientia, cap. 3.
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLÏEN. 35
tion des Apôtres, le jour de la Pentecôte, il faux prétexte de ne pas reconnaître Jésus-
nomme les nations suivantes qui avaient reçu Christ à cause de l'état humihant dans lequel
la foi : diverses races de Gétules et de Mau- il avait paru '.
Traité
res, l'Espagne entière, diverses nations des 3. Tertullien écrivit contre Hermogène, ^^nive Hep-
avant "°s^°*-
Gaules ; les quartiers de la Grande-Bretagne, * d'attaquer les valentiniens ; on ignore
inaccessibles aux Romains, soumis à Jésus- en quel temps ; mais il paraît que ce fut avant dec^Tràft'I.
Christ; des Sarmates, des Daces, des Ger- sa chute, supposé, comme il est probable, que cap. i,
^^^'
mains, des Scythes, et plusieurs nations ca- son Traité contre les Valentiniens ait été com-
chées, plusieurs provinces et plusieurs îles posé dans l'Eghse. [Hermogène vivait encore
inconnues aux Romains. Jésus-Christ règne lorsque Tertullien l'attaqua, et il enseignait
sur tous les peuples, ce qui n'est jamais ar- que la matière est éternelle comme Dieu .] Voici
rivé à aucun roi des Juifs, pas même à Salo- comment il raisonnait : « Dieu n'a pas créé "
ap. vin. mon. Il explique dans le même dessein la cé- le monde de sa propre substance, puisqu'elle
lèbre prophétie de Daniel au sujet des 70 se- est indivisible : s'il l'avait tiré du néant, il
maines marquées pour le terme de l'arrivée serait auteur du mal ; la matière existait donc
du Messie, et, supputant le nombre des an- avant la création, d'autant plus que le nom
nées depuis cette prédiction, c'est-à-dire de- du Seigneur, aussi ancien que celui de Dieu,
puis la première année du règne de Darius, suppose nécessairement un sujet.» Tertullien ,„.
jusqu'à la ruine de Jérusalem et du temple réfute d'abord le dernier argument parla dis-
sous Vespasien, il compte 490 ans. Pour tinction qu'il fait des noms de Dieu et de
preuve de l'accomplissement de cette pro- Seigneur le premier signifie la nature, le se-
:
phétie, il défie les Juifs de produire quelques cond marque son pouvoir sur les créatures,
nouveaux prophètes, ou quelques miracles qui n'a commencé qu'à la création, de même
dont Dieu les ait favorisés depuis la venue de qu'il n'a eu la qualité de juge que depuis le
son nom, dans la manière et le lieu de sa forma l'homme,» etc.Tertullieu continue: «Si ivet seq.
naissance; dans sa passion, dans sa mort, la matière est éternelle, comme Hermogène le
dans les miracles qui l'accompagnèrent et prétend. Dieu n'avait aucun droit d'en dispo-
dans ce qui la suivit, c'est-à-dire la vocation ser en maitre, puisqu'elle existait indépendam-
des Gentils à le foi et la ruine de la nation ment de lui. Elle serait même égale à Dieu,
xm. juive prédite par Ezéchiel. Il ajoute que, de- étant comme lui sans commencement et sans
puis ce temps, les Juifs dispersés dans toutes fin. Ainsi Dieu ne serait plus le souverain
les nations, s'y étaient bâti des synagogues, être ; car cet attribut ne peut convenir à plu-
mais dans lesquelles le Saint-Esprit ne faisait sieurs ne serait pas non plus tout-puissant.
; il
plus sa demeure, comme autrefois dans le Autrement, sachant que la matière était mau-
temple. « Dieu, dit-il, leur a retiré ses grâ- vaise, il l'eût changée de nature, afin de ne
ces ; leur terre est deyenue déserte, et ils rien produire que de bon. Au reste, s'il se fût x etseq.
Toient leur pays possédé par des étrangers. servi de la matière, quoique mauvaise, il ne
Tous ces châtiments sont en punition du laisserait pas d'être auteur du mal comme s'il ,
crime qu'ils ont commis, en faisant mourir l'eût tirée du néant; si l'on suppose qu'il s'en
xiv. Jésus-Christ. » A la fin, il distingue les deux est servi par nécessité, ayant besoin d'une ma-
avènements du Messie; le premier dans l'hu- tière préexistante pour la création , n'avait-il
miliation, l'autre dans la gloire ; il les montre pas sa propre sagesse ^, qu'il a produite et, en-
prédits par les Prophètes, et détruit ainsi le gendrée en lui-même avant les siècles, comme
*Cet ouvrage contient de fort bonnes choses et 2 Tertullien nomme ici matière, la sagesse, longe
quelques-unes sont importantes sous le rapport exégé- digniorem materiam. Mais on ne doit pas s'en éton-
tique, comme par exemple ce qui regarde la pro- ner, puisque, dans ce même traité, il déclare nette-
phétie d'Emmanuel. (L'éditeur.) ment qu'il appelle corps toute substance, et qu'il
* Dans le livre contre les Valentiniens, il cite celui ne compte pour choses incorporelles que les modes
qu'il avait Hermogène. Hœc erit, inquit,
fait contre de la substance, comme l'action, la passion et le
materia quœ nos commisit cum Hermogène. TertulL, mouvement. Quis emm tibi concedit, (il parle d'Her-
lib. adv. Valent., c&p. 16. mogène), motum in secundam partem substantiœ de-
36 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
comme iK^cessaire à l'ouvragft du monde ? » de Procule, un des chefs des montanistcs ;
Cip. xa ii.Hennotrt'no prolcndaitnuo.sous le; nom de ou il faut dire, commevraisem- il est assez
principe et de teire informe, l'Ecriture enten- blable, que ce dernier n'était pas encore
dait la matière éternelle: il disait encore qu'eu tombé dans l'erreur des montanistcs. Autre-
parlant des productions de Uieu, elle ne nom- ment, comment accorder l'cloge qu'il fait dans
mait que le ciel et la terre, sans faire mention le même endroit 'de Miltiade, que l'on sait
de> téiièhres, desabimes,deseaiix, des vents ;
avoir été l'un des principaux antagonistes des
d'où il inférait que ces êtres avaient été tirés erreurs de Montan, et qui les réfuta même
d'une matière déjà existante. Terlullien ré- dans un écrit fait exprès, comme saint *
pond : — « l^Le nom de principe, en grec otpyr,, Jérôme nous l'apprend. Quoiqu'il en soit, Idée
Treité,
Î50.
(
gesse.— 2" La terre est nommée informe, parce pour but qne de combattre les principaux
qu'alors ellen'avait aucune ligure. - 3°L'Ecri- chefs des valentiniens, sans s'arrêter à plu-
ture, en rapportant la création de l'homme, ne sieurs qui afTectaicnt de passer pour docteurs
parle pasnun [dus d'os, nidechair,ni d'yeux; parmi eux. Il se propose pour modèle dans ,
v.
mais elle se contente de dire, en général, que ce combat, Justin, Miltiade, Irénée, Procle,
l'homme fut formé de Dieu. Une preuve que qui avaient traité avant lui cettte matière. Et, vi
toutes les créatures ont été tirées du néant, afinqu'on ne s'épouvantât pas des noms bar-
est que. selon les Prophètes, elles doivent y bares dont les valentiniens se servaient pour
«xvetseq. retourner.» Il remarque qu'Hei'mogène n'avait marquer leurs éons, il dit qu'ils les éclaircira
rien de tixe dans son système, qu'il faisait la par des explications à la marge de chaque
matière tantôt corpori^lle, tantôt incorporelle; page et en mettant des marques au-dessus
tantôt bonne, tantôt mauvaise; quelquefois des hgnes,pour distinguer les noms propres.
infinie, quoique sujette à Dieu; et il lui re- Après cela il entre en matière et commence ^n etw
putare, cum substantiva res non sit, quia nec corpo- derunt, et retuderunt, ut Justrnus philosophus etmar-
ralis denique rnoventur aut a seipsis ut
oninia tyr; ut Miltiades,Ecclesiarum sophista; ut Irenœus,om'
animalia , aut ab aliis ut inanimalia : iamen nec ho. nium doctrinarum cv.riosissimus explorator; ut Proculus
minem, nec lapiiJem, et corporalem,et incorporalem di- noster, etc. IJem, ibid.
cemus, quia et corpus Itubeat et motum, sed unam om. 3 Ut Just mus philosophus et martyr, ut Milfiades....
nibus foi-mam sotiuf corporalitalis ,
qum substantiœ ut Irenœus.... ut Proculus noster.... quos inomniopere
res est. Siqua incorporalia eis adsunt aut actus, aut fidei ,
quemadmodum in isto opiaverim assequi. Ter-
passiones, aut officia, non portioncs deputamus. Ter- tull., uiji supra.
tull., lib. adv. Hennog., cap. 36. * Milliudes, cujus Rhodon in opère suo quod adver-
' Proculus nosler virr/inis seneciœ, et christianœ elo- sus Montanum, Priscam, Maximillamque composuit,
quentiœ dignitas. Idem, lih. adv. Valent., cxp. 5. recordatur, scripsit contra eosdem volumen prœci-
* Nec undique dtcemur ipsi nabis finxisse materias, puum.
quas jam toi viri sanctitate et prœstantia insignes, nec ^ Ad quos [libéras] suscipiendos compelluntur homi-
solum nostri antecessores, sed ipsorum hœresiarcharum nes. TertuU.,lib. de Exhort. casf., cap. 8.
conte mporales , instrtictissimis voluminibus, et prodi' • Nonne vanissimas Papias leges,quœ ante libéras sus-
[lïf SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLIEN. 37
endroit, il n'est question que des lois Papies, veuf. Il semble même désapprouver les pre- Cap. u.
qui ordonnaient de mettre des enfants au milles noces, parce qu'il y trouve le matéiiel
inonde avant l'âge établi par les lois Julies. de la form'cation. Après cela il représente à
Or, l'emperer.r Sévère n'abrogea que les lois son ami les avantages de la viduité, auxquels n.
Papies, et laissa les lois Julies en vigueur. il oppose les inconvénients d'un second ma-
D'autres comptent cet ouvrage entre ceux que riage, et détruit les prétextes qu'il aurait pu
Tertullien fit contre l'Eglise, et ce sentiment avoir de s'y engager : la nécessité d'avoir une
parait d'abord assez probable, eu égard à la femme qui prenne soin du domestique , le xn-
manière outrée dont il y parle contre les se- désir de laisser des héritiers. Enfin il lui rap- xm.
condes noces ; toutefois , il les * y permet pelle l'estimeque les païens mêmes avaient
expressément; il témoigne de plus qu'elles faitede la viduité, et il le presse surtout par
étaient * en usage parmi les cbrétiens ainsi : l'exemple de plusieurs chrétiens qui avaient
il vaut mieux croire qu'il n'était pas encore entièrement renoncé au mariage. Ce sont à
tombé dans l'hérésie, quoiqu'il n'en fût pas peu près les irèmcs raisons dont il s'était servi
éloigné. dans son premier livre à sa Femme.
se 2. Cette Exhortation est adressée à un veuf 5. Le Traité de l'Idolâtrie est cité dans celui „,J';?i'*
<!•
lé,
chrétien, pour le détourner des secondes no- des Spectacles *, et ne peut par conséquent
Anniys.
et il. ces. Il de s'en tenir à la volonté
lui conseille avoir été écrit avant 204. Il paraît même que ^ece Traité.
deDieu, qui est que nous nous sanctifiions Tertullien ne l'entreprit que peu avant sa sé-
dans la viryinité ou dans un seul mariage, paration de l'Eglise; car sa morale commence
sans prétendre user de l'indulgence accordée à à s'y ressentir de l'austérité et de la dureté
,„, ceux qr.i veulent se remarier. Comme on ob- des montanistes. Il enseigne d'abord que tout cap.
jectait ces paroles de saint Paul
mieux : «Il est péché une idolâtrie, parce qu'il n'y en a p**"'
est
de se marier que de brûler, » il répond que aucun qui ne fasse injure à Dieu, en rendant
c'estlamérae chose de dire: Il vaut mieux avoir aux démons l'honneur qui n'est dû qu'à Dieu
,, un œil que de n'en avoir point du tout. Il re- seul. Sur ce fondement, il condamne ceux qui li.
connaît néanmoins que l'Apôtre justifie les croyaient que l'on ne commettait l'idolâtrie
secondes noces ; mais, ajoute-t-il, il y a une qu'en brûlant de l'encens, eu immolant des
grande différence entre le précepte de Dieu victimes, ou en se faisant initier aux mystè-
et le conseil d'un homme ; et il tache de per- res ou aux sacerdoces des faux dieux. Il sou- metiv,
suader que saint Paul s'est conduit en cela tient que ceux qui fabriquaient des idoles,
plutôt par son propre sens que par le mou- n'étaient pas moins coupables de ce crime,
vement du Saint-Esprit, ce qu'il tache de prou- n'eusseut-ils d'autre métier pour gagner leur
y. ver par les paroles de cet Apôtre. Venant aux vie. On objectait que l'Apôtre permet à im v.
preuvesjil montre,parle mariage d'Adam avec chacun de rester dans le même état où il a été
Eve, et par celui de Jésus-Christ avec l'Eglise, trouvé par la grâce. « Il nous sera donc aussi
que,suivant sa première institution,le mariage permis, répond Tertullien, de persévérer dans
y», doit être unique. Sur la défense fuite aux le péché; car il n'y a aucun de nous qui ne
prêtres dans le Lévitique, de se marier plus fût pécheur avant d'être chrétien, puisque Jé-
d'une fois, il dit que l'on observait aussi dans sus-Christ est venu uniquement pour nous dé-
l'Eglise de ne point élever au sacerdoce celui livrer du péché. Comme on insistait sur le
qui avait eu plusieurs femmes; d'où il conclut précepte du mèmeApôtre,de vivre du travail
que tous les chrétiens, même laïques, étant de ses mains, il dit qu'il en faut excepter les
prêtres, dans le langage de l'Ecriture, doivent art.«, qui ne peuvent s'accorder avec la loi de
garder la discipline établie pour les prêtres. Dieu; autrement, ajoute-t-il, l'Eglise serait
vni. Il ne laisse pas d'avouer qu'il est permis à aussi ouverte aux voleurs. Enfin, pour détruire
un chrétien de se remarier ; mais comme il la preuve tix^ée de l'exemple de Moïse, qui fit
prétend que ce n'est que par indulgence, il dresser un serpent d'airain dans le désert, il
soutient qu'il estbeaucoup meilleur de rester répond que ce serpent était la figuré de la
dpi cogunt, quam Juliœ matrimonium contrahi, post filiam suam, secundo matrimonio sterilem, tam iterum
tanlœ audoritatis senectufem, heri Severus constan- patrem factum, quam et iterum maritum. Ibid.,
tissimus pnncipum exclusif. Idem, Apolog., cap. 4. cap. 12.
* Propterlncontinentiœpericulum,permittitur nubere ' De spectaculis autem et voluptafibus hujusmodi,
ne les adore point; n'est-ce pas les adorer que tiens, plus soigneux encore que les païens
de contribuer à les faire adorer par les au- d'illuminer le devant de leur maison et de
'"• très?Le zèle de la foi gémit de voir un cbré- couronner leiu-s portes de lauriers. Il soutient
tien approcher du corps de Jésus-Christ les que ces cérémonies sont autant d'actes d'i-
mêmes mains qu'il a employées au service dolàtrie; le prétexte était,il est vrai,d'hono-
du démon. » rer l'empereur, néanmoins, dans le fond,
"1' 4 «Ceux qui contribuent de leurs frais à l'or-
. CCS honneurs se rapportaient aux faux dieux,
nement des temples ou des idoles, sont encore auxquels les Grecs et les Romains consacraient
coupables d'idolâtrie, quoiqu'ils ne mettent l'entrée de leurmaison. Il rapporte, à ce su-
*• pas la main à l'ouvrage. Les astrologues, parce jet, un exemple d'un chrétien qui fut rude-
qu'ils honorent les astres et qu'ils leur attri- ment châtié en une vision, la même nuit où
buent le même pouvoir qu'à Dieu, tombent ses esclaves avaient couronné sa porte dans
aussi dans ce crime; car encore que ceux qui une joie publicpie nouvellement annoncée,
vinrent d'Orient pour adorer Jésus-Christ, fus- quoiqu'il ne l'eût ni fait, ni commandé; car il
sent des mages et des astrologues; toutefois, était sorti et l'avait à son retour.
trouvé fait
comme que jus-
cette science n'a été tolérée Il conclut qu'il faut rendre à César ce qui
qu'à l'Évaugile absolument défen-
', elle est appartient à César, c'est-à-dire, être soumis
due aux chrétiens,comme toute autre sorte de aux puissances, mais selon les lois du chris-
*• magie. Ils ne doivent pas même enseigner tianisme; de manière à éviter tout ce qui a
les lettres humaines, eu égard aux supersti- rapport à l'idolâtrie. Il traite, ensuite des as- m.
tions auxquelles cette profession les engage semblées de famille, innocentes par elles-
et à la nécessité où elle les met d'expliquer mêmes, comme pour des fiançailles ou des
les noms, les généalogies et toutes les fables noces ,
pour donner le nom à un enfant ou
des faux dieux; mais ils peuvent s'en faire ins- la robe virile à un jeune homme; et il décide
truire et en tirer même du profit pour l'étude qu'on pouvait y assister, pourvu qu'on ne par-
de la religion, parce qu'ayaut déjà la con- ticipât en aucune façon aux sacrifices qui
naissance de la vérité, il leur est aisé de dis- s'y faisaient,c'est-à-dire, qu'on n'y contribuât
*'•
tinguer le vrai d'avec le faux. Il est encore ni de son argent, ni de son ministère. Quant xvn
ne lui soient interdites, d'autant plus que les mais en ajoutant quelque chose qui fasse
1 Ista scientia,usque od Evangclium,fuit concessa,ut exinde Simon magus jam fidelis,quonium aliquid ad-
Christo edilo,nemo exinde nativitatem alicujus de cœlo huc de circulatoria secta cogitaret, ut scilicet intermi-
interpretetur. Idcirco magi jussi sunt ut irent in sua, racula professionis suœ, etiam Spiritum Sanctumper
sed alia, non qua vénérant via, id est ne pristina secta manuum impositionem enundinaret,maledicius ab Apos-
tua incederent sic et alia illa species magiœ quœ tolis de fide ejedus ei^ TertuU. , \ib. de Idololatr.,
miraculis operatur, etiam adversus Moysen œ^mulata, cap. 9.
patientiam Dei traxit usque ad Evangelium. Nam et
[m® SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 39
connaître qu'ils ne les regardent point comme philosophes avaient enseigné de la nature de ^ap. i.
'"'
dieux. Pour ceux qui, par une mauvaise habi- l'âme. Si Socrate la croit immortelle, par la
tude, juraient par les dieux, comme c'était la raison que le corps est mortel, c'est une opi-
coutume chez les Romains de jurer par Her- nion qu'il a avancée comme juste, non comme
cule,ilneles exempte point du crime d'idolâ- certaine; car â qui la vérité est-elle connue
trie, non plus que ceux qui, étant pressés de ju- sans Dieu? Qui a la connaissance de Dieu
rer parune|idole,se taisaient ou dissimulaient, sans celle de Jésus-Christ? celle de Jésus-
de peur d'être reconnus pour chrétiens; car en Christ, sans celle du Saint-Esprit? celle du
ce cas, comme dans tout autre, c'est nier que Saint-Esprit, sans le sacrement de la foi ? Il
"•
"'"• de dissimuler. Il condamne aussi un chrétien commence donc par rapporter les diverses
qui avait emprunté de l'argent d'un païen , opinions des philosophes sur ce sujet, et vient
sous une obhgation qui contenait un serment ensuite à l'examen de chacune en particulier.
par les faux dieux quoiqu'il ne l'eût pas Il attaque Platon et les autres philosophes, '^^'^•
,
écrite lui-même, mais seulement pour l'avoir qui prétendaient que l'âme est incréée ; sen-
"xxiv
signée sans savoir ce qu'il signait. A la fin, timent qu'il détruit par l'autorité de l'Écri-
ilexhorte les fidèles à conserver la foi pure ture, qui assure que Dieu communiqua à
au milieu de tant d'écueils qui pouvaient à Adam le souffle de la vie. Il soutient, contre
tout moment les précipiter dans l'idolâtrie*. les mêmes philosophes, que l'âme est corpo-
relle, non selon l'opinion d'Hipparque, d'He-
de quelques autres,qui ne la distin-
raclite et
ARTICLE XII.
guaient point des corps purement matériels ;
ECRITS DE TERTULLIEN APRÈS SA CHUTE mais suivant les stoïciens, chez qui elle pas-
TRAITÉ DE L'AME. sait pour un esprit corporel. En etïet, dit-il,
l'âme compatissant au corps, et réciproque-
.,^^
nous reste maintenant à traiter des
4. Il ment le corps â l'âme, il s'ensuit que l'âme
fia"® écrits que Tertullieu composa depuis sa chute, est corporelle, puisque cette communication
lien! On peut siirement mettre de ce nombre mutuelle ne peut se faire qu'entre deux cho-
le Traité de l'Aine, où il relève en plus d'un ses de même nature.
endroit l'autorité de son Paraclet , et où il 3. Quanta Pobjection faite par les plato- '»•
va même jusqu'à appuyer son sentiment au niciens, que tout corps est nécessairement
sujet de la nature de l'âme, sur les préten- animé ou inanimé, il est facile de la détruire:
dues révélations d'une femme de la secte l'âme ne saurait être un corps animé, puis-
des montanistes. Il fit paraître ce livre dans qu'eUe-même anime le corps. Ils disent en-
le temps qu'il méditait son grand ouvrage core que les qualités de l'âme tombent sous
contre Marcion ; c'est-à-dire , vers l'an 206, les sens de l'entendement, non sous ceux du
ce que l'on infère de ce qu'il y promet de corps; mais les choses incorporelles ne sont-
traiter ailleurs de la nature de Dieu, contre eUes pas aussi l'objet des sens corporels,
les hérétiques, matière qui fait le sujet de ses comme le son de l'ouïe, les couleurs de la
deux premiers livres contre Marcion ; par con- vue, l'odeur de l'odorat? Ils disent aussi que
séquent, il faut entendre du premier ouvrage tout corps se nourrit de choses corporelles,
qu'il fit contre cet hérésiarque ce qu'il dit tandis que la nourriture de l'âme est la
dans un autre endroit du Traité de l'Ame, qu'il science. J'en conviens ; toutefois Soranus,
avait montré, contre Marcion et Hermogène, très-habile médecin, a fait voir que l'âme se
que l'homme a naturellement le libre arbitre. nourrit comme le corps; autrement, que de-
Ce qui appuie encore cette conjecture, c'est viendraient tant d'âmes des Barbares qui
que, dans celui qui a pour titre: De la Chair de vivent sans aucune connaissance de la phi-
Jésus-Christ, postérieur au Traité de l'Ame, losophie? Mais les stoïciens répondent plus
il appelle seulement un opuscule ce qu'il pertinemment, prétendant que les arts, dont
avait écrit jusque-là contre Marcion. l'âme se nourrit, sont quelque chose de cor-
té* 2. Son but, dans le Traité de l'Ame, est de porel. Enfin l'âme du mauvais riche souffre vu.
faire passer pour incertain tout ce que les dans les enfers; donc elle est corporelle. Il
' On Yoit,par ce Traité,combieii il était difficile aux formule fort bien,dans cet ouvrage, les prescriptions
chrétiens de pratiquer leur religion au milieu d'une particulières, quoique les preuves qu'il en donne ne
société toute imprégnée de paganisme. Tertuliien soient pas toujours concluantes. {L'éditeur.)
iO HISTOIRE GÉNÉRALE DP:S AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
c«p. nii est vrai qu'elle est invisible, mais c'est à la mière respiration, comme elle en était chas-
chair et non pas à l'esprit; car saint Jean, sée parle dernier soupir. Teitullien réfute Cap. xxvi,
ravi en liic.i, vit les auK;- des martyrs. Tel tous ces sentiments; il prét(Mid qu'elle est
est le sentiment de Terlullien sur la nature conçue dans le ventre de la nn-re, en même
«u- de lame. 11 va même jusqu'à lui attribuer les temps que le corps, et, pour expliquer son XX Vil.
trois dimensions et la iî^ute humaine; et il opinion, il entre dans un long détail sur la
u'a pas luuitc de se fonder enetda sur les rê- manière dont se fait la propagation. Ce qu'il
veries d'une certaine femme qui s'était ima- y a de meilleur et qui prouve qu'il ne reje-
ginée avoir vu, en révélation, des âmes de la tait pas encore le mariage, c'est qu'il y ap-
couleur de l'air, et d'une forme humaine. prouve l'union légitime de l'homme avec la
A. Ce qu'il ajoute est plus sensé, et on ne femme.
voit pas bien comment il a pu l'accorder avec 6. Venant au système de Platon sur le pas-
scq.
ce qui précède, à moins de dire que, pensant sage réciproque des âmes d'un corps à un
xetseq. bien, il s'est mal exprimé. D'après lui, l'âme autre, il en fait voir la fausseté: le nombre des
n'est pas distinguée de l'esprit; elle est simple hommes n'a pas toujours été le même, et ils
par elle-même, indivisible, indissoluble, im- se sont multipliés à mesure que le monde a
mortelle. Il réfute les platoniciens, qui la di- vieilli,ainsi qu'il est rapporté dans l'histoire
visaient en plusieurs parties, sous prétexte des autiquités humaines. Quant à la métemp- XXXI
leq.
qu'elle a différentes puissances, sans prendre sycose de Pythagore, il se contente de l'atta-
Jésus-Clirist et les Prophètes nous ont ensei- croit non en substance, mais en force; qu'elle
gné. Une laisse pas de reconnaître, avec Platon, est,desa nature, libre et immortelle; que cha-
qu'il y a dans l'ame le raisonnable et l'iriai- que humme, dès le moment de .'^a naissance,
sonnable; mais ce iju'elle ad 'irraisonnable lui est obsédé d'un mauvais esprit; ce qui fait
est venu du péché et ne lui est point naturel. que nous naissons tous immondes. L'âme est
"'• Seulement il lui est passé comme en nature, censée coupable de la prévarication d'Adam,
parce qu'elle est tombée dans la transgres- jusi]u'à ce qu'elle nai&seeu Jésus-Christ: elle
*^'' sien presque aussitôt qu'elle a été créée. Il contracte le péché par son union avec la chair.
enseigne, selon les stoïciens, que nos sens ne Enfin la chair est blâmée dans les Écritures,
sont pas sujets à erreur; car tout ce qu'ds parce qu'elle sert d'instrument â l'àme pour
nous rapportent est conforme à l'ordre <ie la accomplir ses mauvais désirs , pour la gour-
sagesse divine; et on ne peut dire que Jésus- mandise, pour la veiîgeauce, pour la cruauté,
Christ s'est trompé, en assurant avoir vu Sa- pour l'idolâtrie. « Cependant, ajoute-il, la cor- XU.
tan tomber du ciel, ou en consacrant du vin ruption de notre nature n'est pas si grande,
pour être la mémoire de son sang, que l'àme soit entièrement dépouillée de tout
«viii. 5. Il prouve ensuite que la scnsa tion de l'àme bien; car elle a conservé le libre arbitre qui,
n'est point distinguée de son entendement, pour être affaibli, n'est pas entièrement éteint.
qu'elle ne peut être privée un seul moment Ainsi il reste toujours quelque chose de bon,
XX. de cette puissance, que la grossièreté ou la même dans les plus méchants; comme dans
subtdité de l'esprit vient de la différence des les meilleuro y a toujours quelque chose de
il
lieux où nous naissons et des études que nous mauvais; car Dieu seul est sans péché, et, entre
Kl. embrassons.il établit clairement la force de la les hommes, Jésus-Christ, parce qu'il est aussi
grâce; elle est plus puissante que la nature, Dieu. »
xxu. et a sous elle notre libre arbitre. Puis, après 7. Il passe au sommeil, qu'il définit , avec \LIU.
avoir donné la définition de l'âme, il traite Iss stoïciens, « l'assoupissement des sens.»
ïxiii.xxW de son origine. Saturnin enseignait qu'elle L'âme n'en a pas besoin, et que, pendant ce
et XXV
était descendue du ciel, Platon la croyait temps, elle agit sans le secours du corps. Ce XLV.
incréée, d'autres prétendaient qu'elle était qui se en cet état n'est digne ni de puni-
fait
attirée dans le corps de l'enfant par la pre- tion,ni de récompense. Les réponses rendues
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 41
ges viennent aussi de Dieu, qui a promis, par fasciner les yeux du corps, puisqu'il leur est
ses Prophètes, de répandre de son esprit sur facile d'obscurcir même ceux de l'ame. «Mais
•
i'.
L. ses serviteurs et sur ses servantes. Il établit à Dieu ne plaise> ajoute-t-il, parlant de l'âme
ensuite, contre Epicure et Ménaiidre, la né- de Samuel qui apparut que nous à Saïil,
cessité de mourir imposée à tous les hommes, croyions que le démon ait jamais évoqué des
et ajoute il ne reste dans le
qu'après la mort enfers,je ne dis pas l'âme d'un prophète, mais
u. corps aucune partie de l'âme. Il rapporte à ce de quelqu'autre saint! Car nous savons nue
sujet l'histoire d'une femme chrétienne qui Satan peut bien se transformer en un ange,
était moiie après un court et uni jue mariage: mais non en un homme de lumière. En un
taudis qu'on était occupé à ses obsèques et mot, l'histou'e du pauvre qui reposait dans
que le prêtre commençait à faire les prières, le sein d'Abraham , et du mauvais riche qui
eUe étendit tout-à-coiip ses mains jointes à gémissait dans les tourments, prouve assez
tes côtés et les joignit en forme de suppliante; qu'aucune âme ne peut sortir des enfers: si
et quand
l'oraison fut achevée, elle se remit Dieu, pour marque de son pouvoir absolu,
comme auparavant. Ce mouvement extraor- en a retiré quelques-unes et les a rendues à
dinaire, dit-il, doit s'attribuer à la puissance leurs corps, il ne s'ensuit pas que les magi-
de Dieu et non à quelque parcelle de l'âme ciens puissent faire la même chose'. »
demeurée dans le corps; autrement, les autres
membres auraient été mus de même que les ARTICLE XIII.
mains; au moins elles ne se seraient pas dis-
TRAITÉ DE LA CHAIR DE JÉSUS-CHRIST.
Lii, posées comme pour faire oraison. La mort,
d'après uUien, Tertest tellement une suite du i. Après le Traité de l'Ame, Tertullien Tmité de
péché, que si Ihomme n'y fût pas tombé, il composa celui qui a pour titre : De la Chair Jésus-curist
moment de sa séparation d'avec le corps; pri- jugé fâcheux contre leur doctrine la résur-
vilège qu'il n'accorde qu'aux mai tyrs, fondé rection de la chair de Jésus-Christ, ils pre-
sur les révélations de saint Jean et de sainte nai*mt le parti ou de dire qu'il avait pris une
Perpétue, qui assurent avoir vu dans le para- chair différente de la nôtre, ou de nier abso-
Lvi. dis les âmes des martyrs. Sur la résurrection, lument qu'd se fût incarné. Marcion soutenait
il semble crone que nous ressusciterons tous ce dernier sentiment, et c'est le premier que
dans un âge parfait; niais il dit expressément Tertullien entreprend de réfuter. « Si Jésus-
que nous ressusciterons dans les mêmes corps. Christ n'est pas né, dit-il, c'est sans doute
Lvii. Enfin il attaque ceux qui promettaient d'évo- ou parce qu'il était impossible à Dieu de le
quer des enfers les âmes mêmes desjustes. Il faire,ou parce qu'il était indigne de lui. 1" Il —
soutient que ce sont des illusions dont les dé- ne lui était pas impossible, puisqu'il peut
mons sont auteurs, comme i's étaient obligés tout ce qu'il veut or, il a voulu naitre, au-
:
de l'avouer eux-mêmes dans les exorcismes. trement il n'eût pas paru comme homme,
* L'auteur développe dans cet ouvrage, dit Mœlher, * Ut autem dausula de prœfatione communi faciat,
desconnaissancespbilosopliiques et psycologiques vas- resurrectio carnis nostrce alio libellodefendenda hic ,
tes et variées, quoiqu'il n'ait pas toujours saisi la vérité. habehit prœstructionem ; manifesta jam quale fuerit
La dernière partie de sa dissertation sur le péché quod in Chnsto resurrexit. Tertull., lib. de Cam.
originel, sur les forces de l'àme dans l'homme déchu Chvisti, cap. ullim.
et sur l'état des âmes après la mort, est surtout d'un ' Habet et iste a nobis plenissimum de omni statu
grand intérêt pour l'histoire du dogme. {L'édi' animœ siylum. Idem, lib. de Ref^urrect. carnis, c&p.i.
leur.)
42 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
car il n'avait aucune raison de se faire passer penti. De là Tertullien infère que le monde
pour ce qu'il n'était point.» « Mais, disait — est donc un mal; car se repentir, c'est avouer
Marcion, si Jésus-Christ s'est vérital)lcment une faute : si le monde est un mal, le ciel
incarné, il a donc cessé d'être Dieu? on ne est un mal aussi, et par conséquent tout ce
peut devenir ce que l'on n'était point qu'en qui en est sorti : ainsi, si Jésus-Christ a pris
cessant d'être ce que l'on était.» Tertullien sa chair du ciel, cette chair est donc mau-
répond: «Autre est la nature de Dieu, autre la vaise ? Il explique encore l'endroit où il est
condition des choses créées. Celles-ci ne peu- dit que premier homme a été tiré de la
le
vent recevoir une nouvelle nature sans quit- terre, et que le second est venu du ciel; et Cap
ter la première ; Dieu peut prendre quelle il fait voir que cette différence doit s'entendre
nature il lui plaît, et rester toujours Dieu. Il de l'esprit et non de la chair, qu'il prouve
est plus puissant que les anges, qui se sont avoir été la même en Jésus-Christ que dans
revêtus de corps humains sans cesser d'être les autres hommes, par les mêmes besoins
anges.— 2° Il n'était pas plus indigne de Dieu et les mêmes infirmités auxquelles il a été
de naître, que de mourir et d'être attaché à sujet. 11 vient à ceux qui prétendaient que x.
une croix. D'ailleurs, pourquoi Jésus-Christ l'âme de Jésus-Christ avait été rendue sensi-
est-il nomme homme et fils de l'homme, s'il ble, de sorte qu'elle n'était pas distinguée de
n'avait rien de l'homme ? On ne dirait pas sa chair, et il leur montre qu'ils pensaient
qu'il était homme, s'il n'avait eu une chair en cela contre leurs propres principes. Car,
comme la nôtre, ni qu'il était fils de l'homme, selon eux, Jésus-Christ n'était venu que pour
si son origine n'eût pas été humaine ; de délivrer l'âme. Enfin il une
prouve qu'il avait xm.
même qu'on ne l'appellerait pas Dieu, sans âme et une
chair, puisqu'il dit Mon âme est :
l'esprit de Dieu, ni Fils de Dieu, s'il n'avait triste jusqu'à la mort; et ailleurs: Ze joam ^we
pas DieupourPêre.» je donnerai est ma chair, pour la vie du monde.
2. Il tourne ensuite la dispute contre Apel- 4. Jésus-Christ, étant venu pour sauver l'hom- xivetxv.
lès qui, J-econnaissant que Jésus-Christ s'était me, n'a pas dû prendre la nature de l'ange.
véritahlement incarné, prétendait qu'il avait Comme homme, il a été fait moindre que les
pris sa chair du ciel et non de Marie ; ce qui, anges; mais, en tant qu'il est l'esprit de Dieu
selon cet hérétique, n'était pas étonnant, les et la vertu du Très-Haut, il ne peut être ré-
anges ayant eu des corps sans être nés de la puté au-dessous d'eux, car il est Dieu et Fils
chair. Pour répondre à cet argument, Ter- de Dieu ; aussi il ne dit jamais comme les Pro-
tullien distingue les raisonspour lesquelles phètes L'ange qui me parlait dit, ou Le Sei-
:
Jésus-Christ et les anges avaient paru dans gneur dit; mais il parle avec son autorité Et :
la chair. «Aucun ange n'est descendu du ciel moi je vous dis. Par là Tertullien établit la
pour mourir Jésus-Christ a été envoyé à
; distinction des deux natures en Jésus-Christ.
cette fin, et par conséquent il était nécessaire Il justifie ensuite les siens des calomnies de XVI.
qu'il naquit , puisqu'autrcment il n'eût pas l'hérétique Alexandre, qui les accusait de
été mortel. JNIais, ajoute-t-il, quelle preuve a croire que Jésus-Christ avait pris une chair
Apcllês que les anges aient pris leurs corps pécheresse comme la nôtre. 11 explique, à
dans le ciel? car on ne trouve pas cela dans cette occasion, en quoi consistait cette con-
les Ecritures probable qu'ils se
: il est plus formité, et montre que la nature humaine
les sont formés de rien ou bien d'une subs- dans Jésus-Christ était exempte de toutes ta- I
tance terrestre.» Quant à la réponse que fit ches du péché. Jésus-Christ a dû naitre d'une XVII.
Jésus-Christ à ceux qui lui vinrent annoncer Vierge !<' pour vérifier la prédiction d'Isaïe,
:
1
[IW SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 43
est écrit : // est né non du sang, ni de la vo- reçu la foi tandis qu'elle était dans la chair.
lonté de la chair ou de l'homme, mais de Dieu? « C'est la chair que l'âme est récon-
qui fait
Tertullien répond que saint Jean, en disant ciliée à Dieu
; on lavepour purifier
la chair,
que le Verbe n'est pas né de la volonté de la l'âme ; on oint la chair, pour consacrer l'âme ;
chair, ne nie pas qu'il soit né de la substance on fait sur la chair le signe de la croix, pour
Cap. zx. de la chair ; et comme Valentin tâchait d'é- fortifier l'âme; on met la chair à l'ombre, par
chapper à cette réponse, en avouant que Jé- l'imposition des mains, afin que l'âme soit
sus-Christ était né par la Vierge, mais non éclairée par l'esprit ; la chair se nourrit du
pas de la Vierge, il rapporte plusieurs en- corps et du sang de Jésus-Christ, afin que
droits de l'Ecriture où il est dit expressé- l'âme soit engraissée. Que dirai-je des sacri-
un.
•t
ment que Jésus-Christ né de Marie. En est fices si agréables qu'elle offre â Dieu des biens
effet, si le Verbe s'est formé lui-même une qui lui sont propres, comme les jeûnes, la
chair, il s'est donc conçu lui-même ? il s'est virginité, la viduité? C'est elle qui combat,
enfanté lui-même, la prophétie d'Isaie est exposée à la haine publique et aux tourments
fausse, aussi bien que la salutation d'Ehsa- des démons, pour le nom de Jésus-Christ, et
beth : Béiii soit le fruit de votre ventre. Jésus- s'efforce ainsi de lui rendre la pareille en
Christ n'est plus la fleur sortie de la racine mourant pour lui. Quoi donc! cette chair que Cap, u.
de Jessé, il n'est plus le fils de David et d'A- Dieu a formée de ses mains et qu'il a animée
braham, à moms de dire que ceux-ci avaient de son souffle, qu'il a établie pour commander
aussi un corps céleste. Mais voici, ajoute à tous ses ouvrages, qu'il a revêtue de ses
Tertullien, l'accomplissement de ce qui a été sacrements, dont il aime la pureté, dont il
prédit par Siméon : la conception et l'enfan- approuve la mortification, dont il prise les
tement de la Vierge Marie sont véritable- souffrances ; cette chair ne ressuscitera-t-elle
ment le signe de contradiction. Il montre en pas, elle qui est â Dieu par tant de titres ? Il x.
cet endroit comment elle a été Vierge et est vrai qu'elle est faible et qu'elle a péri
Mère tout ensemble puis, après avoir mar- : misérablement; mais Dieu fait reluire sa
qué et condamné les différentes manières dont puissance dans l'infirmité, et il est venu pour
les hérétiques divisaient Jésus-Christ, il finit chercher ce qui était perdu sans ces mal- :
ce Traité par une transition relative à celui heurs qui sont arrivés à la chair, qu'il me
de la Résuri^ection de la chair. soit permis de le dire, la bonté de Dieu, sa
grâce, sa miséricorde devenait inutile, faute
ARTICLE XIV. d'occasion de l'exercer. » Il reconnaît qu'en
certains endroits de l'Ecriture la chair est
TRAITÉ DE LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR.
blâmée ; mais il oppose â ces passages ceux
Traité de \ . L'élogc qu'il v fait des nouvelles prophé- qui sont eu sa faveur ; après quoi il vient aux
tiou de la
haïr.
ties du Paraclct,? de Montan,} ne
c'est-à-dire,j preuves de la résurrection.
P^^'Qiet pas dc doutcr qu'il ne l'ait composé 2. D'abord il en établit la possibilité, sur la xi.
Analyse
ce Traité,
le
étant moutanistc. Il est divisé en deux par- toute-puissance de Dieu, toujours en pouvoir
ag.325!'
' ^^^^- ^^ première tend à prouver la résur- de rétablir ses ouvrages, quelque changement
rection de la chair contre les nouveaux sad- qu'ils aient souffert, fussent-ils même anéan-
ducéens, c'est-à-dire^ contre les valentiniens tis ; pouvoir dont la nature nous fournit une xu et xm.
et autres hérétiques qui n'admettaient que ,
infinité d'exemples, dans le phénix renaissant
celle de l'àme,et qu'ils faisaient consister dans des cendresd'un autre, dans la vicissitude des
la conversion des mœurs, tournant en allégo- jours, des astres, des saisons, cjui sout autant
ries tout ce que l'Ecriture dit de la résurrec- de figures de la résurrection de nos corps.
tion des corps. Comme ils n'avaient embrassé Quant à la nécessité de la résurrection , il la xiv.
vet vi. cette erreur qu'en haine de la chair, Tertul- prouve par le compte que chaque homme
lien s'applique à en relever la dignité ' par doit rendre de ses actions au jugement der-
vil. lesavantages de la création, par son union nier ; car le corps étant joint â l'âme de telle xv.
viii, avec l'âme, par la part qu'elle a au salut, sorte que, sans lui, elle n'agit et ne pense point,
nulle àme ne pouvant être sauvée qu'elle n'ait il est juste que ce corps participe à la peine
' Spiritus Sanctus jam omnes rétro ambiguitates et tiam de Paracleto inundantem, cujus si hauseris fon-
quas volunt parabolas, aperta atque perspicua totius tes, nullam poteris sitire dodrinam. TertulL, lib. de
sacramenti prcedicatione discussit, per novam prophe- Resurrect. carn., cap. 6.
44 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEUHS ECCLÉSIATIQUES.
ou cà la récompense qu'elle tloit recevoir de ses substance qu'il avait lorsqu'il y est monté ,
Cip. xvi, actions. On répondait (jue la chair est à l'é- c'est-à-dire avec la même chair et le même
gard del'àtnecoinme un vase ipii la renferme, sang que celui des autres hommes,mais dans
et que celle-ci doit être jugée uniquement sur une plus ijrande pureté.
l'usage qu'fdle aura fait d-^ ce vase. Mais Ter- 3. ïerluUien montre ensuite que c'est la Cap LU
tullien soutient, au contraire,que lachair ayant même cliair qui doit ressusciter ce qu'il ap- ,
été conçue et engendrée au même moment puie sur l'exemple du grain confié à la terre,
que l'àme et conjointement avec elle, con- que l'Apôtre propose comme la figure de ce
court avec elle à toutes les opérations de qui doit arriver dans la résurrection. Il réfute lu.
*^' l'homme. Au reste, il déclare que ce qui l'en- ceux qui expliquaient de l'àme ce que le même
gage à détendre la nécessité de la résurrec- Apotredil du corps animal; l'àme, n'élaut point i
tion, n'est pas qu'il croie que l'àme ne puisse mortelle , ne peut non plus ressusciter. Il
soutTrir ou être heui'euse sans le corps ; car, traite ensuite de l'état du corps après la ré-
dit-il, nous ne penoons pas comme le vul- surrection, il enseigne que ses propriétés se- lv
gaire, qiiilacroit incorporelle; maisnouspro- ront absolum.ent changées, mais que sa subs-
fessons ici ce que nous avons prouvé en son tance ne laissera pas d'être la même, comme
xvmeiieq. lieu, que l'àme est corporelle. Il a donc re- dans la vie présente; il passe successivement
cours à d'autres preaves,qui sont les prophé- delà sauté à la maladie, et de la maladie à la
ties qui annoncent clairement la résurrection, santé, conservant toujours sa même nature,
les figures qui la représentent, les paroles de comme la main de Moïse, le visage de saint
Jésus-Christ qui l'établissent, ses miracles qui Etienne, les vêtements de J es iis-Glirist, chan-
la confirment. A ces autorités il ajoute celles gèrent de forme, sans changer de nature. En ui.
qu'il tire des Épitres de saint Paul et des dis- etfet, il ne seiait pas digne de Uieu de don-
royaumedes cieux, marquant, parées paroles, quoiqu'ils ne puissent nous être d'aucun
non la substance de la chair, mais ses œuvres. usage après la résurrection, parce qu'alors
"'•
Car il y aurait eu de l'imprudence en lui de nous serons afiranchis des nécessités de la vie
déclarer en général que la chair et le sang présente il est cependant nécessaire qu'ils
,
1 Cum illic sedeat adhuc Jésus ad dexteram Patris, lis eiiam descensurus ut angeli adfirmant, agnoscendus
homo etsi Deus.... caro et sanguisetsi nostris puriora. scilicet eis qui illum convulneraveruni, Lib. deResur-
Ibidem tamen et substantia «t forma qua ascendit, ia- rect. carn., cap. 51.
[m* SIÈCLE. CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 45
montre assez quel sera l'état de nos corps Trotté de la Résurrection (Je la choir y est ' cité.
après sa résurrection, et, en déclarant qu'alors 2. iN.arcion ^ avait été élevé dans l'Eiilise; Analyse.
nous serons comme des anges, il ne dit pas mais, ayant abandonné l'ancienne doctrine
' -^
^JV*
|iag, 3B5.
i-
que nous serons des anges, mais seulement pour en embrasser une nouvelle, il tomba
que nous serons semblables à eux *.» dans l'erreur. Car, dit Tertullien, il suffit Cap. i.
par les nouvelles prophéties de Montan. C'est pliqne donc piincipulement à prouver l'exis-
ce qu'il marque lui-même assez clairement tence d'un seul Dieu. «C'est, dit-il, une vérité
lorsque , parlant de certaines révélations, il reconnue que, si Dieu n'est pas un, il n'est
dit «qu'il y * avait dispute sur ce point entre point; d'ailleurs, l'idée naturelle que tous les
lui et les psychiques;» car on sait que, sous ce hommes ont de Dieu, le représente comme un
nom, les montauistes entendaient les catho- être souverainement grand, et cet attribut ne
liques. Cet ouvrage ne laisse pas d'être ex- peut convenir à plusieurs; autrement, si tous
cellent et digne d'être regardé comme un avaient la même puicsance,aucun d'eux ne se-
des trésors de l'ancienne théologie, suivant rait l'Être souverain.Or,la même raison qui ne ^.
le jugement qu'en a porté un habile ^ écri- permet pas d'en admettre plusieurs, ne souf-
vain de nos jours e. L'auteur, d'abord, avait fre pas non plus qu'on en reconnaisse deux en- vu
nes de fautes. Tertullien fut donc obligé de s'est trouvé dans l'assemblée des dieux. Mais
le corriuer, et, en le corrigeant, il l'augmenta combien y a-t-il aujourd'hui de misérables
de nouveau et fit ce grand ouvrage que nous qui piennent les noms des plus grands rois,
avons aujourd'hui, divisé en cinq livres. Le comme d'Alexandre, de Darius, d'Holopherne,
1 Cet ouvrage, ainsi que le précédent, est écrit avec ' Marcion naquit àSynope,daDs le Pont, sous l'em-
plus de calme et une exégèse plus exacte que beau- pire d'Antonin, vers l'an de Jésus-Christ 148. 11 était
coup d'autres ouvrages de Tertullien. (L'édileur.) fils d'un évéque catholique, et il passa les premières
' At nunc quale est, ut Dominus a xii Tiberii Cœ- années dans la retraite, gardant la continence; mais,
saris revelutus sit, substardia vero ad decimum quin- ayant ensuite corrompu une vierge , sou père, qui
tum jam Severi imperatoris nulla om?iino comperta était un vieillard illustre par sa piété, par son atta-
sit. TerluU., lib. I ado. Marcion., cap. 15. chement à la sainte doctrine et par son application
Sed et si n:bendt jnm modus poniiur, quem quidem
8
aux fonctions de l'épiscopat, en fut si aifligé, qu'il
apud nos sjjiniualis ratio Paracleto auctore défendit le chassa de l'Eglise. Ce fut en vain que Marcion té-
unum in fide niatrimonium prœscribens ejusdem erit ,
moigna se repentir de sa faute, il ne put en obtenir
et modum figere qui modum aliquando diffuderat. le pardon de son père. Il vint donc à Rome et s'a-
Idem, ibid., cap. 29. dressa aux anciens prêtres qui restaient encore de
* De quo inter nos et psychicos quœstio est. Idem, ceux que les disciples des Ajiôlres avaient instruits;
ibid , lib. IV, cap. 22. mais ils ne voulurent point l'admellre à leur com-
* Fleury, Hist. tom. II, pag. 50. eccles., pagnie, de sorte que, l'iudignalion et l'orgueil l'em-
' Moelher porte jugement. C'est un véri-
le même portant, il leur dit : « Je déchirerai votre Eglise, et
table IréïOr de science cbrétieune et une école pour j'y mettrai une division éternelle.» Il se s-épara ainsi
former à l'apologétique chrétienne. Les deux der- d e l'Eglise, et suivit le parti de l'imposteur Cerdon.
niers livres ont aussi une grande valeur sous le rap- Tertull., lib. I in Marcion., cap. 19; item, Prascript.,
port exégétique et critique. {L'éditeur.) 61, et Epiph., hœresi. 42.
Lib. V contr. Marcion, cap. 9.
''
Uy HISTOIR!-: GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
teur, ce qu'il fait servir à ses sacrements. »
I
sans que, pour cela, coux-ci perdent quelque
Cap. XV.
chose de ce qu'ils étaiont. Ce n'est pas au nom 4. Il montre ensuite aux marcionites que, se-
de Dieu donné au Créateur, que j'attribue lon leurs propres principes,ils étaient obligés
la qualité d'être souverainement grand, c'est de reconnaître non-seulementdcux dieux,mais
à lui-môme, à sa propre substance, parce encore plusieurs autres ; puis il répond à ce
Cap.vui commencement.)) Il
qu'elle est éternelle, sans qu'ils disaient que les clioses accomplies par
'"
se moque du dieu inconnu que Marcion ve- leur dieu, pour déU\Tcr l'homme, étaient suffi-
nait annoncer, comme s'il était possible que santes pour le faire connaître. « [1 faut, dit-il,
ce dieu eût existé durant tant de siècles sans avant toutes choses, prouver, par ses ouvrages,
donner aucune marque de sa grandeur ni de qu'il existe ; après quoi vous ferez voir, par ses
sa bonté, surtout s'il était vrai, comme pré- bienfaits,quel il est. Dieu ne peut se manifester XVIJ.
tendait Marcion, qu'il surpassât eu l'un et en que par .ses productions ou par le moyen de
1. l'autre le Créateur. Il conclut qu'on ne doit ceux qu'il envoie pour l'annoncer; celui-ci
pas balancer un moment à rejeter ce dieu n'est ni par ses effets, puisqu'il n'en a
connu
inconnu, d'autant que la preuve la plus assu- produit aucun, ni par la prédication d'autrui ;
rée que nous ayons de l'exis-tence de Dieu, car Jésus-Christ ne nous a pas enseigné un
XX et xxi.
c'est qu'il n'a jamais été ignoré ; car l'âme a
autre Dieu que le Créateur. Ce dernier est aussi
reçu dès le commencement un sentiment in- que les Apôtres nous aient annoncé *,
le seul
térieur (jui l'assure qu'il y a un Dieu, comme on peut le voir par la foi des Eglises
ont fondées qui toutes professent la
ju.
3. Le monde étant l'ouvrage du Créateur, qu'ils ,
il n'est pas raisonnable d'admettre un autre religion chrétienne au nom du Créateur. En XXII.
Dieu. Car, puisqu'on s'est accordé à recon- un mot, le dieu de Marcion n'est bon ni par
naître le premier pour tel, uniquement parce sa nature, ni par raison ; si la bonté lui était
qu'on sait qu'il est l'auteur de la création, naturelle, dû secourir l'homme dès
il aurait
on doit, par une raison contraire, rejeter celui le commencement contre la malice du Créa-
dont on ne voit aucune production, à moins teur; cependant l'homme est condamné à
de dire ou qu'il n'a pu créer le monde, ou mourir seulement pour avoir goûté du fruit
qu'il n'a pas voulu ; mais l'un est indigne de d'un arbre, depuis ce temp.s, les péchés se
et,
Dieu, et l'autre ne convient pas à sa bonté, sont accrus, et à proportion les peines. Tous
qui ne peut se manifester que par les effets. périssent pour un arbre ^ qu'ils n'ont pas vu,
D'un autre côté, si la création était indigne et cela sans que ce dieu si bon en ait connais-
XII,
teur que Marcion reconnaît néanmoins pour n'est pas non plus réglée par la raison, puis-
Dieu. Mais qu'il rentre en soi-même et qu'il qu'il est venu sauver l'homme qui n'est point
XIV.
considère l'homme dans tout ce qui le com- son ouvrage , et il s'en faut bien qu'elle soit XXIV.
pose tant au-dedans qu'à l'extérieur. Il ad- sans bornes, ceux qui périssent surpassant de
mirera sans doute cet ouvrage de notre Dieu, beaucoup en nombre ceux qui participent au
que le sien a aimé lui-même jusqu'à descen- salut. Encore ne sauve-t-il ces derniers qu'im-
dre du troisième ciel et à se faire crucifier parfaitement, puisque, selon Marcion, la chair
pour l'amour de lui. Jusqu'aujourd'hui *, ne doit point ressusciter. Quel est ce dieu xxviet XX
n'a pas rejeté l'eau du Créateur, qui prescrit des loissans les faire exécuter?
ce Dieu
dont il pour laver les siens, ni l'huile
se sert qui condamne le crime et ne le punit point ?
dont il les oint, ni le miel et le lait dont il
11 faut qu'il soit tout-à-fait insensible, pour ne
les nourrit, ni le pain sous la figure duquel pas s'offenser d'une action qu'il désapprouve,
il cache son propre corps, ayant ainsi be- ou, s'il en devrait s'irriter et sa
est ofiensé, il
soin de mendier, pour ainsi dire , du Créa- colère être suivie de sa vengeance. Si l'on de-
mande aux marcionites ce qu'il arrivera des nir le crime. Ainsi il tira les siens de l'injuste cap.xv-
des continents ou des gens mariés qui se sé- la bouté du Créateur en ce qu'il répand ses
parent, comme si tous ceux-ci n'étaient pas bienfaits également sur les bons et sur les
du mariage ; et, rejetant ainsi le ma-
le fruit mauvais dans sa patience à attendre la con-
,
riage comme mauvais, il détruit le mérite de version du pécheur, dans sa miséricorde qui
la continence, qui consiste à ne pas user de le porta à pardonner aux Ninivites , dans les ''^"' ^^ '"*•
^- TertuUien fait voir que l'homme seul est cou- ensuite les contradictions apparentes de la
pable de sa chute : Dieu, en le créant, lui avait loi, dont Marcion se servait pour en calom-
donné le libre ' par là princi-
arbitre, c'est nier l'auteur, et fait voir à cet hérétique que ce
palement qu'il est à son image, et il n'était qu'il reprenait en Dieu comme des marques
pas convenable que celui qu'il faisait le maî- de faiblesse, était des effets de sa bonté pour
tre de toutes ses créatures, ne le fût pas de les hommes. Lorsqu'il demanda à Adam où '"'^•
^''
soi-même. Au reste. Dieu étant ferme dans il ne l'ignorait pas, mais il lui repro-
était, il
ses desseins, il devait conserver son ouvrage chait son péché, afin de l'exciter à s'en re-
tel qu'il l'avait fait, et par conséquent lui lais- pentir. S'il jure, c'est par soi-même,afin que xxvi.
contraire, sa justice est une marque de sa tait pas plus indigne de lui de converser avec
bonté; car,en punissant nos mauvaises actions, les hommes, que de mourir et d'être attaché
il nous fait craindre ses jugements, et par là à une croix, ce que néanmoins Marcion attri-
nous détourne du mal. buait à son dieu. A la fin de ce second livre xxvm et
6. Sur l'objection tirée du passage d'Isaïe : il y a quelques antithèses que l'auteur y mit,
« C'est moi qui forme la paix et qui crée le apparemment, pour détruire celles que Mar-
mal, » il répond qu'il faut distinguer deux cion avait faites dans un livre exprès pour
sortes de maux, le moral et le physique ; le montrer la distinction du dieu créateur et
démon est auteur du premier , Dieu fait le du dieu inconnu qu'il enseignait.
mal physique; mais ce mal est un bien, parce 7. Le troisième livre est employé à prouver
pag'sg*"''
qu'il est l'effet de sa justice, et il ne le fait sen- que Jésus-Christ est fils du Créateur: « S'il q ,_
tir que pour protéger Tinnocence et pour pu- eût été envoyé par un autre, dit TertuUien,
* Tota ergo libertas arbitrii in utramque partem con- tebat justum de arbitrii sui meritis, li-
illud efficere
cessa est il.'i, ut sui dominus constanter occurreret,et beri scilicet. Cœterum nec mali merces jure
boni, nec
bono sponle servando, et malo sponte vitando : quo- pensaretur, qui aut bonus, aut malus necessitate fuiS'
niam et alias positum hominem sub judicio Dei , opor- set inventus, non voluntaie. Ibid.,iib. II, cap. 6.
48 HISTOIRE GËNI'RALE DES AUTEUliS ECCLÉSIASTIQUES.
celui-ci aurait dû l'annoncer auparavant, aiin eu un vrai corps, ne serait ni mort ni res-
il
c»p.iieiiii. Lib. IV,
d'autoriser sa mission; car ce n'était pas as- suscité, et notre foi serait vaine. Il dit encore:
cap. VII.
sez que le Me-^sie fit des miracles, s'il n'eût qu'il était notoireque Jésus-Christ était filsde
été promis parles Prophètes qui l'avaient pré- David, ])arce cpie la distinction des familles
cédé, puisqu'il nous avertit lui-même que les et des tribus subsistait encore alors chez les
**•
faux prophètes feront aussi des miracles. Il Juifs, etque sa naissance était marquée dans
est vraique les Juifs n'ont pas voulu le recon- le recensement fait sous Auguste et gardé
naître ; mais cela même avait été prédit par dans les archives romaines.
^"-
les Projihètes; cl la cause de leur erreur est 8. Traitant ensuite des prophéties qui regar- Lib. Il
cap. XII
pas su distiutrucr entre les deux
qu'ils n'ont daient le Messie, il fait voir (ju'elles ont été scq.
Créateur. Pour montrer que le Créateur était des Juifs, TertuUien déclare clairement qu'il
homme réellement, TertuUien fait voir que si était millénaire •, et tâche d'appuyer sou
Jésus-Christ avait pu tromper les hommes opinion sur les paroles de saint Paul,d'Ezé-
quanta son humanité, il aurait pu encore plus chiel et de l'apôtre saint Jean, qui fout men-
aisément les tromper quanta la divinité, et pa- tion de
Jérusalem céleste; en cet endroit, il
la
raître Dieu sans l'être. 11 y aurait plus de sens rapporte une chose remarquable arrivée de
à regarder sa chair comme nnn née, qu'à la son temps, et qu'il dit être certaine, parle té-
croire seulement apparente, puisqu'un moins moignage mèuie des païens en Judée on :
ce sentiment serait fonde sur un fait, les an- avait vu pendant quarante jours, à certaines
ges ayant eu une chair véritable sans è're nés. heures du matin, une ville suspendue en l'air
A le bien prendre, Marcion ne gagnait rien à qui disparaissait à mesure que le jour aug-
nier la réalité de la chair de Jésus-Christ; car, mentait, jusqu'à ce qu'enfin elle s'évanouît en-
soit que Jésus-Christ ait été véritablement tièrement.
homme, eu que l'apparence,
soit qu'il n'en ait 9. Marcion avait interpolé de telle sorte Livre
pag.ilS.
IV,
Marcion autorisait également la chair,ouvrage l'Evangile de saint Luc, qu'il pouvait passer
Cap. 1.
Lib.iv, du Créateur: c'est faire injure à Dieu, de croire plutôt pour son propre ouvrage, que pour ce-
xLii et xLm qu il ait voulu paraître autre que ce qu il lui de cetévangéliste. De plus, il avait com-
était en effet; il avait un vrai corps, puisqu'il posé un livre d'antithèses où il opposait la ,
touchait et qu'il était touché; il est dit de lui loi à l'Evangile, et voulait persuader par là
qu'il guérissait les malades par son attouche- que le Dieu de l'Ancien Testament était diffé-
ment ; il reçut l'onction de la pécheresse qui rent de celui du Nouveau: c'e.st sur deux ar-
répandit le parfum sur ses pieds ; enfin il ticles que TertuUien l'attaque dans son qua-
mourut et rendit l'esprit; il apparut après sa trième livre. Il marque d'abord trois raisons
résurrection et se fit toucher, pour preuve de rejeter l'Evangile dont se servait Marcion.
qu'il avait de la chair et des os. S'il n'avait — i ° On na doit reconnaître d'autres Evangiles
• Nam et confitemur in terra nobis regnum repro- utique spiritualium copia in compensationem eorum
missum, sed antu cœlum, sed alio stalu, utpote post quœ in sœculo, vel despeximus, vel umisimus a Deo
resurrectionem in mille annos, in civitate dwini ope- prospectant. Si qutdem et justuni, et Deo dignum illic
ris Hierusalem cw.lo delata, quam et Apostolus niatrem quoque exultare fumulos ejus ubi sunt et afflicti xn no-
nostram sursum désignât hanc et Ezechiel novit, et mine ipsius. Hœc ratio terreni regni, post cujus m ille
apoatolus Joaunes virlit, et qui apud fidem nostram est annos, tntra quam œtatem concluditur Sanctorum re-
novœ prophetiœ sermo iestatur.... denique proxime surrectio, p>'omeritis maturius vel tardiusresurgentium,
expunctum est orientait expeditione. Constat enim, tune et mundi destructione, et Judicii conflagratione
Ethnicis quoque testibus, in Judœa per dies quadia- commissa, demutati iii atomo, inanyelicam subslantium
ginta matutinis niomentis ,civilatem de cuilo pependisse, scilicet per illud incorruptele superindumentum, trans-
omni mœniorum habitu evuncscente de profectu diei, feremur in cœleste regnum. TertuU., lib. III advers,
et alias de proximo nullam. Hanc dicimus excipiendis Marc., cap. 24.
resurreetione Sanctis, et refovendis omnium bonorum
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLÎEN. 49
que ceux qui ont pour auteurs les Apôtres S vée, en envoyant aux prêtres ceux qu'il avait
comme Jean ou bien leurs pre-
et Matthieu; guéris de la lèpre . Jean, son précurseur,
miers disciples , comme Luc et Marc; tandis avait reçu sa mission du Créateur. Au reste,
que celui de Marcion ne portait le nom d'au- en guérissant les malades le jour du sabbat
p. V. —
cun auteur. 2° Les exemplaires de l'Evangile et en permettant à ses disciples d'arracher
de saint Luc dout on se servait alors ^, étaient des épis de blé le même jour il n'a fait ,
absolument les mêmes que ceux qui s'étaient qu'imiter l'exemple du Créateur qui ordonna
conservés dès le commencement dans toutes aux Israélites de porter autour des murailles
les Eglise apostoliques et dans celles qui leur de Jéricho l'arche d'alliance, un jour de sab-
étaientunies de communion; par conseLjuent, bat. De même, eu nous commandant de pré-
ils étaieutplus dignes de foi que ceux que Mar- senter l'autre joue à celui qui nous a frappés
cion voulait faire valoir pour autoriser ses er- sur une joue, il ne prétend point blâmer par Cap. xvi
reurs. Il emploie la même raison en faveur des là la loi du Créateur: ^œ// pour œil, et dent pour ''' '"^i*
trois autres Evangiles quc Marcion ne rece- dent; mais il explique ses véritables iutentious;
vait point, et il fait revenir à ce sujet son ar- car ce même Créateur dit dans un autre en-
gument de prescription, que ce qui est le plus droit, par la bouche du px'ophète Zacharie:
ancien nous est venu des Apôtres et doit seul « qu'aucun de vous ne se souvienne du mal
etTii. être reçu pour vrai. —
3" Il était visible que qu'il a reçu de son prochain.» Enfin il a montré
^j^,
Marcion avait corrompu l'Evangile de saint clairement qu'il ne reconnaissait point d'au-
Luc, en retranchant tout ce qui lui avait sem- tre père que le Créateur, en nous le proposant
blé contraire à sa doctrine, sur l'opposition à nous-mêmes comme le nôtre. Car à quel
des deux Testameuts et de leurs auteurs; cette autre s'adressent ces paroles qu'il nous a mi-
altération paraissait surtout en ce qu'il avait ses dans la bouche « Notre Père qui êtes
:
omis ces paroles de Jésus-Christ: «Je ne suis dans les cieux; «serait-ce à celui qui ne nous a
point venu pour détruire la Loi, mais pour point créés? Quant au divorce, il ne Ta pas ab- ^xxiv.
l'accomplir '. » solument défenclu, puisqu'il le permet en cas
10. En effet, Jesus-Christ a vérifié en soi tout d'adultère; seulement il défend de se remarier
ce que le Créateur avait prédit par ses Pi'o- après une telle séparation. La raison qui lui x^xv.
''""• phètes. Il a prêché dans la Galilée, suivant fit renvoyer aux prêtres les dix lépreux aux-
la prophétie d'Isaïe. Il a voulu être appelé quels il rendit la santé, ce qu'il n'avait point
Nazaréen ; et c'est ce qui explique pourquoi fait à l'égard du premier qu'il avait guéri de
encore aujourd'hui donnent le même
les Juifs la même maladie , c'est que , du nombre de
nom aux chrétiens. Entre une iuiiuité de per- ces dix, il y avait un Samaritain qu'il voulait
sonnes de condition différente, il a choisi des faire rentrer par là dans la soumission à la
pêcheurs pour ses apôtres, selon les paroles Synagogue des dans laquelle seule on
Juifs ,
1 Constituimus imprimis Evanpelicum instrumentum Marcion respuit, ordo tamen Episcoporumad originetn
Apostolos auctores habere, quibus hoc rnunus Evange- recensus, in Joannem stabit auctorem sic et ccetera-
;
liipromulgandi ab ipso Domino sit impositum. Si et rurn generositas recognoscitur. Dico itaque apud illas
Aposiolicos, non tamensolos, sed cum Apostolis et post nec solasjam apostolicas, sed apud unwersas quœ illis
Apostolos. Quoniam prœdicatio discipulorum suspecta de societate sacramenti confœderantur, id Evangelium
fieri possetde glorice studio, si non adsislat ilU auc- Lucœ ab inilio editionis suœ stare quod eani maxime
toritas magistrorum, immo Christi, qui magistros tuemur, Marcionis vero plerisque nec notum.... habet
Apostolos fecit. Denique fidem nobis ex Apostolis Jo- plane et illud Ecclesias, sed suas, tum posteras quam
annes et Matthœus insinuant ; ex Apostolicis Lucas et adultéras, quarum si censum requirus, facilius apos-
Marcus instaurant. Ibid., lib. IV, cap. 2. taticum invenies quam apostolicum, Marcione scilicet
2 Si constat quod prius, idpriusquod ab
id verius conditore, vel aliquo de Marcionis examine eadem
initia, quod ab Apostolis, pariter utique
id ab initia auctoritas Ecclesiarum aposlolicarum cœteris quoque
constabit id esse ab Apostolis traditum, quod apud patrocinabitur Evangeliis, quœ proinde per illas et se-
Ecclesias Apostolorum fuerit sacro-sanctum. Videamus cundum illas habemus : Joannis dico et Matthœi licet
quos lac a Paulo Corinthii hauserint ; ad quam regu- et Marcus quod edidi*. Pétri udfirmetur, cujus inter-
lam Galatœ sint correcti ; quid legant Philippenses, pres Marcus. Nam et Lucœ digestum Pctro adscribere
Thessalonicenses, Ephesii quid etiam Romani de pro-
; soient. Capit magistrorum videri, quœ discipuli pro-
ximo sonent, quibus Evangelium et Peirus et Paulus mulgarint. Ibid., cap. 5.
sanguine quoque suo signatum reliquerunt. Habemus et 3 Matlh. V, 17.— * Jerem. xvi.— s Exod. xxi, 24.
Joannis alumnas Ecclesias. Narn etsi Apocalypsim ejus
u. 4
50 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Messie,et,après avoir montré qu'elles ne pou- croire, est que l'on ne doit rien croire légè-
vaient convenir qu'au fils du Créateur, il finit rement. »
cl seq. pas prêché un autre Jésus-Christ que celui du Clés a empire *, lorsque Tertullien composa
1 «lo.pag,
Créateur. Les endroits dont Tertullien se sert son ouvrage intitulé: Du Manteau; ainsi il ne
pour le prouver, sont tirés des Epîtres de cet parut pas avant l'an de Jésus-Christ 208, épo-
Apôtre aux Galates, aux Corinthiens, aux Ro- que où Gète fut déclaré Auguste par son père.
mains,auxThessaloiiiciens,auxColossiens,aux Il faut même le reculer jusqu'en 210, si ce
Philippiens, et aux Ephésiens. Afin que Mar- qui y est dit de l'exclusion des Barbares *, doit
cion ne put se prévaloir des autres passages s'entendre de la muraille que Sévère fît cette
de cet Apôtre contre les pratiques légales, il année dans la Grande-Bretagne, pour séparer
montre en cela que suivre
qu'il n'avait fait ses conquêtes du pays qui demeurait aux Bar-
les desseins du Créateur, qui étaient d'abohr bares et pour assurer davantage les autres
la loi ancienne pour lui substituer la nou- pays soumis aux Romains. Le manteau était
XXI. velle. Il remarque que non-seulement Marcion alors l'habit des Grecs, et particulièrement
avait corrompu le texte de quelques Epîtres des philosophes et de tous ceux qui faisaient
de saint Paul, comme de celle aux Ephésiens, profession publique de science. Tertullien,
qu'il avait inscrite au nom des Laodicéens, l'ayant pris au lieu de la robe qui était en
mais encore qu'il en avait rejeté d'autres qui usage chez Romains, se rendit l'objet de
les
étaient certainement de cet Apôtre, comme la raillerie publique.Pour justifier son chan-
les deux à Timothée et celle qui s'adresse à gement, il composa cet écrit où il relève les
Tite. De toutes les autres qu'il recevait, il n'y avantages du manteau. C'est, selon lui, l'ha-
avait en tout que celle aux Thessaloniciens, billement le moins embarrassant. Il est utile
qu'il n'eût pas interpolée, grâce à sa briè- et commode à toutes sortes de personnes ;
II. veté. ne recevait pas non plus les Actes des
Il c'est un ornement sacerdotal qui obhge ceux \
Apôtres, parce qu'il ne trouvait pas qu'il y qui le portent à une plus grande pureté de
fût parlé d'un autre Dieu que du Créateur. mœurs, au moins à l'extérieur '.
Dans ce dernier livre contre Marcion, Tertul- 2. La persécution qui donna occasion au AvisàSt
pilla, en îl
lien répète plusieurs choses qu'il avait déjà livre de Tertullien à Scapula,éta.it sans doute Ws-'èi
dites ailleurs au sujet de la résurrection, du celle de Sévère, puisque Sulpice nous ap-
salut de la chair et de la réalité du corps de prend * que, depuis la mort de ce prince
Jésus-Christ. Il y donne cette belle règle tou- jusqu'au règne de Dèce, les chrétiens ne fu-
chant la foi : « La première vérité qu'il faut rent point persécutés ^, si ce n'est par Maxi-
^Quantum reformavit orbis sœculum istud? quantum imperante septima persecutione sœvitum est in Chris-
urbium aut produxit, aut auxit, aut reddidit prœsen." tianos. Severus Sulpitius, lib. II Historiée sacrœ,
tis imperii triplex virtus ? Deo tôt Augustis in unum cap. 12.
favente, quot census transcripti? quoi populi repurga- * Ipse etiam Severus,pater Antonini Car acallœ, Chris-
ti ? quot ordines illustrati ? quot Barbari exclusi ? tianorum memor fuit. Tertull.,lib.ad Scap., cap. 4.Ce
* Deo tût Augustis in unum favente, quot Barbari que dit ici Tertullien, que Sévère avait été favorable
exclusi ? TerlulL, lib. de Pallio , cap. 2. aux chrétiens, doit s'entendre des premières années
9 Dans cet ou voit toutes les ressources de
écrit de son règne car il leur fut très-contraii"e dans la
;
l'esprit de Tertullien, pour dire beaucoup de choses suite. Ce qui l'avait d'abord si bien disposé à leur
sur le sujet le plus frivole. Il est le plus court de tous égard, c'est qu'avant d'être empereur, il avait été
ses ouvrages, mais le plus rempli de gaîté, de traits guéri avec de l'huile par un chrétien nommé Pro-
d'esprit et d'allusion à son temps et à ses alentours ; cule. Tertullien, de qui nous tenons ce fait, ne dit pas
au?si est-il excessivement obscur et le désespoir de de quelle maladie il fut guéri mais il ajoute qu'il en
;
qu'il ne vivait plus lorsque TertuUien l'écri- fait peine, c'est que nous sommes assurés
vit ; mais il est à croire que la persécution que Dieu vengera notre sang sur toutes les
ne cessa pas aussitôt après la mort de ce villes qui l'ontrépandu.» Il remarque ensuite,
prince, et qu'on la continua jusqu'à nouvel comme des signes évidents de cette vengeance
ordre, au moins dans les provinces. On peut divine, plusieurs événements extraordinaires
donc rapporter cet ouvrage au commence- arrivés de puis la persécution. Sous le gouver-
ment de Caracalla , c'est-à-dire à l'an de Jé- neur Hilarien, le peuple cria que l'on ôtât aux
sus-Christ 21 1 ,
qui fut le dernier du règne chrétiens les aires où ils faisaient leur sépul-
de Sévère. ture, et les aires où eux-mêmes battaient leurs
'«P- '• à Scapula, proconsul
3. Tertullien l'adressa blés furent inutiles, car ils n'eurent point de
d'Afrique, pour l'exhorter à faire cesser la moisson. « L'année dernière, dit-il, il y eut
lersécution. Ce qui le fait parler n'est pas des pluies et des tonnerres extraordinaires ;
Ti
,'intérêt des chrétiens, qui se réjouissent plus des feux parurent la nuit sur les murailles
d'être condamnés que maisd'être absous, de Carthage ; à Utique, le soleil s'éclipsa con-
l'intérêt des persécuteurs ; ne les chrétiens de l'astronomie.Saturnin,
tre toutes les règles
doivent pas être contraints au culte des faux le premier qui fit mourir les chrétiens en
dieux , puisqu'ils adorent un seul Dieu dont Afrique, en fut puni par la perte de ses yeux.
tous les hommes ont une connaissance natu- Claude Herminien, gouverneur de la Cappa-
*'•
relie ; il est injuste de leur ôter la liberté de doce, indigné de la conversion de sa femme,
religion que la nature leur accorde comme au traita cruellement les chrétiens ; il fut seul
reste des hommes ; car la religion veut être attaqué de la peste dans son palais, et, dévoré
libre *, et c'est la détruire que de la vouloir par encore tout vivant, il disait : « D
les vers,
forcer. Il les justifie sur les reproches qu'on ne faut pas qu'on sache ma maladie, de peur
leur faisait d'être impies à l'égard des dieux que les chrétiens ne s'en réjouissent; «ensuite
aux empereurs: « Un chrétien,
et rebelles il reconnut sa faute, d'avoir contraint quel-
n'a de
dit-il *, haine pour personne; bien loin ques-uns par les tourments à apostasier, et
d'être ennemi de l'empereur, qu'il sait avoir mourut presque chrétien.» Scapula lui-même,
reçu l'empire de Dieu il est obligé de l'ai- , ayant condamné aux bêtes un chrétien, fut
mer, de le craindre, de le respecter, de prier aussitôt attaqué d'une maladie très-violente,
pour son salut et pour celui de tout l'empire qui le tourmentait encore lorsque Tertullien
romain, qui ne finira qu'avec le monde. écrivait cet ouvrage, parce qu'il avait recom-
m. Nous honorons l'empereur de la manière mencé ses violences contre les chrétiens. Il Cep. iv.
qu'il no^us est permis de le faire et qui lui rapporte ensuite les exemples de plusieurs
convient, le regardant comme un homme gouverneurs qui , craignant de semblables
établi de Dieu et qui n'est inférieur qu'à punitions avaient traité les chrétiens plus
,
tiens, il prit ouvertement leur défense et fit leur toto Romano Imperio, quousque sœculum stabit : tandiu
éloge en public. TertulL, ibid. enim Colimus ergo Imperatorem sic quomodo et
stabit.
* Non est religionis cogère religionem, quœ sponte nobis licet, et ipsi expedit, ut hondnem a Deo secun-
suscipi debeat non vi. Ibid., cap. 2. dum, et quidquid est a Deo consecutum, et solo Deo
* Christianus nullius est hostis, nedum Imperatoris, minorem... itaque et sacrificamus pro sainte Imperato-
quem scit a Deo suo constitui, necesse est ut et ipsum ris, sed Deo nostro et ipsius, sed quomodo pracepit
diligat, et revereatur, et hono7'et, et salvum velit cum Deus, pura prece, Ibid., cap. 8.
52 HISTOIRE GIÎNÉRAT.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
seil qu'il fâché de s'être engagé dans
était comme hérétique la doctrine.de Montan par-
cette malheureuse affaire. Pudens, à qui l'on ce qu'il les rejetait. Il commence par relever ^*p- "^
avait envoyé un chrétien, comprit, par le ti- l'indulgence de son Paraclet, qui avait ac-
tre do l'accusation (lu'elle était calomnieuse, cordé à la faiblesse de la chair les premières
il la déchira et renvoya l'accusé, en disant noces, et soutient que, quand même il les au-
qu'il ne l'interrogerait point sans accusateur rait absolument interdites, il n'aurait rien
légitime, suivant l'ordre de l'empereur. A ces établi de nouveau, puisque Jesus-Christ n'é-
raisons de ne pas faire mourir les chrétiens, tait point marié et qu'il ouvre le ciel à ceux
il ajoute la considération des services qu'ils qui, pour l'amonr de lui, se privent du ma-
rendaient à l'Etat, soit en chassant les dé- riage; d'où vient que l'Apôtre préfère la con-
mons, en guérissant les malades. Le se-
soit tinence au mariage, et par là détruit en par-
crétaire de l'un des gouverneurs d'Afrique, tie la permission de se marier.
fut délivré d'un démon qui allait le préci- 5. Venant ensuite à la loi de la monogamie, il IV.
piter dans un abime; à celui-là on pour- tâche de démontrer qu'elle n'est ni nouvelle,
rait joindre plusieurs de leurs proches ou de ni étrangère aux chrétiens, et que le Paraclet
leurs enfants au berceau. Sévère, père d'An- en devait passer plutôt pour le restaurateur
tonin Caracalla, fut guéri avec de l'huile par que pour l'auteur; il se fonde sur le mariage
un chrétien nommé Procle, et, sous Marc d'Eve avec Adam, sur l'exemple de Noé et de
Aur-^le , l'armée romaine était sur le point ses enfants et sur celui de Jésus-Christ même,
de périr par la soif, sans la pluie miraculeuse qui n'a qu'une seule Eglise pour épouse.
que par leurs
les soldats chrétiens obtinrent Abraham a eu plusieurs femmes, mais nous VI.
prières. Combien de fois u'avons-nous pas sommes ses enfants selon l'esprit et non selon
fait cesser la sécheresse par nos jeûnes et la chair; et nous avons des exemples contrai-
Cap. T. par nos prières? Enfin, pour montrer que les res dans Joseph, Moïse, Aarôn etJosué, qui
chrétiens ne craignaient ni la mor,t, ni les tous n'ont été mariés qu'une seule fois et
tourments, il assure que,sous Arrius-Antonin, qui, en cela, sont plus à imiter qu'Abraham.
l'un de ceux qui les avaient persécutés à Gar- Quant' à l'ordonnance d'épouser lafemme de VII.
thage, tous les chrétiens de celte ville, s'étant son frère mort sans enfants, elle est du nom-
rassemblés, se présentèrent hardiment devant bre de celles qui ont été abolies, parce que
son tribunal ; lui se contenta d'en faire pren- les raisons qui l'avaient fait établir ne sub-
dre un petit nombre , et il dit aux autres : sistent plus aujourd'hui. Il marque quelles
« 6\ vous voulez périr, n'avez-vous pas assez étaient ces raisons : la loi de croître et de
de cordes et de précipices ? » Il conclut que, multiplier qui était encore alors en vigueur,
si l'on continue la persécution contre les chré- la coutume de faire porter aux enfants les
tieiis, à craindre que non-seulement
il est péchés de leurs pères, l'opprobre de la stéri-
Scapula, mais même Carthage et toule la pro- lité
;
puis il apporte les exemples de plusieurs \iii.
rinthiens, que l'on rapporte ordinairement à par ces paroles de Jésus-Christ défendant le
Cap. I.
l'an 57. \\ y combat les psychiques ou catho- divorce « Que l'homme ne doit point séparer
:
liques qui recevaient les secondes noces sui- ce que Dieu a uni. » Si cela est, dit-il, on ne
vant l'autorité de l'Apôtre , et condamnaient doit pas non plus réunir ce que Dieu a séparé
«Pour nous, ajoute-t-il en parlant des monta- pour les èvêques, comme chefs de
fait cette loi
nistes , le divorce nous est permis, mais sans de la faire passer ensuite d'au-
l'Église, afin
ip. X. pouvoir nous remarier ensuite. Au reste, si tant plus facilement au commun des fidè-
la femme répudiée par son mari lui est en- les, qu'ils verraient que c'('tait le seul moyen
core liée de telle sorte qu'elle ne peut pas en de parvenir aux dignités de l'Église
et en- ,
épouser un autre , à plus forte raison celle core pour faire entendre aux évêqnes que la
qui s'en trouve séparée sans en avoir reçu prééminence de leur charge, bien loin de leur
un semblable affront , mais seulement parce donner plus de hcence, les engageait au con-
qu'il a plu àDieu de l'appeler à soi.» Il mon- traire à vivre dansune plus grande retenue.»
tre * ensuite la difficulté d'accorder le soin Ce qu'il ajoute pour détruire les prétextes xuieiseq.
qu'une femme doit prendre de l'àme de son de ceux qui s'engagent de nouveau dans le
mari,mème après sa mort, avec la soumission mariage, est peu difi"éreut de ce qu'on en lit
et lescomplaisances qu'elle serait obligée d'a- dans ses autres ouvrages qui traitent la même
X'- voir pour un autre. Après quoi il répond à matière, surtout dans celui qui a pour titre :
que l'Apôtre se soit contredit lui-même jus- \ . Le T'^aité des Jeûnes est postérieur à ce- je^nei'^ a^^
^"•
qu'à approuver en cet endroit les secondes no- lui de la Monogamie * et du nombre de ceux
ces, puisqu'ailleurs il assure que Jésus-Christ a que Tertullien a écrits contre l'I'^glise. L'u-
rétabli toutes choses dans l'état où elles étaient nique but de l'auteur est d'y soutenir ^ les
dans le commencement. — 2" Ce passage ^ jeûnes particuliers qui s'observaient chez
doit s'entendre d'une femme qui,s'étant con- les montanistes, savoir ceux de la quatrième
vertie à la foi depuis lamort de son premier et cinquième série, ou du mercredi et du ven-
mari, en épouse ensuite un autre en Jésus- dredi, qu'ils prolongeaient quelquefois jus-
Christ, car alors ce mariage peut passer pour qu'à vêpres , et les xérophagies, c'est-à-dire,
le premier, parce que c'est le premier qu'elle l'abstinence des viandes succulentes et même
contracte dans la foi. Enfin il répond que — des fruits vineux. Cependant les catholiques
si saint Paul a permis les secondes noces, ce ne rejetaient pas absolument ces pratiques; ils
n'a été que comme une indulgence, retran- jeiànaient ^eux-mêmes jusqu'à none les jours
"'"• chée depuis par le Paraclet. On objectait en- de station, c'est-à-dire le mercredi et le ven-
tier. {L'éditeur.) fîdem secunda uxor, quœ post fidem prima est. A fide
2 Enimvero et pro anima ejus orat et refricjerium enim etiam ipsa vita nostra censetur. Itaque mulier, si
intérim adposfulat ei et in prima resurrectio?ie con- nupserit,non delinquet, quia nec hic secundu s maritus,
sortium, et offert annuis diebus dormitionis ejus. Nam quia est a fide primus, et adeo sic est, ut propterea
hœc nisi fecerit,vere repudiavit quantum in ipsa est... adjenerit,tantum in Domino ; quia de ea agebaturquœ
cum hœc ita sint, quomodo alii viro vacabit, quœ sua ethnicum habuerat et eo ainisso crediderat, ne scilicet
etiam in futurum occupata est.... alium habebit in etiam post fidem ethnico se nubere posse prœsumeret,
spiritu, alium in carne Hoc
adulterium, unius
' erit licet nec hoc psychici curent. Ibid., cap. 11.
fœminœ in duos viros conscientia. Si alter a carne dis- * De modo quidem nubendi jam edidimus monoga-
junctus est sed in corde remanet, illic usque adhuc
, miœ def'ensionem. TertuU., lib. de Jejun., cap. 1.
maritus est, ipsum illud possidens per quod et factus * Ecce convenio vos et prœter Pascha jejunantes,
est, id est ammum, in quo si et alius habitabit, hoc citra illos dies quibus ablatus est sponsus, et statio-
erit crimen.... qualis es id matrimonium postulans, num semi jejunia interponentes, et vero, id est puro
quod ab eis a quibus postulas non licet habere ; ab interdum pane et aqua victitantes, ut cuiquevisutnest.
episcopo monogamo, a presbyieris et diaconis ejusdem Ibid., cap. 13.
sacramenti, a viduis quorum sectam in te recususti ? et Certe in Evangelio illos dies jejuniis determinatos
*
illi plane sic dabunt viros et uxores quomodo buc- putant, in quibus ablatus est sponsus, et eos esse jam
cellas.... et conjungent vos in Ecclesia virgine, unius legitimos jejuniorum Christianorum. Itaque decœtero
Christi unica sponsa, et orabis pro maritis tuis novo indifferenter jejunandum ex arbitrio, non ex imperio
54 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dredi mais ces jeûnes étaient chez eux de
; nait point de ce qu'ils rejetaient l'heure de
pure dévotion, tandis que les montanistes en nonc comme mauvaise, puisqu'elle était des-
faisaient une loi indispensable; c'est pourquoi tinée chez eux aux prières solennelles du
l'Eglise les condamnait, ne reconnaissant pour mercredi et du vendredi ; mais ils ne doutent
jeûnes d'ohlii^ation que ceux que l'on prati- point que ces sortes de mortifications ne doi-
quait avant Pâques, en mémoire de la passion vent leur être d'une grande utilité; elles ne
de Jésus-Christ, et que l'on a nommés depuis sont point nouvelles, non plus que les xéro-
le Carême ; c'est ainsi qu'elle entendait cette phagies et les jeûnes particuliers que l'on
parole de Jésus-Christ ', « qu'elle jeûnerait s'est imposés de tout temps par un motif de re-
lorsque son époux lui serait ôté. » ligion; enfin elles ont été ordonnées par le
Cap. ni. avant toutes choses, de
2. Tertullien traite, Paraclet. Il ajoute qu'une chair desséchée Cap. xii,<
la nécessité du jeûne en général. Il la fonde sur par le jeûne est beaucoup plus en état de résis-
celleoù nous sommes tous de satisfaire à Dieu ter à la violence des tourments. Ici il fait un
pour le péché du premier homme, et soutient crime aux cathofiques des devoirs de charité
que, lacause de sa chute ayant été son intem- qu'ils rendaient à ceux qui souffraient pour
pérance, rien n'est phis propre à la réparer la confession du nom de Jésus-Clu-ist. Il leur
VI oiscq. que le jeûne, entièrement opposé à ce vice. Il reproche de changer leurs prisons en des Ueux
marque les effets contraires de l'un et de l'au- de réjouissance et de bonne chère; et, pour
tre : l'intempérance entraîne après soi l'oubli montrer l'abus de ces pratiques, il rapporte
de Dieu, dont nous sépare ; le jeûne, au
elle qu'un de leurs confesseurs, à qui ils avaient
contraire,nous met en état de converser fami- fait boire beaucoup de vin, avait été présenté
lièrement avec lui ; il détourne sa colère toute en cet état devant le tribunal du préteur;
prête à se répandre sur des villes entières ; il après une légère épreuve des ongles de fer,
efface les péchés, et souvent même il nous a il ne put donner aucuue réponse au proconsul
fait mériter d'être instruits de plusieurs choses qui lui demandait quel Dieu il adorait, et il
cachées. digéra jusqu'au milieu de son apostasie.
IX. 3. Venant plus particulièrement à son sujet, 4. Il blâme surtout les catholiques de con- Xlll.
il justifie les xérophagies, par l'exemple de damner les jeûnes institués par le Paraclet,
Daniel et de ses frères, d'Elie, de David. Sur tandis qu'eux-mêmes en observaient qui n'é-
la coutume de ne rompre le jeûne qu'après taient fondés ni sur l'autorité des Ecritures, ni
le soleil couché, il dit que c'est en mémoire sur la tradition des anciens; savoir, ceux que
de la sépulture du Seigneur ; à l'imitation de chacun s'imposait par une dévotion particu-
Moïse,qui resta en prières jusqu'au soir, tan- lière, et ceux que les évèques ordonnaient
dis que leslsraélites combattaient contre Ama- quelquefois pour les besoins des Églises. Il dit
lech; de Saûl, qui défendit sous peine de vie qu'en certains heux de la Grèce on tenait des
que personne mangeât avant la défaite entière conciles où toutes les Églises se trouvaient
-
des ennemis; etde Daniel, qui faisait pénitence pour traiter en commun les affaires les plus
devant Dieu dans le sac et sur la cendre jusqu'à importantes, et que ces assemblées commen-
xl. l'heure du sacrifice du soir. Au reste, il dé- çaient par des stations et des jeûnes. Pour jus- XIV.
clare que la coutume qu'observaient les mon- tifier les jeûnes particuliers aux montanistes,
tanistes de jeûner jusqu'à vêpres, ne prove- il soutient que Jésus-Christ, ayant aboli les
novœ disciplinœ, pro tempnribus et causis uniuscujus- tum ! Vide quam bonum et quam jucundum habitare
que, sic et Apostolos observasse, nullum aliud impo- fratres in unum. Hoc tu (il parle aux catholiques con-
nentes jugum cœterorum et in commune obeundorum tre lesquelsil écrivait] psallrre non facile nosti, nisi
jejuniorum, proinde nec stationum quœ et ipsœ suos quo tempore cum compluribus cœnas. Conventus autem
quidem dies liabeant quartœ feriœ et sextœ, passive ta- illi stationibus prius et jejunationibus operari. Il est
men currant, neque sub lege prœcepti, neque ultra su- clair, par ces dernières paroles, que le but de l'au-
premam diei, qunndo et orationes fere hora nona con- teur est d'opposer les conciles de sa secte, précédés
cludat, de Pétri exemplo, quod actis refertur. Ibid., de stations et de jeûnes, à ceux des catholiques,qui,
cap. 2. —
1 Matth. ix, 15. selon lui, ne se tenaient pour l'ordinaire que lors-
2 Les conciles dont parle ici Tertullien étaient qu'ils se trouvaient plusieurs ensemble pour souper.
ceux des montanistes ; voici ses paroles : Aguntur Mais ce qui donne encore plus de sujet de croire
prœterea per Gracias illas certis in locis Concilia ex que les conciles dont il est question n'étaient point
uniuersis Ecclesiis per quœ et altiora quœque in com- ceux des catholiques, c'est qu'on ne voit pas que la
mune tractantur et ipsa reprœsentatio totius nominis coutume de l'Eglise ait jamais été de prévenir ces
Christiani magna veneratione celebratur. Et hoc quam sortes d'assemblées par des stations et par des jeû-
dignum fids auspicantt congregari undique ad Chris- nes.
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 55
loi. « Autrement *, dit-il, pourquoi célébrons- que l'on a proposé un édit, et même péremp-
nous tous les ans la Pâque dans le premier toire; leSouverain Pontife, c'est-à-dire l'évè-
mois ? et pourquoi passons-nous dans la joie les que des évèques, dit Je remets les péchés
:
cinquante jours qui suivent cette fête? D'où d'adultère et de fornication à ceux qui auront
Cap. Il et
nous sont venues les stations de la quatrième accompli leur pénitence.» Entrant en matière, 111.
et jeune de la Parascève ou du
sixième férié, le il dit que, comme il y a des péchés de deux
grand Vendredi, auquel, vous autres psychi- sortes, les uns irrémissibles, et d'autres qui
ques, vous joignez quelquefois le samedi '?» peuvent être remis, il y a aussi deux sortes
Il ajoute que le Paraclet, en prescrivant aux de pénitence,dont l'une est suivie du pardon,
siens des jours de xérophagies, n'avait pré- et l'autre, c'est-à-dire celle que l'on fait pour
tendu condamner les viandes dont il défen- les péchés irrémissibles, n'en peut attendre
XVI. dait l'usage, qu'en certain temps de l'année. que de Dieu, lui seul ayant le pouvoir de re-
Ensuite, après avoir traité en peu de mots des mettre les péchés mortels. Si le pécheur ne
avantages du jeune et de la manière de jeû- doit pas espérer de recevoir des hommes le
ner des païens, il parle des* agapes des catho- fruit de sa pénitence, elle n'est pas néanmoins
liques, qu'il tâche de décrier, en disant qu'ils inutile, puisqu'elle est comme une semence
s'yUvraientà la bonne chère et qu'ils y accor- qu'il jette dans cette vie pour en recueillir le
daient aux jeunes gens de l'un et de l'autre fruit auprès du Seigneur. Il déclare ensuite '^ "t v.
XTU. sexe une hberté contraire à la pudeur. Il re- que les péchés pour lesquels l'Église ne peut
marque que, dans ces repas, on donnait dou- accorder de pardon, sont l'adultère, la forni-
ble portion aux évèques, par honneur '. cation et autres de même genre, qui ne dif-
5. Ce fut encore contre les catholiques que fèrent presque pas de l'idolâtrie et qui sont
TertuUien écrivit son Traité de la Pudicité, compris sous le terme générique d'adultère,
dans le dessein de combattre la pratique de que Dieu défend dans sa loi immédiatement
l'Église, qui recevait à pénitence ceux qui,après après l'idolâtrie. Peu s'en faut qu'il ne mette
lebaptême, étaient tombés dans la fornication encore de ce nombre les mariages clandestins:
ou même dans l'adultère. Il le commence par «Chez nous, dit-il', les conjonctions cachées,
un grand éloge de la chasteté, et soutient auparavant dé-
c'est-à-dire qui n'ont pas été
d'abord que l'adultère et la fornication sont clarées dans l'Église, courent risque d'être
des péchés capitaux, se moque des catholiques traitées comme l'adultère et la fornication,
qui prétendaient avoir le pouvoir de les re- de peur qu'elles n'évitent l'accusation, sous
mettre et témoigne beaucoup de joie de s'être prétexte de mariage. »
séparé de leur communion. Ce qui put don- 6. Il vient aux objections des catholiques ;
ner occasion à cet ouvrage, fut un décret de elles sont tirées l» de l'infinie bonté de Dieu,
:
in omni exultât iotie decurrimus ? cur stationibus quar- d'évêque des évèques ne peuvent guère s'entendre
,
tam et sextam Sabbati dicamus, et jejuniis Parasce- que de celui de Rome, d'autant plus que,dans la suite
vem ? quanquam vos etiam sabbatum si quando con- de ce traité, TertuUien, adressant toujours la parole
tinuatis, nunquam nisi in Pascha jejunandumsecundum à l'évèque dont il est question, le nomme apostoli-
rationem alibi redditam^ nobis certe omnis dies etiam que, cap. 19, et le pape béni, cap. 13 épilhète qu'il ;
vulgata consecrationecelebratur. Lib. de Jejun., cap.l4. donne de même à Eleuthère dans son livre des Pres-
* Apud te agape in cacabis feruet fides in culinis criptions, cap. 30, sub Episcopatu benedictiEleutherii.
,
calet, spes in ferculis jacet. Sed majoris est agape, Au reste, ce n'est que par ironie qu'il relève ici cea
quia per hanc adolescentes tui cum sororibus dor- titres de l'évèque de Rome mais cette raillerie eût
;
miunt.... ad elogium gulce tuœ pertinet quod duplex été sans fondement, si le Pape n'eût été, en effet, re-
apud te prœsidentibus honor, binis partibus ingluviei gardé par tous les catholiques comme le chef de la
scilicet et libidinis deputatur, cum Apostolus dupli- religion et le pasteur des évoques mêmes. Fleury,
cem honorera dederit, ut et fratribus et prœpositis. Hist. EccL, tom. II, pag. 94.
Ibid., cap. 7. ' Ideo pênes nos occultœ quoque conjunciiones, id est
' On rougit pour TertuUien, en lisant ce traité. nonprius apud Ecclesiam professée, juxta mœchiamet
(^L'éditeur.) fornicationem judicaripericlitantur ; ne inde consertœ
* Audio etiam edictum esse propositum, ac quidem obtentu matrimonii crimen éludant. TertulL, lib. de
peremptorium, Pontifex scilicet maximus, quod est, Pudic, cap. 4.
l
sa mort; 2» de ces paroles de Jésus-Christ : « Ne parabole de la brebis perdue que le Seigneur ^*P TU.
jugez poiut, et vous ue serez point jugés ; par- cherche et rapporte ser ses épaules, il sou-
donnez, et on vous pardonnera; 3° del'exem- >> tient qu'elle signifie non le chrétien pénitent,
plt! de David (jui mérita par son repentir, le mais les païens qui se convertissent à la foi :
pardon de l'adidti're (lu'il avait commis; -4'» des «Montrez, dit- il aux catholiques jusqu'aux ,
perdue, de l'enfant prodigue, rapportées dans tinguer si cette brebis représente le chrétien
l'Évangile; 5° de la manière dont Jésus-Christ pécheur ou le païen? De même la drachme
même s'est conduit à l'égard de la femme pé- égarée est plutôt la figure du païen trouvé
cheresse et envers la Samaritaine, quoi(iu'clle par la grâce dans les ténèbres de l'idolâtrie,
se fût mariée jusqu'à six fois; G° delà conduite que d'un chrétien qui est déjà éclairé des lu-
de saint Paul qui , après avoir prononcé ana- mières de la foi. ]\lais quand même l'une de
thème contre le Corinthien incestueux, lui ac- ces paraboles devrait s'entendre du chrétien
corda ensuite le pardon de sa faute, dans la pécheur,il ne s'ensuivrait pas pour cela qu'on
seconde lettre qu'il écrivit aux Corinthiens sur dût les appliquer à ceux qui sont tombés dans
son sujet ; 7° de l'endroit de l'Apocalypse où la fornication ou dans l'adultère, puisque la
l'apôtre saint Jean reproche à l'ange de Thya- brebis etla drachme évangélique étaient seu-
tire, qu'il souffrait dans son Église une femme lement égarées, au lieu que l'adultère et le
de mauvaise vie, qui corrompait les serviteurs fornicateur sont absolument morts à la grâce
de Dieu , et où il menace de punition ses for- aussitôt après le péché.»
nicateurs, s'ils n'ont recours à la pénitence ;
8. C'est encore dans le sens des paraboles
8° enfin du pouvoir que Jésus-Christ a donné précédentes, qu'il explique celle de l'enfant vin et IX.
à son Église de remettre les péchés. prodigue; d l'interprète non du chrétien péni-
7. A la première objection TertuUien répond tent, mais du païen qui, après avoir obscurci
qu'à la vérité Dieu est bon et miséricordieux par ses dérèglements la lumière naturelle que
de sa nature ; mais aussi qu'il est juste et Dieu lui avait donnée pour se conduire, ren-
Cap. tl.
qu'il sait se venger de ceux qui abusent de sa trant enfin en lui-même, a recours à ce bon
bouté ; c'est par cette raison qu'il défend à père qui le rétablit dans son innocence primi-
Jérémie de prier pour les péchés de son peu- tive, par le baptême, qui est l'anneau qu'il
ple et déclare, par la bouche de ce prophète, lui met au doigt, et le régale ensuite de son
qu'il n'aura aucun égard à leurs prières, fus- propre corps, c'est-à-dire de l'Eucharistie. Les
sent-elles même accompagnées déjeunes. Sur catholiques répliquaient que, la pénitence fai- '•
dont nous devons juger notre prochain; d'au- gnorance avant le baptême ; mais Tertulhen
tant que ^w nous serons mesurés à la même me- soutient,au contraire, que c'est pour eux sur-
sure dont nous aurons mesuré les autres.» tout que Dieu a accordé la pénitence et qu'elle
Aussi l'Apôtre ne crut-il pas qu'il lui fût dé- leur est plus utile qu'à personne, parce qu'ils
fendu de juger le Corinthien incestueux. Quant n'en ont pas encore abusé; il confirme son as-
à celles qui nous ordonnent de pardonner à sertion par la prédication de Jonas aux Nini-
nos frères,si nous voulons que Dieu nous par- vites, et de saint Jean-Baptiste aux soldats et
donne , elles doivent s'entendre non des fau- aux publicains encore plongés dans les ténè-
tes qui se commettent contre Dieu, mais des bres du paganisme.
offenses qui nous touchent personnellement. 9. Pour répondre à l'argument fondé sur le
Afin d'ôter aux catholiques l'avantage qu'ils pardon accordé aux femmes pécheresses, il xi-
voulaient tirer des exemples de la miséri- dit 1« qu'il ne nie point que Jésus-Christ ait
:
corde de Dieu envers le pécheur, il leur en eu pouvoir de le faire, mais que ce pouvoir ne
VI. oppose d'autres tout-à-fait contraires, comme résidait qu'en lui seul ; 2° que ces choses s'é-
lorsqu'il vengea, par la mort de vingt-quatre tant passées avant l'établissement de la disci-
mille Israélites, le crime que ce peuple avait pline chrétienne, qui n'a commencé qu'après
cl fcq. commis après le baptême, peuvent s'efifacer tholiques « Le 'sang de Jésus-Christ,son Fils,
:
conde. Cependant TertuUien trouve le moyen conque demeure en lui, ne pèche point, et
*
de se débarrasser, en expliquant cela de deux quiconque pèche, ne l'a point vu et ne l'a point
personnes diiférentes. Autrement, dit-il, qui connu.» Saint Jean ne se contredit point lui-
n'accuserait pas saint Paul de légèreté, d'a- même en promettant là le pardon aux pécheurs
XVI. voircondamné un homme et de l'absoudre et en assurant ici que quiconque pèche n'est pas
un moment après. Il tâche d'appuyer cette con- enfant de Dieu mais il parle diversement, eu
,
jecture sur plusieurs passages de ce même Apô- égard aux différentes espèces de péchés; car
tre, où il s'étudie à inspirer aux fidèles une il y en a de journaliers, dont personne n'est
xvii. grande horreur des péchés énormes et en par- exempt, comme se fâcher injustement, ne pas
ticulier delafornication. Enfin il se réduit à dire se réconcilier avant le coucher du soleil, frap-
tient ensuite, sur plusieurs passages de cet Apô- tant d'autres fautes de ce genre, que si elles
tre, entre autres sur celui-ci : « Ne communi- étaient sans pardon, aucun de nous ne pour-
quez point aux œuvres de ténèbres *, » que les rait se sauver. C'est donc pour ces fautes que
pécheurs, et principalement les fornicateurs, Jésus-Christ intercède en notre faveur auprès
doivent être privés de toute communion avec de son Père. Mais il en est d'autres beaucoup
les fidèles, sans qu'il paraisse par d'autres en- plus considérables, pour lesquelles il n'y a pas
droits qu'il leurait laissé aucune espérance de de pardon, comme l'homicide, l'idolâtrie, la
pouvoir y rentrer, et il explique ces paroles de fourberie, le reniement, le blasphème, l'adul-
Jésus-Christ2 : «J'aime mieux la pénitence du tère, la fornication et tout autre péché de
pécheur que sa mort, » de la pénitence qui cette nature qui viole le temple de Dieu. Il
précède lebaptême; ce qui, selon lui, ne détruit conclut que la discipline établie dès le com-
point celle qui s'accorde â ceux qui sont tom- mencement par les Apôtres, tend à purger en-
bés ensuite, puisqu'elle peut mériter l'absolu- tièrement l'Église de ces sortes de crimes, sans
tion de l'évêque pour les péchés légers, et de espérance à ceux qui y sont tombés de pou-
Dieu pour ceux qui sont irrémissibles, voir jamais y rentrer ; ce qu'il confirme par
xvii. 10. A l'objection tirée del'Apocalypse, il ré- ces paroles de saint Paul auxHébreux^,« qu'il
pond que la femme dont il y est parlé était de la est impossible que ceux qui ont été une fois
secte des nicolaites ; d'où vient qu'elle y est éclairés et qui, après, sont tombés, se renouvel-
représentée comme une femme publique, mais lent par la pénitence. »
dans un sens figuré, parce qu'elle corrompait 11. Il ne restait plus qu'une difficulté àrésou- ixl.
les fidèles par ses erreurs. «Or, ajoute-t-il, per- dre, savoir s'il était vrai que l'Eglise eût reçu
sonne ne doute qu'un hérétique qui, s'étant le pouvoir de remettre les péchés. Les catho-
laissé tromper, reconnaît ensuite sa faute et liques qui le prétendaient ainsi se fondaient
en fait pénitence, n'obtienne le pardon et ne en cela sur la promesse de Jésus-Chi ist â saint
doive être reçu dans l'Église. C'est pour cela Pierre6,qu'il lui donnerait les clefs du royaume
que,chez nous,on reçoit l'hérétique comme le des cieux, et que tout ce qu'il lierait ou dé-
païen, en purifiant l'un et l'autre par le bap- lierait sur la terre, serait pareillement lié ou
» Eph. V, 2.—«Ezech. xxxin, 2.—» I Joan. i, 7 et 8. *I Joan. m, 6.— 8 Hebr. vi, 4.— « Matth, xvi, 19.
58 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
délié dans le ciel. Mais Ter lullien soutient que entreprendre cet ouvrage pour satisfaire son
cette promesse regardait saint Pierre person- ressentiment contre Praxéas, qui avait été un
nellement, à l'exclusion «les autres pasteurs ; des principaux obstacles au j^rogrès des nou-
il ne laisse pas de reconnaître que l'Eglise
* velles ' prophéties de Montan à Rome. En
a la même puissance, et il rapporte à ce sujet effet le pape Victor, prévenu
en faveur de *
cette parole du Paraclet dans ses nouveaux Montan et de ses prophètes, Prisque et Maxi-
prophètes : pouvoir de remettre
« L'Eglise a le mille, était sur le point de leur accorder ses
les péchés; je ne les remettrai pas néanmoins, lettres de communion, et par là, dit Tertul-
de peur que les hommes ne pèchent encore lien, de donner la paix aux Eglises d'Asie et de
davantage. » Mais, outre que c'est Montanqui Phrygie, lorsque Praxéas, qui se trouvait alors
se désigne lui-même sous le nom d'Eghse, à Rome, l'obligea à révoquer ces lettres, par
*
TertuUien, expliquant ces paroles, attribue le faux rapport qu'il lui fit de ces prophètes et
ce pouvoir non aux évoques catholiques, en de leurs Eglises; c'est-à-dire, ajoute le même
quelque nombre qu'ils soient, mais aux hom- auteur, pour parler plus véritablement, en
mes spirituels, c'est-à-dire ou à un apôtre, lui ouvrant les yeux sur ce sujet et lui faisant
ou à un prophète. Il fait encore un reproche voh' qu'il ne pouvait les approuver sans con-
aux catholiques de ce qu'ils accordaient le damner ses prédécesseurs. Praxéas était alors
pai'don des pénitents auxpricres des martyrs; recommandable dans l'Eglise par le glorieux
enfin, supposant qu'ils rejutaient absolument titre de martyr ; mais, enflé de cette qualité,
de la communion de l'Eghse les idolâtres et et d'ailleurs naturellement inquiet, il se mita
les homicides, il se plaint qu'ils fussent plus dogmatiser sur mystère de la Trinité et
le
indulgents pour les adultères, quoique leur fut le premier qui introduisit dans Rome l'hé-
crime fût d'autant moins pardonnable qu'ils résie des patropassiens, qu'il avait connus en
s'y étaient laissé aller par le seul attrait du Asie. Il abandonna ensuite ses erreurs, donna
plaisir; tandis que ceux-là avaient renié Jésus- même sa rétractation par écrit, et parut ainsi
Christ, forcés uniquement, en quelque sorte, pendant quelque temps d'accord avec les ca-
par la violence des tourments. tholiques; enfin, retourné à sou vomissement,
il se déclara de nouveau contre l'Eglise. Il en-
ARTICLE XVIII. seignait que le Père était descendu dans la
Vierge, qu'il était né d'elle, qu'il avait souffert,
TRAITÉ CONTRE PRAXÉAS.
eu un mot qu'il était Jésus-Christmême ; nom
1. Tout ce qu'on sait du livre de TertuUien qu'il avait reçu depuis sa naissance dans le
contre Praxéas, c'est qu'il le fit étant monta- temps.
niste, et il parait même qu'outre le zèle de la 2. D'abord TertuUien oppose à cette héré-
de ce Traita.
vérité que
peut supposer en avoir été le
l'on sie la doctrine de l'Eglise universelle, selon
Cap. II.
motif principal, il fut porté en particuher à laquelle *, dit-il, nous croyons tellement un
* Sed habet, inquit, Ecdesia potesiatem delicta do- ' Duo negotia diaboli Praxéas Romceprocuravit,pro-
nandi. Hoc et ego magis et agnosco et dispono, qui ip- phetiam expulit, et hœresim intulit, Paracletum fuga-
sum Paracletum in prophetis novis habeo dicentem : vit, et Patrem crucifixit. Tertull., lib. adv. Prax.,
divinitaiis, Pater, Filius et Spiritus Sanctus. Tertull., dispetisatione quam œconomiam dicimus, ut unici Dei
ibid. sit et Filius, sermo ipsius qui ex ipso processerit, per
* Quid nunc et ad Ecclesiam et quidem tuam, psy- quem omnia facta sunt, et sine quo factum est nildl.
chice ? secundum enim Pétri persotiani, spiritalibus, Hune missum a Pâtre in Virginem, ex ea nalum homi-
potestasilla conveniet aut apostolo,aut prophetœ.Nam nem et Deum, filium hominis et Filium Dei et cogno-
et Ecclesia proprie et principuliter ipse est spiritus, in minatum Jesum Christum. Hune passum, hune mortuum
quo est Trinitas unius divinitatis, Pater, Filius et et sepultum secundum Scripturas, et resuscitatum a
Spiritus Sanctus, et ideo Ecclesia quidem delicta do- Pâtre et in cœlos assumptum sedere ad dexteram Pa-
nabit , sed Ecclesia spiritus per spiritalem homi- tris, venturum judicare vivos et mortuos. Qui exinde
tW7i,non Ecclesia numerus Episcoporum. Tertull., ibid. miserit tecundum promissionem suam, a Pâtre Spiri-
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. S9
seul Dien,que nous reconnaissons en même pour * moi, qui reconnais que le Fils est delà
temps que ce Dieu a un Fil s qui est son ,
même substance que le Père, qu'il ne fait rien
Verbe, qui est sorti de lui, par lequel toutes sans sa volonté, et qu'il a reçu de lui toute sa
choses ont été créées, et sans lequel rien n'a puissance , que fais-je autre chose, sinon de
été fait. Ce Verbe a été envoyé par le Père défendre dans monarchie que le
le Fils la
dans le sein de la Vierge ; il est né d'elle, Père lui a donnée? Il en est de même du Saint-
homme et Dieu tout ensemble, Fils de l'Homme Esprit, qui procède du Père par le Fils. »
et Fils de Dieu ; il a été surnommé Jésus- S.Sur ces paroles de l'Apôtre «^Quand Dieu : cap. v.
Christ ; il a souffert, il est mort et a été en- le Père se serii soumis toutes choses , le Fiis
seveli, selon les Ecritures ; il a été ressuscité sera aussi soumis à lui, » U dit que cet endroit
par lePère ; il est monté au ciel pour y être seul pourrait suffire pour prouver que le Fils
assis à la droite du Père, d'où il doit venir ju- est autre que le Père; mais, afin de mieux éta-
ger les vivants et les morts. De là aussi, sui- blir cette vérité, il explique en quel sens il
vant sa promesse, il a envoyé du Père TEsprit- était vrai de dire qu'avant la création rien
Saint consolateur, sanctificateur de la foi de n'existait que Dieu. « Dieu, dit-il, était * seul
ceux qui croient au Père, au Fils et au Saint- avant la création du monde, parce qu'il n'y
Esprit. Il ajoute que cette règle delafoi étant avait rien hors de lui ; mais en lui était sa
antérieure à toutes les hérésies, et particu- raison, qui se produisit ensuite au dehors et
Uèrement à celle que
de Praxéas,quine faisait devint sa parole. Cette raison est nommée
de paraître, est par conséquent la seule que par les Grecs Xoyoç, c'est-à-dire, en notre lan-
l'on doive suivre, suivant cette règle de pres- gue, verbe ou parole ; d'où vient qu'il est
cription : Ce qui a été enseigné le premier est passé en usage de dire, qu'au commencement
vrai et divin, ce qui a été ajouté depuis est le Verbe eu Dieu quoiqu'il convînt
était ,
faux et étranger. Il montre ensuite comment mieux de n'employer le terme de parole que
la trinité de personnes nepréjudicie* en rien pour marquer sa prolationà l'extérieur, et de
Cap. m. à l'unité de nature. Comme les hérétiques réserver celui de raison pour l'existence an-
affectaient de relever le nom de monarchie, térieure mais ces expressions sont indiffé-
;
pour imposer aux simples et faire croire qu'ils rentes Il tâche de donner une idée de cette
^. »
ne défendaient que l'unité de Dieu, il fait voir raison qui était en Dieu dès le commencement,
que ceux qui soutenaient la distinction des par l'exemple de celle qui réside dans l'homme
personnes, ne prétendaient point combattre et qui est en quelque sorte un second lui-
•v. cette monarchie. « C'est la détruire, dit-il, que môme avec lequel il raisonne et dispose ses
d'admettre un autre Dieu que le Créateur ; pensées pour les produire ensuite par la parole.
s
ium Sanctum Paradetum, sancfificatorem fidei eorum / Cor. XV, 28.
qui credunt in Patrem,et Filiumet Spiritum Sanctum. Ante omnia enim Deus erat solus,ipse sibi etmun-
*
TertuU., lïh.adv. Prax., cap. 2. dus, et locv^ et omnia. Solus autem, quia nihil aliud
1 Quasi non quoque unius sit omnia, dura ex uno extrinsecus prœter illum. Cœterum ne tune quidem so-
omnia, per subsiantiœ scilicet unitatem, et nihilominus lus, habebat enim secum, quam habebat in semetipso
custodiatur œconomiœ sacramentum, quœ unitatem in rationem suam scilicet.... hanc Grœci'kôyov dicunt
Trinitatem disponit, très dirigens, Patrem, et Filium quo vocabulo etiam sermonem appellamus. Ideoquejam
et Spiritum Sanctum. Tresautem non statu sedgradu, in usu est nostrorum, per simplicitatem interpretatio-
nec substantia sed forma, nec potestate sed specie ; nis, sermonem dicere in primordio apud Deum fuisse
;
unius autem substantiœ, et unius status, et unius po- cum magis rationem competat antiquiorem haberi ;
testât is , quia unus Deus ex quo, et gradus isti, et quia non sermonalis a principio, sed rationalis Deus
formœ, et species in nomine Patris, et Filii, et Spiritus etiam ante principium.... tamen et sic nihil interest.
Sancti deputantur. TertuU., lib adv. Prax., cap. 3. Nam etsi Deus nondumsermonemsuum miserai, pi'oinde
Quale est ut Deus divisionem
dispersionem pati vi-
et eum cum ipsa et in ipso ratione intra semetipsum ha-
deatur in Filio, et in Spiritu Sancto, secundum et ter- bebat, tacite cogitando et disponendo secum quœ per
tium sortais locum, tam consortibus substantiœ Patris, sermonem mox erat dicturus. Cum ratione sua cogi-
quas non patitur in tôt Angelorum numéro, et quidem tans atque disponens, sermonem eam efficiebnt, quam
tam a substantia alieni. Ibid. sermone tractabat. Idque quo facilius intelligas, ex te
* Qui ergo Filium non aliunde deduco, sed de subs- ipso ante recognosce, etc. Ibid., cap. 5.
tantia Patris, nihil facientem sine Patris voluntate, ^ pourvu qu'on admette la génération
Elles le sont,
omnem autem a Pâtre consecutumpotestatem, quomodo éternelle du Verbe dans le sein de son Père. Tertul-
possum de fide destruere monarchiam, quam a Pâtre lien, dans son livre contre Hermogène, admet que Dieu
Filio traditam in Filio semo ? hoc mihi et in tertium engendre son Verbe de toute éternité dans son propre
gradum dictum sit, quia Spiritum non aliunde pute sein. Au reste, il n'est pas toujours d'accordaveclui-
quam a Pâtre per Filium. Ibid., cap. 4. même dans ses espreseioos sur ce mystère. {L'éditeur.)
60 HISTOIRE r,ÉNl<:RALE DES AUTEURS EGCLl^lSIASTIQUES.
Cap. Tll.
A. n en parlant du Verbe divin
ajoute, : 5. « Mais, disait Praxéas, rien n'est diflîcile Cap.xi
Autre est celui qui engendre et celui qui est Dieu dit « Que le firmament soit fait, et Dieu
:
engendré ; autre celui qui envoie et celui qui fitle firmament?» Deux sont ici nommés l'un :
est envoyé ; autre celui (jui fait et celui par dit que le firmament soit fait; l'autre fait le
qui il fait. Le Seigneur même a usé du mot firmament. »
à'autî'eenla. personne du Paraclet,en disant' : 6.« Cela supposé, direz-vous, il faut donc xm.
«Je prierai mon Père, et il vous enverra un admettre deux dieux, et aussi deux seigneurs,®
X.
autre consolateur.» Donc, puisque, pour être selon ce qui est écrit: Le Seigneuraditàmon
Père, il faut avoir un Fils, et que, pour être Seigneur?» — «A Dieu ne
plaise, réplique Ter-
Fils,il faut avoir un Père, autre cbose est d'a- tnllien! jamais le nom
de deux dieux et de
voir un Père, autre cbose de l'être ; et il est deux seigneurs ne sortira de notre bouclie; non
impossible, étant seul, ou d'avoir un Fils, ou que le Père nesoitDieu,etleFils Dieu, et le
de l'être. » Saint-Esprit Dieu, mais parce que le Fils n'est
1 Quœcumque ergo substantia sermonis fuit, illam per quern fit. Bene quod et Dominus usus hoc verboin
dico personam et illi Filii nomen vindico,etdumFilium persona Paracleti, non divisionem significavit, sed dis-
agnosco, secundum a Pâtre def'endo protulit Deus positionem : rogabo enim, inquit, Patrem, et alium ad-
sermonem sicut radix fruticem, fons fluvium, et
et vocatum mittet vobis Spiritum veritatis. TerluU., lib.
sol radium. Nam et istœ species probolœ sunt earum adu. Prax., cap. 1, 8, 9.
substantiarum ex quibus prodeunt.... igitur secundum * Tertullien va jusqu'à dire que le Verbe est une
horum exemplorum formam, profiteur me duos dicere, portion du Père cette expression et celle de plus
;
Deum et sermonem ejus, Patrem et Filium ipsius ; graud sont bien impropres. Le Verbe, dans le sein
nam et radixet frutex duœres sunt, sed conjunctœ de son Père, est aussi grand que son Père selon la
omne quod prodit ex aliquo secundum sit ejus necesse divinité.Mais comme plusieurs Pères ont employé
est de que prodit, non ideo tamen est separatum. Se- cette même expressiou,on a prétendu, non sans rai-
cundus autem ubi est, duo sunt, et tertius ubi est, très son, que celle supériorité du Père devait s'entendre
sunt. Tertius enim est Spiritus a Deo et Filio sicut ter- d'une priorité relative et d'origine. Voyez Ginouil-
tius a radice fructus ex frutice.... haru: me regulam hac. Hist. du dogme catholique, pag. 469. Voyez
professum, quant inseparatos ab alterutro Patrem et aussi BuUus et Bossuet.qui ont justifié Tertullien sur
Filium et Spiritum iestor, tene ubique : et ita quid ce point. {L'éditeur.)
quomodo dicalur agnosces. Ecce enim dico alium esse 3 Jean. XIV, 10. — * Gènes, i, 22. — » Gènes, m,
Patrem, et alium Filium, et alium Spiritum tion 22.
tamen diversifate aHum Filium a Pâtre, sed distribu- ^ Duos deos duos dominos nunquam ex ore nostro
et
tione, nec divisione alium, sed distinctione, quia non profcrimus ; non quasi non et Pater Deus, et Filius
sit idem Pater et Filius, vel modulo alius ab alio. Pa- Deus, et Spiritus Sanctus Deus, et Deusunusqwsque....
ter enim tota substantia est : Films vero derivatio to- itaque deos omnino non dicam, nec dominos, sed Apo-
tius et portio, sicut ipse profitetur, quia Pater major stolum sequar, ut si pariter nominandi fuerint Pater
me est.... sic et Pater alius a Filio, dum Filio major; et Filius, Deum Patre^n appellem, et Jesum Christum
dum alius qui générât, alius qui generatur; dum alius Dominum nominem. Solum autem Christum poiero di-
quimittit, alius qui mittilur ; dum alius qui facit, alius cere Deum,sicut idem Apostolus. Ibid., cap. 13.
[Ill"^ SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 6i
nommé Dieu que par l'umon avec le Père. Esprit consolateur : « Il recevra de ce qui est
Donc, pour ne pas scandaliser les Gentils à moi. » Enfin ^ il a ordonné à ses Apôtres de
j'imiterai l'Apôtre, et, si je dois nommer en- baptiser au Père,au Fils et au Saint-Esprit, non
semble le Père et le Fils, j'appellerai le Père en un seul. C'est pourquoi l'on nous plonge Cp.p. xxvi.
Dieu et le Fils notre Seigneur Jésus-CUrist. non une seule, mais trois fois, pour chaque
Mais quand je nommerai Jésus-Christ seul, je nom des personnes divines. »
3oS'
'^'^
pourrai le nommer Dieu. » Tertullien insiste 8. Les hérétiques, pressés par la distinction xxvn.
encore sur les endroits de l'Écriture où il est des trois personnes si évidente dans les Écri-
dit que le Père est invisible d'où il conclut ;
tures, se réduisaient à dire que le Fils était
que le Fils, ayant apparu aux patriarches et la chair, l'homme Jésus, le Père l'Esprit, le
ayant même conversé avec eux, est autre que Dieu le Christ ; qu'ainsi il n'y avait qu'une
xTiii.
le Père. Il ajoute : «Quand l'Ecriture dit qu'il personne diviue. Mais Tertullien leur fait voir
n'y a qu'un Dieu, c'est contreles païens quiad- qu'en voulant défendre l'unité de Dieu, ils
mettent la multitude des faux dieux, ou contre détruisaient l'Incarnation. « Car ce qui est né
les hérétiques, surtout contre les marcionites, de la Vierge est le Fils de Dieu, Emmanuel,
^'*- qui font aussi des idoles par leurs discours, et Dieu-avec-nuus donc ce n'est pas la chair
:
lorsqu'elle ditque Dieu seul a créé le ciel, c'est seule, car la chair n'est pas Dieu. De plus,
contre ceux qui enseignent que le monde est Dieu ne peut changer; toutefois, le Verbe s'est
l'ouvrage desanges etdes puissances célestes.» fait chair, donc il n'a pas été changé en chair,
et XXI. 7. Praxéas objectait ces paroles de l'Ecri- mais s'en est revêtu, pour se rendre sensible
ture: «'Je suis Dieu,ethorsmoiiln'y enapoint et palpable. Autrement, si Jésus-Christ était
d'autre; » et ces autres « * Le Père et moi som : mêlé de la chair et de l'esprit, ce serait une
mes un; » et encore : « ' Celui qui me voit, voit troisième substance qui ne serait ni l'un ni
aussi mon Père;» et: «* Je suis dans le Père, rautre,iiiDieuni homme. Or ^, en Jésus- Christ
et le Père est en moi. » Tertullien lui répond il y a deux substances non confuses, mais
qu'un si petit nombre de preuves, qui parais- jointes en une personne, le Dieu et l'homme;
sent le favoriser, ne peuvent prévaloir contre chaque substance a conservé ses propriétés :
tant d'autres qui établissent clairement le sen- l'esprit faisait des miracles, la chair souffrait.
timent contraire, c'est-à-dire la distinction du Il parait encore que le Christ n'est pas le Père,
Père et du Fils; mais, pour répondre plus en ce qu'il est dit expressément que le Christ
directement à ses objections, il explique quel est mort, et il paraît que ce n'est pas le Père
était le véritable sens des paroles sur lesque 1- qui a soutiert, puisque le Fils se plaint à la
""• les il les fondait : « Il n'est pas écrit, dit-il: Je croix que son Dieu l'a abandonné. Si c'était
suis, mais Nous sommes; et Jésus-Christ n'em-
: le Père,à quel Dieu s'adresserait-il?» L'auteur
ploie pas le terme d'un au masculin, mais au finitson traité en remarquant que le mystère
neutre, pour marquer une même chose, non de la Triniié, caché aux Juifs, avait été révélé
une même personne. Voulant montrer l'unité aux chrétiens dans la nouvelle loi; et c'est en
de substance, non la singularité de personne, il cela surtout qu'il fait consister la diflereuce
dit: «Je suis dans le Père,» et non pas, je suis le des deux Testaments'.
XXV. Père. Au reste, la distinction de personnes doit
s'entendre non-seulement du Père et du Fils, ARTICLE XIX.
mais encore du Saint-Esprit; d'où vient que
LIVRES DE LA COURONNE DU SOLDAT, DE LA
Jésus-Christ,le promettant à ses disciples, leur
FUITE DURANT LA PERSÉCUTION, DU VOILE DES
dit qu'il prierait son Père de leur envoyer un
VIERGES.
autre consolateur, et, pour marquer l'unité
de substance, il dit, en parlant de ce même l.L'an de Jésus-Christ 255, Maximin, choisi i.ivio de
la Couionne
ut tinguerent in Patrem, et Filium, et Spiritum San- détruit habilement tous les arguments de l'hérétique
ctum, non in unum.. Nam nec semel, sed ter, ad sin- et défend la doctrine catholique, il y explique le
gula nomina, in personas singulas tinguimur. Tertull., dogme de la Trinité avec beaucoup plus d» clarté
Ub. adv. Prax., cap. 26. * Videmus duplicem statum — que les Pères précédents. {L'éditeur.)
6-2 HISTOIRE GI'.NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
du SoMnt empereur, associa à l'cinpire son fils Maxime la main du nous protestons que nous
prélat,
ôcril vers
l'unlSS, pag. ou iMaximin, ct,apparcmment,Tertiillien par- renonçons au démon, à ses pompes et à ses
100.
le dans son Traité de la Couronne des libéra- anges. Ensuite nous sommes plongés trois fois,
lités (jue ce prince fit aux soldats en cette oc- répondant quelque chose au-delà de ce que le
casion : ainsi on peut rapporter à ce temps Seigneur a déterminé dans l'Evangile. Etant
la publication de cet ouvrage, d'autant que la levés des fonts, nous goûtons du lait et du
longue tranquillité, au sujet de laquelle il y
« miel, et, depuis ce jour, nous nous abstenons
est dit que les chrétiens craignaient, semble du bain ordinaire pendant toute la semaine.
avoir rapport à celle dont ils avaient joui sous Quant au sacrement de l'Eucharistie, que le
Garacalla, Macrin, Héliogabale et Alexandre, Seigneur a ordonné à tous, nous le prenons
et qui, en eflet,fut interrompue par Maximin. dans le temps du repas et même aux assem-
Voici l'occasion de cet ouvrage. Le tribun fai- blées d'avant le jour, et nous ne le recevons
sait aux soldats la distribution accoutumée, et que de la main de ceux qui y président. Nous
ceux-ci s'approchaient, couronnés de laurier, faisons tous les ans des oblations pour les
pour la recevoir; un d'entre eux se présenta défunts et pour les fêtes des martyrs. Nous
la tête nue, tenant sa couronne à la main. On ne croyons pas permis déjeuner le dimanche,
lui en demanda la raison; et sur sa ré- ni de prier à genoux; nous jouissons du même
ponse que sa qualité de chrétien ne lui per- privilège depuis le jour de Pâques jusqu'à la
mettait pas de se conformer à ses compa- Pentecôte. Nous souffrons avec peine que l'on
gnons; il fut arrêté et mis en prison, en at- fasse tomber à terre quelque chose de notre
tendant qn'on le punît de sa hardiesse. Son pain ou de notre coupe. A toutes nos démar-
action fut désapprouvée de quelques chré- ches, nos mouvements, nos entrées et nos sor-
tiens qui craignaient qu'elle ne donnât ma- ties; en nous chauffant, en nous baignant, en
tière à une nouvelle persécution, et qui soute- nous mettant à table ou au lit, en prenant un !
naient que cette couronne était un ornement siège, en allumant une lampe; à quelque ac-
indififérent. Mais Tertulheu prétendit le con- tion que ce soit, nous marquons notre front
traire et entreprit de justifier ce soldat. du signe de la croix. Si vous demandez une
2. Il tire sa principale preuve de l'autorité de loi tirée des Écritures pour ces pratiques et
Cap. Il et
Isi tradition; car il reconnaît n'exister aucune pour les autres semblables, vous n'en trouve-
'"
loi de l'Ecriture qui défendît ces couronnes. rez point on vous dira que la tradition les a
:
f^^ap V. 3. Outre ces raisons générales, il en apporte traité en montrant que l'unique motif d'hono-
d'autres plus particulières à son sujet : il sou- rer les faux dieux avait mis en usage les couron-
tient que c'est renverser l'ordre de la nature, nes, et conclut qu'elles sont absolument inter-
de ornements les fleurs na-
faire servir à des dites à tout chrétien, surtout aux femmes qui, XIV.
sur la tête du soldat, on faisait des vœux à s'il permis de s'enfuir pour éviter la per-
était
Jupiter, auxquels le chrétien était censé con- sécution, ou de s'en mettre à couvert pour de
sentir, s'il la recevait, quoiqu'il ne prononçât l'argent. Tertulhen, s'étant trouvé dans une Cap.I.
pas les paroles du vœu. Il en conclut que, por- assemblée, où Fabius, l'un de ses amis, pro-
ter ces couronnes , c'était renoncer de la foi posa la question, dit ce qu'il en pensait. Mais
Jésus-Christ et embrasser le culte des idoles. comme ne put s'expliquer autant qu'il au-
il
viii. Il se propose ensuite quelques faibles objec- rait voulu, parce qu'il fut interrompu par di-
IX. tiens, auxquelles répond à mesure; puis,in-
il verses personnes de la compagnie qui, sans
vitant ses adversaires à produire l'exemple de doute, De se trouvèrent pas de son sentiment,
quelque patriarche,d'un prophète, d'un lévite, il se réserva de traiter la matière par écrit.C'est
d'un prêtre, d'un apôtre ou d'un évèque qui de là que nous est venu son traité intitulé : De la
se fût orné de couronnes, il dit qu'il n'en voit Fuite durant la persécution,
où il prétend qu'on
qu'un à opposer, celui de Jésus-Christ même ne doit ni s'enfuir, ni se racheter de la per-
couronné d'épines ; « mais,ajoute-t-il, on vous sécution pour de l'argent. Saint Jérôme ^ met
laisse la liberté de vous couronner de cette cet ouvrage au nombre de ceux que Tertullien
ï- sorte. » Au reste, il déclare qu'il ne condamne écrivit directement contre les catholiques, et
pas les couronnes en elles-mêmes, c'est-à-dire cetémoignage,quand nous n'aurions pas d'au-
par rapport à ce qui en faisait la matière, mais tres preuves, suffirait à prouver que la trop
seulement à cause de l'usage auquel on les grande confiance, ou plutôt la témérité que
employait, Tertulhen y exige des chrétiens durant la per-
xi. 4. La une occa-
profession des armes était sécution, était entièrement éloignée du véri-
sion presque continuelle de prendre part aux table esprit de l'Eglise Il semble promettre
.
cérémuines païennes que Tertulliea reprend cet écrit dans celui de la Couronne du ' soldat,
dans cetraité; afin de retrancher le mal par son et apparemment qu'il ne tarda pas beaucoup
principe, il soutient que la milice ne convient à exécuter son dessein; car il y a lieu de croire
pointdu tout à un chrétien. Il reconnaît né- qu'ils parurent tous deux dans la même année,
anmoins que l'Eglise n'obligeait point les gens c'est-à-dire en 235, la première du règne de
de guerre à quitter le service,quand ils se fai- Maximin, dès le commencement de la persé-
saient chrétiens, et il rapporte pour exemple cution.
les soldats que saint Jean reçut au baptême Dans celui dont il s'agit, l'auteur pose d'a-
6. Analyse
(le ce Traité.
et à la pénitence, et celui de Corneille le Cen- bord pour un principe incontestable que c'est
Cap. 11 et
tenier baptisé par saint Pierre; mais aussi, Dieu qui nous visite par la persécution, et il en seq,
ajoute-t-il, plusieurs de ceux qui se convertis- marque l'utilité en ces termes: «Alors, dit-il,
sent renoncent ensuite au métier de la guerre, la foi est plus soigneuse, comme en temps de
et ceux qui ne croient pas devoir quitter leur guerre; la disciphue est plus exacte pour les
* Tout cela est fort bien; mais ces raisonnements 2 Hieronym., lib. de Vir. illustr., cap. 13.
justifiaient ils les soldats chrétiens sans avoir con- 3 Sed de quœstionibus confessionum
;
alibi docebimus.
tre eux l'Écriture, ils avaient pour eux la coutume. Tertull., lib. de Coron., cap. 1.
(L'éditeur.)
64 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
jeûnes, les stations, les prières ;
pour l'iiu- mes de confesser Jésus-Christ en présence des
niilité, l'amour de Dieu du prochain, la pu-
et hommes, si nous voulons qu'il nous confesse
reté,^'! sobriété.» Il onconclutque ce qui vient devant son Père, et avec ce qui est dit ailleurs:
de Dieu étant toujours bon, et par conséquent « * Ne craignez i)oint ceux qui tuent 1« corps et
plutôt à rechercher qu'à éviter, on ne doit qui, après cela, n'ont rieu à vous faire davan-
point fuir pour se garantir de la persécution. tage. » Jésus-Christ lui-même évita, par la Cap. via.|
comme si vous l'aviez déjà fait. Si vous êtes en ter la faiblesse de nos frères ?» —
« Oui, dit Ter-
suspens, pourquoi, dans cette incertitude, ne tuUien, et non pas de ceux qui s'éloignent de
pas espérer que vous aurez assez de force nous par la fuite: comment compatir à ceux
pour le confesser? car ou cette force vient de qui ne sont plus avec nous? Si saint Jean
nous -mêmes, et alors nous pouvons sûrement veut que nous donnions notre vie pour nos
nous la promettre; ou c'est Dieu qui la donne, frères, que ne devons-nous pas faire pour
et, en ce cas, il faut laisser le tout à son bon Dieu?» Enfin il soutient que la fuite ne s'ac- x ctseq.
plaisir; il est beaucoup plus sûr de rester corde point avec la fermeté dont un chrétien
ferme et soumis à la volonté de Dieu, que de doit faire profession, et il va même jusqu'à
suivre notre propre choix en fuyant. » 11 rap- dire qu'il est plus glorieux de succomber à
porte, à cette occasion, ce qui était arrivé à la violence des tourments, que de chercher
* un saint martyr nommé Rutilius après avoir : à mettre sa foi en sûreté par la fuite. 11 dé- xi.
fui plusieurs fois la persécution de place en clame avec le môL'ie feu contre ceux qui se
place, après avoir racheté le péril par de l'ar- mettaient à couvert pour de l'argent, et, il dit
gent, il croyait s'être mis en sûreté ; mais il que c'est une chose indigne de racheter pour
fut pris inopinément, présenté au gouverneur, un si vil prix celui que Jésus-Christ a racheté
et, après plusieurs tourments, il finit par le de son propre sang; par là on confesse bien, U
feu «. est vrai, sa foi auprès d'une personne ; mais on
M. 7. Les catholiques objectaient le précepte de l'a niée devant tous ceux en présence de qui
Jésus-Christ, qui ordonne de fuir dans la per- on craint de la déclarer. Cette nouvelle ruse
sécution mais TertuUien soutient qu'il ne
; avait été entièrement inconnue aux Apôtres
regardait proprement que l'unique personne et même aux persécuteurs, qui, jusque-là, ne
des Apôtres, et cela seulement pour un temps, s'étaient point avisés d impos'îr aux chrétiens
jusqu'à ce qu'ils eussent annoncé i'Évaugile un tribut particulier pour leur faire acheter
aux Juifs. C'est pourquoi saint Paul qui, dans la liberté de leur reUgion, quoique leur mul-
le commencement de sa prédication, s'était titude pût apporter par là un grand revenu.
échappé de prison, en se faisant descendre L'argent est le tribut que nous devons payer
dans une corbeille le long du mur, refusa
, à César; mais,à l'égard de Dieu, nous ne pou-
ensuite de se rendre aux prières des fidèles vons reconnaître que par notre propre sang
qui s'cfîorçaient de le détourner du voyage la grâce que son Fils nous a faite de répandre
de Jérusalem, parce qu'il avait été prédit par le sien pour nous. Comme les catholiques
le prophète Agabus qu'il y serait chargé de pouvaient prétexter la nécessité de s'assem-
chaînes. De même , les autres Apôtres ne se bler pour la célébration des mystères, Tertul-
vir. crurent pas obligés de fuir jusqu'à la fin. En lien répond: « Comment faisaient les Apôtres
effet, si ce précepte était pour toujours, com- qui ne donnaient point d'argent ? la foi doit
ment l'accorder avec l'obligation où nous som- être notre plus sûr rempart. Si nos assem-
* Cet exemple prouve que, même après avoir fui, est pris et si l'on souffre les tourments, {L'éditeur.)
on peut, avec la grâce de Dieu, persévérer, si l'on 2 Luc. XII, 4.
[m® srÈcLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 65
'^
blé es ne peuvent se faire de jour, nous avons pose pour principe que la coutume, quelque
la nuit, éclairée de la lumière de Jésus- anciei.ne qu'elle soit, ne peut jamais préjudi-
Christ *. » cier à la vérité. Puis, expliquant le précepte Cap. ivet
^'^'
fs" Le livre intitulé Il faut voiler les Vier-
9. : de saint Paul ^, qui ordonne aux femmes de se
ges, ne se trouve cité dans aucun des écrits voiler dans l'église, il soutient que, sous le
de Tertullien, pas même dans celui de la nom de femme, l'Apôtre a compris tout le sexe
Couronne du soldat, qui est un de ses der- d'Eve, comme sous celui d'homme on entend
niers, quoique la matière le portât * naturel- celui d'Adam ; nommé homme, et
aussi l'un fut
lement à en parler. Il est done à croire qu'il l'autre fut appelée femme, avant même qu'ils se
ne composa cet ouvrage qu'après tous les au- fussent connus; et saint Paul, écrivant aux Ca-
tres qui nous restent de lui; car on a vu qu'il lâtes \ dit que le Fils de Dieu a été formé d'une
a coutume d'indiquer ses écrits précédents, femme, quoiqu'il soit certain qu'elle fût vierge.
lorsque l'occasion s'en présente. Quoi qu'il D'ailleurs, c'est un point établi de la discipline w.
en soit, il est évident qu'il l'écrivit dans le ecclésiastique, que ce qui se pratique pour
schisme; et il parait même qu'il y était phis les femmes s'observe également à l'égard des
attaché que jamais puisqu'il y avance ce
,
filles; il ne leur est pas moins défendu qu'aux
qu'il n'avait encore osé dire ailleurs « Qu'en ; femmes de parler dans l'église, d'enseigner,
Montan ' seul s'était accomplie cette promesse de baptiser, d'offrir, en un mot de faire aucun
de Jésus-Christ * : Quaud l'Esprit de vérité sera exercice attaché au sacerdoce. Pourquoi donc
venu, il vous enseignera toute vérité. » Voici leur serait-il permis de ne se pas voiler dans
P- »• ce qui occasionna cet ouvrage. C'était la cou- l'église, puisque les femmes n'ont pas la
tume dans quelques Eglises d'Occident et même liberté? Il loue néanmoins les vierges xm.
dans plusieurs autres de la Grèce et de l'O- chrétiennes de ce qu'elles ne se montraient
rient, que les filles se voilassent dans l'église. plus en public^ surtout parmi les païens,
">• Dans le pays où écrivait TertulUen, apparem- sans se cacher le visage, de peur de leur être
ment en Afrique, on leur avait laissé la li- une occasion de scandale; mais il exige de
berté de le faire ou de ne le pas faire ; mais plus qu'elles aient lamême charité pour leurs
l'hérésie de Montan, commençant à s'étendre, frères, pour cela elles ne doivent paraître
et
embrassa la pratique de voiler les tilles; cel- dans l'église que voilées. Car si nous sommes
les qui ne Tétaient pas se scandalisèreni de obligés de cacher tie telle sorte nos bonnes
celles qui l'étaient et demandèrent que toutes œuvres, que, quaud nous faisons l'aumône^, la
les filles fussent sans voile ; elles l'obtinrent, main gauche ne doit pas savoir ce que donne
et cette coutume devint presque universelle la droite : quelle précaution ne devons-nous
dans ^ l'Afrique. pas prendre pour nous dérober aux yeux des
«• 10. TertuUien qui, jusque-là, avait souffert hommes, lorsque nous offrons à Dieu notre
les différents usages sur ce point, parce qu'ils propre corps et notre esprit?
Dans une vierge, x,v,
coutumes, on devait voiler généralement tou- se couvraient le visage de telle sorte qu'elles
tes les filles; c'est-à-diie que, depuis qu'elles n'avaient qu'un œil libre, aimant mieux ne
avaient atteint l'âge nubile, elles ne devaient jouir qu'à demi du plaisir de la vue, que de
plus paraître dans l'église que couvertes d'un prostituer leur visage à tout le monde; puis
•• grand voile jusqu'à la ceinture. D'abord il il finit ce traité par ces paroles ;« La grâce
tatis ingénia, opus Del aut ce^saverit, aut proflcere des- * Joan, XVI, 13. — 5 Cor. xi, 5.-6 Gai. iv, 4. —
?
titerit ? cum propierea Paracletum misent Dominus, Matth. VI, 13.
ut quoniam humana medlucriias omnla semel capere Au moins chez les catholiques; car il est à croire
8
non poterat, paulatim dirigeretur et ordinaretur, que ces filles, qui demandèrent que l'on ôtàt le voile
et ad perfectum perduceretur disciplina ab illo vi- à toutes les vierges, étaient catboliques, et qu'elles
cario Domlni Spiritu Sancto... cum vnerit, ait, ille ne se scandalisèrent de celles qui le portaient, que
Spiritus, etc., Aie erit soius a Christo magister, et di- parce qu'elles les soupçonnaient de montanisme.
II. 5
66 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES. l
et de notre SiMpncnr Jc^sus- Christ
la paix cuta pas son projet, au moins cela ne parait
soient avec ceux qui liront ceci dans un esjjrit nulle part.
de paix, préférant la vérité à la conturnc, et 2. On trouve , à la fin des œuvres de ce OuTri|t
fancseï
attriba
avec Septiniius Tertullien, de qni est cet ou- Père, un poème sans nom d'auteur, Conti'c les Tertu
vrage. » Si Ton en excepte le Traité '
du liap- erreurs de Marcion. Faltricius, qui l'attribue
tême, c'est le seul endroit de ses écrits où il à Tertullion,se fonde sur l'autorité d'un cer-
se nomme *. tain manuscrit qu'il dit avoir vu. Cependant
je ne aucun ancien qui ait compté Tet-
sais
ARTICLE XX. tullien au nombre des poètes; et lui-même,
faisant le dénombrement de ses ouvrages
AUTRES ÉCRITS DE TERTULLIEN QUE NOUS N'AVONS
contre Marcion, ne dit pas un mot de celui
PLUS.
dont il s'agit. Bien plus, l'auteur de ce poème
OnvTagïJ
de Tertiil- 1. Outre les écrits dont nous venons de avance en quelques endroits des sentiments
lien i]iie
nous n'a- parler, saint Jérôme cite ' de TertuUien six entièrement opposés à ceux que TertuUien
vons pluf.
livres de l'Extase, qu'il avait écrits contre l'E- embrasse dans des écrits reconnus de tout le
glise, et un septième contre Apollone. Lui- monde pour être de lui. Par exemple, il dit
même, dans ses livres * contre Marcion, se re- que Samuel '^ ressuscita pour prophétiser à
connaît pour auteur d"un ouvrage intitulé : Saùl ce qui lui devait arriver; et TertuUien,
^
De l'Espéi'ance des ftdèles, où il enseignait dans le livre *°rfe l'Ame, préteml au contraire
qu'après la résurrection, Jésus-Christ régne- que la Pythonisse n'évoqua pas effectivement
rait dans la chair avec ses saints. Il avait écrit l'âme de Samuel, mais qu'elle trompa Saùl en
plusieurs autres traités : sur ^ les Vêtements lui faisant voir un démon sous la forme de
d'Aaron,%\xv ' les Animaux mondes et immondes, ce prophète. Ailleurs il fait deux papes diffé-
iLib. de Baptism., cap. ultim. livre sur l'horreur qu'on doit avoir pour les dieux des
y aurait plusieurs trèà-bonnea pensées dans
* Il Gentils, publié par J.-M. Suarès. {L'éditeur.)
cet écrit, si tout n'y était pas poussé à l'extrême. 1» Anim., cap. 35.
Tertull., lib. de I3 Idem, lib. —
{L'éditeui'.) de Coron., cap. 6. —
1* Idem, lib. de Bapt., cap. 15.
6 Idem, Epist. 128. -^ ^ Idem, Epist. 124. » Idem, — Marcion., cap. 27.— '» Tertull., lib. de Anim., cap. 20.
Epist. 123. —
9 Idem, Epist. 18. «" Tertull., lib. — — 19 Lib. III advers. Marcion., pag. 634, column. 2.
de Carn. Christ., cap. 8; Vincent. Lirin., Common., — *<> Tertull., lib de Anm., cap. 57. — '-^ Lib. III
lieuoù Adam est tombé dans le péché. Il le rencontreraient, était une frayeur • conti-
donne à Jésus-Christ le nom de * Saint-Es- nuelle qui paraissait sur son visage et qui
qu'Hermas, surnommé le Pasteur,
prit. Il croit trembler tout le corps. Gennade*"
lui faisait
était frère du
* pape Pie. Selon lui Esdras ', témoigne que Salvien de Marseille avait écrit
plein de l'esprit de Dieu, dicta de sa propre en vers un livre de l'Ouvrage des six jours,
bouche et par le seul secours de sa mémoire, où il suivait laméthode des Grecs, de finir
plusieurs livres des Prophètes qui étaient per- par la création de l'homme c'est ce qui a ;
dus, pour les rétablir dans le canon des Ecri- donné sujet de le faire auteur de celui
dont il
tures ; il cite * l'Apocalypse sous le nom de est question mais on aurait dû prendre garde
;
Jean le disciple. Enfin il établit ^ clairement que ce dernier comprend non-seulement les
l'éternité du Verbe et les deux natures en deux premiers chapitres de la Genèse, où toute
Jésus-Christ ®. l'histoire de la création est rapportée, mais
4. C'est avec aussi peu de fondement que l'on encore les deux suivants, qui traitent de la
a attribué à TertuUien trois autres poèmes chute d'Adam et du meurtre d'Al^el, et par
imprimés à la suite de celui-ci dans l'Appen- conséquent qu'il ne convient pas à l'idée que
dice de ses œuvres. Le premier, intitulé : Du Gennade nous a laissée de celui do Salvien.
Jugement du Seigneur, dépeint la félicité des 6. Le troisième, qui a pour titre Sodome, est
bons et les peines des méchants après le ju- encore moins correct que les deux précédents :
gement dernier, pour exciter le pécheur à c'est une description de l'incendie de Sodome,
pénitence. On croit communément qu'il est où l'auteur fait entrer plusieurs choses mer-
de main de Vérécundus, évêque de Jonc-
la veilleuses,' au sujet de la statue en laquelle
ques dans la province Byzacène, et grand dé- la femme de Loth fut changée et touchant le
fenseur des Trois Chapitres, qui mourut exilé pays des Sodomites. Comme elles n'ont point
à Chalcédoine l'an 552, et qui, au rapport de de vraisemblance, on ne les rapportera pas
l'auteur ' anonyme de l'Appendice qui se voit ici. Suit un autre poème sur Jonas et Ninive,
à la fin de saint Isidore de Séville, composa en attribué à TertuUien, sur la foi d'un manus-
vers hexamètres un traité de la Résurrection crit de M. Piihou. Ou y trouve des fables de
et du Jugement. Cependant, si l'on fait atten- même nature que celles que nous lisons dans
tion au portrait que ce même anonyme nous le précédent ce qui fait croire que ces deux
;
a laissé de Vérécundus, on aura peine à se pièces sont du même écrivain. Dans toutes
persuader que cet évêque, qui y est loué pour les deux
y il est parlé d'un pommier que l'on
son éloquence, ait rendu publique une pièce si voyait dans le pays de Sodome, dont le fruit,
peu châtiée. Le grand nombre de fautes qui s'y qui était très-beau à la vue, s'en en allait
trouvent contre la pureté du langage, donneut poussière aussitôt qu'on y portait la main. Ce
lieu de croire, avec plus de probabilité, qu'elle poème traite aussi de la punition que Dieu
est de quelque auteur moins ancien, qui écri- exerça sur Sodome et Gomorrhe. Mais ce qui
vait apparemment dans la basse latinité. Ter- en fait le sujet principal est l'histoire de Jo-
tuUien fait mention d'un de ^ ses écrits qui nas, laquelle toutefois n'y est pas rapportée
avait le même titre que celui dont il est tout au long telle que nous l'avons aujour-
question j c'est apparemment ce qui lui a fait d'hui dans nos Bibles.
attribuer ce dernier. 7. Il y a de plus un sixième poème adressé à
5. Dans le second poème intitulé La Genèse, : Sénator ^^,i[n\ a passé pendant quelque temps
semper erat virtus gloria et œvo. Lib. V, pag. 638. sénateur, nom de diguité. Voyez Annal, de Philo-
coL 2. soph., tom. XXXIIl, 1846. {L'éditeur.)
8 L'édition de M. Migne, 1844, contient ce poème
ainsi que les suivants. {L éditeur.)
68 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Père, la plupart «les savants s'accordent au- est *, selon lui, entre les auteurs latins, ce qu'O-
jourd'hui à lôlcr du nomhie de ses ouvrages. rigèiie est entre les auteurs grecs, également
On convient néanmoins qu'il parut dès avant consommé dans les lettres divines et humai-
le règne du grand Conslantin. Ainsi il est nes, et il a comme renfermé dans la vaste
respectable pour son antiquil»^; il ne contient étendue de son esprit et de sa mémoire toute
que des idaintes ou des remontrances au la philosophie des sages du monde, les maxi-
consul Scnator, qui était passé du christia- mes de toutes les différentes sectes, avec ce
nisme à l'idolâtrie. Terlullien avait composé qu'il y a de plus curieux dans l'histoire et
un livre sur la Trinité; mais il n'est point dans les sciences; presque toujours victorieux
venu jusqu'à nous, et celui qui se voit im- de ceux qu'il avait entrepris de combattre, il
primé à la lin de ses œuvres, n'en est que accablait ses ennemis par la force et par le
l'abrégé, qui a été écrit par Novatien, au l'aj»- poids de ses raisons, et ses ouvrages étaient
port de * saint Jérôme. Nous montrerons ail- comme autant de foudres qui ont réduit en
leurs que ce même Novatieu est auteur de la cendres les blasphèmes des Juifs, des Gentils,
lettre des Viandes des Juifs, qui est impiimée des Gnostiques et de tant d'autres qu'il a
dans M. Rigault sous le nom de Tcrtullien. combattus dans ses écrits. La suite des pa-
Quant au livre de Gennade, Des Définitions de roles de Vincent de Lérins fait voir qu'il es-
la foi ou Des Dogmes ecclésiastiques, on l'a at- timait non-seulement les écrits que Tertullien
tribué à Tertullien ; mais il est certain qu'il composa étant catholique, mais encore plu-
n'est point de lui; on y trouve plusieurs cho- sieurs de ceux qu'il écrivit dans le schisme
ses qui ne peuvent convenir au III* siècle. pour défendre la vérité. Nous rapporterons
ici ce qui se trouve de plus remarquable dans
* Hieronym., de Vir. illustr,, cap. 70. voluminum suorum molibus, velut quibusdam fulmini-
2 Vidi ego quemdam Pouluni Concordiœ, quod oppi- hus evertif. Vincent. Liriu., Commonit. 1.
dum senem, qui se f'eati Cypriani jam
Italiœ est, 5 Moilher, Patrol., tom. I, développe la doctrine émise
grandis œtafe notarium cuni ipse admodum esset ado- par Tertullien pour reconnaître la véritable Eglise,
lescens, Romœ vidisse diceret, referre t que stbi solitum^ pour confondre toutes les sectes, et surlauature
nunquam Cyprianurn absque Tertulliani lectione unum déchue, sur la Trinité, sur l'anthropologie et la psy-
diem prœteriisse, ac sibi oebro dicere : Da niagis- chologie chrétiennes, sur les sacrements, sur l'Eglise.
trum, Teriullianum sciiicet significans. Hieron., in {L'éditeur.)
Catalog., cap. 53. Legimus omnem Scripturam œdificationi habilem
*
s Tertullianus, vir scripforum nobilissimus. Ruff. divinitus inspirari. TertuU., lib. I de Cuit, fœm.,
et Enseb., Hist. Ecoles , Jib. II, cap. 24. cap. 3. Evolverem prophetias, si Dominus ipse tacuis-
* Sed et Tertulliani quoque eadem ratio est. Nam set, nisiquod et prophetice vox erant Vominu Idem,
sicut ille {Origenes) apud Grcecos, Ha hicapud Latiiios lib. de Hesurrect. carn., cap. 22. Nos quidem certi
nostrorum omnium facile princeps judicandus est. Quid Christum semper in Prophetis locutum, spiritum sciii-
enim hoc viro doctius, quid in divinis atque humanis cet Creatoris. Idem, lib. adv. Marcion., cap. 6. Vere-
rébus exercilatius ? Nempe omnem philosophiam et butur nimirum taidœ constantiœ vir [Puulus) ne di-
cunctas Philosophorum sectus, auctores assertoresque cam Spiritus Sanctus, prœsertim ad filios scribens,
sectarum, onwesqne eorum disciplinas, omnem histo- quos in Evangelio generaverat. Ibid., lib. V, cap. 7.
riarum ac studiorum leritafem mira quadam mentis ^
Cœteri vates, etsi Moyst posthumant ; extremissi
capacitate complexus est... sciunt hoc Marciones, Apel- tamen eorum non retrosiores deprehenduntur primori-
les, Praxeœ, Hermogenes, Judœi, Gentiks, Griostici, bus vestris sapientibus, et legiferis et historicis. Idem,
cceterique quorum ille blasphemias mulfis ac magnis Apolog., cap. 19.
[1I1« SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 69
originaux pour corriger ' ce qui se trouve de rétablit. Quant [à ceux du Nouveau, il ne re-
défectueux dans les versions de l'Écriture. connaît que quatre Evangiles ^, savoir ceux
C'est à Moïse ^ qu'il attribue le Pentateuque; de saint Matthieu, de saint Marc, de saint
à Jérémie ',1e livre qui porte le nom de Ba- Luc et de saint Jean. Mais il remarque que l'on
rucli; à Daniel *, le Cantique des trois jeunes avait coutume d'attribuer à saint Pierre celui
hommes dans la fournaise; les Proverbes et la de saint Marc , et à saint Paul celui de saint
Sagesse à Salomon. Quant a-.i livre de l'Ec-
* Luc. 11 cite '" sous le nom de saint Barnabe ce
clésiastique, il ne marque point qui en est que nous lisons dans l'Epître aux Hébreux,
l'auteur, mais il le cite ® comme il a coutume et l'Apocalypse sous celui "de saint Jean
'*
de citer les livres de l'Ecriture sainte. Il en l'apôtre, auquel il attribue aussi les deux
use de même à l'égard du livre IV ' d'Es- Epîtres qui portent son nom. Tant qu'il fut
dras, des Macliabées, de Judith et de Job, sans catholique,il parla avec honneur du livre*' du
témoigner qu'il eût aucun doute sur leur cano- Pasteur ; mais quand il fut séparé de l'Eglise,
nicité.ll dit que tous les livres de l'Ancien Tes- voyant que ce livre appelle à la pénitence les
tament ayant souffert beaucoup d'altérations chrétiens fornicateurs, aussi bien que les au-
dans les temps de désolation, Esdras les ^ tres, ce qui était contraire à la rigueur des
' Sciamus plane non sic esse in grœco authentico, auctoritas Ecclesiarum apostolicarum cœteris quoque
quomodo in usum exiit, per duarum sijllabarum aut patrocinabitur Evangeliis, quœ proinde per illas et
cal/idani , aut simplicem eversionem. Il s'agit en cet secundum illas liabemus ; Joannis dico efMatthœi, li-
endroit de ces paroles de saint Paul Si dormierit : cel et Marcus quod edidit, Petri adfirmetui; cujus in-
vir ejus^etc, £av y.o'.[xrfir\^ au lieu desquelles il li- terpres Marcus Nam
Lucœ digestum Paulo adscri-
et
multo qui decwsus generis humuni ab exordio mundi Marcion., cap. 14.
quoqur per singulas nativitates, nominatirn tempora- 12Joannes vero in Apocalypsi, idolothyta edentes,...
timque digessit satis probans divinitate m operis ex
, jubet castigare... at in Epistola secunda eos maxime
divinntione vocis. Idem, lib. de Anim., cap. 28. antichristos vocal, qui Christum negarent in carne ve-
^ Meminerant enim [très pueri) Hieremiœ scriben- nisse. Idem, lib. de Prœscript.^ cap. 3. Apostolus Jo-
tis ad eos, quibus illa captivitas imminebat : uet nunc annes Epistola secunda antichristos pronuntiavit ne-
videbiiis deos Babyloniorum,» eic.BaLT\ich,ca.p. 6. Idem, gantes Christum in carne venisse. Idem., lib. III adu.
Scorp., cap. 8. Marcion., cap. 8. Sic et Joannes : nNo7idum,ait, mani-
* Cui (Deo) ctiam inanimalia m. Idem,
et incorporalia laudes festctum est quid futuri simus.iA Joau. lib,
canunt apud Danielem. Idem , lib. adv. Hermog. de Resurrect. carn., cap. 23. Juxta est igitur ut exci-
cap. 44. disse sibi dicamus Joannem in primore quidem Epis-
s Nostra institutio de porticu Salomonis est, qui et tola negantem nos sine delicto esse. Idem^ lib. de Pu-
ipse tradiderat Dominum in simplicitate cordis esse dicit., cap. 19.
quœrendum. Sap. 1. Idem, lib. de Prœscript., cap. 7. 13 Si scripiura PastoriSj^^wœ sola mœchos amat, di-
î^am et in Proierbiis Salomonis quœ parœmias dici- vine instrumento meruisset incidi,si non ab omni con-
mus, etc. Idem, lib. de Pudicit., cap. 17. cilie Ecclesiarum etiam vestrarwn. inter apocryphaet
^ Itaque cum utrumque ex prœceptis ejus didiceri- falsajudicai^etur, etc. Idem, lib. de Pudic, cap. 10.
mus, quid etquid nolit, sicut script um est :Ecce
velit, Et utique receptior apud Ecclesias Epistola Barriabœ
posui ante te bonum et malum : gustasti etiam de ar- illo apocryphe Paslore. mœchorum. Ibid.,cap. 20. C'est
bore agnitionis. (Eccles. xv). TcrtuU., lib. de Exhort. ce que TerlulUen a écrit, élant montaniste ; et voici
cnstit,, cap. 2. ce qu'il pensait de ce livre avant qu'il se fût séparé
^
Scd vobis dico, inquit, qui auditis, ostendens hoc de l'Eglise Quod assignata oratione, dit-il, assidendi
:
olim mandatum a Creatore, loquere in awes aicdien- mes est quibusdam, non perspicie rationem, nisi Her-
tium. Ces paroles sont tirées du livre IV d' Esdras, mas ille, cujus scriptura fere Pastor inscribitur, tran-
chap. 15. Idem, lib. IV adv. Marcion., cap. 16. sacta oratione non super lectum assedisset,verum aliud
8 Hierosolymis et Babylonia expugnatione deletis, quid fecisset, id quoque ad observationem vindicnremus;
omne instrumentum judaicœ litteraturœ per Esdram utique non. Simpliciter enim et nunc positum est :i( cum
constat restauratum. Idem, lib. de Cuit. /œm.,cap. 2. adorassem et assedissem super lectum.» ad erdinem nar-
9 Denique nobis fidem ex Apostolis Joannes et Mat- rationis,nen ad instar disciplinœ.làem, \ih, de Oraf.,
thœus insinuant, ex Apostolicis Lucas et Marcus ins- cap. 12.
taurant. Idem, lib. IV adv. Marcion., cap. 2. Eadem
70 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
montanistes, n'en parla plus qu'avec beau-
il Ou ne doit pas dire qu'iJ yait deux dieux ui deux
coup de m(''pris. Quoi(|u'ii reconnaisse que seigneurs: non que le Père ne soit Dieu, et le
le livre • d'Enuch n'était point dans le canon Fils Dieu, et le Saint-Esprit Dieu; mais parce que
des de sou temps, plusieurs fis-
Juifs, et (pie, le Filsn'est nommé Dieu que par l'union avec le
sent difliculté de le recevoir,il ne laisse pas Père: si l'on doit nommer ensemble le Père et le
d'en soutenir l'autorité, s'appuyant sur l'en- Fils, on appellera
Père Dieu et le Fils notre
le
droit qui en est cite dans l'Epitre de saint Seigneur Jésus-Christ,pour ne pas scandaliser
Jude. Il quelquefois l'Écriture d'une ma-
cite les Gentils;» mais, ajoute-t-il, quand je nom-
nière * différente de nos exemplaires, d'au- merai Jésus-Christ seul, je pourrai le nom-
tres fois il attribue à un prophète
ce que nous mer Dieu ". » Pour marquer la croyance de
ne voyons point qu'il ait dit ' en effet. l'Eglise sur la Trinité, il relève la cérémonie
Sur la tri-
DÎttSies per- 3. Tertullien prouve en plus d'un endroit mystérieuse qui s'observait alors dans le bap-
sonnes en
Dieu, et la qu'il n'y a qa'un Dieu * en trois personnes, le tême, où l'on plongeait non une seule fois,
dirJDité du
Verbe. Père, le Fils et le Saint-Esprit
, qu'il désigne mais pour chaque nom des personnes
trois,
sous le nom de Trinité.
Ces trois personnes « divines. « Car, quoiqu'à cause de l'étroite
sont inséparables l'une de l'autre; et si quel- union qui est entre le Père et le Fils, entre le
quefois on dit {[uc le Père est autre que le. Fils et le Saint-Esprit, le Père, le Fils et le
Fils et le Saint-Esprit, onle dit par nécessité, Saint-Esprit soient un en substance, ils sont
non pour marquer diversité, mais ordre; non néanmoins en personnes. Les noms de
trois
division, mais distinction: il est autre en per- Dieu , de Tout-Puissant, de Très-Haut et au-
soime, non en substance. Le Père est toute tres semblables que l'Écriture donne au Père,
la substance, le Fils en est un écoulement. conviennent « aussi au Fils.» Il nomme 'Pa-
dite haheret, illud quoque assertionem scriplurœ illius lui donne le nom de Joam.
tuerelur. Proinde potuit abolefuctam eam violentia ca- * Ita l'.onnexus Patris in Filio, et Filii in Paracleto,
tacbjsmi, in spirifu rursus reformare, quemadmodum très efficit cohœrentes
alterum ex altero, qui très wium
et Hierosohjmis Bubijlonica expugnatione delctis, omne sunt,non unus, quemadmodum dictum est: aEgo et Pater
instrumentum judaicœ litteraturœ per Esdram constat unum sumus,md substantiœ unitatem, non ad numeri
restauratum. Sed cum Enoch eadem scriptura de Do- singularitatem.... et novissime mandat Apostolis ut
mino eliam prœdicnrit, a nobii quidem nihil omnino tinguerent in Pat rem, et Filium et Spiritum Sanctum,
rejiciendum est quod pertineat ad nos. Et legimus om- non in unum. Nam nec semel, sed ter ad singula no-
nem Scripturam cedificationi habilem divinitus inspi- mina in personas singulas tinguimur. Tertull., lib.
rari. A Judœis potest jam videri propterea rejecta, adv. Prax., cap. 26.
quœ Christum sonant.... eo accedit
sicut et ccetera fere * Voyez not. 6, tom. II, pag. 60.
quod Enoch apud Judam apostolum testimonium pos- 6 Nomina Patris Deus omnipotens, altissimus, Do-
sidet. Idem, lib. I de Cuit, fœmin., cap. 3. minus Virtutum, Uex Jsraelis, qui est quatenus ita ,
' « Usque ad Christum ducem hebdomadas septem, et Scripturœ docent, hœc dicimus et inFilium competisse,
dimidiam, et Lxxu, et dimidiam, et convertet, neic. et in his Filium venisse, et in his semper egisse, et
sic
Daniel, ix. Idem, lib. adv. Judœos., cap. 8. Agenuno ea inse liominibus munifestasse.vOmnia,inquit, Patris,
si legisti pênes prophetam in Psalmis, « Deus regnavit mea sunt,» cur non et nomina? Cum ergo legis Deum
a ligno. (Psal. xcv.) Ces mots, aligno, ne se trouvent omnipotentem , et altissimum, et Deum Virtutum, et
que dans la version des Septante. Ibid., cap. 10. Sic Hegem vide ne per hœc etiam Fi-
Israelis, et qui est ;
dicit Dominus Deus Christo meo Domino, cujus tenui
lius demonstretur suo jure omnipotens, qua so-mo Dei
dexteram.nUai. xlv. Ibid., cap. 7. Dans laVulgate on omnipotentis quaque omnium accepit potestatem ; al-
lit ; Hœc dicit Dominus Christo meo Cyro, cujus
appre- tissimus,qua dextera Dei exaltatus, sicut Pefrus inAc-
hendi dexteram. tisconcionatur ;« Dominus Virtutum,quia omnia sub-
' Legimus apud Ezechielem de vacca illa quœ pepe- jecta sunt illi a Pâtre: Rex Jsraelis, quia illi proprie
rit et nonpeperit. Idem,lib. de Came Christi, cap. 28. excidit sors ge/itis istius;» item qui cst,quoniam mulii
Oo ne trouve rien de semblable daua Ezéchiel. Est dicuntur filii, qui non jun^.»— 'Lib. advers,Prax.,fi&\iA,
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 71
rôle le Fils, et ajoute que cette parole est l'esprit faisait des miracles, la chair souffrait.
uûe personne que le
'
;
Fils est le second après Ce n'est pas Père qui a souffert, puisque
le
le Père; qu'il a toujours été dans le Père et a le Fils se plaint sur la croix que son Père
été produit de lui sans en être séparé ;
qu'il l'a® abandonné. Si c'était le Père, à quel Dieu
en a été produit comme la plante de sa racine, s'adresserait-il? Il est parlé presque dans tous
le fleuve de sa source, le rayon du soleil les ' psaumes de Jésus-Christ, qui y est re-
Quoiqu 'avant la création Dieu fût seul, jjarce présenté comme parlant à son Père. C'est le
qu'il n'y avait rien hors de lui, en lui néan- Fils de Dieu qui se montrait ^ aux patriarches,
moins était sa * sagesse, sa raison et sa parole et non le Père; c'est à l'image du ^ Christ fu-
intérieure, qui se proiluisit ensuite au dehors tur que l'homme a TertuUien met
été créé. »
et devint sa parole extérieure. C'est en faisant la naissance de Jésus-Christ en la quarante-
allusion à cette génération ou prolation ex- unièrae^'année de l'empire d'Auguste, sa pré-
térieure du Verbe, par laquelle Dieu dit que dication en la douzième" de Tibère, sa mort
la lumière soit faite, que Tertullien dit, dans en laquinzièm.e *^ du règne du même prince,
son livre contre Hermogene, que le Fils n'a environ la trentième de Jésus-Christ, la hui-
pas toujours ' été; ce qu'il dit sans préjudice tième des calendes d'avril, le premier jour
de l'éternité du Verbe * intérieur, qui est la des azymes, auquel on devait manger la pâ-
sagesse. que, sous le consulat de Rubelhus Geminus
Sur les 4. Il s'explique sur le mystère de l'incarna- et de Fusius Geminus. C'est sur cet endroit
deux natu- tr it i
re5 en Je- tiou du Verbe, en disant «guil
^ y
J a en Jesus-
qu'il faut corriger ce que Tertullien dit ail-
sus- Christ. -, , ,
Sur l'année Christ dcux substanccs ^ non confuses, mais '
leurs, que Jésus-Christ est descendu du ciel
de sa nais-
'rédlcalioï J0"^^6s en une personne, le Dieu et l'homme, en la. quinzième " année de Tibère. suriana-
'* «""^edecieu.
mort'*
^* Chaque substance a conservé ses propriétés: 5. Il parle de la substance depieu et des»»
i Ibid., cap. 13. —2 Ibid., cap. 5. lius, qui et semper videbatur ; Deum enim Patrem
Quia et Paiei' Deus est, etjudex Deus est ; nonideo
^ nemo vidit unquam, et vixit. Idem, lib. adv. Judœos,
tamen Pater et judex semper^ quia Deus semper ; nam cap. 9.
nec Pater potuit esse ante Filium, nec judex ante de- 8 Igttur si homo est imago Creatoris, ille enim Chris-
lictum. Fuit autem tempiis, cum et Filius et delictum tum sermonem suum intuens hominem futurum ; fa-
non fuit. Quod jwlicem, et qui Patrem Deum faeeret. ciamus, inquit, hominem ad imaginent et similitudi-
Idem, ILb. adv. Hermog., cap. 3. nem nostram ; quomodo possum alterum habere caput ?
* Possum non temere prœstruxisse et tune Deum ante Idem, lib. V adv. Marcion., cap. 8.
universitatis constitutionem solum non fuisse habentem 10Omnes anni Imperii Augusti , fuerunt anni LVI ; vi-
in semetipso proinde rationem, et in ratione sermonem, demus autem quoniam quadragesimo et primo anno
quem secundum a se ipso faeeret. Tertull., lib. adv- Imperii Augusti que post mortem Cleopatrœ impe-
,
Prax., cap. 5. Ante omnia Deus erat solus, ipse sihi ravit, nascitur Christus. Tertull., lib. adv. Judœos,
et mundus, et locus, et omnia. Solus autem quia nihil cap. 8.
aliud extnnsecus prœter illum. Cceterum ne tune qui- ** At nunc quale Dominus a xii Tiberii Cœ-
est ut
dem solus ; habebat enim secum quam habebat in se- ad decimum quin-
saris revelatus sit, substantia vero
metipso, rationem suam scilicet. Ibid. Hœc est nativi- tum jam Severi Imperatoris, nulla omnino comperta
tas perfecta sermonis, ex Deo procedit, conditusdum sit. Idem, lib. I adv. Marcion., cap. 15.
ri^âû/ii"^'
anges, comme s'il l'avait crue corporelle ou les anges bons ou mauvais '. Il dit que ceux-
matt'^rielle. Mais, en examinant ses paroles,on ci ont Hé condamnés pour avoir révélé aux
voit que, par leterme de corps ou de matière, lommes qu'ils aimaient, les * secrets qui leur
il ne voulait dire autre chose sinon que Dieu avaient été confiés.
est une cbo-e vraiment subsistante, et que 6. Tertullien enseigne que Tàme est ^ immor- Sur l'im-
mortalilé de
les anges en sont une aussi ; car, 1° il pose de sa nature :(jue, de même que tous les i'*'"?
telle Sur
,,.
'6 libre ar-
pour principe que le propre de la substance bommes ont*" naturellement la connaissance ^'"«
de Dieu est d'être espi-it ; ce qu'il dit égale-
*
d'uuDieUjplusieurs connaissent que leur âme"
mentdu Verbe,qu'ildit être Dieu de Dieu,es-
* est itnmortelle, qu'elle se connaît elle-même '*;
quo Angeli consiiterunt. Idem, lib. adv. Marcion. cumscripta, licet libidinibus ac concupiscentiis evigo-
cap. 8. rata, licet falsis deis exancillafa, cum tamen resipis-
1 Deum
ediximus, propriam substanfiam spiritum cit,ut ex crapula, ut exsomno,utex aliqua valetudine
inscrihimus , nam et Deus spiritus. Idem, Apolog., et sanitatem suam potitur, Deum nominal, hoc solo no-
cap. 21. mine quia prnprio Dei veri. Deus mognus, Deus bonus
2 De Spirifu Spiritus, et de Deo Deus. Ibid. et quod Deus dederit, omnium vox est ; judicem quo-
5 Mundi hujus moles a Deo creata fuit, cum omni que contestafur illum. Deus videt, et, Deo commendo,
instrumento elementorum, corporum, spirituum. Ibid., et Deus mihi reddet. testimonium animœ natura-
cap. 17. liter Christianœ ! Denique pronunfians hœc, non ad
* enim corpus sui gencris. Lib. adv, Prax.,
Spiritus capitolium, sed ad cœlum respicit. Novit enim sedem
cap. 7 proxime citât. Dei vivi ab illo, et inde descendit. Idem, Apolog.,
^ Omne quod est, corpus est suigeneris, nihil est in- cap. 17. Animœ a primordio conscientia Dei dos est.
corporale, nisi quodnon est. Idem, Ub. de Carne Christ., Lib. I adv. Marcion., cap. 10.
cap. 11. 11 Quœdam enim et natura nota sunt , ut immorta-
' Angeli et dœmones substantia pessimi spiritus. lilas animœ pênes plures, ut Deus noster pênes omnes.
Idem, Apolog., cap. 29. Constat Angelos carnem non Lib. de Resurrect. carn., cap. 3.
propriam gestasse, ufpote naiwai substantia; spiritua- 1^ Hoc quidem in omni anima recognoscere est, noti-
lis ; et si corporis alicuj'us, sui tamen generis. Idem, tiam sui dico. Lib. de Carn. Christ., cap. 12.
11b. de Carne Christi, cap. 6. 13 Cur enim non putes animam puniri et foveri in
' Bergier, Dict. de Théologie, excuse Tertullien sur inferis intérim sub exspectatione uiriusque judicii?...
ce point, comme le fait D. Ceillier, et assurément, novit et apud inferos anima, etdolere, et gaudere sine
malgré l'autorité de Huet, ces critiques ont raison. carne.... salva resurrectionis plenitudine per carnem
{L'éditeur.) quoque. Lib. de Anim., cap. 58. Affirmamus, o anima,
8 Unum propono Angelos esse illos désert ores Dei, te manere post vitœ dispunctionem, et exspectare diem
amatores fœnnnarum, prodi tores etiam hujus curiosi- judicii, promue meritis, aut cruciatui destinari, aut re-
tatis, propterea quoque damnatos a Deo. Idem, lib. I frigerio, utroque sempitemo. Quibus sustinendis neces-
de Cuit, fœm., cap. 2 et 4, sario tibi substantiam pristinam, ejus denique hominis
' Singularis alioquin et simplex, et de suo tota est materiam, et memoriam reversuram, quod et nihil
anima, non magis instructilis aliunde quam divisibi- boni aut malt sentire possis sine carnis passionalis fa-
lis ex se, quia nec dissolubtlis. Si enim sructilts et cultate, et nulla sit ratio judicii, sine ipsius exhibitione
dissolubilis.jam non erit immortalis. liaque quia non qui meruit judicii passionem. Idem, lib. de Testim.
mortalis, neque dissolubilis, neque divisibilis. Nam di- anim., cap. 4.
vidi, dissoloi est, et dissolvi, mori est. Tertull., lib. 1* In summa cum carcerem illum quem Evangelium
de Anim., cap. 14. Adeo hic et anima immortalis na- demonstrat, inferos intelligamus, et novissimum qua-
tura recognoscitur,quœ nonj)Ossit occidi ub hominibus, drantem, modicum quodque delictum, mora resurrec-
et carnis esse mortalitalem, cujus sit occisio. Idem, lib. tionis illic luendum interpretemur •
nemo dubitabit
de R?surrect. carnis, cap. 35. animam aliquid pensare apud inferos. Idem, liû. de
** Hœc est summn delicti, nolentium recognoscere Anim., cap. 54.
quem tgnorare non possunt. Vultis ex operibus ipsius 15 Porro si quœris unde veniat ea voluntas qua quid
tôt ac talibus quibus continemur, quibus sustinemur, volumus adversus Dei voluntatem dicam , ex nobis ;
quibus oblectamur, etiam quibus extevremur ? Vultis ipsis, nec temere ; semini enim tuo respondeas necesse
ex animœ ipsius testimonio comprobemus ? quœ licet e;t: si quidem illeprinceps, et generis et delicti Adam,
carcere corporis pressa, licet institutionibus pravis cir- voluit quod deliquit.,,, proinde et tu si non obaudie-
[iii<= SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 73
était au pouvoir d'Adam de ne point pécher. nement de Jésus-Christ, le Saint-Esprit n'est
Sur la né-
cessité (le la
7. Il reconnaît que, pour faire le bien, nous plus dans la ^ Synagogue; qu'en fait de reli-
risDeo,qui te proposito prœcepto liberœ potestatis ins- torum in ultimis suscitatus compescat sœculum, et
titua,per voluntatis libertalem volens divergas in id tran'juillitaiem suis reddat. Ibid., cap. 12.
quod Deus non vult. Lib. de Exhort. castit., cap. 2. * Et eo magis morluus es (loquitur ad Marcionem),
Ecce posai ante te bonum et mulum, elige quod bonuin quo magis non es christianus ;
qui cum fuisses exci-
est, si non potes, quia non ( posie enim te, si velis, disti, rescindendo quod rétro credidisti. Lib. de Carne
ostendit qui tuo arbitrio vtrumque proposuit) discedas ,
Christi, cap. 2. Te quidem plane non amasti, cum ab
oportet ab eo cuj'us non facis voluntatem. Lib. de Mo- Eccleiia et flde Christi recessisli. Ibid., cap. 4.
nog., cap. 14. * Me, inquit, dereliquerunt fontem aqaœ vivœ, et
fo-
1 Bonorum quorumdam, sicuti et malorum intolera- derunt sibi lucus coniritos, qui 7ion poterunt aquam
bilis magnitudo est, ut ad capienda et prœstanda ea, continere. Indabitale non recipiendo Christunt, fontem
sola fjratia divinœ inspirationis operetur. Nam quod aguœ vivœ lacus contritos, cœperunt habere, id est
maxime bonum, id maxime pênes Deum ; nec alius id, Sgnagogas in dispersiones gentium, in quibus jam
quam qui possidet dispensât ut cuique dignatur. Lib. Spiritus Sanctus non immoratur, ut in prœteritum in
de Patient., cap. 1. templo commorabatur ante adventum Christi, qui est
2 Hœc divinœ gratiœ,potentior utique natura,
erit vis verum Dei tjmplum. Lib. adv. Jud., cap. 13.
habens in nobis subjacentem sibi liberi arbitrii potes- " Humam juris et naturalis potestatis est, unicuique
tatem, quod aûcî^ouTatov dicitur, quœ cum sit et ipsa quod putaverit colère : nec alii obest aut prodest alte-
naturalis atque mutabilis, quoquo vertitur, naturacon- rius religio. Sed nec religionis est cogère religionem,
vertitur. Lib. de Anim., cap. 11. quœ sponte suscipi debeat, non vi, cum et hcstiœ ab
3 Elle surmonte la résistance par la puissance de animo libenti.expostulentur.Lïb. ad Scapul., cap. 2.
ses attraits, qui déterminent notre volonté, mais sans 11 Si autem et baptizantur quidam pro mortuis, vi-
blesser notre liberté. {Uéditeur.) debimus an ratione certe illa prœsumptione hoc eos
;
perpatientiam velut dormiente,donec orntionibus Sanc- turpitudines nostras. Lib. de Bapt,, cap. 20.
74 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
jeûnes, des {çt'^minoxions et par laconfession qu'en leur donnant le baptême aussitôt après
secrète de sos péchés. Le temps destiné un leur naissance, on n'exposât les parrains à
baptême solennel est celui do la cinquan- promettre dans h', baptême ce que le baptisé
taine •
de Pâques; mais on le donnait en tout ne voudiait peut-être point exécuter dans la
temps lorsqu'il y avait nécessité . C'était à suite. Sur ce point on peut l'excuser, si on l'en-
l'évêque à * administrer le baptême; les prê- tend des enfants des païens ou des autres dont
tres, néanmoins, et les diacres avaient pouvoir l'éducation était en péril. Il veut encore que
de le conférer, avec la permission de l'évêque; l'on difïère le baptême des adultes qui ne sont
les laïques mêmes le pouvaient dans le cas de point mariés jusqu'à ce qu'ils se marient ou
,
nécessité. On plongeait trois fois dans l'eau qu'ils soient fortifiés dans la continence. Ter-
celui que l'on baptisait, et^à chaque fois que tulhen parle ' de l'ange qui préside au bap-
l'on nommait une des personnes de la sainte tême. Il dit *que les Apôtres, avant le jour
Trinité, pour marquer la croyance de l'Eglise de la Pentecôte, donnaient le baptême de saint
sur ce mystère. Cela se pratiquait tant pour Jean, pour préparer â la grâce; qu'il n'y a
les enfants que pour les personnes plus avan- point de différence '
d'être baptisé dans la
cées en âge. 11 parait cependant que Tertul- mer, dans un étang, une rivière, une fontaine,
lien qu'on baptisât les
n'était point d'avis une mare, un bassin; que Dieu peut accorder
premiers * avant l'usage de raison, lorsqu'il la grâce du baptême *â la foi de celui qui en
n'y avait aucun danger de mort, dans la crainte a le désir; qu'on obtient ^ encore cette grâce
* Diem baptismo solemniorem Pascha prœstat ; cum terrena non creditur, divina credatur ; norint petere
et pussio Domini in quam tinyuimuradimpleta est salut em, ut petenli dédisse videaris. Non minore de
exindc Pentecoste ordinandis lavacris lalissimum spa- causa innupti quoque procrastinandi, in quibus tenta-
tium est.... cœterum omnis dies Domini est, omnis tio pirœparata est, tam virginibus per maturitatem,
hora, omne tempus habile baptismo : si de solemnitate quam viduis per vacationem, donec aut nubant, aut
interest, de rjiatia nihil refert. Ibid., cap. 19. continentiu corroborentur. Si qui pondus intelligant
Dandi quidem hahet jus summus sacerdos, qui est
* baptismi, magis timebunt consecutionem quam dilatio-
Episcopus dehinc presbyteri et diaconi , non tamen
,
nem : fides intégra secura est de salute. Lib. de Bapt.,
sine Episcopi auctoritafe, propter Ecclesiœ honorem cap. 18.
quo sulvo salva pax est. A lioquin etiam laicis jus est. * Non quod
aquis Spiritum Sanctum consequamur,
Quod enim ex œquoaccipitur, ex œquo dari potest. Nisi sed aqua emendati, sub angelo Spjiritui Sancto
in
Episcopi jam, aut Pi-esbyteri, aut Diaconi vocantur prœparamur : quemadmodum enim Joannes viam Do-
dicentes : Domini sermo non débet abscondi ab ullo. mino prœparanit, ita et angélus baptismi arbitcr, su-
Proinde et baptismus œque Dei census, ab omnibus perventuro Spiritui Sancto vias dirigit ablutione de-
exerceri potest. Sed quanto magis laicis disciplina ve- lictorum quam fides impetrat obsignata in Pâtre, et
recundiœ et modestiœ incumbit; cum ea majoribus com- Filio, et Spii'itu Sancto. Ibid., cap. 6.
petant, ne sibi adsumunt dicatum Episcopis officium * Itaque tinguebant discipuli ejus ut ministri, ut
episcopatus sufficiat scilicet in necessitatibus uta- Joannes ante prœcursor, eodem baptismo Joannis
ris, sicubi, loci, aut temporis, aut personœ condi-
aut quia nec mors nostra dissolvi possel, nisi Domini pas-
tio compeilit. Tune enim consiantia succurrentis exci- sione, necvita restitui sine resurrectione ipsius. ibid.,
pitur, cum urget circumstantia pjericlitantis. Quoniam cap. 11.
^
reus erit perditi hominis,si supersederit prœstare quod Ideo nulla distinctio est, mari quis an stagna,
libère potuit. Lib. de Bapt., cap. 17. flumine an fonte, lacu an alveo diluatur. Nec quic-
* Lex tinguendi imposita est et forma prœscripta. quam refert inter eos quos Joannes in Jordane, et
Jte, inquit, docete omnes gentes, tinguentes cas in no- quos Petrus in Tiberi tinxit ; nisi et ille spado quem
men Patris, et Filii, et Spit'itus Sancti ; huic legi col- Philippus inter vias fortuita aqua tinxit, plus salutis
lata definitio illa :«Nisi quis renatus fuerit,» etc., obs- aut minus retulit .Igitur omnes aquœde pristinaoriginis
trinxit fidem ad baptismi necessitatem. Ihid., cap. 13. prœrogativa , sacramentum sanctificatio?iis consequun-
Et novissime mandat Apostolis uttingverintinPatrem tur, invocato Deo : supervenit enim statim Spirilus
et Filium, et Spiritum Sunctum, non in unam : nam de cœlis , et aquis superest, sanctificans cas de semet-
nec semel, sed ter, ad singula nomina in personas ipso, et ita sanctificatœ, vim sanctificandi combibunt.
singulas tinguimur. Lib. adv. Prax., cap. 26. Ibid., cap. 4.
* Itaque pro cujusque p>ersonœ conditione ac dispo- ' Nunc quoquo modo fuerunt Aposto/i,
sive tincti
sitione, etiam atate, cunctatio baptismi utilior est, sive inloti perseveraverunt de salute tamen eorum
prœcipue tamen circa parvulos ; quid enim necesse est salis temerarium est œstimare, quia non illis vel primœ
spoTisores etiam periculo ingeri ? quia et ipsi per mor- adlectionis, et exinde inOividuœ familiaritatis prœro-
ialitatem destituere promissiones suas passant, et pro- galiva,compendium baptismi conferre possei, cum illi,
ventu malœ indolis J'alli. Ait quidem Dominus ;« Nolile opinor, sequebantur illum, qui credenti cuiquc salutem
illos profiibere ad ine ve7iire.n Veniant ergo dum ado- jwllicebatur ;<( fides tua te, aiebat, salvum fecit, et re-
lescunt ; ventant dum discunt, dum quo veniant do- mittuntur tibi peccata tua; ncredenH utique,nec tamen
centur ; fiant christiani cum Cfir-istum nosse potuerint. tincto. Ibid., cap. 12.
Quid festinat innocens œtas et remissionem peccato- 8 Est quidem nobis etiam et secundum lavacrum,
rum ? Cautius ageiur et sœcularibus, ut eut substantia unum et ipsum, sanguinis scilicet... hic est baptismus
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. TS9
par le martyre. Le péché originel *, avec le- afin que l'âme soit engraissée de Dieu même.»
quel nous naissons tous^ nous rend le bap- 10. Ces dernières parolesne laissent aucun chlrfstie^""
tême indispensable; et nous sommes toujours lieu de douter que Tertullien n'ait reconnu
impurs et coupables aux yeux de Dieu, tant la présence réelle dans l'Eucharistie. 11 l'en-
que nous n'avons point été régénérés dans seigne encore dans un autre endroit où il dit ^
l'eau. La * circoncision ne produisait pas le que Jésus-Christ, ayant pris du pain, le chan-
même effet; elle ne servait aux Israélites que gea en son corps, en disant « Ceci est mon :
pour les distinguer des autres peuples, corps. » Il est vrai qu'il ajoute que le pain qu'il
flrmatîo'i'"^'
^' ^^ sortlr dc l'cau, le nouveau baptisé venait de changer en son corps en était la
reçoit ' l'onction d'où lui vient le nom de figure. Mais il faut remarquer que Tertullien
chrétien. Ensuite on lui impose les mains, ne parle ainsi que dans les livres contre *
avec la bénédiction et l'invocation du Saint- Marcion, où il avait à prouver que les ouvra-
Esprit. Tertullien ne pouvait marquer plus ges du Créateur sont bons. A cet effet, il ap-
clairement sacrement de Confirmation ; et
le porte le pain pour exemple , et dit que Mar-
une preuve qu'il distingue ce sacrement de cion ne pouvait le regarder comme mauvais,
celui du Baptême, c'est qu'il leur attribue des puisque Jésus-Christ, qu'il reconnaissait pour
effets distincts au Baptême, la rémission des
: Messie, l'avait changé en son propre corps,
péchés; à l'onction et à l'imposition des mains dont le pain offert par Melchisedech était la
qui suivent le baptême, le don du Saint-Esprit. figure, de même que celui dont ' parle Jéré-
Il distingue encore ailleurs ces deux sacre- mie en ces termes « Pour moi, j'étais comme
:
à l'ombre par l'imposition des mains, afin exterminons-le de la terre des vivants et ,
que l'âme soit éclairée par l'esprit. La chair que son nom soit effacé de la mémoire des
mange le corps et le sang de Jésus-Clirist, hommes. » Tertullien se sert du terme de ®
qui lavacrum et non acceptum reprœsentat, et perdi- Sunctum tune ille sanctissimus spiritus, super
tum Deus secunda
reddit. Ibid., cap. 16. Posuit igitur emundata corpora libens a Pâtre descendit,
et benedicta
solatia, dimicationem martyrii et lavacrum sanymnis super baptismi aquas, tanquam pristinam sedem re-
exinde securum... piroprie enim martyribus nihil jam cognoscens conquiescit. Lib. de Bapt., cap. 7 et 8.
reputari potest, quibus in lavacro tpsa vita deponitur. * Caro abluitur ut anima emaculetur. Caro ungitur
Lib. ScorjD/flc.cap. 6. ut anima consecretur. Caro signatur ut et anima mu-
Alioquin meminerat Apostolus dominicœ definitio-
1 niatur. Caro manus imjiositione adumbratur ut et ,
nis, nisi quisnascelur exaqua et spiritu, non ibit in anima spiritu illuminetur. Caro corpore et sanguine
regnum Dei, id est non ent sanctus. /ta omnis anima Christi vescitur, ut et anima de Deo saginetur. Lib.
60 usque in Adam censetur, donec in Chrisio recenseu- de Resurrect. carn., cap. 8.
tur : tamdiu inimunda, quamdiu recenseatur. Pecca- ^ Professus itaque se concupiscentia concupisse edere
trix autem, quia immunda, recipiens iynominiam ex Pascha ut suum, indignum enim ut quid alienum
carnis societate. Lib. de Anim., cap. 40. Homo dam- concupisceret Deus, acceptum panem et distributum
naiur ad mortem. ob unius arbusculœ delihaiionem, et discipulis, corpus illum suum fecit, « hoc est corpus
exinde proficiunt delicta cum pœnis, et pereunt jam meum dicendo,md est figura corporis niei. Figura au-
omnes, qui paradisi cespitem nullum noverunt. Lib. I tem non fuisset, nisi veritatis esset corpus... Lib. IV
advers. Marcion., cap. 22. Satanam denique in omni adv. Marcion., cap. 40.
aversatione, et aspernatione, et detestatione pronuntias, ^ Proinde panis et calicis sacramento jam in Evan-
quem nos dicimus malitiœ angelum, totius erroris ar- gelio probavimus corpoiis et sanguinis dominici veri-
tificem, totius sœculi interpolatorem, per quem homo tatem adversus phantasma Marcionis. Lib. V adv. Mar-
a primordio circumventus ut prœceptum Dei excideret, cion., cap. 8.
et propterea in mortem datus, exinde totum genus de ''
Hoc lignum et Hieremias tibi insinuât, dicturis
suo semine infectum, suœ etiam damnationis, tradu- prcedicansJudœis,i(veniie,mittamus lignum in panem
cem fecit. Lib. de Testim. anim., cap. 3. ejus. » Vfique in corpus. Sic enim Deus in Evatigelio
^ Dari itaque habebat circumcisio, sed in signum quoque vestro revelavit, panem corpus suum appellans,
unde Israël in novissimo tempore dignosci haberet. Lib. ut et hinc jam intelligas corporis sui figuram pani
adv. Judœos, cap. 3. dédisse, cujus rétro corpus in panem prophètes figu-
3 Exinde egressi de lavacro, perunguimur benedicta ravit, ipso Domino hoc sucramentum postea interpre-
unctione sic et in nobis carnatiter currit unctio, taturo. Lib. III odv. Marcion., cap. 13.
sed spiritaliter proficit : quomodo et ipsius baptismi 8 Quœ oratio cum divortio sancti osculi Integra
carnalis actus, quod in aqua meî'gimur; spiritalls ef- quale sacrificium est a quo sine pace recedifur ? Lib.
fectus, quod delictis liljeramur. Dehinc manus impo- de Orut., cap. 14. Nonne solemnior erit statio tua, si
nitur, per benedictionem advocans et invitans Spiritum et ad uram steteris ? accepta corpore Domini et reser-
76 HIST01Rl£ GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
sacrifice, pour marquer la c(''lél)ration ilu damne, et veut qu'ils se conforment en tout à
mystère de l'Eucliaristie. Les chrétiens s'as- l'usage de l'Eglise; en sorte ({uetous assistent
seniljlaient avant le jour pour le célébrer ;
•
aux prières du sacrifice. Il pcrmefnéanmoins
chacun y recevait le corps de Jésus-Christ à ceux qui s'imposent des jeûnes particuliers
dans la * main, et, après s'en être coinmiinié de différer la communion du corps de Jésus-
dans l'église, ils le portaient dans leurs mai- Christ jusqu'à l'heure de leur repas.
sons pour s'en communier avant ' le repas. H. l'homme n'eût point péché, il ne
Si Sm- la Pé-
nitence.
Les fiiléles se donnaient aussi dans l'église le serait pas 'mort. Jésus-Christ est le seul
baiser de paix *, après la prière publiiiuc, ex- homme qui soit * exempt du péché, parce
cepté les jours de jeûne solennel, comme la qu'il est en même temps Uieu et homme. De là
nuit de Pâques, c'est-à-dire le Vendredi saint, vient la nécessité de la pénitence pour les au-
appelé aussi Pâques y en avait qui s'en
*. Il tres. Elle est nécessaire pour tous^ les péchés
abstenaient aussi lorsqu'ils jeûnaient en par- du corps ou de l'esprit, d'action ou de pensée,
ticulier, et qui s'abstenaient encore des priè- ou de volonté. Mais on n'accordait qu'une
*° publique dont Ter-
res du sacrifice les jours de station, sous pré seule fois la pénitence
texte qu'en recevant le corps de Jésus-Christ tullien marque les cérémonies, dit-il ,
pour
on rompait le jeûne. Mais Tertullien les^con- adoucir les frères en faveur du coupable ",
vato, utrumqup, salvutn est, et participatio sacrificii- abscondere potes, debes meminisse prœcepti ; ita et dis-
et executio officii. Ibid. cipilinœ foris et consuetudini domi satisfacies. Lib. de
1 Eucharistiœ sacramentum et in tempore victus, et Orat., cap. 14.
omnibus mandatum a Domino, etiam antelucanis cceti- ^ Paschœ quo communis et quasi publica
Sic et die
bus, nec de aliorum manu quam prœsidenlium sumi- jejunii retigio est,merito deponimus osculum, nihil
mus. Lib. de Coron., cap. 3. Plinius secunduscumpro- curantes de occultando quod cum omnibus faciamus.
vinciam regeret, damnalis quibusdam Christianis, qui- Ibid.
busdam gradu piilsis, ipsa iamen multitvdine pertur- 6 Similiter et stationum diebus non pu.tant plerique
balus, quid de ca-tero ageret, co7isuluit tune Trajanum sacrificiorum orationibus interveniendum, quod statio
Imperatorem, allegans prœler obstinationem non sacri- sotvenda sit accepto corpore Domini. Ergo devotum
ficandi, mhil aliud se de sacramentis eo>-um compe- Deo obsequium Eucharistia resolvit? an magis Deo
risse, quam cœtus antelucanos ad canendum Deo et obligat ? n,onne solemnior erit statio tua, si et ad aram
Christo, et ad confœderandam disciplinam. Apolog., Dei stetcris ? accepto corpore Domini et reservato
cap. 2. utrumque salvum est, et participatio sacrificii, et exe-
* Tota die ad hanc partem zelus fidei perorabit, in- cutio officii. Ibid.
gemens christianum ab idolis in Ecclesiam veiiire : ' Qui autem primordia hominis novimus, audenter
de adversarii officina in domum Dei : atloUere ad determinamus, mortem non ex natura secutam homi-
Deum Patrem, tnanus matres idolorum : his manibus nem, sed ex culpa, ne ipsa quidem naturali. Facile au-
adorare, quœ foris aduersus Deum adorantv.r eas : tem usurpari naturœ nomen, in ea quœ videntur a na-
manus admovere corpori Domini,quœ dœmonis corpora tivitate ex accidentia adhœsisse. Nam si homo in mor-
conferunt. Nec hoc sufficit. Parum sit, si ab aliis ma- tem directo institutus fuisset, tune demuri 7nors na-
nibus accipiant qiiod contaminant, sed etiam ipsi tra- turœ adscriberetur. Porro non in mortem institutum
dunt aliis quod contaminaverunt. Adleguntur in ordi- eum, probat ipsa /ex, conditionali communicatione sus-
nem ecclesiasticum artifices idolorum. Proh scelus ! pcndens, et arbitrio hominis addicens mortis eventum.
semel Judœi Christo manus intulerunt, isti quotidie Denique si non dcliquisset, nequaquarn obiisset. Lib.
corpus ejus lacessunt. manus jjrœcidendœ ! viderint de Anim., cap. 52.
jam an per similitudinem dictum sit,usile manus tua * iSïc et in pessimis aliquid boni, et in optimis non-
scandalizat, amputa eam.» Quœ magis amputandœ nihil pessimi. Solus enim Deus sine peccato, et solus
quam in quibus Domini corpus scandalizatur ? Lib. homo sine peccato Christus, quia et Deus Christus.
de Idolol., cap. 7. Ibid., cap. 41.
' Hcc delicium quod gentiles nostra no-
est igitur 8 Exinde spiritalia et corporalia nomina?itur peccatu,
verunt 7ion sciet maritus quid secreto anle omnem quod delictum omne aut agitur, aut cogitatur : ui
cibum gustes ? et si sciverit, panem non illum crédit corporale sit quod in facto est ; spiritale vero quod
esse qui dicitur. Lib. II ad Uxor., cap. 5. in animo est per quod ostenditur non facti solum,
* Alia Jam consuetudo invaluit, jejunantes habita verum et voluntatis delicta vitanda, et pœnitientia
oratione cum fratribus subir ahunt osculum pacis, quod jjurgatida esse. Lib. de Pœnit., cap. 3.
est signaculum orationis. Quando autem magis confe- *o Collocavit Dominus in vestibulo pœnitentiam se-
renda cum fratribus pax est, nisi cum oratio commen- cundam quœ pulsantibus patefaciat ; sed jam semel,
dabilior ascendit, ut ipsi de nostra operatione partici- quia jam secundo, sed ampliun nunquam, quia pjro-
pes, jam audeant de sua pace fratri transigere : quœ xime frustra. Ibid., cap. 7.
oratio cum divortio sancti osculi intégra quem Domino fl Et tu quidem pœnitentiam mcechi ad exorandam
officium facientem impedd pax? quale sacrtficium est fraternitatem in ecclesiam inducens, conciliciatum, et
a quo sine pace receditur?.... potes domi, si forte in- concineratum cum dedecore et horrore compositum
ter quos latere jejunium in totum non datur, differre prostcrnis in médium ante viduas, ante presbyteros,
pacem. Ubicumque autem alibi opérât ionem iuam omnium lacinias invadentem, omnium vestigia lam-
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 77
semel dispeda vel recepta necessitafe non aliter inter- prius apud Ecclesiam professée, juxta mœchiam et
pretandi quam materia propositi est, contendunt jam fornicationem judicari periclitantur. Ne inde consertœ
(
psychici seu catholici ) nec competere ethnicis pœni- obtentu matrimonii crimen éludant. Lib. de Pudicit.,
tentiœ denuntiationem, quorum delicta obnoxia ei non cap. 4.
sint, ignorantiœ scilicet imputanda, quam sola nutura 6 Unde sufficiamus ad enarrandam felidtatem ejus
ream Deo faciat. Ibid., cap. 10. matrimonii quod Ecclesia conciliât, et confirmât obla-
^ At tu jam (Tertullien parle aux catholiques con- tio, et obsignat benedictio ; nugeli l'enuntiant ; Pater
tre lesquels il écrivait) et in martyres tuos effundis rato habet ? nam nec in terris filii sine consensu p)a-
hanc potestatem, ut quisque ex consensione vincula in- trum recte et II ad Uxorem, cap. 8.
jure nubunt. Lib.
duit, adhw mollia, in novo custodiœ nomine, statim ^
matrimonium postulons quod ab eis
Qualis es id
ambiunt mœc/ii, statim adeunt fornicatores jam pre- ,
a quibus postulas non licet habcre ab episcopo mo- :
ces circumsonant, jam lacrymœ circumstagnant ma- nogamo, a presbyteris et diaconis ejusdem sacramenti,
culati cujusque, nec ulli magis aditum carceris redi- a viduis quarum sectam in te recusasti ? et illi plane
munt, quam qui Ecclesiam perdiderunt. Violnntur sic dabunt viros et uxores, quomodo buccellas et
viri ac fœminœ in tenebris plane ex usu libidinum conjungent vos in Ecclesia virgine, unius Chris ti unica
notis, et pncem ab his quœrunt qui de sua periclitan- sponsa, et orabis pro mnritis tuis novo et vetere. Lib.
tur suffœiat martyri propria delicta purgasse ; in- de Monog., cap. 10.
grati vel superbi est in alios quoque spargere, quod * Quot sunt qui statim a lavacro carnem suam obsi-
pro magnn fuerit cnnsecutus. Lib. de Pudicit., cap. 22. gnant? quot item qui consensu pari inter se matri-
3 Interrogabat Deus Adamum quasi incertus, ut et monii debitum tollunt, voluntarii spadones pro cupi-
hic liberi arbitrii probans liominem, in causa aut ne- ditate regni cœlestis ? Lib. I ad Uxor., cap. 6.
gationis, aut confessionis daret ei locum sponte con- * Et tu, uxor, adcersus hœc carnis consilia adhibe
fitendi delictum, et hoc nomine relevandi. Sicut de sororum nostrarum exempta quœ nultam forma
Cdin sciscitatur ubinam frater ejus ; ut ille haberet vel œtatis occasionem, prœmissis maritis sanctitati an-
potestatem ex eadem arbitrii potestate, sponte negandi teponunt. Malunt enim Deo nubere, Deo speciosœ, Deo
delicti, et hoc nomine gravandi, atque ita nobis conde- puellœ. Ibid., cap, 4.
rentur exempta confitendorum potius delicforum, quam 10 Quantum a stupris, et ab omni post matrimonium
negandorum, : ut jam tune initiaretur evangelica doc- excessu iantum, et ab incesti casu tuti sumus. Quidam
trina;aex ore tuo justificaberis, et ex are tuo damna- multo securiores totam vim hujus erroris virgine con-
beris. » Lib. II cont. Marcion., cap. 25. netintia depellunt, senes pueri. Apolog., cap. 9.
?8 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
i^rand, surtout pariiii coiix qui étaient em- ployait pas en festins inutiles,mais à nourrir et
ployés ' au ministère ilo l'Eylise. On n'admet- à enterrer les pauvres, à entretenir les enfants
tait point au rawj; dos piètres ou des veuves orphelins, les vieillards, ceux qui avaient fait
ceux cpii avaient été mariés • plusieurs fois; et naufrage, ceux qui travaillaient aux mines,
Tcrtullien assure qu'on en avait' déposé quel- qui étaient relégués dans des îles, ou prison-
ques-uns pour avoir eu plus d'une femme. niers pour la cause de Dieu. Ils se donnaient
1 Quanti et quantœ in ecclesiasticis ordinibus de con- egenis alendis, humandisque, et pueris ac puellisreac
tinentia censentur, qui Deo nuhere maluerunt acci- parentibus deslitutis, jamque domesticis senibus, item
dentes i?i se concupiscentiam libidinis,
totum illud et naufragis. Etsi qui in metallis, etsi qui in insulis, vel
quod intra paradisum non potuit admitti. Lib. de Ex- in custodiis duntaxat ex causa Dei sectœ, alumni
,
hort. cas titatis,' cap. 13. confessioiiis fiunt. Sed ejusmodi vel maxime di-
suœ
* Quantum detrahant fidei,quantum obstrepant lectionis operatio notam nobis inurit pênes quosdam.
sanctitati secundœ nuptiœ, disciplina Eccleaiœ et prœ- Vide, inquiunt, ut invicem se diligunt, et ut pro alte-
scriptio Apostoli déclarât, cum digamosnon sinit prœ- rutro mori sint parati. Sed et quod frairum appella-
sidere, cum viduam adlegi in ordmem nisi univiram tione censentur, non alias opinor infumant quam quod
non concedit, aram eniin Dei mundam proponi oportct. apud ipsos omne sanguinis nomen de affectione simu-
Lib. 1 ad Uxor., cap. 7. latum est itaque qui unimo, animaque miscemur
* Inde apud nos jdenius atque instructius prcescribi- nihil de rei communicatione dubitamus. Omnia indis-
matrimonii oportere qui adleguntur in
tur, unius esse creta sunt apud nos, prœter uxores. In isto solo con-
ordinem sacerdotalem ; nsque adeo quosdam memini sortium solvimus, in quo solo cœteri homines commer-
digamos loco dejectos. Lib. de Ex/iort. cast., cap. 7, cium exercent Quid ergo mirum si tanta charitas
* Corpus sumus de conscientia religionis et disci- convivatur? nam et cœnulas nostras prœterquam sce-
plinas unitate, et spei fœdere.Coimus ad Deum quasi leris infâmes ut prodigus sugillatis De solo tricli-
manu fada ambiamus, hœe vis Deo
precationibus nio Christianorum retractatur cœna nostra de nomine
grata est. Oramus etiam pro imperatoribus, pro mi- rationem sui ostendil id vocutur quod dilectio pênes
nistris eorum ac poiestatibus , pro statu sœculi, pro Grœcos. Quantiscumque sumptibus constet, lucrurn est
rerum quiète, pro mora finis. Coimus ad divinarum pietatis nomine facere sumptum ; siquidem inopes
litterarum commentorationem si quid prœsentium, quosque refrigerio isto juvamus nihil vilitatis, ni-
temporum qualitas, aut prœmonere cogit, uut reco- hil immodestiœ admittit. Non prius discumbitur quam
gnoscere. Certe fidem sanctis vocibus pascimus, spem oratio ad Deum prœgvstetur. Editur quantum esu-
erigimus, fiduciam figimus, disciplinam prœceptorum rientes cupiunt : bibitur quantum pudicis est utile.
nihilominus inculcationibus densamus. Ibidem etiam Ita saturantur, ut qui meminerint etiam per noctem ad
exhortationes, castigationes et censura divina. Nom et orandum Deum sibi esse : ita fabulantur, ut qui sciant
j'udicatur magno cum pondère, ut apud certos- de di- Dominum audire. Post aquam manualem et lumina,
vine conspectu summumque futuri judicii prœjudi-
; ut quisque de Scripturis sanctis, vel de proprio ingénia
cium est, si quis itu deliquerit ut a commun icatione potest ,jjrovocatur in médium Deo canere. Hmc probatur
orationis, et conventus, et omnis sancti commercii re- quomodo biberit. JEque oratio conviviumdirimit. Inde
legetur. Prœsident probati quinque seniores, honorem disceditur non in eruptiones lasciviarum, sed ad earn-
istum non pretio, sed testimonio adepti, neque enim dem curam modestiœ et pudicitiœ, ut qui non tam
pretio ulla res Dei constat. Etiamsi quod arcœ genus cœnam cœnaverint, quam disciplinam. Hœc coitio Chris-
est, non de honoraria summa quasi redemptœ religio- tianorum hoc sumus congregati quod et dispersi.
nis congregatur. Modicam unusquisque stipem menslrua Hoc universi quod et singuli neminem lœdentes, ne-
die, vel cum velit, etsi modo velit, etsi modo possit, minem contristantes. Apolog., cap. 39.
apponit. Nnm nemo compellitur, sed sponte confcrt, ^ Ad elogium gulœ tuœ pertinet quod duplex apud
hœc quasi deposita pietatis sunt. Nam inde non epulis te prœsidentibus honor binis partibus deputatur. Lib.
aut potaculis, nec ingratis voratrinis dispematur, sed de Jejun., cap. 17.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE I. TERTULLIEN. T9
leslouanges de Dieu, qu^il tirait des saintes der le rafraîchissement et la participation à
Écritures ou qu'd composait lui-mèine. On la résurrection première. Lorsqu'un chrétien
voyait par là comment il avait bu. Le repas s'était ejidormi en paix, un prêtre * assistait
finissait aussi par la prière ; ensuite on se sé- à ses funérailles faisant pour lui des priè-
,
marquaient leur front du * signe de la croix. Jésus-Christ: ce jeune durait jusqu'au soir.
Ils commençaient toutes leurs prières par 11 y avait néanmoins d'autres jeîiaes, mais
l'Oraison^ dominicale, et priaient ' tournés à qui n'étaient que de dévotion, savoir,toutes"
Torient, les mains étendues * vers le ciel en les semaines, la quatrième et sixième férié; ce
forme de croix, les yeux baissés et à voix jeûne s'appelait la station ;
quelquefois aussi
basse. Les prièz-es ^ solennelles se faisaient à les évoques en ordonnaient pour le besoin des
tierce , à sexte et à noue. Tous les an.s, on Eglises, et les fidèles s'en imposaient par une
faisait dans l'église des ^ oblations pour les dévotion particulière. Ces jeûnes de dévotion
défunts , et pour les fêtes des martyrs. Les ne duraient que jusqu'à noue. Quelques-uns
fidèles avaient soin aussi de [.rier pour les ajoutaient au jeûne la xéropliagie, c'est-à-
morts pour eux des ofl'randes
et faisaient '
dire, l'usage des viandes sèches, s'abstenant
annuelles, demandant à Dieu de leur accor- nou-seulemeut de la chair et du vin, mais
* Calicis et panis etiam nostri aliquid decuti in ter- in pàce prœmisisti virum tuum ?... Ergo perseveret in
ram anxie pidimur. Ad omnem progressuni atqne pro- ea cum illo necesse est, quem jam repudiare non pote-
motum, ad omnem aditum et exitum, ad vestitum, ad rit, ne sic quidem nuptura si repudiare potuisset.
calciatum, ad lavacra, ad mensas, ad lumina, adcubi- Enimvero et pro anima ejus orat, et refrigerium inté-
lia,adsedilia, qucRcumque nos conversât io exercet, fron- rim adpostulat ei, et in prima resurrectione consor-
tem crucis signaculo terimus. Harum et aliarum ejus- tium, et offert annuis diebus dormitionis ejus. Nam
modi discipb'narum,si legem expostules ,scripturam nul- hœc nisi fecerit, repudiavit quantum in ipsa est. Lib.
lam inventes. Traditio tibi prœtendetur audrix, consue- de Monng., cap. 10.
tudoconfirmatrix,et fides observatrix.Lxh.de Coron. ,c. 3. * Scio fœminam qvamdam vernaculam Ecclesiœ,
2 Quoniani Dominus, prospecter humanarum necessi- forma et œtate intégra functam, post unicum et brève
tatum, jeorsum post traditani orandi disciplinam, {(pe- matrimonium cum in pace dormisset, et morante ad-
tite, inquit, et accipietis; » et sunt quœ petantur pro hue sepultura intérim oratione presbyteri componere-
circu7tistantia cujusque, prtemissa légitima et ordina- tur, ad primnm halitum orationis, manus a lateribus
ria oratione quasi fundumento. Lib. de Orat., cap. 9. dimotas in habitum supplicem conformasse, rursumque
' Alii sane humanius et verisimilius solem credunt condita pace, situi suo reddidisse. Lib. de Anim.,
Deum nostrum. Inde suspicio
quod innotuerit nos ad
,
cap. 31.
Orientis regionem precari Apolog., cap. 16. .
^ Thura plane non emimus. Si Arabiœ queruntur,
* iVo.j vero non attollimus tantum manus, sed etiam scient Sabœi pluris et carioris suas merces christianis
expandimus e Dominica passione modulatum, et oran- sepeliendis profligari, quam diis fumigandis. Apolog.,
tes confdemur Christo. Lib. de Orat., cap. 12. Atqui cap. 42.
cum riiodestia et humilitate adorantes, magis com- Certe in Evnngelio illos dies jejuniis détermina-
10
mendabimus Deo preces nostras, ne ipsis quidem ma- tos putant in quibus ablutus est sponsus, et hos esse
nibus sublimius elatis, sed temperate ac prope elatis. jam solos légitimas jejuniorum christianorum... Ita-
Ne vultu quidem in audaciam erecto ; nam ille Publi- quc de cœtero diffei^enter jejunundum ex arbitrio,
canus, qui non tantum prece, sed et vultu humiliatus non ex imperio novœ discipiinœ pro temporibus et
atque dejectus orabat, justificatior Pharisœo procacis- causis uniuscujusque ; sic et Apostolos observasse nul-
simo discessit. Sonos etiam voci subjectos esse oportet. lum aliud imponentes jugum. cœterorum, et in com-
Ibid., cap. 13. mune omnibus obeundorum jejuniorum 7 proinde nec
^ Porro cum in Commentario Lucœ, et tertia hora stationum quœ et ipsœ suos quidem dies habeant quartœ
oration 's demonstretur, sub qua Spiritu Sancto initiati feriœ et sextœ ; passive tamen currant, neque sub lege
pro ebriis habebantur, et sexta qua Petrus ascendit in prœcepfi, neque ultra supremam diei, quando et ora-
superiora, et nona qua templum sunt introgressi cur tiones fere hora nona concludat de Pétri exemplo. Lib.
non intelligamus, sulva plane différent ia sentper et de J(jun., cap. 2.
ubique, et omni tcmpore orandi, tamen très istas horas 11 Ecce convenio vos et prœter Pascha
jujunantes,
ut insigniores in rébus humanis, quœ diem distribuunf, dira illos dies quibus ablatus est sponsus, et statio-
quœ negotia distinguunt, quœ publiée résonant, ita et num semi-jej uïiia inter ponentes, et vero, id est puro
solemniores fuisse in orationibus divinis ? Lib. de Je' intei'dum pane et aqua victitantes, ut cuique visum est...
jun., cap. 10. Bene autem quod et episcopi universœ plebi mandare
6 Oblntiones pro defunctis, pro natalitiis annua die jejunia assolent, non dico de industria stipium confe-
facimus. Lib. de Coron., cap. 3. rendarum, ut vestrœ captura est; sed interdum ex
f Ipsam
denique inter rogo fœminam,dic mihi, soror. aliqua sollicitudinis ecclesiasticœ causa. Ibid., cap. 13.
80 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
aussi tles fruits vinrux et succulents. D'autres tianquille,lasiireté dans leur inaison,la valeur
se réduisaient au pain et à l'eau. 11 ifctait dans les troupes, la lidélité dans le sénat, la pro-
permis à personne de jeûner 'le dimanche ni bile dans le peuple, le repos par tout le monde
de prier à genoux ce jour-là; et on jouissait et tout ce ((ue peut désirer un homme ou un
du même privilège depuis le jour de Pâques empereur ; ils ne juraient point par le génie
jusqu'à la Pentecôte, ces cinquante jours étant de César, sachant que les génies sont des dé-
destinés à !a joie. mons, mais par sa " santé dès-lors, le nombre
:
Hoenndeg 16. Tertullien nous fait encore remarquer des chrétiens était si grand, que, s'ils eussent
chrétiens.
que les chrétiens usaient de la même nour- voulu, ils n'auraient manqué ni de force ni
riture que les païens, des mêmes habits, des de troupes pour combattre leurs ennemis;
*
mêmes meubles; qu'ils se trouvaient avec mais c'était une de leurs maximes, de souffrir
eux aux 'places publiques, aux marchés, aux la mort plutôt que de la donner; ils avaient
foires, aux bains, dans les boutiques, dans pour les païens mêmes tant de charité, qu'ils '
les hôteherics et sur mer; qu'ils trafiquaient chassaient de leurs corps les démons dont ils
avec eux, qu'ils portaient les aimes, la])0u- étaient possédés, et le pouvoir de conjurer
raient et faisaient les mêmes métiers; qu'ils ces esprits immondes était ^ commun à tous
étaient exacts àpayer les tributs 'aux princes; les chrétiens. Ils s'abstenaient de manger du^
que,dans leurs prières,ils demandaient à Dieu, sang des animaux,
pour les empereurs*, une longue vie, un règne 17. Quelque rigide que fût Tertullien, il ne
usui vesiro. Apolog., cap. 42. num abrupissemus a vobis, suffudisset utique domina-
' Caetera veciigaiia gratias Christianis agent ex fide tionem vestram, tôt qualiumcumque amissio civium ;
dependentibus debitum, qua alieno fraudando abstine- immo etiam et ipsa destitutiane punisset. Procul dubio
mus, ut si inealur quantum vectigalibwi pereat fraude, expavissetis ad soliiudinem vestram, ad sileniium re-
et mendacio vesfrarum professionum, facile ratio ha- rum et stuporem quemJam quasi martui orbis. Quœ-
beri passif, unius speciei querela compensata pro com- sissetis quibus imperuretis. Plures hostes quam cives
modo cœterarum rutionum. Apolog., cap. 42. remansissent. Nunc enim pauciares hostes habetis prœ
* Nos pro salut e imperatorum Deuni invocamus mullitudine Chrisdanorum. Quis auteni vos ab illis
œternum, Deum verum, Deum vivum, quem et ipsi accultis, et usquequaque vastantibus mentes, et valetu-
imperatùres proprium silA prater cœteros mulunt. dines vestrus hostibus raperet ; a dœmoniorum incur-
Sciunt quts illis dederit imperium. Sciunt qua homi- sibus dico, quœ de vobis sine pretio, sine mercede de-
nes, quis et animam. Sentiunt eum esse Deum solum... pellimus ? suffecisset hoc solum nostrœ ultioni quod
illuc [hoc est in ccelum) suspicientes Chrisliani, mani- vacua exinde possessia immundis spiritibus pateret.
hus expansis, quia innocuis ; capite nudo, quia non Ibid.
erubescimus ; denique sine moniiore, quia de jjectore, * Edatur hic aliquis sub tribunalibus vestris quem
oramus pro omnibus imperatoribus, vilam illis proli- daemone agi constel : jussus a quolibet christiano laqui
xam, imperium securum, domum tutnm,exerciius for- spiritus, ille tam se damanem
canfitebitur de vero,
tes, senatum fidelem, populum probum, orbem quie- quam alibi Deum de.^que producatur aliquis
falso.
ium, et quœcumque hominis et Cœsaris vota sunt. Ibid., ex iis qui de Deo pati existimantur, qui aras itiha-
cap. 30. lantes numen de nidore concipiunt...., nisi se dœmones
^ Sed et juramus sicut non per genios Cœsarum, confessi fuertnt, christiano mentiri non audentes ; ibi-
ita per salutem eorum, quce est augustior omnibus ge- dem illius christiani procacissimi sanguinem fundite...
niis. Ibid., cap. 32. atqui omnis hœc nosira in tllos dominatio et potestas
Quid unquam denotasiis de tam conspiratis, de
' de nominatione Christi valet Christum timentes in
tara animatis ad rriortem usque, pro injuria repensa- Deo, et Deum in Christo, subjiciuntur servis Dei et
tum? Quando vel unu nox pauculis faculis largiter Christi, ita de coniaclu adflatuque nostro, contempla-
ultionis posset operari, si malum malo dispungi pênes tione et reprœsentatione ignis illius correjiti etiam de
nos liceret. Sed absit ut aut igni humano vindicetur corporibus nostro imperia excedunt inviti, et vobis prœ-
divina secia, aut doleat paii in quo probutur. Si enim sentibus erubescentes. Apolog., cap. 23.
et hostes exertos, non tantum vindices occultas agere • Erubescat error vester Christianis, qui ne anima-
vellemus, deesset nobis vis numerorum et copiarum ? lium quidem sanguinem in epulis esculeniis, quiprop-
[[!!'= SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TEUTULLIEN. «I
croyait pas qu'il fût défendu aux chrétiens des païens. Selon Terttdiien, Dieu n'avait pas
d'assister aux sacrifices et aux cérémonies
« absolument défendu ' aux Israélites d'avoir
des païens, pour une cause honnête, pourvu des images, mais seulement de les adorer; le
^
qu'ils ne contribuassent en j'ien au culle des seul motif de rfncarnation était de délivrer
idoles. Il enseigne que, sans Dieu, on ne peut l'homme du péché. 11 remarque que les ca-
counaitre * la vérité, ni Dieu sans Jésus- tholiques peignaient sur leurs calices l'image
Christ, ni Jésus-Christ sans le Saint-Esprit, du ^ bon Pasteur. En faisant la description de
ni le Saint-Espi-it sans le sacrement de la foi, la figui'e de la croix, il dit qu'outre les qua-
c'est-à-dire sans le baptême; que ceux-là tre extrémités ordinaires, il y avait au miUou
n'ont la connaissance d'aucune vérité, qui ^ un *" siège pour le patient. Il assure que le mi-
ne connaissent point le Dieu de vérité ; que racle de l'obscurcissement du soleil, qui arriva
* *'
les préceptes du décalogue sont de droit à la mort de Jésus-Christ, était marqué dans
naturel; qu'il n'y a ' pas d'autres régies de les archives de Rome; que Pilate, déjà chré-
nos actions ; que la volonté de Dieu, et que tien dans le co^ur **, écrivit à l'empereur Ti-
ce que Dieu condamne ne peut jamais être bère, pour l'instruire de tout ce qui regardait
permis dans quelque circonstance où l'on se Jésus-Christ, et que ce prince proposa au Sé-
trouve, ou dans quelque opinion où l'on soit; nat de le mettre au nombre '^ des dieux de
^
que tout ce qui ne vient pas de Dieu est l'empire ; mais que, le Sénat l'ayant refusé, il
corrompu, ce qu'il dit, parlant de la chasteté De changea point pour cela de sentiment et
ierea quoque suffocatis et morticiniis ahstinemus, ne denegare. Quid mirum ? perversa sunt omnia quœ Dei
quo sanguine contaminemuv vel vitra viscera sepulto. non sunt. Lib. II de Cuit, fœm., cap. 1.
Ibidem, cap. 9. ' Proinde et similitudinem vetans fieri omnium quœ
Si propter sarrificium vocatus assistant, ero parti-
1 in cœlo et in terra, et in aquis, ostendit et causai,
ceps idololatriœ ; si me alia causa conjungit sacrifi- idololatriœ scilicet substantiam cohibentes. Subjicit
canti, ero tantum spectator. Cœturum quid facient enim : Non adorabitis ea,neque servietis illis. Serp>entis
servi et îibertifidèles ? Item officiâtes sacrificantiLus autem œnei effigies postea prœcepta Moysi a Domino,
dominis, vel patronis, vel prœsidibus adhœrcntes ? Sed non ad idololatriœ titulum pertinebat, sed ad reme-
si merum quis sacrificanti tradiderit, immo si verbo diandos eos qui a serpentibus infestubantur. Et taceo
quoque aliquo, sacrificio necessario adjuverit, minister défigura remedii. Sic et Cherubim etSeraphim uurea
habebitur idololatriœ. Hujus regulœ rnemores, etiam in arca figuratum exemplum, ccrle simplex ornamen-
magistratibus et potestatibus officium possumus red- tum, accomtnodata suggestui, longe diversas habendo
dere, secundum patriarchas et cœteros majores, qui causas ab idololatriœ conditione, ob qnam similitudo
regibus idololatris usque ad finem idololatriœ appa- prohibetur non videntur similitudinem prohibitarum
;
ruerunt. Lib. de IdoloL, cap. 16. legi refragari, non in eo similitudinis statu depre-
2 Cui Veritas comperta est sine Deo ? oui Deus co- fiensa, ob quem similitudo prohibetur. Lib. II adv.
gnitus sine Christo ? cui Christus exploratus sine Marcion., cap. 22.
Spiritu Sancto ? cui Spiritus Sanctus accommodatus * Nec quisquam nostruni non peccator inventus est,
sine fidei sacramento? Lib. de Anim., cap. 1. cum Christus non alia ex causa desccnderit quam
Nihil verum in his qui Deum nesciunt prœsidem
3 peccatorum liberandorum. Lib. de IdoloL, cap. 5.
et magistrum veritatis. Lib. de Cuit, fœm., cap. 1. ' A parabolis licebit ijicipias, ubi est ovis perdita a
* In principio mundi ipsi Adœ et Evœ logem dédit, Domino requisita, et liumeris ejus 7'evecta ? procédant
ne de fructu arboris planta tœ in medio paradisi ede- ipsœ picturœ calicum vcstrorum, si vel in illis perlu-
rent : quod si contra fecissent, morte morerentur. Quœ cebit interpretatio pecudis illius, utrumne christiano
lex eis sufficeret, si essct custodita. In hac enim lege un ethnico peccatori de restitutione conliniet. Lib. de
Adœ data, omnia prœcepta condita 7'ecognoscimus, Pudicit., cap. 7.
quœ postea puUulaverunt data per Moysen, id est : Di- 10 Pars crucis et quidem majus est omne robur quod
liges Dominum Deum tuum de toto corde tuo, et ex de recta statione defigitur cum antemna scilicet
tota anima tua. Et : Diliges proximum tibi tanquam sua, et cum illo sedilis excessu.Lih. I ad Nat., caj).12.
te et : Non occides, etc. denique si Dominum Demn 11 Eodem momento quo {Christus mortuus est) dies
suum dilexissent, contra prœceptum ejus non fecissent : médium orbem, signante sole, subducta est eum
sijiroximum diligerent, id est semetipsos, persuasioni mundi casum relatum habetis itt arcanis vestris.
serpentis non crcdidissent legem Moysi scrip- ayite Apolog., cap. 21.
tam, quœ et a patribus
naturaliter intelligebatur, i* Omnia super Christo Pilatus, et ipse jam 2}ro sua
custodiebafur. Unde Noe justus invcntus, si non illum conscientia christianus, Cœsari tune Tiberio nuntiavit.
naturalis legisjustitia prœcedat. Lib. adv. Jud., cap. 2. Ibid.
Erramus, nusquam
" et nunquam excusatur quod 13 Tiberius cujus tempore nomen christianum in sœ-
Deus damnât; nusquam et nunquam licet quod semper culum intravit, annuntiata sibi ex Syria Pulastina
et ubique non licet. Non potest aliud esse quod vere quœ illic veritatem istius {Christi} divinitatis revcla-
quidem est bonum seu malum. Omnia autem pênes rant, detulit ad senatum cum prœrogativa suffragii
veritatem Dei fixa sunt. Lib. de Sanct., cap. 20. sui.Senatus, quia non ipse probaver at, respuit ; Cœsar
* (Juanquam et hoc gentili pudicitiœ familiare sit in sententia mansit, comminatus periculum accusatori-
non delinquere, attamen velle, vel etiam nol/e non bus christianorum. IbiJ., cap. 5.
II.
^2 IlISTOinE GÉNÉRALE DES ATTEURS KCCLtSIASTIQIJES.
inonara do peines ceux qui accusoraieut les s'autoriser d'un homme qui avait écrit hors
chnHiens, On avait drepsc à Simon le INlagi- de l'Eglise. Il est bon aussi de remarquer que,
cicu' une statue, avec celte insorii)lion:Ze(//e« selon Tertidlien *, la grande Babylone dont
S((int. Du temps de Tertullicii, les Juifs er- il dans l'Apocalypse. de saint Jean,
est parlé
raient * partoutle monde, sansavoir ni Dieu ni désignait Rome
alors païenne et coupable
homme pour chef, et il ne leur était pas per- du sang des martyrs ^; que saint Pierre et
mis de mettre le pied dans leur pays, même saint Paul souffrirent le martyre dans cette
comme élrançrcrs. C'est sans doute en partie à ville, et que saint Jean y fut plongé dans
voyait tous les jours les prophùlies vérifiées nous fournissent de plus utde pour la con- <ie Teauu
lieu.
par ' rofTet; preuve, dit-il, de celles qui n'é- naissance des dogmes et de la discipline de
taient pas encore accomplies. On peut encore l'Eglise. Mais on y trouve divers sentiments
remarquer semble avoir cru que Jésus-
qu'il peu conformes à la vérité orthodoxe et aux-
Christ n'était point beau * de visage , et que quels il n'est pas aisé de donner un bon sens, seserreu»
Marie, quoique vierge, en tant qu'elle a conçu 11 a cru *°, comme [Jusieurs autres anciens tant
sans connaitre d'homme, n'a pas été vierge juifsque chrétiens, que les anges avaient pé-
dans son accouchement, en tant qu'elle a en- ché avec les femmes des hommes; car il expli-
fanté à la manière' des autres femmes. Cet quait des anges ce que l'Écrituredit des enfants
endroit peut servir à expliquer ce qu'il dit de Dieu, c'est-à-dire des fdsde Seth. Selon lui,
dans son Traité de ia Monogamie que la ,
l'âme " a un sexe particulier, étant elle-même
Vierge fut mariée^ après sou enfantement. mâle ou femelle. Il lui attribue les mêmes di-
Car on ne doit pas prendre à la rigueur ces mensions qu'au corps, la longueur, la largeur,
dernières paroles ,
puisqu'aussitôt après , il la profondeur ; elle a la forme et la figure du
ajoute que Vierge n'avait été mariée
la corps humain ; elle est palpable, transparente
qu'une fois; ce qui ne serait point vrai si,outre et de la couleur de l'air. Il croyait encore
saint Joseph, qu'elle épou?a avant son enfan- que lésâmes venaient l'une de l'autre par une
tement, en eût pris un autre après. Tou-
elle espèce de production et de propagation, en
tefois Helvide, qui niait que Marie fût restée sorte qu'il n'était pas besoin que Dieu en créât
vierge après qu'elle eut mis au monde Jésus- de nouvelles. Dans le livre du Paradis '*, qui
Christ, objectant qu'il suivait en cela le sen- n'est pas venu jusqu'à nous, il s'était efforcé
timent de Tertullicn, saint ' Jérôme ne lui de montrer que toutes les âmes, soit des bons,
répondit autre chose, sinon qu'il ne pouvait soit des méchauts,sont retenues dans les eufers
J Simonem Magum statua, et inscriptione Sandi dei, peperit quœ peperit ; et si virgo concepit, in paHtt
inau(iurant. Ibid., cap. 13. suo nupsit ; ipsa patefacti corporis lege. Lib. de Cam.
• hispersi, pnlabundi, et cceli et soli sut extorres Christ., cap. 23.
vaganlur per orbem, sine liomine, sine Dco rege, qui- * Et Christum quidem Virgo enixa est, semel nup-
tus nec advenarum jure terrarn jmtriam saltem vesti- tura post partum , ut uterque iitulus sanctitatis in
gio salutare conceditur. Ibid., cap 21. Christi censu dispungeretur per matrem et virginem,
' Idoneum opAnor tesiimonium divinitatis veritas et univiram. Lib. de Monog., cap. 8.
dirinationis. Hinc apud nos futurorum quoque fides ' Tei'tullianum in testtmonium vocat (Helvidius), et
tvta est, jam scilicet probatorum : quia cum il lis de Tertulliano quidem nihil amplius dico, quam Ec-
guœ quotidie probantur, prœdicebantur. Ibid., cap. 20. clesiœ hominem non fuisse. Hieronym., adv. Helvid.,
* Denique verbls tantuinmodo et factis, doclrina et pag. 141, tom. IV nov. edit.
8 Sic et Dabylon etiam apud Joannem nostrum, Ro-
virtute sola Christum hominem obstupescebant. Nota-
relur aufem etiam carnis in illo novitas miraculo ha- manœ urbis figura est, proinde magnœ et regno su-
bita. Sed carnis terrenœ non mira conditio, ipsa erat perbœ, et sanctorum Dei debellatricis. Lib. III aduers.
guœ cœiera ejus miranda faciebat, cum dicerent : Vnde Mnrcion., cap. 13.
et signa ista ? etiam dcspicientium for- 8 Si Italiœ adjaces, habes Romam, unde nobis quo-
huic doctrina
niam ejus luec erat. Adeo nec humauœ honestatis cor- que auctoritas prœsto est. Ista quam felix Ecclesia,
pus fuit, nedum cœlestis claritatis. Lib. de Cam. cui totam doctrinam Apostoli cum sanguine suo pro-
Christ., cap. 9. fuderunt : ubi Petrus passioni dominicœ adœquufur;
6 Agnoscimus signum contradicibile conceptum et ubi Paulus Joannis exiiu coronatur ; ubi apostolus
parium Virginis Mariœ, peperit enim et non peperit ; Joannes, posfeaquam in oleum igneum demersus, nihil
virgo et non virgo : quasi non etsi ita dicendurn esset, passus est, in insulam relegatur. Lib. de Prœscript.,
a nobis magis dici conveniret. Peperit enim quœ ex cap. 36. —
1" TertulL, de Veland. Virg., cap. 7. —
sua non peperit quœ
carne, et non ex viri semine. Et u Tertull., de Anim., cap. 9 et 3G, et 31 et 27. —
1* Terlullian., de Anim., cap. 55.
virgo quantum a viro, et non virgo quantum apartu...
[m' SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 83
jusqu'aujour du jugement. lien excep^ait seu- raclet a mis des bornes au mariage et eu a
lement les âmes des martyrs, qu'il plaçait dans Monogamie,
prescrit l'unité, et dans celui de la
le paradis. changea de sentiment
Depuis, il
'
dans lequel, sur la fausse persuasion que le
et distingua les enfers du sein d'Abraham, et Paraclct avait amené une plus grande per-
le sein d'Abraham du paradis. Il mettait les fection que les Apôtres, il condamne les ^ se-
âmes des méchants dans le premier de ces condes noces comme des adultères et ne met
lieux; le second qu'il dit être une région
,
aucune différence entre avoir deux femmes en
plus subhme que les enfers, mais différente même temps, ou les avoir l'une après l'autre.
du ciel, était pour les âmes des saints, soit C'estencore sur l'autorité de son Paraclet qu'il
juifs, soit gentils, qui
y attendaient la résur- enseigne qu'on ne doit pas fuir * dans les per-
rection. Les martyrs étaient reçus dans le sécutions; qu'il n'est pas mêm.e permis de s'en
paradis et y * jouissaient de Dieu. Il paraît exempter pour de l'argent, et qu'il vaut mieux
même y avoir donné place, indistinctement, renoncera la foi dans les tourments que la cou-
aux esprits des saints. Tertullien ' représen- server par la fuite. Il apprit aussi de Montan et
tait le paradis comme un lieu d'une beauté de sesprophétesses à être inexorable envers*
divine, séparé de la connaissance de notre les pécheurs,et il soutient qu'on ne peut accor-
monde par la zone de feu, comme par une der l'absolution aux adultères, sans renoncer
muraille. Il donna aussi dans l'opinion des * à toute pudeur. Il veut qu'on en use de même
millénaires, l'entendant toutefois d'une ma- à l'égard de tous ceux qui se reconnaissent
nière spirituelle. Il semble que ce soit pour coupables dequelques péchés mortelsou capi.?
l'autoriser qu'il rapporte un prodige arrivé taux, pour lesquels il défend même de prier;
en Judée, dans la guerre d'Orient, vers l'an- ce qui faisait dire à saint Jérôme''^ que Ter-
née 138. On vit alors pendant quarante jours tullien rejetait les chrétiens qui recouraient à
comme une ville suspendue en l'air, avec tou- la pénitence. Nous ne devons pas oublier que,
tes ses murailles; ce qui, ne paraissant que le depuis qu'il eut embrasse le parti de Montan,
matin, s'évanouissait à mesure que la lumière il ne cessa d'insulter les catholiques comme
du jour s'augmentait. Il a cru encore que le '^
des hommes charnels et peu éclairés, qu'il ap-
baptême des hérétiques était nul; mais ses pelle partout psychiques. Car tel était l'esprit
paroles peuvent s'entendre de certains héré- de ceux de cette secte, au rapport d'Astère"
tiques qui n'observaient pas la forme usitée Urbain, un de ceux qui se sont appliques à dé-
dans l'Lglise catholique, comme nous l'avons velopper et à combattre les erreurs des mon-
remarqué à la page .5, note 2, et semble dire tanistes et à faire connaître à la postérité les
quel l'Eglise pouvait * être
en deux ou trois mœurs de ces fanatiques. L'esprit d'erreur qui
laïques. Nous ne dirons rien ici de certaines possédait Montan et ses sectateurs, les por-
expressions trop fortes échappées à Tertul- tait, dit cet auteur, à noircir, par d'atroces ca-
lien dans quelques-uns de ses traités compo- lomnies, l'Eglise répandue dans toute la terre.
sés lorsqu'il était encore catholique. Nous les On donc regarder comme des faussetés
doit
avons remarquées lorsque cela nous a paru les reproches que Tertullien fait aux catho-
nécessaire. Mais nous ne pouvons dissimuler liques %de se livrer à la bonne chère et à l'im-
'
les erreurs dans lesquelles il tomba depuis pureté dans leurs agapes, et d'engager les con-
qu'il eut fait schisme avec l'Eglise. On sait la fesseurs détenus dans les prisons *^ à commet-
facilité il reçut dès-lors, comme
avec laquelle tre des excès dans le boire et dans le manger.
des oracles du Saint-Esprit, Its rêveries et les C'était encore une maxime des montanistes de
imaginations de trois fanatiques possédés du s'as-semblerhautement dans le temps même
démon, je veux dire, de Montan, de Prisque despersécutions,commepour irriter les païens,
et de Maximille. Ce sont ces prétendues révé- tandis que les catholiques ne s'assemblaient
lations dont ilsouvent et avec tant
parle si qu'en secret et avec beaucoup de précautions.
d'estime dans ses écrits , en particulier dans 19. Quant
* au style de Tertullien, on ne peut
•' -^ •'
,
Jugement
.
(ie sou style
ses livres contre Marcïon , où il dit que le Pa- disconvenir qu'il ne soit •* dur, mal poli, obs- «-tdesesou-
maines ont de pins beau et de plus savant. Paris, età Bàlc,en 1550,in-f'ol.Sigismond Gé-
Ses livres contre Mai'cion renferment tous les lénius revit la dernière et y corrigea quelques
principes de l'ancienne théologie. 11 faut dire traités de TertuUien, sur un manuscrit d'An-
la même chose de son livre contre Praxéas, gleterre. Il donna, en 1562, une nouvelle édi-
dans lequel il propose avec tant de netteté et tion du TertuUien de Rhenanus, avec les com-
de précision la foi de l'Eglise sur la trinité mentaires de François Zéphinus, Florentin, à
des personnes en un seul Dieu, qu'il peut Bàle, in-foL; on la réimprima à Paris, en 15C6,
servir de modèle à tous ceux qui ont à traiter eu deux volumes in-8°, en fort beaux carac-
ime matière sublime. Ses livres du Bap-
si tères. Jacques Pamélius, archidiacre et depuis
ges de l'Eglise. Enfin son livre des Prescrip- Paris, en 1583; à Heydelberg, en 1596; à
tions fournit des armes pour combattre et Genève, en 1597, IGOl, 1607 ; à Franken,
ruiner toutes sortes d'hérésies. C'est surtout en 1597, avec les notes de Junius; à Paris,
dans ce traité que l'on remarque la vivacité en 1598, 1608; à Anvers, en 4609; à Paris,
du génie de TertuUien, la pénétration et l'é- en 1616; à Cologne, eu 1617; à Zurich, en
tendue de son de son raison-
esprit, la force 1657; à Paris, en 1628, in-8»; 1634, iu-fol.;
nement Il est tout ditlerent dans tous les
, 1638, in-S»; et 1664, in-fol.; à Rouen, en
ouvrages qu'il a fahs depuis son schisme. 1662 in-fol. Outre les prolégomènes les
, ,
quand il s'agit de défendre ses erreurs, et il cueUht plusieurs différentes leçons des ma-
n'a pas honte d'autoriser son sentiment sur nuscrits et les mit à la marge des œuvres de
rum péri tus, sed in loquendo parum facilis, et minus tias tanquam illicitas maledico dente concidit. Au-
comjitus, et multum obscurus. Lactant., lib. V Imlit., gust., de Bono viduitatis, num. 6, cap. 4.
cap. 1. Creber est in sententiis, sed difficilis in lo- ' Veniam ad Latinos : quid Tertulliano eruditius?
quendo. Hieronym., Epist. ad Paulin. quid ucutius? Apologeticus ejus, et contra Gcntes /lin"
* Uinc maxime Cataphrygorum ac Novatianorum hœ- cundam sœculi obtinent disciplinam . Hieron., Epist. 83
reseslumu erunt, quas, buccis sonantibus, non sapienti- ad Magnum.
bus, edam Tertuttianm inflavit, dum secundas nup-
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE I. — TERTULLIEN. 85
Tertullien d'une édition de Pamélius, dont de Giraldi, Venise 1744, est meilleure; on y a
M.Rigault profita dans la suite. Presque dans joint plusieurs dissertations qui avaient paru
le même temps que Pamélius donna sa pre- dans l'intervalle, telles que celles de Ha ver-
mière édition de Tertullien, La Barre en entre- camp sutV Apologétique. Le protestant Semler
prit une autre, qu'il fit imprimer à Paris en a donné à Halle, 1769-1773, une belle édition
d580, in-fol.; je ne sache point qu'elle ait été en 5 vol. in-8°, d'après celle de Bàle 1521;
réimprimée depuis. La première de M. Rii^ault elle contient de bonnes notes critiques. Cette
ne fut que de quelques opuscules, que Robert édition fut complétée en 1776, par Schulz,
Etienne imprima en 1628. Il les fit ensuite qui, dans un sixième volume, donna une table
imprimer tous ensemble, après les avoir revus des matières et un vocabulaire. C'est d'après
et corrigés sur un manuscrit d'Agobard, avec cette édition que s'est réglé Oberthur dans
des notes et un glossaire pour l'intelligence celle qu'il a donnée des Pères latins, in-S",
des termes africains, à Paris, en 1 634 et 1641 : tome I et II, mais en n'admettant qu'un pe-
celle-ci est la plus estimée; mais, pour l'avoir tit nombre de notes les plus importantes, Wi-
complète, il y faut joindre un volume entier cebourg 1780,1781. Les éditions de Cailleau,
de notes et de commentaires de diûérents au- à Milan, 1821 et de Gersdorf, à Leipsick, 1839,
,
teurs, imprimé à Paris, en 1635, in-fol. On es- quatre volumes in-8'', sont à peu près égales
time les notes critiques et grammaticales de en mérite; cette dernière, pourtant, est plus
M. Rigault ; mais on fait peu de cas de celles complète et offre une plus saine critique on :
qui regardent la théologie, et on s'est plaint regrette de ne pas y trouver les Prescriptions.
de la liberté qu'il s'est donnée en parlant de Les Selecti Patres de M. Cailleau •, Paris 1829,
certains usages de l'Eglise. Philippe Le Prieur contiennent presque tous les ouvrages de Ter-
fitréimprimer l'édition de M.Rigault, à Paris, tullien. En 1844 a paru l'édition de M. Mi-
en 166-i et 1695, in-fol., et y ajouta quel- gne. Les éditeurs sont les PP. Bénédictins de
ques notes de sa façon, qui sont de peu de Solesmes, sous la direction de U. Pitra. Dans
valeur celles de Saumaise sur le livre du
: la préface ils traitent de l'autorité de Tertul-
Manteau, avec une dissertation sur la vie , la lien, de l'usage que l'on peut en faire, des dif-
doctrine et les erreurs de Tertullien. Cette férents manuscrits, éditions et traductions de
dernière, de 1695, est plus ample que l'autre ses œuvres, et des soins apportés à cette édi-
et contient, outre le Traité de la Trini(é,aitn- tion. Ils y ont suivi en grande partie celle de
bué à Novatien, un poème intitulé: De Jonas Priorius ou Le Prieur, de 1 664; ils y ont pour-
et de Ninive. Le Père Jean-Louis de la Cerda, tant ajouté un assez grand nombre de pièces
jésuite espagnol,fit imprimer un Commentaire nouvelles, ont recueilli les diverses notes, de
sur les ouvrages de Tertullien, plus ample que manière à former une édition variorum ; ils
ceux qui avaient paru jusqu'alors, en deux ont aussi donné une nouvelle division des trai-
volumes in-fol., en 1624, 1630 et 1611 ; mais tés de l'auteur. Une autre édition de Tertul-
cet ouvrage est demeuré imparfait on le ;
lien a paru aussi en 1843, à Cambridge, par
trouve trop long et ennuyeux, et l'auteur y les soins de H. -A. Woodham, in-8", et a été
faitquantité de recherches et de notes inutiles. rééditée en 1850. Indépendamment des deux
Les Commentaires du Père Georges, capucin, chapitres que l'éditeur a écrits en tète, l'un
le sont encore plus, et il aurait pu, sans faire sur la latinité des Pères africains, l'autre sur
tort au public, les réduire à plus de moitié; les ouvrages apologétiques des anciens doc-
il ne laisse pas d'y avoir de l'érudition, mais teurs de l'Eglise, il a mis au bas d'un texte
peu de connaissance de la bonne critique et motivé ( celui de Léopold en général) des no-
de l'ancienne discipline de l'Eglise. Ils furent tes philologiques très-utiles pour l'interpréta-
imprimés à Paris en trois volumes in-fol., en tion des endroits difficiles. [EramCElher a pu-
1646, 1648, 1650. On a donné à Venise, en blié, en 1 853, une édition complète des œuvres
1701 in-fol., une édition complète des œuvres
, de Tertullien, avec les notes variorum et les
de Tertullien, avec des notes choisies des meil- siennes, trois vol. in-S».]
leurs éditeurs, qu'on a mises à la fin mais ; 'L'Apologétique fut imprimé séparément à
peu exacte. [L'édition de Ve-
cette édition est Venise, en 1497, avec les œuvres de Lac-
nise 1708,avec des notes choisies; celle de Co- tance quelques-unes de saint Chrysostome
,
logne 1716, n'offrent rien de particuher. Celle et la Préparation cvangélique d'Eusèbe ; à Ve"
* Le P. Cailleau, au tome IV de son édition de D. CeillifT, signalo nuf conlmlaçon l'ailo h Milan. {Ucditciir.)
86 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
nise encore, avec les œuvres de Lactance, en tés de la Patience , de la Pénitence, de la
ioOO; à l'aris, oul5U9, iu-4», et chez Aide, en Prière, des Spectacles et de r Ajustement des
4515, in-S"; à Paris, en 1G13, in-4», avec des femmes. Il promettait aussi un dictionnaire
notes de Didier Héralde; ù Leyde, eu 1718, pour l'intelligence de Tertullien; mais cette
in-8", avecun savant commentaire de Sii^c- double promesse n'a point été mise à exécu-
Lcrt Ilavcrcainp; à Zurich, en 1827, par les tion. [Et ces ouvrages sont demeurés inédits.]
soins de J.-G. Orcl[o;à Elderfeld, en 18-28, i)ar Outre ces deux traductions françaises de l'A-
les soins de Ritter. Les deux livres aux l\a- pologétique de Tertullien, Pierre
Maner ou
tions parurent à Genève, en lG2o, in-i", avec Manier (Manerus) en a donné une en espa-
les notes de Jacques Godefroi ; le livre des gnol, à Sarragosse, in-i», 1044, et Joseph Betty
Spectacles, à Paris, en IGOl, avec les œuvres une en anglais, à Oxford, 1722, in-8", avec
d'Ouuphie Panvinius le livre du Manteau, à
; Théophile d'Antioche. L'Apologétique à Sca-
Paris, eu IGOO et 1614, in-8° : la première pula a été traduit en allemand, avec le Traité
édition est d'Edmond Richer, qui donna eu de la Patience, ci imprimé à Luncbourg, eu
même temps ce livre en français; la seconde 1682, in-12; le traducteur est Abraham Hin-
est de Théodore Marsilius. François Junius en kelmann; le7VG<7e de la Patience avait déjà
avait déjà donné une latine à Leyde, en 1595, été donné en allemand, à Smalcalde, en 1582,
avec des notes. Saumaise ejifit une quatrième in-12, par Luc Majo, et il fut publié à Paris,
à Paris, en 1622, in- 8», et une cinquième à eu français, en 1640, in-12, par Hobier. Le
Leyde, en I65G, in-8°. Denys Pétau, mécontent Traité des Prescriptions a été donné séparé-
des notes dont Saumaise avait accompagné ment en latin, avec les notes de Quintinus Hé-
son édition, les attaqua sous le nom sup- duus, à Paris,eulô61;eu 1599, avec les notes
posé d'Antoine Kerkoëlius,en 1622. Saumaise de Pamélius, in-12, à Cologne; en 1675, in-
réponditl'aunée suivante avec assez d'aigreur, 4°, à Bruxelles, avec un long commentaire de
sous le nom de François Francus; ce qui at- Chrétien Lupus, ermite de Saint-Augustin; [à
tira une réplique de Denys Pétau, qui n'est Salisbury, en 1752, in-4", parles soins de P.
pas muius vive que la réponse du premier, Corbicn Thomas; à Ingolstadt, en 1834, in-
Leipsick 1839-41, iu-8». Ce Traité du Mante lu 8», avec le livre du Baptême, de la Pénitence
teur est M. Brayer, chanoine de la cathédrale D. Meunier, bénédictin, mort en 1780. D. Pi-
de Troyes. M. Giry, qui a donné en français tra, dans ses Prolégomènes de TertuUien, l'es-
l'Apologie pour les chrétiens, a aussi donne time beaucoup; d'autres critiques ne lui fout
en la même langue les traités de la Chair de pas le même honneur. La version de l'Apolo-
Jésits-Christ et de la Rèsurrectïon de la chair, gétique,par l'abbé Allard, 1827, est accompa-
in-12,chezLepetit,en iGCi.Florimondde Ray- gnée du texte avec notes et variantes. C'est
mond, ou Louis Richcome, jésuite, donna en un bon travail, mais encore incomplet et qui,
lo9i une version française du Iwi-ade la Cou- plus d'une fois, passe à côté du sens. La plus
ronne du soldat, avec des notes, le tout impri- récente version du livre des Prescriptions est
mé à Bordeaux, chez Millanges. Il le fit réim- celle de M. F.-Z. Collombet; Paris, Saguier
primer à Paris,avec le livre aux Martyrs, à la et Bray, 1843, in-12, avec une notice sur les
tin d'un traité intitulé L'Antéchrist et de
: éditions et ti^aductions de ce traité, une bio-
l'Antipapesse Jeanne, eu 1599. Paul Colomiers graphie de Tertulhen, un discours sur le ca-
a donné aussi le livre aux Ma?'tijrs, en fran- ractère du protestantisme, des notes critiques,
çais, à La Rochelle, en 1673. On a une traduc- dogmatiques et une dissertation du P. de Tour-
tion espagnole, avec les traités de Scapula,de nomine. Le livre du Témoignage de l'âme a été
la Patience, du Témoignage de l'âme, etc., par traduit pour la première fois en français, par
Joseph PeUicier, à Barcelone,enl639.Le Traité Melchior Dulac {Annales de Philosophie, 1832).
de la Couronne du soldat avait été donné en Les Pères de l'Église, traduits en français par
français dès 1563, à Paris, chez Vascosan,in-8", M. de Genoude, contiennent 22 livres de Ter-
par Macéré. M. Mur atori, ayant trouvé dans la tulhen le traducteur est M. Dcnain. On doit
:
Bibliothèque Ambrosienne, à Milan, un ma- louer l'élégance plutôt que la parfaite fidélité
nuscrit où le traité de "Y evi\x\\\QX\ de l'Oraison à rendre de l'auteur. Dans un volume du Pan-
était plus complet que dans les éditions des théon littéraire, ayant pour titre Choix de:
des Spectacles, par le même : cette dernière de Tertulhen en allemand, par S. -A. Besnard,
version a été reproduite dans les Chefs-d'OFu- Vienne 1837-1838, 2 vol. in-8°. La version
vre des Pères, Paris 1837- En 1780, l'abbé italienne de M. de Bargini,Rome 1756,contient
de Gourey, vicaire-général de Bordeaux, a les ouvrages moraux composés par Tertulhen
donné une version estimée des Prescriptions lorsqu'il était catholique. Dalrymple a traduit
et de l'Apologétique. Elle a été reproduite en anglais le livre à Scapula, Edimbourg 1780.
en 1825, à Paris, et en 1837, dans les Chejs- h' Apologétique a été traduit en espagnol en ,
d'Œ livre des Pères ; en 1842^ dans les Démons- 17"J2, par Em. Ximénès de Uriéta.]
CHAPITRE II.
i.Eusèhe, après avoir remarqué que Dieu, et les progrès de lliérésie de Montan, jusqu'à
Kiin est
l'uiiti-iir (!•» qui n'abandonue jamais la défense de la vé- la mort de cet hérésiarque. Lepremierdc ces
•roi« livres
onnli't' les
TiKiiitaiii»»
rité, avait suscité plusieurs hommes célèbres fragmcnts,qui est la préface de tout l'ouvrage,
tes. Il i^ri-
Vilit upivs
en doctrine et en éloquence, pour combattre commence ainsi : « Quoique vous m'ayez ex-
les faux dogmes des montanistcs ou cata- horté de])uis longtemps, mon cher Avircius
phiygiens, ajoute que l'un d'entre eux avait *
Marcèle,d'écrire contrelcs erreurs de Miltiade,
souvent réfuté ces hérétiques de vive voix; douté jusqu'à présent si je devais le faire,
j'ai
mais il ne dit point qui était cet auteur. Saint non que je trouvasse aucune difficulté à dé-
Jérôme* a cru qu'il se nommait Rhodon, le truire le mensonge et à établir la vérité, mais
même à qui un traité sur les six
il attribue dans la crainteque l'on ne m'accusât de vou-
jours de la création du monde. Cependant loir ajouter quelque chose aux paroles de
Rhodon était mort dès le règne de Sévère l'Evangile, sachant qu'il n'est permis à per-
c'est-à-dire, avant l'an 212, tandis que l'a- sonne ni d'y ajouter, ni d'en retrancher. Mais
nonyme dont parle Eusèbe vivait encore en étanl, il n'y a pas longtemps, à Ancyrc, ville
l'année 233, car il dit qu'il écrivait quatorze' de Galatic, j'y trouvai l'EgUse troublée, non
ans après la mort de Maxi mille, arrivée en par la nouvelle prophétie, comme ils l'appel-
218. Il faut donc avouer que saint Jérôme lent, mais par la fausse prophétie, ainsi que
s'est trompé en attribuant à Rhodon un ou- je le ferai voir dans la suite, avec l'aide de
vrage qui n'a paru que longtemps après sa Dieu; je discourus pendant plusieurs jours sur
mort. Nous croyons, avec de Valois, que cet cette matière, dans l'église de ce lieu, et je com-
auteur est A stère * Urbain, dont il est parlé battis tellement ce que ces hérétiques avan-
dans la suite d'Eusèbe. Il était prêtre, puis- çaient pour se soutenir, que j'eus le bonheur
qu'il appelle Zotique Otrène son frère et sou de les confondre et de confirmer les fidèles
collègue dans le sacerdoce. Après avoir sou- dans la vraie foi. Les prêtres de cette Eglise
vent réfuté de vive voix les montanistes , il me prièrent, en présence de Zotique Otrène,
écrivit contre eux, à la prière des prêtres de notre frère et notre collègue au sacerdoce,
l'Eglise d'Ancyre, troublée depuis quelque de leur laisser par écrit le discours que j'a-
temps par ceux qui soutenaient les fausses vais fait; mais, au lieu de le leur accorder
prophéties de Montan. sur-le-champ je promis de l'écrire à loisir
,
M^o.
2. Son ouvrage était divisé en trois livres
rie
res trois li-
et de le leur envoyer. »
vrai.
adressés à un nommé Avircius Marcèle, un 3. Dans le second fragment, Astère Urbain Ambition
de Montan,
de ses amis. Mais cet ouvrage est perdu, et il fait une peinture de Montan, et expose en ces coinraenee-
meiit et sui-
ne nous en reste que quelques fragments termes l'origine de son schisme et de sa cons- te (te son
scliisuie.
qu 'Eusèbe nous a conservés dans son Histoire piration contre l'Eglise « Dans cette partie de
:
1 Euseb., Ilist. eccîes., lib. V, cap. IC. — * Iliero- y aitquelque suite dans le récit d'Eusèbe il faut ,
njm., ia Catalogo , cap. 37. — 3 Apud Euseb., dire nécessairement que ces paroles, prout in eodem
lib. V, cap. 10. Asterii L'rbani libro relatum est, ont élé mises après
* Hcfert prœierea in eodem libro sandissimos coup, soit à la marge, soit dans le texte, en forme
Episcopos spiî-itiim illum, qui in Maximilla residebat, de parenthèse, pour marquer qu'Astère Urbain était
confutare conatos qnidem fui^tse, sed ab aliis qui spi- l'auteur du même livre dont Eusèbe avait parlé un
ritui fovebant jro/iibitos. Verba ejus hœc sunt : Nec peu auparavant autrement, comment expliquer le
:
inibi jain dicat ille Maximillaî spiritus, prout in eo- terme relatif eodem, dont il se sert, et à quel livre
dem Asterii L'rbani lihro relatum est. Arccor lan- le rapporter, sinon à celui dout il est parlé précé-
Montan, nouvellement converti à la foi.poussô sont morts, à ce que l'on dit , d'une manière
d'une ambition excessive et d'un désir déré- toute différente de celle-là. Car on assure
glé de parvenir aux premières cbarges de qu'ils se sont pendus eux-mêmes et qu'ils
l'Eglise^ donna prise sur lui à l'ennemi. Gra- ont péri de la mort de Judas. On prétend que
ins était alors gouverneur d'Asie. Montan, Théodote,le premier de ceux qui ont donné
rempli de l'esprit du démon de et agité cours à leurs prophéties, s'étant abandonné
fureur, commença à débiter des nouveautés à l'esprit d'erreur, fut élevé par ce même es-
dangereuses et une doctrine contraire à celle prit dans les airs, et périt misérablement,
D'autres, peu attentifs aux marques que le Thémison et quelques autres ne leur laissèrent
Seigneur nous a données pour reconnaître les pas la Uberté de montrer que cet esprit de
faux propbètes, exbortaient ce séducteur à Maximille était un esprit de mensonge et d'il-
parler.En même temps, le démon suscita lusion. Astère ajoutait ensuite beaucoup d'au-
deux femmes remplies de l'esprit d'erreur, tres choses pour réfuter les fausses prophéties
qui débitèrent les mêmes
impertinences que de Maximille, et il parlait ainsi des guerres et
Montan. Cet esprit disait quelquefois à ceux des autres désordres qu'elle avait annoncés.
qui prenaient plaisir à l'écouter, qu'ils étaient « La fausseté de cette prédiction n'est-elle pas
heureux, et les flattait par de vaines espéran- évidente, puisque, depuis plus de treize ans
ces ; d'autres fois il les reprenait, afin de leur que cette femme est morte, il n'y a eu aucune
montrer qu'il n'épargnait point le vice . Il guerre ni générale,ni particulière, et que,par
n'y avait qu'un petit nombre de Phrygiens la miséricorde de Dieu, les chrétiens ont joui
qui fussent infectés de cette erreur. Mais ce d'une paixprofonde. » Voyant que les monta-
mauvais esprit portait ceux qu'il possédait à nistes,convaincusd'erreur,se rejetaient sur les
noircir, par d'atroces calomnies,rEglise répan- martyrs de leur cause et prétendaient que
due dans toute la terre. Il agissait ainsi con- la constance avec laquelle ils avaient souffert
tre l'Eglise catholique, en haine de ce qu'elle la mort était une preuve certaine de la puis-
avait refusé de le recevoir et de ce que les sance de l'esprit prophétique qui résidait eu
fidèles d'Asie, s'étant plusieurs fois assemiilés eux, Astère répondit à cette objection dans
pour examiner sa doctrine, l'avaient déclarée un troisième livre : « Plusieurs autres héré-
impie, et retranché de leur communion ceux tiques, dit-il, se vantent d'avoir aussi des mar-
qui étaient infectes de ses eiTeurs. » tyrs; mais nous ne demeurons point d'accord,
vtortiçno- Le troisième fragment est tiré du second
i. pour cela ,
qu'ils aient la vérité de leur côté.
"îi'ta'n" e*t Hvro d'Astèrc Urbain. Eusèbe dit qu'il y Les marcionites prétendaient avoir parmi eux
étessi». rapportait les divers genres de mort de ceux des martyrs de Jésus-Christ; cependant ils ne
qui ont été les auteurs de l'hérésie des mon- confessent point Jésus-Christ selon la vérité.
tanistes. Voici comment il parle de celle de D'ailleurs, lorsquede véritables fidèles sont
Montan, de Maximille et de quelques autres appelés au martyre et qu'ils sont mis avec
de cette secte : « Puisqu'ilsnous accusent, les martyrs des Phrygiens, ils évitent leur
dit-il, de tuer les prophètes parce que nous
, communion, de peur d'approuver l'esprit de
n'avons point reçu les prophéties de leurs Montan et de ses femmes, comme il est arrivé
imposteurs, qu'ils prétendent avoir été pro- de nos jours à Apamce, ville située sur le
mis par le Seigneur, je les conjure, au nom Méandre, aux martyrs Gaïus et Alexandre,
de Dieu, de me dire si, depuis que Montan natifs d'Euménie.»
et les femmes qui l'ont suivi ont commencé 6. Il faisait mention dans le même livre Différence
(les vrais
à déluter leurs rêveries, quelqu'un de leur d'un écrivain nommé Miltiade, qui avait écrit d'avec le»
fa\ix pro-
secte a été persécutépar les Juifs ou mis à contre les montanistes, et y remarquait qu'un phètes.
femme n'a été fouettée ni lapidée dans les du Nouveau Testament: «Les faux prophètes
90 ÏIISTOIRE GI-NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dit-il, parlent dans une fausse extase pleine de gent et des étoffes précieuses. Apollonius re-
hardiesse et<remporlcmcnt, et leur ignorance prenait encore deux personnes de cette secte,
se change (ii folie. Ils ne sauraient nionlror qui se vantaient d'être martyrs. L'un d'entre
que, dans l'Ancien ni le Nouveau Testament, eux Théniisou qui, ayant donné de l'ar-
était
aucun prophète ait été agilt'î d'un pareil esprit. gent pour sortir de prison, avait écrit une let-
Ils ne le montreront ni d'Agabe,ni de Judas, tre catholique, à l'imitation des Apôtres, pour
ni de Silas, ni des iillesde Philippe, ni d'Am- favoriser les nouveautés et les inq)iétés des
miadede rhiladeli)hie, ni de Qiiadratiis, ni de montanistes. L'autre, nommé Alexandre,
plusieurs autres qui n'ont eu aucune commu- était un homme de bonne chère, convaincu
nication avec eux. Puisqu'ils publient que les publiquement de larcin et de plusieurs autres
femmes de la secte de Montan ont succédé au crimes et jugé à Ephcse par Emile Phro-
,
don de prophétie dont Qiuidratus et Ammiade tin, gouverneur d'Asie. « Il nous serait aisé,
avaient été remplis, qu'ils nous montrent ajoutait Ai)ollonius, de faire voir la même
ceux qui ont succédé à iMontan et à ses fem- chose de plusieurs d'entre eux, et de les con-
mes. Car, selon que le dit l'Apôtre, le don de vaincre de dérèglement dans leurs mœurs.
prophétie doit se conserver dans l'Eglise jus- Dites-moi un prophète peint-il ses cheveux,
:
qu'à la venue du Sauveur. Or, quoiqu'il y ait frotte-t-il ses yeux d'antimoine, a-t-il soin de
quatorze ans que Maxiraille soit morte, ils ne se parer, joue-t-il aux dés, prête-t-il à usure?
peuvent montrer parmi eux aucun prophète qu'ils nous répondent franchement si toutes
depuis elle. » Cet auteur disait encore qu'il ces actions sont permises ou non, et alors je
avait fait un abrégé du livre où Miltiade montrerai qu'ils les ont faites. » Apollonius
faisait voir que les véritables prophètes ne ajoutait encore que Zotique, dont nous avons
perdaient pas l'usage du jugement en pro- parlé plus haut, étant sui'venu dans le temps
phétisant; mais cet abrégé n'est point venu jus- où Maximille débitait ses fausses prophéties
qu'à nous, non plus que le livre de Miltiade. à Pépuze, voulut confondre l'esprit dont elle
[Les dix fragments qui nous restent d'Astère était agitée, mais qu'il en fut empêché par
Urbain sont reproduits dans la Patrologie grec- quelques-uns qui étaient dans les mêmes sen-
que de M. Rligne, tom. VU de l'édition latiue^ timents qu'elle. Il faisait aussi mention de
d'après Galland et Eusèbe. ]
Thraséas, qui souffrit en ce temps-là le mar-
ApoUo- Les monlanistes trouvèrent encore un
7. tyre, et rapportait, comme une ancienne tra-
mus, ses é- . .
rrits contre adversauc dans un nommé Apollonius,' dont dition que le Sauveur avait défendu à ses
le? monta- ,
'^ ,
iiistes
seb.. lib.
En- Eusèbe parle immédiatement après ^
avoir fait apôtres de sortir de Jérusalem avant douze
». ,
cap. 19. le détail des trois livres qu'Astère Urbain ans. Eusèbe remarque que l'ouvrage d'Apol-
écrivit contre eux. Il ne dit pas combien Apol- lonius contenait un grand nombre d'autres
lonius en composa, mais seulement qu'il ré- arguments très-forts pour réfuter l'hérésie
futa, dans un ouvrage exprès, l'hérésie des ca- des montanistes; il y employait l'autorité de
taphryges, qui subsistait encore de son temps, l'Apocalypse de saint Jean, et y rapportait
et qu'il y examinait les mœurs des auteurs que cet apôtre avait ressuscité un mort à
de cette secte et réfutait pied à pied leurs faus- Ephèse. Apollonius écrivait environ quarante
ses prophéties. En parlant de Montan, il lui ans après la naissance de l'hérésie de Montan,
reproche d'avoir appris à rompre le mariage c'est-à-dire vers l'an 2 M, car Eusèbe fait com-
et le jeûne, d'avoir doimé le nom de Jérusa- mencer les montanistes en 171. [Routh a re-
lem à Pépuze, et à Tymion , petit bourg de cueilli les fragments qui nous restent d'Apol-
Phrygie, afin d'y attirer le peuple; d'avoir lonius, Reliquiœ sccra?, tom. I.]
établi des gens pour lever de l'argent, sous le 8. Nous joignons à cet auteur Géminé ' ou Gé-
nom récompenses
d'oblations, et assigné des minien,prêtredcrEglised'Antioche,doutnous
à ceux qui prêcheraient sa doctrine. Quant ne savons autre chose sinon qu'il avait composé
aux femmes qui avaient quitté leurs maris quelques écrits qui étaient, dit saint Jérôme,
pour suivre Montan, il montre que c'est à des monuments de sou esprit. Il n'en est venu
tort qu'on voudrait faire passer Prisque pour aucunjusqu'ànous.Géminellorissait sous le rè-
vierge, et les autres pour prophétesses, puis- gne d'Alexandre, vers l'an 232, dans le temps
que, contre la défense que l'Écriture fait aux que Zébènc gouvernait l'Eglise d'Antioche,
prophètes, elles avaient reçu de l'or, de l'ar- et que Iléracle fut fait évoque d'Alexandrie.
CHAPITRE III.
Ilétnitné
paien.il em-
i . Jules Africain, que Socrate * met entre qu'il qualifiait ainsi Africain, celui-ci devait
Wsahie- ceux qui
'
s étaient rendus habiles dans toutes l'être pareillement. Mais on croit qu'Africain
liÇion cure-
4t^"d%iîté
^''^"*6s de sciences,
était ^ originaire de Libye. était plus âgé qu'Origène, puisqu'il l'appe-
p^reur.'"'"'
^^ ^"'^ païen et avait, outre le nom
d'abord ' lait son fils. Eusèbe'" met sous l'empire de
^
de Jules, celui de Sexte, selon la remarque Gordien, c'est-à-dire vers l'an 237, au plus
de Suidas. Il avait fixé sa demeure dans Em- tôt, le voyage que Jules Africain fit à Alexan-
maiis: * cette ville ayant été ruinée, il fut dé- drie, où il avait été attiré par la grande ré-
puté * par les habitants vers
l'empereur Hélio- putation de saint Héracle, prêtre et ensuite
gabale pour lui demander le rétablissement de évêque de cette ville; mais comme il marque
la ville. Sa légation fut heureuse; l'empereur lui-même ce voyage dans sa Chronique, ache-
permit le rétablissement de la ville, que Ton ®
vée en 221 on ne peut douter qu'il n'y ait
,
nomma depuis Nicople [ou Nicopolis] : c'était erreur en cet endroit d'Eusèbe.
l'an de Jésus-Christ 221 . Il finit en la même 3. L'ouvrage qui a le plus contribué à ren-
s/^^,f^'=''''"-
année son Histoire des Temps, qu'il avait dre le nom de Jules Africain célèbre dans l'E- '"S'e,
commencée étant sans doute déjà chrétien, glise, est son Histoire des Temps ou sa Chro-
puisqu'il y faisait un détail des actions des nologie, Elle était divisée " en cinq livres et
Patriarches et des Prophètes, et de ce qui était comprenait ce qui s'est passé depuis le com-
arrivé dans l'Eglise depuis Jésus-Christ jus- mencement du monde jusqu'au consulat de
qu'aux dernières années du règne d'Hélioga- Gratus et de Séleucus, la troisième année du
bale; c'est pour cette raison que Sozomènc ' règne d'Héliogabale, de Jésus -Christ 221.
le compte au nombre des historiens ecclé- Quoiqu'Africain y traitât les choses fort en
siastiques, abrégé, surtout depuis Jésus-Christ jusqu'à
qi^r éuu' 2.0iigène appelle » Jules Africain son frère : son temps, il ne laissaitpas d'être très-exact'*
prêtre.
commc OrigènG était prêtre dans le temps et n'oubliait rien de tout ce qui était uéces-
1 Sed et Clementem, et Africanum atque Origenem, après la ruinedfi Jérusalem, comme pour marquer
viros omni génère doctrinœ excultos, prorsus asperna- l'évéuement de la guerre, c'est-à-dire leur victoire.
batur Aetius. Socrat., lib. II Hist., cap. 35. Urbis est in Palœstina, Nicopolis hodie dicta. Hanc
* Africanus, cognoinento philosophus A fer,
Sextus ,
cum adhuc vicus esset, sacer Evangeliorum liber com-
qui Gestos descripsit libris XIV suntautem ut quœ- : mémorât et Emmauntem vocat. Post excidium autem
darn physicu volumina, qiice continent remédia ex ser- Hierosolymorum, et post victoriam de Judœis relatam,
monibus, et incanlamentis, et quibusdam scriplis ca- Romani eam, Nicopolim nomiiiarunt, ex belli eventu
racteribus constantia, et alios effectus liabentia. Sui- nomen loco imponentes. Sozomeu., lib. V Histor.,
das, in Africano, pag. 512. cap. 21.
3 Onn'en peut douter, s'il est vrai, comme il y ^
Idem, lib. 1, cap. 21. — 8 Origen., de Susanna,
a toute apparence, qu'il soit auteur des Gestes, et pag. 222. — 9 African., ibid., pag. 220.— i" Euseb.,
qu'il y ait enseigué à guérir les maladies par les pa- lib. VI Hist., cap. 31.
roles et par les enchantements. 11 Legimus Africani illius liistoriam, qui Gestes, ut
^ Le choix que les habitants d'Emmaûs firent de nominant, libris quatuordecim composuit. Concisus qui-
Jules Africain, pour renvoyer à l'empereur, et le dem est. Nihil tanien cognitu necessarium omittit. In-
zèle qu'il témoigna pour le rétablissement de cette cipit a mundi
crcatione, apud Moysen, pervenitque
ville, prouve clairement qu'il en était citoyen. ad usque Chrisli adventum. Succincte quoque commé-
^ Sub imperatore Marco-Aurelio Antonino, quiMa- morât gesta jam iride a Christi œtaie usque ad Ma-
ximo successerat , legationem pro instauratione urbis crini imperatoris tempera, quo tempore,ut idem affa-
Emmaûs suscepit, quœ postea Nicopolis appellata est. mât, hoc chi^onicum absolutum est, annorum scilicet
Hieronym., in Catalogo, cap. 6S. quinquies mille septingentorum et viginti trium. Opus
* Selon le témoignage de saint Jérôme, que nous universum voluminibus quinque continetur. Photius,
venons de rapporter, Emmaûs ne fut nommé Nicople Cod. 34.
qu'après son rétablissement sous Héliogabale ou son ^^EJusdcm Africani quinque de Chronographia libri
successeur. Cependant Sozomène dit que les Ro- accuratissime compositi ad nos etiam pervenerunt. In
mains lui donnèrent le nom de Nicople aussitôt quibus se Âlexandriam profecium esse testatur ob
92 HISTOIRE GËNÉRALH DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
saire. On croit '
qu'il fit doux étlitions de sa leurs, il marquer en quel ' temps
avait soin de
Chronologie, et qu'il finit la première à la ces hommes avaient fleuri. Quoiqu'il compte
CCXLVII olympiade, durant laquolloCaracalla lesannées selon le calcul des Hébreux, il ne
commença à rt'gnor en l'an 21 1 dix ans avant , laisse pasde rapporter les supputations des
la seconde édition. Celle que Photius avait en Grecs et en fait ressortir l'accord ou la diffé-
main finissait * au rèi^ne de Macrin, en l'an rence. Il cite la plupart
des historiens grecs,
'
(lu monde 5723. Si l'exemplaire dont il s'est et il soutient qu'ils ont tous écrit après" Moïse.
servi ji'était point défectueux, il faudra dire, Selon quoique la plupart d'entre eux aient
lui,
avec Scaligor », qu'Africani terminait effecti- été assez exacts dans leur supputation », les
vement sa Chronique en l'an du monde 5723; chrétiens qui ont écrit depuis sur la même
mais cette année du monde est, selon la sup- matière, l'ont beaucoup mi<îux traitée. Eusèbe
putation d'Africain, l'an 221 de Jésus-Clirist, et saint Jérôme*" citent un passage d'Africain,
et, selon l'ère vulgaire, la troisième d'iïé- tiré du livre V de sa Chronique, sur les soixante-
liogabale, successeur delNIacrin, puisqu'il y * dix semaines de Daniel; il y commençait ces
parlait du consulat de Gratus et de Séleucus, septante semaines au temps de Néhémie, et
qui tombe en 221 la vingtième année du règne d'Artaxercès,
Idée à» sn
CtironologW:
-4. On
par les fragments que les anciens
voit, la troisième delà LXXX-^ olympiade, et les finis-
nous ont conservés de cette Chronologie, qu'A- sait en la seizième année de l'empire de Tibère,
fricain passait légèrement sur tous les faits
' la seconde de la CCII* olympiade, c'est-à-dire
arrivés avant la I'" olympiade, regardant en l'an 30 de Jésus-Christ, selon l'ère vulgaire,
à peu près comme fabuleux tout ce que l'on époque de la mort de Jésus-Christ, comme
en dit. Il s'arrêtait même assez peu aux grands plusieurs Pères l'ont" cru. L'auteur de la Chro-
événements dont les historiens grecs font nique d'Alexandrie cite '• J. Africain pour les
mention, afin de pouvoir entrer dans un plus tempsdes premiers patriarches avantle déluge.
grand détail sur ce qui était arrivé dans la Il est encore cité par le" Vénérable Bède, et
république des Hébreux. Pourtant, s'il i^encon- saint Basile '* marque que, dans son livre V,
trait quelques personnages illustres, soit chez il rendait gloire au Père, au Fils et au Saint-
les Grecs, soit parmi les Perses, et même ail- Esprit. Quelques critiques ont " avancé que
maximam omnium famam atque existimaiionem de itemque Castor et Thallus, qui Syriacas persecuti sunt,
Ileracla. Euseb., lil). YI, cap. 31. quique gentium omnium hisforiam in bibliothecam
1 Scaligor, in Notis ad Eusebii Chronic, pag. 4 ; suam inclusit, Diodorus et Alexander Polyhistor me-
Tillemont, loin. 111 Hist. eccles., pag. 255. * Pho- — moriœ piodiderunt : quorum etiam e 7iostris prœtcrea
tius, ubi supra. nonnulli diiigentius quam Attici omnes accuratiusque
' ad Eusebii Chronic, pag. 232.
Scaliger, in Notis memineve. Idem, ibid. Tatieu avait traité fort exac-
*Cola paraît par Georges Syncelle, qui cite un tement de l'antiquité de Moïse et des Juifs, selon la
endroit d'Africain où il parlait des consuls Gratus remarque de Clément d'Alexandrie, lib. I Stromat.,
et Séieucus. Georg. Syncell., in Chronogr., pag. 212. pag. 320. Cet auteur écrivit lui-même sur cette ma-
* Quamoirem fahulosis illis </uce ad primam usque tière, et traita plusieurs points de chronologie dans
olympiadem fama cœteris, et honwium opinione prœs- ses écrits.
titerint, brevUer cursimque libatis, quœ postea cojiti- *•>
Euseb., lib. VIII Demonstrat. evangel., cap. 2,
geriiit eu, si modo iiisignia videbutituv, iia cum grœ- pag. 389; Hieronym., in cap. ix Daniel.
cis hebrœa contexam, ut grœcis obiter dumtaxat pers- 11 Clem. Alexaud., lib. I Strom.; ïertull., lib. cent.
trictis, historici more fusius hebrœa pertexam. Afri- Judœos. cap. 8; Origen., Tract. 35 in Matth.
can., apud Euseb., lib. X Prœparat. evang., cap. 10. 1* Chronic. Alexand., pag. 44.
Quoties /ieb7-aicam historiam, quœ cum grœca ali- 1* Deda, in Chronic, tom. 11 Oper.,pag. 111 et 112;
qua iempore conveniet, tradandam suscepero, toties in et tom. m, pag 492. On lit en cet endroit un grand
ea constanler hœrens, detractis, ubi res tulerit, adjec- éloge d'Africain.
tisve nonnullis, quinam aut Grœcorum,aut Persarum, 1' j1< nec Africanum historicum talis glorificandi
aut populi cujusvis alterius, ejusdem tempore florue- forma prœteriit. Si quidem palam est in quinta de
rit, aperiam. Idem, ibid. temporibus epitorne, et ipjsum in hune loqui modum :
' Entre autres, il cite Déroso, Thallus, Castor, Po- nos vero qui et illoi'um verborum mensuram dicimus,
lybe, Pblégon, Ilellanicus, Pbilocore, Alexandre Po- non ignoramus fidei gratiam : gratias agimus ei qui
lyhistor, Diodore de Sicile, Hérodote, etc. prœbet nostris Patribus omnium salvatorem Dominum
* Cœterum hic observandum etiam est quidquid paulo nostrum Jesum Christum, oui est gloria et ma/estas
rarius ob vetustatem Grœci fabulantur, in omne per cum Sancto SpiiHtu in sœcula. Basil., lib. de Spiritu
se posterius inveniri; diluvia, incendia, Prometheum... Sancto, cap. 29. Ce passage pouvait être la conclu-
res Trojanas, Uerculis certamina, Heraclidarum re- sion de la Chronique d'Africain.
ditum, lonum migraiioncm, et objmpiadas. Idem. " Pearsou., in Dissertât. posthum.,i*ag. 98, 99, 100
* Hœc enim Hellanicus et Phi!ocorus,qui res Atdcas, et 101.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE III. - JULES AFRICAIN. 93
la Chronique d'Africain avait été traduite en 5. Dans le voyage qu'Origène fit en*° Pales- Sa Lettre
ù Origèiie
latinavantcelled'Euscbe ; qu'on y avait ajouté tine vers l'an 228, il se trouva engagé dans au Eiijet (Je
riiistoue de
les consuls, et qu'à diverses reprises on l'a- une dispute sur les matières de religion, avec Siisanue.
se donner la peine de les corriger. Ce que nous remarqué qu'Origène y avait employé l'auto-
pouvons dire, c'est qu'Eusèbe le cite plusieurs ritéde l'histoire de Susanne, il ne voulut pas,
fois, nommément dans sa Chronique, et qu'il dans le moment, professer un autre sentiment
parait avoir eu pour maxime % dans ses écrits, que lui sur ce fait particulier, dans la crainte
de profiter des veilles de ceux qui ont traité de faire tort à la vérité qu'il défendait; mais,
les mêmes matières avant lui, mais en leur quelque temps après, il lui écrivit une Lettre
conservant toujours l'honneur de leurs décou- où il prétendait montrer, par diverses raisons,
vertes. C'est sur le témoignage de J. Africain la supposition de cette histoire. Nous avons
qu'il ' rapporte que le pavillon dont se ser- encore cette Lettre imprimée en grec et en
vait Jacob, en faisant paître ses troupeaux, latin, à Bâle, en 1674, par les soins de Rodol-
s'était conservé à Edesse jusqu'au temps d'An- phe Wetstein. Quoiqu'elle soit fort courte, on
tonin, sous lequel il fut brûlé par le tonnerre. ne laisse pas d'y admirer un grand savoir et
C'est encore sur la foi de cet auteur qu'il af- surtout une grande modération. En effet, mal-
firme que l'arbre de lérébinthe, sous lequel
* gré son âge, qui le rendait l'ainé d'Origène,
le même Jacob enterra les idoles de Laban, il en des termes fort respectueux
lui parle
son beau-père, se voyait encore de son temps et le conjure de répondre pour l'instruire.
et était en grande vénération dans le pays, à Origône lui répondit, en effet, par une Lettre
cause de ce souvenir. Il cite ses propres paro- dont l'analyse fera voir le contenu de celle
les pour montrer qu'Eschyle, fils d'Agames-
' qu'Africain lui avait écrite. Eusèbe' ^ et saint
tor, était roid'Athènes dans le même temps Jérôme en ont parlé avec éloge, aussi bien
que Joatlian régnait à Jérusalem, et pour mar- que Photius.
quer le règne du saint roi ^ Abgare dans Edesse 6. Ils font" encore mention d'une autre
Enfin Eusèbe le cite encore nommément dans Lettre qu'Africain écrivitàun chrétien nommé
son Histoire ' ecclésiastique et dans ses livres Aristide **, pour accorder la différence qui
de la Préparation ^
* et de la Démonstration parait être dans la généalogie de Jésus-Christ,
évangélique; de sorte que c'est à lui principale- entre saint Luc et saint Matthieu. Eusèbe rap-
ment que nous sommes redevables du peu qui porte's cet endroit tout entier, et saint Augus-
nous reste de la Chronologie de Jules Africain. tin approuve le sentiment qu'Africain y éta-
cain, excepté quelques endroits qu'Eusèbe a changés. cette Lettre. Africain y pose la question du sacerdoce
Mais on y en trouve qui ne sont ni de l'un ni de et de la royauté en Jésus-Christ, d'après sa naissance
l'autre, et qui ont été ajoutés depuis leur temps. temporelle; il repousse avec indignation la prétendue
* Quœ sane verba ut reddam planiora, ptdchre mihi invention du sacerdoce dans la famille du Sauveur
officio functus esse videbor, si commentationem in et prouve que Jésus-Christ était vraiment de l'ordre
ejusmodi locos ejus viri, qui ante nos idem studium de Lévi. Le cardinal Mal a trouvé dans les manus-
contulerit, non occuliavero ; sed eam quoque apposuero crits du Vatican un autre fragment de cette Lettre
ut aocommodata iis qui lecturi sint hcec. Pulchre enim et l'a publié dans le tom. IV de sa Bibliothèque nou-
dici solet, quœ amicorum sunt, ea esse communia ; et velle, page 231. {L'éditeur.)
15 Euseb., lib. \Hist. ecc/es., cap. 7. Comme ce pas-
quia uti quidem quasi communibus convenit iis quœ
alii probe dixerint, sed itu ut agnoscamus auctores, sage est considérable et qu'il ne se trouve guère que
Neque aut sua sobole jmtres, aut eos qui primi conse- dans Eusèbe , nous le transcrirons ici pour l'uti-
verint propriis seminibus defraudejnus. Euseb., lib.VIII lité des lecteurs. Sed quoniam Matthœus et Lucas in
Demonsirat. evang., pag. 389. Evangeliorum libris, Christi genus ac stirpem varie
3 Euseb., Hist. Grœca in Chron., pag. 22. * Ibid. — nobis tradiderunt, et plurimum interse dissentire vulgo
— " Euseb., in Chron., pag. 25 et 114. * Euseb., — existimantur , adeo ut singuli fidelium, ob veritatis
lib. I Hist., cap. 18. —
Idem, lib. X.
'' ^ prœpar. — ignorationem, varias eorum locorum explicationes cer-
evang., cap. 10. —
^ Idem, lib. VIII Demonstr. evang., tatim excogifaverint : de his traditionem, quœ ad nos
cap. 2, pag. 89. —
i» Euseb., lib. VI Hist., cap. 23. usque deducta est, proponamus, quam is de quo paulo
— *' Origen., Epist. ad African., pag. 220. ante diximus, Africanus in Epistola ad Aristidem de
>* Euseb., lib. VI, cap. 31; Hieron., in Catalogo, consensu Evangeliorum in stirpe Christi nai'randa
94 lIlSrOIUK GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
but. Autant qu'on en peut juger, le point de même femme nommée Estha. Matban en eut
la tlilliculté proposée par Aristide consistait Jacob, et Melcbi en eut Héli. Ainsi Jacob et
à savoir pouniuoi l'Évangile semble donner Héli,(]uoi(jue frères utérins,étaient néanmoins
deux pères à saint Josepli, Jacob selon saint issus de dilférentes familles, l'un de la famille
MuUbii'U, et lléli selon saint Luc. Pour y ré- de Natban, l'autre de la famille de Salomon,
pondre. Africain pose d'abord en principe que qui se réunissaient toutefois en celle de David,
la généalogie des Israélites se fait quelquefois père de Natbau et de Salomon. Héli se maria;
selon l'ordre de la nature, et quelquefois selon mais, étant mort sans enfants, Jacob épousa
l'ordre de la loi. Elle est faite selon l'ordre sa veuve en vertu de la de Moise, et de ce
loi
de la nature, quand elle ne contient que la mariage viut Josepb, qui, par ce moyen, était
suite naturelle et ordinaire des enfants qui fds de Jacob selon la nature et d'Héli selon la
succèdent à leurs pères; et selon l'ordre de la loi. Africain fonde son explication sur le té-
loi, quand c'est un frère qui épouse sa belle- moignage des parents du Sauveur selon la
sœur, pour conserver le nom de son frère cbair, qui, soit par le dessein de faire voir
mort sans enfants. 11 montre ensuite que, dans l'excellence de leur extraction, ou par le seul
la généalogie du Sauveur, lescvangélistes ont désir de nous la conserver, en avaient fait
suivi ces deux ordres diflérents. Puis, venant dresser des mémoires. On voit, par le passage
au point de la dilliculté, il l'explique en cette tiré de la Lettre d'Africain, que les noms de
par Natban, épousèrent, l'un après l'autre, une inter^n'ète soutient que ce n'est que depuis
ut mortui nomen nullis unquam obliterandum sœculis fatnilia editus esset, ut antea diximus, uxorem eam
pemianeret. Quoniam igitur eorum qui inter majores sortitus, Heli filium suscepit. Hoc modo Jacob et Heli,
Christi recementur, alii naturali jure, ut filii, paren- licet divo'so gene/'e prognatos, uterinos fratres i'epe-
tibus successerunt, nonnulli vero cum ab aliis procréait riemus. Quoniam aller, Jacob scilicet, cum frater ip-
essent, aliis cdscripti sunt : ideo utrorumque mentio sius Heli sine liberis decessisset, viduam ejus conjugeni
fada est,tam eorum qui vere patres, quam illorum sibi arcipiens, iet'tiumex eaJosephu7n genuit, naturali
qui quasi patres fuerunt. Ita fit ut neutru7n Evunge- quidem ratiotie filium suum. UticIc etiam scriptum est:
liorum falsum sit, cum alterum naturam, alferum Jacob autem gonuit Joseph. Sed secundum legem filius
legem in majoribus enumerandis sequatur. Nam fami- erut Heli; quippe cum ejus seme7i Jacobus frater sus-
lice quce cum a Salomone. tum a Nathan deducuntur, citavisset; pi'oinde nec generis per eum dedacta séries,
ideo inter se permixtœ sunt, partim reparatione no- vana ac futilis deprehe7idelur, qua77i Mattliœus quidem
minis eorum qui sine proie decessissent, p>artim secun- recensens: Jacob, inquit, genuit Joseph. Lucas vero e
dis nuptiis, partim etiam seminis suscitatione, ut iidem contrario a filiis ad patres ascnndtns : Jesu?, inquit,
homines diversos patres habuissemerito credanfur ; hos qui erat, ut putabatur [hoc enim diserte uddit), filius
quidem fictitios,illosautem naturales. Quo fit ut Evan- Joseph, qui fuit Heli, qui fuit Melchi. Neque enim po-
gplii ulriusjue narratio absoluie verissima, varia qui- terat disertius exprimi fictitia illa generaruli ratio,
dem linearum contextu, sed accurale ad Josephum us- quœ ex lege prosecuta est. Ideo in hujusmodi liberorum
que descendat. Yerum ut id quod diximus, clarius fiât, gene7-atior>e, verbum illud, genuit, nd finem usque i-e-
utriusque stirpis seriem ptroponemus. Igitur si a Davide ticuit, cum ad ipsum usque Adamum. qui fuit Dei,
perSalomonem gênerai iones cum Matt/iœo numeraveris, gradatim ascendendo, totius generis se/iem perduxis-
tertius,a fmereperietur Matban, qui genuit Jacob, pa- set...n in fine autem Epistolœ hoc addit : « Mathan a Sa-
trem Josepbi. Quod si cum Luca a Nathan, David filio, lomone genus ducens, Jacobum genuit. Mortuo deirule
numeres, tertius itidem a fine reperietur Melchi, cu- Muthane, Melchi oriuridus ex Natha7iis stiipe, ex eadem
jus fîlius fuitUeli, paterJosephi. Sic enim ait: Joseph, mulie7'e ge7iuit Heli. Quocirca Jacobus et Heli fratres
qui qui fuit Melchi. Cum igitur velut scopus
fuit Ileli, erant uterini. Heli deirule sine liberis defu?icfo, Jaco-
nobis propositus sit Josephus, explicandum 7iobis est bus ei semen suscitavit, Josepho ge7itto, qui natura
quomodo uterque ],ater illiui esse dicatur, ta7n Jacob, quidem Jacobi, lege autem Heli filius fuit. Sic utei'que
qui ex Salomone, quam Heli, qui ex Nathan origine7n Josephi pater recte dicitur. » Hœc Africanus. Apud
ducit; ac prœtcrca quomodo duo isti, Jacob et Ileli, fra- Euscb., lib. I Hist., cap. 7.
tres fuerint ; dei7ide vero qua ratione eorum patres,
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE III. — JULES AFRICAIN. 95
lin/'S Affi-
le iV^ siècle qu'ils ont été ajoutés à cet en- sainte Sympliorose, martyre sous Adrien, qui caiu.
h.
droit de saint Luc. Cependant le célèbre Mille ont " en tète le nom de Jules Africain, ce qui
ne cite aucun exemplaire manuscrit où il ne vient apparemment de ce qu'il avait inséré
les ait trouvés; et ils se lisent également dans ces Actes dans son Histoire des temps, d'où
'
tous les imprimés. Africain ajoute que Joseph les copistesont pris occasion de les lui attri-
étant ainsi fils de Jacob selon la nature, saint buer, d'autant plus naturellement qu'ils n'en
Matthieujà cause de cela, dit : « Jacob engendra connaissaient pas le véritable auteur. Tritliè-
Joseph, au lieu que saint Luc dit simplement
» me * lui attribue encore un livre de la sainte
que Joseph fut fils d'Héli,))et non qu'IIéli en-
(t Trinité, un de la Circoncision, un d'Attale, un
gendra Joseph, parce que celui-ci n'était fils de la Puque et un autre du Sabbat. Mais, outre
d'Héli que selon l'ordre de la loi. Il est encore qu'aucun des anciens n'a parlé de ces ouvra-
à remarquer que, du temps d'Africain, on te- ges en faisant le catalogue de ceux d'Africain,
nait pour certain que Hérode, fils d'Antipater, il est certain encore, par le * témoignage de
après avoir été élevé sur le trône de Judée saint Jérôme, qu'ils sont de Novatien, prêtre
par un arrêt du Sénat, fit brûleries généalo- de l'Église romaine.
gies des Juifs et des Prosélytes et autres mo- 8. Africain, encore engagé dans les supers- Il est an-
teiu' (les li-
numents de famille qui se trouvaient dans les titions païennes, composa un ouvrage qu'Eu-
('-
vres qui
taient iuti-
archives publiques, se tlattant du vain espoir sèbe et Photius « disent avoir eu pour titre: tiili'S
Ces te».
: Lcg
de pouvoir passer pour issu d'une ancienne Les Gestes. Il était divisé en quatorze livres, et
noblesse, lorsque les Juifs n'auraient plus de Georges Syncelle, qui en compte dix-neuf,
''
preuve pour justifier leur origine. Quelques- ajoute qu'ils contenaient diverses remarques
uns, néanmoins, eurent soin de garder les sur la médecine, sur la physique, sur l'agri-
mémoires qu'ils avaient dressés eux-mêmes culture, sur les sucs des plantes, sur la chimie.
ou transcrits sur les archives; et on cite, entre Suidas ^ fait aussi mention des Gestes de J.
tous les autres, ceux qui étaient unis de parenté Africain, et dit qu'il y enseignait à guérir les
avec le Sauveur. La raison qui poussa Hérode maladies par des paroles par des enchanle- ,
à brûler ainsi tous les monuments publics meuts, par certains caractères et par d'autres
qui regardaient les familles, c'est qu'il était moyens extraordinaires. Mais il paraît que
issu d'une basse extraction. Son père, Antipa- Georges Syncelle s'est visiblement trompé en
ter, était né à Ascalon, d'où, ayant été enlevé disant que l'auteur adressa cet ouvrage à
fort jeune par nue troupe de voleurs idu- ' l'empereur Alexandre, puisqu'à l'époque où
méens, il fut élevé parmi eux et dans leurs ce prince arriva à l'empire, eu 222, Africain
maximes, c'est-à-dire selon la loi de Moise. était déjà chrétien depuis longtemps. On» dit
Il entra depuis dans l'amitié d'Hyrcan, grand- qu'il y a dans la bibliothèque du roi de France
prêtre des Juifs, qui l'envoya en ambassade un livre sous le nom de Gestes, attribué à Afri-
vers Pompée, et lui donna ensuite le gouver- cain et cité ainsi par Politien, mais absolu-
nement de la Palestine. ment différent de celui dont parle Photius.
7. 11 y a quelques manuscrits des Actes de 9. Il parait qu'Africain savait l'hébreu'" et .Tiifrenipnt
des érrits
d'Afiicain.
• Ces peuples, que l'on croit être descendus d'E- amafor... scripsit magnœ utilitatis pliira opuscula, de
dom ou d'Esaii, tils d'Isaac, étaient demeurés indé- quibus feruntur subjecta : Chronicorum, lib. V; de
pendants jusqu'au temps de David, qui les assujettit; Sancta Trinitatc, lib. I; de Circumcisione lib. I; de ,
mais, s'étant soustraits à l'obéissance des rois de Juda, Attalo, lib. I; de Pascha, lib. I; de Sabbato,\ih. l, etc.;
Jean Hyrcan les assujettit de nouveau, les obligea à Trithem., de Viris illustribus, cap. 38.
recevoir la circoncision et à se soumettre aux au- ' Novationus, Romance urbis presbyte?'... sa'ipsit de
tres observances de la loi de Moïse. Joseph., lib. XIII Pascha, de Sabbato, de Circumcisione, de Sacerdoie,
Antiquit., cap. 17. {seu de S. Attalo) et de Trinitate grande volumen.
^ Beutce Sijmphorosœ filiorumque ejus martyrii Acta, Hieronym., in Caialogo, cap. 70.
quœ hic exhibemus in manmcriplis codicibm, Julio ^ Claruit iisdem temporibus Africanus, qui libros
Africano, celeberrimo scriptori, attribuuntur. Ruinarl, KeaTtov titulo inscriptos composuit... Hujm exslat Epis-
Acta sincer., pag. 23, edit. 1713. tola ad Origenem qua historiam Susannœ,
scvipta, in
3 Africain, ayant été député à Héliogabale, qui était quœ in Danielis libro legitur, spuriam esse suspicaiur.
alors à Rome, pouvait s'y être informé aisément des Euscb., lib. VI, cap. 51. Photius dit la même chose,
principaux martyrs d'Italie et en avoir ensuite ia- Cod. 3'k
Ëéré les Actes dans sa Chronologie. ' Syncell., in Chronogr., pag. 359. — 8 Suidas, in
* Julius Africanus, vir undecumque doctissimus, African., pag. 512. — ^ Dupin, Bibliotft. ecclesiast.,
philosophas, historiographus et theologus insignis ac pag. 310. — 19 African., Epist, de Susanna, pag. 221.
dioinarum Scripturarum et librorum ardentissimus
96 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
qu'il éUùl très-versé * dans la scienco des di- aussi, avec version latine et notes. Le Père
vines Écritures. On a même quelque lieu de Cailleau a imprimé la traduction latine de la
croire qu'il eu avait expliqué plusieurs livres, Lettre à Origène dans les œuvres de ce Père.
puisque * Socrate le met au nombre des plus L'édition la plus complète et la plus récente est
célèbres interprètes, avec Clément et Origène. celle de M. Migne. La Lettre à Origène, avec
Ses autres écrits ont été loués comme éj^ale- la réponse de celui-ci, se trouve dans les œu-
ment pleins de 'l'érudition du siècle, des beau- vres d'Origène, tome YIU de l'édition latine
tés de la philosophie et de la science des sain- des Pères grecs; et les autres fragments se
tes Écritures. On * ajoute qu'ils ont été rc(;us trouvent dans le tome VII de la même édi-
de tout le monde
sans aucune contradiction. tion. La Lettre à Aristide y est donnée en en-
ÉJitioi
[10. Les deux Lettres furent d'abord publiées tier, d'après Galland et d'après le cardinal
par l'espagnol Léon Casirius, avec le Commen- Mai; on y trouve aussi la passion de S"' Sym-
taire sur Isaïe, en 1570;etpuis,parGénébrard, phorose et de ses sept fils, d'après Galland;
parmi les œuvres d'Origène ces deux éditions : le récit des choses qui arrivèrent en Perse
n'ont que le latin. Le texte grec parut, pour à la naissance de Jésus-Christ, d'après J.-C.
la première fois, à Ausbourg, eu 100:2, par les Aretin.
soins de Ilœschel, et à Bàle, en 107i, revu et Lesfragments des Gestes ont été insérés dans
augmenté par II. AVctstein. La meilleure édi- les MatJiematici veteres, Paiis 1G9.'J, in-fol., et
tion de la première Lettre est celle de Larue, réimprimés dans huitième volume de Meur-
le
Oper. Orig., tom. I. Galland a rassemblé dans sius, Florence 1740. Ils ont été traduits en
sa Bibliothèque tous les fragments qui nous français par Guischardi, dans les Mémoiresmi-
restent de Jules Africain, tom. II. Les Reli- Romains, 1758,
litaires des Grecs et des in-i",
quiœ sacrœ de Routh, tom. II, le contiennent et à Berliu, en 1774, en 4 vol. in-8°.]
CHAPITUE IV.
Profes«ion
d'Amnioue.
1 . Ammone *, surnommé ^ Saccas ou Porte- habitants d'un quartier d'Alexandrie appelé
Ses études.
Sac, parceque son premier emploi avait été Bruchium ", où se tenaient ordinairement l'a-
Sa maniè-
de transporter du blé ou d'autres marchan- cadémie et l'assemblée des gens de lettres.
re
gQKr.
d'eiiâci-
dises dans des sacs, s'étant depuis ' appliqué Il étaitné, sous l'empire de Commode, de
à la philosophie, devint un des plus célèbres parents ® chrétiens, qui l'avaient élevé dans
*Et sane miratus sum, qui tu multum versatus in On écrit ordinairement Ammonius. {L'éditeur.)
exam inibiis et meditationibus Scripturœ, non observaris 6 Ammian.-Marceli., lilj. XXII, pag. 484.
propfwtm, prophelarum sermonibus fere iisdem ver- ' Hocautem régnante Ammonius, cognO'
{C'om7nodo),
lis usos esse. Orïgen., Epist. ad African., pag. 244. mento Saccas, quibus frumenta cir-
relictis saccis in
2 Sed et Clementem, et Africanum utqne Origenem, cumferctjat, philosophicœ vitœ se iradidit. IIujui audi-
viros omni génère doctrinœ cxcultos, prorsus aspernu- torem fuisse tradunt et Origenem nostrum , et Ploti-
batur {Aetius). Socrat., lib. lî, cap. 35. num hune, etc. Tlieodoret., serm. 6 de J'rovident.Dei,
* Extant et Julii Africani libri et Theodori... tom. IV, pag. 573.
qui omnes in tantum philosopfiorum doctrinis atque 8 Sed Alexandria ipsa non sensim, ut aliœ urbes, sed
scntentiis suos resarciunt libros, ut nescias quid in il- inter initia prima aucta per spatiosos ambitus, intcr-
lis primum adrnirari debeas, eruditiouem sœculi, an nisque seditionibus diu aspere fatigata : ad ullimum,
tcientiam Scripturarum. Ilieronym., Epist. 83, quœest multispcst annis, Aureliano imperium agerdCjCivllibus
ad Magnum. jurgiis ad certamina interneciva,prolapsis diruptisque
* Julius Africanus, cujus vcstigium omnes Australes mœnibus, amisit regionum maximam partem, quœ Dru-
orientales diligenter unanimiterque in Danielis hebdo- chion appellabatur, diulurnum prcEsiantium hominum
madibus investigant, universa temporum spatia, cum domicilium. Unde Aristarchus... et Saccas Ammonius,
omni peritia rigidoque sermone construxit, et nulla Ptotinimngisfer. Ammiau.-Marcell.,lib. XXII, pag. 484.
omnium quœscripta sunt per eum,in totoorbe unquaui — » Euscb., lib. VI, Ilist., cap. 19.
data est con/rac/i'c^o. Anonyii)., apudDedam., tom. III,
pag. 492.
[îll« SIÈCLE.] CHAPITRE lY. — AMMONE SACCÀS. 97
la clarté au milieu des ténèbres « Car cet : de ses livres qui avait pour titre De la Con- :
homme admirable ayant aperçu, dit-il, par formité de Moïse avec Jésus. Il en avait com-
une inspiration divine, la lumière de la véri- posé beaucoup d'autres, mais il n'en est venu
table philosophie, se mit au-dessus de toutes qu'un seul jusqu'à nous; c'est une * Concorde
les opinions communes qui avaient rendu des quatre Évangiles. Elle fut imprimée pour
cette science si difforme et si défigurée, pé- la première fois à Ausbourg, en 1 523 , de la
nétra dans les véritables sentiments de Pla- traduction d'Ottmarus Luscinius, et depuis a
ton etd'Aristote, en montra la conformité au été réimprimée plusieurs fois. On la trouve
moins dans les points importants, et, par ce au commencement du tome VII de la Bi-
moyen, enseigna à ses disciples une philoso- bliothèque Pères de l'édition de Paris,
des
phie toute paisible, exempte de ces disputes et dans
tome II de celle de Lyon. Victor
le
qui ne venaient que des folles imaginations de Capoue ^, qui vivait vers le milieu du VI«
des nouveaux auteurs. » siècle, attribue cette Concorde à Tatien ; mais
disci-
Il
2 Quoiqu'il tâchât de concilier Platon
. on convient aujourd'hui qu'il s'est trompé>
avec Aristote, néanmoins lui et ses disciples Car Tatien, selon la remarque de Théodoret,
ont toujours passé pour platoniciens. Les avait retranché de sa Concorde les généalogies
principaux étaient Origène Adamance, saint et tout ce qui prouvait que Jésus-Christ était
Hiéroclès,qui fut ensuite évèque d'Alexandrie; fils de David : or, dans celle-ci, Jésus-Christ
Plotin, un Origène différent de celui que est nommé plusieurs fois
de David, et fils
l'on surnomme Adamance; Hérennius, le cé- l'auteur y cite quantité de passages opposés
lèbre Longin et Olympe d'Alexandrie. Il y a aux autres erreurs de Tatien. D'ailleurs Za-
lieu de croire qu'en instruisant ses disciples charie «, évèque de Chrysople, qui a fait un
dans la philosophie de Platon, il s'efforçait de Commentaire sur cette Concorde, il y a plus
1 On croit qu'il commetiça à professer la pliilôso- titulo non invenirem nomen auctoris : diligenter in-
phie aussitôt après persécution de Sévère, et qu'il
la quirens quis gesfa vel dicta Domini et Salvatoris nos-
continua au moins jusqu'en 243. Tillemont, toni. III trij evangelica lectione discreta in ordinem quo se ,
ïlist. Eccles., pag. 280. consequi videbantur, non minimo studii labore redege-
2 Multi Plalonici et Aristotelici suos inter se prœrep- rit ; reperi Ammonium, quemdam Alexandrinum, qui
iores aliquandocontendereimpulerunt, allato a singulis canonum quoque Evangelii fertur inventor, Matthœi
in médium quid cuiquemeditatio videretur, et eo usqne Evangelio reliquorum trium excepta junxissc; ac in
audaciœ et contentionis proctsscrunt, ut et scripta prœ- unam seriem Evangelium nexuissc ; sicut Eusebius
ceptorum suorumdepravare7it,quo magis viros inter se episcopus Carpiano cuidam scribens in prœfatione edi-
puanantes exhibèrent ; atque ea perturbatio perduravif, tionis suœ, qua canones memorati Evangelii edidit
philosophicis exercitaiionibus illapsa, usque ad divinum supradicti viri imitalus studium, refert in hune mo-
Ammonium. Hic enim primus œstu quodam raptus ad dum : Ammonius quidam Alexandrinus muUum ut
philosophiœ veritatem,multorumque opiniones qui ma- arbitror, laboris et studii impendens, unum ex quatuor
gnum dedecusphilosophiœafferrent,contemnens. utram- nobis reliquit Evangelium. Ex historia quoque eius
que sectam probe calluit, et in concordiam adduxit,et comperi, quod Tatianus, vir eruditissimus, unum ex
a contentionibus liberam philosophiam tradidit omnibus quatuor compaginaverit Evangelium, cui titulum dia-
suis auditoribus et maxime doctissimis suis œqualibus, pente imposuit... arbitror propterea non Ammonii sed
Plotino et Origeni, et successoribus. Hierocles, de Pro- hujus Tatiani esse editionem memorati voluminis
videntia ; apud Photium, Cod. 241, pag. 1382; Tille- quod Ammonius Matthœi fertur relationi Evnngelista-
mont, tom. III Hist. Ecoles.; Euseb., pag. 279 et 280. rum reliquorum rclatione discrètes annexuisse sermo-
* Euseb., lib. VI Hist., cap. 19: Hieronym., in Ca- nes : hic vero sancti Lucœ principia sunt assumpta
talogo, cap. 55. licet ex maxima parte Evangelii sancii MattJuei reli-
* Elle est marquée par Eusèbe et saint Jérôme, quorum trium dicta conjunxerit, ut jure ambigi pos-
dans les endroits que nous venons de citer. sit, utrum Ammonii an Tatiani inventio ejus ope/'is
s Voici ses paroles et les raisons qu'il avait de le debeat œstimari. Victor Capuanus, Prœfat. in Harmo-
croire ainsi : Dum fortuito in manus meas incideret nium Ammon.
unum ex quatuor Evangelium, compositum, et absente « Apud Labbœum, tom. I Script. Eccles., pag. 57.
II.
08 HISTOIRE Cr^NERALR DES AUTEURS hXCLI^SI ASTIQUES.
de cinq cents ansj'altribiicà Animonc û'Mc- férent d'Ammone Saccas»; celui-ci,philosophe
xandi'ic. Violor oljjcclc que la Concorde d'Am- platonicien et chrétien, n'aurait osé dire qu'A-
moue ivdiiisait les autres cvang'Jlistcs à l'or- rislofe a été '',dans la philosophie, au-delà de
dre de saint Matthieu, tandis que celle-ri com- ce que peuvent les hommes; qu'il n'a rien traité
mence par saint Luc. Mais il ne dit pas de sans le mettre dans sa perfection; qu'il ne
quelle source il tire ce qu'il rapporte touchant lui manqué non plus pour la théologie,
a rien
la Concorde d'Ammone, et, en un cn-lroit, il en connu ce qui est au-dessus du monde
et qu'il a
parle seulement comme d'une opinion com- et ce qui est dans le monde. Il vaut donc
mune, mais * incertaine; et de plus il recon- mieux attribuer celte Vie à un autre Ammone
naît lui-même que celle que nous avons com- d'Alexandrie, comme Saccas, païen et fort
mence par saint Luc, à cause de l'ordre de la attaché ù la philosophie d 'Aristote. Cet Am-
narration qui le demandait ainsi; cependant mone vivait à la lin du V"" siècle. Longin '
elle rapporte prescjne tous les autres Evangé- cite d'un auteur du même nom des poésies et
listcs à saint Matthieu, enjoignant au texte de des déclamations; mais, en ajoutant que cet
celui-ci les extraits des trois autres. Ensuite, Ammone était péripatélicien, il marque clai-
pour distinguer dans cette Concorde ce qui ap- rement qu'il parlait d'un autre Ammone, dif-
partient à chaque Evangéliste, et ce qui est dit férent de Saccas.
par un ou par })lusieurs, Ammone - inventa 5. Les écrits d'Ammone lui méritèrent l'es- •'"^«'r
qn on a
ce que saint Jérôme appelle des canons évan- lime des plus habiles. Eusèbe témoigne que, »
Jf^''"'^"'
gcliques, qui depuis ont été imités par Eu- de son temps, ils étaient entre les mains de
sèbe. Victor de Capoue ^ parle de ces canons. ceux qui aimaient les belles choses. Saint Jé-
Mais les copistes les ont négligés, et nous n'en rôme ^ loue, en particulier, son Trailé de la
trouvons plus qu'au commencement de quel- Conformité de Moïse avec Jésus-Christ, comme
ques Bibles grecques et latines. On remarque * une pièce élégante. Il l'appelle un homme
que la Concorde d 'Ammone est toute compo- éloquent et un habile philosophe. Longin '°,
sée du texte même des évangélistos, sans y son disciple, disait que lui et un autre sur-
ajouter ni en omettre un seul mot. passaient de beaucoup en intelligence ceux
^- ^^5 deux Vies d'Aristote que l'on a mises qu'il avait connus. Enfin Porphyre" le regar-
criiB*'atut
*"" ^ ^^ t^'te de ses ouvrages, il comme
mon".* y en a une qui dait le plus savant philosophe de son
porte le nom d'Ammono, que Jousius croit siècle. II est vrai qu'après l'avoir loué si ma-
être le même que celui dont nous parlons. gnifiquement, il le noircit par la plus insigne
Mais les éloges outrés que Fauteur de cette calomnie, en disant de lui '*
que, dès le mo-
Vie donne à Aristote, font voir qu'il était dif- ment qu'il commença à avoir quelque teinture
' Fertur relationi Evangelistarum annexuisse. Vic- periuntur : atque hcec a nabis dicta sint ad convincen-
tor Capuanus, ubi supra. dam mendacissirni hominis(Porphyrii)calumniam. Eu-
* Ammonius... Evancjdicos canones excogitavit,quos seb., lib. VI Hist., cap. 19.
postea secutus est Eusebius Cœsariensis. Hieronym., 9 Ammonius, vir disertus et valde eruditus in jihilo-
in Catalogo, cap. 55. sophio, eodem tempore Alexandriœ clarus habitus est:
' Vicloi'Cap., ubi supra. —
* Baron., ad ann. 174, qui inter multa ingenii sui et prœclara monumenta,
num. 8. — 5 Jonsius, cap. 13, pag. 282.
lib. III, etiam de consonantia Moysi et Jesu elegans opus com-
' In sîudiis phi/osophice Aristoteles niodurn ingenii posuit... hune falso accusât Porphgrius quod ex chris'
humani excessit, enim ptdlosopldœ partent,
nullam tiano ethnicus fuerit.cum constet eum usque ad extre-
quam non perfecte mulia ipse
traciaverit , quinimo mam vitam christianum persévérasse. Hieronym., in
{quœ fait ejus sagacitas et ingenii acumen ) inveniens Ca^a/o^fo, cap. 55. —
1» Longin, P/o^jn» Vita, pag. 2.
Jérôme soutiennent que c'est là une des im- [G. \J Harmonie des Evangiles d'Ammo- ÉJUIons.
postures de Porphyre, et qu'Ammone est de- nius, traduite par Victor de Capoue, parut à
meuré ferme jusqu'à la mort dans la pureté Mayence en 1524; à Cologne en 1532; dans
de la foi. Saint Grégoire de N}'sse cite un la Bibliothèque des Pères 1677, tom. II et Ilf;
passage * d'Ammone, maître de Plotin, pour dans Gallaud, tom. II, où elle est le mieux
expliquer l'union de l'âme avec le corps, et ordonnée et accompagnée de notes, prolégo-
un autre qu'il lui attribue, conjointement mènes, pag. 54. M. Migue a publié cette der-
avec Numène le pythagoricien, pour montrer nière édition dans le tome LXVill de la Pa-
que l'àme un corps. Il y a aussi,
n'est point trologie latine.]
sous le nom d'Ammone, des Commentaires
CHAPITRE y.
[Les Actes de sainte Cécile, vierg^e et martyre en 250.
[L'an 231.]
V'sièl ^* Guéranger, que l'on doit, ce nous semble, diverses circonstances de l'histoire de sainte
le
«-"^ rapporter la rédaction définitive des Actes de Cécile, qu'il avait pu recueillir soit des Actes
notre Sainte. La latinité défectueuse de cette rédigés par les notaires de l'Eglise, soit d'au-
pièce ne permet guère de la placer plus tôt, tres écrits qui ne devaient pas être rares dans
et l'usage qui en a été fait immédiatement une ville où le culte de la sainte martyre était
passion pour décrier les chrétiens et enlever à l'E- en recevant au nombre de ses disciples, pouvait-
les
glise ses plus grands docteurs. On convient que c'est il si heureux succès ? Qui peut assu-
se flatter d'un
à faux qu'il fait naître Origène dans l'idolâtrie. Pour- rer que tous ceux des païens qui allaient l'écouter,
quoi le croira-t-on lorsqu'il dit qu'Ammone aban- ou avaient envie de se convertir, ou se sont conver-
donna la religion chrétienne sitôt qu'il eut commencé tis en effet ?
à étudier la philosophie, d'autant qu'Eusèbe assure ' Euseb. et Hieronym., ubi supra.
le contraire, et qu'il rapporte même ces deux faits * Gregor. Nyssen., lib. de Anim., pag. 941, tom. I.
en exemple, pour montrer que Porphyre était un Tout ce que dit Ammone
en cet endroit, est que
menteur, et <{u'en ce qui regarde la religion chré- l'àme, étant intellectuelle ou spirituelle, ne souffre
tienne, il ne mérite aucune croyance ? Hœc Porphy- aucune altération par son union avec le corps. Il
rius in libro tertio ejus operis, quod adversus Christia- ajoute qu'elle est immortelle que c'est elle qui ,
nos composuit, qui de viri quidem illius studio etmul- donne la vie au corps, que l'union qui est entre
tiplici doctrina verissime pronuntiavit. Sed in eo ma- l'àme et le corps se prouve clairement par les im-
nifestissime mentitus est {quomodo enim non mentiretur pressions que ces deux parties se font mutuellement,
qui adversus Christianos scribebat), quod ipsum quidem et que cette union se fait sans aucun mélange ni
[Origenem) a Gentilihus ad Christianos transiisse dicit : confusion des parties de même que le soleil s'unit
;
Ammonium veroa veri numinis cultu ad Gentilium ri- à l'air sans se confondre. —
Photius, Cod. 242.
'
tum se contulisse? Euseb., lib. VI, cap. 19. Ces criti- * Voyez de l'Eclectisme alexandrin, par l'abbé
Flist.
ques ajoutent qu'il n'est pas croyable que Plotin ait Prat, tom I; M. Blanc, Cours d'histoire de l'Église,
écouté durant onze ans un philosophe chrétien comme tom. II D. Lumper, tom. I ces auteurs et la plu-
; ;
l'était l'Ammone, auteur de la Concorde évangélique. part des historiens catholiques justifient Ammouius.
Mais nous verrons, dans l'Histoire de la vie d Ori- Orsi, pourtant, et Alzog sont d'un avis contraire, avec
gène, que pendant qu'il enseignait les belles-lettres Mosheim, Brucker, Ritter, Hist. de la Philosophie an-
à Alexandrie, il eut plusieurs païens entre ses disci- cienne; Vacherot, Jules Simon, dans leur Hist. de
ples. Quelques-uns, à la vérité, se convertirent; mais, l'École d'Alexandrie. {L'éditeur.)
fOO IIlSTOIllE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
en si Imufe véiiérution, soit enfin des tradi- sur la célèbre martyre. De là le ton soulcnti
tions orales et des monuments figurc^s. Sa et les velléités oratoires du rédacteur, qui fait
narration commence aux pn- para tifs du ma- précéder sa narration d'un prélude rempli de
ria{,'cde la vierge avec Valérion et s'étend généralités, dans le goût des exordes que l'on
jus(ju'à son martyre et à sa sépulture. trouve en tête d'un grand nombre des Actes
On que l'auleur a cherché à répan<lre
voit recueillispar D. Ruiuart.
sur l'ensemble de son œuvre une couleur Cette coutume de lire solennellement les
imiforme, et qu'il a fondu dans son récit tous Actes des martyrs, au jour de leur fête, s'est
les documents dont il pouvait disposer. La conservée jusqu'aujourd'hui dans nos légen-
naïveté fait le caractère principal de sa dic- des du bréviaire; mais, au V« siècle, elle était
tion, et son style est celui qu'on remarque déjà partout en pleine vigueur et l'objet du
dans cette classe de ix'cits sur les martyrs plus vif empressement de la part des fidèles.
dont la série commence dès le IV* siècle, et Rome, si riche en souvenirs et si ardente
dont on trouve de nombreux exemples dans dans démonstrations de sa piété envers
les
la collection publiée par D. Ruiuart. Dans ces les martyrs, ne pouvait pas rester en arrière
compositions, la langue latine a subi une al- de tant d'autres Eglises. Chacune de ses basi-
tération qui fait déjà pressentir le moment où liques avait, pour ainsi dire, son martyr, et
elle cessera d'être vulgaire. Nos Acles, ce- l'honorait d'un culte spécial; les Romains de-
pendant, sont loin d'avoir cette barbarie de vaient donc désirer les Actes de ce glorieux
langage que l'on remarque dans la Chronique pation, afin de pouvoir les entendre lire dans
papale, coimue sous le nom de Catalogue de la solennité de sa fête. Mais comme, par suite
Félix IV, et qui s'arrête à l'année 534. Si le des ravages de la persécution de Dioclélien,
rédaclcur des Actes de sainte Cécile intéresse dont les édits avaient ordonné spécialement
vivement par le fond de son récit, on ne sau- la destruction des livres ecclésiastiques, beau-
rait en faire honneur au mouvement ou à coup d'Actes rédigés par les notaires avaient
l'habileté de son style ; mais le ton de can- péri, la rédaction postérieure des gestes de*
deur qui règne constamment dans ses allures certains martyrs n'avait point été faite avec
est en même temps une puissante garantie assez de discernement ; comme, en outre, on
de l'entière bonne foi de sa narration. savait que plusieurs Actes, à diverses époques,
Nous aurons, dans la suite, de nombreuses avaient été rédigés par des hérétiques dans
occasions de faire ressortir l'exactitude de le but d'infiltrer leurs erreurs à l'aide de ces
notre historien et de venger son récit des in- documents, le Siège Apostolique se trouva
justes imputalions dont il a été l'objet de la dans la nécessité de prendre, vers la fin du
part de l'école janséniste. Qu'il nous suffise V° siècle, une détermination générale, dans
d'observer ici que Fauteur écrivait sous les le but de mettre sa responsabilité doctrinale
yeux de ses concitoyens; qu'il n'avait pas à à couvert des inconvénients qu'aurait pu en-
raconter l'histoire d'un personnage obscur, traîner Tadoption réelle ou apparente de tous
sur lequel il eut été facile d'inventer, sans les Actes des martyrs qui pouvaient se trou-
s'exposer à être contredit; enfin que ses récits ver entre les mains des fidèles.
ont été acceptés universellement dans toutes
les Eghses de l'Occident, dès lépoque qui les
§ 2. — AUTHENTICITÉ DES ACTES DE SAINTE CÉCILE.
vit pai'aitre. La présomption la plus grave 1Le savant abbé de Solesme démontre,
.
i.p,,
^'*"'<"''^
serait donc en sa faveur, quand même nous pièces en mains, que, loin de considérer ces
n'aurions pas à produire des preuves distinc- Actes comme une pièce d'autorité légère ou
tes et évidentes de sa véracité. suspecte, l'EgUse romaine et celles de l'Oc-
Noi.N (le 2. Les Actes de sainte Cécile, comme un cident, depuis le V« siècle, n'ont cessé d'en
iiou. grand nombre d autres, furent composes pour haute estime, jusque-là qu'elles
faire la plus
être lus du haut de l'ambon , dans l'église leur ont emprunté toute la substance des
delà Sainte, au jour de sa fête. Pour cette prières et des cantiques qu'elles ont adressés
lecture publique, qui devait servir à rehausser à Dieu dans la solennité de sainte Cécile *. On
la solennité,\\ était nécessaire de former un doit reconnaître en même temps, ajoute-l-il,
récit complet et uniforme de tout ce que l'E- que, parmi les Actes les plus authentiques des
glise de Rome possédait de renseignements martyrs, c'est à peine s'il en est quelques-uns
ment VIII, dans le XVP siècle, viennent encore teur l'avait sillonné ; la tète, par une inflexion
confirmer les Actes de la Saiute. Dans un di- mystérieuse et touchante, était retournée ver3
plôme de Pascal, relatif à la première dé- le fond du cercueil. Le corps se trouvait dans
couverte du corps de saiute Cécile, et dans la une complète intégrité, et la pose générale
narration d'Ana-tase le Bibliothécaire, on re- conservée, par un prodige unique, après tant
connaît nou-seulcmcnt le nom de la vierge de siècles, dans toute sa grâce et sa modestie,
Cécile et de Valérien, sou époux, mais ceux retraçait, avec la plus saisissante vérité, Cécile
de ïiburc^ et de Maxime, et la première sé- rendant le dernier soupir, étendue sur le pavô
pulture de ces martyrs a été constatée sur la de la salle du bain ". « La pose insolite * du
voie Appienne, D'après le récit de Pascal, le corps de sainte Cécile contraste avec celle
corps de Cécile était encore couvert d'une roliC qu'on a été à même de reconnaître dans tous
tissue d'or. Les Actes nous avaient déjà fourni les martyrs dont les corps ont été découverts
ce détail, d'une importauce secondaire sans à Rome et partout ailleurs. Mais si l'on se
doute ; «mais leur confirmation sur ce détail, rappelle le genre et les circonstances de la
ajoute D. Guéranger ', n'est-elle pas déjà une mort de Cécile, tout s'explique de soi-même;
garantie de la probité de leur rédacteur et de c'est bien là cette maityre expirant sur les
la pui-eté des sources auxquelles il a puisé ? dalles mosaïques d'une salle de son
ou les
Pascal ne dit pas, dans son diplôme, qu'il palais, s'enveloppant de sa modestie comme
ait découvert, près du corps, l'ampoule teinte d'un voile, et dérobant son visage aux re-
du sang que l'on rencontre encore de nos gards des hommes qui s'empressent pour
jours près des tombeaux des martyrs; ce sont contempler la vierge immolée. »
des linges imbibés de sang qu'il a trouvés aux Le cilice constaté sous les vêtements de la
pieds de Cécile. Nouvelle démonstration de Sainte par Sfondrate vient ajouter une nou-
la fidélité de notre historien, qui les avait velle preuve de l'exactitude du narrateur,
mentionnés le premier. La circonstance de ces jusque dans les faits d'une importance secon-
linges est caractéristique dans le martyre de daire. Nous n'insistons pas sur la robe bro-
la Sainte : ils attestent une blessure essuyée chée d'or et sur les linges ensanglantés, dé-
sur un corps sillonné par le glaive ; ils n'ont tails certifiés déjà sur le diplôme de Pascal.
rien de commun éponges dont ou
avec les 4. La stature môme du corps de Cécile, que 4" Preuves
se servait pour recueillir à terre le sang des l'on reconnut, en 1599, avoir été fort peu éle- tii ées ue l.i
statnrtt du
martyrs, et qu'on exprimait ensuite sur le vase vée, vient encore à l'appui des Actes de la
corps.
destiné à le conserver. Les linges du tombeau Sainte. En effet, dès le début de l'interroga-
de Cécile étaient roulés avec précaution et toire, le préfet la nomme jeune fille, puella.
déposés comme un trophée aux pieds de la c<Mais ce n'est pas seulement dans les faits
martyre. Us certifiaient par leur muet, mais relatifs à Cécile elle-même, que les indices re-
éloquent témoignage, la scène si glorieuse- connus en 1599 se réunissent pour attester
ment tragique de la salle du caîdurium -. » la fidélité des Actes. S'il y est raconté que
3. La seconde découverte du corps de sainte Valérien et Tiburce eurent la tète tranchée,
Cécile eut lieu, le 20 octobre 1599, sous les on trouve dans leur commun sépulcre deux
yeux et par les ordres du pieux cardinal corps décapités. Si Almachius, dans l'interro-
Sfondrate. L'abondance des détails qui nous gatoire, hésite sur l'âge des deux frères, treize
restent sur cette seconde découverte nous met siècles après, leurs ossements oflrent encore
à portée de signaler encore de nouveaux in- une telle ressemblance, que l'on serait tenté
dices de la sincérité de Técrivain du V^ siècle. de les confondre, si chacun des deux corps
Cécile était revêtue de sa robe brocliée d'or, n'eût été enveloppé dans son linceul particu-
sur laquelle on distinguait encore les taches lier. Les Actes racontent que Maxime ne fut
glorieuses de son sang virginal ; à ses pieds pas décapité, mais assommé avec des fouets
reposaient les linges teints de la pourpre de garnis de balles de plomb; on trouve, eu 1590,
i Hist. de sofinte Cécile, chap, 24.- * Hist. de sainte Cécile, cbap. 28. Récit d'aprùs
»Ibid. Eoiio, témoin oculaire. — * Ibid., chap. 32.
10-2 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTOURS ECCLESIASTIQUES.
la tète de ce martyr encore adliùrcnte au vertures par lesquelles l'œil du pèleiin pénètre
troue, et son crùnc tracassé, ses cheveux col- jusque dans les ombres de l'hypocauste et dé-
lés de sang attestant encore le genre du sup- couvre la chaudière que le temps a épargnée,
plice par lequel le greffier d'Almacliius l'em- dégagea les tuy aux en terre cuite qui donnaient
porta la couronne céleste *. » passage à la vapeur, ainsi qu'un autre tuyau
s^PreuTc. 5, [)jins eottc <lémonstration de la vérité en plomb qui s'élève, connue les premiers,
^ruiduuio- Guérangor n'a
jj^g Actes do sainte Cécile, D. au-dessus du niveau delà salle; les uns et les
garde d'oublier un dernier trait d'une haute autres furent protégés par des plaques de
importance,lesdétails archéologiques. Il existe cuivre fixées à la muraille. Rien enfin ne
dans la hasiliciue de sainte Cécile un oratoire manqua à la restitution de ce vén<>rable mo-
ouvrant sur une des nefs latérales, à droite nument, qui reparut ce qu'il avait été dans
en entrant, et désigné sous le nom de hain de l'origine, un SMrfar«î</n dont les dimensions,
suinte Cécile. «Ce sanctuaire, dit le savant his- très-inférieures à celles qu'on remarque dans
torien, reconnu de temps immémorial pour les anciens thermes destinés à l'usage public,
un appendice de l'église elle-même, et honore étaient en rapport avec l'habitation particu-
d'un autel partioulier,était un monument du lièredont cette salle avait fourni un appen-
genre de martyre qu'avait souffert la Sainte, dice.» En repassant ces circonstances, recon-
d'après ses Actes, et il appuyait leur récit, nues et constatées tant de siècles après les
duquel nous apprenons que Cécile mourante événements auxquels ils se rapportent, n'est-
remit sa propre maison au pape saint Urbain, il pas évident qu'elles forment à elles seules
afin qu'il l'érigcàt en église. Nousremarquons, la plus imposante démonstration en faveur
eu efl'et, qu'il nt; s'agit pas ici d'un de ces bains des Actes de sainte Cécile? «Quel est le récit
établis auprès de quelques églises à Rome -et d'un auteur ancien, eût-il été jusqu'alors con-
ailleurs, et qui servaient aux fidèles pour cer- sidéré comme douteux, qui se trouve confirmé
taines lotions mystérieuses. C'est ici un véri- à jamais par des découvertes archéologiques
table 5wc?a^oriMr/i, pour les bains à vapeur, qui de cette importance ? Y aurait-il assez d'aca-
n'ont rien de commun avec ceux que les chré- démiciens, dans toutes les sociétés savantes
tiens des premiers siècles venaient prendre de l'Europe, pour proclamer la réhabilitation
dans les thermes sacrés des églises. D'autre de l'écrivain, pour venger sa probité contre
part, cette salle a reçu constamment un hom- la néghgence et la préoccupation des siècles
mage spécial de la piété des fidèles. Avec les antérieurs? C'est ainsi que la divine Provi-
l'ait extraordinaire
Actes tout s'explique, et ce dence a pourvu à la justification de l'histoire
n'est plus qu'une confirmation de l'événement de Cécile, en faisant éclater au grand jour
qu'il rappelle *. » tant de preuves irréfragables de la sincérité
Par le laps du temps, les diverses restaura- de ses récits '-.y)
tions de cet oratoire lui avaient enlevé son 6. L'école Janséniste a attaqué les Actes de object
caractère primitif. 11 appartenait à Sfoudrate sainte Cécile par différents arguments. Tille- Actes.
de restituer à ce lieu vénérable son antique mont n'a voulu voir dans le récit de ces Actes
forme et ses honneurs. Il ordonna des fouilles qu'un roman, parce qu'il lui semble incom-
sous le pavé de cette chapelle, et on vit bien- patible en lui-même avec le règne d'Alexan-
tôt qu'elle portait sous une voûte. Les abords dre Sévère, parce que le seul nom du pré-
ayant été sondés, on ne tarda pas à recon- fet Aimachius lui semble capable d'infirmer
naître l'hypocauste d'une salle de bains. Les toute la narration. « On est embarrassé, ajou-
soupiraux qui avaient été interceptés furent te-t-il, pour réserver à sainte Cécile une place
facilement ouverts, et l'on reconnut encore dans la chronologie des saints. D'ailleurs, si
une des chaudières, avec le reste des tuvaux tous les monuments grecs et latins la mettent
de plomb par lesquels la vapeur montait dans à Rome, Foi'tunat, qui est peut-être le plus
le caldarium. ancien auteur qui nous en apprenne quel-
« Sfondrate disposa l'ornementation de la que chose, la met en Sicile; il y aura donc
chapelle de manière à rendre impossible dé- eu une translation faite avant la fin du V*
sormais la destruction d'un souvenir si cher siècle. De plus, ces Actes ne sont composés
à sa piété : il fit garnir de grilles en fer les ou- que de miracles extraordinaires et d'autres
choses qui ont peu d'apparence de vérité. Les bain, selon les meilleurs chronoIogTstes de
discours en sont longs*. 11 y a quelque chose l'histoire des Papes, et on comprendra mieux
de beau, qu'on voit bien être pris de Tcrtul- encore cette persécution momentanée et toute
lien ; mais celui qui les a faits devrait avoir de caprice, de la part des magistrats romains.
appris du même auteur à traiter les princes Si Almachius invoque la légalité pour ap-
avec plus de respect que ne font ceux qu'il puyer ses poursuites, c'est que les lois de
fait parler. » Nous répondrons brièvement à l'empire qui avaient été portées contre les chré-
chacune de ces objections, que le révérend tiens par les prédécesseurs d'Almachius, de-
Père Dom Guéranger a réfutées solidement venaient alors son unique appui. S'il allègue
dans deux chapitres *. plusieurs empereurs, cette manière de parler
^fln"'- 7. L'auteur des Actes n'énonce point quel- n'imphque pas nécessairement que l'empire
yeciion.
^^^^ ^j-^. ^^^ quelque disposition d'Alexandre eût en ce moment plusieurs chefs. Cette
contre les chrétiens ; cet empereur n'est pas forme de style judiciaire se reti"oiive à cha-
nommé une seule fois dans les Actes; les que pas dans les tribunaux de l'antiquité et
poursuites violentes contre les fidèles de Rome des temps modernes. »
sont attribuées uniquement au préfet Tur- 8. La réponse à la difficulté tirée du nom R'P'-rat
de ce magistrat. Que, sous le règne d'un nom romain, est facile. Nous ne dirons pas
prince faible de caractère, comme Tétait cet même que ce nom d'Almachius peut avoir
empereur, les chrétiens aient eu à subir des été défiguré par l'usage vulgaire dans le
persécutions locales de la part des magistrats cours des siècles qui se sont écoulés depuis
hostiles à l'Eglise et retranchés derrière des le martyre de Cécile jusqu'à la rédaction de
lois qu'Alexandre n'avait pas eu le courage ces Actes; mais nous répondrons que le pré-
de révoquer, c'est une assertion qui s'appuie fetqui condamna nos martyrs se nommait
non-seulement sur l'opinion savamment éta- Turcius Almachius, et non simplement Alma-
blie de Baronius ', mais encore sur le senti- que Turcius soit
chius. Tillemont niera-t-iî
ment exprès de Pétau *, de Dom Ruinart ®, un nom romain? Les inscriptions romaines
de Fleury *, de Baillet ', et, chose étrange ! données par Gunter seraient là pour le dé-
de Tillemont lui-même, qui, se trouvant dans mentir.
l'impossibilité de nier le martyre du pape 9. Il est bien extraordinaire que
*
Tillemont p..^pona
. . ù 1,1 ti-.iisié
saint Cahxte, finit par convenir que plusieurs prenne la peine de trouver une place a sainte "'a "fjse-
chrétiens ont pu recevoir la couronne du Cécile dans la chronologie des Saints. Cette
martyre à cette époque. 11 va même jusqu'à place n'était pas douteuse ; le pontificat du
expliquer en quelle manière ces violences ont pape saint Urbain, qui parait si souvent dans
dû avoir lieu.w Les Actes de sainte Cécile, dit l'histoire de la Sainte, sufln-ait pour fixer les
chrétiens de Rome sous Alexandre, la confir- sainte Cécile sous Marc-Aurèle et Commode,
ment avec une précision que Tillemont n'a ils la mettent en même temps sous le ponti-
pas même sentie. N'est-il pas évident, par ficat de saint Urbain il y a donc eu erreur
:
toutes les circonstances du récit, que le préfet et erreur évidente de la part d'Usuard et de
Almachius n'introduit qu'avec ime extrême saint Adou. Quant aux Grecs, sur l'autorité
réserve l'accusation de christianisme dans le desquels s'appuie Tillemont pour rapporter
procès des deux frères; qu'il ne se porte aies à Dioclétien la persécution de cette illustre
condamner à mort qu'avec une hésitation vierge, ne sont pas plus recevablessur cette
ils
très-marquée; qu'il n'ose pas même prendre date qu'Usuard et saint Adou sur la leur,
sur lui de faix'e exécuter Cécile sous les yeux puisqu'ils racontent comme eux les rapports
du peuple?.. Ajoutons à cela la circonstance de sainte Cécile avec le pape Urbain, qui gou-
de l'absence de l'empereur en l'année 230, vernait l'Eglise cinquante ans avant l'empire
qui est la dernière du pontificat de saint Ur- de Dioclétien.
1 Mémoires, tom. HT, pag. 689,-2 Cbap. 35 et 36. > Prœfatio in Ada Martyr., § 3, pag. 38.
s Notes sur le Martyrologe romain, 1er janvier. * V, n. 49.
Hist. eccles., liv.
Rutionarium tcmporum, part. I^ lib. V, cap. 11. ^
* Vie des Saints, lom. VIII, iu-4, 14 octobre.
101 IlISTOmii: GÉNÉRALE DES AUTEURS ÉCCLÉSIASTfOUES.
RAiM.nse 10. Ou couvicut que«louslesinoiiiimeuts qui dont parle Tillemont, prescrivaient de ne
tu» ubjic'- parlent de sainte Cécile la mettent à Rome,» bâtir les églises en l'hoimeur des saints que
et VOICI que loi:s ces moimments se trouvent dans les heux où reposaient leurs reliques,
auL'antis en présence du seul Fortunat. Qu'a ou qui du moins avaient été sanctifiés par
donc à leur opposer le saint évèque de Poi- leur habitation ou leurs souftrances. Or, au
tiers de la lin du Vl« siècle? Un vers, un seul temps du Symmaque et D. Guéranger
j)ape (
vers; encore n'est-il pas irréprochable sous le a prouvé que l'égUse de sainte Cécile est
*
rapport de la quantité, ce (jui pourrait, jus- plus ancienne que ce pontife), le corps de la
qu'à un certain point, donner lieu d'y oppo- vierge reposait encore aux catacombes ; la
ser une l'oule de copistes. Mais, eu supposant basilique transtibérine était donc un monu-
que le vers soit oriy,inal , Tillemont sait-il ment qui rappelait l'habitation de sainte Cé-
quelle est la Cécile que Fortunat nomme ici cile à Rome, et, comme nous l'appreiment
en passant? Il est certain que le saint évèque ses Actes et la tradition constante, le propre
ne le dit pas. Ue savants Siciliens, qui ont tra- lieu de son martyre.
vaillé sur les saints que leur ile a donnés au Les miracles extraordinaires qui y sont
1 1 .
ciel, entre autres Octavio Gaetano, après de rapportés empécheraieut-ils la saine critique
longues reclierches, ont avoué francbcinent d'admettre les Actes de sainte Cécile? Mais
qu'ils ue trouvaient pas le plus petit vesiige pourquoi le judicieux critique ne nous a-t-il
d'une sainte Cécile qui fût née en Sicile, ou pas laissé des règles théoriques pourdiscerner
qui y eût souffert, ou même dont les reliques les uns des autres ? D'ailleurs, les Actes sincè-
y eussent été simplement apportées. Quant à res de Dom Ruinart contiennent des miracles
la translation du coi^ps de la Sainte à Rome, plus extraordinaires que ceux qui sont con-
personne n'en a jamais entendu parler, et la tenus dans les Actes de sainte Cécile, et pour-
preuve qu'en donne Tillemont n'en est pas tant iladmet. Ici il s'agit de l'apparition
les
une. Sainte Sabine, martyre dans lOmbrie, de saint Paul et de plusieurs anges ; des faits
a été transférée dans la capitale du monde de ce genre, au rapport d'Oz^igène * et de Ter-
chrétien. Pourquoi sainte Cécile n'aurait-elle tullien '^, étaient communs de leur temps, et
pas été transférée pareillement? Incroyable Tillemont rapporte et admet tous les faits de
logique de ces hommes de parti qui poursui- ce genre qui sont consignés dans les Actes
vaient si durement les Actes de nos saints ! de saint Vincent , de sainte Agnès , de saint
Sainte Cécile a été transportée à Rome mais : Théodote d'Ancyre, etc. Après les apparitions,
pourquoi donc, contrairement à ce qui s'est il n'y a d'autre fait miraculeux dans les Actes
toujours pratiqué dans les translations, n'a-t- de sainte Cécile que la prolongation de la vie
clle pas été placée dans le temple qu'on lui a de la Sainte durant trois jours, après les gra-
érigé, mais a été enfoncée au fond des cime- ves blessures que lui avait faites l'épée du
tières de la voie Appienne, où Pascal la dé- licteur. Quand ces blessures auraient été de
couvrit au IXe siècle, dans la compagnie des nature à causer la mort en moins de temps,
saints Tiburce, Valéricn et iMaxime, qui sans ce que nous pensons, n'y a-t-il pas dans les
doute aussi ont été apportés de Sicile comme Actes sincères de Dom Ruinart un grand
la Sainte eUe-mème? La date de cette transla- nombre de martyrs dont le corps, rendu in-
tion a dû avoir lieu avant la fin du Vc siècle, vulnérable par la puissance divine, résiste à
« puisijue, dit Tillemont, on trouve à Rome tous les tourments?
une de sainte Cécile du temps du pape
église «Au fond, l'école de Port-Royal, dit Dom
Symmaque; » autrement il serait inexplica- Guéranger, travaillait pour les rationalistes
ble qu'on n'eût pas déposé la Sainte dans son antichrétiens. Refuser d'admettre des miracles,
église : mais on a eu le temps d'i.pporter les parce qu'ils sont extraordinaires, c'est agir
reliques à Rome, depuis la paix de l'Eglise sans savoir ce que l'on fait, puisqu'un miracle
jusqu'au pontificat de Symmaque; si personne n'est miracle que parce qu'il est extraordi-
n'en a entendu parler, cela n'empêche pas naire. C'est même
pour cette raison que les
que la chose n'ait eu lieu. Mais la seule exis- faits prodigieux ne se constatent pas intrin-
tence à Rome d'une église de sainte Cécile ne sèquement, mais seulement par la valeur des
prouve-t-eile donc pas que la Sainte a habité témoignages qui les attestent. L'homme con-
cette ville ? Les règles canoniques^ à l'époque naît-il les bornes de la puissance de Dieu?
' Ili-it. de minfc CVciïe, cîiap. 16. — ^ Origen. ' Tertull., lib. de Anima, cap. 47.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE V. — SAINTE CliClLE. 105
Que répondra Tillemont aux incrédules qui geaientleurs Actes sur ces réponses, quiétaient
refuseront de l'écouler sur la véracité des recueillies par des personnes affidées et accou-
Livres saints, lorsqu'ils viendront lui alléguer tumées à ce ministère; souvent on se procurait
ce prétexte emprunté de lui-même, que les à prix d'argent les interrogatoires officiels.
miiacles qu'on y lit sont trop extraordinaires, On rencontre, il est vrai, dans les dialogues
et par conséquent reconnus pour faux, avant et dans les réponses aux interrogatoires,quel-
tout examen? » ques traits qui se retrouvent dans Y Apologé-
Réponse 12. Si la longueur des discours contenus tique de Terlullien; mais que peut-on tirer de
a la Sixième
i i .
ebjectiou. dans les Acles suffisait pour en contester la ce rapprochement, sinon une nouvelle con-
valeur, il faudrait aussi i^ejeter les xXctes sin- firmation de la vérité du récit considéré en
cères, admis par Tillemont, de saint Pionius, lui-même ? « Nos héros ont pu quelquefois
de saint Victor de Marseille, de saint Philippe parler comme TertuUien, parce qu'ils étaient
dTIéraclée, de saint Patrieius, etc., que l'on ses contemporains, et nous avons même quel-
trouve aussi dans Ruinart, et dont les dis- que peine à croire que le rédacteur des Actes,
cours présentent autant de développement dont le style lâche et incolore ne ressent en
que ceux qui se lisent dans les Actes de sainte rien la phrase incisive de l'Apologétique, eût
Cécile. pu même avoir l'idée, au V'' siècle, d'aUer
a Et quand même, dit l'historien de sainte chercher si haut les paroles qu'il avait à leur
Cécile, on accorderait pour un moment que mettre dans la bouche. »
ces discours n'ont pas ime valeur historique, « 13. Tillemont voit une nouvelle invrai- Réponses
cette concession infirmerait-elle les lécits en semblance dans la manière libre dont sainte oljecîioQ™*
eux-mêmes? Ce serait traiter les Actes des mar- Cécile parle au préfet de Rome, et dans ses
tyrs avec plus de sévérité qu'on n'en a jamais invectives contre les princes ces libertés de
:
montré à l'égard des historiens de l'antiquité; langage le scandalisent, et l'on conçoit que
ces derniers ont orné leurs écrits de haran- plus d'un catholique, sous le règne do Louis
gues de leur façon: jusqu'à présent, personne XIV, n'ait pas eu besoin d'autre argument
n'en avait conclu qu'il fallût, par cela seul, pour rejeter des Actes dans lesquels la liberté
leur refuser créance sur les faits positifs chrétienne s'énonçait avec une si rude fran-
qu'ils rapportent.» Le seul discours d'une lon- chise. Ceci tient à la confusion d'idées qui s'é-
gueur considérable qui soit dans \esAcies,est sur le génie et les mœurs des
tait introduite
la harangue à Tiburce, dans laquelle sainte premiers chrétiens et qui dure encore aujour-
Cécile expose la foi chrétienne et ses preuves. d'hui dans un grand nombre d'esprits. Une
Est-il donc si étonnant que Tiburce,qui devait appréciation plus large des actions et des pa-
à ce discours le bonheur d'être cnrétien. Tait roles des saints eût mis tout le monde à même
recueilli de ses souvenirs et l'ait conservé? A- de comprendre que, s'il est beau et glorieux
l)rês tout,cc discours n'avail-il pas une portée de tendre le cou aux bourreaux, comme la
historique? La conversion de Tiburce était un brebis que l'on conduit à la mort, car c'est le
événement pour l'Eglise romaine,elle était due triomphe de la mansuétude chrétienne qui
à Cécile, cette vierge placée si haut dans l'es- s'en remet à la force de Dieu, il n'est pas moins
time des fidèles ; il y avait là une page élo- glorieux ni moins beau de protester contre
quente pour les annales de Rome chrétienne: l'iniquité et de dénoncer oux puissances ter-
ne devrait-on pas plutôt s'étonner qu'elle ne restres, qui tournent contre Dieu et sou Eglise
l'eût pas conservée à la postérité ? Le reste un pouvoir qu'elles n'ont reçu qu'à la condi-
des Actes présente plutôt des dialogues que des tion de les servir, la nullité de leurs droits et
Quant aux interrogatoires, tant pour
discou.' s. l'injustice de leurs actes. »
les demandes que pour les réponses, ils ne Au reste, sainte Cécile, quelque vigoureux
dépassent pas l'étendue que l'on est à même que soit si loin que
son langage, n'cstpas allée
d'observer dans ceux que contiennent les sainte Eulalie, qui cracha au visage de son
Actes publiés par Dom Ruinart. L'espèce de juge; que saint Andronic,qui maudit les empe-
parabole que propose Valérien oifre seule quel- reurs; que sain tThéodoret,martyrd'Antioche.
que disproportion, encore trouve-t-on souvent «A la paix de l'Eglise, dit Dom Guéranger,
des improvisations d'une aussi grande éten- la liberté chrétienne n'oublia pas ces fortes
due. Au reste, on sait que les greffiers écri- traditions, et saiut Hilaire de Poitiers, dans sa
vaient en notes tout ce que disaient les mar- sublime invective contre Constance, où il flé-
tyrs; de leur côté, les notaires de l'Eghse rédi- trit aussi ce prince du nom de tyran, ne crai-
106 HISÏOIUE GÉNÉRALE DES AUTEUIiS ECCLÉSIASTIQUES.
gnait pas d'ajoiitm-: « Ce que je te dis baulc- Yalèrien, jeune romain encore païen, mais
iiionl, Constaiire, je l'eusse dit à Néron ; Dé- que sa noblesse, sa beauté et les qualités de
cius et Maximieii l'eussent entendu de ma son cœur semblaient rendre digne d'un tel
bouche'.» Tous les S'.èdes sont semés de traits honneur, fut l'époux choisi pour celle qui n'en
semblables, (jui étonneraient la mollesse uni- voulait pas d'autre que son Dieu. Dans un si
verselle de la génération présente ; et c'est grand péril, Cécile mit toute sa confiance dans
pour cela que nous avons tant besoin de nous le Seigneur et se préjjara, par la prière, le
retremper dans l'étude des mœurs de nos jeûne et le cilice, au jour fixé pour les noces.
pères, eux qui surent faire valoir si glorieuse- 2. Après la cérémonie d'usage, l'épouse du
ment le dépôt que nous avons tant de peine à Christ fut conduite dans l'appartement nup-
conserver. Ces rudes nîanil'estations de la li- Restée seule avec Valérien
tial. et remplie tout-
berté cbrctienue, qui dépassent de beaucouj) à-coup de la vertu d'en-haut : « Jeune et ten-
de vigueur que l'on admire dans les
les traits dre ami, lui dit-elle, j'ai un secret à te confier,
réponses de sainte Cécile à Almacbius,et dont mais jure- moi que tu sauras le respecter. »
Tillemont voudrait faire autant d'arguments Valéi ien le jura. « J'ai, reprit-elle, pour ami un
contre de nos Ac(es, avaient d'au-
la sincérité ange de Dieu qui veille sur mon corps. S'il
tant moins droit de le surprendre, que lui- voit que, dans la moindre chose, tu oses agir
même, à propos des^c^^s de saint Andronic, à avec moi par l'entraînement d'un amour sen-
qui nous venons d'emprunter un détail, entre- suel, sa fureur s'allumera contre toi, et tu per-
prend l'apologie de ces saillies d'une sainte
* dras la fleur de ta brillante jeunesse. Si, au
audace ; il ne s'en montre scandalisé que contraire, il voit que tu m'aimes d'un cœur
quand il les rencontre, fort adoucies cepen- sincère et d'un amour sans tache, situ gardes
dant, dans les Actes de sainte Cécile ^. » entière et inviolable ma virginité , il t'ai-
Après avoir ainsi établi l'authenticité des mera comme il m'aime et te prodiguera ses
Acles de sainte Cécile, et réfuté les objections faveurs.» Valérien demande à voir cet ange.
de l'école janséniste, nous allons analyser Cécile y met pour condition qu'il se purifiera
rapidement ces mêmes Actes. auparavant et croira en un seul Dieu qui
règne dans les cieux. « Quel est donc celui
ARTICLE IL qui me purifiera?» répond l'époux impatient.
Alors la vierge lui enseigne la retraite du
ANALYSE DES ACTES DE SAINTE CÉCILE.
saint pape Urbain. Valérien y court. Le pon-
Naissance
de bainte Cécile naquit à Rome d'une famille illus-
i . tife, à sa vue, rend grâces au Seigneur, au-
Ct'cile. Ses
premières tre par sa noblesse et son ancienneté, ce qui, teur d'une telle merveille. Pendant qu'il prie,
années. Son
mariage. joint à sou nom, permit de croire avec raison saint Paul, sous la figure d'un vieillard véné-
qu'elle appartenait à cette famille de Cécilius rable, apparaît à Valérien, qui tombe la face
si fameuse dans de l'ancienne Rome.
les fastes contre terre. L'Apôtre le relève avec bonté et
Ca ne sait rien des premières années de sainte dans un livre écrit en
lui fait lire ces paroles
Cécile, sinon qu'elle était chrétienne dès son lettres d'or Un seul Seigneur , une seule foi y
:
enfance. Son père et sa mère, cependant, un seul baptême, un seul Dieu Père de toutes
étaient encore ensevelis dans les ténèbres du choses, qui est au-dessus de tout et en nous tous.
paganisme ; mais, soit indifféi^ence, soit ten- «Crois-tu qu'il en est ainsi? » dit l'Apôtre.
dresse pour leur tille, ils la laissaient complè- «Rien de plus vrai, rien qu'on puisse croire
tement libre de suivre les exei'ciccs de sa reli- plus fermement,» répond Valérien. Paul dis-
gion et d'assister aux assemblées de chrétiens. parait, et l'époux de Cécile,régénéré par l'eau
Do bonne heure prévenue des communica- sainte et couvert de la tunique blanche que
tions de l'Esprit-Saint, elle choisit Jésus pour les néophytes portaient pendant huit jours,
son unique époux et lui consacra sa virginité. revient vers son épouse. La vierge,prosternée,
Elle était d'une beauté remarquable; quand elle priait avec ferveur. Debout à côté d'elle, l'ange
fut parvenue à l'âge nubile, ses parents, fiers de Dieu, tout éclatant de gloire, tenait dans
d'une telle lille,songèrent à contracter, par elle, ses mains deux couronnes entrelacées de ro-
une alUance dont sa main serait l'hemeux gage ses et de lis. Il en mit une sur la tète de Cé-
cile et l'autre sur celle de Valérien : « C'est par son esprit vraiment apostolique. Devenue
du jardin du ciel que je vous les apporte, dit- dispensatrice d'une grande fortune, elle nour-
il; ne se faneront point, et leur parfum
elles rissait une multitude de pauvres. Obligée, par
sera toujours aussi suave. Mais personne ne sa position, de se couvrir de riches vêtements,
pourra les voir qu'il n'ait mérité comme vous, elle s'en dédommageait en portant continuel-
par sa pureté,les complaisances du ciel.» Puis lement un rude cilice sous se.s habits. Ainsi
il dit à Valérien de demander à Jésus-Christ l'Esprit-Saint préparait l'épouse du Christ à
ce qu'il désirait le plus. Valérien avait un la lutte qui devait l'unir à son céleste époux.
jeune frère nommé Tiburce, encore païen. Il 3. C'était en 230. L'empereur Alexandre Viulenoes
exercées
demanda sa conversion. L'ange lui déclara Sévère venait de quitter Rome pour marcher contre dea
clirétiens
ppudant
que sa prière exaucée et que tous deux
était contre (les Perses. Il avait toujours favorisé les 1 iib-sence
recevraient la palme du martyre; puis il dispa- chrétiens mais Rome avait alors pour pré-
; ilre
irAli-xnti-
Sévère,
ïihnrce et
rut. Les deux époux rendaient grâces à Dieu fet Turcius Almachius, connu par son aver- Vnléricn,
conilaninés
et s'entretenaient encore, dans un délicieux et sion pour eux. Profitant de l'absence de l'em- ftmort. Con-
version Pt
céleste colloque, des grâces dont le Seigneur pereur, il donna libre carrière à sahainc; martyre du
prclTier Ma-
venait de les favoriser, quand Tiburce entra. beaucoup de chrétiens, de la classe du peuple, xime.
Cécile était devenue sa sœur; il Taborda par périrent dans les tortures. Le préfet savait
un baiser fraternel. Mais quelle fut sa surprise que les plaintes des petits trouvent rarement
de sentir nue délicieuse odeur de rose et de un écho qui les porte à l'oreille des grands.
lis émanant des cheveux de la vierge Il de- ! Cependant Valérien et Tiburce se faisaient
manda la raison d'un fait aussi extraordinaire, distinguer entre tous leurs frères par leur
puisqu'on n'était encore qu'à la fin de l'hiver. zèle à rechercher, selon la coutume, les corps
Valérien en prit occasion de lui parler de la des martyrs, pour les ensevelir et les inhumer
vraie religion. Cécile, très-instruite des dog- en un lieu sûr. Bientôt dénoncés, ils furent
mes du christianisme, lui montra la vanité des aussitôt ai"rètés. Almachius ne voulait que les
idoles, lui apprit l'existence d'une autre vie, intimider cité à sa barre, Tiburce ne répondit
:
la venue du Fils de Dieu sur la terre etle dog- qu'en confessant hautement Jésus-Christ. Al-
me de la très-sainte Trinité. Pendant qu'elle machius eflrayé l'éloigua. Valérien comparut
parlait, la grâce opérait dans le cœur de Ti- ensuite; il confirma la réponse de son frère,
burce. Etonné et transporté d'admiration, à et étonna le préfet par sou éloquence sommé :
ces révélations si nouvelles pour lui et qui d'offrir des libations aux dieux, il répondit en
élevaient son âme tellement au-dessus de la relevantl'absurditédes païens, qui appelaient
région où il avait vécu jusqu'alors, il pria Cé- dieux de vaines idoles ou d'infâmes démons.
cilede lui exposer la croyance chrétienne tou- Rattu de verges, il rendait grâces à Dieu et
chant le Fils de Dieu. Cécile lui raconte donc par ses énergi-
électrisait les fidèles présents,
le Verbe né d'une Vierge , ses enseignements ques discours. Almachius n'avait pas eu l'in-
touchant la vie éternelle, ses prodiges comme tention d'en venir jusque-là ; il ne savait que
des pharisiens, les douleurs de sa passion, les lui dit de se hâter de les condamner à mort;
prodiges qui accompagnèrent sa mort, les té- car, s'il tardait, les deux frères donneraient
moignages de tous ceux qui l'avaient vu res- tout leur bien aux pauvres, et il ne resterait
suscité et de ceux qui l'avaient vu monter au rien au préfet: Almachius comprit. Les deux
ciel. Tiburce ravi éclatait en sanglots; « Oh! frères furent donc condamnés à avoir la tête
si jamais, en tombant aux pieds de
s'écria-t-il, tranchée au pagus Triopius, sur la voie Ap-
Cécile, mon cœur ma
pensée s'attachent à
et pienne, vers la 4« colonne militaire, s'ils ne sa-
la vie présente, je consens à ne point jouir de crifiaient à J u piter,dont 1 e temple formait l'en-
celle qui doit lui succéder. »
Il partit ensuite trée du /jog-ws. On se mit en marche Maxime, :
avec Valérien pour aller trouver Urbain, Le greffier d' Almachius, les conduisait avec une
saint pape le baptisa et lui donna en outre escorte de soldats. Emu du sort de ces deux
l'onction de l'Esprit-Saint
pour le rendre pro- jeunes hommes, Maxime leur témoignait sa
pre au combat qui se préparait. Ces conver- compassion. Tiburce lui répondit en lui par-
sions avaient eu un grand retentissement, et lant de la vie éternelle. Ses paroles faisaient
cette maison si favorisée du ciel exerçait dans une vive impression sur le greffier. Valérien, le
Rome une puissante influence en faveur du voyant ébranlé, Tassura que, s'il se repentait
christianisme. Cécile, néanmoins, dominait tout de ses erreurs, il verrait, au moment où les
K8 IIISTOIHK GÉNÉRALE DES AUIEUUS ECCLESIASTIQUES.
frères seraient mis à niorl, la gloire qui les servante, est le vrai Dieu, » répondent tou3
alleudait. Maxime accepta la comlition, et, sur les assistants à la fois. —«Allez donc dire à
le conseil de Valérien, les conduisit, avec les l'infortuné Almachius que je demande quelque
soldatSjdaiissa maison, où les deux confesseurs délai. » Almachius l'accorde Urbain arrive
:
le deuxième
mille. Maxime, témoin de la mort duire dans sa maison et de l'enfermer dans la
des généreux frères,avait vu en même temps, salle des bahis de son palais, nommée calda-
pendant quelques instauts,la félicitédes saints. rium, que l'on devait chauffer par un feu
Aussi désirait-il le martyre avec ardeur. 11 violent et continu, afin que la vierge y mou-
prêchait Jésus-Christ à qui voulait l'entendre, rût sans éclat et sans tumulte mois la puis- :
pienne, au cimetière de Callixte, avant le troi- au même endroit où ils avaient été trouvés,
sième mille. Urbain la suivit bientôt. Un mois sans toucher ni les déranger, comme Tat-
les
après, il eut la tète tranchée avec ijlusieurs teste l'inscription gravée sur la lame d'argent
de ses prêtres. Les corps des martyrs furent qu'avait préparée le cardinal Sfondrate, pour
d'abord placés au cimetière de Prétextât; être renfermée dans la châsse *, et le récit de
mais bientôt, grâce aux soins de Marme- Bosio, témoin oculaire, qui a consigné tous les
nia, femme du vicaire du préfet Almachius, détails de cette seconde découverte à la suite
convertie au christianisme immédiatement des Actes de sainte Cécile, dont il donna, en
après le martyre d'Urbain, ils furent placés 1600,une édition revue sur les manuscrits et ac-
dans une crypte au-dessus du cimetière de compagnée de variantes et de notes al )ondau tes.
Prétextât, non loindu lieu où reposaient Va- 6. De nos jours, sainte Cécile, la reine de Histoire
de sainta
lérien, Tiburce et Maxime. l'harmonie *, le modèle des vierges et des d'elle par
r>om Gué-
5. Le pape saint Pascal ayant retrouvé, par épouses l'une des plus illustres héroïnes de
,
rangei-.
une révélation divine, les dépouilles sacrées notre foi, a été réhabilitée aux yeux de l'his-
de Cécile, de Valérien, de Tiburce, de Maxime toire, par la plume savante et éloquente du
et des papes Urbain et Lucius, les transporta révérend Père Dom Guéranger. L'/Z/s/oire de
solennellement dans la basilique de sainte Cé- sainte Cécile, parvenue à sa seconde édition,
cile, dont il venait défaire la dédicace et qu'il nous a fourni la plus grande partie de ce que
dota avec une magnificence vraiment royale. nous avons rapporté sur les Actes de cette
C'est là que reposent encore les corps de ces vierge célèbre, dont le uom est in crit au ca-
saints martyrs ; car, dans la découverte de non de la messe, et qui, dans tous les siècles,
1599, Clément VIII eut soin de les faire placer n'a cessé de recevoir des hommages.]
CHAPITRE YI.
Sainte Apolline, vierge et martyre, et plusieurs autres martyrs
d'Alexandrie, sous Philippe.
* Hùt. de sainte Cécile chap. 23 et 31. chaque année redit ces paroles de la vierge
tienté, qui
' Durant le festin nuptial on chanta l'épithalame qui au jour de son triomphe, en a gardé fidèle mémoire,
célébrait l'union de Valérien et de Cécile, et un chœur et pour honorer le sublime concert que Cécile exé-
de musiciens fit retentir la salle du son harmonieux cutait avec les esprits célestes, bien au-delà des mé-
des iustruments. Au milieu de ces profanes concerts lodies de la terre, elle l'a saluée à jamais reine de
(disent les Actes), Cécile chantait aussi, mais dans l'harmonie. Dom Guéranger, Hist. de sainte Cécile,
son cœur, et sa mélodie s'unissait à celle des anges. pag. 65, 2e édition.
Elle redisait au Seigneur cette strophe du Psalmiste, s Euseb., lib. VI Hist., cap. 41.
mes sens demeurent toujours purs, ô mon Dieu et ! apud Euseb., lib. VI, cap. 41.
que ma pudeur ne souffre point d'atteinte.» La cbré-
110 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
MAlri> cl (le
iwiiitc Qiiiu-
cette persécution fut, selon saint '
Denis, un rent de la brûler toute vive, si elle ne pronon-
t«.
vénérahlc vieillard noinniô Mèti'e Les païens
*. çait avec eux des paroles impies. Elle témoi-
se saisirent do lui et lui corainandcrcnt dj gna demander quelque temps, comme si elle
proA'^ror des hlasphùmes ; sur son refus, ils eût appréhendé leurs menaces; mais quand
le frappèrent longtemps à grands coups de on l'eut laissée à elle, aussitôt elle s'élança
butons [l'ayant traîne au faubourg,] ils lui
;
dans le bûcher, oii elle consomma son mar-
percèrent les yeux et tout le visage avec la tyre.
pointe de quelques roseaux et enfui ils le la- Pc
, A. Saint Denis rapporte ensuitemartyre
le soi
Sérapion.
pidèrent. Après cette exécution, ils s'attaquè- d'un saint homme nommé Sérapion. Les Gen-
rent à une sainte femme ^ nommée Quinte, tils, étant entrés dans sa maison, le tourmen-
la menèrent au temple où élait leur idole, et tèrent par des cruautés inouïes, et, après
luiordonnèrent de l'adorer. Comme elle le qu'on lui eut brisé tous les membres, on le
refusa avec borreur, aigris de sa constance, jeta par la fenêtre et on l'acheva sur le pavé.
ils la traînèrent toute nue, les pieds et les « II n'y avait ni rue ni chemin, dit saint Denis,
mains liés ,
par les rues de la ville sur des ni coin de la ville où il fut libre à un chrétien
pavés très-aigus, la brisèrent en la beurtant d'aller, soit le jour, soit môme la nuil. On en-
contre de grosses pierres, puis la fouettèrent tendait de tous côtés le bruit d'une conspira-
cruellcment, et, l'ayant conduite au môme Tous ces infulcles, continue saint
tion terrible.
lieu où ils avaient lapidé saint Mètre , ils lui Denis,s'exhortaientmutuellementàn'épargner
tirent souflrir le môme genre de mort. aucun de nos frères, et ils arrêtèrent entre eux
T>i- «linto 3. Animés par
ces premières violences, ils que quiconque de nous proférerait des blas-
A|-oIIiiie.
se jetèrent *, par une commuce conspiration phèmes (c'est ainsi qu'ils regardaient la pro-
de toute la ville, dans les maisons des chré- fession du christianisme), serait aussitôt puni
tiens; chacun brûlait ou
par les fenê- jetait de son opiniâtreté, traîné par les rues et brûlé
tres ce qui n'était de nulle valeur, et emportait dans le feu, qu'on tenait toujours prêt pour
ce qu'il trouvait de plus précieux. Les chré- une si cruelle exécution. C'est tout ce que
tiens,peu étonnés de ces désordres, se déro- nous savons de la persécution dont l'Église
bèrent ù ces furieux par une sage retraite, d 'Alexandrie fut affligée en cette occasion.
souffrant la perte de leurs biens avec la même Elle dura néanmoins assez longtemps, et fut
joie que les fidèles dont parle saint Paul. De suivie d'une sédition et d'une guerre civile
tous ceux qui tombèrent entre les mains de entre ces païens, qui leur fit tourner contre
ces furieux, il n'y en eut qu'un * seul assez eux-mêmes toutes les cruautés qu'ils avaient
lâche pour renier sa foi. Ce fut dans cette exercées contre les chrétiens. Les Actes du
émeute, ajoute saint Denis, qu'ils prirent martyre de saint Mètre et des
autres dont
l'admirable vierge Apolline ,
qui était déjà nous venons de parler se trouvent dans Vffis-
fort âgée. Ils lui donnèrent de si grands coups toire ecclésiastique d'Eusèbe, dans le Recueil
sur les joues, qu'ils lui firent tomber toutes de BoUandus et de Dom Ruinart. [Les Béné-
les dents. Ils la menèrent ensuite hors de la dictins de Solesmes les ont insérés dans leur
ville, allumèrent un grand feu et menacè- Hecueil, en français, des Actes des martyrs ®.]
* Dionys., Epist. ad Fabium Antiochen ; apud Eu- admirable vierge, admirandarn provectœ jam œtatis
seb., lib. VI, cap. 41.— Ou Métras. (L'éditeur.)
* virginem Apolloniam , et le culte que l'Église rend à
' Diouys., Epist. ad Fabium Antiochen apud Eu- ; cette Sainte, justifient pleinement cette action, qui
seb., YI, cap. 41. —
lib. Dionys., * ibid. pour indiscrète, si l'on n'était
d'ailleurs pourrait passer
5 Nec eorum quisquam, quod equidem sciam, nisi persuadé que sainte Apolline ne se précipita elle-
fartasse unus aliquis, in illorum manus incidens hac- même dans le bûcher, que par un mouvement extra-
tenus quidem Deum negaoit. Ibid. ordinaire de r Esprit-Saint qui l'animait, et dans le
^ L'éloge qu'en fait saint Denis, en l'appelant une désir d'aller promptement s'unir à Dieu. {L'éditeur.)
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE Vil. — SAINT SATURNIN. 4U
CÎLVPITRE Vil.
Saint Saturnin, premier évêquc de Toulouse et martyr.
[L'an 250.]
que temps après la publication des édits de parle avec de grands éloges de saint Exupère;
Dèce pour persécuter les chrétiens. Cette ce qui donne de conjecturer que l'auteur
lieu
persécution fut générale, et les Gaules y pouvait être un de ses disciples et qu'il a
furent enveloppées, comme le reste de l'em- vécu vers le V" siècle de l'Eglise.
pire : on rapporte à cette persécution le glo- 2. L'auteur des vicies, après un préambule Analyse
de ces Actes,
rieux martyre de saint Saturnin. Nous en assez court, où il marque l'usage de célébrer
avons encore les Actes, revus par Dom Rui- les fêtes des martyrs par des veilles, des
nart sur un grand nombre de manuscrits très- hymnes, des prières et par l'ohlation des
anciens. Ils sont écrits avec beaucoup d'élo- saints mystères, afin de mériter, par ces œu-
quence et de gravité, et quoique l'auteur vres de piété, leur protection auprès du Sei-
n'aitpas été contemporain, il paraît toutefois gneur, ajoute que saint Saturnin avait dans
n'avoir pas été éloigné du temps où sont ar- Toulouse une petite église où il exerçait ses
rivées les choses qu'il raconte, et lorsque l'on fonctions ordinaires. Pour y aller, il était
avait encore une connaissance exacte des obligé de passer devant le Capitolc % temple
1 A quelle époque saint Saturnin, premier évèque cument de l'Eglise d'Arles, publié par le même auteur;
de Toulouse, reçu sa mission ? La réponse à cette
a-t-il des monuments de saint Satur-
inédits, d'anciens ^c/es
question est d'autant plus difficile, qu'il y a, sur ce nin cités par De Marca Adam d'Auvergne, Bernard
;
point, plusieurs versions différentes. Une première Guidonis et d'autres écrivains du moyen âge repro-
tradition se trouve consignée dans les Actes de saint duisent cette tradition. Elle est aussi consignée dans
Saturnin cités par saint Grégoire de Tours. Il y est de vieux bréviaires et dans une ancienne inscription
dit que,« sous le consulat de Dèce et de Gratus, comme du cloître Saint-Cernin; cette tradition diffère peu de
on en garde un souvenir fidèle, la ville de Toulouse la précédente. Saint Saturnin, comme les autres mis-
commença à avoir saint Saturnin pour premier évè- sionnaires apostoliques, aura reçu primitivement sa
que. » Les écrivains postérieurs qui ont adopté cette mission de saint Pierre et ne sera parti, pour la mis-
tradition, comme Floru.«, moine de Saiut-Trond, saint sion qui lui était confièe,que sous saint Clément, con-
Adon, ont fixé à l'empire de Dèce non pas la venue, temporain de saint Pierre. La question ainsi exposée,
mais le martyre de saint Saturnin. Une seconde tradi- la solution ne paraît plus douteuse. La masse des an-
tion dont plusieurs écrivains d'une Laute antiquité se ciens témoignages et des vieilles traditions attribue
sont faits l'écho, c'est que saint Saturnin a été envoyé à saint Saturnin l'antiquité apostolique. L'auteur des
dans les Gaules par saint Clément, à la fin du pre- Actes de saint Saturnin se sera mépris sur le temps
mier siècle. Grégoire de Tours reconnaît que cette de la mission de saint Saturnin, d'autant plus qu'il
tradition avait cours de son temps, De Gloria Mart., ne la cite qu'après le bruit public, ex fideli ou felici
cap. 48. Raban-Maur, Odons de Beauvais, les Actes recordatione. Voyez la savante Dissert, de M. Arbellot
de saint Denijs et la Légende de saint Marcel, cités sur l'apostolat de saint Martial. {L'éditeur.)
dans le second concile de Limoges, un grand nom- 2 Fortunat., lib. II, cap. 8.
bre d'écrivains du moyen âge ont adopté cette se- 3 Ante annos L, sicut actis publicis continetur, id est
conde tradition. Enfin une troisième tradition, qu'on Decio et Grato consulibus, sicut fideli recordatione re-
trouve également dans les légendes d'une haute an- tinetur, primum et summum Christi Tolosa civitas san-
tiquité, fait envoyer saint Saturnin du temps même ctum Saturninum habere cœperat sacerdotem. Ruinart,
des Apôtres. On cite, en particulier, la Légende de saint Act.sinc. Martyr., pag. 130.
Denis, altribuée avec raison àFortunat; l'ancienne * Il y avait dans les principales villes de l'empire
Légende de saint Ursin, publiée par M. Paillon ; le Do- des temples bâtis sur le modèle du Gapitole, et qui
il-2 IIISÏ01RI-: GI'N1':UALE DES AUTEURS ECCLI^SIASTIQUES.
où l'on adorait les damons. Comme il faisait demeura en cet endroit. Deux saintes fem-
souvent ce chemin, sa présence fit taire les mes l'enfermèrent dans un cercueil de bois
démons, de telle sorte qu'au grand étonnc- et le descendirent dans une fosse profonde,
mcnt de ceux qui les consultaient, ils ne ren- songeant moins à lui dresser un tombeau
daient plus d'oracles. On s'en prit aux chré- qu'à dérober ces précieux restes à la haine
tiens, et nommément à Saturnin, leur chef, des païens.
parce qu'il passait souvent devant leCapitole. 3. Longtemps après, que l'on
saint Ililaire, ^,p i,'/',';'^'^^;
Cependant, pour s'assurer de la cause d'un croit avoir été le troisième évèque de Ton- '*!."<"' '*'?,
*
changement si subit, les païens disposèrent louse, fit creuser * en cet endroit et y trouva ^'''"'•
toutes choses pour un sacrifice extraordinaire, le cercueil du saint martyr. Mais, n'osant
espérant rappeler les dieux dans leur an- touchera ses reliques, il se contenta de faire
cienne demeure. Mais lorsqu'on allait com- une voûte au-dessus, avec un petit bâtiment
mencer, ils aperçurent le saint qui passait pour servir d'oratoire. Les fidèles s'y étant
pour aller célébrer l'ofljcc du jour dans sa fait enterrer dans la suite, par dévotion envers
petite église. Croyant que l'occasion était fa- saint Saturnin, ce lieu se trouva rempli de
vorable, ou pour apaiser les dieux en obli- tombeaux ; ce qui inspira à saint Silvic, évê-
geant leur ennemi de leur sacrifier, ou pour que de la même ville, le dessein de bâtir une
les venger en le sacrifiant lui-même, ils se église magnifiquepour y transporter les re-
saisirent de lui, l'amenèrent au Capitule et liques dula commença, mais elle
Saint. Il
le pressèrent de sacrifier aux idoles. « Je ne fut achevée que par saint Exupère, son
n'adore qu'un Dieu, répondit Saturnin; c'est successeur. Comme ce prélat n'osait, par res-
lui qui est le seul et le véritable Dieu, et je pect, y transférer ces reliques, il fut averti
suis prêt à immoler des victimes de
lui dans une vision de ne pas clitïcrer plus long-
louange?. Vos dieux ne sont que des démons temps. Il présenta ' donc une reijuêle aux
qui prennent beaucoup plus de plaisir au empereurs, pour en obtenir la permission,
sacrifice que vous leur faites de vos âmes, parce que les lois romaines ne permettaient
qu'à ceux de vos taureaux. Comment voulez pas qu'on touchât aux corps des morts après
vous que je les craigne, eux qui, de votre les devoirs de la sépulture. Il l'obtint sans
aveu, tremblent devant moi. » Les païens, peine et transféra les reliques du martyr
,
indignés de voir leurs dieux méprisés, atta- avec une magnificence digne de sa piété et
chèrent le Saint par les pieds, avec une corde, de la gloire de saint Saturnin. L'auteur de ce
à la queue d'un taureau indompté, que l'on récit, qui paraît avoir été homme de vertu et
avait amené là pour l'immoler. Puis, pressant de savoir, ajoute que, si nous sommes fidè-
cet animal furieux à grands coups d'aiguillon, les à demander aux saints leur intercession
ils le forcèrent à se précipiter du haut du Ca- auprès de Dieu, nous éprouverons * les effets
pitule. Il entraîna après lui le saint évêque, de leur protection. Saint Grégoire de Tours,
qui, dès la première sccoussc,eutla tête brisée saint Sidoine et Fortunat disent plusieurs
et perdit la vie, pour en acquérir une autre choses de saint Saturnin, qui sont conformes
pleine de gloire et de bonheur. Cependant le à ce que nous lisons dans les Actes de son
taureau continuant à traîner le corps du mar- martyre. Surius les a insérés dans son Re-
tyr, ses membres et son sang se répandirent cueil, et ont été traduits en français par
ils
de tous côtés, jusqu'à ce que, la corde s'étant Drouet de Maupertuy, qui a mis en cette lan-
cassée dans la plaine, ce qui restait du corps gue les Actes des martyrs recueillis par Dom
Thierry Ruiuart. On a réimprimé plusieiu's les Bénédictins, contient aussi, en français, les
fois cette traduction flasque et souvent infi- Acf es de saint Saturnin.]
dèle. Le tome II des Acies des Martyrs, par
CHAPITRE IX •
Saint Pione, prêtre de l'Eg^lise de Sinyrne et martyr.
[L'an 250.]
1. Eusèbe, après avoir rapporté ce qui est ne point abandonner l'autorité de ces Actes,
dit du martyre de saint Polycarpe dans la il est nécessaire de rejeter celle d'Eusèbe, et ii
Lettre de l'Eglise de Smyrne, ajonte qu'il *
faut dire qu'il a confondu deux faits qu'il de-
était aussi parlé dans cette Lettre de plusieurs vait distinguer. Comme les Actes de saint V'.ona
autres qui souflrirent le martyre avec lui; on étaient décrits dans un même cahier, à la
y parlait en particulier de Métrodore prêtre ,
suite deceux du martyre de saint Polycarpe,
de la secte de Marcion, qui fut brûlé vif, et on comprend que l'erreur était facile pour
du célèbre Pione. Ce récit a donné lieu à plu- Eusèbe. Quoi qu'il en soit, l'abrégé, donné par
sieurs critiques de soutenir que saint Pione cet auteur, de l'histoire de saint Pione, qu'il
avait souffert sous Marc-Aurèle, en même avait insérée tout entière dans son Hecueil
temps que saint Polycarpe. On ne peut, en des anciens martyrs, est conforme aux Actes
effet, douter raisonnablement que ce ne soit du martyre de ce saint, preuve que ces Actes
le sens des paroles d'Eusèbe. Cependant les sont les mêmes que ceux qu'Eusèbe avait eus
Actes du martyre de saint Pione, qui sont re^ en main, et qu'ils sont authentiques. Mais
eus des plus habiles comme tout-à-fait légi- ce n'est pas seulement sur l'autorité de ces
times et authentiques, comme très-purs et Actes quB l'on fixe l'époque du martyre de
comme excellents, parlent '^
de Dèce, qui n'a saint Pione sous l'empire de Dèce. La Chro^
commencé à régner que soixante et dix ans nique ^ d'Alexandrie le met dans le mémo
après Marc-Aurèle. Ils font aussi mention temps et ce qui prouve incontestal)lement
,
des 5 cataphryges, que l'on n'a connus que que ce saint n'a point souffert sous Marc- A u^
plusieurs années après la mort de saint Poly- dans la Lettre de l'Église
rèle, c'est qu'il est dit
carpe; d'Eudémon évêque de Smyrne, qui
*, de Smyrne que saint Polycarpe a terminé,
'
renonça à la foi dans une persécution ; enfin par sa mort, la persécution que ce princo
de la fête de saint Polycarpe *, jour auquel avait excitée contre les chi'étiens, En effet, U
saint Pione fut arrêté pour la foi. Ainsi, pour suite d'Eusèbe ne permet point de dire que
^ Sed et alia marbjria sub idern tempus quo Pohj- * Ada sunt hœc consule imperatore Caïo Decio. Num,
carpus passus est, apud Smyrnam f'acta in eadem epis- 23.
iola conjunctim leguntur, in quihus et Metrodorus qui- 3 Invenerunt mulierem,nomine Macedoniam, de Car^
dam, qui Marcionis sectœ presbyter dicebatur, flammis cereno vico, sectœ Phrygum. Ibid., num. 2.
consumptus Celeberrimus quoque inter reliquos
interiit. * Eo in loco ubi erat ille Eudemon.quem paulo ante
ejus iemporis martyres fuit Pionius. Cujus singulns sacrificasse dicebant. Ibid., uum. 16.
confcssiones ac libertalem in dicendo, ut quœ coram ^ Secundo itaque die.... natale Polycarpi martyris
populis ac prœsidibus, pro fidei nostrœ defeusione per- célébrantes. Ibid., num. 2.
oraverit. Conciones item de institutione fidei, prœterea La Chronique d'Alexandrie, en marquant ce qui
6
cohortationes atque invitationes ad eos qui persecutio- s'est passé dans la persécution de Dèce, dit Smyrnœ, :
nis tempore laxi fuerant : allocutiones etinm et consola- Asiatica civitatc, Pionius tuni aliis haud paucis Christi
tiones quas in carccre positus adeuntibus ipsum fratri' causa occubuit. Vir erat eruditus et christianarum
bus adhibuit : quœ super his tormenta quantosque do- disciplinaru7n sanctiore cognitione probe imbutus, Pru,
lores sustinuerit : cluvorum insuper confixioncs et mi- clo Quihtiliano, Asiœ proconsule, IV Idus Martias,
rabilem in medio rogo constantiam ; mortem demque pag. 632.
ipsam, quœ cuncta illa miracula subsecuta est, si qui ' Scripsimus vobis, fratres, tum de reliquis martya
volent cognoscere, eos ad epistolam de illius martyrio ribus, tuin de beaio Polycarpo, qui martyrio suo, velut
uberrime conscriptam amandamus quam nos in opère ,
signuculo quodam persecutioni finem imposuit, Eusl'Jj.^
de prisais martyr ibus, quorum passiones collegimuSj or- lib. IV, cap. 15,
dine suû inseruimus. Euseb., lib. IV cap. 15.
II.
\[\ IIISTOIIU-: GENERALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
snint Pionc ait soullert avant saint Polycarpe; persécuteurs vissent qu'ils étaient disposés à
il rapporte en premier lieu le martyre de ce souffrir. Le samedi, après qu'ils eurent fait
saint évê(pie; puis il remanjue que colui de la prière solennelle et pris le pain ' sanctifié
saint Piono étiiit décrit dans la Lettre de r E- el d«; Polémon, garde du temple des
l'eau ,
ijlise de Sinijrne, à la suite de l'histoire de idoles, entra chez eux avec des archers. Quand
saint Polycarpe , comme étant d'une date il vit Pione, il lui dit: «Vous savez sans doute
postérieure. Ilfautencore ajouter que le grand l'ordre de l'empereur qui vous commande de
nombre dos tombés, dont il est parlé
tidèles sacrifier. » —
Nous savons, répondit Pione,
«
dans les Actes de saint Pione , convient beau- le commandement que Dieu nous fait de ne
coup mieux à la persécution de Déce qu'à sacrifier qu'à lui seul. » Polémon ajouta « Ve- :
celle de Marc-Aurèle^ qui fut moins générale nez donc à la place, et vous verrez la vérité
et moins violente. de ce que j 'ai dit. » Sabine et Asclépiade dirent
0"i Mrit 2. Saint Pione ' était prêtre catholique de à haute voix: « Nous obéissons au vrai Dieu.»
ment, lui mérita la qualité d'homme apos- s'adressa surtout aux Juifs. 11 leur fit voir que
tolique, et regardé parmi les païens
il était lecrime d'idolâtrie qu'ils reprochaient à quel-
comme le docteur des chrétiens. Il parait, par ques-uns des chrétiens qui avaient depuis
ses harangues, qu'il avait voyagé en divers peu abandonné la foi, était beaucoup moins
pays, particulièrement dans la Palestine, où grand que celui dans lequel ils étaient eux-
ilavait vu ' avec étonnement les marques de mêmes tombés si souvent, d'après l'Ecriture,
la juste vengeance de Dieu contre les crimes par une dépravation toute volontaire de leur
des Sodomites. Quelque temps avant son cœur. Il montra ensuite aux païens qu'il
martyre, le pays ayant été affligé par la fa- leur était également honteux d'insulter à des
mine *, par les guerres et les autres calami- misérables, attendu que la faute d'un petit
tés, il en éprouva lui-même les rigueurs, nombre de chrétiens déserteurs ne pouvait
qu'il supporta * toutefois avec la paix que porter préjudice aux autres. «Pour nous, ajou-
lui donnait la confiance qu'il avait en Dieu, ta-t-il,uous n'adorons point la statue d'or, ui
sans vouloir être à charge à personne, eu tous vos dieux. »
quelque besoin qu'il se trouvât. Pione fut écouté de tout le monde avec
4. n est i
Aaaiyeft 3. L'édit dc Dèce, portant ordre de persé- une grande attention; mais comme d répétait ridique^
s n murty- cutcr Ics cluctiens, avait de a été publie dans ces dernières paroles, on tira les martyrs couf"fse j
^
3"; il est nr-
pouria Smyrne, ville d'"Ionie,et Eudémon, qui en était
évèque, venait de renoncer à Jésus-Christ,
.
d'être brûlés après la mort.» Sabine s'étant rent de leur apporter toutes sortes de rafraî-
mise à pendant cette contestation les
rire , chissements; mais Pione, qui ne songeait qu'à
païens lui dirent d'une voix menaçante « Quoi : ! mourir, les refusa. Ils reçurent môme dans la
vousricz?))Elledit:« Jeris^si Dieu le veut, car prison la visite de plusieurs païens, qui s'en
nous sommes cbrétiens.» On la menaça de la retournèrent surpris de la sagesse de leurs
jeter dans des lieux infâmes; elle répondit «Le : réponses et sans avoir pu les faire changer
Dieu saint y pourvoira. » Polémon^ revenant de résolution. Ceux qui, par la violence des
à Pione, le pressa de nouveau de sacrifier au persécuteurs, avaient renoncé à Jésus-Christ,
moins à l'empereur; mais, sur son refus, il y vinrent aussi, déplorant leur chute avec
l'interrogea juridiquement, et un notaire fut beaucoup de larmes. Pione en fut sensible-
chargé de mettre ses réponses par écrit sur de ment affligé il croyait voir en leurs person-
:
la cii'e. Pione, interrogé sur son nom, répon- nes les perles de l'Eglise foulées aux pieds
dit: «Je suiscbrétien.» —
«De quelle Eglise?» dit des pourceaux; car la plupart de ces chrétiens
Polémon. Pione dit: «De l'Eglise catholique.» avaient mené une vie sans reproche avant
Le juge fit la même demande à Sabine; mais leur apostasie. Il les exhorta à la pénitence *
comme elle avait changé de nom^par le conseil et à recourir avec confiance à la bonté de
de Pione, de peur de retomber entre les mains Jésus-Christ, leur prouva qu'il était vraiment
de sa • maîtresse païenne, elle répondit qu'elle ressuscité et qu'd n'était point mort par force,
s'appelait Théodote et chrétienne. «De quelle comme disaient quelques Juifs, qui tâchaient
Eglise?» —
«Catholique,» dit-elle. «Quel Dieu — d'attirer à leur parti ces chrétiens apostats.
adorez-vous?» ajouta Polémon. Elle* répondit : 6. Pendant qu'ils sortaient de la prison, oni^tr»t-
«Le Dieu tout-puissant qui a fait le ciel et la Polémon et Théophile, maître de la cavalerie, ';,^,^''''
''»•
terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent, que survinrent ; après plusieurs contestations et
nous connaissons par Jésus-Christ son Verbe.» après avoir fait souffrir beaucoup de mau-
Asclépiade répondit de même qu'elle était vais traitements aux martyrs, ils traînèrent
chrétienne de l'Eglise catholique et que le , Pione dans le temple et le mirent devaut l'au-
Dieu qu'elle adorait était 'Jésus-Christ. «Quoi tel comme une victime. Eudémon, évêque de
donc! est-ce un autre Dieu?» dit Polémon.— Smyrne,qui avait sacrifié depuis peu,se trouva
« Non, répartit Asclépiade, c'est le * même là. Lépide, qui était juge, s 'adressant aux
qu'ils viennent de confesser. » martyrs, leur demanda d'une voix sévère
" 7; 5. Après ce premier interrogatoire les mar- pourquoi ils ne sacrifiaient point?«Parce que,
tyrs furent ramenés en prison. Ils y trouvè- répondit Pione, nous sommes chrétiens.» Plu-
rent un prêtre de l'Eglise catholique, nommé sieurs autres essayèrent inutilement de vaincre
Lemnus, une femme du bourg de Germa, leur résistance. Un sacrificateur vint avec des
nommée Macédonie, qui avaient aussi été broches où étaient les entrailles des victimes
arrêtés le même jour avec un montaniste encore chaudes, comme pour les donner à
nommé Eutychieu. Les chrétiens se pressè- Pione; mais il u'osa les présenter à aucun
* Cette femme, voulant faire abandonner la foi à vates illa poterat excitare Samuelem ? si potuisse con-
Sabine, sous l'empire de Gordien, l'avait enchaînée senserint, iniquitatem plus justifia passe confessi sunt:
et reléguée dans les montagnes, où les frères la si negaverint sic mulierem reduxisse, necesse est ut
nourrirent secrètement. Dominum Jesum Christum, non sic rediisse convin-
* Deum omnipotentem,qui fecit cœlum et terram,ct cantur... quomodo poterat vatis mulieris dœmon sancti
mare et omnia quœ in eis sunt, quem cognovimus per prophetœ excitare animant jam olim in sinu Abrahas
Verbum ejus Jesum Christum. Act. Pionii, ibid., positam et in paradiso quiescentem : cum semper quod
uum. 9. minus valet a potentiore vincatur? ergo, ut arbitrant
' Quem colis Deum ? illa respondit : Deum onini- tur, Samuel in lucem reductus est ? Minime. Quid est
potentem, qui fecit cœlum et ierram, mare et omnia ergo ? Sicut omnibus qui Deum pura mente suspiciunt,
quœ in eis sunt, quem cognovimus per Verbum ejus anyeli adesse festinant : ita veneficis vel incantatori-
Jesum Christwn. Ibid., num. 9. bus, vel sortilegis, vel furorem sub vaticinationis spe-
* Quem Deum colis? i-espondit : Christum. Polémon : cieper dévia rura vendentibus, dœmones obsequuntur... ,
Quid ergo? Iste alter est? respondit : Non, sed ipse ideo ergo Samuel non est reductus, sed illi mulieri et
quem et ipsi paulo ante confessi sunt. Act. Pionii. prœvaricatori Sauli dœmones ad personani illius se os-
* Dans ce discours il cite l'histoire d'Amau et celle tendere formati. Quod ita postmodum Scriptura mons-
de Susanne, et donne à l'Eglise le titre de catholi- travit. Dicit enim Samuel ad Saulem Et tu hodie :
que :Quid memorem et aliqua mirabilia quœ in Ec- mecum eris. Quomodo poterat cum Samucle invenii-i
clesia cutholica contigerunt? Ibid., uum. 12 et 13. Il deorum cultor et dœmonum ? cui non manifestum est
y dit encore que la Pylhonisse n'évoqua point Sa- quod Samuel cum injustis non erat ? Act. Pionii,
muel, et qu'elle n'avait point ce pouvoir. Quid ergo uum. 14.
ilC IIL^TOIRE GÉNÉllALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
d'eux, et PC contenta de les manger lui-même cevez mon ûme.» Quand le feu fut éteint, Ie3
devant tout le monde. On ramena donc les fidèles trouvèrent le corps du saint martyr
confesseurs en prison, où ils louèrent Dieu entier et comme en pleine santé, les oreilles
de la force qu'il leur avait donnée. molles, les cheveux tenant à la tète, la barbe
Il rarcit Quelques jours après, le proconsul Qnin-
7 . belle, tout le visage éclatant. Ce martyre eut
prmo„*.,i, lilieu,'étant revenu à Smyrne et s'étant assis lieu sous procon>ul Proculus Quintilien,
le
«111 lu cou- «'
j,.mni- 4 ,».
sm- gQn tribunal, se fit amener Pionc, lui sous le troisième consulat de l'empereur
demanda sou nom, de quelle secte il était, Dèce, et le second de Grains, selon les Ro-
et s'il était le docteur des ciiréticns. Pionc mains, le quatrième jourdes ides, c'est-à-dire
répondit qu'il était de l'Eglise catholique et le douzième de mars; selon l'usage de l'Asie,
qu'il instruisait les chiétieus. Lo proconsul Ift le douzième du sixième mois macédonien,
pressa de sacrifier et de dire que c'est Jupiter nommé Xautique, à dix heures; suivant notre
qui Gît dans le ciel avec les autres dieux et manière de compter, l'an de Jésus-Christ
toutes les déesses. Mais, le voj-ant forme dans 2o0, le cinquième jour de mars, à quatre
la foi, de l'avis de son conseil, il prononra heures après midi. Les Actes ne disent rien
la sentence contre Piono, en ces termes : du martyre de Sabine et d'Asclépiade, ni du
« Pione, sacrilège, s'étant avoué chrétien, prêtre Lemue, ni de Macédonie, qui avaient
nous avons jugé qu'il doit être brûlé vif, été les compagnons de la prison et d'une
pour venger les dieux et donner de la crainte partie des souffrances de saint Pione; nid'Eu-
aux hommes. » Le Saint se rendit avec joie tychien le montaniste, qu'il avait trouvé en
an lieu du combat, et, sans attendre qu'on le prison. Le Martyrologe romain ^ attribue à
lui dit, il se déshabilla lui-même ; puis, après saint Pione des écrits pour la foi, que Ton
avoir rendu grâce à Dieu, les yeux élevés au croit n'être autre chose que les discours que
ciel, il s'étendit sur le bois et se livra à un nous hsons dans ses Actes, On voit aussi, à la
soldat pour être cloué. L'exécuteur s'offrit de fin de l'histoire ^ originale du martyre de
le détacher, s'il voulait changer d'avis. Le saint Polycarpe, une note où il est dit qu'elle
Saint répondit : «J'ai bien senti les clous;» et, avait été décrite par Caïus, sur la copie de
après être demeuré quelque temps pensif, il saint Irénée, et par Socrate, sur la copie de
ajouta :« Je me presse. Seigneur, pour me re- Caïus. Il y encore qu'un nommé Pione,
est dit
lever plus tôt;» faisant entendre au peuple que ayant été averti dans une révélation par saint
nous ressusciterons après la mort. On ratta- Polycarpe, avait cherché la copie de Socrate
cha au bois et on l'éleva ensuite il y avait : et qu'il en avait rassemblé les feuilles déjà
à côté de lui un nommé Métrodore, qu'Eu- presque gâtées par la longueur du temps. Si
sèbe dit avoir été de la secte des marciouites. ce Pione est le même que celui dont nous
Ils étaient tous deux tournés vers l'Orient, venons de rapporter les Actes, il est visible
Pioue à droite, Métrodore à gauche. L'on qu'il n'a pu souffrir le martyre en même
dit Amen, avec un visage gai, il expira comme des Actes des Martyrs, par les Bénédictins
par un léger soupir, en disant: «Seigneur, re- de Solesme].
y
[lir SIÈCLE.] CHAPITRE X. — SAINT ACACE. dl7
CHAPITRE X.
Confession de saint Acace, évêque en Orient, et marlyi-c de quelques autres»
Smyrne, Acace, évêque en Orient, fut amené * et l'esprit. Ainsi le Fils de Dieu, la parole de
devant le consulaire Marcien, qui lui repré- vérité, est sorti de son cœur ; c'est pourquoi
senta d'abord l'amour et le respect que Pon il est écrit' :«Mon cœur a produit une bonne
devait aux princes. Acace répondit que per- parole. » Pour engager Acace à sacrifier, Mar-
sonne ne s'acquittait mieux de ce devoif" que cien lui dit «Regardez les cataphryges, gens
:
les chrétiens ,
qui priaient continuellement d'une ancienne religion ; ils ont quitté leurs
j)Our l'empereur, pour la durée et la prospé- vieilles erreurs pour sacrifier aux dieux avec
rité de sou règne, pour ses armées et pour la nous. Obéissez de même, rassemblez tous les
paix de tout le monde. Quelques instances que chrétiens de la loi catholique qui dépendent
Marcien fit ensuite pour Pobliger à sacrifier à de vous, et embrassez avec eux la religion de
l'empereur, Acace demeura ferme et dit qu'il l'empereur.» Acace lui fit cette excellente ré-
ne sacrifiait point à un homme et n'offrait ses ponse Ce n'est pas moi qui les gouverne ;
: «
pi'ières qu'au Dieu d'Abraham, d'Isaac et de c'est l'ordre de Dieu. Qu'ils m'écoutent si je
Jacob, au Très-Haut qui est assis sur les Chéru- leur conseille des choses justes ; si je leur eu
bins et les Séraphins. Marcien dit au saint qu'il propose de mauvaises, qu'ils me méprisent !»
s'égarait dons une vaine philosophie, et qu'il IMarcien lui demanda son nom et celui des
devait se contenter d'adorer pour vrais dieux prêtres de la même Eglise. Acace, après avoir
ceux qu'il voyait, sans se mettre en peine faitquelque difficulté, répondit: «Je suis de-
des dieux qu'il ne voyait point. Acace sachant vant le tribunal, et vous demandez mon nom?
que, par ces dieux visibles, Marcien entendait espérez-vous en pouvoir vaincre plusieurs,,
particulièrement Apollon, lui objecta les fa- vous que je coiifonds moi seul? Si vous êtes
bles de Daphné, d'Hyacinthe et de quelques curieux de noms, on m'appelle Acace ; mon
autres, et conclut que, même au prix de la nom propre est Agathange, et mes deux com-
vie, il n'adorerait pas ceux dont ne lui était
il pagnons, Pison, évêque de Troie, et Ménandre,
pas permis d'imiter les impuretés. Marcien prêtre.» IMarcien envoya cet interrogatoire à
le menaça de mort, ne sacrifiait à Jupiter
s'il l'empereur Dêce, qui, en ayant lu le procès-
et à Junon.oJ'ai ordre, répondit Acace, de ne verbal, ne fit que rire de cette dispute ; mais
jamais nier mon Dieu, Si vous obéissez à un il conçut une telle estime pour Acace, qu'il
homme faible, qui sortira bientôt de ce monde ordonna qu'on le remit en lil)erté. Les Actes
et sera mangé des vers, combien dois-je plus d'AcQce sont rapportés comme authentiques
obéir au Dieu tout-puissant, qui est éternel et par Bollandus, par Mombritius et par Dom
qui dit : « Qui me reniera devant les hommes, Ruinart.
je le renierai devant mon Père qui est au Ce dernier rapporte, immédiatement à la
2. M.irtvi'e
ciel.» — ((Dieu a donc un fils?» reprit IMarcien. suite, ceux du martyre de saint Maxime, que
de!:;iiut
xime,
sso.
Ma-
luQ
«Oui, dit Acace, et ce Fils est le Verj)e ^ de vé- Surius, Baronius et Henschenius avaient déjà
de grâce.»
rité et —
«Quel est son nom?» ajouta donnés au public. Maxime était marchand de
IMarcien. Acace répondit «Il s'appelle Jésus- : profession. Ayant eu avis de Tédit de Dèce
Christ.» Marcien dit « De quelle femme Pa-t-il
: contre les chrétiens, il se déclara hautement
eu?» —
«Dieu n'a pas engendré son Fils à la pour serviteur de Jésus-Christ. Aussitôt il fut
manière des hommes, repartit Acace. Il aformé arrêté et conduit devant Optime, proconsul
* Il paraît qu'il était évêque d'une ville nommée dam acvQÏwgmm Antiocluœ regionis a^(of^e>'a^ Ruinart,
Antiocbe, mais différente de celle de Syrie sa cha- : Acta sine., pag. 152, aum. 2.
rité et son zèle lui avaient fait donner le nom de 2 Verbum veritatis et gratiœ... Jésus Christus voca-
bouclier et de refuge du paj-s. Quem scutum quod- tur. Ibid., nuin. 4. — ' Psalm. xliv.
4i8 IlISTOinE GI-:XKRALE DKS AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
d'Asie. Le jiiajc lui demanda son nom, sa pro- qu'il luidonnait dans ces tourments, et lui
fession et s'il était informe des ordres de demandait la force de vaincre entièrement son
l'empereur contre les chrétiens. INIaximc ré- ennemi. Le proconsul, voyant qu'un si grand
pondit :« Quoique pécheur, je suis chrétien, et supplice ne l'ébranlait point, lui fit couper la
je vis de mon trafic ;
je sais l'ordre injuste du tête. On présenta ensuite an proconsul trois
prince, c'est pourquoi je me suis montré en autres chrétiens, André, Paul et Nicomaquc.
public.» Le proconsul lui ordonna de sacrifier Après les interrogations ordinaires. Optime
aux dieux. Maxime ayant répondu qu'il ne commanda à ce dernier de sacrifier. Nico-
sacrifiait qu'à Dieu seul, Optimc le fit battre maque qui, selon les Actes, avait témoigné
à coups do bâtons ; et comme il l'exhortait d'abord trop de hardiesse, répondit : « Un
encore à sacrifier pour se délivrer des tour- chrétien ne doit point sacrifier aux démons.»
mcnts^le Saint répondit: «Ce que l'onsoufi're Le proconsul prendre et tourmenter.
le fit
*
pour le nom
de notre Seigneur Jésus-Christ Mais lorsqu'il de rendre l'âme, il
était prêt
n'est pas un tourment, c'est une onction sa- s'écria qu'il n'avait jamais été chrétien , et
lutaire. Mais, si j'abandonne ses préceptes, qu'il était disposé à sacrifier aux dieux. Il y
les vrais tourments m'attendent, et ils sont sacrifia en eflet ; aussitôt il fut saisi du
éternels.» On le suspendit ensuite, et pendant démon en se frappant contre
et finit sa vie
qu'on le tourmentait, le proconsul lui dit : terre et en se coupant la langue avec ses
« Reconnais ta folie et sacrifie pour sauver ta dents. Alors une vierge nommée Denyse
vie.» — «Je la sauverai, reprit Maxime, si je ne âgée de 16 ans, qui était là présente, com-
sacrifie point, et je la perds si je sacrifie. Ni mença à s'écrier« Malheureux, fallait-il, pour
:
vos bâtons, ni vos ongles de fer, ni vos feux, un moment de relâche, t'attirer des peines
ne me font point de peine, parce que la grâce ^ éternelles » Le proconsul l'entendit et la fît
!
de Jésus-Christ demeure en moi, et elle me approcher, lui demanda si elle était chré-
sauvera par les prières de tous les saints qui tienne. «Oui, répondit-elle, jela suis, et c'est
ont vaincu avant moi dans ce combat.» Le pour cela que je pleure ce miséiable qui perd
juge le condamna enfin à être lapidé, ce qui un repos ® éternel pour n'avoir pu soufifrir
fut exécuté sur-le-champ. On croit que ce fut une peine d'un moment.» Le proconsul la li-
à Lampsaque, où le même Optime fit d'autres vra à deux jeunes hommes pour la corrompre,
martyrs, le lendemain de la mort de saint et fit mettre en prison André et Paul. Le len-
Maxime, c'est-à-dire le 14 de mai de l'an 250. demain au matin, tout le peuple vint trouver
Marirre 3. Lcs autrcs martyrs de Lampsaque ^ sont le proconsid, lui demandant avec de grands
p!er,v*"An- Plerrc, André, Paul et Denyse, vierge. Le pre- cris qu'il leur abandonnât André et Paul. U se
""ntnyse! ft mlcr était un jeune homme bien fait de corps les fit amener et leur ordonna de sacrifier
aûvlS.'iïo''' et d'esprit. Après qu'il eut dit son nom et à Diane. «Nous ne connaissons, dirent-ils, ni
confessé qu'il était chrétien, le proconsul Op- Diane ni les autres démons, et nous n'avons
time lui ordonna de sacrifier à Vénus. « J'aime jamais adoré que Dieu seul. «Sur cela, le pro-
mieux, répondit Pierre, sacrifier au Dieu vé- consul les fit fouetter et les livra au peuple,
ritable et vivant, à Jésus-Christ *, roi de tous avec ordre de les lapider. Pendant l'exécution,
les siècles, et lui ofi"rir un sacrifice de prières Denyse, sachant ce qui se passait, s'échappa
et de louanges, qu'à cette infâme.» Sur cette des mains de ceux qui la gardaient et courut
réponse, Optime commanda qu'on l'étendit en pleurant au lieu où ou lapidait les deux
sur une roue, où on lui brisa tous les os. Le confesseurs. Elle se jota par terre avec eux,
Saint, cependant, se moquait du tyran et ren- en disant :« Je veux mourir ici avec vous, afin
dait grâces à Jésus-Christ » de la patience de pouvoir vivre avec vous dans le ciel.» On
1 Hœc non sunt tormenla quœ pro nomine Domini Mincuro. dans la petite Mœsie. et une des plus con-
noslri Jesu Chrisfi infcruntur, sed sunt WKtiones. Si sidérables de l'Hellespont. — * Oportet me magis Deo
enim reccssero a Domini prœceptis ,quibus sum de Evan- vivo et vero, régi sœculorum omnium Christo, sacri-
gelio ejus erudiius, vera et perpétua mihi mancbunt ficium offcrre orationis et taudis. Ruinart, Act. sine,
tormcnta. Ruinart, Ad. sine, pag. 157. pag. 159.
' Milii enim nec fustes, nec ungulce, nec if/nis sen- ^ Tibi ago gratins. Domine Jcsu Christe, qui mihi
tiendi doloreyn dont; quia in me nianet gratiaChristi, hanc tolerantiam dore dignatus es ad vincendum ne-
quœ me salvum faciet in œternum, omnium sanctorum quissimum ftjrannum. Idem, ibid.
orationibus, qui in hac colluctatione certantes, vestras * ^fiser et infelicissime homo, cur. propter unius horce
superaverunt insanias nobisque virtutum exempla re- spaiium, acquisisii tibi perpetuam et inenarrabilem
liqucrunl. Ibid. — ' Lampsaque est une ville de l'Asie pœnmn !
[ill^ SIÈCLE.] CHAPITRE X. — SAINTS TRYPHON ET RESPICE. lid
corps d'André et de Paul. Optime commanda tout. » Un olEcier, nommé Pompéianus, leur
qu'on la séparât des deux martyrs et qu'on dit pour les épouvanter « Selon l'ordre de
:
lui tranchât la tête. Cette sentence fut exécu- l'empereur, ceux de votre religion doivent
tée le 15 mai de l'an 250, la deuxième année être brûlés vifs, s'ils ne sacrifient aux dieux.»
durègnede Dèce.Les Actes de ces martyrs sont Respice témoigna qu'ils n'avaient pas de plus
écrits avec beaucoup de simplicité et n'ont rien grand désir que de mourir pour ^ Jésus-Christ,
que de beau et d'édifiant. Il paraît néanmoins Le juge, les voyant également insensibles aux
que celui qui en est auteur écrivait plusieurs menaces et aux caresses, commanda qu'on
années après la persécution de Dèce. Mais il les mît à la torture. Les martyrs la souffrirent
les avait, apparemment, tirés du greffe ou l'espace de près de trois heures sans se plain-
composéssur des mémoires dressés par un té- dre, n'ouvrant la bouche que pour menacer
moin oculaire, car ils ont toutes les marques le juge de la toute-puissance de Dieu et des
de pièces originales. On les trouve dans Vin- supplices dont il punira les adorateurs des
cent de Beauvais, dans Surius et BoUandus. idoles. A ces mots, Aquilin se xeva pour aller
Martyre 4. C'est encore à la persécution de Dèce à la chasse, et ordonna que l'on y menât, atta-
de saint
Tryphra 'et qu'll faut rapporter le martyre de saint Try- chés à la queue des chevaux, les deux mar-
do saint Res-
pice phon et de saint Respice. Le Père Cajetan et tyrs. Comme il faisait un très-grand froid,
Dom Ruinart, après lui, nous en ont donné leurs pieds, qui étaient nus, s'ouvrirent et se
les Actes entièrement dépouillés de ce qu'ils fendirent. Il les fit ensuite mener en prison,
avaient de fabuleux dans Métaphraste, dans avec menaces de les tourmenter cruellement
Vincent de Beauvais, dans Surius et quelques s'ils ne sacrifiaient. Après qu'ils y eurent de-
giens, nés dans un village nommé Sansore, que vous nous conseillez, qu'en demeurant
dans le territoire d'Apamée, de la province inébrankbles dans la confession de * notre
de Bithynie, dont Aquilin était aussi gouver- Seigneur Jésus-Christ, qui viendra un jour ju-
neur. Leur naissance n'avait rien de relevé ; ger tous les hommes.» — « Que l'on apporte des
mais, quoiqu'ils fussent encore fort jeunes, il clous, dit legouverneur en colère, et qu'où
y avait déjà quelque temps qu'ils éclataient les plante dans leurs pieds.» Il les fit traîner
par les dons et les grâces extraordinaires que en cet état par le milieu de la ville, pendant
Dieu avait mises en eux, aussi bien que par un froid extrême. On les fouetta ensuite jus-
leurs vertus. Aquilin, pour se conformer à qu'à lasser les bourreaux ; on les déchira
l'édit de Dèce contre les chrétiens, ayant avec des ongles de fer, et on appliqua enfin à
donné ordre de faire la recherche des fidèles, leurs têtes des torches ardentes. Pendantcette
on lui déféra Tryphon et Respice, qu'il fit cruelle exécution, parut un ange qui fit tom-
il
aussitôt charger de chaînes et mener à Nicée. ber les bourreaux à demi-morts de frayeur, et
Quelques jours après, il se les fit présenter, donna un nouveau courage aux martyrs, en
et comme il leur demanda quels étaieut leur leur m.ettant des couronnes sur la tête. Ils
* Les Actes racontent que les deux jeunes hom- * Fortuna siquidem nulîa est apud Christianos, sed
mes menèrent Denyse à leur logis , mais q\i'après onmia ex divina dispositione aguntur. Ruinart, Acta
s'être efforcésjusqu'à minuit de lui faire violence, sine, pag. 102, num. 2.
il leur fut impossible de réussir; alors il leur ap- 3 Vtinam digni inveniamur pro Christo Domino
parut un jeune homme éclatant de lumière, qui nostro ignibus vivi cremari ! Ibid.
éclaira toute la maison: saisis de peur, ils se jetè- * Nabis ipsis misereri melius non possumus, quam
rent aux pieds de la Sainte, qui les releva en disant :
Dominum fiostrum Jesum ChriS'
constanter confiteri
«Ne craignez point, c'est mon défenseur et mon gar- tumjudicem verum,qui singulorum acta discutere ve-
dien: jVo/<7e timere, iste enim est tutor meus et cusfos, niet. Ibid., num. 4.
pro eo quod vobis a ncquissimo judice suni tradila.»
Ruinart, Acta sine, pag. 160.
Ho mSTOfUE GÉM^IIALE DES AUTEUHS ECCLÉSIASTIQUES.
en rendirent giAccs à Jésus-Christ et lui de-
•
publié dans la Bithynie comme dans les au-
luandèrent la victoire sur le démon. Le len- tres provinces di^ l'empire, on arrêta les deux
demain Aquilin les fit fouetter de nouveau, prédicateurs et on les
(
présenta au proconsul
et, voyant qu'il ne pouvait vaincre leur cons- Sabin. Celui-ci, s'adressantà Lucien, lui de-
tance, les condamna à avoir la tète coupée. manda par quelle autorité il prêchait Jésus-
Tryphon et Ucspice acquiescèrent volontiers Christ?((Tout homme, répondit Lucien, est en
ù cette injuste sentet.ce, et, après avoir re- droit de retirer son frère de l'erreur. »Le pro-
commandé leurs âmes à Jésus-Christ, ils pré- consul, se tournant ensuite versMarcien, l'in-
sentèient leurs tètes aux boiirreaux. Les Actes teirogea sur sa reli-^ion, et ayant su de lui
que ce fut dans la ville de Nicée.
di.-ent qu'il n'adorait qu'un seul Dieu, qu'il relevait
Warlyie Les Actes de saint Lucien et de samt
5. extrêmement la puissance de Jésus-Christ,
âi> Suint l.ii-
«'ii'ii
ïi'iit
et lie
Vw-
Marcien ne marquent point le lieu de leur qu'il regardait la perte de celte vie comme
'en, sous martyre ni l'année en lu([uelle ils ont sont- un moyen d'en ac(piérir une éternelle, il se
fceie.
iért; mais ils disent que ce fut sous le règne livra à la raillerie, et les menaça tous deux
de Dèce et sons le proconsulat de Sabiu, qu'on des plus cruels tourments s'ils n'obéissaient
sait avoir fait mourir plusieurs chrétiens dans à l'édit de l'empereur. Nous voilà prêts à
«
Martyre
ils sortirent de leur solitude pour aller an- 6. Il faut aussi rapporter à la persécution «le saint
Hippolyte,
noncer aux gentils la divinité de Jésus-Christ *, de Dèce le martyre de saint Hippolyte, prêtre en ïiji, sous
Dèce.
(fu'ilsavaient combattue eux-mêmes quelque de l'Église de Rome, sous le pontifical de
temps auparavant. Leurs prédications n'eu- saint Corneille. Il était déjà vieux lorsqu'il
rent point l'effet qu'ils en attendaient, et ne fnt arrêtépour la foi, et avait, pendant quel-
fîrent qu'allumer contie eux la fureur des que temps, suivi le schisme de * Novat et de
yaiens. Cependant l'édit de Dèce ayant été Novatien. Mais Prudence ^, qui nous a con-
< Domine Jesu Christe, ne dialoîus prœvahat ad- l'Église d'Afrique, vint àRome, où, s'étant joiut à
versus nos ; sed exaudi nos et perfice cursum nostrum^ Novatien', le premier antipape ils troublèrent
, la
vt tua sirut pugna, et tua sit Victoria. Ruinart, Acta paix de l'Église romaine, sous le pontificat du pape
sine.,num. 5. saint Corneille.
At illi dicehant ad turbas : Quoniam apcruit Do-
^ « Invenio Hippolytum, qui quondam schisma Novaii
minus sensum nostrum, ut de tenebriset umbrarnortis, Presbyfer attigerat, nostra sequenda negans,
quibus nunc usque deiinetjnmur, nos tiberatos ad sa- Vsque ad martgrii provectum invgtie, tulisse
lutem veram perducerct. Hœc autem vana et inania Lucida songuinei prœmia supplicii.
sunt et a dœmonitms inventa qnœ gessimus. Nos autem Nec mirere senem perversi dogmatis olim,
iilum cognoscimus verum Deum esse, et in illo spem Munere ditatum catholicœ fidei.
nostram pnnimus. Ibid., pag. 6CC, nutn. 3. Cum jam vesano victor raperetur ab hoste.
' In hoc parati sumw, ut quibus voiueris nos im- Exultante anima carnis ad exitiuyrt,
pendas tormeniis quam denegantes vivum et verum riebis amore suœ, multis comifaniibus ibat.
;
Deum, in tenebras cxtei^iores et ignem inextinguibilem, Consulfus qnœnam secta foret melior,
quem paravit Deus diabolo et ministris ejus, ingre- Respondit : Fugite, o miseri, execranda Novati
diamur. Ruinart, Act. sine, nutn. 6. Schismata ; catholicis reddife vos populis.
* Âssémani a publié, d'après les manuscrits syria- Una fides vigeat, prisco quœ condita templo est :
ques dp Nitrio,d'autresy4c/e? du martyre de saint Lu- Quam Paulus i^etinet, quamque Cathedra Peti-i.
cien et de saint Marcien ils sont à peu près sem-
;
Quœ docui, docuisse piget, et venerabile martyr
hlables <^ ceux qui ont été publiés par D. Ruinart. Cerno quod o, cultu rebar abesse Dei.
Lucien et Marcien avaient exercé la magie à Nico- His ubi detorsit lœvo de tramitc plebem,
démic il est à croire fjue c'est là qu'ils consommè-
;
Monstravitque sequi, qua via dextra vocal;
rent leur martyre, puisqiie leurs Actes nous disent Seque ducem recti, spretis anfractibus idem
qu'ils prêchèrent la foi dans les lieux témoins de Prœbuit, erroris qui prius auctor erat.
leurs désordres. [L'éditeur.) Prudent., Hymn. 11, lib. de Coron. Prudence na-
• Novat, après avoir excité divers Iroubl"? dms quit en 348.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE X. — SAINT HIPPOLYTE. 121
serve les Ac(cs du martyre de ce saint, dit ainsi animés s'élancèrent à travers des bois,
qu'ilrentra dans le sein de l'Église avant de des rochers et des épines , abattant les haies
répandre son sang pour la foi de Jésus-Christ. et rompant tous les obstacles. Les dernières
Saint Hippolytft se crut même obligé d'y faire paroles du saint vieillard qu'on put entendre
rentrer ceux qu'il aurait pu en avoir fait sor- furent: «Seigneur, ils déchirent mon corps,
tir par son exemple. Car, dans le temps qu'on prenez mon âme.» Les fidèles le suivirent,
le menait au supplice, le peuple dont il avait fondant en larmes, et, conduits par les traces
eu soin * et qui, par affection, le suivait en de son sang, ils le ' recueillirent avec des
grand nombre, lui ayant demandé quel était éponges ramassèrent de ses membres dis-
et
le meilleur parti, il leur répondit « Fuyez : persés ce qu'ils en purent recouvrer, puis les
le malheureux Novat,revenez à l'Eglise
et ensevelirent à Rome dans les catacombes, près
catholique ; qu'une seule foi vous éclaire, d'un autel. Prudence, qui écrivait ces choses
qu'une seule Église vous rassemble; et cette le siècle suivant *, dit que l'on voyait encore
Eglise, c'est l'ancienne, celle que le grand de son temps l'histoire du martyre de saint
Paul reconnaît et qui voit au milieu d'elle Hippolyte peinte sur une muraille d'une ma-
la chaire du bienheureux Pierre. Je vois nière si vive, que la vue de ce tableau impri-
maintenant les choses tout autrement, et je mait tout ensemble de l'horreur et de la pitié.
me repens de ce que j'ai enseigné. » Après 7. Nous avons des Actes grecs et latins du
qu'il eut ainsi détrompé son peuple, on le martyre de sainte Agathe; mais ni les uns ni
conduisit au gouverneur de Rome, qui exer- les autres ne peuvent passer pour authenti-
çait à Ostie des cruautés inouïes contre les ques, moins encore pour originaux. Ils ne sont
chrétiens. Il fut présenté, chargé de chaînes, pas même conformes entre eux ; les Actes
au milieu d'une troupe de jeunes gens qui grecs sont plus longs dans les harangues, que
criaient autour de lui que c'était le chef des les Actes latins, et racontent plus de miracles.
chrétiens et qu'il devait périr par quelque Au reste, il paraît qu'ils viennent d'unemême
nouveau genre de supplice. «Comment s'ap- source. Ils sont cités dans les Soliloques, qui
pelle-t-il?» dit le gouverneur. Ils répondirent portent le nom de saint Augustin et que l'on
qu'il se nommait Hippolyte. «Qu'il soit donc croit avoir été écrits après l'an 1198. Psellus
traité comme - Hippolyte, ajouta le gouver- en a tiré ce qu'il dit de sainte Agathe dans
'^
neur, et qu'il soit traîné par des chevaux in- un panégyrique à l'honneur de cette Sainte.
domptés.» On prit à l'heure même deux che- On en a imprimé un autre sous le nom de
vaux des plus farouches, que l'on attacha en- saint Méthode, évèque de Constantinople, en
semble à grand'peine. On passa entre eux, 842, où ces Actes sont souvent rappelés. Mais
au lieu de timon, une longue corde, au bout les témoignages de ces trois auteurs ne sont
de laquelle on attacha les pieds du martyr ; point suffisants pour autoriser des pièces dans
puis on les excita par de grands cris, des lesquelles on ne trouve ni la brièveté, ni la
coups de fouet et des aiguillons. Les chevaux simplicité, ni l'air d'antiquité qui se fait sentir
un monstre, dont les chevaux qui menaient son Corporis integri qui fuerai numerus ;
chariot furent épouvantés, en sorte que, n'en pou- ^'ec jmrgafa aliquid debo-ent avia tofo
vant être le maître, il fut renversé, traîné à travers Ex hamine, extersis frondibus et scopulis :
les rochers et mis en pièces. Ovid. Metamorph., Metando eligilur tumido locus : ostia linquunt :
d'une fille de condition; que la Sainte, sans y tombeau de sainte Agathe, pour l'opposer aux
être poussée par aucune nécessite, ait * ap- flammes du mont Etna *?
CHAPITRE Xr.
Saint Alexandre, évêque de Jérusalem et martyr.
[L'an 252.]
qu'il fit paraître durant la persécution de Sé- heureux prêtre Clément, homme d'une vertu
vère et par la " confession publique du nom éprouvée, que la providence de Dieu a con-
et de la gloire de Jésus-Christ. Cependant il duit en ce pays pour afîermir l'Eglise de Jé-
nelui fut pas donné alors de la sceller de son sus-Christ. »
sang ; mais il passa plusieurs années en pri- Quelques temps après, c'est-à-dire en l'an
3. tl est fnir
évêque de
son, et il y en 2M, au com-
était encore '- 212, Alexandre, étant sorti de prison, eut en Jérusfilein,
en2U.
mencement du règne d'Antonin Caracalla, songe •* une révélation dans laquelle Dieu lui
lorsqu'Asclépiade fut fait évêque d'Autioche, ordonna d'aller à Jérusalem visiter les saints
après la mort de saint Sérapion. Lieux. Il partit donc de Cappadoce et trouva
5a Lettre 2. Ce fut à cette occasion qu'il écrivit à à Jérusalem saint Narcisse, qui avait repris *^
à l'Eglise
d'Antiocho, l'Eglise d'Antioche pour la féliciter du choix le gouvernement de son Eglise. La veille de
en 211.
1 Acfa S. Agat. apud Bolland., pag. 646. * Ibid., — le témoignage. Voyez aussi Bélonino, Dictionnaire
pag. 616. —
' Ibid., pag. 618. des persécutions. (L'éditeur.)
Saint Adelme, évêque en Angleterre dans le 6 Euseb., lib. Vi Hist.,ciip. 14.— 6 Ibid.—'' Ibid.
VU* siècle, a aussi fait le panégyrique de sainte *Ibid. —* Ibid., cap. 11; etHieronym., in Catalogo,
Agathe dans son livre de Laudil/us virgmiiatis. Nous cap. 62. — "> Tom. I Basilicon, pag. 295; et Geogra-
avons de plus deux hymnes composées en l'hon- phia sacra, pag. 300 et 301. — n Euseb., lih. VI.
neur de cette illustre martyre. On en trouve une cap. 9. — 12 Ibid., cap. 11. — '^ ibid. — >* Ibid.; et
parmi les poésies du pape l)amase; l'autre, qui est Hieronym., in Catalogo, cap. 62.
de saint Isidore de Scville, a été publiée par BoUan- 15 Quelques malheureux d'entre les chrétiens de
dus, pag. 596. Les anciens livres liturgiques contien- l'Église de Jérusalem, ne pouvant plus supporter la
nent aussi les prmcipales circonstances rapportées vigueur de la conduite de saint Narcisse, et redou-
dans les Actes. Honoré de Sainte-Marie, Des Règles tant la juste punition que méritaient leurs crimes,
et de l'Usage de la critique, tom. II, pag. 25, mon- chargèrent le saint évêque de calomnies, et les con-
tre que certaines circonstances de ces Actes ne suf- firmèrent par un jugement solennel le premier ;
Osent pas, comme on le prétend, pour en renverser d'entre eux voulait, disait-il, périr par le feu Is ;
[îll* SIÈCLE.] CHAPITRE X[ — SAINT ALEXANDRE. i23
son arrivée, saint Narcisse et les plus saints du temps d'Eusèbe de Césarée, qui témoigne
fidèles de cette Eglise eurent une révélation en avoir tiré beaucoup de secours pour com-
durant la nuit, et entendirent une voix très- poser son Histoire ecclésiastique. Il marque,
distincte qui leur commandait de sortir hors en particulier, qu'il y avait trouvé les Lettres
des portes de la ville et de prendre pour évê- et plusieurs excellents ouvrages de Bérylle*,
que celui que Dieu leur enverrait. Ils trou- évèque de Bostres en Arabie, et ceux de saint
vèrent Alexandre, et quoiqu'il fût déjà évo- Hippolyte. Comme nous le verrons dans la
que d'une autre Eglise, par le conseil de fous suite, saint Alexandre autorisa Origène à prê-
les évêques de la Palestine que l'on assembla cher lorsqu'il n'était même que simple laïque,
pour ce sujet, ils l'obligèrent de prendre soin de lui imposa les mains pour l'élever au sacer-
celle de Jérusalem, conjointement avec saint doce et le soutint dans les persécutions qu'il
Narcisse, qui, à cause de son extrême vieil- eut à essuyer de la part de Démétrius, son
lesse, se trouvait hors d'état de faire ses fonc- évèque ; ils furent même si unis ensemble,
tions. C'est le premier exemple d'un évèque qu'ils ne pouvaient presque plus se séparer.
transféré d'un siège à un autre et donné pour 5. On voit,' par sa Lettre à l'Eglise d'Antio- n confesse
^ '-'
une senonde
coadjuteur à un évèque vivant. Ils occupaient che et par celle qu'il écrivit aux Antinoïtes, ^"'^j,;^^f"'"
encore ensemble le siège de l'Eglise de Jéru- combien il avait de zèle pour l'honneur et "."0^''
12
"^•
salem, lorsque saint Alexandre écrivit aux pour la paix des Eglises. Origène loue *aussi
Antinoïtes « Je vous salue, leur dit-il, de la
: l'extrême douceur de ce Saint; elle paraissait,
part de Narcisse, qui a tenu ici avant moi la dit-il, dans toutes les instructions qu'il faisait
place d'évêque,et qui,ayant déjà plus de cent au peuple. Ayant été pris dans la persécution
seize ans, me reste uni par les prières. Il vous de Dèce, il fut présenté, à Césarée, devant le
conjure avec moi de conserver entre vous une tribunal du gouverneur, et, pour la seconde
paix et une union inaltérables.» fois, confessa glorieusement le nom de Jésus-
iiyarefsse 4. Pendant qu'Alexandre
^
fut évèque
^
de Christ. Il fut mis ensuite en prison, où il de-
une ci.'lebre
BU)iiotLè-
Jérusalem, il s'appliqua à former une nom- meura longtemps, et ' il y mourut vers la fin
breuse bibliothèque, où il recueillit, entre au- de l'an 251 Quoique saint Jérôme ne lui attri-
.
, très, les écrits et les lettres des plus grands bue point d'autres écrits que des Lettres,iln'a
hommes de son temps. Elle subsistait encore pas laissé de le mettre * au nombre des écri-
cité du tombeau. Ils le conjurèrent de reprendre l'ad- sanctorum locorum Hierosolymam pergeret, et Narcis-
ministration de son Eglise. Euscb., lib. VI, cap. 11. sus, episcopus ejusdem urbis, jam senexregeret Eccle-
1 Eadem tempestate multi ecclcsiastici viri, dodrina siam et Narcisso, et muttis clericorum ejus revela-
•
excellentes, florebunt, quorum epistolas guas ad se vi- tum est altéra die mane intrare episcopum,qui adjutor
cissim scripserunt, hactenus asservatas facile est repe- sacerdotalis cathedrœ esse deberet; itaque re ita com-
rire.Extant enim nostra quoquc œtate in bibliotheca pléta, ut pjrœdicta fueraf, cunctislin Palœstina episcopis
JEliœ urbis, ab Alexondro Ecclesiœ il Vus episcopo, in unum congregatis, adnitente quoque ipso vel maxime
constructa. Ex nos uberrimam materiam ad ar-
qv.a Narcisso, Hierosolymitanœ Ecclesiœ cum eo guberna-
gumenti hujus quod pi'ce manibus, tvactationem , in culum suscepit. Hic in fine cujusdam epistolœ, quam
unum collegimus. Inter hos fuit Bertjllus, Bostrenorum scripsit ad Antinoitas super pace Ecclesiœ, ait : Salutat
in Arabia episcopus, qui prœter epistolas et lueubra- vos Narcissus , qui ante me hic tenuit episcopalem lo-
tiones, varia quoque elegantis ingenii monumenta de- cum, nunc mecum tandem orationibus régit, annos
et
reliquit. Similiter et Hipjpolytus, alterius cujusdam natus circiter centum sexdecim, et vos mecum precatur
Ecclesiœ episcopus. Euseb., Hist. eccles., lib. YI, ut unum idemque sapiatis. Scripsit et aliam ad Antio-
cap. 20. chenses per Clementem, presbyterum Alexandriœ, de
* Nolite ergo in nabis illud reqitirere/juod in papa qua supra diximus : nec non ad Origenem, ci pro
Alcxandro habetis. Fatcmur enim quod omnes nos su- Origène contra Demetrium, eo quod juxia testimonium
12 i HISTOIRE Gl'.NÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
Tains ecclésiastiques. Indôpeiulammcnt des à divers particuliers. Cléniontd'Alexandiie lui
deux dont nous avons parlé, il y en avait une dédia un livre intitule: Cnnon Ecclésinstique,
à Deniètre, évrMjuti d'Alcxandrio, en faveur ou Contre ceux qui sidvaicni les Juifs dans la
d'Origènc; une à Origèuc, et quelques autres ccUbration de la Piique.
CHAPITRE XII.
Saint Corneille, pape et martyr,
[L'au 252.]
Demetni eum presbyterum constituent, sed et aliœ nalis conscientiœ suœ, et pro humilitate ingenitœ sihi
ejus ad diversos fcruntur Septima autem
epistolœ. et custoditœ verecundiœ, non ut quidam, vim fecit ut
persecutione, sub Decio, quo tentpore Babylas Anliochiœ episcopus sed ipse vim passus est, ut episcopa-
fieret,
passus est, ductus Cœsaream, et clausus in carcere, ob tum coacius excificret. Et factus est episcopus a plu-
confessionem Christi martyr io coronatur. Hieronym., rimis collegis nostris, qui tune in urbe Roma aderant,
in Cataloyo, cap. 62. qui ad nos litlevas honnrifiras et laudabiles, et festi-
1 Venio jnm nunc, frater carissimz, ad personam monio suœ prœdicationis illustres de ejus ordinatione
Cornelii, collegœ nostri, ut Corneliumnobiscum melius miserunt. Factus est autem Cornélius episcopus de
noveris, non de maliynorum et detrahentium menda- Dei et Christi ejus judicio, de clericorum pêne om-
cio,, sed de Domini Dei judicio, qui episcopum fecit nium testimonio, de pleins quœ tune affuit suffragio,
et coepiscoporum testimonio, quorum numerus univer- et de sacerdotum antiquorum et bonorum virorum
sus per totum mundum concordi unanimitate consen- collegio ; cum nemo ante se factus essef, cum Fabiani
sit. Nam quod Cornelium charimmum nostrum Deo locus, id est cum locus Pétri et gradus cathedrœ sa-
et Christo et EcclesiiB ejus, item consacerdotibus cunc" cerdotalis vocaret. Cyprian., Epist.^'i. ad Antonianum
lis laudubili prœdicatione commendat non iste ad
; de Cornelio et Novatiano, pag. 93.
episcopatum subito penenit, sed per omnia Ecclesias- On verra, dans la LeUre de saint Corneille à Fa-
'
Dominum sœpe promeritus, ad saccrdotii sublime fas- contenterons de remarquer ici que ce scliismatique,
iigium cunctis religionis gradihusascendit. Tum deinde s'étant fait ordonner évèque de Rome, écrivit à tou-
episcopatum ipsum nec posfulavif, nec voluit, ncc ut pour leur faire savoir son ordination,
tes les Églises
cœteri quos arrogantiœ suce tumor instat, invasit ; sed et qu'ildéputa même en Afrique, pour obtenir la
quietus et modestus, et quales esse consueverunt qui communion de cette Eglise, mais qu'il fut rejeté
ad hune locu77i divinitus eliguntur, pro pudure virgi- presque partout, saint Corneille ayant été reconnu
[m^ SIÈCLE.] CHAPITRE XII. — SAINT CORNEILLE. 12»
schismalique Novat *, venu d'Afrique, se joi- reçu et confirmé. Ce décret portait en subs-
gnit à lui, et ils commencèi'cnt ensemble le tance qu'il fallait admettre les tombés à la
schisme qui mit le trouble dans l'Eglise. Ils communion^ après une longue pénitence, et
furent suivis dans leur schisme par une partie même avant la fin de leur pénitence, s'ils
du peuple, par cinq prêtres et par une partie tombaient en danger de mort; que, pour les
des confesseurs, qui se déclarèrent pour No- évêques tombés dans le crime, ils seraient re-
vatien. Il les avait attu-és à son parti par des çus après avoir fait pénitence, mais seule-
calomnies atroces dont il avait chargé saint ment au rang des laïques. On condamnait
Corneille ; il l'accusait d'avoir pris un billet aussi dans ce concile le schisme et la doctrine
du magistrat pour éviter la persécution, et de Novatien, qui refusait la communion à
d'avoir communiqué avec des évoques cou- ceux qui étaient tombés, quelque pénitence
pables du crime d'idolâtrie, entre autres avec qu'ils fissent. Saint Corneille donna avis de
un nommé Trophine. Afin de donner plus de ces règlements aux autres Eghses.
poids à ces calomnies, Novatien protesta avec A. Il en particulier à Fabius, évèque
écrivit
des serments horribles qu'il ne désirait point d'Antioche. Eusôbe, qui avait vu cette Lettre,
du tout l'épiscopat. Voyant son parti assez nous en a conservé une partie considérable
fort, il se fit lui-même ordonner évoque de dans son Histoh^e ecclésiastique Saint Cor- .
Rome par trois évoques, hommes rustiques et neille y traçait le portrait de Novatien et
très-simples, qu'il avait auparavant remplis marquait en détail les moyens dont il s'était
de vin et de viandes. servi pour se former un parti et se faire sa-
Saint Cor- 3. Les évêques d'Afrique, avertis de l'irré- crer évèque. « Novatien, disait-il, brûlant de-
neille tient
un concile à
Rome, eu
gularité de cette ordination, refusèrent leur puis fort longtemps du désir d'être évoque,
831.
communion aux envoyés de Novatien, et dé- s'est uni à plusieurs saints confesseurs, afin
clarèrent que Corneille ayant été élu, ordonné de mieux cacher son ambition démesurée;
et approuvé par tant de suffrages, il ne leur mais Maxime, prêtre de notre Eglise, et Ur-
était pas permis de souffrir que l'on attaquât bain, tous deux fort célèbres pour avoir con-
sa réputation, ni qu'on établit un autre évê- fessé doux fols Jésus-Christ devant les païens;
que en sa place. En môme temps saint Cy- Sidonius et Côlérin, deux autres confesseurs
prien écrivit au pape Corneille, et lui envoya qui s'étaient laissé entraîner au parti de
les canons et la Lettre synodale du concile Novatien ayant découvert ses artifices , ses
,
dans lequel il venait d'examiner la cause des tromperies, ses mensonges, ses parjures, son
apostats. Le pape saint Corneille, après avoir humeur farouche et cruelle, sont revenus à
reçu ces Lettres, assembla à Rome un concile l'Eglise et ont publié, en présence des évo-
de soixante évêques et d'un plus grand nom- ques, des prêtres et d'un grand nombre de
bre de prêtres et de diacres, où le décret du laïques, son hypocrisie et ses crimes. Ils ont
concile de Carthage touchant les apostats fut pleuré le malheur où ils étaient tombés en se
pour seul et légitime évèque de Rome. Novatien ne chez lui, il le laissa mourir de faim sur le pavé, et
laissa pas de trouver quelques personnes qui favori- négligea même de l'enterrer après sa mort. D'un
sèrent son parti; entre autres, Marcien, évèque d'Ar- coup de pied qu'il donna à sa femme, qui était
les. Fabius d'Antioche se laissa aussi ébranler par grosse, il la fit avorter d'un enfant mort, devenant
ses sollicitations; mais saint Corneille et saint Denis ainsi le parricide de son fils ainsi que de son père.
lui écrivirent pour l'empêcher de succomber. Tant de crimes lui faisant craindre avec raison qu'on
1 Novat était prêtre de Carthage; mais il est diffi- ne le chassât de l'Eglise, il voulut prévenir sa sen-
cile de concevoir comment il put s'élever à cette tence, en se séparant de lui-môme, et fut le premier
dignité, après ce que dit de lui saint Cyprien, qu'il qui alluma à Carthage le feu de la division et qui
avait toujours été regardé des évêques comme un y souleva une partie des fidèles contre saiut Cyprien,
esprit dangereux, comme un brouillon et un ama- leur évèque. Il n'y a point de doute qu'il n'ait été
teur de nouveauté, et même comme un perfide et un des principaux auteurs du schisme de Félicissime,
un hérétique. 11 voulait tout savoir pour trahir ceux et du nombre des cinq prêtres de Carthage qui se
qui lui confiaient leurs secrets. Il était flatteur, sans joignirent à ce schismalique c'est pourquoi il fut
;
amitié, sans sincérité, vain, arrogant jusqu'à renon- excommunié avec eux. Saint Cyprien dit de lui en
cer à tout sentiment de Dieu et de son devoir, tou- particulier, qu'il avait été condamné comme un hé-
jours prêt à exciter la discorde, ennemi de la paix, rétique obstiné par la voix de tous les évêques.
avare, ravisseur du bien des autres. Il dépouillait les Après cette condamnation il vint se cacher à Home,
pupilles, volait veuves de l'Église de Carthage,
les et ce fut là qu'il se joignit à Novatien pour troubler
déniait l'argent dont il était redevable à l'Église ;
l'Église de Rome, comme il avait déjà fait pour celle
pour comble d'impiété, il tua son propre père, selon de Carthage. Cyprian,, Epid. 49, 50 et 55; et Pacia-
saint Pacien, c'est-à-dire, qu'après l'avoir chassé de nus, Epist. 3.
126 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
séparant de l'Eglise pour suivre cet impos- et ajoutait,on parlant de Novat « Voyons :
teur. » Saint Corneille ajoutait : « Nous l'a- maintenantquelles ont été ses mœurset sa vie,
vons vu lui-même changer eu un moment. pour s'être cru digne de l'épiscopat. Est-ce
Cet homme, qui avait juré avec des serments pour avoir été élevé dans l'Eglise, pour avoir
exécrables qu'il ne souhaitait en aucune défendu la foi et souffert pour elle? Nulle-
manière l'épiscopat, se produit tout-à-coup ment. Il n'a fait profession de la foi qu'à l'oc-
comme évèque. Ce docteur de la vérité, ce casion de la tyrannie que le démon exerçait
doiensour de la discipline de l'Eglise, ayant sur lui depuis longtemps. Tombé malade
entrepris de ravir et de s'attribuer la dignité pendant les exorcismes qu'on faisait pour
épiscopale que Dieu ne lui avait pas donnée, chasser le démon dont il était possédé, et n'at-
choisit pour complices deux personnes qui tendant plus que la mort, il fut baptisé dans
n'avaient plus aucun soin ni aucune espé- son lit par infusion, si l'on peut appeler cela
rance de leur salut, et les envoya dans la un véritable baptême. Après sa guérison,
*
province la plus petite d'Italie, aiin d'eu ame- on n'observa point et on ne suppléa point les
ner évêques, en leur assurant et en leur
trois autres choses qu'il iaut recevoir, selon l'ordre
protestant qu'il fallait qu'ils vinssent à Rome, de TEglise ne reçut pas même le sceau *
; il
méchants, crurent ce qu'on leur disait. Quand nier qu'il était prêtre ; car, prié par les dia-
ilsfurent arrivés, Novatien les fit enfermer cres de donner à ses frères qui étaient en
par des hommes apostés. Il les fit bien trai- dangers et qui avaient besoin d'assistance,
ter, et sur les quatre heures du soir, lors- les secours qu'ils pouvaient justement atten-
qu'ils étaient pleins de vin et de viandes, il dre d'un prêtre, non-seulement il ne fit pas
les contraignit imposer les mains pour
de lui ce qu'ils demandaient, mais il s'en alla et les
lui donner l'épiscopat, par une ordination quitta tout en colère, en disant qu'il ne vou-
vaine et imaginaire. De ces trois évêques il lait plus être prêtre et qu'il embrassait une
y en eut un qui, peu de temps après, revint autre philosophie » Après plusieurs . autres
à l'Eghse, pleurant et confessant son péché. choses qu'Eusèbe n'a pas jugé à propos de
Nous le reçûmes à la communion comme laï- transcrire, saint Corneille disait encore de
que, tout le peuple qui était présent ayant in- Novatien : « Il a abandonné l'Eglise où il
tercédé pour lui. Nous ordonnâmes deux évê- avait reçu le baptême et l'ordre de prêtrise
ques à la place des deux autres, et nous les par une grâce toute particulière de l'évêque
envoyâmes à leurs Eglises. » Saint Corneille qui lui imposa les mains ; car tout le clergé
faisait ensuite le dénombrement des minis- et la plupart des laïques s'opposant à son or*
tres qui composaient de l'Eglise de
le clergé diuatiou, fondés sur ce qu'il n'était pas per-
Rome, des veuves, des pauvres et des malades, mis ' d'ordonner ceux qui avaient été baptisés
1 Saint Cyprien dit qu'il y en avait qui ne vou- dans les cas extraordinaires , non par aucun défaut
laient pas appeler chrétiens ceux qui avaient été de leur baptême, mais parce qu'il y a sujet de pré-
baptisés de cette sorte, mais leurdonner le nom de sumer que leur foi est plus l'objet de la nécessité et
cliniques, à causedu lit où ils avaient reçu le bap- de la crainte de la mort, que d'une vraie conversion
tême, prétendant ou qu'ils n'avaient point du lout de leur cœur. Aussi saint Cyprien croit qu'on ne
reçu ce sacrement, ou qu'au moins ils n'en avaient peut mettre aucune différence entre eux et ceux
pas reçu la grâce avec la même plénitude que les qui ont reçu le baptême de la manière alors la plus
autres. Le sentiment des premiers était manifeste- commuue,qui était l'immersion. Tillcmont, tom, lll,
ment faux, puisqu'on n'avait jamais entrepris de re- pag. 43C; et Cyprian., Epist. 70.
baptiser ces personnes lorsqu'elles étaient guéries. * Jn ipso lecto in quo jacehat perfusus fidem iusce-
Mais il que la
paraît seconde opinion était celle de pit si tamen homo kujuscemodi suscepissc dicendus
:
quitté son parti et celui des cinq prêtres avec de leur délivrance. «Nous savons, disaient-ils,
lesquels il avait d'abord suivi Novatien. » Sur que Corneille a été élu évêque de l'Eglise ca-
la fin de la Lettre, saint Corneille rapportait tholique par Dieu tout-puissant et par Jésus-
les noms des évêques qui assistèrent au cou- Christ Notre-Seigneur. Nous confessons notre
cile qu'il tint à Rome contre Novatien, et de erreur; nous avons été surpris; nous avons été
ceux qui, n'ayant pu s'y trouver, en avaient abusés. Quoiqu'il parût que nous communi-
confirmé les décrets par leurs suffrages. quions avec un homme schismatique ethéréti-
Lettres de 5. Novat, voyant le parti de l'antipape se que, toutefois notre cœur restait toujours uni
saint Cor-
neille àsaint
dissiper à Rome, résolut de faire une tenta- sincèrement à l'Eglise. Car nous ' n'ignorons
Cypiien, en
151.
tive en sa faveur, et partit pour le ranimer pas qu'iln'y a qu'un Dieu, qu'un seul Seigneur
en Afrique; mais, pendant son absence, les Jésus-Christ, que nous avons confessé, qu'un
confesseurs qu'il avait séduits reviurent à Saint-Esprit, et qu'il ne doit y avoir qu'un
eux et se réunirent à l'Eglise catholique. évêque dans (chaque) Eglise catholique*. Saint
Saint Corneille en eut autant de joie que Corneille ajoute que, sur cette confession qui
urgente morbo, perfusus fuiiset, in Clerum aliquem id est verum; le second, dans sa Lettre à Pammaque,
assumi. Verum rogavit episcopus ut eum unum ordi- contre les erreurs de Jean de Jérusalem Qua con- :
lium amplius esse rediturum. Et miser homo non Dominum, quem confessi sumus, unum
C/iristum esse
prius gustat quam sibi ipse malum imprecatus sit. Et Spiritum Sanctum, unum episcopum in catholica Ec-
cum panem illum accipiens dicere dcbuisset, Amen, clesia esse debere. Gornel., Epist. 46 ad Cijprian., la
ejus loco dicit, Non revertar deinceps ad Cormlium. edit. Pamelii.
Idem, ibid. * Baluze, et J. Forbesius entendent cette proposi-
Saint Ambroise, saint .Jérôme et saint Augustin
* tion, unum episcopum in catholica Ecclesia, comme
font mention de cette coutume le premier au li-
; Dom Ceillier. Catholica signifierait orthodoxe.
D'au-
vre IV des Sacrements, chap. v, en ces termes : tres auteurs, comme Baronius, Goûtant, Rorbacher
Ergo non otiose cum accipis tu dicis Amen, jam in admettent le sens suivant il ne doit y avoir qu'un
:
spiritu confiiens quod accipias corpus Chridi di- évêque ou qu'un pape daus l'Église catholique. {L'é-
cit tibi sacerdos, corpus Christi, et tu dicis Amen, diteur.)
128 IIISTOIUE GËNÉKALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
était un rcuouvfllemont de celle que les coa- lui donner, selon la coutume*, avis de son élec-
lesseurs avaient laite devant les magistrats tion. Cette Lettrene ressentait <]U('. la douceur
avant de dans l'Eglise, il avait ordonné
la faire d'une simplicité religieuse,sansaucun mélauge
au prêtre Maxime de reprendre sa place, et d'injure ou de passion. Il écrivit encore, par le
reçu tous les autres avec de grandes acclama- confesseur Augendus, une autre Lettre, pour
tions du peuple, remettant le jugement de tou- donner Cyprien du départ de Ni-
avis à saint
tes choses à Uieu. Il finit en priant saint Cy- costrate, de Novat, d'Evariste, de Priraus et
prien d'envoyer cette Lettre aux autres l'.glises, de Denys, envoyés par Novatien en Afrique.
afin que tous connussent que la l'action de Nous n'avons plus cette Lettre, ni celle que ce
Novalien , cet homme schismatique et héré- saint pape lui écrivit au sujet de Félicissime
tique, se ruinait de jour en jour. et de ses prêtres schismatiques,excommunié3
Dans la seconde Lettre, qui est très-courte, dans le concile d'Afrique. Mais on voit, par la
et que quelques-uns croient n'être qu'un frag- réponse qu'y fit saint Cyprien, qu'il la lui
ment d'une plus grande, saint Corneille fait avait envoyée par l'acolyte Satur, qu'elle
connaître à saint Gyprien quelles étaient les était * [jlcine d'ailcciion, de la vigueur de la
majurs et la conduite des légats que Novatien discipline et de la gravité épiscopale, et que
avait envoyés en Afrique pour y trouverde Tap- saint Corneille y confirmait la sentence d'ex-
pui. a Ayez soin, lui dit-il, d'avertir tous les communication prononcée par évèques les
évoques, nos collègues, et tous nos frères, que d'Afrique contre Félicissime. Saint Cyprien y
Nicostrate est coupable de plusieurs crimes, et fait mention d'une autre Lettre du pape Cor-
qu'outre qu'd a volé sa » patronne, dont il ad- ncdle jointe à cette première. « Mais, dit-il,
<!
ministrait le bicn,il a encore emporté des som- après l'avoir lue, j'ai été surpris de voir que
mes considérables que l'Eglise lui avait mises vous paraissiez un peu touché des violences
cndépôt;qu'Evari5tea été l'auteur du schisme, de Félicissime et de ses adhérents, et de ce
et que Zétus a été élu évoque en sa place;mais qu'ils vous ont abordé avec fureur et menacé
sontbeaucoup plus mau-
les choses qu'il fait ici que, si vous ne vouliez point recevoir les lettres
vaises que celles qu'il a faites parmi les siens.» qu'ils avaient apportées, ils les liraient eux-
AutresLit- 6. Saint Jérôme ^ fait mention de quatre mêmes publiquement et répandraient contre
coiifeiîiè" Lettres de saint Corneille àFabius d'Antioche, moi des choses infâmes et dignes d'eux. Au
duis. dont la première contenait ce qui s était passe reste, ajoute saint Cyprien, si je ne vous ai
clans les conciles de Rome , d'Italie et d'Afri- pas écrit aussitôt au sujet de Fortunat, ce faux
que; la seconde, les résolutions qu'on y avait évèque, élu par un peiit nombre d'hérétiques
prises au sujet de Novatien tombés ; et des opiuiâtres, c'est qu'il m'a paru que je ne de-
la troisième, ce qui avait été conclu dans le vais pas me presser de vous en informer,
concile de Rome ; la quatrième, en quoi con- comme si c'eût été une chose considérable, vu
sistaient l'hérésie de Novatien et l'analhème principalement que vous connaissez assez quel
prononcé contre lui. Les trois premières sont était ce Fortunat, l'un des cinq prêtres qui ont
perdues; mais il nous reste quelques fragment s abandonné longtemps et qui,
l'Eglise depuis
de la quatrième dans VHistoïi-e ecclésiastique depuis peu, ont été excommuniés par la sen-
d'Eusèbe ', et dans le premier tome des Epî- tence de plusieurs évèques nos collègues. »
tres décrétales des Papes, recueillies parDom Saint Corneille s'était donc plaint à saint Cy-
Contant. Nous avons aussi perdu celle que prien de ce qu'il ne lui avait pas donné des
saint Corneille écrivit à saint Cyprien, pour nouvelles de l'ordination de Fortunat,
Ce saint pape écrivit eucoreà saint Denys *, Jésus-Christ. Cette foi que le bienheureux
évèque d'Alexandrie. Celte lettre n'est pas ve- Apôtre a si hautement célébrée, s'est rendue
nue jusqu'à nous, et Eusèbe n'eu dit autre illustre en Cl tte occasion. Il prévoyait dès-lors
chose, sinon qu'elle était contre Novatien. en esprit votre courage et votre fermeté, et, eu
Pour ce qui est de la Lettre de saint Corneille louant la vertu des pères, il excitait l'émula-
à Lupicin, évèque de Vienne, on convient que tion des enfants. L'ennemi était venu fondre
c'estune pièce supposée; il en est de même sur l'armée de Jésus-Christ, pour la mettre
des deux décrétales qu'on lui attribue et dont en désordre; mais, repoussé vigoureusement
nous ferons voir * ailleurs la fausseté, par les efforts d'une armée bien unie, il a re-
saintcor- 7. Cependant l'empereur Dèce ayant été tué connu que les soldats de Jésus -Cbiist sont
fre le mar- gur la llu dc l'au 251, Gallus, son successeur, ne armés pour le coinb&ttre; qu'on les peut faire
fut pas longtemps sans per.-écuter les chrétiens. mourir, mais qu'ils ne peuvent être vaincus.
Une violente peste qui ravageait l'empire en Que dit à cela Novatien? Cela ne suffit-il point
fut, dit-on, l'occasion, et le motif fut le refus pour lui faire quitter son erreur? ne recon-
que tirent les chrétiens de sacriher aux faux nait-il point présentement quel est le vérita-
dieux. Quoi qu'il en soit, saint Corneille fut le ble évèque de Dieu, où est l'Eglise et la mai-
premier,à Home qui confessa le nom de Jésus-
,
son de Jésus-Christ, quels sont ses serviteurs
Christ dans cette persécution. Saint Cyprien, que le diable attaque, quels sont les chrétiens
en ayant eu avis, luiécrivit une lettre de congra- que l'Antéchrist combat? Car il ne cherche pas
tulation dans laquelle il disait : « Nous avons ceux qu'il a déjà vaincus, et ne se met pas en
appris, mon très-cher frère,, les glorieux téuioi- peine de renverser ceux qui sont à lui. L'en-
guages de votre courage et de votre foi; et la nemi de méprise comme des captifs
l'Eglise
joieque nouS eu avons ressentie est si grande, ceux en a fait sortir, et il ne s'attache
qu'il
que cela nous donne part en quelque façon à qu'à ceux eu qui il voit Jésus-Christ habiter ;
Thonneiir que vous avez acquis. En effet, étaut mais quand quelqu'un de ceux-là serait piûs,
aussi unis que nous le sommespar l'unité d'une il n'aurait pas ' sujet de se glorifier de la con-
même Eglise et par la liaison u'un même esprit fession du nom de Jésus-Christ, car il est cer-
et des mêmes sentiments, quel évèque ne se tain que la mort des personnes de cette sorte
réjouirait point des avantages d'un autre évè- hors de l'Eglise ne serait pas une récompense
que, comme il ferait des siens propres. Je ne de leur fui, mais une punition de leur perfidie;
puis vous exprimer quels ont été les transports ils n'habiteront pas dans la maison de Dieu,
de notre joie, lorsque nous avons su que vous avec ceux qui sont bien d'accord ensemble,
avez servi de chef à nos frères, dans la con- ceux-là qui s'en sont retirés par une fureur
fession du nom de Jésus -Christ, qu'ayant schismatique. Nous vous exhortons, mou très-
marché à leur tète, vous avez eu beaucoup cher frère, puisque Notre-Seigueur daigne, par
de compagncjns de votre gloire, et l'avez re- sabonté,nous avertir que le jour de notre com-
haussée par ce moyeu ; eutin qu'en confessant bat approche, de ne point cesser, avec tout le
lepremier pour tous, vous les avez tous ren- peuple, de vaquer au jeune, aux veilles et a la
dus confesseurs. L'évêque, marchant devant, prière; souvenons-nous toujours les uns des au-
a donné une preuve publique de son courage, tres, prions les uns pour les autres, cousolons-
et les frères, eu le suivant, ont donné une nous mutuellement dans nos alUictions; et que
marque de leur atlection; ainsi comme il n'y celui à qui Dieu fera la grâce de partir le pre-
a parmi vous qu'un même esprit et qu'iiue mier conserve toujours sa charité devant le
même voix, toute l'Eglise romaine a confessé Seigneur et ne cesse de lui demander * sa mi-
1 Euseb., lib. VI But., cap. 46. vina domo furore discordice recessisse. CyçT.,Epist. 57
* On examinera, dans l'article de saint Cyprien, si ad Cornel.
saint Corneille est auteur du traité intitulé : De la * Et si quis isthinc nostrum prior divinœ dignatiO'
Discipline et de la Chasteté, et de quelques autres nis celeritate prœcesserit, perseveret apud Dominum
qui se trouvent à la fin des ouvrages de saint Cy- nostra dilectio, pro fratribus et soioribus nostris apud
prien. nusei'icordiarn patris non cesset oro.tio, Cypr., ibid.
3 Quanquam
etsi aliquis ex talibus fuerif apprehen- Quelques auteurs ont cru que saiut Corneille n'avait
sus, non est quod sihi quasi in confessione nominis pas fini sa vie par le supplice mais saint Jérôme
;
blandiatur : cum constet si occisi ejusmodi extra Ec- dit expressément qu'il répandit heureusement son
clesiam fucrint, fidei coronam non esse, sed pœnam sang à Rome.et non à Civita-Veccbia, où l'on prétend
potius esse perfidiœ ; nec in domo Dei inter unani- que ce saint avait été envoyé en exil, aussitôt après
mes habitaturos esse, quos videmu de pacifica et di- qu'il eut refusé de sacrifier aux idoles Sub Decio et :
11.
430 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
séricorde pour nos frères et pour nos sœurs.» rent dans les persécutions de Dèce et de
Saint Corn(nllo mourut à Home lo 14 sep- Galius.
tembre de l'ail 252, par ordre dn rompeieur [ Toutes les lettres et les fini<;m(Mits de saint
Galius. Il ne tint le poutifiiat (ju'un an, trois Corneille se trouvent chez Gallaixl, toui. III,
mois et dix jours. Nous aurons lieu, en fai- page 335 et seq., et chez Contant, Epist. Rom.
sant l'analyse des Letires de saint Cyprien, Pondf., Rome 1G98, et chez Migne, tom. III
CIIAPITUE Xlll.
Origène, prêtre et confesseur, Père de l'Eglise grecque.
[Vers l'an 253.]
Valeriano per.^ecutoribus, quo tempore Cornélius Romœ, accomplis, lorsque son père fut martyrisé l'an 10 de
Cyvrianus Carthayini felici cruore martyrium per- Sévère, de Jéjus-Christ 202.
—
,
s
Suidas, LUtera 0, pag. 389.
tulerunt, multos upud JEgyptum et T/iebaidas tem- 6 Euseb., lib. VI,
peslas sœva popuiata est. Hierouym., in Viia S. Pauli, cap. 2. —
Idem, ibid.
"^
cap. 54. Ce nom, qui signifie de diamant ou indomp- lomnie et soutient qu'Origène fut élevé par ses pa-
table, fut douué à Origèue, pour marquer son assi- rents dans la religion chrétienne, et qu'il y est tou-
duité infatigable au travail. jours demeuré. Euseb., lib. VI Hist., cap. 19.
* Hieronym., Epist. 18. Ce terme signifie entrailles « Euseb., lib. VI, cap. 2. — »» Ibid. — '« Eusel».,
d'airain. Suidas remarque que le surnom de Ca/cen- lib. VI, cap. 6. — i^ Idem, lib. VI, cap. 19.
tère fut donné autrefois à un Didyme d'Alexandrie, 1* Et qma indicem operum ejus [Ongenis] in volu-
qui vivait sous le règne d'Auguste, à cause de sa minibus epistoluram quas ad Poulain scripstmus, in
grande assiduité à l'étude, et qu'il avait composé quadam epistola contra Varronis opéra conferens po-
plus de trois mille cinq cents livres. —^Euseb., lib. VI sui nunc omitto : illud de imntortali ejus ingenio
,
chap. 8, qu'Origène n'avait pas encore dix-sept ans cam, omniumque philosophorum sectas ita didicit, ut
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 131
la dialectique, la géométrie, l'arithmétique, ses six frères : car le fisc avait confisqué tout
la musique, dans toutes les
la rhétorique, et le bien de Léonide. Mais Dieu l'assista par le
sectes des philosophes. Porphyre* ajoute qu'O- moyen d'une dame d'Alexandrie extrême-
rigène lisait continuelleraent Platon, Crone, ment riche, qui le retira dans sa maison. Elle
Apollophane, Longin, Modérât, Nicomaque y logeait aussi un nommé Paul, originaire
et les autres pythagoriciens ;
qu'il avait aussi d'Antioche, hérétique célèbre, et elle l'aimait
mains les livres de
très -souvent entre les tellement, qu'elle l'avait adopté pour son fils.
studiosos quoque litterarum sœcuîarium sectatores ha- difficultates, ut in discendis canendisqtte psalmis cum
béret, et irilerpretaretur eis quotidie, concursusque ad matre contenderet. Hieronym., Epist. 22 ud Paulam.
eum miri fièrent: quos ille propterea recipiebat ut * Euseb., lib. VI Hist., cap. 2.-6 Idem, ibid. —
sub occasione sœcularis litteraturœ in fide Christi hos 8 Idem, ibid.
institueret. Hipronym., in Cataloyo, cap. 54. 11 n'est ^um/uam adduci potuit ut cum Paulo in preca-
''
pas croyable qu'Origèue ait appris toutes ces sciences tione consisteret : Ecclesiœ sciiicet régulant servons a
avant le martyre de son père il y a même appa- ;
puero. Euseb., ibid.
rence qu'il n'en étudia la plupart que dans un âge * A?mum porro decimum octavum agebat tune cum
plus avancé. catechumenis instituendis prœfectus est. Euseh., lib.VI,
1 Porphyr., apud Euseb., lib. VI, cap. 19. cap. 3.
* Quis ignorât et quod tantum in divinis Scripturis 9 Hic Alexandriœ dispersa Ecclesia, 18 œtatis suce
habuerit studii, ut et'.am hebrœam linguam contra anno,Catecheseon opus aggressus, postea a Demetrio in
astatis gentisque suœ nuturam edtsceret. Hierouym., in locum démentis confirmatus,per multos annos floruit.
Cutalogo, cap. 54. Hieronym., in Catalogo, cap. 54.
' Grœcia tota in illo mirata est, quod inpaucis, non 10 Euseb., lib. VI. cap. 3. — U Idem, ibid.
dicam mensibus, sed diebus ita hebrœas linguce vicisset i* Ou six sous. {L'éditeur.)
132 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
tes les oiipidités où sa jeuncfse pouvait le de ceux qui se sont faits eunuques pour le
porter; il joùuait, travaillait tout le jour, em- royaume de Dieu. Il tacha ® de tenir cette ac-
ployait la plus grande partie de la nuit à la tion secrète ; cependant Démèlre 9, son évo-
lecture de l'Écriture sainte, et ne dormait que, ne fut pas longtcMups sans en être in-
que sur la terre. Fendant phisieuis années formé, et il fut surpris d'une action si hardie;
il marcha toujours nu-pieds et s"abstint de
' mais, approuvant en même temps son zèle
et la grandeur de sa foi, il l'exhorta à pren-
vin et des aliments qui ne sont pas ai)soln-
ment nécessaires à la conservation de la vie; dre courage et à redoubler ses soins pour
l'estomac. iMais les secours de charité, 7. La persécution avait cessé par la mort
ment
qu'il rendait niditiéremmeut aux martyrs de Sévère, arrivée le 4 février de l'an 211.
qu'il connaissait et à ceux quil ne connais- Origcne alla à Rome '», poussé du désir de
ne firent pas moins admirer des voir cette Église si ancienne, qui était gou-
sait point, le
Quelque temps après, c'est-à-fHre vers fut en ce temps-là, selon Eusèiie*', qu'Ori-
Indiscré- 6.
tion il'Ori-
l'an 20(3 de Jésus-Christ, Origène qui, âgé
gène apprit la langue hébraï jue, pour péné-
Kéue qui se
fait eimu- trer davantage dans le sens de l'Écriture.
seulement de 21 ans, se trouvait engagé à
Il
que.
enseigner la vérité aux femmes aussi bien acheta aussi que les Juifs ont en
les livres
qu'aux hommes , voulut se mettre à couvert hébreu, et travailla à ramasser les différen-
s, tes versions de l'Écriture qui avaient paru
de la calomnie, et se fit lui-même eunuque
soit par le moyen de quelques médicaments
'^, jusqu'alors.
soit par le fer \ Fins savant que sage, il avait 8. Ln ce temps-là, Ambroise, homme de
pris trop à la lettre ce que Jésus-Christ dit lettres •* et de qualité, convaincu '" par Ori-
VI, cap. 3.-2 Euseb., lib. VI, cap. 4. causa iertiam sibi, id est lUteralem castrationem intu-
» Euseb., lib.
3 Nous ne lisons point que personne, avant Ori- leruut.Nec tantum in eo confutando qui iertium eu-
gène, ait rendu cet oftice de cliarité aux martyrs.— nuchismum, ita ut priores duos, corporalem esse vult,
* Euseb., ibid.
tempuris trivissernus, nisi ali/uos illud ausos vidisse-
s L'action d'Origène était défendue par les lois ci- mus et nonnullos etiam offendisiemus, ferventiorem
animum et fidelem quidem, sed rationis non satis au-
viles depuis Domitien, comme ou le voit par Sué-
dienfem, ad ejusmodi facinus accendere vulentes. Ori-
tone, dans la Vie de cet empen-ur, cbap. 7, et par
riiisloire que rappoitc saint Justin, d'un chrétien
gen., tom. XV in Malth., pag. 369 edit. Huet.
neur Félix afin qu'il lût permis aux cliirurgiens Epist. 41 fid Pammach. et Océan. —
^ Euseb., lib. VI
de le faire
,
la lui refusa. Justin., Apolofj. 2, pag. 71. L'Eglise 1* Tuntam porra curam ac diligentiam in divinis
comme il paraît par le canon 23 des Apôfes, et braicain etiam linguam didicent, et aat henticos Scrip-
par le premier de Nicée. Origène lui-même, devenu turarum libros hebraicis, scrijjfos litteris qui apud
dans la suite plus éclairé, blâma dans des écrits pu- Judœos habentur sibi comparaverit,elc. Euseb., lib. VI,
blics l'action qu'il avait faite, et l'explication trop cap. 16.
tude de la gène de la vérité de notre doctrine, quitta le cinquième du règne d'Antonin Caracalla,
philosophie
iiv«enAra- l'hérésie de •
Valentin. Plusieurs autres sa- le trentième de la vie d'Origène.
bie, eu iia.
vants hommes se rendaient aussi auprès de 9. L'année suivante, une grande * guerre PaiLTm*"
lui,au bruit de sa réputation, pour l'éprou- s'éleva dans Alexandrie; Origéne fut obligé de "Vrê-'h"!''
ver, l'examiner et juger de sa capacité dans nouveau de sortir de cette ne trouvant ville, et, que!'^e"n iîè"
riiitelligence des divines Ecritures. On y point de siu-eté dans toute l'Egypte, il passa
voyait même un
grand nombre d'hérétiques en Palestme et s'établit à Césarée. Quoiqu'il
et de philosophes les plus célèbres. Ce con- ne fût encore que laïque, Tiiéoctiste, évè!|ue
'^
cours l'obligea d'étudier plus à fond toutes de cette ville, et les autres évéques de la Pa-
les sciences humaines, les livres des philoso- lestine, le prièrent d'instruire le peuple dans
phes qui nous promettent la connaissance l'église, en leur présence, et d'y expliquer les
de la vérité, et les dogmes des hérétiques. Ecritures. Uéniètre ^ s'en formalisa, comme
Mais tandis que plusieurs gens habiles témoi- d'une chose témoigna son mécon-
iiiouie, et
gnaient l'estime qu'ils faisaient d'Origène, tentement par des lettres qu'il leur en écrivit.
tantôt en lui dédiant leurs ouvrages, tanlôt en Saint Alexandre, évêque de Jérusalem, et Thé-
les soumettant à son jugement, il s'en trouva octiste de Césarée se justifièrent de ce fait, en
qui le blâmèrent de la trop grande ap[ilica- écrivantàDémètre qu'ils avaient suivi ' en cela
tion qu'il donnait à la philosophie. Il se dé- l'exemple de plusieurs saints évèques, entre
fendit * dans une lettre, par la nécessité où autres de N'^on, évêque de Larandes; de Celse
il s'était trouvé de le faire, et par l'exemple d'Icône, d'Attique deSynnades en Phrvgie,
d'Héracle, son ami, et de saint Pantène, son qui, ayant trouvé parmi les laïques des per-
maître qui tous deux s'étaient appliqués à sonuiis capables de servir leurs frères par la
,
l'étude des sciences profanes et des dogmes parole, les avaient exhortés à la prêcher pu-
des hérétiques. Cependant un officier du gou- bliquement devant le peuple. Démètre, crai-
verneur d'Arabie apporta de sa part des let- gnant ® qu'on ne lui enlevât Origéne, lui écri-
tres pour Origéne, pour Déraètrc, évêque d'A- vit de revenir à Alexandrie, et envoya même
lexandrie, et pour le gouverneur d Egypte. Il des diacres de son Eglise pour presser son re-
demanilait^, par ces lettres, qu'on lui envoyât tour. On ne sait point combien de temps Ori-
Origéne en toute diligence, parce qu'il avait géne resta en Palestine. 11 y était encore au
quelque chose à lui communiquer. Origéne commencement de 217, s'il est vrai, comme
fut donc obUgé de faire ce voyage en Ara- Epiphane ®, qu'il ait trouvé la cin-
le dit saint
1Per idem tempus Ambrosius, qui Valentini hœre- sens que M. Valois et quelques autres ont donné
sim sectabatur, venfaiis quam prœdicabat Origenes aux paroi"? d'Eusèbe Miles quidam adveniens litte-
:
virlute convictus, ad redœ fidei quœ in Ecclesia pi^œ- ras a duce Arabiœ detulit, quibus poscebat ut confes-
dicatur professionem transat. Euseb., ibid. Saint Epi- tim ad se Originem mitterent,qui doctrinam suam ipsi
phane, hœt^es. 64, et saint Jérôme, in Cataloyo, cap. 56, commumcaret. Euseb., lib. VI, cap. 19.
diàenl que cet Ambroise suivait les erreurs de Jlar- * Euseb., lib. On croit qu'Eusèbe fait
VI, cap. 19.
cion. allusion, en cet endroit, au grand carnage que Cara-
2 Cum vero totum me addixissem verbo Dei ac de calla fit à Alexandrie vers le milieu de l'an 216.
noatra eruditione fama jam crebnor spargeretur, con- s Euseb., ibid. —
« Idem, ibid.
Seigueur et l'excellence des préceptes que d'y aller, et partit d'Alexandrie, muni d'une
ce divin Maître nous a laissés, il revint à lettre *° ecclésiastique ou de communion, de
Alexandrie vaquer à ses exercices ordinaires. la part de Démètre, son évèque. En passant à
commente**
^^ ^^^ ^®^'^ ^'^ tcmps-là qu'Origénc com-
^^' Césarée de Palestine, Théoctiste, qui en était
,ù^'i.'i«"m
™6nça à composer divex-s ouvrages sur TEcri- évèque, et saint Alexandre de Jérusalem, avec
u»qu'en228. ture. Plusicurs ' personnes l'engagèrent dans quelques auties évèques de la province, qui le
ce travail, surtout * Ambroise, qui, non con- jugeaient digne des degrés les plus éminents,
tent de l'y exhorter par d'instantes prières et lui imposèrent *' les maijispour l'élever à la
de l'y exciter par l'exemple des plus savants prêtrise. Origène était alors dans la quarante-
hommes de son temps, lui en fournit encore troisième année de son âge. Son ordination
à ses frais tous les moyens. Car il lui donna occasionna de grands troubles et divers rè-
plus de * sept personnes pour écrire sous lui glements dans l'Eglise. Démètre en fut surtout
et se succéder les uns aux autres, avec autant offensé, et s'emporta contre lui avec un tel
de copistes, et des lilles qui écrivaient par- excès de fureur **
et de folie, qu'il en écrivit à
faitement bien. Ambroise entretenait toutes toute la terre. Mais, ne trouvant point d'autre
* Hérodien, livre VI, dit que Mammée vint à An- Quœ cogitabam dicere ?
tioche avec Alexandre, son fils, lorsqu'il passa en Quœ furta corde in tntimo,
Orient pour faire la guerre aux Perses, et qu'elle fit Exercet aies dextera ?
dans cette ville un séjour assez long. Mais comme Ausou., Epigram. 137, cap. 3.
Alexandre ne fit cette guerre que sur la fin de son * Quodque
majus est, incredibili studio quotidie
his
règne, vers l'an 234, et qu'on ne saurait mettre le ab eo opus exigebat. Hieronym., in Catalogo, cap. 16.
voyage d'Origène à Autioche après l'an 227, sans Ambrosius in quadam epistola, quam ad Origenem
''
renverser toute la suite d'Eusèbe, nous le mettons de Athenis scripserat, refert nunquam se cibum, Ori-
sous le règne d'Héliogahale. neveu de Mammée, lors- gène prœsente, iumpsisse sine lectione, nunquam iniisse
que ce prince vint à Antiocbe, après la défaite de somnum, nisi unus e fratribus sacris lilteris persona-
Macrin, en 217. Tillemont, tom. III, pag. 763. ret; hoc diebus egisse vel noctibus, ut et lectio ora-
* Euseb., lib. VI, cap. 21. Il y a tout lieu de tionem exciperet et oratio lectionem. Hieronym.,
croire que Mammée embrassa la religion cbrétienne, Epist. 45 ad Marcellam.
et qu'elle ne contribua pas peu à la paix dont l'E- * Hieronym., in Catalogo, cap. 61. — ^ Hieronym.,
glise jouit pendant le règne d'Alexandre, son fils. in Catalogo, cap. 54.
5 Epiphan., Hœres. 6^, num. 3 —
* Euseb., lib. VI 10 Origenes cum jam mediœ esset œtatis, et propter
Hist., cap. 23; Hieronym., in Catalogo, cap. 61. Ecclesias Acfiaiœ, quœ pluribus hœresibus vexabantur,
* Quippe septem et amplius notarii didanti illi sub testimonio ecclesiasticœ epistolœ. Athenas per Pa-
prœsto aderant, qui prœstituto tempore sibi per vices lœstinam pergeret, a Theoctisto, et A lexandro Cœsareœ
succedebant : nec pauciores anliqunrii simul cum puel- et Hierosolymorum episcopis presbyter ordinatus, De-
lis elegantius scribere assuefis, quibus omnibus ne- metrii offendit animum ;
qui tanta in eum debaccha-
eessarios sumptus copiose subministrabat Ambrosius. tus est mundum super nomine
insania, ut per totum
Euseb., lib. VI, cap. 23. Ausone parle de ces écri- ejus scriberet.Hieronym., in Catalogo, cap. 54. C'est
vains ou notaires, comme les appelle saint Jérôme, donc sans raison que Pholius, Cod. 118, a dit qu'O-
et décrit élégamment avec quelle vitesse ils écri- rigène était sorti d'Alexandrie sans le consentement
Taient. de Démètro et, contre l'autorité d'Eusèbe et de saint
;
Quam prœpetis dextrœ fuga, Jérôme, il ajoute que Théoctène était alors évèque
Tu me loqtieniem prœvenls: de Césarée.
Quis, quœso, quis me prodidit. " Euseb., lib. VI, cap. 8. — i* Hieronym., ubi
Quia istajam dixit tibi, supra.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XITI. — ORIGÈNE. 135
reproche à faire à Oricrène, il se servit ' de la assemblé deux conciles d'évèques et de quel- ,ienx «onci-
les (*t px*
violence qu'il s'était faite à lui-même dans sa nues prêtres, déitosa Origène du sacerdoce, communié
jeunesse, la fît savoir à tous les évêques et lui deiendit d enseigner dans Alexandrie, 1 o- 2«.
l'exaiïéra comme un crime tout à fait énorme. bligea d'en sortir et l'excommunia. Toute la
Eusèbe et saint Jérôme, de qui nous apprenons terre consentit à ce décret, excepté les prélats
ces détails, disent nettement que Démètre
'"^
de de l'Arabie, de la Phénicie ®
la Palestine,
n'agit que par une secrète jalousie de l'estime et de l'Achaïe. Rome ® même assembla contre
que tout le monde portait à la doctrine et à lui son sénat, non, dit saint Jérôme, qu'il en-
la vertu d'Origène. Saint ^ Alexandre prit la seignât de nouveaux dogmes, non qu'il eût
défense dOrigène ; et, comme il était lui- des sentiments hérétiques, ce que veulent
même accusé par Démètre d'avoir agi contre pourtant nous persuader ceux qui aboyaient
les règles de l'Eglise, eu ordonnant Origène, après lui comme des chiens furieux ; mais
il fît voir qu'il avait été en droit de lui impo- parce qu'on ne pouvait supporter l'éclat de son
ser les mains pour la prêtrise, puisqu'il l'avait éloquence et de sa science, et que, lorsqu'il
trouvé muni de lettres formées de son évêque. parlait, tous les autres semblaient muets. Il
ses exercices ordinaires. pas que les amis qu'il avait dans cette ville ne
Hiiuiite
13, Démétre, dont la réconciliation
jviais fussent touchés de son maliieur, il leur '* écri-
avec Origène n'était qu'apparente, ayant ' vit pour se plaindre de Démètre et des autres
1 Euseb., lib. YI, cap. 8. de son sentiment, et rendit avec eux une sentence
' Itaque Demetrius cum eum ( Origenem )
pros- qui déposait Origène du sacerdoce et l'excommu-
peris successibus in dies augeri, et magnum jam ita- niait.
que illustrem, omnium sermonibus, celebrari videret, ' Il y a toute apparence que les évêques de Cap»
humani quidpiam passas, litieris ad omnes ubique padoce ne souscrivirent pas à la condamnation
terrarum episcopos scriptis, facinus illud Origenis pro- d'Origène ,
puisqu'il se retira auprès de Firmilien,
scindere tanquam absurdtssimum cœpit. Euseb., lib. VI, un des plus célèbres évêques de cette province,
cap. 8. Damnaiur a Demetrio episcopo, exceptis Pa- en 235.
lœstinœ et Arabiœ, et Phœniciœ atque Achaïœ sacer- 8 Hieronym., Epist. 29 ad Paulam, ubi supra. Les
sus eum rabidi canes simulant, sed quia gloriam elo- et il n'y a point de doute qu'ils ne pussent le faire.
quentiœ ejus et scientiœ ferre non poterant, et illo Mais les autres évêques, qui n'avaient point de con-
dicente omnes muti putabantur. Hieron., Epist. 29 ad naissance particulière des affaires traitées dans les
Paulam ; II in Hieronym.
et Ruffiu., lib. couciles assemblés contre lui, pouvaient, aussi avec
* Alexander et pro Origène contra Deme-
Scripsit quelque raison, ajouter foi aux lettres de ces conciles,
trium, eo et quod juxta testimonium Demetrii eum parce qu'elles ne disaient rien contre l'Evangile, et
presbyterum constiiuerit. Hieronym., in Catalogo- qu'elles ne disaient d'un homme que ce qui était
* Euseb., lib. VI, cap. 23.
Ruffin., bb. II in — s
croyable d'un homme, selon la remarque de saint
Hieronym. —
Epipban., Hœres. 64, duiû. 1.
6 Augustin sur un sujet à peu près semblable. Salua
^ Il paraît, par Photius, Cad. enim consdentia, litteris concilii crediderant : neque
118, que le premier
concile assemblé contre Origène ne le déposa point enim ab hominibus de aliis hominibus aliquid incre-
du sacerdoce, mais qu'il lui défendit seulement dibile videbatur, aut eis contra Evangelium credebatur.
d'enseigner, et lui enjoignit de sortir d'Alexandrie. August., Epist. cont. Donatist., cap. 25.
Démètre, peu satisfait de ce décret, assembla une >o Ruffin., cap. 19. — " Euseb., lib. VI, cap. 30.
seconde fois quelques évêques d'Egypte qui étaient 1* Hieronym., lib. II adv. Ruffin., pag. 411.
136 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
qui l'avaifrit excommiinin, ot pour montrer cruellc persécution contre les chrétiens, par-
l'injustice et la nullité de, cette excommuni- ticulièrement contre les prélats et les doc-
cation. Dans cette lettre il se plaignait que teurs de l'Eglise, comme causes
du progrès de
Ton eut corrompu sesc^crits, etiltlésavouait
'
l'Evangile, Origène demeurer * fut obligé de
des erreurs considérables qu'on lui imputait. caché pendant deux ans chez une vierge, nom-
Il y encore qu'il lais.sait ses ennemis et
di-^ait mée Julienne, qui lui fournissait tout ce dont
ses calomniateurs au jugement de Dieu, se il Ce fut
avait besoin et le servait elle-même.
croyant* plus obligé d'avoir pitié d'eux que pend.int ce temps qu'il composa son Exhor-
de aimant mieux prier Dieu de
les haïr, et tation au martyre; il l'adressa à Ambroise,son
leur faire miséricorde, que de leur soidiaiter ami, et à un prêtre de Césarée, nommé Pro-
aucun m;d, car nous sommes pour prononcer tecte, qui méritèrent tous deux lu qualité de
choisit Héracle, l'un de ses disciples, pour un voyageen Grèce. Il demeura quelque temps
remplir le siège d'Alexandrie, et que l'on à ' Athènes; et, après être retourné ^ à Césarée,
donna la chaire des Catéchèses à un autre de il alla en Arabie, à la prière des évéques de
ses disciples, nommé Denys, qui fut depuis cette province. Leur motif était de retirer de
évèque de la même ville. Origène, profitant l'erreur l'évêque de Bostres, nommé Bérylle,
du calme qu'on lui laissait, continua les expli- qui, après avoir gouverné assez longtemps
cations qu'il avait commencées surl'Eeriture. son Eglise avec beaucouj» de réputation, était
Pendant ce temps saint Grégoire le Thauma- tombé dans l'hérésie il niait que Jésus-Chiist
:
turge et saint Athénodore, son frère, vinrent eut eu aucune existence avant l'incarnation,
à Césarée, et, y ayant trouvé Origène, ils ap- et prétendait qu'il avait commencé à être Dieu
prirent de lui les sciences humaines et les seulement en naissant de la Vierge, et même
vérités de la religion. Firrailicn, alors évo- qu'il n'était Dieu ' que parce que le Père de-
que de Césarée en Cappadoce, était aussi lié meurait en lui comme dans les Prophètes.
d'amitié avec Origène et était venu jus(ju'en Origène s'entretint d'abord familièrement
Judée pour profiter de ses lumières et de sa avec lui, pour connaître plus aisément quelle
doctrine. Il l'avait même ' invité à passer était sa doctrine. Puis, quand il l'eut connue,
en Cappadoce, pour y instruire les fidèles il en fit voir la fausseté avec tant de force
lui
de cette province. Orgène s'y rendit peu de etde charité, qu'il l'engagea à quitter son er-
temps après. Mais, Maximin ayant excité une reur et à reconnaître la vérité qu'il avait aban-
* Il rejette, entre autres, l'erreur du salut des dé- toire Lausiaque, lib. VIII, chap. 147, où il fait dire à
mons,qu'on lui attribuait. Quidam eorum qui lihenter Origène qu'il avait trouvé chez une vierge nommée
habent criminari proxiinos suos, adxcribunt nobis et Julienne, un ouvrage de Symmaque. Hune librum
doctrinœ nostrœ crimen blasjthemiœ, quod a nobis inveni ego apud Julianam virginem in Cœsarea, qui
nusquam audientnt : de quo ijisi viderint, noientes ob' apud ipsam erat occultus. Dicebat autem se accepisse
servare mandatum illvxl quod dicit : quia maledici n Symmacfio, interprète Judœorum.
regnum Dei non possidentes : dicenles asserere me pa- * C'est là, selon Eusèbe, qu'Origène acheva son
irem mulitiœ eorum qui de régna Dei
et perditionis Commentaire sur Ezéchiel. Euseb., lib. VI, cap. 32.
ejiciuntur, id est diabolum esse salvandum, quod ne — ^ Euseb., ibid., et cap. 33.
aliquis quidem mente motus et manifeste insaniens ''
Tune temporis Beryllus ecclesiasticam pervertens
dicere potest. Origen., apud Hieronym., lib. Il cont. régulant, nova quœdam, et aliéna a fide catholica in-
Buffin., pag. 413. ducere conalus est, ausus asserere Dominum ac serva-
* Quorum magis misereri quam eos odisse debemus ;
torem nostrum,antequam inter homines versaretur, non
et orare pro illis quam eis maledicere : ad benedicen- substitisse in prop7-iœ personœ differentia : nec pro-
dum enimet non ad maledicendum creati sumus. Ibid., priam, sed paternam duntuxat dtvinitatem in se resi-
pag. 411. dentem habere. Euseb., lib. VI, cap. 33. Saiut Jérôme
' Quautœ autem gloriœ fuerit hinc apparet quod ne met point ce dernier article entre les erreurs de
Firmilianus, Cœsareœ episcopus, cum omni Cappadocia Bérylle et, à moins de l'entendre comme nous l'a-
;
eum invilavit et diu tenuit : et postea sub occasione vons marqué, il faudrait plutôt condamner Eusèbe
sanctorum locorum Pa/œstmam veniens, diu Cœsareœ d'arianisme que Bérylle puisqu'il n'y a qu'un arien
, ;
in Scripturis sanctis ab eo eruditus est. Hieronym., in qui puisse dire que le Fils a une autre divinité, et
Catalogo, cap. 54. par conséquent une autre nature que le Père.
* C'est Pallade qui nous apprend ce fait dans l'His-
[lll^ SIÈCLE.] CHàPITRE XIII. — ORIGÈNE. 137
* Hieronym., in Cotalogo, cap. 60. — * Euseb,, ayant voulu assister aux prières qui se faisaient dans
lib. VI, cap. 37. l'église , l'évêque ne voulut point le lui permettre,
3 Euseb.. lib.Origène parle de ces
VI, cap. 38. jusqu'à ce qu'il se fût confessé et rais au rang des
hérétiques dans son homélie sur le psaume lsxxii pénitents à quoi il s'était soumis humblement, fai-
;
et marque leurs erreurs eu ces termes ; Ex universo sant voir par ses actions combien il était touché de
sacro canone quœdam rejicit, quibusdam vero utitur la crainte de Dieu. Euseb., lib. VI, cap. 34. Eusèbe,
tum ex vetere instrumentojum ex Evange-
testimoniis de qui nous apprenons ces circonstances, dit ailleurs
lio.Paulum quidem apostolum integrum repuaiat, que Philippe est le premier des empereurs romains
docet prœterea indifferentem rem esse Christum abne- qui ait été chrétien. Philippus, primus omnium ex
gare : et eum qui sapit, ore quidem tenus in ipso Romanis imper atoribus, christianus fuit. Euseb., in
discrimine negaturum esse, sed non ex animi sententia. Chronic, ad an. 246. —
Euseb., lib. VI, cap. 39.
">
Librum etiam proferunt qvem e cœlo delapsum affir- * Epiphan., de Mensuris et Pond., cap. 18; etHœ-
mant, eosque qui auscultaverint illi et crediderint, resiGit, num. 2, et Eu-seb., lib. VI, cap. 39. » Eu- —
peccatorum veniam consecuturos, et quidem diversam seb., ibid.
ab il la peccatorum remissione quani Jésus Chris tus Photius, Cod. 118, cite des lettres écrites par
^0
impertiit, Euseb., lib. VI, cap. 38. Origène après la persécution de Dèce.
* Epiphan., Hœres. 19,uum. 12 et 14. — » Euseb., '1 Vixit usque ad Gallum et Volusianum, id est us-
lib. VI, cap. 35 et 3G. que ad sexagesimum nonuni œtatis suœ annum, et mor-
8 On disait, du temps d'Eusèbe, que l'empereur tuus est Tyri, in qua urbe et sepultus est, Hieronym.,
Philippe avait été chrétien, et qu'à la fête de Pâques, in Catalogo, cap. 54.
138 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Genèsp,(i\\aiTc\\\'n'S des Principes, trenU'-noni 40. Saint Painphihi' avait rassembl»^, dans Suite.
tomes sur saint Jean, ht livre de la Prière, la bibliothèque qu'il drossa à Césarée, tout
des tomes sur VExade, neuf homt^lies sur les ce qu'il avait pu trouver des ouvrages dOri-
Jugex, plusieurs autres sur VEpitre aux Un- gène, et il j' a apparence qu'ils subsistaient en-
rnains et sur saiut Luc, ['Exhortation au mar- core, pour la plus grande partie, du temps de
tyre, trente tomes sur baie, viugt-ciiuj sur saint Jérôme, i)uisqn'il eu avail fait le dénom-
Ezéchiel, une lettre à saint Grégoire le'l'hau- brement dans une * lettre à sainte Paule. Mais
maturge, dix tomes sur les Cantiques, neuf ce catalogue n'est pas venu jusqu'à nous, non
homélies sur les Psaumes, vingt-cinq tomes plus que celui qu'Eusèbe avait inséré ' dans
sur saiut Matthieu, quinze sur VEinlre aux le livre 111 de la Vie de saint Pamphile. Ainsi
^077îa/«s, qnaranle-cinq homélies sur Jerémie, nous ne pouvons savoir au juste le nombre
quatorze sur Ezéchiel, dix-sept sur la Genèse, des ouvrages d'Origèr.e. Mais il était si consi-
treize sur r^'aorfe, seize sur le Ze'yé^i'^z/e, vingt- dérable, au rap])ort de Vincent de Lérins *,
huitsur les yVo///6res, trois tomes sur la l"=^/J2- qu'aucun homme, avant lui, n'en avait tant
tre aux Thessaloniciens , \inp;\-c\nq sur les composé, et que, selon saint Jérôme ^, il était
petits Prophètes, huit livres contre CWse, vingt- difiiciie de lire autant de livres qu'Origène en
six homélies sur Josué, une homélie sur le avait écrits. Saint ^ Epiphane dit (|ue l'on en
commeuceuieut des Bois une sur la Pytho-
, comptait jus.ju'à six mille, ce qui ne serait
nisse, deux homélies sur les Cantiques, neuf pas incroyable, si, sous le nom de livres, on
sur Isaïe, quelques-unes sur les Actes des Apô- comprenait ses homélies et ses lettres un peu
ti^es, trois tomes sur VEpitre aux Epliésiens, considérables '. Car saint Jérôme dit qu'Ori-
trois livres sur r£'/}?7/'e aux- Co/oss<ens, un livre gène avait prononcé ® dans l'église plus de
SUT VEpitre à Tite, (juelques autres sur VE- mille homélies, et composé une infinité de
pitre aux Hébi^eux, et plusieurs homélies sur commentaires.
la même Épitre. Origène écrivit encore sur le [iO. J)om Pitra a eu le bonheur de retrou- Lettre de
ssint Jéiô-
:ne rt SMiute
psaume l, sur les Proverbes et sur quelques ver au moins la plus grande partie de la Let- Paule, pu-
autres parties de l'Ecriture, comme nous tre de saint Jérôme à sainte Paule ^. Voici le
bliée par D.
Pitra.
le dirons dans la suite; et il écrivit aussi di- dénombrement que ce Père y fait des livres
verses lettres. Nous n'avons qu'une partie d'Origène.
de ces ouvrages; mais on lui en suppose plu- Origène a écrit :
nitenceou des Lammtations d'Origène, des Des extraits sur VExode ... »
commentaires sur Job, des homélies sur di- Des extraits sur le Lévitique . »
vers endroits de l'Evangile, des scolies .sur De Stromates X
VOraison Dominicale et sur les Cantiques de Sur Isaïe XXXVI
la sainte Vierge et de Zacharie, etc. Des extraits sur Isaïe »
sed ne inveniri quidem posse videantur. Vincent. Li- lih 111, 7; dans sa lettre Lxn, 2, il dit Sex millia :
nationis earum diebus desudavit ac noctibus. Mille et » 11 l'a trouvée dans le manuscrit 854 de la Biblio-
eo amplius tractatus quos in Ecclesia locutus est, edi- thèque d'Arraset l'a publiée dans le tome III du Spi-
dil. Innumerabiles prœterea commentarios, quos ipse cilége de Solesme, pag. 311 et suiv. (L'éditeur.)
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÉNE. i39
Sur Osée,à savoir snrEpbraïm. I psaume lxxi 1
mes du au !''
xv<' » Un dialogue contre Candide
Surle psaume i I Valentinien »
— II I Du Martyre I
— m I
, SUR LE NOUVEAU TESTAMENT.
IV
— V I Sur saint Matthieu XXV
— VI I — saint Jean XXXII
— VII I — quelques parties des ex-
— VIII I traits de saint Jean. ... I
— IX I — saint Luc XV
— X I — l'Epitro de Paul aux saint
— XI I Romains XV
— XII I — aux Galates
l'Eoître . . . XV
— XIII I — aux Ephé
l'Epitre siens. . III
— XV I — aux Colossiens.
l'Epitre . II
— XXIV I — à ïite
l'Epitre I
— XXXVIII ....
— XL
* HOMÉLIES SUR L'ANCIEN TESTAMENT.
Sur le commencement du — IV I
uo HISTOIRE G ÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSÏASTIQUES.
Sur le psaume XIII I homél. Sur le psaume cxLiv lîl homél.
XII .. . I — CXLV I
— XIII. . . III — CXLVI I
— XV . . . 1 — CXLVII .... I
•
XVI. . . I — CXLIX
— XVIII . . » Des extraits sur tout le Psau-
I
— XXII . . . I tier »
— XXIV . . i I
— XXV . . I
HOMÉLIES SUR LE NOUVEAU TESTAMENT.
LXXX . . II — Tarse H
— LXXXI. . I Homélies d'Origène, de Eru-
— LXXXII . III mianus et de Grégoire . . »
— LXXXIII I Extr;iits de différentes lettres
— LXXXV . . I qui lui sont adressées ... II livres.
— LXXX VII. I Lettre à Esifodore touchant
— CVIII . . ] la cause d'Origène II
— ex . , . I Lettres adressées à plu -
' Le catalogue n'énuœère pîIS tous les ouvrages venit adhœrescens , ad te Scriptnrœ dictum : Fili mi,
d'Origène, comme le liontre Dom Pitra, et comme cave multos libros conficias, Eccles. 12, vers. 12,
Dom Ceillier peut aussi le démontrer. excusationis loco mittere, et confirmata re ex eo quod
* Origen., in Psal. i. Nous mettrons son passage neque sancti multorum librorum composttioni sticdue-
ci-après. rint, desmere deinceps subjungere comment arios j'uxta
s Poteram autem id quod nobis sub aciem termonw fœdus inter nos inilum ad te transmiltendos ; et tu
[III« SIÈCLE.J CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. m
lors,aucun ne s'était appliqué à composer duits par l'erreur et de tomber dans les pièges
un grand nombre d'ouvrages. Ainsi il serait des hérétiques, comme il était arrivé à Am-
broise *.
demeurédans le silence, si Ambroisc, sou ami,
ne vivemeni excité à écrire, et par ses
l'eût 22. Mais il était si persuadé que ' tout bien Sps pré-
cautions
paroles, lorsqu'il était auprès de lui, et par vient de Dieu et que, sans le secours de ses lu- poiiiperfec-
tionner ses
ouvrages.
ses lettres, lorsqu'il en était éloigné. Il y fut mières, il est impossible à l'homme de décou-
aussi [lorté par les pressants besoins de l'Eglise, vrir les vérités renfermées dans les divines
attaquée par un grand nombre d'hérétiques, Ecritures, qu'd lui demandait sans cesse et
dont quelques-uns avaient composé des * com- lui faisait demander par ses amis la grâce de
mentaires sur l'Évangile, qui, malgré les er- bien chercher la vérité et celle de ne pas s'ap-
reurs qu'ds contenaient, ne laissaient pas pliquer à son travail par une application
d'être lus de plusieurs catholiques, jjarce que purement humaine, mais de le faire entrer,
ceux-ci n'eu trouvaient pas de medleurs. Ce par le secours de son Esprit, dans la pnrtici-
fut donc pour leur en donner d'orthoiloxes pation de ses mystères. Il avait * aussi grand
qu'Origène entreprit les siens, afin qu'ils y soin de lire les écrits de ceux qui avaient
pussent désaltérer la soif qu'ils avaient de travaillé avant lui sur l'Ecriture sainte, et
la vérité, sans s'exposer au danger d'être sé- profitait sans scrupule de leurs découvertes.
fortasse illo dinto Scripturœ commotus, id mihi in * Hœc a nobis velut prœfandi gratia proposita sunt,
posterum concessisses. Sed quoniam Scripturce cum qui in maximum
cerfamen quodque vires nostras ac
recta mente et conscientia excutiendœ sunt rem facuUatem sine ulla dubitntiune superat, ub ingenti
non prolato, nec qnœ mihi videlur suffragari dcfen- tuo.,Ambrosi, vir sanctissime, ergn litteras studio con-
sionem affero quu uti contra me possts, si fjrœter pac- citât i fuanus, et ut in illud descendereniushumanitate
tuni aiiquid fecero. Origeu., tom. V inJoun., pag. 87. tua ac moderatione perpulsi. Quandoquidem diu me
Quoniam non cuntenfus id uhsentis mei causa ttbi comperta periculi magnitudine recusantem, non modo
operis sumpsisse, ut mihi secundam Deum nionitor disputavt d3 sacris litteris sed et multo magis scri-
;
esses, et laboris exactor, postulas etium ut pio meo bere ac posteris relinquere, modis omnibus atque ille-
in te offtcio multa eluborem : ego tuborem fugiem, et cebris demul sisti et ad hoc quibusdam divinitatis pro-
,
eo periculu circnmcessus quod a Dec impendet iis qui gressionibus adduxisti. Tu igitur testis mihi apud
ad scnbendum in divinas Scnpturas se contulerunt, Deum eris tiim cum de vita mea ac scriptis inquiref,
Scripturœ patrocinio tueri me possim multos libros quonam animi comilio sit istud a me susceptum ac
scribere recusuns. Ibid. nonnunquam quidem veritutem assequimur, nonnun-
Cumque nunc specie ac prœtextu cognitionis alie-
1 quam aut violentius perrumpimus, aut dicere aiiquid
narum opinionu/n asseclœ in sanctam Vhristi Eccle- videmur. Porro quod scriptum est vestigavimus, non
siam tnsurgant, et multorum librorum compositiones ifa ut prœclare illud die tum contemneremus : Cum de
diuulgent, quibus Evangelicarum constitutionumexpo- Deo dicis, a Deo judicaris. Item illud : de Deo etiam
sitionem pollicentur, si jam sileamus, nec iilts salu- vera dicere, non médiocre periculum est. Quamobrem
taria et vera documenta apponamus, avidas et jejunas cum nihil sine Deo esse possit egregium, prœsertim-
animas cibi inopia expugnabunt, ad vetritas et omnino que divinarunt litterarum intelligentia ; abs te etiam
impuras abominandasque escas festinantes. Quare ne- atque etiam petimus ut pnrentem omnium Deum,
,
cesse mihi videtur esse, eum qui sine fraude uc prœ- per Salvatorem nostrum ac pontificem genitum Deum
varicatiune potesl pro ecclesiastico serrnone oratorern obsecrare velis, id/ue ab eo nobis impelrare, ut impri-
se interponere, et eos confulare, qui falsam sibi cogni- mis recte quœrere possimus.OTigf^n., in Psal.lypag. 3.
tionem assumunt, sture aduersus hœretica commenta, Nunc intérim non videbitur absque ratione dici,
*
et exce/sitatem Evangelici prœconii illis opponere, in quod ei prioribus nostris quibusdam visum est, pro-
quo est plenissima consensio communis doctrtnœ, vete- phetiam quamdam in hoc designutam esse. Idem, in
ris quod vocant cum novo Testamenlo. Tuque ipse Gen. Quidam tamen ex lis qui anfe nos interpretati
adeo eorum penuria qui meliora assererent, cum ra- sunt hune locum, memini quod mortuos dixerunt eos
tioni pugnantem et absurdani fidem, quœ tua erat in qui nimietate sceleruin in peccatis mortui intelliguntur.
Jesum pietas, minime ferre pos.ses ; iis te olim sermo- Idem, Hom. 9 in Num. Sed et Origcnes, qui multorum
nibus tradideras, quibus postea usus ea, ut decebat, (juœ interpretationes diligenti discussit indagine, stillavit,
data prudentia, damnatis dacessisti. Hœc au-
libi est secutus est eo quod perfecti anima quasi bene composita
tem dico ad eorum qui et dicere et scribere possunt, et confirmata non Ambrosius, in Psal. cxvn,
stillat.
quutenus mihi apparat, defensionem. Sed et meam ip- num. 16. Origène n'est donc pas le premier des au-
sius causam non eo instructu et habitu, quo
dico, qui teurs ecclésiastiques qui ait donné des commentaires
esse oportet eum Deo sit idoneus factus novi
qui a sur TEoriture, comme quelques-uns l'ont dit, entre
Testamenti administer, non litterœ, sed spiritus. auda- autres Bealus Rheuanus, dans une lettre à Hermaa
dus me ad dicendum projiciam Origen., in Joan., de Cologne. Il paraît même, par saint Jérôme,
tom. III, pag. 92. qu'Ambroise, pour exciter Origène à travailler sur
* Commf-nt, après cela, dire avec M. Ed. Duœont, l'Ecriture, lui proposa l'exemple de saint Hippolyte,
dans It's Annal, de Philosop., tom. XLIX, qu'Origène qui était alors en grande réputation. In hujus (Hip-
a cheiT.lié à échapper à la pulilicilé, dans la crainte polgti) œmulaiionem A7nbrosius cohoriatus est Orige-
de voir ses erreurs condamnées, si elles étaient pu- nem in Scripturas scribere. Hieronym., in Catalogo,
bliées. {L'édittur.) cap. 61.
442 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ARTICLE II. la fausseté, il suffira de remarquer: Insoit que
cette version ait été faite par septante inter-
DES ECRITS D ORIGKNE SLR L ANCIEN TESTA-
prètes, ou par un plus grand ou par un pins
MENT. petit nombre de traducteurs, elle n'en a pas
idée des versions de l'Ecriture dont ces re- quc ou les cinq livres de Moïse. Malgré cela,
cueds étaient composés. La première est celle on a donné le nom de version des Septante à
que l'on nomme communément des Septante, la traduction grecque de tous les livres de
faite ù Alexandrie sous de Ptolémée
le rèj^ne l'Ancien Testament.
277 ans avant Jé-
Pliiladel{>he, roi d'Ep;ypte, 2. A l'exemple des septante, plusieurs entre- Version
d'Aquila.
sus-Christ. Sans entrer dans le détail de l'his- prirent de traduire les Livres saints. Le pre-
toire que le prétendu Aristée nous en a don- mier que nous connaissons est Aquila. Il était^
née, et dont tant d'habiles gens ont fait voir * originairedu Pontet païen de religion. Mais*,
1 Celui qui a écrit cette histoire se dit Aristée. Il taillenavale que Ptolémée, fils de Lagus, avait ga-
l'acomposée en forme de lettre adressée à son frère gnée, plusieurs années auparavant, sur Antigone.
Philocrate, et dit que Démétrius Phaléreus, biblio- Enfin, ou ne conçoit pas comment le graud-[)rètre
thécaire du roi Ptolémée Pliiladelplie, persuada à ce Eléasar put sitôt et si aisément trouver dans cbaque
prince d'écrire au graud-prètrc Eléasar, pour lui de- tribu assez habiles dans les langues
six vieillards
mander des interprètes habiles pour traduire en grecque hébraïque pour traduire exactement les
et ,
grec les lois des Juifs, afin de les mettre ensuite Livres sacrés. Il semble qu'un plus petit nombre
dans sa bihliothèqun. Ptolémée écrivit et envoya de convenait mieux et aurait causé moins d'embarras
grands présents à Eléasar, qui, de son côté, fit partir et de confusion. Voyez les préliminaires de M. Dupin
aussitôt soixante-douze interprètes que le roi reçut sur la Bible et la dissertation de Dom Montfaucon
;
avec de grands honneurs. Us achevèrent leur tra- à la tète des Hexoples, tom. I, pag. 33.
duction en soixante-douze jours; puis s'en retournè- 2 Hoc in Septuaginta non habetur, qui forsitan
rent comblés d'honneurs et de présents. Saint Jus- Alexandriœ Scripfuras ex hebraica veritatevertentes,
tin, saint irénée. Clément d'Alexandrie et un grand timuerunt hoc edere, ne reyem ^gypfi viderentur of-
nombre d'auteurs ecclésiiTstiques, ont parlé de cette fendere, dum a Deo Jeruaalem debitum regnum esse
histoire, mais en des manières si différentes, qu'on commemnrarent : quamquam eruditi solos quinque li-
voit bien qu'ils ne la savaient que sur des relations bros Moysi ab eis interprétâtes esse putant. Hieron.,
peu exactes et peu conformes. Par exemple, saint in cap XVI Ezcchiel., vers. 13.
Justin dit que Ptolémée s'adressa au roi Hérode pour Aquila Ponticus. Iren., lib. 111, cap. 24.
'
avoir une version des livres prophétiques. U dit Cum Aquila degeret in Jérusalem, et videret dis-
*
encore que Ptolémée fit bâtir autant de petites mai- cipulos discipulorum ipsorum Apostolorum florentes
sons ou cellules, qu'il y avait d'interprètes , afin fide, et magna àigna opérantes snnationum et aliorum
que chacun travaillât séparément à cette version. miraculorum mente compunctus ckristianismo cre-
Deux circonstances également rejetées comme faus- didit, et cum signaculum
petiisset progressu temporis
ses et insoutenables. D'ailleurs, tout est exaaéré et in Christo, idipsum assecutu<: est. Cum autema primo
merveilleux dans la narration d'Aristée. La descrip- suo habitu non discederet, a credendo vidclicet vanœ
tion qu'il y fait des présents du roi Ptolémée à Eléa- astrologiœ, quam exacte edoctus erat, sed quotidie
sar sent le roman. Les soixante -douze demandes positionem nativitatis suœ speclaret; redargutusque a
qu'on lui fait faire aux interprètes, et leur soixante- doctoribus et increpatus ea gratia non corrigeret se,
douze réponses, n'approchent pas moins de la fic- sed potius conlentiose opponeret et consislentia confir-
tion. Il en faut dire autant des pièces qui composent maret, fatum videlicet et nurrationes de ipso : expul-
cette histoire la lettre du roi h Eléasar, la réponse
; s-us est rursus ab Ecclesia vclut inutilis ad salutem.
qu'y fit ce grand-prétre, sont écrites de même style Ex quo facto amarulentiam velut ignominia affectus
et viennent par conséquent d'une même main, ainsi mente concepit, et ad œmulationem elalus est, et ab-
que l'édit que l'on prête à Ptolémée , portant ordre negato christianisme ipsiusque vita, proselgtus fit et
à tous ceux qui avaient des Juifs esclaves de les circumciditur Judœus : atque tune laborioso siudo
mettre en liberté. Ajoutons que cette narration est tradidit seipsum ad discendum Hebrœorum linguam
pleine d'anachronismes. 1° Selon Strahon, Ptolémée et ipsorum elemcnta. Ubi vero hanc summe didicisset,
ne s'appliqua à faire une bibliothèque que sur la fin interpretatus est non recta ratiocmatione usus, sed
de ses jours. Or, Démétrius était mort dès le com- quœ aliqua ex receptis libris perverteret irruens in sep-
mencement du règne de ce prince, et n'eut jamais tuaginta duorum mterpretaiionem ut , testimonia de
aucun crédit auprès de lui, comme il paraît par le Christo in Scripturis prolala aliter ederet, propter
témoignage d'Hermippus, auteur contemporain, rap- confusionem quam sustinuit ob temerariam suam ex-
porté par Diogène Laèrce, dans la Vie de Démétrius. cusationem. Epiphan., de Mens, et Pond., cap. 18.
î» Aristée attribue à Ptolémée Philadelphe la ba-
[in« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. ORIGENE. 143
ayant vu les miracles
opérés parles chrétiens lement qu'il tiaduisait les mots plutôt suivant
qui étaient alors à Jérusalem et qui avaient leur étymologie *, que selon le sens qu'ils
été disciples des Apôtres, en fut touché, de-
il avaient, soit dans l'usage commun, soit par
manda le baptême et le reçut. Heureux si, en rapporta l'endroit où ils sont employés. Aussi
changeant de religion, il eût changé d'esprit sa traduction était-elle quelquefois barbare et
et de mœurs Comme ! il savait parfaitement inintelligible. D'autres fois il joint ensemble "
l'astrologie judiciaire, il tirait tous les jours le singulier et le pluriel, le masculin et le fé-
et,ayant appris avec beaucoup de soin la lan- était natif de Synope s, dans le Pont, de la
gue hébraïque, il traduisit la Bible en grec, secte des ébionites ^, du nombre de ceux qui
sur latin du règne d'Adrien, vers l'an 130,
» passaient pour Juifs et qui se faisaient circon-
dans la vue non-seulement de décrier la ver- cire. Sa version parut sous l'empire de Com-
sion des Septante, mais encore de détourner moile, vers l'an 84 de Jésus-Christ. Comme
1
et d'obscurcir les prophéties qui regardent elle avait plus de rapport que les autres à la
Jésus-Christ. Saint Jérôme - ne laisse pas de Version des Septante, qu'il avait souvent co-
dire qu'il avait trouvé uivers endroits dans la pour remplir les endroits
piée, ons'enest servi
version d'Aquila, qui étabhssaient la vérité qui manquaient dans les exemplaires des Sep-
de notre foi. Origène témoigne qu'on en louait tante on le remarque surtout dans les livres
:
l'exactitude, et que les Juifs ' appelaient cette de Josué,des Juges, des Rois, de Job, de Jéré-
édi.ion r exacte par excellence ; car Aqiula mie et d'Ezéchiel. Mais l'Eglise la suivait en-
s'était appliqué extrêmement à la lettre , tel- tièrement dans Daniel'*»; et elle est encore au-
1 Cœferum post hune Aquilam et ejus interprétai io' maxime, sensum assecutus esse putetur. Origen., Epist.
nem, succcdit Adriano in regiio Antuninus, appellatus ad A fric.
Plus. Idem, ibid. * Hieronym., Epit. 33 ad Pammach. ^ Montfau- —
* Aquila, qui non contensimius, ut quidam
putant, con, tom. 1 HexapL, pag. 48. —
* Hieronym., in Eze-
fatear, nuœ ad nostrum fidem pertineant roborandam le fait natif d'Epbèse. Ecce ado/escentula in utero
plura re^erio. Hiiîronyra., Epist. ad Marcelhim. [1 ne concipiei et pariet filium, quemadmodum verlerunt
laisse pas de critiquer ailleurs la versiou d'Aquila Théodotion Ephesius et Aquila Ponticus, ambo prose-
comme inCdèle. Par exemple, dans son Commentaire lyti Judœi. lieu., apud Euseb., )ib. V Hist., cap. 8.
sur le verset 5 du chap. XLixd'lsaie, qu'Aquila a tra- 8 Qui utique Théodotion post adventum Christi in-
tatione r'eceptus sit, qui interpretari vohat, et Israël vaut mieux s'en tenir à ro[)inion de saint Irénée,
ei congregabitur, hoc est Deo : cum ver/mm hebrui- qui le fait prosélyte juif. Ou voit en effet, par la,
Quis enim pro frumento, et vino, et oleo possd légère Et post hèhdomadas septuugin/a duas exterminabi-
vel intelligere fusionem pomationemque et splenden- tur unctio. Dan. ix, 26, au lieu de dire, eitermina-
iam. bitur unctits, comme a traduit Aquila. onexscindetur
'enim Aquila hehraicœ lectioni serviens edidit :
Sic Christus, selon Symmaque.
quem Judai accuratissime omnium credunt inierprc admoneo Danielem nonjuxta Sepiuaginta
i'^Lectorem
tatum esse Scripturam quo maxime uti soient qui
, juxta Tlieodotionem Ecclesias légère.
Interprètes, sed
hebraicam dialeclum ignorant , utpote qui omnium Hieronym., Praefat. in Comment, Daniel.
144 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
jourd'lîui en usage chez les Grecs, le livre de terprété comme eux le mot de vierge, par
ce i)ro[ihète ne se trouvant plus delà version celui d'une jeune personne. Car Symma<|ne
des Septante. Ilfautpourtantremarqner que, soutenait l'hérésie des ébionites, et avait
quoique TlK^oilotion suive presque parfont les fait des commentaires on il prétendait ap-
Septante, il y a néanmoins des endroits où il puyer ses erreurs sur des preuves tirées
s'en éloigne pour suivie Aquila. Quelquolois de l'Evangile de saint Matthieu 11 avait .
même il traduit de son chef, mais toujours d'abord ' été du nombre des Sam.iritains ;
d'une manière moins correcte et moins con- mais , devenu insiipportable par son ambi-
forme au texte original, qu'Aquila et Sym- tion, il se retira chez les Juifs et se fil cir-
maque. concire,
de symma-
^® dernier donna, sous le règne de Sé-
^' » 5. Origène
'->
* trouva la cinquième
^ version à ^'"jJ"'*"
me, sixième
que
vère, une quatrième version de l'Ecriture, Jéricho, la » septième année de l'empire de ^î,,.ffonL*de
^'^''^''^'^
moins littérale ijuc celle d' Aquila, mais plus Caracalla, de Jésus-Christ 217. Elle y était
claire et plus intelhgible. Ce qui l'a fait, pré- cachée dans des muids, avec d'autres livres
férer à cellesque l'on avait faites avant lui. grecs et hébreux. L'auteur en est inconnu. Il
Sa version n'a rien de semblahlc à celle des est plus libre dans ses traductions que Sym-
Septante. Il paraît même l'avoir négligée et maque, et parait quelquefois avoir eu pour
s'être i.niquemt'nt attaché au texte hébreu, but de paraphraser le texte de l'Ecriture
^
surtout dans les endroits où les Septante s'en plutôt que de le traduire, ce que l'on remar-
étaient éloignés. On en voit une preuve dans que surtout dans les douze petits Prophètes.
la supputation qu'il fait des années qui se La sixième version parait avoir été faite par
sont écoulées depuis Adam jus(ju'à Abraham; un chi étien ".
Origène * la trouva aussi Cdcliée
car elle est toute différente de celle des Sep- dans un muid eu la ville de ^ Nicople, sur le
tante et entièrement conforme à l'hébreu. cap d'Actiuni,dans l'Epire, veis la septième
Saint Jérôme marque deux éditions de la ver- année d'Alexandre, de Jésus-Christ 2"28. Ces
sion deSyminaque; mais on ne sait laquelle deux versions comprenaient pas toute la
iit;
des deux Origène reçut d'une vierge nommée Bihle, mais seulement quelques livres, parti-
Julienne, qui l'avait eue de Symmaque même. culièrement de ceux qui sont *° écrits envers
On croit que saint Irénée a voulu parler de dans l'hébreu. Eusébe ne dit point en quel
Symmaque, lorsqu'il dit * que les ébionites lieu Origène trouva la septième version. On
ont suivi Aquila et Théodotion daus leur ma- voit, par ce q;ii nous reste sur le prophète Ha-
nière de traduire le passuge dMsaïe où il est bacuc, que l'auteur était delà secte des ébio-
dit qu'une vierge concevra, et qu'ils ont in- nites " juifs. Cette version n'était pas moins
* Saint Epipbane met Symmaque avant Théodotion: libri qvintœ editionis in doliis inJericho occultati cum
Posi Symmachuni, T/teoc'otton Ponticus etiam inlerfjre- alits libris hebraicis ac grœcis. Epiphan., de Mens, et
tationem edidd. Epiplian., de Mens, et Pond., cap. 17; Pond., cap. 18.
mais nous croyons qu'il u'a écrit qu'après : saiut Par exemple, au lieu de ces paroles du chap. 7,
^
taire surit; chapitre Lviii d'isaie. Symmachus in Tlieo- sunt, recesserunt a me, qui rendent l'hébreu à la
dotionis scita concedtns, torquem posuit : c'est aussi lettre, il a traduit a voluptate et abundantia tritici,
:
le sentiment de saint Irénée, s'il est vrai qu'il ait et vini de/'ecerunt a me.
voulu marqut^r Symmaque, en disant que les ébio- Cela parait par la manière dont il a traduit le
''
nites ont imité Aquila et Théodotion dans la traduc- troisième chapitre d'Habacuc,. verset 13 : Egressus es
tion de la prophétie d'Isaïc. ad salvundum populum tuum per Jesum Christum tuum.
* Iren., apud. Euseb., lib. V, cap. 8. Ou croit même Un Juif n'aurait pas traduit ainsi — * Euseb., lib. VI,
qu'il y a faute dans le texte de saint Epipbane, et cap. 16.
qu'autrefois on y lisait que Théodotion avait fait sa * In medio horum temporum inventa est sexta edi-
version en l'an 6 de Commode, et Symmaque en la tio, et ipsa in doliis occultata in Nicopo/i ad orientem
neuvième de Sévère. Montfaucon, lom. I Hexapl., sita. Epiphan., de Mens, et Pond., cap. 18.
pag. 52. 40 Nonnulli vero libri, et maxime hi qui apud Hebrœos
2 Hujus Severi temporibus, Symmachus quidem Sa- versu compositi sunt, très alias editiones udditas habent,
marita, ex numéro supientum apud ipsos, cum non re- quas quintam, et sextam et septimam translationem
pensset fidem apud propriam yentem, principatus vacant auctoritatem sine interpretum nomimbus con-
studio œg rot ans, et contra propriam tribum indignât us secutas. Hieronym., in cap. Epist. ad Titum. m
accedit ad Judœos, ac fit proselytus, et circumciditur i> Dans le verset que nous venons de rapporter, il
secundo circumcisione. Epiphan., de Mens et Pond., a supprimé le nom de Clirist, marqué dans l'hébreu,
cap. 27. — * Euseb. ^ lib. VI, cap. 16. et a traduit ainsi Apparuisti super salute populi tui
:
,
• In septimo autem ipsius Caracalla, inventi sunt ad bberandum electotuos.
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE Xm. — ORIGÈNE. 445
libre que les deux précédentes, et approchait Mais comme ne regardaient que quel-
elles
plus de la paraphrase que d'une exacte tra- ques livres de l'Ecriture, il ne crut pas devoir
duction. changer le titre de sou ouvrage. Cependant',
6. De toutes ces versions, Origène en com- parce qu'elles occupaient deux autres colon-
posa l'ouvrage qu'il nomma les Hexaples ; il nes dans le livre des Psaumes, dans celui
avait jugé à propos de rassembler toutes ces d'Habacuc, et peut-être encore dans * quel-
versions dans un même volume et de les ran- ques autres prophètes, saint Epiphane ap-
ger sous six colonnes, afin que le lecteur pût pelle ' ce recueil d'Origène Octaples, ou de
d'un coup d'œil eu voir les différences et les huit, à cause de ses huit colonnes; elles y
comparer facilement les unes avec les autres. étaient mises en cet ordre les deux textes :
La première de ces colonnes contenait le texte hébreux à la tête, l'un en lettres hébraïques,
hébreu écrit en caractères hébraïques ; dans l'autre en lettres grecques; ensuite Aquila,
la seconde était le même texte hébreu écrit Symmaque les Septante Théodotion et la
, , ,
en caractères grecs; la version d'Aquila était cinquième et sixième versions marquées par
dans la troisième ; celle de Symmaque dans le chiffre de leur nombre. Elles étaient toutes
laquatrième; celle des Septante dans la cin- vis-à-vis l'une de l'autre, chacune dans sa co-
quième etcelle de Théodotion dans la sixième. lonne particulière, divisées par petits mem-
Origène citait aussi dans ses Hexaples la cin- bres et par versets, de la même manière que
quième, la sixième et la septième version. nous les représentons ici *. Origène avait
1 Eusèbe remarque qu'Origène avait aussi donné Eodem modo senarii numeri notam inscribens, ei edi-
place à la septième version dans les livres des Psau- tioni quœ postea inventa est, sextœ interpretationis no-
mes : Quin etiam in Hexaplis Psalmorum exemplari- men indicavit. Sed et artificiose hoc peregit, id quod
bus post insignes illas quatuor editiones, non quintam aliqui ex studiosis ignorant. Cum enim incidu7it in
modo, sed etiam sextam et sepfimam apposait versio- Hexapla aut Octapla : quatuor enim sunt Grœca,
nem. Euseb., lib. VI, cap. 16. Ce qui faisait neuf co- quando Aquilœ et Symmachi et Septuaginta duorum
lonnes. Il avait fait la même chose pour la prophétie et Theodotionis interpretationes conjunctœ fuerint, ubi
d'Habacuc, ainsi qu'on peut le voir dans le tableau autem quatuor lioe columnœ duabus hebraicis adjectœ
ci-dessous, note 4, pag. 145 et 146. fuerint, Hexapla appellantur. Si vero etiam quinta ac
2 Saint Jérôme dit que la cinquième, la sixième et sexta interpretatio conjunctœ fuerint ad illas, conse-
la septième version étaient surtout pour les livres écrits quenter Octapla vocantur : quidam igitur cum in hos
nominans libros, velut supra per longum a me dictum tiones et hebraicam scripturam hebraicis démentis
est. Cum vero invenissetquintœetsextœeditionis libros, atque ipsis verbis in una columna composuit, et aliam
et non sciret qui essent interprètes ipsorum, quo tem- columnam ex adverso apposuit per grœcas quidem lif-
pore inventi essent, unam ex his editionem consequen- teras, hebraicas vero dictiones ad intelligentiam eorum
ter ad priores quatuor adjecit, et quintam appellavit, qui non noverunt hebraica elementa, quo per grœca
inscriptione facta per quintam litteram quinarii nu- hebraicœ linguœ vim cognoscerent, Epiphan., de Mens,
meri significatricem, atque sic nomen ejus declaravit. et Pond., cap. 17.
* TETRAPLA.
GENES. I, 1.
10
146 HTSTOTRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
placé les deux textes hébreux à la tèto, et les dans les autres versions laleqon la plus con-
Septante au milieu, afin qu'ils servissent forme au texte original, comme véritable le-
comme de règle pour faire voir les défauts des çon des Septante. Pour éviter tout changement
autres interprètes. Car son dessein, dans ce ou tout retranchement considérable, il mar-
travail, n'était pas de corriger les Septante,
qua par des obèles i- ce qui ne se trouvait
* ce
pour lesquels il avait une grande vénération point dans l'hébreu, et par des étoiles
qu'il avait emprunté des autres ver.sions
».
de l'Église. C'était
et qu'il savait être à l'usage
plutôt pour en prendre la défense contre les
Quelques-uns ont cru qu'Origène n'avait point
pris ces précautions, dans la version des Sep-
reproches des Samaritains et des Juifs. Tou-
tefois, parce qu'il s'était glissé beaucoup do tante qu'il mit dans le corps des Hcxaplcs,
fautes dans les copies des Scptante,qui étaient mais dans une autre édition des Septante qu'il
donna dans la suite et dans laquelle il mêlait
entre les mains de tout le monde, pour rendre
l'hébreu avec les Septante. Cependant il est
cette version plus correcte et plus exacte,
certain, par les témoignages de ^ saint Jérôme
il en fit la révision sur l'hébreu, choisissant
partie, se trouva altérée et défectueuse en beaucoup des Hexaples d'Origène. Alexandrin et JEgyptus in
Scptuaginta suis Ilesychium laudat auctorem, Constan-
d'endroits, par la négligence des copistes, qui n'eu-
tinopolis usque Antiochiam Luciani Martyris exempla-
rent pas soin de placer exactement ces obèles et ces
ria probat. Mediœ inter has provinciœ Palœstinos codi-
étoiles. C'est ce qui obligea saint Pampbile etEusèbe
ces legunt quos ab Origene élaborâtes Eusebius et
de donner une nouvelle édition des Septante, sur ;
criptos, ex ipsis authenticis cmendare, in quibus et tibus arguatur : sed quod majoris audaciœ est, in edi-
ipsa hebrœa propriis sunt caracteribus verha descripta, tionc Scptuaginta Thcodotionis editionem miscuit, as-
teriscis designans quœ minus fuerant et virgulis quœ
e grœcis litteris tramite expressa vicino. Hieronym.,
HEXAPLA.
OSEiE U, 1.
Xi vep
ou(X£[X[jLE(7- xal (XTTO A'iYUTTTOu AIy^xtou xe'xXïiTai iT-^aa aOTov,^xaU? ^\''°''.._
£aÇ-/lou .j'^f^J^"
IxaXeaa xov utov (xou. uioç [xou AtYuuTou xéxXviTai utov [xou I^AiY^-
pai[i. xapaOi Àeèavi.
TOU.
OGTAPLA.
PSALM. II, 6.
ENNEAPLA.
HABAC. U, *.
Interpretum grœcorum in totum velus Testamentum sui vêlaspirantibus ventis dédit, et recedens a terra,
Joanne
fragmenta, collecta, versa et notis illustrata a in médium pelagus aufugit. Hierouym., Prolog, suœ
Drusio. interpretationis. Origen., Hom. in Ezechiel.
Outre un grand nombre de fragments des Hexa-
«
» De Adamaniio autem sileo, cujus nomen, si parva
noncer l'hébreu.
opuscula Fretellarn.
3 Illud breviter admoneo, ut scias Origenis dubitavit dicere
Primum ejus
5 In singulos Scripturœ libros non
in omnem Scripturam esse triplicia. Hœres. 64, cap. 5.
quœ sibi visa sunt. Epiphan.,
in quibus ea
excepta quœ grœce scholia nuncupantur ,
— Hieron., Epist. 125
''
sieurs fois sescommentaires sur la Genèse, et la neuvième, qu'Origène avait dessein d'ex-
nous en avons encore aujourd'hui plusieurs pliquer de suite toute la Genèse dans ses ho-
fragments qu'Eusèbe, saint Basile, saint Gré- mélies , et ce qui donne lieu de croire qu'il
*
goire de Nazianze, Théodoret et Eustathe l'a exécuté, c'est que, du temps de saint
d'Antioclie nous ont conservés *. Ce dernier Jérôme on avait plusieurs autres homélies
,
blâme * beaucoup Origène d'avoir regardé d'Origène sur la Genèse, que nous n'avons
comme fabuleux ce qui est dit du paradis plus. Rufin en traduisit en ^ latin autant qu'il
terrestre et des arbres fruitiers quiy étaient en trouva; Cassiodore n'en avait vu que seize.
plantés. Socrate dit' qu'en parlant, dans son Nous hsous dans la dixième quelques passages
neuvième tome sur la Genèse, de Jésus-Christ cités comme d'Origène, par saint Eusthate,
et de l'Eglise figurés par Adam et Eve, il y touchant Isaac et Rebecca ; mais on n'y ren-
montrait, comme dans tous ses autres ouvra- contre point ce qu'il en cite sur les puits creu-
ges, que Jésus-Christ n'a pas moins Tàme que sés par Abraham, ni ce qu'Origène disait de
le corps de l'homme. Melchisédech dans la première de ses homé-
sesHomé- 2. Ccs trcizc tomcs d'Origène sur la Genèse lies, où il prétendait que c'était un ange.
ies sur la «
i i
ienèse.veis sout, apparemment, la même chose que son Peut-être cet endroit se trouvait-il dans la
Héxamœron, ou l'ouvrage sur la création des première des homélies mystiques, qu'Origène
six jours,que saint* Ambroise a compilé, au avait recueillies en deux livres, ou dans
rapport de saint Jérôme, mais en se montrant quelque coUection de ses homélies différente
néanmoins toujours plus attaché au sentiment de la nôtre.
de saint Hippolyte et de saint Basile. Origène Les commentaires d'Origène sur le livre
3. '-"
sescom-
mentaires,
fit aussi deux livres d'homélies mystiques de V Exode ne sont pas venus jusqu'à nous, et ets^g"^!!
sur la Genèse que Sixte de Sienne ^ croit être
', il ne nous en reste que deux ou trois frag-
xode!"'^Tèfs
les mêmes que les dix-sept que nous avons ments, imprimés dans le recueil de ses œu- '""^w.
en latin sur cette partie de l'Ecriture. Il y a vres *°.Le plus considérable est celui dans le-
néanmoins lieu d'en douter; car il paraît quel il donne l'explication de ces paroles du
qu'Origène avait travaillé à loisir les homé- dixième chapitre de V Exode : Mais le Seigneur
hes mystiques, en deux livres;
qu'il distribua endurcit le cœur de Pharaon, et il ne voulut
au contraire, nous restent semblent
celles qui pas Ces commentaires étaient
les laisser aller.
avoir été faites sur-le-champ, et être du nom- divisés eu plusieurs " tomes. Origène en fait
bre de ceUes qu'Origène permit ' que l'on mention dans ses '^ hvros contre Celse et dans
écrivît lorsqu'il ies prononçait devant le peu- sa préface sur le Cantique des Cantiques;
ple. La dix-septième est imparfaite et d'un preuve qu'il les composa avant l'an 239,
style plus fleuri que les autres. On voit, par temps auquel on croit qu'il commença ses
1 Galland a ajouté quelques fragments à ceux qu'on ris : quamvis nobis nec in cœteris quœ te insistenfe,
avait déjà. {L'éditeur.) imo potius pensum divini operis exigente in latinum
Eustathius, de Engastrim., pag. 390.
*
vertimus, defuerit plurimus labor, dum supplere cupi-
Origenes in omnibus libris suis Christum homi-
3
mus ea quœ ab Origène in auditorio Ecclesiœ ex tem-
nem factum, anima prœditum esse agnoscit : sed spe- pore non tam explanationis quam œdificationis inten-
cialiter in tomo IX Co?nmen(ariorum, quos scripsit in tione perorata sunt : sicut in homiliis sive oratiunculis,
Genesim. Socrat., lib. \i\Hist., cap. 7.
et in Exodum fecimus, et prœcipue in his quœ in li-
* Nuper sanctus Ambrosius sic Héxamœron Orige?iis brum Levitici ab illo quidem perorandi stylo dictata,
compilavit, ut magis Hippolyti sententias Basiliique a nobis quœ deerant idcirco suscepimus, ne pulsatœ
sequeretur. Hieronym., Epist. 41 ad Pammach., de quœstiones et relictœ, quod in homiliatico dicendi
Errorib. Origen. génère ab illo sœpe fieri solet, latino ledori fastidium
s Le manuâcrit qui contient la lettre à sainte Paule, generarent. Ruf., Pérorât. Comment, in Epist. ad Ro-
porte TOTTixov, seu localium, et cette leçon paraît pré- manos. Nam et promisisse me memini, ut si quœ sint
férable, dit D. Pitra. {L'éditeur.) Adamantii senis in legem Moysis dicta colligerematque
8 Sixt. Senens., lib. IV Biblioth. sanctœ, pag. 352. transferrem.... igitur ut possum quœ injunxisti expli-
— "f
Origan., apud Euseb., lib. VI, cap. 36. care contendo. Jam enim ex omnibus quœ lege scripfa
Ce qui le prouve, c'est que ce Père dit que, dans
8 reperi, solœ, ut puto, in Deuteronomio desunt oratiun-
la première de toutes, Origène parlait beaucoup de culœ. Rufin., Prologo ad Ursatium.
Melchisédech, et prétendait que c'était un ange, ce •'Galland en a quelques autres dans la Bibliothèque
qui ne se trouve point dans celles que nous avons. des Pères, tom. XIV, pag. 3. [L'éditeur.)
Hieronym., Epist. 3 ad Evangelium presbyterum. H Gela paraît par le troisième fragment qui nous en
' Fateor, Heracli, frater amantissime, quod dum reste, à la tète duquel on lit : Rursus in alio tomo in
tuis desideriis satisfacere cupio, oblitus sum pêne man' iisdem ad Exodum commenlarius.
dati quo prœcipitur, onus supra vires tuas ne levave' >* Origea.,lib. IV contr, Cels., pag. 195.
150 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
tomes sur les Cantiques. Il fît aussi des • sco- pieds. Outre ces homélies, Origène avait en-
liessur VExode et plusieurs homélies. Cas- core commentaires et des scolies sur
fait (les
siodore * n'eu compte que douze ; mais nous le Lévitique. Il nous y renvoie lui-même dans
en avons treize de la traduction ' de Rufm, ses tomes sur VEpître aux Romains où il ,
dans laquelle il s'est donné la liberté d'ajou- marque le sens moral qu'il avait donné, en
ter et de retrancher ce qu'il lui a plu. expliquant ce livre, aux divers sacrifices qui
Sur
vitiquc.
la I-*- 4. C'est aussi de la * traduction de Rulin y sont prescrits aux Juifs. Saint Jérôme ' en
que nous avons seize homélies d'Ori^ène sur parle et dit, en généi-al, qu'Origène y traitait
le Lévitique; elles ont été connues de Cassio- fort au long des animaux mondes et immon-
dore ' et de Jonas, évèque d'Orléans. Ce der- des *.
nier cite un passage de la seconde homéUe ne nous reste plus rien des commen-
5. Il
conforme à ce qui se trouve dans Rufin. Mais taires d'Origène sur le livre des Nombres ^.
on n'y lit point ce qui en est rapporté dans Nous savons seulement qu'il les avait écrits
le premier chapitre de la Philocalie. On n'y avant l'an 239, puisqu'il les cite dans ses to-
trouve pas non plus, ni dans aucune autre mes sur les Cantiques, commencés vers ce
des seize, les endroits où Origène lui-même temps-là. Mais nous avons encore vingt-huit
dit ^ avoir parlé des vêtements des prêtres, de ses homéhes sur ce livre, traduites par
de leur onction et de leur consécration. Ainsi Rufin avec une si grande liberté, qu'il pa-
nous n'avons qu'une partie des homélies d'O- raît avoir mis en un même corps *" et les ho-
rigène sur le Lévitique et le traducteur les a
, mélies et les scohes d'Origène sur les Nom-
rendues avec sa liberté ordinaire. Origène bres. Aussi y a-t-il certains endroits dans ces
marque, dans la troisième de ces homélies, homélies qui semblent n'avoir pas été prêches,
qu'on lui avait confié depuis longtemps la mais " travaillés à loisir; et en d'autres on
dispensation de la parole dans la cinquième,
; voit qu'Origène prêchait '^ sur ce qu'on avait
il dit bien nettement qu'il était du nombre lu dans l'église, et néanmoins se contentait
des prêtres; on voit, par la sixième, qu'il par- quelquefois d'en expliquer une partie. Dans
lait dans l'église eu présence des catéchumè- la douzième homélie il cite ce qu'il avait dit,
nes, à qui il adresse quelquefois la parole ; et, en expliquant la Genèse, touchant les puits
par la septième, on connaît que cette église creusés par Abraham. 11 marque, dans la
était celle de Césarée en Palestine. Il témoi- vingt-septième, qu'il avait parlé en une autre
gne dans la huitième qu'il prononçait cette occasion des stations que firent les Israélites
homélie sans s'y être préparé. Dans les sui- dans le désert. Ce qu'il dit dans la dixième,
vantes il cite ce qu'il avait dit en d'autres oc- que, depuis quelque temps, il n'y avait point
casions sur Jérémie, sur la ceinture de saint de martyrs, fait voir qu'il la prononça sur la
Jean- Baptiste et sur ces paroles du psau- fin du règne d'Alexandre, vers " l'an 234. Il y
1Hieronym., apud Rufin., lib. II Invectivar. — collecta digessimus. Rufin., Prologo ad Ursatium. —
' Cassiodor., lib. VI Div. Instit., cap. 1. ^ Rufin.,— " Origen., Hom. 19 in —
idem, Hom. 6.
Num. i*
xibi supra. —
* Idem, ibid. 13 Origène, dans sa douzième homélie sur Jérémie,
6 Cassiodor., ubi supra; Joan. Aurelian., lib. I de faite après l'an 246, semble dire qu'il n'avait pas en-
Institutione Laicali, cap. 5. core commencé à travailler sur les Nombres et dans ;
cum de indumentis sacerdotalibus diccbamus. Origen., cite ce qu'il avait fait surles Nombres : ce qui forme
in homil. 4 in Levit. — "^
Hieronym., Epist. 2 ad une contradiction, aiais, à bien prendre ses paroles,
Damasum. elles ne signifient autre chose, sinon que, quand il
8 On trouvedes scolies sur le Lévitique dans le aurait achevé sa douzième homéUe sur Jérémie, on
tome XIV de Bibliothèque des Pères de Galland
la ;
un endroit des Nombres sur lequel il parlerait
lirait
dans les (Eu\Tes d'Origène par de la Rue, tome IV, et encore ce qui n'empêche point qu'il n'eût déjà fait
;
dans les Cla^s. Auct. de Mai, tom. X, pag. 600. {L'édi- des homélies sur ce livre plusieurs années aupara-
teur.) —9 On trouve des extraits dans de la Rue et vant. Quœdam sunt sacerdotales benedictiones, dequi-
chez Galland. {L'éditeur.) bus, Deo tribuente, post istius loci expositionem, cum ad
1" Cette conjecture est fondée sur les paroles mêmes Numerorum librum venium fuerit disputabimus ibi :
de Rufin dans son prologue sur la traduction des quippe de sacerdotibus quœdam scripta sunt. Origen.,
vingt-huit homélies d'Origène sur les Nombres Quœ- : Homil. 12 in Jerem.; Tillemont., tom. III, note 32
cumque in Numerorum libro, sive homiliatico stylo, sur Origène, page 772.
siveetiam ex his quœ excerpta appellantur, scripta •* Videamus quomodo ipse Dominus Jésus, cumfiliis
repenmus, hac te perurgente ( il parle à Ursace ), Ro- suis, Apostolis scilicet et martyribus, sumit peccata
mana ut potuimus voce, ex diversis in unum ordinem sanclorum, et quidem Dotninus noster Jésus Christus,
[I1I'= SIÈCLE.] CHAPiTRE XIII. — ORIGÉNE. 151
recevrons dans le ciel une grande récompense. sur le Deutéronome. Mais, sans doute, ce tra-
« Mais peut-être aussi, continue Origène, vail d'Origène avait été perdu dès le temps de
que celui qui voit tout, même ce qui n'est pas Rutin, car ce dernier put seulement trouver "
encore, prévoit que nous ne serions pas ca- quelques petits discours qu'il était prêt de
pables de souffrir le martyre. Néanmoins le traduire, si Dieu lui donnait la santé. Gassio-
Seigneur connaît ceux qui sont à lui, et il a dore ^ parle de huit sermons d'Origène sur
des trésors dans ceux mêmes dont on ne l'es- le Deutéronome, écrits avec beaucoup de sub-
pérerait pas; car Dieu ne voit pas comme tilité. Peut-être étaient-ils les mêmes que
l'homme. Pour moi, je ne doute point que, ceux dont Rufîn promettait la traductiou.
dans cette assemblée, il n'y ait des personnes
connues de lui seul, qui, devant lui, sont déjà § 3. — DE CE QU'ORIGÈNE A FAIT SUR JOSUÉ, SUR LES
JUGES, SUR LES ROIS, SUR JOB ET SUR LES PSAUMES.
martyrs par le témoignage que leur cons-
cience lui rend de leur foi, prêts à répandre Nous avons vingt-six homélies ' d'Ori-
1 . Ilomélies
(l'Oi'igèno
leur sang pour le nom du Seigneur Jésus, gène sur Josué, et il ne paraît point qu'il ait sur Josué,
en 249 ou eu
dès qu'on le leur demandera. » expliqué ce livre en aucune autre manière : SSO.
6. Il ne nous reste plus rien des explications Rufin, qui les a traduites en latin, dit ^ qu'il
qu'Origène avait données sur le livre du Deu- a suivi en tout le texte grec, sans y rien chan-
quod venerit ut tolleret peccatum mundi, et morte sua nec mori propter nomen Filii Dei, etc. Origen., Hom.
peccata nostra deleverit, nullus qui Christo crédit igno- 10 in Num.
rât. Quomodo autem et filii ejus aufcrant peccata * Sinon quelques passages cités dans les Chaînes et
sanctorum id est Apostoli et martyres, si poterimus
, des extraits chez Galland, tom. XIV. {L'éditeur.)
ex Scripturis divinis probare, tentabimus. Audi primo * Memini quondam Deutcronomium disserentem in
Paulum dicentem II Cor. 12 Libenter enim, inquit,
: eo loco ubi scriptum est : ne faciatis omnem similitu-
expendam et expendar pro animabus vestris. Et U ad dinem omnis animalis, dixisse me quoniam spirilalis
Timoth. 4 Ego enim jam immolor, et tempus resolu-
: est in alios facere imaginem masculi, in alios feminœ :
tionis mece instat. Pro iis ergo quibus scribebat, ex- illum similitudinem habere volucruni, illum reptilium
pendi se et immolari dicit Apostolus : Hostia autem atque serpentium, et alium facere similitudinem Dei.
cum immolatur, ad hoc immolatur, ut eorum pro qui- Hœc quomodo intelligantur sciet qui ista legerit. ,
eorum qui jugulati sunt propter nomen Domini Jesu, lib. VI Comment, in Epist. ad Rom.
adsistant altari qui autem adsistit altari, ostcnditur * Quœ quidem accommodatius in Deuteronomio exa-
;
fungi sacerdotis officio. Sacerdotis autem officium est, minabuntur. Origen., Hom. 32 in Joan.
pro populi supplicare peccatis, unde ego vereor ne forte " Jam enim ex omnibus quœ in lege scripta reperi,
ex quo martyres 7ion fiunt, et hostiœ sanctorum non solœ, ut puto, in Deuteronomio desunt oratiunculœ,
offeruntur pro peccatis nostris, peccatorum nostrorum quas si Dominus juverit, et sanitatem oculis dederit,
remissionem non mereamur, et ideo vereor ne perma- cupimus reliquo corpori sociare. Rufin., Prolog, ad Ur-
nentibus in nobis peccatis nostris. accidat nobis illud satium
quod de semetipsis dicunt Judœi, quia non habentes ai- * Reliqui etiam vobis in Deutcronomium sermones
tare, neque templum, neque sacerdotium, et ob hoc nec octo Origenis, in quibus est minuta nimis et subtilis
hostias offerentes ,
peccata, inquit , nostra manent in expositio. Gassiod., lib. Divin. Instit., cap. 1.
nobis : et ideo venia nulla subsequitur. Et contra, nos ''
Cassiodore en compte trente, lib. Instit. div,,
dicere debemus, quia hostiœ martyrum non offerurUur cap. 1.
pro nobis, idcirco manent in nobis peccata nostra, non * Nam illa quœ in Jesu Nave vel in Judicum librum,
enim meremur pcrsecutionem pati propter Christum, in trigesimum sextum, et in trigesimum septimum)
152 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
fror. La Philocalie *
rapporte un fragment de écrit vers l'an 238, il cite ses homélies sur les
la vingtième, qui se trouve, eu ellet, dans Juges; CQ qui fait voir qu'il les composa long-
celles que Rufin a traduites, mais non avec temps avant celles dont nous vcnous de par-
toute la fidélité qu'il promet *. C'est néan- ler. Il y a des endroits '"qui semblent marquer
moins un témoignage sulfisant pour montrer, qu'il les avait prononcées sans s'y être pré-
contre les Centuriateurs de Magdebourg ', paré. Peut-être les retoucha-t-il depuis. Dans
que ces homélies sont d'Origènc. Il paraît, la septième il témoigne *'
que l'Eglise jouis-
par la neuvième *, qu'il y avait alors une per- sait d'une paix profonde, ce qui peut avoir
sécution ouverte contre l'Eglise, en vertu des rapport au règne d'Alexandre ou de Gordien.
lois impériales. Ainsi il faut dire qu'il pro- La cinquième explique le cantique de Débora:
nonça ces homélies sur la fin de Tan 2i9, ou ily a en tout neuf homélies de la traduction
au commencement de l'an 250, lorsque Dcce de Rufin. Cassiodore, qui n'en compte que
donna ses édits contre les chrétiens ; on croit huit'-, dit, en général, des homéUes d'Origène
qu'elles sont du nombre de celles qu'Origèue sur l'Octateuque, qu'elles sont pleines d'élo-
prêchait sur-le-champ et qu'il permit que quence. Nous n'avons rien d'Origène sur le
l'on écrivit. Dans la septième il fait " un ca- livre de Ituth, quoiqu'il le reconnaisse " pour
talogue des écrits que les Apôtres ont com- canonique, et qu'il le cite dans ses commen-
posés. Il s'y nomme ® encore prêtre et prédi- taires sur saint Jean.
l'Eghse. Mais il veut que l'EgUse coupe cette que nous avons Ihomehe quOrigène a faite lauîso.
main et la jette, si elle la scandalise en fai- sur le commencement du livre P"" des Rois.
sant quelque chose contre la disciphue ec- Il la prononça dans l'église de Jérusalem,
clésiastique et la règle de l'Evangile. On voit, en présence du peuple et peut-être même
par la huitième, qu'il avait fait dans une au- d'Alexandre, dont il fait un grand éloge. Ri-
tre éghse un sermon sur les deux femmes ju- vet qui ne se souvenait pas qu'il y eût eu
**,
gées par Salomon. U y cite aussi ses sermons dans cette église un évêque de ce nom du
'
sur Jérémie ; et, dans les suivantes, il cite temps d'Origène, a douté que cette homélie
son explication sur le psaume c , et ce qu'il fût eflectiveraent
de lui; mais, en ce point, il
avait dit sur les Nombres. Gratien * cite un a été abandonné de tout le monde. Origène
passage de la quinzième, sous le nom de saint remarque en cette homélie que, selon les an-
Grégoire le Grand, qui, apparemment, l'avait ciens interprètes, tous les psaumes qui sont
pris d'Origène, sans le nommer. intitulés du nom de Choré, ne contiennent
2. Dans son ^ prologue sur le Cantique, rien qui resph'e la tristesse , mais des choses
j.ig.?s"IvMt
l'an 338.
et in trigesimum octavum psalmwn scripsimus, sim- lolatriœ machinas et philosophorum dogmata usque
pliciter expressimus ut invenimus , et non multo cum ad fundamenta dejecit. Origen., Hom. 7 in Josue.
labore transtulimus. Rufiu., Perorat. Comment. Ori- ^ Ego qui videor tibi manus esse dextera et presby-
gen. in Epist. ad Rom. ter nominor, et verbum Dei videor prœdicare, si ali-
1 Philocal., pag. 12. — 2 Magdebourg., Cent. 3, quid contra ecclesiasticam disciplinam et Evangelii re-
cap. 10. gulam gessero, ita ut scandalum tibi Ecclesiœ fuciam,
Les œuvres d'Origène (édit. de la Rue) contiennent
3 inuno consensu conspirans Ecclesia universa excidat
quelques extraits en grec il y en avait quelques ;
me dexteram suam, et projiciat, etc. Idem, ibid.
autres chez Galland. {L'éditeur.)
^ Idem,
Hom. 15 in Josue, et Hom. 25. » Gra- —
* Decreverunt legibus suis, ut non sint Christiani... tian., Causa 23, quaest. 1. — » Origen., Prologo in
confidimus autem quia non solum nos non poterunt Cantic.
obtinere visibiles inimici et adversarii nostri, verum ^^ Origen., Hom. i in Judic.
etiam velociter, Jesu Domino nostro vincente, conteretur ^Propterea ergo, fratres,deprecemur Dominum...ne
satanas sub pedibus servorumsuorum. Origen., //ow. 9 nos tradat in manus eorum qui dicunt : Quando vé-
in Josue. niel tenipus ut detur nobis potestas adversus Christia-
Sacerdotali tuba primus in Evangelio suo Mat-
5 nos ? Origen., Hom. 7 in Judic. — " Origen., in
thœus inerepuit, Marcus quoque, Lucas et Joannes, suis Psal. I.
singulis tubis sucerdetalibus cecinerunt. Petrus etiam " Le Catalogue de saint Jérôme en compte neuf ;
duabus Epistolarum suarum personat tubis. Jacobus de la Rue et Galland donnent des extraits sur les
quoque et Judas. Addit nihilominus adhuc et Joannes Juges. {L'éditeur.)
tuba canere per suas Epistolas et Apocalypsim, et 1* Quis Alexander Papa ? Si primus Episcopus
ille
Lucas Apostolorum gestu describens : novissime autem Romanus multo antiquior est; sin vero
ejus nominis,
veniens ille qui dixit : Puto autem Deus nos novissi- Episcopus Alexandrinus multo recentior : successit
,
mos Apostolos ostendit, et in quatuordecim Epistolarum enim Achillœ anno 311, cum Origenes extremum diem
suarum fulminans tubis, muros Jéricho, et omnes ido- obiisset anno 256. Rivet., lib. II Critic. sac, cap. 13.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÉNE. 153
gaies et favorables. On y voit encore que, tins, la défaite des Israélites. C'est tout ce qui
pendant qu'il prêchait, un homme fut possédé nous reste des homélies d'Origène sur les li-
et tourmenté du démon ; ce qui n'empêcha vres des Rois. Mais on voit, par ' ses autres
pas Origène de continuer son discours. Il pa- écrits, qu'il avait fait une homélie sur les
raît qu'il le composa sur-le-champ ,
pour deux femmes publiques jugées par Salomon,
expliquer ce qu'on avait lu ce jour-là dans qu'il ^ avait traité de ce qui regardait Saiil et
l'église. En un endroit il cite l'hébreu et Achab, et qu'il s'était comme ' engagé à ex-
marque qu'il était conforme aux exemplaires pliquer le troisième livre des Rois et le second
des Septante qu'il avait corrigés et insérés des Paralipomènes, où il est parlé du temple
dans ses Hexaples. Il y dit beaucoup de choses bâtipar Salomon. Cassiodore cite ® d'Origène
sur la prière et remarque que les chrétiens * quatre homélies sur le premier livre des
avaient coutume de prier les mains élevées Rois 9, une sur le second, une fort longue sur
et étendues vers le ciel. Nous avons une autre le deuxième des Paralipomènes, et une sur
homélie sur le livre des Rois, donnée en grec chacun des deux livres d'Esdras. Ces deux
et en latin par Léo AUatius, sur un manus- dernières avaient été traduites du grec en la-
crit du Vatican, et imprimée à Lyon en IG29, tin *" par Bellator, écrivain du VI'' siècle.
in-S», Le passage qu'Eustathe en a cité, s'y 4. Origène cite " lui-même ses écrits sur Pur Job,
avant l'an
trouve, et le style ne permet pas de douter Job ; et saint Jérôme témoigne *^ que saint 238.
qu'elle ne soit d'Origène. Il la prononça en Hilaire en avait traduit en latin une grande
présence d'un évêque, de qui il reçut ^ ordre, partie. Il paraît qu'il avait expliqué ce livre
étant déjà en chaire^de traiter de la py thonisse par des homélies *' et par des commentaires
et de l'évocation de l'àme de Samuel pour ou traités. Mais il ne nous en reste qu'un
Saiil. Origène traita donc cette matière sans fragment, que saint Augustin a tiré d'une
s'y être préparé, et prouva que la pythonisse * homélie de saint Hilaire sur le livre de Job.
avait effectivementévoqué l'àme de Samuel Car les trois livres d'homélies que nous avons
par ses enchantements. Les raisons sur les- sous le nom d'Origène dans le recueil de ses
quelles il s'appuie sont celles-ci: l" Selon l'E- œuvres, sont supposés, comme nous le ferons
criture inspirée de Dieu, le vrai Samuel, et voir ailleurs. Vigilance avait transcrit les
non un fantôme, apparut à Saiil ; 2° le démon traités d'Origène en lui faisant
sur Job ; et,
n'ayant pas le don de prédire l'avenir, il faut des reproches, saint Jérôme nous apprend'*
nécessairement que ce soit Samuel qui ait qu'Origène disait sur le démon, sur les étoi-
prédit à Saùl les choses qui sont marquées les et sur le ciel, des choses que l'Église
dans le vingt-huitième chapitre des Rois, la n'approuve pas. Saint *^ Eustathe en blâme
mort de Saiil lui-même, la victoire des Philis- aussi quelques endroits, surtout les explica-
sortir ' d'Alexandrie, c'est-à-dire avant l'an mais plus au long que par saint Epiphane.
231, plus de vingt ans avant sa mort. Il cite Dans le même tome, Origène faisait le catalo-
*
lui-même ses commentaires sur les psaumes gue *" des livres de l'Ancien Testament, et il
XXX, XXXI et suivants ;xlv et xlvii, sur
sur le disait, selon bîs Juifs, qu'il y en avait autant
le cet cxviii'^. Ce qui prouve qu'il avait en- que de lettres dans l'alphabet de la langue
core expliqué le lxxxix et les onze suivants, hébraïque, c'est-à-dire vingt-deux; car ils ne
c'est qu'au rapport " de saint Jérôme, il les mettaient point de ce nombre les livres des
attribuait à Moïse, suivant en cela l'opinion Machabées. Dans le tome sur le psaume iv, il
d'Huillc, qui était alors patriarche des Juifs. examinait la nature du bien et du mal. Sur
Origène ^ adressait cet ouvrage à Ambroise, le psaume xl il donnait un sens mystérieux
son ami, aux instances duquel il n'avait pu à l'histoire d'Urie. Outre ces fragments im-
le refuser. On remarque ""
que, dès le IV* siè- primés dans le recueil des œuvres d'Origène,
cle de commentaiie d'Origène sur
l'Église, le le Père de Montfaucon en a donné quatre
le psaume cxxvi ne se trouvait pas dans la assez considérables dans le tome I des Hexa-
Bibliollièque de Gésarée. Les autres ont eu ples. Dans le premier, qu'il a tiré de la Biblio-
dans la suite un sort semblable et sont perdus, thèque du roi, et dont saint Jérôme rapporte
pour la plupart, à quelques fragments près, une partie dans sa lettre à Marcelle et dans
que M. Iluet s'est donné la peine de rassem- son premier livre contre Rufin, Origène dit
bler dans le tome I"'' des œuvres de ce Père. que les Hébreux divisaient le Psautier en
Les uns sont tirés de la ^ Philocalie, les au- cinq parties, et marque combien chaque di-
tres de saint Epipliane ^, quelques-uns de vision contenait de psaumes. Le second frag-
l'Histoire ecclésiastique *° d'Eusèbe, d'autres ment, tiré d'un manuscrit du Vatican, parait
de V Apologie par saint Pampliile.
^*^
d' Origène être une partie du prologue d'Origène sur ce
Il y a apparence qn'Origène, dans ses com- livre. Il y traite des titres des Psaumes et de
mentaires sur le psaume i, traitait de la ceux qui eu ont fait des recueils. Le troisième.
1 Si ohscura, quomodo tu ausus es post eos dinserere 1* Methodius, apud Epiphan., Hœres. 64, cap. 12 et 16.
quod explanare non poluerant ? Si manifesta,
il II lî"
Sunt autem viginti duo libri juxta Hebrœos hi:
superfluum est te disserere quod illos latere non po- primus Genesis dicitur, Exodus deinde, tertius Leviti-
tuit, maxime in explanatione Psalmorum, quos apud cus, quartus Numeri, quintus Deuteronomium, sextus
Grœcos interjtretati sunt niultis voluminiùus, primus Jésus, filius Navc ; septimus Judices et Ruth, unico vo-
Origenes, secundus Eusebius Cœsariensis feruntur lumine apud Hebrœos comprehensi octavus Regnorum
;
et diversorum opuscula in psalmos paucos ; sed nunc liber primus et secundus, qui apud eos unicum volu-
de inteyro Psalmorum corpore dicimm, apud Latinos men constituunt nonus Regnorum liber tertius et quar-
;
autem Hilarius Pictaviensis, et Eusebius Vercellensis tm, quos etium ipsi in unum volumen redigunt; deci-
episcopus, Origenem et Eusebium transtulerunt quo- ,
mus Paralipornenon liber primus et secundus uno apud
rum priorem et noster Amb'osius in quihusdarn se- illos contenti volumine ; undecimus Esdras primus et
cutm est. Hieronym.j Epist. (54 ad Augustin. secundus, qui apud eos unicum conficiunt iibrum; duo-
* Voyez le Catalogue de saint Jérôme. (L'éditeur.) decimus liber Psalmorum ; decimus tertius Proverbia
» Euseb., —
lib. VI, cap. 24. * Orig., in Epist. 427 Salomonis; quartus decimus Ecclesiast. ; quintus déci-
ad Roman. —
Hieronyra., ^ lib. I in Rufin., cap. 3. mas Canticum Canticorum; sextus decimus Isaias ; sep-
— Origen., Prœf. in Psul. —
* "^
Hic Pamphilus cum timus decimus Jeremias cumLameniationibus et epistola
multa repererit inventorum nobis indicem derelique-
et in unum cpmpactus volumen ; octavus decimus Daniel;
rit, centesimi vigesimi sextipsalmicommentarium, con- nonus decimus Ezechiel; vigesirnus Job; vigesimus pri-
fessus est non repertum. Non quod talis tantusque vir mus, Est/ier. Extra horum sunt libri Machabœorum.
[Adamantium dicimus) aliquid prœterierit, sed quod Ou ne trouve point, dans ce dénombrement, le livre des
negligcntia posteriorum ad nostram usque memoriam douze petits Prophètes; ce qui fait qu'au lieu de vingt-
non duraverit. Hieron., Epist. 18 ad Marcellam. deux livres qu' Origène dit être dans le canon des
8 Philocal., cap. 2. —
» Epiph., Hœres. 64, cap. 6. Hébreux, il n'en compte ici que vingt-un Rufin y a;
— 10 Euseb., lib. VI, cap. 25.— H Pamphil., Apolog. suppléé dans la version de l'Histoire d'Eusèbe, où cet
pro Origen., pag, 189. —
12 Epiphau., Hœres. 64, endroit d'Origène est rapporté, en mettant le livre des
cap. 6. >3 —
liieiouym., Epist. 38 ad Pammach. — douze petits Prophètes aprèsle Cantique des Cantiques.
[m" SIÈCLE. CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 155
qui se trouve en latin dans une chaîne sur core par Thomélie sur le psaume xxxviii.
les PsaumeSj par Daniel Barbarus, et en grec Ainsi ceux-là se sont trompés qui ont cru
dans une autre chaîne sur les Psaumes, que que Rufm avait partagé en homélies les com-
Ton conserve dans la Bibhothèque du roi, mentaires d'Origène sur les Psaumes. Rufm ^
semble être une suite du précédent; il y traite nous assure lui-même qu^il les avait trouvées
des divers titres et des différentes éditions toutes partagées , et qu'il n'a fait que les
des Psaumes. Dans com-
le quatrième, dont le mettre en latin, à la prière d'Apronien et de
mencement explique le premier verset du sa sœur. Quelques-uns ont douté que les neuf
psaume ii Origêne remarque que les Hé-
, homélies sur les Psaumes, imprimées dans le
breux expriment le nom de Dieu en dix *
recueil des œuvres d'Origène, fussent de lui,
^
manières. Il ajoute qu'ils avaient autrefois et que le latin de ces homélies fût de Rufîn.
des caractères différents de ceux dont ils se Mais ils n'en rendent aucune raison, et ils
servaient alors, c'est-à-dire du temps d'Ori- ont contre eux le témoignage même de Ru-
gène. On dit ' que l'on conserve des explica- fin*", qui les attribue à Origène. D'ailleurs on
mie, il cite les homélies qu'il avait faites sur la troisième témoigne que TÉglise jouissait
il
plusieurs psaumes. On voit, par la première alors d'une grande paix, ce qui revient fort
homélie, qui est sur le psaume xxxvii, qu'Ori- bien à l'an 247, quatrième du règne de Phi-
gène y expHquait ce (^u'on avait lu, et qu'il lippe,G2 d'Origène. Saint Jérôme ** rapporte
y parlait à ^ des auditeurs, ce qui parait eu- un passage d'Origène sur le mot diapsalnia,
1 Saint Jérôme donne l'interprétation de ces dix dion ille vocabat, strictis et nccessariis inlerpretatio-
noms de Dieu dans une de ses lettres à Marcelle : nibus adnotatum in commune legeremus, simul uter-
les plus remarquables sont ; Deus fortis, Deus exevn que deprehendimus, nonnulla eum vel perstrinxisse le-
cituum, excelsus Dominus, qui est ineffabilis. viter,vel intacta penitus reliquisse. Aucior. Breviarii,
2 Est etiam apud illos Uehrœos ineffabile illud no- in Psalter., tom. II oper. Hieronym., pag. 121.
men Tetrayro.mmaton, id est quatuor litteris constam, 7 Idem, ibid. — » Sed dicat fortassis aliquis audi-
olim in aurea summi sacerdotis lamina imcriptum, torum? Origen., Hom. 38 in Psalm.
quod apud Grcecos per vocem Dominus exprimitur, 9 iScirco tibi eam (expositionem), Aproniane, fili
atque in accuratioribus exemplaribus hebraicis anti- carissime, in novem oratiunculas quas Grœci homiiias
,
quis litteris describitur, non autem hodiernis. Nar- vocant, velut in uno corpore digestam, in lutinum
rant enim Esdram aliis usum esse post captivitatem. transtuli. Rufin., Pérorât, in Epist. ad Rom.
Origeu., tom. 1 HexapL, pag. 26, 3 Simlerus, in — '0 Comparez la péroraison de Rufin à, la fin des
Epitome Bibliothecœ Gesnerianœ, in Origène. commentaires d'Origène sur l'Epître aux Romains,
* Origenes edidit pêne infinita volumina, de quibus avec son prologue sur la traduction des homélies
ego latinis infusa vidi tantum subjecta in Genesim. dont il est ici question.
Ilomilias 16... in Psalterium, tractatus 150; Trithem., "Hieronym., Epist. 16 ad Marcell. Ce terme peut
—
de Auct. Ecclesiast., num. 30. ^ Hieronym., Epist. 18 marquer une pause que l'auteur des Psaumes foisait
ad Marcellam. Voyez son passage plus haut. quelquel'ois, soit au milieu, soit à la fin d'un psaume,
* Proxime cum Origenis Psalterium, quod Enchiri-
en coiiséquence de quelque nouvelle inspiration.
156 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que l'on trouve souvent dans les psaumes pag. 25 et 30. Le cardinal Mai a été assez
grecs. Mais il paraît l'avoir tiré plutôt d'une heureux pour retrouver la i)lus grande par-
lettre ou de quelque.«i-uns de ses conimeu- tie des commentaires d'Origèue dans un ma-
taires, que d'une homélie. Eusèbe en cite un nuscrit du Vatican, et il les a publiés avec
de l'homélie sur le psaume lxxxii, dans la- une traduction latine dans le VU* volume de
quelle Unyène découvrit l'impiété d'un nou- la Bibliothèque nouvelle des Pères, section
veau défenseur de Thérésic des elcésaïtes. deuxième. Ces pages d'Origèue respirent
De là il est aisé de voir que toutes ses ho- dit ledocte cardinal, une piété exquise; on y
mélies sur les Psaumes ne sont pas venues trouve des sentiments élevés sur Dieu ; nos
jusqu'à nous. Il y en avait beaucoup qu'il fi- dogmes y sont puissamment affirmés contre
nissait par la ^ glorification du Sahit-Esprit. les hérésies ; sens mystique exhortation à ,
[Tous les fragments sur les Psaumes se trou- la vertu, détestation du vice, tout s'y ren-
vent chez de la Rue, tom.II, et chez Galland, contre; une
c'est mine abondante pour les
à qui un manuscrit de Venise a fom-ni des maîtres de la science dogmatique et morale.
extraits nouveaux. Le cardinal Mai adonné Ces commentaires, tels qu'ils sont reproduits
dans la Bibliothèquenouvelle des Pères,toin.\\ï, d'après la chaîne manuscrite du Vatican, s'é-
pag. 2, préface, un iragment du commen- tendent sur les chapitres xxxi des Proverbes,
taire sur le psaume l.] mais non sur toute la suite des versets. En
voici les passages les plus remarquables. Par
§ 4. — DES ÉCRITS D'ORIGÈNE SUR LES PROVERBES, sagesse, Origène entend la science spùituelle
LES CANTIQUES ET LES PROPHÈTES.
qui contient la doctrine sur Dieu, sur les
Sur les 1 . Il ne nous reste que trois fragments des êtres incorporels, le jugement et la Provi-
Proverbes,
écrits d'Origèue sur le livre des Proverbes ^. dence, et qui révèle la théorie de l'éthique, de
Dans les deux premiers, qui sont tirés de l'A- la physique et de la théologie '. «La sagesse,
pologie de saint Pamphile, Origèue combat
* dit-il encore au chapitre ix, se prend ici en
la métempsycose. On trouve le troisième deux sens ; il en est une qui est donnée par
dans * une chaîne manuscrite sur le chapi- l'Esprit-Saint aux hommes religieux, et par
tre VIII de saint Luc de la Bibliothèque Ma- laquelle la connaissance de Dieu a brillé dans
zarine. Mais on sait qu'il y a peu de fond à le monde ; l'autre est le Fils consubstantiel et
faire sur ces sortes de recueils. Sixte ' de le Verbe de Dieu : par la sagesse de celui-ci,
Sienne atti-ibue à Origène des explications toutes choses ont été tirées du néant pour
sur l'Ecclésiastique, et il ajoute que saint Mé- exister^.» Nous remarquons ici le témoignage
thode dans son livre de la Résurrec-
les cite bien formel d'Origène sur la consubstantia-
tion. Cependant on n'en trouve rien dans les lité du Verbe et sur la création tirée du
fragments que saint Epiphane ^ et Photius néant. Ailleurs il nomme Jésus - Chiùst, le
nous ont conservés de cet ouvrage, ni dans Christ Dieu ^; la discipline pour Origène, c'est
ceux que l'on trouve dans le tome III de la modération des passions considérées dans
la Bibliothèque des Pères, de l'impression de la partie de l'âme passible et irrationnelle.
Lyon. En tournant ses efforts vers la théologie, on
Commen- [2. Le Père de la Rue a donné quelques connaît la sagesse. Le moyen droit et sûr d'ar-
taires sur
les Prover- fragments des commentaires d'Origèue sur river à la sagesse consiste dans le bon règle-
bes, publiés
par le oardi- les Proverbes. D'autres encore ont été réunis ment des sens, du discours et de l'esprit *°.
nal Mal.
Passajç.'s re- à ceux-là par Galland, tom. XIV. append.. Origène recoimait la peine éternelle de i'en-
marijuables.
D'autres prétendent que le Diapsalme dénote un que rei ethicœ, physicœ ac theologiœ theoriam rêve-
changement d'air, de vers ou de matière, ou bien lat (cap. I, 1).
qu'il marquait continuation du même sujet. Hieron., * Sapientiam hoc loco dupliciter intelligiaio: nempe
Epist. ad Marcel!., de Diapsal. illarn quœ a Sancto Spiritu datur religiosis homini-
' Basilius, lib. de Spiritu Sancto, cap. 39. Gela ne bus, per quant Dei quoque notitiam mundo inclaruit.
se trouve point dans celles que nous avons de la Pari modo etiam enhypostaticurn Filium ac Verbum
traduction de Rufin. —
' Origène avait écrit trois li- Dei, a cujus sapientia omnia ex nihilo ad existenduni
^Tes sur les Proverbes. {L'éditeur.) eductœ fuerunt (cap. ix ).
' Pamphil., Apolog. pro Orig., pag. 194. * Huet., — • Hic Christus Deus est qui et cœlestem aquam ap-
fer, et même
temps il insinue la mitigation
en suivent comme eux les voies du salut '. » Et
de cette peine *. Il proclame le libre arbitre *. ailleurs : « Celui qui ne confesse pas à Dieu
D'après ce Père, nous avons besoin de Jésus- ou à un homme agréable à Dieu les maux se-
Christ pour nous délivrer de la voie mau- més dans son cœur par le malin, ne rempor-
vaise '. L'homme, libre de passions, n'éprou- tera pas une heureuse victoire sur le malin :
vera nulle pensée mauvaise et habitera peu celui, au contraire, qui confesse, sera aimé de
après dans royaume des cieux, à cause des
le Dieu et de ses anges s.» Et encore; «Si donc,
commandements qu'il a gardés et de l'espé- ils refusent de confesser leurs
la loi existant,
rance qu'il a eue en Dieu *. Plusieurs fois péchés par un sentiment de crainte et de res-
Origène parle de la sainte Eucharistie. « Les pect humain, ils se perdront misérablement,
liommes mauvais, dit-il, brisent les chairs de comme dit David Je confesserai contre moi-
:
Jésus-Christ par leurs péchés et consument même mon injustice au Seigneur, et vous m'avez
le sang, pensant que c'est une chose profane. remis l'impiété de mon cœur. Et de plus Con- :
Et cependant Jésus-Christ a dit : Celui qui fesse le premier tes péchés pour être justifié.
mange ma chair et boit mon sang, a la vie èter' Salomon ajoute encore : Celui qui cache son
7ielle, et je le au dernier jour. Mais
ressusciterai iniquité ne prospérera pas; celui, au contraire,
celui qui mange indignement et boit le sang du qui l'avoue et qui s'en repent, sera aimé ^ » La .
Sauveur, mange et boit son jugement s. » Et ail- doctrine d'Origène sur les auges gardiens
leurs « Quiconque mange les chairs de Jé-
: n'est pas moins explicite. « Chacun de nous,
sus-Christ et boit son sang, possède le sang dit-il , en observant les commandements de
juste ; l'âme raisonnable qui en est privée, Dieu, Jionore les anges. Ils sont nos chefs,
mourra ®. » ont reçu dès le commencement notre con-
3, Il y parle aussi plusieurs fois de la con- duite 'o.» Puis il indique comme motifs de les
fession des péchés faite au prêtre, et con- honorer le plaisir qu'on fait à Dieu et la ré-
fond ainsi les hétérodoxes, qui ont une si compense qu'on recevra. Par rapport à la
grande horreur de la confession « Ceux, dit- : crainte qu'on doit avoir de dépasser les limi-
il,qui n'obéissent pas aux commandements tes posées, il dit ces paroles remarquables :
de Dieu, sont ses ennemis ; mais ils devien- « Celui qui transporte les limites de la reh-
nent ses amis lorsqu'ils vont trouver les gion, porte devant lui la superstition ou l'im-
hommes justes pour confesser leurs mauvai- piété ; celui qui excède les bornes de la force,
ses actions ; détournés ainsi du mal, ils pour- substitue l'audace à la timidité. On doit pen-
porro nostra criteria sunt, sensus,oratio, mens; et sen- ^ Quicumque Christi cnrnes manducat et ejus san-
sus quidam sensibilia respicit ; oi'atio, verba et cogi- guinem bibit, sanguinem justum possidet, quo si priva-
tationes; mens denique in intellectualibus versatur
, tur anima rationalis, ea mori dicitur (cap. Vi, 17).
cap I, n et m.) Qui Dei mundatis non obtempérant, inimici ejus ;
''
* Acta est cetema pœna, et varia punitio, quœ a sed ejusdem amici fiunt, eum ut malos actus suos con-
jusio judice impuris animabus imponitur, ut maie fiteantur;ad justos homines se conferunt ; a quibus de-
natœ aleœ perdantur (cap. i, 17). Olim non fuit ma- ducti, salutares vias œque ac illi persequuntur (cap. xv,
lum, et hoc ipsum aliquando non erit: sunt enim inde- 28).
lelilia virtutis semina. Hoc mihi propemodum suadet 8 corde a maligno mala non confî-
Qui sata in ejus
dites ille, qui non omnino totus malus fuerat, elsi ob tetur Deo, aut Deo yrato homini, non consequetur /e-
nequitiam inferis adjudicatus : ecce enim ille misericor- licem de maligno victoriam ; qui autem confitetur, dili-
diarn erga fratres retinebat. Atqui misericordia semen getur a Deo et ab angelis ejus (cap. xxvni, 13).
est virtutis optimum (cap. v, 14). —
* Jam vero pen- 9 Si ergo,stante lege,peccata sua confiteri noluerint,
nati nos liomines dicimur, quia volendi viribus, si metu ac pudcre hominum, exitialiter subvertentur. Sic
quidem velimus, prœditi sumus (cap. I, 17). ait David : Confdebor adversus ine injustitiam Domino,
3 Nisi Christus nos liberet, mala via quasi bonaper- et tu remisisii impietatem peccati mei. Et die tu prior
gemus (cap. n, 12). peccata, ut justificeris. Item Salomon ait : Qui operit
Cupiditatibus homo liber nullam pravam cogita-
* iniquitatem suam, non prosperabitur ; qui autem enarrat
tionem experitur, et paulo post in regno Dei habitabit: et vitupérât, hic diligetur (cap. xxis, 24).
quippe qui mandata ejus custodiverit, quia speravit in Quicumque moîidata Dei observamus, angelos de-
'0
Et pareillement on ne doit point du tout chan- et des filles. Dieu notre Père se réjouit en
ger les constitutions des Pères sur chaque voyant ses enfants arriver à sa connaissance
chose, mais elles doivent persévérer '.» Heu- et à la sagesse, et l'Église notre Mère est dans
reux lui-même avait toujours fidèlement
si une grande dans une profonde
tristesse et
observé ces règles Mais son penchant pour
! douleur sur ceux qui sont dans l'ignorance,
les explications du sens mystique, qui l'a en- parce que nous ne voulons pas nous conver-
traîné si loin après l'avoir si bien servi, se ré- tir et nous sauver, mais bien demeurer dans
vèle dans les commentaires sur les Proverbes. la méchanceté ®. N'oublions pas non plus ce
Selon lui, l'Ecriture doit être interprétée spi- qu'il dit sur la foi de Pierre : « Cet homme
rituellement, car la notion matérielle qui est qui juge ici les nations, c'est Pierre, qui a en-
selon l'histoire n'est pas la véritable ^ Il at- seigné au monde entier la foi de cette reli-
tribue les Proverbes, l'Ecclésiaste et le Can- gion du Christ ^ »]
tique des Cantiques à Salomon. Les Proverbes Origène expliqua dans deux ouvrages
4.
appartiennent à l'éthique, l'Ecclésiaste à la différents le Cantique des Cantiques. Il com-
pliysique, et le Cantique des Cantiques à la posa le premier, étant s encore jeune, c'est-à-
théologie '. Il cite plusieurs passages des dire à l'âge de 37 ans au ^ plus tôt, quelque
quatre évangéhstes , mais sans les nommer, temps après son retour à Alexandrie, vers
et ainsi en se contentant de dire comme on
: lit l'an de Jésus-Christ 230. Car ce fut alors qu'é-
dans les Evangiles. L'Epître de saint Jacques tant revenu d'Antioche à Alexandrie '°, il com-
est citée, et cet apôtre en est donné comme mcnça à composer divers ouvrages sur l'E-
l'auteur^.Les sentiment?exprimés par Origène criture ; les premiers furent ses commentaires
sur Notre-Seigneur, sur Dieu, sur l'Eglise, sur l'Évangile de saint Jean, qu'il appelld "
sont admirables. Jésus-Christ, c'est l'ami qui, les prémices et la partie la plus excellente de
1 Qui transfert religionis terminos, superstitionem ac salvari, sed in nequitia perseverare (cap. ibid. , 21).
tel ipsam impietatem prœ se fert ; et qui fortitudinis 7 Virum autem judicantem gentes, Petrum
hic dicit,
transfert terminas, is audaciam vel timiditatem subs- qui mundum universum docuit Christi fidem ac reli-
titua : similiter devirtutibus uliis, et de dogmatibûs.et gionis (cap. xx, 9).
de ipsa fide existimandum prœcipue vero hoc observan-
;
* Gela paraît par le fragment que nous en avon3
homitiem amicitiam factus est homo; omni certe tem- Joannis Evangelium, dum adhuc Alexandriœ dcgeret,
pore Ch)'istus tibi amicus est (cap. XYU). composuit. Ex — îi Alcxandriam
quo igitur tempore
6 Est mater nostra etiam Ecclesia,
quam per Spi- pervenimus, quasnam alias esse oportuit nostrarum ac-
ritum Sancium Deus Pater sibi sponsam copulavit gi- tionum primitias, quam in ScrijAurarum primitius ?
;
gnit enim sibi per ipsam filios filiasque, et de edoctis Origen., pag. 3 in Joann. Audeamus igitur dicere
Dei notitiam atque sapientiam liberis lœtatur Pater j^rimitias Scripturarum omnium Evangeliumesse, Evan-
noster Deus, Materque Ecclesia de incrudilis tris- geliorum vero primitias Evangelium a Joanne tradi-
tatur magnopere ac dolet ,
quia nolumus converti tum.- Ibid., pag. 5.
[ni® SIÈCLE.] CHAPITRE Xni. — ORÏGÈNE. 159
l'Ecriture. Il paraît que ce premier commen- trouve dans la deuxième de ces homélies. Il
taire d'Orig'ène sur les Cantiques était très- est vrai qu'il y est traduit avec quelque li-
court, puisque la Philocalie le nomme un berté mais ne sait-on pas que Rulin avait
;
de Gordien, et les cinq autres furent achevés qu'au quinzième verset du chapitre ii, où il
à Césarée, lorsqu'il y fut retourné. Saint Jé- est dit : Prenez'nous les petits renards qui dé-
rôme * estimait beaucoup cet ouvrage, et dit truisent les vignes. Les quatre homélies dont
qu'il était autant au-dessus des autres écrits nous parlons finissent au même endroit ;
d'Origène, qu'Origène est au-dessus des autres preuve nouvelle qu'elles sont d'Origène et de
auteurs. Il dit encore qu'il y expliquait les Can- la traduction de 'Rufin. On objecte que l'au-
tiques suivant les Septante, Aquila, Symma- teur y parle ^ des Grecs comme étrangers à
que, Théodotion et la cinquième version. On son égard. Mais ces endroits sont de Rufin
croit,avec beaucoup de vraisemblance, que qui, selon la remarque de Cassiodore, s'est
les quatre homélies latines sur les Cantiques, donné la liberté d'ajouter plusieurs choses à
imprimées dans le recueil des œuvres d'Ori- l'original grec. Il en a agi de même dans sa
gène par Génébrard, sont les trois premiers traduction du livre *° des Principes, où il fait
livres et une partie du quatrième des dix dont quelquefois parler Origène comme un auteur
parle saint Jérôme, et que le prologue qui les latin.Du reste, s'il a cru devoir ajouter aux
précède est celui qu'Origène avait mis à la commentaires d'Origène sur les Cantiques, il
allégoriques, pour en donner même aux Rufin ; on les a partagés depuis en quatre
noms propres d'hommes, de villes et d'an- homélies, on ne sait pour quelle raison ; car
ges. D'ailleurs, le passage tiré du second de on n'y remarque ni le style, ni la forme des
ces livres et rapporté dans la Philocalie, se homélies ; et l'auteur y parle
*^ non à des au-
tom. IX, contiennent des scolies d'Origène sur le cis, usque ad illud prœceptum: Capite nobis vulpes
Cantique des Cantiques. Voyez ibid., Procope, p. 259. pusillas exterminantes vineas, tribus libris latius ex'
M. Migne a reproduit ces scolies, avec des amélio- planavit. Gassiodor., lib. Divin. Instit., cap. 5. —
rations dans le texte et avec une traduction latine, ^ Vincent. Bellovac, lib. XVIII Speculi Doctrin.,
tom. XVII de la Patrologie grecque. On y trouve le cap. 4.
genre d'Origène, qui cite aussi les différentes versions. » Cum apud Grœcos, qui eruditi ac sapientes viden-
{L'éditeur.) — 3 Euseb., lib. VI, cap. 32. tur. In Prologo. Apud Grœcos quidem pturimi erudi-
* Origenes cum in cœteris libris omnes vicerit, in torum virorum volentes investigare veritatis indagi-
Cantico Canticorum ipse se vicit, nam decem volumi- nem, de amoris natura multa protulerunt. Ibid., in
nibus explicitis,quœ ad viginti usque versuum millia Prologo.
peneperveniunt,primum Septuaginta interprètes, deinde 10 Quod latine mundum dicimus, grcece Koa\j.oi; ap-
Aquilam, et Symmachum et Theodotionem, et ad cx- pellatur. Lib. de Princip., cap. 3. Paraclefus, quod
Il
tremum quintam editionem ita magnifiée aperteque dicitur Spiritus Sanctus, a consolatione dicitur. Para-
disseruit, ut inde mihi videatur in eo completum esve clesis enim latine consolatio appellatur utrumque
quod dicitur : Introduxit me rex in cubiculum suum, significat in Grœco Paracletus, deprecatorem et conso-
etc. Hieron., Prolog, ad Damasum. Saint Grégoire de latorem. Ibid., cap. 7. —
" Vincent. Bellovac, ubi
Nysse dit aussi, dans son prologue sur les Cantiques, supra.
qu'Origène a travaillé avec grand soin l'explication 1* Sit sane legentis judicium. Hom. 3 in Canticum.
qu'il en a donnée. —
s Les trois premiers tomes et Hœc sunt intérim quœ ad prœsens nobis ex Scripturis
une partie du quatrième ont été recueillis par de la divinis occurrere potuerunt, ut ex his sapiens quique
Rue tom. III. {L'éditeur.)
,
—
^ L'auteur y cite ses lector prudenter possit conjicere, si apta usi sumus
explications sur l'Exode, le Lévitique, les Nombres, expositione, Ibid., Hom. 4.
Il fait lui-même ' mention de ses commen- de les avoir traduites avec beaucoup de li-
taires sur ce prophète dans ses livres contre berté, en y retranchant ou corrigeant ce qui
Cclse. On en avait encore trente tomes du pouvait être contraire à la foi de la Trinité et
temps d'Eusèbe; et* cet historien, après avoir y laissant les autres fautes qui s'y rencon-
remarqué qu'Origène les avait composés sous traient. Il marque, en particulier, un endroit
Gordien ajoute qu'ils n'étaient que sur le
, où saint Jérôme avait ajouté une ligne ", qui
tiers ou sur la première partie d'Isaïe, c'est- se trouve dans première des neuf homélies
la
à-dire sur les vingt-neuf premiers chapitres, qui nous restent. Dans la >* cinquième,Origène
jusqu'à la vision des bêtes à quatre pieds remarque que l'on avait coutume de célébrer
dans Le vingt-sixième de ces tomes
le désert. chaque année la mémoire de la Passion du
était perdu dès le temps de saint * Jérôme. Sauveur en un jour de dimanche, qui était ap-
Nous n'en avons plus aucun, et il n'en est paremment celui auquel on célébrait la Ré-
resté que deux fragments, l'un du premier, surrection; mais qu'on faisait mémoire de ce
l'autre du vingtième volume, cités dans l'A- dernier mystère une fois chaque semaine. Il
pologie d' Origène par saint Pamphile. Saint ^ y adresse la «* parole aux catéchumènes et
Jérôme dit qu'Origène s'y promenait avec li- au peuple, ce qu'il fait encore dans la sixième;
berté dans ses espaces allégoriques, et qu'il preuve que ce sont des homélies, quoiqu'elles
y donnait ses ' propres pensées pour des soient plus serrées et plus obscures que ne
mystères de l'Eglise. Sur le chapitre sixième le sont ordinairement celles d'Origène. La
d'Isaïe, il cite un endroit du huitième tome neuvième est imparfaite. On y a ajouté la fin
d'Origène, où il disaitque si les Juifs avaient
^ de la neuvième homélie sur Jérémie. Le temps
corrompu le texte hébreu de nos livres saints, de ces homélies est inconnu. Ce qu'on en peut
Jésus -Christ et les Apôtres n'auraient pas dire, c'est qu'il était prêtre lorsqu'il les pro-
manqué de leur en faire un crime. Il remar- nonça; ainsi il faut les mettre après l'an 228.
' Hieronym., Prologo in Hom. Ùrigenis in Caniîca. mine, quod erat maximum, reticuissent . Hieron., in
* Il en avait composé trente-six. [L'éditeur.) cap. VI Isaiœ. — * Hieron., lib. I in Rufin., cap. S.
s Origen., lib. VII contra Ceh., pag. 339. — * Eu- Feruntur et alii sub nomineejus de visione qua-
10
* Quod si quis dixerit hebrœos libres postea a Ju- ven, etmaxime in dominica die, quœ passionis Christi
dœis esse falsatos, audiat Origenem quod in octavo commemoratum est; neque enim Resun-ectio Domini
volumine explanationum Isaiœ huic respondebat quœs- semel in anno, et non semper post septem dies, ceh'
tiunculœ, quod nunquam Dominus et Apostoli, qui cœ- bratur, orate Deum, etc.
iera crimina arguunt in scribis, pharisœis, de hoc cri- " Origen., Hom, 4 et 6.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE Xm. — ORIGÊNE. i6i
snr jéré- Nous ne savons point qu'Origène ait
A. * ques. Origène y exhorte les catéchumènes à
l'au'îw. expliqué Jérémie autrement que par des ho- se presser de recevoir le baptême. On voit dans
mélies. Cassiodore en compte quarante-cinq, une autre qu'il était prêtre, inférieur à l'é-
5
que l'on voyait encore du temps * de Raban vêque et élevé au-dessus des diacres. Il cite en-
Maure. Saint Jérôme * en traduisit quatorze, core ce ^ qu'il avait dit sur les psaumes cxxxiv
et il ne parait point que l'on en ait traduit et CXL, et promet de prêcher sur un ' endroit
un plus grand nombre. Ce sont celles que des Nombres qu'on devait lire après son ser-
nous avous aujourd'liui en latin. Huet en a mon. Dans la quatorzième il se plaint de ce
depuis donné dix-neuf, en grec et en latin, sur que les chrétiens n'ont plus la même ferveur
un manuscrit de l'Escurial ; il y en a douze qu'ils avaient pendant les persécutions; ce qui
de celles que saint Jérôme a traduites ; la se- montre qu'il composa ces homéUes en temps
conde et la troisième n'étaient point en grec de paix, après l'an 245. Il marque ^ ailleurs
dans ce manuscrit ; les sept autres sont de la qu'il y avait des personnes qui examinaient
traduction du Père Cordier. Celui-ci, plusieurs ses discours pour y trouver quelque petite
années avant l'édition d'Origène par Huet, faute, afin de la relever et lui en faire un
avait fait imprimer ces dix- neuf homélies crime. C'est pourquoi il veillait à ce qu'on
sous nom de saint Cyrille d'Alexandrie, sur
le n'abusât point de ses paroles, pour lui attri-
la foi d'un ancien manuscrit grec qui les at- buer des sentiments qu'il n'avait pas, entre
tribuait effectivement à ce Père. Michel Ghis- autres celui de la métempsycose. Dans la dix-
lérius en fit aussi imprimer, dans une chaîne neuvième il cite une tradition hébraïque qu'il
sur Jérémie, sept qui n'étaient pas du nombre avait apprise d'un Juif, qui, ayant été chassé
de celles que saint Jérôme avait mises en de son -pays pour avoir embrassé la religion
latin. Ce Père n'avait gardé aucun * ordre chrétienne, était venu au lieu où il prêchait,
dans la traduction de ces quatorze homélies apparemment à Césarée. Il ne reste rien de
d'Origène. Mais Huet a placées autrement
les ses commentaires sur les Lamentations de Jé-
qu'elles n'étaient dans l'édition latine de Gé- rémie; et ce que nous en savons », c'est qu'il
nébrard, conformé au texte de Jérémie
et s'est les écrivit pendant son séjour à Alexandrie,
et à l'ordre qu'elles gardaient dans les manus- avant l'an 231. Eusèbe dit que, de son temps,
crits du Vatican et de l'Escurial. Celle qui est y en avait cinq tomes *''; Nicéphore en met
la troisième dans l'édition de Huet, est im- neuf. On ne voit rien d'Origène sur Baruch.
parfaite et n'explique que le trentième verset Dans ses commentaires sur les Lamentations, il
du chapitre deuxième de Jérémie. Dans la citait ses livres de la Résurrection. Saint Jé-
seconde, Origène combat certains hérétiques rôme '• cite une fort mauvaise explication du
de la secte des valentinieus, qui, distinguant chapitre xxvi de Jérémie, qu'il attribue clai-
dans l'homme plusieurs sortes de substances rement à Origène, sans le nommer.
ou de natures, disaient que la substance ma- 5. Pendant son séjour à Césarée sous le , snr Eié-
térielle était incapable de salut. La douzième règne de Gordien, commencé en l'an 238, î-^^m'*'^
paraît avoir été prononcée un peu avant Pâ- Origène composa divers ouvrages »* sur les
* Cassiodor., lib. Instit. divin., cap. 3. a îaîco. Qui vero totius Eccîesiœ arcem obtinet pro
Raban., Prœfat. in Jeremiam.
* omni Ecclesia reddet rationem. Origen., Hom. 7 in
* Quatuordecim homilias in Jeremiam jampridem Jerem.
confuso ordine interpretatus sum. Hieronym., Prologo 6 Origen., Hom. 8 in Jerem,, et Hom, 18.
— ''
Idem,
in Ezechiel. — * Hieronym., Prologo in Ezechiel., Hom. 12 in Jerem,
ubi supra. 8 Hom. 8 et Hom, 16 in Jerem.
^ eorum non proderunt eis. Hœc ante me ex-
Cleri Euseb., lib. VI, cap. 24.
9
posuerunt alii, et quia non improbo interpretationem 10 Le Catalogue de saint Jérôme dit la même
eorum, eamdem profero. Nos qui putamur aliquid chose il n'en
: reste que quelques fragments pu-
esse, id est qui in clericatus vobis ordine prœsidemus, bliés dans la Chaîne de Procope, tom. III des œuvres
in tantum ut quidam de minori gradu ad hune Iccum d'Origène, par de la Rue, pag. 320 à 351. En 1610
cupiant pervenire, nosse debetis non statim in eo esse existait encore à Rome ce commentaire d'Origène,
sociandos, quia clevici sumus : mulii enim et presbyteri comme le dit le catalogue de la Bibliothèque Bo-
pereunt, et laid beatissimi reperiuntur ; sed si ordi- dhléienne. {L'éditeur.)
nem clericatus et mereamur pari ter et habeamus " Hieronym.,in cap. xxvii Jerem,
Utilitas quippe clericatus non in eo est, si aliquis se- Per hœc tempora Origenes in Isaiam simul et in
*2
deat in agmine presbyterorum, sed si juxta locum Ezechielem commentarios composuit. Ex quibus in Eze-
suum etjuxta prœcepta Domini dignus incedat... Plus chielem quinque et viginti volumina ad nos pervene-
a me exigitur quam a diacono, plus a diacono quam runt. Euseb., lib. VI, cap. 3î.
II. 11
462 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLI^ISIASTIQUES.
livres saints, entre autres, des commentaires Il dit dans la douzième que les prêtres étaient,
sur le prophète Ezéchiel. Il ne les acheva pas en quelque manière, les premiers* de l'Eglise.
n(^anmoins en cette ville, mais à Athènes *, où 11 prononça la treizième dans une assemblée
il fut obligé de faille un voyage. Us étaient d'évêques qui lui avaient ' ordonné de parler
divisés en viugt-cin(| tomes *, dont il ne reste sur le prince de Tyr et sur Pharaon. Il paraît,
qu'un passage, rapporté dans la Pliilocalie et par la onzième, que l'Eglise était alors en
tirédu vingtième de ces commentaires. Ses paix; ce qui marque l'empire de PhiUppe,
homélies sur le même prophète sont posté- sous lequel Origène permit que l'on écrivît
rieures à celles qu'ilcomposa sur Jérémie; ce ses homélies ®.
Sur Da-
qui paraît en ce qu'il ' cite dans sa onzième 6. On voit,
par ses commentaires sur^ saint niel, avant
l'an 245.
ses explications sur le commencement de la Matthieu, qu'il avait composé quelque chose
prophétie de Jérémie. Cependant il les pro- sur Daniel ; mais on ne sait s'il l'avait expli-
nonça toutes devant le même peuple et dans qué entièrement et dans des écrits faits exprès,
la même église, que l'on croit être celle de * ou seulement en passant. Saint Jérôme, qui
Césarée, où depuis longtemps il avait établi s'était •" proposé de rapporter sur le chapitre
sa demeure. Saint Jérôme traduisit en latin neuvième de Daniel ce qu'Africain, Tertulheu,
quatorze homélies d'Origène sur Ezéchiel, Origène et quelques autres anciens eu avaient
qui sont venues jusqu'à nous. Mais il semble dit touchant les septante semaines , n'y cite
qu'Origène en avait fait un plus grand nom- aucun écrit particulier d'Origène sur ce pro-
bre, puisque, dans la sixième et la huitième, phète, mais seulement le dixième • livre de '
marque son ^ sacerdoce, qui lui donnait le droit a fait sur les douze petits Prophètes. Il en
d'être assis comme prêtre, homieur qui lui avait déjà expliqué quelques-uns, lorsqu'il
fail craindre que Dieu ne le punisse, pour n'a- écrivit ses livres contre Celse *', et il y témoi-
voir pas une vertu proportionnée à son rang. gne qu'il était dans le dessein de commenter
1 Intereacum Athenis moraretur, commentarios qui- trer dans la ville de Jérusalem. Origène n'y était
dem Ezechielem absolvit. Idem, ibid.
in donc pas alors. M. de Tille-
C'est ce qui fait voir à
2 LeCatalogue de saint Jérôme porte vingt-quatre. mont qu'il y a faute dans le texte latin, et qu'au
{Léditeur.) lieu de Collectiones istœ non solum in Mlia, il faut
:
3 Eo tempore quo Jeremiayn exposuimus, eà quœ lire Non hic solum, et non Solum in jElia, etc.
: :
nobis gratia Dei oraniibus nobis largita est, sive certe 5 Quid mihi prodest, quia prior sedeo in cathedra
utcumque semimus, exponere conati sumus. Origen., resupinus, honorem majoris uccipio, nec possum habere
Hom. 11 in Ezéchiel. dignitate mea opéra condigna ? Nonne majori pœna
* la neuvième homélie sur Jérémie, il dit
Dans cruciabor, quia honor justi mihi ab omnibus defertur
clairement qu'il prêchait dans la Palestine Hœc non : cum peccator sim?
est terra quam pollicitus est Deus, terra fluens lac et Si autem nos qui videmur Ecclesiœ prœesse, etc.
6
lutn in JElia, non tantum Romœ, non in Alexandria, principis Tyri, ut laudes ejus culpasque dicamus : nec
sed in omni semel orbe similitudinem référant sagenœ non justum est ut de Pharaone, rege .^gypti, aliqua
quœ ex omni génère piscium capit. Mais, en suivant tractemus.
ce sens, il faudrait dire qu'Origène avait flxé sa 8 Le cardinal Mai a donné cinq fragments nou-
demeure à Jérusalem pour un temps considérable, veaux des commentaires d'Origène sur Ezéchiel.
puisqu'il y aurait expliqué deux grands prophètes ; Biblioth. nov. Patr., tom. Vil, sect. 2, Prœfat. [L'é-
pia de sa main, et cette copie tomba depuis 1. La grande tranquillité dont Origène jouit commen-
entre les mains de saint Jérôme. Il ne nous à Césarée, sous l'empire de Philippe, lui per- gènesurrEl
reste des écrits d'Origène sur les douze petits mit de commenter non-seulement une grande saint' "^Mat-
Prophètes qu'un fragment peu considérable, partie des livres de l'Ancien Testament, mais lanaisT
chie n'étaient qu'une explication allégorique. On *° a une autre traduction de ces commen-
Il composa tous ces commentaires sous le rè- taires dans les éditions latines d'Origène; elle
gne de Philippe. [L'édition de la Rue contient est assez ancienne mais inexacte et assez
,
les fragments qui nous restent des commen- barbare. Le traducteur, que l'on croit avoir
taires d'Origène sur les grands et les petits vécu dans le siècle de Gassiodore, a quelque-
Prophètes ^.] fois retranché des pages entières de son texte
et en a ajouté d'autres. Origène " marque dans
i Et in duodecim Prophetas exposiiiones, quarum beaucoup plus ample que l'édition grecque de Huet.
quinque duntaxat et viginti libros reperimus. Euseb., Le commencement, qui fait le ouzième tome d'Origène
lib. VI, cap. 3. —
2 Hieron., in Catalogo, cap. 7. et une partie du douzième, a été donné par Erasme.
3 Origenes parvum de hoc propheta ( Osea ) scripsit Le reste a été divisé par les libraires en trente-cinq
libellum, oui hune titulum imposuit : Quare appellatur traités ou homélies, quoiqu'il soit certain, par les ti-
in Osée Ephraim? volens ostendere quœcumque di- tres grecs, que ce sont des tomes et non des homé-
cuntur contra eum, ad hœreticorum referenda perso- lies. Blésille avait prié saint Jérôme de traduire ces
nam. Et aliud volumen quod et capite, et fine caret... vingt-cinq tomes d'Origène; mais il s'en excusa sur
In ipsum Zachariam duo tantum Origenes scripsit son peu de loisir. Rufin, lib. Il in Hieronym.
volumina, vix tertiam partem a principio libri usque 9 De la Rue a augmenté les tomes X-XVII, et les
ad visionem quadrigorum edisserens. Hieronym., Pro- a revus. On trouve aussi de nouveaux fragments chez
logo in Prologo Comment, in Zachariam.
Osje, et Galland, tom. XIV, reproduits par M. Migne, tom. XVII
Scripsit in hune librum Origenes duo volumina usque de la Patrologie grecque. {L'éditeur.)
ad tertiam partem libri a principio. ^0 Elle est du moins plus ancienne que saint
Scripsit in hune librum Origenes volumina tria,
'*
Thomas, qui en rapporte plusieurs passages sur le
sed historiam omnino non tetigit, et more suo totus chap. XVI de saint Matthieu.
in allegoriœ interpretatione versatus est, Hieronym., 11 Sicut ex traditione accepi de quatuor Evangeliis,
in Prolog. Comment, in Malachiam. ^ Euseb., lib. — quce sola in universa Dei Ecclesia quœ sub cœto est
VI, cap. 36. — 6 Voyez le Catalogue de saint Jérôme citra controversiam admittuntur : primum scilicet
ci-dessus. {L'éditeur.) Evangelium scriptum esse a Matthœo, prius quidem
''
Legisse me fateor ante annos plurimos in Mat- Publicano, postea vero Âpostolo Jesu Christi, qui illud
thœum Origenis viginti quinque volumina. Hier,, Proœ- hebraico sermone conscriptum, Judœis ad fidem con-
mio Comment, in Matthœum. Dans son Prologue sur versis publicavit.Secundum fuisse accepimus Evange-
saint Luc il [en compte trente-six, ou vingt-six, se- Hum Marci, qui, prout Petrus ipsi exposuerat in lifte-
lon d'autres éditions mais c'est une erreur de chif-
; ras, retulit. Atqueidcirco Petrus in Epistola catholica
fre. Rufin ne laisse pas de dire que saint Jérôme fait eum filium suum agnoscit his verbis : Salutat vos
mention de vingt-cinq tomes d'Origène sur saint electa Dei Ecclesia, quee est Babylone, et Marcus filiua
Matthieu. meus. Tertium Evangelium Lucas, quod a Paulo corn-
8 L'édition latine de ces tomes, par Génébrard, est mendatur, in gratiam Gentilium conscriptum. Postre-
164 lusTOîRE giî:nérale des auteurs ecclésiastiques.
le premier tome les Evangiles qui, dans toutes Mais les plus " habiles conviennent qu'elles ne
les Eglises, étaient reçus pour canoniques. sont point de lui; on excepte le commence-
Les deux passages que saint Pamphile cite ment de la neuvième, qui est tiré de son com-
de ce premier tome et du treizième s'y trou- mentaire sur saint Matthieu. ,
vent *, mais avec quelque différence. La Phi- 2. Nous n'avons rien d'Origène sur VÉvan-
localie en rapporte * un du second, où Origène gile de saint Marc, sur lequel il avait néan-
expliquait ces paroles du cinquième chapitre moins travaillé, comme il nous l'apprend •
de saint Matthiim ' Bienheureux sont les pa-: lui-même. Posseviii dit que l'on trouve un de
cifiques. César Boulanger * en cite trois autres SCS commentaires sur cet évangéliste dans une
dans une dissertation contre Casaubon, sans bibliothèque d'Oxford. Peut-être " est-ce le
dire d'où il les a tirés et sans qu'on puisse même que celui qui est quelquefois attribué
le deviner. Nous lisons dans le vingt-huitième à Victor d'Antioche et à saint Cyrille, et qui,
tome, selon l'édition latine, que les églises » dans quelques manuscrits de la Bibliothèque
avaient été brûlées dans une persécution; c'est du roi, porte le nom d'Origène. Il fut imprimé
apparemment dans de Maximin, l'an celle en latin à Ingolstat, en 1580, in-8". L'auteur,
235. Il cite commentaires
dans les autres ses dans le premier et dans le quatorzième cha-
sur saint ^ Jean, ses homélies sur saint ' Luc, pitre, cite Origène, Apollinaire, saint Chry-
ses explications de VÉpiire « aux Romains, et sostome et Théodore, ce qui prouve invinci-
ce qu'il avait dit touchant le ® sixième jour blement qu'il a vécu depuis le IV« siècle.
de la création et sur '° Daniel. Saint Jérôme " 3. Les cinq tomes *^ d'Origène sur l'^'ua/t^îVe
attribue encore à Origène vingt-cinq homélies de saint Luc sont perdus, et des homélies qu'il i"" "ï-'
sur saint Matthieu et une expHcation abrégée, avait faites pour l'expliquer, il n'en reste que
c'est-à-dire des scolies. Il ne nous reste plus trente-neuf en latin, de la traduction de saint
rien de tout cela. On croit qu 'Origène a voulu Jérôme ". Il en avait composé un plus grand
marquer ces ouvrages, lorsqu'il dit, dans sa nombre; car les six dernières ne sont pas la
première homélie sur Jérémie, qu'il avait ex- suite et la continuation des précédentes, et
phqué depuis peu ces paroles de saint Mat- nous ne trouvons dans aucune qu'il explique
thieu, « qu'un prophète n'est sans honneur la parabole des cent brebis laissées sur la
que dans sa patrie. » Il y a, dans le recueil des montagne, qu'il dit avoir traité*» dans ses ho-
ouvrages d 'Origène, dix homélies sous son méhes sur saint Luc. Il dit *9 encore que, dans
nom dont sept sont sur saint Matthieu, les
,
ses explications sur cet Evangile, il avait mar-
trois autres sur divers endroits de l'Evangile **. qué de quelle manière on devait entendre ces
mum vero Evangeliurn Joannis. Ôrigen., tom. I in *s Oui, c'est le même ; il a été publié par Cramer,
Matthœum. tom. I des Chaînes sur le Nouveau Testament : l'é-
1Origen., tom. I, pag. 259, 260 et 304, 305. — diteur anglais croit que saint Cyrille d'Alexandrie
î Origen., Philocal.. cap. 6. ^ Matth., cap. v. — — en est l'auteur. {L'éditeur.)
* Bulliûgerus, Diairiba 3, part. 2, pag. 161, 166, 167. 1* Saint Jérôme en fait mention dans sa lettre à
5 Scimus et ayud nos terrœ motum factum in locis Paule et Eustochie Siquidem illud quod olim Romœ
:
pii extra fidem, causant te>^œ motus dicerent chris- Origenis in Matthœum, et quinque alios in Lueam, et
tianos, propter quod et persecutiones passœ sunt Eccle- triginta novem in Joannem, nostrœ linguœ trader em,
siœ et incensœ sunt. Origen., tom. XXVllI in Matth., nec virium mearum, nec otii, nec laboris est. Hiero-
pag. 88 edit. Genebr. « Origen., —
tom. XXXV in nym., Epist. 106 nd Pau/am et Euslochium.
Matth. — >
Origen., pag. 333 edit. Huet. — » Ibid.,
''
Il les traduisit à la prière de Paule et d'Eustochie :
ronym.. Prologo in Matthœum. scribere. Quam tamen idcirco nunc faciam, quia subli-
« Les Chaînes d'Oxford, tom. V, publiées en 1838, miora non poscitis. Idem, ibid.
^^ Quœ ad centum oves pertinent, eahabes inhomiliis
contiennent beaucoup de fragments des homélies
sur saint Matthieu, et d'autres fragments de diffé- quas in Lucam conscripsimus. Origen., tom. I oper.,
rents ouvrages de ce Père. (L'éditeur.) pag. 333 edit. Huet.
1» Huet, pag. 275, 276. Nous rapporterons ailleurs 19 Si ergo intelleximus quid est magnam vocem cla-
les raisons qu'on a eues de les rejeter. mare, et sic emittere spiritum, id est in manus Dei
t* Consentit autem nobis ad tractatum quem fecimus commendare. Sic enim exposuimus supra, proferentes
de Marci scriptura, etiam sermo conscriptionis Lucœ. expositionem Evangelistœ Lucœ. Origen., Tract. 35 in
Origen., Tract. 35 in Matth., pag. 131. Matth., pag. 180 edit. Genebr.
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 165
de cet évangéliste. Les trente-trois premières prologue sur saint Luc; mais ailleurs il n'en
contiennent une explication suivie, depuis le compte que trente-deux '°, et on croit que c'est
commencement de saint Luc jusqu'au milieu à ce dernier nombre qu'il faut s'en tenir ". Il
du quatrième chapitre. Les six dernières sont y en avait beaucoup de perdus dès le temps
sur différents endroits des chapitres x, xii, d'Eusèbe, qui dit n'en avoir vu ** que vingt-
XVII, XIX et XX du même Evangile. Il y adresse deux. Il ne nous en reste aujourd'hui que neuf.
1 Le Catalogue de saint Jérôme compte seulement spiritus meus in Deo salutari mec : nosti quia de
trente-neuf homélies sur saint Luc et quatorze livres anima sicubi illa quœ soient dici non prœterieris ; sed
de commentaires. On en trouve des fragments consi- ea udhuc etiam ex te additis etiam assertionibus luci-
dérables chez Galland et chez Mai, in Class. Auct., t. X, dius scripseris, ut in illo loco : Ecce ut facta est vox
p. 474-482. Mais ceux que Macaire Ghrysocéphale a salutationis tuae in auribus meis, exultavit infans in
insérés dans ses discours paraissent plus authentiques» utero meo ; ubi dicis quod non erat, hoc principium
Orig., tom. III oper., pag. 979 et seqq. {L'éditeur.) substantise ejus, de tuo addidisti, atque naturae. Hœc
2 Fateor itaqu* antequamille objidat, in hisOrigenis et mille alia his similia in interpretationibus tuis,
tradatibus {quasi iterum talis luderem) alia sunt vi- sive in his ipsis homiliis, sive in Jeremia, vel in Isaia,
rilia ejus, et alia senectutis séria. Hieronym., Epist. maxime autem in Ezechiele subtraxisti. Rufin., lib. II
106 ad Paulam et Eustochium. Invectivar. in Hieronym.
3 Memini cum interpretarer illud quod ad Corin- ''
Alii vero noslros tractatus calumniantes , easentire
ihios scribitur : Ecclesiœ Dei, quœ est Corinthi, cum nos criminantur, quœ nunquam sensisse nos novimus.
hominibus qui invoceni eum, etc. Origen., tiom. 17 in Origen., Hom. 25Lucam.in
Lucam. 8 Sed loquamur et laudemus Deum in Pâtre, et Filio,
* Unde eleganter in cujusdam Martyris epistola et Spiritu Sancto, cui estgloria et imperium insœcula
scripfum reperi, Ignatium dico, episcopum Antochiœ, sœculorum. Origen., Hom. 37 in Lucam.
post Petrum secundum, qui in persecutione Romœ pu- ' Hieronym., Prologo in Lucam, seu Epist. 106 ad
^ Saint Jérôme se dit nettement auteur de cette un fragment en ces termes Blesilla flagitaverat ut
:
traduction dans sa lettre 106 à Paule et à Eustochie, tomos... triginta. duos in Joannem nostrœ linguœ tra-
dont nous avons rapporté plus haut les paroles et ; derem. Rufin., lib. II in Hieronym.
dans le chapitre 135 de ses Hommes illustres : In l'Le Catalogue de saint Jérôme à sainte Paule mar-
Lucam homilias triginta novem, Origenis de grceco que ce nombre. {L'éditeur.)
in latinum verti. i^ Ex universo autem opère, quod in totum illud
6 Secutus sum quod te videram in homiliis secundum Evangelium {Joannis) elaboravit, duo et viginti libri
Lucœ Evangelium fecisse : ubi de Filio Dei in grœco ad nos duntaxat pervenerunt. Euseb., lib. VI Hist.,
non recte inveneras, prœterieris ; in illo loco ubi di- cap. 24.
cit : Magnificat anima mea Dominum, et exultavit
166 HISTOIRE GÉNÉUALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
savoir le !«•, II, VI, X, XIR, XIX, XX.XXVIII et ce grand nombre de flèches de feu que l'on
XXXII''. Dans l'édition latine d'Origène, faite avait lancées contre lui. En quittant Alexan-
sur un manuscrit de Venise, ces neuf tomes drie pour se mettre à couvert de la persécution
sont divisés en trente-deux. Huet •
a corrigé de son évêque, y commencement
il laissa le
cette division dans son édition, où il les a du sixième tome sur saint Jean, ce qui l'obli-
donués on grec, avec la traduction d'Ambroise gea à un nouveau travail, pour ne point lais-
Ferrarius. Quoique meilleure que celle que ser de vide dans ses commentaires. Dans son *
Joachim de Perrone avait donnée aupara- vingt-deuxième tome, qui est perdu, il parlait
vant, cette traduction ne laisse pas d'être no- de la persécution de Maximin, arrivée en 235;
tée comme défectueuse par un critique qui ilparaît par là qu'il avait interrompu le cours
accuse le traducteur d'avoir retranché * plu- de ses commentaires sur saint Jean, pour tra-
sieurs endroits du texte d'Origène, qu'il avait vailler à quelque autre ouvrage, ou pour d'au-
daus son manuscrit grec. Celui dont Huet s'est très raisons que nous ne savons pas. Onignore
servi était apparemment moins complet, car même s'il expliqua entièrement ^ cet Evangile;
on trouve quantité de lacunes, dans son texte car le trente- deuxième tome, que l'on croit
grec, qui sont rempUes dans la traduction de avoir été le dernier, finit au verset trente-
Ferrarius. Origène composa' les cinq premiers troisième du treizième chapitre de saint Jean,
tomes et le commencement du sixième à Sainte Blésille ' avait prié saint Jérôme de
Alexandrie, avant l'an 231 Il continua les au-
. mettre tous ces tomes en latin ; mais il s'en
très à Césarée en Palestine, où, depuis la mort excusa sur son peu de force et sur son peu de
de Démètrc, il trouvait assez de tranquillité loisir. Dans le cinquième tome, Origène parle
d'esprit pour continuer les explications de l'É- des Épitres de saint Paul ^ et marque les en-
criture, Dieu * ayant éteint et rendu sans effet droits où cet Apôtre a prêché l'Évangile; il
y
1 Huet a changé l'ordre ordinaire de ces commen- nos promptitudine initium sexti tomi denuo facere,
de saint Basile et de la Philo-
taires, sur l'autorité eo quod antea inteipretati fueramus.Alexandriœ nescio
calie, qui les citent tout différemment de l'édition quo pacto nobiscum allata non fuerunt. Melius enim
latine, et sur un manuscrit grec de la Bibliothèque ratus sum, ne intérim etiam hoc opus cum ignavia
du roi, où ces commentaires sont distribués comme intermitteretur, quœ restabant prosequi, quam dum
nous l'avons marqué ici. Cependant, pour l'utilité et incertus sum inveniendi, quœ interpretati fueramus
la commodité de, ceux qui n'avaient que l'édition expectare. Orig., tom. VI in Joan., p. 94 edit. Huet.
d'Ambroise Ferrarius, et qui voudraient la citer, il Hujusporro persecutionis {quœ Maximino imperante
^
l'a jointe au texte grec, divisée en trente -deux accidit)tempus indicat Origenes tum in secundo et vi-
traités, comme elle était dans les éditions précé- gesimo libro expositionum in Joannis Evangelium, tum
dentes. [Le Père de la Rue a remis le grec et le in diversis epistolis. Euseb., lib. VI, cap. 38.
latin d'accord.] ® Il paraît, par le passage que nous venons de rap-
* Celui qui l'en accuse est Gallois, cité dans les porter, qu'Origène avait eu dessein de commenter
Journaux des Savants du 11 juillet 1668. Cependant l'Evangile de saint Jean tout entier : Ut corpus totius
Ambroise Ferrarius proteste, à la fin de sa traduc- operis conjungere possimus. — ''
Hierou., Epist, 106
tion, d'y avoir apporté toute la fidélité et toute l'exac- ad Paulam et Eustochium.
titude possibles, sans ajouter au texte de son ori- * Is vero quem Deus idoneum reddidit, qui Novi Tes-
ginal et sans rien retrancher. Lector amice, scito me tamenti minister esset, non littera et verbis tenus, sed
in hoc libro vertendo summa usum esse fide ac dili- spiritus ipsius; Paulus scilicet, qui ab Jerosolymis et
gentia, ut nihil prorsus sit immutatum ab eo quod finitimis locis usque ad Ilbjricum Evangelium adim-
scribit auctor. Scito prœterea me nihil invenisse in plevit, non omnibus Ecclesiis quas docuerat scripsit,
hoc libro quod videatur decretis sanctœ matris Eccle- sed quibus scripsit, paucas ad modum lineas
et iis
siœ adversari. Nam si invenissem, aut librum non exaravit. Petrus autem quo tanquam fundamento su-
vertissem, aut locum signassem suspectum. — 3 Orig., perstructa est Ecclesia Christi, unam duntaxat omnium
tom. VI m Joan., et Euseb., lib. VI, cap. 24. consensu receptam reliquit epistolam ; concedamus vero
Nunc vero quando ignitœ adversum nos sagittce
* et secundam ejus esse : de hac enim ambigitur. Jam
muttcB vanœ fuerunt factœ, Deo illas extinguente, et vero quid dicendum et de eo qui in sinu Christi re-
assueta anima nostra his quœ coelestis sermonis causa cubuit Joanne ? Qui quidem unum reliquit Evange-
cmtingunt, ferre cogitur facilius factas insidias, ve- lium. Scripsit pirœterea revelationem, jussus silere,
luti aliquanium serenitatis nacti, non amplius diffé- nec septem tonitruum voces perscribere. Scripsit etiam
rentes dictare volumus, quœ restant, Deum magistrum epistolam admodum hrevem. Sed concedamus si placet,
in animœ nostrce adito penetrali insonantem adesse et secundam, et tertiam ab illo scriptas esse; neque
precantes, ut fidem accipiat structura enarrationis enim has genuinas illius esse, omnes consentiunt, ambœ
Evnngelii secundum Joannem. Atque utinam Deux au- tamen vix centum versus continent. Origen., tom. V
diat preces nostras, ut corpus totius operis conjungere in Joan., pag. 88. Origène marquait ensuite les écrits
possimus, nec ulla posthac nécessitas intcrcipiat atque des prophètes et des autres apôtres, mais cet en-
interrumpat Scripturœ seriem. Cœterum scias ex multa droit est perdu. ,
[iii^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 167
parle aussi des deux Épîtres de saint Pierre, Un fragment du commentaire sur la première
et dit que la premièie était reçue de tout le Epitre de saint Jean a été donné par Cramer
monde sans aucune difficulté, mais que quel- dans les Chaînes d'Oxford 1840.]
ques-uns en formaient sur la seconde. Quant
aux Epîtres de saint Jean, il paraît les recon- § 2. DES ÉCRITS D'OMGÈNE SUR LES ACTES DES APÔTRES
ET SUR LES ÉPÎTRE3 DE SAINT PAUL.
naître toutes trois; mais avoue en même
il
temps que l'on doutait que les deux dernières 1ne paraît, par aucun endroit, qu'Origène
. Il te^'desApô-
fussent de lui ; il lui attribue l'Évangile qui ait faitautre chose que des homélies sur les
porte son nom et l'Apocalypse. En parlant, Actes des Apôtres, encore ne sont-elles point
dans le sixième, de la vertu du baptême, il venues jusqu'à nous". La quatrième est citée
*
reconnaît, pour principe de toute pureté, la dans la *^ Philocalie, et l'on voit, par le frag-
divinité de la Trinité adorable. C'est dans le ment qui s'y trouve rapporté, qu'Origène ex-
mème tome qu'il parle des martyrs et de ceux phquait dans cette homélie ce que le Saint-
qui, pour soulager leurs frères, étaient morts Esprit avait '' prédit, par la bouche de David,
dans * une peste. Il y dit encore que la cou- touchant Judas, comment un autre devait
tume de laver les pieds ' n'était plus d'u- prendre saplace dans l'épiscopat. C'est à cette
sage que parmi les personnes les plus sim- occasion qu'Origène remarque que c'est tou-
pies. On voit, par ses commentaires sur saint jours le Saint-Esprit,'* qui parle dans les pro-
Matthieu *, qu'en expliquant l'Évangile de phètes, soit qu'ils parlentau nom de Dieu, ou
saint Jean il avait examiné si les onctions des en celui de Jésus-Christ, ou bien en celui de
pieds de Jésus-Christ ont été faites par une quelque peuple. Antoine du Verdier dit, dans
même femme ou par plusieurs. Cet endroit son supplément à la Bibliothèque de Gesner,
est perdu : il devait être au commencement qu'il y a à Constantinople une explication
du vingt-neuvième tome. Origène cite ses to- d'Origène sur les Actes et sur les Épîtres de
mes sur saint Jean dans ^ ses autres écrits. saint Paul ; mais il ne marque point en quoi
Ils sont aussi cités dans la ^ Philocalie, par elle consiste, si ce sont des homélies ou des
saint ' Pamphile, par Eusèbe et par saint ^
» commentaires, ni combien il y en a.
Basile. Comme il les avait composés à la prière 2. Origène cite ses commentaires sur VÉ- tre de safnt
d'Ambroise, c'est à lui qu'ils sont '° adressés. pître aux Romains dans le dix-septième tome Romai alida-
[ L'édition de ces tomes par de la Rue, de ceux qu'il composa sur l'Evangile de saint
1759, est beaucoup plus correcte que celle de Matthieu*^ vers l'an 245.11 y a néanmoins ap-
Huet: indépendamment de la rectification du parence qu'il travailla à ces deux ouvrages
texte d'après deux autres manuscrits non en- presque en même temps, puisqu'en parlant*^,
core coUationnés, elle offre plusieurs nou- dans son commentaire sur VÉpître aux Ro-
veaux fragments dans le quatrième volume, mains, des difficultés qui se rencontrent sur la
1Quoniam aquœ lavacrum significat purgationem cap. 25, — 9 Basil., lib. de Spiritu Sancto, cap. 29,
animœ ab omnibus malitiœ sordibus ablutœ. nihilo — 10 Origen., in Prologo in Joann., pag. 3 et 6, et
tamen minus, et per se ipsum ei qui seipsum prœbet alib.
divinitati adorandœ Trinitatis; per virtutem invoca- ULe Catalogue' de saint Jérôme parle de vingt-sept
tionum, gratiarum principium ac fontem habet. Orig., homélies sur les Actes. Dans un manuscrit assez
apud Basil., lib. de Spirit. Sanct., cap. 29. suspect on lit vingt-sept ou dix-sept. {L'éditeur.)
2 Notum atque testatum cum sit apud Gentiîes, mul- 12 Philocal., cap. 7. —
'^ Psalm. cviil.
tos cœdi pro communi hominum salute seipsos tradi- Personal fingit Spiritus Sanctus in prophetis : et
1*
disse, cum pestilentes morbi suam patriam invasissent. si personam induxerit Dei, non est Deus qui loquitur^
Cœterum mul-
Origen., tom. IX in Joan., pag. 143. sed Spiritus Sanctus ex persona Dei loquitur. Si
tum immoroii sumus de martyribus verba facientes, Christum induxerit, non est Christus qui loquitur,
atque enarrantes de his qui perierunt ob pestilentes sed Spiritus Sanctus ex persona Christi loquitur, ita
constitutiones, ut videremus excellentiam illius qui etsi personam prophetœ exhibuerit, vel hujus aut illius
ductus est velut ovis ad cœdem. Idem, ibid. Cette populi, quamcumque tandem personam introducit, Spi-
peste n'est point marquée dans l'histoire ; on croit ritus Sanctus est qui omnes illas personas fingit. Orig.,
qu'elle arriva vers l'an 232. in Act. Apost., pag. 423.
3 Qui mos quidem erat, sed nunc non sit nisi supra is Origen., in Matth., pag. 194. Plurima a nobis ad
modum rarissime, et apud admodum simplices rus- hune locum dicta sunt, cum in nostris in Epistolam ad
ticioresque. Origen., tom. XXXII in Joan., pag. 391, Romanos commentariis ipsum interpretaremur.
* Origen., tom. XXXV in Matth. — ^ Origen., in ^^Cujus rei dissertio non est nunc nobis in transitu
Maith., pag. 539 edit. Huet., et tom. V in Epist. ad pulsanda. In suo enim loco jungetur. Origen., lib. l
Rom. — ^ Philocal., cap. 4 et 5. — Pamphil., Apo-
"^
in Epist. ad Roman., pag. 298 edit. Geneb.
log. pro Origen,, pag. 184. — « Euseb., lib. VI Hist.,
1G8 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
généalogie de Notrc-Seigaeur rapportée par commentaires d'Origène est le même que ce-
saint Matthieu, il ajoute qu'il les traitera en lui qui se dit^ dans la péroraison, le traduc-
,
Héraclius, qui la lui avait demandée ; mais, le texte d'Origène en le traduisant. Socrate
soit par modestie ou par quelque autre mo- dit que, dans le premier tome de ces commen-
tif que nous ne connaissons point, il ne se taires, Origèue montrait fort au long com-
nomma pas dans le prologue qu'il mit à la ment •* la Vierge est Mère de Dieu Saint Ba- .
* Aiunt enim mihi : in his quœ scribis, quoniam injunctum est, sed nunc a beato Gaudentio episcopo
plurima in eis tui operis hubentur, titulum nominis vehementer perurgetur, démentis scilicet episcopi ro-
tui. Rufin., Peroratione in Epist. ad Rom. mani, Apostolorum comttis, quorum ut successoribus da-
s Rufin., in Prologo. rem cognitionem, libri a nobis in latinum vertuntur.
Quelque motif que Rufin ait eu de ne pas se
^ Idem, ibid.
nommer, il avoue qu'il l'a fait à dessein. Verum ego '1 Nous avons rapporté son témoignage un peu
qui plus conscientiœ meœ quam nomini defero, etiamsi plus haut.
addere aliqua videor et explere quœ desunt aut bre- Sed et Origenes in primo tomo commentariorum
1*
viare quœ longa sunt, furari tamen titulum ejus qui in Epistolam ad Romanos exponens qua ratione dica-
fundamentum operis jecit, et construendi œdificii ma- tur deipara, eam quœstionem latissime pertractavit.
teriam prœbuit, rectum non puto. Idem, in Perora- Socrat., lib. VII, cap. 32.
tione. Rursus in commenturiis quibus exponit Epistolam
•3
la même indication. {L'éditeur.) lui-même ses commentaires sur cette Epître. Trac-
* disaient à Rufin de mettre son nom à
Ceux qui tatu 23 in Matth., et Horn. 17 in Luc.
la tête de sa traduction ajoutaient que l'on y aurait 1* Le Catalogue adressé à sainte Paule n'en parle
pu mettre celui de Jérôme, s'il en eût été l'au- pas ; montre que ce Catalogue a passé plu-
ce qui
teur, selon la coutume des écrivains profanes, qui sieurs ouvrages d'Origène. Mais il compte onze ho-
intitulent leur traduction du nom du traducteur, et mélies sur la deuxième Epitre aux Corinthiens. {L'é-
uoo de celui dont on traduit les ouvrages. Da titu- diteur.)
I
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE XUI. — ORIGÈNE. 169
Colossiens; un autre du
tome ^ de troisième de commencer aussi VApocalypse ; mais nous prèsVanîw.
ses commentaires sur la première aux Thessa- n'avons pas d'autre preuve qu'il ait exécuté
loniciens, où Origène selon la remarque de , sa promesse '*, que la parole de saint Epiphane,
saint Jérôme, expliquait beaucoup de choses qui nous assure qu'Origène a commenté l'É-
avec une grande sagesse. Il avait fait aussi un criture tout entière.
livre surVÉpître à Tite, dont on trouve quel-
ques passages dans saint Pamphile «. C'est ARTICLE IV.
encore à ce saint martyr que nous sommes
DE DIVERS AUTRES ÉCRITS D'ORIGÈNE.
redevables de quelques fragments du com-
mentaire d'Origène ' sur VÉpître aux Hébreux. § 1. — DE LA LETTRE D'ORIGÈNE A JULES AFRICAIN
TOUCHAIJT l'histoire DE SUSANNE.
Eusébe nous en a donné » un autre tiré d'une
homélie d'Origène sur la même Épitre, où Ori- Nous avons déjà remarqué qu'Origène,
1. Lettre d'o-
gène dit qu'on n'y remarque point le style de s étant trouvé à Nicomédie dans le cours du frkain, é-
cnte eu 223.
1 II faut lire quinze livres, d'après le Catalogue. illa sermonis rusticitate quœ propria est Apostoli,
Quelle leçon est préférable? On ne sait. {L'éditeur.) quippe qui rudem atque imperitum sese confitetur in
* Quin potius in eo, ut mihi videor, cauiior atque sermone, id est in forma ac ratione dicendi. Verum
timidior, quod imbecillitatem virium meorum sentiens, Epistola illa in verborum compositione majorem prœ-
Origenis commentarios sum secutus Scripsit enim . fert grœci sermonis elegantiam, ut fatebitur quisquis
ille vir in Epistolam ad Galatas quinque propria vo- de styli differentia perite judicare potest, et prœte-
lumina, et decimum Stromatum suorum librum, com- rea sententias continet admirabiles, nec scriptis apos-
matico super explanalione ejus sermone complevit tolicis ullatenus inferiores, Atque id verissimum esse
tractatus quoque varias, et excerpta quœ vel sola pos- assentientur quicumque Aposiolorum scripta attente
sint sufficere, composuit. Hieronym., Prologo in Epist. perlegerint... Ego vero ita censeo, sententias quidem
ad Galatas. ipsas Apostoli esse, dictionem autem et compositionem
3 lllud quoque in prœfatione commoneo : ut sciatis verborum esse alterius cujusdam, qui dicta Apostolo
Origenem tria volumina in hanc Epistolam {ad Ephe- commemorare, et quasi in commentarios redigere vo-
sios) corner ipsisse, queui et nos ex patate secuti sumus. luerit ea quœ a magistro audierat. Proinde si quœ
Hieronym., Prologo in Epist. ad Ephes. Il paraît Ecclesia hanc Epistolam pro Paulina habet, eo nomine
même que l'on reprocha à saint Jérôme de s'être laudetur. Neque enim temere majores eam Pauli esse
trop attaché aux opinions qu'il y avait trouvées. tradiderunt. Quis autem rêvera illam scripserit, soli
Neque enim fieri potest ut in eisdem ad Ephesios li- Deo notum esse opinor. Sed scriptores quorum monu-
bris, quos ut audio criminatur, et bene et maie dixe- menta ad nos usque pervenerunt, partim Clementi,
rim, de eodem fonte àulce amarumque processerit;
et Romanœ urbis episcopo, eam adscribunt, partim Lucœ,
ut qui toto opère damnuverim eos qui credunt animas qui Evangelium et Actus Apostolorum litteris prodi-
ex angelis conditas; subito mei oblitus , id de fende- dit. Origen., apud Euseb., lib. VI, cap. 25.
rem quod ante damnavi. Hieronym., lib. I contr. Ru- 8 Complétez les écrits d'Origène sur saint
Paul par
fin. — Pamphil., pag. 186.
* le Catalogue donné plus haut. On y voit qu'Origène
5 Origenes in tertio volumine elucubrationum avait composé des homélies dont l'auteur ne parle
Epis-
tolœ Pauli ad Thessalonicenses primœ post multa quœ pas. (L'éditeur.)
vario prudentique sermone disseruit, hœc intulit. Hie- Omnia hœc exponere sigillatim. de capitibus sep-
*"
ronym , Epist. 9 ad Minervium et Alexandrum. tem draconis... non est temporis hujus. Exponetur au-
« Pamphil., in Apolog. pro Origene, pag. 176, 177, tem tempore suo in revelatione Joannis. Orig., tom. XXX
et 191. —
T Pamphil.,
ibid., pag. 179 et 184. in Matth., pag. 94.
* Stylus Epistolœ quœ inscribitur ad Hebrœos, caret " Epiphan., Hœres. «4, niuu. 3.
170 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
?'aelleenriit voyage qu'il fit en Achaïe en 228, avait eu qui y estcité du livre de V Exode, prouve suf-
occasioo f
une conférence sur les matières tic religion fisamment qu'elle n'est point de Daniel, parce
avec un nommé Bassus. Pendant la dispute, qu'on ne trouve en aucun endroit de l'Écri-
Origène se servit de l'autorité de l'histoire de ture, qu'un prophète se soit servi des propres
Susanne. Jules Africain, qui était présent et termes d'un autre prophète qui aurait écrit
qui ne reconnaissait point pour authentique précédemment ; 8" enfin, le style est différent
cette partie de la prophétie de Daniel, n'en té- de celui de Daniel.
Analyse
moigna rien alors ; mais, quelque temps après, 3. Quoiqu'Origène ne se trouvât pas assez de laRépon-
se d'Origè-
il en écrivit à Origène pour lui marquer son de loisir à Nicomédie pour examiner à fond ne à la Let-
tre d'Afri-
sentiment et les raisons qu'il avait de regar- toutes les difficultés que Jules Africain lui cain, selon
la même é-
der cette pièce comme fausse et supposée. proposait dans sa Lettre, il ne laissa pas de ditioD.
Nous avons encore cette Lettre en grec, et la les traiter toutes dans sa réponse, et d'en faire
réponse qu'y fit Origène. Elles sont l'une et voir le peu de solidité, sans néanmoins s'as-
Pag. 235.
l'autre un témoignage du savoir et de la mo- treindre à l'ordre des objections d'Africain. Il
dération de leur auteur, et peuvent servir de répond à la première que ^ Dieu ayant, selon 237.
modèle de la charité chrétienne avec laquelle le témoignage de saint Paul, parlé autrefois
on doit se conduire dans les disputes qui nais- à nos pères en diverses occasions et en diflCé-
sent de temps en temps dans l'Eglise, sur di- rentes manières par 'un chacun des Prophètes,
vers points de critique et de discipline. c'est-à-dire, tantôt par vision, tantôt par inspi-
Analyse
de la Lettre La Lettre d'Africain est fort courte; celle
2. ration, on ne doit pas être surpris si la même
d'Africain à
Orieène, se- d'Origène est beaucoup plus longue. 11 l'écri- chose est arrivée à Daniel. Origène répond à 238.
lon l'édition
de B&le, en vit à Nicomédie, où il fut obligé de faire quel- la seconde par une répréhension charitable
167«.
que séjour. Les raisons dont Africain se sert qu'il fait à Africain, en lui disant que la ma- 239.
pour montrer que l'histoire de Susanne est un nière dont il l'avait proposée ne sentait pas
Pag. 220.
récit fabuleux sont celles-ci * : 1° Daniel n'a assez la gravité d'un chrétien et le respect
jamais prophétisé par inspiration, mais tou- qu'il doit à ce qui est reçu dans l'Eglise, et
jours par vision ; au contraire dans l'histoire, que , s'il permis de traiter, avec raillerie
était
de Susanne, on le fait prophétiser par inspi- ce qu'elle nous propose, il y aurait plus de
ration; car il y est dit que, lorsque l'on con- sujet d'en user ainsi à l'égard de l'histoire des
duisait Susanne à la mort, le Seigneur suscita deux femmes qui disputaient pour un enfant
l'espritd'un jeune enfant nommé Daniel, qui devant Salomon. Quant à la troisième, fondée
cria à haute voix que la sentence prononcée sur l'allusion qu'il y a entre les deux mots *
contre elle était injuste ; S*» la manière dont grecs, dont l'un marque l'arbre sous lequel
il reprend les vieillards qui avaient accusé et un des vieillards disait avoir trouvé Susanne,
condamné cette femme ne ressent point la l'autre le supplice auquel ce calomniateur fut 240.
gravité de l'Écriture ; 3° l'allusion ou le jeu condamné , Origène la résout en disant que 241.
de mots qui se trouve dans ce récit est une l'interprète grec a donné en sa propre langue
preuve qu'il a été écrit originairement en grec les mêmes rapports que ces termes avaient
221, et non en hébreu ainsi il ne peut avoir place
: dans l'hébreu ou dans le chaldéen; ce qu'il
parmi les livres de l'Ancien Testament, qui confirme par d'autres endroits de l'hébreu où
tous ont été traduits de l'hébreu en grec ; 4" il l'on trouve de semblables allusions. Il cite, à
est hors d'apparence que les Juifs aient eu, cette occasion, ses Hexaples. Il résout la qua- 243.
pendant la captivité, le droit de juger à mort, trième, en faisant voir qu'il n'y a aucune ab-
surtout la femme de leur roi Joakim ; 5° on surdité de soutenir que les Juifs obtinrent 244.
ne conçoit pas non plus d'où venaient à ce roi permission du roi de Babylonc de juger leurs
les vastes jardins et les grands édifices dont criminels selon la loi, comme ils l'ont obte-
il est parlé l'histoire de Susanne ; 6° cette
dans nue depuis des empereurs romains, dont ils
avaient, par la permission de l'empereur, un cinquième objection : il n'y a pas plus de dif-
chef ou etnarque , dont le pouvoir était très- ficulté à croire que les princes étrangers aient
grand, et qu'ils condamnaient quelquefois à accordé un grand jardin à Joakim, que de
l'nç-^as.
mort. On voit aussi que, pendant la captivité, grands emplois à d'autres de sa nation. Il
plusieurs Israélites jouissaient de grands biens traite la sixième objection avec plus d'éten-
224.
et occupaient des places et des emplois consi- due, parce qu'elle attaquait non- seulement
dérables dans l'Etat, entre autres ïobie, Acliia- l'histoire de Susanne, celle de Bel et du Dra-
^25.
carus, Mardochée Néhémie Origène pro-
et ; gon, mais encore plusieurs * autres parties de
fite de ce moyen de preuve pour résoudre la l'Ecriture, particuhèrement du livre d'Esther,
dœis didracmum ipsis pendentibus ; quanta permissu possint simul comprehendi, pauca exponemus : videli-
Cœsaris Prœfectus populi apud illos possit , ut non cet ex libro Estherœ, ubi nec preces Mardochœi, nec
alite)' vivant quam dum regnaret ille populus, id ex- Estherœ {quœ legentem œdificare possunt) apud Hebrœos
perti sumus. Fiunt autem interdum judicia clam se- habentur. Sed nec epistolœ vel Ammani, de deletione
cundum legem, ut condemnentur nonnulli eorum ad Judaicœ gentis scripta, vel Mardochœi, sub nomine Ar-
mortem ; non equidem mm
omni omnino ad hoc li- taxerxis eumdem populum a morte absolvens. Sic et in
centia; 7iec tamen clanculum et inscio eo qui régnât. Jobo, ab his verbis : Scriptum est ipsum resurrectu-
Id quod cum in regione hujus gentis longo tempore rum cum quibus Dominus resurgit : usque ad finem,
essemus commorati, didicimus et certo persuasi sumus, quœcumque sequuntur désuni apud Hebrœos. Quaprop-
Quamvis sub Romanis duce tantum tribus ferantur esse, ter nec apud Aquilam extant, sed apud LXX et Theo-
Juda nempe atque Benjamin. Origen., Epist. ad Afri- dotionem, quœ inter se conveniunt. Item alia plurima
can., pag. 243 et 244. invenimus in Jobo, tum deficientia, tum redundantia
1 Scias itaque ad hœc, quid nobis agendum, non so- in nostris exemplaribus, prœter illa Judœorum. Defi-
lum in ils quœ de Susanna, in lingua grœca secundum cientia quidem in iis : Cum surgens mane obtulit pro
Grœcos, per totam Christi Ecclesiam circumferuntur, eis sacrificia, secundum numerum ipsorum, vitulum
quœ tamen in hebrœo posita non sunt : nec solum de ununa pro peccatis, pro animabus eormn. Et .\C\im ac-
duabus aliis sectionibus, ut dicis, circa finem libri ;
cédèrent angeli Dei, ut starent coram Deo, venit
nimirum de Belo et dracone, consignatis ; quœ pariter quoque diabolus cum illis Hoc : Gircumiens terram
:
in hebrœo Danielis textu non sunt scriptœ : sed et de et perambulans eam. Prœterea post hœc verba : Do-
aliis plurimis, quœ pro mediocritate nostra, dum exem- minus dédit, Dominus abstulit apud Hebrœos non;
plaribus hebrœis compararemus nostra, pluribus in lo- erant : Sicut Domino placuit, sic factum est. Plura
cis invenimus. Nam in ipso Danielis, ubi de camino autem in nostris, prœter hebrœa, sunt : quando dixit
ardente, illud compedibus constricti, invenimus
: sed Job uxor ejus, ab illo: Quousque perseverabis dicendo :
in nostris exemplaribus, prœter ea quœ in hebraicis Ecce manebo adliuc parum expectans spem salutis
abundant versus non pauci : quorum initium {juxta meae usque ad hœc verba : Ut requiescam ab aerum-
;
nonnulla quœ versantur in nostris Ecclesiis exempla- nis et doloribus meis, quce me nunc constringunt.
ria) hoc erat : Precabatur Ananias, et Azarias et Nam in hebraico hœc tantum verba mulieris scripta
Misaël, et laudarunt Dominum, usque ad ea verba : sunt Die verbum contra Dominum, et morere...
:
Benedicite omnes qui colitis Dominum Deum deo- Multa quoque ejusmodi deprehendimus in Jeremia : in
rum : canite et confitemini, quoniam in saeculum quo fréquentes transpositio7ies et permutationes vati-
misericordia ejus, et in saecula saeculorum. Etfactum ciniorum invenimus. Et in Genesi illud : Vidit Deus
est cum rex illos canentes audiret ac videret eos vi- quod bonum , cum factum expansum, apud
fuisset
ventes. At secundum alia exemplaria: et ambularunt Hebi'œos non reperitur. Et quœstio est apud Judœos
in média flamma, Deum bymno célébrantes, et be- non vulgaris, super hac re. Sic et alia inveniuntur in
nedicentes Domino, v^que ad hœc verba : Benedicite Genesi, quibus signa apposuimus, obeli a Grœcis dicta,
omnes qui colitis Dominum Deum deorum cantate : ut nobis loci taies innotescant. Prout rursum astericos
et confitemini quoniam in sœculum misericordia
;
illis verbis assignavimus, quœ in hebraico quidem ex-
sor miratus est, et surrexit cito ; et respoudens dixit sacerdotum habentur ; adeo multifariam immutata
magnatibus suis. Sic enim Aquilas hebraicœ dictioni sunt, ut neque sensu convenire videantur. Vide igitur
serviens edidit {quem Judœi honorifice prœ aliis cre- {etiamsi non lateat nos) hœc talia irrita facere exem-
dunt interpretatum esse scripturam cujus versioni ; plaria, quœ in Ecclesiis nostris habentur ; et fratribus
maxime assueti sunt ii, qui hebrœa dialecto ipsi uti legem figere, tum seponendi sacros libros apud illos
nesciunt, tanquam is omnium maxime sensum assecutus usitatos, tum Judœis blandiendi et suadendi,ut nobis
fuerit). Sed nostra exemplaria, quorum etiam voces puros et nullum figmentum continentes libros tradant.
exposui, alterum erat juxta LXX Interprètes; alterum An vero providentia quoque divina in sacris Scripturis
secundum Theodotionem ; et sicut apud utrosque positum iquas illa omnes largita est), in Ecclesiis Christi œdi-
reperiebatur Susannœ, quod dicis, figmentum ; una ficationem non curavit illorum qui pretio empti sunt;
cum ultimis in Daniele sectionibus; ita quoque ista, ver- pro quibus Christus mortuus est ; cui, quamvis filius
sibus [ut conjectura dicam) ducentis et aliquot. Item- esset, non pepercit Deus ipsa chantas, sed quem pro
que in multis aliis sanctis libris invenimus, ut alicubi nobis omnibus tradidit, ut cum ipso nobis omnia gra-
quidem plura apud nos extarent, quam apud Hebrœos; tificaretur. Origen., ad African., pag. 223.
alicubi vero pauciora. Exempli gratia, cum non omnia
172 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
P»g. 220. qui se trouvent dans les exemplaires grecs de Susanne, les meurtres qu'ils avaient com-
de toutes les Eglises de Jésus-Christ, et ne se mis sur la personne des prophètes dont au- ,
^^- lisent point chez les IléJjreux. « Prenons donc cun n'avait échappé à leur cruauté. Origène Paç.au.
garde, dit-il à Africain, qu'en supprimant ces répond à la septième objection, en témoignant
passages, nous n'imposions une loi à nos frè- être surpris qu'un homme aussi habile qu'A-
res,de rejeter des livres sacrés reçus généra- remarqué ce qui n'est pas
fricain n'ait pas
lement dans les Eglises et de ilatter les Juifs, ignoré même des plus simples, que souvent
en donnant à croire qu'ils sont les seuls en un prophète emprunte les paroles d'un autre
état de nous donner les Ecritures pures et prophète ; en apporte plusieurs exemples
et il
exemptes de toutes fables. La providence, de tirés des prophéties d'Isaie, de Michée, de Jé-
Dieu, qui a donné à toutes les Eglises de Jésus- rémie et du livre des Psaumes. Pour réfuter 2*6.
Christ le moyen de s'édifier par les Ecritures la huitième, il ne dit autre chose sinon que le
saintes, aurait-elle refusé celui de les lire dans style de l'histoire de Susanne ne lui paraît
leur pureté, elle qui les a rachetées par un point différent de celui de Daniel. A la fin de 24i.
aussi grand prix qu'est la mort de Jésus-Christ? sa Lettre il dit qu'AmbroLsc était alors avec lui,
Dieu ne dit-il pas aussi dans ses Ecritures: qu'il l'avait aidé à la composer, qu'il l'avait
Vous ne changerez point les bornes éternelles relue et corrigée. Il salue Africain de sa part,
qui ont été posées par vos pères * ? Ce n'est pas, de la part de Marcelle, sa très-fidèle compagne,
dit Origène , que d'examiner les
je refuse de leurs enfants et d'Anicet; et il le prie de
Ecritures des Juifs et de les conférer avec les saluer aussi de sa part le pape Apollinaire
nôtres. Je l'ai fait, si je l'ose dire, autant que qui était apparemment l'évèque de Nicopolis
personne, discutant toutes les éditions et leurs en Palestine, où nous avons dit qu'Africain
différences ; examinant eu même temps, au- faisait sa résidence ordinaire.
tant qu'il est possible, la version des Septante,
de peur qu'il ne semble que je veuille impo- § 2. — DU PÉRIARCHON OU LIVRE DES PRINCIPES.
ser à toutes les .Eglises qui sont sous le ciel i. Ce fut à Alexandrie avant l'an 231,
* et Livre de«
Priacipes,
et donner prétexte de calomnier les exemplai- qu'Origène composa l'ouvrage intitulé Pé- : écrit avant
l'an 131.
res communs et célèbres. Nous nous exerçons riarchon ' ou des Principes, parce qu'il pré-
aussi à ne pas ignorer les Écritures des Juifs, tendait y établir les principes de ce qu'il faut
afin qu'en disputant avec eux, nous puissions croire en matière de religion. Nous ne l'avons
leur citer les passages selon leurs exemplaires, plus en grec» ni même la traduction que saint
et qu'ils n'aient plus de prétexte pour mépri- Jérôme en avait faite; nous n'avons que celle
ser les fidèles, gentils d'origine, et se moquer de Rufîn, qui pourrait passer pour un second
d'eux comme ignorant la vérité qui est dans original. Car, outre qu'il fait entendre, dans
229. leurs Écritures. » Origène ajoute que l'histoire son Prologue sur cet ouvrage, qu'il l'a corrigé
de Susanne et des vieillards qui l'avaient ca- autant qu'il lui a été possible, et qu'il en a i
231. lomniée n'était pas inconnue aux Juifs, et il retranché ce qui lui paraissait contraire à la
montre, par plusieurs endroits de l'Evangile doctrine de l'Eglise, y a ajouté ce qu'il a
il
232. de saint Matthieu, de l'Epître de saint Paul cru nécessaire pour l'intelligence du texte de
aux Hébreux et des Actes des Apôtres, que son auteur. La raison * que Rufîn eut d'en
les Juifs avaient connaissance d'im grand agir avec tant de liberté, fut celle que cer-
nombre d'autres faits qui ne sont point écrits tains hérétiques s'étaient donnée de corrom-
234. dans les livres de l'Ancien Testament. D'où il pre Périarchon, en y insérant leurs erreurs
le
conclut qu'ils les en avaient retranchés pour pour les autoriser du nom d'Origène. Mais,
faire perdre la mémoire des faits qui leur quelque précaution qu'il ait prise pour pur-
étaient les plus honteux, entre autres l'histoire ger cet écrit, on y trouve encore des opinions
1 Prov. XXII, 28. mettre le livre des Principes après les deux ou trois
*Euseb.,lib. VI, cap. 24. Dans le livre II du Périar. premiers tomes sur la Genèse ; car le troisième était
chon, chap. 3, Origène cite les explications qu'il avait sur l'ouvrage du quatrième jour.
données aux premières paroles du livre de la Genèse, ' Eusèbe ne marque pas le nombre des livres des
et dans le livre 1er, chap. 3, son explication sur ce Principes. Libres item de Principiis antequam ab urbe
qui est dit ensuite : L'Esprit de Dieu était porté sur Akxandriu discederet, composuit. Lib. VI, cap. 24.
les eaux. Mais il marque, dans le chap. 2 du même Mais saint Jérôme en compte quatre : Périarchon li-
livre, qu'il n'avait pas encore expliqué ces autres bros quatuor. Epist. 29 ad Paulam.
paroles : Faisons l'homme à tiotre image. Ainsi il faut * Rufin., Prologo m lib. I Périarchon.
[III^ SIÈCLE.] CHAPITRE Xin. — ORIGÈNE. 173
hardies et singulières sur la préexistence des sance ;on ne l'invoque nommément dans
si
âmes, sur la pluralité des mondes, sur la na- le baptême, qui doit se donner au nom de
ture des astres, sur la durée des peines, sur la Trinité, ce sacrement n'est suivi d'aucun
le salut des mauvais anges, et autres sem- effet.Toute créature raisonnable est capable
blables, qui, n'étant point fondées sur la tra- de louange ou de blâme, et si, entre les anges,
dition de l'Eglise, ont été rejetées de tout le les uns sont supérieurs aux autres, cela ne
monde. Il y avait néanmoins de l'injustice à vient pas de ce qu'ils sont d'une nature plus
les attribuer toutes à Origène, puisqu'il s'est excellente, mais de leurs mérites. Il en est de
plaint lui-même que l'on avait corrompu ses même des mauvais anges. C'est par leur pro-
écrits, et qu'il ne propose ces sentiments sin- pre mahce qu'ils ont été réduits à l'état où
guliers que comme des questions probléma- ils se trouvent comme il est au pouvoir de
: Llb. Ilf.
cap IV.
tiques, soumettant le tout au jugement du l'homme de se rendre heureux en vivant bien,
lecteur. Saint Pamphile cite souvent le livre
* ou malheureux en s'abandonnant au mal.
des Principes dans l'Apologie qu'il a faite Dieu créa, avant les corps, un certain nombre Lib I.
cap vu, VIII,
pour Origène. On en trouve des endroits con- d'esprits égaux, qui la plupart ont péché, et,
et Llb. II,
sidérables dans la Philocalie ^ et dans la let- selon les degrés de leurs fautes, ont été atta- cap vai IX.
tre ' de l'empereur Justinien au patriarche chés à divers corps créés exprès pour les pu-
Mennas. Eusèbe en * cite les premiers mots, nir, en sorte que de purs esprits ils sont de-
et saint Jérôme, même ® depuis qu'il fut de- venus âmes d'anges, d'astres ou d'hommes.
venu ennemi d'Origène, renvoyait saint Pau- Car Origène enseigne que les anges sont com- Lib. II.
cap. m.
lin au livre des Principes, pour s'y instruire posés d'âmes et de corps très-subtils, et que
Lib. I,
sur des questions importantes. Photius en les astres sont animés, mais par des esprits, cap. vu,
Lib. II,
parle aussi, et marque ^ en abrégé ce qu'il toutefois, moins coupables que ceux qui ha- cap. VI, IX,
Lib. I. Dans le premier livre il fait voir, contre les être uni d'une manière plus excellente, pour
valentiniens,les marcionites et les basilidiens, n'en être jamais séparé, c'est l'âme de Jésus-
qu'il n'y aqu'un Dieu, seul principe de toutes Christ, dont il dit lui-même que personne ne
Cap. vni. choses, bon et immuable de sa nature ; que peut la lui ravir. Cette âme est incapable de
ce Dieu est incorporel; qu'il a un Fils éternel péché mais il n'en est pas ainsi des autres
;
maux naissent les uns des autres, mais d'une les bienheureux ne les rend pas impeccables,
cap, III.
éternelle, l'Ecriture ne laisse pas de la nom- anges cesseront d'être ennemis de Dieu, afin cap. VI.
dans chaque ciel ils seront instruits de ce qui voir, laissant à notre libre arbitre de profiter
regai'de la situation et le mouvement des du secours de sa grâce, ou de n'en pas pro-
astres. fiter. Comme bonnes pensées nous sont
les
Analyse 3. On du troisième livre,
trouvc, à la tête suggérées par les bons anges, ainsi les mau-
dn livre HT o ii i r. i i
des Princi- une secoudc prctace de Ruim, dans laquelle vais nous en inspirent de mauvaises ; quoi-
il avertit qu'il a traduit le troisième et le qua- qu'il soit en notre pouvoir de leur résister,
trième Uvre des Principes avec la même li- noiis ne pouvons néanmoins surmonter leurs
berté que les deux premiers, c'est-à-dire en attaques sans la grâce de Dieu; enfin il ne se
y ajoutant ce qu'il jugeait à propos, et en re- fait rien de bien sans que Dieu le fasse, ni de
tranchant ce qu'il y trouvait de contraire à mauvais, qu'il ne le permette. II met le souve-
la saine doctrine, et qu'il croyait avoir été rain bien de l'homme dans la ressemblance
ajouté par les hérétiques, ou même certaines avec Dieu, qui est la fin dernière de toutes
choses qui avaient déjà été dites dans les U- les créatiu-es raisonnables, et il prétend que
Lib. m, vres précédents. Dans le troisième Uvre, Ori- notre corps ne nous sera point un obstacle
"^P" ''
gène prouve solidement, et par la raison et pour parvenir à cette ressemblance, parce
par l'autorité de l'Ecriture, le libre arbitre de qu'après la résurrection, il sera changé et
l'homme. Comme on lui objectait ces paroles exempt de toutes les infirmités auxquelles il
fait toutefois de telle sorte, que, dans les cho- Traité de la Prière, imprimé en grec à Oxford crit'enVre
ses mêmes qui dépendent de notre libre ar- en 1686,in-12, sur mie copie fort défectueuse
1 Scultet, tom. I Medullœ Patrum, pag. 130, croit Runn, mais il n'en donne point de raison.
que cette récapitulation est de saint Pamphile ou de
[m® SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 175
d'un manuscrit de la Bibliothèque de Cam- prier, etmoins encore s'il est du nombre des
bridge. La traduction latine qui se trouve à la réprouvés. Pour résoudre la première de ces Pag. 23.
suite du texte grec n'est pas moins infidèle. deux objections, Origène dit 1° que l'expé- :
Rodolphe Westein fils en corrigea quelques rience ne laisse aucun lieu de douter que
endroits dans la réimpresion qu'il en fit à l'homme n'ait le libre arbitre; 2° que la pres- 24.
Bâle, en 1664, in-^». Au reste, on ne laisse pas cience de Dieu n'est point la cause de tous
de remarquer dans ce traité le style d'Ori- les événements, principalement de ceux qui
gène, surtout l'humilité ' et la crainte res- dépendent de notre volonté; au contraire, les 25.
pectueuse qu'il fait paraître dans tous les en- décrets de Dieu supposent et enferment la
droits de ses écrits * où il s'est agide parler prévision de nos prières, en sorte que Dieu
de Dieu. D'ailleurs il est certain, par le té- ne se détermine à accorder ou à rebuter nos
moignage 5 de saint Pampliile, qu'Origène demandes qu'après avou* prévu si elles sont
avait fait un on ne
traité de la Prière, et de nature à être exaucées ou rejetées; 3° en 2G.
trouve dans celui-ci aucunQ marque de sup- conséquence de cette prévision. Dieu donne
position. Origène le composa à la sollicitation à ceux qu'il sait devoir prier dignement, un
d'Ambroise, et peut-être encore de Tatienne, bon ange pour leur aider à prier, et un es-
* prit de sang à ceux dans lesquels il prévoit
sa sœur; car il l'adressa à tous deux. Il y cite
ses commentaires sur le troisième chapitre des dispositions toutes contraires. Il répond 27.
de V Exode; ce qui montre qu'il n'écrivit son destination se faisant en vue de nos mérites
traité de la Prière qu'après ^ l'an 231, mais futurs, et la réprobation en vue de nos démé-
avant l'an 240. rites, ni l'une ni l'autre ne détruit la néces-
Analyse 2. Le premier dessein qu'Origène se pro- sité de la prière. Il en prouve l'usage par les 37.
de ce Traité.
posa, en composant ce traité, fut de répondre livres de Tobie, de Judith, d'Esther et de 45 et 53.
aux fausses raisons de quelques imposteurs, Daniel, et fait voir, par l'histoire des Macha- 37.
gens inconnus et sans autorité % qui soute- bées, que les saints prient pour nous. Userait
naient que la prière était inutile et superflue. même ridicule, ajoute Origène, de croire que
Ils allaient encore plus loin, en ne voulant les saints, qui ont reçu la perfection de la
rien d'extérieur dans la religion, pas même science, n'aient pas aussi reçu la perfection
Pag. 3. de baptême ni d'eucharistie. Mais, pour ren- des autres vertus, dont une des principales est
dre son ouvrage plus utile, il entreprit en la charité du prochain.
même temps de marquer la manière dont on 3. Il veut que l'on prie en peu de paroles, Disposi-
tions pour
4. doit prier, ce qu'il faut demander à Dieu, l'esprit tranquille, le cœur exempt de haine prier; temps
auquel on
10 les heures les plus convenables à la prière, ou de colère, la conscience pure, et comme doit prier;
ce qu'on doit
et il se propose d'expliquer en détail la for- en la présence du Seigneur on doit prier au
: demander.
mule d'oraison que nous trouvons dans l'E- moins trois fois le jour, le matin, à midi, le Pac:. 30.
tout prévu et tout ordonné, et que nos prières la terre et les choses de peu de conséquence
ne peuvent rien changer à ses décrets éternels, ne doivent point être l'objet de nos prières ;
20, il est inutile de prier. Ils disaient encore Ou : et nous n'en devons demander que de céles- 30 et 62.
un homme est du nombre de ceux que Dieu tes et de grande importance. Celui qu'il faut
a choisis avant la création du monde; ou il prier est le Père, le Dieu de l'univers, sans
y
n'en est point. S'il en est, il n'a que faire de joindre aucune autre personne, pas même
vel de oratione, vel de rcsurrectione. Pamph., in Apc- mença ses commentaires sur la Genèse avant 241, et
log., pag. 491. —
* Quomodo vero secundum illos que ceux qu'il a faits sur YExode sont cités dans ses
—
interrogabat Adamum dicens : Ubi es ? Verum de his tomes sur les Cantiques, écrits vers l'an 240. Ori- ''
plus satis disseruimus ista quœ apud Genesim expli- gan., lib. de Orat., pag. 16 edit Oxon, 1085.
cantes. Origen., lib. de Orat., pag. 86.
476 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Jôsiis-Christ, qui nous a lui-nièmo cnscigiK'i sible, matériel, corruptitiblo; ce qui est im- p«g. st.
de nous adresser au Père. Cet endroit pour- pie. C'est pourquoi il veut que l'on donne un
rait faire de la peine si Origène ne s'ex-
, sens spirituel à tous les endroits de l'Ecri-
Paf. 58. pliquait ensuite. Mais il témoigne ne s'être ture qui semblent attribuer à Dieu un corps
exprimé ainsi que dans la crainte que l'on ou quelque chose de matériel. Par la seconde 90.
n'adressât la prière au Père et au Fils en nom- demande, nous prions Dieu de nous donner
bre pluriel, comme si c'étaient deux dieux. sa sainte grâce, persuadés que, sans son di-
59. C'est pourquoi il ajoute qu'on ne doit pas vin secours, nous ne pouvons opérer notre io4.
prier l'un sans l'autre, mais prier le Père par salut. Il y en avait qui, sous le nom de pain
01 . le Fils, suivant la pratique ancienne et univer- que nous demandons à Dieu , entendaient le
selle de l'Eglise, et conformément à ce qu'il dit pain matériel qui sert de nourriture à no-
dans le cinquième de ses livres contre Cclse
'
: tre corps. Origène rejette cette explication
« Tous nos vœux, nos prières, nos demandes, comme fausse, et soutient qu'on doit enten-
nos actions de grâces doivent s'adresser à dre ce pain, du pain qui est descendu du
Dieu, qui est Seigneur de toutes choses, par ciel et destiné a nous sanctifier et ^à nous
le souverain Sacrificateur, qui est au-dessus donner les forces pour parvenir à l'immor- ^jg
de tous les Anges, le Verbe vivant et animé, tahté. En expliquant ces paroles : Remeitez-
qui est Dieu lui-même ; » et encore : « Nous nous nos offenses comme nous les remettons à
rendons l'hommage de nos prières à un seul ceux qui nous ont offensés, il dit que tous n'ont
Dieu et à son seul Fils, qui est son Verbe et pas pouvoir de remettre les péchés, mais
le
son image. Je veux dire que nous offrons ceux-là seulement à qui Jésus-Christ l'a ac-
nos vœux au Dieu de l'univers, par son Fils cordé, comme aux Apôtres, lorsqu'il souffla
unique. » sur eux et leur dit; «Recevez le Saint-Esprit,
Expiiea- 4. Origène donne ensuite l'explication de les péchés seront remis à ceux à qui vous les
rui^o'n^ Do^ i'Oraïson Dominicale, qu'il croit être différente remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui
dans saint Matthieu et dans saint Luc, et vous les retiendrez. » Ce pouvoir, toutefois,
dictée par Jésus-Christ en diff'érentes circon- regarde les péchés commis contre Dieu, tan-
G9. stances, quoiqu'elles aient entre elles un grand dis que chacun de nous peut et doit remettre
^^^
77. rapport. Sur la première demande, remar- il les offenses qu'il a reçues. Il se plaint de ce
que que, bien que Dieu soit appelé Père dans que quelques-uns accordaient le pardon pour
l'Ancien Testament, on ne voit pas néanmoins les crimes d'idolâtrie, d'adultère et de for-
qu'on l'ait nommé ainsi dans les prières qui nication, et semble dire que cela n'est pas
^gg
82. étaient alors en usage. Lorsque nous disons même au * pouvoir des prêtres. Par la der-
qu'il est dans le ciel, nous ne devons pas nière demaude, nous prions Dieu, non de
nous imaginer qu'il y est comme les corps nous délivrer de toutes tentations, ce qui ne
84. sont dans les lieux qui les contiennent, au- paraît pas possible, la vie de l'homme étant
trement il faudrait dire que Dieu est plus petit une tentation continuelle, mais de ne nous . .
que le ciel, dans lequel il est corporel, divi- laisser point succomber à la tentation. Nous
1 Lib. V conft^a Celsum, pag. 253. Il dit la même nistres de l'Eglise, pour toutes sortes de péchés;
chose dans sa douzième homélie sur Ezéchiel Ut : mais que, conformément à l'esprit de l'Eglise et à
nunquam ad radices nostras securis ponatur, quœ in la disciphne de ce temps-là, il ne croyait pas qu'on
Evangelio prœdicatur, uttentius Jesum Christum Do- pût absoudre les pécheurs qu'après une longue et
minum nostrum cum Pâtre suo precemur. Voyez aussi sincère pénitence. Voici comment il s'explique dans
l'homélie 4 in Jerem.; les homélies 15, 18 et 36 Lu- m le livre III contre Celse, pag. 142 -.Jam erga peccantes
cam. Au commencement du livre IV contre Celse, il quam severa est disciplina, prœcipue contaminatos libi-
adresse lui-môme ses prières à Dieu par Jésus-Christ. dine, quos e sua communione rejiciunt nostri, quan-
^ At quidam nescio quomodo sibi assumentes quœ tumvis Celsus eos nugacibus circu'atoribus similes fa-
sacerdotalem difjnitatem exceduni et fortassis non cial? Et pythagorœorum quidem veneranda scfiola po-
probe callentes scientiam sacerdotalem, se idololatrice nebat cenotaphia disciplinas suce desertoribus, nimirum
veniam facere posse gloriantur, adulterium quoque et quod haberet eos pro mortuis : hi vero ut perditos,
fornicationem remittere, ac si ipsorum precibus, qui Deoque mortuos lugent eos qui libidine aliove simili
hoc perpetraverant dimitteretur peccatum quod est ad malo victi fuerint ; ac rursum resipiscentes, haud se-
mortem. Origen., lib. de Orat.; pag. 132. Mais, en eus quam redivivos recipiunt tandem post longiorem
comparant cet endroit avec ce qu'Origène dit ail- melioris mentis approbationem, quam cum primum ad
leurs de la discipline que l'Eglise observait à l'égard religionem discendam admitterentur ea tamen condi-
des pécheurs coupables de grands crimes, on voit tione, ut quoniam lapsi sunt, excludantur in posterum
qu'il reconnaissait le pouvoir des clefs, dans les mi- ab omnibus dignitatibus et magistratibus ecclesiasticis.
liii« SIÈCLE.] . CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 477
ajoutons : Délivrez-nous du mal, c'est-à-dire : cution de Maximiu, qui dura depuis l'an 235
faites-nous vaincre notre ennemi, en surmon- jusqu'en 238, Origène composa un traité pour
tant les efforts qu'il faitpour nous perdre. les animer l'un et l'autre au martyre. Quoi-
5. La posture la plus convenable pour prier, qu'Ambroise ne fût que diacre, il le nomme
est de le faire les mains étendues et les yeux cependant avant Prototecte, dans une espèce
élevés au ciel. Mais si on ne le peut à cause d'épître dédicatoire qui leur est commune, et
de quelque circonstance particulière, ou pour il s'adresse principalement à lui dans tout
cause de maladie, il est permis de prier assis, l'ouvrage soit par reconnaissance des bien-
ou couché, si ce n'est lorsque l'on demande à faits qu'il eu avait reçus,
parce qu'ayant
soit
Dieu la rémission de ses péchés; car alors on une femme, des enfants de grands biens,
et
doit priera genoux. On peut prier en tout lieu, toutes ces attaches pouvaient le détourner du
Mais il était d'usage, dès le temps d'Origène, martyre. Origène* nomme Germanie le lieu où
de préférer les lieux destinés aux assemblées ils devaient souffrir, et l'on trouve, en efifet,
des fidèles, parce que l'on croyait que les an- en Orient quelques villes de ce nom ; mais il
ges y assistaient, et qu'elles étaient sanctifiées n'est pas impossible que l'empereur Maximin
par la vertu de notre divin Sauveur et les mé- les eût fait amener dans la grande Germanie,
rites des saints, que défunts,
tant vivants c'est-à-dire dans l'Allemagne, où il était alors.
Origène semble dire que les anges que Dieu Tout cet écrit n'est presque qu'un tissu de pas-
a donnés pour nous garder prennent un soin sages tirés de l'Ecriture, Origène ne jugeant
tout particulier de ceux qui viennent à l'église rien de plus propre, pour exciter des martyrs
pour y rendre gloire à Jésus-Christ, mais à donner leur vie pour la défense de la vérité,
qu'ils n'en usent pas de même à l'égard de que les paroles mêmes de la vérité. On croit
ceux qui y vont comme on va dans les assem- qu'il le composa à Césarée en Cappadoce, où
blées où l'on ne traite que des affaires de né- il se rétira pendantla persécution de Maximin,
goce et purement humaines. C'était aussi la et où il demeura caché durant deux ans chez
coutume de se tourner du côté du soleil le- la vierge Julienne ^. [Cet ouvrage est écrit
vaut pour prier, l'Orient étant la plus excel- avec beaucoup de chaleur et d'enthousiasme,]
lente de toutes les régions du ciel. La prière Origène exhorte d'abord ses amis à comp-
2. Analyse
doit commencer par la doxologie, en rendant ter pour rien les travaux de cette vie et à se seion^î-'édil
*'
gloire au Père par Jésus-Christ dans le Saint- souvenir, pendant tout le temps de leurs com- «T\m.
165,
Esprit ; ensuite vient l'action de grâces pour bats, de la récompense destinée dans le ciel
les bienfaits qu'un chacun a reçus; puis la à ceux qui souffrent pour la justice. Ensuite Pag. 163.
confession des péchés que l'on a commis cou- il leur fait voir qu'il est nécessaire au salut de
tre Dieu, accompagnée de douleur très-vive ; confesser la foi de bouche aussi bien que de
*''''•
chacun doit ensuite demander à Dieu ses dons cœur, et que ceux-là se trompent qui se per- 154.
célestes, prier tant pour ses propres besoins suadent qu'il suffît de croire de cœur pour
que pour ceux de ses amis et de tout le êtrejustifié. Pour rendre la confession de la 166.
monde ; et enfin on doit terminer sa prière foi complète, il faut, pendant tout le temps 471.
par la glorification du Père, du Fils et du de l'examen et de la tentation, ne donner au-
Saiut-Esprit. A du texte grec du traité
la suite cune prise sur nous au démon qui nous solii-
d'Origène sur la Prière, on trouve une courte cite, par de mauvaises pensées, à renoncer, ou
paraphrase grecque de l'Oraison dominicale, à douter de la vérité de notre foi; ne dire au- 472.
sans nom imprimée à Paris dès l'an
d'auteur, cune parole qui s'éloigne de la confession;
1601, par Morelle. [Les Pères de la Rue n'ont souffrir toutes sortes de mauvais traitements
pas jugé à propos de la reproduire; elle n'ap- de la part de nos adversaires moqueries, , les
partient pas à Origène.] les risées, les mépris, la compassion qu'ils
témoignent de l'erreur et de la folie qu'ils
§ 4. - TRAITÉ D'ORIGÈNE SUR LE MARTYRE.
^^^^ attribuent; de plus, u'êtrc point empor-
1 Ambroise, ami d'Origène, et Prototecte,
. téspar l'affection naturelle pour des enfants,
prêtre de l'Eglise de Césarée en Palestine, pour une femme et pour les autres person-
ayant été arrêtés pour la foi dans la perse- nés qui d'ailleurs nous sont chères, ni par
et seq.
raj. 200. Dieu et à lu vie qui esi dans lui, et dont nous martyre est décrit dans les livres des Macha-
devons jouir avec son Fils unique. Il ne faut '
bées précepte que Jésus-Christ a fait, non
; le l'JS.
pas seulement combattre, pour ne pas nier, à ses ennemis, mais à ses amis, de boire le
^oi.
mais encore pour ne pas succoml)er, dès le calice de sa passion; l'exemple du Sauveur qui,
commencement, à un premier mouvement de pour avoir souffert la mort sur la croix, est
honte que l'on ressent lorsqu'on se voit trai- assis à la droite de Dieu l'avantage qu'Am-
;
^03.
ter indignement par les ennemis de Dieu, sur- broise pourra procurer à ses propres entants,
en priant pour eux après son martyre; la 20i.
tout après avoir été honoré et reçu en plusieurs
villes. Ce qui s'adresse à Ambroise, qui avait gloire dont les souffrances seront récompen- ^o..
202- rempli de grandes charges. Il avait aussi une sées ; le danger que nous courons si souvent
femme, des enfants, des frères, des sœurs et de mourir d'un genre de mort commun à tant
203, 176. de grands biens, Origène en prend occasion de d'autres ; enfin la volonté du Seigneur, qui n'a-
"7. l'animer davantage au martyre ,
parce qu'il vait peut-être prolongé leur vie jusqu'au temps
sera d'autant plus glorieux qu'il aura préféré de la persécution, qu'atin qu'ils fussent lavés
116. Jésus-Christ à tout ce que l'on peut aimer sur dans leur sang et purifiés de tous leurs péchés.
la terre. Puis il ajoute, parlant de lui-même: 4. Quelques-uns regardaient les sacrifices 2io.
«Je souhaiterais, en possédant autant de biens offerts aux idoles comme une chose indiffé-
et plus même que vous n'en possédez, mourir rente; d'autres disaient que, les noms étant su.
martyr pour l'amour de Jésus-Christ, afin de d'institution humaine, il importait peu de
recevoh- dans le ciel à proportion de ce que dire: J'honore Jupiter, ou Apollon, ou Diane,
j'aurais quitté ici-bas, et de pouvoir devenir ou Cérès. Mais Origène réfute ces faux pré- siâ.
le père d'une nombreuse et sainte troupe d'en- jugés et soutient que ces noms ont quelques
fants, par la grâce de celui de qui procède vertus particulières pour attu'cr les démons ;
1''^
toute paternité. Comme il est juste que ceux qu'il n'est permis de donner au vrai Dieu que
qui n'ont point passé par l'épreuve des tour- les noms que lui ont donnés Moïse, les Pro-
ments cèdent aux autres dont la patience a phètes et Jésus-Christ, savoir Sabaoth, Ado- :
paru sur les chevalets, dans les différentes tor- naï, Saddaïjle Dieu d'Abraham, d'Isaac et de
tures et au milieu des feux ; aussi quand nous Jacob. « Car c'est là, dit Dieu lui-même dans le
mourrions martyrs , nous autres qui sommes livre de l'Exode *, le nom que j'ai dans toute
pauvres, la raison nous obligerait de nous ra- l'éternité, et le nom qui me fera connaître
baisser au-dessous devons, puisque vous au- dans la suite de tous les siècles. »
riez foulé aux pieds, pour l'amour de Jésus- 5. La dernière raison dont Origène se sert sis.
Christ, les grands biens que vous possédiez, pour exciter Ambroise et Prototecte à se hâter
les enfants que la nature vous rendait si d'aUer à Dieu par le martyre, est tirée du désir
chers, et cette gloire trompeuse du siècle qui que notre âme a naturellement de s'unir à
est recherchée avec tant d'empressement par lui, comme à un être avec lequel elle a quel-
les hommes. » que rapport, étant de sa nature, comme Dieu,
178. 3. Origène fait ensuite ressouvenir Ambroise raisonnable, intelligente et invisible. « Pour-
et Prototecte des promesses qu'ils ont faites quoi donc, ajoute-t-il, appréhendons-nous de
à ceux qui pour le baptême,
les instruisaient nous débarrasser de ce corps corruptible qui
et leur montre que la liberté qu'ils avaient appesantit l'âme, abat l'esprit par la multipli-
alors de choisir le vrai Dieu préieral)lement cité des soins qui l'agitent, et l'empêche d'al-
aux dieux étrangers des Amorrhéens et au- avec Jésus-Chiùst, du repos qui doit
ler jouir,
tres peuples idolâtres, est devenue pour eux nous rendre heureux et des délices du para-
une nécessité, par l'engagement qu'ils ont pris dis. » Il conclut ainsi ce traité : « Je souhaite 217.
en répondant à leurs catéchistes Nous ser- : que mes avis vous soient utiles pour le com- 2i8.
lis. vwons le Seigneur, car il est notre Dieu. Il leur bat que vous avez à soutenir ; mais si l'état
propose la joie que les anges recevront en leur où vous êtes et la connaissance plus abon-
* Et vero non tantum ceitandum est ne quis abne- poris triumphas, tollens crucem nostri Jesu, sancte
get, sed et nemox ab initio pudore confundatur, dum Ambrosi, ipsumque secutus, qui ducis instar prœcedit
existimatur ab hostibus Dei pudore digna pati ; at- ad prœsides atque reges : ut ipse una tecum iter fa-
que id maxime, si celebratus fuerit cum honore et ciens, idem os tibi det et sapientiam, etc. Origen.,
'usceptus a plurimis civilatibus. Sicuti tu nunc tem- lib. de Exhort. martyr., pag. 200. —
* Gap. m, 15.
[m* SIÈCLE.l CHAPITRE Xin. — ORTGÈNE. 479
dante des mystères de Dieu, vous les font re- la crainte néanmoins, qu'il ne s'en trouvât
s,
garder comme puériles et méprisables^ j'en d'assez faibles parmi les simples fidèles pour
serai ravi^ mon dessein n'étant pas que vous se laisser ébranler par les paroles de Celse
arriviez à la couronne du martyre par mon et entraîner par ses faux raisonnements, et
ministère, mais que vous y arriviez de quel- ne voulant d'ailleurs donner aucun lieu '° de
que manière que ce soit; et Dieu veuille que supposer qu'il refusait d'exécuter les ordres
ce qu'il y a de plus divin et de plus excellent d'Ambroise, il entreprit de réfuter les calom-
vous y conduise, je veux dire le Verbe de la nies de Celse contre la religion chrétienne,
sagesse de Dieu. » Ambroise et Prototecte ne et adressa son ouvrage à l'ami qui l'avait si
souffrirent pas néanmoins le martyre dans vivement sollicité. Il est divisé en huit livres,
cette persécution, et ils n'y acquirent que la que nous avons encore en grec. Eusèbe en
qualité de confesseurs. parle dans son Histoire " ecclésiastique et y
renvoie, dans ses livres contre Hiérocle , tous
§ 5. — DES HUIT LIVRES D'oRIGÈNE CONTRE CELSE. les amis de la vérité qui voudront connaître
i. L'histoire fait * mention de deux Celse ce que *^ c'est que le christianisme et la faus-
qui suivaient l'un et l'autre la philosophie seté de tout ce qu'on a dit pour le décrier et
d'Epicure. Le premier vivait sous le règne ^ le noircir. Cet ouvrage est cité avec éloge par
de Néron ; le second, sous celui d'Adrien et saint »5 Jérôme, et on en trouve des fragments
des empereurs suivants. On croit s, avec beau- considérables dans la Philocalie de saint Ba-
coup de vraisemblance, que c'est à celui-ci sile et de saint Grégoire de Nazianze. Comme
de Commode, après la mort de Marc-Aurèle, ses accusations contre les chrétiens, Origène
qui y est appelé Dieu. Ce Celse avait * écrit s'en sert aussi pour le combattre et pour dé-
contre les chrétiens deux hvres différents truire ses calomnies. Il y avait déjà long-
un auquel il avait donné le titre de Discours ^ plus de soixante ans. Ainsi il faut mettre ses
véritable; ce qu'Eusèbe ® appelle un titre livres contreen 249, sous Philippe,
Celse
vain et insolent. Ambroise, ayant eu ce dis- puisque, dans temps qu'il les composa, l'E-
le
cours entre les mains, l'envoya à Origène et glise, selon le témoignage '^ d'Eusèbe, jouis-
le pria en même temps de le réfuter. Origène sait d'une profonde paix ; ce qui convient au
ne s'y engagea qu'avec répugnance, consi- règne de ce prince. On voit cependant, par
dérant d'un côté ' que Jésus-Christ, dans sa un endroit du livre III, que, lorsqu'Origène
passion, était demeuré dans le silence, per- l'écrivait, il y avait de grands mouvements
suadé que tout le cours de sa vie et les ac- dans l'empire ; mais il ne paraît point que
tions qu'il avait faites au milieu des Juifs le l'Église en ait été troublée, et on peut l'ap-
justifiaient pleinement; de l'autre, qu'il n'é- pliquer à la rébellion de Dèce, qui avait été
tait guère * possible que les calomnies de précédée par " celle de Jotapien dans la Sy-
Celse imposassent à quelques personnes. Dans rie, et par celle de Marin dans la Pannonie.
domantis, pag. ^98. — * Origen., lib. IV cont. Cel- 15 Quo tempore cum fides nostra, ut par erat, auge-
sum, pag. 186. — s
Idem, lib. I, pag.
Euseb., 3. — ^ retur in dies, et doctrina Christianorum summa ubi-
in Hieroclem., pag. 434. —
Orig., in Prœf., pag. 1.
''
que lïbertate frueretur, Origenes jam sexagenario
— 8 Ibid., pag. 3. 9 Ibid. — —
i» Ibid., pag. 2. — major octo libros composuit adversus librum. quem-
Il Euseb., lib. VI, cap. 36. dam Celsi epicurei contra Christianos, qui de Vera
** In quitus libris causas omnes et argumenta com- Doctrina inscribitur. Euseb., lib. VI, cap. 36.
plexus vir ille, omnia simul quœcumque super ea re 16 Denuo calumniatores nostri causam tantorum mo'
a quoquam vel dicta sunt, tel dicentur posthac in tuum quibus nunc Romance res agitantur in multitu-
aniecessum dissolvit, Euseb., in Hieroclem., pag. 433 dinem fidelium conferunt. Origen., lib. III cont. Cels.,
et 434. pag. 120.
*3 Scripserunt conti^a nos Celsus atque Porphyrius. 1''
Quum autem perturbationes eodem tempoi'e {sub
Priori Origines, alteri Methodius, Eusebius et Apol- Philippo) plures acciderent in republica : orientales
linaris fortissime responderunt. Hierouym., Epist. 83. quidem provinciœ partim tributorum exactionibus gra-
" Qui Celsus, ne communem quidem vitam inter ho- vâtes, pariim quod Priscus iis nationibus cum imperio
180 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
AnnijTf :2. La premier»» aonisatinn (luo Cclse for- ches moines,- qui les auraient accablés, s'ils
contre if'.- muit contrc les curetiens, etail au suiet de u avaient ete soutenus contre taut d assauts
selon V6-
»«>,
,
aition .i« leurs assemblées secrètes, c'est-a-dirc de leurs par une 'puissance divine.
t.BIKhndgo,
en 1658. agapcs, qu'il dit être contraires aux lois. Ori- 3. Celse objectait (jue les préceptes de mo- Pa^-.T.
Paff. 4. gène répond à cela qu'on ne doit point trouver raie , cbez les cbrétleus, n'avaient rien de
mauvais que ceux qui connaissent la vérité singulier ni de nouveau; qu'ils ne reconnais-
fasscnt des assemblées pour ses intérêts, fus- salent point pour divinités celles qui étaient
défendues par les lois, qui, dans ce
sent-elles fabriquées de la main des bomnies; que tout
cas, doivent être regardées comme impies, le pouvoir qu'ils semblent avoir, lorsqu'ils
-' Car de même que si un tyran s'était rendu conjurent et chassent des esprits malins, leur
maitre de quelque république, ceux-là se- vient des noms et de l'invocation de certains
raient jugés dignes de louanges qui s'assem- démons ;
que Jésus-Christ n'a
des mira- fait
bleraient en secret pour conspirer contre lui clés qu'avec le secours de
magique. Oii-
l'art
;
ainsi les chrétiens en méritent, puisqu'ils ne gène ne fait aucune difficulté de reconnaître
s'assemblent que pour secouer le joug d'un que Dieu, qui a donné aux uns, par ses Pro-
cruel tyran, qu'ils nomment le diable, et pour phètes et par Jésus-Christ, les règles de bien
travailler au salut de ceux à qui ils peuvent vivre, a accordée tous les autres des lumières
^'
persuader d'en faire de même. Celse ajoutait qui leur font connaître leur devoir, afin que
que la doctrine des chrétiens était barbare tous soient inexcusables au jour du jugement. ''^
dans son origine, voulant dire qu'elle venait II avoue de même que les chrétiens ne met-
des Juifs ; que les Grecs étaient beaucoup tent point les idoles au nombre des dieux, et
plus propres pour former à la vertu, et que dit que le culte d'un seul Dieu est une de
c'était à eux à perfectionner ce que les Bar- ces vérités imprimées dans le cœur des hom-
bares inventaient; « car ils ont cela de bon, mes; mais il soutient qu'on ne peut, sans une
disait Celse, qu'ils sont capables d'inventer calomnie manifeste, accuser les chrétiens d'a-
des dogmes. Origène profite de cet aveu et
» gir par la vertu des démons. « Si les chrétiens,
en conclut que, si quelqu'un, élevé sous la dit-il, ont quelque pouvoir, ce n'est point par
discipline et instruit de la science des Grecs, l'invocation de ces esprits malins, mais par
venait parmi nous, non -seulement il juge- celle du nom de Jésus et du récit de quelques
rait notre doctrine véritable, mais il donne- actions de sa vie. C'est par ces moyens qu'on
rait encore aux preuves qui en établissent la les a vus souvent contraindre les démons de
vérité tout ce qui semble leur manquer pour sortir des corps de ceux qu'ils possédaient,
être une démonstration qui lui est particu- surtout lorsqu'ils prononçaient ce saint nom
lière, c'est-à-dire, « par les effets sensibles de avec une conscience pure et une foi ferme ;
l'esprit et de la puissance de Dieu *, » comme car le nom ' de Jésus a tant de force contre
parle l'Apôtre; les effets de l'esprit sont les les démons, qu'il est même arrivé quelque-
prophéties qui rendent témoignage à Jésus- fois, qu'étant prononcé par des méchants, il
Christ, les efifets de la puissance sont les mira- n'a pas laissé de produire son effet. Ce que
clés qui ont été faits pour preuve de la vérité Jésus-Christ a marqué eu disant * Plusieurs :
de cette doctrine, comme il s'en fait encore me diront en ce jour-là : Seigneur, n'avons-
quelquefois parmi les - véritables chrétiens. nous pas chassé les démons en votre nom, et
^- La religion prouve encore ses principes par n'avons -nous pas fait des miracles en votre
la victoire que les chrétiens ont remportée sur nom? A l'égard de Jésus-Christ ", quand il
le monde entier, malgré les arrêts du sénat serait vraique nous ne pourrions montrer
de Rome, les persécutions des empereurs en par quelle vertu il faisait des miracles, il n'en
divers temps, la fureur des soldats, la haine serait pas moins constant que les chi-étiens
prœesse jussus, intolerabilis omnibus esset, novas res * Tanta certe vis nomini Sesu inest contra dœmones,
molitcePapinnum ad summam ro'um evenerunt, iti-
,
ut nonnunquam etiam a malis nominaium sit efpcax.
tum argumentis aliis, tum quia supersunt etiam nunc tnenta ; Jesu duntaxat nomine contentas, et dictis aliis
eorum vestigia apud eos qui vivunt juxta voluntatem quitus secundum sacrant Scripluram fides adhibetur,
ipsius. Lib. I cont. Cels., pag. 5. Ibid., pag. 7,
[m' SIÈCLE.] CHAPITRE Xni. — ORIGÈNE. 181
qu'ils ne se servent que du nom de Jésus , y il lui en fait des reproches, et dit que l'Apô-
ajoutant seulement quelques autres choses tre, et les chrétiens ne croient point
avec lui,
qu'ils croient, sur l'autorité de l'Ecriture. » Il que la sagesse soit une folie devant Dieu,
fait voir ensuite que c'est mal à propos que mais la sagesse de ce monde ils entendent ;
Celse veut faire passer pour une doctrine ca- par là toute cette vaine philosophie qui doit
chée la doctrine des chrétiens, beaucoup plus être détruite. Ensuite Origène lui demande Pag.is.
connue dans le monde que celle qu'ensei- pourquoi il reçoit comme des vérités ce que
gnent les philosophes eux-mêmes. « Qui est- les histoires des Grecs et des Barbares racon-
ce, en effet, qui n'a point ouï parler de Jésus tent de l'antiquité des autres peuples, tandis
né d'une Vierge et mort sur une croix ; de sa qu'il rejette comme des fables ce que Moïse
résurrection, qui est l'objet de la foi de tant et les autres Prophètes de la nation juive
de personnes ; du jugement à venir, où les nous ont laissé par écrit ? Quelle raison peut-
méchants recevront la peine due à leurs cri- il avoir de soupçonner ceux-ci de fraude,
mes, et les bons la récompense qu'ils ont mé- plutôt que les autres ? et de rejeter le témoi-
ritée par leurs vertus? Le mystère de la résur- gnage des écrivains juifs comme de person-
Pag.8, rection des morts n'est-il pas connu de tous, nes qui n'avaient pas le sens commun, lors-
quoique les incrédules en fassent le sujet de qu'il reçoit celui des autres comme de gens
leurs railleries ? Si les chrétiens ont quelques sages et éclairés? Quoique cette distinction i*.
points de doctrine qui ne sont pas connus de ne fût fondée que sur la préoccupation de
tout le monde, il en est de même de toutes Celse contre les chrétiens, Origène ne laisse
les sectes de philosophes, où
y a certains
il pas d'en faire voir le ridicule et de montrer
dogmes que l'on répand moins dans le public; que Moïse mérite beaucoup mieux le titre de
et on a toujours observé un grand secret dans sage qu'Orphée, que Pythagore et tous les au-
tous les mystères, soit des Grecs, soit des Bar- teurs profanes qui se sont appliqués à donner
bares, sans qu'on y ait trouvé à redire. » des préceptes de morale, soit parce que plu- 15.
4. Celse voulait aussi qu'on ne reçût aucun sieurs d'entre les Grecs, convaincus par les
dogme qu'après avoir pris conseil de la rai- écrits de Moïse, ont embrassé la religion des
son et eu avoir fait de son étude et
le sujet Juifs ; soit parce que dans les cinq livres qu'il
9. de sa méditation. « Mais ni les nécessités de la nous a laissés, il y également tous
instruit
vie, dit Origcne, ni les infirmités des hommes les hommes, au que les sages du paga-
lieu
ne permettent qu'à un fort petit nombre de nisme se sont peu mis en peine du commun
personnes la discussion des dogmes de la re- de ceux qui pourraient lire leurs écrits ; soit ^^•
10. N'arrive-t-il pas souvent qu'entre diverses ajoute que la circoncision n'est point passée ^^.
sectes de philosophes, on en choisit une pré- des Egyptiens aux Juifs , mais d'Abraham,
férablement aux autres, sans en avoir préa- qui est le premier de tous les hommes qui ait
lablement examiné les principes, uniquement été circoncis; que ceux qui con-
la plupart de
parce qu'on la croit la meilleure, sur l'auto- jurent les démons mettent ces mots: a Le
rité seule de Tauteur de cette secte ? N'est-il Dieu d'Abraham, » dans le formulaire dont
pas plus juste d'avoir la même déférence ils se servent; et souvent encore ceux « d'I-
raison pour établir solidement notre croyance leur sentiment, qu'il importait peu quel nom
par les preuves convaincantes qui se présen- l'on donnât à Dieu, soit qu'on l'appelât Jupi-
tent d'elles-mêmes, ou qu'une exacte recher- ter ou autrement. Origène réfute ce senti-
n. che peut nous fournir.» Il se moque de Celse, ment en disant que c'est une chose constante 19,
qui se vantai ^de tout savoir et d'étendre ses qu'il y a des noms qui ont naturellement une
soins à tous les hommes ; et parce qu'il avait certaine vertu. Tel est le nom de Jésus, qui
falsifié un passage de saint Paul ,
pour avoir chasse les démons des corps
âmes; tels et des
lieu d'accuser les chrétiens de suivre cette sont encore ceux dont se servent les sama-
12> maxime : a La sagesse de la vie est un mal, » nées et les brachmanes, parmi les pliiloso-
182 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
vra et enfantera un à qui Ton donnera
phes indiens, et les mages des Perses dans les fils,
qui savent l'art de conjurer, ces noms^ pro- no\is '. » En même temps remarque que
il
nonc(^s en leur langue propre, ne manquent le moi Alrna, que les Septante ont traduit par
pas de produire leur effet, tandis qu'ils n'ont celuide Vierge dans le texte d'Isaï3, se trouve
aucune vertu si on les change eu ceux de aussi employé pour signifier une Arierge dans
quelque autre langue. Par exemple, si, eu in- le livre du Deutéronome, où il est dit « Si :
voquant Dieu, ou en jurant par lui, on le une fille vierge, étant fiancée à un homme,
est trouvée dans la ville avec quelqu'un qui
l'iJVgV, nomme «le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac
rap. .0..
déshonore, vous les ferez sortir tous deux
^^ ^^ j^.^^ ^^^ Jacob, » ou fera certaines cho- la
ses par ces noms, dont la nature ou la vertu à la porte de leur ville, où vous les lapide-
est telle, que les démons mêmes cèdent et se rez '. » La suite du texte d'Isaïe, ajoute-t-il,
soumettent aux personnes qui les pronon- demande nécessairement qu'on traduise le
terme aima par celui de vierge. Autrement
cent. Mais si l'on traduit ces noms en une
autre langue, en disant, «le Dieu du père élu quel signe et quelle merveille serait-ce qu'une
de la mer bruyante, le Dieu du ris et le Dieu jeune fille qui ne serait point vierge mit un
fils au monde ? et ne convenait-il pas
mieux rag. 28,
du supplantateur, » ces noms n'auront pas
plus d'effet que ceux qui n'ont aucune vertu. à une vierge pure et chaste, qu'à une femme
Le nom de Sabaoth ou celui d'Adonai, que l'on qui aurait conçu à la manière ordinaire, de
donne à Dieu, lui appartient par des raisons mettre au monde Emmanuel, c'est-à-dire.
secrètes et mystérieuses ; Platon s'est fait ad- Dieu avec nous ?
mirer par son respect extrême pour les noms 7. Vous prétendez, disait Celse, qu'un fan- 3i.
décrier la doctrine de Jésus-Christ, comme relle d'une colombe. « Mais, avec toutes ses lu- 32.
n'ayant rien de noble ni d'élevé, puisque le mières, il n'a pas pris garde, ditOrigène, qu'il
fait produire son objection par un homme
grand nombre de savants et d'ignorants qui
l'ont embrassée dans presque toutes les par-
à qui les écrits des Prophètes out persuadé
tiesde la terre, et qui aiment mieux mourir une infinité de choses beaucoup plus surpre-
que d'y renoncer, ce qu'on ne lit pas que nantes que n'est l'apparition de la colombe.
personne ait jamais fait pour aucune autre Comment, en effet, un Juif pourrait-il prou-
doctrine, est une preuve que celle des chré- ver que Dieu ait dit à Adam, à Eve, à Caïn,
22. tiens vient de Dieu. La pauvreté de la mère à Noé, à Abraham, à Isaac et à Jacob toutes
les choses que les Ecritures marquent leur
dont Jésus est né et le lieu de sa naissance,
sont des preuves que les prophéties ont été avoir été dites, sinon par le témoignage des
25- accomplies en lui; l'adultère de la mère de Prophètes ? Comment le même sait-il que les 33.
Jésus avec un soldat nommé Panthère, est cieux furent ouverts à Ezcchiel, et qu'il eut
une fiction pour diminuer la croyance de l'o- une vision dans laquelle lui fut représentée la
du Seigneur, ce n'est parce qu'Ezé-
pération miraculeuse du Saint-Esprit dans la gloire si
même témoignage
des visions d'Isaïe, dont le
parence que celui qui n'a rien oublié pour
régler les actions des hommes sur la volonté ne mérite pas plus de croyance que celui de
Jésus, qui a fait éclater sa vertu et sa puis-
du Créateur de l'univers, ait eu la plus hon-
27. teuse de toutes les naissances. Il reproche à sance, non-seulement pendant qu'il a paru
Celse, qui avait rapporté plusieurs endroits sur la terre revêtu de notre chair, mais encore
de l'Evangile touchant la naissance de Jésus, après sa mort par les miracles que ses apôtres
comme l'apparition de l'étoile, de n'avoir pas ont faits et que font encore les chrétiens de
dit un mot de la prophétie d'Isaïe, qui s'y nos jours en qui il reste â^s traces de cet
trouve en ces termes : « Une Vierge conce- esprit qui parut en forme de colombe. Car 3*.
1 Levit. XII, 31. — » Matth. i, 23; Isa. tu, 10. » Deuteronom. xxu, 23 et 25.
[iii^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 183
ils chassent les démons, ils guérissent diverses Jésus-Christ a fait de gens sans lettres, dont
maladies, et, par les lumières qui leur vien- quelques-uns s'étaient même rendus coupables
nent de Dieu, ils pénètrent quelquefois dans de grandes fautes, pour en faire des apôtres:
l'avenir. » Origène ajoute : « Quand Celse ou o 1" Si l'on considère, dit-il, avec un esprit non rag s
son Juif devrait s'en moquer, je dirai qu'il prévenu, quels étaient les apôtres de Jésus,
y en a eu plusieurs qui se sont faits chrétiens on sera contraint d'avouer que le succès avec
,35.
comme malgré eux, un esprit secret faisant lequel ils ont prêché le christianisme ne peut
tout d'un coup sur le leur une impression si être que l'efl'ct d'une vertu toute divine. Car ce
vive et si puissante en songe, soit en
, soit n'était ni par la force de leur éloquence, ni
vision, et produisant en eux un tel change- par la netteté de leur méthode, ni par les au-
ment, que d'ennemis du christianisme, ils très artifices de la rhétorique et de la dialec-
en devenaient les défenseurs et les martyrs, tique, qu'ils se rendaient les maîtres de l'esprit
Nous en avons vu divers exemples, et si nous de leurs auditeurs, et qu'ils les engageaient
voulions les rapporter, nous à qui la vérité à embrasser une doctrine qui était si éloignée
est connue par le témoignage de nos propres des auciennes coutumes de leurs ancêtres.
yeux, nous nous exposerions aux railleries des 2" Si Jésus-Christ avait choisi, pour prédica-
infîdèles, qui ne manqueraient pas de dire teurs de sa doctrine, des personnes qui eussent
que nous prenons plaisir à conter des fables.» eu dans le monde une grande réputation de
39. il montre ensuite que Jésus est le seul en qui sagesse et dont les discours eussent été capa-
se soient accompUes toutes les prophéties blés de plaire au peuple, on aurait pu douter
40. touchant le Messie celle de Michée, qui met
: avec raison que sa doctrine eiit le caractère
sa naissance en Bethléem, ville d'Ephrata; de divinité qu'il lui attribuait, étant alors sou-
celle de Jacob, qui le fait descendre de la race tenue par tout ce que l'art a de plus propre
42. de Juda; celle d'Isaïe, qui marque que les —
pour persuader. 3" Jésus voulant montrer à 4».
Gentils croiront en lui, et qu'il sera mené à la tous les hommes combien sont puissants les
mort à cause des iniquités de son peuple. Ce remèdes qu'il leur offre pour la guérison de
qui trompe lesJuifsettous ceux qui ne croient leurs âmes, il n'est pas surprenant qu'il ait so
pas en Jésus, c'est qu'ils ne savent pas que pi'is des gens adonnés au vice et les ait fait
les Prophètes parlent de deux avènements du devenir des exemples de toutes sortes de ver-
43. Christ: le premier, où il devait paraître dans tus à ceux qui embrassaient l'Evangile par
la bassesse et s'assujettir à toutes les infirmi- leur ministère. » Il justifie encore Jésus-Christ ^i.
tés des hommes, afin que, vivant avec eux, il sur sa fuite en Egypte étant venu au monde
:
leur enseignât la voie qui conduit â Dieu ; le à dessein d'y vivre comme un homme, il ne 52.
second, glorieux et divin, sans aucun mélange devait pas s'exposer, à contre-temps, au dan-
44. des faiblesses humaines.quelques-uns Si ger de mort, non qu'il ne pût l'éviter d'une
d'entre les hommes sont nommés enfants de autre manière, mais parce qu'il fallait que sa
Dieu, ce n'est que par adoption et parce qu'ils vie fût ménagée avec un ordre convenable,
aiment la vertu, au lieu que Jésus est véri- Puis, venant à ses miracles, que Celse attri- ^s.
tablement Fils de Dieu, la source et le prin- buait à la magie, il dit : «La vertu et la force
4G. cipe de tout le bien qui est en eux. A sa nais- de Jésus se sont assez fait connaître par
sauce, tout l'art et tout le pouvoir des démons toute la terre où sont répandues les Eglises
furent déconcertés, leurs prestiges rendus de Dieu, qu'il a formées, après avoir retiré
vains, et leurs forces détruites ; les mages ne tous ceux qui les composent d'un nombre in-
le vinrent adorer que dans la persuasion qu'il fini de vices et de désordres ; son nom soulage
était Dieu, plus puissant que les démons et même encore ceux qui ont l'esprit troublé,
que tous ces esprits qui avaient accoutumé il chasse les démons et guérit les maladies
;
de leur apparaître. Selon Origène, l'étoile qui il n'y a rien de comparable à la modération,
leur apparut était d'une nouvelle espèce, à à la retenue , à la douceur que sa doctrine
peu près de même nature que comètes les produit en ceux qui en font sincèrement pro-
45. et les autres feux qui paraissent de temps en fession; bien éloigné de la vanité des magi-
temps, tantôt sous la figure d'une poutre, ciens qui se font une vaine parade de leurs
tantôt sous celle d'un tonneau, tantôt avec prestiges, et n'ont jamais pour but de chan-
une longue chevelure tantôt sous d'autres
, ger les mauvaises habitudes de ceux qui les
formes. admirent , il n'a rien fait d'extraordinaire 54.
47. 8. Origène justifie ensuite le choix que qu'en vue de corriger les mœurs de ceux qui
184 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
étaient les témoins de ses miracles : la nais- rement attaché. Il apporte ensuite plusieurs Pag. e:i
sance de Jésus étant telle qu'elle est décrite preuves des deux natures en Jésus-Christ, et ' '
dans nos Livres saints, on ne peut nier que dit qu'on ne doit pas séparer le Fils de Dieu
son corps * n'ait quekiue chose de plus divin d'avec Jésus, parce que, depuis mystère le 6i.
que les autres et ne puisse même, en un sens, de l'Incarnation, le corps et l'àme de Jésus
être appelé le corps d'un Dieu. » ont été très-étroitement unis au Verbe pour
Anaiys; 9. Daus Ic secoud livre Ori";cne
r^ fait voir,} ne faire qu'un tout avec lui. Les Prophètes, ce.
<lu livre 11
contre Celte contrc Cclsc, quc ccux dcs Juii's qui ont cru ajoute-t-il, avaient prédit la trahison de Ju-
Pag. 56. en notre Sauveur, n'ont pas, pour cela, aban- das et les persécutions que l'on a fait soufl'rir ci.
donné la loi de leurs pères, puisqu'ils l'ont à Jésus et à ses disciples ; il a prédit lui- 68.
observée depuis. On voit, en effet, par l'Épître même que son Evangile serait prêché dans
de saint Paul aux Galates *, que saint Pierre tout le monde, ce que l'on ne peut nier être
observait les coutumes })rescrites par la loi accompli, puisqu'il n'y a ® aucune sorte de
de Moïse, et dans les Actes des Apôtres ', qu'il personnes, ni Grecs ni Barbares, ni savants
observait encore la distinction des viandes en ni ignorants, qui n'en aient eu connaissance
pures et impures, lorsqu'il fut envoyé à Cor- et n'en aient suivi les maximes; sa prophétie co.
neille. Saint Paul allègue la loi de ses pères touchant la ruine entière de Jérusalem s'est
58. dans tous ses discours. En aurait-il agi de la trouvée accomplie sous l'empire de Vespasien,
sorte s'il l'eût abandonné ? D'ailleurs, il est dont le fils Titus ruina cette ville de fond en
certain que les cérémonies de la loi et les comble les païens mêmes, entre autres Phlé-
;
écrits des Prophètes servent d'introduction gon, dans ses Clironiques, attribuent à Jésus-
59. au christianisme; et c'est par leur moyen que Christ la connaissance de quelques événe-
l'on parvient à la connaissance « du mystère ments futurs, et lui rend témoignage que les
qui,étant demeuré caché dans tous les siècles choses étaient arrivées comme il les avait
passés, dans les oracles des Prophètes, a été prédites. A l'occasion des miracles de Jésus- 80, si, i
découvert parla manifestation de Jésus-Christ Christ, que Celse traitait d'illusions, voulant
notre Seigneur *. » Il disait lui-même à ceux qu'on les attribuât à l'art magique et à l'o-
qui le rejetaient vous croyiez Moïse,
: « Si pération des démons, Origène soutient qu'en 9t-
vous me croiriez aussi, car il a écrit de moi ^.» admettant quelque puissance au-dessus de la
60. Et saint Marc, l'un des quatre évangélistes, nature, s'il y en a une mauvaise, il faut qu'il
commence son Evangile en citant les écrits y en ait une bonne, encore supérieure, et par
du prophète Isaïe, et montre par là que les conséquent, s'il y a de faux miracles dont les
Ecritures des Juifs sont le commencement démous soient auteurs, il y en a de vrais qui
61. de l'Evangile. Comment se pourrait-il faire, viennent de Dieu. Les règles qu'il donne pour
demandait Celse, que les Juifs, sachant qu'il discerner les vrais des faux miracles, sont les
devait venir un juge au monde de la part de mœurs de ceux qui les font, leur doctrine et
Dieu, pour punir les méchants, l'eussent mal- les effets qui en suivent. Jésus -Christ n'a 61.
63; traité si indignement à sa venue ? C'est, ré- donné aux hommes que des préceptes utiles;
pond Origène, que, conformément aux oracles la doctrine qu'il leur a enseignée a eu la vertu
des Prophètes, ils ont vu Jésus-Christ sans le de les détourner des péchés auxquels ils s'a-
connaître, et qu'ils l'ont entendu sans com- bandonnaient, et il a pratiqué le premier ce
prendre que les choses qu'il leur disait étaient qu'il a enseigné. Le fruit de ses miracles a Lib
Mais, pour l'avoir maltraité, il ne leur reste une nation entière gouvernée par des lois
plus rien de ce qu'il y avait autrefois d'au- saintes et des mœurs pures, Jésus-Christ a
guste dans leur religion. Ils n'ont plus ni rassemblé toutes les nations dans la connais-
prophètes ni miracles, comme on en voit chez sance du vrai Dieu et dans la pratique de la
les chrétiens ; ils sont bannis de leur ville vertu- Tous deux ont eu besoin de miracles, 9i et 9!
capitale, sans avoir la liberté d'y aller ren- Moïse pour faire reconnaître sa vocation et
dre à Dieu le culte qui y était particuliè- établir le culte de Dieu ; Jésus-Christ pour
* Non ignorans tamen quod si quidem, ita ut scri- * Rom. ivi, 25. — » Joan, v, 46.
bitur, natus est, posset esse corpus quoque ejus divi- * Omnem enim humanam naturam vicit sermo prœ-
nius cceteris, atque etiam in quodam sensu Dei corpus. dicatus cum ullum genus ho-
potentia, nec videre est
Origen., lib. I contra Cels., pag. 54. minum a quo hœc doctrina recepta non sit. Lib. II,
> Galat. IV, 9. — » Act. x, 9. pag. 68 et 69.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XllI. — ORIGÈNE. 18o
prouver sa divinité et faire recevoir l'Evan- ses demandait qu'il fût aussi enseveli comme
Pag.95.
gile dans tout le monde. A qui persuadera- un homme. Ce qu'il y a de certain, c'est que,
t-on que, pour douner la force à des lois qui si les disciples de Jésus-Christ ne l'avaient vu
nous détachent, non-seulement du culte des ressuscité et n'avaient été persuadés de sa di- p^g^g^;
' •
démons, mais même de l'amour de tous les vinité, ils ne se seraient jamais mis dans l'es-
êtres créés, pour nous élever jusqu'à Dieu, ils prit d'affronter et de mépriser tous les périls
aient l'un et l'autre eu recours aux prestiges, qui les menaçaient d'une fin pareille à celle
aux charmes de la magie et au pouvoir des de leur maître, et d'abandonner leur patrie
Lit. I, démons? Les charlatans ne se mettent pas en pour aller prêcher partout, suivant son ordre,
^' '
'
peine de corriger les mœurs de ceux qui les la doctrine qu'il leur avait enseignée. Ils n'é- \^[
^
admirent, et ils n'en sont pas capables, étant talent ni des sages, ni des savants, mais des
eux-mêmes très-corrompus. Leurs prestiges publicains et des pécheurs qui n'avaient au-
ont eu peu d'effet. Theudas ne fut pas plutôt cune teinture des lettres. Car c'est ainsi que
mort, que ceux qu'il avait séduits se dissipé- l'Evangile nous les décrit et qu'ils se présen-
Lib. I, rent. Un certain Judas de Galilée, qui avait tent eux-mêmes. D'oùleurvenaientlaforce de
pag. 4V
d'abord attiré à sa suite un grand nombre de disputer contre les Juifs et contre les Gentils,
Juifs, ayant été puni pour les avoir séduits, et la vertude gagner leurs esprits, sinon de
demeura presque sans disciples. Ceux de Si- la puissance divine de celui qui, en les appe-
mon le Magicien abandonnèrent sa docti'ine lant à l'apostolat, leur avait dit*: Suivez-moi,
après sa mort, « et je crois, dit Origène, qu'à etje vous ferai des pêcheurs d'hommes ? Jésus- no.
peine en trouverait -on aujourd'hui trente Christ était donc plus qu'homme, puisqu'il a
dans le monde. » répandu sa doctrine et sa religion par toute la
95 et 96. 10. Quanta la résurrection du Sauveur, elle terre,malgré l'opposition des rois et des prin-
ne peut être soupçonnée d'aucun artifice. Il ces, du sénat et du peuple romain, et généra-
a été crucifié aux yeux de toute la Judée, et lement de toutes les puissances du monde,
son corps, ôté de la croix en présence d'un H. Selon Celse, la dispute des chrétiens avec Ajiaivse
grand nombre de témoins, a été mis dans le les Juifs était impertinente, puisque, con-
sépulcre; U en est sorti vivant, selon que les venant les uns et les autres que Dieu avait p^^ ^^a.
iji.
Prophètes et lui-même l'avaient prédit, et a prédit qu'il viendrait un certain Sauveur, ils
apparu à Pierre comme au premier des Apô- ne disputaient plus que sur le fait, savoir, si m.
très, puis à tous les douze, puis à cinq cents ce Sauveur prédit est venu ou non. Selon lui
100,
disciples réunis. Thomas, l'un des douze, n'a- encore, de même que les Juifs se revoltèi'ent
joutant point de foi au rapport de ceux qui contre les Egyptiens, à qui ils étaient rede-
avaient vu Jésus, ce Sauveur lui apparut, et, vables de leur origine, ainsi l'esprit de sédi-
l'ayant appelé par son nom, lui dit: Portez ici tion a porté une partie des Juifs à se séparer
voti'e doigt, et considérez mes mains: approchez des autres, pour suivre Jésus; c'est donc l'es-
aussi votre main et la mettez dans mon côté, et prit de sédition quia fait le premier établisse- ne.
ne soyez pas incrédule mais fidèle *. Enfin il se ment tant des anciens Juifs que des chrétiens;
98 fit voir aussi à Paul. Il est vrai que, depuis sa les chrétiens eux-mêmes, depuis qu'ils se sont
résurrection, montra pas en public, ni
il ne se multipliés, se sont divisés en diverses sectes, us.
indifféremment à tout le monde, comme au- et ne se sont d'abord unis ensemble que
ils
paravant. Il n'était pas même continuellement par l'amour du désordre, que par l'avantage ii9.
avec ses disciples, et quelquefois il ne leur qu'ils y trouvent et par la crainte d'être op-
apparaissait qu'après huit jours d'intervalle. primés. Gomme toutes ces accusations n'a-
99, Mais ce n'est pas à nous à approfondir les rai- valent aucune apparence de vérité, Origène
sons qu'il a eues de ne se pas faire voir de les réfuteen peu de mots. 1" Quand ou accor-
même manière avant et après sa résurrection, derait, par supposition, que Jésus n'est pas
102. Nous ne devons pas non plus demander pour- celui que les Prophètes ont désigné, il y au-
quel il n'a pas disparu étant sur la croix; ce rait toujours de l'utilité à rechercher le vrai
n'est pas à nous à prescrire à Dieu comment sens des prophéties, afin de se faire une idée
104
il doit faire ses miracles. D'ailleurs, puisqu'il bien distincte du Sauveur qu'elles promettent,
a bien voulu être attaché à une croix et y de savoir quelles sont les qualités et les ac-
mourir comme un homme, la suite des cho- lions qu'elles lui attribuent , et de connaître,
qui, parleurs lois, sont obligés à se laisser égor- ily a de quoi exercer les personnes les plus
ger comme des brebis, plutôt que de mettre à éclairées aussi bien que les plus simples. Ils 121.
mort leurs ennemis, se soient établis, par la ne doivent adorer ni Hercule, ni Esculape, ni
sédition, au milieu du peuple juif. Jésus-Christ Castor, ni PoUux, qui ne sont que des hom-
n'avait pas besoin d'user de violence pour se mes honorés sans raison du nom de dieu ; au
former une société la douceur de ses discours
: contraire, la puissance divine de Jésus-Christ i2k
était telle, qu'elle attirait non-seulement les s'est fait un nombre infini de
reconnaître par
hommes, mais aussi les femmes, qui, malgré Grecs et de Barbares, dont quelques-uns, pour 128.
la faiblesse et la retenue de leur sexe, le sui- montrer que leur foi produit en eux quelque
vaient dans le désert. Il n'y avait pas jusqu'aux chose d'extraordinaire, guérissent les malades,
enfants, qui ne s'y laissassent conduire avec sans y employer d'autres moyens que l'invo-
joie par ceux à qui devaient la naissance,
ils cation du grand Dieu au nomde Jésus, avec
ou qui n'y vinssent attirés par la vertu de sa de l'histoire
le récit de l'Evangile. «Car nous
divinité. — 4° Comme il y a eu parmi les Juifs en avons vu nous-même, dit-il, plusieurs qui
quantité de sectes, à cause des dififérentes in- ont été ainsi délivrés d'accidents fâcheux,
terprétations qu'on a données aux écrits de comme d'égarements d'esprit, de manies et
Moïse des Prophètes, il y en a eu également
et d'une infinité d'autres dont ni les hommes,
parmi les chrétiens, plutôt par le désir qu'ont ni les démons n'avaient pu les soidager. »
eu les savants d'entre eux d'en approfondir Tous les miracles que les poètes attribuent à 120 et scq.
les mystères, que par aucune suite de querelle Aristée, qu'Apollon fit mettre au nombre des
ou de sédition; s'il y en a eu d'autres qui aient dieux, à Autinoiis et aux autres divinités du
entièrement renoncé à Jésus - Christ, comme paganisme, ne sont que des fictions ; mais,
celle des ophites et des caïnites, «nous n'a- ajoute-t-il, «ce n'est pas une troupe d'impos- 133.
vons, dit Origène, rien de commun avec elles, teurs, qui, par déférence pour les ordres d'un
120. pas mèmele nom de Jésus. » — 5° L'amour du empereur, ou par complaisance pour les dé-
dérèglement ne peut être le nœud d'une reli- sirs de quelque autre prince, aient entrepris
gion dont la doctrine a pour but de corriger de faire passer Jésus-Christ pour Dieu : c'est
les mœurs de purifier les âmes. L'union des
et le Créateur même de l'univers qui l'a déclaré
chrétiens n'est pas non plus l'effet de la crainte digne de recevoir les hommages, non-seule-
d'être opprimés, puisque, depuis longtemps, ment des hommes qui voudraient se conver-
ils jouissent en repos des choses nécessaires tir, mais aussi des démons et des autres
à la vie. Au reste, l)ien loin de cacher leurs puissances invisibles. » Comme les miracles
principes, comme Celse les en accusait, ils qui rendaient témoignage à la divinité de Jé-
s'efiorcent d'en mettre les beautés dans tout sus-Christ n'étaient que trop souvent contes-
leur jour « Car la première chose que nous
: tés par les païens, Origène en prouve encore 135.
faisons, à l'égard de ceux qui se convertissent, ici l'authenticité, et montre que ceux qui les
c'est de leur inspirer du mépris pour les ido- ont mis par écrit ne peuvent être soupçonnés
les. Après cela nous élevons leur esprit jusqu'à de mensonge. C'étaient des personnes sincères, 193.
la connaissance du vrai Dieu, eu leur mon- leur piété et leur candeur se remarquent dans
trant qu'il n'est pas permis de rendre à des on n'y découvre rien qui sente
leurs écrits, et
créatures le culte qui n'est dû qu'au Créateur; le l'artifice, la fourberie ou l'im-
déguisement,
ensuite nous leur faisons reconnaître le Mes- posture. Des esprits comme ceux des Evan-
sie, en leur expUquant, à cet effet, le grand géhstes , qui n'avaient pas été formés dans
nombre d'oracles des anciens Prophètes qui les écoles des Grecs pour y apprendre les
I
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 487
subtilités de l'art, n'étaient pas capables d'in- ont donné toutes les preuves possibles de leur
venter des choses si propres d'elles-mêmes à ferme résolution dans la profession du cliris-
nous iuspirer, avec nous deman-
la foi qu'ils tianisme. C'est parmi ces derniers que Ton en
daient, la résolution d'y conformer notre vie; choisit pour leur confier le soin d'examiner
et il y a tout lieu de croire que Jésus n'a em- ceux qui souhaitent d'être admis dans l'as-
ployé de tels hérauts, pour publier sa doc- semblée. Ils pleurent, comme morts à Dieu,
trine, qu'afin qu'on ne put soupçonner qu'elle ceux qui se laissent vaincre par quelque pè-
se soutînt par l'illusion de quelques sophis- ché considérable, et, s'il leur arrive de donner
mes. D'ailleurs , les principes de notre foi des marques suffisantes d'un sérieux retour,
s'accordent parfaitement avec les premières ils les regardent comme ressuscites d'entre
et les plus communes idées de la nature, qui les morts ; mais ils beaucoup plus long-
sont ^ag. 48,
nous enseigne que Dieu n'est pas une matière temps à les recevoir qu'à admettre ceux qui
corruptible, et qu'il ne saurait être honoré se présentent la première fois. Ils leur ôtent
dans ces choses inanimées sous lesquelles même, pour l'avenir, toute espérance d'avoir
les hommes prétendent le représenter; que part au gouvernement de l'Eglise de Dieu,
les idolesne peuvent pas être des dieux, car parce qu'une telle chute les en rend indignes,
ces ouvrages de la main des hommes ne sont « donc pas une calomnie évidente,
N'est-ce
pas à comparer avec le grand Dieu qui a créé, conclut Origène, de nous mettre, comme Celse
qui soutient et qui gouverne tout l'univers, fait, au rang de ces scélérats qui font métier
L'àme, faisant aussi réflexion sur ce qu'elle d'amuser le peuple dans les places publiques?
est, et reconnaissant l'affinité qu'elle a avec Car nous ne négligeons rien pour que nos as-
Dieu, se sent naturellement portée à l'aimer, semblées ne soient composées que de person-
et, par une suite de cet amour, elle s'attache nés prudentes ; et, dans les discours que nous
fortement à celui qui a le premier appris à faisons en public, nous n'expliquons ce qu'il
tous les peuples ce qu'ils devaient croire sur y a de plus sublime et de plus divin dans no-
Dieu et sur son royaume, c'est-à-dire croire tre doctrine , que lorsque nous avons des au-
à Jésus-Christ, Dieu lui-môme et le Fils de diteurs capables de l'entendre. Nous le taisons
Dieu, la propre parole, la propre sagesse et et nous le cachons à ceux qui, selon le lan-
la propre vérité de Dieu. gage de l'Apôtre, ne sont pas assez forts pour
.137. 13. Un autre chef d'accusation de Celse se nourrir de viandes solides et ont encore
contre la religion chrétienne, c'est qu'on n'y besoin de lait; car il y a pour l'âme des plus
admettait que des ignorants, des fous et des avancés une nourriture plus substantielle que
142. étourdis. Nous les recevons, répond Origène, pour les personnes récemment initiées. Nous ii-i»
parce que notre doctrine promet de guérir donnons aux enfants des préceptes proportion-
ceux qui sont dans ce mauvais état ; mais nés à leur âge. Nous enseignons aux esclaves
nous y invitons aussi les savants, les sages et le moyen de devenir libres, par les nobles
les prudents, persuadés que le savoir et les sentiments que notre religion leur inspire ;
autres belles qualités de l'esprit ne sont pas nos docteurs déclarent hautement qu'ils
et
un obstacle à la connaissance de Dieu, mais sont redevables aux Grecs et aux Barbares ,
142. qu'elles servent plutôt â l'acquérir. Plus ré- aux sages et aux simples '. Nous prêchons à 145.
serves que les philosophes qui discourent en tous mépris des choses sensibles et périssa-
le
public, sans choisir leurs auditeurs, les chré- blés, et l'amour des biens spirituels et invi-
tiensexaminent avec soin le cœur de ceux sibles; nous faisons envisager l'union avec
qui demandent à être du nombre de leurs dis- Dieu et avec les siens, comme le souverain
ciples, et, avant de les recevoir dans leurs as- bonheur. Nous exhortons les femmes à n'être
semblées, ils les fortifient par diverses exlior- ni infidèles, ni fâcheuses à leurs maris, et à
tations dans le dessein de bien vivre. Quand se défaire de la folle passion des spectacles.
ils lesvoient dans l'état où ils les désirent, ils Nous nous opposons aussi aux désordres des
en font un ordre à part, car ils en ont deux jeunes gens, et nous représentons aux uns et
différents parmi eux: l'un, des initiés, qui ne aux autres, non-seulement ce que le péché a
le sont que depuis peu et qui n'ont pas en- de hideux en lui-même, mais encore les châ-
core reçu le sceau de leur purification, c'est- timents que lespécheurs auront à souffrir en
à-dire le baptême; l'autre, des personnes qui l'autre vie. Enfin, nous faisons tous nos ef- 14G.
1 Rom. I, 14.
488 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
fortspour obliger ceux mêmes qui sont itiibus de Dieu, en descendant sur terre, n'a pas été,
des maximes de la philosophie à servir Dieu comme le disait cet épicurien, d'y api)rendre
comme nous, leur montrant rexcellcnce et ce qui se passait parmi les hommes, mais
la pureté de notre culte. » Pour répondre à de ramener au troupeau les brebis perdues
Celse, qui non-seulement faisait passer les de la maison d'Israël, et d'ôter aux Juifs, à
docteurs de la religion chrétienne pour des cause de leur incrédulité, ce que l'Ecriture
gens grossiers, mais qui les accusait encore appelle « le royaume de Dieu *, » pour le
de n'iuviter à leurs mystères que des gens pé- donner aux chrétiens. « Il n'a pu, disait Celse, ^k- 109,
Pag.147. cheurs, Origène continue : « Il y a de la dif- descendre parmi les hommes sans devenir de
férence entre présenter à des âmes infirmes bon mauvais, d'heui^eux malheureux ce qui ;
les remèdes dont elles ont besoin et appeler ne convient pas à Dieu. » Origène répond que,
les espritsbien sains à la connaissance des comme Dieu, demeurant immuable en son
choses divines. Nous exhortons d'abord tous essence , ne laisse pas de s'abaisser par sa
les hommes à chercher leur guérison dans no- providence et par ses soins jusqu'aux choses
tre doctrine. Nous promettons aux pécheurs humaines, ainsi le Fils de Dieu n'a souffert
qu'elle leur apprendra à ne plus pécher; aux aucun changement en sa nature divine en
ignorants, qu'elle leur donnera de la science; descendant sur la terre. « Il avait, dit-il, la
aux simples, qu'elle les remplira d'une pru- forme de Dieu ; mais son amour pour les hom-
dence consommée, et à tous, qu'elle les con- mes l'a porté à s'anéantir, afin qu'ils pussent
*48. duira à la béatitude. Nous n'initions à nos le comprendre. Ce n'est pas qu'il soit devenu i"?o.
mystères que les personnes saines et pures, de bon mauvais, car il ne commit jamais au-
celles quin'ont rien à se reprocher depuis cun péché, ni que sa félicité soit changée en
longtemps, ou qui, après avoir profité de nos misère, puisqu'il s'est abaissé volontairement
exhortations, tâchent sérieusement de réfor- sans cesser d'être heureux; et, demeurant
mer leur vie. » toujours Dieu immortel et toujours Verbe de
14. Les chrétiens ne croyaient point, comme Dieu en son essence, il n'a rien souffert des
Celse les en accusait, que Jésus-Christ ne fût faiblesses ni des peines auxquelles il a bien
venu que pour les pécheurs, mais ils disaient : voulu assujettir le corps mortel et l'âme hu-
1*9. Dieu le Verbe, comme médecin des âmes, a maine pour l'amour de nous. »
qu'il a pris
été envoyé pour les pécheurs ; et comme doc- Après cela Origène fait voir que. Moïse étant i08
teur des divins mystères, il a été envoyé pour plus ancien qu'Homère et les autres écrivains
ceux qui sont déjà purifiés et qui ne pèchent profanes, on ne peut l'accuser d'avoir em- jse,
plus, quoiqu'ils aient péché auparavant ; car prunté d'eux ce qu'il a écrit de la création loi,
il n'y a point d'homme qui n'ait péché, et il du monde, du déluge, de l'embrasement uni-
est impossible même qu'il y en ait un seul, à versel, de la confusion des langues, de l'his- iii
la réserve de celui qui a paru en la personne toire de la tour de Babel, de la destruction
de Jésus -Christ, lequel n'a jamais commis des villes de Sodome et de Gomorrhe. La i75,
de péché. Il n'est pas possible non plus que comparaison que Celse faisait des chrétiens
l'homme, appuyé sur sa propre vertu, s'élève avec des chauve-souris, des fourmis et des
vers Dieu ; et, pour qu'il en obtienne miséx-i- vors, est ridicule et insoutenable ; car leurs n7,
corde, il est nécessaire qu'il s'abaisse devant lumières et leur piété les mettent beaucoup
lui, parle sentiment de ses crimes passés, avec au-dessus des païens, qui doivent bien plutôt
une vive douleur de les avoir commis et avec être regardés comme des vers et des fourmis,
la résolution de pratiquer toutes les vertus. puisqu'ils n'ont point de connaissance du
151, Au reste, quelque enfoncé que l'homme soit vrai Dieu, qu'ils n'adorent que des brutes et
dans péché, sa conversion n'est pas impos-
le se plongent dans toutes sortes de vices; il n'y isi
sible à Dieu, elle ne lui est pas même fort dif- a pas plus de raison de comparer les Juifs à
153. fîcile; et étend sa miséricorde à tous ceux
il ces vils animaux, eux qui ont fait voir dans
154. qui pleurent sincèrement leurs fautes et ont leur conduite une image de la vie céleste, en
un désir sincère de changer de vie. ne reconnaissant d'autre Dieu que le Souve-
^^' O^^oène continue, dans le livre IV, de rain, en ne souffrant parmi eux ni peintres, 182
duiivrîv'
répondre aux calomnies de Celse contre la ni sculpteurs, dans la crainte de donner lieu à
'
religion chrétienne, et montre que le dessein l'idolâtrie, bannissant de leur État toute occa-
siou de débauches ;en choisissant, pour exer- suivre les coutumes deleurpays; queles chré-
cer la justice, les personnes dont les mœcirs tiens, au contraire, qui ne sont point, comme
étaient les plus pures; en s'occupant les jours les Juifs , un corps de nation, avaient eu tort
de sabbat et d'autres fêtes à s'instruire dans d'abandonner les leurs pour suivre la doctrine
la loi, et en gardant un ordre merveilleux de Jésus. Origène détruit ce principe par l'ab- Pa5.2.-)5.
serpent qui séduisit Eve , la fécondité de Sara dispenser d'approuver la coutume des Scythes
192- dans un âge avancé, les moyens dont Rebecca qui, selon les lois de leur pays, font mourir
se servit pour faire tomber sur Jacob la bé- leur propre père ; et celles des Perses, qui
nédiction qu'Isaac destinait à Esaii, l'inceste permettent à un homme d'épouser sa mère
de Loth et plusieurs autres circonstances ou sa fille. A l'égard des chrétiens, il en est 255.
rapportées dans nos Livres saints. Origène d'eux à peu près comme des philosophes, qui,
en soutenant que la plupart
justifie ces récits ayant appris à s'élever au-dessus des opinions
doivent s'entendre dans un sens allégorique, vulgaires et superstitieuses, les quittent sans
et en faisant voir que ce que les poètes ra- se mettre en peine si les lois de leur pays les
content des dieux et des héros du paganisme, autorisent. « Au reste, ajoute Origène, il y a 25C.
mérite beaucoup plus la censure. Il prouve deux lois: la loi de nature, dont Dieu est
ensuite que Dieu également le créateur
est l'auteur, et la loi écrite, par laquelle les so-
du corps et de l'âme, mais qu'il n'est point ciétés politiques se gouvernent. Il est juste
l'auteur du mal; que si l'Ecriture lui attribue que, tant que la loi écrite n'est point contraire
quelque passion humaine, comme la colère à la loi de Dieu, elle soit observée par ceux
210. contre les impies, cela ne doit pas s'entendre qui composent une société, et qu'ils ne s'en
316. à la lettre, mais d'une certaine conduite dont éloignent pas sous prétexte de quelques lois
il use pour châtier plus rudement ceux qui étrangères. Mais lorsque la loi de la nature, 259.
319. ont commis de grands péchés, ou pour les c'est-à-dire la loi de Dieu, ordonne des cho-
engager à se corriger. ses contraires à la loi écrite, la raison veut
17. Celse ne voulait pas que l'on crût qu'un que l'on obéisse à Dieu. » Il fait l'éloge de la aeo.
Dieu, ni un Fils de Dieu fût descendu sur la religion des Juifs avant la venue de Jésus-
233. terre, ni qu'il y descendit jamais. Pour leçon- Christ, et les justifie sur certains reproches 263.
vaincre du contraire, Origène le renvoie aux que Celse leur faisait, comme de se croire 264.
prophéties qui marquent la venue du Messie plus saints que les autres, parce qu'ils se fai-
et à ce que les chrétiens disent de Jésus-Christ, saient circoncire. En accordant à Celse que Je- ges.
234. Celse ajoutait que les Juifs, sans contrevenir sus-Christ n'est ni le seul, ni le premier qui 200.
à leurs lois, adoraient le ciel, les anges, le ait été envoyé, il en tire cette conséquence,
soleil, la lune et les étoiles *. Origène répond qu'il a donc aussi été envoyé de Dieu comme
que, la défendant ces sortes de culte^, ceux
loi les autres il avoue encore que les chrétiens et
:
qui l'ont observée n'ont jamais adoré que les Juifs reconnaissent un même Dieu, qu'ils 271.
236. Dieu seul; s'il y en a eu qui se soient laissés confessent également les uns et les autres que
aller au culte superstitieux des anges et des les livres, qu'ils nomment sacrés, sont l'ou-
astres, ils ont par là attiré la colère de Dieu vrage de l'esprit de Dieu ; mais qu'ils diffèrent
241 sur eux et sur toute leur nation. Il fait voir entre eux dans l'explication de ces livres et
242. ensuite, par les oracles des Prophètes, que dans leur manière de vivre. Une nie pas non
Dieu fera passer tous les hommes par le feu ; plus qu'il n'y ait diverses hérésies parmi les 27-2.
que ce feu n'épargnera que ceux qui seront chrétiens Mais bien loin, dit-il, de traiter
: «
parfaitement purifiés dans leur doctrine, dans indignement ceux qui ont des sentiments cou-
leurs mœurs et dans leur entendement ; mais trairas aux nôtres, nous faisons notre possible
qu'il brûlera chacuu à proportion de son pé- pour les ramener à la vraie doctrine. S'ils
2*3- ché. Il ne s'étend pas beaucoup à prouver la s'obstinent dans leur erreur, nous observons
résurrection des morts, parce qu'il avait déjà l'ordre * qui nous a été donné à leur égard :
traité cette matière dans d'autres écrits. Évitez celui qui est hérétique, après l'avoir
248.
18. Celse prétendait qu'il était utile aux ai>erf« «ne e^ rfcM^^ /02s, sachant que quiconque
Juifs, comme à tous les autres peuples, de est en cet état, est perverti et qu'il pèche,
*^- ^^ sixième livre est un parallèle des disait que Jésus-Christ avait puisé plusieurs
du ifx"reî?
" '
«„ écritsde Platon avec ceux des Prophètes et points de sa doctrine dans les écrits de Platon,
des Apôtres. Origène y fait voir que, si les écri- entre autres cette maxime : « Il est plus aisé
vains sacrés ne se sont point servi d'un style qu'un chameau passe par lé trou d'une ai-
aussi fleuri et aussi étudié que celui de ce guille, qu'un riche entre dans le royaume du
philosophe, c'est qu'ils n'ont pas eu seulement ciel. » Comment Jésus, qui était né et avait
en vue de dire des choses véritahles, ils ont été élevé parmi les Juifs, et qui, bien loin d'ê-
voulu aussi les dire d'une manière propre à tre instruit dans les lettres grecques, ne l'était
attirer la multitude, afin qu'étant ainsi gagné pas même dans de son pays, au-
les sciences
et attiré, chacun pût ensuite s'élever, selon rait-il lu les livres de Platon? Les Prophètes 288.
ses forces, aux mystères cachés sous la siin- n'ont rien emprunté non plus de ce philoso- aai.
277. plicité de la lettre. Quoique ce philosophe ait phe, puisqu'ils ont vécu avant lui, et qu'ils guj.
eu des pensées assez nohles de la puissance ont dit des choses beaucoup plus excellentes
éternelle de Dieu et de sa divinité, il a ignoré que celles que l'on trouve dans ses écrits. Ori- 29c.
279. la manière dont on doit l'adorer; ce que Moïse gêne fait ensuite une peinture des mystères gy*.
et les Prophètes ont dit de Dieu, ils l'avaient de certains hérétiques, nommés ophites, parce 333
même non des livres de qu'ils prenaient la défense du serpent qui sé-
appris de Dieu et
duisit Eve, et dit que l'on ne peut, sans in-
Platon, écrits longtemps après eux; il n'est
pas vrai que les chrétiens exigent, do ceux justice, leur donner le nom de chrétiens,
qui désirent se convertir, une foi sans exa- puisqu'ils ne reçoivent personne dans leur
chacun assemblée, qu'ils ne lui aient fait prononcer
282. meu ; « mais nous instruisons, dit-il,
que nous nous contentons d'exhorter à croire, tend sur la signification du uom de diable, sur
parce qu'ils ne sont pas capables de plus; les quaUtés que doit avoh l'Antéchrist; puis,
d'autres que nous tâchons de convaincre par venant aux objections que Celse faisait contre
des démonstrations, apportant sur chaque l'histoire que Aloïse a écrite de la création du
point de notre doctrine les raisons les plus monde, de la propagation des hommes, de 309 et scq,
Platon à Hermée et à Corisque, où ce philo- non plus que celles qu'il proposait au sujet de
sophe disait: «Vous eu prendrez à témoin le la naissance corporeUe de Jésus-Christ, de sa 325.
Dieu de l'univers, l'arbitre des choses présen- forme extérieure et de sa mission. Sur ce 329.
tes et futures, avec le Père et le Seigueur de dernier article, il dit que si Jésus-Christ n'a
cette première et souveraine cause; lequel paru que dans un petit coin du monde, comme
nous connaîtrons tous clairement autant que leproclamait Celse, c'est qu'il devait paraître
des hommes bienheureux en peuvent être parmi ceux à qui le Messie avait été promis,
capables, si nous nous appliquons comme il qui lisaient les prophéties, qui avaient la con-
308. faut à l'étude de la philosophie. « Il se sert naissance d'un seul Dieu; que cela n'a pas
ailleurs du même passage pour montrer que empêché que ce soleil de justice ne répandit
Platon a reconnu pour Fils de Dieu celui qui ses rayons, dans toutes les parties de l'univers,
a fait l'univers. sur les âmes de tous ceux qui ont ouvert les
285. 20. Celse reconnaissait qu'il y avait parmi yeux à sa lumière.
les chrétiens de la modestie et de l'humilité. 21. Dans le septième livre Origène dit que. Analyse
Origène répond que l'humilité dont les chré- de l'aveu même d'Aristote, d'Epicure et autres
tiens font profession, ne consiste pas à s'abais- sages du paganisme, les oracles que la Grèce
ser d'une manière abjecte et indécente, à se admirait, n'avaient rien de réel ni de sohde :
traîner sur les genoux, à se prosterner, à por- une preuve que leurs prétendues prophé-
ter un habit sale et à le couvrir de poussière; tesses n'étaient pas animées d un esprit divin,
s'il s'en trouve d'assez simples pour mettre c'est qu'en prononçant leurs oracles, elles ne
l'humilité dans cet extérieur, c'est qu'ils n'ont se connaissaient plus et paraissaient comme
pas bien compris la nature de cette vertu; possédées. Mais il n'en était pas ainsi des
mais elle consiste à s'abaisser sous la main Prophètes du peuple juif. Eclairés par l'Es- Pag.334.
toute-puissante de Dieu, et à méditer les vé- prit divin, ils voyaient beaucoup plus clair
rités de la rehgion qui sont véritablement que de coutume, dans le moment du com-
[ITT« SÎÈCI.E.1 CHAPITRE Xin. — ORTGÈNE. 101
merce étroit qu'ils avaient avec Dieu. Ainsi mais en chercher un plus sublime, caché sous
leur âme était toute pénétrée de lumières, l'écorce de la lettre; ainsi, par les richesses
et leur corps même était comme mort à ce que l'on doit rechercher, il faut entendre les
qui se nommeparmi nous les pensées et les vertus, et par les ennemis que Dieu nous
Pag.33D. sentiments delà chair. D'ailleurs, ceux dont commande de détruire, nous devons enten-
Apollon et les autres divinités du paganisme dre les vices que chacun de nous doit faire
se servaient pour rendre des oracles, étaient mourir. Car, de croire, par exemple, que Dieu
336.
(jgg ggjjg (jg mœurs déréglées. Au contraire. ait promis des richesses temporelles aux gens
Moïse, Jérémie et les autres prophètes des de bien, ce serait une illusion visible, puis-
Juifs étaient des hommes sages avant d'être que c'est une chose constante que les plus
inspirés de Dieu, et ils n'ont été choisis, pour saints d'entre les Juifs et les Prophètes mêmes
être les dépositaires des saints oracles, qu'à ont vécu dans la dernière pauvreté, et qu'ils
cause de de leur conduite, de leur
la sagesse ont été persécutés et abandonnés. Il avoue rag.2is.
fermeté inimitable et de leur intrépidité dans néanmoins que, dans les choses essentielles
les plus grands périls et à la vue de la mort au gouvernement de la république des Juifs, 249.
337. même. Ce sont là les Prophètes qui, prophé- la loi de Moïse était différente de celle des
tisant de la part de Dieu, ont prédit ce que chrétiens ; ainsi ils avaient droit de faire la
devait être Jésus-Christ, et une infinité d'au- guerre à leurs ennemis, de combattre pour
tres choses, plusieurs années avant qu'elles leur patrie et de punir soit de mort ou de toute
338. arrivassent. Ils proposaient ouvertement et autre manière les adultères, les meurtres et
sans voile tout ce que leurs auditeurs avaient autres crimes semblables. Autrement c'eût été
intérêt d'entendre sur-le-champ, et ce qui les exposer à une entière et inopinée destruc-
pouvait servir à la correction de leurs mœurs; tion, et donner heu à leurs ennemis de venir
mais, pour les choses mystérieuses et plus fondre sur eux comme sur des gens que leur
subhmes, qui demandaient une intelligence propre loi empêchait de se défendre. Au con-
330. au-dessus du commun, proposées
ils les ont traire, il n'est point permis aux chrétiens de
sous des énigmes et sous des allégories qui tuer leurs ennemis, ni de condamner au feu
ne peuvent être développées que par ceux ou de lapider ceux qui, pour avoir violé leurs
qui sont sages et savants en Jésus-Christ. lois, seraient dignes de supplices.Il prouve, ^^q ^.t j^q,
340. 22. Pour affaiblir la forcede l'argument par l'autorité des Ecritures, que le séjour des
que l'on tirait des prophéties en faveur de la bienheureux est dans le ciel, où est aussi la
religion chrétienne, Celse disait: « Si les Pro- Jérusalem céleste, dont celle qui était dans la
phètes avaient prédit que Dieu dût être esclave Judée n'était que la figure. Quoique notre 253.
ou malade, ou qu'il dût mourir, faudrait-il âme, qui, de sa nature, est immatérielle et in-
que, pour justifier sa divinité, il fût esclave visible, n'ait pas besoin
de notre corps pour
341. ou malade, ou qu'il mourût? » Origène répond conuaitre Dieu, puisque ce n'est pas l'œil du 357.
que cette supposition est absurde, parcequ'elle corps qui connaît Dieu, mais l'entendement,
établit pour vrais deux raisonnements dont ce corps ne laissera pas après la résurrec-
,
„ „„.
Pti(:,384.
dre a Jésus-Christ le même
culte qu us ren- sées, est uni â Dieu. Sachant qu'il faut celé- Pap.soa.
daient à Dieu. Origène répond par ces pa- brerla pàque,en mangeant la chair du Verbe,
38". rôles de Jésus-Christ « Mon Père et moi nous
: il n'est jamais sans faire cette fête, et celle
sommes une même chose. Mon Père est en de la Pentecôte, lorsqu'il s'applique à la prière
moi, et je suis dans mon Père'.» Après avoir pour se rendre digne de participer aux dons
remarqué qu'on ne pouvait inférer de ces pas- de Dieu. Si les chrétiens refusent de prendre
sages l'unité des personnes, non plus que de part aux sacrifices et de manger des viandes 395.
celui des Actes des Apôtres où il est dit «que immolées aux idoles, c'est qu'ils sont persua- 396.
38C. toute la multitude de ceux qui croyaient n'é- dés qu'on ne peut le faire sans crime et sans
tait qu'un cœur et qu'une âme*, » il ajoute: communiquer avec les démons; par une sem- 397.
« Nous adorons donc un seul Dieu, le Père et blable raison, ils s'abstiennent des viandes
le Fils. Nous adorons le Père de la vérité, et étouilées, soit à cause de la défense que les
qui est la vérité, les considérant comme
le Fils Apôtres en ont faite, soit parce qu'on tient
deux choses, par rapport à leur subsistance que le sang des animaux est l'aliment des dé-
ou personne, mais comme une seule et même mons ; au reste, ils ne croient pas qu'il faille
chose à l'égard de leur accord, de la confor- s'abstenir de la chair de tous les animaux,
mité de leurs sentiments et de la parfaite ni que les choses nécessaires à la vie nous
union de leur volonté. Celui qui a vu le Fils S soient fournies par les démons, mais par les 398
qui est la splendeur de la gloire de Dieu et saints anges, établis pour avoir l'inspection
le caractère de sa substance, a vu Dieu, en sur toutes choses, pour donner la fécondité à
1387. voyant celui qui est l'image de Dieu, celui qui la terre, régler la température de l'air et le
étant engendré par le Père, est, pour cet effet, cours des eaux: les démons, au contraire, ne
nommé son Verbe et sa sagesse, la vérité et sont employés qu'à tourmenter les hommes
^388. la justice. Un ne peut avoir qu'un
tel Fils par la famme, la peste et les autres fléaux,
Père éternel; mais nous sommes bien éloi- dont Dieu les rend les ministres, soit pour
gnés de croire que le Fils soit plus puissant éprouver les justes, soit pour corriger les
que le Père. Il lui est inférieur, selon qu'il méchants.
nous l'a appris lui-même , en disant Mon : 26. Un autre reproche que Celse faisait 402.
l'emportent inûniment sur les temples bâtis Grecs en grec, les Latins en latin, et ainsi
de la main des hommes pour le culte des des autres. Dieu, qui est le maître de toutes
392. choses insensibles; que les fêtes que les païens les langues, entendant ceux qui le prient en
aux princes, en demandant à Dieu qu'il dé- rompu ses écrits et de ce qu'on lui en avait
427. truise les puissances ennemies, est beaucoup faussement attribué un. Eusèbe rapporte « un
plus efficace que celui des soldats qui vont à fragment d'une autre Lettre d'Origène, où il
l'armée et qui tuent autant d'ennemis qu'ils se justifiait contre ceux qui le blâmaient
d'a-
peuvent; travaillent pour le bien commun
ils voir employé trop de temps à étudier la
phi-
de leur patrie, non-seulement par
et le service losophie. 11 en écrivit une, vers l'an 236
au
leurs prières, mais encore par la sainteté de pape ' Fabien
à d'autres évêques pour leur
et
leur vie et en enseignant aux autres à mépri- faire voir la pureté de sa foi; une à »
Bérylle
ser les voluptés et à servir religieusement le évêque de Rostres, vers l'an 244; une à l'em-
42S. Dieu protecteur de tous les États; s'ils refusent pereur » Philippe et à l'impératrice Sévère,
de porter les armes et d'exercer les magistra- vers l'an 245 ; une à
«"
Tryphon, son disciple'
tures, c'est pour se réserver à des devoirs etquelques-unes '« où il faisait une relatiou
plus divins et plus nécessaires, qui regardent exacte des supplices qu'on lui avait fait souf-
le service de l'Eglise et le salut des hommes, frir durant la
persécution de Dèce. Ses au-
Surla de l'ouvrage, Origène prie Am-
fin très Lettres sont perdues, etnous n'en savons
broise de chercher et de lui envoyer l'écrit ni le sujet, ni le nom des personnes à qui
que Celse avait promis , pour montrer de elles étaient adressées •^
quelle manière il fallait vivre selon ses rè- Origène nous assure '*
2. lui-même qu'il Ouvrages
gles; « afin, dit Origène, que nous renver- avait fait un p"""^'
traité sur le Libre Arbitre. Saint
n.
i3
m HISTOIRE r.ÉNI<:nALE DES AUTEURS ECGLIÎSI ASTIQUES.
Anatole de Laodicce lui en attribue un au-
' droits de.seç écrits oii il les a combattus.
tre sur la Pugue, dont il rapporte un passage, Théodoret remarque ®encore que l'on attri-
ajoutant (juc l'auteur était très-versé dans la buait à Origène un livre contre Artémas et
science du calcul *. Ces deux ouvrages ne les théodotiens, intitulé : Le Petit LaOï/rinthe
6ont pas venus jusqu'à nous, non plus que le mais il ajoute que le style faisait assez voir
Monobiblin ', ni V Explication * des noms pro- qu'il n'était pas de lui. Nicéphore' est le seul
pres du Nouveau Testament, que saint Jé- qui ait dit qu'Origène avait composé des trai-
rôme compte parmi les ouvrages d'Origène ^. tés particuliers pour réfuter un certain Mar-
L'auteur dos " Questions aux Orthodoxes dit celle de Galatie et Porphyre. Nous ne dirons
qu'il avait aussi donné une explication de rien de la conférence qu'il eut avec Bassus,
toutes les mesures marquées dans l'I^xriture ;
parce qu'il n'est pas certain s'il l'a mise par
peut-être que cet écrit n'était pas différent de écrit. Il écrivit celles qu'il eut avec un héré-
celuioù Origéne expliquait les noms propres siarque *° de la Palestine, et avec Bérlyle, évê-
du Nouveau Testament. Il ne l'avait entrepris que *' de Bostres; mais elles sont perdues,
que pour achever celui dans lequel Philon de môme que le dialogue " où il disputait
donnait des explications des noms propres de contre un nommé Candide, de la secte des
l'Ancien Testament. Saint ' Pamphile et saint valcntiniens. On dit " que l'on conserve à
Epiphane disent qu'Origèue a confondu tou- Florence un traité imparfait d'Origène contre
tes les hérésies par ses écrits : Théodoret dit toutes les hérésies. Nous avons aussi perdu
la même chose, et remarque en particulier les dix livres des Stromates, qu'il avaitcom-
qu'il a écrit contre Simon et Ménandre, con- posés à l'imitation de Clément d'Alexandrie **.
tre Basilide, contre Valentin, contre Hermo- Saint Jérôme met cet ouvrage entre ceux
^'^
gène. contre les encratites, contre Marcion, qui renfermaient le plus d'erreurs, principa-
contre les nazaréens, contre les elcésaïtes, lement sur la résurrection, ce qui était cause
contre les nicolaïtes. Mais il n'est pas aisé de que personne n'osait le traduire. Origène '® y
juger si ces Pères attribuent à Origène des comparait les dogmes de la religion chré-
traités exprès contre chacun de ces héréti- tienne avec ceux de la philosophie, et con-
ques, ou s'ils parlent seulement de divers en- firmait toutes les maximes du christianisme
tem sui, ut salvetur aut pereat. De quibus plenitis a tom. III, pag. 395-97. {L'éditeur.) — 6 Justin., ad
nobis in eo libella ubi de arbitrii libertate disserui- Orthodox., quaest. 86.
mus, pro viribus singula quœque discussa sunt. Orig., ^
Pamphil., in Apolog.; Epiphan., HœresiGii, num. 5;
lib. VII in Epist. ad Rom., cap. 9, pag. 377, tom. II Theod., lib. I Hœretic, Fabular., cap. 2, 4, 19, 21,
Geneb. 25 lib. II, cap. 2, 7, et lib. III, cap. 1.
;
1 Sed et Origenes omnium eruditissimus, et calculi 8 Contra istorum [Theodoti et Artemœ) hœresim
componendi perspicacissimus, libellum de Pascha lu- conscriptus est Parvus Labyrinthus, quem nonnulli Ori-
culentissime edidit. Anatol. Alexand., Prœfat. ad Can. genis opus esse putant, sed eos qui hoc dicunt stylus
Pasch., pag. 439. redarguit. Théodoret., lib. II Hœreticar. Fabular.,
* Le Catalogue le compte aussi. {L'éditeur.) pag. 220.
'. Vultis noscere quanta ingenii sui relique r it monu- 8 Indicant hoc quœ Origenes ad Galatam Marcellum
menta Sequens titulus ostendit : scripsit in Genesim
? composuit, et quœ ad Porphyrium quem diximus lu-
libros tredecim... item Monobiblia, de Principiis libros culenter rescripsit libellis de rébus ejuscemodi editis^
quatuor, de Resurrectione libros duos, et alios de Re- qui/jus propter copiam verborum veritatis effecit, ut
surrectione dialogos duos. Hieronym., Epist. 29 ad illi quod contradicerent non haberent. Niceph., lib. X
Paulam. Ou croit que, par le terme de Monoinblia, Hist. eccles., tom. II, pag. 88.
saint Jérôme entend divers ouvrages qui n'étaient *o Pamphil., in Apolog. pro Origen. H Euseb., —
pas assez longs pour être divisés en plusieurs tomes. lib. VI, cap. 33.
* Ac ne forte consummato œdificio quasi extrema ^^Habetur dialogus apud Grœcos Origenis et Candidi,
déesse t manus, Novi Testamenti verba et nomina in- valenlinianœ hœreseos defensoris , in quo duos Anda-
terpretatus sum, imitari volens ex parte Origenem, batas digladiantes inter se spectasse me fateor. Hie-
quem post Apostolos ecclesiarum magistrum , nemo ronym., lib. II contra Rufin.
nisi imperitus negat. Inter cœlera enim ingenii sui 13 Mabill., lier Italie, pag. 168. [C'est celui des
prœclara monumenta, etiam in hoc laboravit, ut quod Philosophumena.]
Philo quasi judœus omiserat, hic ut christianus, irn- 1' Le Catalogue de saint Jérôme compte les dix
pleret. Hieronym., Prœf. ad lib. Nominum hebraic. livres de Stromates immédiatement après les Extraits
L'auteur des Questions aux Orthodoxes cite le même sur le Lévitique et parmi les ouvrages sur l'Écriture
ouvrage d'Origène, quaesl. 82 et 86. sainte ce qui ne parait pas s'accorder avec l'opinion
;
* D. Pitra publie, dans le vol. III du Spicilége, des reçue, que les Stromates traitaient des livres des an-
fragments et des interprétations bibliques d'Origène. ciens philosophes. {L'éditeur.)
Il les a tirés d'un ancien glossaire d'Ansileubus, 1* Hieronym., Epist 38 ad Pammach. — 1" Idem,
auteur du VIII» siècle. Spicilegium solemniacense, Epist. 83 ad Magn.
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 195
par des passages tirés de Platon, d'Aristote livres sur la Résurrection, de son Commentaire
et des autres philosophes célèbres. Dans le sur le psaume i", et de ses œuvres mêlées. Ori-
livre X il donnait une explication abrégée de gène semble ® pi-omettre, dans son tome II
la prophétie de Daniel touchant le temps de des Commentaires sur saint Jean, un traité de
la venue du Messie, et de YEpltre aux Calâ- l'Ame, où il avait dessein de parler de son ori-
tes. Saint Jérôme rapporte ces deux endroits, gine et d'examiner à fond ce que l'on disait
l'un dans son Commentaire sur le chapitre ix sur sa propagation, sur la métempsycose et
de Daniel, l'autre sur le cinquième de l'Epî- sur plusieurs autres questions touchant cette
tre aux Galates. Il cite un endroit du livre V matière. Mais il ne parait pas qu'il ait exé-
sur le chapitre xxii de Jérémie, et un autre cuté ce projet, et saint Pamphile dit en *° ter-
du sixième, sur le mensonge, dans son livre P"" mes exprès qu 'Origène n'a fait aucun traité
contre Rufin. Origène écrivit ses Stromates à de l'Ame ''.
Alexandrie », sous le règne d'Alexandre, entre 3. Nous avons parmi les oeuvres d'Origène Dialoguea
contie les
les années '222 et 231. Il composa dans la trois Dialogues contre les marcionites, sous le niiM ioniles,
fuusiemeiit
même ville ^ deux livres sur la Résurrection. nom d'Adamance. Le nom d'Origène ne s'y (litribiiés
Oiigèiie.
à
Il les citait ' dans ses tomes sur les Lamenta- trouve en aucun endroit, si ce n'est dans la
tions, et en transcrivit quelque chose dans
il préface de l'ouvrage, où l'auteur remarque
ses * livres des Principes, écrits avant l'an 231 qu'Adamance se nommait aussi Oiigène. Mais
Saint Pamphile rapporte ^ quelques passa- on convient •* que cette préface est une pièce
ges de ces deux livres pour justifier la doc- ajoutée après coup ; aussi n'est-elle pas de la
trine d'Origène touchant la résurrection. On même manière dans tous les manuscrits, et
en trouve aussi quelques - uns dans saint '^
ily en a où on ne la trouve point du tout.
Méthode, qui, ayant remarqué dans ces deux C'est ce qui donne lieu de juger que l'auteur
livres des sentiments peu conformes à la vé- de ces Dialogues est différent d'Origène. Le
rité, leur en opposa deux autres qu'il intitula témoignage de cet Adamance le prouve beau-
aussi de la Résurrection. Origène écrivit ' en- coup mieux " il dit qu'il écrivait sous le rè-
:
core deux dialogues sur la même matière. Pro- gne d'un prince qui gouvernait avec plus de
bablement c'est au deuxième de ces dialo- prudence que ses prédécesseurs, qui aimait
gues que saint Jérôme fait allusion, lorsqu'il ceux qu'ils avaient haïs, qui relevait ce qu'ils
cite le livre IV d'Origène sur la Résurrection^ ; avaient abattu, qui ruinait les temples et les
car nous n'en connaissons point d'autres que idoles qu'ils avaient adorées. Or, de tous les
ceux dont nous venons de parler. Il rapporte princes qui ont régné avant Constantin, il n'y
au même endroit divers sentiments d'Origène en a aucun à qui cet éloge puisse convenir.
sur la résurrection, qu'il dit être tirés de ses Car, quoique l'empereur Philippe fût très-fa-
1 Euseb., lib. VI, cap. 24. — « Idem, ibid. — oraiio de anima copiosa aîioqui et ad interpretandum
* Idem, ibid. —
Lib. * II Princip., cap. 10. —
^ Apo- difficilis, si undequaque ex /lis quœ
colligi debeat
log. Pamphil., pag. 488, tom. I Genebr. —
^ Epiph., sparsim posita sunt in Scripturis, proprium requirit
Hœres. 64. opus. Origen., in Joan., pag. 108, tom. II Huet.
^ Hieronym. Episf. 29 ad Paulam.
, — * Idem, 10 Denique in tam multis et tam diversis ejus {0)'i-
etiam quid injunctum sit vitœ uniuscujusque animœ, fragments d'Origène cités par Victor, évêque de Ca-
atque de ejus recessu ex hac vita, et an contingai il- poue. Ces fragments nous font connaître quatre
lam denuo in corpus, an non, et eadem periodo, et nouveaux ouvrages d'Origène l" une lettre d'Ori-
:
secundum subjectum et qualitatem, et num semper eo- ou cite un passage du livre III; l'ouvrage sur la Pâ-
dem corpore, usura sit, an immutatura illud. In qui- que, dont on cite un passage du livre lef 3° une épî-
;
tus etiam illud quid proprie sit iranscorporatio, quid- tre d'Origène à Firmilien. [L'éditeur.)
que fiœc différât ab incorporât ione, indagare necesse •2 Westenius, JVo^ in dialogo Adamant., pag. 6.
erit, et num sequafur ut qui astruit mutanda corpora, 13 Melius enim et contra quam illi reges, hic
Plus im-
servet mundum incorruptibilem. In quitus necessario perat. Quœ enim illi dissiparunt, restaurât isie; quos
ponendœ erunt rationes eorum qui volunt ea Scriptu- oderunt illi, diligit iste; quœ illi fana et idola in ho-
rarum auctoritate, ut anima simul cum corpore se- nore habuerunt, hœc iste subvertit. Adamant., sect. 1
minetur, et qum sequuntur ipsas : et, ut semel dicam, Dialog., pag. 30.
196 HISTOIRlî GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
voiable aux chrétioiis, on n'a aucune preuve rapporte deux médailles de leur apothéose \
certaine qu'il les ait aimés 3US(ju'à rétablir Leur aurait-on rendu cet honneur à Rome,
leurs éfçlisps '
J)rùlécs durant la persécution s'ils y eussent été connus pour chrétiens ? 11
de Maximin, ni (pi'il ait renversé les temples faut encore ajouter que l'auteur des Actes de
faux dieux. Il est vrai qu'on
et les idoles des saint Ponce commet une faute insoutenable
dans les Actes de saint Ponce * que l'em-
lit touchant l'année de la conversion de ces deux
pereur Philippe, ayant été converti par le l)rinces ; car il la met au temps de la solen-
moyen de ce saint martyr, détruisit plusieurs nité de l'an 1000 de Rome ^ et dit que Phi-
temples des idoles et bâtit des églises. Mais lippe régna encore qualre ans depuis. Or cette
il de montrer que ces Actes
n'est pas difficile solennité ne se fît, au plus tôt, qu'eu 24-7, et il
sont faux et absolument insoutenables, au est certain d'ailleurs que Phihppe fut tué par
moins dans la plupart de leurs circonstances. Dèce avant la fin de l'an 249 ^. Une troisième
Peut-on, par exemple, ajouter à ce qui y
foi preuve que l'auteur de ces Dialogues est dif-
est dit, que la mère ' de saint Ponce, qui avait férent d'Origène, et qu'il a môme écrit depuis
soupiré vingt-deux ans après ce fils unique, le concile de Nicée, c'est qu'il se sert plusieurs
ait voulu l'étouffer dans son ventre et le tuer fois du terme de consubstantiel »". Jusque-là
après qu'il fut né, parce qu'étant entrée dans peu d'écrivains s'en étaient servis, et saint
le temple de un des prêtres, possédé
Jupitei-, Athanase ** ne l'avait rencontré que dans les
tout-à-coup du démon, avait dit que l'enfant écrits de saint Denys d'Alexandrie contre Sa-
qu'elle portait dans son sein briserait les dieux belHus, dans ses lettres à saint Denys,évêque
des Romains? que saint Ponce, étant encore de Rome, et dans les H
y pot >fposes de Théo-
enfant et n'ayant aucune connaissance de la gnoste. Il '2 cite Origène pour prouver que le
religion chrétienne, se soit jetéaux pieds du Fils est éternel et de la même substance que
pape Poutieu pour les baiser ? que lui et un lePère; mais il ne dit nulle part qu'il ait em-
autre enfant soient entrés dans le lieu où l'on ployé le terme de consubstantiel.
célébrait les saints mystères, contre la disci- 4. On objecte que saint Basile et saint Gré- h<^poi!
pline de l'Église, qui n'en accordait pas l'en- goire de Nazianze ont attribué cet ouvrage à ""t^''ns 3c
hommes*? que, six mois après la mort de son recueil qu ds ont fait de divers endroits de
père,qu'on suppose avoirété sénateur romain, ses écrits, sous le titre de Philocalie. Mais il
des soldats soient venus l'enlever et l'aient faut " remarquer premièrement, que ce pas-
contraint de venir prendre place dans le sé- sage y est cité, non d'Origène comme les au-
nat, quoiqu'il n'eût encore qu'environ vingt tres, mais du livre Vil d'Eusèbe de la Prépa-
ans Ce que ces Actes ajoutent de la conver-
? ration cvangélique : de là il y a même Heu de
sion de l'empereur Philippe, et des suites conclure que saint Basile et saint Grégoire
qu'elle eut daus l'Etat, n'est pas plus autorisé. n'ont point connu les Dialogues d'Adamance,
Il y est dit qu'elle se fit en un seul jour ^, et oubienn'ont pas cru qu'ils fussent d'Origène,
que son fils, qui était seulement âgé de douze puisque, dans un recueil entièrement composé
ans, se convertit aussi; que toute la ville de de ses passages, ils n'auraient pas tiré celui-
Rome en eut une joie extrême; que tout le là seul d'un autre auteur, quand ils pouvaient
monde courait au baptême et qu'on bâtit des le tirer de lui-même; secondement, que le pas-
églises sur les ruines des temples. Cependant sage rapporté dans la Philocalie, quoiqu'assez
ii est certain, par le témoignage d'Eutrope ^, conforme à celui qu'on lit daus les Dialogues
que les Philippe père et fils furent mis au d'Adamance, en ** est néanmoins assez diffé-
nombre des dieux par les Romains, et Goltzius rent pour les expressions; eu troisième lieu.
1 Origen., Hom. 28 in Matfh. — ^ Balus., tom. II pag 134. — 9 Aurelius Victor et Eutropius, in Vitn
Miscellan., pag. 133, et Bolland., ad diem 14 maii. Philijjpi. — lo Adamant., in Dialoyo, sect. 1, pag. 3,
— 3 Balus., ibid., pag. 124, 125 et seq. et sect. 5, pag, 159 et 160. — il Athanasius, in Epis-
* Pessimum etperversum in cultura dœnionum suo- tola de der.retis synodi Nicœnœ. — ** Ibid. — >* Til-
rum esse ultra omnes homines. Ibid. ^ Ibid. — letnont, tom. III Hist. ecclcs.,
pag. 7G0, 761 et 7C2.
6 Ambo inde ab exercitu interfecti sunt, senior Phi- " Rodolpbe Westein eu convient Initium hujus :
lippus Vei'onœ, liomœ junio)-, inter divos tamen relati segmenti fuit de verbo ad verbum transsumptum, reli-
tunt. Eutrop., in Vita Philippi. qua vero, pari seusu, aliis tantum verbis adhiben-
f Goltzius, pag. 107 et 108. — » Balus., ubi supra, iur. Prœfat. in dialogo Adamant., pag. 17. On n'y
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE Xdl. - ORIGÉNE. 197
la note qui se trouve à la fin du chapitre xxiv
en cinq parties, qu'il nomme sections,
de laPhilocalie ne prouve pas ce qu'on avance; au lieu
que, dans les exemplaires de Trithème,
il était
il
y est dit que ce passage « est transcrit du divisé en cinq livres. D'autres divisent ce
livre YI[ de la Préparation évangélique
d'Eu- Dialogue en trois. On le trouve en latin
sèbe; mais qu'il est de sous
Maxime », comme Eu- le titre de La véritable Foi en Dieu, dans l'é-
:
le IV* siècle de l'Église, l'an 312, et des mani- tranchées dans la seconde, parce qu'on a re-
chéens *, dont la secte n'était pas comme du .marqué qu'elles étaient de saint Chrysostôrae.
temps d'Origène. Il y a même des endroits qui On 9 cite encore sous le nom d'Origène de pe-
font voir que l'auteur écrivait après la nais- tites notes sur Job; mais on convient qu'elles
sance et la condamnation de l'hérésie arienne, sont d'un style et d'un génie différent.
lui-même Quelques-uns *°
et qu'il était arien. Son style est 7. lui ont attribué le livre
encore différent de celui d'Origène. Il est fi- intitulé De la Singularité des clercs^ imprimé
:
guré, mais sans élévation. Dans premier ' le parmi les œuvres de saint Cyprien. Ils en
de ces Commentaires, on attrihue le livre de donnent pour raison que l'auteur ne désap-
Job à Job lui-même, ou à quelques-uns de ses prouve pas ceux qui se mutilaient volontai-
amis *; dans le second ', il estattrDiué à Moïse; rement ; mais c'est plutôt une raison de dire
d'où on peut conclure que ces deux ouvrages que cet ouvrage n'est pas de lui. Car il est
sont de deux auteurs différents, qui ont écrit certain "qu'Origène s'est repenti d'êlre tombé
tous deux depuis le concile de Nicée. Erasme^ dans cette faute; il en a détourné les autres,
attribue le premier à Maximin, évéque arien, comme d'une action contraire à l'esprit de
qui disputa contre saint Augustin, vers l'an l'Evangile. Ou croit ", avec plus de vraisem-
428. Huet au contraire, qu'il est
' soutient, blance, qu'il est d'un auteur latin ; le style en
d'un auteur grec. Quoiqu'il en soit, l'auteur » est dur et mal mêlé de quantité de ter-
poli,
témoigne qu'il avait encore écrit sur la Ge- mes barbares et presque inintelligibles. Il y a
nèse. J. Périonius traduisit le
second en latin, un endroit qui favorise l'erreur des ariens.
sur un manuscrit grec de la Bibliothèque du Le dessein de ce traité est de montrer que les
* Ita consummatus est beatus atque gloriosus Lucia- vehementium dolorum, sicut admirabilis Job, cujus
nus, lucidus vita, lucidus et fide, lucidus etiam tole- sanctœ virtutis insignia quis edicere, vel juxta meri-
rantiœ consummaiione. Ob hoc enim Lucianus cogno- tum proferre, vel admirari valeat, quœ scripta sunt
minatus est, tanquam lucidus, aut proprio lumine sibi Syrorum lingua, sive ab ipso Job, sive ab a7)iicis ejus.
fulgens, aut aliis lucens. Hic namque beatus duode- Lib. I in Job., pag. 227.
cim diebus supra testas pollineas extensus, tertia dé- s Quod si quis dicat, librum Job
non esse Mosis,
cima die est consummatus, aliique innumeri sancti mar- sed ipsius Job ex nobis intelligut eum non fuisse
; is
tyres eodem modo mortem transeuntes consummati sunt. osientatorem neque laudatorem sui... necessario igitur
Lib. II in Job., pag. 259, tom. I Genebr. Moses Job virtutem mandat litteris. Prolog. Com-
* Hœc autem ait non quod resurrectionem improbet, ment, in lib. Job., pag. 519.
ut manichœi putaverunt, etc. Comment, in lib. Job., « Apud Huet., lib. III Origen., pag. 273.— ' Huet.,
pag. 528, tom. I Genebr. Semien autem Carici dédit, ibid.
non ut semel contemnat et nihili faciat manichœorum * Idcirco fructus terrœ anno illo
( diluvii ) neque
et falsorum continentium sententias , etc. Ibidem, germinavermd neque creverunt, neque maturescere
,
verbum est ut vox, nec Deus quasi principio careat, regni obtinendi causa tertiam sibi castrationem intu-
sed verbum est quidem quod sine inedio, et ut ita di- lerunt, nec tantum in eoconfutando qui tertiumeunu-
cam immédiate natus est, voluntate et virtute genera- chismum ita ut priores duos, corporalem esse vult
tus, non naturœ affections, non divisione essentiœ. Qui temporis, trivissemus, nisi aliquos illud ausos vidisse-
enim eum genuit, is interire non potest, ut qui im- mus et nonnullos etiam ostendissemus. Orig., Tract, i^
mortalis est neque ergo ô[/.oou(Tiov aliquidejus est, in Alatth., pag. 368 et 369 edit. Huet.
id est ejusdem essentiœ... neque biJ.oo6(jioy , comparuri 1* On le voit parce fragment de la cinquième ho-
enim non potest. Comment, in Job., pag. 556. mélie : Cum ager quod in eo aliquid agatur, vel villa
* Item vero alius lucet constantia atque tolerantia a circumvallaiione limitis nomen acceperit, etc.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XllI. — ORIGÈNE. 199
ecclésiastiques doivent fuir la familiarité des posé de réfuter de même toutes les hérésies,
femmes. Les dix homélies sur divers endroits en montrant qu'elles avaient tiré leur origine
de TEvangile n'ont rien du style ni de la mé- des dogmes des philosophes. Gronovius Ta in-
thode d'Origèue, et paraissent être d'un au- séré dans son Recueil des ^ antiquités grecques
teur * latin. La seconde fait mention des ma- et soutient qu'il est d'Origène ; mais il est vi-
nichéens, qui ne sont venus qu'après la mort sible qu'il ne peut être de ce Père; car l'au-
d'Origène. Il est dit dans la première que Ma- teur ^ déclare qu'il était évêque et chargé de
rie eufanta sans rompre le sceau de la virgi- veiller à la garde de l'Église. Nous ne répéte-
nité. Origène enseigne le contraire ® dans une rons pas ce que nous avons dit plus haut du
de homélies sur saint Luc. Le commence-
ses livre de la Pénitence ou des Lamentations d'O-
ment de la neuvième est tiré du trente-qua- rigène, que l'on regarde avec raison comme
trième traité d'Origène sur saint Matthieu le ; l'ouvrage de quelque imposteur ^ ignorant qui
milieu est du livre VIll de saint Jérôme sur en voulait à la réputation d'Origène. Mais il
Isaïe ; le reste du cinquième est pris des mo- ne faut pas oubher qu'on lui supposa, même
raies de saint Grégoire le Grand. C'est encore de son vivant, une conférence ou un dialogue
sans raison que l'on a mis le nom d'Origène rempli d'erreurs. L'auteur ' de cette impos-
à la tête d'un commentaire sur saint Marc, ture était un hérétique qu'Origène avait vu
puisqu'Origène lui-même y est cité, et aussi à Ephèse et avec lequel il avait souhaité d'en-
saint Chrysostôme, qui n'a vécu que longtemps trer en conférence sur les matières de religion,
après lui. Nous avons montré ailleurs que l'é- Cet homme s'en défendit; mais, ayant depuis
crit intitulé ; Quel riche est sauvé, était de Clé- composé une conférence entre Origène et lui,
ment d'Alexandrie non d'Origène , comme
et il l'envoya à Rome et dans beaucoup d'autres
quelques-uns l'ont cru. On ne peut non plus endroits, et par ce moyen elle tomba entre les
lui attribuer les notes ou scolies sur l'Orai- mains de plusieurs catholiques. Origène s'é-
son dominicale et sur les cantiques de la sainte tant trouvé à Antioche, où était aussi cet hé-
Vierge, de Zacharie et de saint Siméon, tra- rétique, lui demanda raison de sa fourberie en
duits du grec enlatin, par Morel, à Paris 1601, présence de beaucoup de personnes. L'héré-
in-8°. Elles sont, à ce qu'on croit ^,de Pierre tique la soutint avec la dernière impudence.
deLaodicée,qui était évêque de cette viUe vers Mais Origène l'ayant sommé de produire son
l'an 700 de Jésus-Christ. écrit devant tous ceux qui étaient présents,
On a aussi imprimé, sous le nom d'Ori-
8. il n'osa jamais apporter son Uvre ; ce qui
gène, un livre dans lequel l'auteur rapporte convainquit tout le monde qu'Origène était
les différents sentiments des philosophes, pour innocent des erreurs qu'on lui imputait, et
les réfuter ensuite. Ce n'est qu'une partie d'un que celui qui l'en accusait était un calomnia-
ouvrage plus considérable où il s'était pro- teur.
en a vu un autre à Rome, dans la Bibliothèque Bar- dans Alexandrie , il s'en vint à Jérusalem , où l'es-
bérine, dont il promet de donner les différentes le- time que l'on avait pour lui fit qu'on le pria d'ins-
çons. Montfaucon, Di'ariMwi italicum, pag. 210. truire le peuple. Il s'en défendit longtemps, et,
* Hœc autem non quam
alius coarguet, tradiius in comme on continuait à le presser, il se leva, pro-
eu Spiritus Sanctus ,
quem cum primitus accepissent nonça parole du psaume XLix
cette Le Seigneur :
Apostoli, iis communicarunt qui recte de Deo sentie- a dit au pe'cfieur : Pourquoi annoncez-vous mes pré-
bant : quorum nos cum successores simus et ejusdem ceptes, pourquoi ouvrez-vous la bouche pour parler
grotiœ participes, necnon episcopatus et magisterii et de alliance ? Aussitôt il se rassit en pleurant,
mon
custodes Ecclesiœ reputati, non oculis per socordiam et pleurer tous les assistants avec lui. » Epi-
fit
rtuon*"' .i.'â ét6 oharné par le t;ouveriiemont français d'ex- 4 vol. 1852), non-seulement il laisse le saint
meno. plorcr Ics couvents de la Grèce, rapporta a évéque investi de cette triste propriété, mais
Paris, entre autres manuscrits plus ou moins il calomnie sans pudeur l'Eglise de Rome
précieux, le livre des Philosophumena, con- pendant l'ère des martyrs. Un révérend cha-
tenant une réfutation de toutes les hérésies noine anglican de Westminster, M. Words-
des trois premiers siècles. Ce manuscrit a été worth, repoussa certaines propositions impies
publié par M. Miller, à Oxford, en ISril, sous des Philosophumena, dans son livre de Saint
le nom d'Origène. Cette publication fit aussi- Hippolyte et de l'Eglise de Rome, 1853; mais
tôt grand bruit, surtout en Angleterre et en il maintint le martyr en possession de l'ou-
Allemagne. Ce nom illustre, l'intérêt de dé- vrage anonyme, et ne craignit pas d'inviter
tails nouveaux sur les sectes des trois pre- les catholiques à passer dans le camp de l'E-
miers siècles, et des fragments encore incon- glise anglicane. La Revue de DuUïn (avril
nus de Pindare, d'Empédocle et d'Heraclite, 1853) et le Correspondant, dans un article de
éveillèrent la curiosité. Les uns ne virent M. l'abbé Freppel, ont reconnu saint Hippo-
que la question historique et littéraire; mais lyte pour l'auteur des Philosophumena. M. Le-
d'autres crurent qu'ils pouvaient tirer des normant, dans le Correspondant^, a combattu
Philosophuriiena un meilleur parti au profit de cette opinion, et, ainsi que M. Ed. Dumont,
leurs haines religieuses. Le livre IX de l'ou- dans les Annales de Philosophie ', il incline à
vrage, en effet, contient les invectives les plus voir dans cette composition l'œuvre d'Ori-
violentes contre un des successeurs de saint gène.
Pierre, contre un saint et un martyr. Le pape 10. M. l'abbé Cruice, dans ses savantes
saint Calliste y est grossièrement accusé d'es- Études sur de nouveaux documents historiques
croquerie, d'immoralité et d'hérésie. On lui empruntés à l'ouvrage r^écemment découvert des
reproche d'être sorti des mines de Sardaigne, Philosophumena et relatifs au commencement
où l'avaient jeté ses méfaits, pour se glisser, du christianisme, et en particulier de l'Eglise
à force d'hypocrisie et d'intrigues, sur le trône de Rome, i vol. in-8°, a réfuté les différentes
pontifical, et là, d'avoir corrompu la foi et opinions émises sur l'auteur présumé des
les mœurs des âmes confiées à sa vigilance, Philosophumena, et a repoussé avec vigueur
et altéré, dès sa source même, la tradition des les calomnies du protestantisme contre l'E-
vérités chrétiennes. Les revues anglaises s'oc- glise et le saint pape Calliste. Il rejette d'abord
cupèrent les premières de la publication de l'opinion qui attribue l'ouvrage à Origêne, et
M. Miller. L'Ecclesiasticand theologian (juin et cela pour seize raisons déduites avec autant
juillet 1851),dans deux savantes dissertations, de science que de logique. Les plus décisives
réfuta l'opinion de M. Miller, en attribuant les sont tirées des contradictions de doctrines et
Philosophumena à un prêtre romain nommé de diverses particularités entre les Philoso-
Caïus, et les faits scandaleux du livre IX à phumena et le célèbre prêtre d'Alexandrie. Le
un hérétique de même nom que le pape Cal- traitéen question contient, en effet, de longs
liste. L'année suivante, M. Jacobi, un des dis- passages empruntés mot pour mot de saint
ciples les plus distingués de Neander, dans Irénèe, qu 'Origêne ne cite jamais et ne pa-
une revue de Berlin, soutint que l'auteur des rait point avoir lu. Ebion est pour l'anonyme
Philosophumena était un des évêques suburbi- grec un chef de secte, comme pour plusieurs
caires de la province romaine, jouissant d'une Pères grecs et latins; mais Origêne, qui savait
haute autorité sous le pontificat de saint Cal- l'hébreu, affirme que les ébionites s'étaient
'
liste. Hippolyte, évêque de Porto, martyr et donné ce nom, qui signifie pauvre, par une
docteur de l'Eglise, vint remplacer Origêne, affectation d'austérité. Les Philosophumena
et la calomnie eut ainsi une plus large con- supposent expressément réternité des peines,
sécration. Aussi cette idée prit -elle faveur tandis que Origêne est accusé de rejeter ce
soiten Allemagne, soit en Angleterre. M. Bun- point capital. On peut encore alléguer deux
sen, ambassadeur de Prusse à Londres, crut raisons à la décharge d'Origène: l» Eusèbe,
devoir profiter des circonstances pour la sou- qui fait une assez longue et admirât ive énu-
tenir à grand renfort de volumes et d'érudi- mération des ouvrages du grand homme, tout
tion. Dans son ouvrage intitulé Saint Hip- : en réservant les détails à l'apologie, n'indique
' Contre Celse, lib. II, cap. 1. — * Correspondant, mai 1853. — ' Annales de philosophie, tom. XLIX et L.
[I1I« SIÈCLE.] CHAPITRE Xni. — ORIGÈNE. 201
le livre dont il s'agit, ni sous le titre de Philo- talent guère alors séparées de l'astronomie,
sophumena, ni sous celui de Réfutation des hé- excepté chez les catholiques. Les cinq livres
résies, dans les deux chapitres où il rappelle suivants passent en revue une trentaine d'hé-
les éludes et les travaux d'Origène contre les résies, et ledixième et dernier livre est une
philosophes et les hérétiques, bien qu'il cite récapitulation de tout l'ouvrage.
avec complaisance une lettre d'Origène à ce 13. Une des erreurs les plus accréditées de ^e'^efa*"^:
sujet; 2° l'auteur des Philosophumena, selon notre siècle, consiste à regarder le christia- n"s"par°"e;
tandis qu'Origène, dans ses deux voyages, y de tous les progrès de la raison humaine.
a séjourné très-peu. A l'article de saint Hip- D'un autre côté, on a prétendu que la religion
polyte, nous avons prouvé que ce saint mar- juive s'était développée par une méthode sem-
tyr n'était pas l'auteur des Philosophumena K blable, en empruntant plusieurs de ses dog-
Véritable H. Quel est donc le véritable auteur de cet mes aux peuples de l'Orient; qu'arrivée à son
auteur «le
itoiivrage.
m
ouvrage? M. Cruice a trouvé, dans le Traité
•
aussi bien que l'existence des neuf premiers ces monstrueuses doctrines. Nous y voyons,
livres. Revenant alors sur une pensée émise en effet, dit M. Maynard {Bibliog., déc. 1855),
par M. l'abbé Jalabert dans sa thèse du doc- que la philosophie grecque, bien loin de pré-
torat, M. Cruice cherche à établir que si l'a- parer le christianisme et de lui prêter son con-
nonyme n'est pas TertuUien lui-même, c'est cours lors de son apparition, a donné nais-
au moins un de ses disciples. Si ces savantes sance à toutes les hérésies ;
que les Pères, con-
conjectures ne dépassent pas la vraisem- vertisdu platonisme à la religion chrétienne,
blance au moins il est difficile de rejeter
, commencèrent par abjurer leurs doctrines, et
cette dernière opinion. Cependant D. Pitra, que tous les philosophes devenus chrétiens,
tom. II du Spicilége de Solesmes, pense qu'il qui voulurent être à la fois les disciples de
faudrait plutôt l'attribuer à un des disciples Platon et de l'Évangile, furent condamnés par
d'Origène. précisément pour avoir mêlé les en-
l'Église,
12. Le dessein de l'auteur est de chercher seignements de la philosophie grecque aux en-
quels ont été les sentiments des philosophes seignements de Jésus-Christ. Nous y voyons
grecs et ceux des hérétiques sur la divinité et encorequele judaïsme, loin d'avoir progressé
sur la création du monde, et de prouver que avec les âges et d'être arrivé à son apogée au
les différentes hérésies ne sont pas sorties du moment de l'apparition de Jésus-Christ, s'était
dogme chrétien mais bien de la philosophie
, affaibli après le retour de la captivité, qu'il
païenne. L'ouvrage est annoncé comme con- n'avait emprunté à que ses erreurs,
l'Orient
tenant dix livres le premier expose les prin-
: qu'il s'était fractionné en sectes aussi impuis-
cipes des diverses sectes philosophiques, en y santes qu'hétérodoxes, et qu'enfin il ne s'était
comprenant les gymnosophistes et même les mêlé au christianisme que pour déposer dans
druides ; ensuite devaient venir les mysti- son sein le germe de nombreuses hérésies :
ques ; mais deuxième et le troisième, qui
le c'est ce que M. Cruice démontre parfaitement
semblaient réservés pour cetterevue générale, d'après les Philosophumena dans les deux
manquent encore. Peut-être, dit M. Dumont, premiers chapitres de sa seconde partie.
l'anonyme n'aura pas achevé son projet, ou L'auteur anonyme pourrait encore servir
une autre main aura retranché ce travail. Au à confirmer différents dogmes, comme la pra-
moins est-il certain que le résumé du livre X tique de la confession, comme la perpétuelle
n'en fait pas la moindre mention. Le peu qui tradition du célibat ecclésiastique; la supré-
reste du livre IV attaque les astronomes ou matie et l'infaillibilité pontificale sont avouées
magiciens, car l'astrologie et la magie n'é- dans le récit, par les reproches de l'anonyme,
1 On a aussi prétendu que Caïus, prêtre romain^ tulé Le Petit Labyrinthe, il réfute les hérétiques
:
aurait si récemment
et si publiquement favo- Dumont, dans une telle Eghse, l'élection d'un
risé de si mauvaises doctrines? Comment au- infâme au trône pontifical, et même quelque
cun des buit premiers conciles si souvent ré- influence à un homme si dépourvu de mérite,
calcitrants envers le Saint-Siège, comment comme on nous représente Calliste, c'est que-
surtout les conciliabules grecs, notamment le reller l'évidence.»
brigandage d'Epbèse, ne se sont jamais pré- nous représente saint
D'ailleurs, la tradition
valus d'un fait si grave, ni du livre grec qui Calliste élu, suivant l'usagedu temps, par les
le rapporte de deux cboses Tune néces-
? car, suffrages de toute l'Église de Rome, de ses
saii'ement, dit M.Dumont ; ou le fait répandu évéques, de ses fidèles. De plus, la sainteté de
par toute la terre n'est pas parvenu en Orient, ce pape a pour garantie non-seulement les
ou le livre qui nous revient de l'Orient n'y a Martyrologes, le Liber pontificalis et les Actes
obtenu aucun crédit. Comment encore se fait- de son martyre, mais encore une catacombe
il que, dans les siècles qui suivirent, il n'y soit désignée du nom
de Saint-Calliste, comme
faitaucune allusion par tant d'bérétiques in- ayant été disposée par ses soins; les hon-
téressés à appuyer leurs erreurs sur l'Eglise neurs rehgieux qu'on lui a rendus de temps
romaine ou à détruire son autorité? Le docteur immémorial, l'église qu'on a élevée en sou
Wordswortb explique cet inexplicable silence honneur et qui porte son nom. Évidemment,
par l'état de l'Eglise de Rome à cette époque, tout cela ne suppose pas un escroc et un in-
Eglise alors obscure, ignorante, incon-dit-il, fâme.]
nue, méprisée. M. l'abbé Cruice lui rappelle
ARTICLE VL
victorieusement tous les monuments de i'bis-
toire, qui sontautant de témoignages en fa- DOCTRINE d'oRIGÈXE.
veur de la suprématie, de la dignité et de la 1. Origène suppose partout, comme une
science de l'Eglise romaine et du Saint-Siège. chose incontestable, que les écrivains sacrés
Le témoignage même de l'auteur des P/u'loso- n'ont été que les organes du Saint-Esprit, et
phumena dépose en faveur de la visibilité de que toute l'Ecriture, soit de l'Ancien, soit du
cette Eglise, puisqu'il atteste que la doctrine Nouveau Testamentjusqu'àla moindre lettre*,
1 Outre le sénateur Apollonius, il faut compter duorum requiris, non te pigeât dicere Spiritum esse
Cécile, Valérien et Tiburce, restitués si authentique- sanctum : quoniam sermones sapientium, sive ante
menl à l'histoire par Dom Guéranger. adventum, sive in ipso aduentu, sive post adventum,
* Quod si serio respondenduin est ad opinionem sunt quasi stiinuli ; sunt quasi fixorii implantati,
Celsi credentis nos idem de Scripturis sentire quod dati ab uno pasiore. Origen., Tract. 6 in Matth.,
Judœi sentiunt, dicam confessum esse apud utrosque, pag. 39, tom. Genebr. Si autem eloquia Domini
II
sacras Itbros scriijtos esse divino Spiritu, sed de intel- eloquia casta, etc., exquisitissima cura et studio, Spi-
lectu eorum non consentira nos; quando nec vivimus ritus Sanctus per ministros verbi ista subjecit, ne un-
ut Judœi quod non sapiamus juxta externam legis
,
quam nobis latere possit ratio, secundum quam divina
litteram. Origen., lib. V contra Celsum, pag. 271, sapientia omriem Scripturam divinitus datam vel ad
Jucundum est autem consensum intelligere, eliam unam usque litterulam attigit ; et propterea fartasse
circa convenientia duorum testamentorum ; in quo servator: Iota, inquit, unum, vel unus apex e lege
enim testamenta duo conveniunt sibi, ut nullus sit in- non prœtereat donec omnia fiant. Quemadmodum
ter ea dissen.fus eorum inveniatur oratio de omni re enim in mundi opificio ars divina non solum in cœlo
acceptabilis Deo. Si autem et tertium congregatorem et in sole, et luna et astris apparet, per tota illa cor-
[m® SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGENE. 203
*
a été divinement inspirée. Selon lui, les Pro- sens avec beaucoup de soins, et distinguer
phètes ne perdaient pas Tusage de la raison ' les personnes qui y parlent d'avec celles à qui
en prophétisant; ils le faisaient avec une en- elles adressent la parole; car elle est obscure®
tière liberté, sans y être forcés par TEsprit- en plusieurs endroits, ce qui ne serait poiut si
^
Saint qui les animait. Il n'y a rien d'inutile nous avions plus de force et de pénétration
dans l'Ecriture, et on n'en doit rien ' rejeter. d'esprif. La connaissance des lettres humai-
Pour la bien entendre ^, il eu faut étudier le nes est ® utile pour l'intelligence de l'Ecriture ;
pora permeans; sed efiam in terra, in materia viliore dicuntur, quœrenti quœnam sit persona loquens, quœ-
hoc ipsum effecit, ut neque ah artifice, minimorum nam quam sermo fit ; cur desierit persona quœ
eu ad
etiam animalculorum corporn neglecta sint... Ita nos loquebatur cum sœpe cui verba fiunt reservetur, et
;
censemus de omnibus ex afflatu Sancti Spiritus scrip- alla cum ea ipsa loquatur, vel ea ad quam erat sermo
tis, tanquam ilîa quœ sapientiam humana superiorem non amplius audiente, sed altéra dicta excipiente; cum
tradii, magna providentia per divinas litteras homi- nihilominus maneat quœ loquebatur. Ambœ. interdum
num generi salutaria documenta inseruerit, et singulis, mutantur, et ea quœ dicit, et cui dicitur, vel cum
ut ita dicam litteris, quoad unaquœque capere potest utraque diutius majieat, non aperte significanlur ma-
vestigia sapientiœ impresserit. Origen., iti Psalm., nière
;
quid autem opus est horum singulorum exempta
pag. 39, tom. I Huet. quœrere, cum Prophetarum scripta, ipsorum copia re-
Admirabar quondam Isaiam, antequam compara-
1 ferta sint. Quœ causa est non sane levis, cur obscuri-
rem Ezechieli, et obstupescebam quomodo diceret : Au- tas dictorum non dijudicetur. Est autem is Scripturœ
dite sermonem Domini, principes Sodomorum; at- mos, ut ab uno sermone ad alium illico prosiliaf ;
tendite iegem Dei, principes Gomorrlise quo mihi : idque obscure ac confuse admodum Prophetœ faciunt.
multitudinem sacrificiorum vestrorum, dicit Domi- Origen., in Cant., pag. 51, tom. I Huet.
nus ? Picebat enim hœc, cum possct dicere vel tacere; ^ Sunt autem in creatione quœdam quœ natura hu-
neque enim ut quidam suspicantur, mente excidebant mand di/ficulter, vel nullo modo invenire possit. Neque
Prophètes, et ex necessitate Spiritus loquebantur. Si idcircoaccusandus est omnium effector Deus ; v. g.
alii, inquit Apostolus, reveiatum fuerit sedenti, prior cum non invenimus causam cur ci^eati sint basilici, et
taceat. Ex quo ostenditur potestatem habere eum qui alia venenata animalia : hinc enim sanctum est cons-
loquatur, cum velit dicere, et cum velit tacere. Et ad cium imbecillitatis generis nostri, quodque divinœ artis
Balaam dicitur : Verumtamen verbum quod im- rationes, quantalibet maxima eas diligentia fuerimus
mitto in os tuum, hoc observa loqui quasi potesta- : contemplât! , percipere non possimus, ad unum Deum
tem habente eo ut, accepta Dei verbo, diceret, seu ta- horum cognitionem referre, qui nobis postea, si digni
ceret. Origen., in Ezech., pag. 401, tom. I Geuebr. judicemur, hœc ipsa aperiet quœ illi pie permisimus.
* Neque mirandum est, si quodcumque verbum emit- Sic igitur et in divinis litteris videndum est, multa
tebant Prophefce ; opus efficiebat verbis conveniens : sed in illis recondita esse, quorum nobis est perdifficilis
et arbitrer omnem mirabilem litteram inter divina tom. I Huet.
explicatio. Origen., in Psalm., pag. 40,
oracula perscriptam neque unum iota esse aiit
efjlcere, Considéra itaque Scripturas ad hune modum, tan-
^
unum apicem in Scriptura, qui opus suum non efficiat quam omnes herbœ sint, aut unum perfectum oratio-
in his qui virtute litterarum uti sciunt... Herbarius enim nis corpus : si vero neque herbarius es Scripturarum,
est, ut ita dicam, vir sanctus et spiritalis, seligens e sa- neque dissector propheticorum sermonum ne idcirco ,
cris Scripturis quodlibet iota, et quodlibet obvium ele- existima in Scripturis quidpiam redundare, sed teip-
mentum, et littera virtutem inveniens,et quem ad usum sum solum potiusquam litteras sacras accusa, cum
accommodari possit, et nihil esse in Scripturis superva- rationem eorum quœ scripta sunt non invenis. Origen.,
caneum. Origen., in Hierem., pag. 199, tom. 1 Huet. in Hierem., pag. 199, tom. I Huet.
3 Sed neque unquam propheticam pastionem concul- * Gaude in Deo, Domine mi sanctissime, et multum
cemus nos, neque aquam legitimam turbemus, cum venerabilis fili Gregori, ab Origene..... ego omni in-
vero peccent aliqui in evangelicam pastionem, ut ex genii et animi conten'ione te uti volebam quod finem
evangelicis quœdam proculcent, aliqua ut bonam her- attinet, ad christianismum , sed et quoad effectionem.
bam depascantur, et ex apostolicis vel omnia ejiciant, Idcirco cupiebam e philosophia Grœcorum ea te acci-
vel quœdam seligant. aliqua vero abjiciant ; 7ios Evan- pere quœ ad christianam doctrinam circulares disci-
gelia omnia depascamur, et nihil ex ipsis conculcemus, plinœ, vel prœludia esse possunt ; quœque ex geome-
et omnia apostolica bibentes, quantum possumus, aquam tria, rhetorica et astronomia, philosophi prœdicant,
nobis appositam, hœc custodiamus, Origen., in Ezech., tanquam philosophiœ sociis et adjutricibus, id nos de
pag. 201. tom. I Huet. philosophia ad christianam religionem dicamus. Et
* Omni ratione conandum est in nostro corde colli- forsitan taie quid significat quod in Exodo scriptum
gere, animadvertendo ad lectionem, invocationem et est, ut jubeantur filii Israël petere a vicinis et contu-
doctrinam, et in lege Domini meditando die ac bei^nalibus vasa urgentea et aurea et vestes, ut spolia-
nocte, non solum nova Evangeliorum, Apostolorum et tis.Egyptiis, materiam habeant ad ea ornanda quœ
eorum Apocalgpseos oracula; sed et antiqua legis, fu- ad divinum cultum jiertinent... Tu igitur, Domine fili,
turorum bonorum umbram continentis, Prophetarum- prœcipue incumbe in lectionem divinœ Scripturœ. In-
que qui post hœc futura prœdixerunt. Origen., in cumbe , inquam , multa enim attentione opus est, ne
Matth., pag. 220, tom. I Huet. inconsideratius aliqua effutiamus aut sentiamus : atque
s Qui non perceperit proprietatem
personarum divinœ animum advertens ad lectionem divinorum librorum,
Scripturœ, tum earum quœ loquuntur, tum ad quas cum fideli et Deo accepta pirœnotione pulsaque in iis ,
verba fiunt, multum illi perturbationis affcrunt quœ clausa sunt et aperientur tibi a janitore de quo dixit
204 HISTOIRK G^INÉIULE OES AUTEURS ECCLV'SIASTIQUES.
mais rien propre à la mériter que la
n'est plus vait aussi se servir avantageusement du sens
prière accompagnée d'une loi ferme. littéralde l'Écriture, lorsqu'il était question
Siirlesdif-
2.0rigène distingue trois sens de l'Ecriture *: de soutenir la vérité des dogmes de notre
fi^rents sens
A» r Ecritu-
le sens littoral ou historique, le sens mystique religion. Nous en avons donné des preuves
re.
ou allégorique, et le sens moral. Ses Coiumen- dans l'analyse de ses livres contre Celse. On
taires sont pleins d'explications allégoiiques; voit encore, par une de * ses homélies sur /es
et, quoiqu'il n'y néglige point le sens moral, Nombres, qu'il pensait que l'on devait inter-
il est facile de remarquer qu'd le regardait préter selon la lettre les endroits de l'Ecri-
comme beaucoup au-dessous du mystique. ture qui, dans leur sens littéral, ne laissent
Son application à recueillir toutes les versions pas d'être propres à édifier les lecteurs, et
de la Hihle, à les conqjnrer avec le texte hé- donner un sens moral ou spirituel aux autres
breu et à en expliquer les endroits difficiles, passages qui, pris à la ne pourraient
lettre,
prouve assez qu'il aimait à s'instruire du vrai exciter à la piété. Pour engager les fidèles à
sens de la lettre, et, s'il se laissait souvent al- la lecture des divines Ecritures, il leur repré-
ler au goût qu'il avait pour l'allégorie, il sa- sente que c'est un moyen de s'affermir' dans
Judicia Domini vora, etc. Nisi ergo essent singula ista a tamen iis Apostolus et dicit : Hœc autem sunt allego-
semetipsis diversa, nunquam utique proprias unicuique rica. Orignes conciudens Ostendimus, ut opinor, aw-
:
Scriptura divina differentias indidisset, et aliud de toritate Scripturœ divinœ, ex iis quœ in lege scripta
lege Domini diceret, aliud de mandata, aliud de j'us- sunt aliqua penitus refugienda esse et cavenda ne
, ,
tificationibus, aliud de judiciis. Est ergo, ut ex his secundum litteram ab Evangelii discipulis observen-
ostendimus , aliud lex , aliud prœceptum , aliud testi- tur : quœdam vero omnimode, ut scripta sunt obti-
monium, aliud judicium, Sed et in
justificatio, aliud nenda : alia autem habere quidem secundum litteram,
ipsa lege evidentior horum differentia designatur ubi veritatem sui recipcre tamen utilifer et necessario
,
dicitur, hœc est lex et mandata, et justificationes et etiam allegoricum sensum. Orig., Hom. 11 in Num.,
prœcepta, et testimonia et judicia quœ prœcepit Domi- pag. 130, tom. 1 Genebr.
nus Moisi. Cum ergo hœc ita se habere et his a se in- 3 Summa utilitas ab ejusmodi lectione ad eos perve-
vicem differre distinct ionibus , legis ipsius testimoniis nil, qui veram terne distributionem a Jesu N&ve fac-
approbentur, diligentius debemus intendere ils quœ tam filiis Israël intelligere possunt, et ad eum qui po-
recitantur in lege. Qui sicubi scribitur, v. g hoc esse tuit ascendere in tei'ram sanctam veram et vere bonam,
est... si ergo scriptum legimus, quia lex umbram ha- lientibus, quœ de diversis locis 7nemorantur, accommo-
beat futurorum bonorum, non continua etiam manda- dare ; sed quoniam difficile est invenire qui tantum
tum, vel justitiœ, tel judicia, de quibus hoc non est captant utilitatis,adhortarivolumus audientes ne ani-
scriptum, umbrœ esse credendœ sunt futurorum bono- mum legendum despondeant. Quodnam igitur
inter
rum. Denique ut, exempli gratia, unum ponamus ex solatium ne succumbat qui ei Icctioni interest, di-
sit,
mullis, non est scriptum, hoc est mandatum Paschœ, cendum. Quemadmodum igitur carmina vim habent
sed hœc est lex Paschœ. Et quia lex umbra est futu- quamdam insitam ufque imprudens aliquid a car-
,
rorum bonorum; lex sine dubio Paschœ , umbra est mine accipit, quo incantatur, ea nimirum est natura
fin* SIÈCLE.] CHAPITRE Xin. — ORIGÈNE. 205
la vertu ; il dit que, si une fois on en pénètre comptait - vingt-deux livres de l'Ancien Tes- livres cano-
niques de
le sens, on sera peu surpris de la bassesse *
tament, selon le nombre des lettres de la lan- l'Aucien
Testament.
du style et des fautes que l'on y trouve con- gue hébraïque. Il attribue les cinq premiers
tre les règles de la grammaire, surtout lors- à 5 Moïse,même le dernier chapitre du *Deu-
qu'on se souviendra que ceux qui en sont les téronouie, où il est parlé de sa mort et de sa
auteurs déclarent eux-mêmes qu'ils n'ont sépulture. plus ancien que Moïse;
Il dit Job s
point employé les discours persuasifs de la mais ne s'explique pas sur l'auteur du livre
il
sagesse humaine, mais les effets sensibles de qui porte son nom; seulement on lit dans les
la vertu de Dieu. commentaires sur Job, qui lui sont attribués,
3. Nous avons déjà remarqué qu'Origène que Moïse ^ en écrivit le premier chapitre et
sonorum carmînis, sive in damnum, sive ad sanitatem Isaias decimus septimus, Jeremias cum Lamentatio-
;
corporis vel am?ni sui : sic velim existimes omni car' nibus Epistola, in unum compact us volumen; deci-
et
mine potentiorem esse significationem nominum divinœ mus octavus, Daniel ; decimus nonus, Ezechiel ; vigesi-
Scripturœ. Sunt eniin quœdam in nobis fucultates, mus Job; vigesimus primus, Esther. Extra horum
,
quorum quœ meliores sunt , per hœc veluti carmina, censum sunt libri Machabœoi'urn. Nous avons expli-
cum ipsis cognatœ atque affines sint, aluntur Hœ qué, en parlant des commentaires d'Origène sur les
veluti sortitione animas nostras et corpora possident, Psaumes, pourquoi il ne marque ici que vingt-un
quœ sanctœ si7d, lectione Scripturœ juvantur et va-
si livres de l'Ancien Testament, quoiqu'au commence-
lidiores fiunt : etsi mens nostra fructum non sentiat. ment de ce même passage, il en compte vingt-deux.
Origeu., in Josue, pag. 27, tom.I Huet. Origen., in Psalm., pag. 48, tom. I Huet.
Qui dividit apud se vocem et significata et res,
1 3 Qui vero reprchendet quod ad plura scribenda me
pro quibus notiones ponuntur, non impinget ad sole- accinga??!, Moseni talem ac tantum virum quinque so-
cismum vocis, cum perscrutatus, res quibus significandis los libros reliquisse dicet. Origen., in Joan., pag. 88,
voces adilibentur, sanas et intégras invenerit maxime : tom. I Huet.
vero cum profiieantur viri sancti, sermon<^ro suum et ^ Quid igitur vos [Judœos) ei {Moisi) conciliavit?
prœcouiuLD uon iu peisuasione sapienliae verborum, An : Et mortuus est ibi
quia de obitu sua scripsit sic
sed in demonstratione spiritus et potestatis esse. Moses, fabulus Domini, in terra Moabitarum per ver-
Sed Apostoli qui non ignorarent ad quœ impingerent, bum Domini, sepullusque est in ea terra juxta ajdem
et in quibus studii non essent versati, profitentur lo- Phogoris nec quisquara novit sepulcrum ejus in
:
terrœ pervsnirs, et Christi doctrinœ, non fatua solum sermones mei et ponantur in libro in perpetuum ? in-
mundi , sed et sapientes interdum subjungere Si terpretata autem sunt hœc a magno illo viro Mose in
enim eleganiiam et dictionis apparalum ut scripta , hebraicam linguam atque flliis Israël tradita, quod
,
illa quœ Grœcis admirationi sunt divinœ litterœ ha- ostendit ipsa Scriptura Job dicens : Hinc interpretatus
buissent , existimasset a/iquis, tion homines vicisse ve- est ex Syrorum libro. A quo interpretatus? Manifes-
l'itatem sed apparentem consecutionem et dictionis
, tum est quod a Mose in hebrœum, item vero a Septua-
splendorem audienfes prolectasse, et illecebris delini- ginta interpretibus ex hebrœo in grœcum iranslatu^
tos circumvenisse. Origen., Philoc, cap. 4, pag. 24. est. In jEgypto scilicet olim Moses illum ex Syro in
^ Sunt autem viginti duo libri juxta Hebrœos, hi : hebrœum transtulit. Item in yEgypto etiam Septua-
Primus, qui a nobis Genesis dicitur ; Exodus de Inde ; ginta sub Ptolonœo ex hebrœo grœcum illum trans-
tertius , Lcviticus; quartus,Numeri; quintus, Deute- tulerunt , et inde ex JEgypto per universas gentes
ronomium ; Nave ; septimus, Judices
sextus, Jesu filius beati Job scriptura divulgaia est... erat nimirum pri-
et Rut h, unico volumine apud Hebrœos comprehensi: dem syriace ex parte scripta, non ita diligenter, ne-
octavus, Regnorum liber primus et secundus, qui apud que ita vigilant er quemadmodum postea a Mose. Solœ
eos unicum volumen constituunt, quod. dicitur Samuel; enim responsiones atque repltcationes a primordio
nonus, Regnorum liber tertius et quartus , quos ipsi scriptœ sunt. Nam quis illorum poterat nosse quomodo
etiam in unum volumen redigunt ; decimus, Paralip- venerint angeli ut starent ante Deum , vel quomodo
pomenon liber primus et secundus uno apud illos , diabolus venerit, vel quid dixerit, vel quid responde-
confenti volumine; undecimus, Esdras primus et se- rit ? Nullus illorum poterat hoc nosse, vel hoc quod
cundus, qui apud eos unicum conficiunt librum ; duo- diabolus ad Deum locutus fuerit, nisi sanctus Moses
decimus, liber Psalmorum ; decimus tertius, Proverbia Spiritus Sancti révélations. Lib. I in Job., pag. 227,
Salomonis; decimus quartus, Ecclesiastes ; decimus tom. I Genebr.
quintus , Canticum Canticorum ; decimus sextus ,
206 HISTOIRR GÉNI^.RALR DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
une partie du second, et qu'il traduisit le li- noms; sans nom ', auxau-
les autres, qui sont
vre entier du syria<]ue on hébreu; on y voit teurs des psaumes précédents; le ^ soixante-
rncore que, dans le temps que ce commenta- onzième cl les ' psaumes graduels à Salomon ;
leur écrivait, on « lisait le livre de Job dans quoiqu'on ne convint dans rKglise que de
lesassemblées des fidèles aux jours déjeunes trois livres écrits par Salomon *, savoir les
etde stations. Origène attribue onze psaumes Proverbes, VEcclèsiaste et le Cantique des Can-
à* Moïse, savoir lo(iuatre-vingt-nenvième et tiques, plusieurs né.anmoins lui attribuaient
'
les suivants jusqu'au centième ; aux fils de encore la ® Sagesseei *" l'Ecclésiastique; etOri-
Coré et à * Asaph, ceux qui portent leurs gène cite ordinairement ces livres sous son
1 Similiter autem et in conventu Eccîesiœ, in diehus tionem Psalmorum considéra illam verbi gratia ,
sanctis legiiur patsio Job, in diebus jejunii, in diehus psalmi quadragesimi primi, quœ talis est : In finem
abstinentiœ , in diebus in quibus tanquam compatiun- intellectus iiliis Core. Cum enim très esse?d filii Core,
tur a
qui jejunant et abstinent, admirabiii illo Job, quorum nomina in Exodo reperimus, Aser, Helcana,
in diebus in quibus in jejunio et abstinentia sanctnm Abiasaph propheliœ minime divisœ sunt sed ab una ,
,
Domini nosfri Jesu Christ i passionem sectamur. Ibid. voce et une spiritu in una anima vere concorditer
,
tum esse : Oralio Moysis, hominis Dei. Sed deitide unus très id elocuti sunt : Quemadmodum desiderat
quœstionem movens de quihusdam Dei oraculis Julio cervus ad fontes aquarum. Quin et in Psalmo XLiii,
patriarchœ et cuidnm a/jud Judœos sapientis famam in numéro plurali dicunt : Deus auribus nostris au-
habenti, audivi in universo Psalniorum libro a primo divimus. Origen., in Matlh., pag. 338, tom. I Huet.
et secundo psalmo eos qui apud Hebrœos inscriptione Quin et Asaph indicans problemata et parabolas
'*
caren.t , vel inscriptionem quidem habent , sed non esse historias Exodi et Numerorum, memoratus cas,
scriptoris nomen, ad eum scriptorem pertinere cujus in Psalmis sic prœfalur : Attendite, popule mi, le-
nonien ferlur in prœcedenti primo psalmo qui nomen gem meam, etc. Psalm. Lxxvn. Origen., cont. Cels.,
scriptoris habet, ilis autem de rébus verba faciens, lib, IV, pag. 197. — ^ Orig., tom. I HexapL, pag. 79
primo dicebat tredecim esse Moysis psalmos. Cum au- loc. cit.
tem ex iis quœ audieram 7-eponerem ipsi undecim * Deus judicium luum régi da, etc. Aperte Salo-
tantum esse : percontatus deinde eum qui apud illos moni inscriptus hic psalmus de Christo prophetat.
sapiens uudiebat, edidici esse rêvera undecim, quorum Origen., in Joan., pag. 29, tom. II Huet.
octogesimi quidem noni initium erat : Domine, refu- ''
In lib. Psalmorum, in canticis graduum, qui Sa-
gium factus es nobis in generatione et genera- lomonis esse referuntur, hoc modo scriptum est : Nisi
tione; scquentis vero, qui apud nos noixagesimus fer- Dominus aedificaverit domura, etc. Origen., lib. III
tur, initium erat : Qui habitat in adjutorio Altissioii, de Princip., pag. 455, tom. I Genebr.
quem etiam dicebnt esse Moysis. Imo etiam cum qui Tentemus primum de eo requirere quid illud sit,
*
inscriptionem quidem habet, sed sine scriptoris no- quod cum tria volumina Ecclesia Dei a Salomone
mine, nempe nonagesimum primum, sic inscriplum ' scripta susceperit, primus ex ipsisProverbiorum liber
Psaltnus canlici in diem sabbati. Moysis esse dicebat, positus sit; secundus ii qui Ecclesiastes uppellatur
cujus initium : Bonum est conQteri Domino. Ins- tertio vero in loco Caniici Canticorum volumen liabea-
criptione autem carere eum qui nonagesimus secundus tur. Origen., in Cant., pag. 312 , tom. I Genebr. iVe
fertur , cujus initium : Dominus regnavit, decorem illud quidem remaneat in nobis omissum quod qui-
induit. Quem et ipsum dicebat esse Moysis, similiter- busdam reqiàrendum visum est adhuc de ipsa attitu-
que nonagesimum iertium, cujus initium : Deus ultio- latione ac superscriptione libri, quœ ita habetur :
num Dominus. Et nonagesimum quartum, cujus ini- Canticum Canticorum, quod est ipsi Salomoni. Sic
tium : Venite exultemua Domino. Et nonagesimum
, enim accipiunt, quasi canticum hoc esse dixerit canti-
quintum cujus initium : Cantate Domino cauticum
, corum Sulomonis , ut ex plurimis suis canticis hoc
novum cantate Domino omnis terra. Et nonagesi-
: unum esse signaverit ; sed nos quomodo recipiemus
mutn sextum, cujus initium : Dominus regnavit, hujusmodi intelligentiam, cum neque Ecclesia Dei
exultabit terra. Et nonagesimum septimum, qui in- ulla extrinsecus Salomonis cantica legenda susceperit;
scriptus tantum erat : Psalmus. Nam illud, Davidi, neque apud Hebrœos, a quibus eloquia Dei ad nos vi-
quod in quibusdam exemplaribus habetur, neque in dentur esse translata, aliquid prœter hos très libellos
hebraico, neque in leliquis editionibus haberi. Hujus Salomonis, qui et apud nos sunt, amplius habeatur in
autem initium erat : Cantate Domino canticum no- canone? Ibid., pag. 305.
vum, quia mirabilia fecit. Nonagesimus item octavus 8 Sapienliam autem et disciplinam qui abjicit, in-
ipsius pariter esse dicebatur, cujus initium est : Do- felix est, et vana spes ejus, et labores ejus insen-
minus regnavit, irascantur populi. Etiamque nona- sati; et inutilia opéra ejus, ait Sapientia, quœ titulo
gesimus nonus, inscriptus : Psalmus in confessionem, inscribitur Salomis. Sap. m. Origen., in Hieronym.,
cujus initium : Jubilate Deo omnis terra. Post hos pag. 370, tom. I Genebr.
autem undecim inscriptum haberi tum in hebraico, '0 In libro qui apud nos quidem inter Salomonis vo-
tum apud omnes, Davidi Psalmus. Ita ut centesimus lumina haberi solet et Ecclesiasticus dici , apud Grœ-
non ultra Moysis esset. Origen., tom. I HexapL, cos vero Sapientia Jesu, filii Sirach, appellatur, scrip-
pag. 79. tum est : Omnis sapientia a Deo est. Ecclesiastici i.
' Quod si e veteri scriptura très prodxicendi sunt, Origen., Hom. 8 in Num., pag. 152, tom. I Genebr.
qui super terram comenserint, ita ut in medio eorum Sed et sicubi in alio loco scriptum forte materiœ no-
fuerit verbum, a quo in unum conjuncti sunt, inscrip- men est, nusquam, ut ego arbitror, hoc de quo nunc
[m* SIÈCLE.J CHAPITRE XIII. - ORIGÈNE. 207
nom.Il reçoit pour divins les livres d'^s- «
écrit en hébreu en faveur des Juifs convertis
;
de Judith, de Tobie, de la Sagesse, et cite
îher, le troisième, eu faveur des Gentils et approuvé
comme Ecriture ceux des ^ Machabées, V Ec- par saint Paul. Il ne marque pas que Ton ait
clésiastique 3 et * Esdras. Il soutient que le contesté les Actes des Apôtres à saint Luc, ni à
Cantique des trois jeunes hommes dans la
^
saint Paul les treize Epitres qui portent son
fournaise, l'iiistoire de « Suzanne, de Bel et nom; mais il nous apprend que Ton était
du Dragon font partie de la prophétie de partagé sur l'auteur de VEpitre aux Hébreux,
Daniel ; mais il remarque que, de tous les li- que plusieurs Eglises, fondées sur le témoi-
vres de l'Écriture, les sadducéensn'admet- ^
gnage des anciens, l'attribuaient à saint Paul,
taient que le Pentateuque. d'autres à Clément, évèque de Rome, et quel-
Sur les li-
vres canoiii- 4. Quant aux Uvres du Nouveau Testament, ques-uns à saint Luc ^ ; pour lui, il parait per-
mies 'lu
îîouTeau Origène témoigne que, dans toute TEghse, suadé que le sens et les pensées sont de l'A-
Testament.
on recevait d'un consentement unanime » les pôtre, mais que le choix et la disposition des
Évangiles de saint Matthieu, de saint Marc, termes sont d'un de ses disciples, qui a voulu
de saint Luc et de saint Jean le premier, : étendre et expliquer ce qu'il avait appris de
vouloir ' réfuter ceux qui niaient que cotte comme Jude; il se sert aussi
celle de saint
Epître eût été écrite par saint Paul, et il la du livre du '» Pasteur, mais avec quelque ré-
cite * presque toujours sous son nom dans serve, remarquant qu'il n'était point reçu de
les ouvrages qu'il a faits depuis. On recevait tous pour divin. Selon lui, U n'y a pas une
aussi dans toutes les Eglises la première Epî- syllabe •* dans les Epîtres de saint Paul qui
tre de' saint Pierre, qui était appelée* Catho- ne renferme quelque mystère.
lique, et la première de saint " Jean; quant 5. Origènc cite quelquefois dans ses écrits
aux cinq autres, savoir la seconde de « saint : de certains ouvrages que nous appelons apo-
Pierre, la seconde et la troisième de ' saint crypbi^s; mais, ordinairement, il remarque
Jean, celles de ^ saint Jacques et de ^ saint aucune autorité; entre autnis, un
qu'ils n'ont
Jude, elles souffraient encore alors quelque livre d'exorcismes sous le nom de Salomon,
**
contradiction. Origène les '° reçoit néanmoins une prophétie '^ faussement attribuée à Isaïe,
1 Inquiramus de quo dicatur : Dissecti sunl. Heb. ii, tum, etc. Jud. vi. Origen., in Matth., pag. 488, tom. I
qui forte studio a Judœis depravatus est , dum voces et Jacobum, fratrem Domini, similia protestantem, cum
nonnullas impertinentes scripte illi interseruerunt dicit Qui voluerit amicus esse hujus saîculi, ini-
:
epistolam admoduni brevem ; sed concedamus , si pla- sed etiam potestafem danlem discipulis suis super
cet, et secundam et tertiam ab illo scripias esse; ne- omnia dœmonia et ut infi^mitates sanarent dicet
, ;
hujusmodi fides mortua est, ut legimus in Epistola 46 Isaiam serra dissectum fuisse traditum est. Si
quœ Jacobi nomine circumfertur. Origen., in Joan., quis vero historiam hanc non admittat, quod ea in
pag. 284, tom. II Huet. apocrypho Isaia referatur, lis credat quœ in Epistola
9 Quod si quis Judœ quoque Epistolam admittat, vi- ad Heljrœos ita scrijjta sunt : Lapidali sunt, secti
deat quid ex hac sequatur doctrina propter illud : sunt, tentati sunt. Illud enim secti sunt, ad Isaiam
Angeles vero qui non servaverunt suum principa- refertur. Origen., in Matth., pag. M5, tom. I Huet.
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE Xm. — ORIGÉNE. 209
*
les livres intitulés *
: La Doctrine et l'Évangile Matthieu dit avoir été mis à mort parles Juifs
de saint Pierre, le livre ^ d'Enoch, un * de Je • entre le temple et l'autel, n'est point tirée
rémie un de ^ Jamnès et de Mambré, un du
,
des exemplaires authentiques de l'Ecriture,
prophète • Elie, les ''
Récognitions de saint Clé- mais de quelques livres apocryphes. En gé-
ment, Y Ascension ' de Moïse , V Évangile ^ des néral, il reconnaît que les Apôtres ont inséré
Hébreux, un livre '° intitulé Le Testament des
: dans leurs écrits quelques circonstances qu'ils
douze Patriarches, un autre ", la Prière de Jo- avaient tirées des livres apocryphes, et sou-
seph, enfin un livre de saint Jacques, et quel- tient qu'éclairés, comme ils étaient, des lu-
ques autres qui étaient sans nom d'auteur. Il mières du Saint-Esprit, ils l'ont pu *' faire
croit que l'histoire de ** Zacharie, que saint sans danger de se tromper, mais que, n'ayant
* Si vero quis velit nobis proferre ex eo libella qui ' Et Clemens romanus, Pétri apostoli discipulus, in
Pétri Doctrina appellatur, ubi Salvator videtur ad hanc quœstionem et sententiam cum pâtre, Luodiceœ, in
discipulos dicere : Non suiii dœinonium incorpo- circuitionibus locutus aliquid maxime necessarium in
reum, primo respondenâum est ei quoniam ille liber fine hujusmodi sermonum affert, de iis quœ ab ortu
inter libros ecctesiasticos non habetur, et osiendendum evenisse videntur, oratione décima quarta, ubi sic pa-
quia neque Pétri est ipsa scriptura, neque alterius let : Ignosce mihi, fili, etc. Recognit., lib. X, num. 10;
cujusquam qui spiritu Dei fuerit inspiratus. Origen., Origen., Philoc, cap. 23, pag. 81.
8 In Genesi serpens Evam seduxisse describitur, de
lib. I de Princip., pag. 421, tom. 1 Genebr.
* Putabant irjitur illum esse Josephi et Mariœ fi- quo in Ascensione Moysi ( cujus libelli meminit in
lium... ad id scilicet adducti traditione Evangelii, Epistola sua apostolus Juda) Michael archangelus cum
quod secundum Petrum inscribitur, vel libri Jacobi. diabolo disputans de corpore Moysi, ait diabolo ins-
Origen., îh Matth., pag. i23, tom. I Huet. piratum serpentem causam extitisse prœvaricationis
^Quanquam hic valde confuse calumniator {Celsus) Adœ et Evœ. Origen., lib. I de Princip., pag. 457,
loquitur in hac disquisitione de angelis missis ad ho- tom. I Genebr.
mines, ut qui obscure inaudivit nescio quid ex Enochi 9 Quod si quis Hebraeorum Evangelium proférât, in
litieris quas nec legisse videtur, nec scire. Quod non quo servator ipse hœc dicit : Modo accepit me mater
magna sit earum auctoriias in Ecclesiis : unde for- mea Sanctus Spiritus, uno capillorum meorum, et
tasse illud sumptum
sexagenos et septuagenos des-
est me in montem magnum Thabor portavit, etc.
cendisse, eosque malos reddiios, Origen., contra Cels., *" Sed et in alio quodam libello qui appellatur Tes-
lib. V, pag. 267. Qui fecit mullitudinem stellarum, tamentum duodecim Patriarcbarum, çwawjyw non ha-
ait Propheta, omnibus eis nomina vocat. De qu ibus beatur in canone, talem tamen quemdam sensum in-
quidem nominibus plurima in libellis qui appellantur venimus, quod per singulos peccantes singuli satanœ
Enocb sécréta continentur et arcana; sed quia libelli Intel ligi debeant. Origen., Hom. 15 in Jos., pag. 197,
istinon videntur apud Hebrœos in auctoritate haberi, tom. I Genebr.
intérim nunc ea quœ ibi nominantur, ad exemplum n Quod si quis admittat Precationem Joseph inscrip-
vocare differamus. Orig., in Num., pag. 178, tom. I tam in his libris, qui apud Hebrœos dicuntur apocri-
Genebr. phi, mox hoc dogma etiam aperte dictum inde sump-
*Sed quoniam quod post hœc dicit Evangelista : turus est. Origen., in Joan., pag. 77, tom. II Huet.
Tune impletum est quod dictum fuerat per Hiere- '2 Illud : In occisione gladii mortui sunt, ad Za-
miam prophetam dicentem, etc., inter ea quœ scripta chariam refertur occisum inter templum et altare, si-
sunt, non invenitur hoc Flieremias alicubi prophetasse cut Servator docuit ; testimonio suo
opinor, confir- ,
in libris suis, qui vel in Ecclesiis leguntur, vel apud mans Scripturarn in communibus quidem et publicis
Judœos referuntur. Si quis autem potesf scire, osten- libris vix divulgatam ; in apocryphis autem libris uti
dat ubi sit scriptum : suspicor aut errorem esse scrip- verisimile est extantem. Origen., in Matth., pag. 225,
turœ , et pro Zacharia positum Hieremiam, aut esse tom. I Huet.
aliquum secretam Hieremiœ scripturarn in qua scribi- 13 Operosum est autem, et procul ab opère propo-
tur. Talis est autem textus apud Zachariam prophe- sito, si velimus nunc inquirere quam muttorum libro-
tam : Et dicam ad eos Si bouum est in conspectu
: rum commemoratio fiât in divinis Scripturis, quorum
mercedem meam, aut abnegate; et
vestro, date sta- lectio nulla nobis omnino Sed neque apud
est tradita.
tuerunt mercedem meam trigenta argenteos, etc.* Judœos haberi quidem usum hujusmodi reperimus lec-
Si autem hœc dicens aliquis existimat se offendere, tionem, quœ sive pro eo quod aliqua supra humanam
videatne alicubi in secretis Hieremiœ. Hoc propheta- intelligentiam continebant, placuit Spiritui Sancto au-
tur, sciens quoniam et Apostolus scripturas quasdam ferri de medio, sive quod essent de Scripturis his quœ
secretorum profert, sicut dicit alicubi : Quod oculus appellantur apocryphœ, pro eo quod multa in eis cor-
non nec auris audivit. In nullo enim reguiari
vidit, rupta, et contra fidem veram inveniuntur a majoribus
libro hoc positum invenitur, nisi in secretis Heliae tradita, non placuit eis dari locum, nec admitti ad
prophetœ. Item quod ait : Sicut Jamnes et Mambres auctoritatem, supra nos est pronuntiare de talibus, illud
restiterunt Moysi, non invenitur in publias Scripturis, tamen palam est multa vel ab Apostolis, vel ab Evange-
sed in libro secreto qui supra scribitur : Jamnes et listis, exempta esse prolata et Novo Testamenfo inserta
Mambres Unde ausi sunt quidam epistolam ad
liber. quœ in his Scripturis quas canonicas habemus nun- ,
Timotheum repeUere quasi habentem in se textum quam legimus in apocryphis tamen inveniuntur, et
,
alicujus secreii, sed non potuerunt. Orig., in Matth., evidenter ex ipsis videntur assumpta. Sed ne sic qui-
pag. 124, tom, II Genebr. dem locus apocryphis dandus est : non enim tran-
6 Ibid. — 6 Ibid. seundi sunt termini quos statuerunt patres nostri. Po-
H. U
210 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pas le mémo secours qu'ils avaient, nous no phis dignes de que les antres; les Juifs
* foi
devons point nous servir do raulorilô de en ont néanmoins corrompu ' quelques-uns;
ces sortes de livres. dans l'endroit de l'Evangile de saint Jean où
Il est encore à remarffncr qu'un auteur plus nous lisons «Ces choses se passèrent en Bé-
:
la Genèse : a Les enfants de Dieu voyant que le lieu où les porcs se précipitèrent dans la
les iilles des hommes étaient l^elles, prirent mer, n'était pas dans le pays des Géraséniens,
pour femmes toutes celles d'entre elles qu'ils où il n'y a ni mer ni étang, ni dans celui
avaient choisies, » l'entendait ' du dt'sir que des Gadaréniens, mais dans celui des ^ Gergé-
les âmes avaient eu d'être unies à des corps, siens; l'apôtre saint Paul suit la version des
preuve qu'Origène n'est pas le premier qui ait Septante dans ses Epitres; les Epîtres aux
^
cru la préexistence des âmes avant les corps. Corinthiens sont ' antérieures à celle aux
Selon Origène, les exemplaires hébreux sont Romains, et il écrivit celle-ci de ^ Corinthe.
iuit cnim fieri ut Apostoli , rel Evangelistœ , Sancto tionis, BcViania vero domus obedientiœ. Origen., in
Spiritu rcpîeti , scivcrint quid assumemhim ex illis Joan., pag. 130, tom, II Iluet.
cssef Scripturis,quidve refutandum : tiobis autem non " Dispensatio namque circa porcos e rupe prœcipi-
est absque periculo aliquid taie prœsumere, quibus tatos ,mari suffocafos a dœmoniis , scriptum est
et in
non est lanta Spiritus abundanlin. Origen., Prolog, in fuisse Gerasenorum. Gerasa autem urbs est
in loco
Cant., pag. 315, tom. I Geocbr. Arabiœ, neque mare, neque stagnum in propinquoha-
• Sed interpretemur ejus dictum candidius quippe ,
bens. Nec mendacium adeo aperlum, quodque facile
qui vidimus, quod ille non vidit in Genesi scriptum : redargui posset, dixissent Evangelistœ, viri diligenter
Viderunt Dlii Doi lilias hominuin quod esseut pul- agnoscentes regionem Judeœ; quoniam vero in jmucis
cbrtE; acceperuntque bibi usores sclectas ex omui- exemplaribus invenimus in locum Gadarenoruni, ad
bus; nihilominus eos , qui valent intelligere mentem hoc etiam est dicendum Gadaram quidem civitatem ,
prophcticam admonemus etiam ante nos quemdam , esse Judeœ; circa quam celeberrima balnea sunt,
hœc retu lisse ad anintas cupidus vivendi in corpore, haudquaquam vero in ea esse stagnum vel mare prœ-
eas aiebat vocatas per figuratam locutionem filias ho- cipitiis adjacens. Ât Gergesa, a qua Gergesœi, urbs
minum, Origen., contra Cels., lib. V, pag. 867. est antiqua juxta stagnum quod nunc Tiberiadis vo-
2 In /lis vero quœ exemplaria veriora sunt et cum camus. juxta quam rupes est stagno adjacens, e qua
hebrœis consonant , habelur : Non debui neque de- ostenditur porcos a dœmonibus in prœceps delatos
buit mihi quisquam. Oportet igitur et id quod in iisu fuisse. Interpretatur autem Gergesa, habitatio ejicien-
est atque in Ecclesiis legitur, exponere , et hoc quod tium, fartasse cognomentum sorfita propheticœ illius
in hebrœis codicibus invenitur iniactum non prœte- rei quam locorum cives crga Servatorem fecerunt
rire...quia autem et alla nobis expositio residua est obsecrantes eum ut e finibus suis excederet. Origen.,
propter exemplaria ceriiora, in quibus continetur : m Joan., pag. 131, tom. II Iluet.
Non debui neque debuit inibi quisquam, et hune lo- Tota die expandi manus meas ad populum non
*
ungue adamautino sculptum super pcctus cordis eo- autem secuius est Septuaginta interpretum varietatem
rum. Quoniam difficile est uliquem se malum confi- in suis scriptis ; sicut illi interpretati sunt, exponit.
teri, ideo Judœi qui exemplaria nonnulla falsarunt, Origen., in Epist. ad Boni., pag. 384, tom. II Geneb.
mune habeat cum Bethania. Dicunt autem ostendi nisi Crispum et Caium. Simile et deinde datur indi-
circa tumulos Jordanis Bethabara, ubi historiœ di- cium, ubi dicit : Salutat vos Erastus, arcarius civita-
cunt Joannem baptizasse, estque nominis interpretalio tis. De quo Erasto ad Timotheam secundam scribens
consequens baptismatis prœpat^antis Domino populum dixit : Erastus remansit Corintbi. Ex quibus omnibus
instructum. Est enim si interpreteris domus instruc- colligi certissima videntur indicia, quod de Corintho
I
[iri« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 2H
Ses mnxi-
mcs ?m' Ift
6. C'était la coutume • dans l'Eglise de lire avaient de s'instruire de la loi de Dieu, tandis *
le-tiirc (le
l'Ecriture sainte tous les dimanches. Les chré- qu'ils de grandes dépenses pour
faisaient
l'Ecriture
sainte et sur
tiens s'assemblaient donc en ce jour. Mais devenir habiles dans les lettres humaines; il
la ninnière
de l'étudier.
Origène se plaint de plusieurs qui ne venaient exhorte ^non-seulement à venir en-
les fidèles
à l'église qu'aux jours * solennels moins en- , tendre la lecture des Ecritures dans l'église,
core pour s'instruire que pour se relâcher. Il mais encore à les lire eux-mêmes dans leurs
se ^ plaint aussi de ceux qui sortaient de l'é- maisons. Ses maximes sur l'étude de l'Ecri-
glise aussitôt après avoir ouï la lecture, sans ture sainte sont remarquables. Il veut que
en conférer ensemble et sans interroger les ceux qui enseignent dans l'église ne disent
prêtres; etde quelques autres qui n'attendaient rien d'eux-mêmes ', mais qu'ils prouvent tout
pas que la lecture fût finie, ou qui, pendant par l'Écriture, à l'exemple de saint Paul, qui
qu'on faisait la lecture, s'entretenaient de la cite souvent, quoiqu'inspiré de Dieu; que
toute autre chose dans un coin de l'éghsc. II les interprètes suivent
^, non leur propre sens,
reproche* aux chrétiens leur attachement aux mais celui du Saint-Esprit; qu'on se défie des
affaires temporelles et le peu de soin qu'ils hérétiques, quand ils citent l'Ecriture; qu'on
« Quoniam quœ in Scripluris solœcismi formam ha- quœstiones proponentes quœ objici a pluribus soient,
bent, diclione ipsa legentem confundunt, ut
suspiceiur etiam absolutiones earum. Ex his quœ nobis sunt a
noti recte, neque ut se habent, ita scriptas esse divinas majoribus tradita, requiramus, ut cum hujuscemodi
Lifteras : ut et audeant aliqui eas emendationis prœ- fundnmenta jecerimus ab historiœ textu possimus
,
texlu immutnre, et circumpositam iis quœ consecutio- ascendere ad spiritalis intelligcntiœ mgsticum et al-
netn haberp videntur verbis intelUgentiam transpo- legoricum sensum et si quid in eis arcanum confi-
,
quantum e locutione in propositis verbis conjicere Itcet révélante. Hom. tom. I Genebr.
2 in Gènes., pag. 5,
6 SV quis est qui ad audiendum verbum Dei con-
latentem in ipsis sententiam videamus, etc. Philoc.,
veniat audiat quid prœcepit Dominus sanctificatus
, ,
cap. 8, pag. 32.
^ Si quando legens Scripturam, incidas in senten- venire débet ad audiendum verbum, lavare débet ves-
tiam in qua sit lapis offensionis et petra ruinœ, ac- timenta sua. Si enim sordida hue detuleris vesti-
cusa teipsum, neque non credas lapidem hune offensio- menta, audies et tu: Amice, quomodo hue introisti non
nis habere sensa illa , ut fiât quod dictum est; et qui habens vestem nuptialem. Nemo ergo potest audire
crédit non confundetur. Primum crede , et invenies verbum Dei, nisi prius fuerit sanctificatus, id est,
sub hoc offendiculo plurimum sanctœ utilitatis. Ibid., nisi fuerit sanctus corpore et spiritu, nisi vestimenta
est enim paulo post ad cœnam
sua laverit. Ingi-essurus
cap. 10, pag. 37.
5 A'on igitur animo langueamus cum audimus , nuptialem, manducaturus est de carnibus Agni, pota-
Scripturas quas non intelligimus sed fiât nobis se- ,
turus est poculum salutare. Hom. 11 in Exod., p. 60,
suspicetur aliquis infidelis, vel ut fidelis admitte, quia Deo, vel de Domino Jesu Christo, vel de Spiritu
Sancto, non solum autem de his, sed de aliis creatu-
utiles sunt, divinitus esse datas. Ibid., cap. 12, p. 40.
de dominationibus , vel de virtutibus
Oportet eum qui semel admiserit opificis mundi lias
ris, id est, vel
proptcr hoc necessnrium videtur, prius de
esse Scripturas , animum quoque inducere quœcumque
sanctis :
est omnium effector Deus... Sic igitur et in divims eam falsis opinionibus asserebant, posteaquam credi-
Litteris videndum est, multa in il lis recondita esse, dimus Filium Dei esse Christum, et ab ipso nobis
quorum nobis est perdtfficilis explicatio. Ibid., cap. 2, hanc disccndam esse persuasimus : ita cum multi sint,
qui se putent sentire quœ Christi sunt, et nonnulli
pag. 23 et 24.
congregemus eorum diversa a prioribus sentiant sei-vetur vero ec-
Omnibus modis conandum est, ut in ,
4
clesiastica prœdicatio per successionis ordinem ab
corde noslro altendentes lectioni, exhortationi et doc-
die ac nocie, non so- Apostolis tradita, et usque ad prœsens in Ecclesiis
trinae : et in lege Dei meditando
lum nova Evangeliorum oracula et Apostolorum et ho- permanens : illa sola credenda est veritas, quœ in
verum etiam vetera legis umbram nullo ab ecclesiastica discordât traditione. Lib. 1 de
rum explanationes,
Princip., pag. 404, tom. Genebr.
habeniis futurorum bonorum, ac Prophetarum qui his
I
non incomparabilia inter se comparantes, sed compa- nos illis credere non debemus , nec exire a prima et
traditione nec aliter credere niii quem-
rabilia quamdam sermonis similitudinem idem decla- ecclesiastica , ;
Orig., in Matth., cap. 13, pag. 7, lom. II veritas Ecclesiœ Dei : Ab ea enim sola sonus in om-
verbum Dei.
Genebr. nem terram exivit, et in fines orbis terrae verba eo-
* Incipientes de arca disserere; primo omnium vi- rum, et velociter currit sola vere veritas Dei. Orig.,
deamus quœ de ea secundum litteram referuntur, et in Matth., pag. 92, tom. U Genebr.
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. - ORIGÈNE. 213
religion. Mais, par cette tradition, entend il invisible, son Verbe, la sagesse éternelle, la
celle qui est venue de main en main depuis vie, la splendeur de la gloire du Père, à qui
*
les Apôtres jusqu'à nous. il est égal, le Père s'étant commimiqué avec
8. 11 distingue * trois personnes en Dieu, le toute sa grandeur à son Fils uuique, qui est
Père, le Fils et le Saint-Esprit ; mais il sou- aussi le premier-né de toutes les créatures et
tient * que les trois personnes ne font qu'un par qui il a ® créé toutes choses Le Fils n'est .
seul Dieu. Car, quoique le Père et le Fils puis- point séparé du Père • c'est pourquoi il dit;
sent être considérés comme deux choses à dans l'Evaugile : « Quiconque me reçoit, re-
l'égard de leur liypostase, ne sont néan- ils çoit celui qui m'a envoyé.» 11 est même dans '
moins qu'un par rapport à leur substance. Le le Père, et il en est sorti pour venir vers nous
Fils est coéternel ' à son Père et de même sous une forme visible, le Fils de Dieu étaut *
substance que lui ; limage invisible de Dieu invisible de sa nature ®, incorporel et un '"pur
1 Est ergo hœc tvium dictinctio personarum in Pa- gendum erit. » Origen., apud Athan., lib. de Décret.
quœ ad pluralem puteo-
ire et Filio et Spiritu Sancto, Nie. Synod., tom. I, pag. 232.
rum numerum revocatut: Sed horum puteorum unus * Juxta nostram doctrinam non solus universorum
est fons. Una enim est substantia et natura Trinita- Deus et Pater magnus est : communicavit enim suam
tis. Origen., Hom. 12 in Num., pag. 135, tom. I Ge- magnitudinem cum unigenito et primogenito créa-
Debr. Nos aufem qui très personas, Patrem et Filium turœ totius ; ut cum invisibilis Dei sit imago , magni-
atque Spiritum Sanctum esse credimus et ingenitum , tudine quoque imaginem Patris referai alioqui non
ninil prœter Patrem esse nobis persuasimus; Spiritum habitura erat imago illius invisibilis Dei, pulchram
Sanctum et iis omnibus quœ per Verbum fada sunt ut ita loquor proportionem, nisi magnitude etiam ac-
et ordine iis omnibus quœ a Paire per Christum con- cederet. Origen., lib. VI contra Cels., pag. 323.
dita sunt, prœstantiorem esse, ut pium et verum con- * Est enim contemplatu difficilis Deus Verbum, dif-
cedimus et approbamus. Origen., tom. II in Joan., ficilis et sapientia, per quam Deus creavit omnia.
pag. 56 edit. Huet. Origen., lib. VI contra Cels., pag. 323.
' Quod si id quod apud Isaiam scriptum est, ait 6 Deinde vero cum a Filio Pater non separetur,
Servator noster, se a Pâtre missum esse , et ab ipsius apud eum est qui Filium susceperit : unde dictum
Spiritu, respondendum est etiain hoc loco missum esse est, Lucœ ix, 48 Et quicumque me receperit, recipit
:
Christum a Spiritu, non quod natura différât, sed eum qui me misit. Orig., in Matth., tom. I, pag. 325
propter Filii Dei conservatoris noslri, qui se infra edit. Huet.
eum minuit, in humanitate sumenda dispensationem. ,
''
Quoniam quando Filius in Pâtre est, antequam
Origeu., ibid., pag. 57. Vnum igitur Deum sicut et seipsum exinaniat, veluti locus ipsius est Deus. Orig.,
rationem reddidimus, Patrem et Filium colimus... Pa- in Joan., pag. 306 edit. Huet.
trem veritatis et veritatem Filium, duos quidem sub- * Formam namque servi accepit, et cum ipse invisi-
sistentia, unum vero concordia, consensu, voluntatis- bilis sit naturœ, utpote œqualis Patri, habitum tamen
que identitate. Orig., lib, VIII contra Cels., pag. 386. visibilem suscepit. Origen., Hom. 4 in Gènes., pag. 12
' Quod autem Verbum ab œternitate sit cum Pâtre, edit. Genebr., tom. IL
nec alterius quam Patris substantiœ vel hypostasis * Porro Deus, juxta nostram opinionem, cum sit in-
proprius sit, ut declaravit synodus , liceat vos iterum corporeus, est invisibilis; contemplativis tamen homi-
a labortoso Origent audire. Num quœ il le velut inqui- nibus corde, id est mente, cernitur Fatemur etiam
rens et disputuns scripsit non ita accipienda sunt, Deum contemplatu difficilem : sed non solum imo et
quia sic ipse sentiret, sed ex eorum mente quibuscum ejus unigenitum. Est enim difficilis contemplatu Deus
disputât; atquœ fidenter définit et affirmât, hœc vera Verbum, difficilis et sapientia per quam Deus o-eavit
perquam studiosi sententm. Itaque post
est viri Iiujus omnia. Origen., lib. VI contra Cels., pag. 323.
ea quœ exercitationis gratia ad hœreticos dixit, sta- *o Non est eni?n corpus, juxta nostram doctrinam,
tim piopriam ipse metitem his verbis exponit : « Si est spiritus, sicut nec ignis ille corpus est, qui Deus esse
imago Dei invisibilis, invisibilis guoque est ipsa imago. dicitur apud eum, qui dicit... Deus noster ignis con-
Qutn etiam addere ausim, cum sit similitudo Patris, sumeus. Nam hœc omnia figurate dicuntur, ut per
non posse fieri, ut aliquando non fuerit. Quando corporea consuetuque nomina indicetur natura illa in-
enim Deus quem Joannes lucem appeilat , nam Deus telligibilis ad differentiam sensibilium , Scriptura
lux est, propriœ gloriœ splendore caruit ut quis au- , solet intelligibilia vocare spiritus, et spiriiualia, ut
deat principium existendi Filio tribuere, quasi scilicet cum Paulus dicit : sed sufficieutia nostra ex Deo est,
antea non fuisset? Quandonam vero non erat Verbum, qui nos fecit idoneos ministros Novi Testament!, non
Verbum, inquam, quod et Patrem cognosctt, et est cJia- litterœ, sed spiritus, nam littera occidit, spiritus vi-
racter acimago ejusdem substantiœ, quœ digne nec vificat. Ubi litteram nominavit , cum juxta sensum
exprimi, nec nominari, nec proferri possit? Intelligat divinas litteras accipimus , spiritum vero cum juxta
enim qui dicere audet , fuit aliquando cum non esset intellectum. Ita quod ad Deum spiritum attinet, quo-
Filius, idem esse ac si diceret : Sapientia aliquando niam SarrMritani Judœique corporaliter et juxta
non erat, Verbum non erat, Vita non erat, » Idem rur- figuras mandata legis observabant, dixit Servator ad
sus ita alibi loquitur : « Verum nefas est, nec pertculo Samaritanam : Deus spiritus est, et qui eum adorant,
vacat, propter nostram infirmitatem, Deum, quantum in spiritu et veritate debent adorare. Quibus verbis
in nobis est, unigenito privure Verbo, quod semper docuit non carnaliter adorandum esse Deum, sed spi-
cum illo fuit, et illa erat sapientia qua delectubaiur. ritu. Ipsum esse spiritum etiam inde colligitur, quo-
Alioquin eum non semper fuisse delecialum intelli- niam eeque pollet,si quis eum in spiritu et intelUgi-
214 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
esprit. Quoiqu'cnvoyc par le Père et par le le salut des hommes, conjointement avec le
Saiut-Esprit , il n'en est point ' tli'peudaut et Fils. C'est lui encore qui nous remet nos pé-
®
n'est pas d'une autre substance. Les diffé- * chés, comme les autrespersonnes de la Tri-
rentes fonctions des personnes de la Trinité nité, quoique l'Ecriture sainte donne cette
ne causent aucun changement 'dans leur na- prérogative à Jésus-Christ, comme elle attri-
ture, qui est * une en trois personnes. Le Saint- bue^ au Père la création de l'univers, au Fils
Esprit est la ne parait pas que
' troisième. Il de communiquer la raison, au Saint-Esprit
les Juifs en aient eu connaissance, ni qu'ils la sanctification. On par saint Basile '°,
voit,
aient ^ désiré de le recevoir. C'est néanmoins qu'Origèue finissait beaucoup de ses entretiens
le Saint-Esprit qui parlait par les Prophètes sur les psaumes par la glorification du Saint-
et qui a été envoyé par le Père ' pour opérer Esprit, et que, dans ses expositions sur saint
in Joan., pag. 57 edit. Huet. fert,per quod ad hœc quœ sunt, prœstatur eis ut bene
s Quœ sunt ista duo Seraphim ? Dominus meus Jé- siîd. Est et alia quoque etiam Spiritus Sancti gratia
cas, solus Christus in prœsenti lectione nunc peccata nens in eo cum dicit : Divisiones donorum sunt, vel
dimittit, et tamcn certum est a Trinitate peccata di- donationum, idem autem spiritus et divisiones sunt
;
s Origen., Hom. 12 in Num., pag. 135, ubi supra, sunt operalionum, idem autem Deus qui opcratur
et tom. II in Joan., pag. 56, ubi supra. Porro ulii omnia in omnibus. Unicuique autem datur manifes-
legentes Mittam vobis advocatum Spiritum veritatis,
:
tafio Spiritus secundum id quod expedit. Ex quo
nolunt intelliqere tertiam personam a Paire et Filio manifestissime designatur quod nulla est in Trinitate
discretio, sed hoc quod donum Spiritus Dei ministratur
et divinam sublimemque naturam, sed apostolum Pau-
lum. Orig., Hom. 24 in Luc., tom. II Geueb., pag. 150. per Filium, et inoperatur per Deum Patrem. Omnia
* Quis ita desideravit Deum sic ut dicat : Sitivit autem operalur unus alque idem Spiritus dividens sin-
gulis prout vult. Orig., lib. I Periarch., cap. 3. Ego
anima mea ad Deum vivum? Quis ita sitivit ubera
petrœ? Petra autem erat Christus. Quis ita sitivit autem existimo Spnritum Sanctum, ut ita dicam, ma-
Spiritum Sanctum sic ut dicat : Quemadmodum desi- teriam gratiarum quœ a Deo proficiscuntur suppeditare
derat cervus ad fontes aquarum ita desiderat anima ;
iis qui per ipsum ejusque communionem sancti sunt,
dum materia quam dixi , charismatum a Deo quidem
mea ad te Deus. Nisi hosce très fontes aquarum siti-
verimus, nullum fontem aquarum rejieriemus. Vide- operatur, a Christo autem ministratur, per Spiritum
bantur Judœi sitire unicum fontem aquarum Deum; vero Sanctum existit. Orig., tom. II in Joan., p. 57 Huet.
iiï
Jam Origenem multis in locis expositio-
vero et
sed quia Christum et Spiritum Sanctum minime sitie-
num deprehendimus , cum
quas in psalnios edidit,
bant, de Deo quoque bibere non potuerunt. Videbantur
Christum Jesum sed quia non Sancto Spiritu grattas agentem Deo, virum qui non
item hœretici sitire ;
men certum est a Trinitate peccata dimitti. Origeu., lib. de Spiritu Sancto, cap. 29.
[III* SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 215
Jean, il reconnaissait en termes formels la di- le sein de la Vierge était un cori)s matériel,
vinité de la Trinité adorable.Ce témoignage sujet aux blessures et à la mort comme celui
et quelques * autres que nous lisons encore des autres hommes, en sorte qu'on ne peut
dans les écrits d'Origèue, le mettent à cou- douter de la ' réalité de sa chair; il s'est aussi
vert des erreurs qu'on lui a imputées sur ce uni ù * une àme humaine, d'une union très-
mystère. intime, pour n'en être jamais séparé il y a ;
Sur l'in-
carnation et
9. Il moins orthodoxe sur celui
n'est pas deux natures * en Jésus-Christ, l'une divine,
la divinité
de Jésus-
de l'incarnation du Verbe de Dieu; car, selon l'autre humaine, unies en une * seule per-
CUi'ist.
Origèue, le * corps que le Verbe prit dans sonne. Jésus -Christ est doue vrai Dieu et
1 Origène dit ailleurs qu'on doit prier et louer Jecus disserere. Origen., lib. I contra Cels., pag. 52.
Dieu dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Prop- Non prœdixerunt Prophetœ Deum crucifigendum
terea Domini misericordiam deprecemur, ne, nobis ta- quando de mortem assumenie sic loquuntur : Vidimus
centibus, lapides clamitent, sed loquamur et laudemus cum, non habeulçm specicm, nec pulcliritudinem...
Deum in Pâtre, et Filio, et Spiritu Sancto. Origen., Homo in plaga constitutus et dolore. Vide ut aperte
Hom. 37 in Lucani, pag. 158, tom. II edit. Genebr. hominem nomine/tt, qui humana passus est. Et ipse
Et encore : que le Saint-Esprit, de môme que le Jésus bene scicns quod moriturum erat esse hominem,
Fils, reçoit toute la splendeur de la gloire de Dieu. ait suis insidiatoribus : Nunc autem quaeritis me
Cœterum quoniam hune locum devenimus, ubi Deiis
in interficere Iiomiuem qui veritatem voLis locutus
:
per Christ uni glorificatur, opposite quœremus, quomodo sum, quam audivi a Deo. Quod si quid in hoc quem
etiam per Spiritum Sanctum glorificetur atque arbi- •
per se hominem intelligimus divinitutis inerat, id quod
tror ego qiddem totius gloriœ Dei sptendorem esse erat unigenitus Dei et primogenitus creaturœ totius,
Filium, ut a Paulo trudituni est dicente : Qui cum cujus verba sunt : Ego suni veritas, etc., alia de hoc
sit splendor gloriaî; pervenire tamen particulares ejusque essenlia considerutio est, seorsum ab eo quem
splendores ab hoc splendore totius gloriœ ad reliquam in Jesu intelligimus homine, quamobrem ne simplicis-
naturam rationis capacem. Alioqui non arbitrer perci- simus quidem christianus et inexercitatus in doctrina
pere aliquem posse omnem sptendorem totius gloriœ exquisitiorc diceret obiisse veritatem
, aut vitam , aut
Dei, nisi Filium Dei. Si eo addas etiam ejus Spiritum, viam, aut vivum panem qui descendit de cœlo nec
optime tu quidem certe et absolutissime de Deo et di- ullus nostrum ita insanit, ut dicat mortua est vita
ces.et senties. Orig., in Joan., tom. II, pag. 416 Huet. igitur in quantum cogitantur gcsta Jesu, quœ in eo
[Ces dernières paroles ont été rejetées par La Rue patravit deitas, ])ia sunt nec aliéna a sanctis de Deo
,
comme une note de copiste.] cogitationibus : in quantum autem homo erat , supra
* Nec enim est simile quod nos prœdicamus de Jesu omnes homines ornatus pai'iicipatione ipsius Verbi et
ejusque virtute quod enim ex Virgine natum est
,
ipsius sapientiœ , susiinuit ut sapiens et perfectus,
corpus, erat constans ex humana maleria vulneribus quidquid oportebat sustinere. Nihil non facientem pro
moi'tique obnoxium. Orig., lib. lll cont. Cels., pag. 125. génère hominum sive rationalium. Origen., lib. VII
* Alii igitur Celso concédant non fuisse illum contra Celsum, pag. 342.
(Christum) mutatum, sed illusisse oculis videntium : 6 Hœc autem non eo a nobis dicta sunt quod sepa-
nos quibus persuasissimum est non putative, sed vere, remus a Jesu Filium Dei, unita est enim post dis-
manifesteque advenisse Jesum ad homines, alieni su- pensationem anima Jesu corpusque cum Verbo Dei :
mus ab objedo per Celsum crimine. Origen., lib. IV nam si juxla Pauli doctrinam dicentis : Qui cohajret
contr. Celsum, pag. 172. Domino unus est Spiritus; quisquis intelligit, quid sit
* Quod autem tanto Dei Filio anima Jesu dicitur cohœrere. Quodque ei cohœrens unus sit cum eo Spi-
uni ta per summam participât ion em nunquam ab eo ritus : quomodo non multo divinius et prœstantius
separanda, nil mirum est. Norunt enim sacri d.ivina- unum est id quod cum Dei Verbo est compositum ?
rum Litterarum sermones et alia, quœ, duo cum sint Origen., lib. II contra Celsum, pag. 64. Sed ubi venit
natura, in unum conjuncta reputantur et sunt : quale plenifudo temporum et adolevit, atque Unigenitum
est illud de mariio et uxore dictum, non amplius suum Pater Spiritu Sancto unctum misit in liunc mun-
sunt duo, sed caro uua et de viro perfecto, qui agglu-
: dum, odorata sponsa divini unguenti fragrantiam
tinatur vero Domino, Verbo, et sapienliœ, et veritati, sentiensque quod illa oninia aromata quibus prius usa
quod agglutiuatus Domino unus est spiritus. Quod si videbatur longe inferiora sint, ad comparationem
is qui Domino agglutinatur, unus est spiritus, quanto suauitatis novi hujus et cœlestis unguenti, ait : Odor
magis Jesu anima o.gglutinata Domino, ipsi Verbo, ungueutorum tuorum super omnia aromata et quo- ;
ipsi sapientice , ipsi veritati, ipsi justitiœ? Atque ita niam Christus idem sjjonsus atque idem pontifex dicitur:
non sunt duo anima Jesu et Deus Verbum totius crea- pontifex quidem secundum hoc quod mediator est Dei
turœ primogenitus, Lib. VI cont. Cels., pag. 308 et 309. et hominum omnisque creaturœ, pro qua et propitiatio
5 Quid igitur absurdum, si is qui semel Homo fac- factus semetipsum offerens hostiam pro peccato mundi :
tus est, humano more ducatur ad vitanda pericula sponsus vero secundum hoc quod Ecclesiœ jungitur
nam nimia novitas auxilii , supraque modum illus- non habenti maculam aut rugam, aut aliquid horum :
tris non conveniebat ei qui vellet ostendere se ho- consideremus ne forte unguentum illud pontificale quod
minem a Deo testimonium habentem, occulfare quid- in Exodo componi jubetur arte pigmentarii , istius
dam divinius sub Itumana specie, id quod erat proprie unguenti quod nunc odorata sponsa miratur, teneat
Dei Filius, Deus Verbum, potentia, sapientiaque Dei, rationem Videumus ergo quomodo compositum sit
qui vocatur Christus. Non est autem hujus temporis illud unguentum. Et locutus est, inquit, ad Moysen :
de sic composite, et ex quibus constabat homo factus Accipc tibi llorem myrrbui electiE, etc. Uœc in iege
216 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
vrai homme tout ensemble *
; et sa divinité à la tristesse, aux autres passions et à lamort
recouauc des chrétiens dès le
était loil(!mcut même, c'était comme * homme et non comme
temps d'Adrien, que his païens * leur en fai- Dieu. Le motif de l'incarnation du Fils de Dieu
saient un crime, et que les chrétiens repro- a été le salut des hommes. Car quel autre
'
chaient * dès-lors aux Juifs de ne l'avoir pas pouvait sauver l'àme do l'homme et la con-
crue. Une autre preuve de la divinité de Jô- duire à Dieu, sinon le Verbe de Dieu qui, étant
sus-Clu-ist est que les chrétiens, non-seulement en Dieu au commencement s'est fait chair
,
ceux qui vivaient dans la piété, mais ceux pour ceux qui étaient attachés à la chair et
mêmes qui menaient une vie déréglée, chas- qui étaient devenus comme chair, afln qu'ils
saient * les démons du corps des possédés en pussent le recevoir, eux qui ne le pouvaient
prononçant le nom de Jésus-Christet récitant voir, en tant qu'il était Verbe et en Dieu et
quelques parties des évangiles. S'il a été sujet Dieu lui-même? Au reste, c'a été volontaire-
quidem referri audierat sponsa ; sed rationem eorum nomine Jesu cum commemoratione
tur [christiani), sed
vevitatemque nunc perspicit. Vide ergo quod istœ qua- ejus factorum : nam
his verbis sœpenumcro profli-
tuor species unguenti istius, formam tenebant Incarna- gati sunt dœmones ex hominibus prœcipue quoties qui
tionis Verbi Dei, quod ex quatuor elemcntis compagi- enuntiatit ea, sano affectu et intégra fide proferunt.
natum corpus assumpsit , in quo corpore myrr/ia illa Tanta certe vis nomini Jesu inest contra dœmones, ut
mortis ejus, quam sive ut pontifex pro populo, sive nonnunquam, etiam a malis nominaium, sit efflcax;
ut sponsus pro sponsa suscepit servat indicia , sed quod docens Jésus dicebat : Mulli dicent mihi in die
hœc omnia oieo puvo colliguntur, per quod ostenditur illa, in nomine tuo dœmonia ejecimus et virtutes
vel misericordiœ vel salutis causa fuisse quod is qui
, fecimus. Ibid., lib. I, pag. 7. Tatitum abest ut eos
erat in forma Dei, formam servi 'susceperit , vel ea {dœmones) veneremur, ut precibus et sacrurum Litte-
quœ ex materiali substantia in Christo fuerant as- rarum recitatione profligemur eos ex obsessis homini-
sumpta, per Spiritum Sanctum, redacta in unum fuisse, bus, et ex locis sibi dicatis, interdum etiam ex ani-
atque in unam speciem quœ est persona mediatoris malibus nonnunquam enim ut hœc quoque lœdant, ope-
cffecta. Orig., Hom, 1 in Cant., pag. 318, tom. I Geneb. rantur dœmones. Ibid., lib. VI, pag. 376.
* Quod si talis erat Jesu vita quis sanœ mentis ^ Si ergo aliquis defendens passiones humanas pro-
,
conférât eum cum prœstigiatorum, proposito, ac non fert nobis etiam ipsum tristatum fuisse Jesum, au-
potius credat fuxta oracula Deum esse conspectum m diat quoniam qui tentatus est per omnia secundum
humano corpore, ut in nostrum genus exerceret bene- simililudinem prœter peccatum, hic non est tristatus
ficentiam. Origen., lib. I contra Celsum, pag. 54. tristitia passionis ipsius, sed factus est secundum hu-
Venerunt igitur (Magi) in Judœam, docti jam natum manam naturam tantum in ipso principio tristitiœ
esse regem quemdam, cœterum ignari cujusdam regni et pavoris , ut ostendat discipulis suis prœsentibus,
aut ubinam natalium ejus sit locus, fcrentes dona maxime Petro magna de se exisfimanti , rébus ipsis
composito ( ut sic loquar) ex mortali et Deo, aurum quod postea eis dixit : quia spirilus promptus est,
in signum potestatis regiœ, ut morituro mgrrham, ut caro autem infirma ergo cœpit quidem tristari
Deo thus. Ibid., pag. 46. secundum humanam naturam, quœ talibus passionibus
* Post hœc autem fortassis aliquis putabit nos re- subdita est non autem secundum divinam virtutem
,
prehendi probabiliter, dum dicit Celsus : Si nuUum quœ ab liujusmodi passione longe remota est. Origen.,
alium isti prœter unum Deuin colerent, videri pote- Tract. 35 in Matth., pag. 115, tom. II Genebr. Dein-
raut merito contemnere. Nunc cum recens
alios ceps autem putans {Celsus) non corpus Jesu extensum
exortum hune immensis extoliant honoribus, cre- et cruciatum, non deitatem ejus, dicere Dei Filium;
dunt se nihil peccare in Deum quod ministro ejus et in quantum cxtendebatur ac cruciabatur Deum cre-
reverenter serviant. Ad quod respondendum, si Cel- dere : Tum vero, inquit, Deum prœsentem, qui dis-
sus intellexisset z7/M<i ; Ego et Pater unum sumus; et tenderunt et cruciaverunt, nihil mali passi sunt. Qua
illud in precatione dictum a Filio Dei, sicut ego et de re, quoniam superius diximus multa nunc data
tu unum sumus non putasset nos et alium colère
; opéra locum hune silentio prœteribimus. Origen.,
prœter Deum universorum Dominum. Orig., lib. VIII lib. V III contra Celsum, pag. 404. Voyez plus haut
contra Celsum, pag. 385. les témoignages touchant les deux natures eu Jésus-
Prœterea dicit {Celsus) hoc Christi fidèles Judœis
» Christ.
objicere, quod non credant Dei Filio, qua de re jam • Quapr opter si nos Celsus interrogaverit quomodo
super ius respondimus, simulque ostendimus quomodo putemus nos cognosccre Deum, et per illum salutem
eum Deum opinemur, et quatenus existimemus homi- acquirere, respondebimus idoneum esse Dei verbum
nem. Lib. II contra Celsum, pag. 61. ut ingressum quœrentibus , se suumque adventum ex-
* Quod si Celsus credet Evangeliis quoties ei viden- pectanfibus Patrem revelet qui cerni non potcst nisi
,
,
tur contra christianos facere, eisdem asserentibus per prœcedenfem adventum Filii. Quis enim alius va-
Jesu divinitatem nollet credere : dicemus ei, heus tu ! leat servare , et ad Deum optimum maximum huma-
aut in universum eis non crede et criminari desine, nam animam adducere, quam Deus Verbum ? Qui cum
aut si credis omnibus qicœ continent, admirare sermo- tn principio apud Deum esset, propter carni cohœren-
nem Dei factum hominem eo consilio ut prodesset , tes et carnales caro factus est, ut caperetur ab eis a
universo humano generi. Magnificum. vero Jesu opiis quibus alloqui ne videri quidem poterat in quantum
extat hodie, dum hodieque maie affecti sanantur ejus Verbum erat, et apud Deum erat, et Deus erat. Orig.,
nomine quos Deus sanari vult. Origen., lib. contra lib. VI contra Celsum, pag. 32î. [ A salute nuUus
Celsum, pag. 80. Non incantationibus pollere viden- excipitur, sive Judaeus, sive Grœcus, sive Barbarus
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIII, — ORIGÉNE. 217
ad ouanes. » Idem, in Epist. ad Romanos , lib. I, securisquœ in Evangelio prœdicatur, attentius Jesum
num. 13, edit. la Rue. ] Christum Dominum nostrum cum Pâtre suo precemur.
1 îtaque pius Pnter est Jesu pater, qui proprio Fi- Origen., Hom. 12 in Ezechiel., pag. 415, tom. I Ge-
lio non pepercit, sed pro nobis omnibus eum tradi- nebr. Ut igitur et nos stantes in templo, et tenentes
dit, agnum suum, ut peccatum niundi iolleret Agniis Dei Filium, amplcxnniesque eum, digni remissiotie et
Dei , pro universo mundo mortuus ; quapropter non profectione ad meliora simus, oremus omnipotentem
coacius, sed volens ac sciens pertulit quidquid in eum Deum, oremus et ipsum parvulum Jesum quem allo-
sibi permisit sceleratorum audacia. Origen., lib. VIII qui et tenere desideramus in brachiis. Hom. 15 in Luc.
contra Celsum, pag. 405. Quia igitur salvator creatoris est Filius, in commune
* Ascendit autem ad summum Deum
is qui eum Patrem Filiumque laudemus, cujus lex, cujus et tem-
inseparabiliter et per Jesum Dei
indivisibiliter colit plum est. Hom. 18 in Luc, pag. 146, tom. II Geneb.
Filium , cujus solius ductu ad Patrem perveniunt , qui Propterea Domini misericordiam deprecemur, ne no-
per Verbi Dei et sapientiœ contemplationem tam doc- bis tacsntibus lapides clamitent, sed loquamur, et
trina quam operibus et cogitationibus , Deo rerum om- laudemus Deum in Pâtre et Filio et Spiritu Sancto.
nium conditori modis omnibus annituniur conciliari. Hom. 37 in Luc, pag. 158, tom. II Genebr.
Ibid., pag. 382. Oportet autem nosse quoniam et antequam corpus
•*
* Unum Deum et unum ejus Filium ad verhum assumeret ad sanctos quoque descendit : et post hanc
,
imaginemque quantum possumus supplicafionibus et , prœsentiam corporalem ad cœlos victor ascendens rur-
honoribus venevamur afférentes Deo universorum Do- sus ad nos vcniet. Orig., Hom. 9 in Hier., pag. 101,
mino preces per suum Vnigenitum, oui prius eas adhi- tom. I Huet. Descendit Christus ad in fer os non tan-
bemus, rogantes ut ipse, qui est propitiator pro pec- quam servus eorum qui ibi erant, sed tanquam Domi-
catis nostris, dignetur tanquam pontifex preces nostras nus deccrtaturus.... Igitur Salvator descendit ut libe-
et sacrificia, et intercessiones offerre Deo optimo raret. Origen., in lib. Reg., pag. 32, tom. 1 Huet.
maximo. Ibid., pag. 386. Omnia vota omnes i?iter- , • Fatemur scriptum de Jesu corpore despicabili,
pellationes, deprecationes et gratiarum actiones desti- quamvis non adscriptum, parvum
haheatur aperte
nandœ sunt ad Deum verum omnium Dominum, per fuisse ac vile. Est autem locus apud Isaiam prœdicen-
majorem angelis summum pontificem vivum Verbum tem venturum eum non supra modum décora specie
et Deum. Verbum illud deprecaturi sumus, interpel- nec excellenti pulchritudine. Domine , quis credidit
labimus, et ei gratias agemus preces etiam offere- , auditui nostro? Et bracbium Domini cui revelatum
mus : modo intelligamus quomodo hœc accipiantur, est? Aunautiavimus in conspectu ejus sicut inlan-
vei abusive, vel proprie. Origen., lib.
contra Cels., V tulus, sicut radix in terra siti squalida : Non est
pag. 233. Solus adorandus est Deus optimus maxi' species nec décor, sed species ejus sine bonore,
ei,
mus, preces autem offerendœ unigenito Dei Verbo et deficiens supra filios bominum. Hœc ergo Celsus
totius , qui ut pontifex eas ad
jjrimogenito creaturœ audivit, quod putaret pro se esse, et ad accusationem
Deum suum ad Deum nostrum perferut, et Patrem
et Jesu facere; non iiem illa e psalmo quadragesimo-
suum atque omnium juxta Verbum ejus viventium. quarto quomodo dicantur : Accingere gladio tuo su-
Lib. VIII confra Cels., pag. 395. per fémur tuum, potentissime, specie tua et pulchri-
* Si ergo Enos, et Moyses, et Aaron, et Samuel in- tudine, et iutende, prosperare et regua. Sed fac
vocabantDominum, et ipse exaudiebat eos, sine dubio eum non legisse hanc prophetiam; aut legisse quidem,
Christum Jesum Dominum invocabant , et si invocare seductum tumen a malis interpretibus non putare quic-
Dornini nomcn et adorare Deum, unum atque idem quam eam ad Christum pertinere : quid dicet de Evan-
est , sicut invocatur Christus, et adorandus est Chris- gelio, ubi conscenso excelso monte transformatus est
tus, et sicut offerimus Deo Patri primo omnium ora- coram discipulis et visus est in gloria, quando et
tiones, ita et Domino Jesu Christo : et sicut offerimus Moyses et Elias, in gloria visi, colloquebantur de ip-
posfulationes Patri, ita offerimus postulationes et Fi- sius exitu complendo in Jérusalem? Non mirum
lio; et sicut offerimus gratiarum actiones Deo, ita est materiam suapte natura vertibilem, alterabilem
gratias offerimus Salvatori : unum namque utrique ho- in quidquid conditori placet mutabilem, et cujuscum-
norem defei'endum , id est Deo Patri et Filio ; divi- que qualitatis quam ei voluerit suus opifex addere
nus docet sermo, eum dicit : ut lionoriiicent Filium, capacem, modo talem habere qualitatem juxta quam
sicut bonorificant Patrem. Lib. VIII in Epist. ad Rom., dicatur non habuisse speciem vel pulchritudinem ;
pag. 382, tom. II Genebr. Cum autem plénitude modo tam gloriosam, mirandam stupendamque ut , ,
gentium introierit, tune omnis Israël salvus eritj et in faciem prociderent spectatores tam excellentis pul-
fiet unus grex et unus Pastor, docens in commune chritudinis : dico très illos apostolos, qui una cum
populum suum magnificare omnipotentem Dominum Jesu montem ascenderant. Orig., lib. VI contra Cels.,
cum Christo Jesu, cui est gloria et imperium in sce- pag. 327 et 328.
cula sœculorum, Origen,, Hom. 4 in Hierem., pag. 74, ' Jésus unus cum esset, non uno modo cogitari pote-
218 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de Jésus-Christ avait la prérogative île paraî- coupables envers Jésus-Christ. Il remarque
tre aux yeux de ceux qui le re.^ardaiiuit, tel que.Phlégon *, un des écrivains profanes, fai-
qu'il lidlait qu'il leur parût, selou la portée et sait mention de l'éclipsé et du tremblement de
le besoin d'uu eliacuu; et que la rosseud>lauce terre arrivés à la mort de Jésus-Christ; qu'il
qu'il y avait eutre lui et saint Jean a donné lui attribuait la connaissance de l'avenir; qu'il
lieu à quelques-uns * de prendre saint Jean reconnaissait que les choses étaient arrivées
pour pour saint
Jésus-Ciirist, et Jésus-Christ comme Jésus les avait prédites, mais qu'il
Jean. 11 que le Sauveur n'a
croit prêché* que confondait Jésus-Christ avec saint Pierre.
l)endaut un an et quelques mois; qu'il soulfrit Origène parait * persuadé que cette éclipse
la mort ' quaraute-deux ans avant la ruine de ne fut pas générale, non plus que le tremble-
Jérusalem ; que la * destruction de celte ville ment de terre et les autres prodiges qui arri-
et la dispersion de la nation Juive furent la vèrent alors ; il ' rapporte que ceux que l'on
peine des crimes dont les Juils se rendirent condamnait à mourir sur la croix n'y expi-
rai, et ab inspicieniibus non similiter videbatur ab 6 Arbitror ego sicut cœtera signa quœ facta sunt in
omnibus quod aufem ab impicientibus non eodem passione ipsius, in Jérusalem tantummodo facta sunt :
viodo videbatur ab omnibus, sed prout capaces erani; sic et tencbrœ ianlununodo super onineni terram Ju-
tnanifestum erit his qui sciunt , cur transformaturus dœam sunt factœ usque ad horam nonam.Quœ autem
se in excelso monte ne discipulos quidem omnes as- dico, in Jérusalem tantummodo hcec facta sunt, quod
sumpserit , sed sotvs P^rum , Jacobum , Joannem, ut vélum templi scissum est, quod terra contremuit, quod
qui soli capaces essent tam gloriosi spectaculi , pos- petrœ diruptœ sunt, quod rnonumenta aperta sunt,
sentque in illa claritate Moijsen et E liant considerare, nec enim extra Judceam petrœ diruptœ sunt, aut rno-
audircque illorum colloquia , ac etiatn vocem cœlitus numenta aperta sunt alia, nisi ea tantum quœ in Jé-
delatam in nubibus. Orig., li]j. II cont. Cels., pag. 99. rusalem erant aut forte in terra Judœa. Nec alia
,
1 Prius Jesu Mater, .nmulatque illum concepit, ad terra tremuit tune nisi terra Jérusalem : nec enim re-
Joannis matrem , eamque uterum fereniem pergit fertur alicubi quod omne elementum terrœ tremuerit
quando qui formatur accuratiorem formationem do- in tempore illo, ut sentirent, v. g. et qui in JEthiopia
nat ei qui formabatur, confortnem illum efficiens suœ erant, et in India et in Scgthia; quod si factum fuis-
gloriœ; adeo ut ob formam communem Joannes crede- set, sine dubio inveniretur in historiis aliquibus eorum
retur esse Christus, et item Christus Joannes esse a qui in chronicis scripserunt nota aliqua facta. Orig.,
mortuis excitus putaretur apud non discernunt
eos, qui Tract. 35 in Matth., pag 128, tom. II Geuebr.
inter imaginem et inter eum qui est secundum ima- ' Secundum alterum autem modum, quoniam forte
ginem. Orig., tom. IX in Joan., pag. 138, lom. II Huct. prœstare volens Pilatus populo universo qui dixerat :
' Certissimu7n aryunwntum diffusai gratice in lubiis Grucilige, crucifige eum, et timens populi totius tu-
ipsius hoc est, quod cum pauco tempore docuisset, an- multum , non jussit secundum consuetudinem Romano-
num enim menses aliquot docuit, universus ovbis
et rum de his qui crucifiguntur, pcrcuti sub alas corpo-
doctrina ejus et Dei cultu per ipsum impletus est. ris Jesu : quod faciunt aliquando qui condemnant eos
Origen., Philoc., cap. 1, pag. 4. qui in majoribus sceleribus sunt inventi, Quoniam
Quadraginta duo anni non amplius, opinor, in-
3 ergo majorent sustinent cruciatum qui non percutiun-
tercesserunt inter Jesu crucem et deleta Jerosolyma. tur post fixicnem, sed vivuntcum plurimo cruciatu
Lib. IV contra Celsum, pag. 174. aliquando autem et tota nocte ; et adltuc post eam
* Id unum ex arcfumentis est, divinum aliquid et iota die : Jésus ergo cum non fuisset percussus, et
sacrum fuisse Jesum, quo lœso Judœi tôt et tantis speraretur diu petidens in cruce majora pati tor-
malis dffliguntur tam longo tempore : et audemus menta, oravit Patrem et exauditus est, et statim ut
dicere nunquam fore ut restituantur. Scelus enim
, clamavit ad Patrem recepius est : aut sicut potesta-
commiserunt supramodum impium, per insidias op- tem habebat ponendi animam suam, posuit eam quando
pressa Servatore liumani gencris in ea urbe, ubi sacra volait ipse, quod prodigium stupuil centurio factum,
Deo facieljunt majus mijsterium significunlia. Jtaque
, et dixit : Yere hic Lomo Tilius eral Uei. Mirncu-
neccise fuit eam urbem in qua hœc Jésus passus est lum enim erat , quoniam post très horas receptus est,
deleri fundiius , et Judaorum gentem expelii suis qui forte biduum victuvus erat in cruce secundum
sedibus, et alios vocari ad Dei beatituditiem. Ibick consuetudinem eorum qui suspenduntur quidem, non
^ De defectu auiem solis sub Tiberio Cœsare quo autem percuiiuntur, ut videretur beneficium Dei fuisse
,
imperante Jesum constat crucifixum , deque magtiis quod expiravit, et meritum oralionis ejus magis quam
ejus temporis terrce motibus, etiam Phlegon scripsit violentia crucis. Illud etiam quod in sequentibus ex-
in decimo tertio, aut, ni fallor, decimo quarto Chroni- ponit Marcus, cum Joseph intrasset ad Pilatum et pe-
corum suorum volumine. Lib. Il contra Cels., pag. 80. tiisset corpus Jesu, hoc ipsum siguificat. Sic enim di-
Phlegon, certe in decimo tertio, aut, ni fallor, in de- cit, quouiam Pilatus miratus est si jam mortuus esset,
cimo quarto Chronicorum suorum volumine , faietur et vocans centurioaem intcrrogavit eum si jam mor-
ingénue Christum prœscivisse futura, confundem Pe- tuus esset? et cum audisset a ceuturione, donavit cor-
trum cum Jesu, testaturque evenisse quidquid prœ- pus ejus Joseph; si enim consuetudo, quœ apud Roma-
dictum fuerat : nihilominus illic quoque vel propter nes fuerat de crucifixis atque percussis in Christo ,
hanc prœscientiam pêne invitus faietur, non fuisse servuta fuisset, quomodo miratus fuisset Pilatus si
divina virtute vacuum sermonem quem accepimus a jam mortuus est? Vide ergo nisi novum demonstrat
majoribus. Origeu., ibid., pag. 69. miraculum quod jam mortuus erat, et quod vocavit
[III* SIÈCLE.] CHAPITRE Xra. -- ORIGÈNE. 219
raient qu'au bout de deux ou trois joiu-s^d'où la Vierge, la naissance de ce corps ayant été
il Sauveur étant mort le même
infère que^ le exempte de toute ^ corruption, Origène croit
jour qu'il y avait été attaché, mort doit ^ que INIarie enfanta ^ comme les autres femmes,
être regardée comme miraculeuse *. mais d'une manière beaucoup ' plus pure, et
Sur la vir- 10. Jésus-Christ est * né d'une Vierge, qui qu'elle souffrit quelques affaiblissements^ dans
ginité lie
jïarie.et la
manière
l'avait couQu
»
nou à la manière ordinaire des sa foi à la passion de Jésus-Christ, qui, sans
dont elle
conçut et femmes, mais par l'opération ' du Saint-Es- cela, ne serait pas mort pour les péchés de sa
enfanta.
prit, sans perdi'e sa * virginité ; et il ne faut mère, si eUe n'en avait commis aucun. Il sou-
pas s'imaginer que la nature divine se soit tient qu'elle est toujours demeurée ^ vierge
souillée en prenant un corps dans le sein de et qu'elle n'a eu d'autre enfant que Jésus, qui
centurionem Pilatus, et interrogavit si jam mortuus ^ Deinde iterum atque iterum repetens ( Celsus
)
est. Orig., Tract. 35 in Matth., pag. 131, tom. Geneb. II quasi non anlea multis cavillatus sit in nativitatem
1 Origen., Tract. 35 m Matth., pag. 131, tom. II Dei ex Virgine, sic loquitur : Quod si voluit Spiri-
Genebr., ubi supra. tum ex se emittere, quid opus erat inspirare in
Et adjecit Domiuus loqui ad Achaz dicens Pete
2 : uterum fœminse; poterat enim ut qui jam sciebat
tibi signuiu a Domiuo Deo tuo, etc. Ecce Virgo con- homines fingere, huic quoque corpus affingere, ne
cipiet et pariet Filium, et vocabit nomen ejus Em- proprium Spiritum in tantam contamiuatiouem mit-
manuel, quod interpretatur nobiscum Deus. Isa. vu, teret, atque hoc pacto e superius prolatus, boc
10. Quod si Judœus voculuîa excutiens, neyet scrip- ipso plus sibi conciliasset fidei. Hœc dixit, quia nes-
tum, ecce virgo, sed ecce adolescentula, dicemus ibi ciebat puram et virgineam incorruptamque nativita-
,
legi vocem aima, quam Septuuginta interprètes vei'- tem corporis, cujus ministerio servandum erat huma-
terunt virginem, alii vero adolescentulam. Ea, ut num genus, Lib. VI contra Celsum, pag. 326.
aiunt, etiam in Deutcronomio legitur in significato ® Quemcumque de utero effusum marem dixeris, non
virgiuis, in his verbis : Quod si puellam virgiuem sic aperit vulvam mutris suœ, ut Dominus Jésus, quia
desponsatam vire nactus homo in urbe concubuerit omnium mulierum non partus infantis, sed viri coiius
cum ea, educentur ambo ad portam civitatis suae, vulvam reserat. Matris vero Domini eo tempore vulva
lapidabunturque et necabuntur, adolescentula ea reserata est quo et partus editus, quia sanctum ute-
,
ratione quod non exclarnavit in urbe, homo ex rum, omni clignât ione venerationis venerandum,
et
ratione quod humiliarit uxorem proximi sui Sed ante nativitatem Chrisii, masculus omnino non teti-
ne videamur ex hebraica lectione hos demulcere, qui git. Hom. 14 in Luc, pag. 142, tom. Il Genebr.
minus complecti animo possunt, utrum sit illi assen- Omnis ergo homo in pâtre et in matre poUutus
''
tiendum necne, cum prophetam dixisse astruimus Je- est, solus vero Jésus Dominus meus, in hac généra-
sum ex Virgine nasciturum in cujus ortu et illud
, tions mundus ingressus est, in matre non est pollutus,
asseritur,nobiscum Deus âge et ex ipsis verbis
; , ingressus est enim corpus incontaminatum non est
consideremus sentantiam. Dominus scribitur dixisse ad ergo contaminaius in matre, sed 'ne in pâtre quidem.
Achaz : Pete tibi signum a Domino Deo tuo in pro- Nihil enim Joseph in generatione ejus prœter ministe-
fundum, vel in altum. Ac mox subjicitur signum rium prœstitit et affectum. Hom. 12 in Levit., p. 103,
quod datur : Ecce Virgo ex utero habebit et pariet tom. I Genebr.
Filium. Quale autem signum esset adolescentulam, * Quid? putamus quod scandalizatis Apostolis, Ma-
non virginem parère, et utri magis convenit gignere ter Domini a scandalo fuerit immunis. Si scandalum
Emmanuelem , quod est, nobiscum Deus, mulierine in Domini passione non passa est, non est mortuus Jé-
coitum passée et more fœminarum gracidœ, an purœ sus pro peccatis ejus. Si autem omnes peccaveruni, et
ac castœ virgini? Certe hanc docet parère talem pro- egent gloria Dei , justificoti gratta ejus et redempti,
lem, qua nata dicatur nobiscum Deus. Origeu., iib.J utique et Maria illo tempore scandalizata est. Et hoc
contra Celsum, pag. 27 et 28. est quod nunc Simeon prophetat dicens : Et tuam ip-
* Deinde Celsus sic loquitur : Non potest enim sius animam, quœ .scis absque viro peperisse te Virgi-
esse Dei corpus quod sic satum sit ut tu salus es. nem, quœ audisti a Gabriele : Spiritus Sanctus veniet
Non ignorans tamen quod siquidem ita ut scribitur super te, et virtus Altissimi obumbrabit tibi, per-
natus est, posset esse corpus quoque ejus divinius cœ- transibit infidelitatis gladius, et ambiguitaiis mucrone
teris, atque etiam in quodam sensu Dei corpus; verum ferieris. Hom. 17 in Luc, tom. H Geuebr.
non crédit Scripturis de conceptione ipsius e Sancto * Dicebant autem ii qui admirabantur, ignorantes
Spiritu , malens e pantherœ cum virgine congressu ipsum virginis esse filium, nec id quidem a^edentes,
natum credere. Origen., lib. I contra Cels., pag. 54. etiamsi iis diceretur, sed filium Joseph fabri existi-
Hœc ergo dicta sunt nobis de eo quod observavimus mantes... Putabant igitur illum esse Josephi et Mariœ
scriptum, quia non superfluo addidit legislator, mu- filium; fratres autem Jesu, filios esse Josephi ex
lier si conceperit semen et pepererit filiiun : sed esse priore conjuge quam ipse ante Maria7}i duxerit, affir-,.,
exceptio?tem mgsticam, quœ solam Mariam a reliquis mant ad id scilicet adducti traditione Evan-
nonnulli,
mulieribus segregaret , cujus parfus non ex concep- gelii quod secundum Petrum inscribitur, vel libri
tione seminis, sed ex prœsentia Sancti Spiritus, et vir- Jacobi. Qui vero id dicunt, Mariœ dignitatem in vir-
tute Altissimi fuerit. Hom. 8 in Levit,, pag. 89, tom. I ginitate ad finem usque volunt conservare ne corpus ,
simi un obumbrans. Ac existimo rationi comenta- scatere, undis ultro nascentibus, et aère culta rignri
neum essevirorum quiilem munditiei quœ in castilate tempesiivis imbribus , cumdemque pcr spiracula reci-
est, primitias fuisse Jesum : mulierum autein Mariant. procatum vitam refrigerando conservare : negamus
Impium enim est alii ac illi primitias virginitatis at- tamen potestates illas invisibiles esse dœmones... Ita-
tribuere. Ori^'^n., in Mattli., pag. 223, tom. I Huet. que non a dœmonibus accepimus singula victui neces-
* Deinde ( Celsus) cavillis in lignum ludens, ait : saria, prœsertim qui cis decenter uti didicimus; ne-
Ejus crebram meiitioDem fieri, vel quia magister que cum dœmonibus cpulanlur qui fruunlur fi'ugibus,
noster cruci sit al'fixus, vel quod artem exercuerit vino, arborum fructibus, aquis, aère : sed poiius hœc
inateriarii. Noti videns lignum vitœ in Mosaicis repe- angelis Dei ferimus accepta, qui quodammodo invi-
riri litteris, nec animadcertens nusquam in Evangeliis tantur intra hominis pii domesticos parietes, prœcep-
ab Ecclesia receplis, legi Jesum ipsum falrum fuisse. tum illud tenentis : Sive editis, sive bibilis, omnia
Lib. VI contra Celsum, pag. 299. in gloriam Dei facile; ac rursum alibi : Omnia ia
* Origen., in Matth., pag, 223, tom. I edit. Huet., uomiue Dei facile. Dum igitur in gloriam Dei edi-
ubi supra. mus, bibimus, spiramus, et cœtera eadem ratione fa-
' Quare licebit pcr nos stoicis ut deflagratione ab- cimus, non epulamur cum ullo dœmone, sed cum an-
sumant omnia; nos nullam incorpoream substantiam gelis Dei. Lib. VHI contra Celsum, pag. 398 el 399.
simus esse cremabilem, nec ignibus absumi hominis ' Cœterum in eis verbis, inquit Heracleon, honesle
animam aut angelorum t/tronorum dominationum
, ,
,
Samaritidem falsam fuisse quœ sibi Jésus dixisset :
principataum, potestatum substantiam. Lib. I contr. sol tus enim prophetœ, inquit Heracleon, est otnnia cer-
Celsum, pag. 325. nere : utrobique mentiens , cum etiam angeli hujus-
* Jam vero considei'a an angelorum genus utpoie modi cernere queant, et prophela non videal omnia,
majori honore dignum, prinium esse ac prœstantissi- Origen., in Joan., pag. 209, tom. II Huet. Angeli Dei
mum, prœ hominum, qui postremi sunt, génère dicere ascendunt et descertdunt ad Filium hominis, perqui-
possis. Quemadmodum enim in Job scriptum est : runt, et curiose agunt quid in unoquoque nostrum in-
Quaudo facla suut astra, laudaverunt Deum omnes veniant quod offerant Deo. Vident et perscrutantur
augeli ejus; quasi non Itomine solum antiquiores et uniuscufusque nostrum mentem si habeai altquid taie,
honoratiores , sed et reliquo mundi post illos condito si tam sanctum aliquid cogitet , quod Deo mereatur
opificio; audacter affirma plurimos angelos, qui homi- offerri. Intuentur et considérant si, his auditis, corri-
nibus priores erant, quibusdam hominibus fieri poste- gere cogitât vius suas, et oblivisci prœierila, ac prœ-
riores : homines vero complures, qui natura angelis parare sead futura. Orig., Hom. 9 in Levit., pag. 97,
posteriores sunt, angelis quibusdam in primo gradu tom. 1 Geneb.
constitutis, certas ob causas ad postrema redactis prio- ^ Quod si multorum etiam favor captandus est, dis-
res evadere. Orig., in Matth., pag. 396, tom. I Huet. cimus in nostris litteris, quod millia millium assis-
' Christiani qui sciunt œternam vitam consistere in tebant ei, et myriades myriadum minislrabant ei.
cognitione unius veri Dei, et ab illo missi Jesu Christi; Quœ multitudo cum videt homines erga Deum pieta-
et qui didicerunt omnes deos gentium esse dœmonia, tem imitantes, adjutut eos coniendentes ad sulutem, et
victimarum cruoris avida, versantiaque circa nidores Deum invocantes ; iitterdum apparendo pjrecaniibus,
hujusmodi ad decipiendos quotquot non habenl apud non indignam rem censens si eis aures prœbeat, atque
totius creaturœ Deum,refugium; cœterum angelos Dei ex consensu in terris versetur ad gratificandum cœles-
tam natura quam voluntate plurimum differre a ter- tis Ttuminis invocatoribus , cui et ipsa preces ofj'erre
cruenta sacrificia. Lib. HI contra Celsum, pag. 133. quosdam Spirilus, crebro mittente Deo commeantes
* Qui autem potuerit de nominuni sécréta ratione ad eos homines quos manet salutis hœreditas : hosque
philosophari multa facile inveniet et de appellationi-
, modo ascendere ad purissima loca cœlestia, et puriora
bus angelorum Dei, quorum alius Michael , alius Ga- etiam super cœlestia, oblaturos preces hominum, modo
briel, alius Raphaël nominatur, nomine quisque conve- rursum descendere ad homines reporlando illinc aliud
nienti suc ministerio , ex voluntate Dei, qui universœ in usum singulorum, ut quisque dignus est beneficio.
rerum naturœ prœsidet. Lib. I contra Cels., pag. 20. Origen., lib. V contra Celsum, pag. 233.
' Fatemur non absque prœsidio invisibilium, ut ita 4' Angélus ejus [christiani] perpetuo faciem cœlestis
loquar, agricolurum ac dispensalorum aliorum non Patris aspiciens, semper preces ejus in cœlum offert
solum terrœ fruges prœberi rtobis, verum etiam fluenta per unicum pontificem summo Deo, ipse quoque ijro
aquaram omnium, ipsis curantibus terras, aquas, ac- sibi commisso deprecans. Lib. VIII contra Celsum,
rern uroferre in rnitioris vitœ usum alimenta^ fontes pag. 401. — i» ibid.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XÎII. — ORIGÉNE. 221
et nous communiquent • les grâces dont il Dieu se sert toujours des démons pour exécu-
plaît à Dieu de nous favoriser les anges con- ter sa justice et pour punir les hommes
; il
y ;
naissent l'avenir • par le moyen des astres ; a des ^ démons qui sont attachés par des en-
les noms * que Ton donne aux anges ne mar- chantements, ou qui s'attachent par leur pro-
quent pas leur nature, mais leurs différents pre malice, pendant des siècles entiers, à cer-
offices ; les * démons n'ont aucun pouvoir de tains lieux et à certains édifices; la raison
nuire à ceux qui sont consacrés à Dieu, puis- pour laquelle ils souhaitent qu'on leur offre
qu'outre qu'il les protège lui-même, il donne des animaux en sacrifice ', c'est qu'ils pren-
encore à chaque fidèle un ange particulier, nent plaisir à sentir la fumée des victimes, et
afin que ni les anges contraires, ni leur prince, qu'ils s'en repaissent. Ce qui engageait ^ plu-
qu'on appelle prince de ce siècle, ne puisse sieurs personnes à présenter des enfants à Jé-
rien contre ceux qui sont consacrés à Dieu ; sus-Christ, afin qu'il leur imposât les mains,
les bons * anges ne font jamais aucun mai c'est qu'elles étaient persuadées qu'il pouvait,
aux hommes,, pas même aux plus méchants; par son attouchement les prémunir contre
,
* Lib. V contra Celsum, pag. 233, ubi supra. Hos procuratoresque Dei angeli non lœdunt contumeliosos
nominare docti inveni-
spiritus angelos ex officio suo homines quos si qui lœdunt, sunt ex numéro malo-
,
mus propter divinitatem quamdam interdum Deos vo- rum illorum quos etiam Celsus imaginatus est, qui
cari a sacra Scriptura: sed non sic ut jubeamur eos nullam satrapiam procurationemve commissam habent
adorare aut divinis honoribus colère, quamvis dona a Deo. Lœdutit autem sibi obnoxios qui se illis ultro
Dei nobis afferant. Ibid. submiserunt tanquam Dominis. Hoc est enim opinor,
' Jam vero quoniam hanc in Deo prœnoscendi vim cur certis in regionibus cibis vetitis vescentes, si sub-
certis adhuc argumentis osiendimus , juverit deinceps diti sunt ii dœmonibus, non impune ferunt quod si
,
quemadrnodum astra signorum loco instituta sint, ex- alienus idem faciat qui se non subjicit eorum domi-
,
plicare. Statuendum igitur imprimis est ejusmodi si- niOj immunis est a piaculo, jubens valere illos dœmo-
deribus assignatum, ac definitum esse motum, ut quœ nas : ut enim cœteris per ignorantiam eis devoti, ob-
errantia vulgo dicuntur viam fixis illis atque cons- noxii sint eorum injuriis ; certe christianus , qui vere
tantibus plane contrariam teneant. Id quod eo consilio christianus est, dicatus uni Deo, Verboque ipsius, non
factura est, ut ex vario astrorum situ, eorum quœ potest lœdi a dœmonibus, utpote illis prœstantior.
partim sin.julis, partira in universum eveniunt, signa Ibid., pag. 401.
quœdara hauriant, non jam honnnes certe quidera [ex ' Quales esse spiritus eos censendum est, qui tôt
illa enim siderura conversione quidquid aut facturi ,
integris sœculis , sive aliquibus incantationibus , sive
singuli sint, aut passuri , vere ac certo intelligere suapte maliiia, sunt alligati certis locis et œdificiis,
operœ est humanas vires longe multumque superan- hos omnes ratio jubet haberi pro malis, et arie divi-
tis) : sed naturœ illœ superiores, quas pluribus sane natoria, quœ quidem est indifferens abutentibus ad
de causis eam in cognitionem venire necesse est uti ,
decipiendos homines, et abstrahendos a vero numine
deinceps pro captu nostro demonstrabinius. Homines cultuque hujus purissimo, Lib. VU contra Celsum,
autern quod nonnulla id genus , vel observationibus, pag. 334.
^
tel ange/orum qui cura suos ipsi fines transilierint, Christiani qui sciunt œternam vitam consistere in
turn gêner is in nostri perniciem ista docuerint, infor- cognitione unius veri Dei, et ab illo missi Jesu Christi;
matione didicerint ; eorum simul quorum significatio- et qui didicerunt omnes deos gentium esse dœmonia
nem iis Scriptura tribuit, auctores illos esse putave- victimarum cruoris avida, versantiaque circa nidores
runt, a quihus ea se percipere signa credebant. Orig., hujusmodi ad decipiendos quotquot non habent apud
in Gen., pag. 7, tom. 1 Huet. totius creaturœ Deum refugium non patientur sibi
Quin etiam qui hoc existimat, dicet, quod ut ho-
' obtrudi Jovem aut Apollinem , nec alium ullum re-
mines vocati snnt o.ngeli ; apud eos quos palam cer- quirentem nidores atque cruenta sacrificia. Lib. III
nere est esse homines, quemadmodum Zacharias di- contra Celsum, pag. 133.
cens: Angélus Dei ergo vobiscum sum, dicit Dominus 8 Portasse etiam prout se habet Saipturœ contextus,
etiam qui Dei sint angeli hoc vocabulo nuncupati , verant, ut postquam infantes et pueros tetigisset Jésus,
propter officium qui non fuere vocati homines propter etvirtutem suam hoc contactu in eos infudisset , nullus
naturam. Origen., in Joan., pag. 69, tom. II edit. posset casus invadere , neque dœmonium, nec aliud
Huet, quidvis, quem ipse semel tetigisset. Quoniam autem
* Proinde Celsus sua terriculamenta au ferai mini- nefariœ potes f aies quam plurimœ, in variis animœ
tans malum a dœmonibus quos nos contemnimus : ni- humanœ struendis ab initio insidiis occupantur ;
prop-
hil enim nobis contempti dœmones possunt officere, terea qui servatori infantes offerebant, perspecta antea
cum dicûfi simus ei, qui unus succurrere potest dignis virtute ipsius ac poientia, id fecisse existimo, ut per
omnibus ; nihilominus tutores piis addens suos ange- manuum ipsius impositionem , et oratio?iem pro par-
los, ut nec contrarii angeli , nec eorum princeps, qui vulis et infantibus fusam , contactus ope mala abige-
et hujus saeculi princeps dicitur, quicquam valeat con- 9'entur, eximia autem virtus in eos infusa utpote con-
tra Deo devotos homines. Lib. VIII contra Celsum, tactus adversariorum repellendi robore pollens, ad
pag. 401 et 402. reliqua sufficeret. Orig., in Matth., pag. 373, tom. I
» Falliiur Celsus ; veri satrapœ, prœsides , duces. Huet.
ooi) HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que les démons dressent ordi-
les emhùclic'5 Origéne défend oh quelques * endroits d'ado-
nairement aux hommes. Ce sont les démons rer les anges ; ce qu'il faut entendre d'un culte
qui dirit,^ent '
augures; ils sont
les sorts et les semhlahle ù celui que nous rendons à Dieu.
la cause ' des famines, des pestes, des stérili- Il dit encore « qu'on ne doit pas les prier
;
tés et autres fléaux qui affligent les hommes et mais apparemment il n'entendait autre chose,
les hôtes; mais ils n'en usent ainsi que comme sinon que nos prières doivent s'adresser prin-
exécuteurs de la justice de Dieu, qui permet erpalement à Dieu par sou Fils, sans exclure
ces choses, soit pour punir ou convertir les ahsolument l'invocation des anges, puisque
pécheurs, soit pour faire éclater la constance lui-même, dans une ' de ses homélies sur
et la piété des justes; ils n'ont* pas le pouvoir Ezéchiel, invoque l'ange du Baptême.
qu'avait Jésus-Christ, et que les chrétiens ont remarque que l'on croyait dans Sur lann-
l^. Origènc
tiiie de l'i-
en son nom, de faire des miracles, en parti- l'Eglise que l'âme de l'homme subsistait ' me a rétat
culier de rendre la vue aux aveugles ; l'or-
., -1-1 \ ..où elle est
après être séparée du corps, et ne mourait après sasé-
gueil* a été le principe de la chute des anges. pas avec lui;' qu'étant a douée du libre arbitre, i'avcc°"io
*•
* '
Corps.
' Hœc ergo omnia, id est, sive auguratio, sive extis- terras migravit de cœlo. Orig., Hom. 9 in Ezéchiel.,
picium, sive quœlibet immolaiio, sive etiam sortHio, pag. 408, tom. I Geneb.
aut quicumque motus avium, tel pecudum, vel ins- " IIos spiritus angelos ex officia suo nominare docti
pectio quœcumque fibrarum , ut aliquid de futuris invenimus propter diviniiatem quamdam interdum deos
videantur ostendere, in operatione dœmonum ficri non revocari a sacra Scriptura; sed non sic ut jubeamur
dubito , vel avium , vel pecudum
dirigentiuyn vel , eos adorare; aut divinis honoribus colère,
quamvis
fibrarum motus aut sortium secundum ea signa quœ ,
dona Dei nobis afferant omnia enim vota, omnes in-
:
docuerunt iidem dœmones observari ab iis, quibus artis terpellationes deprecationes , et gratiarum actiones
,
hujus scieniiam tradiderunt. Hom. 16 in Num., p. 147, destinendœ sunt ad Deum rerum omnium Dominum,
tom. I Geneb. per majorem omnibus angelis summum pontificem,
* Si verum proferendum est libère ,
quœnam sint vivuui Verbum et Deum. Lib. V cont. Cels., pag. 233.
horum {dœmonum) opéra, dicemus famés et stcrilitates Etiamsi sciamus non dœmonas, sed angelos prœesse
vinetorum an arborum, siccitatesque nimias lœdendis frugum proveniibus, et fœturis animalium; prœdi-
frugibus, inierdum etiam pestileniiam sœvientem tum camus eos ut beatœ quibus a Deo commissœ sunt uti-
in bruta, tum in homines. Hœc omnia dœmonum opéra litates hominum ; non tamen honorem soli Deo debitum
sunt, seu carnificum,judicio quodam divino potestatem his reddimus, nom nec Deus hoc vult nec ipsi quibus ,
hanc habentium certis temporibus, sive ad converten- hœc commissa sunt. Ibid., lib. VIII, pag. 416.
dos homines et cohibendos ab effv^a vitiorum licentia, * Angelos invocare absque eorum cognitione eujus
sive ad exercendum genus hominum rutione utentium, homo capax non eàt non videtur rationi consen-
,
ut mediis in adversitatibus pietatem comtanter co- taneum. Atque ut demus ab homine comprehendi mi'
lentes, et a virtute non discedentes conspicui fiant ob ram et arcanam eorum noiitiam, officiorumque quibus
prœstantiam spectator ibus visibilibiis et invisibilibus funguntur singuli : hoc ipsum cohibebit ne quis audeat
illi vero contrarii quœrentes vitiorum latebras , per preces offerre nisi soli Domino Deo, qui unus omnibus
calamitntes arguantur quales sinl, et ad se redeant per abunde sufficit, per servatorem nostrum Dei Filium,
spectatorcs, ut ita dicam, ti-aducti. Testatur divinorum Verbum, sapientiam, veritatem, et quidquid de eo
hymnorum fidicen , quod tristiores Dei Judicis sen- Prophetarum, Apostolorumque Jesu litterœ prœdicant.
tentias exequantur quidem mali angeli, ubi dicit : Ibid., lib. V, pag. 233.
^
Immisit in eos iram furoris sui, furorem, iram et Omnia angelis plena sunt : vent, angele , suscipe
affliclionem; immissiones per augelos malos. An sermone conversum ab errore pristino a docirina dœmo-
autem etiam alia prœter hœc faciant dœmones quando niorum, ab iniquitate in altum loquente : et suscipiens
permittitur (sempier quidem nocendi cupidi sed non , eum quasi medicus bonus confove atque institue, par-
semper valentes lœdere eo quod prohibcantur), qui po- vulus est , hodie nascitur senex repuerascens : et sus-
test examinet divina judicia, quantum homini licet, cipe tribuens ei baptismum secundœ regenerationis : et
imaginans , quoties multœ simul animœ illa vel illa advoca tibi alios socios ministerii tui , ut cuncti pa-
via delatœ ad mortem separantur a corporibus. Orig., riter eos qui aliquando decepti sunt erudiatis ad ,
lib. VIII cont. Cels., pag. 398. fidem. Origen., Hom. 1 in Ezéchiel., pag. 391, tom. I
' Atque inimici quidem dicentes ipsum {Christum) Geneb.
habere dœmonium, illi viderint : nos vero illi cre- ' Porro persuasum habent, non solum christiani et
damus diccnti : Ego daemonium non habeo. Neque Judœi, verum etiam alii multi, tam Grœci quam Bar-
enim potest dœmonium cœcorum oculos aperire, vel barie quod supersit et vivat post discessum a corpore
hœc signa facere quœ scripta sunt, quorum etiam ves- humana anima. Lib. VII cont. Cels., pag. 334.
tigia et reliquiœ , vel usque in prœseris fiunt »i eccle- 9 Poslhœc jam quod anima substantiam vitamque
* Quod ergo est peccatum maj'us omnibus peccatis: dinis hereditate positura, si hoc ei sua gesta prœs-
utique illud propter quod et diabolus corruit. Quod est titerint ; sive igné œtemo ac suppliciis mancipanda, si
hoc peccatum in quo tanta sublimitas cecidit, ut elatus in hoc eam scelerum culpa detorserit ; sed et quia erit
in judicium incidat diaboli : Inflatio, superbia, arro- tempus resurrectionis mortuorum, cum corpus hoc
gantia peccatum diaboli est : et ob hœc delicta ad quod in corruptione seminatur, surget iu iûcorrup-
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — ORIGÈNE. 223
*
elle recevra, selon ses mérites, des récom- il paraît admettre la préexistence des âmes
penses ou des peines éternelles; qu'elle est Qt croire,avec quelques anciens, que Dieu a
d'une substance différente de celle du corps, créé, avant le corps, un certain nombre d'es-
et qu'elle a aussi une vie qui lui est propre ;
prits égaux destinés ' à être unis à divers
ce qu'il explique plus clairement ' ailleurs, en corps. Il prouve l'immortalité de l'âme * par le
disant qu'elle est raisonnable , d'une nature consentement des chrétiens, des Juifs et des
beaucoup plus excellente que les êtres corpo- Barbares, et par les ombres des morts qui pa-
rels, une substance invisible et immatérielle; raissent 9 auprès des tombeaux. Ces ombres
qu'elle est faite * à l'image de Dieu ;
qu'elle marquent les âmes souillées •», que le poids
est' naturellement le temple de Dieu, qu'elle de leurs péchés attache tellement à la terre,
a dans elle les semences de la vertu. Mais
* qu'elles n'out pas la force de pousser même
il ajoute que l'Eglise ^ n'avait encore rien dé- leurs soupirs vers le ciel, tandis âmes que les
cidé touchant l'origine de l'âme, en sorte nettes et qui ne sont point chargées du far-
qu'il était incertain si elle était engendrée deau des péchés, s'élèvent au plus haut des
avec le corps et par le même principe, ou si airs laissant ici-bas les corps grossiers. Le
,
elle avait un autre commencement. Pour lui. séjour de ces âmes pures est " le ciel. Il y en
beat initium, et hoc ipsum initium si genitum est, animœ suum quoddam corpus habent. Lib. II contra
an non genitum : vel certe si intrinsecus corpori indi- Cels., pag. 97. — i» Ibid., lib. VU, pag. 334, ubi sup.
tur necne, non satis manifesta prœdicatione distin- » Ibid. Symbolice Judeœ et Jérusalem umbra est
S2i HISTOIRK GÉN1<RALK DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
a d'autres qui, à cause de leurs péchés, pas- garde duquel elles étaient confiées, et d'être
seut parle l'eu avant d'entrer dans la gloire;
', données en garde à un autre; mais il n'est
carle feu * n'épargnera que ceux qui seront pas vrai que l'âme, après être sortie d'un
parfaitement puriliés dans leur doctrine, corps, passe dans un autre, selon la doc-
dans leurs mnnurs et dans leur entendement; trine » de la métempsycose.
d'autres enfin qui seront condamnées à des " 13. C'est encore un article de foi dans l'E-
peines éternelles. Si, pendant leur union, il ghse, que l'âme a été ° créée libre, capable de
arrive qu'elles se souillent par le péché, elles faire le bien et mal; car
le si l'on ôtait à la
méritent d'être abandonnées de l'ange * à la vertu la liberté du choix, on lui ôterait son '
Origène dit ailleurs que les âmes des saints vont, est, et iiivisibilis pst quo puniuntur qui recédant a
aussitôt après leur séparation d'avec le corps, dans Salvatore. Tract. 34 in Matthœum , pag. 107, tom. I
templa Dei voluntate, non studuerunt ut vita res- tione ojnnem animam rationabilem esse liberi arbiirii
ponderet eidem imagini. Lib. V cont. Cels., pag. 242. et voluntatis : esse quoque ei certamen advcrsus diabo-
* Nos quoque ante omnia rationibus illis innumeris lum et angelos ejus, contrariasque virtutes; ex eo quod
quibus ipsi ad christianam pietatem perducti surtius, illi peccatis eam onerare contendunt , nos vero si recte
conamur omnes quotquot possumus eodem adducere : consuUeque vivamus, ab hujusmodi nos exuere conemur.
ubi vero invenimus prœoccupiatos culumniis quibus Unde et consequens est ihtelligere non nos necessitaii
christiani gravamur, ita ut imaginatione christianœ esse subjectos, ut omnimodo etiamsi nolimus vel niala,
impictatis ne aures quidem adhibere sustineant his vel bona agere cogamur. Si enim nostri arbitrii su-
qui divinam hanc doctrinam pollicentur : ibi huma- mus, instigare fartasse possunt aliquœ virtutes ad pec-
nitati studentes, quoad ejus fieri potes t , damus ope- catum, et aliœ juvare ad salutem : non tamen necessi-
ram ut saltem illud de impiorum œternis pœnis tate cogimur, vel agere recte vel maie : quod fieri
dogma persuadendo reddamus idoneos ad percipien- arbitrantur, qui stellarum cursum et motus causam di-
dam hanc doctrinam, etiam eos qui nolunt christiani cunt humanorum esse gestorum, non eorum quœ extra
fieri. Lib. VIII contra Celsum pag. 411. Qui rece-
,
arbitrii açcidunt libertatem , sed eorum quœ in nostra
dunt ab Jesu, decidunt in ignem œternum, qui alte- sunt posita potestate. Origen., Proœm. in Periarch ,
rius generis est ab hoc igné quem habemus in usu pag. 420, tom. I Genebr.
"
JEternus autem ignis est iile de quo et Isaias dicit Nescio quantum correctionem Celsus desiderans sic
,,
de même nature, et aucune d'elles n'est sor- n'invite pas seulement ceux qui veulent venir
tie vicieuse des mains du Créateur. C'est
* (commed'eux-mêmes),maisqu'elle attire aussi
par le péché qu'elles se sont réduites en ser- ceux qui ® répugnent, leur faisant quitter '
vitude *. Mais il n'est pas impossible à Dieu de la haine qu'ils portaient à l'Évangile, et les
vaincre la corruption, qui devient quelquefois fortifiant de telle sorte qu'ils sont prêts à mou-
naturelle à certaines personnes qui se font une rir pour la religion. Personne n'a jamais fait
habitude du péché; elles peuvent même se
^
aucune ' bonne action sans la grâce, et sans
*
tirer du bourbier des vices, pratiquer les elle nous ne sommes pas ^ capables de cher-
commandements du Seigneur, mais avec le cher Dieu ni de le trouver; elle nous est en-
secours de la grâce, dont la force est si puis- core nécessaire pour •*' croire, car la foi est un
saute, qu'elle nous fait en quelque façon vio- don de Dieu; si les justes vainquent les dé-
pergit quœrere : Ergo non erat possibile divina vir- aut aliquid prœceptorum Dei. Tract. 35 in Matth.,
tute corrigere, nisi milteretur ad hoc natus aliquis? pag. 114, tom. II Genebr.
Portasse postulabat isfe, ut Deus, prœsens hominibus 5Quis vos, catechumeni, in Ecclesia congregavit?
apparens semel omnium malitiam eximeret, et pro ea Quis stimulus impulit ut , relief is damibus, in hune
virtutem insereret : qua de re merito duhitaretur, cœtum coeatis? Neque enim nos domus vestras sigil-
possetne fieri. Sed fac passe; ubi tum erit nostra vo- latim circuivimus, sed omnipotens Pater virtute invi-
lurdas? Ubi laudabilis erga verifatem creduliias, et sibili subjicit cordibus vestris, quos scit esse dignos,
probanda aversatio mendacii? Sed quantumcumque hune ardorem, ut quasi inviti et retractantes veniatis
donemus hoc possibile, atque décorum etiam eadem ad fidem, maxime in exordio religianis , cum vcluti
opéra quispiam similis Celsi quœreret , quin potius trepidi et patentes, salutis fidem curn timoré suscipi-
divina potentia taies fecerat homines, lit ne correc- tis. Hom. 7 in Luc, pag. 138, tom. II Genebr.
tione quidem opus esset, bonos atque perfectos jam ^ Ipse Unigenitus ipse , inqunm , Filius Dei adest,
,
naturam rerum considerantibus, quod virtus nisi spoU' nibus diebus usque ad consummationem sœculi. Sed
tanea sit, ne virtus quidem erit. Lib. IV contra Cels., nec sufficit eum esse nobiscum sed quodammoda vim ,
theatro, non sine gravibus gestaminibus potest, qui usu Dei Verbo animis eorum prœsente, quantulocumque fem-
studioque impraba hanc facultatem sibi paravit : et pore capacium ejus energiœ. Lib. YI cont. Cels., p. 329.
studium erit irritum, aut impossibile videri
virtutis 9 Dicimus non esse sufficientem humanam naturam
débet homini ufrumque depravuto ingénia? Vide qui ad quamadacumque quœrcndum Deum, eumque pure
hœc dicis, ne creatarem rationalis animalis incuses inveniendum, nisi adjuvetur ab ipso qui quœrifur ;
magis quam creaturam. Nisi farte ad efficienda ista qui invenitur a fatentibus prœter suum conatum, opus
operosa quidem, sed nulli utilia vim naturœ humanœ se habere ipsius auxilia, ostendentis se lus quos hoc
indidit, et negavit quantum satis est ad quœrendam honore dignatur, quatenus vel natura Dei potest inno-
beaiitudinem, Lib. III contra Celsum, Tpag. 153. tescere homini, vel hominis anima valet , in corpare
Petrus qui existimavit mendacem passe facere ve-
* manens, Deum cognascere. Lib, Vil cont. Cels., p. 360.
ritatem non tantum scandalizatus est, sed etiam dere- Considérantes diligenter quidem qmd sit proprie
10
n. i5
226 HTSTOTRE m-NI'RALE DES AUTEURS ECC^^^PTASTTQUES.
mons ', c'est avec le secours de la gràtc, et faire entendre. La grâce nous abandonne quel-
ilsne s'attribueut jamais la gloire d'aucuno quefois David " eu fut abandonné lorsqu'il
*.
bonne action, parce qu'ils savent (|ue c'est pécha avec lîethsabée, et il apprit, par son
de Jésus-Christ (lue leur'* vient la victoire. La expérience, que les biens qu'il trouvait en soi
prédication seule ne suffit 'pas nous devons ; auparavant, ne venaient pas tant de lui que
de plus demander à Dieu qu'il verse sur nous de Dieu, qui est la source de toutes les vertus.
l'eau de sa grâce, afin de faire fructifier la La grâce nous est nécessaire pour connaître '
semence de la parole (jue nous avons reçue; Dieu et vaincre ® les tentations. Origène ne
car la voix de Dieu est de telle nature, qu'elle laisse pas de donner beaucoup au libre arbi-
n'est entendue * que de ceux à qui Dieu veut la tre et à la nature. 11 distingue » deux sortes
prosequHur, omnia facial, quo aperiantur oculi nos- que personne n'est tenté au-delà de ses forces.
tri adhuc rJaiL'ii ab ignominia, nostrn, ]iropier vitium, Origen., de Princip., lib. III, num. 3 edit. La Uuo. ]
juxta illud : Coopcruit nos ignoniinia nostra; et * Tenlatus est {David nudatus auxilio, ut vide-
) et
confilcnttbus nobis exaudicniur causœ, cur uondum ret quid humana possit infirmilas. Rucedente quippe
credamus, et quasi maie affectis, alque medico egenti- prœsidio Dei, ille castissimus, ille admirabilis in pu-
bus opem ferens Dominus, cooperahitur nobis ad per- dicitia, qui audierat : Si muudi sunt pueri, maxime
cipiendum donum crcdendi, tertio loco apud Paulum a muliere , et acceperat eucharistiam quasi mundus,
positum, dum recenset dona; iiirnirum post donum sa- non potuit perseverare, sed in eo rcpertus est anmine,
pienttœ; et post donum scientiœ, quibus subjungit : in quo sibi quasi continens applaudebat. Si qtiis ergo
Alii fides per eumdem spiritum; de quo dono et alibi conscius puritatis suœ seipsum glorificaverif, non ha-
inquit : A Deo nobis donatura est, non solum ut in bens memoriam iilius dicti : Quod autem liabe» quod
Ipsum credamus, venimetiam ut pro ipso paliamur. non accepisli? Si autem accepisti, quid glorlaris quasi
Origen., in Joan., pag. 324, tom. II Huet. non acceperis? relinquitur, et derelictus discit expe-
* Moris sandorum est, uli adversarius vincitur, tan- rimento, quia in his bonis quorum sibi conscius erat,
quam qui sciant non sua virtute, sed Dei gralia vic- non tam ipse sui extttit causa quam Deus, qui virtu-
toriam factam, hymnum Deo gratulationis offerre. tum omnium fons est. Hom. 9 in Ezech., p. 410, t. l
Ilom. 6 in Exod., pag. 45, tom. I Genfibr. Genob. — ' Lib. Vil contra Cels., pag. 3G0, ubi sup.
* Qui sub Jesu militât, incolumis débet redire de * negamus multos esse in
Itaque ne nos quidem
prœlio; nec usquam dehet ex juculis maligni ignitis terradœmones , sed fatemur eos esse, posseque mul-
vulnus accipere, non in corde pollui, non cogita- m tum in malos, propter eorum malitiam : sed nihil
tione maculari non per iram, 7ion per cupiditatem,
, posse in eos qui se induerunt armatura Dei, accepa-
non per aliam quamlibet occasionem dœmoniacis vul- runtque robur ad resistendum circumvenire se conanti
neribus locum dare De Victoria nemo se jactat, diabolo. Lib. VIII contra Celsum, pag. 400.
nemo suœ virtuti, quia superavit, adscribit : scientes * Quid est quod homo offerat Deo ? hoc ipsum quod
quia Jésus est qui victoriam tribuit. llom. 12 in Jos., in lege scriptum : Munera mea, boc est data mea. Ex
pag. 192, tom. I Genebr. iis ergo quœ Deus dédit, offerunt nihilominus Deo.
' Omnipotcnfis Dei misericordiam dcprecemur, qui Quid dédit Deus homini? Agnitionem sui. Quid ergo
nos non solum auditores verbi sui fnciat, sed et facio- offert Deo? Fidem suam et affectum. Hoc est quod
res; et inducat super nostras quoque animas diluvium expetit ab homine Deus...,. Sunt ergo quœ dantur a
aquœ suœ ; et deleat in nobis quœ scit esse delenda, Deo, et sunt quœ prœbentur ab homine. Verbi gratia,
et vivificet quœ
judicat esse vivificanda per Christum in homine fuit ut una mna faceret decem mnas, et
Dominum et per Spiritum suum sanctum. Hom. 2 in una mna faceret quinque mnas. Ex Deo autem fuit
Gènes., pag. 8, tom. I Genebr. ut haberei homo mnam, ex qua facere posset decem
* Talis est Dei vox , ut a solis audiatur, quos ipse mnas. Cum autem obtulit ex se decem mnas, accepit
audire illam vult : ne intérim dicam Dei vocem de rursus a Deo, non jam pecuniam sed potestatem et ,
qua hic Scriptura loquitur non esse percussum aerem, regnum decem civitatum. Petit Deus ab Abraham, ut
aut percussionem aeris, aut quidquid aliud de voce offerret ei Isaac filium suum, in montem quemcumque
dicitur, ideoque non isto sensili auditu, sed longe ostendisset ei. Obtulit Âbra/iam, intrepidus unigeni-
prcestantiore divinioreque percipi : et quoiies j/we qui tum imposuit super aram cultrum eduxit ut jugula-
,
loquitur non ab omnibus eam exaudiri vult, eos, qui ret, inhibetur continua, et aries ei jjro flio datur ad
eximias illas aures habent, audire Deum; qui vero victimam. Vides ergo quia quœ Deo offerimus nobis
auribus animœ absurduerant , non sentire scrmonem manent : sed ad hoc expeiimur ut in lis affectus nos-
Dei. Lib. II contra Celsum, pag. 105. ter erga Deum probetur. Et fides. Hœc pro eo quod
* Et adversum quidem Ulum priorem populum (Ju- diximus, profectos esse filios Israël a puteo, et venisse
daicum ) corporales insurgebant hostes, cum deliquis- in Mathanaim, quod munera eorum. A
interpi-etatur
set ; adversum nos autem, qui Israël sumus secundum Mathanaim autem venimus in Nahaliel, quod inter-
spiritum, spiritalis sine dubio hostis insurgit : et cum pretatur ex Deo. Quid ex Deo ? posteaquam obtuleri-
mandata Dei negligimus, cum Christum contemnimus, mus nos quœ ex nobis sunt venimus ad hoc ut conse-
validior adversum nos manus dœmonum efficitur, et quamur ea quœ ex Deo sunt. Cum enim fidem nostram
tradimus eliam nos inimicis cum deserimur a gra-
, etaffectum obtulerimus ei, tune et ipse largitur di-
tta. Hom. 7 in Jud., tom.
Genebr., pag. 217. [Ori-
1 versadona Spiritus Sancti de quibus dicit Apostolus :
gène n'entend point parlor d'un abandon absolu, Omnia ex Deo sunt. Hom. 12 in Num., pag. 136,
mais d'une soustraction de grâce, puisque, d'après tom. I Genebr. Omni habenti dabitur, et abunda-
lui, Dieu donne à tous la possibilité de vaincre, et bit, etc., ut puta fidem habenti, quœ est ex nobis, da-
[ni« SIÈCLE.] CHAPITRE Xin. — ORTGENE, 227
de foi : l'une, qui vient de nous, et que nous sur ce principe qu'Origène en quelques
dit,
devons offrir à Dieu comme le profit que nous endroits, que la prédestination se fait en vue
*
avons fait de la connaissance naturelle qu'il de nos mérites, et en d'autres, que Dieu nous
nous a donnée de lui-même ; l'autre, qui est donne gratuitement sa grâce et sa gloire *.
un don du Saint-Esprit, ou comme la récom- Selon ce Père, la prescience en Dieu n'est pas
pense de la première. Il en est de même des la cause de tous les événements, surtout de
vertus. Les unes sont l'effet de notre propre ceux qui dépendent ^ de notre volonté; Jésus-
travail ; les autres nous sont données de Dieu. Christ est mort pour * plusieurs, et il serait
Il faut donc, avant toutes choses, travailler à mort pour tous les hommes, si tous avaient
acquérir les premières. Mais, sachant qu'elles cru en lui; il n'a ' prié que pour les élus;
ne nous seront d'aucune utilité, si Dieu ne [ mais Origène explique de suite ce quïl en-
met à leur place celles qui viennent de sa tend par élus, eu disant que ceux-là ne le
grâce, nous devons nous humilier sous son sont pas qui, par leur indignité, méritent
hi'as tout-puissant, élever vers lui des mains d'être méprisés et rejetés par le Seigneur. Il
innocentes, le prier de perfectionner ce qui convient enfin que Dieu a révélé certaines
est en nous, et de nous rendre lui-même par- vérités ^ aux philosophes.]
faits et agréables à Dieu. C'est apparemment 14. Origène enseigne en plusieurs endroits ebéYrigintl
et actuel.
bitur gratta fidei, quœ est per spiritum fidei, et abun- tur et adoptentur in filios. In Epistola ad Roman.,
dabit. Et quidquid habueril, qui ex naturali creatione, pag. 377, tom. II Genebr. Justitia Dei per fidem
cum exercuerit eum , accipit idipsum , et ex gratia Jesu Christi ad omnes perveniens qui credunt, sive
Dei, ut abundet et firmior sit in eo ipso quod habet. Judœi, sive Grœci, purgatos eos a prioribus sceleribus
Non enim de sapieniia sola, sed de omni virtute in- , et capaces facit gloriœ Dei : et hoc non ex
justificat
telligendum est nobis quod ait Salomon : Et si fuerit meritis eorum, nec pro operibus facit, sed gratis glo-
quis perfectus inter filios hominum, si abfuerit ab riam prœstat. Ibid., pag. 824.
3 Prœscientia Dei non est futurorum omnium causa,
illo sapieutia tua, in nihiium reputabitur. Sic et qui
perfectus fuerit in castitate, aut in justitia, aut in prœsertim istorum quœ libéra voluntas effectura est,
veritate,aut pietate, non fuerit autem ei aut castitas, prout impetus in nobis excitabitur. Origea., lib. de
aut justitia, aut virtus, aut pietas, quœ venit ex Dei Orat., pag. 24 edit.Oxon.
gratia, in nihiium reputatur hujusmodi homo, Prop- * Etiamsi Filio hominis exhibitum sit ministerium,
terea si volumus ut detur nobis virtus perfectior, et quando angeli accesserunt et ministrabant ei, et rur-
abundet in nobis quod perfectum est inter homines sum ministravit ei Martha; non tamen ad id venit,
per diligentiam omni modo acquiramus, et postquam ut ipse ministraretur, sed inter hominum genus con-
acquisierimus , quasi intelligentes quoniam in nihiium versatus est ut ministraret , et eousque saluti deser-
hœc reputantur sine gratia Dei, humiliemus nosme- viens procederet, ut animam suam pro multis qui in
tipsos sub manu valida Dei, et oremus sine ira et se crediderant, redemptionis pretiu7n daret, et si, ut
disceptatione, levantes puras manus, ut omnium bono- hoc ponamus , omnes in eum credidissent , animam
rum quœ sunt in nobis perfectio detur ex Deo, et fa- suam utique redemptionis pretium pro omnibus de-
cial nos perfectos et accepiabiles Deo quasi filios Dei. disset. Origen., in Matthœum, pag. 422, tom. I Huet.
Tract. 33 in Matth., pag. 105 et 106, tom. II Geneb. [IciOrigène considère seulement les mérites de la
* Deus qui futurorum seriem prospexit, et libertatis passion dans leur effet, et non dans l'intention du
nostrœ propensionem cognovit, et aliquorum ad picta- Sauveur qui n'a excepté personne. ]
tem impetum affectumque post ha?ic propensionem ;
,
s Stamus nos pro foribus, operientes Pontificem nos-
quodque ii se totos virtuti daturi sint, ipsos prœnovit: trum commorantem intra sancta Sanctorum, id est
cognoscens quidem prœsentia, prœsciens vero futura, apud Patrem, et exorantem pro peccatis eorum qui se
et prœnovit futuros conformes imagini Filii
quos ita expcctant, non pro omnium peccatis exorantem, non
ad Rom., pag. 424,
sui, prœdestinavit. Orig., in Epist. enim exorat pro his, qui in sortem veniunt ejus hirci
tom. II Huet. Dignus erat {Paulus), qui segregaretur qui emittitur in desertum. Pro illis exorat tanium
in Evangelium Dei, non propter excelleniem aliquam qui sunt sors Domini , qui eum pro foribus expec-
naturam, et quœ ita esset comparaia, ut eos qui taies tant Quod autem dicimus de sorte, non sic acci-
non sunt, longe superaret : sed ob prœscitas prius piat auditor, quasi sors talis aliqua dicatur, quœ in-
actiones, quœ postea factœ sunt ex apostolica quadam ter homines casu non judicio agi solet. Sors Domini
et
institutione. Ibid., pag. 426. ita accipienda est, tanquam si diceretur : electio Do-
* Cum nondum nati fuissent, aut aliquid boni mini, vel pars Domini; et rursum, sors ejus qui in
egissent, aut mali, etc. Hœc omnia eo spectant, ut œiernum mittitur, accipienda est, veluti pars illa quœ
illud probet Apostolus , quod si vel Isaac, vel Jacob pro indignitate sui a Domino spernitur et abjicitur.
pro his meritis electi fuissent ad ea quœ in carne Hom. 9 in Levit., pag. 95 et 96, tom. I Genebr.
positi quœsierant , et per opéra carnis justificari me- ^ In quibus etiam ostendit Apostolus quod ea qui-
missent, posset utique mer if i eorum gratia ad poste- dem qicœ ad sapientes sœculi de veritatis scientia per-
ritatem carnis quoque et sanguinis pcrtinere. Nunc venerunt, Deo révélante, pervenerunt : sed dum aut
vero cum electio eorum non ex operibus facta sit, sed vanœ gloriœ student, aut adulantur erroribus vetustù
ex proposito Dei, ex vocantis arbitrio, promissionis aut metu principum refrœnantur, damnationis suœ ipsi
gratia, non in fîliis carnis impletur, sed in filiis Dei: judices fiunt. A quibus veritas quam, Deo révélante,
Hoc est qui similiter ut ipsi ex proposito Dei eltyan- cognoverant, aut exclusa libertaie contegitur, aut ges-
228 HISTOIRE GÉNfî:RAT.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que tous les hommes péché uaisseut avec le * doit pas = négliger les péchés légers; mais
originel, et il en apporte pour preuve le bap- on peut, en tout temps, en faire « pénitence
tême des enfants. 11 distingue deux sortes de et les racheter à toute heure. Il n'en est pas
péchés les « péchés légers, que nous ap])('loiis
: de même des péchés mortels, dont on ne peut
véniels, et les péchés plus cousidérables ', que se (léhvrer que par ' une pleine et entière sa-
nous nommons mortels. Les premiers n'em- tisfiiction. Les péchés que nous commettons
pêchent pas que l'àme * ne vive à la grâce. sont, pour ainsi dire, gravés » sur notre âme;
Les seconds causent la mort de l'àme et sont ils paraîtront avec nous devant le tribunal
torum iniquitate denegatur. Orig., in Ejiist. ad l\om., test esse cum morte. Et ideo si quis sibi conscius est
pag. 301, tom. Geuebr. II quod habeat peccatum, neque id a se per pœ-
intra. se
* Quod autemdicit [Celsus] : Hœc impie Mosem nitentiam plenissimœ satisfactionis abjicit, non speret
coutinxisse , quia Deuin inox a principio facial iu- quod intrat Christus ad animam ejus, qui ud omnem
firmum, non valentem servare hoaiineiu quem ipse animam defunctam non intrat, quia magnus sacerdos
considérai Respondemus hoc perinde esse ac si quis
: est. Hom. 12 «?j Levitic, pag. 102, tom. I Genebr.
reprehendat admissam esse in res humanas rnalitiam, 5 Sed ne contemnas etiamsi parvam videris intra te
quam Deus ne ab uno quidem homine arcere potuerit, fermentari rnalitiam , quia modicum fermenti totam
ut saltem unus ejus esset expers vel in prima rerum massam corrumpit : et ideo neque de parvo peccato
origine. Nam sicut ad hoc satis responsum est a pa- negligas, quoniam ex uno peccato generctur et aliud.
irocinantibus Provident iœ nec paucis nec contemnen-, Hom. 23 in Num., pag. 1G4, tom. I Genebr.
dis lia et de Adamo ejusque peccato philosophabun-
;
^ Si forte ulicui lapsus acciderit, semper est recu-
iur qui sciunt, Adami vocabulo, Hebrœos significare perandi facultas, ut verbi gratia dicamus : si nos ali-
hominem ; et in his, quœ de hoc Moses prodidit, des- qua culpa morulis invenerit, quœ non in crimine rnor-
cribi naturam hominis. Natti, ut ait Scriptura : Iq tuli, non in blasphemia fidei, quœ mura ecclesiastici et
eam solam pertinet. Lib. IV contra Celsum, pag. 190. missis hujusmodi pœniludinem gererc. In gravioribus
Quod si placet audire quid etiam alii sancti de ista enim criminibus, semel tantum pœnitenliœ conceditur
nativitate se7iserint audi David dicentem : In ini-
, locus. Ista vero communia, quœ fréquenter incurrimus
baptismi superflua videretur. Hom. 8 in Levit., pag. 90, pisti. Adulterium, diaboli pecunia est. Diaboli enim
sua dicit quœdam esse peccata ad mortem , quœdam conscriptum forsitan delerem illud ; nunc autem
,
simile : propierea unusquisque omni custodia suum ies.Origenes in Joannem., pag. 57, tom. II Huet.
,
cor servare débet. In Alatth., pdg. 254, tom. I Huet. « si designandi sunt ii qui jaxta Evangelium
Quod
1 Morluus est enim Jésus, ut mortuis etiam domine- impuri sunt cibi, dicemus taies esse illos qui ab ava-
tur, afque quamdiu vivit homo, non gerit imaginem nt ia subministrantur, et turpis lucri studio cornpa-
terrent, sed cum moritur, interficiturque ab homicida rantur et prœ sumuntur, et idcirco quod
volupjtate
illo { diabolo ), tum perdit Dei imaginem, tum recipit honoratum ventrem pro Dec habeamus : quando vidt-
imaginem et mortificatur. Origen., in Joan.,
terrent licet ipse, ejusque appetitus, non ratio animœ nostrœ
pag. 317, tom. Huet. Il dominantur ; sud et scientes dœmoniis usum aliquem
* Si post luctam et certamina recidivam patiaris et fuisse vel non cognoscentcs quidem, suspicantes autem,
pecces, omnes labores tut venerunt in manus Nabucho- et ea de re dubitantes, si talibus utamur, non ad Dei
donosor. Quomodo omnes labores tui abibunt tibi, si glorinm illis usi sumus, neque in nomine Christi, cum
cecidens postquam plurima lahorasti pro veritate, tunta non ipsa solum suspicio cibos idolis immolatos esse
certamina invanum sustinuisti? prœsertim qui conseil comedentem eondemnet , sed et de ea re dubitatio :
sibi sunt multorum laborum pro virtute exanflatorum Oui enim dubitat, juxta Apostolum, si manducaverit,
timere debent ne forte labore ipsorum, si facti sint
, damnatus est, 'quia non ex fide omne autem quod
:
Jérusalem peccato aliquo admisso, accipiat Nabucho- non ex fide, peccatum est. Orig., in Matth., pag. 250,
donosor, rex Babylonis. Ut autem clarius videas quo tom. I Huet.
pacto labores Jérusalem peccantis accipiat Nabucho- ''
Si Celsus dicit immunes a peccatis qui peccare
donosor, simul ufar iis quœ in Scriptura Ezechielis desierunt, ad hos quoque Servator noster missus est,
scripta sunt, sic se habentibus : Justus quilibet, si sed non ut medicus. Quod si per immunes a peccato
se. averterit a juslitiis suis, et fecerit delictum, non significat eos quinunquam peccaverunt respondebi- ,
recordabar justitiaruoi ejus quas fecit. Hom. 18 in mus impossibile esse tnveniri hominem a peccato im-
Jerem., pag. 179, tou]. I Huet. munem, utique in eo sensu, solo excepta homine quem
^ Audisti quanta sint in lege sacrificia pro peccatis
; Jésus assumpsit qui peccatum non fecit. Origan.,
,
audi nunc quantœ sint remissiones peccatorum in Evan- lib. in contra Celsum, pag. 149.
geliis. Est ista prima, qua baptizamur, in remissio- 8 Prima fundamenta congregationis Ecclesiœ siatim
nem peccatorum. Secunda remissio est in passione ab initia sunt posita, unde et Apostolus dicit œdificari
martyrii. Tertia est quœ pro eleemosyna datur. Ecclesiam non solum super Apostolorum fundamenta,
Quarta nobis fit remissio peccatorum per hoc quod et sed etiam Prophetarum. Inter Prophetas autem nume-
nos reinittimus peccata fratribus nosfris. Quinfa re- ratur et Adam, quia magnum myslerium prophetavit
missio peccatorum est, cum converterit quis pcccatorem in Christo et in Ecclesia, dicens : Propter boc, relin-
ab errore vice suœ. Sexta quoque fit remissio per quet liomo patrem suum et matrem suam, et adhae-
abundantiam charitatis. Est adhuc et septima, licet rebit uxori suae, et erunt ambo in carne una. Evi-
dura et laboriosa, per pwnitentiam peccatorum, cum denter enim de his dictis ejus dicit Apostolus : Quia
lavât peccator in lacrymis ttratum suum, et fiant ei mysterium hoc magnum sit, ego autem dico in
iacrymœ suœ panes die ac nocfe, et cum non erubescit Christo et in Ecclesia. Sed et idem Apostolus cum
sacerdoti Domini indicare peccalum suum, et quœrere dicit Sic enim Ecclesiam dilexit, ut semetipsum tra-
:
medicinam. Hom. 2 in Levit., p. 67 et 68, 1. 1 Geneb. deret pro ea, sanctificans lavacro aquae; non utique
* Novi autem quosdam, qui non solum in hoc sœ- ostendit eam prius non fuisse ; quomodo enim dilexis-
culo, verum etiam in futuro a proprio peccato deti- set eam quœ non erat ? Sed eam sine dubio dilexit,
neantur, veluti istos de quibus Filius inquit Dei : Qui quœ erat. Erat autem in omnibus sanctis qui ab ini-
blasphemaverit in Spiritum Sanctum, non habet re- tia sœculi fueruht facti. Origen., Hom. 2 in Canti-
missionem ueque in prœsenti saecuio, neque in fu- cum Cantic, pag. 331, tom. I Genebr.
turo. Origen., in Joan., pag. 275, tom. H Huet. 9 Sed quoniam Apostolus de Christo et Ecclesia id
* Et fortasse non propterea ei qui in Spiritum dictum esse vult : Et erunt duo in carne una, dicen-
Sanctum peccaverit, non ignoscitur quod ipse Christo dum est non aliam ob causam, priorem, ut ita appel-
sit honoratior, eique anteponatur, sed quod omnia in les, conjugem ipsius, priorem nempe Synagogam fuisse
quibus est ratio, Christo participant , quibus, cum a repudiutam, Christo illud servante : Quos Deus cou-
; eos autem qui Sancto
peccatis discedunt, venia datur juûxit, homo non separet, quam quod a malo vi-
Spiritu digni judicati sunt, non consentaneum sit tiata hœe mulier fornicata est, et cum eo insidias viro
veniam consequi, cum tanto ac tali tnstinctu, et, ut suo struxit, eumque neci dédit, dicens : Toile ejus-
lia dicam^ impiratione in malum iterum relabenles, modi hominem de terra, crucifîge, crucifige eum.
et consilia Spiritus Sancti, qui in eis inest respuen- Illa igitur discessii potius quam vir eam repudiatam
230 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'Eglise dont il est l'àme; car de mémo que *
tenait le premier *
rang entre les apôtres
l'aineanime le corps et lui donne le mouve- comme le plus honorable de tous; et Origène
ment animal, qu'il n'a pas de lui-même ainsi : le reconnaît ailleurs ' pour la pierre solide sur
le Verbe, agissant dans tout son corps, qui est laquelle Jésus-Christ a fondé son Eglise. Hors
l'Eglise, pour lui donner les mouvements con- de l'Eglise il n'y a point de salut. Ainsi les '
"^
venables, fait aussi mouvoir chacun des mem- hérétiques n'en doivent point espérer taudis
bres qui la composent. Ainsi, selon la pensée qu'ils persévèrent dans leur erreur. Elle ren-
d'Origène, on peut définir l'Eglise le corps de ferme néanmoins dans son sein les mauvais *
Jésus-Christ animé par le Fils de Dieu, et dire chrétiens et ceux mêmes qui, ayant aban-
que les particuliers qui croient, sont les mem- donné " la foi dans leur cœur, ne laissent
bres de ce corps, considéré comme un tout. pas d'en faire profession. C'est encore à l'E-
Elle est fondée sur tous les * apôtres et sur les glise seule '° qu'appartient le pouvoir de re-
saints, et non sur saint Pierre seul ; ce n'est mettre les péchés. Les hérétiques " ne l'ont
pas ' à lui seul qu'ont été données les clefs pas; et les sacrifices que l'on oil're à Dieu,
du royaume du ciel. Cependant saint Pierre soit dans " le schisme, soit dans l'hérésie.
dimisil...Dominus quidem, qui vir est, propter Eccle- reus. Hom. 3 in Josue ,
pag. 183, tom. I Genebr.
siam Patrem reliquit, quem intuebatur cum in forma ' Sicut là qui fornicationibus et immundicitiis, at-
Dei esset; reliquit vero et matrem, cum superna Jéru- que impudicitiis et idolorum cultibus maculati sunt,
salem filius esset , et suce , quœ hue ceciderat, uxori regnum Dei non possidcbunt, ita et Id qui in hœresim
adhœsit, et duo in carne una hic effecti sunt ; nam declinaverint. Origen., apud Pamphil., in Apolog.,
pro/iter eam caro et ipse factus est. Orig., in Matth., pag. 481, tom. I Genebr.
pag. 357, tom. I Huet. 8 Nunc autem conflatum ex vivis lapidibus tem-
i Ut autem persuadeamus acquiescenti dogmatibus plum Ecclesiam esse existimo, in caque nonnullos esse
inter se consentientibus et ejus utilitati consulamus,
, qui non quasi in Ecclesia vivant, sed quasi secundum
dicimus ex autoriiate sunce Scripturœ corpori Christi, carnem militent, quique orationis ex vivis lapidibus
quod est Ecclesia Dei, pro anima esse Dei Filiutyi, constructam domum per suam nequitiam latronum
membra autem universi corporis esse quoscumque fidè- speluncam faciant : quis enim postquam peccata in
les. Quoniam sicut anima vivificat et movet corpus, Ecclesiis quibusdam ab
commissa perspexerit
iis
quod ex seipso vivum motum non habet : ita Verbum tantum illud Ecclesiœ mysterium latronum spelun-
illud mira energia corpus suum incitons ad ea quœ cam esse factam non fateatur? Origen., in Matthœ.,
débet facere, movet simul membra Ecclesiœ singula, pag. 440 et 441, tom. I Huet.
nihil sine ratione faciens. Orig., lib.VI cont.Cels, p. 309. 3 Sicut ergo in Evangelio permittuntur zizania simul
* Si vero super illum nnum, solummodo Petrum cum eodem modo etiam hic in Jérusa-
tritico crescere,
iotam Ecclesiam a Deo œdificari arbitraris, quid de lem, id est in Ecclesia sunt quidam Jebusœi, isti qui
Joanne, tonitrui filio, et unoquoque Apostolorum dixc- ignobilem et degenerem vitam ducunt, qui et fxde et
ris? Alioquin an audebimus dicere portas inferi spe- actibus, et omni conversatione sua perversi sunt. Ne-
ciatim adversus Petrum non prœvalituras, prœvalitu- que enim possibile est ad liquidum purgari Ecclesiam,
ras autem adversus reliques apostolos et prœfectos ? dum in terris est, ita ut neque impius in ea quis-
Nonne vero et in omnibus et in his singulis
fit isiud quam, neque peccator residere videatur, sed sint in ea
quod supra dictum est : Portae inferi non prœvale- omnes sancti et beati, in quibus nulla prorsus peccati
bunt adversus eam; et illud quoque : Super hanc macula deprehendatur. Sed sicut dicitur de zizaniis,
Petram aedificabo Ecclesiam meam? An etiam soli ne forte eradicantes zizania, simul cum illis eradi-
Pefro dantur a Domino claves reyni cœlorum nec , cetis et triticum : etiam super iis dici potest in qui-
quisquam beatorum alius eus accipiet? quod si et aliis bus vel dubia, vel occulta peccata sunt. Neque enim
id commune est : Dabo tibi claves regni cœlorum; dicimus de iis qui manifeste et evidenter criminosi
quomodo et non ea quœ prœcedunt communia sunt, et sunt, ut non de Ecclesia expellantur. Hom. 21 in Jo-
quœ subnectuntur tanquam in Petrum dicta. Origen., sue, pag. 203,tom. I Genebr.
in Matth., pag. 275, tom. I Huet. ^ Ibid. — 1* Nos autem quœrimus, an propter illud : Ecce
* Quod si opus est Scripturam perscrutari usque ad Agnus ille Dei qui tollit peccatum mundi, interpre-
ea quœ minima esse putantur, quœret aliquis cur tan- tari debeamus mundum
spiritualiter esse Ecclesiam,
dem cum in numerandis Apostolis primum locum obti- ablatione peccatorum circumclusa in sola Ecclesia.
neat Petrus, fortassis quia cœteris honorabilior, quo- Origen., in Joan., pag. 147, tom. U Huet.
niam etiam vere omnium ultimus Judas ob malum n Certum est quod remissionem peccatorum nullus
affectum in ultimum locum projectus jacet. Origen., accipiat, nisi detulerit integram, probam et sanctam
in Joan., pag. 382, tom. II Huet. fidem, per quam mercari possit arietem ; cujus natura
* Vide magno illi Ecclesiœ fundamento, et petrœ hœc est, ut peccata credentis abstergat. Et hic est
solidissimœ, super quam Christus fundavit Ecclesiam, siclus sanctus, probata et sincera fides , id est ubi
quid dicatur a Domino : Modicœ fidei, quare dubi- nullus perfidiœ dolus, nulla Iwereticœ calliditatis per-
lasti? Origen., Hom. 5 in Exod., pag. 45, tom. Il versitas admiscetur, ut sinceram fidem offerentes pre-
Genebr. [Voir de La Rue sur ce passage.] tioso Christi sanguine, tanquam immaculatœ hostiœ
' Nemo sibi persuadeat, nemo semetipsum decipiat : diluamur. Hom. 3 in Levit., pag. 72, tom. I Genebr.
extra hanc domum, id est extra Ecclesiam nemo sal- 1* Talis ergo iste masculus , et talis vir quœritur,
vatur, Nam si quis foras exierit, mortis suœ ipse fit qui carnes sanctas possit comedere, et comedere non
,
sont des sacrifices profanes. L'Eglise est * vi- pour faciliter la prédication de l'Evangile, par
sible et uue -, quoique ' répandue dans tou- la paix et la liberté du commerce, que la
entre autres celles des Ethiopiens, qui étaient évèques lesyeux, les diacres et autres mi-
au-delà du Nil; des Sères, qui habitaient une nistres les mains, le peuple les pieds. Outre
partie des Indes delà le Gange ; plusieurs des lesévèques '°, les prêtres et les diacres, il y
Bretons et des Germains vers l'Océan, des avait encore d'autres ministres. On distin-
Daces, des Sarmates et des Scythes. Ce fut guait aussi les " vierges et les veuves entre
m quocumque loco, sed in loco sancfo, iyitva atrium orbe : non enim fertur prœdicatum esse Evangelium
tabernaculi. Audiant hœc qui scindant Ecdesiam et apud omnes JEthiopas, maxime apud eos qui sunt ultra
peregrinas ac prava.s inducentes doctritias , putant flumen, sed nec apud Seras, nec apud Orientem uu-
se sacras carnes extra femplum Dei et extra aulam dierunt christianitatis sermonem. Quid autem dicamus
dominicam posse comedere. Profana sunt eorum sa- de Britannis aut Germannis qui sunt circa Oceanum,
crificia, quœ contra mandati legem geruntur. In loco vel apud Barbaros, Dacos, et Sarmathas, et Sajthas,
sancto edi jubentur, intra o.tria tabernaculi tcstimonii quorum plurimi nondum audierunt Evangelii verbum,
sint, quœ fidei murus ambit, spei columnœ suspen- audituri sunt autem in ipsa sœculi consummatione.
dunt, charitatis amplitudo dilatât. Vbi hœc non sunt, Tract. 28 in Matth., pag. 88, tom. II Genebr,
carnes sanctœ nec haberi possunt, nec comedi. llom. 4 ^ Exorta est in diebus ejus [Christi] justitia, et
tem, quœ plena est lumine vero, quœ est columna et fieret Jcsu apostolis illud mandatum ipsius : Euutes,
firrriamentum veritatis, in qua tota totus est adventus docete omnes gentes. Constat autem, Augusto ré-
Fila hominis, diceniis omnibus qui ubique sunt : Ecco gnante, Jesum natum, qui princeps quasi complnnavit
ego vobiscum sum omnibus dicbus vitse usque ad pleraque terrarum uno regtio inducto. Fuisset enim
consummationem saeculi. Tract, 30 in Matthœum, impedimentum quominus distribueretur doctrina disci-
pag. 93, tom. II Genebr. pulorum Jesu in omnem orbem, si multa régna fuis-
* Petrus cum vellet eis tria facere tabernacula, im- sent, non solum ob prœdictas causas, sed quia propter
peritiœ notatur, fanquam qui 7iesciret quid diceret. bella militandum fuisset omnibus pro sua cuique pa-
Legi enim , et Prophctis , et Evangelio non tria, sed tria. Lib. Il contra Celsum, pag. 79.
in Levit., pag. 82, tom. Il Genebr. ita proxima mea in medio liliarum , accipiemus Ec-
* Quis item non mirabitur ascendens contcmpla- desiam gentium dici : quod vel e medio infidelium
tione ad illud vaticinium : Prœdicabitur Evangelium et non crederdium, quasi ex spinis emerserit, vel pro
hoc in universo mundo, in teslimouium ipsis et hœreticorum circumstrepjentium se morsibus in medio
gentibus; cum videat juxta illam prœdictionem jam spinarum posita dicatur. Hom. 3 in Cant., pag. 335,
prœdicatumin omnibus quœ sub calo sunt terris, tom. l Genebr.
Grœcorum Barbarorumque tum sapientibus, tum in- * Ex quo constituta est Ecclesia in nomine Christi
sipientibus. Omnem enim humanam naturam vicit ad consummationem usque sœculi persévérât. Origen.,
sermo prœdicatus cum potentia, nec est videre ullum in Matth., pag. 443, tom. I Huet.
genus hominum, a quo hœc doctrina recepta non sit. Christum autem Ecclesiœ caput esse, non ego, sed
"^
Lib. II contra Celsum, pag. 68. Apostolus intellexit. Sacerdotes autem rationabiliter
* Quid necesse est dicere de Apostolis et Proplietis possunt dici Ecclesiœoculos, quoniam et speculatores
cum de Domini adventu scriptum sit : Omnis terra habcntur. Diaconi autem cœterique ministri, manus,
clamât cum laetitia? confitentur et miserabiles Judœi quoniam pcr eos opéra spiritualia universa geruntur;
hœc de Christi prœsentia prœdicari, sed stulte igno- populum autem esse pedes Ecclesiœ , quibus omnibus
rant personam, cum videant impleta quœ dicta sunt. parcere non oporfet si scandalum Ecclesiœ fuerint
,
Quando enim terra Britanniœ ante adventum Christi facti. Tract. 5 in Matth., pag. 37, tom. II Genebr.
U7iius Dei consensit religionem ? Quando tei'ra Mauro- [Ce passage manque dans le grec]
rum ? quando totus semel orbis ? nunc vero propter ^^ Si audacter expedit loqui Scripturarum sensum
terium viduitatis suœ. Si vero sit talis gualem Aposto- rum civitatum, inventes quosdam senaiores ecclesias-
lus notât, oliosa, verbosa, et non solum verliosa, sod ticos dignos ubivis geniium administrare divinilus
et curiosa, loqueus quœ non oportct, scd in deliciis consiitulam rempublicam , senaiores vero istos qui
degeus, vivtns mortua, liœc deshonoravit et non illus- passim reperiuntur, nihil in moribus habere eximium
travit minisierium viduitatis su(h. Eodem modo etiam prœ plebeis honiinibus. Eodem modo magistraius ec-
virgo consecrata Deo, non illustrât minisierium virgi- clesiastici cum urbunis magistratibus con/erendi : ut
nitatis suœ, nec illustrât lampadem suam, sed e con- inlelligas magisiratus Ecclesiœ, etiam qui inier colle-
trario lumen ejus extinguitur, et efficiiur una de gas paulo frigidius versentur in officio, tamen in mo-
insipientibus virginibus. Lib. VIII in Epist. ad Rom., rum et virtutum raiione vulgaribus senatoribus atque
pag. 388, tom. II Genebr. Prceter hœc vero quœ gêne- magistratibus prœcellere. Lib. III cont. Cels., pag. 128
rai ia sunr, est debitum viduœ, quœ ab Ecclesia susten- et 129.
talur. Aliud vero diaconi, et aliud presbyteri, necnon 3 In Ecclesia Christi inveniuntur non solum convi-
gravissimum episcopi debitum, quod exigit totius Ec- via, et facientiumea mensas suscipientes, sed etiam
clesiœ Salvator, et nisi redditum sit, vindicabit. Orig., calhedras primas in eis amantes et niulta facientes,
lib.de Orat,, pag. 12S edit. Oxon. primum quidem ut diaconos fiant non iules quales
1Requiritur in ordinando sacerdote et prœsentia dicit Scriptura, sed quales suni qui comedunt vidua-
populi, uf sciant omnes et certi sint, quia qui prœs- rum domos occasione longa orantes : et propterea ac-
tantior est ex omni populo, qui diciior, qui sanctior, cipient judicium majus. Et qui taies diaconi fieri vo-
qui in omni virtute eminentior, ille eligitur ad sa- lunt, consequenier visibiles primas cathedras eorum
cerdotium, et hoc adstante populo, ne qua postmo- qui dicuntur presbyteri, prœripere volunt. Quidam
dum retractatio cuiquam, ne quis scrupulus resideret. autem nec istis contenti plurima machinanlur ut
Hom. 6 in Levit., pag. 82, tom. I Genebr. epnscopi vocentur ab hominibus, quod est liabbi : cum
* At Peus, qui Jesum miserai, frustratus dœmo- deberent intell igere episcopum fieri oportere irrepre-
num insidias, effecit ut per universum orbem ad con- hensibilem, etc. Orig., Tract. 24 in Matih., pag. 76,
veriendos corrigendosque homines prœvulerei ejus tom. II Genebr.
Evangelium, ubique instituerentur Ecclesiœ, cum
et Nos vero cum sciamus oppidatim alias civitates
*
raiione vivendi contraria super stitiosorum , intempe- per verbum Dei condiias, eos qui viia et doctrina sana,
rantium et injustorum congregationibus. Taies enim ut prœsint, suni idonei, hortamur ad prœfeciuras Ec-
mores passim cemuntur in civitatibus. Cœterum Ec- clesiarum non ambiiiosos probando, sed modestos, et
clesiœ Dei per eruditœ collaiœ ad vulgares cœtus ho- non temere se tn functiones tam arduas ingerenies co-
minum, plane mundi suni lumina. Quis enim non fa- gimus ad curas publicas. Et magistraius nostri bene
teatur deteriorem Ecclesiœ nosirœ partem, collatam rem administrantes inviti coguniur, summo rege ins-
non vulgaribu-i concionibus, longe f>rœstantioi-em esse? tante, quem Dei Filium esse et Deum Verbum credi-
Nam Ecclesia Dei, quœ Aihenis est. v. g. mansueta mus. Origen., lib. VIII cont. Cels., pag. 428.
s Discant Ecclesiarum principes successores sibi
est et quieta, quippe quœ uni Deo se approbare cu- non
piat : Atheniensis autem populi concio, sediiiosa, nec eos qui consanguiniiate generis juncti suni, nec qui
modo conferenda cum ejus urbis Ecclesia Dei. cai'nis propinquitaie sociantur, tesiamenio signare,
ullo
neque Juereditarium tradere Ecclesiœ
principatum,
Idem dicendum de Ecclesia Dei, quœ est Corinthi, et
concione populi Corinihiorum quam etiam sua ipsi sed referre ad judicium non eligere illum
Dei; et
,
lingua vacant Ecclesiam ; simililer de Ecclesia Dei, quem humanus commendat affecius, sed Dei judicio
quœ est Alexandriœ, v, g. et concione Alexandrini totum de successoris electione permittere. Origen.,
populi. Quœ si quis candidus et veritatis siudiosus Hom. 22 in Num., pag. 161 edit. Genebr., tom. I.
* Ego vero quod de columbarum venditoribus scrip-
audiens examinei, res mira videbiiur, conatum hoc
aliquem atque etiam effecisse, ut per civitaics intra tum est, his convenire existimo, qui Ecclesias avaris,
eadem mœnia cohabiiaret Ecclesia Dei cum profanis tyrannicis, indoctis et irreligiosis episcopis, presby-
populis suas conciones celebraniibus, sic etiam sena- teris vel diaconis tradunt. Orig., in Matth., pag. 442,
dures, tantôt sous prétexte de quelque péché, de Jésus-Christ, qui parlait à des femmes,
tantôt par mépris pour leur pauvreté. Il les qui imposait les mains à des enfants, qui la-
fait * souvenir que celui qui est appelé à vait les pieds à ses apôtres ®. Ils pèchent con-
l'épiscopat, est appelé non au commande- tre Dieu, si, au lieu de servir leurs frères,
ment, mais au service de l'Eglise, et qu'il comme serviteurs du même maître, ils les
doit rendre ce service avec tant de modestie traitent en maîtres ; ils ne doivent excommu-
et d'humilité, qu'il soit utile à celui qui le nier personne pour un motif de haine ou de
'
rend et à celui qui le reçoit. Il veut que, s'il vengeance, surtout ceux qui ne méritent pas
est nécessaire de reprendre publiquement
* de l'être une excommunication injuste n'a *
:
les pécheurs pour intimider les autres , et aucun effet. Il est néanmoins de la piété de
d'user de la puissance pour les livrer à Satan, ceux qui se trouvent déposés ou excommu-
1 Primeps vero, sic auiem appellandum existimo, qui peccat inimici loco habendus est, sed audiendus
qui in Ecclesiis episcopus vocatur tanquam qui minis- Apostolus qui ait : Nolite quasi inimicum existimare,
trantibus ministrat.... taies sumus ut nequissimorum sed corripite ut iïalrem. Orig., in Matth., pag. 422,
inter gentes principum superbiam aliquando superemus tom. I Huet.
et satellites haud secus ac reges tantum non conqui- * Vide ordinationem Spiritus Suncti : quoniam qui-
ramus : quin etiam nos ad terrorem componentes, dem cœtera crimina sœcuii legibus judicantur, et su-
difficilesque ad nos aditus, pauperibus prœsertim fa- perfluum videbatur, ea nunc divina lege prohibere quœ
cientes taies iis accedentibus, et aliquid rogantibus suffieienter humana lege plectuntur, illa sola de qui-
nos exhibemus , quales tyranni principumve crudelis- bus nihil liumana lex dixerut, religioni videbatur
simi supplicibus sese non prœbent. Ac in plerisque convenire decernere. Ex quo ajjparet Judices mundi
légitime constituas, sed majorum prœsertim civitatum partem maximam Dei legis implere ; omnia enim cri-
Ecclesiis principes populi Dei videre licet haud ullam mina, quœ vindicari vult Deus non per antistites et,
apud se œqualitatem servari ne prœstantissimis qui- principes Ecclesiarum, sed mundi judices voluit vin-
dem, nonnunquam Jesu discipulis permittenies... Non- dicari. Orig., lib. IX in cap. XH ad Rom., pag. 398,
nullos autem asperis utentes comminationibus videre tom. II Genebr.
licet aliquando peccati obientu, nonnunquam etiam ^ Juxta Dei sermonem palam facere vellem principi
prœ pauperum contemptu , et rursum nullam erga Ecclesiœ. Imitandum non esse pri?icipem gentium, nec
subditos œquabilitatem in animum inducentes, neque eos œmulandos, qui imperium pofestutemve suam im-
modestiam œquabilitatem inter christianos potissi-
et potenter exercent, quique regia dignitate prœditi sunt:
mum versari debere cogitantes, sed inter eos prœser- sed Christus.... potius pro virili imitandus est, ad
tim qui dignitatem aliquam in Ecclesia gerunt. Orig., quem facillimi sunt aditus, qui cum mulieribus con-
in Matth., pag. 420, tom. I edit. Huet. versatur et pueris manus imponit : Jesum vero in
' Reges gentium dominantur eorum et qui potes- pelvim aquum profudisse et discipulorum pedes ter-
tatem habent super eos beneficivocantur, vos autem sisse. Orig., in Matth,, pag. 421, tom. I Huet.
non sic... At inter vos discipulos meos hœc ita se * Peccat autem in Deum quicumque episcopus, qui
non habento ; neque quibus aliquod tradiium in eos non quasi conservis servus ministrat, sed quasi Domi-
est imperium, qui mihi fidem habent, vel aliquam in nus. Tract. 31 in Matth., pag. 101, tom. II Genebr.
Patris mei et Dei Ecclesiam potestatem habere cre- Mali qui non sunt pastores, sed mercenarii, clau-
''
duntur, fratribus suis impotenter imperanto.,., Quod dunt regnum cœlorum ante homines, nec audiunt quod
si guis primas etiam apud me tenere partes cupit, se ait Apostolus : Sed omnia sustinemus, ut non offen-
nemini prœlatum iri sciât, cui cum sei'vire potuerit, diculum demus Evangelio Ghristi. Est vere videre
minime tamen servierit, servitutem in modestia et multos doctores non permittenies intrare in regnum
laudabili humilitate positam quœque servienti pro- cœlorum, intrare concupiscentes, maxime quando sine
desse, eos autem juvare et reficere possit quibus ipsa judicio et sine ratione non propter peccatq quœ fa-
exhibetur. Orig., in Matth., pag. 419, tom. I Huet. ciunt, excommunicant quosdam, sed propter aliquem
' Hœc auiem eo non dicimus quo nos ipsi incon-
, zelum et contentionem prohibent intrare fréquenter
sulto humiliemus sub potenti manu Dei, et juxta et meliores quam sunt ipsi. Tract. 25 in Matth., p. 77,
ipsius sermonem sub ecclesiastico ministerio : quando- tom. II Genebr.
que autem juxta Apostoli effatum : Peccantes coram 8 Interdum
fit, ut aliquis non recto judicio eorum
omnibus arguendi suut, ut et cœteri timorem ha- qui prœsunt Ecclesiœ, depellatur et foras mittatur;
beant, nonnunquam etiam poteslate sua uti licet, ali- sed ipse non ante exiit, hoc est, si non ita egit ut
quos tradendo Satanae in inleritum carnis, ut spiritus mereretur exire, nihil lœditur in eo, quod non recto
salvus sit in die Domini; ac id raro faciendum est, judicio ab hominibus videtur expulsus. Et ita fit ut
sed corripere oportet inquietos, consolari pusillani- interdum ille qui foras mittilur, intus sit; et il le
mes, suscipere infirmos, et patientes esse erga om- foris, qui intus retineri videtur. Hom. 14 in Levit.,
nes, et nemioi malum pro malo reddere. Neque vero pag. 108, tom. I Genebr.
234 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
niés injustement *, de supporter cette peine estimait que l'on devait observer à cet égard
avec patience, réservant le tout au jugement ce qui est dit dans TEcrituro touchant les
lie Dieu : aussi était-ce la coutume de l'Eglise prémices, rommc plusieurs autres lois qui
de n'excommunier jamais que pour * des pé- n'ont pas été abolîtes par l'Evangile. Il trou-
chés considérables et publies. Les prêtres te- vait indigne que celui qui entrait dans l'E-
naient ' le premier rang dans l'Eglise, avec glise ne donnât pas aux prêtres et aux mi-
l'évèque, et prêchaient * que](juel'ois ' en sa nistres occupes à la parole de Dieu et au
service de l'autel, les prémices et même les
"
présence. Ils vivaient • dans le céhbat, n'as-
pii-ant qu'à une iécoudité spirituelle. Un leur ' décimes, soit <1(î ses fruits, soit d(; son bétail,
donnait les prémices des fruits, et Origèuc afin qu'ils s'occupassent ^ uniquement de la
* Infamia est a populo Dei et Ecclesia sejjarari, sed ego in sacerdotibus Ecclcsiœ hujusmodi indulgen-
dedecus est in Ecclesia surrjere de consessu presbijte- tiam non introduxerim. Aliam namque rem video
rii, projici de diaconatus gradu, et quidcni eorum currere sacramento. l'ossunt enim et in Ecclesia sacer-
qui ubjiciuiilur , alii sediliones commoverd, alii vero dotes et doctorts filios generare, sicut et ille qui di-
judicium in se factum, cum omni humilitate susci- cebat : Filioli mei, quos iteruin parlurio, douce l'or-
piunt. Quicumque igitur exifjuntur, et dolore deposi- metur Christus in vobis. Et iterum alibi dicit: Tamelsi
iionis suœ comjreyant populos ad scliisnia faciendum, multa millia pocdagogorutn liabeatis in Ghristo, sed
et sollicitant multitudinem malignorum, non accipiunt non mullos patres. Nam in Ghristo .Tesu per Evange-
inhonorationem suam in prœsenti , sed thésaurisant lium ejus ego vos geuui. Hom. 6 in Levit., pag. 83,
sibi thesaurum in die irœ. Qui autem cum omni hu- tom. I Genebr.
militate, sive digne, sive indigne depositi sunt, Dca
''
Primitius omnium frugum, omniumque pecudum,
judicium derelinquunt et patienter sustinent quod de sacerdotibus lex mandat offerri... hanc ergo legem ob-
se judicatum est, isti et a Deo misericordiam conse- servari etiam secundum litteram sicut et alia non-
quentur, et fréquenter etiam ab hominibus revocantur nulla, necessarium puto ; sunt enim aliquanta legis
in pristinum gradum, et in gloriam quam umiserant. mandata, quœ etiam Navi Testamenti discipuli necessa-
Orig., Hom. 10 in Ezech., pag. 410, tom. I Geuebr. ria observatione custodiunt decet et utile est etiam
* In Ecclesiis Christi consuetudo tenuii talis, ut sacerdotibus Evangelii offerri primitias. Ita enim et
qui manifcsti sunt in magnis delictis, ejiciantur ab Doniinus disposuit, ut qui Evangelium nnnuntiant, de
oratione communi, et ne modicum fermentum non ex Evangelio vivant, et qui altari deserviunt, de altari
corde mundo orantium totani unitatis conspersionem participent. Et sicut hoc dignum et decens est, sic e
et consensus corrumpat. Tract. 35 in Matth., p. 115, contrario et indecens et indignutn existimo et im-
tom. II Genebr. Ubi enim peccatum non est evidens, pium, ut is qui Deum colit et ingreditur Ecclesiam
ejicere de Ecclesia neminem possumus, ne forte eradi- Dei, qui scit sacerdotes et ministros adsistere altari,
cantes zizania, eradicemus simul cum ipsis etiam tri- aut verbe Dei, aut ministerio Ecclcsiœ deservire, ut de
ticum. Hom. 21 in Josue, pag. 203, tom. 1 Genebr. fructibus terrœ quos dat Deus, solem suum produ-
* Epnscopi et presbyteri quibus priores populi sedes cendo, et pluvias suas ministrando, non ofjerat pri-
attributœ sunt, quique totas Ecclesias, quibus minime mitias sacerdotibus. Non mihi videtur hujusmodi
oportct, tradunt, et principes quos non expedit consti- anima habere memoriam Dei; nec cogitare, nec cre-
tuunt, a sunt columbarum venditores. Origcn., in dere, quia Deus dederit fructus quos cœpit, quos ita
Matth., pag. 443, tom. I Huet. recondit quasi alienos a Deo. Si enim a Deo sibi da-
Nous avons remarqué dans
* la vie d'Origcne que, tas crederet, sciret utique munerando sacerdotes ho-
quoiqu'il ne fût que prêtre , il avait souvent prêché norare Deum
de daiis et muneribus suis. Hom. 11
devant le peuple dans l'église, et il témoigne lui- in Num., pag. 130 et 131, tom. I Geneb.
même que l'usage était général parmi les Grecs. " Et adhuc ut amplius hœc observanda etiam se-
Omnes episcopi, atque omnes presbyteri, tel diaconi cundum litteram ipsius Dei vocibus doceantur, adde-
erudiunt nos, et erudientes adhibent correptiones , et mus ad hœc. Dommus dicit in Evungeliis : Vœ vobis,
verbis austerioribus increpant. Origen., Hom. 1 in scribae et pharisœi hypocritœ, qui decimatis mentham,
Psalm. XXXVII, pag. 292, tom. I Geuebr. hoc est decimam datis menthœ, et cymini, et haneti,
5 Origône prononça son discours sur la Pythonissc et praeleritis quae majora sunt legis, hypocritœ, haec
en présence de plusieurs évoques. Arbitratu suo par- oportet fieri, et illa non omitti. Vide ergo diligentius
tem, quam vult, proponat episcopus, ut in id studium quomodo sermo Domini vult fieri quidem omnimode
nostrum conferamus. Origen., llom. in lib. Regum, quœ majora sunt legis, non tamen omitti et hœc quœ
pag. 29, tom. I Huet. secundum litteram designantur. Quod si dicas, quia
^ Certum est quia impeditur sacrificium iis qui con- hœc ad pharisœos dicebat, non ad discipulos, audi
jugalibus necessitatibus serviunt, unde videtur mihi iterum ipsum dicentem ad discipulos : Nisi abundave-
quod illius est solius offcrre sacrificium indesinens, qui rit justitia vestra plusquam pharisaîorum et scriba-
indesinenti et perpétues se devoverit castitati. Rom. 23 rum, etc. Quomodo ergo abundat justitia nostra plus-
inNum., pag. 163, tom. I Geneb. Videamus ne forte, quam scribarum et pharisœorum, si illi de fructibus
quoniam in superioribus diximus, hoc genus indû- terrœ suœ gustare non audent, jjriusquam primitias
ment i indicium castitatis vider i quo vel femora operiri sacerdotibus offerant, et levitis decimœ separentur, et
tel consiringi renés videntur ac lumbi, ne forte, in- ego nihil fiorum faciens, fructibus terrœ ita abutar
quam, non semper in illù qui tune erant sacerdotes, ut sacerdos nesciat, lévites ignoret, divinum altare
lias 2>o.rtes dicat esse constrictas. Aliquando enim et de non sentiat? Ibid.
posteritale generis, et de successu sobolis indulgetur; 3 Lex Dei sacerdotibus commissa est, et levitis, ut
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIIF. — ORIGÈNE. 235
loi de Dieu, sans autre soin. « Si, recevant certains usages de l'Eglise dont la connais-
de vous abondamment, ajoute-t-il, en s'adres- sance était réservée aux prêtres. On n'ad-
mettait point *de bigames dans le clergé, et
sant aux laïques les choses nécessaires à la
,
a un partage sur la terre et qui s'applique à le maniement des deniers de l'Eglise, mais
la cultiver, est plutôt prêtre de Pharaon que en détournent toujours quelque chose, pour
de Jésus-Christ. Une veut pas qu'ils commu- s'enrichir du bien des pauvi'es, et n'emploient
niquent ^ aux laïques les raisons secrètes de pas même avocju-sticc ce qu'ils emploient.
huic soli operam tribuant, et verbo Dei ulisque ulla plagis, ad solam orientis partem conversi orationem
sollicitudinevacent. Sed intérim ut vacare possint, fundimus, non facile cuiquam puto ratione comper-
laîcorum uti ministeriis debent. Si enim lairus quœ tum. Sed et eucharistiœ, sive percipiendœ, sive eo ritu
necessaria surit non prœbuerit sacerdotibus et levitis ; quo geritur explicandœ, vel eorum quœ geruntur in
occupati illi in talibus, id est, in corporalibus curis, baptismo verborum gestorumque et ordinuin atque in-
minus legi Dei vacuhunt ; illis auteni non vacantibus, teri^ogationum ac responsionum , quis facile expUcet
neque operam dantibus iegi Dei, tu periclitaris : obs- rationem ? Et tamen omnia hœc operta et relata por-
cur abitur enim lux scientiœ quœ in illis est, te non tamus super humeros nostros, et cum adimplemus ea
subministranfe oleum lucernœ, et culpa tua illud eve- et exequimur, ut a magna jiontifice, atque ejus filiis
niet, quod dixit Dominus : Quia si cœcus caeco duca- tradita et commendata suseepimus. Cuncta hœc ergo
tum prœbeat, ambo iu foveam cadent. Sed et illud in et ïiorum similia cum gerimus, nec tamen eorum as-
te complebitur quod Dominus dixit : Si enim lux quœ sequimur rationem, levamus humeris nostris et por-
in te est tenebrae sunt, ipsae tenebrae quantae sunt. Ut tamus operta et obtecta divina mysteria : nisi quis sit
ergo lux scientiœ in sacerdotibus fulgeat, et lucerna inter nos Aaron aut filius Aaron, quibus ista conce-
eorum sit semper accensa, tu impie officium tuum, ditur nuda et revelata pcrspicere. lia tamen conce-
coinple mandatum Dei erga obsequia sacerdotum. ditur, ut sciant sibi velanda hœc et opjerienda, uld
Quod si forte susceptis a te quœ necessaria, et sic non cœteris dari ea, et in opus profertn ratio poposcerit.
quasi avaritiam, sed quasi benedictionem , illi negle- Hom. in Num., pag. 119, tom. I Geneb.
xerint eruditioni operam dare, et verbo Dei vacare, * Cum autem fieri passe videremus, ut unius uxoris
et in lege Dei meditari die ac nocte, ipsi videbunt viri nonnulli bis matrimonio conjuncti longe meliores
quomodo pro animabus vestris reddant Domino ra- essent, dubii eramus quamobrem Paulus ab ecclesias-
tionem. Hom. 17 in Josuc, pag. 199, tom I Geneb. ticis magistratibus bigarnos arceat ; id enim mihi
1 Hœc duo sunt pontificis opéra, ut aut a Deo dis- examine dignum videbatur, propterea quod fieri po-
cat legendo Scripturas divinas, et sœpius meditando, test, ut qui in duobus matrimoniis fucrit infelix, et
aut populum doceat, sed illa doceat, quœ ipse a Deo alteram uxorem etiamnum juvenis amiserit, reliquum
didicerit, non ex proprio corde, vel ex humano sensu, vitœ tempus ad senectutem usque castissime traduxe-
sed quœ Spiritus Sanctus docet. Est et illud opus rit. Quis ergo jure merito incertus non hœreat quid
quod facit Moyses, ad bella non vadit, non pugnat sit cur cum Ecclesiœ principe opus sit, hune duarum
contra inimicos, sed quid facit? Orat, et donec ille uxorum virum, propter ista connubii vocabula, non
orat, vincit populus ejus. Si relaxaverit, et dimiserit prœficimus, unius auteni uxoris virum etiamsi ad se-
manus, populus ejus vincitur et fugatur. Oret ergo et nectutem usque uxori convixerit, nec se fartasse un-
sacerdos Ecclesiœ indesinenter, ut vincat populus qui quam ad castitatem et continentiam exercuerit, prin-
sub ipso et hostes invisibiles, Anialecitas, qui sunt dœ- cipem eligimus? Jam vero ab Us quœ dicta sunt ad
mones, impugnantes eos qui volunt pie vivere in legem de libello repudii mentem converte, quœsiturus
Christo. Hom. 6 in Levit., pag. 84, tom IGeneb. an non quandoquidem episcopus, presbyter et diaconus
2 Vis scire quid intersit imiter sacerdotes Dei et rerum verarum symbola sunt, quœ his nominibus eon-
sacerdotes Pharaonis? Pharao terras concedit sacer- tinentur, esse debere illos unius uxoris symbolice viros
dotibus suis, Dominus autem sacerdotibus suis par- sandre voluerit, etc. Orig., in Matth., p. 363, 1. 1 Huet.
teni non concedit in terra ; sed dicit eis : Ego sum Diaconi qui Ecclesiœ pecwiias non recte dispen-
*
pars vestra, observate ergo, qui hœc legitis, omnes sant, sed eas semper manibus contrectant, non honeste
Domini sacerdotes, et videte quœ sit differentia sacer- vero administrant, sed ea quœ vulgo divitiœ existi-
dotum, ne forte qui partem habent in terra, et de rnantur esse, et pecu7iias coacervant, ut ex ils quœ
terrenis cultibus ac studiis vacant, non tam Domini pauperum nomine erogantur, divites fiant, hi numu-
quam Pharaonis sacerdotes esse videntur. Hom. 16 larii sunt pecuniarum mensas habentes, quas Salvator
in Gen., pag. 31, tom. I Genebr. evertit. Origen., in Matth., pag. 423, tom. I Huet.
3 Sed et in ecclesiasticis observationibus sunt non- * Omnes episcopi atque omnes presbyteri , vel dia-
nulla hujusmodi, quœ omnibus quidem facere necesse, coni erudiunt nos, et erudientes adhibent correptiones
nec tamen ratio eorum omnibus patet. Nam quod, v, et verbis uusterioribus increpant. Orig., in Ps. xxxvil,
g., genua flectimus orantes, et quod ex omnibus cœli p. 292, t. I Geueb. -"''In Matth., p. 443, ubi supra.
236 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
En général, les chrétiens * ne négligeaient façon particulière, gardaient une virginité *
rien pour l'airi' embrasser leur religion à tout perpétuelle, non en vue des homieurs ou des
le monde, autant qu'il 'lépeudait d'eux ; et il récompenses temporelles, mais pour la gloire
y en avait qui s'occupaient tout entiers à aller de Dieu et avec le secours de sa grâce. 11 y
dans les villes, dans les bourgs et dans les en avait qui s'engageaient par * vœu à vivre
villages, enseigner aux autres la manière de dans la continence. L'office * des veuves était
bien servir Dieu, sans qu'on pût les soupçon- d'enseigner les personnes de leur sexe, de
ner de chercher par là à s'enrichir, puisque lesexhorter à vivre dans la pureté, et de leur
souvent il? ne voulaient pas même qu'on leur laver les jjieds. La • cérémonie des exor-
donnât ce qu'il fallait pour vivre ; ou, s'ils cisines se faisait par l'imposition des mains,
prenaient quelque chose, ils se contentaient que accompagnait de jeûnes et de prières.
l'on
du pur nécessaire, quoicju'il se trouvât des Origène ' veut que ceux (jui sont chargés
de
personnes prêtes à leur fournir beaucoup au- la distribution des revenus de l'Eglise, les dis-
delà. Les * vierges, consacrées à Dieu d'une pensent avec fidéUté et avec prudence; que,
1 Christiani, quanium
in ipsis est, non negligunt multa jefunia, multœ exorcistarum invocationes, et
per Muni orùem
seminare iloctrinam hanc suam, ad hœc omnia surdus dœmon in obsesso corpore per-
certe quù'am hoc unum sibi desumpserunt negotium, maneat et persistât, tolerabilius ferens exorcistarum
ui obambularint non tantum per oppida, sed vicos pœnas, et adhibita sibi ex Dei noninis invocatione
etiam et villas, ui alios (juoque ad pietafem, verum- tormenta, quam discedere ab homine quem impuden-
que Dei cultiim pertraUerent. Nec objici potest eos ter absidet et nequiter. lia etiam hic intelligendarn
lucri causa id facere, quando scppe récusant accipere qui dicuntur Amorrhœi, qui permanent et
est in istis
victui necessaria, et si forte hue interdum coguntur persistunt habitare in Elan et in Selamin. Et ut vere
prœ prasenti tantum usu contenti sunt
inopia ,
ostenderet Scriptura, quia perferentes pœnas et fla-
etiamsi non desit rnultorum ultronea liberalitas gella persistunt, dicit : Et gravis elTecta est super
plura largiri cuinentium. Lib. III cont. Cels., p. 116. eos manus Eplirem, quomodo autem gravis efficitur
' Eodem modo etiam virgo consecrata Dec, non manus Ephrcm super Amorrhœos? vel exorcistarum,
illustral ministei'ium virginitatis suœ, nec illustrât ut diximus, manus impositione vehementius imposita
lampadem suam, sed e contrario lumen ejus extin- gravari dicitur super immundos spiritus manus
guitur et efficitur una de insipientibus virginibus. Ephrem, vel quia boni actus, vel bona opéra gravant
Lib. VIU in Epist. ad Rom., pag. 388, tom. II Geticb. et affligunt dœnionum genus, contrariasque virtutes.
' Apud alios quoque, ut putantur, deos, virgines Hom. 24 in Josue, pag. 206^ tom. I Geneb.
exiguœ numéro, sive ab hominibus custoditœ, sive ''Non autem est import unum monere propter pec-
non {nec enim hoc nunc quceritur) videniur perseve- cata, quœ in hominibus qui videntur credere Christo,
rare in castitate, religionis gratia. Cœterum apud et in dispensatoribus Ecclesiarum plerumque fieri so-
christianos non propter humanos honores, non propter ient: quoniam et secundum simplicem intelleclum,
mercedes pecuniarias, non propter gloriolas viget vir- multi opus habemus ut fidèles simus pariter et pru-
ginitatis studium; et quamprimum approbaverunt dentes ad dispensandos Ecclesiœ reditus. Fidèles qui-
Deum habere in notitia, conservantur a Den in hac dem ut non devoremus quœ sunt viduarum, et ut me-
mente laudabili, et pietatis offîciis, pleni omni boni- mores simus pauperum, et occasionem accipientes ex
tate et justitia. Lib. Celsum, pag. 3G7.
VII contra eo quod scriptum est : Dominus constituit bis qui
* Nos ergo cum venimus ad Deum et vocemus ei Evaugelium prœdicant de Evangelio vivere, amplius
nos in castitate servir e,pronuntiamus labiis nostris, et quœramus cibo simplici, et necessariis vestimentis,
juramus nos castigare carnem nostram vel maie ei fa- ut ne amplius teneamus nobis quam demus esurienti-
cere, atque in servitutem cam redigere, ut spiritum sal- bus fratrihus et sitientibus, atque nudis, et cis qui
vum facere possimus. Hom. 3 in Lev., p. 70, t. I Geneb. necesmtatem patiwdur in sœcularibus curis. Prudentes
' Verum et quœ constituuntur viduœ in Ecclesiis : autem ut unicuique secundum dignitaiem uniuscujùs-
si sanetorum, inquit, pedes lavit. Si autem vis aper- que subministremus recordantes quod dictum est:
,
tius audire, quomodo vidua lavât sanetorum pedes, Boalus qui iutelligit super egenum et pauperem.
audi Paulum in aiio loco constituentem viduiset dicen- Non enim simpliciier de rébus ecclesiasticis dare
tem: Beae doceiites ut pudicas efliciaut adolesceu- oportet ut unum hoc observemus, ut ne quœ pauperum
tulas, lavantes sordes pedum juvencularum, et islae sunt, devoremus aut furtum faciamus de iis : sed ut
viduae diguœ sunt ecclesiaslico honore quœcumque prudenter intelltgamus indigeidium causas jiropter
sanetorum pedes lavant sermons spirilalis doctrinœ, quas sunt indigentes; et uniuscujusqus dignitatem,
sanetorum vero non masculorum, sed mulierum. Docere quomodo advocatus est, quantum necessarium habet,
enim mulierem non ijermittit, neque principari viro. vel pi'opter quam causam indiget. Non ergo si militer
Yult esse mulieres bene docentes ut ad castitatem sua- est agcndum in eis qui ab infantia duriter sunt edu-
deant, non adolescentes, sed adolescentulas : indecens cati et stricte, et in eis qui large et deliciose nutriti
mulier magistra vir> fini, sed ut casti-
quipjpe est ut sunt, et postea ceciderunt: nec eadem sunt ministranda
tatem suadeant adolescenlulis, et amare viras et li- viris et mulieribus, aut multum
senibus et juvenibus,
béras suas. Hom. lom. I Geneb.
6 in Esai., pag. 356, aut juvenibus quidem et debilibus, propter quod non
* Si inimica virtus dœmonis ex amaritudinis turma possunt sibi acquirere escas, et eis qui vel ex parte
venions obsideat alicujus corpus, perturbet ac deci- possunt sibi succurrere. Requirendum est autem et si
piat mentem, adhibeantur autem multœ orationes, multos habeunt nutos non negligenter, sed omnia fa-
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XIIl. — ORIGÈNE. 237
contents du simple nécessaire, ils ne gardent donné toutes les preuves nécessaires de leur
pas pour eux plus qu'ils ne donnent aux frè- ferme résolution de n'abandonner jamais la
res qui sont dans le besoin qu'ils donnent à profession du christianisme. On en choisis-
;
chacun selon qu'il le mérite; « car, ajoute-t-il, sait quelques-uns de ces derniers pour exa-
il ne faut pas traiter de même ceux miner la vie de ceux qui souhaitaient d'être
qui ont
vécu durement dès l'enfance, et ceux qui ont admis dans les assemblées, afin qu'ils en
été élevés dans l'abondance et dans les déli- éloignassent ceux qui ne voulaient pas re-
ces ; ils doivent donner des secours différents noncer à leurs mauvaises habitudes, et qu'ils
aux hommes et aux femmes, aux vieux et aidassent les autres à faire tous les jours de
aux jeunes et à ceux qui peuvent s'aider en nouveaux progrès dans la vertu. Souvent*
partie; ils doivent s'informer du nombre de on tentait les catéchumènes et même les fi-
leurs enfants, s'il y a de la négligence, ou si dèles de retourner à l'idolâtrie, en leur di-
leur travail ne peut leur suffire. » sant une telle idole a guéri d'une telle ma-
:
Sur le sa-
crement (le
17. Ceux qui désiraient de * sortir des té- ladie, ou a deviné une telle chose. Avant de
Bapti>nie. nèbres de l'idolâtrie pour s'instruire de la loi recevoir le baptême *, il fallait qu'ils eussent
de Dieu étaient mis au nomlire des catéchu- montré desfruits dignes de pénitence, et
mènes. Il y en avait ^ de trois sortes : les passé quelque temps dans une bonne vie, se
premiers , à qui l'on n'accordait point l'en- préservant de toutes les ordures et do tous
trée dans les assemblées ecclésiastiques, parce les vices.Après cela, ils venaient " à la fon-
qu'ils ne s'étaient présentés que depuis peu, taine mystique du baptême, et, en présence
et qu'il était nécessaire de sonder leur inten- de l'ordre sacerdotal et lévitique, ils étaient
tion et de les exorciser quelque temps aupa- initiés à ces mystères vénérables que savent
ravant; les seconds, qui n'étaient pas tout ceux à qui il est permis de les connaître.
à fait disposés à recevoir le baptême et n'a- L'usage de l'Eglise était de baptiser par «
vaient pas encore reçu le symbole de leur l'eau visible et le chrême visible, au nom ' de
purification ; les troisièmes, ceux qui avaient la Trinité. Origène dit qu'il n'y a point d'au-
cientes, et non
sibi suffidenter occur rentes. Origen., cro vos, ne absque cautelu et diligenti circumspectione
Tract. 31 m
Maith., pag. 101, tom. Il Geneb. ad baptismum veniatis, sed ostendatis primum fruc-
* Eteuiin tu qui nuper cupis, idololatriœ tenehris tus dignos pœtiitentiœ. Facife aliquid temporis in
derelictis, ad audicntiam divinœ legis accedere, conversatione bona
nunc , mundos vos a cunctis sordibus,
primum jEfjyptum derelinquis , cum catechumenorum vitiisque servate ; et tune vobis remissio peccatorum
acjgregatus es numéro et prceceptis ecclesiasticis parère fief, quundo cœperitis et ipsi propria peccata contem-
cœpisfi. Orig., Hom. 4 in Josue, p. 184, t. I nere. Hom. 21 in Luc, pag. 147, tom. II Genebr.
Genob.
* Christiani, quantum possunt,
prœexaminant ani- ^ Si vero ad mysticum baptismi veneris fontem, et
mos audire cupientium; ac primo privatim incan-
se consistente sacerdotali et levitico ordine initiatus
taios priusquam in cœtum recipiantur, ubi fueris venerandis illis magnificisque sacramentis, quœ
videntur
eo profecisse, ut honestœ vitœ sint cupidi tum
; demum norunt illi quibus nosse fas est, tune etiam sacerdo-
infroduc...it distinctis ordinibus, altero recens udmis- tum ministeriis Jordane digresso, terram repromis-
sorum necdum
assecutorum lustrationis symbolum; sionis intrabis, in qua te post Moysem suscepit Jésus,
altero eorum, qui quantum in se est demonstra?it et ipse tibi efficitur
sibi novi itineris dux. Hom. 4 in Jo-
propositum esse, nil aliud nisi cum christianis velle sue, pag. 184, tom. I Genebr.
et sentire; inter quos nonnulli prœpositi sunt, qui in Quamvis secundum typum Ecclesiœ traditum om-
6
vitarn et inores eorum qui admittuntur inquirant, ut nés bapfizafi sumus in aquis istis visibilibus, et in
non concessa facientes, candidatos religionis chrismaie visibtli, tamcn qui mortuus est peccaio, et
arceant
a suis conventibus : cœterum horum vere baptizatur in morte Christi, et consepelitur ei
dissimiles exci-
piunt ex animo et quotidianis accessibus per baptismum in morte Christi, iste vere in Spiritu
meliores fa-
ciant. Origen., lib. III contra Celsum, pag. 142. Snncto baptizatur de superioribus et aqua. Lib. V in
3 Sunt quidam qui miftunt vos, mugis autem Epist. ad Rom., pag. 350, tom. II Genebr.
cate-
chumenos, quantum in ipsis est ad oenfriloquos f Requiras
fortassis etiam hoc quod ipse Dominas
Videte ergo nequando decipiatur alicujus
ex vobis dixitad discipulos , ut buptizarent omnes gentes in
anima, ut adhuc ambigat et dubitet , cum audierit nomine Pat ris, et Fïlii, et Spiritus Suncii, cur hic
illum et illum hominem : in illo idolo dœmon
curavit Apostolus solius Christi in baptismo nomen assumpsit
illum lunguorem, illud et illud divinavit.
omnia Ma dicens : Quicumque baptizati sumus in Cliristo,
cum
idola sunt dœmonum et Iwminum non cognoscentium utique non habeantur legitimum baptisma, nisi siib
vei'itatem. Hom.Isaiam, p. 358, tom. I Gonebr.
7 in nomine Trinitntis. Sed intuere prudentiam Pauli,
* Venite, calechunieni
, agite pœnitentiam ut in re- quoniam in prœsenti loco non tam baptismatis ratio-
missioncin peccatorum baptisma
consequumini , in re- nem quam mortis Christi discutcre cupiebat, ad cujus
missionem peccatorum baptisma, qui pec-
ille accipit nos similitudinem etiam suaderet mori deoere peccato
care desistit. Si quis enim peccans
ad lavacrum et Et non utique conveniens, ut
consepeliri Christo.
venit, ei non fit remissio peccatorum;
propterea obse- ubi de morte dicebat, vel Patrem nominaret, vel Spi-
2:î8 HISTOIRE r.i::NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSÎASTrOUES.
tro l)aptcme que celui qui csl couféré ou ce sirs et à tout ce qui se lait pour son service,
nom; oi il renuuque que, du teuips des Apô- et s'engageait par là à ne plus goûter d'au-
tres, on ne donnait pas seulement, comme de cune science diabolique, ni d'astrologie, ni de
son temps, lu formule des mystères à ceux magie, ni d'aucune doctrine contraire à la
que l'on baptisait, mais qu'on leur en expli- piété. Quoique le baptême d'eau remette * les
quait encore la vertu et la raison, savoir que, péchés, celui de sang, qui les efface aussi,
par le baptême, on est enseveli avec Jésus- est plus s
excellent. Après le baptême d'eau, il
Christ, et que l'on doit marcher avec lui dans y en a très-peu qui se conservent sans tache
une nouvelle vie. La coutume de baptiser les jusqu'à la fin de la vie ; mais celui qui est
enfants venait de la * tradition des Apôtres, baptisé dans son sang ne peut plus pécher.
et était, selon Origènc, une prouve du péché Il y en a même qui, quoique baptisés dans
ritum Sanctum mihi vero ne illud quidem otiose reddat quam aquœ baptismus reddidit. Et hoc ego
prœmisisse in hoc capitula videtur Apostolus quod di- non prœsumo, sed Script ura referf et dicente Domino
cit : aut nescilis. Pe?' qucd ostcndit, quia tune, hoc ad discipjulos : Baptismum habeo baptixare quod vos
est Apostolorum temporibus : non ut nunc fieri vide- nescitis, et quomodo urgeor ut perficiatur. Vides ergo
mus, typus tantummodo mysteriorum his qui haptiza- quia profusionem sui sanguinis baptisma nominavit.
bantur, sed virius eorum ac ratio tradebatur, et tan- Et ne offendam, vereor ne istud baptisma
ista dicens
quam scieniibus et edoctis, quia qui baptizantur in eminenfius baptismale quod per aquam tradi-
sit illo
morte Christi, baptizantur et consepeliuntur ei per tur. Illo enim accepta, valde pauci sunt ita beati, qui
baptismum in mortem, et quia sicut Christus surgens id immaculatum usque ad exitum vitœ servare potue-
a mortuis per gloriam Patris, in novitate vitœ ambu- rint. Hoc vero baptismo qui haplizalus fuerit, peccare
lare debeant, hi qui baptizati sunt. Ibid., pag. 351. jam ultra non potest. Et si temerarium non est in
1 De hoc ergo ctiam David dixîsse credendus est rébus talibus audei'p aliquid, possumus dicere, quod
illud quod supra memoravimus Quia : in 'peccàlo con- per illud baptisma prœtei'ita peccata purgantur : per
cepit me
mater mea, secundum historiam enim nullum illud vero etiam futura pcrimu7itur. Ibi peccata di-
matris ejus declaratur peccatum. Pro hoc et Ecclesia missa sunt, hic exclusa. Hom. 7 in Judices, pag. 218,
ab ApostoUs traditionem accepit etiam parvulis bap- tom. I Genebr.
tismum dare. Sciebant enim illi quibus mysteriorum s Qui accepimus gratiam baptismi in nomine Christi
sécréta commissa sunt divinorum, quia essent in om- loti sumus : sed nescio quis lotus sit in salutem : Si-
nibus genuinœ sordes peccati, quœ per aquam et spiri- mon lotus est, et baptisma consecutus perseverabat in
tum ahlui deberent. Ibid.^ pag. 353. Philippi societate : verum quia non erat lotus in sa-
* Addi his etiam illud potest, ut requiratur quid lutem, condemnatus est ab eo qui in Spirilu Sancto
causœ sit cur bapfisma Ecclesiœ in remissionem pec- dixit ad eum : Pecunia tua tecum sit in perditionem.
catorum detur, secundum Ecclesiœ observantiam etiam Ingentis est difficultatis eum qui lavatur, lavari in
parvulis baptismum dari : cum utique si nihil esset salutem. Attendite, catechumeni, audite et ex his quœ
in parvulis quod ad remissionem deberet et indulgen- dicuntur prœparate vosmetipsos dum catechumeni
tiam pertinere, gratia baptismi superflua viderctur. esiis, dum, necdum estis baptizati, et veniatis ad lava-
Hom. 8 in Levit., pag. 90, tom. I Geocbr. crum, lavemini in salutem, nec sic lavemini ut
et
' Recordefur unusquisque fidelium, cum primum quidam qui loti sunt, sed non in salutem : ut qui ac-
venit ad aquas baptismi : cum signacula fidei prima cipit aquam, et non accipit Spir'itum Sanctum, qui la-
suscepit et ad fontem salutaris accessit, quibus ibi vatur in salutem, et aquam accipit etSpiritum Sanc-
tune usus sit quid renuntiaverit diabolo :
verbis, et tum. Quia non fuit Simon lotus in salutem, accepit
non se murum pompis neque operibus ejus, neque
ejus, aquam, et non accepit Spiritum Sanctum. Hom. 6 in
ullis omnino servitiis ejus ac voluptatibus pariturum. Ezechiel, pag. 403, tom. I Gencbr.
Et hoc est quod his legis sermonibus adumbrafur : ' Omnis purificatio peccatorum etiam hœc quœ per
Quia non declinet Israël neque in agrum ejus, neque pœnitentiam quœritur, illius ope indiget de cujus la-
in vineam ejus. Sed neque aquam de lacu ejus polli- tere aqua pracessit et sanguis. Hom. 8 in Levit.,
celur se esse potaturum. Non enim ultra disciplinée pag. 92, tom. I Genebr.
diabolicœ, non astrologiœ, non magiœ, non ullius om- 8 Quin et hoc insuper notandum quod Joannis bap-
nino doctrines, quœ contra Dei pietatem aliquid do- tismus Jesu baptismo, quod dabatur per discipulos
ceat, poculum sumet fidelis. Hom. 12 in Num., p. 137, ejus, inferior erat. Qui ergo in Actis baptizati erant in
tom. I Gcnebr. Jaunnis baptismo, et neque, an Spi7itus Sanctus esset
* Amputantur et exsecanfur ab hominibus peccata audiirunt, denua ab Apostolo baptizantur, quia rege-
cum in baptismo donatur remissio peccatorum. Hom. 4 neratio non apud Joannem, sed apud Jesum per apos-
in Cant., pag. 346, tom. I Gencbr. tolos suas fiebat. Orig., in Joan., pag. 125, tom. U
* Baptisma sanguinis solum est quod nos puriorea Genebr.
1
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XllI. — ORIGÈNE. 239
administrait le baptême de Jésus-Christ, fai- i8. Ils étaient persuadés que le pain qu'on Pur l'Eu-
charistie.
sait en même
temps profession de croire en offrait dans l'Eglise devenait ", par le moyen
la sainte Trinité. Le baptême ne se donnait
' de la prière, un corps qui était saint et avait,
qu^une * fois. Mais, outre le baptême d^eau de plus , la vertu de sanctifier ceux qui en
et de sang, on en distinguait un troisième, usaient avec un esprit bien disposé ; ils
nommé baptême du Saint-Esprit. L'eau, dans croyaient manger la » chair même du Eils de
le baptême ^, est non-seulement le symbole de Dieu et boire son propre sang, dont la manne
la purification de l'âme, elle est encore, par était la figure. C'estpourquoi ils s'en appro-
elle-même, le principe et la source des dons chaient avec beaucoup de précaution et de
divins, en vertu des invocations de l'adorable respect, de peur qu'il ne ^ tombât la moindre
Trinité. Si un juif, ou un de ceux qu'on ap- partie du corps du Seigneur; et ils se seraient
pelait sévériens ou tatiens, voulait croire en crus coupables, si, par leur négligence, il s'en
Jésus-Christ, on * ne devait pas le presser de fût perdu quelque chose. Ils célébraient *"> la
manger toutes sortes de viandes, comme s'il pâque en mangeant la chair du Verbe ; et,
ne pouvait être sauvé sans prendre celle qu'il dans le temps de la célébration de l'Eucha-
avait en aversion. Les chrétiens eux-mêmes ristie, ils se donnaient •• le baiser de paix, qui
s'abstenaient encore alors du sang ^ des ani- était appelé saint, comme étant chaste, sin-
maux et des viandes ^ suffoquées. cère et le signe d'une véritable charité. Pour
' Cum ergo venimus ad gratiam bapUsmi, universis mus, cum precibus ei graiiarum pro beneficiis acceptis
aliis dits et dominis renuntiantcs, solum confltemur actione oblatos panes edimus, corpus jam per preca-
Deum Patrem Filium et Spiritum Sanctum. Hom. 8
et tionem factos sanctxim quoddam et sanctificans, uientes
in Exod., pag. 52, tom. I Gcnebr. eo cum sano proposito. Lib. VIII cont. Cels., pag. 399.
* Recordemur vero simul peccatorum nostrorum : * Tùnc in œnigmate erat manna cibus, nunc autem
quodque nemo possit remissionem peccatorum sine in specie caro Verbi Dei est verus cibus, sicut et ipse
baptismo coyisequi, et quod fieri nequeat secundum dicit: Quia caro mea vere est cibus, et sanguis meus
evangelica prœcepta, ut quis iterafo baptizetur, aqua vere est potus. Hom. 7 in Num., p. 122, t. I Geneb.
et spiritu, in remissionem peccatorum. Orig., Exhort. ^ Volo vos admonere religionis vestrœ exemplis :
ad martyr., pag. 191. nostris, qui divinis mysteriis interesse consuestis, quo-
' Larncrum aquœ symbolum et nota existens puri-
, modo cum suscipitis corpus Domini, cum omni cautela
ficationis animœ ablutœ ab omni sorde malitiœ, nilii- et veneratione servatis, ne ex eo parum quid décidât,
lominus, etiam ex se, esse principium ac fontem mu- ne consecrati muneris aliquid dilabatur. Rcos enim
nerum divinorum propter potentiam invocationum vos creditis et recte creditis, si quid inde per negligen-
adorandœ triadis ei qui se exhibuerit deitati. Orig., tiam décidât. Quod si circa corpus ejus conservandum
in Joan,, pag. 124, tom. II Genebr. tanta utimini cautela, merito utimini, quomodo pu-
et
* Tametsi quis Judœus, verbi causa, aut ex his qui tatis minoris esse piaculi verbum Dei negkxisse quam
severiani tatianique appellantur, velit Christo cre- corpus ejus? Hom. 13 in Exod., p. 63, t. I Geneb.
dere: putet tamen non parum inesse moment i in ob- ^"Quisquis item cogitât Pascha nostrum immolatum
servaniia continentiœ, vel eorum ciborum qui lege esse Christum, celebrandumque hoc festum edendo
prohibai' fur, vel quos quasi castitati adversantes exis- carnem Verbi, nunquam non Pascha facit, etc. Lib. VIII
timant nonnulli etiam Scripturarum, auctoritaie dccli- cont. Cels., pag. 392.
nandos : hujusmodi hominem si perurgcas ad com- *'
Os sponsi intelligimus virtutem Dei, qua illumi-
munes hominum cibos, nec dicas eum aliter posse nât mentem
et velut sermone quodam amoris ad eam
salvari, vel ad fidem Christi, vel gratiam pervenii-e, facto, si tamen capere mereatur tantœ virtutis prœ-
nisi sumptis his quos refugit cibis tune vere bonum , scntiam, incognita quœque sibi et obscura manifestât,
spiritalis sententiœ blasphematur, putante eo quem et hoc est verius propriusque et sanctius quam oscu-
perurges hanc apud nos haberi fidem, ut salvum fieri lum quod a sponso Dei Verljo porrigi dicitur sponsœ,
nullum credamus, nisi qui suillis vescatur carnibus, purœ scilicet animœ et jjerfectœ; cujus rei imago est
vel aliis hujusmodi communibus et indifferentibus illud osculum quod in ecclesia sub tempore mysterio-
cibis. Lib. X in cap. xiv Epist. ad Rom., pag. 403, rum inmcem damus. Hom. 1 in Cant., pag. 316,
nobis
tom. Il Genebr. tom. I Geneb. Salutate invicem in osculo saucto. Ex
" Ex fide autem manducat is, qui crédit in idolo- hoc sermone et aliis nonnullis similibus, mos Ecclesiis
rum templis immolatum non esse id quod comeditur, traditus est, ut post orationes osculo seinmcem sus-
nec suffocatum illud esse, nec sanguinem; non ex fi.de cipiant fratres. Hoc autem osculum sanctum appellat
vero qui de aliquo eorum dubitat. Orig., in Mutth., Apostolus : quo nomine illud docet primo, ut casta sint
pag. 250, lom. I Huet. oscula quœ in ecclesiis dantur. Tune deinde ut simu-
® Suffocatts autem nobis interdicitur, quia sanguis lata non sint, sicut fuerunt Judœ, qui osculum labiis
ex non est excretus ( cujus exhalatione aiunt
eis dabat, et proditionem corde tractabat. Osculum vero
pasci dcmones); ne vescamur cibo dœmonum, et ne fidèle primo, ut diximus, ca^stum sit, tune deinde
forte simul nobiscum edant dœmones, si suffocatum paeem in se simplicitatemque Imbeat in charitate non
edamus. Lib. VIII contra Celsum, pag. 396. ficta. Lib. X in cap. xvi Epist. ad Rom., pag. 411,
'
Nos qui reri^m qrnnium conditori placere stude- tom. II Geneb.
240 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
partiriper an pain de hc^nédiction, il fallait '
terre, en "^
offraient une partie à l'Eglise, pour
être sain, c'cst-à-diic, sans intirniités spiri- l'entretien des pauvres et des pèlerins. Plu-
*
tnelles, sans habitude de péché. On cachait sieurs, étant tombés, ne prenaient aucun soin
à tous autres qu'aux fidèles le mystère de de se * relever par la pénitence. On chassait
*
rEucharistie, rpi'Origcne appelle adorable de l'Eglise ' ceux dont les péchés étaient ma-
en plus d'un endroit. nifestes, non ceux dont dou-
les fautes étaient
1 Primo quidcm observa tune {Jesum) sanasse offerre Ecclesiœ, vel in usum pauperum aut peregrino-
œgros, cum panes bcnedictionis discipu/is daturus es- rum tantum prœbere :si postea ex lus quœ vovcf,
setquos turbis apponerent, ut sanituti restituti, pa- aliquid ad usus proprios prœsumat, jam non de suis
num benedidionis fièrent participes; nec enim qui frnctibus prœsumpsit, sed suncia Dei violavit. Ibid.,
etiamnum infirmi sunt, panes bcnedictionis Jesu ca- pag. 100.
pere possunf. Sed et si quis cum hœc audire deberet : Multi sunt qui nec ad hoc inclinantur, nec pœni-
*
Probet autem uuusquisque seipsum, et sic de pane illo tentice refugium quœrunt ; sed cum ceciderint, sur-
edat. etc. Is non obtempérât quidcm, sed temere pa- gere ultra nolunt, delectanlur in eo luto quo hœserint
nem Domini, cjusque calicem sumit : imbecillus vel volutari. Ilom 11 in Levit., pag. 101, tom. I Geneb.
^ Ergo quia non
infirmus fit vel dormiens ex ea, ut ita dicam, capitis possumus cjicere istos qui nos
gravedine quant a vi panis contrahit. Origen., in conculcant, eos saltem quos possumus, quorum peccata
Matth., pag. 233, tom. I Iluet. manifesta sunt. Ubi enim peccatum non est evidens,
' apud vcteres propitiationis pro ho-
Ritus quidem ejicire de Ecclesia neminem jiossumus. Hom. 21 in
minibus, qui fiebat ad Deum, qualiter celebraretur, Josue, pag. 203, tom I Geneb.
edocuit, sed tu qui ad Christum venisfi pontificem 8 Propter hoc et in Ecclesiis Christi consuetudo te-
verum in sanguine suo Deum tibi propitium fecit, et nuit talis, ut qui manifesti sunt in magnis delictis,
reconciliavit te Patri,non hœreas in sanguine carnis, ejiciantur ab oratione communi, et ne modicum fer-
sed disce pofius sanguinem Verbi, et audi ipsum tibi mentum non ex corde mundo orantium, totam unita-
diccntem quia liic sanguis meus est, qui pro vobis ef- tis conspersionem et con'iensus corrumpat. Tract. 35 in
fundetur in remissioncm peccatorum. Novit quimyste- Matth., pag. 115, tom. U Geneb.
riis imbutus est et carnem et sanguinem Verbi Dei. s Hœc in Ecclesia sœpe accidentia possumus consi-
Non ergo immoremur in his quœ et scientibus nota derare. Peccavit quispiam, et post peccatum postulet
sunt, et ignorantibus patere non possunt. Hom. 9 in communionem, si ei conceditur quod rogat, in iticom-
Levit., pag. 98, tom.
Geneb. I modum omnium venia procedit, et laxatis frenis
' Pater vocavit Filium, immo ut vere dicamus, Deus sceleribus panditur via. Sin vero cum rationabili de-
hominem vocavit justifiam ad pedes suos, id est incar- liberatione, non ut misericors, nec rursum ut crude-
nationem Filii sui. Ideo et adoramus scabcllum pe- lisJudex, sed quasi uni providens et de omnium so-
dumillius juxta quod scriptum est: Adorate scabel- luté pertractans consideraverit populi dumnum in
lum pjus, quia sanctum est. Caro siquidem Domini, unius venia, haud dubium est quin faciat ejici unum
ho7iorem deitatis assumit. Hom. 5 m Isa., pag. 354, de Ecclesia, ut multos salvet incolumes. Hom. 12 in
tom. I Geneb. Hierem., pag. 112, tom. I Huet.
* In populo Dei sunt quidam, sicuti Apostolus dicit, •0 Jam erga peccantes quam severa est disciplina,
sus spiritales nequitias pro reliquo populo et pro iis est hareticus bonœ vitœ et plus in doctrina sua habet
qui infirmiores sunt sive per œtatem, sive per sexum, auctoritatis eo qui doctrinam conversatione maculet.
sive per propositum. Pugnant autem isti orationibus Qui enim vitœ pessimœ est, non facile homines ad
et jejuniis, justitia et pietate et castitate, cunctisque falsum dogma sollicitât, nec potest per umbram sanc-
contineutiœ virtutibus tanquam armis bellicis com- titatis uudientium decipere simplicitatem. Qui vero
muniti : et cum ad castra victores,
ingressi fuerint sei'mone picrversus est , et disciplinis saluti contrarius,
fruuntur laboribus eorum etiam imbelles et ii qui ad mores autem compositos et ornatos habet, nihil facit
pugnam vel non vocantur, vel exire non possunt. Orig., aliud nisi accipit indumenta varia instituti boni et
Ilom. 27 in Num., pag. 168, tom. 1 Geneb. convcrsationis quietœ, et circumdat ea idolis suis, ut
* Salomon in Proverbiis dicit : Laqueus est viro magis decipiat audientes. Idcirco sollicite caveamus
forlis cito aliquid de suis sanctificare. Postea enim hœreticos qui convcrsationis optimœ sunt, quorum
quam voluerit evenit pcenitere. Et hoc est utique
, forte vitam, non tam Deus quam diabolus instruxit,
quod dicit : ne quis forte cum fructus ex area aut nom quomodo quasdam illecebras escarum aucupes
vinum ex torculari colligit, et dixerit, volo tantum proponunt, ut facilius aves capiant per oblectamentum
[III'' SIÈCLE.] CHAPITRE XTII. — ORIGÈNE. 241
est plus dangereux de s'égarer dans la doc- vertu qui, en chassant le vice, fait obtenir le
trine que dans les mœurs; que toutes les pardon des fautes. Aussi l'Eglise, après avoir
vertus paraissent être dans les hérétiques; pleuré ^, comme perdus et comme morts,
mais qu'elles y sont fausses, le martyre même, ceux d'entre les chrétiens qui s'étaient laissés
et que les hérétiques dont les mœurs sont vaincre par l'impureté ou par quelque autre
bonnes, sont les plus pernicieux; qu'on ne ' péché, ne les recevait qu'après qu'ils avaient
doit pas accorder facilement le pardon aux donné des marques suffisantes d'un retour
pécheurs, mais ^ mesurer l'indulgence à la sérieux, en leiu* ôtant néanmoins toute espé-
pénitence qu'ils ont faite de leurs fautes. La rance d'avoir part, à l'avenir, au gouverne-
douleur que l'on a de ses péchés doit ' renfer- ment de l'Eglise de Dieu. Celui qui avait com-
mer la résolution de s'en corriger à l'avenir, mis un crime public était dès là même ® séparé
les pleurs et les gémissements n'étant * pas de la communion des fidèles, sans attendre le
capables d'eux-mêmes d'obtenir de Dieu grâce jugement de l'évèque, mais il avait encore la
et miséricorde, s'ils ne sont accompagnés du liberté de se trouver aux assemblées dans
désir sincère de changer de vie car c'est la : l'église. Origène fait voir ' l'utilité de la con-
gulœ, sic, ut audacius dicam,est quœdam castitas rem frugem, eum a Deo recipi. Lib. HI contra Cels.,
diaboli, id est , decipula humanœ animœ , ut per is- pag. 149.
iiusmodi castitatem , et mansuetudinem et justitiam * Nos credimus, neminem malum nisi ad virtutem
possit facilius capere, et falsis sermonibus irretire conversum sublevari a Deo, sicut neminem qui jam
Omnia, ut diximus, diabolus operatur, et ea quœ vi- bonus sit rejici : nec propter miserationem et miseri-
dentur esse bona, nec sunt; et ea quœ per naturum cordiam, ut vulgus loquitur, quemquam, sublevat, sed
suam mala sunt, omnia adversus animam commenta' qui peccata sua damnant toto pectore, seque ipsos de'
tur humanam. Unde qui curam habet vitœ suœ, neque fient ac lugent, tanquam ob malefacta merito perditos,
mansuetudine hœreticorum capitur ad consentiendum ac mox mutationem prœ se ferunt quœ resipiscentes
doctrinœ eorum, neque meis delictis qui videor in deceat, èis demum propter mutatam in melius men-
Ecclesia prœdicare, scandaiizabitur, sed ipsum dogma tem, condonat errata pi^œterita, eam prœteritorum
considérons et pertractans, Ecdcsiœ fidem a me aver- oblivionem impétrante virtute, quœ in locum profli-
sabitur, doctrinam vero suscipiet secundum prœceptum gatorum successit. Lib. III contra Celsum, pag. 154.
Domini qui ait: Super calhedram Moysi, etc. Hom. 7 ^ Jam erga peccantes quam severa est disciplina
in Ezech., pag. 405, tom. I Genebr. Arbitrer et cas- prœcipue contaminatos libidine, quos e sua commu-
titatem esse antichristum, quœ est apud hœreticos in nione rejiciunt nostri, quantumvis Celsus eos nugaci-
errorem mittens homines, ne intelligant ecclesiasticam bus circulatoribus similes faciat? et pythagorœorum
castitatem Christum. Sic et misericordia est anti- quidem veneranda schola ponebat cenotaphia disci-
christus contra misericordiam Christum, qui faciunt plinœ suœ desertoribus, nimirum quod haberet eos pro
eleemosynas, sed non propter justitiam Dei. Est pa- mortuis. Hi vero ut perditos Deoque mortuos lugent
tientia anticliristus in eis qui videntur quidem pati eos qui libidine , aliove simili mulo victi fuerint :
pro christianitate , et usque ad effusionem sanguinis ac rursum resipiscentes, haud secus quam redivivos
concertantes, videlicet ne videantur denegare cliristia- recipiunt tandem post longiorem melioris mentis ap-
nitatem : iniquitatem autem in excelsum, in ipsa probaiionem , quam cum primum ad religionem dis-
eiiam effusione sanguinis sui loquuntur, et ponunt in cendam admitterentur, ea tamen conditione, ut quo-
cœlos os suum. Tract. 37 in Matth., pag. 85, tom. II niam lapsi sunt, excludantur in posterum ab omnibus
Geuebr. dignitatibus et magistratibus ecclesiasticis. Lib. III
1 Hom. 12 in Hier., p. 122, t. I Huet., ubi supra. contra Celsum, pag. 142.
* Pro mensura pœnitentiœ remissionis quantitas mn- fi
Ego puto quia docere nos vult sermo divinus,
deratur : ne nosmetipsos seducamus, putantes nullis quod qui peccat dupliciter exire dicitur, primo enim
hœc regulis, nullis dispensari judiciis; puto enim exit a proposito bono et recta sententia, exit a via jus-
quod qui omnes justitias impleverit, ille omnes abluat titiœ, exit a lege Dei. Postmodum vero cum confuta-
iniquitates ; qui vero paucas vel partem aliquam. justi' tus fuerit pro peccato, exit etiam de cœtu et congre-
tiœ operatus est, partem aliquam iniquitatum resol- gatione Sanctorum. Ut si, verbi causa, dicamus : pec-
vat; qui vero perfeciam pro omnibus malis et inte- cavit aliquis fidelium, iste etiam si nondum abjiciatur
gram pœnitentiam gesserit , ita ut purum cor jam per episcopi sententiam, jam tamen per ipsum pecca-
offerat Deo , iste simul omnem labem diluit peccato- tum quod admisit, ejectus est : et quamvis intret in
rum, si vero ex parte pœnituit, et ex parte jam me- ecclesiam, tamen ejectus est, et foris est segregatus a
ruit absolutionem. Hom. 2 in Psal. xxxvm, pag. 300, consortio et unanimitate fidelium. Hom. 14 in Levit,,
tom. I Genebr. pag. 107, tom. I Genebr.
* Hoc esse impossibile dicimus, ut homo ab iniiio
''
David eodem spiritu loquitur in Psalmis et dicit :
mox virtutem complectalur, et ad Deum attollat ocu- Iniquitatem meam notam feci, et peccatum meum
los. Necessumenim malitiam primo in hominibus
est non cooperui; dixi: Pronuntiabo adversum me injus-
subsistere, sicut etiam
Paulus scribit : Sed postquam titiam meam, et tu remisisti impietatem cordis mei.
venit mandatum, peccatum revixit, ego autem mor- Vide ergo quia pronuntiare peccatum remissionem pec-
tuus sum. Neque de injusto docemus sufficere ad hoc cati meretur. Prœventus enim diabolus in accusatione,
ut a Deo recipiatur, si agnoscat suam miseriam; sed ultra nos accusare non poterit : et si ipsi nostri sumus
qui damnata sua prœterita vita convertat se ad melio" accusatores, proficit nobis ad aalutem : si vero expec
II.
542 HISTOIRE GI'.Nl^RALE DES A UTEURS ECCLESIASTIQUES.
fession tlps péchés secrets, en ce que le pé- paravant le médecin à qui vous cxposoroz la
cheurcn ol)tieiitla rémission, s'il les conlessc cause de votre maladie, alin qu'ayant reconnu
voloutiiirenient. Il enseigne (ju'on n'accordait sa capacité et sa charité, vous suiviez les con-
(ju'une fois la pénitence '
pul)lique; que l'on seils qu'il vous donnera. S'il estime que votre
confessait quelcpiefois publi(iueinent des pé- mal doive être découvert daixs l'assemblée de
chés commis en secret; et il * exhorte les péni- toute l'Eglise, pour votre guérison et l'édifi-
tents à n'en être point détournés par la honte cation des autres, il le faut faire, mais avec
(|ui pourrait leur en revenir; d'autant que, grande délibération. » Il met encore , entre
par ce moyen, ils en obtenaient le pardon. les moyens propres à effacer nos péchés, les
« Seulement *, ajoute-t-il, examinez avec soin peines temporelles * dont Dieu nous punit, le
à qui vous devez les confesser; éprouvez au- baptême, le martyre, le pardon des injures.
temus ut a diabolo accusemur, accusatio illa cedit dium, et ipse sui accusator existât; hi autem qui fu-
nabis ad pœnam ; habebit enim socios in gehenna quos iurum Dei judicium non mctuunt, hœc audicntes eum
convicerit criminum socios. Ilom. 3 in Lcuil., pag. 70. in/irmantibus quidem non infirmenlur, eum scandali-
^ In graviorihus criminibus semel tantum pœniten- zantibus non urantur, eum lapsis 7ion jaceant, sed di-
tiœ conceditur locus ; ista vero communia quœ fré- cant : « Longe te fac a me, neque accédas ad me, quo-
quenter incurrimus, semper panilentiam recipiunt, et niam mundus sum : » et detestari incijiiant eum quem
sine intermissione redijnuntur. Hom. 15 in Levit., ante admirahantur, et ab amicitiis recédant cjus qui
pag. 109, tom. 1 Gcnebr. Dans les éditions d'Ori- delictum suum noluit occultare : supier his ergo con-
gène, ou lit qu'on n'accordait la pénitence publique sequenter dixit qui exomologesim, id est, confessio-
qu'une fois, ou rarement Jn gravioribus enim cri-
:
nem facit ; amici mei, etc., Sed hœc non oportet for-
minibus semel tantum vel raro pœnitentiœ conceditur midare eum qui post delictum salvari cupit, neque
locus. Mais ces paroles, vel raro, paraissent avoir notam eorum pertimescere , qui sua quidem peccata
été ajoutées car elles ne se trouvent point dans
;
non cogitant, nec memores Scripturœ sunt divinœ di-
plusieurs manuscrits des œuvres d'Origène, dont centis : Noli improperare homini convertenli se a
quelques-uns ont jusqu'à huit cents ans, selon la peccato, sed memor esto quoniam omnes sumiis in
remarque de Dom Edmond Martène, lib. I de An- culpis. Non ergo de ialibus, sed cogitet de
cogitet
tiquis Ecclesiœ ritibus , part. 2, cap. C, art. 2. Le anima sua, exoraas Deum
ut ab ipso exaudiatur, et
môme auteur cite un ancien théologien qui rap- sublevetur post casum suum ut possit etiam dicere
porte ce passage d'Origène sans ces mots vel raro. quœ sequuntur : Quoniam iniquitalem meam ego pro-
Le Maître des Sentences ne les lisait pas non plus uunliabo, etc. Hom. 2 in Psalm. .\xxvil, pag. 294,
dans ses exemplaires, lib. IV, Distinct. 4. Vitasse tom. I Genebr.
assure que l'on ne les trouve point dans un ancien * Vide quid edocet nos Scriptura divina, quia opor-
manuscrit d'Origène conservé dans la bibliothèque tet peccatum non celarc intrinsecus. Fortassis enim
de Sorbonne. Vitasse, tom. II, pag. 752. sicut a inclusam escam indigestarn aut
qui habent
2 Qui pro peccatis suis confitetur Deo, et animo humoris vel flegmatis stomacho graviter et moleste
dolet dum pœnitet, sciens post exitum vitœ quœ pœna imminentia, si vomuerint relevantur : etiam hi qui
immineat peccatori, hœc dicit : Amici mei et proximi peccaverint, si quidem occultant et retitient intra se
mei adversum me appropinquaveruut et steteruut, peccatum, intrinsecus urgentur, et propemodum suffo-
exponens quanta pati necesse sit euni qui se ad pœni- cantur a flegmate vel humore peccati. Si autem ipse
tentiam emendationemque convertit, quomodo derelin- sui accusator fiai, dum accusât semetipsum, et confite-
quant eum amici et proximi sui et longe efficiantur
,
tur, simul evomit et delictum atque omnem morbi
pro -eo quod ipse se ad exomologesim peccati sui mce- digerit causam; tantummodo circumspice diligentius
roremque convertit, Dicit ergo : Amici mei, etc., in- cui debeas confiteri peccatum tuum, proba prius me-
tellige mihi fidelem quidem hominem, sed tamen in- dicum, cui debeas causam languoris exponerc, qui
firmum qui etiam vinci ab aliquo peccato potuit, et sciât infirmari eum infirmante, flere eum fiente, qui
propter hoc mugieniem pro delictis suis et omni , condolendi et compatiendi noverit discipiinam, ut ita
modo curam vulneris sui, sanitatemque requirentem, demum si quid ille dixerit qui se prius et eruditum
licet prœventus sit volentem tamen mede-
et lapsus, medicum ostenderit et nnsericordem , si quid consiiii
lam et salutem reparare. Si ergo hujusmodi homo dederit, faeias et sequaris. Si intellexerit et prœvi-
memor delicti sui confiteatur quœ commisit, et hu- derit talem esse languorem tuum, qui in conventu
mana confusione parvipendat eos qui exprobrant eum totius Ecclesiœ exponi debeat et curari, ex quo for~
confitentem, et notant vel irrident : ille autem intel- tassis et cœteri œdificari poterunt , et tu ipse facile
ligens per hoc veniam sibi dari, et in die resurrectio- sanari, multa hoc deliberatione et salis perito medici
nis pro his quibm nunc confunditur coram hominibus, illius consilio procurandum est. Ibid., pag. 295.
tune ante angelos Dei confusionem atque opprobria * Restât ut ostendamus multo esse gravius accipere
evasurum, ut nolit tegere et occultare maculam suam, peccatum et habere seeum, quam morte mulctari. Mors
sed pronuntiet delictum suum, ncc velit esse sepul- quœ pœnce causa infertur pro peccato, purgatio est
crum dealbatum, quod dcforis quidem appareat ho- peccati ipsius, pro quo jubetur inferri. Absolvitur
minibus speciosum, id est, ut videntibus se quasi ergo peccatum per pœnam rnortis, nec superest ali'
j'ustus appareat, infus autem sit repletusomni immun- quid, quod pro hoc crimine judicii dies et pœna
ditia et ossibus mortuorum. Si ergo sit aliquis ita œterni ignis inveniat. Hom. 14 in Levit., pag. 108,
fidelis ut, si quid conscius sit, sibi procédât in mé- tom, I Genebr.
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE XII[. — ORIGÉNE. 243
la conversion de nos frères, la charité, la pé- pour Dieu ou par rapport à Dieu * est inutile
nitence laborieuse, l'onction et l'imposition '
au salut, et nous en rendrons * compte au jour
des mains faites sur nn malade par le minis- du jugement. Si Dieu ^ n'a point décerné des
tère des prêtres de l'Eglise, selon ce qui est peines temporelles dans le décalogue , con-
,
marqué dans l'Epître de saint Jacques. Tl tre les prévaricateurs de ses préceptes, c'est
marque - le pouvoir de remettre les péchés, qu'il veut que nous observions ses lois, non
donné particulièrement aux apôtres, par ces par crainte, mais par amour; mais ailleurs,
paroles « Recevez le Saint-Esprit; ceux dont
: il punit de mort ces mêmes prévaricateurs,
vous aurez remis les péchés, » etc. « Ce pou- en particulier l'adultère et l'homicide, pour
voir, dit-il, a passé des apôtres à leurs suc- nous apprendre que si nous venons à le mé-
cesseurs, et regarde les péchés commis contre priser, et que nous n'ayons pas pour lui tous
Dieu; au heu que chacun de nous peut et doit les sentiments d'amour que nous lui devons
remettre les péchés pour ce qui regarde l'of- comme à notre père, il nous traitera, non plus
fense qu'il a reçue. » Il se plaint ' de ce que en fils, mais en esclaves. Celui ' qui observe
quelques-uns, usant d'un pouvoir qui ne leur les commandements de Dieu dans d'autres
appartenait pas, accordaient le pardon à ceux vues que de lui plaire, par vanité ou par res-
qui étaient coupables du crime d'idolâtrie, pect humain, fait injustement des actions de
d'adultère et de fornication. justice. Dieu » ue reçoit les dons que de ceux
divers qui croient en lui; il rejette ceux des infidèles,
20. Selon Origène, tout ce qui ne se fait pas
le.
1 Audisti quanta sint in lege sacriflcia pro peccatis, non solum pro malis verbis, sed etiam pro oiiosis,
audi nunc quantœ sint remissiones peccatorum in quis gloriabitur castum se habere cor? Aut quis con-
Evangeliis. Est ista prima qua baptizamur in remis- fidit dicens : Mundus sum a peccato? Hom. 1 in
sionem peccatorum. Secunda remissio est in passione Psalm. xxxviii, pag. 297, tom. Genebr. I
martyrii. Tertio est quœ pro eleemosyna datur ^ Non occides, non adulterabis. Hoc solum prœci-
Quarta nohis fit remissio peccatorum, per hoc quod pitur, et non adscribitur pœna commissi; nunc autem
et nos remittimus peccata fratribus nostris Quinta iterantur quidem eadem additis his pœnis dicitur ,
est cum converterit guis peccatorem ah errore vice suce. enim : Homo quicumque adulteraverit uxorem viri
Sexta quoque fit remissio per abundantiam charitatis. et uxorem proximi morte
moriatur is qui
sui,
Est adhuc et septima, licet dura et laboriosa, per pœ- adultérât et quae adulteratur, etc. De his autem in
nifentiam remissio peccatorum, cum lavât peccator in prioribus jam data fuerant prœcepta, sed non obser-
lacrymis siratum suum, et fiunt ei lacrymœ suœ pa- vantem quœ maneret pœna^ non fuerat adscriptum.
nes die ac nocte ; et cum non erubescit sacerdoti Do- Nunc ergo eadem repctuntur, et uniuscujusque pœna
mini indicare peccatum suum, et quœrere medicinam peccati decernitur. Et ideo hœc recte justiflcationes
secundum eum qui ait : Dixi Pronuntiabo adversum
:
et judicia appellantur, quibus quod justum est reci-
me injustitiam meam
Domino, et tu remisisti impie- pere judicatur ille qui peccat. Sed intuere ordinem
tatem cordis mei. In quo impktur et illud, quod divinœ sapientiœ, non continua pœnas cum primis sta-
Apostolus dicit : Si quis autem infirmatur, vocet tuit ut non metu pœnœ , sed
prœceptis. Vult enim
presbyteros Ecclesiœ, et impooant ei manus ungen- amore prœcepta custodias : sed si con-
pietatis, Patris
tes eum oleo in nomine Domini, et oratio fidei sal- tempseris , non tam homini jam, quam contemptori
vabit infirmum, et si in peccatis fuerit, rcmittuntur mandatur pœna. Primo ergo benignitate provocaris ut
ci. Hom. 2 in Levit., pag. 68, tom. I Genebr. filius : Ego enim dixi, dii estis et filii Excelsi om-
* Certe omnes potesto.tem habemus dimittendi quœ nes. Quod si filius esse obediens non vis, contemptor
in nos peccantur Sed is in quem Jésus insufflavit plecteris ut servus. Hom. 11 m Levit., pag. 100, tom. I
quemadmodum in apostolos omnibus quœ secun-
in Genebr.
dum rationem gen debent, dimittit solum quœ Deus ^
Quando facimus mandatum Dei, et in conscientia
dimittit, et retinet peccata insanabilia, obsecutus et nostra vanœ gloriœ sordes respergimus, ut placeamus
ipse Deo qui solus habet potestalem condonandi pec- hominibus, aut a/ia quœcumque non placet Deo, boni
cata. Origen., lib. de Orat., pag. 129 edit. Oxon. operis causa prœcedit, quamvis faciamus prœceptum
^ At quidam nescio quomodo sibi assumentes quœ Dei, tamen illud absque querela non facimus et in-
sacerdotalem dignitatem excedunt , et fortassis non juste id quod justum est sequimur. Hom. 2 in Luc,
probe callentes scientiam sacerdotalem , se idololatriœ pag. 135, tom. 1 Genebr.
veniam facere passe gloriantur, adulterium quoque et * Non Deus aliunde accipere primitias nisi a
vult
fornicationem remittere ; ac si ipsorum precibus qui sanctificatis Israël. Paierai enim fieri, ut et apud
hxBc perpetraverant , dimitteretur peccatum quod est Gentiles invenireniur aliqua opéra digna Deo. Exco-
ad mortem. Non enim legisse videntur istud : Est luerunt enim, et inter illos aliqui virtutes animi, et
peccatum ad mortem, non pro iilis dico ut roget philosophia in nonnullis egit aliquantulum , sed non
quis. Origen., ibid., pag. 132. vult ista offerri in primitiis. Ex illis vult Deus bene-
* Inanis dicitur omnis actus et omnis sermo in quo facta suscipere, quorum mens videt Deum, et qui
non est intrinsecus aliquid pro Deo, vel pro mandato sanctificati sunt Deo per fidem. Gentilis autem etiam
Dei. Hom. 25 in Num., pag. 168, tom. I Genebr. licet aliquid honcstum et prababile habere videatur in
* Otiosus sermo est qui neque boni, moribus, hoc ipso quod non Dea adscribit animi vir-
neque mali ali-
quid agit. Si ergo in die judicii rationem reddemus. tutem, sed jactantiœ suœ députât, non est sanctificata
244 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
parce qu'encore que leurs actions soient quel- ordonné, doit être réglé selon la qualité des
quefois bonnes en apparence, ils ne les lui personnes, Origène montre *, par l'autorité de
'
rapportent pas ; ces infulèles ne laissent pas saint Faul, que nous pouvons déchoir de la
de mériter quelques louanges, lorsqu'ils font justice. Il " condamne ceux qui, par complai-
le bien pur un amour naturel de la justice; sance pour les grands, font semblant d'ado-
et, quoique leurs actions leur soient inutiles rer les idoles, qu'ils méprisent en elTot; qui
pour la vie éternelle, elles sont dignes de ré- parlent autrement ® qu'ils ne pensent, et qui
compenses temporelles de la part de Dieu. usent de finesse ' en fait de religion. Il croit
Notre amour * pour Dieu doit être sans bor- néanmoins qu'on ne doit pas accomplir ce
nes, c'est-à-dire que nous devons l'aimer au- que l'on a promis avec serment, lorsque * Ja
tant qu'il est en nous. Il n'en est pas de même chose est mauvaise ; et c'est sur ce principe
de l'amour du prochain, qui, pour être bien ' qu'il excuse ^ Judith de ce qu'elle ne tint pas
hujusmodi probitas, et ideo non recipitur inier pri- cœteros, quomodo non pro uniuscujusque meritis affec-
mitias. Hom. 11 m Num., pag. 133, tom. I Gencbr. tio pensabitur charitatis, longe eminentior quam erga
• Bene guis facit homini , naturali justifia motus, eos haberi potest, qui aut nihil horum aut non intègre
non propfer Deum , quomodo faciebant interdum et egerunt : sed et inter parentes fidèles et infidèles, et
genfes, et multi faciunt homines : opus illud oleum frafres fidèles ac infidèles, soi-oresque potestne fieri,
est vulgare non magni odoris, et ipsum tamen accep- ut non erga hos singulos diversus ordo habeatur cha-
tabile apud Deum, sicut Daniel signifient dicens ad ritatis, etc.? Hom. tom. I Gencb.
3 in Cant., pag. 337,
Balthasar Deum non cognoscentem : Audi consilium 3 Non sermo divinus nec impossibilia
est inordinatus
meum, rex, et peccata tua eleemosyuis redime. Taie prcecipit; nec dicit, diligite immicos vestros ut vos-
aliquid dicit et Petrus apud Clementem, Quouiam metipsos, sed tantum diligite iniuiicos vestros, sufficit
opéra bona quae fiunt ab infidelibus in hoc saeculo, quod est diligimus et odio non habemus. Hom. 2 in
eis prosunt, non et in illo ad consequeudam vitam Cant., pag. 307, tom. I Genebr.
seternam. Et convenienter, quia nec illi prnpter Deum * Quod autem possit interdum divinus ignis extingui
faciunt, sed proptev ipsam naturam humanam.Tracl. 33 etiam in sunctis et fidelibus audi apostulum Paulum
,
in Matth., pag. 110, tom. II Genebr. prœcipientem his qui dona Spiritus et gratiam mère-
' Est autem ordo charitatis et mensura hujusmodi, bantur accipere, et dicentem : Spiritum nolite extin-
verbi gratia, Deum diligere nullus modus, nulla men- guere. Hom. 15 in Gen., pag. 28^ tom. I Geneb.
sura est, nisi hœc sola, ut ei totum exhibeas quantum ^ Aliud est colère, aliud adorare. Potest quis inter-
habes; in Chrislo enim Jesu diligendus est Deus ex dum et invitus adorare sicut nonnulli regibus adulan-
toto corde, et ex tota anima et ex totis viribus. In tes; cum eos ad hujuscemodi studia dcditos viderint,
hoc ergo nulla mensura est. Diligere vero proximum adorare se simulant idola, cum in corde ipsorum cer-
est mensura aliqua; proximum, im/uit, tuum dilige si- tum sit quia nihil est idolum. Colère vero est toto his
cut teipsum.Si ergo aut in Dei dilectione minus ali- affectu et studio mancipari, utrumque ergo resecat
quid feceris quam potes, et quarn in viribus tuis est, sermo divinus, ut neque affectu colas, neque specie
aut inter te et proximum tuum non servaveris œquita- adores. Hom. 8 in Exod., pag. 52, tom. I Genebr.
tem, sed aliquid differentiœ habueiHs non est in te
,
8 Dolus est cum aliud quis lingua loquitur, et aliud
charitas ordinata, nec ordinem suum tenens... Si quis volutat in corde. Quod crimen nescio si vel justos
luboret in verbo Dei, atque animas nostras instruat et quosque electos relmquat immunes, sed puto quod
illuminet, viam salutis doceat, vivendique ordinem tra- alius plus, alius autem minus, nemo tamen sit ab hoc
dat, non tibi videtur et hic proximus esse quidem, perfecte purus nisi ille solus de quo scriptum est :
,
sed multo amplius alio proximo diligendus qui ho- Qui peccatum non fecit, nec dolus inventus est in
rum nihil egerit? Quod si aliquis me errantem et ore ejus. Lib. III in Epist. ad Rom., pag. 321, tom. II
in prcecipitio positum muliebris peccati, ad lucem re- Genebr.
vocet pietatis et de ipso jam interitu eripiat ac retra- ' Non hoc tantum stultum
est, si quis preces simu*
hat ad salutem, atque ex ipsis faucibus œternœ mor- lacris offerat , sed etiam cum aliquis id simulât,
tis eripiat ; non tibi videtur quod illa ipsa si fieri, vulgi opinionibus se attemperans, quod faciunt philo-
potest, plenitudine charitatis qua Deum diligimus, sophi penpatetici, et qui sectantur sectam Epicuri aut
diligendus sit post Deum Si sit non habens quidem Democriti. enim adulierinum débet inesse in
Nihil
docendi vel instruendi gratiam , neque verbum Dei anima hominis vere pii erga Deum optimum, maxi-
prœdicandi, sed tamen sanctœ vitœ vir, innocens, im- mum. Lib. VII contra Celsum, pag. 375.
maculatus, et qui in justificationibus et mandatis Dei 'Absurdum videtur ut si per iracundiam dixero
ingrediatur sine querela, videturne tibi talis hic vir me hominem occisurum, et non fecero, ne perjurare
in eodem charitatis ordine habendus quo ille qui nihil aut fallere videar, cogar ad explendum opus quod
horum agit, quandoquidem uterque proximus dicitur? temere et illicite promisi. Hom. 3 in Levit., pag. 70,
Nonne et hic propter opus suum et vitce meritum se- tom. Genebr.
1
cundum Apostoli dictum, similiter ut ille qui in verbo ^ Volo exemplum dare a Scriptura justi fœdera
Dei laborat superabundantius habendus est in chari- revocantis ; Judith fœdera sanciverat cum Holoferne,
tate propter opus vitce suœ? Erga sanctos vero qui ut tôt diebus egressa ad invocandum Deum, post toti-
nos in Christo genuerunt, sed et pastores atque epis- dem dies sisteret semetipsam cubili Holofernis ; pacta
copos vel qui verbo Dei prœsunt presbyteri, aut qui hœc admiserat Holofernes ; dimisit Judith ad precan-
btne ministrant in Ecclesia, vel qui in fide prœcellunt dum foras extra castra. Quid facere debebat Judith?
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XIU. — ORIGÉNE. 245
parole à Holoplierne. Toutes les fois que la loi qu'il n'y a plus de martyrs et que les hosties
écrite n'est point contraire à la loi de Dieu, des saints ne s'offrent plus pour nos péchés,
il est • à propos de s'y soumettre, plutôt que nous ne méritions point d'en obtenir la rémis-
d'affecter de suivre des lois étrangères; mais, sion. » Il prouve ailleurs ', par l'autorité du
lorsqu'elle est coutraire à la loi naturelle, il livre II des Machabées, que les saints qui sont
vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. On dans le ciel conservent la charité pour leurs
doit s'abstenir * de tout ce que l'on ne peut proches qui vivent en ce monde, qu'ils prient
faire sans scandale, quoique la chose soit in- pour eux, qu'ils s'intéressent auprès de Dieu
différente en elle-même. La célébration ' des pour leur salut.
fêtes consiste à s'acquitter de ses devoirs. 21. Ce qu'il dit des mœurs des chrétiens Sur los
mœurs des
Comme dans l'ancienne loi les prêtres confé- de son temps est remarquable. Ils n'avaient ' chrétieus.
sent, les âmes des martyrs nous font sentir est un être invisible et immatériel; mais ils
que ce n'est pas sans sujet qu'elles environ- avaient des églises dans tous les endroits *
nent l'autel du ciel, en ce qu'elles obtiennent* du monde, dont la plupart furent brûlées »
la rémission des péchés à ceux qui les prient. dans la persécution de Maximin. On voyait
« J'ai donc peur, dit-il, dans une de ses ® homé- régner la douceur et*°le bon ordre dans leurs
hes prononcées en temps de paix, que, puis- assemblées; et, quoique chacune des Eglises
servarene pacta , vel ea prœvaricari ? In cciifesso est catis. Unde ego vereor, ne forte ex quo martyres non
namque prœvaricari, quoad Ho-
quia prœvaricari. [lia fiunt, et hostiœ sanctorum non offeruntur pro peccatis
lofernem, beatum erat in ordine ad Deum. Hom. 19 nostris, peccatorum nostrorum remissionem non me-
in Hierem,, pag. 193, tom. I Huet. reamur. Hom.
10 in Num., pag. 129, tom. I Genebr,
' liaque cum sint duœ leges in génère , altéra na- ^ Sed et omnes sancti qui de hac vita decesserunt,
turœ lex , cujus Deus lator est; altéra scripta, valens habentes adhuc charitatem erga eos qui in hoc mundo
in civitatibus, ubicurnque scripta lex legi Dei non ad- sunt, si dicantur curam gerere salutis eorum et Juvare
versatur, decet accommodare se civibus , nec affectare eos precibus suis, atque interventu suo apud Deum,
leges exteras : ubi vero scriptœ contrarium naturœ, non erit inconveniens ; scriptum namque est in Macha-
id est Dei, lex imperat , vide annon ratio dictet ut bœorum libris ita : Hic est Hieremias propheta Dei,
scripta lege valere jussa, Dec legislatori te commit- qui semper orat pro populo. Hom. 3 in Canticum,
tens , vivas juxta illius prœscriptum, eiiamsi id fa- pag. 338, tom. I Genebr.
ciendum sit cum innumeris periculis, laboribus, rnor- ''
Ne imagines quidem eorum [deorum) putamus sta-
tibus, ignominiis. Lib. V
contra Celsum, pag. 256. tuas , ut qui Deum incorporeum et invisibilem nulla
* Manducore carnem et non manducare, vel bibere figura circumscribamus. Lib. VII cont. Cels., pag. 376.
vinum aut non bibere, neque malum, neque bonum, * Olim quidem in uno Hierosolymœ loco unum erat
sed médium haberi docuit (Apostolus) et indifjèrens... torcular, ubi coacti preces emittebant, cujus meminit
Ornnia igitur fieri oportet ob hoc ne destruatur Isaïas his verbis : Et œdificavi turrim et protorcu-
opus Dei et ideo etiam manducandum est, si in
: lar fodi in illa. Turris vero templum significat, pro-
hoc frater aedifîcatur, et manducandum, si
non est torcular autem altare. Verum quoniam illa se destruc-
per hoc non crescit opus Dei et bibendum est, si : turum comminatus est, et , pro uno
rêvera destruxit
per hoc proficit frater ad fidem; et non est biben- postea multa constituit torcularia, ecclesias nempe
dum, si per hoc frater damnum fidei, aut tu detri- per totum orbem conditas. Origen., in Psal., pag. 81 ;
mentum charitatis incurras. Lib. X in Epist. ad HexapL, tom. I.
Rom., pag. 404, tom. II Genebr. ^ Scimus autem et apud nos terrœ motum factum
* Festum, ut quidam Grœcorum sapiens pulchre in locis quibusdam et factas fuisse quasdam ruinas,
dixit, nihil aliud est quam ofpcium facere : et vere ita utqui erant impii extra fidem, causam terrœ mo-
festum célébrât quisquis facit quod débet, semper va- quod et persecutiones
tus dicerent christianos, propter
cans precibus, continenter incruentas victimas offerens passœ sunt ecclesiœ et incensœ sunt. Tract. 28 in
Deo suis precationibus. Lib. VIII cent. Cels., pag, 392. Matth., pag. 88, tom. II Genebr,
* Quemadmodum illi, qui secundum legem Mosis 10Deus qui Jesum miserai, frustratus dœmonum
altari operam navabant, sanguine iaurorum et hirco- per universum orbem ad converten-
insidias, effecit ut
rum, remissionem peccatorum minisfrare videbantur : dos corrigendosque homines prœvaleret ej'us Evange-
sic animœ secui'i percussorum proptei' testimonium lium , et ubique instituerentur Ecclesiœ cum ratione
Jesu, non frustra cœlesti altari assidentes adminis- Vivendi contraria superstitiosorum, intemperantium et
trant rogantibus remissionem peccatorum. Origen., injustorum congregationibus : taies enim mores pas-
Exhort. ad martyr., pag. 192. sim cernuntur in civitatibus. Cœterum Ecclesiœ Dei
^ De martijribus scribil Joannes apostolus in Apoca- pererudilc collatœ ad vulgares cœtus hominum, plane
lypsi, quia animée eorum qui jugulati sunt propter mundi sunt lumina. Quis enim non fateaiur deterio-
nomen Domini Jesu , adsistant altari ; Qui autem rem Ecclesiœ nostrœ partem collatam cum vulgaribus
adsistit altari, ostenditur fungi sacerdotis officia. Sa- concionibus longe prœstaniiorem esse, Lib. III contra
cerdotis autem officium est, pro populi supplicare pec- Celsum, pag. 128.
uc> HISTOIRE GI^INÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
fût au milieu des corps ne
i)olitiqucs, elles pendant lés Juifs ' accusaient les chrétiens
laissaiout pas (1(! faire corps à ])art. Leurs d'immoler un petit enfant dans leurs assem-
vertus étaient telles, que ceux qui étaient dans blées , d'en manger la chair en commun et
un degré très-bas, en comparaison des plus de s'abandonner ensuite à l'impureté après ,
avancés, valaient beaucoup mieux que la plu- avoir éteint les flam])eaux; et cette calomnie,
part do ceux dont les assemblées civiles étaient toute grossière qu'elle était, avait fait une si
composées. La première cliose que les cbré- grande impression sur les infidèles qu'il y ,
tiens * enseignaient à leurs disciples, était en avait encore, du temps d'Origène, qui ne
le mépris des idoles et à ne point servir les voulaient pas entrer en conversation avec un
créatures. Mais ils ne voulaient - pas que per- chrétien. On n'initiait aux mystères ' de la
sonne reçût leur religion sans l'avoir exami- religion que les personnes saintes et pures;
née, persuadés que la doctrine chrétienne ne ' mais on ^ promettait aux pécheurs que la
corrigeait pas les hommes malgré eux. Plu- doctrine de Jésus-Christ leur apprendrait à
sieurs d'entre eux s'abstenaient des * plaisirs ne plus pécher ; aux ignorants qu'elle leur ,
qu'il leur était permis de prendre dans un donnerait de la science ; aux simples, qu'elle
mariage légitime, pour servir Dieu avec plus les remplirait d'une prudence consommée, et
de pureté. Ceux qui en usaient ne se les **
à tous les malheureux en général, qu'elle les
croyaient permis qu'en certains temps, et conduirait à la béatitude. Parmi les païens
toujours dans la vue d'avoir des eniants. Ce- qui embrassaient la religion chrétienne, le
1 Itaque palam approbamus veneranda religionis jurgitem fertur infrenis, iste incircumcisus est prcepu-
nostrœ initia; non, ut Celso videtur, occultamus tio carnis suœ. Hom. 3 in Gen., pag. 10, tom. I Geneb-
quandoquidem ejus candidatis anie omnia contemptum Vereor proloqui quod sentio, vereor, inquam, ne cas-
idolorum omniumque staluarum indimus, mentemque tior fuerit harum (filiarum Loth) incestus, quam pu-
horum a cullu et veneratione creatur'arum ad Deum dicitia multarum. Discutiant se, et requirant fœminœ
universitatis hujus conditorem attollimus , aperte de in conjugiis positœ, si ob hoc solum adeant viros ut
pronuntiato a vatibus docentes tum ex ipsorum pro-
, suscipiant liberos sin post conceptum desistunt. Istœ
phetiis quœ plurimœ sunt , tum ex Evangelistarum enim quœ argui videntur incesti, ut adeptœ sunt con-
Apostoloi^mque sermonibus accuraie traditis ad poste- ceptum, ultra non accedunt ad concubitum viri. Non-
ras, qui modo prudentius eos audire valeant. Lib. III nullœ vero mulieres, neque enim utiiversas pariter
contra Celsum, pag. 120. noiamus, sed sunt quœdam, quœ sicut animalia abs-
2 Itaque non omni accedenti dicimus, primum crede, que ulla discretione indesinenter libidiJii serviu7it, quas
de quo te doceo, Dei Filium esse; sed unumquemque ego nec mutis pecoribus comparaverim, Pecora enim
alloquimur habita rations morum ejus et conditionis, et ipsa sciunt, cum conceperint ultra non indulgere
ut qui didicimus scire quomodo respondendum sit cui- maribus copiam sui. Hom. 5 in Gènes., pag. 13.
que : sunt enim quibus hoc prœdicamus, cum minus * Videtur mihi
( Celsus ) fecisse idem quod Judœt
queant ad fidem adduci; cœteris quoad ejus fieri po- christianœ doctrinœ initio, sparso rumore quod ejus
test, demonstramus percuntando vicissim ac respon- sectœ homines mactati pueri vescerentur carnibus ; et
dendo. Lib. VI contra Celsum, pag. 281. quod quolies eis libeat operam dare occultis libidini.
3 Rursum aliam quœstionem movet (Celsus) : Ergo bus, extincto lumine, constupret quam quisque pri-
scicbat quidem ai non corrigebat , nec corrigere
,
mam nactus fuerit ; quœ falsa et iniqua opinio dudum
divina virtute polcrat? Quœ omnia stulte loquitur; valde multos a religione nostra aliénas tenuit persua-
Deus enim nullo non sœculo per Verbum suum in sos quod taies sint christiani; et ad hoc tempioris non-
sanctiores animas descendens , et amicos Dei prophe- nullos fallit, qui ea de causa christianos ita aversan-
tasque faciens, corrigit omnes quotquot obediunt, si- tur, utne simplex colloquium cum homine christiano
cut Christo nato per doctrijiam christianam emendat, habere velint. Lib VI contra Celsum, pag. 292.
'
non tamen invitas, sed eos qui ad meliorem vitam Quoniam gratiam Dei prœsto est omnibus in in-
Deo placentem se conferunt. Lib. IV contra Celsum, magistrum disciplinarum
corimptibilitate diligentibus
pag. 163. immortalitatem conferentium, quisquis purus est, non
* Ex quo autem tempore verbum receperunt, quanta solum ab omni scelere, verum etiam a peccatis istis
cequiores sunt redditi ,
graviores, consfantiores ; adeo quœ leviora putantur, fidenter initietur mysteriis chri-
ut quidam ex ipsis amore eximiœ puritatis et quo , stianœ religionis a Jesu traditœ, quœ non commu-
certiores ad cultum divinum accédèrent, ne concessa nicantur nisi puris et sanctis. Lib. III contra Celsum,
quidem et légitima utuntur venere. Lib. I contr. Cels., pag. 148.
pag. 21. * Principio curandos vocamus, ut audita salutari
Si quis igitur erga hujuscemodi motus non im-
* doctrina, peccatores non peccare discanf, insipientes
portunus existât, nec statutos legiUus terminas supe- intellectum acquirant, puériles mentem virilem, déni-
ret, nec aliam fœminam quam conjugem legitimam que infelices félicitât em, tel potim beatitudinem, ut
noverit, et in eaquoque ipsœ posteritatis tantummodo loquar magis proprie tibi vero jam conversi ad sa-
,
* Iste ( Celsus ) in eam partem hoc interpretatur, temnendis voluptatibus, nec sinentes nos ab eis quovis
quasi allectemus peccafores, quia neminem bonum ac pertrahi. Sic nos prœ aliis pugnamm pro imperatore :
justum possimus attrahere. ideoque aperiamus portas cum ipso, licet nos impellat, non militamus ; sed prop-
scffleratissimo cuique et perditissirno. Considérât nos ter ipsum instruimus castra propria pietatis auspi-
quivis, modo ne nobis iniquus , plures ei possumus ciis, rem deprecationibus gerentes. Ibid.
osfendere conversos a vifa non admodum contaminata ^ Forfassis etiamearum { apum ) bella nos docent
peccatis quam a perditissima. Sic enim natura corn- juste bellum gerere, si res ita postulet. Origen., cont.
paratum est, ut quimeliorem habent conscientiam Cels., pag. 217.
cupiant vera esse quœ prœdicantur de reddendis a Deo ® Quin et ad magistratus in patria gerendos horta-
prœmiis, eoque facilius huic doctrinœ quam scelerati tur nos Celsus, si hoc incolumitas legum ac pietatis
assentiant , quos retardât malorum conscientia, me- tuenda postulet. Nos vero cum sciamus oppidatim alias
riiam midctam intentons judicium illud iiniversale verbum Dei conditas, eos qui vita et doc-
civitates pjer
coyiiantibus. Nec sine causa pi'opositus est ille terror trina sana ut prœsint sunt idonei,hortamur ad ptrœ-
extremi judicii, ad quod sistentur omnes homines : fecturas Ecclesiarum ; non ambitiosos probando , sed
quandoqiddem interdum etiam valde perditi capiun- modestos, et non temere se in functiones tam arduas
tur amore hujus doctrinœ invifati sola spe pœniten-
, ingerentes cogimus ad curas publicas. Et magistratus
tiœ, utcumque retrahantur inveteruta peccandi consue- nostri bene rem administrantes invifi coguntur, summo
tudine utpote imbuti malitia. nec valantes facile relictis rege instante, quem Dei Filium esse et Deum Verbum
moribus pristinis conferre se ad vitam correctiorem. credimus, qui dum bene prœsunt, divinitus constitutis
Lib. III contra Celsum, pag. 151. patriis, hoc est Ecclesiis, a quibus electi sunt, regunt
^ Persuasum sit omnibus, sciantque quod germune cas juxta prœscripta Dei, salvis etiam legibus publicis.
christiani ne usitatis quidem in sacra Scriptura Dei Nec hoc faciutit christiani quod ista publica vitœ mu-
nominibusutantvr inter precandum,sed Grœci grœcis, nia réfugiant; sed quod se servent divinioribus et
Romani romanis, singidiquc prccentur propria lingua, magis necessariis muniis Ecclesiœ ad salutem homi-
Deumque célèbrent pro viribus, et omnium linguarum num. Ibid.
Dominus omnibus 1 inguis precantes exaudit, tam varie ^ Si
juventutem avertimus a docentibus comicas et
loqueides haud secus quam consonos, ut ita dicam, et obscenitates iambicas, et quœcumque alla nec docto-
unius vocis homines intelligens. Lib. VIII cont. Cels., rem ipsum meliorem reddunt, nec prosunt auditoribus,
pag. 402. nisi quis philosophice intelligat poemata et singula
* Possumus etiam sic respondere alienis a nostra interpretetur ad utilitatem adolescentulorum, iion pu-
fide etad mib'tiam pro republica, cœdesque hominum det nos hœc fateri. Quod si mihi dederis prœceptores
nos urgentibus ; ccce vestrorttm quogue numinum sa- philosophiam docentes et exercentes, a talibus non de-
cerdotes et delubroricm custodes dextras serva^it puras terrebimus juvenes : sed ubi fuerint in horum scholis
a sanguine, causa sacrorum, id incruentis impollutis- et orbe, ut vacant, disciplinarum prœexercitati, sub-
que cœde manibus, victimas offerant solemnes iis quos veham eos altius ad christianarum sublimem igno-
habetis pro diis, nec ullo bello, delectus habetis e sa- tamque vulgo grandiloquentiam disserentem de rébus
crificiorum ordine. Hujus moris si constat vobis ratio, arduis, et maxime necessariis, idque ex prisconim
quanta magis, cœteris milifantibus non contemnenda Prophetarum oracidis et Jesu Apastalorum litteris.
estnostrorum hominum militia, manus quidem paras Lib. III cont. Cels., pag. 146.
servantium, decertantium autem fusis ad Deum preci- 8 Nunc vero et secundœ, et tertiœ, et qnartœ nuptiœ,
btts pro legifimo imperafore, et pium justumque bellum ut de pluribus taceam, reperiuntur, et non ignoramus
gercnte milite, ut destrnatur quidquid est juste facien- quod taie conjugium ejiciet nos de régna Dei. Sicut
tibus adversurium? Lib. VIII cont. Cels., pag. 427. enim ab ecclesiasticis dignitatibus non salum fornica-
'•
Laboramus autem pro imperio romano dum jit-fte tio, sed et nuptiœ repelluntur, neque enim episcopus,
viventes vota pro eo facimus, exercentes nos in con- nec presbyter, nec diaconus, nec vidua possunt esse di-
2i8 HISTOIRE GÉNl'.RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
secondes noces eu des termes un peu durs, quelquel'ois une raison pour le rétablir. On
et semble même exclure les bigames du croyait * non-seulement permis de
qu'il était
royaume du ciel; mais il s'explique ailleurs *
fuirdurant la persécution, mais qu'd y avait
et reconnaît que celle qui se marie deux lois, encore de la témérité à rester au milieu du
participera aussi à la vie éternelle, quoique danger, lorsqu'on avait le moyen de l'éviter.
dans un degré inférieur à ceux qui ne so. se- Aux jours de fêtes ', on faisait mémoire des
ront mariés qu'une fois, ou qui auront vécu saints, pour s'exciter à imiter leur vertu. Il
y
dans la continence. Il remarque que certains avait ® des chrétiens qui ne se trouvaient aux
évèques ou chefs de l'Eglise * permirent à une assemblées que les jours de fêtes, quoique
femme d'épouser un second mari, du vivant ce fût la coutume de s'y trouver aussi tous
du premier qu'elle avait abandonné; mais il les joui's, pour y entendre
la parole de Dieu
avoue, en même temps, que cette dispense et la des Ecritures, en particulier
lecture
était contraire à l'Ecriture. Si un prêtre ou des ' livres de Moïse, environ l'espace * d'une
un diacre '
déposé, même justement, souffrait heure. Les fidèles étaient ° assis pendant la
cette peine avec patience et humilité, c'était prédication, et quelquefois, au milieu du dis-
gami; sic forsitan et de cœfu primitivorum, immacu- gloriam quam amiserant. Hom. 10 in Ezechiel., p. 410,
latorumque Ecclesiœ, quœ non habet maculam neque tom. I Genebr.
rugam, ejiciefur digamus, non quo in œternum mitta- * Licet etiam hoc in militia Christi , ut si forte ali-
tur incendium, sed quo partem non habeat in regno quando inferiorem te viribus senseris in persecutionibus,
Dei. Origen., Hom. 17 in Luc, pag. 145, tom. II Ge- et non œquum tibi adversum crudelitatem tyranni, per
nebr. fragilitatem corporis, videris esse certamen, dure locum
1 Sunt quidam qui ideo colunt castitatem et purita- irœ et fugere de loco ad locum, nec tibi in hoc adsa'i-
tem, et alii qui idcirco colunt monogamiam, quia pu- bitur militare commissum. Designatur hoc etiam in le-
tabant perire illum qui nuptialiter coeat ; perditum gibus Christi dicentis : Si vos persecuti fuerint la
iri qui duos uxores duxerit. Comparamus eos secun- hac civitatc, fugite in aliam. Hom. 9 in Judices,
dum seipsos, quia expedit magis monogamo deceptum pag. 220, tom. I Genebr.
esse, et putasse punitum iri, et œterno supplicio addi- * Usibus sanctorum honeste et decenter non quasi
quant nosse veritatem et duas accepisse uxores. Arbi- ipsis quodammodo habere communem, et meminisse
tror omnem quicumque hujusmodi sequelam viderit, sanctorum sive in collectis solemnibus , sive pro eo ut
dicturum beatius quidem esse puritatem servare et non ex recordatione eorum proficiamus, apium et conve-
ad secundas transira nuptias minime decepfam, et vi- niens videtur. Lib. IX m Epist. ad Rom., pag. 396.
dere illam quoque quœ bis nubit participem quidem ® Obsecro vos, qui auditorio verbi semper adsistitis,
esse salutis alicujus, non tamen tantœ beatitudinis, patienter accipite, donec paululum négligentes et desi-
quantœ illa quœ colit puritatem sin hoc non possit, ;
des commoneamus. Necesse est nos eos qui collectam
prœstat fuisse deceptam, ac si bis nubentes périrent. negligunt, et audire déclinant verbum Dei, paululum
Origen., Homil. 19 in Jerem., pag. 188, tom. I Huct. per patientiam castigare, qui non desiderant Verbum
Nam et Apostolus licet sub alia specie et alia figura, panem vitœ, nec aquam vivant, qui non exeunt de cas-
dicit tamen mulierem alligatam legi quamdiu vir tris, nec procedunt de domibus luteis, ut colligant sibi
ejus vivit; si autem mortuus fuerit vir, solutam esse manna, qui non veniunt ad petram, ut bibant de spi-
a lege viri, ut jam non sit adultéra si fuerit cum ritali petra... dicite mihi vos qui tantummodo festis
alio vire. Origen., Hom. 6 in Gènes., pag. 15, tom. I diebus ad Ecclesiam convenitis, cœteri dies non sunt
Genebr. festi? Non sunt dies Domini? Judœorum est dies fes-
* Jam vero contra Scripturœ legem mulieri, vivente tas et raros observare solemnes. Et ideo ad eos dicit
viro, nubere quidam Ecclesiœ redores permiserunt, Deus : Quia neomenias vestras et sabbata et diem
agentes contra id quod scriptum est, in quo sic habe- magnum non sustineo; jejunium et ferias et dies
tur Mulier alligata est quanto tempore vir ejus vi-
: fcstos vestros odit anima mea. Odit ergo Deus eos
vit, et cotitra illud : Igitur, vivente viro, mulier voca- qui unum diem putant feslum diem esse Domini.
bitur adultéra, si fuerit cum alio viro non omnino ;
Christiuni omni die carnes agni comeduni, id est car-
tamen sine ratione, hœc cnim contra legem initio latam nes Verbi Dei quotidie sumunt. Hom. 10 in Gen.,
et scriptam ad vitanda pejora alieno arbitrio morem pag. 21, tom. I Genebr.
^
gerentes eos permisisse verisimile est. Orig., inMatth., Moyses nobis legitur in Ecclesia deprecemur Do- ,
pag. 363, tom. I Huet. minum, ne secundum verbum Apostoli, etiam apud
' Dedecus est in Ecclesia surgere de consessu près- nos cum legitur Moyses, velamen sit positum super cor
byterii, projici de diaconatus gradu, et quidem eorum nostrum. Origen., Hom. 7 in Gènes., pag. 15, tom. I
qui abjiciuntur, alii seditiones commovent, alii vero Genebr.
judicium in se facium cum ornni humilitate susci- * Multa sunt, et singula discutere opus est ingens.
piunt Qui autem cum omni humilitate sive digne, Verum quid proderit ut nostro quidem ingenti laborc
,
crucifié la tète en bas, à Rome, où saint Paul mangea la pâque le quatorzième jour de la
soutïrit alors le martyre. Le lieu * de la sé- lune. Il croit qu'Adam '° est sauvé; que " la
l'homélie 39 sur saint Luc : Surgentes oremus Deum, ^ Videtur mihi quemadmodum Lex et Prophetœ lo-
ut digni simus offerre munera quœ nobis restitiuit et cum hubuerunt ad Joannem usque; post quem recessit
pro terrenis cœlestia largiatur in Christo Jesu, cui est a Judœis prophetica gratia ; ita regnantium in populo
gloria et imperium in sœcula sœculorum, amen. potestatem, qua ad interficiendos eos qui morte digni
Pag. 160, tom. II Genebr. judicabantur, pollebant, ad Joannem usque persévé-
* Compertum est nonnullos éloquentes et eruditos rasse; et prœter fas interfecto ab Herode novissimo
viros non solum in sermone, sed et in sensibus prœpo- prophetarum, Judœorum regem potestate interficiendi
tenfes cum mulia in ecclesiis dixerint, et ingentcm
, fuisse privatum. Nisi enim ea excidisset Herodes, Je-
plausum taudis acceperint, neminem tamen audito- sum capite non damnasset Pilatus, sed satis ad id fuis-
rum ex his quœ dicta sunt compunctionem cordis acci- set Herodes cum concilio pontificum et seniorum po-
pere, nec profîcere ad fidem, nec ad timorem Dei , ex puli. Origen., in Matth., pag. 229, tom. I Huet.
recordatione eorum quœ dicta sunt incitari, sed suavi- Simon et Cleopas inter se sermones conferentcs de
"f
tate quadam et delectatione sola aurihus capta, disce- omnibus quœ ipsi Jesu Christo, qui resurrexerat, acci-
ditur, Lib. II in Epist. ad Rom., pag. 393, tom. II dissent, nondum ipsum e mortuis excitum fuisse scien-
Genebr. tes, inquiunt : Tu solus peregrinus, etc. In Joan.,
* De Jesu vero in Bethlehem nativitate, si quis vult pag. 7, tom. II Huet.
post Michœœ prophetiam, postque scriptam in Evange- * Eo mense qui apud Romanos januarius nuncupa-
liisa Jesu discipulis historiam et aliunde fieri certior, tur, baptismum Domini factum esse cognoscimus, qui
considérât quod, juxta evangelicam de nativitate ipsius est mensis quartus ab anno novo juxta supputationem
historiam, ostenditur apud Bethlehem spelunca ubi Hebrœorum. Hom. 1 in Ezech., pag. 390, tom. I Ge-
natus est, et in ea spelunca prœsepe ubi fasciis obvolu- nebr. Triginta annorum refertur Jésus, cum venit ad
tus est quod ostenditur celebratum est etiam in
: et baptismum. Orig., Hom. 2 in Gènes., pag. 7, tom. I
locis natum esse Jesum
infidelium, in ea ipsa spelunca Geneb.
qui a christianis adoratur. Lib. I contra Celsum, 8 Post duos dies factum est Pascha secundum quod
cundum Dei imaginem factus, consequens est ut dies " Venite confundamus linguas eorum quid aliud :
ille sextus divisus fuisse intelligatur in duas species putandum est, nisi quod diversi angeli diversas in
creaturce sextam quidem animalia inte/li-
: ut anle hominibus linguas operati sunt ac loquelas? ut v. g.
gantur fuisse creata in sexta autem hora dixisse Do-
, unus aliquis fuerit qui Babylonicam tune uni homini
minum : Faciamus homiuem ad imaginem nostram, impresserit linguam, alius qui alii jEgyptiam, et
et fecisse eum tune. Propter quod conveniebat pro sainte alius qui Grœcam... manserit autem lingua per
.
ejusdem hominis, morientem in ipsa hora sexta sus- Adam primitus data, ut putamus Hebrœa, in ea parte
pendi. Ibid., pag. 128. hominum quœ non pars alicujus angeli vel principis
250 HISTOIRE Gl'NÉnALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
langue qu'il parlait était la langue hébraï- ARTICLE VI.
que; que les Hébreux ', avant de descendre JUGEMENT DES ÉCRITS d'oRIGÈNE.
en Egypte, avaient leur langue particulière
CATALOGUE DES ÉDITIONS QUI EN ONT ÉTÉ FAITES.
et des caractères différents de ceux des Egyp-
tiens; que c'est de celte langue et de ces ca- i . On sera peut-être surpris qu'ayant cou-
ractères que Moïse se servit pour écrire les tume de rapporter les erreurs qui sont quel-
cinq livres que les Juifs regardent comme quefois échappées à ceux dont nous exami-
des livres divins. Marie *, qui embauma le nons les écrits,nous passions sous silence
corps de Jésus - Christ est différente de la
, celles que saint " Méthode, eaint Epiphaue,
femme pécheresse dont il est parlé dans saint saint Jérôme, Théophile d'Alexandrie et plu-
Luc; l'Evangile ' ne fait mention que de trois sieurs autres anciens ont attribuées à Ori-
Marie ; les Juifs * empêchèrent les Romains gène, dont on trouve, en effet quelques
et ,
de placer la statue de César dans le temple ; vestiges, dans les ouvrages qui nous restent
les " prodiges des magiciens de Pharaon n'é- de ce Père '°. INIais nous avons cru devoir
taient que des prestiges. Dans la Judée, on prendre ce parti, 1^ parce qu'il n'est pas cer-
faisait quelquefois la moisson avant * Pâ- tain qu'Origène ait enseigné les erreurs que
ques, en sorte que les pains azymes étaient ces écrivains lui attribuent. Il paraît, au con-
faits de nouveau grain. Du temps d'Origène, eu des sentiments tout opposés
traire, qu'il a
il se faisait encore beaucoup de ' miracles à ceux qu'on a condamnés en lui *', et que,
dans l'Église Le nombre * des chrétiens d'A-
. sur le mystère de la Trinité, sur la divinité
lexandrie était peu considérable, en compa- de Jésus-Christ, sur l'incarnation, sur la na-
raison de celui des Juifs et des païens qui ture des anges, sur la durée des peines des
étaient dans cette ville. damnés, sur la résurrection des morts, il n'a
facta est, sed quœ Dei portio permansit. Hom. 11 in tam exitus declaravit, illam vero fuisse meras pra-s-
Num., pag. 132, tom.
Genebr. I tigias. Lib. II contra Celsum, pag. 90.
' Hebrœi suam patriam linguam ho.bebant prius- ' Messis incipiit fieri (in Judœa) circu mensem qui
(/uaiit in JEyyptum desccnderent,
hebraicœ litterœet apud Hebrœos Nisan quando agitur Pas-
ajjpellatur,
diversœ étant ab jEgyptiacis : quibus Moses usus cha, adeo ut aliquoties azijma faciant Judœi ex nova
scripsit quinque illos codices sacras apud Judœos ha- frumenta. Origen., in Joan., pag. 230, tom. II Huet.
^
bitas. Lib. III
contra Celsurn, pag. 115. Adjiciendum, discipiinam nostram liabcre quarn-
^Loquitur Evancjelium, quia venit mulier liabens dum demottsfralionem propriam diviniorem quam sint
alabastrulu uugueuti nardi pistici pretiosi, non illa Grœcorum dcmonstrationes, quam Apostolus nominal
peccatrix, sed sancta de qua nunc milii sermo est : scia demonstrationem spirilus et virlutis : utpote Spiritu
quippe Lucam de peccutrice, MattluBum vero et Joan- per prophetias fidem astruenle iis quœ de Christo
nem et Marcum, non de pcccatrice dixisse ; venit ergo feruntur, virtute vero per prodtgia quœ facta credi-
non jjeccatrix illa, sed sancta eujus nomen quoque mus lum argumentis aliis, tum quia supersunt etiam-
Joannes inseruit. Maria quippe erat habens alabas- nunc earum vestigia, dumlaxat apud eos qui vivunt
trurn, etc. Hom. 2 in Cant., pag. 306, tom. I Geueb. juxta valuntatem ipsius. Lilj. 1 contra Cels., pag. 5.
' Forsitan ergo quis dicet quatuor fuisse mulieres 8 Cûm videris Judœos odia habentes christiaiium, et
de quibus conscripserunt Evangelistœ? Ego autem insidiantes ei, intellige quia completur prophetia illa
mugis consentio très fuisse : et unarn quidem de qua quœ dicit : Et ego concitabo eos in non gentom.
conscripserunt Matthœus et Marcus, tiullam differen- Nos enitn sumus non gens, qui pauci ex ista civitaie
tiam expositionis suce facientes in uno capitula : alte- credimus, et alii ex aliu et nusquam gens intégra ab
ram autem fuisse de qua scripsit Lucas : aliam au- initia credulitatis videtur aasumpta. Hom. 1 in PsaU
tem de qua sa'ipsit Joannes : quoniam differt ab aliis muni XXXVI, pag. 276, tom. I Genebr.
mulieribus, non solum in his quœ scripta sunt de un- 9 iMelbod. apud Epipban., Ilœres. 64, uum. 12 et
guento , sed quoniam et diligebat Jésus Mariam et IC; Epipban., Hœres. 04; Hieronym., Epist. 38 ad
Martham. Tract. 35 in Matth., pag. 109, tom. II Ge- Pammach., et 41 ad Pammach. et Oceanum ; Theo-
uebr. pbil., lib. I Paschali, tom. IV op. Hierou., pag. 696
Judœi utpote peculiarem, secundum Mosis legem,
* nov. edit.
doctrinam et diversam agentium instifuto, vitce ratio- >o Les Mémoires de Trévoux se sont fortem''nt
nem luentes, illudque dogma observantes : Usque ad élevés à ce sujet contre D. Geillier. Ils lui repro-
mortem certa pro veritate, et Deus pugnabit pro te, chent sa partialité pour Origène et son manque de
ne legem Dei vialarent , victricibus sui gentibus 'ad- respect pour les décisions de l'Eglise. Nous croyons
versabantur ; et sœpje in prœsentissimum vitœ discri- ce jugement trop sévère. (Voyez Mémoires, avril
men adducti sunt cum Romanis, qui propter Judœorum 1733.) {L'éditeur.)
peccata superiores ipsis evaserant , Cœsaris siatuam Le point le plus
11 difficile à. expliquer favorable-
templo Dei inferre volentibus, palam obsisterunt. ment dans Origène est sa doctrine toute platoni-
Origen., in Matth., pag. 481, tom. I Huet, cienne de la purification progressive des âmes, qui,
*Incantatarum JEggpliorum potentia non erat si- prise dans sa rigueur, ne pourrait se concilier avec
milis mirificce Motis gratiœ, sed hanc diviriitus accep- ie dogme de l'éteruité des peines. Et pourtant Cri-
,
rien enseigné qui ne soit conforme à rensei- par des hommes, que ses paroles et ses livres
gnement de l'Eglise. Nous en avons donné mêmes. » —
2» Il est constant que, du vivant
des preuves dans les extraits que nous avons même d'Origène, on corrompit ses écrits, et
rapportés plus haut, et on peut encore s'en on lui en supposa qui étaient pleins d'er-
convaincre aisément en jetant les yeux sur reurs. C'est de lui-même que nous l'appre-
ce qui nous reste de l'Apologie que saint nons, nous avons encore la lettre dans
et
Pamphile a pour Origène, et dans la-
faite laquelle se plaint de ces fourljeries insi-
il
quelle ce saint martyr justifie la foi de ce gnes. Elle est adressée à ses amis d'Alexan-
Père par propres paroles de ses écrits
les : drie en ces termes - « Quelques-uns de ceux :
gène repousse comme un blasphème d'avoir jamais cere esse salvandum : quod ne aliquis quidem mente
dit que Satan serait sauvé. La plupart des autres ar- motus et manifeste insaniens dicere potest. Sed nihil
ticles soutenus ou énoncés par Origène n'étaient mirum mihi videtur si adulteretur doctrina mea ab
point alors définis ou ne le sont point encore. D'ail- inimicis meis , et tali adulterio corrumpatur, quali
leurs il osa le premier, dit M. Blanc, construire un adulterio corrupita est Epistola Pauli apostoli ad
corps de théologie et de philosophie chrétiennes ;
Thessalonicenses ;
quidam enim sub nomine Pauli fal-
ce fut le premier essai de la raison opérant sur sam epistolam scripserunt, ut conturbarent Thessuloni-
les dogmes catholiques, et nous avons vu en quels cences, quasi instaret dies Domini, et seducerent eos.
écarts elle s'était jetée. Après un tel début, que no Propter hanc epistolam in secunda Epistola quam et
devait-on pas redouter de la raison? Le rationa- ad Thessalonicenses scripsit, hœc dicit : Rogamus vos,
lisme naissant causa un secret effroi, et l'Eglise fratres, per adventum Domini, ut non moveamini
elle-même n'hésita pas à le condamner, sous le nom cito a sensu vestro, neque terreamini ueque per Spi-
d'origénisme , à la suite des troubles qu'il excita ritum, neque per Verbum, neque per epistolam tan-
dans les siècles suivants. Voici les auteurs les plus quam per nos missam quasi instet dies Domini. ,
remarquables pour et contre Origène. Pour lui, Talia ergo quœdam video etiam nobis accidere. Nam
l" parmi les anciens Eusèbe, liv. VI; les saints Gré-
: quidam auctor hœreseos, cum sub prœsentia multorum
goire Thaumaturge , de Nysse et de Nazianze saint ;
habita inter nos fuisset disputatio, et descriptum acci-
Basile, saint Athanase, Didyme l'aveugle, saint Chry- piens ab his qui descripserant codicem, quœ voluit ad-
sostome, Jean de Jérusalem et Rufin; '2," parmi les didit , et quœ voluit abstulit, et quod ei visum est
modernes le P. Halloix, Origenis defensus; Huet,
: permutavit circumferens tanquam ex nomine nostro,
:
sur plusieurs points dans Y Origeniana ; Tillemout, insultans et ostendens ea quœ ipse conscripsit. Pro
tom. III; D. Lumper, tom. IX et X; D. Gervaise, Vie quibus indignantes fratres, qui in Palœstina sunt, mi-
de Rufin; le Père Prat, Ilint. de l'éclectisme alexan- seruni ad me Alhenas hominem , qui acciperet a me
drin; les Bénédictins, éditeurs d'Origène; M. Blanc, ipsum aulhenticum exemplar, quod ne relectum quidem
ainsi que Rohrbacher, Histoire de l'Eglise; Bergier, vel recens itum a me antea fuerat : sed ita neglectum
Dict. de ThéoL, art. Origène. Henrion, Cours complet jacebat, ut vix inveniri potuerit. Misi tamen et sub
d'histoire ecclésiastique , tom. XII. Contre Origène teste Deo loquor, quoniam cum convenissem illum
1" parmi les anciens saint Méthodius do Tyr, Théo-
: ipsum qui adulteraverat librum quare hoc fecisset ?
phile d'Alexandrie saint Jérôme , saint Epiphaue
,
Velut satisfaciens mihi rcspondit : Quotiiam mugis
saint Augustin , saint Jean do Damas, et le 5e Con- ornare volui disputationem ipsam, atque purgare. Vi-
cile général 2» parmi les modernes
; les PP. Dou- : dete quali purgatione disputationem nostram purga-
cin, Hist. de l'Origénisme; Pétau, Thomassin, Dog- vit? Tali nempe quali purgatione Marcion purgavit
mata; Pagi, D. Martianay, Vie de saint Jérôme; le Evangclia vel Apostolum, vel quasi successor ejus post
P. Noël Alexandre, 3o sœcul., dist. 15, 16 et 17. ipsum Ajtelles. Nam sicut illi subverterunt Scriptura-
Annales de philosophie , passim. En général les pro- , rum veritatem ; sic et iste sublatis quœ vere dicta sunt,
testants, surtout Saumaise, Leclerc Brukère. Les , oh nostri criminationem insérait quœ falsa sunt
Centuriateurs sont favorables à Origène. Nous ne Denique in Epheso cum me vidisset quidam hœreticus,
pouvons nier non plus que deux papes, Anastase et et congredi noluisset, neque omnino os suum aperuis-
Vigile, ont condamné Origène. Mais les auteurs qui set apud me; sed nescio quo, ex causa id facere vilas-
justifient ce Père disent qu'on a voulu condamner set : postea ex nomine meo et suo conscripsit qualem
seulement la doctrine répandue à tort ou à raison voluit disputationem, et misit ad. discipulos suos ut ,
sous son nom. {L'éditeur.) ego quidem cognovi, ad eos qui Romœ erant : sed non
1 Quid apud homines judices pro defuncto homine dubito quin et ad alias, qui per diversa sunt. Insulta-
fortius et ftrmius valere débet, quam et litterœ et bat autem et apud Antiochiam, priusquam ego illuc
scripta defuncti? Pampliilus, in Apologia, pag. 223, venirem : ita et ut ad quam plurimos nostrorum per-
tom. V op. Hieronymi, nov. edit. veniret ipsa disputatio quam paraverat. Sed ubi affui,
2Quidam eorum qui libenter habent criminari proxi- multis eum prœsentihus argui. Cumque j'am sine ullo
mos suos, adscribunt nobis et doctrinœ nostrœ crimen pudore pertenderet imprudenter asserere falsitalem,
blasphemiœ, quod a nobis nunquam audierunt, de quo poposci ut liber deferretur in médium, ut scelus meum
ipsi viderint : nolentes observare mayidatum illud agnosceretur a fratribus, qui utique cognoscerent quœ
quod dicit : Quia maledici regnum Dei non posside- soleo disputare, vel quali soleo uti doctrina. Quique
bunt dicentes patrem mulitiœ uc perditionis et eorum
: cum uusus non esset proferre librum, convictus ab om-
qui de regno Dei ejiciuntur, id est , diabolum me di- nibus et confutatus est faisitatis : et ita persuasum est
252 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
et d'enseigner que le diable sera sauvé; ce style et ma doctrine : il n'osa montrer le li-
que tout homme, ne fût-il pas sage ni sain vre. Ainsi tout le monde fut convaincu de
d'esprit, ne dira jamais. Mais je ne dois [>as cette insigne fausseté, et nos frères furent
être surpris que mes ennemis corrom[)ent persuadés qu'ils ne devaient point ajouter
ainsi mes écrits, puisqu'on n'a pas épargné foi à toutes ces calonmies. » Aiiisi parlait Ori-
l'Epître de saint Paul aux Tliessaloniciens. » gène, sans se mettre en peine de détailler les
Origène ajoute : « Un certain hérésiarque, erreurs qu'on lui imputait. La seule dont il
après que nous eiàmes disputé on présence fait mention est celle du
démons. salut des
de plusieurs personnes, prit la relation de la Mais, quoiqu'il l'ait désavouée en des termes
main de ceux qui l'avaient écrite, y ajouta, si formels, on n a pas laissé, dans la suite, de
raître sous mon nom ce qu'il avait écrit lui- aucun endroit de l'histoire de l'Eglise, que
même, et m'iusultant. Nos frères de Pales- l'on ait fait aucun reproche à Origène sur sa
tine eu furent indignés, et m'envoyèrent un doctrine pendant sa vie. La jalousie fut la
homme à Athènes pour avoir l'original. Je source de toutes les poursuites que Démètre
ne l'avais ni lu, ni revu, et je l'avais telle- fit contre lui; et, s'il fut condamné par un
ment négligé, que j'eus peine à le trouver. grand nombre d'évêques, ce ne fut pas, dit
Je l'envoyai, toutefois, et je prends Dieu à saint * Jérôme, qu'il eût enseigné de nou-
témoin qu'ayant été trouver celui qui avait veaux dogmes, ou qu'il eût des sentiments
falsifié cet écrit, comme je lui demandais hérétiques , mais parce que l'on ne pouvait
pourquoi il l'avait fait, il me répondit, comme supporter l'éclat de son éloquence et de sa
pour me satisfaire, qu'il avait voulu orner et science , et, que il semblait
lorsqu'il parlait,
corriger notre dispute. Voyez quelle correc- que tous les autres étaient muets. Si les évê-
tion ! C'est ainsi que Marcion ou Apelles, son ques de Palestine l'avaient soupçonné d'errer
successeur, ont corrigé les Evangiles et saint dans la foi, l'auraieut-ils fait venir en Arabie,
Paul. » Et ensuite : « A Ephèse, un certain pour y travailler à retirer Bérylle de Ros-
hérétique m'ayant vu et n'ayant voulu, je tres de l'erreur où il était au sujet de l'in-
ne sais pourquoi, ni conférer avec moi, ni carnation du Verbe; et cet évêque aurait-il
même ouvrir la bouche en ma présence, écri- voulu entrer en conférence avec un homme
vit ensuite une conférence telle qu'il lui plut, suspect ou convaincu d'erreur? Car les livres
sous son nom et sous le mien, et l'envoya à d'Origène étaient dès-lors répandus partout,
ses disciples à Rome, comme je l'ai appris; et et il y avait plus de dix ans qu'il avait rendu
je ne doute pas qu'il ne l'ait envoyée aussi publics ses quatre livres des Principes. Il fal-
à ceux des autres Ueux. Il m'insultait même lait donc que ces évêques fussent persuadés
à Antioche avant que j 'y vinsse , en faisant
,
que les erreurs que l'on y trouvait, si, toute-
courir sa prétendue conférence ; mais quand fois, ces livres étaient déjà corrompus, n'é-
j'y fus^ je le convainquis, en présence de taient point d'Origène, et qu'ils n'eussent au
plusieurs témoins; et comme il persistait cun doute sur la catholicité de sa doctrine. Il
dans son impudence, je demandai que l'on est vrai qu'Eusèbe ' et saint Jérôme font men-
représentât l'écrit, afin que mon crime fût tion de quelques lettres qu'Origène écrivit,
connu par les frères qui connaissaient mon tant au pape Fabien qu'à d'autres évêques,
fratribus, ne aurem criminationibus prœberent. Orig., doleamne an rideam nescio. Doctor egregius Origenes
in Apologia Parnphili ,
pag. 251, tom. V op. Hiero- audet docere diabolum id rursum futurum esse quod
nymi, nov. edit. fuerat, et ad eamdem rediturum dignitatem et conscen-
1 Talis pastor gregis morbidi (Ongenes) Christum surum régna cœlorum. Epipbanus, Epist. ad Joan-
ubique sugil/at injuriis et diabolum honore sustollit, nem, Episcopum Hierosolymitauum tom. II, pag. 314 ,
dum illum adserit purgatum vitits atque peccatis pris- edit. Petavii.
tinam aliquando gloriam recepturum, et hune regnare Damnatur a Demetrio episcopo, exceptis Palœstinœ
2
pag. 708 et 70». lllud quoquc quod asserere nititur, Epist. 41 ad Pammach. et Oceanum.
,,
pour faire voir la pureté de sa foi. Saint Jé- lecteur. 11 expose d'abord la foi de l'Eglise
rôme *
ajoute même que, dans la lettre à catholique et ce qu'elle enseigne universelle-
saint Fabien, Origène rejetait sur Ambroise ment. Il traite le reste comme des questions
la faute de diverses cboses qu'il était fâché problématiques, propose ses pensées avec
il
d'avoir mises dans ses livres. Mais, outre qu'il une grande modestie, en voulant qu'on les
est injuste d'imputer à un auteur des erreurs distingue de la foi commune de l'Eglise, en
qu'il a désavouées, c'est aux ennemis d'Ori- montrant partout un esprit * très-humble,
gène à marquer quelles étaient ces diverses Irès-soumis à l'Eglise, très-respectueux pour
choses qu'il était fàclié d'avoir mises dans ses sa doctrine et ses décisions, très-attaché à
livres. Les huit livres qu'il écrivit contre son unité et très-modéré envers ses propres
Celse, sous le pontificat de saint Fabien, persécuteurs. — 5°Origène est mort dans la
servent encore aujourd'hui de témoignage communion catholique, et, pour ainsi dire,
qu'Origène n'avait alors que des sentiments au milieu des tourments qu'il venait d'endu-
orthodoxes sur les principaux articles de la rer pour la foi de Jésus-Christ, dans la persé-
foi qui y sont traités. Aussi c'est à ces livres cution de Dèce. Si l'erreur de saint Cyprien
qu'Eusèbe renvoie tous ceux qui, aimant la touchant le baptême des hérétiques, n'a pas
vérité, voudront connaître ce que c'est que nui à sa sainteté, parce qu'il conserva ' tou-
le christianisme et la fausseté de tout ce jours de son côté l'unité de l'Eglise et la
qu'on a dit pour le décrier et le noircir. — charité, et qu'il soutenait de bonne foi une
4° Sans doute, dans ces livres comme dans mauvaise cause et sur laquelle il n'y avait
beaucoup d'autres d'Origène, il se rencon- pas encore de décision reçue par un consen-
tre quelques endroits difficiles et auxquels il tement unanime de toute l'Eglise, pourquoi
n'est pas aisé de donner un sens bien pur et manquerait-on d'indulgence envers Origène
bien orthodoxe. Mais faut-il, pour cela, aban- ( si toutefois les erreurs qu'on lui impute
donner cet illustre docteur et le traiter d'hé- sont de lui ), puisqu'il a conservé, jusqu'au
rétique? Ne vaut-il pas mieux, suivant la dernier soupir, l'unité de l'Eglise et la cha-
pensée de saint Athanase, regarder comme ^ rité?
étranger à Origène tout ce qu'il traite d'une Ceux qui l'ont combattu avec le plus de
manière problématique, par conjecture, et force se sont crus obligés de reconnaître que,
ne lui attribuer que les choses qu'il avance s'il était tombé dans quelques erreurs, il était
affirmativement? Car telle a été la méthode inimitable dans ses vertus. Ils ont parlé de
d'Origène dans ses écrits, et surtout dans les lui, tantôt comme du plus grand ® maître
livres des Principes. S'il y avance des er- qu'ait eu l'Eglise depuis les apôtres, tantôt
reurs, ce n'est que * comme des opinions, en comme d'un homme ' grand dès son enfance
doutant et en les soumettant au jugement du et le vrai fils d'un martyr, en qui l'on voyait
^ Ipse Origenes in epistota quam scribit ad Pabia- simi pecioris cooperuit ubere charitatis ; dum unitam
num, Romance urbis episcopum, pœnitentiam agit cur Ecclesiœ toto orbe crescentis , et copiosissime défen-
talia scripserit ; et causas temeritatis in Amhrosium dit, et perseverantissime tenuit vinculum pacis Ac-
refert, quod secreto édita in publicum protulerit. cessit hue etiam quod tanquam sai^mentum fructuosis-
Hieron., ibid. simum, si quid in eo fuerat emendandum, purgavit
* Quod autem Verbum ab ceternitate sit cum Pâtre, Pater falce passionis. Aug., Epist. 93 ad Vincent.
nec alterius quam Patris substantiœ vel hypostasis Rogatistam, num. 40, pag. 247 nov. edit.
proprius sit, ut declaravit Synodus, liceat vos iterum 6 Ac ne forte consummato œdificio quasi extrema
a laborioso Origène audire. Nam quœ ille velut inqui- deessetmanus,Novi Testamenti verba et nominainter-
rens et disputans scripsit, non ita accipienda sunf, pretatus sum, imitari volens ex parte Origenem, quem
quasi sic ipse sentiret, sed ex eorum mente quibuscum post Apostolos, Ecclesiarum magistrum, nemo nisi
disputât : at quœ fidenter définit et afp.rmat; hœc vera imperitus negabit. Hieron., Praef. in lib. de Nominib.
est viri hujus per quam studiosi sententia. Itaque post hebr., tom. II, pag. 3 nov. edit. Vellem cum invidia
ea quœ exerciiationis gratia ad hœreticos dixit, sta- nominis ejus, habere etiam scientiam Scripturarum.
tim propriam ipse mentem his verbis exponit, etc. Idem, Proœmio traditionum Hebr. in Gen., pag. 507,
Alhan., Epist. de décret. Nicen. Synod., tom. I, tom. II nov. edit.
pag. 232 nov. edit. T Magnum vir ab infantia, et vere martyris filius,
^ Fleury, tom. II Hist. ecclés., pag. 107. Alexandriœ ecclesiasticam scholam tenuit, succedens
* Tillemont, tom. III Mémoires ecclésiastiques eruditissimo viro Clementi presbytère. Voluptates in
pag. 49S. tantum fugit, ut zelo Dei, sed tamen non secundum
» Porro autem Cyprianus, aut non sensit omnino scientiam, ferro truncaret genitalia. Calcavit avari~
quod eum sensisse recitatis; aut hoc postea correxit in tiam, Scripturas memoriter tenuit, et in studio expla-
régula veritatis ; aut hune qwisi nœvam sui candidis- nationis earum, diebut desudavit ac noctibua. Mille et
2S4 HISTOIRE GÉNh'RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
autant d'horreur pour les plaisirs que d'rloi- saint Amhroise, ceux qu'il a
sur l'ou-
faits
p^uemont ]iour les richesses, et un amour si vrage des six jours et sur saint Luc. De tous
ardent pour les divines Ecritures, qu'il em- les ouvrages d'Urigène qui sont venus jusqu'à
ployait les jours et les nuits à les expli(pier, nous, ses huit livres contre Celse sont le plus
avec un travail extrême. Ils ont loué en ' considérable. C'est celui où il fait paraître
lui des mœurs irréprochables, un génie su- plus de savoir et d'érudition, et où il prouve
périeur, un esprit profond, vaste, solide, pé- avec plus de force et plus de solidité les vé-
nétrant, une éloquence non commune. Ori- rités essentiellesde la religion chrétienne. Le
gène joignait à tant de rares qualités une style en est beau, vif et pressant, les raison-
érudition universelle. Il était habile dans la nements bien suivis et convaincants ; et, s'il y
science des divines Ecritures, et il excellait répète plusieurs fois les mômes choses, c'est
dans la philosophie humaine. Comme il sa- que les objections de Celse l'y obligeaient et
vait par cœur n'avance pres-
les Ecritures, il qu'il n'en voulait laisser aucunes sans les
que jamais rien qu'il ne l'autorise de quel- avoir entièrement détruites à chaque fois
ques preuves tirées des Livres saints ; et, qu'on les lui proposait.
lorsqu'il entreprend d'en développer quelques 2. Daniel Huet *, évoque d'Avranches, a cntaiognc
endroits obscurs et embarrassés, il est rare recueilli en deux volumes presque tout ce qui d-origène.
qu'il n'en vienne à bout. 11 savait le grec nous reste, en grec, des ouvrages d'Origène
exactement ; mais on remarque qu'il n'avait sur l'Ecriture sainte. [Je dis presque tout : en
qu'une connaissance médiocre de la langue effet, on trouve dans les bibliothèques des
hébraïque. Son style est doux, net, poli et fragments, en grec, que Huet n'a pas recueil-
persuasif, surtout dans ses ouvrages de con- lis. Ainsi il a omis une préface d'Origène sur
troverse; car, pour ses commentaires, comme saint Marc, qu'on trouve dans un manuscrit
il en avait dicté la plus grande partie, le de la Bililiothèque royale, qui contient le texte
style en est moins châtié et moins suivi ; il y des Évangiles en grec] On imprima ce re-
a encore moins de suite dans ses homélies, Rouen, en 1C68, 2 vol. in-foL; à Paris,
cueil à
qu'il prononçait sur le champ et sans aucune en 1670; à Cologne, ou plutôt à Francfort,
préparation. Saint Basile et saint Grégoire en 1685. A la tète de ces éditious, Huet a mis
de Nazianze avaient tant d'estime pour ses plusieurs dissertations sur la vie, sur la doc-
écrits, qu'ils en tirent le fondement de leurs trine et les écrits d'Origène, qui sont d'un
études sur l'Ecriture sainte, et qu'ils en re- grand secours pour l'intelligence de plusieurs
cueillirent un grand nombre d'extraits, que points difficiles à développer dans l'histoire
nous avons encore sous le nom de Philocalie. de la vie et dans les ouvrages de ce Père.
C'est aussi de ses veilles que saint Hilaire a L'homélie sm' la Pythonisse avait déjà été
enrichi ses commentaires sur les Psaumes, et imprimée en grec à Lyon, en \ 629, in-4" ; à
eo amplius tractatus qms in Eccîesia locutus est, cdi- pauca forent divina, pêne fartasse nulla, kumance
dit. Innumerabites prœteren commentarios quos ipse philosophiœ quœ non penitus adsequeretur : cujus
nppellat tonios, et quos nunc prœtereo, ne videar ope- scientiœ cum grœca concédèrent, hehrœa quoque elabo-
rum indicem texere. Quis nostrum tanta potesf
ejit<! rata sunt. Eloquentiam vero quid memorem ? Cujus
légère, quanta ille conscripsit? Quis ardentem in fuit tam amœna, tam lactea, tam dulcis oratio, ut
Scripturis animum non miretur ? Quod si quis Judas niihi ex ore ipsius non tam vcrha, quam mella quœ-
Zclotes opposuerit nobis errores ejw,; audiat libère; dam fluxisse videantur. Quœ non ille persuasu di/fici-
interdum maynus dormitat Homerus. Verum operi lia disputandi viribus elimpidavit? Quœ factu ardua,
lonrjo fas est ohrepere somnum. Non imitemur ejus non ut facillima, viderentur, effecit ? Sed forsitan ar-
vitia, cujus possumus sequi, Hieronym.,
virtutes non gumentorum tantummodo nexibus assertiones suas
Epist. 41 ad Pamtnachium et Oceanum. texuit. Imo plane nemo unqtiam magistrorum fuit,
' Nam si vita facit auctoritatem, magna illi indus- qui pluribus divinœ legis uteretur exempt is. Sed,
tria, magna pudtcitia, patientia, tolerantia. Si genus credo, pauca conscripsit. Nemo mortalium plura; ut
vel eruditio; quid eo nobilius, qui primum in ca mihi sua omnia non solum non perlegi, sed ne invc-
domo natusquœ est illustrata martyrio? Deinde
est, niri quidem passe videantur. Vincent. Lirin., Com-
pro Christo, non solum paire, sed omni quoque facul- manit., pag. 350 et 351 cdit. Baluz.
tate privatus, iantum inler sanctce paupertatis profecit * Le clergé de France fixa son attention sur la
angustias, ut pro nomine dominicœ confessionis , sœ- réimpression des œuvres d'Origène en grec, et dans
pius ut ferunt , affligeretur , neque vero hœc in illo
, l'assemblée de 1536, Aubert, docteur en Sorbonne,
sala erant, quœ cuncta postea tentât ioni forent; sed fut cliargé de publier une édition complète des
tanta etiam vis ingenii tam profundi, iam acris, tam œuvres d'Origène en grec et en latin, mais il ne
elegantis, ut omnes pêne multum longeque superaret: l'exécuta pas c'est alors que Daniel Huet se mit à
;
in-fol., mais sans le texte grec. Oberthur a niel, sur saint Luc, se trouvent dans les col-
reproduit l'édition parisienne, texte grec et lections du cardinal Mai. Le premier volume
latin, mais sans la préface et sans les notes; du Spicilége de Solesme contient aussi quel-
VV'urtzbourg 1780 et années suivantes, 15
, ques fragments d'Origène. En 1836 on a pu-
volumes in-8°. L'édition donnée à Berlin par blié à Leipsik, en grec et en latin, le livre des
Lommatzch, 1831-48, 25 volumes in-8", est Principes, in-8°. Une traduction française du
très-belle. JSl. Migne a réimprimé l'édition de due à M. Denain, se trouve
traité contre Celse,
Paris, texte grec avec la version latine, et dans les Pères traduits en français par M. de
version latine seulement. L'édition grecque Genoude, tome VIII. Les Chefs-d'Œuvre des
latine comprend sept volumes, de XI àXVlII, Pères contiennent une traduction française
de Les Hexaples se trouvent
la Patrologie. du traité de la Prière , du traité de l'Exhor-
au tome XV et XVI; M. le chevaUcr Drach tation au martyrs, par Labesse. L'abbé de
les a corrigées, annotées, et en a surveillé Courcy a donné une traduction du traité
l'impression. Le tome XVII renferme le sup- conti^e Celse dans ses Apologistes ; celle de
plément aux œuvres exéyétiques, les ouvrages Bouhéreau a été réimprimée par M. Migne
supposés, les écrits qui regardent Origéne, dans le premier volume des Démonstrations
savoir : l'Apologie de saint Pamphile pour évangéliques. Les Pères de l'Eglise, par M.
Origène ; le livre de Rufin sur l'altération des Guillon, tom. II, contiennent la traduction
livres d'Origène, les Origeniana de Huet, un de plusieurs passages d'Origène. L'Alle- —
extrait de la Défense de la foi de Nicée, par magne possède la traduction du ti^aité contre
Ballus , prêtre anglican. Les Pères choisis de Celse, par Mosheim,
Hambourg, 1745; celle
M. Cailleau contiennent la plupart des œu- du livre des Principes, Stutgard, 1835, in-8''.]
[III« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 287
CHAPITRE XIV.
Saint Cyprien, docteur de l'Eglise, évêque de Carthage et martyr.
' Thascium Cyprianum gladio animadverti placet. tamus. Augustin., Serm. 311, cap. 7. Le saint martyr
Ruinart., Act. stuc. Mart., pag. 217 edit. Amstelod.,
témoigne lui-même qu'il avait passé une partie de
ann. 1713. —
2 Cyprianus A fer, HieroQym., ia Cata-
sa vie dans les charges et les emplois les plus con-
loyo, cap. 67.
sidérables; Fascib'js obiectatus et honoribus. Gyprian.,
3 Prudence dit que saint Cyprien dans le
souffrit ad Donat., pag. 2 edit. Ox.on., auu. 1700.
lieu de sa naissance est prof/r-tus patries martyr, sed
:
' Gregor. Naziauz., ubi sup.
amore et ore noster. Prudent., de Coronis, hynino 13, * Stipatus clientium cuneis, frequentiore comitatu
pag. 157 edit. Basil., an. 1507. Or, il est constant, officiosi agminis honestatus. Gyprian., ad Douât.,
par les Actes de son martyre, qu'il fut interrogé et pag. 2. —
7 Gregor. Nazianz., ubi sup.
jugé à Garthage, et ensuite exécuté hors de la ville, * In tantam gloriam venit eloquentiœ, ut
oratoriam
en un lieu nommé Sexti : Carthaytne in secretario
Palernus procousul Cypriano dixit
quoque doceret Cartliagini. Hieronym., in cep. m
et ita dernum Jonœ, pag. 1489, tom. lil novae edit.
in agrum Sexti productus est. Ruinart., Act. smcer., 9 Cyprianus Afer primum gloriose rhetoricam
do-
pag. 216. cuit. Hieronym., in Catulogo, cap. 67.
* Cyprianus magnum quondam Carthaginensium, 10
Cela se voit surtout dans ses livres des Témoi-
nunc autem totius orbis nomen, opibus conspicuus, po- gnages contre les Juifs, où il suit souvent à la lettre
tentia illustris, génère clarus, stquidem maximum le grec des Septante, et où il cite les livres de l'E-
nobilitatis argumentum
est senatorem esse, prirna- criture, non à la manière des auteurs latins, mais
riamque m sedem obtinere, fos juventutis,
eo ordine comme les auteurs grecs. Par exemple, au lieu de
eiaboratum naturœ opus, doctrinœ principatus tam dire : in libro tertio Regum, il dit m BafftXetov libro
:
philosoplucœ, quam cujusvis alius generis disciplinée, tertio. Item, in Evangelw xarà Joannem, xarà Mat-
idque quacumque eum partecensere volueris, adeo ut tftœum.
in eo et variarum artium cognitio mirabilior esset, 11 C'est,
dit-on, qu'il n'était pas naturel en ce
quam singularum exacta et perfecla scientia. Gregor. temps-là, surtout parmi les païens et les personnes
Nazian., Oratione 18, tom. I, pag. 276 edit. Paris., de qualité, d'attendre à un âge avancé, à prendre
au. 1609. Quoique saint Grégoire de Nazianze ait parti et à se marier. Vie de saint Cyprien, à Paris,
confondu dans un même discours saint Cyprien de 1717, pag. 14.
Garthage avec un autre du même nom, martyrisé en ** Sermode hoc fuerat usitafus ut, si quemprœdi-
illi
Orieut, nous avons cru pouvoir tirer de lui certaines
catum Dei laudatione legisset, suaderet inquiri propier
circonstances qui ne peuvent convenir qu'à celui de quœ facta Deo placuisset ; si Job Dei testimonio glo'
Garthage. Il semble que saint Augustin donne aussi riosus, dictus est Dei verus cultor, et cui m terris
à saint Cyprien la qualité de sénateur Mutati sunt : nemo comparatur, faciendum docebat ille quidquid
piscatores; mutati surtt etiam plurimi senatorés; mu- Job ante fecisset: ut dum et nos paria facimus, simile
tutus est et Cyprianus, cujus hodie mtmoriam frequen- in nos Dei testimonium provocemus, Contemptis ille
17
85« HISTniRE fiÉNÉRAI.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
prien sur la vie de Job serond doit s'en-
; le 2. Dieu, pour le convertir, se servit du mi- Conr*rjl6n
de saint Ty-
tendre du prêtre Cécilien, qui avait été marié nistère du prêtre Cécile, qui était un homme pnenChan-
f;rmeiit qn»
juste et vénéraitle par son âge aussi bien que e baptême
et qui, en mourant, recommanda sa femme r.iit en lui,
zianze, Prudence et quelques autres, ont cru Jérôme, et qui le fit descendre du troue de
qu'avant sa conversion il s'était adonné à la sou orgueil pour emlirasser l'humilité et la
magie, et qu'il s'était servi de cet art pour simplicité du christianisme. Saint Cyprien,
satisfaire Cep<mdant
ses passions déréglées. plein de reconnaissance pour la grâce de sa
aujourd'hui * que ces auteurs ont confondu l'instrument, le considéra toujours depuis
saint Cyprien de Cartilage avec saint Cyprieu
* comme son meilleur ami * etle respecta comme
martyr en Orient, qui avait été magicien et son père. Ce fut à ^ Carthage qu'il reçut le
qui ne se convertit (pi'aprtVs avoir reconnu baptême, et, comme '° l'on croit, vers l'an 240
l'impuissance des démons et l'hmtilité de ses de Jésus-Christ, qui était la troisième de l'em-
enchantements contre la vertu des vierges pire de Philippe. Il faut l'entendre raconter
chrétiennes ». Mais, quoique saint Cyprien fût lui-même les merveilleux effets que ce sacre-
exempt de ce crime, il n'était pas néanmoins ment produisit dans son àme. « Lorsque je
languissais, dit-il à Douât •', dans les ténèbres
innocent, et il nous « apprend lui-même que,
languissant depuis longtemps dans les ténè-
d'une nuit profonde, et que, lloltant sur la
bres d'une nuit entière, le péché avait jeté mer orageuse du siècle, j "étais incertain de ce
que je devais faire, n'ayant point la lumière
dans son cœur de profondes racines, qu'il se
trouvait engagé dans une infinité de mauvai-
de la vérité pour me conduire, j'avais dans
priuni, pag.
de sceculo excedens, arcessitione jani proxima, com-
3.
9 Cela paraît par une de ses lettres au clergé de
mendaret illi conjugem ac liberos suas, et quem fece-
rat de seciœ communione participem postmodum face-
Carthage, où il parle en ces termes: Quando ergo
vos scripseritis rébus compositis me venire debere, aut
ret pietatis hœredem. Poutius, ibid., pag. 3.
» Gregor. Nazianz., Orat. 18; Prudent., de Coronis, si ante dignatus fuerit Dominus osfendere, tune ad
hymmo 13. vos veniam ; ubi enim mihi aut melius possit esse, aut
»TLUemont, tom. IV, pag. 47 et 601; Ruinart, ^c<. lœtius, quam illic ubi me Deus et credere voluit et
Annal. Eccles., crescere? Cyprian., Epist. 7, pag. 178.
JUart., pag. 198; Basnage, tom. II
345. Le premier de ces écrivains remarque ju- Annal. Cyprian., pag. 7. L'auteur de ces An-
^'^
pag.
dicieusement qu'il n'est pas ordinaire que ceux qui nales ajoute que saint Cyprien reçut le baptême
ont de grands avantages du côlé de la naissance, dans le cours des cinquante jours que l'on compte
des biens et de l'érudilion, fassent profession publi- depuis Pâques jusqu'à la Pentecôte, parce que c'é-
que de la magie la pauvreté, le désir d'un gain
;
tait la coutume de lE'glise d'Afrique d'administrer
sordide, étant ordinairr-ment les motifs qui enga- le baptême à cbaque jour de cette cinquantaine,
gent dans un métier si infâme. selon la remarque de TertuUien Diem baptismo so- :
* Il soutîrit le martyre à Nicomédie, dans la persé- iemmorem Pœicha prcestat, cum et passio Dornini, in
cuUon de Dioctétien. quam tingimur, adimpleta est. Exinde Penfecoste ordi-
» Voyez D. Maran, Vie de saint Cyprien, daiis l'é- nundis lavacris lalissimum spaiium est quo et Dommi
dition des œuvres du Saint. {L'éditeur.) resurreciio inter discipulos frequentata est. Tertull.,
• Cyprian., Epist. ad Donat., pag. i et 3. iib. de Baptismo, cap. 19.
1 Proponamu* nohit beatum Cyprianum audittt fi Cyprian., ad Donat., pag. >.
[m* siicLB.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 259
sauver. Je ne pouvais concevoir qu'on put difficile me sembla facile, et je reconnus que
naitre encore une
en sorte qu'en lec-e-
lois, ce que j'avais cru jusqu'alors être iuipnssible,
vant une nouvelle vie dans h'S eaux sacrées ne aucunement. Il me fut alors aisé de
l'était
du ba])léme, on se dépouillât de ce qu'on comprendre que mou ancienne vie, toute char-
était auparavant, et qu'un homme chajjgeàt
nelle et toute sujette aux vices, venait de la
entièrement d'esprit et d'iuclinations, son terre; et que celle dont le Saint-Esprit
corps demeurant toujours le
com-
même. Comment, mençait à me faire vivre, tirait son
origine
disais-je, un si grand changcmeni est-il pos- de Dieu même. Vous savez vous-même,
sible? Gomment
mon
pouirait-on se défaire tout cher ami, et vous voyez comme moi,
d'un coup de tant de choses qui ont jeté en
ce que
(ce sacrement), qui fait mourir les crimes et
pous de Irès-proloudes racines, soit que la donne la vie aux vertus, a ôté en nous, et ce
uature les y ait plautées et fortiliées eu les qu'il y a mis. Vous le savez,
y et je n'ai que
faisant croître avec le temps; soit qu'une lon- faire de le publier, parce qu'il
est toujours
gue habitude leur y ait fait acquérir la même odieux de se louer, quoiqu'on puisse dire que
dureté et la même force? Voilà ce que je re- ce n'est pas une vauité, mais une
reconnais-
passais souvent eu moi-même. Car comme je sance, lorsqu'au lieu d'attribuer rien à la
me trouvais engagé dans une inhuité de mau- force et à la vertu de l'homme, on
donne à
vaises habitudes dont je croyais ne pouvoir Dieu la gloire de tous les biens;
lorsqu'on
sortir, j'aimais mieux céder à des vices que impute à la grâce de la foi de ce
qu'on ne
j'aimais, que d'eiitrepreudie de les vaincre; pèche plus, comme à l'erreur humaine,
de
et, désespérant de devenir meilleur que je ce qu'on a pèche autrefois. »
n'étais, je m'accoutumais avec mes maux qui
3. Autant laconversion de saint Cyprien
m étaient déjà comme passés en nature. Mais fut agréable aux iidèies, autant elle déplut •
îl embras-
se la conti-
nenrc don-
lorsque,, les souillures de ma vie pa&sée éiant
;
vres. Il n'eut plus • que du mépris pour les et de ses enfants. Ce qui prouve que saint
richesses ; il quitta tout le faste et toutes les Cyprien était encore laïque, puisque la disci-
vanités du siècle; il assujettit son corps à de pline de l'Eglise d'Afrique ne * souffrait pas
• de leurs fonc-
rudes mortifications. « Ainsi, dit le diacre qu'on retirât les ecclésiastitjues
Ponce, il commença à être parfait chrétien, tions sacréespour les engager à des tutelles.
presque avant de savoir ce qu'il faut faire 4. bonne odeur que sa vertu ré-
Mais la 1\ lit fail
prêtre, et
ensuite évê'
pour être chrétien, et il fit ainsi voir que les pandait déjà dans l'EgUsc de Carlhage le fit un •lie Car-
tilage, en
progrès dans la vertu n'attendent pas toujours bientôt élever à la prêtrise, et ensuite à Té- lait Ï48.
lé cours des années. » Il s'appliqua aussi à la piscopat, par le jugement de ^ Dieu et par les
lecture des écrivains ecclésiastiques, surtout souhaits du peuple. Pour céder cet honneur
de Tertullien. Il ne passait aucun jour sans à ceux qui étaient plus anciens que lui, le
lire quelque chose de ce dernier, et, «juand il Saint avait pris la résolution de fuir; mais les
le demandait, il disait* à celui qui lui servait fidèles ayant •" gardé les avenues de sa mai-
de secrétaire : « Donnez-moi mou maître. » son, il fut obligé de se rendre à leurs désirs.
pas empêché saint Jérôme * de dire que l'on année de l'empereur Philippe. Il y eut néan-
voyait bien, par les écrits de saint Cyprien, moins quelques particuliers qui s'opposèrent"
qu'il avait eu Tertullien pour maître, appa- à son élection, entre autres cinq '^ prêtres de
remment à cause de la conformité de quel- l'Eglise de Cartbage, savoir : Fortunat '*, No-
ques-unes de leurs pensées et de leurs exprès- vat, Donat, Gordie et Caïus de Didde. Saint
sions. Ce fut pendant le cours de ces études, Cyprien, loin d'en avoir du ressentiment, ne
*
que mourut le saint prêtre Cécile, selon le crut pas faire assez pour eux en leur par-
diacre Ponce, qui remarque ' que ce respec- donnant cette faute '^ en les traitant tou-
et
table vieillard, pour témoigner sa reconnais- jours avec toute la douceur, la patience et la
communione participem postmodum faceret pietatis au règne de Philippe, sous lequel l'Eglise jouissait
,
Victor, fraier noster, de sœculo excedens Ge- il/a contra episcopatum meum, imo contra suffragium
Gemimus
vcsirum et Dei judicium venena relinentes instaurant
minium Faustinum presbyierum tutorem testamenlo
episco- contra wtpugnutianem suam. Cyprianus, Epist. 48,
tua nominuverit : cum jampridem in concilia
pag. 227.
porum slaluium sit ne quis de clericis et Dei minis-
tristutorem vel curatorem
,
tait de son visage tant de rayons de grâce et parmi les chrétiens reçût aussi des païens
,
ou possède quelciue chose de Cécile Cyprien, pour l'exécution de ses ordres et pour veiller
évêque des chrétiens, qu'il ait à le déclarer sur les besoins de son Eglise. Trois d'entre
et à le fisc. » On ne sait quel fut
remettre au eux étaient évêques, savoir Caldone ^ Her- :
le lieude sa retraite ni qui furent ceux qui , culan et Victor. Les autres, qui étaient prê-
l'accompagnèrent. Saint Cyprien marque *, tres, se nommaient Kogatien ^, Numidique,
dans une de ses lettres, qu'il avait avec lui Brice et TertuUe. Saint Cyprien '" parle de ce
un diacre nommé Victor et quelques autres dernier comme d'un homme plein de foi et
personnes qu'il ne nomme point. Longtemps de piété, toujours prêt à servir ses frères et
avant que cette persécution arrivât, le saint s'appliquant, avec une sollicitude et une ar-
évèque en * avait été averti en une vision deur extrêmes, aux choses de Dieu et de la
dans laquelle il vit le Père de fam.ilie assis religion, et n'ayant pas moins de prudence
avec un jeune homme à sa droite, qui avait que de zèle. Les autres se rendirent illustres
la tète appuyée sur sa main et faisait pa- dans l'Eglise par leurs vertus, et même en
raître sur sou visage quelque tristesse mêlée versant leur sang pour la foi.
d'indignation. Il y avait à sa gauche un autre 8. La persécution commençant à se ralen- schisme
jeune homme, portant un filet, qu'il mena- tir, Cyprien se disposait à *• retournera
saint me^tn"i"o
*"'
çait de jeter, pour prendre le peuple qui était Carthage, lorsqu'il en fut empêché '* par un
alentour. Ce dernier était l'homme ennemi nouveau trouble qui venait de se former dans
qui avait reçu de Dieu le pouvoir de nuire le sein même de son Eglise et qui avait pour
aux chrétiens, dont la plupart vivaient dans auteurs Novat et Féhcissime. Le premier,
la négligence et dans le dérèglement. prêtre de l'Eglise de Carthage •*, était uu
Sa Tigi-
.-.ce dans
lance ,
7. Pendant son absence, il ne cessa point homme inquiet, amateur de nouveautés, sus-
-ii i i , •
sa retraite Qc Veiller a la conduite de son troupeau; il pect ai;x évêques pour sa foi, présomptueux,
pour gou-
le . . . .
Yeri.fment dounait dcs Hvis au clergé
*
"^ i il exhortait les avare, flatteur, séditieux, ennemi de la paix.
de
le son r.gu- '
te confesseurs; dos réprimandes à ceux
il faisait Il avait dépouillé des pupilles et des veuves,
qui, ayant été exiles, étaient revenus sans détourné les deniers do l'Eglise, laissé mou-
ordre; il excitait les frères à fléchir la misé- rir de faim son père, sans méîne prendre
ricorde de Dieu, non-seulement par de fer- soin de sa sépulture, fait avorter sa femme
ventes prières, mais encore par les jeûnes et d'un coup de pied. Pour éviter châtiment le
leslarmes, et par tous les autres moyens ca- que tant de crimes méritaient, il se sépara de
pables d'attirer la bénédiction divine; il les la communion de stm évèque et fit ordonner
fortifiait contre la violence des tourments pour son diacre un nommé Félicissime, sans
qu*on leur avait déjà fait souffrir, ou qu'on la permission et à l'insu de saint C^'^prien.
leur préparait; il s'opposait à l'indulgence Félicissime n'était pas moins coupable que
indiscrète qu'obtenaient des martyrs et des Novat. Il avait commis '* beaucoup de fraudes
confesseurs ceux qui avaient souillé leurs
, et de rapines dans l'administration des biens
mains bouches par des attouchements
et leurs qui lui avaient été confiés ; il '• s'était souillé
sacrilèges, ou blessé leurs consciences par par plusieurs adultères et avait même violé
des billets qu'ils avaient donnés aux juges des vierges. Il joignit à tant de crimes celui
païens, dans lesquels, pour s'épargner la du schisme, et poussa son insolence •• jusqu'à
fugam inii. Diony3., apud Euseb., lib. VI Histor., Cypriani, episcopi christianorum, etc. Cypr.. EpUt. 66.
cap. 40. 3 Cypr., Epiil.
6. —
* idem, Eptst. 11. » Idem, —
Le clergé de Rome parle avec beaucoup de froi-
* Epist. 20. —
Id.m, Epist. 11.
6 —
Idem, Epist. 14, ''
faire de grandes menaces à ceux qui se pré- d'avril, à cause de quelques nouveaux trou-
senteraient pour recevoir des aumônes de bles excités parles prêtres qui s'étaient oppo-
saint Cyprien, et à déclarer en même temps sés à son élection. Mais plusieurs évêques
que tous ceux qui obéiraient à ce saint évêque d'Afrique s'étant trouvés à Carthage aussitôt
et demeureraient dans sa communion, ne après les l'êtes de * Pâques, selon la coutume,
communiqueraient point avec lui sur la mon- saint Gyprien s'y rendit, pour régler avec
tagne. C'était le lieu * où il avait commencé à eux les afifaires de l'Eglise dans un concile.
ériger un autel et à tenir des assemblées avec La cause des tombés y fut examinée avec
les * cinq prêtres qui s'opposèrent d'abord à beaucoup d'exactitude et de soin. On y dis-
l'élection de saint Gyprien, auxquels s'étaient cuta aussi celle de FéUcissime et des cinq
joints un nommé Augendus et quelques au- prêtres qui l'avaient suivi. Us furent • en-
tres, du nombre de ceux qui étaient tombés tendus, condamnés et excommuniés, et les
pendant la persécution. Saint Gyprien, ayant Pères du concile en donnèrent avis au pape
été averti de ce désordre par Caldone et ses
* Corneille, sitôt qu'ils eurent appris son élec-
collègues, leur lit réponse que, puisque * Fé- tion. Ils *" envoyèrent même à Rome deux
licissime s'était séparé lui-même de l'Église, évè(jues d'entre eux savoir Caldone et For-
,
il avait prononcé contre lui la sentence (ju'il tunat, soit pour réunir les lidêles de cette
méritait, qu'ainsi il était séparé de la com- Eglise divisés au sujet de l'élection de Cor-
munion de son évêque. Ensuite, ayant su neille, soit pour faire aux Africains un rap-
d'eux les noms des autres schismatiques, il port fidèle et assuré de ce qui s'était passé à
déclara en ces termes ceux-ci excommuniés : Rome en cette occasion. Saint Gyprien *' fit
a Nous avons retranché de notre commu-
" ensuite un voyage à Adrumet, avec un évê-
nion Félicissime et Augendus, avec Repostus, que nommé Libéral, et, ayaut connu que les
qui a été banni pour la foi, Irène de Hutile et fidèles de cette Eglise, dont Polycarpe était
Paule, la couturière; Sopbrone, qui a été aussi évêque, avaient adressé des lettres à saint
banni pour la foi, Soliasse et Dudiuaire. » Il Corneille, informa de la résolution du
il les
écrivit • en même temps à son peuple de concile, qui était que, jusqu'au retour des
prendre garde aux discours trompeurs et députés, on ne rejetterait ni n'approuverait
pernicieux de ces schismatiques, de n'avoir formellement l'ordination de saint Corneille.
aucune communication avec eux, et de les Mais le droit de ce pape ayant été, bientôt
regarder comme des ennemis d'autant plus après appuyé " par le témoignage de Cal-
,
dangereux, qu'ils s'efforçaient d'attirer à eux done et de Fortunat, par celui des évêques
les tombés, sous des espérances trompeuses, qui avaient assisté à son ordmation, par les
en leur promettant la paix qu'ils ne pou- évêques Pompée et Etienne, qui arrivèrent en
vaient leur donner. ce temps-là en Afrique, et par une " seconde
Saint cy- 9. Cependant Dèce ayant quitté Rome, vers lettre qu'il écrivit lui-même à saint Gyprien,
tourne il
lé ^printcmps de l'année 251, 'pour aller en tous les évêques d'Afrique embrassèrent sa
Cai'tliaeeau *^
mois <ia,;rii Mésie coutre les Gotlis, le feu de la persécu- communion, son épiscopat y fut approuvé de
de an Sol.
1
'^ •"
c!)ucur'"°
*^"^ ^® ralentit de telle sorte en Afrique, que tout le monde, et l'ordination de Novatien,
saint Cyprieu résolut de sortir de sa etraite i son compétiteur, rejetée comme illégitime.
et de revenir à Carthage célébrer la fête de ' 40. La paix et la liberté avaient été ren- Psi, reu-
Pàijues, qui, cette année, tombait au vingt- dues à l'Eglise par la mort de l'empereur areo^^sî"!
troisième de mars, selon le cycle de saint Dèce, arrivée vers la fin de novembre de l'an confes.eurs
lA »T . -i • schismati-
Hippolyte. Il ne put néanmoins exécuter sa 251. Les confesseurs, que '* Novat avait se- 'iMei»ruai-
' 11 semble que Félicissime avait une église chei mets quibus prœsentibus secundum arbitrium quoque
;
lui sur la montagne, c'est-à-dire, apparemment, dans vesti'um etomnium nostrum commune consilium, sicut
le quartier le plus élevé de la ville, d'où vint à ces semel placuit ea quœ agenda sunt disponere pariter
,
même
.
11
pierre, quoKju elle
• > *'* "posé
kuauon.
fidèles. 11 écrivit * au pape saint Conieille fût devant ses yeux; il persécuta et chassa
pour l'en féliciter et pour lui dépeindre la les saints qui priaient pour sa sauté et pour
personne et les crimes de Novat, qui, étant sa gloire ; et, en les privant de la liberté et de
prêtre de TEglise de Carthage, y était mieux la i)aix, il se priva lui-même de l'eifet de
connu qu'à Rouie. Il écrivit aussi aux con- leurs prières. On attribue cette per.sécution
fesseurs réconciliés ', et leur envoya deux au refus que les chrétiens firent de participer
traités qu'il venait de composer, celui </e l'U- aux sacrifices que Gallus et Volusien, son fils,
nité de l'Eglise, et celui des Laps, c'est-à-dire avaient ordonnés, dans toutes les provinces,
•"
de ceux qui étaient tombés dans la persécu- pour obtenir de leurs dieux la cessation de
tion. 11 travailla, dans le * même temps, à af- la peste qui ravageait l'Empire. Saint Cyprien
fermir dans l'unité sacerdotale et catholique fut demandé une seconde fois dans lecirtjue,
Antouien, évêque de Numidie, qui, ébranlé par du peuple de Carthage ", pour
les cris
par les lettres de Novatien, dont il avait d'a- être exposé à un lion. Bien que ces bruits
bord rejeté la communion pour s'attacher à populaires ne fussent suivis d'aucun elïet, le
saint Corneille, paraissait disposé à s'éloigner saint évêque, à qui Dieu avait fait connaître
de l'unité de l'Eglise. quelle devait être la grandeur de cette persé-
Pnint cy- 11 5 de mai de l'année suivante 252,
. Lc 1 cution, ne songea plus '* qu'à se préparer à la
pricn tient • ,. ,-, - •
i , . . -i
nu concile à sauit Cyi)rien » assembla a Larthage un con- mort et à disposer son Eglise à soutenir les
»5». cile (le soixante-six eveques ^, pour eximmer furieux assauts qu'on lui devait livrer. Dans
de nouveau la cause de ceux qui étaient tom- cette vue, communion aux pé-
il fit donner la
par des visions et par des révélations fréquen- puissantes exhortations, et de le rendre iné-
tes. Pendant la tenue de ce concile, Privât *, branlable par "^ des jeûnes, des veilles et des
ancien hérétiipie, déjà condamné par quatre- prières continuelles. L'espérance que saint
vingt-ilix évêqucs et par les lettres de saint Cyprien avait conçue de la générosité de
Fabien et de Douât de Carthage vint de- , ceux à qui il accorda la paix ne fut pas ,
mander audience pour se justifier ; mais on vaine ; s'ils avaient eu le malheur de tomber
la lui refusa. dans la persécution de Dèce, ils demeurè-
Perséni- 12. Sur la fin de la même année, Gallus, ne '
rent " invincibles sous Gallus, et donnèrent
tioii de Gai-
lus ^aint reconnaissant ^pas la faute <|u avait faite Dèce, leur sang et leur vie pour Jésus-Christ.
Cypneii est i •'
deman.ié
' de se déclarer ennemi de
uae. seconde
gon prédécesséui',
^ i3. Cependant la pt!ste continuait à rava- sain*"cy^*
l'EgUse, et ne s'apercevant pas ^ de ce qui ger l'Empire ' ', sans qu'un fléau si terrible fîit Xuu». t,ëi-
te.
1 Voyez tom. II, pag. 574, not. (6). — * Cyprian., chrétiens et n'ordonnait pas qu'on les persécutât.
Epit. 52 —
» Idem, Epist. 54. —
Idem, Eptst. 55.
» u Cyprianus, Epist. 5 9. — " Idem , Epist. 53. —
— Idem, Epist. 69.
» — • August., lib. IV ad Bonif., " Idem, Epist. 57. — '* Idem, ibidem. — " Idem,
cap. 8, pag. 481, lom. X nov. edit. Cyprian., — "' Epist. 60.
Epist. 59.-8 Idem, ibid. '« Nulli enim nostrum dubium vel incertum est, fra-
* Sed neque Gallus culpam Decii intellexit , nec tres charissimi qui prima acte id est Deciana
, illos , ,
prospexit quid tandem illum pessum dedisset. Qum persecutione vulnerati fuerunt, lios postea, id est, se-
potius ad eumdem lapidem ante oculos suos positum cundo prœlio ita fortiter persévérasse, ut con'.emnentes
impeg't. Qui cum imperium ipsius prospéra in statu edicta sœcularium principum, hoc invictum liuberent,
esset, cunctaque ex animi sententia succédèrent, viros quod et non metuerunt exemplo boni Pa^toris animam
sanclos qui pro pace et incolumitale ipsius preces ad suam tradere et sanguinem fundere nec ullam insa- ,
Deum allegabant , insertatus est. Cum illis crgo ora- nientis tyranni sœviliam recusare. Auctor anonymus,
tiones pro ipso fieri salilas simul fugavit. Dionys., Tractatu in Novatianum hœreticum ad calcera oper.
apud Euseb., lib. VII Hist., cap. 1. Cyprian., pag. 17, col. 1.
to L'édit d(j l'eaipereur ue fuii>ait point ineotioa des ^ Cyprian., ad Demctrian., pag. 129 et seq;
m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRÎEN. 265
capable d'arrêter les désordres, ni de rete- ment général de tout monde. Saint Etienne
le
nir les hommes dans leur devoir. Il ne laissa gouvernait alors l'Eglise de Rome, en la place
pas de jeter la frayeur dans les esprits; tout de saint Luce, martyrisé au mois de mars de
le monde s'enfuyait pour l'évite^, et l'on la même année. Comme les commencements
avait la cruauté de jeter même ses proches de l'empire de Valérien furent três-favorables
hors des maisons, comme si l'on eût pu aux chrétiens, les évê(iues en profitèrent pour
chasser la morl avec malade. On voyait
le tenir des conciles et rétablir la discipline. Il
les rues • de Garthage couvertes de corps s'en tint plusieurs à Carthage, auxquels saint
morts, ou plutôt de cadavres à demi-pourris, Cyprien présida. Dans celui que nous nom-
dont l'état seul conjurait les passants de leur mons le troisième, et qui fut couvoqué eu 254,
rendre les devoirs de piélé dont eux-mêmes on déclara ' que Basilide et Martial, qui avaient
allaient bientôt avoir besoin. Mais personne surpris le pape Etienne, pour se faire rétablir
n'était touché de compassion par la crainte dans leurs sièges, ne pourraient y rentrer, et
d'une semblable disgrâce; personne ne fai- que l'ordination de Sabin et de Félix, qui
sait pour les autres ce qu'il aurait voulu avaient été créés évêques en leur place de- ,
qu'on eût fait pour lui, s'il avait été en leur vait subsister. L'année suivante, c'est-à-dire
place. Saint Cyprien, vivement touché de tant en 255, une grande question s'étant émue
de maux, assembla son * peuple et l'instruisit entre les évèques catholiques touchant la va-
des œuvres de miséricorde, lui représentant, lidité du baptême des hérétiques, saint Cy-
par des exemples tirés de l'Ecriture, combien prien assembla, sur ce sujet, deux conciles.
elles sont utiles pour attirer la grâce de Dieu. 11 y fut décidé * qu'il n'y a point d'autre bap-
Il ajouta que c'était peu de nous ac(piitter de tême que celui qui se donne dans l'Eglise ca-
ces devoirs de charité envers les fidèles ; que, tholique; que ceux qui ont été souillés de
pour être parfait, il fallait faire plus que les l'eau profane des hérétiques doivent être re-
païens et les pubUcains, vaincre le mal par le baptisés lorsqu'ils viennent à l'Eglise, et qu'il
bien, aimer ses ennemis et prier pour le sa- ne suffit pas de leur imposer mains, afin
les
lut de ceux qui nous persécutent; en un mot, qu'ils reçoivent le Saint-Esprit. Saint Cyprien
qu'il fallait que nos actions répondissent à donna ' avis de ce décret au pape saint
notre naissance, et que ceux qui étaient ré- Etienne, qui, le trouvant ^ contraire à la tra-
générés de Dieu ne devaient pas dégénérer dition de l'Eglise, le rejeta et déclara qu'il
de la gloire de cette origine, mais faire voir, ne communiquerait plus avec Cyprien et les
au contraire, eu imitant un si bon père, qu'ils autres évèques du même sentiment, s'ils ne
lui appartenaient . Ces exhortations ayant quittaient leur opinion. Cette réponse obli-
produit dans l'esprit des fidèles l'effet que gea saint Cyprien de tenir, le l^"" ' de sep-
saint Cyprien en attendait, ils se partagèrent tembre de Tan 25t), un nouveau concile au-
aussitôt les emplois, selon la qualité de cha- quel assistèrent quatre-vingt-cinq évêques
cun. Plusieurs, qui ne pouvaient donner de des provinces d'Afrique de Numidie et de
,
l'argent parce qu'ils étaient pauvres, faisaient Mauritanie, a\ec les prêtres, les diacres et
plus en se donnant eux-mêmes pour servir une grande partie du peuple. On ne fit que .
les malades, et tous s'empressèrent de pren- répéter ce qui avait été dit dans les deux
dre part à de si saintes œuvres. Il se fît donc conciles précédents, et la conclusion en fut
une si grande profusion de charités, qu'elles la même, savoir, que l'on devait rebaptiser
se répandirent même sur les païens : ainsi les hérétiques. Mais saint Cyprien ne se * sé-
la charité des fidèles de Carthage surpassa, para point de la communion de ses confrè-
en cette occasion, celle de Tobie, puisque ce res qui étaient d'une autre opinion que lui.
saint homme n'enterrait que ceux de sa na- 15. Valérien, ayant changé l'affection qu'il Exii da
tion, tandis que les chrétiens étendirent alors avait d'abord témoignée aux chrétiens en pWenenssT.
leurs soins jusque sur leurs persécuteurs. une cruelle persécution, à la persuasion ' du
Divers 14. L'au 253 de Jésus-Christ, la cinquième maître des magiciens d'Egypte, saint Cyprien
conciles «le ,ii,. i /^ •
-tti-
saint cy-
pnen ,ae- •''
anucc dc lépiscopat de saint Cyprien,
d '
Vale- i.
fut pris et présenté au '° proconsul d'Afrique,
Pjy'^>^ 25$ ^^^^ ^^'* proclamé empereur par un ccnsente- à Carthage , dans le parquet ; c'était le 30
connaissance de Dieu ne doit point être point consentira ces offres. Néanmoins, ayant
changée. » —
« Vous pourrez donc, reprit le appris que le proconsul, qui était à U tique,
proconsul, suivant l'ordre de Valérien et de avait envoyé des soldats pour l'y amener,
Gallien, aller en exil en la ville de Curubc *.» il cétla au conseil de ses amis, quitta ses jar-
Sur quoi le Saint répondit « J'y vais al- : dins et se retira en un autre lieu. Ce fut de là
ler. » Le proconsul ajouta qu'il voulait sa- qu'il écrivit sa dernière lettre au clergé et au
voir quels étaient les prêtres de Carthage. peuple de son Eglise, où il leur donne cette
« Vous avez ordonné, répondit le
fort bien raison de sa retraite ', qu'il convient à un
saint évê(iue, que nous ne devons point être évéque de confesser le Seigneur dans la ville
délateurs; d'ailleurs, les règles * de la dis- où est son Eglise, afin que tout le peuple soit
cipline chrétienne ne permettent pas qu'on honoré de la confession de son chef.
se présente soi-même mais si vous cherchez ; 17. Le proconsul étant revenu d'Utique à ^
Pon mar-
ces prêtres, vous les trouverez chez eux. » Carthagp, saint Cyprien retourna aussi dans ^^eptembr»
Paterne signifia ensuite à saint Cyprien la sou jardin. Comme il y était, le 13 de septem-
défense expresse que Valérien avait faite aux bre de l'an 258, tout-à-coup deux officiers
chrétiens d'entrer dans les cimetières et de du procon.sui *, avec des archers, vinrent le
s'assembler, menaçant de la mort ceux qui prendre sur leurs chariots : ils avaient ordre
désobéiraient à cet ordre. Saint Cyprien ré- de le mener en un lieu nommé ^ Sexte, à six
pondit : « Faites cequi vous est commandé. » milles de Carthage, où le proconsul était allé
Alors le proconsul ordonna que le Saint fût pour rétablir sa santé. Samt Cyprien '* passa
mené au lieu de son exil. 11 y arriva le 13 ou la nuit dans la maison du commissaire, au
le 14 de septembre. La nuit d'après son arri- bourg de Saturne. Tout le peuple fidèle était
vée, il eut une vision * dans laquelle Dieu devant la porte, dans la crainte qu'on ne prit
l'assura que, le même jour de l'année sui- ce temps pour disposer à leur insu de leur
vante, U souffiirait le martyre. Il employa évêqne ; mais comme y avait plusieurs
il
tout ce temps à animer, par ses lettres, les jeunes filles, le Saint donna ordre qu'on eût
confesseurs condamnés à travailler aux mi- soin qu'il ne se passât rien d'indécent. Le
nes de cuivre des montagnes de Mauritanie lendemain 14 de septembre, au matin, le
et de Numidie, à soulager leurs travaux par proconsul envoya chercher Cyprien. Le Saint
ses aumônes et à régler les affaires de son sortit de la maison du commissaire, accr>m-
Eglise. pagné d'une '* grande multitude; la distance
Relourde ^^ Après ûvoir demeuré onze mois à Cu- jusqu'au prétoire était d'une stade, c'est-à-dire
f'rten'en'ws. rubc, il cu fut rappelé * par Galère-Maxime, de cent vingt pas. Quand il y fut arrivé, le pro-
polfr pon." qui avait succédé à Paterne en la dignité de consul ne paraissant pas encore, ou le fit atten-
rèmksgé^ proconsul d'Afiique. De retour à Carthage, dre dans un lieu retiré, où il s'assit sur un
il parut de nouveau devant Galère, qui lui siège qui se trouva par hasard *' couvert d'un
donna pour prison les ' jardins que le saint linge, comme pour le faire jouir de l'honneur
> Cette ville était à douze lieues de Carthage, sur ' Congruit episcopum in ea civitafe, in qtia Ecclesiœ
leâ bords de la nier. (L'éditeur.) dominiccB prœest, illic Domtnnm confiteri, et plebem
* Cum di.sci'ijtma pro)dbeat, ut quis se ultro offerat. universam prœpositi prœsentis eonfessione ciarificari.
Ruin., Ad. Martyr., pag. 216.
sine. Cyprian., Epist. 81, pag. 333 in edit. Baluz.. Ep. 83.
» Ponlius, in Vila Cyjirian., pag. 7.-^ * Act. sine. 8 Act. sine. Martyr., pag. 217. — » Ibid. -* «« Ibid.
Martyr., pag. 216. — » ibid., pag. 217. — « Pontius, U Pontius, in Vita Cyprian., pag. 10.
in Yita Cyprian., pag. 9. » Se<ft/e ttuten trai fortuito iinte<y t<ctvm, ttt et tub
[iri* SIÈCLE.J CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 267
min qu'il avait fait, un soldat, qui avait été diacre du même nom, lui renthreut cet office.
chrétien, lui offrit ses hahits pour changer : Les fidèles jetèi'cut des linges et des mou- ^
« En quoi, dit le diacre Ponce *, il ne songeait choirs devant lui pour recueillir son sang.
qu'à posséder cette précieuse sueur du mar- En cet état il eut la tète tranchée, le 14 de
tyr qui était prêt d'aller à Dieu. » Mais saint septembre, sous le consulat de Tuschus et de
Cyprien lui répondit : « Vous me voulez sou- Bassus % c'est-à-dire l'année 258, le même
lager d'une incommodité dont je serai peut- jour , un an
® auparavant , il avait eu la
où
être délivré sous peu. » Cependant le pro- vision touchant sa mort. Comme les païens
consul, averti de son arrivée *, se le fit amener voulaient avoir son corps, les fidèles le por-
dans la salle du criminel, où il était assis. tèrent en un lieu proche de l'exécution , et,
Après lui avoir demandé son nom et s'il lorsque la nuit fut venue, ils le transportè-
était évêque des chrétiens '^ il lui ordonna rent •" avec des cierges et des torches , et
de sacrifier. Saint Cyprien répondit : «Je n'en l'enterrèrent en grande solennité dans une
ferai rien, w Le proconsul insista une seconde place qui appartenait à un officier nommé
fois, et,voyant la fermeté du saint évêque, Candide.
de de son conseil, il prononça contre
l'avis que mourut saint Cyprien
18. C'est ainsi
^
Eiogesqu»
j ^^' ancien»
1
lui celte sentence « Nous ordonnons que
: qui, ayant été pendant sa vie un exemple de ^"^\jj|°"^*»
Thasce Cyprien ait la tète tranchée. » Le Saint vertu digne d'être proposé à tout le monde, p^en-
ictu passionis episcopafus honore frueretur. Pont., ' Linteamina vero et manualia, a fratribus ante
ibid. On par cet endroit, que c'était la coutume
voit, eum mittebuntur. Act. sine. Martyr., ibid. Le diacre
de couvrir d'un linge la ctiaire de l'évèque. Ponce ne rapporte point cette circonstance, non plus
1 Qui videlicet mhil aliud in rébus oblutis ambiebal, que beaucoup d'autres, dont les Actes du martyre
quant ut proficiscentis nd Deum martyris sudures jam de saint Cyprien fout mention, parce qu'il croyait
sangu neos possideret. Pont., in Vita Cypr., pag. 10. inutile de répéter ce que l'on trouvait écrit ailleurs.
* Pont., in Vda Cyprian., pag. 10. — ^ Act. sine. C'est pourquoi il renvoie le lecteur à ces Actes, tels
Martyr., pag. 217. qu'ils se trouvaient de son temps, soit entre les
* Act. sine. Martijr., pag. 218. Le diacre Ponce dit mains des fidèles, soit dans le greffe de Carthage, et
que cette protestation puljlique de vouloir être mar- tels que nous les avons encore, car ils n'ont rien que
tyrisé avec saint Cyprien, leur en donna le mérite. d'original : Et ut quid sacerdos Dei proconsule inter-
beatum Ecclesiœ populum, qui episcopo suo tali et royauté responderet taceam, sunt acta quœ referont.
oculis pariter et sensibus , et quod est ampHus, publi- Pont., in Vita Cypriuni, pag. 6.
cafa voce compnssiis est; et sicut ipso tractante semper ' Act. sine. Martyr., pag. 216. — • Pont., in Vita,
audierat, Deo judice coronatus est. Quamvis enim non pag 10.
poluerit evenire quod optabant vota communia, ut con- *o Ejus corpus propter geniilium curiositatem in
sortio paris gloriœ simul plehs tota pateretur ; qui- proximo positum est. Inde per noctem saOlatum cum
cumque sub Christi spectantis oculis et sub auribus cereis et scholacibus ad areas Macrobii Candidiani
sacerdotis ex animo pati volait per idoneum voit sui procuratoris cum vota et triumpho magno deductum
testem, leyatioms quodammodo litteras ad Deum mi- est.
iit. Pont., in Vita Cypr., pag. 11. '1 Et in qua civitate prior multa prœclara fecerat,
* Act. sine. Martyr., pas. 218. prior etiam sacerdotii cœlestis insignia glorioso cruore
* Voici le texte des Actes Qui cum lacinias ma-
: decoraret. Pont., in Vita, pag. 11.
nuales ligare sibi non potuisset, Julianus presbyier et ** Cypriunus in concordia omnium, in pace communi,
Julianus snbdiuconvs ei ligaverunt. Le mot manunle in confe.<surum grege passas est, et scepe confessus,
signifiant un mouchoir, lacinias désigne les bouts itérât is per.'^ecutiontbus et multa lacération^ vexai us,
du moucboir. Saint Cyprien se mit son mouchoir et novissime satiitari calice propinatus est. Pacian.,
Éur les yeux, et les deux Julien attachèrent les ex- Epist. 2 ad Symphorianum , lotû. IV Èiblioth. Pair.
trémités de ce mouclioir derrière sa léte. {^L'éditeur.) Ludg., pag. 608.
268 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de vexations, et, après tout cela, il a bu le ca- cipales de Jésus-Christ, le livre contre le Jeu
lice salutaire du martyre. C'est ainsi qu'on des dés, le traité des Montagnes de Sinai et de
est courouué. Novatien a pu souflrir comme Sion contre les Juifs, deux Oraisons où il est
lui *, il a pu être tué; mais il n'a pas pu re- parlé de sainte Thècle; l'ouvrage intitulé: De
cevoir la couronne hors de l'Eglise. « Lac- la Singularité des clercs, une Exposition du
tanoe ', saint Grégoire de Nazianze, saint Jé- symbole, un autre traité qui a pour titre De :
rôme, saint Augustin et Prudence se sont i Incrédulité des Juifs, un contre les Juifs
étendus sur les louanges de ce saint martyr. qui ont persécuté Jésus-Christ , le traité de la
Saint Paulin dit cjue la ville puissante de Révélation du chef de suint Jean-Baptiste, celui
Cartilage lait sa gloire de ce martyr ', qui, du double Martyre, des douze Abus du siècle,
des Laps ou Tombés, un autre de l'Oraison do- les savants, un des premiers ® fruits de la con- verTi'aDïM
minicale, un de la Mortalité, V Exhortation au version de saint Cyprien. Il le composa n'é-
martyre, l'écrit cont7'e Démétrien, celui de tant encore que laïque, et peu de temps après
l'Aumône bonnes Œuvi'es, un du Bien de
et des son baptême, vers l'automne de l'année 246.
un autre de l'Envie. Ses lettres
la patience, C'est la suite d'un entietien qu'il avait eu
sout au nombre de soixante-dix * il y en a : dans un jardin, au temps des vacations, avec
quinze à sou clergé et à son peuple, quatre Donat, son ami particulier, sur les périls que
au clergé de Rome, huit au pape saint Cor- l'on court dans le monde et sur la grâce que
neille, onze à divers confesseurs, une au pape Dieu fait à une âme qu'il en retire, pour
saint Luce, deux au pape saint Etienne, les l'appeler à son service. D'où vient qu'il est
autres à différents particuliers. On attribue .i quelquefois intitulé : De la Grâce de Dieu.
saint Cyprieu plusieurs traités qui ne sont Saint Augustin l'appelle une letti^e à la ma-
''
1 Porro, etiamsi passus est aliquid Novatianus, non du rang des sénateurs, mais d'une foi vive et d'une
tamen etiam occisus. Etiamsi occisus, non tamen coro- grand plaisir était d'enten-
piété solide, dont le plus
natus. Quidni? Extra Ecclesiœ pacem, extra concor- dre parler des cboses de Dieu. Ce fut à sa prière
diam, extra eam matrem cujus portio débet esse qui que saint Cyprien écrivit le livre qu'il lui adressa.
martyr est. Idem, ibid. « On en juge par le style, qui est extraordinaire-
* Lactant., lib. V Instit., cap. 1; Gregorius Nazianz., ment fleuri et plein d'ornements d'une éloquence
Orat. 18; Hieronym., in Calai., cap. 68 et in cap. m mondaine. Saint Augustin marque, en particulier,
Jonœ; August., Sermone 312, et lib. Il de Docirina l'endroit où saint Cyprien fait la description d'une
Christ., c^p. 40; Prudent., Hymno 13 de Coronis. treille qui formait un couvert, et une retraite agréa-
^ At Carthago polens Cypriuno martyre gaudet, cu- ble dans le jardin où il s'entretenait avec son ami
jus et ore sanguine fontes, fecunda-
simul profusi , et Donat. August,, lil). IV de Doclrin. Christ., cap. 14,
verunt Libyœ sitientis arenas. Paulin., Carminé 27 de num. 31, pag. 76, tom. III.
Sanctorum reliquiis per orbem difjusis, pag. 168 ' Augustin., ibid.
edit. 1685. * Cm
Cyprianus quale testimonium perhibeat, audi
* compte 81 lettres celles de
L'édition d'Oxford ; ex Epistola quam de unitale conscripsit. Augustin.,
Pamélius, de Baluze, de D. Maran, en comptent 83, lib. II cont. Crescon., cap. 33, et lib. de Fide et Oper.,
mais dans un ordre différent. {L'éditeur.) cap. 19, et lib. IV de Baptisrn. cont. Donat., cap. 9
Ce Donat était un homme riche, et, ce semble,
!^
et cap. 8.
,
saint Paeien '. Mais, dans beaucoup de ma- menter les vices; les prévarications qui se Pag. s,
nuscrits, l'écrit à Donat est qualifié livre, ce commettent en une infinité de manières par
qu'on a suivi dans l'édition d'Oxford. ceux qui, dans le barreau, sont préposés pour
Analyse 2. H y décrit,' avcc toutes les fleurs de son rendre la justice ; les bassesses et les intri-
ae ce livre, •'
\\ln' d'oxl
éloquence, les perplexités dont il se trouvait gues de ceux qui veulent parvenir aux char-
forrtdeiaa admi- inquiétudes des riches, tellement es-
ggj^^ avaut SOU Laptème, et les effets ges ; les
Pag. 2. rables que ce sacrement produisit eu lui, claves de leurs richesses, qu'on peut dire
relevant partout la bonté et la miséricorde qu'ils en sont plutôt possédés qu'ils ne les
de Dieu qui, par le secours de sa grâce, lui possèdent ; et la variété et l'inconstance de '»•
avait rendu facile ce qu'il avait regardé au- la fortune, qui ne rit aux grands que pour
paravant comme impossible. « Oui, c'est de leur être ensuite plus cruelle, qui ne les flatte
Dieu, dit-il, que nous tenons tout ce qu'il y a que pour les tromper, et qui ne les élève que
de force eu nous. C'est lui qui nous fait vivre, pour les précipiter. Le seul moyeu de vivre
c'est lui qui nous anime et qui, nous donnant en paix et en assurance, c'est, conclut saint
une vie nouvelle, fait que, dès ce monde, nous Cyprien, de se mettre à l'abri des tempèles
avons des pressentiments de l'avenir. Ayons du siècle, de lever sans cesse les yeux au
seulement soin de vivre dans la crainte, ciel, et, lorsqu'on a été une fois admis au
comme étant la gardienne de notre inno- bain salutaire et qu'on se voit déjà proche
cence, et qu'il n'arrive pas que le pardou de de son Dieu, de regarder au-ilessous de soi
nos fautes nous rende négligents et laisse ce que les autres estiment de plus haut et de
une porte ouverte à Tancien ennemi pour ,
plus élevé. Pour parvenir à cet état, il n'est
3. rentrer dans nous. » Ensuite, s'adressant à besoin ni d'argent ni de crédit. C'est un don
Donat, il lui promet que, s'il marche d'an pas de Dieu tout gratuit, car le Saint-Esprit se
égal dans la voie de la justice et de l'inno- répand comme le soleil répand ses rayons,
cence, attaché à Dieu de tout son pouvoir, la comme une fontaine répand ses eaux, comme
grâce spirituelle s'augmentera en lui et lui le ciel verse la pluie.
donnera de nouvelles forces, les dons célestes 3.Nous ne trouvons rien dans le traité de Tr&ité d»
la Vanité
ne recevant ni bornes ni mesures. Afin de lui des idoles,
la Vanité des idoles qui en puisse fixer l'épo- écrit vers
faire comprendre ensuite encore mieux l'é- que 2. Le style en est élégant et fleuri, mais Van 250.
mineuce de la grâce que Dieu fait à ceux moins châtié ' que celui des autres ouvrages
qu'il tire des périls inévitables du siècle, il de ce Père, et les preuves qu'il y apporte *
lui représente les tempêtes et les agitations pour montrer qu'il n'y a qu'un Dieu, ne sont
4.
du monde , l'effroi et l'horreur de la guerre, pas aussi bien arrangées qu'elles devraient
la barbarie des spectacles de gladiateurs l'être. Ce qui fait voir que saint Cyprien
dont tout le plaisir consiste à se repaître les écrivit ce traité à la hâte, et apparemment
yeux de sang et de carnage les dangers du ; dans le temps de la persécution * de Dèce,
théâtre, où l'on se fait gloire de représenter pour confirmer les chrétiens dans la foi et
les crimes passés, les parricides, les incestes, faire voir aux païens la fausseté du culte
les adultères, et où l'on ne voit rien que de qu'ils rendaient aux idoles. Saint Augustin '
capable de corrompre les mœurs et de fo- le cite, et saint Jérôme eu admire la briè-
i
Lege totam de lapsis episioîam. Pacian., Épist. 3 donner les idoles. Ils se fondent sur certaines ptraseS
ad Sympromanum. qui leur paraissent moins chrétiennes; entre autres
2 Lumper que saint Cyprien
inclinerait à croire celles-ci : Régna... sorte tariantur. Et, en parlant de
composa ce avant une persécution dont l'ap-
traité Jésus-Christ ressuscité Ad siiperos denuo regredi,
:
proclie ne lui permettait pas de le soigner. Voyez pag. 11. Mais il est à remarquer que les auteurs sa-
sa dissert., tom. IV Pair. Migne, col. 1011. (L'édi- crés se sont servis de semblables expressions,
teur.) comme on le peut voir au hvre des Nombres, xxvi,
^ En moins de douze lignes il répète jusqu'à trois 55 , 56, xxxni, 54; Deutéronom., i, 38, et xxxi, 7;
foisl'adverbe cœterum : Cceterum imperium ante te- Josue, I, 6, et xvni, 6, 8 et 10 Esther., m, 7; Pro-
;
nuerurd et Assyrii... cceterum, si ad ordinem redeas... verb., XVI, 33; Act., i, 17.
ccpterum Régulas auspicia servavit. Cyprian., de
et ^ Regulœ apostolicœ sectator, episcopus Cyprianus de
Idol. vanit.,pag. 9. —
* Ibid., pag. 10. uno vero Deo adversus multorum deorum falsorumque
" D'autres sont persuadés que saint Cyprien com- cultures disputans, multa profert testimonia de libris
posa cet écrit aussitôt après son baptême , comme eoruni quos prœclaros auctorcs habent, hoc est ex illa
pour rendre compte au public de son changement veritate quam in iniquitaie detinent, August., lib. de
de religion et des raisons qu'il avait eues d'aban- Unico Baptismo, cap. 4, pag. 530, tom. IX noT. edit.
270 HISTOIRE r.f.NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
vetti •, la connaissance que le Saint y l'ait pa- vances sujx'rstitieuses du paganisme ne sont
raitre de toute l'histoire, et la beaut»^. soit des que des prestiges par lesquels les démons
paroles, soit des pensées. Cept nJanl ce traité détournent les hommes du culte du vrai
n'est, pour ainsi dire, qu'un extiait de Ter- Dieu; ce que ces malins esprits avouent eux-
tuUien et de Miuuce-Félix, et ce qu'il y a de mêmes, lorsque, par la vertu des exorcis-
plus beau est tiré presque mot pour mot des mes, ou les chasse des corps qu'ils possé-
écrits de ce» deux auteurs *. daient.
depp^""àil'* ^' 11 en trois parties. Dans la
est divisé 5. Saint Cyprien prouve, dans la seconde ^^^^â.
'^'*"
B^*n?s.!în première, saint Cyprien fait voir que ceux partie, qu'il n'y a qu'ini Dieu et qu'un Sei-
"" qne les païens adorent comme des dieux ne gneur, parce qu'étant lout-puissant, d ne peut
.l'ieiî'.
Pag. 8. 'e sont pas eu eiiet; que l'origine du culte avoir de compagnon de sa puissance, « ce
superstitieux qu'on leur rend provient de ce qui se peut même prouver, ajoute-t-il, par
qu'autrefois il y a eu des rois «iont la mé- lesexemples des empires d'ici-bas. Où a-t-on
moire a été honorée, après lem- mort, par vu deux rois, sur nu même trône, vivre long-
leurs sujets, qui d'abord leur érigèrent des temps en bonne intelligence? Rémus et Ro-
temples et des statues pour en conserver le mulus, qui avaient été ensemble dans le sein
souvenir, i)uis leur ofirirent des sacrifices et de leur mère; César et Pompée, qui étaient
instituèreut des fêtes eu leur honneur : ain^^i alliés , ue purent s'acconler, pour la puis-
ce que les uns avaient inventé pour se con- sauce. Les abeilles n'ont qu'un roi, les trou-
soler de la perte de leurs princes, les autres peaux qu'un conducteur. Donc, à plus forte
en firent un acte de religion. C'est ainsi que raison, il n'y a qu'un maître de l'univers qui
Mélicerte et Leucothée, Castor et Pollux, Es- a fait tout par son Verbe^ qui le gouverne
culape, Hercule, Apollon, Neptune, Jupiter, par sa sagesse, qui l'entretient par sa vertu.
Saturne, Janus et un grand nombre d'autres On ne peut le comprendre, parce qu'il est
ont été mis au rang des dieux Les Maures au-dessus de nos sens et de nos connais-
ont plus de sincéi-ité; ils adorent leurs rois, sances, et nous ne le comprenons jamais
et ne s'en cachent point. Pour les dieux des mieux qu'en l'appelant incompréhensible. 11 Paf.n.
Romains, rien n'est plus honteux que leur ne peut être renlermé dans aucun temple.
» origine. On sait que Romulus lut fait dieu Son nom est Dieu. On a besoin de noms pour
sur un faux serment de Proculus; que Con- distinguer chaque particulier dans une mul-
sus fut adoré comme le dieu des conseils, titude, mais le nom de Dieu suffit pour celui
pour avoir enlevé les Sabiues par une perfi- qui est seul Dieu. Il est donc un et répandu
die honteuse; qu'Hostilius bâtit un temple à partout. Le peuple le confesse, même natu-
la Crainte et à la Pâleur; qu'un autre consa- rellement, en plusieurs rencontres, lorsque
cra la fièvre, et fit des divinités d'Acca et de Tàme se porte, comme par instinct, vers son
Flore, deux fameuses courtisanes. Comme les principe et son auteur. Ainsi l'on dit sou-
Romaius auraient pu objecter qu'ils étaient vent : JNlon Dieu voit tout ; sM plaît à
Dieu !
redevables aux dieux de la grandeur de leur Dieu, et autres choses semblables. Et c'est ce
empire, saint Cyprien prévient cette objec- qui rend les hommes encore plus coupables,
tion, en montrant que l'empire romain, dont de ne vouloir pas recounaitre celui qu'ils ne
le premier roi monta sur le trône par un peuvent ignorer. »
10. parricide, ne s'est accru que par le crime; 6. Il emploie la troisième partie à prouver Qiipjésn»-
que, quoique Régulus eût observé les au- que Jésus-Christ est l'auteur de notre salut, bieiret a"-
» ,.„ ,.., 1,, , 1 1,.
. 1 '6111' 'le no-
gures, il ue laissa pas d'être pris par les en- « Les Juits, dit-il, étaient d abord chéris de trcsoint.
nemis; que César, au contraire, qui, malgré Dieu et grands observateurs de leur religion;
la défense des augures et des auspices se , de là vint que leur état fut florissant et leur
mit en marche avant l'hiver, pour passer eu peuple nombreux. Mais, ayant depuis mé-
Afrique, navigua heureusement et remporta prisé ses lois, ils perdirent la grâce qu'ils
la victoire; que les augures et autres obser- avaient reçue, et ils portent encore aujour-
gua historiarutn omnium scientiu, quorum verborom et non sint et quod unus Deus sd. Cela vient, dit iiœllier,
semuum s/Je/tdore perslrinxit? Hierouyœ., Epiait. 83 de ce que les aucieus donnaient souvent pour Ulre
ad Maynum. aux ouvrages les preuiiers mots du texte. Plusieurs
* Le titre et le commencement de cet ouvrage ne manuscrits portent Epistola. '^L'éditeur.)
60pt pas partout les mêmes. Tantôt on trouve : Quoi
[m* siÈCLE.T CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 274
d'hui un témoiguage vivant et public des of- § 2. — LES TROTS LIVRES DES TÉMOIGNAGES,
A QL'IIUN, CONTRE LES JLIFS.
fenses qu'ils ont commises contre Dieu ; car
ils sont l'ugitifs, va;^aboiids, bannis de leur 1. Quoique le diacre Ponce ne fasse pas
' "^
,.
lps trois
livres à Qui-
pays de leur Etat, sans habitation et sans
et mentlon de cet ouvrage, on ne peut néan- 'in sont de
tous les endroits de la terre, des gens qui de- auteur, puisque saint * Jérôme, saint Augiis- j,'»^'
"" »"
vaient le servir plus fidèlement, et il les a tin, Gennade, saint Fulgence et plusieurs
rassemblés par son Fils, la parole éternelle autres le lui attribuent en termes formels, et
dont tous les Prophètes ont parlé comme du qu'il ne contient rien qui ne convienne à ce
maître du genre humain, la vertu de Dieu, saint martyr. Il l'écrivit étant déjà évêque,
sa raison, sa sagesse et sa gloire. Les Juifs ou du moins prêtre, ce qui paraît en ce
savaient qu'il devait venir, selon les oracles qu'il appelle son ' fils celui à qui il l'adresse.
des Prophètes ; mais, ne prenant pas garde Ainsi on ne peut le mettre avant l'an 247 ou
qu'ds ont parlé de deux avènements, l'un 248 de Jésus-Chi'ist, temps auquel il fut fait
où il devait venir comme homme, l'autre évêque. Cet écrit, qui n'est, à proprement
comme Dieu, ils n'ont pas connu le premier, parler, qu'un recueil d'extraits ou de passages
parce qu'il était accompagné d'humiliation, de l'Ecriture * réduits sous divers titres, est
et ne croient que le second, parce qu'il sera divisé en trois livres. A la tête des deux pre-
glorieux. Par une suite de cet aveuglement, miers, on trouve une préface dans laquelle
ils ont attribué à la magie les miracles qu'il saint Cyprien témoigne qu'il ne les a écrits
faisait, leprenant pour un homme, à cause que pour se rendre à l'instante prière que
de la chair dont ils le voyaient revêtu. Us ont Quirin, nouvellement converti à la foi, lui
même poussé leur fm*eur contre lui jusqu'à avait faite, de lui envoyer quelques instruc-
le faire condamner à mort par Pilate, alors tions tirées de l'Ecriture sainte, afin qu'étant
Pag. 12. gouverneur de la Syrie; mais il prévint lui- délivré des ténèbres et éclairé par des lu-
même ses bourreaux, il rendit volontaire- mières si pures, che-
il put marcher dans le
ment l'esprit, et trois jours après il ressus- min qui conduit à la vie. Nous voyons, par la
cita, donnant par preuves de sa ma-
là des préface du troisième livre, que le Saint le
jesté et de sa puissance. Il apparut ensuite composa encore à la prière du même Quirin,
à ses disciples, leur commanda d'aller par dont il loue la foi et le zèle pour l>ieu; mais
toute la terre prêcher sa parole; et, afin de on ne voit nulle part pourquoi ces livres
faire éclater davantage leur foi et la confes- sont intitulés : contre les Juifs, et on n'en peut
sion qu'ils font de son nom, maintenant qu'd rendre d'autre raison, sinon qu'il fait voir
est dans le ciel, il permet qu'ils soient épi^ou- dans le premier que, les Juifs s'étant rendus
vés par de supplices. Car
diverses sortes indignes des faveurs de Dieu, les chrétiens
leurs souflrances sont comme autant de té- ont été mis en leur place. L'hérésiarque Pe-
moins -qui déposent pour la divinité de Jé- lage 5 recueillit quelques passages de l'Ecri-
sus-Chiist qui, ayant été donné aux hommes ture sur la conduite de la vie, dédiés à Ro-
pour communiquer la vie, a voulu que le sa- main, pour imiter, disait-il, ceux que saint
crifice de la leur fût une prédication encore Cyprien avait dédiés à Quirin, et suppléer •
plus puissante que celle de leur voix. » même à ce qui manquait à son ouvrage.
1 Scultet, toDQ. t Syntagm. Pat., pag. t84, met cet veriere. Aug., iib. tV ad Bonif., cap. 10; Gennadius,
ouvrage entre ceux qu'on doute être de saint Cy- de Script. Eccles., cap. 42; Fulgentius , contra Fabia-
prien mais il n'en donne aucune
; raison. num., cap. 11.
* Cir.:que se imitatorem imo , expletorem operis 2 Obtemperandum fuit, fili charissime, desiderio tuo
beati tnartyris Cypriani scribcrdis ad Quirinum, esse spiritali. Gyprian., Praefat. in Iib. I Testim.
fatealw Pelagius , non meminit se in eodem opère * Saint Cyprien ajoute peu de chose, il est vrai,
dixisse contraria, llle in quinquagesimo-quai'to titulo au texte sacré mais ce peu de cliose dit beaucoup
;
libri tertii ponit, neminern sine sorde et sine peccato et fait de ces passages ramassés un tout bien suivi
esse passe. Tu, Pelagi, e diverso asseris passe hominem et très-propre à produire l'effet que prétendait l'au-
sine peccato Hieronym., advers. Pelag., p. 503,
esse. teur. (L'éditeur.)
tom. IV nov. edit. Mérita et ad Qmrinum Cyprianus •>
Pelagius cum débita certo honore Cyprianum com-
de fiac re absolutissimam sententiam suam proposuit, mémorât, ubi Testimouiorum librum scribem, eum se
oui testimania divina subjungeret, neminern sine sorde asserd imita ri , hoc se dicens facere ad Romanum,
et sine peccato esse : ubi etiam illa testimonia posuit, quod ille fecerat ad Quirinum. Augustin., Iib. IV ad
quibus canfirmatur originale peccatum, qute conantur Bonif., cap. 8, num. 21, pag. 48, tom. X.
istiin nescio quos alios novos sensus pravosque con- • Hieroaym., ubi supra.
272 HISTOIRE GÉNl^RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Ansiyiie Le premier livre des Témoignages est
2. ne doit se glorifier de rien, puisque rien n'est
à^ Témui- distribué en vinfft-tjuatre chapitres. Saint à nous. C'est en Dieu seul qu'il faut mettre
v fait
r.vnripn y
Cyprien Ecn-
n.ir l'autorité des Ecri-
f;nt voir, par sa confiance et sa gloire. Ne rien préférer à
Pag, 16
et sel]!'
" tures, que les Juifs, selon ce qui avait été l'amour de Dieu et de Jésus-Christ. La crainte
prédit auparavant, se sont éloignés de Dieu de Dieu est le fondement de l'espérance et
pour adorer les idoles ;
qu'ils ont perdu de la foi. L'on ne peut aller à Dieu que par
la grâce et la lumière que Dieu leur avait Jésus-Christ, et on ne peut arriver au ciel
données promises pour l'avenir; que les
et sans le baptême. Mais c'est peu d'être bap-
chrétiens, dont la foi a mérité la faveur et tisé et de recevoir l'eucharistie, si l'on ne
la protection de Dieu, qui viennent à lui de fait des bonnes œuvres. Un baptisé perd la
toutes les nations et de tous les endroits de grâce qu'il a reçue, s'il ne conserve son in-
la terre, ont pris la place des Juifs, qui ne nocence. L'Eglise ne * peut pardonner à ce-
peuvent plus pardon de leurs
obtenir le lui (jui a pt'ché contre Dieu, c'est-à-dire con-
crimes, ni se laver du sang de Jésus-Christ tre le Saint-Esprit, en attribuant au démon
qu'ils ont fait mourir, que dans son baptême, les œuvres de Dieu. Lorsqu'on a voué à Dieu
en passant à l'Eglise et en obéissant à ses quelque chose, on doit le lui rendre aussitôt.
lois. La foi est utile à tout; nous pouvons autant
Analyse 3. second livre, composé de trente
Dans le que nous croyons, et obtenir même aussitôt
du livre 11. , . n • , i>- . •
T
chapitres, saint Cyprien traite de 1 incarna- ce que nous désirons, si notre foi est vérita-
' ble; c'est donc notre faute si nous n'éprou-
it seqf tion du Verbe, et montre que Jésus- Christ
est le premier-né, la sagesse, la parole, la vons pas l'assistance de Dieu dans toutes nos
main, le bras et l'ange de Dieu; qu'étant Fils aflliclions. Personne n'est exempt de péchés;
de Dieu, il est né d'une Vierge, atin qu'étant les péchés sont tous effacés dans le baptême.
Fils de Dieu et tils de l'iiomme tout ensemble, Les chrétiens doivent éviter de paraître devant
il put être médiateur entre nous et son Père. un juge païen, pour y vider leurs différends;
Il est le Juste que les Juifs devaient faire ils ne doivent pas non plus contracter ma-
mourir, l'agneau destiné à être égorgé la , riage avec des |.aiens, ni s'entretenir avec des
pierre angulaire qui, selon la prophétie de hérétiques. L'ordre de la chanté demande que
Daniel, deviendra une montagne qui remplira l'on ait plus de soin de ses proches que des
toute la terre; l'époux de l'Eglise de laquelle autres, surtout lorsqu'ils sont chrétiens. Le
doivent naitre des enfants spirituels. Il fait diable n'a point de puissance sur l'homme,
voir aussi que les Prophètes ont prédit sa siDieu ne le permet. Le respect dû aux évè-
passion, sa mort, sa résurrection, son régne ques et aux prêtres demande qu'on se lève
éternel, la vertu attachée au signe de la en leur présence. » .
croix sur laquelle il est mort.
Analyse Lcs maximes établies dans le troisième
^-
§ 3. — TRAITÉ DE SAIXT CYPRIEN : COMMENT LES
duiivreiii. VIERGES DOIVEMT SE CONDUIRE.
j^^^g gyjj|. g^^ nombre de cent-vingt. Elles
°*
concernent les devoirs de notre religion et Le diacre Ponce, faisant l'énumération
et s^qf
CeUes qui suivent sont les plus remarqua- traite de saint Cyprien dans le temps de la
bles. « Lorsqu'on n'a pas le moyen de faii-e persécution de Dèce, dit que * ce saint évê-
beaucoup d'aumônes, la volonté suffit. On que a appris aux vierges, par l'autorité des
* Son posSe remitii in Ecctesia eî qui in Deum de- lib. V, Quœst. in Heptafeucum, pag. 577, tom. III.
liquerit. Cyprianus, lib. III Tesiirn., pag. 53. Il y a C'est donc du péché contre Dieu que parle saint
de la différence, selon saint Augustin, entre pécher Cyprien, c'est-à-dire de l'impénilence finale, ou du
à Dieu et pécher contre Dieu. Pécher à Dieu, c'est péché contre le Saint-Esprit, qui va à l'endurcisse-
pécher et s'en repentir; pécher contre Dieu, c'est ment Qui vero in Ecclesia remiiii peccata non cre-
:
pécher et demeurer daus l'endurcissement Sed et : dens, contemmt tantam divini muneris largitatmi et
illufJ merito ad quœrendum monet utrum et Icoc sii in hac obstinatione mentis diem ctaudit extremum,
peccare Deo quod peccare in Deum. Unde, ait Hett sa- reus est illo ivremissibili peccato in Spiritum Sanc-
cerdos, si in Deum quis peccaverit, quis orabit pro tum, quo Christus remittit peccata. Augustin., in
in
eo? Dicam quid mihi in prœsentia videutur. Peccare Enchirid. ad Lnweut., cap. 83.
in Deum est in lis peccare quœ ad Dei cultum perti- * Finge enim tune tilum, martyrii dignatione trans-
nent.... Peccare autem Domino hi mihi vtdentur non latum; quis emolumentum gratiœ per fldem proficien-
immento dici qui piam poeniterdiam peccati sui nunc tis ostenderet ? Quis virgines ad congruentem pudici-
agunt, ut glorificetur ignoscens Dorninus. Augustinus, ticB disciplinam et haàitum sanctimonice dignum, vtlut
[III* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 273
divines Écritures, à mener une vie conforme recommande aux vierges^ c'est de vivre dans Paj. 67.
à la sainteté de leur état. De là quelques cri- une exacte observation des règles de l'Evan-
tiques ont cru pouvoir conclure que le traité gile. Il leur fait envisager la régularité de
de la Conduite des vierges n'a été fait qu'a- leurs mœurs comme l'appui de leur espé-
près la persécution de Uèce. Mais cette con- rance, le fondement de leur foi, le guide du
séquence n'est pas juste; il est certain que chemin qui conduit au salut. Il relève en- 68.
Ponce ne s'est point appliqué à marquer le suite les avantages de la virginité, dont le
temps des œuvres de saint Cyprien, mais vœu oblige également ceux de l'un et de Tau-
seulement à en donner le détail comme il , tre sexe, et fait voir que les vierges étant la
parait en ce qu'il joint aux écrits que le Saint plus illustre partie du troupeau de Jésus-
a composés depuis la persécution ceux qui Christ, le chef-d'œuvre de la grâce, l'orne-
l'ont précédée, savoir celui dont il s'agit et ment de la nature, un ouvrage parfait et iu-
le livre à * Donat. D'ailleurs, ce que le Saint corruptible, enfin la joie de l'Eglise, elles ne
dit, dans le traité de la Conduite des vierges, doivent rien négliger pour accomplir le vœu
touchant leurs mœurs dissolues, leurs orne- qu'elles ont fait à Dieu de leur corps et de
ments lascifs et impudiques, leurs attache- leur esprit, et pour achever un ouvrage dont
ments pour les spectacles et pour les bains la récompense est le royaume des cieux. Il 69.
publics, où elles ne craignaient point de s'ex- veut que la pureté dont elles font profession
poser à la vue des hommes, marque bien soit telle, que personne n'en puisse douter et
clairement le relâchement qui s'était ghssé qu'elle s'étende à toutes choses; que le luxe
parmi les chrétiens durant la paix dont l'E- des habits ne déshonore pas l'intégrité du
glise jouit pendant plusieurs années sous le corps ; car pourquoi s'ajuster comme si elles
règne de Philippe. Le calme qui suivit la per- avaient des maris ou qu'elles en cherchas-
sécution de Dèce ne dura pas assez pour oc- sent ? Il n'est pas permis à une vierge de se
casionner tous les désordres que saint Cy- parer pour paraître plus belle, ni de se glo-
prien reprend dans cet écrit. Il était déjà rifier de sa beauté, puisqu'elle n'a point de
prêtre lorsqu'il le composa, puisqu'il dit qu'il plus grand ennemi que son corps,
était chargé ' de veiller à la conduite des 3. Comme plusieurs de celles qui étaient 70.
vierges, quoiqu'il n'eût pas encore sur elles riches prétendaient être en droit de se servir
une pleine autorité. Ainsi il faut mettre ce de leurs biens pour s'orner davantage, saint
traité vers l'an 247. Saint Jérôme ^ l'appelle Cyprien leur dit qu'il n'y a de vraies ri-
un livre excellent, et saint Augustin* en rap- cliesses que celles qui nous mènent à Dieu;
porte quelques endroits, pour nous donner dans le baptême, nous avons renoncé aux
des modèles d'une éloquence sainte et ecclé- pompes et aux délices du siècle; l'usage qu'il
siastique. Il reconnaît que saint Cyprien n'y est permis de faire des biens temporels se
a pas employé toute la force de son élo- borne, selon saint Paul, à se vêtir honnête-
quence, et en rend cette raison ^, qu'il ne
il ment modestement ; et, selon saint Pierre,
et
s'agissait point là d'exhorter au vœu de. vir- il beaucoup plus à propos d'orner son
est
ginité celles qui ne l'avaient pas encore fait, cœur que de se parer à l'extérieur d'or et
mais qu'il y tx-aitait des qualités que devaient d'habits précieux. Il ajoute, en s'adressant à
avoir celles qui s'y étaient déjà engagées. celles qui se disaient riches : « Servez-vous
2. La première chose que saint Cyprien de vos richesses pour en faire de bonnes
frenis quibusdatn lectionis dominicœ coerceret? Pont., volumen edidit. Hieronym., Epist. 97 ad Demetriad.,
pag. 4. pag. 796, tom. IV.
• Personne ne doute que le livre à Donat ne soit * De génère temperato est apud Cyprianum virgini-
désigné par ces paroles que nous venons de rappor- Aug., lib. IV de Doctrin. Christ.,
tatis illa laudatio.
ter Quis etnolumentum gratiœ per fidem proficientis
: cap. 21, pag. 84, tom. III.
ostenderet ? 5 Hœc autem propterea in exemplo hujus tempérait
votre salut. De grauds biens sont une grande de Dieu, enfin à se donner mutuellement des
tentation , à moins qu'on n'en fasse un bon exemples de vertu, en sorte que les plus
usage et qu'on ne s'en serve pour racheter âgées servent de maîtresses aux plus jeunes,
ses péchés au lieu de les augmenter. » et que les Sur
jeunes assistent les anciennes.
r«f. 71. 4. Saint Cyprien attribue aux anges apos- la fin, il prie les vierges de se souvenir de
tats d'avoir mtroduit daus le monde l'usage lui lorsqu'elles auront reçu la récompense
ser aucune partie de la tête sans la déguiser. Cypricn écrivit son traité de i' Unité de l'E- l'Egiise, é-
"^5 crit en 251.
72. 11 s'élève conti'e ces usages dont les suites glise. Aussitôt qu'il eut appris le retour des
sont, dit-il, si funestes; et, pour en faire sen- confesseurs de Rome, qui avaient suivi le
tir toute la honte, il se sert de cette compa- schisme de Novatien, il leur fit part de cet
raison.: « Si un excellent peintre ayant tiré écrit, persuadé - qu'ils ne pourraient man-
quelqu'un au naturel et ayant parfaitement quer de le recevoir favorablement, puisqu'ils
exprimé tous les traits de son visage, un autre l'approuvaient déjà par leur conduite, en re-
entreprenait de mettre la main à son tableau tournant à l'unité de l'Eglise. Quoique saint
et de le corriger, cette action vous semblerait Cyprien y ait particulièrement en vue Nova-
une que le premier
insulte, et vous jugeriez tien et Félicissime, qui déchiraient tous deux
aurait raison de s'en fâcher. Cependant vous propre diocèse, il ne laisse pas
l'Eglise et son
croyez pouvoir retoucher l'image que Dieu d'y fournh des armes pour combattre toutes
a formée sans qu'il vous punisse d'une si
, sortes de schismatiques. Le diacre * Ponce
étrange témérité? Je veux que ce déguise- faitmention de ce traité; saint Augustin rap-
ment ne vous rende point impudique à l'égard pelle * une èpître sur l'unité. Il était connu
des hommes; n'êtes- vous pas pire qu'une autrefois * sous le titre de la Simplicité des
adultère, de corrompre ainsi ce qui est à pasteurs, et c'est ainsi que ^ saint Fulgence
Dieu ? Tous ces ornements ne vont qu'à dé- le cite, ajoutant que, dans les anciens exem-
truire son ouvrage et à anéantir la vérité et plaires, il était intitulé: De V Unité de V Eglise
la beauté de la nature. » catholique. Il paraît, en effet, qu'il portait ce
5. Il se plaint de ce que, parmi les vierges, titre dès le temps de saint Cyprien, ou an
il y en avait qui ne rougissaient pas de se moins qu'on ne tarda pas à le lui donner, snr
trouver aux festins des noces, d'y prenrlre l'idée que le Saint en donne lui-même dans
part aux discours qui blessent la bienséance sa lettre cinquante -quatiième, où il dit à
•73. et la pudeur, et de se laver dans les bains pu- Maxime et aux autres confesseurs qui avait
blics, prostituant ainsi aux yeux lascifs des été schismatiques « Nous ' vous avons re- ;
/
[III* SIÈCLE.] CHAPITRE XrV. — SAINT CYPRIEN. 275
présenté Tunité de l'Eglise catholique selon mière ; elle étend ses branches par tout le
notre faiblesse, et j'espère que la lecture de monde et fait couler ses ruisseaux de tous
ce traité ne vous aura pas été désagréable. » côtés; néanmoins c'est un seul tronc, une
iiy»e 2. Il le commence en avertissant tous les seule origine, une seule mère extrêmement
aite.
son Eglise sur un seul, et, quoiqu'après sa l'agneau pascal, que l'on devait manger dans
résurrection donne à tous ses Apôtres une
il une même maison; la colombe, dont le Saint-
puissance égale, néanmoins, pour montrer Esprit ne prit la forme que parce qu'elle est
l'unité, il a établi une chaire et a posé Tori- simple, qu'elle aime la paix et la concorde,
gine de l'unité en la faisant descendre d'un figuraient l'Eglise, la simplicité et la charité
seul. Sans doute, les autres Apôtres étaient qui doivent y régner, l'amour et l'union que
ce qu'était Pierre, ils partageaient avec lui les chrétiens doivent conserver entre eux. Il
un même honneur et une même puissance ; dit ensuite : «Que personne ne s'imagine que 80.
mais le commencement vient de l'unité, afin les bons puissent sortir de l'Eglise le vent :
que l'on reconnaisse que l'Eglise de Jésus- n'emporte point le froment, mais seulement
Christ est une. » Pour prouver cette unité, la paille légère ; et Dieu ne permet qu'il s'é-
saint Cyprien allègue le passage du Cantique lève tous les jours des hérésies et des schis-
des Cantiques, où il est dit que la colombe, mes, qu'afîn que, dès ici-bas et avant le jour
figure de l'Epouse de Jésus-Christ, c'est-à- du jugement, les bons soient séparés des
dire de l'Eglise, est unique; il rapporte en- méchants et le froment d'avec la paille.»
core celui de l'Epître aux Ephésiens, où saint 4. Venant ensuite à Novatien, il s'élève
Paul, marquant le sacrement de l'unité, dit contre son ordination schismatique, où toutes
qu'il n'y a parmi nous qu'un corps, qu'un les formes canoniques avaient été violées, et
esprit, qu'une espérance, qu'un Seigneur, soutient que le baptême qu'il administrait
qu'une foi,qu'un baptême, qu'un Dieu. Puis n'engendrait pas des enfants à Dieu, mais au
78, il ajoute : « L'épiscopat aussi est un et indi- diable; « car, dit-il, il n'est pas possible que
chaque évèque en possède solidai-
visible, et ceux qui sont nés du mensonge puissent re- 81.
rement une portion. L'Eghse, de même, est cevoir les promesses de la vérité. » Comme
une et se répand par sa fécondité en plu- Novatien pouvait s'autoriser de cette parole
sieurs personnes. Comme
y a plusieurs il de Jésus-Christ qui promet de se trouver
rayons du soleil, quoiqu'il n'y ait qu'une lu- partout où il y en aura deux ou trois assem-
mière; comme un arbre a plusieurs bran- blés en son nom, saint Cyprien répond que :
ches, mais un seul tronc ; comme une source 1" il est clair, par les paroles qui précèdent
se divise en plusieurs ruisseaux, mais con- le texte allégué, que Jésus-Christ n'a pas
serve toujours son unité dans son origine : tant égard au nombre qu'à l'union de ceux
ainsi l'Eglise, toute éclatante de la lumière qui le prient « Si deux de vouSj dit-il, sont
:
du Seigneur, répand ses rayons par toute la bien unis sur la terre ; » 2» qu'en cet endroit
terre ^ cependant ce n'est qu'une seule lu- Jésus-Christ parle de son Eglise et de ceux
276 HISTOIRE r.lî:Nr:RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
qui y sont, qui y vivent avec crainte et sim- qu'il n'est pas surprenant que quelques con-
plicité , qui prient unanimement ensemble. fesseurs se soient engagés dans le schisme,
« Or, comment pourrait-on être d'accord parce que la confession du nom de Jésus-
avec quoiqu'un, quand on est désuni d'avec Christ ne met pas à couvert des attaques du
le corps de l'Eglise et de tous les fidèles? démon Autrement, dit-il, les confesseurs
: «
Comment deux ou trois peuvent-ils s'assem- ne tomberaient ni dans l'adultère, ni dans les
bler au nom de Jésus -Christ, lorsqu'il est autres crimes, au nous en voyons avec dou-
certain qu'ils se sont séparés de Jésus-Christ leur tomber quelques-uns; un confesseur,
et de son Evangile ? Quelle paix se promet- quel qu'il soit, n'est ni plus heureux ni plus
tent, de la part de Dieu, ceux qui n'ont point chéri de Dieu que Salomon, qui, après avoir
de paix avec leurs frères? Croient -il s que marché longtemps dans la voie du Seigneur,
Jésus-Christ soit avec eux, lorsqu'ils sont l'abandonna. La confession du nom de Jésus-
ensemble, s'ils n'ont d'union que hors de Christ est le commencement de la gloire,
l'Eglise ? Quand ils souffriraient la mort pour mais elle n'en est pas le couronnement. Il Pas- 85.
la confession de son nom , tout leur sang n'y aura de sauvé que celui qui persévérera
n'est point capable d'effacer cette faute. Le jusqu'à la fin. Les Apôtres ne perdirent pas
schisme est un crime si énorme, que la mort leur foi et leur fermeté pour avoir été aban-
même ne saurait l'expier. Celui-là ne peut donnés par le traître Judas ; ainsi l'infidélité
être martyr qui n'est point dans l'Eglise. de quelques confesseurs ne détruit point la
Celui-là ne peut arriver au roj^aume, qui sainteté et la dignité de tous les autres. » II
abandonne celle qui doit régner... Celui-là conclut ce traité en ordonnant aux fidèles de
ne peut être martyr, qui ne garde pas la cha- fuir les schismatiques, de n'avoir aucun com-
rité fraternelle... Us ont beau être exposés au merce avec eux, d'imiter l'union qui régnait
feu et aux bêtes, ce ne sera pas la couronne parmi les chrétiens du temps des Apôtres.
de leur foi, mais la peine de leur perfidie; ce « Elle est, ajoute-t-il, autant diminuée parmi
ne sera pas une mort glorieuse, mais un dé- nous que les bonnes œuvres qui en sont la
sespoir. Un homme de peut être tué,
la sorte suite. Alors ils vendaient leurs maisons et
Pag. R2. mais il ne x>eut pas être couronné. » La rai- leurs héritages, et en donnaient le prix aux
son qu'en donne saint Cyprien, c'est que les apôtres pour le distribuer aux pauvres. Mais
schismatiques, n'observant pas les comman- maintenant nous ne donnons pas seulement
dements de Dieu, qui tous sont renfermés la dîme de notre revenu; et, au lieu que
dans celui de la charité, ne peuvent point Notre-Seigneur nous commande de vendre
parvenir au royaume des deux, destiné aux notre bien, nous achetons au contraire et
83. seuls observateurs des lois du Seigneur. Il nous augmentons'. »
compare Novatien à Coré, Dathan et Abiron,
qui voulurent usurper sur Moïse et sur Aa- § 5. — TRAITÉ DE CEUX QUI ÉTAIENT TOMBÉS PENDANT
LA PERSÉCUTION.
ron lepouvoir de sacrifier; à Ozias, qui fut
frappé de lèpre pour avoir mis la main sur i La persécution ayant cessé tout à fait
. Traité des
l'encensoir et voulu sacrifier de force contre en Afrique, quelque temps avant Pâques de crit enVac
la loi du Seigneur; aux enfants d'Aaron qui, l'an 251, saint Cyprien revint à Carthage et
pour avoir mis un feu étranger sur l'autel, y assembla un concile pour faire un règle-
tombèrent morts sur la place ; il dit que son ment sur l'affaire des Tombés. Il composa en*
crime est pire que celui de ceux qui sont tom- même temps un traité sur cette matière, et
bés dans la persécution. le lut en ' plein concile. Depuis, il l'envoya
84. 5. Saint Cyprien fait remarquer ensuite à Rome aux confesseurs qui avaient élé enga-
* Saint Cyprien, dit Mœlher, est plus original gîoriosos lœtis conspedibus intuemur, sanctis osculis
dans cet ouvrage que dans tout autre. On regrette adhœrentes, desideratas diu inexplebili cupiditate
seulement que l'auteur ne se soit pas étendu da- complectimur. Ibid.
vantage. {L'éditeur.) ' Propter quod et nos temperamentum tenantes
* On voit, par le commencement de ce traité, que Diu multumque tractatu intcr nos habito justa mode-
eaint Cyprien le composa aussitôt après que la per- ratione agenda libravimus. Quœ omnia penitus potes-
sécution de Dèce fut finie. Pax ecce, di/ectissimi fra- tis inspicere lectis libellis quos hic nuper legeram, et
tres, Ecclesiœ reddita est. Pag. 87. Et lorsque les ad vos quoque légendes pro communi dilectione trans-
confesseurs revenaient du combat Confessores prce-
: miseram, ubi lapsis nec censura deest, quœ increpet,
conio boni nominis claros et virtutis ac fidei laudibus nec medicina quœ sanet. Cyprian., Epist. 54.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 277
faire connaître que, si d'un côté il reprenait leur montre, par l'autorité des Ecritures, qu'il ^»t- 9t.
fortement ceux qui étaient tombés, de l'au- est nécessaire d'abandonner sa patrie et de
tre il ne négligeait pas les remèdes qui pou- perdre son bien plutôt que de se souiller de
*
vaient servir à leur guérison *. Le diacre viandes immolées aux idoles ; la violence et
Ponce, saint * Fulgence et
Augustin, saint * la longueur des tourments rendent favorables
beaucoup d'autres anciens font mention de la cause de ceux qui y ont succombé ; mais
ce traité. Il parait que saint Cyprien le com- rien ne peut excuser ceux qui, dans la seule
posa pour réprimer l'insolence de quelques- crainte d'être tourmentés, ont sacrifié aux
uns de ceux qui, étant tombés pendant la faux dieux.
persécution, voulaient obtenir le pardon de 3. « Je ne dis point cela, continue saint
leur crime sans eu faire pénitence. Cyprien, pour exagérer la faute de nos frè-
\naiyi=e
Traité.
2. H fait voir que si Dieu a éprouvé les res, mais pour les porter davantage à prier
, _ .
, r . 1- j l
chrétiens par le feu des persécutions, c est qu'on la leur pardonne et à en faire une juste
qu il était nécessaire d en venir a des remèdes satisfaction. Un prêtre de Dieu ne doit pas
violents pour réveiller leur foi languissante et tromper les chrétiens par une complaisance
endormie une longue paix avait corrompu
: pernicieuse, mais les guérir par des remèdes
la discipline ; le zèle de la reUgion et la pu- salutaires. » Il se rencontrait néanmoins des
reté de la foi étaient éteints dans les prêtres gens assez téméraires qui, contre la vigueur
et dans les ministres de l'Eglise, et il n'y de l'Evangile, contre la loi de Dieu et de Jé-
avait plus ni charité, ni règlement de mœurs sus-Christ, accordaient la paix et la commu-
parmi les chrétiens. « Etant coupables de si nion à ces sortes de pécheurs, sous le nom
grands péchés, ajoute-t-il, que ne méritions- spécieux de compassion et de miséricorde.
89. nous point de souffrir? Cependant, aux pre- Saint Cyprien montre que cette prétendue 91.
mières menaces de l'ennemi, une partie de miséricorde est une véritable cruauté ; qu'une
nos frères ont trahi leur foi ; et, sans attendre telle paix est pernicieuse à ceux qui la don-
que l'effort de la persécution les renversât nent et infructueuse àceux qui la reçoivent;
par terre, ils s'y sont jetés d'eux-mêmes. Ils et qu'avant que les tombés aient expié et
n'ont pas attendu qu'on les interrogeât pour confessé publiquement leur crime, avant que
renoncer Jésus-Christ, ni qu'on se saisît d'eux leur conscience ait été purifiée par le sacri-
pour brûler de l'encens sur les autels. Plu- fice ' et l'imposition des mains de l'évêque,
90.
commettre un sacrilège détestable. Des en- corder le pardon; autrement ce pardon ne
fants ont été portés aux autels par leurs pro- serait pas une paix, mais une guerre. « Nous
pres pères, et ont perdu (dans l'intention ' croyons, à la vérité, que les mérites des mar-
de leurs pères) la grâce qu'ils avaient reçue tyrs ^ et les œuvres des justes peuvent beau-
un moment auparavaut. » C'est surtout con- coup auprès du souverain Juge ; mais ce ne
tre ceux qui étaient tombés de cette sorte. sera que pour le jour du jugement, lors-
1 Idem, ibid. — * Quis doceret pœnitentiam lapsosf pas pour rendre ces enfants coupables, chacun de-
Pont., in Vita, pag. 5. vant répondre de son péché Isto sensu recte intel-
:
' Quoniam beatus Cyprianus in epistola de Lapsis, ligi potest quod scripsit beatissimus Cyprianus in
cum deplorando et arguendo multa commemoraret epistola de Lapsis, cum eos qui tempore persecutionis
Hœc omnino non nominal. August., lib. de Fide
ibi idolis immolaverant, arguit dicens: Ac ne quid dees-
et op., cap. 19, pag. 185, tom. YI. set, etc. Amiserunt, dixit, quantum attinuit ad illo-
* Cyprianus in epistola quoque de Lapsis, quisquis rurn scelus a quibus amitlere coacti sunt. Amiserunt
volet, hœc inserta reperiet. Videt ille corda singu- in eorum mente ac voluntate, qui in illos tantum faci-
lorurn. Fulgentius, lib. II ad Trasimundum , cap. 17. nus commiserunt. Nam si in seipsis amisissent , re-
* Ac ne quid deesset ad criminis cumulum, infantes mansissent utique sine ulla defensione damnandi.
quoque parentum manibus vel impositi, vel atlracti ; Quod si sanctus Cyprianus arbitraretur, non eorum
amiserunt parvuli quod in primo statim nativitatis defensionem continua subjiceret. Augustin., Epist. 98
exordio fuerant consecuti. Cyprian., de Laps., pag. 90. ad Bonifac. episcopum, pag. 264, tom. II.
Saint Augustin dit qu'il faut entendre cet endroit en ' La réconciliation des pénitents se faisait pendant
telle sorte, que, selon lui, les enfants portés aux autels le sacrifice de la messe.
par leurs pères, ne perdent pas effectivement la grâce •
C'est que quelques-uns des martyrs avaient
du baptême, et qu'ils ne la perdent que dans le des- ordonné, en mourant, qu'on réconciliât ceux qui
sein et l'intention de leurs pères. Ce qui ne suffit étaient tombés, comme il parait par la lettre 27.
278 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
qu'après la fin du monde les chrétiens com- désordre, à cause de la persécution, laissèrent
paraîtront tous devant le tribunal de Jôsus- chez eux une petite fille qui était encore à la
Christ '. » mamelle, et que sa nourrice porta aux ma-
Pg w. A. SaintCyprien ne refusait pas néanmoins gistrats ,
qui lui donnèrent du pain trempé
d'exécuter ce que les martyrs ordonnaient en dans du vin, parce qu'elle était encore trop
mourant, si, toutefois, ce qu'ils ordonnaient petite pour manger de la viande. Quelque
La plupart avaient alors com-
était léfçitimc. temps après, la nourrice l'ayant remise entre
mandé (ju'on réconciliât ceux qui étaient les mains de sa mère, celle-ci, ne sachant
tombés. Mais le saint évêque ne crut pas de- rien de ce qui s'é(ait passé, l'apporta avec
voir obéir, parce qu'il n'était pas juste d'ab- elle, lorsque nous offrions le sacrifice. Mais
pénitence. D'ailleurs^ il ne croyait pas que les des saints, ne put supporter notre prière, et,
martyrs obtinssent toujours de Dieu Tindul- pleurant et se tourmentant comme si on lui
gence qu'ils promettaient aux tombés. Moïse eût donné la question, elle témoignait ce qui
pria pour les péchés du peuple; cependant lui était arrivé par tous les signes qu'elle
il n'en obtint pas le pardon. Notre-Seigneur pouvait donner en un âge si tendre. Quand
dit dans l'Evangile : Celui qui m'aura con- toutes les cérémonies furent achevées et que le
fessé devant les hommes, je le confesserai diacre lui présenta le calice à son tour, alors,
devant mon Père qui dans les deux , et je
est poussée d'un instinct que Dieu lui donna, elle
renoncerai celui qui m'aura renoncé *. S'il se mit à tourner la tète, serrer les lèvres et
ne renonce pas celui qui le renonce, il ne rejeter le calice. Le diacre, néanmoins, per-
confessera pas non plus celui qui l'aura con- sista et lui fit boire de force le sacrement
fessé : l'Evangile ne peut pas subsister pour du calice; mais aussitôt le cœur lui souleva
une chose et n'avoir pas lieu pour l'autre. et elle vomit. L'eucharistie ne put demeurer
Il faut que toutes deux soient vraies ou que dans un corps et une bouche infectés. Une
toutes deux soient fausses. Si ceux qui re- autre plus âgée, qui avait commis le même
nient Jésus-Christ ne sont point coupables, crime, s'étant présentée pour recevoir l'eu-
ceux qui le confessent ne seront point récom- charistie, lesang du Seigueur demeura entre
pensés. Mais si la foi, qui est victorieuse, son gosier et son estomac, en sorte qu'après
remporte des couronnes, il faut que l'infidé- plusieurs tremblements, elle tomba morte sur
lité vaincue souffre des supplices. Que per- la place. Une autre femme ayant ouvert avec
sonne donc ne déshonore la dignité des mar- des mains impures l'armoire où elle avait
tyrs. Ceux qui ont accompli les commande- mis le Saint du Seigneur,
en sortit une il
ments de Dieu ne peuvent porter les évoques flamme qui l'empêcha d'y toucher; et un
à les violer. homme, souillé du même crime, ayant eu la
94, 5. Ensuite il exhorte les tombés à faire de hardiesse, après la célébration du sacrifice,
dignes fruits de pénitence, et, pour leur ins- d'en prendre sa part avec les autres, ne put
pirer une salutaire confusion, il leur remet ni manger ni toucher le Saint du Seigneur,
devant les yeux les châtiments dont Dieu et trouva qu'il n'avait que de la cendre dans
avait puni quelques-uns d'entre eux aussitôt la main. »
après leur crime. L'un de ceux qui étaient 6.Indépendamment de ceux qui avaient pag.95.
volontairement montés au Capitole pour re- sacrifié aux idoles sans y être contraints par la
nier Jésus-Christ, devint muet aussitôt après violence des tourments, il y en avait d'autres
l'avoir renié. Une femme, étant dans le Ijain, qui, n'ayant point sacrifié, donnaient néan-
devint possédée de l'esprit immonde, qui l'a- moins ou recevaient des pom* attester
billets
gita de telle sorte, qu'elle tomba et se coupa qu'ils l'avaient fait. C'est pourquoi on les
avec les dents la langue dont elle s'était servi appela libellatiques. Saint Cyprien soutient
pour manger des viandes détestables ou pour qu'ils sont coupables et qu'ils ont besoin de
prononcer des paroles sacrilèges. « Mais écou- faire pénitence. « Cette protestation que l'on
tez, ajoute saint Cyprien, ce qui est arrivé fait dans ces billets, dit-il, est la déclaration
en ma présence et dont je suis témoin : un d'un chrétien qui se désavoue pour ce qu'il
père et une mère, s'enfuyaut en hâte et en est ; c'est avoir commis un crime que de con-
' Tout ce que prétend saint Cyprien, c'est qu'on personne en cette vie qui n'ait fait pénitence.
ne peut, en vue des mérites des martyrs, absoudre > Luc. xu, IS.
[Uf SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT GYPRIEN. 279
fesser qu''on l'acommis; et puisqu'il est écrit ses écrits, et "exhorte Valentin et les au-
qu'on ne peut servir deux maîtres *, le libella- tres serviteurs de Dieu à le lire , pour y ap-
tique n'a pas servi Dieu, puisqu'il a servi un prendre principalement que nous devons de-
liomme, puisqu'il a obéi à ses édits, puisqu'il mander à Dieu la grâce d'accomplir ce qu'il
a exécuté ses commandements. Je veux qu'il nous commande. Il le lut * lui-même aux
soit moins coupable, en ce qu'il ne s'est point moines d'Adrumet, et leur conseilla de le
présenté devant les idoles, en ce qu'il n'a hre avec soin, pour s'instruire sur la néces-
point profané la sainteté de la foi aux yeux sité de la grâce et de la prière; il en * con-
d'un peuple qui s'en moque, et en ce qu'il seilla encore la lecture à saint Prosper et à
n'a point souillé ses mains ni sa bouche par Hilaire, les assurant qu'ils y trouveraient le
des sacrifices funestes et des viandes crimi- contre-poison que Dieu préparait dès-lors
nelles cela peut lui faire obtenir plus aisé-
: contre le venin de l'hérésie pélagienue. Saint
ment pardon de son crime ; mais cela ne
le Hilaire n'estimait pas moins ce traité de saint
Pag:. 96. le peut exempter de crime. » Il les exhorte à Cyprien. Il paraît même qu'il le regardait
*
confesser leur faute et à faire une sincère comme une pièce achevée, puisqu'il dit
pénitence, afin que le pardon, qui leur sera que l'explication que Cyprien, de sainte mé-
accordé par les prêtres, soit agréable à Dieu. moire, avait donnée de l'Oraison domini-
98. «Pensez-vous, leur dit-il, pouvoir si tôt fléchir cale, le délivrait de la nécessité de traiter la
le Seigneur, après l'avoir renié si lâchement? même matière. Le diacre Ponce ' le met
Il faut le prier continuellement, passer les après le livre de l'Unité de l'Eglise, et dit
jours et les nuits à pleurer et à soupirer, que ce saint évêque y enseigne aux enfants
coucher sur la cendre, se couvrir d'un cilice, de Dieu la loi de la prière évaugélique. On
s'occuper de bonnes œuvres, faire beaucoup croit- que saint Cyprien le composa après la
d'aumônes. Dieu peut avoir égard à ce que persécution de Dèce, vers la fin de l'an 251
les martyrs demandent et à ce que font les ou au commencement de 252, dans un temps
prêtres pour de tels pénitents. Celui qui sa- où il gouvernait en paix son Eglise.
tisfera ainsi au Seigneur, tirera de sa chute 2. Il y a trois parties dans ce traité. Dans Analyse
(le ce Traité.
même, avec l'aide de Dieu, un accroissement la première, saint Cyprien fait voir que l'O-
'^^'
de courage et de foi, réjouira autant l'Eglise raison dominicale est la plus excellente, la
qu'il l'avait attristée, et ne méritera pas seu- plus spirituelle et la plus efficace de toutes
lement le pardon, mais la couronne *. » les prières, puisque c'est Jésus-Christ même
qui nous donnée ^, afin que nous nous en
l'a
§ 6. — TRAITÉ DE l'oraison DOMINICALE.
servissionspour parler au Père lorsqu'il di- :
^énit'vers"
Cyprien est celui qu'il composa pour exph- adorateurs adoreraient le Père en esprit et
ran252.
quer l'Oraison dominicale. Saint Augustin en vérité, il avait en vue cette admirable
le cite avec éloge eu plusieurs endroits de prière qu'il devait laisser à ses disciples :
ficat, ut ostendat tamen ea quœ implenda jubentur in ante quoi annos, contra ea quœ futura erant pela-
lege, in oratione esse poscenda. Quod utique vanissime gianorum venena quale sit antidotum prœparatum, etc.
fieret, si ad illa agenda sine divino adjuforio volun- Augustin., de Dono perseverantiœ, cap. 2, p. 823, t. X.
ias humana sufficeret. Augustin., lib. de Lib. arbit., 6 De orationis autem sacramento, necessitate nos
cap. 13, tom. X, pag. 731. commentandi Cyprianus, vir sanctœ memoriœ, libéra.'
4 Legimus librum beatissimi Cypriani de
eis etiam vit. Hilar., Comm. in Matth., cap. 5.
cuerit, omnia quœ ad mores nostros pertinent quibus evangelicœ legis precem doceret ? Pout., pag. 5.
rede vivimus, a Pâtre nostro qui in cœlis est, esse 8 Jeau, IV, 23.
280 HISTOIRE gi-'ni;:rale des auteurs ecclésiastiques.
a Ce n'est pas seulement une ignorance, n'ayant qu'un'seul père, qui est au ciel. Nous
ajoute-t-il, mais une faute * de prier autre- l'appelons 7iofre Père, c'est-à-dire le père de
ment qu'il nous l'a enseigné , puisqu'il re- tous ceux qui, étant sanctifiés par lui et re-
proche aux Juifs • (le rejeter le commande- nouvelés par la naissance spirituelle du bap-
ment de Dieu pour établir leur tradition : tême, commencent à devenir ses enfants.
prions comme notre Maitre et notre Dieu Nous disons ensuite Que votre nom soit sauc-
: pag. loî.
nous l'a appris. C'est une belle et une agréa- ti/ié, non que nous souhaitions que Dieu soit
ble prière que celle que nous adressons à sanctifié par nos prières, mais nous lui de-
Dieu, comme venant de lui, que celle qui mandons de nous faire la grâce de conserver
frappe ses oreilles par des paroles que Jésus- la sainteté que nous avons reçue au baptême.
Christ lui-même a formées. Car, puis<ju'il C'est dans le même sens que nous lui disons:
nous assure que le Père nous accordera
' Que votre royaume arrive ; car, par ces paroles,
tout ce que nous lui demanderons en son nous ne demandons point que Dieu règne,
nom, il nous l'accordera beaucoup plutôt, mais l'avènement du royaume que Dieu nous
si nous ne le lui demandons pas seulement a promis et qui nous est acquis par le sang
en son nom, mais par ses paroles mômes. » et les souffrances de Jésus-Christ, afin qu'au
Saint Cyprien veut que l'on prie avec beau- lieu d'être les esclaves du siècle, nous ré-
coup de respect et de retenue, en s'efforçant gnions avec Jésus-Christ régnant, comme lui-
de plaire à Dieu, aussi bien par cette conte- même nous l'a promis. Nous ajoutons Que :
nance que par le ton de la voix. Il croit qu'il votre volonté soit faite en la terre comme au
convient mieux à la foi et à l'esprit de l'E- ciel non pas afin que Dieu fasse ce qu'il
*';
vangile de prier en secret et en des lieux veut, mais afin que nous-mêmes puissions
retirés. Mais lorsque l'on s'assemble avec faire ce qui lui plaît. Or, pour cela, nous
révêquc, pour célébrer avec lui les divins avons besoin du secours de Dieu, parce que
mystères, il dit qu'on doit éviter le bruit con- personne n'est fort par ses propres forces,
fus de voix tumultueuses, et adresser mo- mais par la bonté et la miséricorde de Dieu.
destement ses prières à Dieu. Nous demandons que la volonté de Dieu soit
Pag. 100. 3. La seconde partie contient l'explication faite en la terre comme au ciel,parce que
de l'Oraison dominicale, a Nous ne disons de l'un et de l'autre dépend la consommation
pas, remarque saint Cyprien, Mon Père qui de notre salut. Comme nous avons un corps
êtes dans les deux, ni Donnez-moi aujourd'hui qui a été pris de la terre, et une âme qui tire
mon pain, parce que notre prière est • une son origine du ciel, nous sommes terre et
prière publique et commune, et que, quand ciel tout ensemble; et nous prions Dieu que io3.
nous prions, ce n'est pas pour un seul, mais sa volonté s'accomplisse en l'un et en l'autre,
pour tout le peuple fidèle, qui ne forme qu'un c'est-à-dire en notre corps et en notre es-
vie, qui est Jésus-Christ, ou à la lettre, du le monde ou le démon peut tramer contre
pain matériel qui sert de nourriture à notre notre salut. »
corps. Nous demandons que ce pain nous 4. Dans la troisième, partie, saint Cyprien p»jf. i07.
soit donné tous les jours, de peur que nous, traite des conditions de la prière. Il ensei-
qui sommes incorporés en Jésus -Christ et gne qu'on doit y être assidu, à l'exemple
: 1°
qui recevons tous les jours Teucharistie, ne de Jésus-Christ qui passait les nuits à prier,
soyons séparés du corps de Jésus- Christ, non pour lui-même, puisqu 'étant innocent
étant empêchés par quelque faute considé- iln'avait rien à demander, mais pour nos
rable de participer au pain céleste. L'on peut péchés; 2° qu'il faut prier de tout son cœur,
encore entendre ces paroles de cette sorte : bannir toutes les pensées charnelles et sécu-
Après avoir renoncé au monde par la foi, lières, et songer uniquement à ce que nous
à ses pompes et à ses richesses nous ne de- , demandons. « C'est pour cela, dit-il, que le
mandons plus que la nourriture nécessaire prêtre, avant de commencer l'oraison, y pré-
pour chaque jour, sans étendre même nos dé- pare les fidèles par ces paroles Elevez vos :
sirs jusqu'au lendemain. Ensuite nous prions cœurs au Seigneur; et que le peuple répond :
^^g
Pag. 105. pour nos péchés, en disant à Dieu Remet- : Nous les avons élevés au Seigneur; » 3" que
tez-nous nos dettes, comme nous les remettons à nous devons accompagner nos prières de
ceux qui nous doivent : paroles qui nous en- bonnes œuvres, surtout de l'aumône, à l'imi-
seignent deux vérités, l'une que nous som- tation de Tobie et de Corneille le centurion,
mes tous pécheurs, l'autre que nous pou- qui méritèrent d'êti^e exaucés, parce qu'ils
vons, par le moyen de la prière, obtenir le accompagnaient leurs prières d'œuvres de
pardon de nos péchés. Ilque Jésus-
est vrai charité; 4° qu'il n'y a point d'heures du jour
Christ ajoute une condition, laquelle est que où nous ne devions prier Dieu, et que nous
nous pardonnions à ceux qui nous ont offen- ne devons pas en excepter la nuit; car il n'y
sés. Car Dieu veut que nous vivions en paix a point de nuit pour les véritables chrétiens
dans sa maison, et que ceux qui ne sont qui sont toute lumière eu Jésus-Christ. Aussi
animés que d'un même esprit n'aient aussi prétend -il que c'est au nom de l'Eglise et
qu'une même volonté. C'est pour cela qu'il des fidèles que l'Epouse dit dans le Cantique
ne reçut point le sacrifice de Cain qui était ,
des Cantiques : « Je dors, mais mon cœur
mal avec son frère , et qu'il défend de s'ap- veille *. » Ilne laisse pas de marquer en
procher de l'autel dans un esprit de haine. particulier, pour heure ordinaire de la prière,
Il veut encore que nous ajoutions Et ne : celles de tierce, de sexte et de noue. Il ajoute
permettez pas que nous tombions en tentation. qu'il faut encore prier le matin, afin de cé-
Ce qui montre que notre ennemi ne peut rien lébrer la mémoire de la résurrection de Jé-
contre nous, si Dieu ne le lui permet. Or, sus-Christ, et sur la fin du jour, quand le so-
Dieu ne donne ce pouvoir au démon que leil se couche, pour demander au vrai soleil,
lorsque nous péchons, et il ne le lui donne qui est Jésus -Christ, qu'il hâte son avène-
que pour nous punir ou nous éprouver. Gela ment, afin de nous donner la grâce de la vie
nous fait encore souvenir de notre faiblesse éternelle .
et nous avertit de ne nous rien attribuer et
§ 7. — TRAITÉ DE LA MORTALITÉ.
de ne point croire que, lorsque nous confes-
sons Jésus-Christ, la gloire nous en soit due. 1. La grande peste qui ravagea l'Empire, Traité de
Enfin l'Oraison dominicale finit par une de- sous Gailus, donna lieu à saint Cyprien de 'é^n'yers'
1 . • r 1 l'an iâi ou
mande qui comprend en abrégé toutes les
.
autres; car, lorsque nous demandons à Dieu titre : De la Mortalité, ou De la Peste. La per-
de nous déhvrer du mal, il ne reste plus rien sécution durait encore , et l'on faisait ' des
à lui demander. Munis de sa protection, violences aux chrétiens pour les obliger à ,
nous n'avons rien à redouter de tout ce que renoncer à leur religion, en jurant * par le
saint Cyprien, qu'à nous laisser une idée de terde posséder une joie qui ne pourra plus
chacun de ses ouvrages. D'ailleurs, dans lo nous être ravie » !
traité de la Mortalité, il n'est fait mention 3. Il fait voir ensuite que c'était sans rai- Pag. H2.
que de la peste et dans le livre à Démétrien,
,
son que quelques-uns s'étonnaient que la
le Saint témoigne ' que, lorsqu'il l'écrivait, peste attaquât aussi bien les chrétiens que
l'Empire encore désolé par un second
était les païens : « Comme si le chrétien, dit-il,
fléau, savoir par la famine, qui, comme l'on n'avait embrassé la foi que pour s'exempter
sait, est une suite ordinaire de la peste, parce du mal et vivre content ici-bas, et qu'il ne
que les hommes étant morts, la terre de- au contraire, qu'il soufî'rît en ce
fallût pas,
meure que des ronces
inculte et ne produit monde pour être heureux en l'autre. Nous
et des épines. Saint Jérôme ' cite le traité de avons part comme eux â tous les accidents
la Mortalité , et saint Augustin en rapporte de cette y a plus un chrétien doit
vie. Il :
plusieurs extraits dans le * livre II contre Ju- ici que les autres, parce qu'il a
plus souffrir
lien, dans l'ouvrage
à Boniface contre les
* davantage à combattre contre le démon. »
deux lettres des Pélagiens, dans le livre ° de Ce que saint Cyprien prouve par plusieurs
la Prédestination des Saints et dans ' quel- passages de l'Ecriture et par l'exemple de
ques autres de ses éci'its. Il est encore cité Job, de Tobie, d'Abraham et des Apôtres qui
par Jornande ^, évêque de Ravenne. ont souffert avec courage les fâcheux événe-
Analyse 2. Le but de saint Cyprien, dans cet ou- ments de cette vie. « Ces grandes évacua- dl3.
(lece Traité.
vrage, est de consoler et de soutenir ceux tionsqui nous abattent, ajoute-t-il, ces
Pag. MO.
d'entre les fidèles qui, par un manque de foi, cruelles inflammations de gorge qui nous
ou par l'amour de la vie, ou par la faiblesse altèrent; ces fréquents vomissements, ces
de leur sexe, ou, ce qui est encore pis, par yeux étincelants et pleins de feu, ces mem-
l'ignorance de la vérité, paraissaient ébran- bres pourris qu'il faut couper, ce venin froid
lés à la vue de ce fléau de la justice divine. de la maladie qui nous fait perdre l'usage
Il leur représente que Jésus -Christ ayant des jambes, de l'ouïe ou de la vue, tout cela
prédit les diverses calamités qui affligent le ne sert qu'à exercer notre foi. Que celui-là
monde, ne doivent pas être surpris de les
ils appréhende de mourir, qui n'est point régé-
que craindre la mort, c'est
voir arriver; néré par l'eau ou par l'Esprit, qui n'est pas
manquer de foi et d'espérance, puisque c'est marqué du signe de la croix. La mortalité
le temps d'aller régner avec Jésus -Christ; est une peste pour les Juifs et pour les Gen-
que le juste Siméon, après avoir eu entre ses tils ; mais c'est une heureuse sortie pour les
m. bras le Christ du Seigneur, souhaita de mou- serviteurs de Dieu. Cette peste nous prépare
rir, nous faisant connaître par là que les ser- au martyre, en nous apprenant à ne point
* Quod autem
crebrius bella continuant, quod steri- ac pêne omnibus qui ecclesiasticas litteras amant lau-
litas et famés sollicitudinem cumulant, quod sœvienti- dabiliter notum. Augustin., lib. de Prœdesiinat.
bus morbis valeludo frangitur, quod humanum genus Sanct., cap. 14, pag. 807, tom. X.
^
luis populatione vastatur, et hoc scias esse prœdictum. August., lib. de Catechismo, cap. 1, et lib. I ad
Cyprian., lib. ad Demetrianum, pag. 130. Prosper., cap. 14.
* Pestilens morbus multaa totius orbis jirovincias oc- * Jornand., de Gothorum origine, cap. 19, pag. 638
cupavit, ut Çypriatti de Mortalitate testis est iiùçr. edit. Amstelodam., au. 1655.
[iii^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT GYPRIEN. 283
craindre la mort. Ce n'est pas un fléau pour vous que je fasse? » « C'est ainsi, ajoute —
nous, mais un exercice qui nous fait rempor- saint Cyprien, que Notre -Seigneur, voyant
ter la gloire de la constance et nous dispose que de souflrir remporte sur le
la crainte
à recevoir des couronnes. » désir que nous avons d'aller à lui, ne consent
Pag. H4. 4. Saint Cyprien répond aux vains pré- pas à nos désirs pour notre avantage. » Il
,
textes dont quelques-uns se servaient pour finit ce traité par ces paroles remarquables :
autoriser leur crainte et leur douleur. Les « Notre patrie, c'est le paradis ; nos parents Pag. ne.
uns disaient que leur affliction était, après sont les patriarches pourquoi donc ne cou- :
s'être préparés à confesser le nom de Jésus- rons-nous poiut voir notre patrie et embras-»
Christ et s'être disposés au martyre, de se ser nos frères? Grand nombre de nos amis,
voir privés de ce bonheur par la mort. D'au- de nos frères de nos enfants nous y atten-
,
très apportaient pour raison de leur regret, dent, assurés de leur salut et encore en peine
le mérite et la probité des parents ou des pour le nôtre. Quelle joie pour eux et pour
amis qu'ils avaient perdus. Le saint évêque nous de nous voir et de nous embrasser!
dit aux premiers que, le martyre étant une Quel plaisir de jouir d'une vie éternelle sans
grâce de Dieu, ne peuvent pas dire qu'ils
ils être traversés de la crainte de la mort d'être !
l'ont perdue, puisqu'ils ne savent pas s'ils toujours et souverainement heureux! C'est là
méritaient de la recevoir; qu'au surplus Dieu, qu'est le chœur glorieux des apôtres, l'au-
qui sonde les cœurs et découvre les choses guste assemblée des patriarches, la multitude
les plus cachées, les récompensera de leur innombrable des martyrs, la troupe triom-
résolution et de leur courage ; car Dieu ne phante des vierges, la bande sacrée des per»
115. demande point notre sang mais notre foi. Il
,
sonnes charitables qui ont soulagé les mi-
dit aux seconds que nous ne devons pas pieu- sères des pauvres et envoyé leurs trésors
rer comme perdus ceux de nos proches ou daus le ciel. Hàtons-nous de les aller trouver
de nos amis qui ne font que passer de cette et d'être bientôt avec Jésus-Christ. Qu'il voie
vie à la vie éternelle, mais nous réjouir au dans notre cœur ces pensées et ces désirs;
contraire de leur départ, assurés, par la foi, car plus nous désirerons de le voir, plus
de la vérité des promesses de Notre-Seigneur. notre récompense sera grande '. »
Il ajoute que Dieu lui avait commandé, par - „
8 8. — DE L EXHORTATION AU MARTYRE.
des révélations fréquentes et manifestes, de
prêcher pubhquement qu'il ne fallait pas 1 Le traité qui a pour titre
. Exhortation :
l'Exhorta-
pleurer ceux que Dieu avait appelés de ce «w martyre, est mis dans l'édition d'Oxford
monde, ni s'habiller de noir, à cause d'eux, immédiatement après celui de la Mortalité.
puisqu'ils ont déjà reçu des robes blanches; Il paraît, en effet, qu'ils out été écrits à peu
ni donner sujetaux païens de nous reprocher prés dans le même temps, c'est-à-dire sous
de pleurer comme perdus et anéantis ceux que la persécution de Gallus ^. 11 y a néanmoins
nous disons être vivants avec Dieu. Il rapporte quelques critiques * qui le mettent après le
aussi une vision qu'eut un évêque qui, étant livre de la Patience,
composé sous l'empire de
fort malade, avait demandé à Dieu qu'il lui Valérien; d'autres *qui le placent sous Dèce.
plût encore le laisser en ce monde. Un jeune Ce qui nous porte à croire que saint Cyprien
homme *, plein de majesté et de lumière, se le fit dans le temps que la persécution se
présenta à lui et lui dit, d'un ton qui témoi- renouvela, sous Gallus, l'an 232, c'est ce
gnait assez son indignation : « Vous appré- qu'il « y dit de la fin du monde et de la ve-
hendez la persécution, et vous ne voulez pas nue de l'Antéchrist, qu'il croyait proche; car
néanmoins sortir de ce monde que voulez- : il parle de la même manière '
dans sa lettre
* Posside rapporte cette histoire tout entière * Tillemont , tom. IV, pag. 166.— ^ Baron., ad
dans la Vie de saint Augustin qui s'en servait quel- an. 255, num. 45.
quefois pour fortifier ceux qui craignaient trop la Persecutionum et pressurarum pondus incumbit, et
«
mort. Possid., in Vita August., cap. 27. in fine algue consummatione mundi Aniichristi tem^ ,
pour ainsi dire, qu'un recueil de passages de tre second du premier livre des Machabées.
l'Ecriture, divisé eu douze titres ou chapi- Il montre ensuite qu'après avoir été rachetés
tres, et disposé de la même manière que les et vivifiés par le sang de Jésus-Christ, nous
livres des Témoignages à Quirin. Le Saiut n'y ne lui devons plus rien préférer, mais nous jag.
ajoute que peu de chose aux paroles du texte devons prendre garde de ne pas retomber
sacré, laissant à Fortunat ou â ceux qui li- sous la puissance du démon; nous devons ^gs.
ront cet écrit, d'étendre la matière, s'ils le persévérer dans la foi et dans la vertu , sans
jugent à propos. Saint Cyprien en parle en appréhender les persécutions, dans la con- ^j*.
ces termes : « Je vous envoie, dit-il dans la fiance que Dieu est plus puissant pour nous
préface à Fortunat *, non une robe toute protéger que le diable pour nous vaincre.
faite, mais la laine même et la pourpre de « Il a été prédit, ajoute saiut Cyprien, que
l'Agneau qui nous a rachetés et vivifiés. Vous le monde nous haïrait et qu'il exciterait
vous en ferez un vêtement à votre volonté, des persécutions contre nous ce qui ne doit :
que vous aimerez d'autant mieux que vous point paraître étrange à des chrétiens, puis-
l'aurez fait vous-même. Je vous supplie aussi que, dès le commencement du monde, les
d'en faire part à nos autres frères, afin qu'ils gens de bien ont soufl'ert de la part des mé-
* Le nom d'Hilaire ne se trouve que dans l'édition ' Baluze et D. Maran le croient sans hésiter de
d'Erasme et de Marianus les autres lisent Cyprien
, saint Cyprien. {L'éditeur.)
ainsi que portent tous les manuscrits, selon la re- * Cyprian., Praef. ad lib. de Exhort. mart., p. 118.
marque de Dom Martianay. Nulla fide, dit-il, hic pro * L't quantum sufficit medioo'itas nostra auxilio di-
Cypriano Hilavium obtrudunt Erasmi et Mariant edi- arma ac munimenta
vines inspirationis instructa, quasi
iiones, cum omnes manuscripti codices, nullo excepta, quœdam pugnaturis fratribus de prœceptis dominicis
veram ac genuinam retineunt lectionem. Quorum Cy- promerentur. Cyprian., ibid., pag. 117.
prianus de sejttenario, id est, impari numéro disserens, 6 Necnon et illud consilium utile ac salubre pros-
quœ et quanta dixerit ad Fortunatum, liber illius pexi, in exfiortutione tam necessaria quœ mai-tyres fa-
testimonio est. Martianay, not. in Epist. 30; Hiero. cial, amputandas esse verborum nostrorum moras ac
nym., pro libris adversus Jovinianum , pag. 241, tarditates,atque ambages sermonis humant suhtrahen-
tom. IV. das; ponendo illa sola quœ Deus loquitur, quibus ser-
' Quorum Cyprianus de septetMrio disserens , etc., vos suos ad martyrium Christus hortatur. Cyprianus.,
ut supra. ibid., pag. 118.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 285
Vf- 125. chants. » Ce qu'il prouve par ce qui est dit ce Démétrien était proconsul d'Afrique; mais,
dans l'Ecriture d'Abel, de Jacob^ de Joseph, s'il Cyprien lui eût-il parlé
l'eût été, saint
de David, d'EUe, du grand-prêtre Zacharie, en ces termes ? « Il y a longtemps ^ que je
tué au milieu du temple, proche de l'autel; vous entends vomir des blasphèmes contre le
120. des trois enfants de Babylone, de Daniel et Dieu véritable et unique; mais je vous avais
des sept frères Machabées, dont il décrit le toujours méprisé jusqu'ici, parce que je ju-
martyre. « Si donc nous nous sommes vérita- geais plus à propos de vous laisser dans votre
blement donnés à Dieu, conclut-il, si nous erreur, que d'aigrir un homme furieux et
marchons sur les anciennes et saintes traces emporté. » Ailleurs ' le Saint en parle comme
des justes, ne faisons point difficulté de pas- d'un homme qui aimait à disputer contre les
ser par les mêmes épreuves nous
, estimant chrétiens; qui, dans les disputes , ne faisait
heureux de nous rencontrer dans un temps que crier sans raison, et qui tâchait d'attirer
où la foi et la vertu sont si florissantes qu'on à son parti plusieurs personnes ce qui ne ;
ne peut plus compter, comme autrefois, le convient pas à un proconsul, premier etle
nombre de ceux qui signalent leur valeur le souverain magistrat d'Afrique. Il y a donc
par le martyre. Dieu ne promet pas des ré- plus d'apparence que Démétrien était un des
compenses seulement à ceux qui souffrent le principaux ministres de la justice et de la
martyre, mais aussi à ceux qui conservent persécution, c'est-à-dire qu'il était ou gou-
127. ime foi pure et entière. Car tout chrétien qui verneur d'Afrique, ou assesseur du proconsul.
abandonnera ses biens pour Jésus -Christ, Car on ^ voit qu'il persécutait les chrétiens
108. sera mis au rang des martyrs. Dieu, qui est avec beaucoup de cruauté; qu'il les chassait
un juge équitable, n'a point d'égard au de leurs maisons, qu'il les dépouillait de
temps. Durant la persécution il couronne le leurs biens, qu'il les chargeait de chaînes,
courage, et durant la paix il couronne la les enfermait dans des prisons et les faisait
vertu et la bonne volonté. » Il est à remar- mourir par les bêtes, par le fer et par le feu.
quer que, dans ce traité, saint Gyprien * Il était 9 venu souvent voir saint Cyprien,
compte près de six mille ans depuis la créa- plutôt pour disputer contre lui que pour en
tion jusqu'à son temps. Ici il ^ suivait la apprendre quelque chose. Le Saint crut d'a-
chronologie reçue communément en Afri- bord que le silence était le moyen le plus
que, qui mettait cinq mille cinq cents ans sûr pour vaincre son opiniâtreté; mais voyant
depuis le commencement du monde jusqu'à que Démétrien et beaucoup d'autres, à sou
la naissance de Jésus-Christ '. instigation, accusaient les chrétiens d'être
cause des guerres, des pestes et des famines
§ 9. — TRAITÉ DE SAINT CYPRIEN CONTRE
qui désolaient l'Empire, il craignit qu'on n'at-
DÉMÉTRIEN.
tribuât son silence à la faiblesse et à la dé-
Trsiti' Ce fut encore pendant la persécution de
1 . fiance, plutôt qu'à une sage retenue, et que,
contre Iié-
métrien ù- Gallus * que saint Cyprien écrivit son traité tant qu'il négligerait de répondre aux crimes
,
crit eiiî62.
contre Démétrien, vers l'an 28:2, car on croit qu'on imputait aux chrétiens, il ne semblât
qu'il y parle de la mort de Dèce ^ et de ses qu'ilsen demeuraient d'accord. C'est ce qui
enfants, arrivée sur la fin de l'an 251, comme l'obhgea de composer cet écrit il l'adressa :
d'un événement tout récent et comme un eflet à Démétrien lui-même, et il le réfute avec
de la vengeance que Dieu avait tirée du persé- autant de force que de charité. Le diacre
cuteur des chrétiens. Quelques-uns ont cru que Ponce parle de ce traité. Lactance et saint
1 Sex millia ûnnorum jam pêne compi§ntur. Gypr., pro culloribus Dei scepe repetitas, nullo vocis prœcov
in Prœfat.. lib. de Exhort. martyr., pag. 117. dio revolvamus , documentum recentis rei satis est^
Oxon., not. in hune locum.
* quod sic celeriter, quodque in tanta celeritaie sic
Les motifs qui doivent engager au martyre sont
' granditer nuper secuta defensio est ruinis regum,
exposés avec force dans le chapitre V. La pérorai- jacturis opum , dispendio militum, diminutione cas-
son manque de développements, mais elle est pleine trorum. Gyprian., lib. ad Démet., pag. 133.
de pensées édifiantes. {L'éditeur.) * Gyprian., lib. ad Demetrian., pag. 129.
* On ne peut pas dire que ce fut sous la persécu- ^ Nam cum ad me sœpe
studio magis contradicendi,
tion de Dèce puisque saint Cyprien attribue à la
,
quam voto discendi ventres et clamosis vocibus perso-
vengeance divine la mort du prince prédécesseur de nans, malles tua impudenter ingerere quam nostra
celui sous lequel il écrivait car ni Philippe, ni Gor-
; patienter audire, inepium videbatur congredi tecum,
dien n'excitèrent aucune persécution. Gyprian., ibid.
* liam ut memorias taceamus antiquas, et ultiones 8 Ibid., pag. 132. — > Ibid., pag. 129.
280 HISTOIRE GËNP.RAT.F. DES AUTEURS ECCLI^SIASTIQUES.
JfMÙme tronvcnt étonnant qnc le Saint y em- 3. En second lieu , bien loin que les chré- Vag tzi.
ploie plutôt les passages de l'Ecriture et des tiens soient la cause des calamités publiques,
Prophrtes, que ceux des poètes et dos philo- en n'adorant pas faux dieux, ce sont les
les
sophes païens S o'^ ^^^ raisons luunaincs, se- païens eux-mêmes qui les attirent, en ne
lon leur jugement, eussent éUi plus propres rendant })as au vrai Dieu le culte qui lui est
à convaincre l)énu';trien Mais peut-être cet
*. dû et en persécutant tous ceux qui l'adorent.
idolâtre avait-il quelque connaissance de nos Dieu, pour punir leurs crimes et se venger du
livres saints; d'ailleurs, ce traité devant être mépris qu'ils ont pour lui, les frappe de plu-
rendu public, il était à propos de le rendre sieurs plaies en cette vie, jusqu'à ce qu'il les
utile aussi bien aux chrétiens qu'aux païens, punisse par des flammes éternelles en l'au-
et de faire voir aux uns et aux autres que les tre; toutes ces choses ont été prédites par les
divines Ecritures sont le fondement de notre Prophètes. Puis, s'adressant à Démôtrien :
.„„ remarque, accusait les chrétiens d'être la en vivant mal, vous méritiez qu'on vous fît
cjiuse de tous les ileaux qui ravageaient du bien? vous vous plaignez de ce que le ciel
l'Empire. Saint Cyprien répond, en premier est fermé, tandis que vos greniers ne sont
lieu, que tous ces maux viennent de l'afïai- point ouverts aux indigents; vous vous ré-
hhssemcnt de la nature et de la décadence criez de ce que la terre produit moins de
du monde qui tend à sa fin ; ce qu'il essaie fruits, et vous ne faites point de part aux
de montrer par l'énumération des divers dé- pauvres de ceux qu'elle produit; vous mur-
rangements arrivés dans le cours ordinaire murez de la peste, et la peste a découvert
de la nature. « Il ne tombe plus, dit-il, tant ou augmenté vos crimes; car l'on ne secoure 132.
de pluie en hiver pour nourrir les semen- point ceux qui en sont atteints, et on les
ces, le soleil n'est plus si chaud en été pour pille quand ils sont morts. L'avarice exerce
mûrir les fruits, le printemps n'est plus si pubhquement ses rapines. La ville est pleine
agréable, ni l'automne si fertile. Les car- d'empoisonneurs, de faussaires et d'assassins.
rières de marbre, comme si elles étaient las- On ne craint ni accusateurs ni juges, parce
ses, n'en fournissnet plus tant, et les mines que les uns sont complices et que l'on cor-
d'or et d'argent sont épuisées. Les terres de- rompt les autres. Que chacun pense aux pé-
meurent incultes, les mers sans pilotes, les chés et aux plaies de sa conscience, et il ces-
armées sans soldats. Il n'y a plus d'inno- sera de se plaindre de Dieu ou de nous,
cence au barreau, de justice parmi les juges, quand il reconnaîtra qu'il souffre ce qu'il
d'union entre les amis, d'industrie dans les mérite. »
arts, de discipline dans les mœurs. Croyez- 4. « C'est donc injustement, continue saint
vous qu'une chose qui est sur son retour, Cyprien, que vous persécutez ceux qui ser-
puisse être aussi vigoureuse qu'elle était d'a- vent le vrai Dieu. Il ne vous suffit pas de ner
bord? Quand donc vous imputez aux chré- le point adorer, si vous ne faites la guerre à
tiens, que dans la vieillesse du monde, toutes ceux qui l'adorent. Vous approuvez les hon-
choses empirent c'est comme si les vieillards
: neurs qu'on rend à de vaines idoles faites par
s'avisaient de leur imputer les incommodités la main des hommes, et même à des mons-
de la vieillesse et de les accuser d'être cause tres; il n'y a que ceux qu'on rend à Dien
qu'ils n'entendent plus si clair, qu'ils n'ont qui vous déplaisent. Vous privez de leurs
plus si bonne vue, qu'ils ne sont plus si maisons de leurs biens des hommes jus-
et
agiles, ni si robustes, ni si sains, et que, tes et innocents, des amis de Dieu; vous les
tandis que l'on vivait autrefois huit et neuf chargez de chaînes et vous leur faites souffrir
cents ans, à peine s'en trouve-t-il mainte- tous les tourments qu'une cruauté ingé-
nant qui aillent jusqu'à cent. » nieuse peut inventer. Puisque je confesse
seribens, testimoniis usus sit Prophetarum et Apostolo- rôme se contente de rapporter le passage de Lac-
rum, quœ ille commentitia et ficta esse dicebat ; et tance, sans approuver la critique contre saint Cy-
non potius philosophorum et poetarum, quorum aucto' prien. {L'éditeur.)
ritati, ut etlmicus, contraire non poterat. Hieronym., * Confer Diss. de D. Le Nourry. Patrolog. Migne,
Episi. 83 ad Magnum, tom. IV, pag. 655, et Laclant., tom. IV, cap. 974 et seqq. {L'éditeur.)
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 287
que je suis chrétien, et que je le déclare che pas que nous ne priions Dieu sans cesse
hautement, pourquoi donner la torture à un pour le repos de l'Etat, pour les biens de la
homme qui avoue ce qu'on lui demande et terre, et que nous ne lui demandions, nuit
qui ne se cache pas pour mal parler de vos et jour pour vous toutes sortes de prospéri-
,
dieux, mais qui s'en moque devant tout le tés. » Il finit en exhortant Démétrien et les rag. 135.
monde et à la face des juges et des magis- autres païens à travailler à leur salut, tandis
Pag. 133. trats? Pourquoi attaquez-vous la chair qui qu'il est encore temps; à satisfaire à Dieu
est faible? Combattez contre l'esprit, renver- pour leurs crimes, et à sortir de la nuit pro-
sez notre foi, surmontez-nous par la raison, fonde de leurs superstitions, pour entrer dans
si vous le pouvez. Ou, si vos dieux sont véri- la pure et éclatante lumière de la religion
tablement dieux, qu'ils se vengent, qu'ils se véritable. « Nous vous offrons pour cela,
défendent eux-mêmes. » Saint Cyprien fait ajoute-t-il, nos services et nos conseils; nous
voir que, loin de pouvoir exercer cette ven- payons votre haine d'amitié et de bienveil-
geance, ils sont tous les jours maltraités par lance ; et, pour les tourments que vous nous
les chrétiens qui les chassent malgré eux des faites souffrir, nous vous montrons le che-
corps de ceux qu'ils possèdent. « Venez, dit- min du salut croyez et vivez. Que ni l'âge
: i36.
il, aux païens, et soyez vous-mêmes témoins ni les péchés n'empêchent personne de se
de ce que nous disons. Vous verrez que ceux convertir. Tant qu'on est en ce bas monde, il
que vous priez, nous prient, et que ceux que est toujours temps de faire pénitence; mais,
vous adorez, nous craignent; vous verrez après le jour du jugement, il n'y aura plus
trembler devant nous, comme de misérables de retour. Un feu brùlaut et dévorant tour-
esclaves, ceux que vous regardez comme mentera pour jamais ceux qui y seront con-
vos maîtres, et déclarer eux-mêmes ce qu'ils damnés, sans qu'ils puissent espérer ni trêve
sont , sans que votre présence puisse les em- ni fin à leurs tourments. Leur repentir sera
pêcher de découvrir leurs prestiges et leurs alors inutile, leurs plaintes vaines et leurs
tromperies. » Il avance, comme un fait cons- prières sans efî'et; ceux qui n'ont pas voulu
tant, que jamais l'on ne persécute les chré- croire pour obtenir la vie éternelle, croiront
tiens, que le ciel ne donne aussitôt des mar- enfin, mais trop tard *. »
ques de son courroux. D'où il infère que les
chrétiens ne sont la cause des fléaux de la
§ 10. — TRAITÉ DE L'aumône.
colère de Dieu , qu'autant que Dieu les en- 4 y en a qui ont cru que saint Cyprien
. 11 ti aité je
voie pour les venger de leurs persécuteurs. avait composé cet écrit à l'occasion de l'ir- cHtTtfîsèt'
134. 5. « Il ne sert de rien, ajoute saint Cy- ruption que les barbares d'Afrique firent
prien, de dire que les calamités publiques en Numidie et dans laquelle ils emmenèrent
tombent également sur les chrétiens et sur captifs un grand nombre de chrétiens, hom-
les païens. Les maux ne sont tels qu'à l'é- mes et femmes, et même des vierges consa-
gard de ceux qui s'en affligent et qui ne crées à Jésus-Christ il est vrai que ce saint:
peuvent espérer d'avoir part aux biens du docteur fut vivement touché de ce désordre,
ciel, et non à l'égard de ceux qui, assurés qu'il en craignit les suites, et qu'il donna
des biens à venir, ne s'inquiètent pas des tous ses soins à amasser une somme suf-
maux présents. L'on n'entend parmi vous fisantepour la rançon des captifs. On voit
que plaintes et murmures; vous êtes cha- même, par sa lettre 62% qu'il envoya aux
grins et impatients ; au lieu que nous con- évêques de Numidie cent mille sesterces
servons une patience forte et religieuse, tou- d'écus, c'est-à-dire environ vingt-cinq mille
jours h'imble, toujours reconnaissante envers livres , pour ce rachat. Cependant plusieurs
Dieu. Nous voyons d'un visage égal la bonne raisons nous font croire qu'il avait dès-lors
et la mauvaise fortune ; et, sans perdre ja- composé ce traité de l' Aumône et des bonnes
mais calme de l'esprit, nous demeurons
le Œuv7'es, Il \° n'y fait aucune mention du pil-
inébranlables aux tempêtes du monde, et at- lage de Numidie par les barbares. 2° On voit,
tendons en repos le temps de l'accomplisse- par les dernières paroles, qu'il l'écrivit en
ment des promesses divines; ce qui n'empê- temps de paix, et ainsi au commencement
* Le style de cet ouvrage, selon Mœlher, est élo* leur but semble plutôt de rétorquer
traitées à fond ;
pelle un grand volume, où saint Cyprien chesses ne s'épuisent point, lorsqu'on s'en
nous apprend combien le pouvoir de la mi- sert pour Jésus-Christ c'est Uieu même qui:
concile oecuménique ^ d'Ephèse sous le titre ne manquera jamais : mais celui qui détourne
de Discours sur l'Aumône, et dans celui de les yeux de dessus eux, sera réduit à une ex-
Calcédoine ® sous le nom de livre des Œuvres trême pauvreté. Car les actions de grâces
de piété et de l'Aumône. que les pauvres rendent à Uieu pour les au-
*Ti"\u^
2. Saint Cyprien y montre d'abord, par un mônes que nous leur faisons attirent sa bé- ,
S^'^î'^il nombre de passages tirés de l'Ecriture, nédiction sur nos biens et les font croître. »
1)7
qu'après avoir perdu la grâce que nous avions Après avoir appuyé cette vérité dc^quelques
reçue dans le baptême, nous pouvons la re- endroits de l'Evangile, il s'élève avec beau-
couvrer par les œuvres de justice et de misé- coup de zèle contre les riches avares, et leur
ricorde. Car, de même que l'eau du baptême dit « Vous appréhendez que vos revenus ne
:
éteint le feu de l'enfer, les aumônes et les viennent à manquer, si vous en assistez libé-
bonnes œuvres servent à remettre les pé- ralement les pauvres, et vous ne savez pas,
chés : en sorte que la pratique continuelle misérables que vous êtes, que, tandis que
des œuvres de miséricorde renouvelle, en vous craignez que votre bien ne manque, la
quelque manière, la vertu de ce sacrement vie et le salut vous manquent en effet. Vous
et nous fait obtenir de nouveau la même prenez bien garde que vos richesses ne di-
138. grâce. Ce sont encore les aumônes qui ren- minuent, et vous ne considérez pas que vous
dent nos prières efficaces, qui nous garantis- diminuez vous-mêmes, parce que vous aimez
sent des dangers , qui délivrent nos âmes de mieux votre argent que votre âme. Vous Paj. 140.
la mort, et même nos corps ce que le Saint : avez peur de perdre votre patrimoine, et
prouve par l'exemple de Tabithe, à qui les vous vous perdez vous-mêmes pour votre
bonnes œuvres et les aumônes rendirent la patrimoine. C'est de vous que saint Paul a
130. vie. C'est pourquoi Jésus-Christ ne nous re- dit ^ : Ceux qui veulent devenir riches, tom-
commande rien tant dans l'Evangile, que de bent dans la tentation et dans les pièges du
faire l'aumône de songer plutôt à amasser
, diable, et sont possédés de beaucoup de mau-
des trésors dans le ciel que sur la terre, et vais désirs, qui précipitent les hommes dans
d'acheter de tout son bien la vie éternelle, la mort et dans la damnation ^. Vous ap-
qui est cette pierre précieuse à laquelle son préhendez que votre bien ne vous manque,
sang a mis un si haut prix. si vous en faites beaucoup d'aumônes ; mais
1 Si expeditos, si celeres, si in hoc operis agone regem impiissimum, si se audire voluissef, scit paupe-
currentes , dies nos vel redditionis, vel persecutionis rum sustentatione salvandum. Hieronym., Epist. 54
invenerit : nusquam Dominus meritis ad meri- nostris ad Pammach.
tum deen't ; in pace vincentibus coronam cundidam pro " Cypriani sanctissimi episcopi et martyris, ex trac-
operibus dabit, in persecutione purpuream pro pas- tatu de Eleemosyna. Tom. III Concil. Labbœi, p. 511.
sione geminabit. Cyprian., lib. de Ëleemos., pag. 144. * Cypriani sanctissimi episcopi et martyris ex libro
* Unde sic misericordiam disceremus? Pont., in de pietaiis Opère et Eleemosynis. Tom. IV Concil.,
Vila sancti Cypr., pag. 5, pag. 288. —
1 Prov. xxvili, 27. —
« I Timoth. vi, 7.
Adam portaverat vulnera, etc. August., lib. IV ad mentum his contenti sumus. L'annotateur de la
,
Bonifac., cap. 8, pag. 480, tom. X. Bible portative fait observer avec raison que la leçon
* Quantas vires habeat misericovdia, et quibus do- exhibitionem, donnée par Baluze, est vicieuse. Exhi-
nanda sit prœmiis; et beatus Cyprianus grandi volu- bitio ne signifie pas victum. Peut-être saint Cypriea
mine prosequitur et Danielis consilium probat, qui lisait-il enutritionem. {L'éditeur.)
[m' SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. -- SAINT CYPRIEN. 289
raciileusement dans la fosse aux lions ; Dieu à boire à celui qui avait soif; qui auront ha-
nourrit les oiseaux et les infidèles, et vous, billé celui qui était nu, visité les malades et
qui êtes chrétiens, serviteurs de Dieu, occu- les prisonniers. Il leur met encore devant les Pag. m.
pés à faire de bonnes œuvres , cliers ù votre yeux l'ardente charité et la vive foi des nou-
Seigneur, vous avez peur de manquer de veaux chrétiens sous les Apôtres. Ils ven-
quelque chose? Croyez- vous que Jésus-Christ daient alors leurs maisons et leurs hérita-
ne nourrisse pas ceux qui le nourrissent, ou ges, et eu donnaient libéralement le prix aux '
que les choses de la terre puissent manquer Apôtres, qui le distribuaient aux pauvres.
à ceux à qui Ton donne même celles du ciel ? Leurs bonnes œuvres étaient en aussi grand
N'est-ce pas là une pensée infidèle? ce senti- nombre que leur union était grande. Enfin
ment n'est-il pas impie et sacrilège? Que fait il les exhorte à imiter, dans leurs largesses
un incrédule dans la maison de la foi? Pour- envers leurs frères l'exemple de Dieu , qui
,
quoi vous appelle-t-on chrétien, si vous n'a- n'exclut personne de ses grâces et de ses
vez aucune confiance en Jésus-Christ?» Saint bienfaits. « L'aumône, ajoute-t-il, est quel-
Cyprien se plaint ensuite de la plupart des que chose d'exceUent et de divin ; c'est la
Pag. 141. dames qui, plus attentives à se peindre et à consolation des fidèles, le gage de notre sa-
se noircir les yeux, qu'à les ouvrir sur les lut, lefondement de notre espérance, le bou-
besoins des pauvres, ne regardaient pas seu- clier de notre foi, le remède de nos péchés.
lement le tronc en venant à l'église, ne don- C'est une chose grande et aisée tout ensem-
nant rien pour le sacrifice et prenant même ble; c'est une couronne qu'on remporte dans
une partie de * ce que le pauvre avait offert. le temps de la paix et qui exempte des pé-
A. Une autre raison alléguée par les riches rils de la persécution ^; c'est un des plus
pour s'exempter de faire l'aumône, était le grands dons de Dieu, nécessaire aux faibles,
grand nombre de leurs enfants. Saint Cyprien glorieux aux forts et utile à tous les chré-
leur répond que le précepte de l'amour de tiens pour obtenir les grâces du ciel, pour se
Dieu ne leur permet pas de préférer leurs en- rendre Jésus-Christ favorable au jour du ju-
fants à Jésus-Christ, qui nous est représenté gement, et pour mettre Dieu même au nom-
142. en la personne des pauvres; que plus ils ont bre de nos débiteurs. »
d'enfants, plus aussi ils ont de personnes pour
lesquelles ils doivent prier Dieu et dont ils § 11. — TRAITÉ DE SAINT CYPRIEN, DU BIEN
DE LA PATIENCE.
sont chargés de racheter les péchés et de sau-
ver les âmes; ce qu'il prouve par 'l'exemple 1. Saint Cyprien, craignant ' que la cha- ^^^.,^ ^^
143. des richesses périssables. 11 fait souvenir les Bien de la putietice, et l'envoya * à Jubaien,
riches des menaces que Jésus-Christ fait avec la réponse à une lettre par laquelle cet
dans l'Evangile à ceux qui l'auront méconnu évêque ^ lui avait demandé son sentiment
en la personne des pauvres, et des récom- sur le baptême des hérétiques. Saint Ponce ^
penses éternelles qu'il promet à ceux qui au- marque cet écrit, et il est cité plusieurs fois
ront donné à manger à celui qui avait faim, par saint Augustin, qui l'appelle une lettre '.
1 C'était les pains dont on faisait l'Eucliaristie et Propter hoc etiam libellum de Bono patientiae, quan-
dont les riches avares mangeaient comme les pau- tum valuit nostra mediocritas , pej'miitente Domino
vres,
quoiqu'ils ne donnassent rien aux pauvres. et inspirante, conscripsimus, quem ad te pro mutua
Lomhert., in hune locum. dilectione transmisimus. Cyprian., Ëpist. 73 ad Ju'
2 U faut lire : « qui est exempte des périls de la per- baiunum.
sécution : sine periculo persecufioms. » [L'éditeur.) * Idpm, ibid. —
" Idem, ibid. —
• Unde patientiam
* Si quis uuiem putatur conlentiosus esse, nos talem disceremus? Pontius, pag. 5.
consuetud iuem non habemus, neque Ecclesia Dei. Ser- J Item Cyprianus, in epistola de Patientia Dei :
U, i9
son iHSTomF, nrs AUTr.ims KCCLf:siA?TiQUES.
r.itNiïnALF.
Le P we Joan 11
;
des en-
tue ieVerrCres, JLsôe à uel,,ue, séna- premier homme, qui comiamne se»
<
vie .lan,
vers le m, -la'nts à passer tous les jours de leur
ënrs mettre ce traité en
11 fa. t
Cartha.e, ,m la douleur et la tristesse ; Tobl.gation p.. -
temps ue ^int Cyprien tint, à sou£fr.r les persee t-
au sujet .lu enlière aux <l,ré!ie„s de
conci e de s^aant. -onze évêqaos, taq.ies du
tiens, la perle de leurs biens, les a
ban Cme des heréti.p,es. Toutefois, ali., que mort^«
^émon, les croix, les fe.a la
r âge tUplusde'fruitetlùt mieux reçu q.i uiut les
ajoute . La chanté est le l.eu
évita d'y rien dire q.ii
L
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He tout le monde il
P» x le e.-nt ;
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fidèles, le fondement de ia
M : ^
rr*
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ce^îe cont'stati'on, et s'en
, X 1 Vnnité elle est plus ffraiule que 1
• espérance
"» t: :
ia^ol; elle" surfasse to'ntes les
bonnes
Analyse 's::; t'''^;:"Ltvrr d'abord comme
de ce Traité.
Pag. 145.
cerTain:q;e^'pa,ience..ontlespbilosoplies
font pr.ifession était aussi fausse
que leur ^-::::^:Zr::
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actions de ce divin Sauveur,
quer dans toutes une patience
et
infime. Au
fait remar-
«°J'^; ^ ^
que sa pa .,„,,
epimne et J^ l^éieva an comble
«e la gloire^
dit o II souffre cons-
,„. sujet de sa passion, il ^^.^^^ ^^^^ ,^
:
iirnam
, Cyprianu. episcopus et martyr, in episiola
de Pa-
ad vie tores, J--/-^-" '^^^^^'^
lom. IV ConciL, pag. 11^^.
HT.L^'Xl
Judxcatur judicaluru^,
• et Dei terme
lienUa
[in« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 2M
frère, Esaù à vendre son droit d'aînesse, les n'y en a guère de plus imperceptible, ni qui
Juifs à tuer les Prophètes et Jésus -Christ; nous fasse plus tôt périr sans que nous l'aper-
c'est l'impatience qui fait violer aux héré- cevions. Pour nous en convaincre, il prend
tiques la paix et la charité. Au contraire, la la chose dès l'origine et dit que c'est cette
patience nous rend digues de jouir de Dieu; maliieureuse passion qui, dès le commence-
elle calme nos passions ; elle éteint le feu des ment du monde, a perdu le diable et l'homme
divisions, retient la puissance des riches dans avec lui. Car le démon, cet esprit aupara-
des bornes légitimes, console l'indigence des vant si glorieux et si chéri de Dieu, voyant
pauvres , conserve l'intégrité bienheureuse l'homme créé à l'image de la Divinité, en
des vierges, la chasteté laborieuse des veu- conçut alors une maligne jalousie, et par là
ves, l'union sainte et indissohible des per- il toujba lui-même avant de faire tomber
sonnes mariées; elle établit solidement les l'homme, qu'il ne fît déchoir de son immor-
fondements de notre foi, élève l'édifice de talité qu'apK's être déchu lui-même de sa
notre espérance et nous fait marcher sur les gloire. C'est l'envie qui anima Cain contre pag. lu.
traces de Jésus- Christ. Abri, Esaù contre Jacob, les fils de ce pa-
Pag. 151. 7. Sur la fin il dit à ceux qui
de ce traité, triarche contre Joseph, leur frère; Saiil con-
attendaient avec impatience la vengeance tre David, les Juifs contre Jésus-Cbrist, et qui
des injures qu'ils avaient reçues, de considé- tue tous ceux qui se rendent les imitateurs
rer que celui qui vengera les autres ne s'est du diai)le, suivant cette parole de l'Ecriture :
pas encore vengé sur la terre, quoiqu'on l'a- « La mort est entrée dans le monde par l'en-
dore déjà dans le ciel, et d'attendre en pa- vie du diable , et ceux qui sont de sou parti
tience le jour de la colère et de la vengeance, l'imitent ^. »
car il n'est pas raisonnable que le serviteur Après avoir ainsi décrit les funestes
3.
veuille être vengé avant le maître *. effets de l'envie, il en marque l'étendue, en
disant qu'elle est la source de toutes sortes
§ 12. — TRAITÉ DE LA JALOUSIE ET DE L'ENVIE.
de crimes et la matière de tous les péchés,
rrnité de 1. Ou croît ^ ouc la même nécessité qui en particulier de la haine, de l'animosité, de
t eu '256 porta saint Cyprien à écrire le livre de la l'avarice, de l'ambition, de l'orgueil, de la co-
Patience, l'obligea à composer celui de la Ja- lère. c( C'est l'envie qui est cause
qu'on rompt
lousie et deV Envie , peu de temps après qu'il le lieu de
qu'on viole la charité
la paix,
eut envoyé l'autre à Jubaïen *. Saint Ponce * fraternelle, qu'on corrompt la vérité, qu'on
marque ce traité, lorsqu'il dit que le saint déchire l'unité, pour former des schismes et
évèque a arrêté, par la douceur d'un remède des hérésies, parce qu'on se plaint de n'avoir
salutaire , cette jalousie empoisonnée qui pas été ordonné évèque, ou que l'on refuse
vient de la malignité de l'envie. Cet écrit est d'obéir à celui qui nous a été préféré. Quelle
cité par saintJérôme, qui ra])pelle s un livre pitié d'envier la vertu à autrui, de haïr en
excellent. Saint Augustin le cite ^ aussi et lui ou ou les grâces de
ses propres mérites
dit qu'il était fortconnu des peuples '. Il en Dieu, de faire son malheur du bonheur des
est encore fait mention dans un discours ^ autres, d'être tourmenté de leur prospérité;
de saint Césaire, imprimé dans le Recueil de s'afiliger de leur gloire, et de nourrir sans
des règles données au pubhc par Holsténius. cesse dans son cœur ces chagrins qui sont
Analyse 2. De tous Ics viccs, îl n'y en a point, se- comme autant de bourreaux qui le déchi-
'
Ion saint Cyprien, qu'un chrétien cloive plus rent Quelle joie un tel homme peut-il avoir
^J"'
'"•
!
soigneusement éviter que l'envie, parce qu'il au monde? Il soupire et se plaint contiuuel-
1 Mœlher appelle cet écrit un des produits les 8 Legamus ergo epistolam Cijpriani de Zelo et Lir-
plus précieux de saint Cyprien. {L'éditeur.) vore, et uideamus quantum malum sit invidere melio-
^ Tillcmont, t. IV, p. 159; Fleury, t.. II, p. 284. ribus, cuj'us mali originem ab ipso diabolo extitisse
» Saint Cyprien ne fa^t pas mention du livre de memorabiliter docet. August., lit». IV de Baptismo,
l'Envie dans sa lettre à Jubaien, d'où l'on infère qu'il cap. pag. 127, tom. IX.
8,
l'écrivit postérieurement à cette lettre. ''
Hœc verba Cypriant quale malum est, etc., in
* Pout., in Vita Cijpr., pag. 5. quam
epislolu populis nota, vera, quam fortia sifit
B Scripsit
et beatus Cyprumus Ubrum de Zelo et recognoscwtus. August., ibid.
Livore, mlde optimum : quem qui legerit, non dubita- * Caisar., Exhortations ad Ccesariam, tom. IV Cad.
bit atmumerare operibus carnis invidiam. Hieronym., Regul., pag. 67.
lib. m in cap. iv, Epist, ad Galatas, p. 302, tom. IV. » Sap. u, ?*.
29'i HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
la jalousie ne le laisse reposer ni passion qui. met celui qu'elle possède au rang
lement, et
des homicides; car quiconque est envieux,
nuit ni jour. Tous les autres crimes ont une
raccomplisseinent. hait son frère, et celui (jui hait son frère est
fin et se terniiuent par
que, pour vaincre
h;s avertit Paf.457.
Un adultère est conleut quand il a joui de la hniricide *. Il
heureux, plus elle s'irrite et s'enflamme. Elle Ecriture, faisons de bonnes œuvres, pensons
met les menaces dans la bouche, la colère souvent à Jésus -Christ, prions sans cesse,
dans les yeux, la pâleur sur le visage, fait soyons toujours occupés de bonnes choses.
grincer les dents et dire des paroles outra- Un chrétien n'a pas à attendre la seule cou-
geantes, pousse les mains aux meurtres et à ronne du martyre. La paix a aussi ses cou-
Ptg. i55. la violence. Qui que vous soyez, qui êtes ma- ronnes, qui sont la récompense des différentes
hu et envieux, vous avez beau chercher les que nous remportons sur notre en-
victoires
moyens de nuire à celui que vous haïssez, nemi. Surmonter la volupté, dompter la co-
lère, souffiir les injures, triomplicr de l'ava-
vous ue lui ferez jamais autant de mal que
vous vous en faites. Partout où vous êtes, rice, supporter en patience les afflictions,
votre adversaire est avec vous. Le mal est tout cela mérite une couronne. Celui qui ne
renfermé au-dedans devons; vos liens sont s'enorgueillit point dans sa bonne fortune,
servitude. C'est un mal opiniâtre que de per- dans le ciel. Celui qui n'est point envieux et
sécuter un homme que Dieu prend eu sa pro- qui vit paisiblement avec ses frères, recevra
tection. C'est un malheur sans remède que le prix de sa douceur '. »
tous, celui-là sera grand'.» Il n'est doue lon l'édition d'Oxford, que nous suivons, est
plus permis à un disciple de Jésus-Christ d'ê- celle qu'il écrivit, sur la fin du règne de Phi-
tre envieux. Nous ne pouvons plus dispu- hppe % au clergé et au peuple de Furnes, dans
ter de gloire et d'élévation entre nous, puis- l'Afriiiuc Proconsulaire ^ Ceux de cette Eglise
qu'on n'y arrive que par l'humUité. Aussi l'ayant informé que Géminius Victor avait,
l'Apôtre met l'envie entre les œuvres des té- par son testament, nommé tuteur le prêtre
nèbres *. Géminius Faustin, il en fut extrêmement tou-
4. La suite du traité est une exhortation ché, de même que les évèques et les prêtres
1S6.
vive et toute pathétique aux chrétieus de son qui se trouvaient alors avec lui; car, dans un
temps, pour les engager à se défaire de cette concile * précédent, on avait ordonné que
passion criminelle, incompatible avec la cha- personne ne fit, par son testament », un clerc
rité, qui, selon l'Apôtre, n'est point
jalouse s, tuteur ou curateur, pour ne pas le détourner
4 Luc, XXII, 24. — * Rom. xui, lî. — M Cor. xin, cution, niqu'on en craignit même pour l'avenir.
conthmail à instruire de jeunes païens dans assez orQueilleux pour ne vouloir pas obéir
le même métier. La réponse porte qu'il ne au grand Prêtre ou au juge qui sera alors,
convient ni à la majesté de Dieu, ni à la dis- on le fera mourir, afin que le peuple voyant ,
excuser, et que les Juifs étaient contraints de pren- * C'est la LXI« lettre de l'édition de D. Maran.
dre la tutelle de ceux mêmes qui n'étaient pas {L'éditeur.)
Juifs. Aussi le décret de ce concile ne parle ni des 3 C'était alors l'usage du théâtre, que les hommes
tutelles légitimes, qui étaient déférées par droit de
y jouassent les personnages des femmes.
parenté; ni des tutelles dalives, imposées par le ma- * Nec putet salaria se esse redimendum ut a pecca-
gistrat; mais seulement des tutelles testamentaires: tls cesset, quando hoc non nobls, sed sibi prœstet.
Cum jamjjridem in concilio episcoporum siatutum sit Cyprian., pag. 171.
ne quis de dericis et Dei mimstins, tutorem vel cura- 5 Quod si illic Ecclesia non sufficit ut laborantibus
torem testamento suo constituât. Fleury, Hist. ecc/e's., prœstet alimenta, poterit se ad nos transferre, et hic
tom. lî, pag. 273, et L. Spadon. 15, § 6, ff de Excus. quod sibi ad victum et vestitum necessarium fuevit
* On croit qu'il était
évèque de Thènes, dans l'A- accipere. Cyprian., ibid.
frique. On trouve un évèque de ce nom parmi les ^ Il y a, dans les souscriptions du grand concile
quatre-vingt-sept qui assistèrent au grand coucile de Carthage, un Rogatien de Nova.
de Carthage. ^ Deuteronom. xva, 12.
294 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
à reconnaître leur faute et à vous eu faire et, après avoir fait sentir toute la laideur
satisfaction; car nous aimons mieux vaincre d'une habitation si illicite, il ajoute : « Si
par la palicnrc le mal qu'on nous a fait, tous sont obligés, sans exception, de garder
que de le venger par la puissance sacerdo- la disciphne, les suiiérieurs ecclésiastiques et
pag. 173.
certaines viei'ges qui, après une ferme résolu- tion de ceux que l'on avait trouvés avec les
tion de garder iuviolablement la continence, vierges, en })articulier du diacre qui avait
avaient été convaincues d'avoir couché avec longtemps cohabité avec une d'entre elles.*
des hommes, et jusque même avec un diacre. Quant aux vierges, il veut que, si ches se re-
Elles le conteseaient et soutenaient néanmoins pentent et si elles sont encore vierges ', on les
qu'elles avaient gardé leur intégrité. Pom- reçoive dans l'Eglise et qu'on les admette à
pone avait excommunié le diacre et les autres la communion, en leur déclarant néanmoins
convaincus d'avoir dormi avec ces vierges. que, si elles retournent avec les mêmes per-
vèrent présents; et saint Cyprien y fit, en les recevra pas facilement dans l'Eglise. « Si paj. 175.
est la cinquième selon l'édition d'Oxlbrd *, rable à celui d'embrasser bouches qui ces
saint Cyprien dit aux prêtres et aux diacres ont confessé hautement le nom de Jésus-
Bpist. 5, de son Eglise « Puisque l'état des lieux ne
: Christ de fixer sur ma personne ces regards
;
Sf-*''^* me permet pas d'être présent, je vous con- qui, ayant méprisé le siècle, se sont rendus
jure, par votre foi et par votre piété, de vous dignes de voir le Seigneur Que personne de !
pag. 177.
acquitter de vos fonctions et des miennes de vous ne pense à la mort, mais à l'immorta-
telle sorte que rien ne manque à l'ordre et à lité qui doit la suivre. En quelque nombre
la discipline. Quant à la dépense qu'il faudra que soient les afflictions des justes, l'Ecriture
faire, soit pour les confesseurs qui sont en sainte ' nous assure qu'ils sont délivrés de
prison, soit pour les pauvres qui persévèrent toutes leurs peines, quand ils mettent leur
dans la foi, je vous prie que rien ne leur confiance en Dieu. » Puis il ajoute « Heu- :
manque, puisque toute la somme qui a été reuses aussi les femmes qui sont avec vous
amassée n'a été distribuée entre les mains et qui, s'élevant au-dessus de la faiblesse de
des clercs, qu'afin que plus de personnes eus- leur sexe, ont donné aux autres un si bel
sent de quoi pourvoir aux besoins de chacun. exemple de courage et de vertu. Afin que
17g Si les frères, par l'ardeur de leur charité, tout sexe et tout âge eût part à votre gloire,
s'empressent à visiter les saints confesseurs. Dieu vous a associé même des enfants, en
je crois qu'ils doivent user de précautions quoi il nous fait voir quelque chose de sem-
et n'y pas grandes troupes, de peur
aller à blable à ce que firent autrefois ces illustres
qu'excitant l'indignation (des païens) on ne enfants de Babylone que le feu respecta dans
leur permette plus l'entrée de la prison; en la fournaise *.» Et ensuite «Suivez en toutes
: 173,
sorte que nous perdions tout par l'avidité de choses le chemin que le prêtre Rogatien, ce
trop avoir. Prenez donc garde qu'on en use glorieux vieillard, vous trace par son courage;
avec discrétion, afin qu'on le puisse faire avec lui qui, avec notre frère Félicissime, toujours
plus de sûreté; et même que les prêtres qui plein de sagesse et de retenue, a soutenu les
oflrent le sacrifice dans les prisons des con- efforts du peuple furieux et est entré le pro-
fesseurs, y aillent tour à tour, parce que le mier dans la prison, comme pour vous y pré-
changement les rendra moins odieux. Nous parer une demeure. »
devons en tout être doux et humbles, comme 7. Dans la lettre suivante ' saint Cyprien ^etue
il convient à des serviteurs de Dieu; nous recommande aux prêtres et aux diacres de priln^i^o^ô
accommoder au temps et procurer le repos son Eglise d'avoir soin des veuves, des ma- j^^^*- *°
temps à Sergius, à Rogatien et aux autres laissé mon fonds chez le prêtre Rogatien;
de ^ pag 178.
confesseurs de Carthage détenus dans les et, comme je crains que cela ne suffise pas,
prisons, pour les congratuler sur la généro- je lui envoie une autre somme par l'acolyte
sitede leurs confessions et les exhorter à la Narique. » 11 leur dit encore qu'il retournera
persévérance. «Je souhaiterais extrêmement, à Carthage, lorsqu'ils lui écriront que toutes
leur dit-il, de jouir de votre présence, s'il choses sont calmes, ou quand le Seigneur le
m'était libre de sortir du lieu où je suis. Car lui fera connaître par révélation.
1 Et quid egerim, îoquuntur vobis epistolœ pro ^ Sed et peregrinis, si qui indigentes fuerint, sump-
temporibus emissœ numéro tredecim ,
quas ad vos tus suggeratis de quantituie mea propria, quum apud
transmisi. In quibus nec clero consilium , nec confes- Rogatianum compresbyferum nostrum dimisi. Cypr.,
soribus exhortatio, nec extorribus quando oportuit Epist. 7, pag. 178. Ce fonds que saint Cyprien mar-
objurgatio, nec umversœ fraternitati ad deprecandam que comme lui étant propre, pouvait être pris de la
Dei misericordiam allocutio et persuasio nostra de- pension que l'Eglise lui faisait pour son entretien
fuit. Cyprian., Epist. 20 ad Clerum romanum. comme évêque; car, quant à ses biens de patri-
' LXXXle de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.) moine, il les avait distribués dès le commencement
« Psalm. xxxm, 10. —
* Dan. m, 17. de sa conversion. Fleury, Hist. ecclés., pag. 178, et
* XXVle de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.) Fellus, Not. in hune locum.
296 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Lettre 8 Le clprsé de Rome, qui protivernait
'. par respect humain, à cause de leur dignité,
du tlergtSIe
Borne an l'Eglise durant la vacance du Saiiit-Si<iL;e, soit par la crainte des tourments. Nous ne les
tient'' 'le
..rihiipe
ai)rès le niailyre du pape saint Fabien, avons i)as aitandonnés, lorsqu'ils étaient sé-
"nmt'Vy-' sy»"* appiis la retraite de saint Cy[irien, par parés de nous, mais nous les avons exhortés
piien.cniso
(^(^meut, sous-diacrB de Carthage, qui était à faire pénitence, de peur qu'en les aban-
allé à Rome , au saint
écrivit une lettre donnant ilsne devinssent pires. Vous devez
évêque et une autre à son clergé. La lettre à faire la même chose et relever le courage
saint Cyprien est perdue. Mais saint Cyprien de ceux qui sont tombés, afin que, rentrant
en parle et semble dire qu'elle lui apprenait dans le bon chemin à l'aide de vos exhorta-
le martyre du pape saint Fabien. Dans l'au- tions, ils puissent, s'ils sont repris, confesser
tre, qui était pour le clergé de Carthage, on le nom de Jésus-Christ et répai-er ainsi leur
ue voyait point expressément ni de qui elle faute. Si ceux qui sont tombés viennent à
venait', ni à qui elle s'adressait. Le contenu, être malades, et qu'ils se repentent de ce
l'écriture même et le papier firent craindre à qu'ils ont lait et désirent la communion, il
saint Cyprien qu'il n'y eût eu quelque falsifi- faut la leur accorder. Soit donc que ce soit
cation ou altération; de sorte qu'il la renvoya des veuves, ou des pauvres, ou des personnes
à Rome, après en avoir pris une copie. Mais en prison, ou chassées de leurs maisons, on
il fut convaincu dans la suite qu'elle venait doit leur donner quelqu'un qui la leur admi-
véritablement du clergé de Rome. Elle com- nistre. Les catéchumènes aussi qui tombent
les à vous acquitter de ce devoir; mais vous beaucoup du grand exemple que saint Fabien Ri.me, en
250.
pourrez apprendre de plusieurs personnes avait donné à tout son peuple. « Car autant,
Epist 9,
qui viennent d'ici, que, par la grâce de Dieu, dit-il, la chute de l'évêque est pernicieuse à pag.iéi
nous avons fait et faisons toutes ces choses ceux qui sont sous sa conduite, autant son
avec tout le soin possible, et au péril même exemple est utile et salutaire, lorsque, de-
181. de notre vie. Nous avons fait revenir jusque meurant immobile dans la foi, il se propose
du capitule quelques-uns de nos frères qui lui-même aux frères pour leur servir de mo-
y étaient montés pour ofiVir de l'encens aux dèle. » encore qu'il leur renvoie l'ori-
Il dit
dieux. Cette Eglise est ferme dans la foi, ginal de la lettre dont nous avons parlé j)lus
quoique quelques-uns soient tombés, soit haut, afin qu'ils reconnaissent ® si c'est leur
tourments et aux confesseurs qui n'étaient pas eux-mêmes comme il faut? Ainsi, tandis
encore qu'en prison, mais destinés aux sup- que quelques-uns s'élèvent insolemment par
plices.II relève, dans cette lettre, la gran- la fausse gloire qu'ils se donnent de leur
deur du courage de ces martyrs, qu'aucun confession, Dieu a permis qu'on nous fasse
tourment n'avait pu vaincre. Parlant de saint soullrir des tourments sans fin qui nous en-
Epist. 10, Mappalique, il dit « Une parole pleine du
: vient la consolation de la mort et la couronne
pag 183.
Saint-Esprit est sortie de la bouche d'un des du martyre, et qui ne cessent point qu'ils
martyrs, lorsque le bienheureux Mappalique n'aient surmonté notre patience. Prions donc
a dit au proconsul au milieu des tourments : du plus profond de notre cœur. Frappons, et
18i. Vous verrez demam un combat. Le combat on nous ouvrira, pourvu que la charité unisse
promis a été rendu, et le serviteur de Dieu y nos prières. Car, ajoute saint Cyprien, ce qui
a été couronné. » Saint Cyprien exhorte les m'a porté principalement à vous écrire, c'est
martyrs et les confesseurs qui étaient en pri- que, dans une vision s, j'ai entendu ces pa-
un si bel exemple, afin que la
son, à suivre roles Demandez, et vous obtiendrez. Ensuite
: Pag. i86.
consommation d'une même vertu et la ré- il a été marqué au peui»le qui était présent,
compense d'une même couronne unissent, de prier pour certaines personnes désignées;
après leur mort, tous ceux que les liens d'une mais, dans leurs prières, les voix ont été dis-
même confession et d'une même prison cordantes et les volontés divisées, ce qui a fort
avaient joiuts pendant leur vie. Ensuite il déplu à celui qui avait dit Demandez, et vous
:
ajoute que si, avant le jour de leur combat, obtiendrez. Que serait-ce si tous les frères
Dieu donne la paix à sou Eglise, ils ne doi- conspiraient ensemble dans la paix que notre
vent pas s'ctffliger d'être privés de la gloire Seigneur nous a donnée avant daller à son
extérieure du martyre, puisque le Seigneur, Père ? » Saint Cypi-ien dit encore : « Il n'y a
de qui ils attendent la couronne, connaît pas longtemps que j'ai eu une autre vision ^,
pour mériter la cou-
leurs intentions, et que, dans laquelle on nous reprochait d'être en-
ronne immortelle que Dieu nous a promise, dormis dans nos prières et de ne pas y ap-
le seul témoignage de celui qui nous doit ju- porter assez d'attention et de vigilance. » Il
ger suffit. les exhorte donc à sortir de cet assoupisse-
Lettre 11 *. Saint Cyprien écrivit aussi aux prê- ment, à prier sans cesse, à l'exemple des Apô-
de saint Cy-
prien A sôa tres et aux diacres de son Eglise, pour les tres et de Jésus-Christ même, qui passait les
clergé, en
250. exciter à prier et à s'humilier, afin d'apaiser nuits en prières; à fléchir la justice de Dieu
la colère de Dieu. Il avait écrit'' à son peuple par un repentir sincère des fautes passées,
sur le même sujet ; mais celte seconde lettre avec promesses de marcher à l'avenir dans
est perdue, et nous n'avons que la première, ses voies et d'accomplir ses préceptes, et à
qui est citée par saint Augustin *. Voici quel regarder la persécution comme une épreuve
Epist. H, en est le contenu « Puisque ce sont nos pé-
: que Dieu fait de leur courage. Il ajoute, pour ^s^.
paç. 185.
chés qui ont attiré sur nous une si horrible les consoler : « Quoique je sois le moindre
tempête, il ne suffît pas d'adresseràDieu nos des serviteurs de Dieu, coupable de beaucoup
prières, il faut tâcher de l'apaiser par des de péchés et indigue de sa bonté, il n'a pas
1 Ville de rédition de D.
Maran. {L'éditeur.) nus, ad clericos deprecando Deo, transfigurans in se,
* Vile de l'édition de D.
Marau. [u éditeur.) sicut sandus Daniel, peccata populi sut, etc. August.,
» Saint Cyprien en fait mention en ces termes lib. IV de Baptismo, cap. 2, pag. 122, tom. IX.
dans la lettre vingtième, adressée au clergé de " Nam quod magis suasit et compulit, ut has ad
Rome Et quid egerim, loquwitur vobis epistolœ pro
:
vos liiteras scriberem, scire debetis, sicut Dominus
temporibus emissœ numéro tredecirn, in quibus nec ostendere et revelare dignatur, dictum esse invisione:
clero consilium.... nec universœ fraternitati ad depre- Petite, et impetratis. Gyprianus, Epist. 11.
candam Dei misericordiam a/locutio et persuasio nos- ^ Nam ethoc nobis non olim per visionem, fratres
tra de/uit. Cyprian., Epist. 20. carissimi , exprobratum sciatis quod donnitemus in
* Nam et hoc in quadam epistola sua dicit CypriU' precibus, nec vigilanter oremus, Id., ibid.
,
mettre au même rang. Ils ont soufïert tout que Notie-Seigueur aura rendu la paix, nous
ce qu'ils ont été disposés de souffrir, et celui retournions à l'Eglise tout renouvelés et tout
qui s'est présenté aux tourments et à la mort, changés; et que nos frères, et même les Gen-
pour l'amour de Dieu, a enduré, en effet, tout tils, remarquent ce changement, et que ceux
ce qu'il a eu volonté d'eudurer. Ce n'est pas qui n'avaient admiré jusqu'ici que la cons-
lui qui a manqué aux supplices, mais ce sont tance de notre loi, admirent aussi le règle-
les supplices qui lui ont manqué. Lorsqu'a- ment de nos mœurs, » Il ajoute * qu'il leur en-
près avoir confessé Jésus -Christ, on meurt ^ voie deux cent cinquante sesterces, et Victor,
®
dans la prison et dans les chaînes, la gloire diacre, quatre cent vingt-cinq, ce qui fait
d'un martyr est consommée. « C'est pourquoi, quarante-deux livres dix sous de notre mon-
ajoute saint Cyprien, marquez le jour de leur naie.
mort, afin que nous puissions célébrer leur 14. ® Cependant ceux qui étaient tombés Lettre
de saint Cy-
mémoire avec celle des martyrs. Il est vrai durant la persécution occasionnaient quelques prien ù Bon
clergé, en
que notre frère Tertulle, suivant son zèle troubles dans l'Eglise de Carthage, et quel- îbO.
ordinaire, outre les ser\ices qu'il rend à tous ques-uns des confesseurs continuaient à vi-
nos frères, prend encore soin de ceux qui vre dans les désordres que saint Cyprien leur
sont morts et m'écrit tous les jours où ceux avait déjà reprochés dans la lettre précédente.
qui meurent en prison vont jouir de l'immor- Voyant donc qu'il lui était encore à propos Epist. U,
pag.191.
talité bienheureuse, et nous célébrons ici, en de demeurer dans sa retraite, il écrivit de
leur mémoire, des sacrifices que nous offri- nouveau aux prêtres et aux diacres de son
rons bientôt avec vous, s'il plaità Dieu. Éten- Eglise, pour leur i^ecommander d'avoir soin
dez aussi vos soins sur les pauvres, mais sur des pauvres qui étaient demeurés fermes
ceux-là seulement qui sont demeurés fermes particulièrement des confesseurs qui étaient
dans la foi et n'ont succombé ni à la pau- sortis Mais qu'ils sachent et ap-
de prison. «
vreté, ni à la persécution. » prennent de vous, ajoute saint Cyprien, ce
* Denique ad minimum famulum suum et in deîic- et loquifur, ex quibus nos Dominus monere et insfruere
tis plurimum constitutum et dignalione ejus indiy- dignatur. Cyprian., Epist. 16.
tium : tamen ille pro sua circa nos bonitate , man- » XXX Vile de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
dare dir/natus est, die illi, inquit,secum sit,quia pax » Vie de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
Ventura est; sed quod intérim monita est, supersunt * Cet endroit ne se lit point dans l'édition d'Ox-
adhuc qui probentur. Id., ibid. On voit par là que, ford, et Jean Fellus témoigne ne l'avoir trouvé dans
du temps de saint Cyprien les révélations étaient aucun manuscrit : cependant Rigaut l'a fait impri-
encore fort communes. Le Saint dit ailleurà que Dieu mer à la suite de celle letlre, sur d'un l'autorité
lui Msait connaître aussi ses volontés par le moyen manuscrit de Reims. Cette addition commence ainsi:
des enfants qui, étant remplis du Saint-Esprit, Et quanquam clero nostro et nuper cum ad/iuc esseiis
voyaient en extase, entendaient et rapportaient les in curcere constituti. Ce qui fait voir que les confes-
avertissements que Dieu donnait à son peuple : seurs dont parle saint Cyprien étaient hors de leurs
Castigare nos liaque divina censura nec noctibus desi- prisons, et que la persécution s'adoucissait à Car-
nit, nec diebus. Prœter nocturnas enim visiones, per thage, quoiqu'elle continuât encore ailleurs.
dies quoque impletur apud nos Spiritu Sancto puero- » Fleury, tom. II, pag. 191, Hist. ecclés.
rum innocent estas, quœ in exiasi videt oculis, et audit * V* de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SALNT CYPRIEN. 299
que la discipline ecclésiastiiuc, fondée sur voit que, dès le temps queTertiillieu écrivait
l'Ecriture sainte, demande d'eux; c'est-à-dire sou traité de la Pudicité, les pécheurs avaient
qu'ils soient humbles, modestes et paisibles; recours aux martyrs et aux confesseurs, et
*
sieurs bons confesseurs, par le dérèglement communion avec les siens, » ce qui ne s'était
d'un petit nombre qui ne valent rien. » Et jamais Le principal auteur de ce désordre
fait.
ensuite : « Quant à ce que nous ont écrit nos était un confesseur nommé Lucien ®, qui, peu
frères, les prêtres Douât, Fortunat, Novat instruit des maximes de FEvaugile, donnait
et Gordius, je n'ai pu y répondre seul, parce à tous ceux qui se présentaient des billets
que, dès le commencement de mon épiscoi)at, écritsde sa main, au nom du saint martyr
j'ai résolu de ne rien faire de mon chef, sans Paul, quoique mort depuis quelque temps, et
votre avis et sans le consentement du peuple; au nom du jeune martyr Auréle, qui ne savait
mais loisque Dieu '
m'aura fait la giâce de pas écrire. fut secoudé dans un zèle aussi
Il
retourner avec vous, nous traiterons ensemble indiscret par certains prêtres de Caiihage ',
des choses ou à faire, comme le respect
faites qui, ennemis de la gloire des martyrs et de
que nous nous devons réciproquement nous la tranquillité publique, au lieu d'obliger les
aux confes- vcuous de vou* Qu'il différait la résolution, leur eussent imposé les mains, enfin qu'ils
seurs, en
250. était apparemment le rétablissement de ceux eussent fait pénitence conformément à l'in-
qui étaient tombés durant la persécution. Ils tention des martyrs qui avaient donné ces
étaient en très -grand nombre dans l'Eglise billets, communiquaient avec eux, offraient
dénommées dans ces lettres ou billets. Cet tion d'Oxford, après avoir averti les martyrs
usage n'était pas nouveau dans l'Eglise, et ou et les confesseurs de témoigner autant de
* Sed cum ad vos per Dei gratiam venero, tune de vesiram vim pati, oro vos quibus possum precibus ut
lis quœvel gesta sunt, vel gerenda, sicut honor rnutuus Evangelii memores et considérantes quœ et qualia in
poscit, in commune tractahimus. Cyprian., Epist. 14. prœieritum antecessores vestri martyres concesserint,
Telle était la déférence des saints évèqnes pour leur quum solliciti in omnibus fuerint, vos quoque sollicite
clergé et même pour le peuple fidèle. Fleury, ibid., et caute petentium desideria ponderetis. Gyprianus,
pag. 196. Epist. 13.
2 Xe de l'édition de D. Maran. Cette lettre et la * Quam pacem quidem in Ecclesia non habentes, a
suivante sont très-importantes pour la discipline de martyrihus in carcere exorare consueverunt. Tertull.,
en ces premiers temps. (L'éditeur.)
l'Eglise lib. ad Martyres, cap. 1.
Et quoniam audio, fortissimi et charissimi fratres,
* ^ Gyprianus, Epist. 15. —
• Idem, Epitt. Î7. —
impudentia vos quorumdam premi et verecundiam T Idem, Epist. 15 et 16.
300 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
zèle pour l'obsorvation des lois du Seigneur gneur et qui dei^ez un jour juger le monde
qu'ils on ont lait piraître pour la conri'ssion avec lui. Examinez bonnes
la conduite, les i'< lOi.
de son nom, il di'crit eu ces tei-nu's les ilé- œuvres et les mériles de chacun, genre et le
sordies arrivés dans Cartilage, à l'occasion la qualité des péchés, de peur que si vous
de leurs billets, i>ar la mauvaise conduite de j)romettiez, ou si nous faisions quelque chose
quel(|ues-uns des prêtres de son Eglise : avec précipitation, notre Eglise n'en rougisse
« J'avais cru que les prêtres l't les diacres devant les païens mêmes. Motlérez les de-
qui sont présents vous instruiraient pleine- mandes ({u'on vous fait, discernant et répri-
ment des règles de l'Evangile, ainsi qu'il a mant ceux qui abusent de vos grâces pour
toujours été pratiqué sous nos j)rédécesseurs, s'en faire des amis, ou même
en ti'afiquer *
sous lesquels les diacres allaient dans les pri- indignement. Il est aussi à propos que vous
sons et réglaient, [)ar leur conseil et par l'au- marquiez nommément * ceux à qui vous dé-
torité de la divine Kcriture, les demandes des sirez que donne la paix, et que vous dé-
l'on
Pag. loa. naartyis. Mais maintenant j'ai>prends avec signiez seulement ceux que vous voyez, que
beaucoup de douleur qu'ils vous empêchent vous connaissez et que vous savez avoir déjà
de suivre les divins préceptes ; qu'après que accompli * une grande partie de leur péni-
vous m'avez écrit d'examiner vos demandes tence, afin que les lettres que vous nous écri-
et d'accorder la paix à ceux qui sont tombés, rez ne donnent point d'atteinte à la foi et à la
quand la persécution sera finie, et après en discipline. »
avoir conféré avec notre clergé, eux, contre 16 *. Saint Cvprien écrivit, comme on l'a i.ettre
l'ordre de l'Evangile et même contre la de- dit,' sur le mêmemais avec beaucoup
sujet, l'Hen a so»
•' '
^ clergé, tn
mande que vous nous en
très-respi'ctueuse plus de force, aux prêtres et aux diacres de 220.
avez laite, ont la hardiesse de leur oflïir la son Eglise. Il se plaint amèrement de ce que
paix, et de leur donner l'Eucharistie avant quelques-uns d'entre eux, ne songeant ni au
q\i'ils aient t'ait pénitence, qu'ils aient confessé jugement futur, ni à l'évèque qui les gou-
un crime si graml et si énorme, et que l'évo- verne, ni à ce qui s'était pratiqué jusque-là,
que et le clergé leur aient ini[iosé les mains s'attribuent toutes sortes de pouvoir et réta-
pour les réconcili(!r. On peut pardonner cet blissent, contre l'ordre,ceux qui sont tom-
empressement à ceux qui sont tombés ; car bés. « Ils savent eux-mêmes, ajoute saint Cy- E|iist i6,
!''&'• '''^
quel est le mort qui ne se hâte de recevoir la prien, que le crime que la persécution leur a
vie? Mais c'est à ceux qui président à obser- fait commettre est le plus grand de tous ce- ;
ver l'ordre et à instruire les ignorants, de pendant, tandis que ceux qui sont coupables
peur qu'ils ne soient les meurtrit;rs du trou- des moindres péchés en font pénitence pen-
peau, au lieu d'en être les pasteurs. C'est dant un temps [)rescrit, qu'ils les confessent
tromper les pécheurs que de leur accorder selon l'ordre de la disciphne de l'Eglise, et
des choses qui leur sont pernicieuses. Et reçoivent le droit de communier par l'impo-
parce que j'ajtprends, nos très-chers frères, sition des mains de l'évèque et du clergé,
que l'impudence de quelques-uns vous presse ceux-ci sont admis à la communion, quoique
et fait violence à voire modestie, je vous la persécution dure encore; ou fait nommé-
conjure, autant que je le puis, de vous sou- ment mémoire d'eux au sacrifice de l'autel;
venir de l'Evangile et de considérer ce que et, sans qu'ils aient fait pénitence, ni confessé
les martyrs, vos prédécesseurs, ont autrefois leur crime, ni reçu l'imposition des mains de
accordé, afin de peser exactement les deman- l'évèque et du clergé, on leur donne l'Eu-
des de ceux-ci, vous qui êtes les amis du Sei- charistie. » Il rejette la faute de ce désordre
1 Hoc autem totum potest fieri, si ea quœ a vobis cum suis. Cyprian., Epist. 15. Ce qui étant indéfini,
peturdur religiosa contemplatione moderemini, intelli- on pouvait, en vertu d'un pareil billet, présenter
gentes et comprimentes eos qui personai accipientes, in vingt et trente personnes qui se diraient parents,
beneficiis vestris aut gratificanfuv, aut illicitœ nego- alliés, affrancbis et domestiques de celui qui aurait
tiaiionis nundinas aucupantur. Cyprianus, Epist. 15. reçu le billet.
Ces paroles scinbleut marquer que quelques-uns * Et ideo peto ut eos quos ipsi videtis, quos nostis,
vendaient à d'autres des billets des martyrs. quorum pœnitentiam satisfuciioni proximam conspici-
* C'est qu'il y avait des billets qui, sans désigner tis, designetis nominatim iibello, et sic ad nos fidei
personne, marquaient en général qu'un tel, avec : ac disciplinée congruentes litteras dirigatis. Id., ibid,
les siens, soit reçu à la communion. Audio enim qui- * IX« de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
busdam sic libellos fieri, ut dicatur : Communicet ille
[m* SIÈCLE. CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 301
sur les prêtres qni, plus instruits des divines ristie. Ensuite il exhorte son peuple, dont il pa„ ,97.
Ecritures que les autres, sont obligés de les loue la modestie et la retenue, à arrêter, par
avertir de leur devoir. Il leur reproche de des conseils sages et modérés, la trop grande
rendre odieuse la conduite des martyrs, et précipitation des coupables, et à leur inspirer
de les commettre avec l'évêque. Car, pendant la patience, et il ajoute : « Qu'ils écoutent l'a-
que ceux-ci écrivaient à saint Cyprien et le vis que nous leur donnons et qu'ils attendent
priaient de remettre l'examen des apostats notre retour, afin que lorsque
par la miséri- ,
et leur réconciliation après son retour et la corde de Dieu, nous reviendrons vers vous,
paix de l'Eglise^ ces prêtres communiquaient nous puissions examiner les demandes des
avec ceux qui étaient tombés, offraient avec bienheureux martyrs dans l'assemblée de
eux et leur donnaient l'Eucharistie. Il les plusieurs évêques, selon la discipline de l'E-
menace, s'ils continuent, de se servir contre glise, et en présence des confesseurs. » '
eux de la correction que le Seigneur com- -18 *. Los grandes chaleurs de l'été, mena- j^^^^^
*
çant à l'ordinaire de beaucoup de maladies,' <'<^.'aint cy-
mande, de leur défendre d'offrir le sacrifice * 1 pi'ien à son
jusqu'à ce qu'il soit retourné et qu'il leur ait obligèrent saint Cyprien à se relâcher un peu jj^''''*'
**"
fait rendre raison de leur conduite en pré- de sa sévérité. Il écrivit donc aux prêtres et
sence des confesseurs et de tout le peuple. aux diacres de son Eglise pour leur marquer
Lettre 17 *. Daus au peuple de Carthage,
la lettre de quelle manière ils devaient pourvoir aux
de saint Cy- .,/-, . a. . •
i i' •
j.
prien à son sauit Cypricu tcmoigue être vivement touche besoins de leurs frères. « Si ceux, leur dit-il, Epist. 18,
peuple, eu ' "^
. 1 t 1 • - •
j.
'
250. de compassion pour ceux qui étaient tombes, qui ont reçu des billets des martyrs et qui p^s-''^^-
et leur fait espérer, de la bonté de Dieu, le peuvent être aidés auprès de Dieu par leurs
pardon de leur faute, pourvu qu'ils ne préci- prières *, tombent dans quelque maladie qui
Epist. 17, pitent rien. Il répète ce qu'il avait dit dans les mette eu danger, ils pourront, sans atten-
pas- 190,
2^ lettre précédente touchant les lettres que dre notre retour, faire la confession de leur
les martyrs lui avaient écrites et sur findul- crime devant premier prêtre qui se trou-
le
gence indiscrète des prêtres qui, sans obser- vera présent; ou, s'il ne se trouve point de
ver l'ordre de la pénitence, avaient com- prêtres, et que la mort presse, devant un
mencé de communiquer avec les tombés, diacre ^, afin qu'ayaut reçu l'imposition des
d'offrir pour eux et de leur donner l'Eucha- mains pour la pénitence, ils aillent au Sei-
1 Saint Cyprien semble même dire qu'il les sus- gativa eorum apud Deum adjuvari possunt, si incom'
pendait dès-lors: Scienfes quoniam si ultra in iisdem modo aliquo et infirniitutis periculo occupati fuerint,
perseveraverint uiar en admonitione, qua me uti Do-
, non expectata prœsentia nostra, apud presbyterum
minus jubef ; ut intérim prohibeantur offerre, ncturi quemcumque prœsentem, vel si presbyter non expertus
apud nos et apud confessores ipsos et apud plebem fuerit et urgere exiius cœperit, apud diaconum quo-
causam suam. Cyprian., Epist. 16. Ce qui confirme que exoynologesim facere delicti sui possini, ut manu
cette conjecture, c'est que saint Cyprien approuva, eis in pœnitentta imposita, veniant ad Dominum cum
dans la suite, qu'on eût séparé de la communion pace quam dari martyres litteris ad nos factis deside-
Gains, prèlre de Dide, et quelques autres qui com- raverunt. Cyprian., Epist. 18.
muniquaient avec ceux qui étaient tombés, ainsi ^ Fleury ne croit pas que le passage que nous ve-
que nous le remarquerons en parlant de la let- nons de rapporter doive s'entendre de l'absolution
tre XXXIV' de saint Cyprien à son clergé. Il est sacramentelle, mais seulement de quelque cérémo-
vrai néanmoins que Gaius ne fut séparé de la com- nie qu'un diacre peut accomplir par commission de
munion qu'après plusieurs monitions : Intègre et cum l'évêque. Fleury, tom. Il Hist. ecclés., pag. 201.
disciplina fecistis, fratres cbarissimi, qucd consi/io col- C'est le sentiment le plus commun et le plus con-
legurum nieorum qui prœsentes erant, Gaïo, Diddensi forme à la pratique de l'Eglise. D'autres sont per-
presbytère et diacono ej'us, censuistis non communican- suadés que la permission que saint Cyprien donne
dum : qui communicando cum lapsis, et offerendo à ses diacres, au défaut des prêtres, était pour ab-
oblationes eorum, in pravis erroribus suis fréquenter soudre véritablement des péchés les pénitents qui
deprehensi, et semel alque iterum a collegis mets mo- se trouvaient en danger de mort. Ils ne croient pas,
niti ne hoc fanèrent, in prœsumptione et audacia sua pour cela, que ces diacres aient eu le pouvoir des
pertmaciter perstiterunt. Cyprian., Epist. 34. Mais clefs, comme l'ont les prêtres, mais seulement l'u-
nous ne voyons nulle part que saint Cyprien eût sage de ces à cause du cas de nécessité et par
clefs,
déjà averti les prêtres dont il est question dans la commission de l'évêque. Cette dernière opinion est
lettre XVb. En tout cas, on ne peut douter qu'il ne fondée: l» sur les paroles de saint Cyprien, qu'il est
les menace dans cette lettre de quelque chose de difficile d'expliquer d'une autre manière sans leur
plus que de leur défendre d'offrir le sacrifice. faire quelque violence 2° sur la pratique de quel
;
* X^ de l'édition de D. Maran. [L'éditeur.) ques Eglises dont les peuples étaient gouverné
. > XII' de l'édition de D. Maran. [L'éditeur.) seulement par des diacres ce qui n'aurait pu se
;
* Qui libellas a martyribus acceperunt et prœro- faire, si ou ne leur eût accordé le droit d'absoudrç
302 HISTOIRE GIÎNËRALE DES AUTEURS ECCLT^.SI ASTIQUES.
gnoiir avec Ki paix qun les martyrs nous ont 19 *.Le clergé do Carthage, qui n'avait Lettre
(le soint Cy-
]irié (le donner i)ar les lettres qu'ils
leur fait - aucune réponse à plusieurs lettres de prien à son
cliM'gé, en
nous nn ont (écrites. Soutenez aussi, par votre saint Cypri(Mi », répondit à celte dernière, et 280. ,
présence, le reste de ceux qui sont tombés, demanda conseil sur Timportunité de quel- Episl.19,
l'ag.198.
et encouragez-les, par vos exhortations, à ne ques tombés. Le Saint écrivit à ses clercs
perdre point la conliance qu'ils ont en la qu'il n'avait rien à ajouter à ce qu'il leur
miséricorde de Dieu. Ayez soin encore des avait mandé dans sa lettre touchant ceux qui,
catéchumènes qui se trouveront en danger ayant des billets des martyrs *, se trouvaient
de mort, et, s'ils implorent la grâce de Dieu, en danger de mort; mais qne, pour les autres
c'est-à-dire le baptême, elle ne doit pas leur qui, n'ayant point do billets, pressaient indis-
être refusée. » crètement leur absolution, comme c'était une
chose dans un concile de Tours de l'an 1163, sous Eglises, donné l'absolution sacramentelle, ils l'ont
le pape Alexandre 111. Pures et latrones, si in furando fait par un abus qui a été local et non universel.]
aut pradando occidantur, visum nobis est pro eis non 1 XIII" de l'édition de D. Maran. (L'éditeur.)
esse orandum, si auteyn apprehensi vel vulnerati pres- * Mirer vos, fratres charissimi, ad multas epistolas
bytero aut diucono confessi fuerint, connnunionem non meas quas ad vos fréquenter misi, nunquam mihi res-
negamus. Apud Martenne, lom. IV Thesauri anec- cripsisse. Cyprian., Epist. 18.
dotorurn, pag. 144. Un concile de Londres, tenu en 3 Legi litteras vestrus\, fratres charissimi, quibus
1200, porte Adjicimus, ut non liceat diaconibus bap-
: so'ipsistis salubre consiliitm vestrum non déesse fra~
tizare vel pœnitentias dure, nisi dup/ici necessitate, tribus nostris, etc. Cyprian,, Epist. 19.
videlicet quia sacerdos non potest , vel absens, vel • '*
Safis plene scripsisse me ad hanc rem proximis
stulte non vult, et mors imminet puero vel œgro. litteris ad vos factis credo, ut qui libelluma marty~
Concii. Londin., cap. 3, tom. XI Concii., pag. 14. ribus acceperunt, et auxilio eoram adjnvari apud
Dans un synode tenu à Angers l'an 1273, on y fit ce Dominum in delictis suis passant si premi infirmi-
,
aflFaire qui regardait toute rEQ:lise, il fallait de l'empereur, était depuis sorti de prison ;
attendre la paix pour en délibérer dans une vers le mois de mai de la même année 250,
assemblée d'évèques, en présence du peuple il écrivit à un de ses amis, appelé Lucien,
fidèle. Ce serait blesser la religion, de faire qui était aussi du nombre des martyrs, et
entrer dans l'Eglise des apostats, tandis qu'il même le chef ^ Je ceux de Carthage, une
y a des confesseurs exilés qui n'ont encore lettre pleine de modération, de prudence,
pu revenir et qui sont dépouillés de tous d'humilité, de modestie et de respect pour
leurs biens. Ceux qui sont si pressés ont en la discipline de l'Eglise. Après les témoi-
leur pouvoir ce qu'ils demandent. La guerre gnages d'une tendre, sainte et ancienne ami-
n'est pas finie, l'on combat encore tous les tié, Célérin lui marquait son extrême afîlic-
jours. Si leur repentir est sincère et leur zèle tion sur la mort spirituelle de sa sœur, qui
si ardent qu'ils ne puissent soulïrir de délai, avait trahi Jésus-Christ et sacrifié aux idoles
ilspeuvent recevoir la couronne du martyre. pendant la persécution. « C'est ce qui a été Epist. 21,
vas;.200 et
Lettre 20 '. Saint Cypricn éci'ivit en même temps cause, ajoute-t-il, que j'ai passé dans les lar- '201.
de saint Cy-
prien au
elei'içé de
aux prêtres et aux diacres de Rome pour mes tout ce temps de Pâques ^, qui est im
Rome, ea leur rendre compte de sa retraite, dont on ne temps de joie, pleurant nuit et jour, et cou-
2S0.
leur avait pas fait un rapport assez fidèle. Il vert de sac et de cendre, et je continue dans
dit qu'il ne s'est retii^é que dans la crainte la même affliction, jusqu'à ce que Notre-Sei-
d'allunier davantage la persécution par sa gneur Jésus-Christ, par sa grâce et par votre
Epist. 20, présence. « Mais, quoique je sois absent, intercession, ou par celle que vous demande-
pag. 199.
ajoute-t-il, je n'ai rien omis, selon ma fai- rez pour elle à nos frères qui seront couron-
biesse, de tout ce qui pouvait servir à nos nés, lui accorde le pardon de son crime. Car
frères pour les maintenir dans l'observation je me souviens de votre charité, et je ne
exacte des lois du Seigneur.» Il justifie sa vi- doute point que vous ne soyez touché de
gilance épiscopale par les treize lettres qu'il douleur, avec tous les autres, de la faute de
avait édites depuis qu'il s'était retiré, et nos sœurs Numérie et Candide, que vous con-
marque qu'il les leur envoyait, afin qu'ils naissez. Si vous intercédez pour elles auprès
apprissent tout ce qui s'était passé, et com- de Jésus-Christ, vous qui êtes ses martyrs, je
ment il conformé à leurs avis, touchant
s'était crois qu'il leur pardonnera, en considération
les apostats malades, « de peur, dit-il, que de la pénitence qu'elles ont faite et des as-
notre conduite ^, qui doit être la même en sistances qu'elles ont rendues à nos frères
tout, ne fût différente en quelque chose. » qui, étant bannis d'Afrique, sont venus ici, et
Lettre de 21 3. Un nommé Célérin, après avoir souf- qui vous rendront eux-mêmes témoignage
Céli»rinà
LncieD
S50.
, ea fert à Rome les tortures * et les tourments de leurs bonnes œuvres. Je vous prie donc
les plus cruels pendant l'espace de dix-neuf de parler aux autres martyrs, vos confrères,
jours, et confessé Jésus-Christ en présence de Numérie et de Candide, et de conjurer
infestât ionis principe et auctore congressus ; dum inex- Epist. 21. On voit, par cet endroit, que cette lettre
pugnabili firmitate certarninis sui adversarium vincit, fut écrite avant la XVIlIe de saint Cyprien et les
vincendi cateris viam fecit ; non brevi compendio vul- suivantes.
30t HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pouniuoi je vous supplie que, quand
ceux d'entre \on^ qui seront couronnés
les « C'est
bien qu'elle n'a point sa- examinée devant l'évê.iue et qu'elles auront
tôt et'ie sais tort
personnes ayant été confessé leur faute. » Lucien ne mourut pas
criiié La cause de ces
dans la prison, et continua » à donner indif-
examinée, ceux qui nous gouvernent
leur
ainsi jusqu'à ce féremment aux apostats des billets écrits de
ont ordonné de demeurer
ait un évoque *. Je vous
supplie donc sa main au nom des confesseurs, particuhe-
au'il y
mes frères, rement au nom du martyr Paul et d'un jeune
de rapporter cette alfaire à tous
vos confesseurs, afin que vous
aidiez celles homme nommé Aurèle.
récompense, 23 *. Saint Cyprien eut tout lieu d'être in- Lettre
qui ont recours à vous; et, en des confes-
grande place de Rome. puisqu'il attribue la môme chose à tous les autres,
1 C'était un lieu dans la
« C'est que saint Fabien étant mort, le clergé de nommément à saint INlappalique, qui n'avait garde
vacance du saint-Siége. de tomber dans cette faute lui qui n'avait jamais
,
« au nom de JéiUà-Glirist. »
C'est de Tillemont, tom. IV Hist. ecclés., pag. 74 ; et Cypr.,
* Il devait dire :
Epist 24, Elle portait : « La nécessité du temps fait ne pouvant juger seul l'affaire dont les con- prieo a son
pae.ioi. 250'^^'
^^
q^g jjQ^g jjg donnons pas légèrement la paix fesseurs lui avaient parlé, il voulait qu'on
à ceux qui sont tombés. Mais^ quant à ceux exécutât l'ordre qu'il avait donné dans ses
qui, après avoir sacrifié aux idoles, ont été dernières lettres savoir, que les tombés se
,
tentés de nouveau et se sont bannis volon- soumettraient à son examen, puisque les
tairement, me
semble qu'ils ont effacé leur
il confesseurs l'avaient ainsi marqué dans leur
pécbé, par l'abandon qu'ils ont fait de leurs lettre. « Afin que vous sachiez, ajoute saint Epist. 26,
terres et de leurs maisons, pour faire péni- Cyprien, ce que m'a écrit Caldone, et ce que p*&- '^^^
tence et suivre Jésus -Christ. » Caldone mar- je lui ai répondu, j'ai joint à cette lettre la
que, entre autres,un nommé Félix, Victoire copie de la sienne et de ma réponse, et je vous
sa femme, Lucius, une autre femme nommée prie de lire le tout à nos frères, afin que cela
Bone ; et ajoute « Toutes ces personnes de-
: les porte de plus en plus à avoir patience "
mandent la paix en disant Nous avons recou- : et à n'ajouter pas une seconde faute à la pre-
vré la foi que nous avions perdue, nous avons mière, en ne voulant obéir ni à l'Evangile ni
fait pénitence et confessé publiquement Jé- à nous, et ne permettant pas qu'on examine
sus-Christ. Quoique je croie qu'on doive leur leur cause. »
donner la paix, je les ai renvoyées à votre 27 ^. En même temps il écrivit aux prêtres lettres
conseil, afin de ne rien faire mal à propos. et aux diacres de Rome pour leur rendre ''pi-feL"' au'
Ecrivez -moi donc ce que vous avez résolu compte de l'état où se trouvait, en Afrique, ^nT^foJ^s-
en commun. » l'affaire des Tombes. Il s'étend sur l'indis- më.'Vn'wo".
^^ *' Saint Cypricn approuva « entière- crétion de Lucien et du billet qu'il avait écrit
de.ainfc'"-
prienàcai-
uone en,
meut la conduitc de Caldone, et, pour lui au nom des autres confesseurs ; sur les désor-
, .
"'"*•
faire savoir comment il s'était gouverné lui- dres ' arrivés à l'occasion de la paix que ce
même envers ceux qui lui avaient demandé martyr et les autres avaient accordée indiffé-
la paix, il lui envoya cinq lettres qu'il avait remment à tous ceux qui la leur avaient de-
Epist. 25, écrites sur ce sujet « Je les ai déjà adres-
'. mandée; il marque qu'il leur envoie diverses
PaS-205. , , T. -1 . , 1 , 1,. .
sees, lui dit-il, a plusieurs de nos collègues, qui lettres qui regardaient cette affaire. Il loue en g g,
j^j
les ont approuvées et qui m'ont fait réponse ces termes celles que le clergé et les confes-
qu'ils sont en cela de mon sentiment, et qu'il seurs de Rome avaient écrites sur le même
est conforme à la foi catholique. Faites -les sujet, et qui ne sont pas venues jusqu'à nous :
tenir aussi, s'il vous plaît, au plus grand nom- « Au reste *, la lettre que vous avez écrite
bre possible de nos collègues, afin qu'il n'y à notre clergé, et celle que les bienheureux
ait parmi nous tous qu'une même conduite et confesseurs Moïse, Maxime, Nicostrate et les
un même esprit, suivant les préceptes du Sei- autres ont écrite à Saturnin, à Aurèle, ainsi
gneur. » qu'à d'autres personnes, sont survenues fort
de sainf cî- 26 *. Il écrivit ensuite à son clergé que à propos , car elles sont toutes pleines de la
utrumque ad vos hgendum iransmîsi. Cyprian., raison. {L'éditeur.) — * XYII» de l'édition de D. Ma-
Epist. 27. ran. [L'éditeur.)
1 XIX» de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.) ^ Dans d'autres éditions on lit Magis ad pœniten-
:
2 II lui donne en même temps de grands éloges tiam componantur. Qu'ils se disposent de plus en plus
et fait connaître, en peu de mots, son mérite et sa à la pénitence.
vertu : Accepimus litteras tuas, frater charissime, sa- 6 XXII« de l'édition de D. Maran. La lettre à Moïse
tis sobinas et integritatis ac fidei plenas. Nec mira- est la XXVe dans D. Maran et la XXllIe dans l'édition
mur si exercitatus et in Scripturis dominicis peritus d'Oxford. (L'éditeur.)
caufe omnia et consulte géras. Recte aufem sensisti ' Denique hujus ssditionis origo jam cœpit. Nam in
circa impertiendam fratribus iiostris pacem, quant sibi provincia nostra per aliquot civitates in prœpositos
ipsi vera pœnitentia et dominicœ confessionis gloria impetus per multitudinem factus est, et pacem quam
reddiderunt, sermonibus suis justificati, quibus se ante semel cuncti a martyribus et confessoribus datam cla-
damnaverunt. Cypr., Epist. 25. milabant, confestim sibi reprœseniari coegerunt; terri-
3 Voici le texte de saint Cyprien Quos nunc : tis et subactis prœpositis suis, qui ad resistendum mi'
urgentes (il s'agit des laps) et pacem temere atque nus virtute anitni et robore fidei prœvalebant. Cypr,,
importune extorquentes , quomodo disposuerimus ut Epist. 27.
scires, librum tibi cum epistolis numéro quinque misi, Opportune vero litterce vestrœ supervenerunt quas
8
quas ad clerum, et ad plebem, et ad martyres quoque accepiad clerum factas, item quas benti confessores
Evidemment saint Cyprien parle
et confessores feci. Moyses et Maximus, Nicosti-atus et cœteri, Saturnino,
ici d'un livre distinct des lettres. D. Ceillier, avec Aurelio et cœteris miserunt. In quibus Evangelii pie-
Fellus, ne le distingue pas des lettres. Rigaut et Ba- nus vigor et disciplina robusta legis dominicœ conti-
luze se prononcent contre ce sentiment, et ils ont nentur. Cyprian., Epist, 27.
u. 20
306 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES,
de la
la l.n-meté les porteurs.Après avoir donné à l'immilitc s, snint c.y-
vigueur évanf^élique ot de |M icn , tn
à la sunisancc ot à la sagesse de ce samt eve-
21)0.
et marquent qu'ils lui envoient la copie de évêques des Eglises de notre voisinage, et
la lettre qu'ils avaient eux-mêmes écrite avec ceux que la persécution a jetés ici des
en Sicile, et que nous n'avons plus; puis ils provinces éloignées, et nous avons cru qu'il
ajoutent, en continuant de parler de l'affaire ne fallait rien innover avant l'établissement
des Tombés : «Nous avons une nécessité bien d'un évêque, mais tenir en suspens ceux qui
plus pressante de différer, nous qui, depuis la peuvent attendre ; et qu'à l'égard de ceux qui
mort de Fabien, de glorieuse mémoire, n'a- se trouvent en péril de mort, si, après avoir
vons pu encore, par la conjoncture fâcheuse fait pénitence et détesté souvent leurs péchés,
du temps, avoir d'évêque, pour régler toutes ilsdonnent des signes d'un vrai repentir, par
ces choses et pour examiner avec autorité et leurs larmes et leurs gémissements, quand il
conseil ce qui regarde ceux qui sont tombés. n'y aura humainement plus d'espérance qu'ils
Cependant nous sommes de votre avis pour : puissent vivre, en ce cas on les secoure avec
une affaire d'aussi grande importance, il faut beaucoup de précaution, laissant à Dieu le ju-
attendre la paix de l'Eglise, et ensuite exami- gement de telles personnes, et prenant garde
ner la cause des apostats, en consultant avec seulement que les méchants ne se prévalent
les évêques, les prêtres, les diacres, les con- de notre trop grande facilité, et que ceux qui
fesseurs et les laïques qui sont demeurés fer- sont véritablement pénitents, ne nous accu-
mes. Car il nous seinble que ce serait nous sent avec raison de dureté et de cruauté. »
rendre extrêmement odieux, si un seul pro- Telle est la lettre des prêtres et des diacres de
nonçait sur un crime commis par tant de l'Eglise de Rome que l'on regarde avec jus-
,
personnes. Un décret ne peut être ferme sans tice ' comme la plus sage, la plus humble et la
avoir le consentement de plusieurs. Regardez plus apostolique qui soit peut-être jamais sor-
le monde entier ravagé et plein des restes de tie du clergé de Rome. On croit * qu'elle fut
ceux qui sont tombés. Il faut que, comme le composée par Novatien, qui était alors prêtre
crime s'est répandu partout, on s'assemble de cette Eglise, et saint Cyprien le dit ' assez
aussi de tous côtés pour en délibérer. » En- clairement dans sa lettre à Antonien. Le con-
suite ils invitent saint Cyprien à joindre ses fesseur * Moïse y souscrivit, de même que les
prières et ses larmes aux leurs, pour deman- prêtres de l'Eglise de Rome; ensuite elle fut
der à Dieu la paix de FEglise et la conver- envoyée par tout le monde ^, pour venir à la
sion des pécheurs ; ils exhortent ceux-ci à connaissance de toutes les Eglises ^.
être humbles, soumis, modestes dans leurs 30 Satur et Optât apportèrent aussi à
'. Lettres
des ronfes-
demandes ; à n'intercéder que par leurs lar- saint Cyprien une lettre de la part des prê- senrs de Ro-
me A saint
mes, leurs gémissements et leur pénitence; tres Moïse et Maxime, des diacres Nicostrate Cyprien, et
de saint Cy-
à envisager comme il faut la profondeur de et Rufm et des autres confesseurs qui étaient ]irien à sou
clerfré.
la plaie mortelle qu'ils ont reçue, et à ne pas prisonniers à Rome, par laquelle ils répon-
prévenir par leur importunité le temps pres- daient à celle qu'il leur avait écrite. « Votre
Epist. 31,
crit, de peur d'irriter encore davantage celui lettre, lui disent-ils, a été pour nous comme pag 212.
qu'ils veulent fléchir. Ils terminent leur lettre un rayon dans la tempête, comme le calme
par cette conclusion « Cherchant donc à gar-
: dans une mer orageuse, comme le repos
der quelque tempérament, nous avons conféré dans le travail, comme la santé dans la mala-
longtemps et en grand nombre avec quelques die, et comme la lumière dans les ténèbres.
Nous l'avons lue avec tant de plaisir et nous dent rien? Qui voudra se laisser charger de
autres à souffrir, ne mérite pas moins aussi lui serait ])0ssib]e, en sorte qu'elles fussent
connues tant des de Cartilage, que des
fidèles
d'être couronné que ceux qui ont souffert, et
il n'est pas moins glorieux d'avoir encouragé
évèques, prêtres et diacres des autres villes,
au combat, que d'avoir combattu. Ils relèvent et d'en laisser prendre des copies à tous ceux
la manière vive et éloquente avec laquelle qui voudraient, afin qu'en attendant que
le
l'affaire des tombés fût décidée par un con-
saint Cyprien leur représentait dans sa lettre
la gloire des martyrs, pour les engager eux- cile,on observât partout une règle et une
mêmes à confesser hardiment le nom de Jé- conduite uniforme sur ce point.
sus-Christ au milieu des supplices. » Ensuite, 31 '. Pendant que ces choses se passaient,
après avoir rapporté plusieurs passages de quelques-uns des tombés, du nombre de ceux
l'Ecriture par lesquels le Seigneur anime
*,
qui, sans vouloir faire nulle pénitence pour
les siens au combat, ils ajoutent: «Lorsque leurs crimes, pressaient toujours leur rétablis- Epist.
33.J
autres semblables paroles de notre Sauveur, au nom » de toute l'Eghse, non pour le prier
qui sont comme autant de feux pour embra- de leur accorder la paix, mais pour lui décla-
ser notre foi, non -seulement nous n'appré- rer qu'elle leur était due, puisqu'ils l'avaient
hendons point les ennemis de la vérité , mais obtenue du martyr Paul, qui, avant de mou-
rir, l'avait, disaient-ils, accordée à tous. Saint paj.aic.
Ptg.H4. nous les provoquons même au combat. » Ils
prient le saint évêque de demander pour eux Cyprien, sans s'arrêter à relever l'insolence
louent sa vigilance de cette termes piquants dont
lettre, ni les
à Dieu la victoire; ils
de dignesde pénitence
fruits ceux qui étaient tombés, puisqu'il est écrit
sans avoir fait ;
ceux qui l'ont renié n'y per- ment qui sont ceux à qui je dois répondre,
Jésus-Christ, si
teur.)
11; Rom. vin, 35.
« Ecce aliud gaudium nosirum, quod id officio
* Cyprian., Epist. 36.
temporis B Miror quosdam audaci temeritate sic mihi scribere
episcopalus tui, licet intérim a fratribus, pro
distractus es, tamen non defuisti : quod voluisse , ut Ecclesiœ nomme litteras facerent. Cypr.,
conditione,
fréquenter corroborasti quod Epist. 33. Ces deux lettres des Tombés à saint Cy-
litterii confessores ;
justis prœ- prien sont perdues, et nous n'en savons que ce que
etiam sumptus necessarios de tuis laboribus de ses
quod omnibus te prœsentem quodammodo saint Cyprien en a inséré dans quelques-unes
buisti;
lettres, particulièrement dans la XXVI» et
XXXIII».
exhibuisti ; quod in nulla officii tui parte, quasi
ali-
31. « Matth. xxu, 32.
quis desertor daudicasti. Cyprian., Epist.
[m* SIÈCLE.] CHâPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 309
puis je répondrai sur tous les articles de vo- choses jusqu'à ce que nous soyons présents.»
tre lettre selon mon peu de suffisance et de Saint Cyprien donna avis de tout ceci au Epist. 35,
pag. 2i8.
capacité. » clergé de Rome,
et lui envoya des copies des
Lettre 32 *. quelque temps après aux
Il écrivit deux dont nous venons de parler,
lettres
de saint Cy-
prii'ii à soa prêtres et aux diacres de son Eglise touchant avec celles des tombés, le tout par Fortunat,
clerf;é et au
c]erpéde différentes choses sur lesquelles ils l'avaient sous-diacre.
Rome, en
sso.
consulté. La principale regardait un nommé 33 '. La réponse des prêtres et des diacres Lettre
(lti cleigé <la
Gaïus, prêtre do Didde, et son diacre, qui de Rome est d'une grande beauté. Après Rome .\
meurés opiniâtres dans leur faute; ce qui coup d'éloquence, et la témérité de la de-
avait obligé le clergé de Carthage, confor- mande des apostats, et la nécessité indispen-
mément à la discipline de l'Eglise et avec l'a- sable de la pénitence pour un aussi grand
vis des évêques présents, à se séparer de leur crime que celui de l'idolâtrie. Parlant des
communion. Samt Cyprieu ® approuva la billetsque les martyrs accordaient aux tom-
conduite de son clergé en ce point et lui or- bés, ils disent qu'ils en usaient ainsi, pour
donna, par cette lettre, d'en user de même à ménager en même temps leur modestie et la
l'égard des prêtres et des diacres, soit de Gar- vérité; car, se voyant pressés par plusieurs
thage, soit étrangers, qui tomberaient dans et voulant se délivrer de leur importunité, ils
avoir abandonné leur poste et leurs fonctions server inviolable la pureté de l'Evangile. Ils
durant la persécution, sans la permission de font ensuite l'éloge de l'Eglise de Carthage *,
Tévêque, étaient revenus, saint Cyprien, sur de sa foi, de son humilité, de sa charité, et
la prière de son clergé, s'explique de la sorte: paraissent surpris que quelques-uns de ses
« Je ne puis juger moi seul cette affaire, et membres aient usé envers saint Cyprien de
elle doit être examinée non-seulement avec termes moins respectueux. Enfin ils le re-
mes collègues, mais aussi avec tout le peu- mercient des avis qu'il leur avait donnés tou-
ple le règlement qu'on fera là -dessus de-
, chant Privât, évêque de Lambèse ^, en Numi-
vant servir d'exemple à la postérité en de , die; ce qui fait voir que saint Cyprien leur
pareilles rencontres, pour tous les ministres avait écrit de prendre garde à cet hérétique.
de l'Eglise. Qu'ils s'abstiennent cependant Mais nous n'avons plus la lettre où il en
de rien recevoir des distributions de tous les parlait.
mois, non comme étant privés du ministère 34 °. Sur la fin de l'automne, Célérin, Fun Lettr
ecclésiastique, mais afin de remettre toutes des plus illustres confesseurs de Rome, étant ''l'ïHea'aur
1 XXVII et XXXVIIIe de l'édition de D. Maran. tique de la colonie de Lambèse, » avait été condamné
{L'éditeur.) depuis plusieurs années pour des crimes atroces
* Intègre et cum disciplina fecistis, fratres charissimi, dans un concile de quatre-vingt-dix évêques, et par
quod consilio collegarurn meorum, qui prœsentes erant, les lettresde saint Fabien de Rome et de Donat de
Gaio Diddensi presbytero, et diacono ejus, censuistis Carthage. Ses fourberies étaient déjà connues des
non communicandum, gui communicando cum lapsis, prêtres de Rome, lorsque saint Cyprien les avertit
et ofj'erendo ohlaliones eorum in pravis erroribus suis de s'en défier, ainsi qu'il parait par la fin de la
fréquenter deprehensi, et semel atque iierum a collegis XXVIe lettre, où ils disent Quod autem pertinet ad
:
meis admoniti ne hoc facerent, in prœsumptione et ciu- Privafum Lambesitanum, pro tuo more fecisti qui
dacia sua pertinaciter jjerstiterunt. Gypr., Epist. 34. rem nobis soUicitam nuntiare voluisti: omnes enim
3 XXXe de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.) nos decet pro corpore totius Ecclesiœ, cujus per varias
* Novimus Carthnginensis Ecclesiœ fidem, novimus quasque provincias membra digesta sunt, excubare.
institutionenij novimus humilitatem. Unde ettam mi- Sed nos etiam ante litferas tuas fraus callidi hominis
rati sumus, quod quœdam in te per epistolam injecta latere non potuit. Nam cum antehac quidam ex ipsius
durius notarernus : cum amorem vestrum mutuuni et nequitiœ cohorte venisset vexillarius Privati futurus et
charitatem exemplis multis reciprocœ affectionis in vos fra.udulenter litteras a nobis elicere curaret, nec quis
inviceni sœpe comperissemus. Cyprian., Epist. 36. esset latu't, nec litteras quas volebat accepit, Apud
* On voit, par la cinquante-neuvième lettre de Cypr., Epist. 36.
saint Cyprieu, que Privai, qu'il appelle « ce vieil héré- " XVe de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
31 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
r.onff«.«e.ir« fcvciiu à Cartliiii^e *, après un an de prison d'abord devant les magistrats de Carthapje,
"'"*'*
«0. et a[)rès avoir souflcrt de très-cruels suppli- qui l'avaient bauui ; ensuite dans la place
ces pour la foi, vint aussitôt trouv(!r saint pubU(iue, où il avait soull'ert de grands tour-
Cyprien dans sa pour l'informer de
retraite, meuts et vaincu le proconsul même. Il m6ri-
tout ce qui se passait à Home. Il lui rapporta un rang plus élevé ipie celui de
tait lecteur;
l'extrême affection de Moïse, Maxime et des mais comme il était encore fort jeune, saint
autres confesseurs de cette ville envers lui. Cyprien le fit commencer par la cliarge de
Ces rapports obligèrent le saint évêque à lecteur, jugeant qu'il n'y avait rien de plus
leur écrire de nouveau pour leur témoigner convenable que de faire servir à la lecture
combien il était sensible aux marques de publique des livres divins, la même voix
E|)isi. :î7, Dans cette lettre, qui est ex-
leur aflection. qui avait glorieusement confessé le nom de
trèmement tendre et qui ne respire que cba- Jésus-Clirist. Saint Cyprien le faisait lire tous Epist.30,j
'
rite etamour pour Jésus -Christ, saint Cy- les dimanches en sa présence, en attendant
^^'^' '
prien marque qu'il y avait près d'un an que qu'il pût lire publiquement dans l'Eglise,
ces saints confesseurs étaient en prison, et lorsque la paix serait rendue. Célérin fut or-
dit (ju'ils ont passé ce temps en de continuels donné lecteur avec lui; mais il n'accepta cet
221. triomphes. Autant de jours, leur dit-il, au-
« honneur qu'après y avoir été contraint par
tant de nouveaux sujets de louanges; et la une vision céleste. Son aïeule, Célérine, et 224.
longueur du temps n'a fait qu'accroître vos ses oncles,Laurent et Ignace, avaient souffert
mérites. Celui qui souffre la mort d'abord ne le martyre, et il portait lui-même sur son
triomphe qu'une seule fois; mais celui qui, corps plusieurs cicatrices des plaies qu'il avait
souffrant sans cesse, combat contre la dou- reçues dans la prison, où il était demeuré
leur et n'en est point surmonté, triomphe pendant dix-neuf jours, chargé de chaînes et
tous les jours. » Il s'étend ensuite sur les les jambes attachées à une pièce de bois. Son
louanges du martyre et du courage avec le- mérite le fit donc dès-lors destiner à la prê-
quel ces saints confesseurs avaient surmonté trise, de même qu'Aurèle ; et, quoiqu'ils ne
la faim, la soif et les horreurs d'une prison fussent que lecteurs, saint Cyprien leur as-
affreuse; puis il ajoute: « C'est maintenant, signa la même distribution par mois que
mes très-chers frères, qu'il faut que vous les prêtres recevaient. Numidique était un i:pisi.4^
vous souveniez de moi, et que, parmi ces homme plus âgé, qui s'était rendu illustre par •'*= "' '
grandes et divines pensées dont votre esprit la gloire de sa confession, aussi bien que par
est occupé, vous ne m'oubliiez pas, mais me la grandeur de sa vertu et de sa foi. Il avait
donniez quelque part dans vos prières. Car, fortifié par ses exhortations un grand nom-
que pouvez-vous demander à Notre-Seigneur bre de martyrs lapidés et brûlés, et vu, avec
que vous ne méritiez qu'il vous accorde, vous une sainte joie, sa femme, qu'il chérissait,
qui avez si bien gardé ses commandements; brûlée avec les autres. Lui-même, à moitié
qui, par une foi sincère et généreuse, avez brûlé et accablé de pierres, avait été laissé
toujours suivi les règles de l'Evangile et af- pour mort ; sa fille, qui cherchait son corps
fermi, par la constance de votre martyre, la pour l'enterrer, le trouva encore en vie, le
foi chancelante de plusieurs de nos frères. » retira, et il revint en sauté. Saint Cyprien
Trois lot- 35 Peu après l'arrivée de Célérin, c'est-
*. le mit au nombre des prêtres de l'Eglise de
cypdeû'ù à-dire sur la fin de l'année 250, saint Cy- Carthage, dans l'espérance que Dieu ferait
etàFonpeii- prieu, profitant de la présence de quelques refleurir,par lui et par d'autres semblables,
évéques qui étaient venus le trouver dans sa la gloirede son clergé, flétrie par la chute de
retraite,ordonna lecteurs Aurèle et Célérin, quelques-uns de ses membres qui avaient
et fit Numidique ' prêtre de Carthage. Au- renoncé à la foi dans la persécution. Il donna
rèle joignait à des mœurs très -pures une avis de tout ceci à son clergé et à son peu-
3^ humflité et une modestie singulière. Il avait pie, qu'il n'avait pas consulté en cette occa-
P .^,
pag. 2:2.
'
confessé deux fois le nom de Jésus-Christ, sion, comme U avait coutume de le faire;
t Célérin, le même qui écrivit fi Lucien, confcs- Saint Cyprien ne dit pas qu'il ordonna prêtre
»
seur, était un jeune laïque, d'une grande vertu ; Numidique, mais seulement qu'il l'immatricula au
comme il était on le renvoya en son
d'Afrique, clergé de Carthage: Ut Numidicus presbyter ads-
pays, après l'avoir laissé pendant un an en prison. crihatur presbyteroi-um Carthaginensium numéro.
« XXXIII, XXXIV, XXXY« de l'édition de D. Ma- Epist. 40.
ran. {L'éditeur.)
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 311
sachant bien qu'il n'est pas besoin d'atten- avons • encore une espèce de billet ou d'affi-
dre le témoignage des hommes lorsque Dieu che qui est comme la sentence par laquelle
s'est déclaré lui-même, ilsdéclarèrent excommuniés FéUcissime, Au-
de
I.ctttvs
(^akloiie
3G Vers le commencement de l'an 251,
'. gende et cinq autres, dont deux, Répostus et
'^^"^^ Cyprien envoya à Carthage les évê- Sophrone, avaient été bannis pour la foi.
pril"n"oU'ë
pr"™\uif.î- 1^63 Caldonc et Herculanus, avec les prê- 37 *. Saint Cyprien écrivit sur ce suiet à i-ettre
, ,
1 X -, ,
desajijt Cy-
sn,i>'t"a,'. vl- *res Rogatien et Numidique, tous les deux il- tout son peuple tant aux tombés ou à ceux
, p''«" •> ^oa
hnssuiicuM
i^is^rgs confesseurs, pour examiner, en son qui étaient demeures fermes, pour exhorter ^si.
Fpisi. 41, absence, les besoins des frères et fournir de les uns à persévérer constamment dans la Kpisi.43,
pag. iî6.
s^^ pjjj,^ QQ qyj serait nécessaire à ceux qui communion de 1 Eghse, et les autres à ne se
pouvaient exercer quelque métier. En même pas laisser séduire par les promesses trom-
temps il les pria d'examiner l'âge, la condi- peuses d'une fausse paix. Il leur dit qu'il ne
tion et le mérite de chacun d'eux afin qu'il , pourra retourner à Carthage qu'après la fête
pût connaître à fond ceux dont il était chargé, de Pâques ®, à cause de cette nouvelle tem-
et élever aux charges ecclésiastiques ceux pête , qu'il regarde comme une persécution
qui s'en montreraient dignes par leur dou- beaucoup plus dangereuse encore que celle
ceur et leur humiUté. Fclicissime, qui, dès le des païens; il les assure pourtant qu'elle pas-
commencement, s'était opposé à l'élection de sera bientôt, par la protection de Dieu ^. Il
saint Cyprien, et qui, contre toutes les règles combat en ces termes le schisme de Félicis-
de l'Eglise, venait d'être ordonné diacre par sime « Il n'y a qu'un Dieu, qu'un Christ,
: 229.
le prêtre Novat, qui d'ailleurs était coupable qu'une Eglise et qu'une chaire fondée sur
d'un grand nombre de crimes, empêcha de Pierre parla parole de Notre- Seigneur. On
tout son pouvoir qu'on ne fit cet examen, ne peut élever un autre autel, ni faire un
menaçant ceux qui s'y étaient présentés les sacerdoce nouveau ,
parce qu'il n'y a qu'un
premiers, les intimidant avec force et décla- seul autel et un seul sacerdoce : Quiconque
rant que ceux qui obéiraient à saint Cyprien assemble ailleurs, disperse. Tout ce que des
et demeureraient dans sa communion, ne hommes furieux veulent établir contre la
communiqueraient point avec lui sur la mon- disposition de Dieu est adultère, impie et
tagne, où il tenait ses assemblées. Caldone sacrilège. » Ensuite il défend à son peuple
et ses collègues en donnèrent avis à saint Cy- d'avoir aucune communication avec les schis-
prien *, qui en fut pénétré de douleur. Il ne matiques, leurs discours étant aussi dange-
se laissa pas abattre cependant et répondit reux qu'un chancre et que la peste. Il con-
à Caldone que, puisque Félicissime s'était clut en disant : « S'il y en a qui, refusant de
séparé lui-même de l'Eglise, il avait pronon- faire pénitence et de satisfaire à Dieu, pas-
cé contre lui la sentence qu'il méritait , et sent au parti de Félicissime et de ses adhé-
qu'ainsi il était séparé de la communion de rents, qu'ils sachent qu'ils ne pourront plus
son évoque. Il prononça la même sentence revenir à l'Eghse, ni communiquer avec les
contre Augende et les autres sectateurs de évêques et avec le peuple de Jésus-Christ. »
Félicissime, s'ils persistaient dans le schisme, 38. Aussitôt que les fêtes de Pâques de Lettres
des crimes dont on l'accusait. Saint Cyprien compagne de plusieurs évêques de sa pro- 'Demë'^en'
chargea Caldone et Herculau de lire sa lettre vince, revint à Carthage et y tint avec eux
aux frères qui étaient avec eux, de la com- un concile dans lequel on fit un règlement
muniquer au clergé de Carthage et de mar- sur l'affaire des Tombés. Il portait, en subs-
quer au bas les noms de ceux qui s'étaient tance, que les libellatiques qui avaient re-
.v^'lâ'i!''
joints à Félicissime. Ils le firent, et nous connu leur faute et embrassé la pénitence
1 XXXllI et XXIXe de l'édition de D. Maran. (L'é- Apud Cyprianum, Epist. 42. — * XL« de l'édition de
diteur.) D. Maran. {L'éditeur.)
2 La lettre qu'ils écrivirent sur ce sujet à ^ Pâques, en l'année 251 de Jésus-Christ, qui était
saint
Cyprien n'est pas venue jusqu'à nous. la seconde année de la persécution, était le 23 mars.
^ Abstinuimus communicatione Felidsdmum et
Au- ^ Persecutionis istius novissinia hcec est et extrema
yendum, item Reposium de extonibus et Irenem Ru- tentatio, quœ et ipsa cito Domino protegsnle transi-
tilorum et Paulam farcinatricem quod ex annota-
, ; bit, ut reprœsenter volns post Paschœ diem cum colle-
tionc mea scire delmistis. Item abstinuimus Sophro- gis meis. Cyprian., Epist. 43. Le schisme de Félicis-
nium et ipsum de extorribus, Soliassum Budimrium. sime se dissipa icu moins de deus: a^â.
342 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dès l'année précédente, aussitôt après leur d'avoir formé, un schisme. Saint Cyprien ne
cliute, seraient sur-lc-chuinp admis à la com- marque pas ces raisons dans cette lettre,
munion; mais que ceux qui avaient sacrifié mais il dit à saint Corneille que le prêtre
seraient traités plus sévèrement, sans qu'on Primitivus les lui apprendra. La lettre sui-
leur ôtat néanmoins l'espérance du partlon, vante *, qui est encore adressée â ce saint
de peur que le désespoir ne les rendit pires pai)e, porte : « Nous vous avions envoyé nos Episl. 45,
r..fe'.231.
et ne les portât à embrasser tout à lait le pa- collègues Caldone et Forlunat, pour travailler
ganisme ou à se jeter parmi les hérétiques de tout leur pouvoir,tajit par nos lettres que
et les schismatiqiies ;
que, pour ce sujet, on par leur présence et par les résolutions que
les tiendrait longtemps en pénitence et une vous devriez prendre tous ensemble pour ra-
pénitence pleine et entière, afin qu'ils tâ- mener à l'unité de l'Eglise catholique ceux
chassent cependant d'obtenir, par leurs lar- qui s'en étaient séparés. Mais, puisque le
mes gémissemants , la miséricorde
et leurs parti contraire n'a pas seulement refusé de
de Dieu ; que, pour régler la durée de leur retourner dans le sein de sa mère, mais s'est
pénitence, on examinerait les diverses cir- élu un évèque; et, contre toutes les lois de
constances des fautes de chaque coupable, la discipline et de l'unité catholique, a créé
leuis intentions et leurs engagements. Ce hors de l'Eglise un chef qu'elle ne reconnaît
règlement fut embrassé par toute l'Eglise, point, comme vos lettres et celles de vos
et le pape saint Corneille, qui venait d'être collègues nous l'ont appris, et nos collègues
élu évèque de Rome en la place de saint Pompée et Etienne nous l'ont aussi confirmé
Fabien, ayant eu avis de ce décret, le reçut depuis avec douleur nous vous avons écrit
;
être instruits de ce qui s'était passé dans lettre, saint Cyprien se justifie sur ce qu'il
l'ordination de Corneille. Durant cet inter- avait attendu à se déclarer pour saint Cor-
valle. Pompée et Etienne revinrent de Rome neille, jusqu'à ce qu'il eût des preuves con-
et informèi'ent leurs confrères de la vérité : vaincantes en sa faveur. Il le prie de faire lire
aussi, après leur témoignage, on ne jugea pas aux frères qui sont à Rome ses lettres tou-
à propos d'écouter davantage les députés de chant Félicissime, dont il lui avait envoyé
Novatien. On ne laissa pas de réfuter les des copies par Caldone et Fortunat.
accusations qu'ils formaient contre Corneille 39 '. Saint Cyprien écrivit en même temps LeI très
de saint Cy-
et de les convaincre, par plusieurs raisons. aux confesseurs qui étaient tombés dans le piieu aux
Confesseurs schisme de Novatien, pour les exhorter à re- coude Les confesseurs eux-mêmes
lettre. Epist. 54,
de Rome et pag. 240.
à saint Cor- tourner dans l'unité de l'Eglise catholique. écrivirent à saint Cyprien sur leur réunion,
neille, en
S51. Mais il ordonna au sous-diacre Mettius, por- assurés qu'il s'en réjouirait avec eux; et
Epist. -iil,
teur de cette lettre, de la montrer auparavant saint Cyprien leur répondit pour les congra-
47, p. 233.
au pape, à qui il en donna avis par une let- tuler de ce qu'ils étaient revenus de leur
tre particulière, afin que celle destinée aux schisme. Il leur envoya en même temps deux
confesseurs ne leur fiit remise qu'autant que traités, l'un intitulé des Tombés, l'autre de
saint Corneille le jugerait à propos, et de peur V Unité de l'Eglise catholique. Cette lettre est
qu'on ne lui fit dire autre chose que ce qu'il citée par saint Augustin '.
y disait effectivement. Depuis, ayant appris 41 Quelques soins que saint Cyprien se
*. Lettre
de saint Cy-
que saint Corneille voyait avec peine que fût donnés pour empêcher que les schisma- prien i An-
touien , ea
ceux de l'Eglise d'Adrumet, qui écrivaient à tiques ne trouvassent créance parmi les évê- 252.
Rome^ adressassent leurs lettres, non au pape ques de la province d'Afrique, Antouien, qui Episl. 55,
p>ig.241.
lui-même, mais au clergé de Rome, il lui était évêque en Numidie, ne laissa pas d'être
manda que cela ne s'était fait ni par légèreté, ébranlé par les lettres de Novatien, dont il
ni à dessein de lui faire injure, mais parce avait d'abord rejeté la communion pour s'at-
que les prêtres et les diacres de l'Eglise d'A- tacher à saint Corneille. Il avait écrit quelque
drumet ne savaient pas, à cause de l'absence temps auparavant à saint Cyprien pour lui
de Polycarpe, leur évêque, ce qui avait été mander que, selon son conseil, il embrassait
résolu dans le concile tenu à Garthage après la communion de saint Corneille, et l'avait
Epis'. 48, la persécution. Il ajoute que, pour empêcher même prié d'envoyer au pape une copie de
pag. 234.
que schisme arrivé à Rome ne troublât
le sa lettre. Mais depuis, ayant reçu des lettres
quelques-uns de ceux qui n'auraient pas été de Novatien, il écrivit de nouveau à saint
bien instruits des choses, il avait fait écrire Cyprien, par un prêtre nommé Quintus, et le
à tous les évêques de sa province, qui compre- pria de lui mander quelle était l'hérésie de
nait la Numidie et les deux Mauritauies, pour Novatien par quelle raison Corneille com-
et
les informer de ce qui s'était passé à l'ordina- muniquait avec Trophime et avec ceux qui
tion de saint Corneille, etque tous avaient re- avaient offert de l'encens aux idoles. Car No-
connu la vérité et l'autorité de son épiscopat vatien, dont Anton ien paraissait suivre les
et étaient demeurés fermes dans l'unité et la sentiments, voulait que ces sortes de per-
charité de l'Eglise catholique. sonnes demeurassent excoihmuniées toute
Lettres de
saint Cor-
40 *. Cependant Novat étant parti de Rome, leur vie et ne fussent pas même réconciliées
neille à
sain^Cy-
les confesseurs qu'il avait séduits revinrent à à la mort. Antouien témoignait aussi avoir
prien, et de
s.'iint C\'-
l'unité de l'Eglise; au même moment, saint quelque peine sur la conduite que saint Cy-
prienàsaint
Corneille, et
Corneille dépêcha l'acolyte Nicéphore pour prien avait gardée envers les tombés, comme
des Confes-
seurs à saint
en apporter la nouvelle à saint Cyprien, qui s'il eût usé â leur égard d'une indulgence
Cyprieii, eu
251.
l'avait envoyé à Rome, et il le fit parth? du peu conforme aux maximes de l'Evangile.
Epist. 49,
lieu même où l'Eglise était assemblée pour Ce fut pour satisfaire à toutes ces diCTicultés
50, p. 225. la réconciliation des confesseurs, afin qu'il que saint Cyprien lui écrivit la lettre cin- .
Epist 51, s'embarquât en diligence. Saint Cyprien quante-cinquième, qui est une des plus im-
pag. 236.
ayant appris cette agréable nouvelle, écrivit portantes. Il se justifie d'abord lui-même, en 242.
Epist. 52,
pag. 237. à saint Corneille pour l'en féliciter et pour rendant raison de la conduite diverse qu'il
Epist 53, lui dépeindre la personne de Novat ^, dont avait tenue à l'égard de ceux qui avaient
pag. 239.
saint Corneille lui avait parlé dans une se- souillé leur conscience par des billets, ou
1 De LXVI à XLI dans l'édition de D. Maran. {L'é- fidèles. Il laissa mourir son père de faim, et lui re-
diteur.) fusa même l'honneur de la sépulture. ilComme
2 Novat était prêtre de Garthage, et il y était avait été marié, on dit qu'il donna un coup de pied
mieux connu qu'à Rome. C'était un homme vain, dans le ventre à sa femme, qui était grosse, et qu'il
avare, arrogant, d'une mauvaise réputation, et con- la fit avorter Utérus uxoris calce yercussus, et abor-
:
damné tout d'une voix par les évêques comme un tione properante in parricidium partus expiressus.
hérétique et un scélérat. Il jeta d'abord en Afrique Cypr., Epist. 52. Novat était apparemment tombé
les semences du schisme, en se joignant à Félicis- dans cet excès avant qu'il fût prêtre.
sime contre saint Cyprien. Puis, à l'insu de son évê- 3 August., lib. II cont. Crescon., cap. 34.
que, il fit ordonner diacre Félicissirae. Après quoi * XLIIe dans l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
il s'eu alla à Rome, où il mit la divisioû parmi les
314 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
offert des sacrifices aux idoles, a Dans le nombre nos frères qui le suivaient et qui
fie
fort «îe la iK-r^trutiou, dit-il, il avait or- n'y lussent point revenus sans lui. Corneille,
donné qu'on leur refusât la réoonrilialion, après en avoir délibi;ré avec plusieurs de nos
hors le cas d'extrémité de la vie, alin que, collègues, a reçu Trophime, mais seulement
non-seulement ils entrassent dans la voie do à la communion laïque, et non du rang d'é-
la pénit(!nce mais que, comme l'occasion
, vêque, comme des gens pleins d'artifices vous
s'offrait encore de retourner au combat et l'ont écrit. Ce qiie l'on vous a rapporté, que
de réparer leur faute, ils se portassent à cou- Corneille communiquait iudiffOreinmeiit avec
fesser Jésus - Chi'ist et à gagner la victoire ;
ceux qui ont sacrifié, est encore une calomnie
la persécution étant apaisée, le concile d'A- des apostats. Nous réconcilions ceux qui sont i^»p- 3W-
frique et celui de Rome avaient accordé la en péril de mort, comme on en est convenu;
réconciliation à ceux qui avaient accompli mais, s'ils viennent ensuite à recouvrer la
une sérieuse pénitence, suivant les distinc- santé, faut-il (]ue nous les étouffions de nos
tions portées par les règlements qui en furent propres mains et que nous les obligions à
dressés et approuvés en ces conciles. « J'es- mourir effectivement, parce qu'ils n'ont reçu
time, ajoute saint Cyprien, que je ne dois pas la paix que comme mourants? » Saint Cy-
me départir des résolutions prises une fois prien marque ensuite en détail les différents
parmi nous tous, quoique plusieurs en parlent degrés de chute, a IL ne faut pas, dit-il, met-
d'une manière fort désavantageuse, et qu'on tre au rang de ceux qui ont sacrifié aux idoles
répande de tous les côtés, contre les évèques les libeffatiques *, puisqu'il faut même sou-
de Dieu, des calomnies sorties de la bouche vent faire une différence entre ceux qui ont
du diable, pour rompre la paix et l'unité sacrifié. Car il n'y a point de comparaison en-
catholique. Mais il faut que, comme un bon tre celui qui d'abord s'est offert volontaire-
frère, vous ne receviez pas aisément ce que ment pour immoler aux faux dieux, et celui
disent des méchants et des apostats. Considé- qui, après avoir combattu et résisté longtemps,
rez plutôt ce que font vos collègues, person- s'est enfin laissé aller ; entre celui qui s'est
nages graves et retenus, et jugez de leur sen- livré avec tous les siens, et celui qui s'est
Pag. 243. timent par leur conduite. » Il fait ensuite exposé au péril pour tous, mettant à couvert
un grand éloge de saint Corneille, montre la sa femme, ses enfants et toute sa maison;
régularité de son élection, et le disculpe des entre celui qui a poussé au crime ses hôtes
calomnies que les schismatiques publiaient ou ses amis, et celui qui les a épargnés et
contre lui. «Sachez, dit-il, que nos coUègues, qui a reçu chez lui plusieurs frères qui s'en-
après des infoi^mations très-exactes, ont re- fuyaient ou qui étaient bannis pour la foi, et
connu qu'il n'est coupable ni d'avoir pris un leur adonné une retraite, offrant au Seigneur
billet de siireté de la part des magistrats, ni plusieurs âmes vivantes et saines, qui prient
d'avoir eu une communication sacrilège avec pour la sienne. Puis donc qu'il y a beaucoup
les évèques qui ont sacrifié aux idoles ; il a de différence entre ceux mêmes qui ont sa-
seulement réuni avec nous ceux dont la cause crifié, humanité serait-ce de vouloir
quelle
2**- a été examinée et l'innocence justifiée. A l'é- confondre avec eux ceux qui se sont seule-
gard de Trophime, la chose ne s'est pas pas- ment servis de billets? Ils peuvent dire, pour
sée comme on vous l'a fait entendre; car no- leur défense j'avais lu et j'avais entendu
:
tre très-cher frère CorneiUe n'a fait en cela prêcher à l'évêque qu'il ne faut point sacrifier
que se rendre à la nécessité et suivre ce que aux idoles : de peur de le faire, l'occasion s'é-
nos prédécesseurs ont fait, lorsqu'il s'est agi tant présenté d'avoir un billet, je suis venu
de ramener à l'Eglise plusieurs de nos frè- au magistrat, ou j'ai chargé un autre qui y
res. Une grande partie du peuple avait fait allait, de que j'étais chrétien, qu'il ne
lui dire
défection avec Trophime; mais quand celui- m'était pas permis de sacrifier ni d'aller aux
ci est revenu à l'Eglise, qu'il a confessé sa autels du démon, que je donnais de l'argent
faute, demandé pardon, ramené avec lui tous pour ne point le faire. Maintenant, continue
ceux qu'il avait emmenés, on a eu égarfl à saint Cyprien, sur ce que nous avons repré-
ses prières, et par là c'est moins Trophime sente à une personne de cette sorte, qu'il ne
qu'on a reçu dans l'Eghse, que ce grand devait pas même prendre de billet, et que,
t Nous avons déjà remarqué qu'on appelait libel- où ils déclaraient avoir sacrifié aux idoles, quoiqu'ils
latiques ceux qui recevaient un billet des magistrats, ne l'eussent point fait.
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRFEN. 315
quoique sa main et sa bouche soient pures, sa munion, commencent à la demander dans
s'ils
conscience ne l'est pas, il pleure, il se lamente, la maladie; car ce n'est pas le regret du péché
il proteste qu'il a péché par erreur plutôt que qui les presse, mais la crainte de la mort;
par malice, et qu'à l'avenir il sera plus ferme, et celui-là ne mérite pas d'être consolé à la
Si nous rejetons la pénitence de ces gens-là, mort, qui n'a pas songé qu'il devait moui'ir.
qui ont quelque excuse apparente, aussitôt le Pour ce qui regarde la personne de Novatien,
démon les jettera dans l'hérésie ou dans le nous ne devons pas nous soucier de ce qu'il
schisme, avec leurs femmes et leurs enfants enseigne, puisqu'il enseigne hors de l'Eglise, ^^s 249.
qu'ils avaient conservés, et il nous fera re- Il n'y a qu'une seule Eglise établie par Jésus-
proche, au jour du jugement, de n'avoir point Christ et distribuée en plusieurs membres par
pris soin des brebis malades, et, pour une qui toute la terre, et un épiscopat répandu de
était blessée,d'en avoir perdu plusieurs qui tous côtés en plusieurs évêques que la con-
Pjg.SiG. se portaient bien. Les stoïciens ont d'autres corde réunit. Cependant Novatien, sans avoir
maximes eux qui disent que tous les péchés
*, égard à l'institution divine, et rompant l'u-
sont égaux et qu'un homme sage ne doit pas nité de l'Eglise catholique, s'efforce d'établir
aisément se laisser fléchir. Mais les maximes une Eglise humaine, et envoie ses nouveaux
• des chrétiens sont autres que celles de ces apôtres en plusieurs villes pour jeter les fon-
philosophes; c'est pourquoi, mon très-cher déments de sa nouvelle doctrine ; et, quoiqu'il
frère, conclut ici saint Cyprien, nous avons y ait depuis longtemps, par toutes les pro-
trouvé bon, après avoir examiné la cause de vinces et dans chaque ville, des évoques éga-
chacun, que les libellatiques seraient admis lement vénérables par leur âge et recom-
dès à présent, et que ceux qui ont sacrifié se- mandables par l'intégrité de leur foi et par les
241. raient réconcihés à la mort. » Il dit ensuite épreuves qu'ils ont souffertes durant les per-
qu'ou ne doit pas craindre que cette indul- secutions, il a néanmoins la hardiesse d'en
gence diminue le nombre des martyrs. Quoi- créer d'autres, prétendant changer par ses ca-
qu'on accorde la pénitence aux adultères, il baies toute la face du monde. Mais il ne sait
ne laisse pas, pour cela, d'y avoir des vierges pas que d'ordinaire les schismatiques font
218. et des continents; à la vérité, quelques évè- d'abord de grands progrès, qui ne durent pas,
ques d'Afrique leur avaient autrefois entière- et que leurs entreprises illégitimes tombent
meiît fermé l'entrée de la pénitence; mais ils bientôt par terre avec eux : quand bien même
ne s'étaient pas, néanmoins, séparés des autres il aurait été élu évêque le premier, il en per-
évèques; sans rompre le lien de la concorde, drait le pouvoir, abandonnant le corps des
chaque évêque^ règle sa conduite, dont il doit évêques et l'unité de l'Eglise. Car celui qui
rendre compte à Dieu. 11 prouve par l'autorité ne conserve ni l'unité d'un même esprit, ni
''
de l'Ecriture, en particulier par des passages le lien de la paix, mais se sépare de l'Eglise
tirés de l'Apocalypse^ du livre de Tobie* et de et de la compagnie des évêques, ne peut
celui de la Sagesse *, qu'il est permis d'accor- avoir ni la puissance, ni la dignité d'évêque,
der le pardon aux pécheurs pénitents; puis parce qu'il ne veut pas garder la paix ni
il ajoute ^ « Mais, quant à ceux qui ne mon-
: l'unité de l'épiscopat. » Saint Cyprien repro-
trent point la douleur de leurs péchés par che ensuite à Novatien sa dureté envers les
des témoignages manifestes, nous avons été libellatiques ®, auxquels il ôtait toute espé-
d'avis de leur ôter toute espérance de com- rance de réconciliation, taudis qu'il donnait
1 Saint Cyprien fait cette comparaison, à cause de mortis urgentis admonitio compeUit. Nec dignus est
Novatien, qui d'abord avait fait profession de la phi- in morte accipere solatium, qui se non cogitavit esse
losopliie stoïcienne. Fleury, t. Il Hist. ecc/e's., p. 234. moriturum. Cyprian., ibid.
* Manente concordiœ vinculo et persévérante catho- ^ Qui ergo nec unitatem spiritus, nec conjunctionem
licœ Ecclesiœ individuo sacramento, actum suum dis- pacis observât, et se ab Ecclesiœ vinculo atque sacer-
ponit et dirigit unusquisque Episcopus, rationem pro- dotum collegio séparai, episcopi nec potestatem habere
positi sui Domino redditurus. Cyprian., Epist. 55. potest, nec honorem, qui episcopatus nec unitatem vo-
3 Apoc. II, 5. — * Tob. IV, 11. — s
Sap. m, 13. luit tenere, 7iec pacem. Cyprian., Epist. 55,
* Et idcirco, frater charissime, pœnitentinm non ^ Aut si se cordis et renis scrutatorem constitua et
agentes, nec doloretn delictorum suorum tofo corde et judicem per oninia œqualiter judicet.... fraudatores
manifesta lamentationis suce professione testantes, pro- et mœc/ios a latere atque comitatu suo separet : qtiando
hihendos omnino censuimus a spe communicaiionis et multo et gravior et pejor sit mœchi, quam libellatici
pacis, si in infirmitate atque in periculo cœperint de- causa, cum hic neccssitate, ille voluntate peccaverit.
precari; quia regare illos non délie ti pœnitentia, sed Ibid.
31G HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
la paix aux voleurs et aux adultères, et qu'il leur faute. « Car, ajoute-t-il, puisqu'on a ju-
Pig. 250. cumuiuniiiuait avec eux. II l'accuse * encore gé à propos d'accoriler la réconciliation aux
(le se moquer des de se jouer de
fidèles et tombés pénitents, lorsqu'ils viennent à être
leurs larmes, parce qu'en les exhortant à dangereusement malades, ceux-là, qui ne
sati>l'aire à Dion par la pénitence, il leur re- sont point toml)és par lâcheté, mais qui ont
fusait ce pourquoi on l'ait pénitence, c'est- combattu et ont reçu des ])laics honorables
à-dire la réconciliation et l'Eucharistie *. 11 et n'ont été vaincus que par l'infirmité de la
paraît, par toute la suite de cette lettre, qu'elle chair, doivent, ce me semble, avoir quelqu'a-
fut écrite après le retour des confesseurs et vantage sur eux. » Il promet à Fortunat que, Pag. 252.
après la mort de Déce, mais avant que l'on lorsque les évéques auront satisfait à la so-
eût accordé généralement la paix aux tomhés. lennité de Patpies, et qu'ils seront venus le
Ainsi il faut la mettre à la lin de l'année :251 trouver, il traitera de cette affaire avec eux
ou au commencement de l'année 252. et lui fera savoir leur résolution.
Lettre 42 Saint Cyprien reçut, pendant les pre-
*. 43 Le concile que saint Cyprien promet
®. Lpttro
da faiiit Cy- de saint Cy-
prifn il l"or- miers jours de la solennité de Pâques de la dans la lettre précédonto, est celui qui se tint pciiMi et des
tiinat, en l'èies du
même année 252, une lettre de Forlunat et à Carthage le 15 du mois de mai de l'an 252; concile de
Cnrthage &
Epi?t.^5C, de cinq autres évoques, savoir Ahimnius, : l'atlaire desTombés y fut examinée de nou- ^aint Cor-
251. noillc et é,
rab'.
Optât, Privation, Donatule et Félix, assemblés veau, et il y fut résolu qu'on leur donnerait Fidiia, en
2o2.
à Capse dans *, la Bysacène, pour l'ordination la paix, non-seulement s'ils venaient à être
d'un évêque : ils lui écrivaient au sujet de dangereusement malades, comme il avait été
trois chrétiens qui, après avoir surmonté les ordonné dans le concile précédent, mais à
efforts des magistrats et du peuple, et souffert tous ceux qui, du jour de leur chute, avaient
constamment plusieurs supphces en présence fait pénitence. L'approche de la persécution
du proconsul, avaient enliu cédé à la violence de Gallus occasionna ce changement de dis-
et à la longueur des tourments, mais qui, de- cipline, et il parut, par la suite, que l'indul-
puis leur chute, c'est-à-dire depuis trois ans, goucc accordée aux tombés leur avait été
avaient toujours vécu dans la pénitence et également salutaire et honorable à l'Eglise,
dans les larmes. Ces é vaques, consultés eux- car ceux qui avaient apostasie dans la per-
mêmes par Sujière, qui sans doute était évê- sécution de Dèce, souffrirent avec constance
que de ces trois chi"étiens *, demandaient à le martyre sous Gallus. Cependant saint Cy- Kpist. 57
paj. 252 et
saint Cyprien si on pouvait dès-lors les ad- prien et les autres Pères du concile écrivirent seq.
mettre à la communion, et le priaient d'exa- une lettre synodale à saint Corneille, espérant
miner cette affaire avec les autres évèques. qu'il approuverait cette indulgence, et remet-
Saint Cyprien répondit à Fortunat et à ses tant au jugement de Dieu ceux qui voudraient
collègues que son sentiment était que l'on en user autrement. Cette lettre porte en tète
devait accorder la paix à ceux dont ils lui les noms de quarante-un évèques, dont sahit
parlaient, persuadé que la pénitence qu'ils Cyprien est le premier. INIais il paraît qu'il
avaient faite pendant les trois ans pouvait y a faute dans le nombre ', et qu'au lieu de
*
suffire pour obtenir de Dieu le pardon de quarante-un évèques, il devrait y en avoir
soixante-ueuTième dans le concile de Carthage, tenu affuerunt numéro LA' F/. Apud Cyprian., Epist. 64.
[m' SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 317
soixante -six, s'il est vrai, comme il y a proconsulaire, fut écrite avant la fin du con-
beaucoup d'apparence *, que ce concile soit cile dont nous venons de parler. Car le saint
le même que celui dont nous avons une lettre évèque y ordonne ' qu'on tienne la main à
Epist. 6i, synodale à Fidus. Cet évèque avait donné faire accomplir une pleine et entière pénitence
ig. 279.
pag "^
. ., „, \ j r> Il . ,
avis au concile que Therapej eveque de Bulle, aux tombés, avant de les réconcilier, ce qu'il
dans la province proconsulaire, avait accordé n'aurait pas fait après la tenue de ce concile,
la communion à un prêtre, nommé Victor, où il fut résolu de réconcilier incessamment
sans qu'il eût entièrement accompli sa péni- tous les laps, à cause d'une nouvelle persé-
tence, selon qu'il avait été ordoiuié dans le cution dont on était menacé. Voici quel est Episi. es,
p'^"" ''
concile précédent , sans la participation du le sujetde cette lettre : saint Cyprien avait
peuple et sans qu'il y eût été contraint ni par été informé que Fortunatien, autrefois évè-
la maladie, ni par aucune nécessité. Le con- que d'Assures, et déposé de l'épiscopat * pour
cile, quoiqu'iudigné de cette action, se con- avoir sacrifié aux idoles durant la persécution
tenta d'en faire une réprimande à Thérape, de Dèce, faisait tous ses efforts pour rentrer
qui paraît y avoir été présent, et de l'avertir dans sa dignité, et troublait Epictète ^, qui
de ne plus retouiber dans cette faute. Ou ne avait été élu en sa place, ce qui causait beau-
jugea pas même à propos de priver Victor de coup de désordre dans cette Eglise ; il en fut
la communion que son évèque lui avait ac- extrêmement touché, ne pouvant comprendre
cordée trop légèrement. Le même Fidus avait que cet homme, au lieu de songer à effacer
encore consulté le concile sur une question son crime par la pénitence, eût la hardiesse
plus importante, savoir : Si on devait bapti- de s'ingérer encore dans le sacerdoce et de
ser les enfants avant qu'ils eussent huit jours, s'approcher de l'autel de Dieu au sortir de
comme on attendait autrefois ce terme pour celui des démons. C'est ce qui l'obligea d'é-
donner la circoncision. Mais les Pères du crire au nouvel évèque et au peuple d'As-
concile répondirent tous d'une voix « que sures, pour leur défendre d'avoir aucune com-
Dieu ne faisant non plus acception des âges munication avec ce perfide. Il leur ordonne
que des personnes, on ne pouvait jamais re- en même temps de s 'opposer à ses entreprises
fuser aux enfants la grâce qui nous est accor- téméraires, et, s'il persiste dans son audace,
dée par le baptême. » de l'excommunier avec tous ceux qu'il aura
desainfcy! 4-4 '".
Il y a tout que la lettre
lieu de croire séduits.
''pîctète et" de saint Cyprien à Epictète et au peuple 45 6. Cependant la persécution s'étant re- dpjji^f"'"!
d'Assurés, d'Assures , ville d'Afrique, dans la province nouvelée sous Gallus, qui avait succédé à P^hibari-
tains,ea2ï2
* Ce qui nous le persuade, c'est qu'il est visible, a deprecando Domino non recédant, nec Ecclesiam
par la lettre du concile à Fidus, qu'elle fut écrite catholicam quœ una et sola est a Domino constituta
depuis le décret qui défendait de recevoir à la com- derelinquant ; sed satisfactionibus immorantes et Do-
munion les pécheurs qui n'avaient pas achevé leur mini misericordiam deprecanfes ad Ecclesiam puisent,
pénitence, et avant l'indulgence que l'on donna à ut recipi illic possint ubi fuerunt et ad Christum
, ,
ces mêmes pécheurs en cette année 252, et dont il redeant a quo recesserunt Quod si quis impatiens
est parlé dans la lettre synodale au pape saint Cor- fuerit ad Dominum depu^ecandum, qui offcnsus est, et
neille. Legimus litteras tuas, disent les Pères du con- nobis obtemperare noluertt, sed desperalos et perditos
cile à Fidus, quitus significasti de Victore quondam secutus fuerit, sibi imputabit cum judicii diesvenerit.
preshytero, quod et anteguam pœnitentiam plenam Cyprian., Epist. 65.
egisset, et Domino Deo
quem deliquerat satisfecis-
in * Au concile de Carthage, célébré en 251, il avait
set, temere Therapius collega noster immature icm- été résolu que
évèques qui auraient sacrifié aux
les
pore et prœpropera festinatione pacem dederit. Quœ res faux dieuX; seraient déposés du sacerdoce et réduits
nos satis movit secessum esse a decreti nostri auctori- à la communion laïque, après avoir fait pénitence
tate, ut ante legitimum et plénum tempus saiisfac- de leurs crimes. Maxime cum jampridem nobiscum
tionis, et sine petitu et conscientia plebis nulla infir- et cum omnibus omnino episcopis in toto mundo cons-
mitafe urgente ac necessitate cogente pax ei concede- tituas, etiam Cornélius, collega noster, decreverit ejus-
retur. Sed librato apud nos diu consilio satis fuit modi homines ad pœnitentiam quoque agendam posse
objurgare Therupium collegam nostrum, quod temere admitti, ab ordinatione autem cleri atque sacerdotali
hoc fecerit, et instruxisse ne quid taie de cœiero fa- honore prohiberi. Cyprian., Epist. 67.
cial. Pacem famen quomodocumque a sacerdote Dei 5 Le titre de frère, que saint Cyprien donne ici à
semel datam non putavimus auferendam, ac per hoc Epictète, donne lieu de croire qu'il avait été fait
Victori communicationem sibi concessam usurpare per- évèque d'Assures à la place de Fortunatien : Cypria-
misivnis. Apud Cyprianum, Epist. 65. nus Epicteto fratri, et plebi Assuras consistenti.
2 LXIVe de l'édition de D. Maran. {L'éditeur.) Epist. 65.
' iMpsi vero magnitudinem delicti sui cognoscentes 6 LVIe de l'édition de D. Maran. (L'éditeur.)
318 HISTOIRE ^.îî;N^':RALR DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Dôcc, sur la fin do l'anucc 2.')1, ou commanda ont appris ù mourir. « Que personne d'entre
au peuple, par des écrits publics, de sacrifier vous, ajoute-t-il, ne s'clTraie donc de la per-
aux idoles, et ou demanda pour la seconde sécution qui va s'élever, ni de l'avènement de
fois, dans raniphithéàtre, que Cypritn fût l'Antéchrist qui est proche; mais que l'Evan-
cxposé aux lions. Le Saint, persuadé (pie sa vous fournissent des armes
gilo et l'Ecriture
fin était proche, ne pensa plus qu'à se dispo- contre tous les daugcrs. L'ennemi exerce
ser au combat et à préparer son peuple à la contre nous tous sa rage et sa fureur, mais
mort. Ainsi, ne pouvant aller à Thibare ', le Seigneur suit aussitôt pour nous venger,
comme il s'y était engagé à la prière des Dieu nous regarde lorsque nous combattons
peuples de cette ville, qui souhaitaient d'eu- pour notre foi. Quelle gloire et quel bonheur
tendre ses exhortations, il se contenta de leur de combattre aux yeux de Dieu et d'être
écrire * pourexhorter à tout abandonner
les couronnés de la main de Jésus-Christ Ar- !
et à tout soufliir pour Jésus-Christ. Mais il raons-nous de tout notre pouvoir et dispo-
le fit en des termes si pressants et d'une sons-nous à cette guerre par la pureté de nos
manière si pathétique et si foite, qu'on ne mœurs, par notre foi et j)ar notre zèle. Que
peut hre cette lettre sans en être vivement ceux qui sont demeurés debout se tiennent
Epist. r.8, touché. D'abord il leur représente la violence prêts, de peur qu'ils ne perdent ce qu'ils ont
or.r.
paf
de la tempête qui était près de fondre sur les conservé jasqu'à cette heure. Que ceux qui
chrétiens, et dit que, pour préparer ses peu- sont tombés se préparent aussi, afin qu'ils
pies au combat, il leur faisait boire ^ tous recouvrent ce qu'ils ont perdu. Que l'hon-
les jours le sang de Jésus-Christ, afin qu'ils neur pique les premiers et que la douleur
pussent eux-mêmes répandre le leur pour la anime en les exhortant
les autres. » Il finit
foi. Ensuite il fait voir que, Jésus-Christ ayant à avoir toujours devant les yeux les peines
prédit les persécutions, on ne doit point s'é- dont Jésus-Christ menace ceux qui le renie-
touner si elles arrivent, d'autant qu'elles sont ront, et la gloire qu'il promet à ceux qui le
nécessaires pour éprouver les élus et les unir confesseront.
1256. à Dieu par la mort ; que l'on doit se réjouir 46 ».Pendant que saint Cyprien travail- Lettre
de saint Cy-
dans les persécutions, parce que c'est alors lait ainsi au salut des âmes et à la gloire de prien ù
saint Cor-
en
que la foi reçoit des couronnes; que ceux qui la religion, Félicissime, accompagné d'une neille
252.
,
1 Ville que quelques géographes placent dans la afllixerit, velper maria prœcipiti navigatione prope-
Zengitanc. {L'éditeur.) rantem tempestas ac procella submerserit : spectat mi'
2 Celte lettre est citée par saint Fulgence. Lib. II lilem suum Christus ubique pugnantem, et persecu-
ad Trasimund., cap. 17. tionis causa pro nominis sui honore morienti prœmiupi
s Gravior nunc et
f'erocior pugna imminet, ad guam rcddit, quod daturum se in resurrectione promisit.
fide incorrupta et virtute robusta parure se dcbent Nec minor est martyrii gloria, non publiée et inter
Christi milites ; considérantes idcirco se quotidie cali- multos periisse, cum pereundi causa sit propter Chri-
cem sanguinis Christi bibere, ut possintet ipsipropter stum perire. Sufficit ad testirnonium martyrii sui,
Christum sanguinem fundere. Cypr., Epist. 58. testis aie qui probat martyres et coronat. Cyprian.,
* Et si fugientent in solitudine ac montibus latro Epist. 58.
oppresserit, fera invaserit, famés aut sitis aut frigus B LVe de l'édition, de D. Maran. {L'éditeur.)
[ni« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRÏEN. 319
Ep^si.59, nimité épiscopale. Il y loue saint Corneille que faute d'obéir au pontife de Dieu et de
pag. .0
.
en même temps sa surprise de ce qu'il s'était ment de Dieu, après les suffrages du peuple
laissé ébranler par les menaces de ce schis- et le consentement des autres évèques, entre-
matique « S'il est ainsi, lui dit- il, que l'in-
: prît de se constituer juge, non de l'évêque,
solence des méchants devienne redoutable, mais de Dieu même si ce n'est qu'il y ait
:
et qu'ils emportent par leur audace ce qu'ils quelqu'un assez impie et assez insensé pour
ne peuvent obtenir par justice, c'en est fait croire qu'un évêque se fasse sans que Dieu
de la vigueur épiscopale et de la puissance su- y ait pris part, tandis qu'il nous dit qu'un
blime et divine du gouvernement de l'Eglise, passereau ne tombe pas à terre sans sa vo-
€t il ne faut plus parler d'être chrétiens, si lonté ^. Il est vrai qu'ily a des évêques qui
l'on est réduit à appréhender les menaces des ne se font pas par la volonté de Dieu ; mais
Car les Gentils, les Juifs, les héré-
scélérats. ce sont ceux qui se font hors de l'Eglise,
tiques généralement tous ceux que le dé-
, et contre la disposition de l'Evangile. » Saint
mon obsède, nous menacent de même, et té- Cyprien fait ensuite, mais comme malgré lui 262.
moignent leur rage par des discours furieux : et eu des termes très-modestes, l'apologie
néanmoins il ne faut pas céder pour cela, de son élection et de la conduite qu'il avait
ni croire que l'ennemi, parce qu'il usurpe gardée dans le gouvernement de l'Eglise de
im grand pouvoir en ce monde, soit plus
si Carthage; il dit qu'on ne doit point être sur-
que Jésus-Christ ; mais on doit conserver une pris de voir des hommes superbes et ennemis
foi immobile, un courage ferme et inébranla- des évêques se retirer de l'Eglise, puisque
ble, contre lequel, comme contre un rocher, le Seigneur l'a prédit ainsi et qu'il a souffert
vienne se briser tout l'effort des vagues les lui-même que ses disciples l'abandonnassent,
phis impétueuses. » Il fait voir ensuite le se contentant de dire à ses Apôtres ^ : Vou-
ridicule de Félicissime, de Fortunat et de ses lez-vous aussi vous en aller? Mais Pierre,
autres adversaires, qui le menaçaient à Rome sur qui il avait bâti son Eglise répondit ,
où il n'était pas, tandis que, l'ayant en leur pour tous Seigneur, à qui irons-nous? AVec
:
pouvoir à Carthage, ils le laissaient tranquille. cette haute déclaration, il témoignait que
200. Puis il ajoute : « Mais il ne faut pas, mon ceux qui abandonnent Jésus-Christ périssent
très-clir>r frère, abandonner la discipline de par leur faute; que l'Eglise, qui croit en lui
l'Eglise, ni rien relâcher de la gravité épis- et qui se tient à ce qu'elle a une fois connu,
copale, parce qu'on nous charge d'injures ou ne le quitte jamais, et que ceux-là sont TE-
qu'on tâche de nous épouvanter, puisque glise, qui demeurent dans la maison de Dieu;
l'Ecriture sainte nous dit * Ne craignez
: au lieu que ceux que nous voyons n'avoir
j)o\nt les menaces du pécheur, parce que sa pas la solidité du froment, mais étr-e empor-
gloire se changera en fumier et en pourri- tés commedes pailles, par les vents des ten-
ture. Comment ceux-là pourront-ils éviter la talions que l'ennemi excite, sont des plantes
condoumation du Dieu vengeur, qui vomis- qui n'ont pas été plantées par Dieu le Père,
sent de semblables injures, non -seulement Le saint évêque décrit après cela les mœurs 263.
* Saint Cyprien ne
s'était pas pressé d'écrire à lettres, Félicissime eut le loisir de le prévenir, Cypr.,
Rome sur l'élection de Fortunat, se confiant sur la Epist. 59.
connaissance qu'on y avait, tant de ce personnage * Félicissime assurait que Fortunat avait été or-
que de Félicissime, qui venait d'en être chassé. Néau- donné par vingt-cinq évoques. Cyprian., Epist. 59.
moins, ayant trouvé Félicien, acolyte, qui y retour- 3 Tillemont, tom. IV Uist. ecclés., pag. 114.
nait, il on avait écrit comme des aatres choses qui * 1 Machah. n, 62. —
^ Deuteronom. xva, 12.
se passaient en Afrique. Mais Félicien ayant été re- ^ Matth. x, 29.
tenu, ou à cause du vent ou pour recevoir d'autres ''
Joan. vi, 67.
350 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
examinée en Afrique, et leuf
rents, ayant été.
dépravées et les crimes de Félicissime et de
marque le nom des cinq sentence prononcée par un plus grand nom-
SCS adhérents, et
et hérétiques, à la têle des- bre d'évêques qu'ils n'étaient de personnes
évoques apostats
or- dans leur faction, il est imhgne de la gravité
quels était l'rivat de Lamhèse, qui avait
des évèques de délibérer de nouveau sur cette
donné Fortunat évèque. « La disette même
affaire. après avoir donné avis à
Ensuite,
des méchants est si grande parmi eux,
ajoule-
vingt-cinq saint Corneille du retour de plusieurs de ceux
t-il, qu'ils n'en peuvent compter
qui avaient été séduits par le parti de Féli-
qui les aient suivis, tant des apostats que des
cissime et de Fortunat, il fait une peinture
hérétiques; cependant, pour surprendre les
affreuse de la vie et des intrigues de ce faux
simples et tous ceux qui sont éloignés, ils en
évèque, et dit qu'il ne s'adresse à Home que
grossissent le nombre et disent que vingt-
parce que sa vie honteuse et abominable est
cinq évèques se sont trouvés à l'ordination
connue partout ailleurs. de le rece-
Il s'offre
de Fortunat , comme si l'Eglise pouvait être
voir à pénitence, d'écouter ses raisons et de lui
vaincue par dos hérétiques, en quelque nom-
» Il se plaint amèrement du ouvrir la porte de l'Eghse après une satisfac-
p»6.2G4. bre qu'ils soient. que
tion convenable. «Car je souhaite, dit-il,
renversement qu'ils faisaient de la discipline
tous les soldats du Seigneur soient renfer-
de l'Eghse, en particulier de ce que, dès
le
Pag.sfo. Enfin il avertit les fidèles de Rome de n'a- cution de Gallus, et son exemple encouragea
eu 'sos'"'*'
voir aucun commerce avec les schismatiques, tellement les fidèles de Rome, que tous ceux
et de vivre autant séparés d'eux qu'ils le sont
qui surent qu'il était interrogé accoururent
de l'Eglise, puisque, selon les divines Ecri- pour confesser avec lui. La nouvelle eu étant ^ •
. ^.
tures, ne doit y avoir aucune société entre
il
venue a Carthage , saint Cyprien lui écrivit pa&- S"'-»-
uu fidèle et un perfide *. 11 n'y a pas lieu de aussitôt pour le congratuler, avec toute l'E-
douter * que saint Corneille, par suite de cette glise romaine, des témoignages si glorieux
lettre, n'ait rejeté avec courage les insultes de son courage et de sa foi. « Par votre
et les menaces de Félicissime. Mais quant à union et votre générosité, lui dit -il, vous
l'Afrique, l'cpiscopat de Fortunat fut cause avez donné un grand exemple à tous les
que son parti se trouva presque abandonné fidèles. Vous avez montré au peuple à se 370
de tout le monde. Car ceux que l'on retenait tenir, dansdanger, uni à son évèque, et
le
auparavant dans le schisme en leur faisant
,
aux frères, à ne se point séparer de leurs
espérer de retourner tous ensemble dans l'E- frères; qu'on ne peut être vaincu quand on
glise par un accord, voyant, par cette élection,
est bien uni, et que le Dieu de paix accorde
combien on était éloigné de ce dessein, se
à ceux qui vivent en paix tout ce qu'ils lui
retiraient de jour en jour et venaient frapper
demandent en commun. Combien y en a-t-il
à la porte de l'Eglise ainsi toute la peine
:
de ceux qui étaient tombés, qui se sont rele-
de saint Cyprien était d'examiner ceux qui
vés, et qui, touchés de regret et de honte, ont
207. étaient digues d'y être admis. Car, comme le
fait voir, par leur fermeté dans le combat,
peuple recevait avec joie ceux qui n'étaient qu'ils avaient été surpris la première fois;
que médiocrement coupables, de même ne de sorte
il qu'ils ne sont plus maintenant en
veau Testament, et
ensuite ^"S- °so.
^ en instituant ce
Juifs n'y venaient pas. » 11 enseigne
dont' Jésus-Christ se servit
point le sang de Jé- que l'on doit y mêler de l'eau, parce que Jé-
sacrifice, que l'on n'ofire
sus-Christ l'a fait ainsi et a ordonné qu'on
sus-Christ, lorsqu'il n'y a point de vin dans
peuple et le vin le
L'eau signifie le
pas célébrer comme le fit «
: ,
illo ve-
sédech. Qui utique ordo hic est de sacrificio
quœsiio, in qua quœritur utrum
calix
tur quippe ibi
descendens, quod Melchisédech sacerdos
mixtam debeat niens et inde
dominicus aquam solam, an eam vino quod panem et vinum obtulit, quod
inquit, etc. Augustin., Dei summi fuit,
habere. Admonitos nos scias, Nam quis magis sacerdos Dei
Abraham benedixit.
IV de Docirin. Christ., cap. 21 Qui sa-
lib.
pag. 136. summi, quam Dominus noster Jésus Christus?
1 Tiliemout, Hist. ecclés., tom. IV, obtulit hoc idem quod
crificium Deo Patri obtulit, et
2 Admonitos autem nosscias, ut in calice offerendo, suum,
Melchisédech obtulerat, id est, panem et vinum
dominicn Iraditio observetur, neque aliud fiât a nobis,
scilicet corpus et sanguinem. Et
circa Abraham bene-
nobis Dominus prior fecerit. Cyprian.,
quam quod pro nostrum populum pertinebat.
dictio illa prœcedens, ad
2.
ensuite à la raison sur laquelle se fondaient lui avait écrite un nommé Florentius Pup- r i;'2S4.
ceux qui n'offraient que de l'eau dans le sa- pien ^ qui, après avoir enduré quelque chose
crifice ils appréhendaient qu'en commu-
: dans la persécution de Dèce ®, s'était atta-
niant le matin « ils ne sentissent le sang de
, ché au parti de Novatien et ne voulait point
Jésus-Christ, en sentant le vin, » et que les reconnaître saint Cyprien pour évêque, ni
païens ne reconnussent par là qu'ils étaient rentrer dans sa communion avant qu'il ne se
chrétiens. « C'est donc ainsi, dit ce saint évê- fût purgé de divers crimes horribles dont la
que, que nos frères n'ont plus le courage de calomnie le disait coupable. Comme il ne s'a-»
souffrir la mort pour Jésus-Christ, lorsqu'il gissait que d'humilier Puppien et de rabattre
s'élève quelque persécution, et qu'ils appren- l'excès de vanité et d'insolence auquel il s'é-
nent dans son sacrifice même à rougir de tait laissé emporter, saint Cyprien le fait par
son sang, sans se souvenir qu'il a dit : Celui une ironie continuelle et par des railleries
qui aura honte de moi, le Fils de l'homme où l'on remarque autant de force que d'es-
aura aussi honte de lui *. Comment pouvons- prit. Il lui ofire néanmoins de le recevoir à sa
nous répandre notre sang pour Jésus-Christ, communion, s'il se repeut, mais à condition
puisque nous avons honte de boire son sang ?» de consulter Dieu auparavant « Car je me :
Comme ceux qui étaient dans cet abus s'ex- souviens, ajoute-t-il, de ce qui m'a été ré-
cusaient sur ce que, n'offrant le matin que vélé, ou plutôt de ce que Notre-Seigneur a
de l'eau, ils offraient de l'eau et du vin mêlés ordonné à un serviteur qui le craint ; il lui a
ensemble à souper, il soutient que cet usage dit, entre autres choses Celui qui ' ne croit
:
*
était encore abusif, et qu'on ne doit offrir point Jésus-Christ lorsqu'il fait un évêque,
que le matin. «Il est vrai, ajoute-t-il, que commencera à le croire lorsqu'il vengera son
Jésus-Christ n'a offert qu'après souper; mais pontife. Je n'ignore point * que les songes
il ne s'ensuit pas que nous devions offrir en et les visions semblent ridicules à certaines
ce temps-là. Il fallait qu'il offrit sur la fin du gens; mais ce sont ceux qui aiment mieux
jour, afin que l'heure même de son sacrifice croire ce que l'on dit contre les évèques, que
montrât la fin du monde. Mais nous célébrons de croire les évèques. » Il conclut par ces pa-
la résurrection de Notre- Seigneur, et c'est roles remarquables, qui font voir combien il
pour cela que nous offrons le matin. » était persuadé qu'il n'avait rien dit dans cette
desainfcy! 51 '. Au commeuccment de l'année 254, lettre qui fût indigne de la charité d'un chré-
piên?j'u''2'5i? qui était la sixième de son épiscopat *, saint tien, ni de la gravité d'un évêque : « Voilà ce
non possumus, ut sacramcnti veritatem fraternitate 3 LIX» dans l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
omni présente ceîcbremus. Ai enim non mane, sed Ecce jam sex annis nec fraternitas habuerit epis-
*
post cœnam, mixtum calicem obtulit Dominus. Num- copum, nec plebs prœpositum, nec grex pastorem ?
quid ergo dominicum post cœnam celebrare debemus ? Cyprian., Epist. 66.
Ut sic mixtum calicem frequentandis dominicis ofj'e- ^ Saint Cyprien lenomme son frère Ego te, fia- :
ramus? Christum oportebat circa vesperam diei of- ter, credideram, tandem jam ad pœnitentiam converti.
ferre, ut hora ipsa sacrificii ostetideret occasum et ves- Ibid. fait croire à quelques-uns que Pup-
Ce qui a
peram mundi. Nos autem resurrectionem Domini pien évêque. Mais la suite de la lettre donne
était
mane celebramus. Gyprian., Epist. 63. L'usage que plutôt lieu de juger que c'était un simple laïque.
saint Cyprien reprend ici comme abusif, parait s Et ne forte claritalis et martijrii lui dignitas
avoir été reçu en Afrique dès le temps de ïertul- nostra communicatione maculetur. Ibid.
lien Eucharistiœ sacramentum, dit cet auteur, lib.
: ' Itaque qui Christo non a'edit sacerdotem facienti,
de Corona, cap. 3, in tempore victus mandatum a Do- postea credere incipiet sacerdotem vindicanti. Ibid.
mino, etiam untelucanis horis sumimus. Mais il s'a- * Quanquam sciam somnia ridicula etvisiones inep-
bolit insensiblement, et nous voyons qu'au troisième tas quibusdam malunt con-
videri, sed utique illis qui
concile de Carlbage tenu eu 397, il fut défendu de tra sacerdotes credere, quam Sed nihil mi-
sacerdoti.
communier après avoir mangé, excepté le jour du rum, quando de Joseph fratres sui dixerunt : Ecce
jeudi saint, en mémoire de ce que Jésus-Christ avait somniator ille venit, et somniator postea quod som-
fait ce jour-là avec ses Apôtres: Ut sacramenta alta- niaverat, consecutus sit, et occisores ac vetidi tores con-
ris, non nisi a jejunis hominibus celebrentur excepta ,
fusi sint, ut qui verbis prius non credidissent, factis
uno anniversario que Cœna dominica celebratw: nam postmodum crederent. Liid.
32i> HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que j'ai à vous rcpondre *, suivant le tcmoi- ceux qui se joignent aux coupables sont '
rriea aux i)a<i;ne uommés Dasilide et xMartial, dont un 1 les maximes inhumaines de cet hérésiarque,
L.-on Cl .le
^^l^[^ évèque de Léon, et 1 autre de Mérida, il refusait la paix aux pénitents et en avait
«*• s'étant rendus coupables de divers crimes, tu- laissé mourir plusieurs, dans les années pré-
rent déposés par les évèques réunis de la pro- cédentes, sans leur accorder la communion.
201.
vince; Sabin l'ut mis en la place de Dasilide, Cependant on le tolérait, et il n'avait point
et Félix en ne
colle de Martial. iMais Basilide, encore été excommunié. INIais, au lieu de pro-
pouvant soull'rir de se voir réduit au rang fiter de cette douceur, il s'en servait pour in-
des laïques, s'en alla à Rome pour se faire sulter à l'Eglise, allant jusqu'à se faire gloire
rétablir par le pape saint Etienne, qui rem- de s'en être séparé pour suivre Novalien.
plissait alors le saint-Siége. On ne sait pas si Faustin, évèque de Lyon, et les autres évèques
JNIartial fit aussi le voyage de Rome ;
mais il de la même province, en écrivirent au pape
est certain que Basilide surprit la religion du saint Etienne. Faustin en écrivit aussi deux
pape en lui déguisant le fait, qu'il obtint de fois à saint Cyprien; ce qui obligea celui-ci à
lui des lettres favorables, et qu'à son retour écrire " de son côté au pape, pour l'exhorter
il trouva des évèques qui communiquèrent à envoyer aux fidèles d'Arles et aux évè-
avec lui et avec Martial. C'est ce qui obligea ques des Gaules, des lettres amples et fortes,
l'Eglise de Léon et celle de Mérida d'écrire pour les engager à déposer Marcien et à met-
aux évèques d'Afrique et de leur députer les tre un autre évèque eu sa place. « C'est à
évèques Félix et Sabin, pour demander leurs nous, lui dit-il, mon très-cher frère, à remé-
conseils dans cette fâcheuse conjoncture. Ces dier à un si grand mal; à nous qui, tenant
lettres furent lues dans un concile de trente- la balance pour gouverner l'Eglise avec un
six évèques, à la tête desquels était saint Cy- juste tempérament, conservons tellement la
prien, et ce fut lui qui répondit, au nom de vigueur de la discipline envers les pécheurs,
tous, par une au prêtre Félix
lettre adressée que pour les relever de leurs chutes et les
,
et au peuple fidèle de Léon et d'Astorga, au guérir, nous ne leur refusons pas le pardon
diacre Lélie et au peuple de Mérida *. Sa let- qu'ils demandent. » Il lui fait en outre remar-
Epi6t. 07.
paf. 2S7. ^j.g^^Q^^ jjQyg ferons ailleurs un plus long quer qu'il y a longtemps que Novatien lui-
détail, porte en substance que l'élection de même a été excommunié et déclaré ennemi de
Sabin et de Félix ne doit point être cassée, l'Eglise, surtout depuis qu'il avait osé élever
mais subsister; que l'on ne devait pas recon- à Rome un autel profane et oûrir des sacri-
fices sacrilèges, en la place de Corneille, qui
naître Basilide et Martial pour évèques, ni
communiquer avec eux en cette qualité, la en était le véritable évèque; puis il ajoute:
surprise dont ont usé envers le pape de
ils « N'est-ce pas une chose honteuse que nous
au Ueu de leur acquérir un nouveau droit, et core de nous et se constituent les juges de
la témérité des évèques qui ont communiqué l'Eglise. Envoyez donc des lettres à la pro-
avec eux ne pouvant servir qu'à les faire dé- vince et au peuple d'Arles en particuUer, pour
poser eux-mêmes, puisque, selon TApôtre, excommunier l'évêque Marcien, en mettre un
1 Hœc pro animi mai pura conscientia et Dei met l'Apostolat de saint Martial, par M. Arbelot. {L'édi-
s LX1I« de l'édition de D. Maran. (L'éditeur.) ac fraternœ salutis inimicum, collegio nostro insultare
» Saint Trophime est placé au i" siècle, même par le paliamur... Dirigantur in provinciam et ad plebem
P. Longueval, Hist. de l'Eglise gallicane, qui, sur ce Arelatœ consistentem a te litierœ quibus, abstenio
abandonne Grégoire de Tours. Voyez Monu-
point, Marciano, alius in locum ejm substituatur , et grex
et vulne-
ments inédits pour servir à Vhiatoire de sainte Christi, qui in hodiernum ah illo dissipatus
Magdeleine, tom. I; voyez aussi Dissertation sur ratus contemnitur, colUgatur, Cypr., Epist. 68.
[iri" SÎÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 327
dans une même bergerie les brebis du Sei- qui, après avoir été baptisés par Novatien et
gneur car, quoique nous soyons plusieurs
: après avoir suivi son parti, le quittaient pour
pasteurs -, nous paissons néanmoins un seul se réunir à l'Eglise calholique. Saint Cyprien Epist. m,
troupeau. » Il oppose à la dureté de Nova- répondit; « Tous les hérétiques et les schis- i'^s-29*.
tien et de Marcien, l'indulgence des saints matiques n'ayant aucun droit ni aucun pou-
papes Corneille et Luce, son successeur, les- voir, Novatien, ennemi déclaré de la paix de
quels ont déclaré, par leurs lettres, qu'il fal- l'Eglise et de la charité de Jésus-Christ, ne
lait donner la paix et la communion aux pé- devait pas être excepté du nombre de ses ad-
cheurs pénitents « Ce que nous avons aussi
: versaires et des antechrists : ainsi, puisqu'il 295.
tous ordonné, dit -il, car nous ne pouvions n'y a que l'Eglise qui ait l'eau de la vie et la
pas être d'un sentiment différent les uns des puissance de baptiser et de sanctifier, on ne
autres, étant tous animés d'un môme esprit.» peut être baptisé ni sanctifié dans le parti de
A la lin de sa lettre il dit au pape : « Man- Novatien, non plus que dans aucune autre
dez-nous, s'il vous plait, qui aura été mis en secte hérétique ou schismatique. Car l'Eglise
la place de Marcien ', afin que nc^us sachions étant une, elle ne peut pas en même temps
à qui nous devons écrire et adresser nos frè- être dedans et dehors. Si elle est avec Nova-
res. » Saint Augustin fait visiblement allu- tien, elle n'a point été avec Corneille; mais
sion à cette lettre *, lorsqu'd en cite une de si elle a été avec Corneille, qui a succédé lé-
saint Cyprien au pape saint Etienne, laquelle gitimement à Fabien, Novatien n'est point
ne parlait point du tout du baptême. Car dans l'Eglise, puisqu'il n'a succédé à per-
nous n'avons que deux lettres de lui à ce sonne et qu'il a pris son origine de lui-mê-
saint pape; celle qu'il lui adresse sur le bap- me; or, celui qui n'est point dans l'Eglise ne
tême est la soixante-douzième; elle a pour peut la gouverner. « Si l'on oppose que No- ays.
but de faire voir l'invalidité du baptême des vatien tient la même loi que l'Eglise catho-
hérétiques. Il ne nous reste aucune des let- lique, qu'il baptise avec le même symbole,
tres de Faustin, ni des réponses que saint qu'il reconnaît le même Dieu pour Père, le
Cyprien y avait faites. Car on ne doute point même Christ pour Fils, et le même Saint-Es-
qu'ayant écrit au pape sur cette affaire, il prit; qu'ainsi, puisqu'il ne diffère point d'a-
n'ait aussi marqué à Faustin ce qu'il croyait vec nous pour les demandes qui se font au
2 îiam etsi pastores multi sumus, unum tamen gre~ baptiser les hérétiques, ce qui semble prouver qu'elle
gem pascimus. Cyprian., ibid. a été écrite après la tenue du concile de Carthage,
3 Nous ne savons ce qui arriva de cette affaire, où cette question fut décidée en 25G. Mais rien n'em-
sinon que Marcien ne se trouve point dans une an- pêche qu'on ne dise que Magnus, étant bien in-
cienne liste des évêques d'Arles donnée depuis peu. formé du sentiment de saint Cyprien et des autres
Ce qui peut porter à croire qu'il fut déposé et ef- évêques d'Afrique sur le baptême des hérétiques,
facé des dyptiques, c'est-à-dire de la table où l'on ne le crut pas véritable, et que c'est pour cela qu'il
mettait les des évêques morts dans la commu-
noms ne lui fit aucune question sur ce point. Ainsi nous
nion de l'Église, comme Saturnin, déposé pour l'a- suivrons Baronius et Pearson, qui prétendent que
rianisme, ne s'y trouve point non plus. Tillemont, la lettre de saint Cyprien à Magnus est la première
tom. IV Hist. eccle's., pag. 132. de celles qui regardent la question du baptême des
^ Sed aliquisforsitan quœrat quid de hac re beati hérétiques.
Cypriani epistola ad Stephanum dixerit, cujus in hac ^
Saint Cyprien donne à Magnus la qualité de fils,
sententia commemoratio facta est, cum in exordio fin charissime. D'où ou conclut qu'il n'était qu'un
concilii non sit commemorata; credo quia non puta- simple laïque ou inférieur en dignité à salut Cy-
tum est necessarium... Nam p)orsus ad quœstionem prien.
non pertinet..,,, Prorsus enim illa epistola de bap-
3-28 HISTOIRE GÉNl<'RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
baptême, il peut fort l)ien s'attribuer le pou- droits de l'Ecriture ', que l'aspersion, dans le
voir de baptiser : je réponds pn;mièrc'ineut, baptême, sullit pour i)urilier. Il dit qu'il ne
continue saint C\ prien, (lu'il n'est point vrai faut point s'arrêter au nom de clinicjues ({ue
que les scliismatiques aient le même symbole quelques-uns doiuiaient à ceux qui avaient
que nous, ni qu'ils fassent les mêmes de- été baptisés dans le lit, au lieu de les nom-
mandes aux baptisés car lorsqu'ils disent ; : mer cliréliens. « Je ne sais, ajonte-t-il, où ils
même l'ère, le même Fils et le même Saint- longtemps au lit,ne l'empêcha point de re-
Esprit que nous, cela ne leur saurait servir à cevoir du ciel une vigueur tout entière. Si
rieu : Coré, Datban
Abiron reconnaissaient et quelqu'un touché de ce qu'entre ceux qui
est
bien le même Dieu qu'Aaron et que Moise, et ont été baptisés, étant malades, il y en a qui
avaient la même loi ; néanmoins, pour avoir sont encore possédés par des esprits immon-
voulu usurper le droit de sacrifier, ils furent des, qu'il sache que la malice opiniâtre du
punis sur-le-champ de leur témérité. » Saint diable a lieu jusqu'à l'eau salutaire du bap-
Cyprien fonde sa réponse sur un grand nom- tême, mais * qu'au baptême toute la force de
bre de passages de l'Ecriture, et principale- ce poison est éteinte. Le diable est fouetté,
ment sur ce principe qu'il regarde comme brûlé et tourmenté par la voix des exorcis-
incoutestable, que tous les hérétiques et les tes et par la puissance divine; et, bien qu'il
schismatiques, n'ayant point le Saint-Esprit, mente souvent lorsqu'il dit qu'il sort et qu'il
Paf. 297. ne peuvent le donner. Maguus lui demandait va quitter les hommes qui appartiennent à
encore si ceux qui avaient été baptisés, étant Dieu, néanmoins, lorsqu'on en vient à l'eau
malades devaient être réputés pour chré- salutaire et à la sanctification du baptême,
tiens, attendu qu'ils n'avaient pas été pion- nous devons savoir et tenir pour certain que
gés dans bain sacré, comme on avait alors
le le diable y est sufî"oqué, et que l'homme qui
coutume de le faire, mais seulement arrosés y est consacré à Dieu est entièrement déli-
d'eau. Cette question pouvait aussi regarder vré par sa miséricorde. Nous voyons même, p.g.290.
Novatien, qui avait reçu le baptême étant par expérience, que ceux qu'on a été obligé
malade. « Nous estimons, dit saint Cyprien, de baptiser pendant leur maladie sont déli-
que les bienfaits de Dieu ne peuvent être af- vrés de l'esprit immonde dont ils étaient
faiblis, et que, lorsque la foi de celui qui tourmentés auparavant, qu'ils mènent une
donne et de celui qui reçoit lebaptême est vie exemplaire dans TEgUse, et font croître
pleine et entière, il se fait aussi une pleine et de jour en jour, par le moyen de la foi, la
entière efi'usion de ses dons. Le bain salu- grâce qu'ils ont reçue; il arrive souvent, au
taire ne lave pas les souillures de l'âme de la contraire, que ceux qui ont été baptisés eu
même manière qu'un bain commun nettoie santé, s'ils viennent ensuite à pécher, sont
celles du corps. Il ne faut pour cela ni cuve, tourmentés par l'esprit immonde qui rentre
ni escabeau, ni étrilles d'or. Le tout s'opère en eux. Il est donc évident que le diable est
par le mérite de la foi et, en cas de nécessité, ,
chassé dans le baptême par la foi de celui
208. elle supplée à tout le reste. Ainsi on ne doit qui le reçoit, et que, cette foi venant à man-
pas trouver étrange qu'un malade, étant quer, il y retourne. » Il finit sa lettre en di-
seulement arrosé d'eau, reçoive également la sant : « Je vous ai déclaré mon sentiment,
grâce de Dieu. » Il prouve, par plusieurs en- mais je ne prétends pas qu'il doive servir de
i Ezech. XXXVI ; Num. xix, 19; Num. vui, 7. bus ipsis experimur, ut necessiiate urgente in œgritu-
' Quod si movetur quod quidam de
aliquù in illo dine baptizati et yratiam consecuti, careaht immundo
lis qui œyri baptizantur, spiritibus adhuc immundis spiritu quo antea movebaniur, et laudabiles ac proba-
teniantur sciât diaboli nequiliam pertinacem usque
; biles in Ecclesia vivant, plusque per dies singulos in
ad aquam salutavem valere, in baptismo vero omne augmentum cœ/estis gratiœ per fidei incrementa pro-
nequitiœ suce virus amittere. Cyprian., Epist. 69. ficiant ; et contra sœpe nonnulli de illis qui sani bap-
Saint Cyprieu croyait donc que ceux qui, après avoir iizantur, si postmodum peccare cwperint, spiritu im-
reçu le baptême, étaient travaillés du démon, l'é- mundo redeunte quatiuntur ; ut manifestum sit diabo-
taient par leur faute et pour avoir violé l'inno- lum in baptismo fide credentis excludi, si fides post-
cence de leur baptême; ce qui paraît clairement modum defecerit, regredi. Cyprian., ibid.
par ce qu'il dit un peu plus bas: îloc denique et ré-
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 329
loi à personne, ni empêcher les autres évê- le baptême étant un, on ne pouvait le réité-
ques *
d'en user comme il leur plaira. » rer; en second lieu, qu'il fallait suivre l'an-
Saint Augustin cite ' l'endroit de cette lettre cienne coutume. Saint Cyprien demeure d'ac-
où saint Cyprien dit que les sacrifices mêmes cord qu'il n'y a qu'un baptême, mais il pré-
du Seigneur font voir l'union indissoluble tend que cet unique baptême n'est que dans
'
qui doit être parmi les chrétiens. Facundus l'Eglise catholique, qu'on ne saurait rien re-
en rapporte encore un grand passage dans cevoir chez les hérétiques, parce qu'il n'y a
sa lettre pour les trois chapitres, et dit rien; qu'étant réputés pour morts, ils ne
qu'elle est écrite pour saint Corneille, pape et peuvent donner pas eux-
la vie qu'ils n'ont
martyr, parce qu'elle combat Novatien *, qui mêmes. Quant à coutume, il n'en discon-
la
avait prétendu prendre la place de ce saint vient pas, mais il dit que la raison doit l'em-
pape. porter Il s'appuie sur l'exemple de saint
''.
Lotroi
de Raint i;y-
55 '. La même année, saint Cyprien fut
,
Pierre qui, dans son différend avec l'apôtre
. . .
prenauxé- coQsulté pap plusicurs éveques de Numidie, saint Paul touchant la circoncision, ne s'at-
Nnmi.iie et au uombre de dix-huit, pour savoir si l'u- tribua rien avec arrogance, pour dire qu'il
en 253. étaient de baptiser tous les hé- avait la primauté et que les nouveaux venus
gage OÙ lls
rétiques et les scliismatiques était légitime. devaient plutôt lui obéir. Il ne méprisa pas
On ne voit point le sujet particulier de cette davantage Paul, parce qu'il avait persécuté
consultation, si que quelques-uns
ce n'est l'Eglise mais il reçut son conseil et céda à
,
d'entre eux ne voulussent plus se conformer à ses raisons, afin de nous apprendre à ne pas
cet usage, ou que quelque évêque des autres nous attacher opiniâtrement à nos opinions
Ep si. 70, provinces eût remué cette question. Ce qui et à embrasser les sentiments de nos frères,
pag. 300.
est certain, c'est que saint Cyprien ayant fait quand ils sont utiles et véritables ; car alors
lire leur lettre dans un concile de trente- ce n'est point être vaincu, mais instruit. H
deux évêques et de plusieurs prêtres où il du concile
s'appuie encore sur l'autorité te-
présidait, y il que personne ne
fut résolu ^ nu par Agrippin, son prédécesseur, avec les
pouvait être baptisé hors de l'Eglise, et que évêques d'Afrique et de Numidie, dont le
les évêques de Numidie devaient suivre la décret portait que la rémission des péchés
pratique qu'ils observaient déjà, et conti- ne pouvait être donnée que dans l'Eglise, les
nuer à baptiser ceux des hérétiques ou des ennemis de Jésus -Christ ne pouvant rieu
schismatiques qui se réunissaient à l'Eglise s'attribuer de ce qui regarde sa grâce. Saint
catholique. Saint Cyprien fit une semblable Cyprien envoya en même temps à Quintus
réponse à Quintus, évêque de Mauritanie, qui la lettre synodale du concile qu'il venait de
avait chargé le prêtre Lucien de le consul- tenir, afin qu'elle servit à le convaincre de la
Episi. 71, ter sur la même question. Mais comme il
y nécessité de baptiser les hérétiques, et qu'il
pag. 302
avait quelques évêques qui, au rapport de la communiquât à tous les évêques de sa pro-
Quintus, soutenaient qu'on ne devait point vince.
baptiser les hérétiques, de répon- il s'efiForce 56*. Mais, voyant que la dispute sur le Lettre
de saint Cy-
dre aux raisons qu'ils alléguaient pour leur baptême des hérétiques, au lieu de s'apaiser, prien au pa-
pe saint E-
sentiment. Ils disaient en premier lieu que, s'échauffait de jour en jour, il tint un second ticnne , eu
256.
clerus, rnultique ex populo refragareniur, eo quod sed ratione vincendum. Nam nec Petrus, quem primum
non liceret quemquam ex iis qui urgente vi morbi in Dominus elegit, et super quem œdificavit Ecclesiam
ledulo, perinde ac ille, perfusi fuissent, in clerum as- suam, cum secum Paulus de circumcisione postmodum
sumi, postulavil ab iis episcopus ut hune solum ordi- disceptaret , vindicavit sibi aliquid insolenter aut ar-
nari a se paterentur. Cornel., iu Episi. ad Fab. An- roganter assumpsit, ut diceret se primatum tenere, et
tioch., apud Euseb., lib. VI Hist., cap. 43. obtemperari a novellis et posteris sibi potius oportere.
* August., lib. VII de Baptismo, cap. 50, lom. IX, Gyprian., Episi. 71.
^pag. 200. 8 XXXIIe pareillement dans l'édition de D. Maran.
3 Facundus, tom. III Spicilegii, pag. 116 et 117. {L'éditeur.)
* Tillemont, tom. IV Hist, ecclés., pag. 159.
,
l'Eglise catholique, tomberaient ensuite dans synodale dont nous venons de parler; mais
l'hérésie ou dans le schisme, ne seraient ad- on voit, par un fragment qui nous en reste,
mis dans l'EgUse qu'à la communion laïque, qu'il y décidait la question sur le baptême eu
ces termes « Si quelqu'un vient à nous ' de
sans pouvoir jamais exercer aucune fouctiou :
ecclésiastique. Saint Cyprien donna avis de quelque hérésie que ce soit, que l'on garde,
tous ces décrets au pape saint Etienne, par sans rien innover, la tradition qui est de lui
une lettre qu'il lui écrivit au nom de tous les imposer les mains pour la pénitence, puisque
Pères du concile, qui croyaient que ce saint les hérétiques mômes
ne baptisent point
*
pape entrerait dans leur sentiment, persua- ceux qui viennent à eux d'un autre parti,
dés, comme ils l'étaient, d'avoir donné une mais les reçoivent seulement à leur commu-
décision entièrement conforme à la piété et à nion. » 11 y rejetait également la décision du
la vérité. «Ce n'est pas que nous ne sachions, concile de Carthage, et déclarait qu'il ne com-
ajoute-t-il, qu'il y eu a qui ue veulent point muniquerait plus ^ avec Cyprien et les autres
quitter les opinions dont ils sont une fois évèques du même sentiment, s'ils n'en chan-
prévenus, et qui gardent leurs usages par- geaient. C'est de saint Cyprien lui-même que
ticuliers, sans rompre pour cela avec leurs nous apprenons toutes ces circonstances; et
frères. Eu quoi nous ne prétendons point non la manière dont il les représente dans sa let-
plus donner la loi ni fau-e violence à per- tre à Pompée, a fait croire à quelques criti-
gouvernement de son Eglise.» Avec cette son sentiment a été, qu'il fallait recevoir tout
lettre, saint Cyprien lui envoya celles qu'il baptême donné par les hérétiques en quelque
avait écrites quelque temps auparavant aux manière que ce Eusèbe ^, saint Augus-
fût.
évèques de Numidie et à Quintus. Saint Jé- tin , Vincent de Lérins et Facundus , qui ont
tjere, nec Libère de aqua aliéna, et idcirxo hœreticorum micus christ ianorum, sacerdotes Dei, veritatem CUristi
reprobans, ad Stephanum tune Romance ur- et Ecclesiœ unitatem tuantes, abstinendos putat. Cy-
baptisma
bis episcopum, super hac re Africunam synodum dire- prian., Epist. 74 ad Pompeium.
xit : sed conatus ejus frustra fuit. Hieronym., Adv.
* Primus omnium Cyprianus, qui tune temporis
alterutrum ad se venientes non baptizent, sed commu- sed consuetudo illa quœ opponebatur Cypriano, ab
nicent tantum. Stephan., apud Cyprian., Epist. 74 ad eorum exordium sumpsisse credenda est, sicut sunt
Pompeium. multa quœ universa tenet^Ecclesia, et ob hoc ab Apo-
* Pour que ces paroles aient quelque sens, il faut stolis pi-œcepta benc creduntur, quunquam scripta non
reperiantur. Aug., lib. V de Bapt. cont. Donat.,
I
apparemment les entendre ainsi: La tradition de ne
point rebaptiser a jeté de si profondes racines, que cap. 23, pag. 156, tom. IX. Quondam igitur venera-
les hérétiques mêmes n'osent la combattre. Fleury, bilis memoriœ Agrippinus, Carthaginensis episcopusf
tom. 11 Hist, ecdés., pag. 285, primus omnium mortalium contra divinum canonem,
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 331
nous n'avons point de preuve claire du con- tout baptême donné au nom de Jésus-Christ
traire, et qu'il n'est pas juste de condamner est valide, ces paroles en elles-mêmes n'ont
d'erreur, sur des raisons faibles et incertai- rien de contraire à la vérité. Etre baptisé au
nes,uu pape honoré comme saint et comme nom de Jésus-Christ ou au nom de la Trinité,
martyr, et avec lui un grand nombre d'évê- étaient, dans les premiers siècles, deux ma-
ques qui le suivaient. Car il est difficile de nières synonymes de parler *, et on ne se ser-
s'assurer des sentiments d'une personne, soit vait de la première que pour distinguer le
sur des passages détachés, soit sur le lémoi- baptême de Jésus-Christ d'avec celui de saint
contra universalis Ecclesiœ regulam, contra sensum rebaptizantibus non ferendis. Facund., lib. cont. Mo-
omnium consacerdotum, contra niorem et instituta ma- cianum, pag. 577, edit. Sirm.
jorum, rthaptizandum esse censebat; quce prœsumptio 1 Tillomont, not. 39 in Cyprian., pag. 628 Coû- ;
tantum mali invexit, ut non solum hœreticis omnibus tant, tom. I Epist. décrétai., pag. 227 et seq.
formam sacrilegii, sed etiam quibusdam cutholicis oc- 2 Ad calcem. oper. Cyprian., pag. 20 et seq.
casionem prœbuerit erroris. Cum ergo undique ad no- 3 Multum proficit nomen Christi, ut quicumque et
vitatem rei cuncti reclamarent, atque omnes quaqua- ubicumque in nomine Christi baptizatus fuerit, statim
versum sacerdotes pro suo quisque studio reniterentur, consequatur grutiam Christi. Steplian., apud Firrai-
tune beatœ memoriœ papa Stephaiius, apostolicœ Sedis lianum. Voyez aussi les paroles de saint Firmilien
antistes, cum cœteris quidem collegis suis, sed famen lui-même, sur lesquelles on appuie encore plus bas :
prœ cœteris restitit. Dignum, ut opinor, existimans, si lllud quoijue absurdum quod non putant quœrendum
reliquos oiyines tantum fidei devotione vinceret, quan- esse, etc. Epist. 75, inter Cypriauicas.
tum loci auctoritate superabat. Denique in epistola quœ ^ Cela est que les adversaires eux-mêmes
si vrai,
tune ad Africam missa est his verbis sanxit : Ni-
, du pape saint Etienne se servent des mêmes ex-
hil innovandum nisi quod traditum est. Intellige-
, pressions que lui, comme on peut le voir dans les
bat etenim vir sanctus et prudens, nihil aliud ratio- avis qu'ils donnèrent dans le troisième concile de
nem pietatis admittere, nisi ut omnia qua fide a Pa- Carthage : Cecilius a Bilfa dixit : Ego unum bap-
tribus suscepta forent, eadem pde filiis consignarentur, tisma in Ecclesia sola scio, et extra Ecclesiam nullum...
nosque religionem non qua vellemus ducere, sed potms, una fides, una spes, unum baptisma; non apud hœre-
qua sequi oportere; idque esse proprium
illa duceret, ticos, ubi spes nulla est et fides falsa, ubi in nomine
christtanœ modestiœ et gravitatis, non sua posteris Christi tingit Antichristus Apud Cyprian., pag. 158.
.
tradere, sed a majoribus accepta servare. Quis ergo Hortensius a duodecim laribus dixit : Quot sint bap-
tune universi negotii exitus? Quis utique, nisi usitatus tismi, viderint aut prœsumptores, aut fautores hœreti-
et solitus"^ Retenta est scilicet antiquitas, explosa no- corum : nos unum baptisma, quod non nisi in Ecclesia
vitas, Vincent. Lirin., in Commonit., pag. 331. Ste- novimus, Ecclesiœ vindicamus. Aut quomodo possunt
phani potius quam Cypriani sententiam tenet Ecclesia, in nomine Christi aliquem baptizare, quos ipse Chris-
non solum de rebaptizandis hœreticis, verum etiam de tus dicit adversarios suos esse? Ibid., pag. 161,
33-2 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Jean. Il est dit, dans le livre des Ac(es ', que gnage même
de saint Firmilien, auteur non
les Apôtres baptisaiinit au nom de. Josus- susp(!ct en cette matière, que saiut Etienne
Clirist. Cc[»eTulant on ne peut douter, selon n'admettait point d'autre baptême que celui
saint Hilaire *, qu'ils n'aient baptisé au nom qui se doimait au nom de la sainte Trinité.
de la sainte Trinité, conlorinéineut à l'ordre Voici ses propres paroles « C'est * encore une
:
qu'ils en avaient reçu; et ce Père ne veut pas absurdité de s'imaginer, comme font ceux du
qu'gn juye de ce qu'ils ont lait, par cet endroit parti d'Etienne, qu'il ne faut point avoir d'é-
des Actes, mais par le connnandement que gard à celui qui a baptisé, et que celui qui a
Jésiis-CUrist leur avait fait de baptiser au été baptisé a pu fort bien recevoir la grâce
nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. On du baptême par la seule invocation des per-
ne doit donc pas non plus prendre à la lettre sonnes de la Trinité. » Saint Jérôme et saint
ce (|ui est rapporté de plusieurs anciens, qu'ils Léon, qui ne pouvaient ignorer qu'on avait
baptisaient au nom de Jésus-Christ, ou qu'ils rejeté dans le concile de Nicée ° le baptême
rectîvaifcut tout baptême qui était conféré eu donné par les paulianistes , ne laissèrent pas
ce nom. Le pape saint Innocent, qui, dans depuis de dire % en des termes aussi généraux
une de ses lettres, dit qu'on ne doit faire
' que le disait saint Etienne, que l'Eglise avait
aucune difficulté de recevoir à la péniteuce toujours reconnu pour valide le baptême
les novatiens, parce qu'encore qu'ils eussent douné par les hérétiques.
été baptisés chez les hérétiques, ils l'avaient 57 ^. Il parut , dans le même temps ', un Lettre
néanmoins été au nom de Jésus-Christ, assure écrit eu forme de lettre, dans lequel on avan- y'îwa\ iu-
dans une autre * que les novatiens baptisaient çait qu on recevait la rémission de ses péchés 25c.
au nom du Père, du Fils et du Saiut-Esprit, selon sa foi, n'importe de qui l'on reçût le Epist. 73,
rag. 306 et
et ajoute qu'en cela ils différaient des pau- baptême. On y soutenait encore qu'il ne fal- seq.
hanistes, qui ne baptisaient point au nom de lait point baptiser ceux qui quittaient le parti
la sainte Trinité. Quant à ces termes géné- de Marcion pour se réunir à l'Eglise, d'au-
raux dont s'est servi saint Etienne « Si quel- : tant qu'ils avaient été baptisés au nom de
qu'un vient à nous de quelque hérésie que ce Jésus-Christ. Celte lettre étaut tombée entre
soit, » ils ne prouvent rien en faveur de ses les mains d'un évêque nommé
Jubaien, dont
adversaires ; car il est évident, par* le témoi- le siège est incormu, cet évêque l'envoya à
et Filii, et Spiritus Sancti jussi, tanfum in nomine bellos, quos adversus nos de hœreticis rebaptizandis
Jesu buptizaverunt (id est, baptizasse leguutur in edidit, et ibi reperiet ipsum Hilarium coyifiteri a Ju-
Actis). Hilarius, lib. de Synodis, num. 85, pag. 1198 lio, Marco, Sylvestro et cœteris veteribus episcopis, si.
mil., apud Cypr., Epist. 75. viner que de l'attribuer au pape saint Etienne.
* De paulianistis qui deinde ad Ecclesiam confuge- Qu'avait-il à craindre s'il eût mis son nom à la
runt, statutum est ut li omnino rebaptizentur. Concil. tète de cette lettre? Et quelle raison pouvait-il
Nicaen., can. 19. avoir de ne l'y mettre pas?
''
Si hœrttici baptisvia non habent, et ideo rebapti-
,
vons pas nous mettre en peine de ce que pra- Dieu, que quelques-uns prècliaient avec zèle,
tiquent les ennemis de l'Eglise pourvu que ,
d'autres par jalousie; qu'il ne suflît pas que Paj. 3H.
nous conservions l'honneur de notre dignité le baptême ait été donné au nom de Jésus-
et l'ordre inébranlable de la vérité et de la rai- Christ, s'il n'a été donné dans la vraie foi,
son, son. Il dit ensuite qu'il faut considérer quelle qui consiste à croire premièrement le Père, et
est la créance des hérétiques, et s'ils croient ensuite le Christ, son Fils, qu'il a envoyé; que
le même Père, le même Fils, le même Saint- le baptême n'a pas plus de force ni de vertu
Esprit, la même Eglise que nous : « Car si que le martyre, qui toutefois ne sert de rien
cela est ainsi, ajoute-t-il, peuvent aussi ils à ceux qui le souiïrent hors de l'Eglise ; qu'il 3i2.
avoir le même baptême.» Puis, examinant en est vrai néanmoins que les catéchumènes qui
particulier les marcionites, parce que c'était sont mis à mort pour la confession du nom
d'eux qu'il était parlé dans l'écrit anonyme, de Jésus-Christ, avant d'avoir reçu le bap-
il soutient que leur baptême ne saurait être tême, sont sauvés sans baptême ; mais qu'ils
bon, puisqu'ils ne reconnaissent pas le même tiennent la foi entière et l'unité de l'Eglise,
Père et le même Créateur que nous, ni le et qu'ils reçoivent le baptême de leur sang,
même Fils unique, Jésus-Christ, ni qu'il soit qui suffît avec la vraie foi, comme on le voit
né de la Vierge Marie. On objectait à saint par l'exemple du bon larron. Il se fait ensuite 313.
Cyprien que ceux qui avaient été baptisés cette difficulté :Que deviendront donc ceux
en Samarie par le diacre saint Philippe, n'a- qui, ayant quitté les hérétiques, ont été reçus,
vaient pas été rebaptisés par les Apôtres, qui par le passé, dans l'Eglise sans y avoir été
s'étaient contentés de leur imposer les mains baptisés ? Il la résout en disant ^ que Dieu est
308. afin qu'ils reçussent le Saint-Esprit. Il répond assez puissant pour leur faire miséricorde, et
qu'ils avaient été baptisés dans l'Eglise, à qui que ceux qui, ayant été ainsi reçus simple-
seule il est donné de conférer la grâce, et que, ment dans l'Eglise, y sont morts, ne seront
CQmme ils avaient reçu un baptême légitime, pas privés des grâces que Dieu a accordées à
il n'était plus nécessaire que d'attirer sur l'Eglise, leur mère. « Mais, ajoute-t-il, parce
eux le Saint-Esprit par la prière et l'impo- que l'on s'est trompé quelquefois, il ne s'en-
sition des mains. « Et c'est, continue -t- il, suit pas que l'on doive se tromper toujours.»
ce qui se pratique encore maintenant parmi Il est remarquable que saint Cyprien, en bap-
Ptf. 3U. maître de ses actions. Car, autant que nous vaut lesquels nous devons fuir les hérétiques
lepourrons, nous n'aurons point de démêlé comme des antechrists, d'autant que l'on ne
là-dessus avec nos collègues les évèques, avec trouve pas que, dans les siècles précédents, où
qui nous voulons toujours vivre en paix et il s'est élevé tant d'hérésies, on ait ordonné
en union, suivant le commandement de No- d'imposer les mains aux hérétiques et de les
tre-Seigueur Jésus-Christ, surtout puisque admettre ainsi à la communion. Il se moque sifi.
l'Apôtre dit * : .!>< quelqu'un veut contester de ce que saint Etienne se servait de l'exem-
là-dessus, nous n'avons rien à dire, sinon que ple des héréti(|ues qui ne rebaptisaient pas
ce n'est coutume ni celle de
point là notre ceux qui venaient à eux d'une autre secte ;
l'Eglise de Dieu. Nous conservons inviolable- et dit que ceux qui croyaient que les héré-
ment, par notre patience, la charité de l'es- tiques confèrent le Saint-Esprit par le bap-
prit, rhonneûr de notre collège, le lien de tême, devaient croire aussi qu'ils peuvent le
la concorde du sacerdoce.
foi et la » Tl en- donner par l'imposition des mains *, c'est-à-
voya * à Jubaien, avec cette lettre, celle qu'il dire par la confirmation. Puis, venant au fait
avait aussi écrite quelque temps auparavant à de la question, il soutient que, l'effet du bap-
Quiutus siir la même matière, la lettre syno- tême étant la régénération, l'hérésie ne sau-
dale du premier concile aux évoques de Nu- raitengendrer à Dieu des enfants par Jésus-
midie, et, selon toutes les apparences, le dé- Christ dont elle n'est point l'épouse; que cette
cret du second concile touchant le baptême prérogative appartient à lEglise seule ,
qui
des hérétiques, avec son traité Bien de la Du est l'épouse et la bien -aimée, la seule qui
patience, dont nous avons parlé eu son lieu. par Jésus-Christ et purifiée par
soit sanctifiée
Lettre 58 '. Saint Cyprien envoya aussi les lettres son baptême ;
que cette Eglise est une, mar-
do saiûl Cy-
pricu il qu'il avait écrites sur le baptême, à Pompée, quée dans le Cantique ^ par le jardin fermé,
Pompée.
qu'on croit avoir été évêque de Sabrate, daus la fontaine scellée et le puits d'eau vive.
la Tripolitaine. Cet évèque souhaitant encore « Comment, dit-il, celui qui n'est point dans
avoir la réponse que saint Etienne avait faite dans ce jardin ou boire
l'Eglise, peut-il entrer
Epift.^74, à la lettre synodale du concile d'Afrique, saint de l'eau de cette fontaine ? » Il s'appuie en-
pas. 314
Cyprien lui en envoya une copie, et prit soin core sur les paroles de saint Pierre *, qui éta-
de lui taire remarquer ce qu'il croyait y avoir également l'unité de l'Eglise et du
blissent
de défectueux dans cette lettre. Comme saint baptême; il ajoute que, comme dans ce bap-
était naturel de conclure que, puisqu'ils conOrmaient paroles de saint Etienne, a quacumrjue hœreai vene-
une seconde fois les bérétiques, à plus forte raison rit ad nos, niliil innovetur nisi quod traditum est,
devaient-ils les rebaptiser, n'étant pas plus au pou- ut manus illi impjonaiur in pœnitentiam. Slepb., apud
voir des bérétiques de donner le Saint-Esprit par un Cypr., Epist. 74.
sacrement que par un autre Si m nomine Christi :
t Cant. IV, 12.
tème du monde, où l'ancienne malice fut pu- de Jésus-Christ eut le dessus dans leur cœur,
rifiée, ceux qui ne se trouvèrent point dans en sorte qu'il n'y eut aucun schisme parmi
l'arche de Noé ne purent être sauvés par eux. Le même Saint, s'objcctant ces paroles
Teau ; ainsi maintenant personne ne peut être de la lettre à Pompée « Mais d'où vient cette
:
sauvé par le baptême, s'il n'est baptisé dans tradition? Est-ce de Notre-Seigneur et de l'E-
TEglise, qui, figurée par cette arche unique, vangile, ou des Apôtres et de leurs épîtres? »
a été fondée par Notre-Seigneur dans l'unité. répond qu'à la vérité les Apôtres n'ont rien
'
Il finit sa lettre en disant * « Nous avons : ordonné expressément là-dessus, mais que
coutume de baptiser du baptême de l'Eglise la coutume qu'on opposait à saint Cyprien
ceux qui y viennent, de quelque hérésie qu'ils avait pris son commencement de la tradition
sortent; mais nous ne baptisons point ceux qu'ils ont laissée.
qui, a3^ant déjà été baptisés dans l'Eglise, 59 Pour examiner encore plus à fond la
*. i pttre de
uiilirn k
étaient passés parmi les hérétiques; il suffit, question du baptême des hérétiques, saint s'ù int C.y-
en
lorsqu'ils retournent, qu'on leur impose les Cyprien convoqua un concile des trois pro- 253
' Observatur itaque a nobis, et tenetur, frater dm- lien, où il dit que non-seulement saint Cyprien,
rissime, cxplorata et perspecta veritate, ut omnes qui mais aussi ceux de sou parti, demeurèrent dans l'u-
ex quacumque hœresi ad Ëcclesiam convertuntur, Ec- nité de la paix, quoique salut Eticnue crût qu'on
clesiœ unico legitimo baptismo bapiizentur, exceptis devait les excommunier : Cum ergo Stephanus non
his qui baptizati in Ecclesia prius fuerant, et sic ad soium non rebajitizarct hœreticos, verutn etiam hoc
hœreticos transieranf: hos enim oportet, cum redeunt, facientes, vel ut fieret décernantes, excommunicandos
acta pœnitentia, per manus impositionem solam re- esse censer^et, sicutaliorum episcoporum et ipsius Ct/'
cipi, et in ovile unde erraverant a pastore restitui. priani litterœ osfendunt ; tamen cum eo Cgprianus in
Gypr., Epist. li ad Pompeium. unitatis pace pernio.nsit... Ecce duo erant eminentissi-
^ Jam illa quœ in Stephanum irritatus effudit, re- marum Ecclesiarum, Romanœ scilicet et Carthagi-
tractare nolo; quia et non opus est, eadem quippe nensis episcopi Stephanus et Cgprianus, ambo in uni-
ipsa dicuntur, quœ jam satis discussa sunt, et ea prœ- tate cntholica constitua... Multi cum illo , quidam
terire melius est, quœ periculum perniciosœ dissentio- cum isto etiam sentiebant, utrique cum eis in umiate
nis habuerunt. Stephanus autem etiam abstinendos consistantes. August., lib. de unico Baptismo contra
putaverat, qui de suscipiendis hœreticis, priscam con- Petilian., cap. 14, pag. 538, tom. IX.
suetudinem convellere conarentur : iste autem quœs- 3 Apostoli autem nihil quidem exinde prœceperunt :
tionis ipsius difficultate permotus, et sanctis charitatis sed consuetudo illa quœ opponebatur Cgpriano , ab
viscerihus largissime prœdttus, in unitate cum eis ma- eorum traditione exordium sumpsisse credenda est, si-
nendum qui quamvis commotius,
diver^sa sentirent. Ita cut sunt multa quœ. universa tenet Ecclesia, et ob hoc
sed tamen fraterne indignaretur , vicit tamen pax ab Aposfolis prœcepta bene creduniur quanquam, scripta
Christi In cordibus eorum, ut in tali disceptatione, non reperiantur. Augustin., lib. V de Baptismo,
nullum inter eos malum schismatis oriretur. Lib. V cap. 23, pag. 156, tom. IX.
de Baptismo cont. Donat., cap. 26, pag. 158, tom. IX. * LXXVe pareillement dans l'édition de D. Maran.
Il s'explique de même dans som livre contre Péti- [L'éditeur.)
336 HISTOIRE Gl^Nl^lRALE DES AUTEURS ECCLT^ISIASTIQUES.
ceux qui rel)apti?aient les hérétiques. Saint Cy- d'autres provinces, une grande variété, sui-
prien écrivit *, de son côté, à saint Firmilien, vant la diversité des lieux et des personnes,
et lui députa un de ses diacres, nommé lloga- sans que l'on ait jamais rompu pour cela la
tien. Saint Firmilien le reçut avec joie ; et, paix et l'iuiité de l'Ejjlise catholique. » Fir-
après avoir relu souvent les lettres *, qu'il lui milieu vient ensuite à la pratique des héré-
avait apportées, renvoya vers le com-
il le ' '
tiques dont saint Etienne s'autorisait, et dit
mencement de une longue lettre
l'hiver avec qu'on n'est point obligé de suivre des gens
Paç. 319. pour saint Cyprien. Quoiqu'il ne le connût qui sont dans l'erreur; qu'il ne faut point
que de réputation, il ne laisse pas de montrer s'étonner que les hérétiques en usent ainsi
une grande affection et une grande estime les uns envers les autres; car, bien qu'ils
pour lui; mais il parle de saint Etienne en diffèrent entre eux en quelques petites cho-
330. des termes peu respectueux. Il répète les rai- ses, ils s'accordent tous néanmoins dans le
sonnements dont saint Cyprien s'était servi point principal, c'est-à-dire dans les blas-
dans ses lettres pour montrer l'invalidité du phèmes qu'Us vomissent contre le Créateur
baptême des hérétiques, et il tache de les for- et dans leurs rêveries touchant un Dieu fan-
tifier par de nouvelles réflexions. Il soutient, tastique et inconnu que °, comme il n'est
; pag. 322.
contre le saint pape Etienne, que les Apô- pas au pouvoir des hérétiques, étrangers à
tres n'ont pu défendre de baptiser ceux qui l'esprit et à la sainteté divine, d'ordonner ni
venaient de l'hérésie à TEghse, puisque les d'imposer les mains, ils ne peuvent non plus
hérésies les plus exécrables, telles qu'étaient baptiser ni faire aucune fonction spirituelle.
cellesde Cerdon, de Marcion, de Valentin, de « Nous avons, dij.-il établi tout cela, il y a
,
Basihde, ne se sont élevées que depuis les longtemps, à Icône en Phrygie, où nous étions
32!. Apôtres. « D'ailleurs, ajoute-t-il, ceux qui assemblés de Galatie, de Cilicie et des pays
sont à Rome * ne gardent pas la tradition en voisins, pour lever le doute où quelques-uns
toutes choses, et c'est en vain qu'ils veulent étaient sur ce sujet, et nous avons résolu de
se couvrir de l'autorité des Apôtres, puisqu'on soutenir fortement cette doctrine contre les
voit chez eux quelques diversités touchant la hérétiques. » prétend que saint Paul ayant
Il
célébration de la Pàque et de plusieurs autres rebaptisé ceux qui avaient reçu le baptême
mystères *, et qu'ils n'observent pas toutes de saint Jean, il eu doit être de même de
choses précisément comme on les observe à ceux qui ont été baptisés par les hérétiques,
Jérusalem. Il y a pareiUement, en beaucoup l'invocation du nom 'des trois Personnes
ipsa atque eadem dorno slmul tnhaùitautes. Firmilian., sancte nec spiritualder gerere quando aliénas sit a
,
apud Cyprian., Episl. 73. spiritali et deifica sanctitaie. Quod totum nos jam
* Nos vero ea quœ a vobis scripta sunt, quasi nostra pridem in Iconio, qui Phrygiœ locus est^ collecti in
propria suscipimus , nec in transcursu tegiinus, sed unurn coHvenientibus ex Galatia et Cilicia, et cœteris
sœpe repetita memoriœ mandavimus. Firmilian., apud proximis regionibus, con/irmavimus tenendum contra
Cypr., Epist. 75. hœreticos firmiter, et vindicandum, cum a quibusdam
2 Quoniam legatus iste a vobis missus, regredi ad de ista re dubdureiur. Firmilian. apud Cypr., ibid.
vos f'estinabat et hibernum tempus urgebat, quaidum ^
lllud quoque absurdum quod non putant quœren-
potuimus ad scripta vestra rescripsimus. Ibid. dum esse quis sit ille qui baptizaverit , eo quod qui
* Jios autem qui Romœ sunt, non ea in omnibus ob- baptizatus sit gruliam consequi potuerit, invocata Tri-
servare, quœ sunt ab origine tradita, et frustra Aposto- nitate nominum Patris,et Filii, et Spiritus Sancti. At
lorum auctoritatem prœtendere scire quis etiam inde : quis est in Ecclesia perfectus et sapiens, qui hoc aut
potest quod circa celebrandos dies Paschœ et circa defendat, aut credat ,
quod invocatio hœc nominum
multa alia divinœ rei sacramenta videat esse apud nuda ad remissionem peccutorum et baptismi
sufficiat
illos aliquus diversitates nec observari il lie omnia
, sancti ficationem ? Cum hœc tune utique proficiant,
tnqualiler quœ Jerosolymis observantur. Firmilian. quando et qui baptizat habet Spiritum Sanctum, et
apud Cyprian., Epist. 75. baptismu quoque ipsum non sit sine Spiritu Sancto,
» Ces paroles de Firmilien semblent montrer qu'il Firmilian., apud Cyprian., Epist. 75,
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 337
divines, ne suffisant point seule pour remet- hors de l'Eglise au nom de Jésus -Christ, a
tre les péchés et communiquer la sainteté aussi le pouvoir de communiquer le Saint-
dans baptême, si celui qui baptise est lui-
le Esprit; et, selon ce sentiment, toutes les au-
même dans le péché et destitué de l'Esprit très choses qui se font chez les hérétiques,
qui sanctifie. Pour rendre odieuse l'opinion seront pareillement justes et légitimes, puis-
de ses adversaires, il rapporte l'histoire d'une qu'elles se font au nom de Jésus-Christ.» Quant
prétendue prophétesse qui, quelque temps à l'argument que saint Etienne tirait de la
après la mort de l'empereur Alexandre, avait coutume, il dit a Vous autres Africains,vous
:
même un prêtre et
séduit plusieurs fidèles, et pouvez dire, contre Etienne, que vous avez
un diacre, par ses prestiges, et qui, s'étant quitté coutume, quand vous
l'erreur de la
acquis un grand nombre de sectateurs qui avez connu la vérité. Mais, pour nous, nous
lui obéissaient et la suivaient partout, celé- joignons la coutume à la vérité, et nous op-
brait souvent en leur présence les divins posons à la coutume des Romains une autre
mystères et baptisait ceux qui se présentaient coutume plus authentique que la leur, con-
à elle, se servant des paroles et des cérémo- servant depuis le commencement ce que Jé-
323. nies usitées dans l'Eglise. «Que dirons-nous, sus-Christ même et les Apôtres ont enseigné,
poursuit-il, du baptême de cette femme, par car nous ne nous souvenons point que cette
le ministère de laquelle le démon baptisait? pratique ait commencé chez nous, parce
Etienne et ceux de son parti ne l'approu- que nous n'avons jamais connu qu'une seule
veront-ils pas, vu surtout qu'il était accom- Eglise de Dieu et un seul baptême. » Firmi-
pagné de l'invocation de la Trinité et des lien répète l'objection que saint Cyprien s'é-
interrogations usitées dans l'Eglise? » Il dit tait faite dans sa lettre à Jubaïen Que de- :
encore : «Le baptême des hérétiques est ou viendront donc ceux qui, abandonnant les bé-
chamel ou spirituel s'il est charnel, il ne
: rétiques, ont été reçus dans l'Eglise sans y être
difiere en rien de celui des Juifs, qui n'est baptisés?Il répond « S'ils sont morts, nous
:
les élève et les nourrit comme les siens. 11 ne le pardon de leurs péchés. » Il ajoute « Nous :
pag. 386.
peut y avoir chez les hérétiques de rémission avons aussi jugé * que l'on ne doit point tenir
des péchés la puissance de les remettre n'a
: pour baptisés ceux qui l'ont été par des évê-
été donnée qu'aux Apôtres envoyés par Jésus- ques tombés pendant la persécution, et tous
Christ aux Eglises qu'ils ont fondées, et aux ceux qui viennent à nous de cette sorte, nous
évêques qui sont à leur place, par une ordi- les baptisons du véritable et unique baptême
nation successive. Mais les ennemis de l'u- de Sur la fin de sa lettre, il se
l'Eglise. »
nique Eglise catholique, dans laquelle nous plaint, en des termes fort durs, de la conduite
sommes, et de nous qui avons succédé aux du pape Etienne envers les évêques d'Orient
Apôtres, eux qui. usurpent le sacerdoce et et du Midi, surtout de ce qu'après avoir re-
dressent des autels profanes, que sont-ils fusé d'entrer en conférence avec les députés
325. autre chose que Goré, Dathan et Abiron? Si qu'ils avaient envoyés à Rome, il leur avait
le baptême conféré au nom de Jésus-Christ encore refusé l'hospitalité et avait défendu à
hors de l'Eglise a le pouvoir de purifier celui tous les frères de les recevoir chez eux. La
qui le reçoit, l'imposition des mains donnée conformité ^ du style de cette lettre avec ce-
1 Nos etiam illos quos ht, qui prius in Ecclesia tur, et lavacri vitalis regenerationem consequantur ; et
catholica episcopi fuerant, et postmodum sibi potes- tamen multum intei'sst intereum qui invitus et neces-
tatem clericœ ordinationis assumentes ùaptizaverant, sitate persecutionis coactus succubuit, et illum qui sa-
pro non baptizatis habendos judicavimus, et /toc apud crilega voluntate audax contra Ecclesiam rebellât,
nos observatur, ut quicumque ab illis tincti ad nos Firmilian., apud Cyprian., Epist. 75.
veniunt, tanquam alieni et nihil consécutif unico et * Tillemout, tom. IV Hist. ecelés., pag. 158.
vero Ecclesiœ catholicœ baptismo apud nos baptizen-
IL 22
338 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
luide saint Cyprioii, fait ju<^er qu'elle a ùlé prisons, pailie dans les minières. Il regarde Pag. ssr
traduite eu latin par ce Saint niênic. Saint leur ferm(!té dans la foi comme le fruit de
Augustin * témoigne (jne les donatistes lui leur zèle pour les préceptes du Seigneur,
objectaient linéiques lettres des (Jrieutaux. pour la sinq)licité et l'iimocence, pour la
Mais il y a apparence qu'il parle d'autres let- charité et l'union, pour la modestie et l'hu-
tres que de celle de Firuiilieu, qui n'est écrite milité, et de la vigilance qu'ils avaient fait
que par un seul évèque. Il semble que saint paraître dans les fonctions de leur minis-
Augustin ne l'ait pas connue, puisqu'il ne tère, en aidant ceux qui avaient besoin de
répond jamais à Firmilicn lorsqu'il avance leurs secours, en soulageant les nécessités
que sa pratique était d'un temps immémo- des pauvres, en défendant la doctrine de la
rial, ce que sa candeur ne lui eût pas permis vérité, en maintenant la vigueur de la disci-
de dissimuler ; et il ne résout nulle part le phne. Comme on
les avait outragés et mal-
cas que Firmilicn y propose relativement à traités à coups de bâton, avant de les en-
cette femme dont nous avons parlé plus haut, voyer aux mines, il leur dit * (pie ce genre de
qui baptisait dans formes ordinaires, et
les supplice n'offre rien d'inlamc pour des chré-
avec l'invocation solennelle de la Trinité. tieus qui mettent toute leur espérance dans
Lettre 60. Cependant il s'éleva contre l'Eglise une le bois de la croix. Puis, après avoir décrit
'piii-ii aux" nouvelle persécution, ce fut celle de Valérien. la manière dont on les traitait dans ces mon-
(ontessenis *
„ ,t
mil ii«i,nt Saint Cvprien, ayant coniesse une seconde tagnes, il les console en les faisant souvenir
duns les mi- * ^ ' %J
n«, en 157.
fojg jg ^^gm dc Jésus-CUrlst, fut envoyé en que Jésus-Christ est le rafraîchissement et le
exil à Curube, où il arriva vers le 14 du mois repos de ceux qui souffrent pour son nom ;
de septembre de l'année 237. Divers évêques qu'une peine courte et passagère sera chan-
qui, à sou exemple, avaient fait une confes- gée en une gloire immortelle, et que leur
sion publique de leur foi, tant à Garthage piété ne souffre aucun dommage de ce qu'ils
que dans le reste de l'Afrique, furent mis en n'ont pas la consolation de célébrer les di-
prison, puis envoyés aux mines avec plu- vins mystères, puisqu'ils offrent à Dieu un
membres de
sieurs leur clergé et un grand sacrifice également précieux et glorieux, en
nombre de laïques des deux sexes et - de lui offrant leur corps comme une victime vi-
tout âge, que la crainte des tourments n'a- vante, sainte et agréable à ses yeux. Enfin il ;:29.
vait pu séparer de leurs évêques, comme il ajoute : « Quelle joie pour vous , de n'avoir
parait par la lettre que saint Cyprien leur plus à attendre que la récompense !Tout près
Epist. 16, écrivit pourencourager au martyre. Elle
les de quitter le siècle présent, vous vous hâtez
pas- ^27.
gg|.a(ji.ggsée « à Némésien, Félix, Luce, un d'être associés aux martyrs, espérant qu'au
autre Félix, Littéc, Polien, Victor, Jader et sortir des ténèbres de ce monde, vous rece-
Dative (tous évêques, dont les noms sont vrez une clarté au-dessus de toutes vos souf-
parmi ceux du grand concile de Cartilage), frances. » Saint Cyprien leur envoya cette
aux prêtres, aux diacres et aux frères qui lettre par Hérennien, sous-diacre, et par les
sont dans les minières, martyrs de Dieu le acolytes Lucain, Maxime et Amance, à qui il
Père tout-puissant et de Jésus-Christ Notre- donna en même temps une somme d'argent
Seigneur, notre Dieu et notre protecteur ^. » pour le besoin des exilés.
Après leur avoir témoigné la joie qu'il aurait 61 . Ces saints martyrs, ayant reçu la lettre n^pon-if
.1 , 1 •
/-i
• 1 • , , des uuirtyr
de les aller voir, s'il lui était permis de sor- et les aumônes de samt Cyprien, lui en te- à snint cy
tir du lieu de son exil, il les félicite de ce moignèrent leur vive reconnaissance par trois 257,
que plusieurs d'entre eux avaient déjà con- lettres différentes, ce qui donne lieu de ju-
sommé leur martyre par une fin glorieuse, ger qu'ils travaillaient eu trois différents en-
que les autres attendaient, partie dans les droits. La première, qui est la soixaute-dix-
I Quidqutd de Cypriani venerabiîis marhjris, et de tem coronam gloria geminata provexit. In pueris quO'
quorumdam Orientalium lilieris inserendum put asti, que virtus major œiate, atinos suos confessionis laude
quod cis placuerit apud hcereticos et schismaticos da- transcenda, ut martyrii vestri bealum gregem et se-
tum improbare baptismi sacramentum , nihil impcdit xus et œtas omnis ornaret. Gyprian., Epist. 76.
causam nostram, si eam Ecclesiam relinemus, quam 3 LXXVII« dans l'édition de D. Maran. {L'éditeur.)
non deseruit Cyprianus, etium cum multi ejus collegœ * Execranda nobis ista res non est. Neque enim ad
in hanc sententiam consentire noluissent. Augustin., fustes christianum corpus expavit, cujus spes omnis in
lih. III cont7^a Crescon., cap. 1, pag. 455, tom. VII. ligna est. Cyprian., Epist. 76.
* Cujus numéro nec desunt virgines quas ad cœles-
[III* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. - SAINT CYPRIEN. 339
septième dans l'édition d'Oxford *, porte en on faisait courir
à ce sujet divers bruits peu
tête les noms de Némésien, Dativo, Félix et fondés, envoya des exprès à Rome pour
il
Victor. Elle est d'unegrande beauté et con- savoir avec certitude ce que l'on avait
or-
tient en peu de paroles un excellent ^ pané- donné touchant les chrétiens. Ils lui rap-
jf!'33o"'
Sy^^<î"6 de saint Cyprien. Il y est loué en portèrent que l'empereur Valérien ' avait
or-
particulier pour son éloquence, sa sagesse, donné, par un rescrit envoyé au sénat, que
sou humilité, sa libéralité, sa tendresse, son les évêques, les prêtres et
les diacres se-
zèle pour le martyre, sa fermeté, son cou- raient punis de mort sans délai; que les sé-
rage et la force de ses lettres capables de nateurs, les personnes de qualité et les
che-
relever des esprits abattus, guérir les bles- valiers romains seraient privés (fe
leur di-
sures, délier les chaînes, éclairer les ténè- gnité et de leurs biens que si, après
cela, ; ils
bres d'une prison, aplanir les montagnes, persistaient à être chrétiens, ils seraient con-
et de chasser l'odeur des miasmes putrides damnés à être décapités; que les dames de
qui s'exhalaient des mines où ces saints tra- condition perdraient leurs biens et
seraient
vaillaient. Ils font mention dans cette lettre,
.
envoyées en exil; que tous les affranchis im-
de Quirin, dont ils avaient aussi reçu des au- périaux qui auraient confessé ou qui confes-
mônes et qu'on croit être le même que celui seraient à l'avenir, seraient privés
de leurs
à la prière duquel saint Cyprien composa ses biens au profit du fisc, et qu'on les
Episi. 7S,
enverrait
trois livres des La seconde let-
Témoignages. enchaînés dans du domaine.
tre, qui est encore en actions de grâces, fut
les terres A
cette déclaration, Valérien joignait le
modèle
écritepar saint Luce au nom de plusieurs des lettres-patentes qu'il devait envoyer
aux
martyrs qui étaient avec lui. Il
y prie saint gouverneurs contre les chrétiens. Saint Cy-
Cyprien de faire tenir à Quirin la lettre de prien manda toutes ces choses à l'évêque
remercîment que lui ei ses frères lui adres- Successus *, le priant de les faire savoir à ses
s^^ent. Félix, Jader et Polien écrivirent la
fm.^' confrères. H lui marquait encore dans sa
troisième, avec les prêtres et tous ceux qui lettre le martyre du pape saint Sixte, « cet
travaillaient dans les mines de Signe, que évèqne excellent et si pacifique % » et d'un
si
l'on croit avoir été près de la ville de Siguite nommé Quartus, qui fut exécuté avec lui le
en Numidie.
6 août, dans le cimetière de Calliste.
sainu'y- ^^^ ^'^^ ^^^' ^^"^^ Cypricn étant sorti de 63. Quant à lui, sachant que le proconsul.
^ «-«"OLii., „
Dernière
..
C^^^^^e pour être présenté à Galère-Maxime, A+
/,,,;
qui était
-j-
TTx- - .
• ' successeur de Paterne dans la dignité de pour 1 y amener, il céda au conseil de ses
proconsul d'Afrique, eut la liberté de demeu- î!,';!f"/
'''^'^''
'^a
meilleurs amis, et se retira de son
jardin
rer dans un jardin, près de Carthage, qu'il
dans un lieu où il pût demeurer caché, Epist. 81,
en
avait vendu an commencement de sa conver- attendant que le gouverneur revînt
paçr. 333.
à Car-
sion, et que la Providence lui avait rendu.
thage. Ce fut de là qu'il écrivit sa
dernière
Pendant qu'il y était occupé à régler les af- lettre adressée aux prêtres, aux
diacres et à
faires de son Eglise et à distribuer aux pau- tout le peuple de son Eglise \ Il leur
vres ce qui lui restait, il apprit que la persé-
donne,
pist. 80,
pour raison de sa retraite, « qu'il convient à
cution augmentait de plus en plus ; et, comme
un évêque de confesser le Seigneur dans la
dire avec lui. Ce serait flétrir l'honneur d'une venues jusqu'à nous. Les deux qu'il écrivit ^
Eglise aussi illustre que la nôtre, si je rece- à son clergé et à son peuple, au sujet de Fé-
vais ma sentence ù Utique, et si je souffrais licissime et des prêtres qui le suivaient, sont
lemartyre dans une ville dont Je ne suis pas aussi perdues. Elles contenaient l'histoire et
Psf. 334. évoque. Aussi ne cessai-je point de désirer les raisons de ce qui s'était passé en Afrique
ardemment et de demander dans toutes mes touchant cette affaire; et saint Cyprien en
prières, de confesser chez vous le Seigneur, avait envoyé des copies à saint Corneille par
d'y souffrir la mort et d'en sortir pour aller les évèques Caldone et Forlunat, le priant de
à lui. Pour ce qui est de vous, mes frères, les faire lire à son peuple, afin que les fidèles
observez la discipline; et, suivant les pré- de Rome
fussent aussi bien instruits de tou-
ceptes du Seigneur et les instructions que tes choses que ceux de Carthage. Nous avons
je vous en ai si souvent données dans mes encore perdu la que saint
lettre circulaire
discours, gardez le repos et la trancpiillité. Cyprien écrivit aux évoques d'.\frique ", de
Qu'aucun de vous ne fasse du bruit à cause Nuinidie et des deux Mauritanies, pour les
de nos frères, ou ne se présente de lui-même informer de la condamnation de Novatien et
aux païens •; il suffit qu'il parle lorsqu'il pour leur faire voir que Corneille était seul
sera pris, puisqu'alors c'est le Seigneur qui légitime évêque de Rome ; celle ' qu'il écri-
parle en nous '. » vit au pape saint Corneille, et dans laquelle
il lui envoyait une liste de tous les évèques
ARTICLE IV.
catholiques de sa province, afin qu'il sût à
DE QUELQUES ÉCRITS DE SAINT CYPRIEN QUI SONT qui il devait écrire , et de qui il devait rece-
PERDUS, ET DE CEUX QU'ON LUI A FAUSSEMENT voir des lettres; une autre de
saint Cyprien
ATTRIBUÉS. au même pape
par laquelle il lui mandait
»,
§ l". — DES LETTRES DE SAINT CYPRIEN QUI ce qui .se passait en Afrique et ce que l'on y
SONT PERDUES. disait de l'élection de Fortunat ; la lettre de
de sauf";*- *• Saint Cyprien témoigne, dans une de saint Cyprien au pape saint Luce, pour lui
toù^pTr- ses lettres * au clergé de Rome, qu'il avait marquer la part qu'il prenait à sa promotion
dues.
* Quodcumque enim sub illo confessionis momento quam illic circa omnia per nos fraternitas instruatur.
confessor episcopus loquitur, aspirante Deo, ore om- Cyprian., Epist. 43 ad Cornel.
nium loquiiur. Cypriau., Epist. 81. Sed quoniam latius fusa est nostra provincia, ha-
6
* Ne quisquam vestrum atiquem tumultum de fra- bet etiam Numidiam et Mauritanias duas sibi cohœ-
tribus moveat, aut ultro se gentilibus ofjerat : appre- rentes, plaçait ut per episcopos retenta a nobis rei
,
hensus enim et traditus loqui débet, siquidem in verilate et ad comprobandam ordinationem tuam fada
nobis Dominus positus illa liora loquatur, qui nos auctoritate majore, per omnes isttc positos litterœ fiè-
confiteri magis voluit quam profiteri. Cyprianus, rent, sicuti fiunt, ut te universi collegœ nostri, et com-
Epist. 81. municationem tuam, id est, catholicœ Ecclesiœ uni-
' L'édition Baluze et Maran contient trois autres tatem jjariter et charitatem probarent, firmiter ac
lettres trouvées dans quelques anciens manuscrits. tenerent. Cyprian., Epist. iS ad Cornel.
La première, qui est du pape Corneille, est adressée ' Nec tamen de hoc tibi scripseram, quando hœc
à saint Cyprien; la seconde, au peuple de Cartilage; omnia conternnantur a nobis, et miserim tibi proxime
la troisième, au prêtre Thurasius. Généralement on nomina cpiscoporum istic constitutorum , qui integri
ne les regarde pas comme authentiques {L'éditeu7\) et sani in Ecclesia catholica fratribus prœsunt. Quod
* Et quid egerim loquuntur vobis epistolœ pro tem- utique ideo de omnium nostrorum consilio placuit
poribus emissœ, numéro tredecini, quas ad vos trans- scribere, ut erroris diluendi ac perspiciendœ veritatis
i
misi. In quibus nec clero consilium defuit nec compendium fieret : collegœ nostri qui-
et scires tu et
universœ fraternitati ad deprecandam Dei misericor- bus scribere et litteras mutuo a quibus vos accipere
diam allocutio et persuasio nostra defuit. Cyprianus, oporteret. Cyprian., Epist. 59 ad Cornel.
Epist. 20. * Quod autem de Forlunato isto pseudoepiscopo non
* Melius autem, frater, faciès, si etiam exempta lit- statim scripsi, non ea res erat quœ in notiiiam tuam
terarum quœ ad te legenda pro dilectione communi deberet per nos festinato statim quasi magna aut me-
pcr Caldonium et Fortunatum collegas nostros proxime tuenda perferri Nactus tamen occasionem fami-
miseratn, quœ de eodem Felicissimo et de presbijterio liarissimi hominis et clerici,per Felicianum acolijtum
ejusdem ad clerum istic nostrum et ad plebem scrip- quem cum Perseo collega nostro miseras, inter cœtera
seram, legi illic fratribus jubeas, quœ et ordinalio- quœ in notitiam tuam perferenda hinc fuerant, etiam de
nem et rationem rei yestœ loquantur, ut tam istic Fortunato isto tibi scripsi, Cypr., Epist. 59 ad Cornel.
[III' SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 341
età la gloire de son bannissement *; la ré- de Valérien ; car saint Cyprien étendait • ses
ponse de saint Cyprien à Faustiu, évêque de soins et sa charité au-delà même de l'Afrique
Lyon, au sujet de Marcien, évêque d'Arles,
car on ne doute point qu'il n'ait répondu à § 2. — TRAITÉS DES
SPECTACLES, DU BIEN DE LA PUDI-
CITÉ, DELA LOUANGE DU MARTYRE, DU DISCOURS
la lettre par laquelle les évèques des Gaules
CONTRE NOVATIEN, ET DE L'EXHORTATION A l\ PÉ-
le consultaient sur cette affaire; la lettre de NITENCE.
saint Cyprien * à saint Firmilien, pour lui
donner avis de tout ce qui s'était passé en 1 A la tête des ouvrages faussem ent attri-
. Traité des
Spectacles
Occident dans la contestation qui s'y était bués à saint Cyprien est celui qui a pour titre : faussement
etti'ibué à
élevée sur le baptême des hérétiques. Des Spectacles. Il est écrit en forme de lettre et saint Cy-
prien.
2. Le diacre Ponce finit le dénombrement adressé « au peuple qui demeure ferme dans
des écrits de saint Cyprien en disant ' qu'il l'Evangile. » L'auteur était évêque % et tel-
a animé par l'ardeur de ses discours un
,
, lement éloigné de son peuple, qu'il trouvait
grand nombre de confesseurs dont on avait, rarement l'occasion de l'instruire par écrit :
pour la seconde fois, marqué le front par des ce qui ne peut convenir à saint Cyprien, qui,
caractères glorieux aux yeux des anges et , quoique banni ou caché , dans le temps des
que Dieu avait conservés pour être un exem- persécutions de Dèce et de Valérien, paraît
ple vivant du martyre. Comme saint Ponce avoir toujours eu la facilité d'écrire soit à
ne compte point les lettres de saint Cyprien son clergé, soit à son peuple. On ne trouve
parmi ses ouvrages, on présume que ces ex- d'ailleurs aucun ancien qui ait cité cet écrit
pressions ne peuvent se rapporter à la lettre sous le nom de saint Cyprien; Ponce n'en
soixante -seizième adi-essée aux confesseurs parle pas, et il n'est daus aucun manuscrit
condamnés aux mines sous Valérien, où Ton des œuvres de ce Père * ; ce n'est que par
ne rencontre d'ailleurs rien qui ait quelque conjecture qu'on le lui donne dans quelques
rapport à ces circonstauces ; mais on pense imprimés. Le style même est différent de ce-
qu'elles marquent un ouvrage particulier, lui de saint C^^prien plus dur et moins cou-
,
différent de l'Exhortation au mat'tyre , dont lant : ce qui n'empêche jpas que cet écrit ne
saint Ponce * parle auparavant. Si cela est soit excellent ^, plein d'esprit et de piété. Il a
il faut dire que cet ouvrage est perdu , de été composé dans le temps du paganisme '",
même que les lettres de saint Cyprien à saint lorsque les exorcismes " des possédés étaient
Augustin ^ et à sainte Félicité, martyrs à Ca- fréquents dans l'Eglise et que les fidèles por-
poue, en Gampauie, durant la persécution taient encore l'Eucharistie *^ dans leurs mai-
nistratione confessorem pariter et sacerdofem consfi- colloqui), ita mihi nihil tantam lœtitiam hiluritatem-
tuit divina dignatio. Sed et nunc non minus tibi et que restitua, quam cum adest rursus occasio. Vobis-
comitibus tuis et universœ fraternitati gratulamur. cum me esse arbitrer, cum vobis per littei'as léguer.
Gyprian., Epist. 61 ad Lucium. Cyprian., lib. de Spect., tom. II, pag. 3.
* Accepimus per Rogatianum charissimum nostrum, 8 Addunt impressi codices passim Cypriani nomen.
diaconum a vobis missum, litteras quas ad nos fecisti, In manuscriptis nullis quos vidit comparet hœc épis-
frater dilectissime , et grattas propter hoc Domino tola. Fellus, not. in hune locum, pag. 3.
maximas agimus. Firinilian., Epist. 75 ad Cijprian. « Tillemont, tom. IV Mém. ecclés., pag. 96.
* Quis deni'jue tôt confessores, frontium notatarum '0 Non pudet fidèles homines et christiani sibi neminis
secundo inscriptione signatos, et ad exemplum marty- ouctoritafem vindicantes, superstifiones vanas genti-
rii supcrstitès réservâtes, incentive tubœ cœlestis ani- lium, cum specfaculis mixtas de Scripturis cœlestibus
maret ? Pontius, in Vita Cyprian., pag. 5. vindicare et auctoritatem idololalriœ conferre. Nam
Quis martyres tanla exhoriatione divini sermonis
* quando id quod in honore alicujus ideli o.b ethnicis
erigeret ? Pontius, in Vita Cyprian., pag. 5. ugitur, a fidelibus christianis spectacule frequentatur.
* Il en est parlé dans un très-ancien manuscrit Ibid.
cité dans l'édition d'Angleterre à la fin de l'index 11 Impudenter in Ecclesia dœmenia exorcizat, quo-
de l'Ecriture :quartam persecutionem passi
Christiani rum veluptates in spectaculis laudat: et cum semel
sunt a Decio imperatore, auctore malorum. Hac perse- illi renunfians, recisa sit res emnis in baptismate
cutione Cyprianus per epistolas hortatus est Augusti- dum post Christum ad diaboli spectaculum vadit,
num et Felicitatem ,
qui passi sunt apud civitatem Christo tanquam diabolo renuntiat. Ibid., pag. 4.
Copuensem, metropolim Campaniœ , Valeriano impe- 12 Cui ut non objiciam quod forte commisit, vidit
les mêmes que celles dont s'est servi Terlul- s'étend beaucoup sur les éloges de la virgi-
lien. Comme on objectait que l'on trouvait nité et ne craint point de dire qu'elle rend
dans l'Ecriture les mêmes choses que l'on l'homme, en quelque sorte, supérieur aux
représente daus les spectacles; qu'Elie y est anges '. Mais il reconnaît que l'on ne peut
appelé char d'Israël et son couductciur;
'
le parvenir à cet état, ni embrasser la conti-
qu'on y voit* David dauser devant l'arche; nence sans le secours de la grâce '°. C'est ce
qu'il y est fait mention ' de divers instru- qu'ily a de plus renuuquable dans ce traité,
ments de musique; que saint Paul *, pour qui ne se trouve pas **, non plus que le pré-
engager les chrétiens à travailler sans relâ- cédent, dans les recueils manuscrits des œu-
che à leur salut, leur propose l'exemple dos vres de saint Cyprien**.
athlètes et de ceux qui couraient dans la car- Quant au traité qui a pour titre De la
.'J. : Traité <ie
rière pour remporter le prix, l'anonyme ré- Louange du martyre tout le monde convient
, a"i nmr°ty?e
pond que l'on n'en peut rien conclure en au purd hui qu il na pomt samt Cyprien '^ ainibuéi
endroits il s'agit du culte de Dieu, au lieu trop embarrassé, surtout dans les premières
que dans les spectacles tout se fait en l'hon- périodes, qui sont presque iniul(;lligibles. Le
neur des idoles. II finit sa lettre, non à la reste du pas néanmoins à mépri-
traité n'est
manière ordinaire, mais par la glorification ^ ser; et, bien que l'auteur y fasse paraître
du Père et de Jésus-Christ Notre-Seigneur ^. beaucoup d'art, nous ne croyons pas que ce
Trait* du 2. Le traité De la Discipline et du Bien de soit une raison de rejeter cette pièce comme
"
piuiiefté la pudicité est aussi écrit en forme de lettre, une simple déclamation '* faite par quelqu'un
aurTimé'i mais d'un style moins beau et moins élégant pour s'exercer. Elle est adressée à Moïse ^'^, à
"*'
pr'iôu. que celui Des Spectacles, et entièrement dif- Maxime et aux autres confesseurs de Rome,
férent de la manière d'écrire de saint Cy- martyrisés eu 251 L'auteur les prie *^, à la
.
prien. L'auteur, qui était évoque ' , le com- finde sou discours, de se souvenir de lui,
posa pour l'instruction de sou Eglise de la- , lorsque Dieu aura commencé d'honorer en
quelle il était absent à cause de la persécu- eux le martyre. Ce qui marque qu'il écrivait
tion *, ne croyant pas qu'il lui fût permis, avant que ces saints eussent été couronnés,
même alors, d'interrompre les discours de et apparemment vers la fin de l'an 250, lors-
poiuisset
;
qui festinans ad spedaculum dimissus, et " Certe ex utero sanctitatem custodiisse et infantem
adhuc gerens secum, ut assolet, eucharistiam, inter se usque insenectutem in sua œtate tota tenuisse, ad-
corpora ohscœna vieretricum tulit; plus damnationis mirandœ utique potentiœ est: nisi quod blandas cor-
meritus de spectaculi voluptate. Ibid. poris leges non nosse magis felicitatis est, notas jam
' IV Reg. n, 12. —
2 II Reg. vi, U. — 3 Psalm. vicisse, virtutis est; [sic tamen ut et virtus ista de
cxLvni. — "^
I Cor. ix, 25. dono Dei veniaf, licet se in membris hominibus osten-
5 ijui solus est et ante omnia et super omnia, imo dat. Ibid.
ex quo omnia Pater Domini nostri Jesu Christi cui 11 In nullo manuscripto epistolam hanc videre conti-
laus et honor in sœcula. Pag. 5. git. Oxon., not. in hanc epist.
6 Voyez Lumper, qui range ce traité parmi les ou- 12Confer. Lumper, qui ne se prononce pas, mais
vrages douteux de saint Cyprien. D. Maran l'a ad- qui montre que la diiïérence de style ne saurait em-
mis comme authentique. Confer. Pairolog. Migne, pêcher d'attribuer ce traité à saint Cyprien. D. Ma-
tom. 111, col. 803 et seqq. [L'éditeur.) ran l'a mis parmi les vrais ouvrages de ce Père.
' A liguas officiorum meorum partes non œstimo 13 Lumper incline fortement à le donner h saint
prœteriisse, dum sempcr cnitor vel maxime quotidia- Cyprien il n'ose pourtant se prononcer; il est cer-
;
nis Evangeliorum tractatibus, aliquando vobis fidei tain que beaucoup de raisons portent à maintenir
et scientiœ per Dominum incrementa prœstare. Quid ce jugement. Conf. Migue, Putrol., tom. 111, col. 80;
enim aliud in Eccîesia Domini utilius geri, quid ac- et seqq., et Mœlber, art. saint Cyprien. [L'éditeur.)
commodatius ofjicio episcopi potest inveniri, quam ut 1* Exercendi styli gratia hœc videntur scripta, cum
doctrina divinorum per ipsum insinuata collataque plenos theatri cutieos et popv.li strepitum sibi reprœ-
verborum, possint credentes ad repromissum regnum sentat orator. Oxon., not. in hune locum.
pervenire cœlorum ? Apud Cyprianum tom. II, , 15 L'éditeur remarque que les noms de ces mar-
que la peste, commencée dès cette année, Christ; 2" en leur faisant voir, par l'autorité
faisait *
déjà de grands ravages. La pein- de l'Ecriture, que Dieu est infiniment misé-
ture - que souf-
qu'il fait des divers supplices ricordieux, et qu'il est toujours prêt à accor-
frent les damnés, est remarquable. Il croit der le pardon aux pécheurs vraiment péni-
que le feu qui les tourmente est réel, mais tents. Il cite l'Apocalypse *° sous le nom de
qu'il y en a certains qui sont encore chargés saint Jean; mais il ne dit point qu'elle soit
de chaînes et punis en d'autres manières. de saint Jean l'Evangéliste.
Les docteurs de Louvain ont cru que saint ouvrage, qui a été découvert et pu-
[3. Cet .
Exhorta-
Augustin avait cité ce traité dans ses livres bue pour la première fois a Bologne, en nitence.
contre Gaudence ' ; mais oe qu'il ci!te sous le 1751, présente la même disposition que celui
nom de saint Cyprien se trouve encore plus qui a pour titre : Livres des Témoignages.
ejipressément * dans l'écrit « Donat que dans L'éditeur lui - même
Chrysostome Trom-,
'amt"'cy- ^^ ^^ ^^'^^^ ^^^ Tâng dcs ouvragcs douteux que citations de l'Ecriture sainte ne s'accordent
^"'"- pas avec celles que donne saint Cyprien, et
parce que le style en parait plus fort ^, moins
diffus et moins facile que celui de ce Père. d'ailleurs, sauf le titre du manuscrit, ce livre
Du reste, les plus habiles jugent * que cet n'a aucun témoignage des anciens en sa fa-
écrit est également plein de doctrine et d'é- veur. Quoi qu'il en soit, l'auteur allègue beau-
légance. Quel qu'en soit l'auteur, il écrivait coup l'Ecclésiastique et montre ainsi combien,
après la persécution de Dèce ', dans le temps dans les premiers siècles, on estimait ce livre,
où Novatien* vivait encore, et lorsque le que les protestants estiment si peu *'.]
schisme de Félicissime était près de s'étein-
dre, vers l'an 255. Il combat ^ la dureté de § 3. —
DU TRAITÉ, QUE L'oN NE DOIT POINT REBAPTI-
SER CEUX QUI ONT UNE FOIS £TÉ BAPTISÉS AU NOM
Novatien et de ses adhérents, 1° en leur re- DE JÉSUS-CHRIST.
présentant qu'ils ne pouvaient, sans injusti-
ce, refuser d'admettre à la pénitence la plu- 1. Le seul titre de ce traité forme une ce Traité
part des tombés qui le demandaient, puisque preuve suffisante qu'il n'est point de saint dè^saimcy-
'"'"'°"
beaucoup de ceux qui étaient tombés dans Cyprien. Aussi ne lui est -il attribué par per-
la persécution de Dèce étaient demeurés in- sonne, et on est même d'accord que c'est di-
vincibles sous Gallus et n'avaient pas craint rectement contre lui qu'il a été composé **, et
de donner leur sang et leur vie paur Jésus- que c'était à saint Cyprien que l'auteur en
4 Tibi jam et mundus ipse succumbit et terra cedit, et excruciet turba multorum. Apud Cypr., tom. II,
nos cogère etiam lues cœpit. Apud Cyprian.^ pag. 15. qui prima acie, id est, Deciana persecuiione vulnerati
2 Sœviens locus oui gehenna nouien est, magno fuerunt, hos postea, id est secundo prcelio iter per-
plangentium murmure et geniitu et eructantibus flam- sévérasse, ut contemnentes edicta sœcularium princi-
mis perhorrendam spissce caliginis nodem, sœva sem- pum Gain nempe et Volusiani ) hoc invictum habe-
(
per incendia camini fumantis expirât: globus ignium rent; quod et non metuerunt exemplo boni pastoris
arctatus obstruitur, et in varias pœnœ exitus relaxa- ammam suam tradere et sanguinem fundere. Apud
tur, tune sœviendi plurima gênera, tum in se, ipse Cypr., pag. 17, tom. II.
convoluit quidquid ardo7-is emissi edax flamma cru- 8 In qua doma si persévérasses, Novatiane, vas for-
tolerabilis curvat, altos per abruptum clivosi iramitis 10 In eadem Apocahjpsi hoc quoque Joannes dicit
collem vis sœva prœcipitat et catenarum stridentium sibi revelaturn. Ibid., pag. 19.
nexum grave pondus inclinât. Sunt et quos agens 11 Confer Mœlher et Lumper, ubi supra. ( L'édi-
sirictim rota et indefessa vertigo, et quos tenaci infer teur.)
se densitate canstrictos adhœrens corpari corpus in- 12 Galland, Biblioth. vet. Patr., tom. III, pense
cludat ; ut et absumat incendium, et gravet ferrum, comme D. Geillier et comme Tillemont. {L'éditeur.)
34t HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
voulait, lorsqu'il dit, en parlant de la dispute dans l'eau longtemps avant de recevoir le
qui s't'luit élt!V('e d(!puis i)eu, parmi les ca- Saint-Esprit. » L'auteur se sert de ces exem-
tiioliques, touchant le baptême des héréti- j)les pour montrer (pic, quoique ces deux
généreux par quelcjucs esprits légers ([ui, rement pour donner le Saint-Esprit. « Car, Pag. a.
n'ayant point d'autres excuses de leurs cri- dit cet anonyme, on ne peut douter qu'il n'ar-
mes que le nombre des coupables, pid)lient rive fort souvent, encore aujourd'hui, que
partout <|u'il a corrigé les erreurs de toutes plusieurs meurent après le baptême, sans
les Eglises. Car, ajoute -t- il, c'a toujours été avoir reçu l'imposition des mains de l'évè-
la conduite de tous les hérétiques d'inventer que, et ne laissent pas d'être tenus pour fi-
le plus de médisances qu'ils peuvent contre dèles parfaits. Autrement le salut des évêques
l'EgUse, et de faire vanité d'avoir trouvé en serait impossible, s'ils étaient obhgés de sub-
ellequelques taches, quelque légères qu'elles venir en personne à tous ceux qui sont sous
soient, pour lui en faire des reproches. » leur charge et qui peuvent tomber malades
Voilà* comment on traitait celui en qui saint en divers lieux, vu que les moindres clercs
Augustin a admiré surtout une humilité pro- ne peuvent leur donner ce secours. » De là
fonde, un amour ardent pour l'honneur et la il conclut que quand le baptême au nom de
,
tout ce qui est douteux, s'il est jugé contraire sa créance et change de vie en renonçant
à l'ancienne pratique de tous nos saints pré- au péché , s'il vient à l'évèque et à l'Eglise
21. décesseurs. » Entrant ensuite dans l'examen et reçoit l'imposition des mains il recevra le ,
de la question, il distingue deux baptêmes, Saint-Esprit, sans perdre le fruit de cette in-
« le baptême d'eau et le baptême du Saint- vocation précédente du de Jésus-Christ,nom
Esprit, suivant ces paroles de saint Jean-Bap- célébrée légitimement par le sacrement, qui
tiste Celui gui vient après mot vous bap-
'^
: toutefois ne lui suffirait point seule pour le
tiseradans le Saint-Esprit et dans le feu. Et salut et qui commence à avoir la force et la
Jésus-Christ lui-même dit: Jean a baptisé vertu qu'elle n'avait pas lorsqu'on était en-
cans Veau; mais , dans peu de jours, vous se- gagé dans l'erreur; ce qui manquait alors est
rez baptisés dans le Saint-Esprit. Le cente- suppléé par l'imposition des mains. » Il fait 23.
nier Corneille reçut le baptême du Saint-Es- voir ensuite, par l'exemple des Apôtres qui,
prit avant d'avoir reçu le baptême d'eau ®. après avoir abandonné Jésus - Christ et renié
Au contraire, les Apôtres furent baptisés leur foi, ne laissèrent pas de baptiser, que
« Apud Cyprian., tom.II, pag. 20. tione tradatur: aut si a minore clero per necessitalem
Tillemont, tom. IV Hisf. ecclés., pag. 152.
» traditum fuerit, evenlum expectemus, ut aut supplea-
' Cela paraît eu ce qu'il se dit le ministre ordi- tur a nobis, aut a Domino supplendum reservetur.
naire du baptême, qui, en ce temps-là, u'était autre Apud Cyprian., pag. 24, tom. II.
que l'évoque Et ideo cum salus nostra in baptismale
: * Nonnidla super hac nova quœstione scripta et res-
S])iritus, quod plcrumque cum baptismale aquœ con- cripla esse jaclabaniur, quihus utraque pars ad des-
junctus , iit constituta , siquidem per nos baptisma truenda aliéna summo studio nitebatur. Ibid., pag, 20.
tradetur, intègre et solemniler et per omnia quœ s Matth. m, il, et Joan. i, 27.
scriptu sunt assiynetur, atque sine ulla rei separa- « Act. I, 5,
[m® SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT GYPRIEN. 345
le baptême reçu des mains d'un ministre de Toutefois , s'ils ont quelque relâche , on leur
très -mauvaise vie ou même errant dans sa donne le baptême d'eau de même le bap- :
croyance ou ignorant, est bon et entier^ tant tême d'eau suffit aux fidèles, et il n'est pas
est grande la vertu propre aux opérations nécessaire qu'ils soient baptisés dans leur
Pag. 24. divines. Il ajoute : « Puisque notre salut dé- sang. Ce sont les deux fleuves qui prennent
pend du baptême de l'Esprit, qui le plus sou- leur source dans le baptême de Jésus-Chi-ist;
tême en cas de nécessité , attendons l'événe- moignage : l'esprit, l'eau et le sang, et ces
ment pour suppléer nous-mêmes à ce qui peut trois sont une même chose *. » Voilà, en subs-
manquer, ou réserver au Seigneur de le sup- tance, ce que contient le traité anonyme De
pléer. S'il a été donné par des étrangers, ap- du baptême, qui parait fait ex-
la Réitération
portons-y le remède dont la chose est ca- près pour défendre le sentiment du pape
pable. Le Saint-Esprit de
'
n'est point hors saint Etienne touchant la validité du bap-
l'Eglise, la foi même ne peut être saine, non- tême donné par les hérétiques. On peut en-
seulement chez les hérétiques, mais encore core y remarquer que l'auteur * croyait le
chez les schismatiques. Quand donc ^ ils font martyre inutile aux hérétiques, ou à ceux
pénitence et se corrigent, ils n'ont besoin qui répandaient leur sang pour 'le nom de
d'autre secours que du baptême spirituel et Jésus-Christ sans la charité, c'est-à-dire hors
de l'imposition des mains de l'évêquC;, de de l'Eglise; que le martyre souffert dans l'E-
peur que nous ne semblions mépriser l'in- glise ® obtient le mérite d'une foi et d'une
vocation du nom de Jésus ^ qui ne peut être charité parfaite ;
que le livre intitulé La Pré-
:
effacé, puisque l'Apôtre dit qu'il n'y a qu'un dication ' de saint Pierre, avait été composé
25. baptême. » Ensuite il explique le baptême de par les disciples de Simon le Magicien; que
sang marqué par Jésus-Christ, lorsqu'il dit^: ces héréfiques, à l'imitation de leur chef,
26. Je dois être baptisé d'un autre baptême. « Ce pour persuader aux simples qu'il n'y avait
n'est pas qu'il y ait deux baptêmes ; mais le qu'eux qui donnassent le baptême entier,
baptême d'eau et le baptême de sang con- faisaient paraître ® du feu sur l'eau aussitôt
courent ensemble pour nous communiquer que celui qu'on voulait baptiser y était des-
le salut. Or, il fallait que ces deux espèces cendu, et soutenaient que le baptême de Jé-
de baptêmes fussent premièrement sanctifiées sus-Christ devait être accompagné de feu
par Notre-Seigneur, afin que l'une ou l'autre, matériel. On voit aussi qu'il se faisait » en-
ou toutes les deux ensemble, nous pussent core beaucoup de miracles au temps où cet
être utiles, et que l'une nous pût suffire sans anonyme écrivait, et que les infidèles mêmes
l'autre, comme le baptême de sang suffit en faisaient quelquefois. On remarque dans
aux catéchumènes qui souffi'ent le martyre. cet écrit quelques expressions peu exactes :.
tum, quem confiteri oportet, confiteatur. Quia Dnmi- sanguine suo jjroprio habere baptizari. Ita ut et solo
nus pari vice confitendo et ipse confessorem suum hoc baptismale baptizati, fidem integram et dilectio-
apud Patrem , honore eum martyrii ut , pollicitus est, nem sinceram lavacri possint adipisci, et utroque modo
exornet. Quod utique non débet latins accipi, quasi baptizari. Ibid., pag. 26.
possit usquequaque porrigi ;
quia potest Christi nomen 7 Ibid., pag. 27. — s Ibid., p. 27. — » Ibid., p. 25.
346 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
par exoinplo, que le Saint-Esprit n'était pas ' quel temps il vivait. Il cite un passage du
encore avant la mort de Jésns-Chiisl; qu'il livre De la Doctrine des Apôtres ,
que l'on ne
est descendn - du ciel par la volont('î de Dieu trouve nulle part [Ce livre a été retrouvé
®.
et non par la sienne '; que le baptême du de nos jours et publié d'après un manuscrit
Saint-Esprit est plus grand * que celui de syriaque, mais sans traduction; Berlin, i vol.
l'eau, et <pielques autres siMiiblables, mais ou in-8".]
qu'il laul excuser sur la diUiculté (pic l'au- 2. Le traité Des Montagnes de Sinai et de TraitA dus
Mohtiigiic<
teur parait avoir eue de s'exprimer avec Sion, contre les Juifs, est encore plus éloigné (leSiiiui et
de Sion
netteté, ou même qui, examinées avec soin, du génie de saint Cyprien que le précédent. faust'ctiient
iilli'ibu6 k
n'ont pas besoin de justiGcation. [Telle est Ce n'est qu'une explication allégorique des saint Cy-
prien.
celle-ci : « Le Saint-Esprit n'était point avant noms de oos deux montagnes, de celui d'A-
la mort de Jésus -Christ; » car, dans cet en- dam, d'Abel et de quelques autres patriar-
droit, l'auteur rend mot pour mot le verset ches, à la manière des cabalistes et des rab-
39 du chapitre vu de saint Jean où le grec , ])ins. L'auteur y dit que Jésus -Christ fut
point encore donné , comme on a lu depuis près de même style. Elles sont languissantes prien.
dés. On voit % par le commencement de ce tre, Sodome, et un troisième qui est adressé à
traité,que l'auteur était évoque ou même Sénator. Il n'y a pas plus de raison pour les
pape car il parait s'attribuer la primauté
, attribuer à saint Cyprien; et, quel qu'en soit
dans toute l'Eglise ; mais on ne sait point eu l'auteur, il n'était qu'un poète très-médiocre.
1 Ibid., pag. 21. sif.... et quoniam nobis divina et palerna pietas Apo-
' Ibid., pag. 22. stolaius ducatum contulit, et vicariam Domini scdem
D. CcillifT paraît avoir tort de blâmer ces mots
3 : cœlesti difjnatione ornavit , et originem uulhentiri
« le Saint-Esprit est descendu du ciel parla
Que apostolatus, super qucm Christus fundavit Ecc/esiam
volonté de Dieu (le Père), et non par la sienne. » in superiore nostro portamus, accepta simul potestaie
On trouve des expressions semblables dans l'Evan- solvcndi ac ligandi, et curnlione peccata dimitlendi :
gile de saint Jean. Notre-Seigueur y dit qu'il est salalari doclrinn admonemur, ne cum delinquentibus
descendu du ciel non pour faire sa volonté {divine, assidue ignoscimus, ipsi cum eis pariter torqueamur.
ainsi que l'expliquent plusieurs interprètes ), mais Apud Gypriau., tom. II, pag. 28.
celle de son Père; et, parlant du Saint-Esiirit, xvi, 13, ^ Le voici : Si quis fratev delinquet in Ecclesia, et
il dit Non a semetipso loquetur. [L'éditeur.)
: non paret Icgi, hic uec colligatur, doncc pomdentiam
* Ibid., pag. 26. agat, et non recipiatur, ne inquinetur et impediatur
* Magna nobis ab universa fralemiiate cura succes- oratio vestra. Apud Gypriau., toin. II.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 347
On croit que le poème qui a pour matière la l'écrit contre les Juifs qui ont persécuté Jésus-
croix de Je sus -Christ, est de saint Victoriu Christ, dont le style est entièrement éloigné
de Pettau. de celui de saint Cyprien ; la Révélation du
[ Le poème adressé à Félix, sur la Résur- chef de saint Jean - Baptiste , narration fabu-
rection des morts, n'est pasnon plus de saint leuse faite depuis le temps de saint Athanase,
Cyprien, quoique l'auteur de cet écrit pa- de l'empereur Théodose et du roi Pépin, dont
raisse ancien. Le style et les expressions ne elle fait mention; le traité Du Double Martyre,
peuvent convenir à saint Cyprien. On trouve où il est parlé de Dioclétien, des Turcs et des
dans ce poème le péché originel, la nécessité moines ; celui Des Douze Abus du siècle, où
du baptême, le mystère de la Trinité, la ré- l'Ecriture est citée suivant la version de saint
surrection des morts. Dom Martène a, le pre- Jérôme ; un autre qui a pour titre Le Festin, :
mier, publié cet écrit dans sa Collection des et qu'on dit, avec raison ', être plus digne
anciens Ecrivains. M. Migne l'a reproduit, d'un turc ou d'un bouffon qui voulait se
tome IV de la Patrologie.] railler de toute l'Ecriture, que d'un martyr.
Le Traité 6. Les raisons que nous avons données Quant au livre De la Pénitence ou De la Con-
de la Singu-
larité (U>s
clercs n'est
pour montrer que le livre De la Singularité fession de saint Cyprien, trouvé dans quelques
pas de saint
Cyprieu.
des clercs ne peut être d'Origène, prouvent manuscrits d'Angleterre on ne doute point
,
encore qu'il n'est point de saint Cyprien ; en qu'il n'ait été écrit longtemps après le mar-
de cet ouvrage est dur, mal poli
effet, le style tyre de saint Cyprien, et on croit qu'il re-
et mêlé d'un grand nombre de termes bar- garde saint Cyprien d'Antioche, qui avait été
bares et presque inintelligibles. Quelques- magicien et qui, s'étant converti, souffrit le
uns veulent qu'il ait été écrit au siècle du martyre sous Dioclétien. C'est aussi de ce
Vénérable Bède, ou vers l'an 1000, lorsque même Cyprien qu'il est parlé dans Adon,
la question du célibat des clercs fut agitée quoique cet auteur, dans la narration fabu-
en Occident mais cette conjecture n'est pas
: leuse qu'il en a faite, y ait mêlé quelques cir-
appuyée. Le dessein de l'auteur, qui parait constances relatives à saiut Cyprien, évêque
avoir été constitué en dignité *, et qui était de Carthage. Les Secrets et les Prières de saint
apparemment évêque, de montrer com-
est Cyprien sont des écrits pleins de superstitions
bien il est dangereux aux clercs de demeurer magiques, et c'est avec raison qu'on les a
avec des femmes. Son ouvrage est solide et supprimés dans l'édition d'Oxford, comme
très-utile. Il y soutient que les prêtres doi- indignes de voir le jour.
vent vivre dans le célibat. 8. On voit par saint Jérôme, que * beau-
,
Traité
lie la Trini-
Exposi- 7. Tout le monde convient que V Exposi- coup de personnes attribuaient à saint Cy- té et Cycle
tion du pascal
Pynibole, et tion du Symbole des Apôtres n'est pas de saint prien un livre De la Trinité, et que les macé- faussement
autres écrits attribués à
t'ausspmeiit
attribués à
Cyprien, mais de Rufin, prêtre d'Aquilée. On doniens le débitaient sous son nom à Cons- saint Cy-
prien.
saiut Cy-
demeure aussi d'accord que c'est sans raison tantinople. En effet, il y a dans ce traité
priea.
qu'on lui a attribué le traité intitulé De l'In- : quelques endroits qui favorisent leur erreur.
crédulité des Juifs; ce traité n'est que la pré- Mais le style fait assez voir, ajoute saint Jé-
face de la traduction du Dialogue de Jason rôme, que cet écrit est de Novatien, dont il
et de Papisque, faite par un nommé Celse et porte même le nom dans plusieurs exem-
adressée à un saint évêque nommé Vigile * ; plaires. Paul, diacre, parle d'une Chronique ^,
1 Sed quia nunc de fœminarum commoratione vul- qui l'ont annoncé, les motifs qui ont porté l'auteur
garités inter vos quidam ad ignominiam devoluti à écrire. Eu finissant, il conjure Vigile de prier pour
sunt , etiam de hac re specialiter vobis Domini cor- lui quand il sera dans le ciel. {L'éditeur.)
reptione scribere compulsus sum : qui miserum me 3 Tillemont, tom. IV llist. eccle's., pag. 196.
pro vestra negligentia cum severitate corripiens, man- * Novafianus scripsit..-. de Trinitate grande volu-
dare prœcepit, ne clerici cum famiius commorentur. men quasi epitomen operis Terlulliani faciens quod
, ,
Et licet hcBC admonitio sola litlerarum mearum auc- plerique nescientes Cypriani existimant. Hieronym.,
toritate sv.fficeret, tamen ne me somniatorem irrideat in Catalogo, cap. 70. Transit Rufinus ad inciytum
quisquam, sicut Joseph fratres irriserunt Scriptura- , martgrem Cyprianum et dicit Tertulliani librum oui
,
rum addimus firmitatem, Apud Cyprianum, tom. II, tifulus est de Trinitate, sub nomine efus Constantino-
pag. 140. poli a Macedoniœ partis hœreticis lectitari. In quo
2 On trouve cette préface dans la Patrologie lutine crimiîie mentitur duo : nam nec Tertulliani liber est,
de M. Migne, tom. VI. L'autour y montre que Jé- nec Cypriani dicitur, sed Novatiani cujus et inscribitur
sus-Christ est le Sauveur sans lequel on ne peut titulo, et aucioris eloquium styli proprietas devions-
obtenir la réconciliation.
Il y rappelle les différentes trat. Hieronym., lib. II Apologiœ in Rufinum.
circonstances de la vie du Seigneur, les prophéties " Chronicam quoque valde utilem composuit. Pau-
,
prien n'avait pas encore embrassé la religion est l'ouvrage du Saint-Esprit : c'est pourquoi
chrétienne, ou du moins n'était pas encore il l'ap[)clle divine ^ et la regarde comme un
assez habile dans la connaissance des divines arsenal divin ^ qui nous fournit des armes
Ecritures et des rites de l'Eglise pour entre- contre tous nos ennemis et contre tous les
prendre de régler la fête de Pâques. D'ail- dangers '; comme une voix puissante qui
leurs, nous ne voyons point que le diacre arme notre foi ® et fortifie les serviteurs de
Ponce, ni saint Jérôme, ni aucun des anciens Dieu ; comme un trésor inépuisable ® où la
lui attribuent un Cycle pascal, ouvrage assez sagesse divine se découvre en cent façons, et
remarquable dans les premiers siècles de l'E- comme fondemenl '° de la discipline de
le
glise. Enfin, le style de celui-ci est obscur l'Eglise. Il met au nombre des livres sacrés
et embarrassé *, et n'a rien de la beauté et ceux de Tobie ", des Machabécs **, de l'Ecclé-
de l'élégance que l'on remarque dans tout ce siastique '^, de la Sagesse '*, et il attribue ces
qui est sorti de la plume de saint Cyprien. deux derniers à Salomon. Quelquefois il cite
On lui fait encore hoimeur d'avoir ajouté aux la prophétie de Baruch '* sous le nom de Jé-
notes dont les Romains se servaient pour rémie, et licite les histoires des trois jeunes"
lus diaconus in passione Cyprian., tom. Oper. Cypr., reatur, ut non evangelicis exhortationibus et prœcepiis
ex editione Pamelii, ac momtis cœlestibus ad omnia inveniatur armatus.
1 On en jugera par le préambule de ce Ctjcle pas- Cypr., Epist. G68, pag. 257.
cal : Multo quidem non modico tempore anxii fui- * Nonne fidem noslram semper arnia7is et Dei ser-
mus et œstuantes, non in sœcularibus, sed in sanctis et ves cœlesti voce corroborons dicit Scriptura divina ?
divinis Scripturis quœrentes invenire, quisnam sit pri- Cypr., de Lapsis, pag. 89.
mus dies novi mensis , in quo niense pi'œceptum est 9 Sed quoniam sermo divinus humanam naturam
Judœis in jEgypto XIV luna immolare Pascha. Ad- supergreditur, nec potest totum et perfeclum anima
nuit itaque sanctissimus qui id vidit, et invenimus. concipere : idcirco et tantus est numerus prophetarum,
Apud Cypriannm, tom. 11, pag. 209. Le reste de ut multiplex divina sapientia per multos distribuatur.
l'ouvrage est de même style. Cyprian., Epist. 75, pag. 320.
* Monendus porro lector superesse qaemdam li-
est •" Discam quid secundum Scripturarum magisterium
« Obtemperandum fuit desiderio tuo tam necessario, homiuibus tormenta passi sunt. Sap. m, 4. Cyprian.,
ut quantum sufficit mediocritas nostra auxilio divinae lib. 111 Testimon., pag. 50.
inspirationis instructa , quasi arma ac munimenta Item apud Jeremium : Hic Deus noster, et non
15
quœdam pugnaturis fratribus de prœccptis dominicis deputabitur alius absque illo. Barucb, cap. m, 36.
promeremus. Cyprianum ad Fortunatum, de Laude Cyprian., lib. Il Testim., pag. 26.
martyr., pag. 117. " Imiiemur très pueros, Ananiam, Azariam et Mi-
''
Neque aliquis ex vobis,frutres, futurœ persecutio- saelem, qui nec œtate territi, nec captivitate fracti
nis metu aut Aniichristi imminentis adventu sic ter- Judœa devicta et Hierosolymis capiis, in ipso régna
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 349
niel ' dans la fosse aux lions^ et de Susanne ', il au vingt-deuxième chapitre « Ado-
lisait :
sans témoigner le moindre doute sur leur rez le Seigneur Jésus ; » au lieu que nous
authenticité. Il dit que les quatre Evangiles * lisons a Adorez Dieu. » Saint Cyprien suit
:
sont comme les quatre fleuves qui arrosent ordinairement la version des Septante, et cite
l'Eglise figurée par le paradis terrestre, que les livres de l'Ecriture d'une manière diffé-
les paroles qu'ils contiennent sont comme au- rente des Pères latins, ainsi que nous l'avons
tant 5 de feux allumés pour embraser notre remarqué ailleurs.
foi, et que celui qui retranche quelque chose 2. Il établit comme une maxime constante
des vérités qui y sont enseignées, est un vo- que la vérité vient à être douteuse en
si •'
leur ^ et un adultère. La manière dont il quelque point, nous devons remonter à l'E-
parle des épitres ' de saint Pierre, fait voir vangile et à la tradition des Apôtres, et régler
qu'il les croyait toutes deux de cet apôtre. notre croyance, soit sur ce qu'ils nous ont
Il lisait ® dans
première de saint Jean ces
la laissé par écrit dans leurs épitres, soit sur ce
paroles que nous y lisons encore, mais qui qu'ils nous ont communiqué par une tradi-
ne se trouvent point dans plusieurs anciens tion orale et non écrite. C'est sur l'autorité
exemplaires, par la faute des copistes « Il y : de cette dernière espèce de tradition qu'il
en a trois qui rendent témoignage dans le soutient la validité du baptême des enfants,
ciel le Père, le Verbe et le Saint-Esprit, et
: l'usage des interrogations qu'on faisait aux
ces trois sont une même chose ». » Et dans catéchumènes avant le baptême, celui sur des
suo regem fidei virtute vicerunt, qui adorave statuam Gyprian., lib. II adv. Judœos cap. 27, pag. 33. Ste- ,
quani Nubuchodonosor rex fecerat jussi, et minis reyis phanus infamans Petrum et Paulum beatos apostolos ,
et flamrnis fortiores extiterunt. Gyprian., Epist. 58, quasi hoc ipsi tradiderint, qui in epistolis suis hœre-
pag. 257. ticos execrati sunt et ut eos evitemus monuerunt.
^ Sic et Danielcum compelleretur adorare idolum II Petr. III, 17. Epist. 75, pag. 321.
Bel, quem tune populus et rex colebat, in asserendum * Et iterum de Pâtre et Filio et Spiritu Sancio
Dei sui honorem, pleiia fidei liùeriate prorupuit di- scriptum est : Et hi très unum
Joan. v, 7. Gj'- sunt. I
cens : Nihil colo ego, nisi Domiuum Deum meum. prian., de Unit. Eccles., pag. 79, Epist. 73, pag. 310.
Daniel, xiv, 4. Gyprian., ibid. Facundus lisait le passage de saint Jean dans les
* Danicli in lacu ad leonum prœdam jussu régis exemplaires de saint Gyprien Quod Joannis apostoli :
incluso, prandium
divinitus apparatur. Gypr., lib. de testimonium beatus Cyprianus, Carthaginensis antistes
Opère et eleemosynis, pag. 140. et martyr, in epistola sive libro quem de Trinitate
' iVe œtas vos eorum, nec auctoritas fallat, qui ad scripsit de Pâtre et Filio et Spiritu Sancto, dictum
duorum presbyterorum veterem neqidtiam responden- inte/ligit; ait enim : Dicit Dominus, ego et Pater
tes, sicut illi Susannam pudicam corrumpere, et vio- uuum sumus, et iterum de Paire et Filio et Spiritu
lare conati sunt sic et là adulterinis doctriiiis Ec-
: Sancto scriptum est Et hi très uuum sunt. Facun-
:
clesiœ pudicitiam corrumpere, et veritatem evangeli- dus, lib. I pro Defensione trium capitulorum, pag. 16
cam violare conantur. Gyprian., Epist. 43, pag. 228. edit. auni 1629.
* Nonrti.si ununi Christum et unam ejus Ecclesiam 3 Aquas namque populos significare in Apocalypsi
facta , et corrumpit atque adultérât prœcepta divina. hœreticis necesse est inventât ur
;
quos dum contra Ec-
Epist. 63, pag. 278. clesiam vindicai, sacramentum dioinœ traditionis im-
'
Item m epistola Pétri apostoli : Gliristus semel pugnat. Gypr., Epist. 73, pag. 318.
pro peccatis nostris mortuus est, etc. I Petr. ui, 18;
3r;o HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
p-xorcismos qui pr«''ct>(lai(.'iit ce sacrement, et 3. Saint Cyprien prouve
« la vérité de la re- Pnr la
les n'iioiiceiiienls »ju(î l'on y faisait au démon ligion par accomidissement des proi)hcties
1 itiici.m
' Eos aufem qui Romœ sunt non ea in omnibus ob- illum crediderant hominem tantum de humilitate Gar-
servare quœ sunt ab origine tradita, et frustra Apos- magum de licentia potes-
nis et corporis, existimabant
tolorum audoritatcin pralenderc ; scirequis etiarn inde tatis : hune magistri eorum atque pvimores, hoc est
poteslf quod circa celebrandos dies Paschce, et circa quos et doctrina ille et sapientia revincebat, accensi
multa alia divinœ rei sacranienta, vident esse apud ira et indignatione provocati, postremo detentum, Pon-
il/os aliquas diversitatcs , omnia
ncc observari illic tio Pilalo qui lune ex parte Romana Sgriam jirocu-
(rqunliter quœ Jerosohjmis observantur. Secundum rabal, tradiderunt ; crucem ejus et mortem suffragiis
quod in cateris quoque plurimis provinciis multa pro violeniis ac pei-tinacibm flagitantes.Hoc eos fuctnros
iocoruni et nominum diversitate variantur ; ncc tarnen et ipse Prophctarum omnium testimo-
prœdixerut et
propter hoc ab Ecclesiœ calholicœ puce atque unitate nium sic ante prœcesserat, oportere illum pati, non ut
idiquando discessum est. Apud Cyprianum, Epist. 73, serdiret tantum mortem, sed ut vinceret, et cum passus
pag. 321. esset, ad superos denuo regredi, ut vim divinœ mnjes-
* Quod vero Christ us sit et quomodo per ipsum no- tatis osfenderet. Fidem itaque rerum cursus implevit.
bis salus venerit, sic est ordo, sic ratio. Judœis piri- Nam et crucifixua, prœvento carnificis officio, spiritum
mum apud Deum gratia. Sic olim justi erant,
erat sponte dimisit, et die tertio rursus a mortuis sponte
sic majores eorum religionibus obediebant ; inde illis surrexit. Apparuit discipulis suis talis ut fuerat,
et regni sublimitas floruit, et generis magnitudo pro- agnoscendum se videnttbus prœbuit, simul junctus et
venu. Sed illi négligentes, indisciplinati et superbi substantiœ corporalis firmitate conspicuus, ad dies
postmodum facti, et fiducia patrum inflati, dum di- quo.draginta remorutus est, ut de eo ad prœcepta vi-
vina prœcepta contemnunt, dalum sibi gratiam perdi- talia instrui possent, et discernent quœ docerent. Tune
derunt. Quam vero fuerit illis profana vita, quœ con- in cœlum circumfusa nube sublatus est : ut hominem
tracta sit violalœ religionis offpnsa, ipsi quoque tes- quem dilexit, quem induit, quem a morteproiexit,ad
tanlur, qui etsi voce tacent, exitu confitentur, dispersi Patrem victor imponeret, jam venlurus e cœlo ad
et palabundi vugantur, soli et cali sui profugi per pœnani diaboli et ad censuraiii generis humani, vltoris
hospitia aliéna jactantur. Necnon Peus ante prcedixe- vigore et judicis potestate per orbern vero discipuli
;
rat fore ut vergente sœculo et mundi finejam proximo magistro et Deo monente
prœcepta Dei in sa-
diffusi,
ex omni génie tt populo et loco, cultures sibi allegeret lutem dorent, ab errore tenebrarum ad viarn lucisad-
multo fideliores et melioris obsequii, qui indulgentiam ducereid cœcos et ignaros ad agnitioneni veritaiis
,
de divinis muneribus haurirent, quam acceptam Judœi, ocularent. Ac ne esset probatio minus solida et de
coïitenqitis religionibus, perdtdissent. Ihijus igitur in- Chrislo delicata confessio, ]>er tormenta, per cruces,
dulgentiœ, gratiœ disciplinœque urbiter et maguter, per multa pœnarum gênera, tentuutur. Dolor qui ve-
sermo Dei mittitur, qui per Prophetas omnes
et Filius ritatis testis est admovetur, ut Christus Dei Filius,
rétro illuminator et doctor huntani generis prœdica- qui hominibus ad vitam datus creditur, non tantum
batur. Hic est virtus Dei, hic ratio, hic sapientia ejus prœco/do vocis, sed et passionis tcstimonio prœdicare-
et gloria. Hic in virginem illabitur, carnem Spiritu tur. Cypr., de Idol. vanit., pag. 11.
Sancto coopérante induitur. Deus cum homine misce- ' Ergo unus est ubique totus et diffusus est.
et
tur. Hic Deus noster, hic Christus est qui mediator Namque vulgus in multis Deum naturaliter confi-
et
duorum hontinem induit, quem perducat ad Patrem. tetur, cum mens et anima sui auctoris et principis ad-
Quod homo est esse Christus voluif, ut et homo possit monetur. Dici fréquenter audimus : Deus; et, Déus
esse quod Christus est. Sciebant et Judœi Christum videt ; et, Deo comiiiendo; et, Deus mihi reddet; et,
esse venturum. Nam hic illis semper Prophetis admo- quod vult Deus; et, si Deus dcderit. Atque hœc est
nentibus annuntiabatur. Sed significato duplici ejus summa delicti nolle agnoscere quem ignorare non pos-
adcentu, uno qui exercitio et exemp/lo hominis funge- sis. Ibid.
retur, altero qui Deum fateretur, non intelligendo * Unus igitur omnium Dominus est Deus. Neque
primum aduentum qui passione prœcessit occultas; enim illa sublimitas potest habere consortem, cum sola
unum tantum credunt, qui erit in potestate manifes- omnem ieneat potestatem. Ad divinum imperium etiam
tus; quod autem hoc Judœorum populus intclligere de terris mutuemur exemplum. Quando unquam regni
non potuit, delictorum meritum fuit. Sic erant sapien- societas aut cum fide cœpit, aut sine cruore desiit?
tiœ et intelligeniiœ cœcitate mulctati, ut qui vita in- Sic Thebanorum
germanitas rupta et permanens ,
digni esscnt, haberent vitam ante oculos nec vidèrent. rogis dissidentibus etiam in morte discordia, et Ro-
Jtaque cum Christus Jésus secundum a Prophetis ante manos geminos wium non capit regnum, quos unum
prœdicta, verbo et vocis impterio dœmonia de homini- uteri cœpit hospitium. Pompeius et Cœsar affines
bus excuteret, paralyticos restringeret, leprosos pur go- fuerunt, tamen necessitudinis fœdus in œmula
nec
ret, illuminaret cœcos, claudis gressum daret, mortuos potestate tenuerunt. Nec hoc tantum de homine mire-
rursum animaret, cogeret sibi elementa famulari, ser- ris cum in hoc omnis natura consentiat. Rex unus est
vire ventos, maria obedire, inféras cedere : Judœi qui apibus, et dux unus in gregilus, et in armentis rector
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 351
en Dieu ', par la forme du baptême. Ces trois que nous devons premièrement adresser nos
personnes atloraliles ne sont qu'une même prières ^, et ensuite satisfaire par lui à Dieu
chose *. Le Saint-Esprit ne ^ saurait être sé- le Père.
pare de Jésus -Christ^ et ou ne peut recevoir Les anges *» ont aussi le pouvoir de nous
5. Sur l'in-
tercvssion
l'un sans l'autre. aider dans toutes nos actions, et les saints *', des Saintii,
le minjstëie
des atÉge^,
Siir
carnationdu
\-In-
4. Le Verbe de Dieu, dont tous
*, le Fils qui sont dans le ciel, intercèdent pour nous la eau-e de
Verbe sur
les Prophètes ont parlé comme du maître du chute.
Itiir
.
et homme tout ensemble. S'il est mort, c'est G. Il distingue trois états de l'homme après Sur
diveis états
les
mort '
qu'il l'a bien voulu, atiu de vaincre la la mort : celui des saints dans le ciel ^, où ' de l'hurame
après la
mnrt, sur la
et de donner, en ressuscitant, des preuves de ils jouissent des joies et des délices que Dieu prière pour
morts et
sa majesté et de sa puissance, faisant voir à leur a préparées; celui de l'enfer *% où les les
le lieu de
leur sépul-
ceux à qui il apparut, pendant quarante jours méchants souffrent des peines éternelles, et ture.
après sa résun-ection, la même chair ® visible celui du purgatoire ", où l'on est purifié par
et palpable qu'il avait auparavant. C'est à lui le feu avant d'entrer dans le ciel. Saint Cy-
unus: miilto magis mundi unus est rector, qui uni- fautores. Apud Cyprianum, Epistola 77, pag. 330.
versa, quœcumque sunt, verbo jubet,ratione dispensât, Durate fortiter, spiraliter pergite, pervenite féli-
il
virtute consummat. Ibid., pag. 10. citer: tuntum mementote tune nostri cum incipiet in
1 Dominas post resurrectionem discipulos suos mit- vobis virginitas honorari. Cypr., de Habit, virgin.,
tens, quemadmodum baptizare deherent instituit et pag. 74. Et quis isliric nostrum prior divinœ digna-
docuit dicens: Ite et docete gentes omnes, bapti- tionis celeritate prœcesserit, perseveret apud Donii-
zantes eos in nomiae Patris et Filii et Spiritus num nosira pro fratribus et sororibus nos-
dilectio
Sancti. Insinuât Trinitatem, cujus sacramento gentes tris, apud misericordiam Patris non cesset oratio.
baptizarentur. Cypr., Epist. 73, pag. 307. Cypr., Epist. 60, pag. 271.
2 Si baptizari quis apud hcereticos potuit. titique et 12 Videamus unde zelus et quando et quomodo cœ~
remissam peccatorum consequi potuit. Si peccatonan périt... hinc diabolus inter initia statim mundi et
remissam consecutus est, et sanctificatus est et tem- periit primus et perdidit. Ille dudum angelica majes~
plum Dei factus. Qucero cujm Dei ? si Creaforis non , tate subnixus, illeDeo acceptus et charus, postquam
potuit qui in eani non credidit : si Christi, nec hujus hominem ad imaginem Dei factum conspexit, in ze-
fteri pofest templum, qui negat Deum Christum : si lum malevolo livore prorupit, non prius alterum de-
Spiritui Sancti, cum ires unum sint, quomodo Spiri- jiciens instinctu zeii, quam ipse zelo ante dejectui;
tus Sandus placatus esse ei potest, qui aut Patris aut capticm anfequam capiens , perditus antequam per-
Filii inimicus est? Cypriamis, Epist. 73, pag. 309. dens, dum stimulante livore homini gratiam do.tœ
' Qui potest apud hœreticos baptizatus Christum in- immortalitatis cripit, ipse quoque id quod prius
duei^e, multo magis potest Spiritum Sanctum quem fuerat amisit. Cyprian., de Zelo et Livore, pag. 153.
Chris tus misit, accipere. Cœterum major erit mit- *^ Diabolus hominem ad imaginem Dei factum im-
tente qui missus est, ut incipiat foris baptizatus patienter tulit, inde et periit primus et perdidit.
Christum quidem induisse, sed Spiritum Sanctum non Cypriau., de Bono patient., pag. 150.
potuisse percipere; quasi possit aut sine Spiritu Chris- >'» Cyprian., de Habitu virg., pag. 71.
tus indiii, aut a Christo Spiritus separari. Cyprian., 1^ Cyprian., de Exhortât, martyr., pag. 127.
Epist. 74, pag. 316. 16 Crédite il H qui credentibus prœmium vitce œternce
Cyprian., de idol. Vanitate, pag. 11. Voyez le dabit. Crédite illi qui incredulis œterna supplicia ge-
passage à la page précédente, note 2. hennœ ardoribus irrogabit... Cremabit addictos ardens
» Ibid. — 6 Ibid. — ?
Ibid. — » ibid. semper gehenna et vivacibiis fl.ammis vorax pœna,
* Quod si pro nobis ac pro delictis nostris ille et nec erit unde habere tormenta vel requiem possint ali-
laborabat vigilabat et precabatur, quanto nos ma-
et quando vel finem. Servabuntur cum corporibus suis
gis insistere precibus et orare, et primo ipsum Domi- animae infmitis cruciatibus ad dolorem. Cyprian., ad
num rogare. Tum deinde per ipsum Deo Pafri satis- Demetrian., pag. 135,
facere debemus. Cyprian., Epist. 11, pag. 186. ^"^
Aliud. est ad ve.niam stare, aliud ad gloriam per-
" Simus ergo orationibus nostri alterutrum adju- venire; aliud missum in carcerem, non exire inde
tores, et rogemus sicut mandasti, ut Deum et Chris- donec solvat novissimum quadrantem ; aliud statim
tum et angelos in omnibus actibus nostris habeamus fidei et virtutis accipere mercedem ; aliud pro peccatis
352 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
priiMi no pas qu'on ne pût soulager
doiilait le nôtre. Quelle joie pour eux et pour nous
ceux (jui étaient dniis ce dcrnitT état, puis- de nous voir et de nous embrasser Hatons- !
qu'il marque en plusieurs endroits que c'é- nous d'aller les trouver. » Et dans le même
tait la coutume de l'Eglise de prier pour les livre : « Les gens de bieu " meureut pour être
morts • et d'oflrir pour eux le saint sacri- mis dans un lieu de rafraîcbisseraent, et les
fice *; mais il dit que les âmes et les corps méchants pour être tourmentés les pre- :
des damnés souflriront des supplices éter- miers, pour être plus tôt en sûreté, les autres
nels sans que le repentir de leurs fautes pour être plus tôt punis. Les vierges sortent
[luisss leur être utile. Il remanjuc qu'il y de ce monde pendant la paix, avec toute la
avait dans l'Eglise des personnes destinées '
gloire de leur virginité, sans appréhender
à ensevelir les morts, et un lieu particulier ni les menaces, ni les brutalités des persécu-
pour les enterrer, distingué de celui où l'on teurs. Les enfants sont enlevés aux périls de
enterrait les païens. H dit que le jour de la l'adolescence et parviennent heureusement
mort assigne à chacun une demeure tran- à recevoir le prix de l'innocence et de la pu-
([uille *, qui nous rétablit dans le paradis, reté. » Il dit encore ailleurs que Dieu, qui est
([ui nous donne entrée dans le royaume des un juge équitable ', n'a pas égard au temps
cieux, ce qui doit s'entendre des justes, et pour récompenser ses saints ; qu'il couronne,
fait voir que le sentiment de saint Cyprien pendant la persécution, ceux qui combat-
était que non-seulement les martyrs, mais tent, et pendant la paix, ceux qui meurent
aussi tous les justes, jouissent de la béatitude avec une bonne conscience.
aussitôt après leur mort; car ce n'était pas 7. Tous sont redevables de leur salut à Pur le pé-
ché originel
aux martyrs, mais au commun des fidèles Jésus-Christ qui, exempt de tout péché, s'est p^^"aHnef
né-
affligésde la peste, qu'il adressait les paro- chargé des nôtres *, et est mort innocent sur la
cessité et la
force de la
les suivantes : « Notre patrie, c'est le para- pour sauver les coupables. Nos péchés sont grftci'.et'iir
le libre ar-
dis ^; grand nombre de nos amis, de nos de deux sortes, l'originel et l'actuel; nous ti- bitre.
frères, de nos enfants nous y attendent, as- rons le premier d'Adam ^, et les enfants qui
surés de leur salut et encore en peine pour ne fout que de naitre n'en sont pas même
longo dolore cruciatum emundari , et purgari diu * Amplectamur diem qui assignat singulos domicilia
igné; aliud peccata omnia passione purgasse aliud ;
suo : qui nos istinc ereptos et laqueis sœcularibus ex-
denique pendere in die judicii ad senientiam Domini ; solutos paradiso restituit et regno cœlesti. Cypr., de
aliud statim a Domino coronari. Cjprian., Epist. 55, Mortalit., pag. 11 G.
pag. 247. ° Patrium nostram paradisum computemus , pa-
' Cum jampridem in concilia episcoporum statutum rentes pairiarchas habere jam cœpimus: quid non pro-
sit,ne quis de clericis et Dei ministris ttitorem vel peramus et currimus, ut putriam nostram videre, ut
curatorem fesfamento sua constituai, quando singuli jjarentes salutare possimus ? Magnus illic nos charorum
divino sacerdotio honorati et in clerico ministerio numerus expectat, parentum, fratrum, filiorum fre-
constituti, nonnisi allo.ri et sacrificiis deservire, et quens nos et copiosa turba desiderat, jam de sua im-
precibus atque orattonibus vacare debeant Ac si mortalitate secura et adhuc de nostra salute sollicita.
quis hoc fecisset non offerretur pro eo, nec sacrificium Ad horum conspectum et complexum venire, quanta
]iro dormitione ejus celebraretur. Neque enim apud et illis et nobis in commune lœtttia est ! Ad hos, fra-
(dtare Dei meretur nomtnari in sacerdotum prece, qui tres dilectissimi, avida cupiditate properemus; ut cum
ab altari sacerdotes et ministros voluit uvocare. Et his cito esse, ut cito ad Christum venire cordingat,
ideo Victor, cum contra formam, nuper in concilio a optenms. Ibid.
sacerdottbics datam, Geminium Faustum preshyterum « Hoc quod sine ullo discrimine generis humani
ausus sit tutorcm comtituere, non est quod pro dor- cum injustis moriuntur et justi, non est quod putetis
mitione ejus apud vos fiât oblatio aut deprecatio ali- bonis et malis interitum e«e communem: ad rcfrige-
qua 7iomine ejus in Ecc/esia frequentetur. Cyprian., rium justi vocantur, ad supplicium rapiuntur injusti.
Epist. 1, pag. 169 et 170. Datur velocius tutela fidcntibus perfidis pœna
,
* Cjpr., ibid. Exccdunt ecce in puce tute cum gloria sua virgines,
3 Et quod maximum est, corpora martyrum aut venientis Antichristi minas et corruptelas et lupanaria
cœterorum, si non sepeliantur, grande periculum im- non timentes. Pueri periculum lubricœ œtatis evadunf,
minet eis quibus incumbit hoc opus. Apud Cyprian., ad continentiœ atque innocentiœ prœmium féliciter
Epist. 8, pag. 181. Martialis quoque prœter gentilium perveniunt. Cyprian., de Mortalit., pag. 11^ et 114.
iurpiu et hdulenta convivia, et collegia diu frequen- "•
Sine damno temporis merces, jndice Deo, reddi-
iata et filios in eodem coUegio, exteraruin gentium tur, in persecutione militia, in pace conscientia coro-
more , apud profana sepulcru depositos et alienigenis natur. Cyprian., de Exhortât, martyr., pag. 128.
ronsepultos, aclis etiam publiée habitis apud procu- * Orabat ille {Christus) pro nobis, cum peccator
rctorem ducenarium obtempérasse se idololatriœ et ipse non esset, sed aliéna peccata portaret. Cyprian.,
Christum negasse contesiatus sit. Cyprian., Epist. 67, Epist. 11, pag. 186.
pag. 289. * Cœterum si homines impedire aliquid ad consecu-
[in« SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 353
exempts. Saiut Cyprien appelle le péché ori- chés actuels, et c'est un orgueil et une folie
ginel le péché d'autrui *, parce que ceux qui de le prétendre. Mais, entre ces péchés, il y
en sont coupahles ne vivaient pas, quand il en a de grands ^, de moindres et de légers.
fut commis, d'une vie qui leur fût propre, La conversion du pécheur est l'effet de la
mais de la vie de celui qui portait en lui- grâce ^, quelquefois si prompte et si puis-
même les semences de toute sa postérité. Ce sante ', que, contre ce qu'on avait osé se
péché, qui fit perdre à Adam la ressemblance promettre, on se trouve en un moment assez
qu'il avait avec Dieu ^, nous a fait perdre ' fort pour rompre des engagements que la
la vigueur du corps avec l'immortalité. Il n'y nature et l'habitude avaient extrêmement
a personne non plus qui soit exempt * de pé- fortifiés. Cette grâce ® est un don gratuit de
tionem gratiœ posset; magis aduUos et provectos, et remédia salutaria.Cypr., lib. de Opère et Eleemosyn.,
majores natu passent impedire peccata graviora. Porro pag. 138,
autem etiam gravissimis delictoribus et in Deum
si ^ Nam cum in minoribus delictis quœ non in Domi-
multum ante peccantibus, cum poslea crediderint, ve- num committuntur, pœnitentia agatur justo tempore,
rnissa peccatorum datur et baptismo atque a gratia et exomologesis fiât, inspecta vita ejus qui agit pœni-
nemo prohibetur; quanta magis prohiberi nan débet tentiam, nec ad communicationem venir'e quis possit,
infans, qui recens natus nilUl peccavit, nisi quod se- nisi prius illi ab episcopo nianus fuerit impo-
et clero
cundum Adam carnaliter natus, contagium martis an- sita, quanta magis in lus gravissimis et extremis de-
tiquœ prima nativitate contraxit? Qui ad remissam lictis caute omnia et moderate secundum disciplinam
peccatorum accipiendum hoc ipso facilius accedif, Domini observari oportet! Cypr., Epist. 17, pag. 197.
quod im remitfuntur non propria, sed aliéna peccata. Denique quanlo et fide majores et timoré meliores
Cyprianus, Epist. 64, pag. 281. Saint Augustin cite sunt, qui, quamvis nullo sacrificii aut libelli fucinore
ce passage pour prouver le péché originel, lib. Il conscripti, quoniam tamen de hoc vel cogitaverunt,
de Nuptiis et Concupiscefit., cap. 29, pag. 328 tom. X. hoc ipsum apud sacerdotes Dei dolcnter et simpliciter
Il en cite encore un autre sur le méme_sujct, tiré confitentes, exomologesim conscientiœ faciunt, animi
du livre de saint Cyprien de Opère et Ekemosyn, sui pondus exponunt, salutarem medelam parvis licet
Videamus ergo quid de originali peccata quod per et modicis vulneribus exquirunt. Cypr., tract, de Lap-
unurn hominem intravit in niundum, senserit Cypria- sis, pag. 95.
nus. In epistola de Opère et Eleemosynis ita laquitur : Accipe quod sentitur antequam discitur; nec per
^
Cum Dominus adveniens sanasset illa quœ Adam por- moras temporum longa agnitione eolligitur, sed com-
taverat vulnera, et venena serpentis antiqua curasset, pendio gratiœ maturantis hauritur. Cypr., lib. de
legem dedit sano, et prœcepit ne ultra jam peccaret, Gratia Dei, pag. 2.
quid peccanti gravius eveniret. Coarctati eramus ^ Qui
Tifi possibilis, aiebam, est tanta conversio, ut re-
et in angustum innocentiœ prescriptione conclusi: tiec pente ac perniciter exuatur, quod vel genuitium situ
haberet quid fragililatis humanœ infirmitas atque matcriœ naturalis obduruit, vel usuipatum diu senio
imbecillitas facei'et, nisi iterum pietas divina subve- vetustatis inolevit ? allahœc et profunda penitus ra-
niens, justitiœ et misericordiœ operibus ostensis viam diée sederunt. Quando parcimoniam discit, qui epula-
quamdam tuendœ salutis aperii'ct ; ut sordes postmo- ribus cœnis et largis dapibus assuevil ? Et qui pretiosa
dum quascumque contrahimus eleemosynis abluamus, veste canspicuus in aura atque in purpura fulsit, ad
Apud Cyprianum, pag. 137; Augustin., lib. IV coiUr. plebeium se ac simplicem cultum quando deponit?
duas Epist. Pelag., cap. 8, pag. 480 tom. X. Fascibus ille oblectatus et honoribus pirivatus et in-
1 Cypr., Epist. 64, pag. 281 loc. cit. glorius esse non potest. Hic stipatus clientium cuneis
2 Si patientia Dei Patris maneat in nobis, si simili- frequentiore comitatu officiosi agminis hanestatus, pœ-
tudo divina quam peccato Adam perdiderat, manifes- nam putat esse cum solus est. Tenacibus semper illece-
telur et luceat in actibus nostris, Cypr., de Bono pa- bris necesse est, ut solebat, vinalentia invitet, infîet
tient., pag. 146. superbia, iracundia inflammet, rapacitas inquietet,
^ Num cum in illa prima transgressione prœcepti crudelitas stimulet, ambitio delectet, libido prœcipi-
(irmitas corporis cum immortalitatc discesserit , et tet. Hœc eyomet sœpe mecum sed postquam undœ
cum morte infirmitas venerit, nec possit firmitas re- genitalis auxilio supcrioris œvi labe detersa in expia-
cipi, nisi cum recepta immortalitas fuerit: oportet
et tum pectus ac purum, desuper se lumen infudit, post-
in hac fragilitate atque infirmitate carporea luclari quam cœlitui, spiritu liausto, in novum me hominem
semper et congredi, quœ luctatio et congressia non- nativitas secunda reparavit, mirum in modum proti-
nisi in palientiœ viribus potest sustineri. Cypr., ibid., nus confirmare se dubia, patere clausa, lucere tene-
pag. 149. brosa, facultatem dare quod prius difficile videbatur ;
* Nec quisquam d& puro atque immacu-
sic sibi geri passe quod impossibile putabatur ut escet ; agno-
lato corde btandiatur, ut innocentia sua fretus,
medi- scere terrenum fuisse quod prius carnaliter natum de-
cinam non putet adhibendam esse vulneribus cum , lictis obnaxium viveret; Dei esse cœpisse, quod jam
scriptum sit: Quis gloriabitur caslum se habere cor, Spiritus Sanctus animaret. Cyprianus, lib, de Gratia,
aut quis gloriabiturmundum se esse a peccatis? Si pag. 2.
autem nemo esse sine peccato potest, et quisquis se 8 Quam stabilis, quam incancussa tutela est, quam
inculpalum dixerit, aut superbus, aut stultus est. perennibus bonis cœleste prœsidium, implicantis mun-
Quam necessaria, quam benigna est dioina clément ia! di laqueis solvi, in lucem immortalitatis œternœ de
Quœ cum sciât non déesse sanatis quœdam postmodum terrena fœce purgari ; videritque in nos prius infes-
vulnera, dedit curandis denuo sanandisque vulneribus tantis inimici pernicies insidiosa grassata sit. Plus
II. 23
3?)t IIISTOIRR GÉNI'RALE DES AUTEURS ecclt':stastiques.
Dieu, uno rfllision de l'Esprit rôlnstc qui la ces parolo55 nous ne demandons pas que
,
pas moins l'eftet de sa puissance que la con- de nous glorifier de quelque chose, quand
version des pécheurs, puisque c'est Jésus- nous n'avons rien do nous-mêmes, recon-
Christ, protecteur de la foi, qui combat dans naissons humblement dans un autre endroit
ses saints, et vainc continuellement en nous de cette prière, où nous demandons de ne
la mort * qu'il a une fois vaincue pour nous. pas tomber en tentation, que nous sommes
En général nous n'avons de forces ", de vie, faibles et infirmes *, afin que sa bonté nous
de vigueur, qu'autant que Dieu nous en ac- accorde tout ce que nous lui demandons
corde. C'est ce que les saints * reconnaissent ainsi avec crainte et respect. Or, cette bonté
en attribuant à Dieu ce qu'ils font de grand est si grande, qu'il nous récompense des cho-
et de glorieux dans l'Eglise et c'est de quoi , ses qu'il a faites lui-môme en nous et par
nous sommes avertis ' par cette demande nous ", et qu'il ne met d'autres limites à ses
que nous lui faisons dans la prière de cha- grâces que celles de notre foi ». Mais s'il n'y
que jour: Que votre volonté soit faite, etc.; par a que notre incrédulité qui nous empêche
amare compellimur quod futuri sumus, dum et scire In Evangelioxaxà Joannem : Nemo potcsl quidquam
damnare quod eramus. Nec ad hoc pre-
conceditur, et datum faerit illi de cœlo. Item in Epis-
accipere, uisi
tiis aut ambitu, aut manu opus est, ut hominis summa tola Pauli ad Corinthios prima : Ouid enim liabe3
vel dignitas, tel poteslas elaborata mole pariatur, sed quod non acceperis? Cyprian., lib. III Testimon.,
gratuitum de Deo munus et facile est. Cyprianus, ibid., cap. 4. Saint Augustin cite ce passage, lib. IV cont.
pag. 6. duas Epist. Velag., cap. 9, pag. 484, et lib. de Vrœdest.
* Ut sponte sol radiât, fons rigat, imber irrorat ; Sanct., cap. 3, pag. 793 tom. X.
^ Quando autem rogamus
ita se Spiritus cœlestis infundit. Ibid. ne in tentationem venia-
' Quam lœtus illic Cliristus fuit, quant libens in mus, admonemur infirmitatis et imbecillitatis nostrœ,
talibus servis suis et pugnavit et vicit protector fidei ! dum sic rogamus ne quis se insolenter extollat, ne
Et dans credentibus tanfum, quantum se crédit acci- quis sibi superbe atque arroganier aliquid assumât,
pere qui sumit, certamini suo adfuit, prœliatores at- ne quis aut confessionis aut passionis gloriam suam
que assertatores sui nominis erexit, corroboravit , ani~ ducat, cum Dominus ijjse liuniilitatem doccns dixerit:
mavit. Et qui pro nobis mortem semel vicit, semper Vigilate et orate, ne veuiatis in tentationem. Spiri-
vincit in nobis. Cypr., Epiit. 10, pag. 183. tus quidcm promptus est, caro autem infirma, ut dum
* Deiinquam, Dei omne quod possumus. Inde
est, prœcedit humilis et summissa datur to~
confessio, et
vivimus, inde pollemus, inde sumpto et concepto vi- ium Deo, quidquid suppliciter cum timoré et honore
gore, hic adhuc positi futurorum indicia prœnoscimus. Dei petitur, ipsitis pietate prœstetur. Cyprian., de
Cypr., lib. de Gratia, pag. 2. Orat. domin., pag. 106. Voyez ce passage cité par
* Scripserunt autem mihi nuper quidam de lapsis, saint Augustin, lib. IV cont. duas Epist. Pelag.,
humiles et mites, et trementes et metuentes Deum, et cap. 9, pag. 484.
qui in Ecclesia sempier gloriose et granditer operati 8 Quis non libenter et prompte calicem salutis acci'
sunt; et opus suum Domino imputaverunt, scientes il- piat? Quis non appelât gaudibundus et lœtus in quo
tum dixisse : Et cum haec omnia feceritis, dicite, servi aliquid et ipse Domino suo rétribuât? Quis non prc
supervacui sumus, quod debuimus facere fecimus. tiosam in conspectu Domini mortem fortiter et con-
Cypr., Epist. 33, pag. 216. stanter excipial ;
placiturus ejus oculis, qui nos in
* Addimus quoque: Fiat voluntas tua sicut in cœlo congressione nominis sui desuj/cr spectans, volentes
et in terra; non ut Deus faciat quod vult, sed ut nos comprobat, adjuvat dimicantes, vincentes coronat, re-
facere possimus quod Deus vult. Ncm Deo quis obsis- tributione bonitatis ac pietatis paternœ, remunerans
tit, quominus quod velit faciat? sed quia nobis a in nobis quidquid ipse prœstitit, et honorons quod ipse
diabolo obsistitur, quominus per omnia noster animus perfecit? Ipsius enim esse quod vincimus, et quodad
atque actus Deo obsequatur. Oramus et petimus ut maximi certaminis palmam subacto adversario per-
fiât in nobis voluntas Dei, quœ ut fiât in Jiobis, opus venimus, déclarai et docet Dominus in Evangelio suo
est Dei voluntate, id est, ope cjus et pirotectione, quia dicens: Cum autem vos tradiderint, nolite cogitare
nemo suis viribus Dei indulgentia et
fortis est, sed quomodo aut quid ioquamini, etc. Cypr., Epist. 76,
misericordia tutus de Orat. dom.,
est. Cyprian., pag. 329.
pag. 102. Saint Augustin se sert de ce passage con- 8 Quare in persecutionibus nemo cogitet, quod pe-
de recevoir ce qu'un Dieu tout-puissant nous laquelle l'homme, laissé à sa liberté, se pro-
peut donner, il nous abandonne, et sa grâce cure lui-même la vie ou la mort. Il nous
se retire de nous, quand nous tombons dans laisse l'usage de notre libre arbitre ®, eu
l'orgueil et dans le mépris de ses commande- sorte qu'ildépend de nous, par exemple, de
ments. Ainsi se retira-t-elle * de Saiil et de croire ou de ne pas croire; mais il nous ap-
Salomon; dans la suite, la nation juive*
ainsi, prend à n'en pas trop présumer ' lorsqu'il
a-t-elle mérité de la perdre. C'est pourquoi nous enseigne, dans l'Oraison dominicale, à
encore nous demandons à Dieu, dans l'Orai- lui demander la grâce de régler nos mœurs.
son dominicale, que son nom soit sanctifié, 8. On ne peut vivre hors de l'Eglise *, et siui'Kgiise.
c'est-à-dire qu'il daigne, par sa bouté *, con- iln'y a point de salut hors d'elle. C'est pour-
server en uous la sainteté et la vie qu'il quoi on ne doit " jamais s'en séparer, pour
nous a communiquées par sa grâce, afin que quelque cause que ce soit. Comme elle est '^
nous persévérions dans la justice du bap- notre mère, elle se réjouit de la gloire de ses
tême ; et nous ne cessons de lui réitérer cette enfants ", et ne voit leur perte qu'avec dou-
demande dans toutes nos prières de jour et leur '2. Elle est une *' et se répand, par sa fé-
de nuit. Cependant * Dieu garde la loi ^ par condité, en plusieurs membres par toute la
iSalomon denique, et Saûl, et cœteri multi, quam- vitam tibi ut vivas. Cypr., lib. III Testimon., cap. 52,
diu in viis Domini ambulaverunt, datam sihi gratiam pag. 58.
ienere potuerunt, recedente ab iis disciplina dominica, Leginius
"^
eis etiam librum beatissimi martyris
reccssit et gratia. Cyprian., Epist. 13, pag. 189. Cypriani de Oratione dominica, et ostendimus quem-
* Judœis primum erat apud Deuni gratia. Sic olim admodum docuerit ornnia quœ ad mores nostros
justi erant, sic majores eorum religionibus obedie- pertinent, quibus recte vivimus, a Pâtre nostro qui
bant; inde illis et regni sublimitas poruit, et generis in cœlis est, esse poscenda, nede libéra prœsumenies
magnitudo provenit, sed illi négligentes, indiscipli- arbitrio, a divina gratia decidamus. Ubi etiam de-
nati et superbi postmodum facti, et fiducia patrum monstravimus quomodo admonuerit idem gloriosissimus
inflati, dum divina prœcepta contemnunf, datam sibi martyr, etiam pro inimicis nostris, qui nondum in
gratiam perdiderunt. Cyprianus, de Idolor. vanit., Christum credideru?it, nos ut credant orare dehere:
pag. 111. quod utique inaniter fieret, nisi Ecclesia crederet,
3Dicimus: Sanctificetiir nomen tuum, non qiiod op- etiam malas atque infidèles hominum voluntates per
temus Deo, ut sanctificetur oratiojiibus nostris, sed Dei gratiam in bonum posse converti. Augustin.,
quod petamus ab eo, ut nomen ejus sanctificetur in Epist. 215, pag. 794 tom. II.
* Nec putent sibi vitœ aut salutis constare i^atio-
nobis. Cœterum a quo Deus sanctificetur, qui ipse
sunctificat? Sed quia ipse dixit : Saucti estote, quo- nem, si episcopis et sacerdotibus obteniperare nolue-
niam ego sanctus sum, id petimus et rogamus,
et rint neque enim vivere foris possunt, cum domus
ut qui in baptismo sanctificati sumus, in eo quod esse Dei una sit, et nemini sulus esse nisi in Ecclesia pos-
cœpimus perseveremus hœc sanctificaiio ut in no- sit. Cyprian., Epist. 4, pag. 175.
bis permaneat oramus: et quia Dominus et judex 9 Nam
videntur in Ecclesia esse zizania, non
etsi
noster, sanatoase et justi fîcato, comminatur jam non tanien impediri débet aut fides aut charifas nostra,
delinquere, ne quid et deterius fiât, hanc continuis ut quoniam zizania esse in Ecclesia cernimus, ipsi de
orationibus precem facimus, hoc diebus ac noctibus Ecclesia reccdamus... Nec qicisquam sibi quod soli
postulamus, ut sanctificaiio et vivificatio quœ de Dei Filio Pater tribuit, vindicare potest; ut putct aut ad
gratta sumitur, ipsius protectione servetur. Cyprianus, arcam ventilandam purgandam, palam ferre se Jam
et
tract, de Orat. domin., pag. 102. Saint Augustin posse, aut a frumento universa zizania humano judi-
cite cet endroit pour prouver que la persévérance cio segreg are. Cy])V., Epist. 54, pag. 240.
est un don de Dieu, puisque, selon saint Cyprien, Cum
autem nativitas christianorum in baptismo
^0
nous devons la lui demander. Aug., lib. de Dono per- sit, baptismi autem generatio et sanctificaiio apud
sev., cap. 2, pag. 824 tom. X. solam sponsam Christi sit, quœ parère spiritaliter et
* llle non increpuit recedentes, auf graviter commi- generare filios Deo possit ; ubi, et ex qua, et cui na-
natus est, sed magis conversus ad Apostolos suos di- tus est, qui filius Ecclesiœ non est, ut habere quis
xit: Numquid et vos vultis ire? Servans scilicet le- possit Deum Patrem, ante Ecclesiam matrem? Cypr.,
gem, qua homo libertati suce relictus, et in arbitrio Epist. 74, pag. 315.
proprio constitutus, sibimet ipse vel mortem appétit, Il Exulto lœtus et gratulor, fortissimi ac beatissimi
vel salutem. Gypr., Epist. 59, pag. 262. fratres, cognita fide ac virtute vestra, in quibus ma-
Hinc hœreses et factœ sutit fréquenter et fiunt,
^ ter Ecclesia gloriatur. Cypr., Epist. 10, pag. 183.
dum perversa mens non habet pacem, dum perfidia 1* Opto pariter et exhortor, ut qicos vinculum con-
discordons non tenet unitatem, fieri vero hœc Domi- fessionis et hospitium carceris simul junxit jungat ,
nus permittit et patitur, manente propriœ hbertatis etiam consummalio corona cœlestis ; ut
virfutis, et
arbitrio, ut dum corda et mentes nostras veritatis lacrymas matris Ecclesiœ quœ plangit ruinas et fu-
discrimen examinât, probatorum fides intégra mani- nera plurimorum , vos vestra lœtitia tergeatis; et
Cypr , de Unit. Eccles., pag. 80.
festa luce clarescat, cœterorum quoque stantium firmitatem, vestri exempli
Credendi vel non credendi libertatem in arbitrio
* provocationem solidetis. Ibid., pag. 184,
positam. In Deuteronomio: Ecce dedi ante faciem *3 Episcopatus unus est, cujus a singulis in solidum
tuam vitam et mortem, bonum et malum, elige pars tenetur. Ecclesia quoque una est, quœ in multi-
3*10 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
torrc, comme le soleil a plusieurs rayons, avec qui conmmni(]uent martyrs, les * les
quoiqu'il n'y ait (lu'une lumière; comme uu confesseurs , veuves et toutes
les vierges , les
arbre a plusieurs branches, mais n'a qu'un les Eglises du monde. La raison en est que
tronc et une racine; comme une source se l'Eglise ne peut être dehors ', ni divisée ou
divise en plusieurs ruisseaux, mais conserve séparée d'avec elle-même; que c'est le peu-
toujours son unité dans sou origine. Une ple uni à son évèque, et le troupeau à son
branche d'arbre rompue ne peut plus pren- pasteur*; eu sorte que, comme l'évèque est
dre rachie, et uu ruisseau retranché de sa dans l'Eglise, l'Eglise est aussi dans l'évèque;
source, se dessèche. C'est l'Eglise qui nous et qui n'est point avec l'évèque, n'est point
fait naître, qui nous nourrit de son lait et non plus dans l'Eglise. Enfin les évéques
qui nous anime de son esprit. Celui-là ne joints ensemble sont le lien de l'union de
peut avoir Dieu pour père, qui n'a point l'E- l'Eglise catholique, c'est-à-dire de celle-là
glise pour mère. Or, ceux-là se flattent mal seule ' qui est établie de Dieu, que Jésus-
à propos ', qui, n'ayant pas la paix avec les Christ s'est acquise et qu'il a formée de son
communiquent en secret avec
prêtres de Dieu, sang «, qu'il gouverne avec un souverain
quelques membres. Mais je suis en sûreté, empire ^ Comme il a voulu qu'elle fût une,
quand j'ai la communion de mon évèque. aussi l'a-t-il bâtie ® sur un seul, qui est Pierre.
tudinem latius incremento fecundilatis extendttur : nobis miscere se noluit, in paradiso atque in regno
quo modo salis multi radii, sed lumen unum; et cœlorum solus habitabit, Ibid.
rami arboris multi, sed robur unum tenaci radice 3 Fo7-is no7i esse Ecclesiar/i , nec scindi adversum se
fundatum ; et cum de fonte uno rivi plurimi de/luunt, aut diiidi passe, sed inseparabilis atque individuœ
7iumerosiias licet diffusa videatur exundantis copiée do7)ius unitatem manifestât Scripturœ divi7iœ
te7iere
largitate, uni tas tamen seivatur in origine. Avelle fîdes, cu7n de sacratnento Paschœ et agni , qui agnus
radium solis a corpore, divisionem lucis imitas non Christum dcsig7iabat , scriptum sit: In domo uoa
capit: ab arbore frange ramum, fractus germinare comedctur, etc. Cyprianus, Epist. 09, pag. 295.
non poterit a fonte rescide rivum, prœcisus arescet.
: * Illi sunt Ecclesia, plebs sacerdoti adu7tata, et
Sic Ecclesia Domini luce perfusa per orbem totum pastori suo grex adha-i'cns. Lhide scire debes episco-
radios suos porrigit, unum tamen lumen est, quod pum in Ecclesia esse, et Ecclesiam in episcopo. Et si
ubique diffunditur, nec unitas corpoiHs separatur: qui cum episcopo non sint, in Ecclesia 7ion esse, et
ramos suos in universam tei^am copia ubertatis ex- frusti'a sibi bla7idi7'i eos, qui pacem cum sacerdotibus
tendit, profluentes largiter rivos latius expandit: Dei non habe7ites obrepunt, et latetder apud quosdam
unum tamen cuput est et origo una, et una mater, communicai-e se C7'edunt; quando Ecclesia quœ catho-
fecunditatis successibus copiosa. Illius fœtu 7iascimur, lica una est, scissa non sit neque divisa; sed sit uti-
illius lacté nutrimur, spiritu ejus animamur. Adul- que connexa, et cohœrentium sibi invicem sacerdotum
teran non potest sponsa Christi, incorrupta est et gluti7io copulata. Cypr., Epist. 66, pag. 280.
pudica, unam domum novit, unius cubiculi sanctita- ^ Lapsi magitudi7iem delicti sui cognoscentes, a de-
tem caslo pudore custodit. Ilœc nos Deo servat, hœc precando Domi7io non 7'ecedant, 7icc Ecclesiam catho-
filios regno quos gencravit assignat. Quisquis ab Ec- licam, quœ una et sola est a Domino constiluta, dei-e-
clesia segregatus adultérée jungitur, a promissis Ec- linquant. Cypr., Epist. 65, pag. 283.
clesiœ separatur, nec pervenit ad Christi prœmia, qui * Quod autem majus potest esse delictum, aut quœ
relinquit Ecc/esiam Christi; alienus est, profanus macula deformior, quam adversus Christum stetisse;
est, hostis est. Ilabere jam non potest Deum patrem, quam Ecclesiam ejus, quam ille sangui7ie suo paravit
qui Eccksiam non habet matrem. Cypr., de Unit. Ec- et condidit, dissipasse? Cyprian., Epist. 72, pag. 305.
cles., pag. 78. ' Christus arbitrio et nutu, ac prœsentia sua, et
1 Unde scire debes frustra sibi blandiri eos qui pa- prœpositos ipsos, et Ecclesiam cum prœposilis guber-
cem cum sacerdotibus Dei non habentes, obrepunt, et nat. Cyprian., Epist. 66, pag. 286.
latenter apud quosdam communicare se credunt ; 8Loquitur Dominus ad Petrum : Ego tibi dico,
({uando Ecclesia quœ catholica est, scissa non sit ne- inquil, quia tu es Petrus, et super istam petram
que divisa; sed sit utique connexa et cohœrentium sediûcabo Ecclesiam meam, ctc Super illum
sibi invicem saccrdotum glutino copulata. Cyprian., unum œdificat Ecclesiam suam, et illi pascendas
Epist. 66, pag. 286. mandat oves suas. Et quamvis Apostolis omnibus post
* Quare in hune scrupulum non inciderunt de plèbe 7'esurrectionem suam parem potestatem tribuat et di-
ista nostra quœ apud nos est, et nobis de Dei digna- cat : Sicut misit me Pater, et ego mitto vos. Acci-
tione commisse est, tôt confessores quœstionati et pite Spiritum Sanctum si cui remiseritis peccata,
:
torti, et insignium vulnerum et cicatricum memoria remittentur illi, etc. Tamen ut unilalem manifesta-
gloriosi? Tôt virgines integrœ? Tôt laudabiles tiduœ? ret, unam cathedram constiluit, et unitatis ejusdem
Ecclesiœ denique universœ per totum mundum nobis- originem ab uno accipientem, sua autoritate disposuit.
cum unitatis vinculo copulatœ? Nisi si omnes isti IIoc erant utique et cœtei'i Apostoli, quod fuit Petrus,
communicantes mecum secundum quod scripsisti, pol- pai-i consortio prœditi et honoris et potestatis , sed
luto nostro are polluti sunt, et spem vitœ œternœ exordium ab unitate profciscitur. Prirnatus Petro da-
communicationis nostrœ contagione perdiderunt : Pu- tur, ut una Christi Ecclesia et cathedra una monstre-
jnanus solus inleger, inviolatus, sanctus, pudicus, qui tur. Et past07-es 5U7it omnes, sed grex unus osiendi'
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 357
Ily a mis une seule chaire, non qu'il n'ait dotale, auprès de laquelle la perfidie ne peut
donné à tous ses apôtres une puissance égale; avoir d'accès. Les hérésies viennent de ce '
car ils étaient ce qu'était Pierre, participants qu'on ne remonte point à la source de la
au même honneur et à la même puissance; vérité, qu'on ne cherche point le chef, et
mais il voulait montrer l'unité, c'est pour- qu'on ne garde point la doctrine du Maître
quoi il en a étal^li l'origine par son autorité, céleste. L'évoque de Rome * est le successeur
en la faisant descendre d'un seul ; c'est pour- de saint Pierre, et on voit, par la lettre de
quoi aussi la primauté est donnée à Pierre saint Firmilien s, que de son temps les papes
pour montrer toujours qu'il n'y a qu'une se faisaient honneur et du lieu de leur ôpis-
Eglise de Jésus-Christ et une chaire. Ils sont copat, et d'occuper la chaire de saint Pierre.
tous pasteurs, mais on ne voit qu'un trou- Outre le clergé et le peuple de Rome, les
peau que tous les apôtres doivent paître d'un évèques étrangers ^ qui se trouvaient dans
commun accord. C'est dans le même sens la ville, avaient quelquefois part à l'élection
que saint Cyprien dit que l'Eglise est fon- du pape, on en donnait avis par lettres à
et
dée sur les évèques *, parce que c'est à eux toutes les Eglises et à celle de Carthage eu
que la conduite et l'administration en est particulier, afin qu'elle fût approuvée d'un
commise. commun consentement par tous les évèques
9. Rome est la chaire de saint Pierre ®, la du monde. Il ne faisait rien que de l'avis ''
première Eglise, la source de l'unité sacer- et du consentement des autres, de même que
hcr, qui ab Apostolis omnibus unanimi consentione des, Apostolo prœdicante, laudata est, ad quos perfidia
pascatur. Cyprianus, de Unitate Ecoles., pag. 253 habere non possit accessum. Cyprian., Epist, 59,
cdit. Pamel. anni 1574. L'édition d'Oxford, que nous pag. 2C5.
n'avons pas cru devoir suivre ici, a supprimé de Hœreses invenit [diabolus) et schismata, quibus
3
ce passage les paroles qui regardent la primauté subverteret fidem veritatem corrumperet , scinderet
,
donnée à saint Pierre. Cependant Manuce les avait unitatem, quos detinere non potest in vice veteris cœ-
déjà insérées dans son édition antérieure à celle de citate, circumscribit et decipit novi itineris errore
Pamélius et, s'il en
; faut croire ce dernier, sur l'au- Eoc eo fit, fratres dilectissimi dum ad veritatis ori-
,
torité de très-anciens maDUScrits, un entre autres, ginem non rcditur, nec caput quœritur, nec magistri
estimé de neuf cents ans par Marianus Victor. Re- cœlestis doctrina servatur. Quœ si quis consideret et
mond Rufus et Alanus Coppus les ont soutenues, examinet, traclatu longe atquc argumentis opus non
l'un contre Dumoulin, l'autre dans son premier dia- est. Probatio est ad fidem facilis compendio veritatis.
logue contre les Cenluriateurs de Magdebourg. Pa- Loquitur Doyninus ad Petrum : Ego tibi dico, inquit,
mélius, qui avance aussi qu'elles étaient dans le quia tu es Petrus, etc. Cyprian., de Unitat. Ecoles.,
manuscrit dont se servit le cardinal Hoscius, les li- pag. 76.
sait dans son ancien manuscrit de Cambron, et les * Factus est autem Cornélius episcopus de Dei et
éditeurs d'Oxford n'ont pu nier qu'ils n'en eussent Christi ej'us judicio, de clericorum pêne omnium tes-
vu quatre où elles étaient de même. Ils ont sup- timonio, de plebis quœ tune a/fuit suffragio, et de sa-
primé ces autres qui suivent dix lignes plus bas cerdotum antiquorum et bonorum virorum collegio-
dans la même édition de Pamélius Qui cathedram : cum nemo ante se factus esset, cum Fabiani locus, id
Pelri, super quani fundata est Ecclesia, deserit, in est, cum locus Petin et gradus cathedrœ sacerdotalis
Ecclesia se esse confidit ? quoiqu'autoriséos par Gra- vacaret. Cyprian., Epist. 55, pag. 243.
tien, Dist. 49, cap. Qui cathedram, et par le manus- s Atque ego in hac parte juste indignor ad hanc
crit de Cambron. Voyez Pamel., ad not. in lib. de tam apertam et manifestam Stephani stultitiam, quod
Unit. Ecoles. catlioL, pag. 2G1. [D. Maran a aussi qui sic de episcopaius sui loco gloriatur, et se succes-
conservé, contrairement à Baluze, les paroles sur la sioneni Pétri tenere contendit super quem fundamenta
primauté. Au reste, saint Cyprien a émis dans beau- Ecclesiœ collocata sunt, multas alias petras inducat,
coup d'endroits une doctrine semblable. Voyez D. et Eoolesiarum multarum nova œdificia constituât,
Maran, préface. Au lieu de super quam, ou lit dans dum esse illic baptisma sua auctoritate deffendit. Fir-
Maran super quem.] mil., apud Gypr., Epist. 75, pag. 324.
1 Dominus noster cujus prœcepta metuere et obser- Cornélius factus est episcopus a plurimis collegis
6
vare debemus, episcopi honorem et Ecclesiœ suœ ratio- nostris, qui tune 2W urbe Roma adorant, qui ad nos
nem disponens in Evangelio, loquitur, et dicit Petro: litteras honorificas, et laudabiles, et testimonio suœ
Ego tibi dico, quia tu es Petrus, etc. hide per tem- prœdicationis illustres, de ejus ordinatione miserunt.
porum et successionum vices, episcoporum ordinatio Cyprian., Epist. 55, pag. 243. Venio jam nunc, fra-
et Ecclesiœ ratio decurrit, ut Ecclesia super episcopos ter charissime, ad personam Cornelii collegœ nostri ;
constituatur , et omnis aclus Ecclesiœ, per eosdem ut Cornelium nobiscum vertus noveris, non de mali-
prœpositos gubernetur. Gyprian., Episf. 33, pag. 21G. gnorum et detrahentimn mendacio, sed de Domini
2 Pust ista adhuc insuper pseudoepiscopo sibi ab Dei judicio, qui episcopum fecit; et coepiscoporum
hœreticis constituto, navigare audent, et ad Peiri ca- testimonio, quorum numerus universus per totum
thedram, alque ad Ecclesiam principaleni, unde unitas mundum concordi unanimitate consensit. Ibid.
sacerdotalis cxorta est, a schismaticis et profanis lit- "^
Omni igitur actu ad me perlulo, placuit contrahi
teras ferre, nec cogitare eos esse Romanos, quorum fi- presbyterium, adfuerunt etiam episcopi quinque, qui
,
et hodie prœsentes fitei'unt, ut firmato consilio, quid ut ad ordinationes rite celebrandas, ad eam plebem,
circa persouant eoruni o()scrvari dc/jcret, consen.su om- cui prœpositus ordiiiatur, episcopi ejusdem provinciœ
nium statueretur, et motum omnium et consilium proximi quique conveniant, et episcopus deligatur,
smgulorum di(/nosceres etiam sententias nos t ras
, plèbe prœsenie, quœ singulorum vitam
plenissime no-
ptacuit in notitiam vesfri proferri, f/uas et subjectasi vif, el uniuscujusque actum de cjus conversatione pcr-
loges... hat litteras puto te debere, fraler c/utrissime, spexit. Quod et apud vos factum videmus in Sabini
et ad cœteras Hcclesias ndttei-e, ut omnes sciant collegœ iiostri ordinatione, ut de universœ fraternitatis
schismatici hujus et liœretici dolum et prœvaricatio- suffragio et de episcoporum, qui in prœsentia convene-
7tem de die in diem evacuari. Cornol., apud Cypr., runt, quique de eo ad vos litteras fecerant judicio:
Epist. 49, pag. 235. Quanquam nobis in tam ingenti episcopalus ei deferretur, et manus ei in locum liasi-
negotio placeat, quod et tu ipse tractasti prius : Ëc- lidis imponeretur. Nec rescindere ordinationem jure
clesiœpacem sustinendam, deinde sic collatione consi- perfeclam potest, quod Basilides post crimina sua dé-
liorum cum episcopis, presbyteris, diaconis, confesso- tecta et conscientiam etiam propria confessione nuda-
ribus pariter ac stanlibus laicis facta, lapsorum trac- tam, Romam
pergens, Stephanum collegam nostrum
tare rationem; per quam enim nobis et invidiosum et longe positum et gestœ rei ac tacitœ veritatis ignarum
onerosum yiobis videtur , non per multos cxaminare, fefellit, ut exambiret reponi se injuste in episcopa-
quod per multos commissum videatur fuisse, et unam tum de quo fuerat juste depositus. Hoc eo pertinet ut
sententiam dicere, cum tam grande crimen per multos Basilidis non tam abolita sunt quam cumulata delicta,
di/fusum notetur exisse; quoniam nec firmum decre- ut ad sujieriora peccata ejus etiam falluciœ et circum-
tum potest esse quod non plurimorum videbitur ha- ventionis crimen accesserit. Neque enim tam culpandus
buisse consensum. Glerus Roman., Epist. ad Cypr,, est ille cui negligenter obreptum est, quam hic exe-
apud eumd., Epist. 30, pag. 211. crandus qui fraudulenter obrepsit... sed nec Martiali
* Ad quœdam disponenda et consilii communis exa- potest profuisse fallacia quominus ipse quoque deliclis
minatione limanda, necesse hubuimus, frater charis- gravibus involutus episcopatum tenere non debeat.
sime, convenientibus in unum pluribus sacerdotibus, Apud Cypr., Epist. 67, pag. 287.
cogère et celebrare concilium, in quo multa quidem 3 Langage qui respire le presbytérianisme. Il s'a-
prolata atque transacta sunt : sed de eo vel maxime git d'appellations, dans des cas particuliers, et non
tibi scribendum, et cum tua gravitate ac sapientia de l'appellation en général. Autrement il faudrait
conferendum fuit, quod maçjis pertineat, et ad sacer- conclure que saint Cyprien condamne d'avance sou
dotalem auctoritatem, et ad Ecclesiœ catholicœ unita- successeur Cécilien, contre les douatistes; saint Atha-
tem pariter ac dignitatem, de divinœ dispositionis nase, qui en appelle à Rome contre les ariens;
ordinntione venientem, eos qui sint foris extra Eccle- saint Chrysostôme, qui en appelle ù Rome contre
siam lincti, et apud hœreticos et schismaticos profanes ses ennemis particuliers. Saiut Augustin rapporte
aquce labe maculati, quartdo ad nos atque ad Eccle- plusieurs exemples d'appellations des évêques d'A-
siam, quœ una est, venerint, baptizari oportere; eo frique, et il ne les blâme point; au contraire, il en
quod parum sit eis manum imponere ad accipiendum reconnaît la légitimité. Voyez J. Devoti, Inst. canon.,
Spiritum Sanctum, nisi accipiant et Ecclesiœ baptis- tom. II, de Appellutionibus. {L'éditeur.)
mum... Hœc ad conscientiam tuam, frater charissime, * Post ista adhuc insuper pseudoepiscopo sibi ab
et pro honore communi, et pro simplici dilectione hœreticis constituto , navigare audent ; et ad Pétri
pertulimus, credentes etiam tibi pro religionis tuœ et cathedram atque ad Ecclesiam principjalem, unde uni-
fidei veritate placere, quœ et religiosa pariter et vera tas sacerdotulis exorta est, a schismuticis et pi'ofanis
sunt. Cypr., Epist. 72 ad Sleph., pag. 305 et 806. litteras ferre, nec cogitare eos esse Romanos [quorum
L'un et l'autre paraissent par la lettre synodi-
* fides, Apostolo prœdicante, laudafa est), ad quos per~
que des évêques d'Afrique à l'Eglise de Léon et fxdia habere non possit accessum. Quœ autem causa
d'Astorga, et à celle de Mérida: Cum in unum con- veniendi et pseudoepiscopum contra episcopos factum
venissemus, legimus litteras vestras, fratres dileclis- nuntiandi? aut enim placet il lis quod fecerunt; et in
simi, quas ad nos per Felicem et Sabinum coepiscopos suo scelere persévérant, aut si displicet et recedunt,
nostros pro fidei vestrœ integritate et pro Dei timoré sciunt quo revertantur. Nam, cum statutum sit omni-
fecistis, significantes Basilidem et Martialem libellis bus nobis, et œquum stt pariter ac justum, uniuscu-
idololatriœ commaculatos et nefandorum facinorum jusque causa illic audialur, ubi est crimen admissum,
conscientia vinctos, episcopatum gerere et sacerdotium et singulis pastoribus portio gregis sit adscripta,
Dei administrare non oportere ; et desiderastis rescribi quam regat unusquisque et gubernet, rationem sui ac-
hœc vobis et justam pariter ac necessariam sollicitu- tus Domino reddilurus; oportet utique eos quibus
dinem vestram, vel solatio, vel auxilio nostrœ sen- prœsumus non circumcursare, nec episcoporum concor-
tentiœ sublevari. Voilà ce qu'on écrivait d'Espagne ;
diam cohœrentem sua subdola et fallacii femeritate
el voici le principal do la réponse des évêques d'A- collidere, sed agere illic causam suum ubi et accusa-
frique : Diligenter de traditione divina et apostolica tores habere et testes sui criminis possint, nisi si pau-
observntionc servandum tenendum, quod apud
est et cis desperatis et perditis minor videtur esse auctoritas
nos quoque^ et fere per provmcias universas lenetur, episcoporum in Africa constilutorum, qui jarn de
,
crime a été commis, et où les coupables peu- 10. Voici ce qui se trouve 'de plus impor- Pur les é-
uiics.
vent avoir des accusateurs et des témoins de tant touchant chaque ordre de l'Eglise en
leurs crimes ', Le titre de pape n'était pas particulier, L'épiscopat est une dignité plus
alors particulier à l'évêque de Rome; le grande que la prêtrise * ; il est indivisible ^,
clergé de cette ville le donne à saint Cyprien répandu ' de tous côtés en plusieurs évoques
dans toutes ses lettres *. C'était pour les infé- qui sont tous unis ensemble, selon la tradi-
rieurs la manière ordinaire de qualifier les tion divine ; chaque évêque en possède soli-
évèques; mais, entre eux, les évêques ne dairement une portion * : c'est pourquoi Jé-
connaissaient guère de qualités que celles de sus-Christ dit dans l'Evangile qu'il n'y aura
frère ' ou de collègue. Par cette dernière seu- qu'un troupeau et qu'un pasteur. L'ordina-
lement ils se distinguaient de tous les autres tion des évêques est d'institution divine ';
clercs ou laïques *, qu'ils traitaient aussi de ils succèdent aux Apôtres »<> et sont ordonnés
frères. C'est ce qu'on peut remarquer dans en leur place; ils ne doivent rendre compte
toutes les lettres et autres écrits de saint de leur conduite qu'à Dieu *', chaque évêque
Cyprien. étant libre de se comporter *^ comme bon lui
illisjudicaverunt, et eorum conscientiam multis de- copatum quoque ipsum unum atque indivisum probe-
lidorum laqueis vùictam, judicii sui nuper gravitate mus. Cypr., de Unitat. Eccles., pag. 78.
damnarunt. Jam causa eorum cognita est: jam de eis ^
Cum sit a Christo una Ecclesia per iotum mun-
dicta sententia est, nec censurce congruit sacerdotum dum in multa membra divisa, item episcopatus unus
mobilis atque inconstantis animi levitate reprehendi, episcoporum multorum concordi numerositate diffusus;
cum Dominus doceat et dicat : sit sermo vester, est ille post Dei traditionem, post connexam et ubique
est, noDj non si eorum qui de illis priore anno judi-
; conjunctam catholicœ Ecclesiœ unitatem, humanam
caverunt, numerus cum presbyteris et diaconis compu- conetur Ecclesiam facere. Cypr., Epist. 55, pag. 249.
tetur, plures affuerunt judicio et cognitioni
tune * Episcopatus unus est, cujus a singulis in solidum
quam sunt iidem isti, qui cum Fortunato nunc viden- pars' tenetur... Monet ipse {Cliristus) in Evangelio
tur esse conjuncti. Cypr., Epist. 59, pag. 265. suo, et docet dicens : Et erit unus grcx et unus pas-
1 bonne dans bien des
Cette règle de procédure, tor. Cyprian., de Unit. EccL, pag. 79.
cas, peut être mauvaise dans d'autres elle a néces- : 9 Dominus noster cujus prœcepta metuere et obser-
sairement des exceptions. Dans le fait, les scbisma- vare debemus, episcopi honorem, et Ecclesiœ suœ ra-
tiques, dont saint Cyprien se plaint à son ami saint tionem disponens in Evangelio loquitur et dicit Petro:
Corneille, n'appelaient point; mais, sachant comme Ego tibi dico, quia tu es Petrus, etc. Inde per tem-
tout le monde que la chaire de Pierre était la porum et successionum vices, episcoporum ordinatio,
source de l'unité et de la légitimité sacerdotale, ils et Ecclesiœ ratio decurrit, ut Ecclesia super episco-
voulaient eu avoir des lettres de communion pour pos constituatur ; et omnis actus Ecclesiœ per eosdem
autoriser leur faux évêque. {L'éditeur.) prœpositos gubernetur. Cum hoc itaque divina lege
* CyprianuSj Epist. G7, pag. 289, Didicimus seces- fundatum sit, miror quosdam, audaci temeritate sic
sisse benedictum papam Cyprianum, a Clementio sub- tnihi scribere voluisse, ut Ecclesiœ nomine litteras
diacono ,
qui a vobis ad nos venit certa ex causa. Cle- facerent ;
quando Ecclesia in episcopo et clero, et in
rus Rom., apud Cypr., Epist. 8, pag. 179. [C'est saint omnibus stantibus sit constituta, Cypr., Epist. 33,
Grégoire VII qui a prescrit de ne donner le nom de pag. 216.
pape qu'aux évêques de Rome.] 10 Hoc enim vel maxime, frater, et laboramus et la-
* Cum de excessu boni viri collegœ mei (Fabiani) borare debemus, ut unitatem a Domino, et per Aposto-
rumor apud nos incertus esset, fratres charissimi, et los nobis successoribus traditam, quantum possumus
opinio dubia, nutaref , accepi a vobis litteras ad me obtinere curemus. Cypr., Epist. 45, pag. 232. Nec hœc
missas per Clementium ypodiaconum. Cypr., Epist. 9, jacto, sed dolens profero, cum te judicem Dei consti-
pag. 182. tuas et Christi, qui dicit ad Apostolos, ac per hoc ad
* Legi litteras tuas, frater charissime, quas per Sa- omnes prœpositos qui Apostolis vicaria ordinatione
turum fratrem nostrum acolytum misisti. Cyprian., succédant : Qui odit vos, me odit. Cypr., Epist. 65,
Epist. 59 ad Cornet., pag. 259; Cypr., Epist. 45, pag. 285.
pag. 231; Cyprian., Epist. 14, pag. 191 et 192. 11 Manente concordiœ vinculo, A persévérante catho-
^ Admonitos nos et instructos sciatis dignatione di- licœ Ecclesiœ individuo sacramento, actum suum dis-
vina, ut Numidicus prcsbyter adscribatur presbytero- ponit et dirigit unusquisque Episcopus, ratio?iem pro-
rum Carthaginensium numéro, et nobiscum sedeat in posai sui Domino redditurus. Cyprian., Epist. 65,
clern... et promovebitur quidem, cum Deus permiserit, pag. 248.
ad ampliorem locum religionis suœ quandn in prœsen- 1* Neque quisquam nostrum episcopum se episcopo-
tiam, protegente Domino, venerimus. Cypr., Epist. 40, rum constitua, aut tyrannico terrore ad obsequendi
pag. 225. Non iste (Cornélius) ad episcopatum subito necessitatem collegas suos adigit ;
quando habeat om-
pervertit, sed per umnia ecclesiastica officia promotus, nis episcopus pro licentia libertatis et potestatis suœ,
et in divinis administrationibus Dominum sœpe pro- arbitrium proprium; tanique judicari ab alio tion
m,eritus, ad sacerdotii sublime fastigium, cunctis reli- possit, quamnec ipse potest judicare. Sed expectemus
gionis gradïbus ascendit. Cypr., Epist, 55, pag. 243. universi judicium Domini nostri Jesu Christi, qui
6 Unitatem firmiter tenere et vindicare debemus, unus et solus habet potestatem, et prœponendi nos in
maxime episcopi, qui in Ecclesia prcssidemus, ut epis- Ecclesiœ. suœ gubernatione, et de actu nostro judi-
300 HISTOIRE GÉNÉIIALE DES AUÏEUUS ECCLÉSIASTIQUES.
scml)lc dans le î:;onvcrnoinciit de sou Eglise, en avoir deux dans une mémo Eglise. Après
sauf à rendre compte à Dieu de sa conduite; l'élection, on imposait les mains à celui
leur dignilc preuil sou origine de la tradition qu'on voulait ordonner évèque. Dès-lors il
des Apôtres et de l'Evangile *; c'est de Dieu ne lui était plus permis, si ce n'est par une
même qu'ils ont reçu la garde de leurs trou- raison particulière, d'abandonner son trou-
peaux *. LV'lection des évoques se faisait par peau, même pendant la persécution '. Les
ceux de la même province % en présence du autres devoirs des évêques, selon saint Cy-
clergé et du peuple , qui donnaient aussi prien, sont d'administrer leur Eglise, de con-
leurs suffrages; et, quand un évoque avait cert avec le clei-gé et le peuple ^; de pren-
été une fois élu et approuvé en cette ma- dre l(nir avis, même pour les ordinations des
nière, on n'on pouvait plus élire un autre * ; moindres clercs '; de s'informer de ceux qui,
car on était persuadé que c'est Dieu même '^
dans leur diocèse, sont les plus dignes d'ê-
qui fait les évêques, et que l'élection cano- tre promus aux fonctions ecclésiastiques, de
nique n'est qu^me déclaration de son juge- conférer des affaires de leurs Eglises '" avec
ment. On croyait encore ® qu'il ue pouvait y leurs métropolitains, de mépriser les vio-
candi. Cyprianus, pag. 158. Cela ne se doit oûten- possit, quisquis postunum qui solus esse debeat, fa-
dre que pour les questions qui ne sont pas encore ctus, non jam
secundus ille, sed nullus est. Gyprian.,
parfaitement éclaircies, dit saint Augustin Opinor : Epist. 55, pag. 243.
utique, in his quœstioniôus quœ nondurn cliquatissima ^ Quoniani
comperi, fratres charissimi, minus sim-
perfectione discussœ sunt. August., lib. 111 de Bapt., pliciter, et minus fideliter vobis renuntiari, quœ hic
cap. 3, pag. 110 tom. IX. [11 ue s'agit pas non plus a nobis et gesia sunt
geruntur, necessarium duxi
et
de questions de discipline sur lesquelles le Souve- lias ad vos litteras facere quibus vobis actus nostri et
rain-Pontife s'est formellement prononcé.] disciplitiœ et diligentiœ ratio redderetur. Nam sicut
* Si ad divinœ traditionis caput et originem rever- Domini mandata instruunt, orto statim turbationis
tamur, cessât en-or hunianus; et sacramentorum cœ- inipetu primo, cum me clamore violenio fréquenter
lestium 7-atione perspecta, quidquid stcb caligine ac populus futigasset, non tam meam salutem, quam
nube tencbrarum obscurum latcbat, in lucem veritatis quielem fratrum publicam cogitans, intérim secessi,
aperitur... Quod et nunc facere oportet Dei sacerdotes ne per inverecundam prœsentiam nostram, seditio quœ
jirœcepta divina servantes, ut si îh aliquo nutaverit et cœperat plus pi-ococaretur. Absens tamen corpore, nec
vacillaverit veritas, ad originem dominicam et evange- spiritu, nec actu, nec monitis meis defui ; quorninus
Hcam, et apostolicam tradilionem reveriamur, et inde secundum Domini prœcepta, fratribus 7iostris, in qui-
surgat actus nostri ratio, unde et ordo et origo sur- bus possem, mea mediocritate consulerem. Gyprian.,
rexit. Gypr., Epist. 74, pag. 317. Epist. 20, pag. 199.
* Quare in hune scrupulum non inciderunt de plèbe * Ad id vero quod scripserunt mihi compresbyteri
iita nostra quœ apud nos est, et nobis de Dei digna- nostri Donatus et Fortunatus, Novatus et Gordius,
tione commùsa est, tôt confessores quœstionati et solus rescribere nihil potui; quando a primo/dio
iorti? etc. Gyprian., Epist. 66, pag. 286. episcopatus mei statuerim nihil sine consilio veslro, et
3 Propter quod diligenter de traditione divina et sine consensu plebis, mea privalim sententia gerere ;
apostolica observatione servandum est et tenendum, sed cum ad vos per Dei gratium venero, tune de iis
lences des méchants ', de ne rien écrire si ce ont autorité sur d'autres évêques, tel qu'était
n'est avec beaucoup d'attention et d'exacti- saint Cyprien) ; de ne pas trop souffrir qu'on
tude *, dans les occasions surtout où ils ont qu'on leur doit ', et même
oublie- le respect
à se défendre contre la calomnie, se souve- d'excommunier ceux qui ne leur obéissent
nant de donner davantage à la modération pas en choses justes, car il leur est permis
qu'à la justice de leurs ressentiments ; de te- de venger le mépris qu'on fait de leur di-
nir la main ^ à ce que les pécheurs fassent gnité, par l'excommunication ou par la dé-
pénitence, de ne pas témoigner moins de position, puisqu'en méprisant les évêques,
charité à recevoir ceux qui reviennent à l'E- c'est Dieu même qu'on méprise. Le corps des
glise dans des sentiments d'humilité et de évêques est grand ^, et toutes ses parties
repentir *, que de fermeté à en repousser sont extrêmement liées et unies ensemble,
ceux qui veulent y rentrer comme par force, afin quelqu'un d'eux fait quelque hé-
que si
sans avoir fait aucune satisfaction de leurs résie et ravage le troupeau de Jésus-Christ
fautes; de veiller à la garde du troupeau que les autres viennent au secours. La marque
Dieu leur a confié, sans s'en éloigner ^, sinon qu'un évèque ne tient pas la vérité du Saint-
pour des raisons légitimes et de charité ; de Esprit, c'est quand il ne pense pas comme
ne pas casser ^ légèrement ce qu'un autre ses collègues; car, animés de cet esprit de
évêque a fait ( cela regarde les évoques qui Dieu, ils ne peuvent être d'un sentiment
plena fidei virtute tendebant, diutinis cruciatibus ex- tram corroborare. Sed quoniam sic rébus urgentibus
cidisse : nec tatnen post hune gravem lapsum non vo- detinemur, ut longe istinc excurrere , et diu a plèbe
luntate , sed necessitate susceptum , a pœnitentia cui de divina indulgentia prœsumus, abesse non detur
agenda per hoc triennium destitisse. De quitus co7isu- facultas, lias intérim pro me ad vos vicarias litteras
lendum putastis, an eos ad communicationern jam fas misi. Cyprian., Epist. 58, pag. 255.
esset admittere. Cypr., Epist. 56, pag. 251. '^
Legimus litteras tuas, frater charissime, quibus si-
1 Quod si ita res est, frater charissime, ut nequissi- gnifîcasti de Victore, quondam presbytero, quod ei, an-
moTum timeatur audacia , et quod malt Jure atque tequam pœnitentiam plenam egisset , et Domino Dec
aquitate non possunt , temeritate ac desperatione per- in quem deliquerat, satisfecisset, terrier e Terapius, col-
actum est de episcopatus vigore, et de Eccle-
ficiant, lega noster,immaturo tempore, et prœpropera fesii-
sice gubernandœ sublimi ac divina potestaie , ne chris- natione pacem dederit Sed librato apud nos diu
tiani ultra aut durare, aui esse jam
possumus, si ad consilio, salis fuit objurgare Terapium, collegum nos-
hoc ventum est, ut perditorum minas atque insidias trum, quod temere hoc fecerit, et instruxisse ne quid
pertimescamus, Cyprian., Epist. 59^ pag. 259. taie de cœtero faciut. Pacem tamen quomodocumque a
* Nec aune cum
nie oportet, frater charissime, paria sacerdote Dei semel dutam, non putavimus auferen-
illis quœ
facere, et eacommiserunt atque hucusque dam, ac per hoc Victor i communicationern sibi con-
committunt meo sermone decurrere ; cum consideran- cessam usurpare perrnisimus. Gyprianus, Epist. 64,
dum sit nobis quid proferre et scribere sacerdotes Dei pag. 279.
oporteat, nec tam dolor apud nos debeat, quam jmdor "^
Graviter et dolenter commoti sumus ego et col-
loqui : et ne videar provocatus, maledicta potius quam legœ, qui pressentes aderant ,
frater chainssime, lectis
crimina et peccata congerere. Cypr, Epist. 59, p. 264. litteris tuis quibus de diacono tuo conquesius es, quod
^ An putas, frater, levia esse adversus Deum faci- immemor sacerdotalis loci tui, et offidi ac ministerii
nora, parva et modica deiicta, quod per illos non ro- sut oblitus , contumeliis et injuriis suis exacer baver it.
gatur mu.jestas indignantis Dei? Quod non timetur ira Et tu quidem honorifice circa nos et pro solda tua
et ignis etdies Domini viderint laici hoc quomodo humilitate fccisti, ut malles de eo nobis conqueri, cum
curent; sacerdolibus labor major incumbit , in asse- pro episcopatus vigore et cathedrœ auctoritate, haberes
renda et procuranda Dei majestate, ne quid videamur potestatem qua passes de illo statim vindicari : certus
in hac parte negligere. Cyprian., Epist. 59, pag. 265. quod collèges tui omnes gratum haberemus quodcum-
* cum pœni-
.implector prompta et plena dilectione que circa diaconum tuum contumeliosum sacerdotali
tentia revertentes,peccatum suum satisfactione humili potestate fecisscs , habens circa hujusmodi homines
et simplici confdentes. Si qui autem sunt, qui putant prœcepta divina... ideo oportet diaconum de quo scri~
se ad Ecclesiam, non precibus, sed minis regredi possc, bis, agere audacice suce pœnitentiam , et honorem sa-
aut existimant aditum se sibi non lamentationibus et cerdotis agnoscere, et episcopo prœposito suo plena hu-
satlsfactionibus sed terroribus facere; pro certo ha-
, militate satisfacere Quod si ultra te contumeliis
beant , contra taies clausam stare Ecclesiam Domini, suis te exacerbaverit et provocaverit , fungeris circa
nec castra Christi invicta et fortia, et Domino tuente eum potestate honoris tui, ut eum vel deponas , vel
munita, minis céder e, Sacerdos Dei Evangelium te- abstineas. Cyprian., Epist. 3, pag. 172.
uens, et Christi prœcepta custodiens, occidi potest, non 8 Idcirco, frater charissime, copiosum corpus est sa--
potest Vinci. Ibid., pag. 267. cerdotum concordiœ mutuœ glutino atque unitutis
,
s Cogitaveram quidem, fratres dilectissimi, atque in vinculo copulatum, ut si quis ex collegio nostro hœre-
votis habebam, si rerum ratio ac temporis conditio sim facere, et gregem Christi lacerare et vastare ten-
permitteret secundum quod fréquenter desiderastis
, taverit, subveniant cœteri, et quasi pastores utiles et
ipse ad vos venire et quantulacumque mediocritate
, miséricordes, oves dominicas in gregem colligant. Cy-
fxhortationis nostrœ prœsens illic fralemilatem ves- prian,, Epist. 68, pag. 292.
M'I HISTOIRE GÉNr.RALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
différent les uns dos autres *, Les évêqucs Après que Jésus-rChrist monté au ciel, les
fut
s'écrivaient inutucllcment, pour marque
* Apôtres se choisirent des diacres ' pour être
de coumnuiion; c'est pourquoi, quand une les ministres de leur cpiscopat et de l'Eglise ;
Eglise en avait un nouveau, ils étaient atten- ainsi c'est l'évèque qui les fait ce qu'ils sont.
tifs ù s'informer de ce qui concernait sa per- Non-seulement les évoques, mais les prêtres
sonne et sa foi. Ils avaient coutume de s'as- avaient <lcs diacres, comme nous venons de
sembler ' tous les ans, après les fêtes de le remarquer, lis avaient soin de servir à
Pâques, pour régler en commun ce qui re- l'autel, de distribuer * l'eucharistie aux fi-
gardait le bien de l'Eglise. dèles; ils accompagnaient les prêtres * pour
Pur iM 1 1 Les prêtres avaient leurs diacres * pour
. le sacrifice dans les prisons ; ils adminis-
niiu-re.." les servir à l'autel; ils s'asseyaient avec l'é- traient *° les revenus de l'Eglise; au défaut
Ou voit, par ce des prêtres, ils imposaient les mains " aux pé-
""
cicicl. vêque * et jugeaient avec lui.
qui se passa au sujet du prêtre Numidique «, nitents et les réconciliaient. Ils avaient part
qu'il étc'iit permis à un évêque d'associer à aux jugements ecclésiastiques •*, et ils avaient
sou clergé un prêtre d'une autre Eglise, place dans les conciles, en Afrique et à Rome;
lute fuerit substitutus , ut sciamus ad queui fratres Meminisse diaconi debent quoniam Apostolos id
"^
,
nostros dirigere, et oui scribere debeamus. ibid. Nam est , episcopos et prœpositos Dominus elegit; diaconos
et pars Novatiani Maximum presbijterum nuper ad autem post ascensum Domini in cœlos, Apostoli sibi
nos a Nouatiano legatum missum, ulque a nostra com- constiluerunt ejnscopatus sui et Ecclcsiœ ministros.
municatione rejectum, nutic isthic sibi fecisse pseu- Cyprian., Epist. 3, pag. 173.
doepiscopum dicitur. Nec tamen de hoc tibi scripse- Cyprian., Tract, de Lnps., pag. 94. Le passage se
8
ram ; quando hœc omnia contcmnantur a nobis, et trouvera plus bas dans l'article sur l'Eucharistie.
miser im tibi proxime nomina episcoporum isthic con- » Consulite ergo et providete, ut cum temperamenlo
stitutorum, qui integri et sani in Ecclesia catholica hoc agi tutius possit, ita ut preshyteri quoque, qui
fratribus prœsunt. Quod utique ideo de omnium nos- illic apud confessores offerunt, singuli cum singulis
trorum consilio placuit scribere; ut erroris diluendi, diaconis per vices alternent : quia et mutafio perso-
ac perspiciendœ veritatis compendium fieret, et scires narum et vicissitudo convenientium minuit invidiam.
tu et col/egœ nostri, quibus scribere, et litleras mu- Cyprian., Epist. 5, pag. 176.
tuo a quibus vos accipere oporteret. Cypr., Epist. 59, 10 Dtdicimus Nicostratum diaconio sanctœ admi-
pag. 203. nistrationis amùso, ecclesiasticis pecuniis sacrilega
3 Persecutionis istius novissima hœc est et extrema viduarum ac pupillorum deposi.
fraude substractis, et
tentatio, quœ et ipsa cito Domino protegente transibit, tis denegatis non tam in Africam venire voluisse,
,
ut repraisenter vobis post Paschœ diem cum coUeyis quam conscientia rapinarum et criminum nefandorum
meis, quibus prœsentibus secundum arbitrium quoque illinc ab urbe fugisse. Cyprian., Epist. 52, pag. 237.
vestrum et omnium nostrum commune consilium, sicut U Occurrendum puto fratribus nostris, ut )jui libel-
scmel placuit, ea quœ agenda suid, disponere pariter las a murtyribus acceperunt , et prœrogativa eorum
et limare poterimus. Cyprian., Epist. 43, pag. 229. apud Deum adjuvari possunt, si incommoda aliquo et
Çuonium scripsistis, ut cum pluribus collegis de hoc infirmitatis periculo occupati fuerint, non expectata
mujus et
ipso plenissime tractent, et rcs tanla exigit prœsentia nostra, apud presbyterum quemcumque prœ-
impensius de multorum collatione consilium, et nunc senteni, vel si presbyter repertus non fuerit, et urgere
omnes fere mter Paschœ prima solemnia apud se cum exitus ccpperii, apud diaconum quoque, exomologesim
fratribus demoraniur ; quando solemniiati celebrandœ facere delicti sui possint, ut manu eis in pœnilentiam
apud suos satisfecerint , et ad me venire cœperint, imposita, veniant ad Dorniyium cum pace, quam dari
tractabo cum singulis plenius, ut de eo quod consu- martyres litteris ad nos factis desideraverunt. Cypr.,
luistis figatur apud nos et rescribatur vobis firma sen- Epist. 18, pag. Voyez dans l'analyse de cette
197.
tentia multorum sacerdotum consilio ponderata. Cy- Epître les éclaircissemeuts qu'on a donnés sur cet
prian., Epist. 56, pag. 251. endroit.
* Intègre et cum disciplina fecistis , fratres charis- 12 Si eorum qui de illis ( schismaticis
)
priorc anno
sinii, collegarum meorum qui prœscnles
quod concilio judicaverunt , nvmerus cum presbyteris et diaconis
erant, Gaio Diddensi presbytero, et diacono ejus, cen- computetur, plures tune ajfuerunt judicia et cogni-
suistis non communicandum, Cypriauus, Epist. 56, tiani, quam sunt iidem isti qui cum Fortunato nunc
pag. 217, videntur esse conjuncti. Cyprian., Epist. 59, pag. 267.
[111° SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 303
quelquefois même
gouvernaient les Egli- ils l'Eglisepouvaient aussi baptiser. Ce sacre-
ses Un diacre pouvait être déposé et ex-
*. ment est, selon saint Gyprien, la source de
communié * par son seul évêque. Saint Cy- toute la foi *", l'entrée à la vie éternelle et
prien fait souvent mention des sous-diacres ^, une grâce particulière que Dieu accorde à ses
des exorcistes *, des acolytes ^ aiusi que des serviteurs pour les purifier et leur donner la
lecteurs ^, et marque avec quelle exactitude vie. Tous les péchés contractés avant le bap-
on s'informait de leur vie et de leur capa- tême y sont effacés '' par ,1e sang de Jésus-
cité, avant de les engager dans le ministère Christ. Les enfants étaient admis au baptême
de rF.glise. Les lecteurs instruisaient les ca- aussitôt après leur naissance **, sans attendre
téchumènes ''
et lisaient l'Ecriture sainte *, lehuitième jour, parce qu'on était persuadé
même l'Evangile, dans l'église, au pupitre. que ceux qui mouraient sans baptême péris-
Le droit de conférer le baptême était,
12. saient éternellement ''; mais on n'y admet-
fi'eiiif nts «le
Hoi'tùmc cl pour l'ordinaire, réservé aux évêques ''; dans tait pas les adultes avant qu'ils ne donnassent
le lioiifir-
Diutiua. le cas de nécessité, les autres ministres de des marques de leur foi '*. Le baptême, pour
Cum in ununi Carthagini convenissent calendis sep- tuta, siquidem per nos baptisma tradetur intègre et
tembris episcopi plurimi ex provincia Africa Nuyii- , solemniter, et per omnia quœ scripta sunt adsignetur,
dia, Mauritania cum prcsbyteris et diaconibus, prœ-
, atque sine ullius rei separatione tradetur; aut si a
sente etiani plebù muxima parte, etc. Conc. Carthag. minore clerc per neccssitatem traditum fuerit, even-
apud Cypr., pag. 158. Rornce congregata est sijnodus tum expectemus, ut aut suppleatur a nobis, aut a Do-
in qua sexaginta quidem episcopi, presbyteri vero ac mino supplendum reservetur. Auctor. anonym., de
diaconi multo plures convenerunt. Eusob., lib. VI Bapt. hœret., apud Cyprian., tom. II, pag. 24.
**^ Neque
Hist., cap. 43, pag. 242. Eusèbe parle du concile enim parva res liœreticis et modica conce-
tenu à Rome daus l'affaire des novatiens, le même ditur, quando a nobis baptisma eorum in acceptum
dont il est fait mention dans saint Cyprien, Epist. 55, refertur ; cum inde incipiat omnis fidei origo, et ad
pag. 242. spem vitœ œternœ salutaris ingressio, et purificandis
1 On l'infère de la lettre 67, pag. 287, adressée ac vivificandis Dei servis divina dignatio. Cyprian.,
au prêtre Félix et au peuple de Léon et d'Astorga, Epist. 73, pag. 309.
et encore au diacre Lélie et au peuple de Mérida; 11 Loquitur in Scripturis divinis Spiritus Sanctus et
car il semble que, s'il y eût eu un prêtre dans cette dicit : Eleemosynis et fide delicta purgantur. Non
dernière Eglise, saint Cyprien lui aurait adressé sa utique illa delicta, quœ fuerant ante contracta, nam
lettre plutôt qu'à un diacre. Au reste, c'est un fait illa Christi sanguine et sanctificatione purgantur. Cy-
avéré que, daus l'ancienne Eglise, il y avait des dia- prian., tract, de Oper. et Eleemos., pag. 137. In aquœ
cres qui gouvernaient des Eglises, apparemment au baptismo accipitur peccatorum remissa , in sanguine
défaut de prêtres. Le concile d'Elvire parle de ces corona virtutum. Cyprian., Praef. de Exhort. mart.,
diacres daus le canon 77. Si quis diaconus regens pag. 118.
12 Quantum vero ad causam infantium pertinet, quos
plebem sine episcopo vel presbytero aliquos baptizave-
rit, episcopus eos per benediclionem perficere debebit. dixisti intra secundum vel tertium diem quo nati
Tom. I Conc. Labb., pag. 978. sint, constitutos, baptizari non oportere, et consideran-
2 Oportet diaconum, de que scribis, agere audaciœ dam esse legem circumcisionis antiquœ, ut intra octa-
suœ pœnitentiam, et honorem sacerdotis agnoscere, et vum diem eum qui nalus est baplizaiidum et sancUfl-
episcopo pi'œposito sua plena humilitate satisfacere... candum non pu tares : longe aliud iti concilio nostro
Quod si ultra te contumeliis suis exacerbaverit et omnibus visum est. In hoc enim quod tu putabas esse
provocaverit , fungeris circa eum potestate honoris tui, faciendum, nemo concessit, sed universi potius judica-
ut eum vel deponas, vel abstineas. Cyprian., Epist. 3, vimus, nulli hominum naio misericordiam Dei et gra-
pag. 173. iiam denegandam. Nam cum Dominus m Evangelio
3 Cypr., Epist. 29, pag. 208. — * Idem, Epist. 69, suo dicat : Filius hominis non venit animas homi-
p. 299.— 5 Id., Epist. 34, p. 217.— 6 id., Epist. 29. num perdere, sed salvare. Quantum in nobis est, si
J Opiatum inter lectores doctorem audientium cons- fieri potest, nul la anima jjerdenda est. Cyprianus,
tituimus. Ibid., pag. 209. Epist. 04, pag. 280. lieatus quidem Cyprianus non
Merebutur talis Aurelius) clericœ ordinationis
* { aliquod decretum condens novum, sed Ecclesiœ fidem
ulteriores gradus et incrementa majora, non de annis firmissimam servons, ad corrigendum eos qui pulabant
suis, sed de meritis œsiimandus ; sed intérim plaçait, ante octavum diem natinitatis non esse parvulum bap-
ut ab officio lectionis incipiat ; quia et nihil magis tizandum, non carnem, sed animam dixit non perden-
congruit voci quœ Dominum gloriosa jjrœdicatione dam, et mox natum rite baptizari passe cum suis qui-
confessa est, quam celebrundis divinis lectionibus pcr- busdam coepiscopis censuit. Augustinus, Epist. 166,
sonare : post verba sublimia quœ Christi martyrium pag. 593, tom. II.
prolocuta sunt, Evangelium Christi légère, unde mar- •3 Succendi et cremari alienigenas prœcinit Dominus,
tyres fiunt : ad pulpitum post catastam venire : illic id est, alienos a divino génère et profanas , spiritali-
audiium esse cum miraculo circumstantis populi, hic ter non renatos , nec Dei filios factos. Evadere enim
cum gaudio fraternitatis audiri. Cyprian., Epist. 38, eos solos passe qui renati, et signo Christi renati fue-
pag. 222. rint, alio in loco Deus loquitur. Cyprian., tract, ad
3 Cum salus noslra m baptismale spiritus quod ple- Demetr., pag. 134.
rumque cum baptismale aquœ conjunctus, sit consti- 1* Cœterum si homines impedire aliquid ad consecu-
30i HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
être bon, doit être doniu'' de toute la au nom paravant par l'évèque ', et Thuilc dont on
Trinité ', et non pas seiilemcjit au nom de oignait les l)aj)tisc.s, consacrée sur l'autel *
Jésiis-Chribt *. Ou renonçait au monde ', à par les actions de grâces. Ou plongeait dans
ses plaisirs et à ses pompes dans le baptême, l'eau ceux qu'on baptisait; mais ou se con-
"
parce qu'après avoir été régénéré par une tentait d'en arroser ceux (jue la maladie re-
secoude naissance *, on ne vit plus que pour tenait au lit, et (pielques-uns, pour cette rai-
Dieu. Le ministre^ demandait, entre autres son, les appelaient cliniques. Cette sorte de
choses , à celui qui devait être baptisé ', s'il baptême qui se donnait, soit par infusion,
croyait eu la vie éternelle et eu la rémission soit par aspersion, passait pour bon et vala-
des péchés par la saiute Eglise. Le baptême ble, (pioiqu'à Home on exclût de la cbirica-
était précédé d'exorcismes ; l'eau qu'on y "^
turc "^ ceux qui avaieut été baptisés de cette
employait devait être puriiiée et sanctifiée au- manière. Le ministre donnait le baiser uu
baptizaulcd eos in uomiiie Patris, et Tilii, et Spiritus qui baptizalur abluere. Cyprian., Epist. 70, pag. 300.
Saucti. Insinuât Trinitatem cujus sacramento gentes 8 Ungi quoque necesse est eum qui baptizatus sit, ut
baptizarentur. Cyprian., Epist. 73, pag. 307. accepta chrismate , id est, unctione , esse unctus Dei et
* Quomodo ergo quidam dicunt foris extra Eccle- hubere in se gratiam Christi possit ; porro autem Eu-
siam, imo et contra Ecclesiam , modo
nomine in charistia est unde baptizati unguntur, oleum in allari
Jesu Christi, ubicumque et quomodocumque gentdem sanctiftcatum. Cyprian., ibid., pag. 301.
baptizntum peccatorum consequi pusse;
remissionem 8 Quœsiisti, fili charissime, quid milti de illis vi-
quundo ipse Christus gentes baptizari jubeat in plena deatur, qui in infirmitate et languore gratiam Dei
et adunuta Trinitate? Cypriau ibid., pag. 311. , consequuntur, an habendi sint legitimi christiani, eo
* Cœterum quœcumque terrena sunt, in sœculo ac- qvod aqua salutari non loti sint, sed perfusi Nos
cepta, et hic cum sœculo remansura, tam contemni quantum concipit mediocritas nostra, œstimamus in
debent quam mundus ipse contemnitur cujus pompis nullo mutilari et debililari posse bénéficia divinu, nec
et deliciis jam lune renuntiuvimus, cum meliore trans- minus aliquid illic posse continyere ubi plena et Iota
gressu ad Deum venimus. Cypriau., de Habita virg., fide et dantis et sumentis accipiiur, quod de divinis
pag. 69. Sœculo renuntiaveramus cum baptizati su- rnuneribus hauritur. Neque enim sic in sacramento
mus : sed nunc vere renuntiavimus sœculo, quando salutari, delictorum contagia ut in lavacro carnali et
tentati et probati a Deo, nostra omnia relinquentes, sœculari sordes cutis et corporis abluuntur, ut aphro-
Dominum secuti sumus, et fide ac timoré ejus stamus nitris et cœleris quoque adjumentis , et solio et pis-
et vivimus. Cyprian., Epist. 13, pag. 190. cina opus sit, quibus ablui et mundari corpusculum
* Nam qui exposiia nativitate terrena spiritu re- posstt. Aliter pectus credenlis abluitur, aliter mens
créât i et renati sumus, nec jam rnundo, sed Deo vivi- hominis per fidei mérita mundatur. In sacramenlis
mus. Cyprian., tract, ad Demetr., pag. 134. salutaribus, necessitate cogente ^ Deo indulgentiam ,
" Quod si aliquis illud opponit, ut dicut eamdem suam largtente, totum credentibus conferunt divina
Novaiianum Icgem tenere quam Ecclesia calholica te- compcndia; nec quemquam rnovere débet, quod as-
neut, codem sgmboio quo et 7ios, buplizarc; eumdem pergi, vel perfundi videntur œgri , cum gratiam do-
nasse Deum Patrem, eumdem Filium Christum , eum- minicam consequuntur ; quando Scriptura sancia, per
Ezechielem prophctam loquatur et dicut : Et asper-
dem Spiritum Sanctum, ac propter lioc usurpare eicm
potestatem baptizandi posse, quod videatur in inter- gam super vos aquam muudam, etc... Unde apparet
rogalionc baptismi a Jiobis non discrepare sciât quis- ; aspersionem quoque aquœ, instar salutaris lavacri ob-
quis hoc opponendum putat, primum, non esse unam tinere;et quando hœc in Ecclesia fiant, ubi sit et
nobis et schismaticis symboli legem, neque eamdem in- dantis et accipientis fides, intégra stare omnia et con-
terrogati07ie>/i. Nam cum dicunt : Credis remissionem sumniori ac perfici posse màjestate Domini et fidei
peccatorum et vitam œternam per sanctam Ecclesiam ? veritaie. Cyprian., Epist. 69, pag. 297.
Mentiuntur in interrogalione quando non habeant Ec- 10 Cum egregius ille Ecclesiam Dei
vir (Novatianus)
reliquisset, in qua post susceptum baplismum, presby-
clesiam. Cyprian., Epist. 69, pag. 29G. Quoynodo bap-
tizans dare alteri remissam peccatorum potest, qui terii gradum fucrat consecutus, idque per gratiam
ipsesua peccata deponere extra Ecclesiam non poicst? episcopi qui, manus illiimponens, eum ad presbytero-
Sed et ipsa interrogatio quœ fit in buptismo, testis est rum ordinem evexii. Vui cum universus clerus, mul-
[m'" SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 3f)S
regard des enfonts. Outre le baptême de l'eau, aux Samaritains baptisés par le diacre Phi-
on en reconnaissait un autre, savoir, celui de lippe,il dit : « C'est ce qui se pratique encore
sang, pour les martyrs ^, baptême beaucoup maintenant parmi nous ^ ceux qui ont été :
plus grand ', plus puissant et plus illustre baptisés dans l'Eglise sont présentés ensuite
que celui de l'eau. On était aussi persuadé aux prélats et, par notre oraison et l'imposi-
,
que les catéchumènes qui mouraient avant tion de nos mains, ils reçoivent le Saint-Es-
d'avoir reçu le baptême *, étaient sauvés en prit et sont perfectionnés, c'est-à-dire confir-
vertu de leur foi, quoique, prévenus par la més par le sceau du Seigneur. » L'auteur
mort, ils n'eussent pu recevoir la consomma- anonyme qui a écrit sur la réitération du
qu'un auteur con-
tion de la grâce. C'est ce baptême, dit que, quand l'évêque baptisait ',
tique ex populo refragarenfui', eo quod non îiceret consequi possint, ne per alienam prœsumptionem in
quemquam ex iis qui urgente vi morbi in lectulo, pe- pristino errore manentes sine gratice consummatione
rinde ac clerum assumi : pos-
ille, pei^fusi fuissent, in moriantur. Firmil., apud Cypr., Epist. 75.
s Auctor auouym., apud Cypr.,
tulavit ah eis episcopus, ut hune solum ordinnri a se pag. 24, tom. II.
paterentur. Coniel. Pap., in Epist. ad Fab. Antioch.; Voyez son passage plus bas.
apud Euseb., lib. YI Hist., cap. 43, pag. 245. 6 llli qui in Samaria crediderant, ftde vera credi-
1 jVawi et quod vestigium infantis in primis partus derant, et intus in Ecclesia quœ una est, et cui soli
sui diebus constitutif mundum non esse dixisti , quod gratiam baptismi dare, et peccafa solvere permissum
unusquisque nostrum adhuc horreat exosculari nec , est, a rhilippo diacono, quem iidem
apostoli mise-
hoc putamus ad cœlestem gratiam dandam impedi- ront, baptizati erant quia legilimum et ec-
; et idcirco
mento esse oportere ; scriptum est enim : Omuia muuda clesiasticum baptismum consecuti fuerant, baptizari
suut mundis. Nec aliquis nostrum id débet liorrere, eos ultra non oportebat, sed tantummodo quod deerat,
quod Deus dignatus est facere. Nam etsi adhuc infans id a Petro et Joanne factum ut oraiione pro eis
est,
a partu novus est, non ita est tamen, ut quisquam il- habita, et manu imposita, invocaretur et infunderetur
lum in gratia danda, atque in puce facienda horrere super eos Spirifus Sanctus, quod nunc quoque apud
debeat osculari ; quando in osculo infantis unusquis- nos geritur, ut qui in Ecclesia baptizantur, prœpositis
que nostrum pro sua religione, ipsas adhuc récentes Ecclesiœ offeî-antur, et per nostram orationem ac ma-
Dei manus debeat cogiiure, quas in homine modo for- nus impositionem, Spiritum Sanctum consequantur, et
mato et recens nato quodamjuodo cxosculamur, quando signoculo dominico consummentur. Cypr., Epist. 73,
id quod Deus fecit amplectimur. Cyprian., Epist, G4, pag. 308. Quando omnis potestas et gratia in Ecclesia
pag. 281. constifuta sit, ubi prœsident majores natu, qui et
*Numquid potest vis baptismi esse major, aut po- baptizandi et manum imponcndi et ordinandi possi-
tierquam confessio, quam pussio, ut quis coram ho- dent potestatem. Hœretico enim sicut ordinare non li-
minibus Chnstum confiteatur, et sanguine suo bapti- cet, nec manum imponere, ita nec baptizare. Firmil.,
zetur? Et tamen neque hoc baptisma hœreticisprodest, Epist. 75, apud Cyprian., pag. 322.
quamvis Cliristum confessi et extra Ecclesiam fuerint ' Cum salus nostra in baptismale spiritus quod
Cypr., Epist. 73, pag. 312.
occisi. plerumque cum baptismale aquœ conjunctus , sit con-
3 Nos tantum qui Domino perfnitlente prinium bap- stituta, siquidem per nos baptisma fradetur, intè-
tisma credentibus dedimus, ad aliud quoque singulos gre et solemniter et per omnia quœ scripta sunt ad-
prœparemus, insinuantes et docentes hoc esse baptisma signetur, atque sine ulla illius rei seporatione trada-
in gratia majus, in potestate sublimius, in honore tur : aut si a mirtore clero per necessitatem traditum
pretiosius : baptisma in quo angeli baptizant ; bap- fuerit, eventum expectemus, aut ut suppleatur a no-
tisma in quo Deus et Christus ejus exultant ; baptis- bis, aut a Domino supplendum reservetur. Si vero ab
ma post quod nemo jum peccat ; baptisma quod fidei alienis traditum fuerit, ut potest, hoc negotium et ut
nostrœ incrementa consummat ; baptisma quod nos de admittit, corrigntur. Quia Spiritus Sanctus extra
mundo rccedentes statim Deo copulat. In aquœ bap- Ecclesiam non sit, fides quoque non solum apud hœ-
tisma accipitur peccatorum remissu, ia sanguinis co- reticos, verum etiam apud eos qui in schismate consti-
rona virtutum. Cyprian., Praef. de Exhort. martyr., tuti sunt, sana esse non possit. Idcirco quœ pœniten-
pag. H8. tiam agentibus correctisque per doctrinam veritatis et
* Quid ergo, inquiunt, de his qui ah hœreticis
fîet per fidem ipsorum, quœ p)Ostea emendata est, purifi-
venientes sine Ecclesiœ baptismo admissi sunt? Si de cato corde eorum tantummodo baptismale spiritali, id
sœculo excesserunt, in eorum nutnero qui apud nos est, manus impositione episcopi, et Spiritus Sancti
catechizati quidem sunt, sed priusquam baptizarentur, subministratione subveniri debeat ; signum quoque fidei
obierunt, habentur : non modo dicunt emolumentum integrum hoc modo et hac ratione tradi in Ecclesia
vcritatis et fidei ad quam, relicto errore, pervenerant merito consuevit; ne invocatio nominis Jesu quœ aho-
etsi consummat ionem grutiie consecuti non sunt, morte leri non potest, contemptui a nobis videatur habita.
prœventi. Qui auietn adhuc iti sœculo permanent, bap- Auctor anonym., de Baptis. hœret., apud Cyprian.,
tizentur Ecclesiœ baptismo, ut remissionem peccatorum pag. 24, tom. II.
:j66 HisToinr: gi'nérale des auteurs ecclésiastiques.
lion à l'(5vèquc, au drl'aiil duquel on croyait sus-Christ a offert du pain et du viû, savoir
l)ouvoir laisser à Diou d'y suppléer. son corps et son sang. C'est encore Jésus-
Pur 1 Tu- 13. Du temps de saint Cyprien, on célé- Christ que l'on ofTre * dans l'eucharistie, c'est
ebarittic.
brait • matin et le soir; mais
Teucharisfie le aussi son corps que l'on touche « dans la com-
il approuvait davantage la coulumc de la munion. Les prêtres oflfraiont tous les jours
célrbrcr le matin. Il ajipelle l'eurliaristie le roucliaristie ', et les chrétiens la recevaient
corps et le sanj; de Jésus-Christ *, et dit que tous les jours, s'ils n'en étaient empêchés par
c'est un sacrifice qui a succédé aux sacrifices quelque péché considéra])le, et buvaient tous
de l'ancienne loi '. Le sacrifice de Melchisé- les jours le calice du sang de Jésus-Christ '.
dech en était la figure *, et, comme lui, Jé- Ils recevaient l'eucharistie dans la main ',
* h'am si Jésus Chrisius Dominas et Deus noster sacramentum prœfiguralum videmus, secundum quod
ipse est sumnius sacerdos Dei Patris, et sacrificium Scriptura divina testatur et dicit : Et Molcliisedfich
Vairi seipsum privius obtulit, et hoc fieri in sui com- rci Salom protulit paiifin nt viuum. Fuit autem sa-
7)temorationem pracepit : utiqne ille sacci'dos vice cerdos Dei summi et bcnedixii Abraham. Quod autem
quod Christus fecit, imi-
Christi vere fiingitur, qui id Melchisedech typum Christi portaret, déclarât in Psal-
tatur : et sacrificium verum
plénum iunc offert in et mis Spirifus Sanctus, ex pcrsona Patris ad Fi.livm
Ecclesia Deo Patri, si sic incijjiat offerre, secundum dicens : Ante luciferum genui te lu es sacerdos in :
quod ipsum Christum videat obtulisse. Cœierum omnis œlernum secundum ordinem Melcliisedech, Quiordo
re/iijionis et veritatis disciplina subvertitur, nisi id utique hic est de sacrificio illo veniens et inde descen-
quod spiritafiter prœcipitur, et fideliter reservelur ;
dens, quod Melchisedech sacerdos sutnmi Dei fuit,
nisi in sacrificiis matutinis, hoc quis veretur, ne per quod panem et vinum obtuUt, quod Abraham bene-
saporem vini redoleat sanguittem Christi. Sic ergo in- dixit. Nam quis magis sacerdos Dei summi quam Do-
cipit eta passione Christi in perseculionibus frater- minus noster Jésus Christus, qui sacrificium Deo Patri
nitas retardari, dum in oblationibus discit de san- obtulit, et obtulit hoc idem quod Melchisedech obtule-
guine ejus et cruore confundi.... An illa sibi aliquis rat, id est, panem et vitium, suum scilicet corpus et
mane aqua sola
contemplafione blanditur, quod elsi sanguinem ? Cypr., Epist. 63, pag. 277.
offerri videtur, tamen cum ad cœnandum venimus, " Idem, Epist. 63, ubi supr., pag. 281.
mixtum calicem offei-imus : sed cum cœnamus, ad * Cœtcrum quale delictum est vel illorum qui ad-
convivium nostrum plebem convocare non possumus, ut mittuntur, vel eorum qui admiftunt, ut non ablutis
sacramenti veritaiem fraternitate omni pressente cele- per Ecclesiœ lavacrum sordibus, nec peccatis expositis,
bremus. At enim non mane, sed post cœnam mixtum usurpaia temere communicaiione, contingant corpus et
calicem obtulit Dominus. Numquid ergo dominicum sanguinem Domini. Firmil., ap, Cypr., Ep. 85, p. 326.
post cœnam cclebrare debemus ? Ut sic mixtum cali- Ut sacerdotes qui sacrificia Dei quotidie celebramus,
''
cem frequentandis dominicis offeramus ? Christum of- hoslias Deo et victimas p/rœparemus. Cypr., Ejnst. 57,
ferre oportebat circa vesperam diei, ut hora ipsa sa- pag. 253.
occasum et vesperam mundi
crificii ostenderet nos * Nam panis vitœ Christus est, et panis hic omnium
autem resurrectionetn Domini mane celebramus. Et non est, sed noster est : et quomodo dicimus Pater
quia passionis ejus mentionem in sacrificiis omnibus noster, quia intelligentiurn et credentium Pater est, sic
facimus, passio est enim Domini sacrificium quod of- et panem nostrum vocamus, quia Christus noster qui
ferimus, nihil aliud quam quod ille fecit, facere de- corpus ejus contingimus, panis est. Hune autem panem
bemus. Cypr., Epist. G3, pag. 281. duri nobis quotidie postulamus, ne qui in Christo su-
^ At vero yiunc non infirmis, sed fortibus pax neces- mus, et eucharistiam quotidie ad cibum salutis accipi-
saria. est, nec morientibus, sed viventibus communica- mus, intercedente aliquo graviore delicto, dum abstenti
tio a nobis danda est, ut quos excitamus et Itortamur et non communicantes a cœlesti jjane prohibemur, a
ad prœlium, non inermes et nudos relinquamus, sed Christi corpore separemur; ipso prœdicante et monente
protectione sanguinis et corporis Christi muniamus; Joan. VI, 51. Ego sum panis vitae qui de cœlo des-
et cum ad hoc fiât eucharistia ut possit accipientibus cend!. Si quis ederit de meo pane vivet in œter-
esse tutela, quos tutos esse contraadversarium volui- num. Quando ergo dicit in œternum vivere, si quis
mus, niunimento dominicœ saturitatis armemus. Nam ederit de ejus pane; ut manifestum est eos vivere qui
quomodo docemus aut provocamus eos in confessione coipus ejus atfinyunt, et eucharistiam jure communi-
nominis sanguinem suum fundere, si eis militaturis cationis accipiunt : ita contra timendum est et oran-
Christi sanguinem denegamus ? Aut quomodo ad mar- dum, ne dum quis abstentus separatur a Christi cor-
tyrii poculum idoneos facimus, si non eos prius ad pore, procul remaneat a salute. Cypr., de Orat. dom.,
hibendum in Ecclesia poculum Domini Jure communi- pag. 104. Gravior nunc et ferocior pugna imminet, ad
cationis admittimus? Cyprian., Epist. 61, pag. 253. quam fide incorrupAa et virtute robusta parare se de-
* Nam si Jésus Christus Dominus et Deus noster ipse bent milites Christi, considérantes idcirco se quotidie
est summus sacerdos Dei Patris, et sacrificium Patri calicem sanguinis Christi bibere, ut possint et ipsi
seipsum primus obtulit, et hoc fieri in sui commemo- jjropter Christum sanguinem fundere. Cypr., Epist. &S,
rationem prœcepit : utique ille sacerdos vice Christi pag. 255.
vere fungitur, qui id quod Christus fecit, imilatur; * Tumens animussvperbus , nec quia victus est,
et
et sacrificium veru7n et plénum tune offeit in Ecclesia fractus est. et integris vulneratus mi-
Jacens stantibus
Deo Patri, si sic incipiut offerre, secundum quod ipjsum natur ; et quod non statim Domini corpus inquinatis
Christum videat obtulisse. Cypr., Epist. 63, pag. 281. manibus accipiat, aut ore polluto Domini sanguinem
* Hem in sacerdote Melchisedech sacrificii dominici bibat, sacerdotibus sacrilegus irasdtur. Cypr., lib. de
[lll^ SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 3G7
avec crainte et respect *, et remportaient plus âgée, qui avait commis ce crime, s'ctant
dans leurs maisons ^, pour y participer en présentée pour recevoir l'eucharistie '', le sang
particulier et sous la seule espèce du pain. On du Seigneur demeura entre son gosier et son
la donnait même aux enfants ^, que l'on ne estomac, en sorte qu'après plusieurs tremble-
faisait point difficulté alors d'admettre aux ments et convulsions, elle tomba morte sur
assemblées où l'on célébrait les divins mys- la place.Une femme ayant ouvert, avec des
tères; mais il fallait être vivant *, c'est-à-dire mains impures, l'armoire où elle avait mis le
saint et d'une vie pure, pour y participer. Saint du Seigneur », il en sortit une flamme
Saint Cyprien rapporte, comme témoin ocu- qui l'empêcha d'y toucher. Un homme, souillé
laire s, plusieurs miracles et punitions exem- par des sacrifices profanes, ayant eu la har-
plaires de quelques personnes qui avaient diesse ^, après la célébration des mystères,
reçu indignement le corps et le sang du Sei- d'en prendre sa part avec les autres, ne put
gneur. Une jeune enfant à la mamelle '^, qui manger ni manier le Saint du Seigneur, et
avait mangé du pain trempé dans du vin trouva qu'il n'avait que de la cendre dans la
consacré aux idoles, ayant ensuite reçu des main. Aussi n'accordait-on l'eucharistie à ces
mains du diacre le sacrement du calice, l'eu- sortesde pécheurs coupables de grands cri-
charistie ne put demeurer dans ce corps et mes, qu'après qu'ils en avaient fait une légi-
dans cette bouche infectés; le cœur de l'en- time pénitence '", et après qu'on avait donné
fant se souleva, et elle vomit aussitôt. Une fdle à leurs plaies, comme s'exprime le clergé ro-
Laps., pag. 93. Muniaturos ut Dominum suum Chris- * Gyprian., lib. de Orat. dom., pag. 104, ubi supra.
tum victrix Armemus et dexteram
lingua fateatur. ^ Gyprian., lib. de Laps., pag. 94, ubi supra.
gladio spiritali, ut sacrificia funesta fortiter respuat, « Ibid.
et eucharistiœ memor, quœ Domini corpus accepit, ip- "^
At vero ea quœ œtate provecta et in annis adul-
sum complectatur, posfea a Domino sumptura prce- tioribus constitula, sacrificantibus nobis latenter obrep-
mium cœlestium coronarum. Cypr., Epist. 58, p. 258. sit, non cibum, sed gladium sibi sumens et velut quœ-
1 Cum timoré et honore eucharistiam accipiendam. dam venena lethalia, inter fauces et pectus admittens,
I ad Cor. ii. Quicumque ederit panem aut bibfrit angi, et anima exœstuatite, concludi postmodum cœpit,
calicem Domini indigue, etc. Cypr., lib. III Teslim., et pressuram non jam persecutionis , sed delicti sui
cap. 94^ pag. 63. passa palpitans et tremens concidit. Impunitum diu
* Cum quœdam arcam siiam in qua Domini sanc- non fuit nec occultum dissimulatœ conscientiœ crimen:
ium fuit, manibus indignis te?itasset aperire, igné quœ fefellerat hominem , Deum sensit ultorem. Ibid.
inde surgente, deterrita est, ne auderet attingere. 8 Ibid., ubi supra.
Cypr., lib.de Laps., pag. 94. At alius qui et ipse maculatus sacrifîcio a sacer-
3
3 Prœsente ac teste tne ipso, accipite quid advenerit. dote celebrato, partem cum cœteris ausus est latenter
Parentes forte fugientes, dum trepidi minus suis con- accipere , Sanctum Domini edere, et contrectare non
sulunt, sub nutricis alimenta parvulam filiam reli- potuit, cinerem ferre se apertis manibus invenit. Do-
querunt; relictam nutrix detulit ad mngistratus. llli cum.ento unius ostensum est, Dominum recedere cum
ei apud idolum quo populus confluebat, quod carnem negatur, nec immerentibus ad salutem prodesse quod
necdum posset edere per œtatem, panem mero mix- sumitur, quando gratia salutaris in cinerem, sancti-
tum, quod tamen et ipsum de immolatione pereiin- tate fugiente , mutetur. Gypr., lib. de Laps., pag. 94.
tium supererat, tradiderunt. Recepit filiam postmodum '<>
A ad Sanctum Domini
diaboli aris revertentes ,
mater, sed facinus puella commissum tam loqui et sordidis et infectis nidore manibus accedunt. Mortife-
indicare non potuit, quam nec intelligere prius potuit, ros idolorum c.ibos adhuc pêne ructantes, exhalantibus
nec arcere. Ignoratione igitur obreptnm est ut sacrif.- etiam nunc scelns suum faucibus , et contagia funesta
cantibus nobis eam secum mater inferret. Sed enim Domini corpus invadunt : quando occur-
redolentibus,
puella mixta cum sanctis, précis nostrœ et orationis rat Scriptura dioina et dicat : Ouinis mundus man-
impatiens, nunc ploratu concuti, nunc mentis œstu, ducabit carnem anima qusecumque manducaverit
;
cœpit fluctuabunda jactari, et velut tortore cogente, ex carne sacrificii salutaris, quod est Domini, im-
quibus poterat indiciis conscientiam facti in simplici- muuditia ejus super ipsum est; peribit anima illa de
bus adhuc annis rudis anima fatebatur. Ubi vero so- populo suo. Apostolus item dixit : Non potestis cali-
lemnibus adimpletis, calicem diaconus offerre prœsen- cem Domini bibere et calicem daemouiorum : non
tibus cœpit, et accipientibus cœteris, locus ejus advenit, potestis mensae Domini communicare et mensœ dae-
faciem suatn parvula instinctu divinœ majestatis mouiorum. Idem et conlumacibus et pervicacibus com-
avertere, os labiis obturantibus premere, calicem re- minatur : Quicumque ederit panem, etc. Spretis his
cusare. Perstifittamen diaconus, et reluctanti licet omnibus atque contcmptis, vis infertur corpori ejus et
de sacramento calicis infudit. Tune sequitur singitltus sanguini : et plus modo in Dominum manibus atque
et vomitus in corpore atque are violato, eucharistia ore delinquunt, quam cum Dominum negaverunt. Ante
permanere non potuit. Sanctiflcatus in Domini san- expiata delicta, ante exomologesim factam criminis,
guine potus, de pollutis visceribus erupit : tanta est ante purgatam conscientiam , sacrificio et manu sacev'
potestas Domini, tanta majestas! Hoc circa infantem dotis; ante offensam placatam indignantis Domini et
quœ ad eloquendum alienum circa se crimen , necdum minantis , pacem putant esse quam quidam verbis fal-
Itabuit œtatem. Cypr., lib. de Laps., pag. 94. lacibus venditant. Non est pax illa, sed bellum, «ec
,
et leslarmes de ces pécheurs, en cette extré- Saint Cyprien se sert ' souvent du mot d'au-
mité, étaient moins l'effet d'un repentir sin- tel pour marquer la table sur laquelle on
cère que celui de la crainte de la mort. Tout offrait le sacrifice du Seigneur; il dit qu'on
cela était alors d'une discipline rigoureuse le célébrait même dans les prisons des con-
et sévère, qui n'ôtait pas à l'Eglise le pouvoir fesseurs 8. C'était dès-lors la coutume que,
qu'elle a toujourseu de remettre les plus dans la célébration des mystères, le prêtre
grands péchés à ceux qui étaient suffisam- préparât les fidèles par une préface à élever
ment disposés pour en recevoir l'absolution. leurs cœurs vers Dieu '.
Ecclesiœ jungUur qui ab Evanr/elio separafur. Cypr., teneatur, veriiatis luce pers]iecfa, ad radicem atque
lib. de Laps., pag. 92. Absit enim ab Ecclesin romana originem traditionis dominicœ reverfatur...: Admoni-
vigorem suuni tam profana facilitate dimittere , et tos autem nos scias, ut in calice offerendo, dominica
nervos severitatis eversa fidei niaj'esfate dissolvere ; ut traditio servetur, neque aliud fiât a nobis quam quod
cum ad/iuc non tantum juceant, sed et codant everso- pro nobis Dominus prior fecerit : ut calix qui in com-
rum fratrum ruinœ. properata nimis remédia commu- memoratione ejus offeriur, mixtus vino offeratur. Cy-
nicationurn utique non profufura prœstenlur, et nova prian., Epist. 63, pag. 276.
per miser icordiam falsam veinera veteribus transgres- * Sic autem in sanctificando calice Domini oflerri
sionis vulneribus imprimantur, ut miseris ad eversio- aqua solanon potest, quomodo nec vinum solum po-
nem majorem eripiatur et pœnitentia. Ubi enim pote- test ; nam si vinum tantum quis offerat, sanguis
rit indulgentiœ medicina procedere, si etiam ipse Christi incipit esse sine nobis: si vero aqua sit sola,
medicus intercepta pœnitentia indulget periculis? Si plebs incipit esse sine Cluisto: quando autem utrum-
tantummodo operit vulnus, nec sinit necessaria tempo- que miscetur, et adunatione confusa sibi invicem co-
ris remédia obducere cicatricem ? Hoc non est curare, pulatur, tune sacramentum spiritale et cwleste perfi-
sed si dicere verum volumus, occidere. Clerus Rom., citur. Ibid., pag. 280.
Epist. 30, apud Cyprian., pag. 210. Qua in parte invenimus calicem mixtum fuisse
'
1 Non ea quce sanorum sunt corporum, medicus quem Dominus obtidit, et vinum fuisse quod sangui-
œgris dabit, ne importutiis cibis tempestatem valetu- nem suum dixit. Unde apparet, sanguinem Christi
dinis sœvieniis non reprimat, sed accendal. Apud Cy- non offerri, si desit vmum calici; nec sacrificium do-
prian., Epist. 31, pag. 214. minicum légitima sanctificatione celebrari, nisi obla-
2 Idcirco, frater c/tarissime, pœnitentiam non agen- tio et sacrificium nostrum responderit Passioni. Ibid.,
tcs, née dolorem delictorum suorum tofo corde, et ma- pag. 279.
nifesta lamentationis suce professione testantes, pro/ti- 6 Ibid., pag. 280, ubi supra.
bendos omnino censuimus a spe communicationis et Porro autem euc/iaristia est unde baptizati un-
'
pacis, si in infirmdaie atque in periculo cœperint de- guntur, oleum in altari sanctificaium. Sanctificare
precari; quia rogare illos non delicti pœnitentia, sed autem non potuit olei creaturam qui nec allare habuit,
inoriis urgentis admonitio compellit nec dignus est , nec Ecclesiam. Cypr., Epist. 70, pag. 301.
in morte accipere solatium qui se non cogitavit esse 8 Consulite ergo et providete, ut cum temperamento
morilurum. Cyprian., Epist. 55, pag. 248. hoc agi tutius possit: ila ut presbgteri quoque qui il-
3 Quoniam quidam vel ignoranter, vel simplicifcr in lie apud confessores offerunt, singuli cum singulis
calice dominico sancti/icando et piebi ministrando diaconis per vices alternent. Cyprian., Epist. 5,
non hoc faciunt quod Jésus Chrisfus Dominus et
, pag. 176.
Deus noster, sacrificii hujus auctor et doctor fecit et 9 Ideo sacerdos ante orationem, pn'œfatione prce-
docuii ; religiosum pariter ac necessarium duxi , lias missa, parât fratrum mentes dicendo : Sursum corda,
ad vos liiteras facere, ut si quis in islo errore adhuc ut dum respondet plebs: Habemus ad Dominum,
[m* siÈci-E.l CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 360
14.. On n'offrait pas à l'autel les noms des les autres, avait mis à couvert sa femme, ses
pénitents. ' Or, l'idolâtrie et le renoncement enfants, toute sa maison ; entre celui qui
à la foi n'étaient pas les seuls crimes qui avait poussé ses hôtes ou ses amis à apos-
fussent soumis à la pénitence canonique : on tasier et celui qui leur avait épargné cette
y soumettait de moindres péchés ^, c'est-ù- impiété et qui avait même donné retraite
dire ceux qui ne se commettent pas direc- chez lui à plusieurs frères bannis ou fugitifs
tement contre Dieu, comme Thomicide et pour la foi, offrant à Dieu tant d'âmes saines
l'adultère y avait aussi un juste es-
; et il et vivantes, afin d'intercéder pour une seule
pace de temps pour cette pénitence, qui était âme malade et blessée. On réconciliait ceux-
accompagnée d'exomologèses ou confessions ci après un terme assez court *, comme qua-
et examens, et finissait par l'imposition des treou cinq années ou environ de pénitence;
mains de Tévêque et du clergé. Cependant mais les autres n'avaient d'absolution à at-
les premiers, comme les plus grands et les tendre qu'à la mort,si ce n'est que, profitant
plus énormes, étaient censés exiger plus de d'une seconde occasion pour confesser la foi
précautions et de vigueur de la part de ceux qu'ils avaient renoncée, ils méritassent sur-
qui étaient chargés du maintien de la disci- le-champ que l'Eglise ' oubliât leur faute et
pline.Seulement on croyait devoir mettre des leur rendit sa communion, ou qu'après avoir
différences entre celui, par exemple, qui d'a- été absous le danger de mort ^, ils re-
pour
bord s'était offert volontairement pour im- vinssent en santé, auquel cas on ne les remet-
moler aux faux dieux ^, et celui qui, après tait pas de nouveau en pénitence. Si l'on se
avoir combattu et résisté longtemps, s'était permettait ces distinctions à l'égard de ceux
enfin laissé aller; entre celui qui s'était pros- mêmes qui avaient sacrifié, à plus forte rai-
titué à ces sacrifices abominables avec les son croyait-on devoir séparer la cause des
siens, et celui qui, s 'exposant au danger pour libellatiques ; et on voit que '
saint Cyprien
admoneatur nihil aliud se quam Dominum cogitare quando inter ipsos etiam qui sacrificaverint, et con-
debere. Gypr., de Orat. dom., pag. 107. ditio fréquenter et causa diversa sit; neque enim
1 Nam cum in minoribus peccatis agant peccatores œquandi suni, ille qui ad sacrificium nefandum, sta-
pœnilentiam justo tempore, et secundum disciplina: tim voluntate prosilivit, et qui reluclatus et congres-
Qvdinem ad exomologesini veniant, et per manus im- sus diu ad hoc funestum opus necessitate pervenit:
positionem episcopi et cleri, jus conimunicationis acci- ille qui et se et omnes suos prodidit, et qui ipse pro
piant : nunc crudo tempore, persecutione adhuc per- cunctis ad discrinien accedens, uxorem et libéras et
pax datur, necesse sit mori eos qui pacem acceperint: versitas, quœ inclementia est, et quam acerba duritia,
cum mugis in hoc judicium divinœ pietutis et paternœ Itbellaticos cum iis qui sacrificaverint conjungere I
lenitatis appareat ; quod qui pignus vitœ in data pace Ideo placuit, frater charissime, examinatis causis sin-
percipiunt , hic quoque ad vitam percepta pace ienean- gulorum , libellaticos intérim admitti , sacrificatis in
tur. Et idcirco si accepta pace, commeaius a Deo exitu subveniri, quia exomologesis apud inferos non
datur, nemo hoc débet in sacerdotibus criminari, cum est, nec ad pœnitentiam quis a nobis compelli potest,
semel placuerit frutribus in periculo subveniri. Nec si fructus pœnilentiœ subtrahatur, Gypriau,, Epist. 55,
tu existimes, fruter charissime, sicut quibusdam vide- pag. 245.
tur, libellaticos cum sacrificatis cequari oportere,
II. U
,
* Si quis immoderatus
prœceps, sive de nostiiset tectio reduces ad Ecclesiam suam fecerit ; hi, sublafo
presbyteris , vel diaconibus, sive de peregrinis
ausus , honore quem nobis beati martyres cum confessoribus
fuerit ante sententiam nostram commumcare cuin lap- servant, contempla Domitii lege et observutione, quam
sis , a communicatione nostra avceatw, apud omnes iidem martyres et confessores tenendam mandant, ante
nos causam dicturus temeritatis suœ, quando in unum, extinctum persecutionis metum, ante reditum nostrum,
permittente Domino, convenerimus. Gypr., Epist. 34, ante ipsum pefie martyrum excessum, communicent
pag. 217. cum lapsis et offerant, et eucharistiam tradant. Gy-
* Cumcomperissem eos qui sacrilegis contactibus prian., Epàt. IG, pag. 193.
manus suas atque ora maculassent vel nefandis libel- , ^ Fecerunt ad nos de quibusdam beati litteras,
lis mhilominus conscientiam polluissent, exambire ad petentes examinari desideria sua ; cum pace nobis
martyres passim, confess07'es quoque importuna et gra- omnibus a Domino prius data, ad Ecclesiam regredi
tiosa deprecatione corrumpere, ut sine ullo discrimine coeperimus, examinabuntur singula, prœsentibus et
atque examine singulorum darentur quotidie libello- , judicantibus vobis. Gypr., Epist. 17 ad plehem suam,
rum millia contra Evangelii legem ; litteras feci qui- pag. 196.
tus martyres et confessores concilio meo quantum 8 Nam cum in minoribus peccatis agant peccatores
posseni ad dominica prœccpta rcvocarem. Cyprianus, pjcenitentiam jusio tempore, et secundum disciplina
Epist. 20, pag. 199. Sed et illud ad diligentiam ves- ordinem ad exomologesim veniant , et per manus im-
tram redigere et emendare debetis ut nominatim de- , positionem episcopi et clcri jus communicationis acci-
signetis eos quibus pacem dari desideralis ; audio piant : nunc crudo tempore, persecutione adhuc persé-
enirn quibusdam sic libellas fieri , ut dicatur : com- vérante, nondum restituta Ecclesiœ pace, ad commu-
municet ille cum suis. Quod nunquam omnino a mar- nionem admittuutur, et ofjertur nomen eorum, et,
ttjribus factum est, ut incerla et cœca petit lo invi- pœnitentia nondum acta, nundum exomologesi facta,
diam nobis postmodurn cumulef. Late enirn palet, nondum manu eis ab episcopo et clero imposita, eu-
quando dicitur : Ille cum suis, et possunt nobis viceni charistia illis dalur, cum scriptum sit Qui edei'it :
et triceni, et amplius offerri, qui jjropinqui et affines, panem indigae, etc. Gyprian., Epist. 16 ad Cler.,
et liberli ac domeslici esse asseverentur ejus qui acci- pag. 195.
pit libellum; et ideo peto ut eos quos ipsi videlis f Et ideo peto ut eos quos ipsi videtis, quos nostis,
quos nostis, quorum pœnitentiam satisfactioni proxi- quorum pœnitentiam satisfactioni proximam conspici-
mam conspicitis , designetis nominatim libello, et sic tis, designatis nominatim libello, et sic ad nos fidei
ad nos ftdei ac disciplinée congruentes litteras diriga- ac disciplinœ congruentes litteras dirigatis. Gyprian.,
tis. Gyprian., Epiist. 15, pag. 194. Epist. 15, pag.. 194.
3 Si dandam pacem martyres putaverunt, cur
illis 8 Cum videamus diem rursus alterius infestationis
ipsi non dederunt? Cur illos ad episcopum, ut ipsi di- appropinquare cœpisse, et crebris atque assiduis osten-
cunt, remittendos consueverunt ? Is enirn qui jubet sionibus admoneamur, ut ad ceriamen quod nobis
fieri, potest utique facere, quod fieri jubet. Sed ut in- hostis indicit , armati et parati simus ; plehem etiam
telligimus, imo ut res ipsa loquitur et clamât, sanc- nobis de divina dignatione commissam , exhortât ioni-
tissimi martyres utrobique adlnbendum putaverunt bus nostris paremus, et omnes omnino milites Chi-isti
temperamentum et pudoris et veritatis. Nam et quia qui arma dcsiderant, et prœliuni flagitant , intra cas-
a multis urgebantur, dum ad episcopum illos remit- tra dominica colligamus : necessitate cogente censui-
tunt, verecundiœ fjropriœ , ne ulterius inquietarentur, mus , eis qui de Ecclesia Domini non recesserunt sed ,
consulendum putaverunt : et dum illis non ipsi com- pœnitentiam agere et lamentari ac Dominum depre-
,
municant, evangelicœ legis illibatam sinceritatem eus- cari a primo lapsus sui die non destiterunt , pacem
todiendam judicaicrunt. Cler. Rom., Epist. ad Cy- dandam esse; et eos ad prœlium quod imminet armari
prian., apud eumd. 36. pag. 219. et instrui oportere. Obtemperandum est namque osten-
* Exponunt invidiœ beatos martyres , et gloriosos sionibus atque admonitionibus justis ut a pastoribus
, ,
servos Dei cum Dei sacerdote committunt , et cum illi oves in periculo non deserantur, sed grex omnis in
memores loci nostri, ad me litteras direxerint, et /je- unum congregetur, et exercitus Domini ad ccrtamen
tierint tune desideria sua examinari et pacem dari, militiœ cœlestis armetur. Merito enim trahebatur do-
quando ipsa ante mater nostra Ecclesia, pacem de mi- lentium pœnitentia tempore longiore, ut infirmis in
sericordia Domini prior sumpserit, et nos divina pro' exitu subveniretur, quamdiu quies et tranquillitas
,
sans l'abandonner pour tomber ni dans une de les réduire à la communion et à l'état des
vie païenne et séculière, ni dans le sebisme laïques. On imposait les mains pour pénitence
et l'hérésie, promettaient de combattre géné- à ceux qui revenaient du schisme ou de l'hé-
reusement pour le nom du Seigneur et pour résie '. Enfin on se confessait aux prêtres
leur salut. Les évêques et les autres minis- des péchés même de pensée *, et on en faisait
ou même
tres de l'Eglise qui avaient sacrifié pénitence. Les maximes de saint Cyprien sur
témoigné par des billets qu'ils l'avaient fait, la pénitence sont celles-ci : il faut instruire
étaient admis comme les autres à la péni- ceux que l'ignorance ou l'empressement
tence *, mais ils étaient absolument exclus porte à vouloir être absous avant le temps ;
du sacerdoce et des fonctions ecclésiastiques, elle doit renfermer le repentir ^ des offenses
et on ne pouvait leur accorder la paix avant passées et la résolution de n'y plus retom-
qu'ils eussent fait une pénitence pleine et en- ber et de marcher dans les voies de Dieu;
tière, et sans la ^ participation du peuple ; ce il ne suffit pas '^
de prier Dieu, on doit encore
qui montre qu'ils étaient soumis, en certains tâcher de l'apaiser par des jeûnes, des lar-
cas, à la pénitence publique et à la privation mes, des gémissements par tous les autres
et
des sacrements, tandis que dans les siècles moyens propres à Les réconcilia-
le fléchir.
suivants on se contentait de les déposer et tions précipitées ' nuisent plutôt qu'elles ne
aderat ,
quœ differre diu plangentium lacrymas, et tamen ad Ecclesiam revertentes, et pœnitentiam agen-
subvenire ferro morientibus in infirmitate pateretur : tes, necesse non erat baptizare. Quod nos quoque hodie
at vero nunc non infirmis, sed fortibus pax necessaria observamus ut quod consfet hic baptizatos esse, et a
,
est, necmorientibus, sed viventibus communicatio a nobis ad hœreticos transisse, si postmodum peccato
nobis danda est, ut quos excitamus et hortamur ad suo cognito et errore digesto, ad veritatem et malri-
prœlium, non inermes et nudos relinquamus sed pro' , cem redeat, pœnitentiam manum imponere;
satis sit in
tectione sanguinis et corporis Christi muniamur, et ut quia ovis fuerat hanc ovem abalienatam et erra-
,
cum ad hoc fiât eucharistia ut possit accipientibus bundam in ovile suum pasior recipiat. Si autem qui
esse tutela, quos tutos esse contra adversarium volu^ ab hœreticis venit, baptizatus in Ecclesia prius non
mus munimento dominicœ
, saturitatis armemus. Cy- fuit, sed alienus in totum et profanus venit, baptizan-
prian., Epist. 57, pag. 252. dus ut ovis fiât, quia una est aqua in Ecclesia
est
* Legimus litteras tuas ,
frater charissime ,
quibus sancta quœ oves faciat. Cyprian., Epist. 71, pag. 303.
significasti de Victore quondam presbytero, quod ei, Denique quanto et fide majores, et timoré meliores
*
antequam pœnitentiam plenam egisset, et Domino Dec sunt, qui quamvis nullo sacrifiai aut libelli facinore
in quem deliquerat satisfecisset, temere Therapius col- constricti, quoniam tamen de hoc vel cogitaverunt, hoc
lega nosier, immaturo tempore et prœpropera festina- ipsum apud sacerdotes Dei dolenter et simpliciter con-
tione pacem dederit. Quœ res nos satis movit, secessum fitentes, exomologesim conscientiœ faciunt, animi sui
esse a decreti nostri auctoritate , ut ante leyitimum et pondus exponunt, salutarem medelam parvis licet et
plénum tempus satisfactionis et sine petitu et conscien- modicis vulneribus exquirunt , scientes scriptum esse :
tia plebis , nulla infirmitate urgente, ac ?iecessitate co- Deus non irridetur, derideri et circumveniri Deus
gente , pax ei concederetur. Cyprianus., Epist. 64, non potest, nec astutia aliqua fallente deludi... Con-
pag. 279. Cum Basilides insuper prœter libelli macu- fiteantur singuli, quœso, vos fratres dilectissimi , de-
lam, cum in infirmitate decumberet, in Deum blasphe- lictum suum, dum adhuc qui deliquit in sœculo est,
maverit, et se blasphémasse confessus sit ; et episcopa- dum admitti confessio ejus potest, dum satisfactio et
tum pro conscientiœ suœ vulnere sponte deponens, ad remissio facta per sacerdotes apud Dominum grata
agendam pœnitentiam conversus sit Deum deprecans, , est. Cyprian., tract, de Lapsis, pag. 95.
et satis gratulans, si sibi vel laico communicare con- 8Habemus advocatum et deprecaiorem pro peccatis
tingeret... Cumque alia multa sint et gravia delicta, nostris Jesum Christum Dominum et Deum nostrum,
quibus Basilides et Martialis implicati tenentur, frus- si modo nos in prœteritum peccasse pœniteat, et confi-
tra taies episcopatum sibi usurpare conantur, cum ma- tentes atque intelligentes delicta nostra quibus nunc
nifestum sit ejusmodi homines , nec Ecclesiœ Christi Dominum offendimus , vel de cœtero nos ambulare in
posse prœesse, nec Deo sacrificia offerre debere. Maxi~ viis ejus, et prœcepta ejus metuere spondeamus. Gypr.,
me cum jarn pridem nobiscum et cum omnibus om- Epist. 11, pag. 186.
nino episcopis in toto mundo constitutis, etiam Corné- Convertamur ad Dominum mente tota, et pœniten-
5
lius collega noster, sucerdos pacificus ac justus, et tiam criminis veris doloribus exprimentes, Dei mise-
martyrio quoque dignatione Domini honoratus, decre- ricordiam deprecemur. Illi se anima prosternât, illi
verit ejusmodi homines ad pœnitenfiam quidem agen- mœstitia satisfaciat, illi spes omnis incumbat. Rognre
dam posse admitti, ah ordinatione autem cleri atque qualiter debeamus dicit ipse : Revertimini, inquit, ad
sacerdotali honore prohiberi. Cyprianus, Epist. 67, me ex toto corde vestro, simulque et jejunio, et
pag. 289. fletu, et planctu; et scindite corda vestra et non
» Cyprian., Epist. 64, pag. 279, ubi supra. vestimenta vestra. ^rf Dominum toto corde redeamus ;
s Dicunt se in hoc veterem consuetudinem sequi; iram et offensam ejus , jejuniis fletibus planctihus , ,
quando apud veteres, hœreseos et schismatum prima sicut admonet ipse, placemus. Cypr., tract, de Lapsis,
adhuc fuerint initia, ut hi illic essent, qui de Ecclesia pag. 96.
recedebant , et hic baptizati prius fuerant ;
quos tune ' Dissimulandi nunc locus non est, quando deci-
372 IIÎSTOÎRE GÉNltRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
servent, et irritent davantage * Dieu contre de la réconciliation. Avant saint Cyprien il y
les pécheurs ; les prèlros qui les accordent avait ou en Afrique des évêques qui rejetaient
ne sont pas les pasteurs, mais les meurtriers les adultères de la ])ai.v, par conséquent de
des l)robis • : celui-là fait pénitence qui, étant la pénitcîuce, puistpi'on n'a pas droit d'y obli-
doux et patient selon que Dieu Ta com-
» ger personne on
lui en ôte le fruit qui est
*, si
mandé, et obéissant aux prêtres, mérite, par la réconciliation. Mais, du temps de saint
son humilité et par ses bonnes oeuvres, que Cyprien », on avait adouci cotte sévérité ex-
Notrc-Seigncur lui pardonne. La pénitence cessive, et on ne refusait la communion qu'à
doit être proportionnée au péché *. C'est tra- ceux qui, n'ayant point fait pénitence '°, ni
vailler au vrai bien des pécheurs que de ne
* donné par leurs larmes des marques d'une
les point Qatter, mais de les porter à apaiser véritable douleur, commençaient à la deman-
la colère de Dieu par une satisfaction pleine der lorsqu'ils se voyaient surpris de qnel([ue
et entière. La fermeté et la douceur sont né- maladie périlleuse, parce qu'alors ce n'était
cessaires aux prêtres à l'égard des pécheurs®; pas tant le regret de leur faute que la crainte
ils doivent réprimer l'insolence, mais ménager de la mort qui les obligeait à faire cette de-
tellement la pénitence de ceux qui sont sou- mande. Au reste, les pénitents achetaient cher
mis, qu'ils n'ôtent à personne l'espérance ''
cette grâce *'. Non-seulement ou lés obligeait
piaiur fraternitas nostra a quibusdam vestrum, qui ficis medela vera, dum blandimentis decipit dulcis
dum sine ratione restituendœ salutis plausihiles esse illccebra. Cyprian., Epist. 34, pag. 217.
Cupiunt, magis lapsis ohsunt.Summum enim delictum * Dominus qui sacerdotes sibi in Ecclesia sua eli-
esse quod persecutio committi coegit sciunt ijjsi etiam gere et constituere dignatur, electas quorjue et cansti-
qui commiserunt , cum dixerit Dominus et Judex nos- tutos sua valunlate atque opitulatiane tuetur, guber-
ter : Qui me confessus fueril coram hominibus, etc. nantes inspirons, ac subministrons et ad improborum
Ilœc qui subtrahit fralribus nostris , decipit miseras, cantumaciam frœnandam, vigorem, et ad lapsorum
ut qui possunt agentes pœnitentiam veram Deo Patri fovendam pœnitentiam, lenitatem. Cypr., Epist. 48,
et misericordi precibus et operibus suis satisfacere ; pag. 234.
seducantur ut magis pereani, et qui erigere se passent, ' Neminem putamus a fructu satisfactianis et spe
magis codant. Cypriau., Epist. 16, pag. 194. pacis arcendum cum sciumus juxta Scriptwarum
,
* Compatior ego et condalea de fratribus tiostris, divinarum fidem, auctore et hortatore ipso Deo, et ad
qui lapsi et persecutionis infesiatione prostrati partem agendam pœnitentiam peccatares redigi et veniam at-
nostrorum viscerum secum trahentes , parem dolarem que indulgentiam petentibus non denegari. Cypriauus,
nabis suis vulneribus intuleiunt. Quibus poiens est di- Epist. 55, pag. 250.
vina misericcrdia medelam dure; praperandum tamen 8 Exomolagesis apud inféras non est, nec ad pœni'
non puto, ne: incaute aliquid et festinanier gerendum, tentiam quis a nabis compelli potest, si fructus pœni-
ne dum
temere pax usurputur, divinœ dignatianis tentiœ subtrahatur. Cyprian., Epist. 55, pag. 246.
offensa gravius pi-ovocetur.Cypr., Epist. 17, pag. 196. ^ Nam et mœchis a nabis pœnitentiœ tempus cance-
2 Prœpasitorum est prœceptum tenere, et vel prope- ditur et pax datur, non tamen idcirco virginitas in
rantes, vel ignorantes instrucre, ne qui ovium pastares Ecclesia déficit, aut canlinentiœ propositum gloriosum
esse debent , lanii fiant : ea emm concedere quœ in per aliéna peccata languescit... Et quidem apud ante-
perniciem veriant , decipere est. Nec erigitur sic lap- cessares nostros , quidam de episcapis isthic in pro-
sus , sed per Dei offensam magis impeÛitur ad rui- vincia nostra, dandam pacem mœchis non putaverunt,
nam. Cypriau., Epist. 15, pag. 195. et in tatum pœnitentiœ locum contra adulteria clause-
3 Tempus est igitur ut agant delicti pœnitentiam, runt ; non tamen a coepiscoporum suorum collegio re-
ut probent lapsus sui dolarem , ut ostendant verecun- cesserunt, aut catholicœ Ecclesiœ unitatem, vel duri-
diam, ut monstrent humilitatem, ut exhibeant modes- tiœ, vel censurœ suœ obstinaliane ruperunt, ut quia
(iam; ut de submissiane provacent in se Dei clemen- apud alias adulleris pax dabatur, qui non dabat, de
tiam, et de honore débita in Dei sacerdote eliciant in Ecclesia separaretur. Cypr., Epist. 55, pag. 247.
se divinam misericordiam. Cler. Rom., Epist. ad Cy- '0 Idcirco, frater charissime , pœnitentiam non
prian., apud eumd. 36, pag. 219. agentes, nec dolorem delictorum suorum toto corde
* Quam magna deliquimus tam , granditer deflea- et manifesta lamentât ionis suœ prafessione testantes,
mus ; alto vulneri diligens et longa medicina non de- prohibendos omnino censuimus a spe communicationis
sit : pœnitentia crimine niinor non sit. Cyprianus, et pacis, si in infirmitale atque in pericula cœperint
tract, de Lapsis, pag. 98. deprecari ; quia rogare illos non delicti pœnitentia,
6 Mérita salubi-ia nostra et vera caiisilia nihil pro- sed mortis urgentis admonitio compellit, nec dignus
movent, dum blanditiis et palpationibus perniciosis Ve- est in morte accipere sotatium, qui se non cogitavit
ritas impeditur, et patitur lapsorum saucia et œgra esse mariturum. Cypr., ibid., pag. 248.
mens, quod corporaliter quaque œgri et infirmi sœpe H Opartet impensius et rogare, diem luctu transi-
patiuntur : ut dum salubres cibas et utiles potus, gere, vigiliis nactes ac fletibus ducere, tempus omne
quasi amaras et abhorrentes respuunt, et illa quce lacr-ymosis lamenlationihus occupare, strata solo adhœ-
obleclure et ad prœsens suavia videntur esse, appelant; rere cineri, in cilicio et sordilms volutari : post indu-
perniciem sibi et mortem per inaudientiam et intem- mentum Christi perditum, nullum hic jam telle vesti-
perantiam provocent: nec proficiat ad salutem arti- tum ; post diaboli cibum malle jejunium : justit
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT GYPRIEN. 373
mort et chasse de l'Eglise. Il veut qu'un évè- d'offrir pour le repos de Victor mort, ni de
que use de ce glaive contre ceux qui mépri- célébrer dans l'église aucune prière en son
sent sa dignité *; et il en usait lui-même nom, de manière toutefois que saint Gyprien
selon les occurrences ^, mais toujours contre ne laisse pas de de frère.
le traiter
des personnes coupables de fautes considé- 15. G'est peu '°, selon saint Gyprien, d'être sm- .11-
'
rables et scandaleuses, et dans des occasions baptisc et de recevoir l'eucharistie, si l'on ne demoJai'e.
où il était nécessaire de maintenir l'autorité fait de bonnes œuvres; les offices de charité
épiscopale ou l'honneur de l'EgUse. Quelque- comme l'aumône attirent sur nous les grâ-
fois l'excommunication ^ n'est que commina- ces " de Dieu; ils servent à purifier '^ les
toire dans saint Gyprien; d'autres fois elle est souillures contractées depuis le baptême; ils
provisionnelle ', comme celle qu'il prononça disposent la miséricorde à recevoir favora-
contre Félicissime et ceux qui l'avaient suivi ; blement nos prières *'; ils nous obtiennent la
operibus incumbere quibus peccata purgantur elee- : diaconibus, sive de peregrinis ausus fuerit ante sen-
mosynis fréquenter insistere quibus a morte animœ tentiam nostram communicare cum lapsis, a commu-
liberentur... An illa ingemiscit et plangit, eut vacat nione nostra arceatur, apud omnes nos causam dictu-
cultum pretiosœ vestis induere , ncc indumentum rus suœ temeritatis , quando in unum, permittenic
Christi quod perdidit cogitare? Accipere pretiosa Domino, convenerimus. Cypr., Epist. 34, pag. 217.
ornamenta et monilia laborata, nec cœkbtis ac divini Cum Felicissimus comminatus sit non communi-
''
ornatus damna deflere? Cyprian., tract, de Laps., caturos in monte secum, qui non obtempérassent, id
pag. 98. est, qui nobis communicarenc, accipiat sententiam quarn
1 Epist. 4, pag. 174 et 175. — 2 Epist. 34, p. 217. prior dixit , ut abstentum se a nobis sciât, quando
3 Interfici Deus non obtem-
jussit sacerdotibus suis ad fraudes ejus rapinas quas dilucida veritate
et
pérantes, judicibus a se ad tempus constitutis non obe- cognovimus , adulterii etiam crimen accedit Quœ
dientes ; sed tune quidem gladio occidehantur, quando omnia tune cognoscemus ,
quando in unum collegis
adhuc et circumcisio carnalis manebut: nunc autem pluribus, permittente Deo, convenerimus. Epist. 41,
quia circumcisio spiritalis esse apud fidèles servos pag. 225. — 8 Epist. 34, pag. 217. — » Epist. i,
Dei cœpit, spiritali gladio superbi et contumaces ne- pag. 170, ubi supra.
cantur, dum
de Ecclesia ejiciuntur. Epist. 4, p. 175. 10 Parum esse baptizari et eucharistiam accipere,
Oportet diaconum de quo scribis agere audaciœ
* nisi quis opère proficiat. In epistola Pauli ad Corin-
suœ pœnilentiain et honorem sacerdotis agnoscere et thios prima: Nescitis quia qui in stadio currunt, etc.
episcopo prœposito suo, plena humilitate satisfacere... Cypr., lib. III Testim., cap. 26, pag. 53.
Quod si ultra te contumeliis suis exacerbaverit et 11 Aggregatam primo in loco uno plebem, de miseri-
provocaverit, fungeris circa illum potestate honoris cordiœ bonis instituit {Cyprianus) docens divinœ lectio-
tui, ut eum vel deponas vel abstineas. Cypr., Epist. 3, nis exemplis quantum ad promerendum Deum prosint
pag. 73. officia pietatis. Pont. Diacon., in Vita S. Cyprian.,
5 Cypr., Epist. 41, pag. 225 et 229, et Epist. 59, pag. 6.
pag. 263, et Epist. 34, pag. 217, et Epist. 4, pag. 174, 12 Non haberet quid fragilitatis humanœ infirmitas
* Vos iiaque secundum litteras meas, fideliter et atque imbecillitas faceret, nisi iterum ptetas divinn
salubriter consulentes, a consiliis melioribus ne rece- subvenietis, justitiœ et misericordiœ operibus ostensis,
datis. Legite vero has easdem litteras et collegis mets, viam quamdam tuendœ salutis aperiret ; ut sordes posf-
si qui aut prœsentes fuerint, aut supervenerint, ut modum quascumque contrahimus eleemosynis ablua- ,
unanimes et concordes ad fovenda et sananda lapso- mus. Cyprian., tract, de Oper. et Eleemos., pag. 137.
rum vulnera, consilium salubre teneamus, tractaturi ^^ Scriptura divina instruit dicens: Bona est oratio
plenissime de omnibus, cum convenire in unum })er cum jejunio et eleemosyna. Nam qui in die judicii
Domini misericordiam cœperimus. Interea si quis im- prœmium pro operibus et eleemosynis redditurm est,
moderatus et piceceps, sive de nostris presbyteris vel hodie quoque ad orationem cum opérât ione venienti
37 i HlSTclRK GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
virtoire sur nos passions, et nous méritent ou a d'enfants ', plus on doit donner aux pau-
lies couronnes et des rccouipenses au dernier vres, puisque c'est à Jésus-Christ* môme qu'on
jour '
; ils sont préférables aux sacrifices *. donne, ne faut pas préférer des ser-
et qu'il
Sans les œuvres de miséricorde, nos jeûnes viteurs au maître. Il faut doue joindre l'au-
et nos prières ont moins de pouvoir '. Elles mûne ù la prière ^ ; sans elle nos oraisons
ne délivrent pas seulement de la mort de sont moins puissantes '°. Nos prières, pour
l'âme *,mais aussi de celle du corps : comme être bonnes, doivent " être faites eu esprit de
l'eau du baptême éteint le l'eu de l'enfer*, paix, simples, pleines de confiance et accom-
elles servent à remettre les péchés. Quand pagnées de gémissements et de larmes. Il ne
nous en avons une fois obtenu le pardon dans faut pas seulement jn-ier pour soi '*, mais
le baptême, la pratique continuelle des œu- aussi pour tous les fidèles qui ne forment en-
vres de charité renouvelle, en quelque sorte, semble qu'un même corps, et pour la paix de
la vertu de ce sacrement et nous fait encore l'Eglise *'. Jésus-Christ lui-même nous a ap-
obtenir la même grâce. Faire l'aumône ^ pris à prier et nous a donné une prière ** qui
c'est donner son bien à Dieu à intérêt. Plus est la plus agréable à Dieu et qui contient
benignus auditor est. Gyprian., tract, de Orat, dom., rum animœ liberandœ. Ut in hac vita sœculari alen-
pag. 107. dis sustinendisque pignoribus, quo major est numerus,
Qui dicit se in Christo manere, débet, quomodo
• hoc major et sumptus est: ita et in vita spiritali at-
nie ambulavit, et ipse ambulare: ambulandum est que ccelesti, quo amplior fuerit pignorum copia, esse
igitur vestigiis paribus, œmula ingressione nitendum et operum débet major impensa. Cypr., de Oper. et
est. Tune respondet ad fidem nominis sectatio verita- Eleemos., pag. 142.
iis, et credenti prœmium datur, si quod o'ediiur et 8 Sed nec illa res, fratres charissimi, a bonis operi-
geratur locupletem te dicis et divitem et utetidum bus et justis refrœnet, et revocet christianum, quod
pufat iis quœ possidere te Deus voluit. Vtere, sed ad res excusari se posse aliquis existimet, bénéficia filiorum,
salutares...: divitem te sentiant pauperes , locupletem quando in impensis spiritalibus, Christum cogitare,
te sentiatd indigentes, patrimonium tuum Deo fœnera, qui accipere se professus est, debeamus, nec conseivos
Christum ut virginitatis perferre gloriam liceat, ut liberis nostris, sed Dominum prœferamus... Si enim
ad Domini prœmia venire contingat, multorum preci- Deus eleemosynis pauperum feneratur, et cum datur
bus exora. Gypr., de Habit, virg., pag. 70. minimis, Christo datur : non est quod quis terrena
' Distractis rébus suis, ad indigentiam pauperum cœlestibus prœferat, nec divinis hmnana prœponat.
sustentandam , tota prœdia pretio dispensons, duo Cypr., de Oper. et Eleemos., pag. 141.
bona simul junxit, ut et ambitionem sœculi sperneret, 8 Cypr., de Orat. dom., pag. 107, ubi supra.
gua perniciosius nihil est; et misericordiam quam " Cypr., de Oper. et Eleemos., pag. 138, ubi supra,
Deus etiam sacrificiis suis prœtulit, quam nec ille n tantum sine cessatione poscendi, et cum fide
A'oî
qui legis omnia mandata sériasse se dixerat, fecit? accipiendi, simplices et unanimes Dominum deprece-
impleret. Pont. Diac, iu Vita S. Cypr., pag. 2. mur cum gemitu pariter et fletu deprecantes, sicut de-
^ Raphaël angélus horlatur dicens : Boua est oratio precari oportet eos qui sint positi iider plangentium
cum jejunio et eleemosyua. Quia eleemosyna a morte ruinas, et timentium reliquias, inter numerosam lan-
libellât, et ipsa purgat peccata, ostendit orationes nos- guentium stragem, et exiguam stantium firmitaiem,
tras ac jejunia minus posse, nisi eleemosynis adju- Cy pr.,1Epist. 11, pag. 187.
ventur. Deprecationes solas parum ad impetrandum Ante omnia pacis doctor atque unitatis magister,
1*
valere, nisi factorum et operum accessione sarciantur. singillatim noluit et privatim precem fieri, ut cum
Cypr., tract, de Oper. et Eleemos. quis precutur, pro se tantum jirecetur; non enim dici-
In Actibus Apostolorum facti fides posita est, et
* mus : Pater meus qui es in cœlis; nec panem meum
quod eleemosynis non tantum a secunda, sed et a da mihi hodie ; nec dimitti sibi tantum unusquisque
prima morte animœ liberentur, gestœ et impletœ rei debitum postulat, aut ut in tentationem non inducatur
probatione compertum est. Ibid., pag. 138. atque a malo liberetur, pro se solo rogat. Publica est
s Sicut lavacro aquœ salutaris gehennœ ignis
exfin- nobis et communis oratio ; et quando oramus, non pro
guitur, ita eleemosynis atque operibus justis delicto- uno, sed pro toto populo oramus; quia totus populus
rum flamma sopitur, et quia semel in baptismo ve- unum sumus. Deus pacis et concordiœ magister, qui
rnissapeccatnrum datur, assidua et jugis operatio, docuit unitatem, sic orare unum pro omnibus voluit,
baptismi instar, imitata Dei rursus indulgentiam, quomodo in uno omnes ipse portavit. Cypr., de Orat.
largitur. Cypr., tract, de Eleemos., pag. 137. dom., pag. 100.
Quando quis miseretur pauperis, Deum fcmerai,
* >3 Hogemus pacem maturius reddi, cito latebris nos-
et qui dat minimis, Deo donat, spiritaliter Deo sua- tris et periculis subveniri, impleri quœ famulis suis
vitatis odorem sacrificat. Cypriau., de Orat. dom., Dominus diguatur ostendere, red intégrât ionem Eccle-
pag. 108. siœ, securitatem salutis nostrœ, post pluvias serenita-
' Sed enim multi sunt in domo liberi, et retardât tem, post tenebras lucem, post procellas et turbines
te numerositas filioj'um, quominus largiter bonis ope- placidam lenitatem. Cypr., Epist. 11, pag. 187.
ribus insistas: atquin hoc ipso operari amplius debes, >* Qui inter ccetera salutaria sua monita et prœcepta
que multorum pignorum pater es. Plures sunt pro divina, quibus populo suo consuluit ad salutem, etiam
quibus Dominum multorum delicta redi-
depreceris : orandi ipse formam dédit; ipse quid precaremur,
nienda sunt, multorum purgandœ conscientiœ,jnulto^ monuit et instruxit. Qui fecit vivere, docuit et orare;
[Iir SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 375
de prier autrement qu'il ne nous a enseigné *. d'obtenir de Dieu ' tout ce qu'on lui demande,
Il est besoin de prier sans cesse *, pour n'ê- quand on est bien uni; l'union et la charité
tre point exclu du royaume de Dieu, et cette sont nécessaires pour obtenir de nos l'efiFet
obligation est une preuve que nous sommes prières ®; la prière ^ de peu de personnes
pécheurs '. En priant *, on ne doit pas trop bien unies a plus de pouvoir que celle d'une
élever la voix ; car Dieu n'écoute pas la voix, multitude discordante ; ceux qui sont désu-
mais le cœur, et ce n'est pas de bouche », nis d'avec leurs frères '", ne sauraient effa-
mais d'esprit qu'il faut prier. Selon saint cer le crime de cette division, quand bien
Cyprieu ®, les heures de tierce, de sexte et même souffriraient le martyre; il n'est pas
ils
de none, auxquelles les Juifs mêmes avaient même permis " de boire ni de manger avec
coutume de prier, figuraient le mystère de les schismatiques ; celui-là ne peut avoir la
la Trinité, qui devait être révélé dans les der- puissance ni la dignité d'évêque ", qui re-
niers temps. Le saiut évêque relève grande- fuse de garder la paix et l'unité de l'épisco-
benignitate ea scilicet, qua et cœtera dure et conferre habeamus in corde, et aliud in voce, quando intentio-
dignatus est : ut dum prece et oratione, quam filius ne sincera Dominum debeat non vocis sonus, sed ani-
docuit, apud Patrem loquimur, facilius audiamur. mus et sensus orare. Gypr., de Orat. dom., pag. 107.
Cjprian., de Orat. dom., pag. 99. Qualia autem sunt, ® In orationibus celebrandis invenimus observasse
fratres dilectissimi , orationis dominicœ sacramenta, cum Daniele très pueras in fide fortes, et in captivi-
quam multa, quam magna breviter in sernione collec- tate victores , horam tertiam, sextam, nonam, sacra-
ta sed in virtute spiritaliter copiosa, ut nihil omnino
; mento quœ in novissimis temporibus
scilicet Trinitatis,
prœtermissum sit, quod non in precibus atque oratio- manifestari habebat. Gypr., de Orat. dom., pag. 108.
nibus nostris, cœlestis doctrinœ compendio comprehen- ^
Docuistis granditer Deum timere, Christo firmiter
datur. Ibid, pag. 101. adhœrere, plebem sacerdotibus a periculo jungi; in
1 vera magis apud Patrem precatio, quam quœ
Quœ persecutione fratres a fratribus non separari; concor-
a Filio, qui est veritas, de ejus ore prolata est? Ut diam simul junctam vinci o^nnino non passe ; quidquid
aider orare quam docuit, non ignorantia sola sit, sed simul petitur a cunctis, Deum pacis pacificis exhibei-e.
et culpa ; quando ipse posuerit et dixerit : Rejicitis Gypr., Epist. 60, pag. 270.
mandatum Dei ut traditionem vestram statuatis. * Scire debetis sicut Dominus ostendere et revelare
remittimus debitoribus nostris. Quam iiecessario au- perfidis, et fidelibus pacem sua voce commendans, os-
tem, quam providenter et salutarifer admonemur, toidit magis esse se cum duobus aut tribus unanimi'
quod peccatores sumus, qui pro peccatis rogare corn- ter orantibus, quam cum dissidentibus plurimis : plus-
pellimur, ut dum indulgentia de Deo petitur, conscien- que impetrari passe paucorum concordi prece, quam
tiœ suœ animus recordetur. Gypr., de Orat. dom., p. 105. discordiosa oratione multorum. Gypr., de Unit. EccL,
Sit autem orantibus sermo et precatio cum disci-
* pag. 81.
plina quietem continens et pudorem. Cogitemus nos '" Cœterum discordans et dissidens, et pacem cum
sub conspeclu Dei stare : placendum est divinis oculis fratribus non habens, secundum quod beatus Apostolus
et habitu corporis, et modo vocis : nam ut impudentis pro nomine Christi
et Scriptura sancta testatur, nec si
est clamoribus strepere, ita congruit verecundo modes- occisus crimen dissentionis fraternœ poferit
fuerit,
tis precibus orare Quando in unum cum fratribus evadere; quia sicut scriptum est : Qui fratrem suum
convenimus, et sacrificia divina cum Dei sacerdote ce- odit, homicida est, nec ad regnum cœlorum perve-
lebramv.s, verecundiœ et disciplinée memores esse de- nit, aut cum Deo vivit homicida. Non potes t esse cum
bemus, non passim ventitare preces nostras conditis Christo, qui imitator Judœ maluit esse quam Christi.
vocibm, nec petitionem commendandam modeste Deo, Quale delictum est, quod nec baptismo sanguinis po-
tumultuosa loquacitate jactare, quia Deus non vocis, test ablui! Quale crimen est, quod martyrio non po-
ted cordis auditor est. Gyprian., lib. de Orat. dom., test expiari! Gypr., de Orat. dom., pag. 106.
pag. 99. i^Audet quisquam dicere aquam baptismi salutarem,
Claudatur contra adversarium pectus et soli Deo
>*
et gratiam cœlestem communem cum schismaticis esse
pateat, nec ad se hostem Dei tempore orationis adiré passe; cum quibus nec terrestris cibus, nec sœcularis
patiatur, abrepit enim fréquenter et pénétrât, et sub- pofus débet esse communis? Gypr., Epist. 69, p. 296.
tiliter fallens preces nostras a Deo avocat, ut aliud 12 Qui ergo nec unitatem spiriius, nec conjunctionem
37G mSTOmi- GKNiiRALE DlîS AUTEURS EGGLIÎISIASTIQUES.
grain. Les hérétiqnes n'ont ni antel, ni viennent que de ce qu'on n'obéit pas à l'é-
église, et ne peuvent par conséquent consa- vèqne de Dieu, de ce que des esprits mal
crer *; c'est à eux nne témérité de vouloir faits ne sauraient demeurer en repos, et de
abolir la succession continue des évèques et ce que des brouillons et des perfides ne peu-
s'en faire de nouveaux '; ils ne succèdent à vent couserv(n' l'unité. Il n'est pas <le la ma-
personne * et prennent leur origine d'eux- jesté de l'Eglise " catholique de s'informer
mêmes; ils corrompent ordinairement les beaucoup de ce que les hérétiques et les
Ecritures '; ce n'est pas nous (jui nous som- schismaliques l'ont parmi eux. »
mes mais ce sont
éloignés des hérétiques ^, •16. En jtarlant des indulgences que les s.uiesin-
enx qui se sont éloignés de nous ; il est dan- martyrs demandaient pour les tombés, saint ie"v(rr*d'e
gereux d'avoir commerce avec eux '; ils Cyprien dit que c'est " déshonorer la dignité. Tes n/àrtyrs.
n'ont point Jésus- Glu-ist avec eux, n'ayant obscurcir la gloire et flétrir les couronnes
pacis observât, et se ab Ecclesiœ vinculo atque a sa- • Quomodo possuni duo aut très in nomine Chiisti
cerdûtum collegio séparât, episcopi nec potestatem po- colligi, quos constat a Cttristo et ab efus Evangelio
tesf hahere, nec honorem, qui episcopatus nec unitatem separari? non enim nos ab illis, sed illi a nobis re-
voluit tenere, nec jmcem. Cypr., Epist. 55, pag. 249. cesseruni. Cypr., de Unit, EccL, pag. 81.
* Nain etsi videntur in Ecctesia esse zizania, non ''
Vitate, quœso vos, ejusmodi homines, et a latere
tamen impediri débet aut fxdes aut cho.rifas nostra, ut atque auribus vestvis, perniciosa colloquia velut conta-
quoniam zizania esse iyi Ecclesia cernimus, ipsi de gium mortis arcete, sicut scriptum est : Sepi aures
Ecclesia recedamus. Nobis tantummodo laborandum tuas spinis, et noli audire linguam nequam.... Aver-
est, ut frumentum esse possimus, ut cum cœperit fru- sandus est talis atque fugiendus quisquis fuerit ab
mentum doniinicis horreis condi, fructum pro opère Ecclesia separatus, perversus est ejusmodi et peccat,et
nostro et labore capiumus. Cypr., Epist. 54, pag. 240. est a seipso damnatus. Cyprian., lib. de Unit. EccL,
* autem non potuit olei creaturam, qui
Sanctificare pag. 83.
nec altare habuit, nec Ecclesiam. Unde nec unctio spi- 8 Pertinere non poteril ad Christum, qui dilectio-
rita/is apud hœi-eticos potest esse, quundo constet nem Christ i perfida dissensione violavit. Qui charita-
oleum sanctificari et eucharistiam fieri apud illos tem non habet, Deum non habet. Joannis beati apos-
omnino non posse. Cypr., Epist. 70, pag. 301. iuli vox est : Dens, inquit, dilectio est, et qui manet
3 Cum sit a C/iristo una Ecclesia per toturn mundum in dileclione, in Deo manet et Deus in illo. Cum
in multa mernbra divisa, item episcopatus unus epis- Deo manere non possunt qui esse in Ecclesia Dei una-
coporum multorum concordi numerositate diffusus: nimes noluerunt, ardeant licet flammis et ignibus ira-
ille {Novatianus) post Dei traditionem, ])Ost connexam diti, vel objccti iestiis aniynas suas ponant ; non erit
et ubique conjunctam catholicœ Ecclesiœ unitatem, hu- illa fldei corona, sed pœna perfidiœ ; nec religiosce
manam conetur Ecclesiam facere, et per plurimas ci- virtutis exitus gloriosus, sed desperationis interitus,
vitates novos apostolos suos mittaf, ut quœdam recentia Occidi talis potest , coronari non potest. Cypr., ibid.,
suœ fundamenta constituai : cumque jam
institutionis pag. 82.
pridem per omnes provincias et per urbes singulas Cypr., Epist. 59, pag. 261, ubi supra.
»
ordinati sint episcopi, in œtate antiqui, in fide inte- Hinc hcereses et factœ sunt fréquenter et fiunt dum
10
gri, in pressura probati, in persecutione prescripti, ille perversa mens non habet pacem, dum perfidia discor-
super eos, creare alios pseudoepiscopos audeat. Cypr., dans non tcnet unitatem. Cypr., de Unit., pag. 80.
Epist. 55, pag. 249. n Cum hœc in notitia tua esse considerem, et pro
Ecclesia xma est,^iuE una et intus esse et foris non
* certo hœrere memoriœ et discipUnœ tuœ scirem, ne-
potest. Si enim apud Novatianum est, apud Cornelium cessarium non putavi, celeriter et urgenter hœretico-
non fuit. Si vero apud Cornelium fuit, qui Fabiano rum tibi ineptias nuntiandas, neque enim ad catholicœ
episcopo légitima ordinatione successit, et quem prce- Ecclesiœ majestatem pariter ac dignitatem pertinere
ter sacerdotii honorem martyrio quoque Dominus glo- débet, quid apud se hœreticorum et schismaticorum
rificavit; Novatianus in Ecclesia non est, )iec episco- mohatur audacia. Cypr., Epist. 59, pag. 263.
pus computari posset, qui, evangelica et apostolica 12 Porro si fides quœ vicerit, coronalur, necesse est
traditionc contempla, nemini succedens, a seijiso ortus ut vida perfidia puniatur.martyres aut nihil
Ita
est : habeve numque aut tenere Ecclesiam nullo modo possunt, si Evangelium solvi potest ; aut si Evange-
potest, qui ordinatus in Ecclesia non est. Cyprianua, lium non potest solvi, contra Evangelium facere non
Epist. 69, pag. 295. possunt, qui de Evangelio martyres fiunt. Nemo fra- ,
de ces saints intercesseurs, que d'abuser de dont le vœu ne paraît point avoir été irrévo-
ces indulgences pour s'exempter de faire pé- cable, et c'est de celles-ci qu'il faut entendre
nitence; le pouvoir que les hommes pour- ce que dit ce Père dans sa lettre à Pompone :
raient s'attribuer de les donner ' est vain, si « Si elles ne veulent ou ne peuvent persévé-
Dieu ne l'autorise. Le clergé de Rome ajoute rer dans la pureté®, il vaut mieux qu'elles se
que les indulgences perdent toute leur vertu marient, que de tomber dans le feu parleurs
quand elles sont contre l'Evangile ^, et qu'el- crimes. » Quant à celles qui, après une ferme
les sont contre l'Evangile quand elles accor- résolution de garder la continence et s'être
dent trop tôt pardon aux pécheurs et
' le consacrées de bonne foi à Jésus-Christ, étaient
avant qu'ils aient satisfait à Dieu par une vé- convaincues du crime d'impureté, on les obli-
ritable pénitence. L'éloge que saint Cyprien geait à la pénitence publique '', comme ayant
fait des vierges est remarquable ; il dit qu'el- commis un adultère contre Jésus-Christ, et
les sont comme les fleurs odoriférantes de on prescrivait un certain laps de temps, après
l'Eglise "*, le chef-d'œuvre de la grâce, l'orne- lequel elles revenaient à l'Eglise. On peut
ment de la nature, un ouvrage parfait et in- faire les remarques suivantes à l'égard des
corruptible, l'image de Dieu répondant à la martyrs par respect pour leurs reliques, les
:
bere illos probatur, hoc ipso quod petunt, cur non ju- suam sibi dicatam et sançtitati suœ destinatam jacere
dicium eorum sustinent a quibus petcndam pacem, cum altère cernit, quam indignatur et irascitur ? et
quam utique non habent putaverunt? Quod si aliunde quas pœnas incestis hujusmodi conjunctionibus cem-
prœregativam cemmunicationis habere se credunt, cum minatur?... Si autem de eis aliqua cerrupta fuerit
Evangelio illam conferre conentur, ut ita demum fir- deprehensa, agat i^cenitentiam plenam, quia quœ hoc
miter valeat, si ab evangelica lege non dissonat. Cle- crimen admisit, nen mariti, sed Christi adultéra est,
rus Rom., apud Gyprian., Epist. 36, pag. 219. Cœte- et idée œstimato juste tempère, postea exomelogesi
rum quo pacte evangelicam peterit prœstare cemmuni- facta ad Ecclesiam redeat. Ibid., pag. 174
cationem quod contra evangelicam decretum videtur Paternus proconsul dixit : Prœceperunt ( impe-
*
veritatem ? Natn cum omnis prœrogativa ita demum ratores ) ne in aliquibus locis conciliabula fiant, nec
ad indulgentiœ privilegium spectet ; si ab ee qui so- cœmeteria ingrediantur. In Vita S. Cypr., pag. 13.
ciain quœrif, qui a Deo cui sociari
nen discrepet 8 Certe durum erat, ut, cum majores nostri, plebeis
;
guœrit, discrcpat, necesse est indulgentiam et privile- et catechumenis martyrimn censecutis, tantum honoris
gium societatis amitfat. Videant igitur quid in hoc pro martyrii ipsius veneratione dederint, ut de pas-
negotio ugere conentur. Nam si aliud quidem Evange- sienibus eerum multa, aut prope dixerim pêne cuncta
liuni, aliud autem martyres dicunt potuisse decretum: conscripserint , ui ad nostram quoque notitiam qui
collidentes contra Evangelium martyres utrobique pe- nendùm nati fuimus, pervenirent, Cypriani tanti sa-
riclitubunlur. Apud Gyprian., Epist. 36, pag. 219. cerdotis et tanti martyris passio prœteriretur. Pont.
3 Ibid. Diac, in Vita S. Cypr., pag. 1.
* JV'wwc nobis ad virgines semie est, quarum que 10 Denique et dies eorum quibus excedunt annotate,
sublimior gloria est, majer et cura est. Hœ sunt ut commemorationes eorum inter memorias martyrum
ecclesiastici germinis flores, decus atque emamentum celebrare possimus ;
quanquom Tertullus fidelissimus
gratiœ spiritalis , lœta indoles, laudis et honoris epus et devotissimus frater noster ,
pro caetera sollicitudine
integrum atque incerruptum, Dei imago respon- et cura sua quam fratribus in omni obsequio operaiionis
dens ad sanctimeniam Demini, illustrior partie gregis impertit, qui nec illic circa curam corporum deest,
Christi. Gypr., de Hab. virg., pag. 68. scripserit et scribat, ac significet mihi dies quibus in
Quantus vero communis omnibus nobis mœror est
^ carcere beati fratres nestri ad immortalitatem gle-
virginum, quœ illic tenentur ;
et cruciatus de periculo riosœ mertis exitu transeunt. Et celebrantur hic a
pro quibus non tantum libertatis , sed et puderis nobis oblatienes et sacrificia ob commemorationes
jaciura plangenda est, nec tam vincuta barbarerum, eerum, quœ cito vobiscum, Domino protegente, celé-
quant lenonum et lupanarium stupra deflenda sunt ; brabimus, Gyprian., Epist. 12, pag. 188.
,
leurs reliques '; on célobrait le jour de leur 17. L'Eglise avait des revenus dentelle dis- Sur le»
revenue d«
mort chaiiuc année *, en oH'raut des sacri- tiihuait chaque mois une partie aux clercs % rKRl.se,
l'eiaploi
fices en leur honneur; les billets qu'ils don- pour fournir à leur subsistauce; elle en son- qu'on en fai-
sait, le soie
naient, pour abréger le temps de la péni- lageait aussi les pauvres ^, mais ceux-là sen- dus mala-
des, la di-
tence à ceux qui étaient tombes, avaient lieu lement qui demeuraient formes dans la foi '' nio les con-
;
ciles, et les
d'une église à l'autre; on honorait comme et fournissait aux pauvres artisans de quoi visions
loi liées
oc-
aux
Udùict.
martyrs * les confesseurs qui mouraient en exercer leur métier '*. Il y avait , à cet elfet,
prison; les souflVances des martyrs * sont au- des troncs dans aumônes
les églises ^, et les
tant de témoins qui déposent pour la divinité que les fidèles y mettaient étaient spécia-
de Jésus-Christ; on n'est pas martyr en ré- lement pour les pauvres; les fidèles, même
paudant sou sang pour le nom de Jcsus-Chi ist, ceux qui étaient pauvres, payaient la '" dime
* Cum post iter îongum, nimio sudore madidatus turpi et infami confagione fœdetur... Quod si penu-
sederct ( Ctjprianus ), ijuidam ex Tesserariis quondam riam talis et necessitatem paupertatis obtendit, potest
c/iristianus, tes suas obtulit, quasi vellet ille vedimen- inter cœteros ,
qui alimentis Ecclesiœ sustinentur,
tis suis humidis sicciora mutare: qui videlicet nihil hujus quoque nécessitas adjuvari; si tamen contentas
aliud in relus oblatis ambiehut, quant ut jnvftciscen- sit frugalioribus , sed innocentibus cibis, nec putet
tis ad Deum marhjris suJores jani sanguineos jjossi- salaria se esse redimendum ut a pcccatis cesset,
det-et. Pont. Diac, in Vita Cypi:, pag. 10. quando hoc non nobis, sed sibi prœstet... Quod si illic
* Cyprian., Epist. 12, pag. 188, ubi supra. Ecclesia non sufficit ut laborantibus prœstet alimenta,
s Corjjoribus etiamomnium qui etsi torti non sunt poterit se ad nos transferre, et hic quod sibi ad vi~
in carcere, famen glorioso exitu mortis excedunt, im- ctum atque ad vestiium necessarium fuerit accipere.
pertiafur et vigilantia et cura propensior. Neque enim Cyprian., Epist. 2, pag. 171.
virtus eorum aut honor niinor est, quominus ipsi Paupcribus quoque, ut sœpe jam scripsi, cura ac
^
quoque inter beatos martyres aggregentur. Quod in diligentta vestra non desit, iis tamen qui in fide
illis est, toleraverunt quidquid tolerare parati et stantes, et nobiscum fortiter militantes Christi castra
prompti fuerunt. Qui se torrnentis et morti sub oculis non reliquerunt, quibus quidem nunc major a nobis
Dei obtulit, passus est quidquid pati volait. Non enim et dilectio et cura praestanda est ; quod nec pauper-
ipse torrnentis, sed tormenta ipsi defuerunt. Cum vo- tate victi, nec persecutionis tempore prostrati, cum
luntati et confessioni nostrœ in carcere et vinculis ac- Domino fideliter serviunt, cœteris quoque pauperibus
cedit et moriendi terminus, consummata martyrii exemplum fidei prœbuerunt, Cyprianus, Epist. 12,
gloria est. Cj'pr., Epist. 12, pag. 188. pag. 188.
* Ne esset probatio minus solida,
de Christo de- et 8 Cumque ego vos pro me vicarios miserim, ut ex-
licata confessio, per tormenta, per cruces, per multa pungeretis nécessitâtes fratrum nostrorum sumptibus,
pœnarum gênera tentantur. Dolor qui verttatis testis si qui eliain vellent suas artes exercere, additamento
est admovetur, ut Christus Dei Filius, qui hominibus quantum satis esset, desideria eorum juvaretis: simul
ad vitam datus creditur, non tasitum prœconio vocis, etiam œtates eorum et conditiones et mérita discerne-
sed et passionis testimonio prœdicaretur. Cyprian., de retis ; ut jam nunc ego, cui cura incumbit, omnes
Idol. Vanit., pag. 12. optime nossem, et dignos quoque et humiles et mites
' Qute nunc ratio et forma in clerc tenetur, ut qui ad ecclesiasticœ admi7iistrationis officia promoverem.
in Ecclesia Domini ordinatione clerica promoveniur, Cypr., Epist. 41, pag. 226.
in nullo ab adminiatratione divina avocentur; nec mo- ^ Locuples et dives es, et dominicum celebrare te
lestiis negotiis sœcularibus, sed in honore sportu-
et credis,quœ corbonam omnino non respicis quœ in ;
lantium fratrum, tanquam décimas ex fructibus acci- dominicum sine saa'ificio venis quœ partem de sa- ,
pientes, ab altari et sacrificiis non recédant, sed die quod pauper obtulit, sumis ? Jntuere in Evan-
crificio,
ac nocte ccelestibus rébus et spiritalibus serviant. gelio viduam prœceptorum cœlestium memorem, inter
Cypr., Epist. l,pag. 170. Desiderastis quoque ut de ipsas pressuras et angustias egestatis operantem, in
Philumeno et Forlunato hypodiaconis , et Favorino gazophylacium duo quœ sola sibi fuerant minuta mit-
acolyto, qui medio tempore recesserunt, et nunc vé- tentem Pudeat divites sterilitatts atque infidelita-
nérant, quid mihi videatur rescribam... intérim se a tis suœ : vidua et inops vidua, in opère larga inveni-
divisione mensurna tantum contineant, non quasi a tur. Cumque universa quœ dantur, pujnllis et viduis
ministerio ecclesiastico privati esse videantur, sed ut conferantur, dat illa quam oportebat accipere, ut scia-
integris omnibus ad nostram prœsentiam differantur. mus quœ pœna sterilem divitem maneat, quando hoc
Cypr., Epist. 34, pag. 217. documento operari etiam pauperes debeant. Cyprian.,
* Consulendum me existimasti frater charissime de Oper. et Eleemos., pag. 141.
, ,
quid mihi videatur de liistrione quodam,qui apud vos 10 In nobis vero sic unanimitas diminuta est, ut et
consfitutus, in ejusdem adhuc artis suœ dedecore per- largitas opertionis infracta est. Domos tune et fundos
sévérât; et magisler et doctor non erudiendorum, sed venumdabant, et thesauros sibi in cœlo reponentes,
perdendorum jiuerorum, id quod maie didicil, cceteris disiribuenda in usus indigentium pretia Apostolis of-
quoque insinuât: an talis debeat communicare nobis- ferebant, at nunc de patrimonio nec décimas damus,
eum. Puto nec majestati divinœ, nec evangelicce disci~ et cum vendere jubeat Dominus, emimus potius «t
plina coyigruej'e, ut pudor et honor Ecclesia tam augemus. Cyprian., de Unit. Ecclts., pag. 85.
,
par infirmité. On voit, par divers endroits des i .également difficile de faire l'éloge
Il est Eloge de
eaint Cy-
écrits de saint Cyprien, que de son temps les des vertus de saint Cyprien, et d'exprimer piiea.
visions et les révélations étaient fort com- de quelle utilité ses écrits sont à l'Eglise ^.
munes *, que Dieu en gratifiait même les en- Son éloquence même ne suffirait pas *" pour
fants ^
; et ce saint évêque s'élève avec force faire sou panégyrique; et tout ce que nous
contre ceux qui faisaient difficulté d'y ajou- pourrions dire ne répondrait jamais à l'idée
'*
ter foi *. Il ne voulait pas que les chrétiens que son nom seul forme dans l'esprit de tout
portassent le noir dans leurs habits, en signe le monde. Si l'ardeur de son zèle, la grandeur
* Alla quœ incumbunt vobis, etiam ipsa subdidi- atras vestes, quando illi ibi indumenfa alba jam
mus ; ut si qui in hanc tentationem inciderunt, cœpe- sumpserint. Cypr., de Mortalit., pag. 115.
rint appre/tendi infirmitate , et agant pœniteniiam fi
Scire debetis et pro cerio credere ac tenere, pres-
facii sut, et desiderent communionem, utique subveniri surée diem super caput esse cœpisse, et occasum sœculi
eis débet. Sive viduœ , si thlibomeni qui se exhibere atque Antichristi tempus appropinqunsse; parati omnes
non possunt, sive hi qui in carceribus sunt, sive ex- ad prœlium stemus. Cypr., Epist. 58, pag. 255.
clusi a sedibus suis, utique huberi debent qui eis mi- "^
lia beatus Cgprianus passus, ejusque corpus prop-
nistrent. Sed et catechumeni apprehensi infirmitate, ter gentil ium curiositatem in proximo positum est
decepti esse non debebunt, ut eis subveniatur. Cler. cum cereis et scolacibus. Auct. Passion. S. Cgprian.,
Rom. apud Cypr., Epist. 8, pag. 181. pag. 15.
* JVe igitur ore nostro quo pacem neganius, quo ® Quoniam feriata nunc quies ac tempus est otio-
duritiam niagis humanœ crudelitatis, quam divinœ et sum, quidquid inclinato jam sole in vesperam diei
paternœ pietatis opponimus, oves nobis commissœ a superest, ducamus hanc diem lœti, nec fit vel hora
Domino rcposcantur ; placuit nobis, Sancto Spiritu convivii gratiœ cœlestis immunis; sonet psalmos con-
suggerenfe, et Domino per visiones multas et mani- vivium sobrium ; et ut tibi tenax memoria est, vox
festas admonente, quia hostis nobis imminere prœnun- canora, aggredere hoc munus ex more. Magis charis-
tiatur et ostenditur, colligere intra castra milites simos pasces, si sit nobis spiritalis auditio, prolectet
Christi, et cxaminatis singulorum causis, pacem lap- aures religiosa mulcedo. GypriaD., lib. ad Donat.,
sis dure. Gyprian., Epist. 57, pag. 254. pag. 12.
^ Castigare nos itaque divina censura nec noctibus 9 Impossibile est omnino complecti quantum inter
desiiiit , nec diebus ;
prœter nocturnas enim visiones, alios scriptores Ecclesiœ conférât beatus Cgprianus,
per dies quoque impletur apud nos Spiritu Snncto' velut okum decurrens in omnem suavitatem, lingva
puerorum innocens œtas, quœ in extasi videt ocuiis, composita, declamator insignis doctorquc mirabilis,
et audit, et loquitur ea quibus nos Dominus monere Gassiod., lib. Dw. Instit., cap. 19.
et instruere dignatur. Cypr., Epist. 16, pag. 196. *" Cujus reverendi episcopi et venerandi martyris
* Memini enim quid jam mihi sit ostensum, imo Ctjpriani laudibus nulla lingua sufficeret, nec si se ipse
quid servo obsequenti et timenli, de dominica et di- laudaret. Augustinus, seriu. 313 de sancto Cypriano,
vina auctoritate prœceptum qui inter cœtera quœ pag. 1258 tom. V.
;
<l Hœc sunt quœ dicenda habuimus de Cypriano,
ostendere et revelnre dignatus est, et hoc addidit : ita-
que qui Christo non crédit sacerdotem fucienti , pos- atque haud scio an plura dicere necesse sit ; neque
tea credere incipiei sacerdotem vindicanti. Quanquam enim etiamsi orutionem in longum produxerimus
sciam somnia ridicula et visiones ineptas quibusdam quidquam tamen afferre queamus quod illius virtutibus
videri, sed utique lUis qui malunt contra sacerdotes et existimationi quam de eo unusquisque concepit,
credere,quam sacerdoti. Cypr., Epist. 66, pag. 286. ulla ex parte respondeat. Gregor. Na^iauz., Orat. 18,
Nobis quoque ipsis mimmis et extremis, quoties
^ pag. 284.
revelatum est, quam fréquenter atque manifeste de 12 Ego Cyprianum catholicum episcopum, catholicum
Dei dignatione prœceptum est, ut constanter assidue martyrem et quanto magis magnus erat, ianto se in
,
et publiée prœdicarem, fratres nostros non esse lu- omnibus humiliantem ut coram Deo inveniret gra-
,
gendos accersitione dominica de sœculo liberatos, cum tiam, nullo prorsus modo crediderim, in sancto prœ-
tciamus non eos amitti, sed prœmitti, recedentes prœ- sertim concilio collegarum aliud protulisse quam corde
cedere ut proficiscentes, ut navigantes soient; deside- gestabat. August., lib. III de Bapt., cap. 3, pag. 110
rari eos debere, non plangi ; nec accipiendas esse hic tom. IX.
380 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
membre de l'Eplise * , ses (^crits, répandus distingué par son éloquence; ses ouvrages
'
jusque dans les Kj^lisos d'Orient ', et cites sont tous admirables, chacun en leur genre;
dans les conciles pour la défense de la foi et il a tant de grâce pour orner tout ce qu'il
contre les hérétiques, l'ont l'ait regarder dit, tant de netteté pour le faire entendre,
comme un maître et un juge de la doctrine tant de force pour le persuader, qu'il est dif-
de l'Eglise *. Saint Jérômfî qui n'en a pas ,
ficile déjuger en quoi il excelle le plus, ou
voulu faire le catalogue, « parce qu'ils sont", dans beauté de l'expression, ou dans la
la
dit-il, plus connus que le soleil, les compare clarté du raisonnement et des pensées, ou
à une source très -pure ' dont les eaux cou- dans la force des preuves. Il avait un génie
lent avec mie agréable douceur. Ils ressem- facile, abondant, agréable, et, ce qui est une
blent aussi très -souvent à un torrent qui des plus belles qualités de l'orateur, fort clair
se précipite avec impétuosité et rompt tous et fort net. » Les plus célèbres écrivains de
les obstaclesqu'on lui oppose. Quoique les l'antiquité en ont fait " de semblables éloges,
païens ne pussent les entendre, parce qu'ils et les difficultés qu'il eut avec saint Etienne
ne sont composés que pour les iidèles ', ils n'ont pas empêché que le pape Gélase n'ait
ne pouvaient pas ne point estimer la beauté mis ses écrits à la tète de ceux des saints
des expressions de saint Cyprien et de son Pères *** que l'Eglise reçoit avec vénération.
style. » — « Il est, dit Lactance, le seul », « Sa langue **, immortelle dans la mort même
entre les défenseurs de la vérité, qui se soit de son corps, s'est fait entendre partout. Elle
1 Fuit in eo, sicut compertum habemus, et contra in suo génère miranda, Erat enim ingénia facili , co-
errores diaboli, spiritali sapientiœ plenitudo, et ad- pioso, suavi , quœ sermanis maxima
et est virtus,
versum persecuiiones mundi diristiani pectoris infati- aperto; ut discernere nequeas utrum ne
ornatiar in
gata constanlia Vere hic mirabilis atque omnium eloquendo, an facilior in explicundo, an potentiar in
ubique studiis celebrandus, quem sanctilas sacerdotem, persuudendo fuerit. Hic tamen placere ultra verba sa-
perilia doclorem , fides martyrem consea'avit. S. Ma- cramerdum ignorantibus non patest, quoniam mystica
xiams, llom. 2 de S. Cyprian., pag. AO tom. VI Bi- sunt quœ locutus est et ad id prœparata ut a salis
, ,
sectantes adversus hœreticos et schismaticos enodemus. Al Carthago potens Cypriano martyre gaudet :
*
August., lib. VII de Bapt., cap. 1, pag. 185 tom. IX, Cujus et are simul profusi, et sanguine fontes,
2 Beatissimum , corona etiam martyrii gloriosissi- Fœcundaverunt Libyœ sitientis arenas.
mum Cyprianum nec Africanis atque Occidentalibus
, S. Paulin., Carm. 26, p. 293 lom. III Bibl. Pair.
tantum , verum et Orientalibus Ecclesiis fama jjrœdi- Vaiis Cypi'iani et martyris
cante et scripta ejus lonye lateque diffundente , notis- Cor, lingua, sensus, dignitas
simum, etiam ipse hœresiarches istorum Pelagius, Mortem ferendo proferunt.
cum débita cerle honore commémorât. August., lib. IV Vitalis ictum nex dédit,
ad Bonif., cap. 8, pag. 480 tom. X. Mucrone parla lux micat.
3 Concil. Ephes., Act, 1, pag. 512, tom. III Concil. Dictis fuit prœfulgidus
Concil. Chalced., Act. 1, pag. 288 tom. IV. Et ore dives unica,
Vt non solum caput orbis, verum etiam latera illi
* Torrentis unda gurgitis
judicio testimonium perhiberent , adhibitus est a me- Impacta cornu spicula
ridie beatissimus Cyprianus, episcopus Carthaginensis Sermone vincens pivmulo.
et martyr, a Septentrione sanctus Ambrosius, Mediola- Ennod., Hymn. 12, pag. 423 tom. IX Bibl. Patr.
nensis episcopus.Hi sunt igitur omnes apud Ephesum Ecclesia non approbans beati Cypriani ejusque prœ-
sacrato decalogi numéro ynagistri, consiliarii, testes decessoris Agrippini, qui hoc ante statuerai, de bap-
judicesque producli quorum beata illa synodm doc-
,
tizandis omnibus hœreticis definitionem non solum ,
trinam tenens, consilium sequens, credens tcstimonio, ipsas, sed etomnes qui cum illis hoc definierunt epis-
obediens judicio, absque tœdio, prœsumptione et gratia copos Patres adscribit eorumque fidem atque doctri-
,
de fidei regulis pronuntiavit. Vincent. Lirin., in Com- nam, et maxime Cypriani tata orbe radiantem judicat
mon., pag. 367 edit. Baluz. esse iaudftbilem. Viicundns ,
pro Defens. trium capi-
^ Hujus ingenii supcrfluum est indicem texere, cum tuL, lib. X, pag. 428.
10 Post harum auctoritaiem et custa-
sole clariora sint ejus opéra. Hieronym., de Viris [ conciliorum )
' Unus igitur prœcipnus et clarus extitit Cyprianus, Inde dama Cyprianum, sed decus orbis et magistrum.
quoniam et magnum sibi gloriam ex arlis oratoriœ Est praprius patriœ martyr, sed amore et ore noster.
professione quwsierat, et admodum multa conscripsit Incubât in Libya sunguis, sed ubique lingua poUet :
,
a instruit les Gaules, l'Anglelerre, et jus- plication ù les lire, ne donna jamais dans
il
ment, heureusement expliqués. Saint Augus- condamné, il est louable pour la conduite
tin ^, prêchant à Carthage contre les péla- qu'il a tenue dans cette dispute. S'il a sou-
giens, lut en pleine assemblée une partie de tenu l'erreur, c'a été avec douceur et avec un
la lettre de saint Cyprien à Fidus, pour faire esprit de paix, prêt à recevoir les éclaircisse-
voir quel était le sens canonique et catholique ments des autres, si on lui en eût donné '.
des Ecritures, et que ce qu'il soutenait, au Mais comme on se contentait *, dit saint Au-
nom de l'Eglise , péché originel,
touchant le gustin, de lui opposer la coutume, sans ap-
n'était point une doctrine nouvellement in- puyer cette coutume par des raisons propor-
ventée, mais celle des chrétiens, et un des tionnées à un esprit aussi éminent que le
fondements de notre religion. C'est donc avec sien, cet homme, si grave et si judicieux, ne
raison que saint Jérôme ^ regrette que saint crut pas devoir quitter un sentiment appuyé
Cyprien ne se soit pas appliqué à l'explication sur l'autorité de ses prédécesseurs et sur des
des divines Ecritures. Mais les fréquentes raisons qui, bien que fausses, paraissaient
persécutions des païens ne lui en laissaient très-fortes, et sur lesquelles on ne le satis-
point le loisir et l'obligeaient de s'appliquer faisait point et qui étaient telles , que saint
,
tout entier à affermir son peuple dans la foi Augustin même avoue ^ qu'elles l'auraient
et à l'exciter à la pratique de la vertu. emporté aussi bien que saint Cyprien, si l'au-
Ses er- 2. Quclqu'estime que saint Cyprien fît des torité de toute TEglise, qui avait décidé la
reurs sur le -«-t. j. l </
^^^^^^ dc Tcrtullieu, et quelle que fût son ap- question, ne l'eût obligé de l'examiner avec
hérétiquer
Sola superstes agit de corpore, sola obire nescit. mauté du Pontife romain comme de droit divin.
Dum genus esse hominum Christus sinet, et vigere Voyez Dissert, théol. hist. de Thomassiu Patrolog, ,
* Hieron., Epist. 49 ad Paulin., pag. 567 tom. IV, legi fateor, et profecto issem in eamdem sententiam,
ubi supra. nisi me ad diligentiorem considerationem revocaret
3 Saint Cyprien n'a résisté à la sentence du pape tanta auctoritas aliorum, quos vel pares gratia doc-
saint Etienne que parce qu'il crut y voir abus de trinœ, vel ettam fartasse doctiores per tôt gentes lati-
pouvoir mais il n'a jamais nié le pouvoir lui-même,
; nas, grcBcas, barbaras et ipsam kebrœam Ecclesia toto
et il ne s'est jamais séparé de Rome , ce qu'il n'eût orbe diffusa parère potuit, August., lib. III de Bapt.f
pas manqué de faire s'il n'eût pas reconnu la pri- cap. 4, pag. 111 tom. IX.
382 mSTOTRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
plus de soin. Enfin, quelque
s'il s'est élevé Crinitus ; à Vei>ise, en 1547, in-8"; à Rome,
nuage de lu frap^ililé liumaine dans une • en 1503, in-fol., de l'impression d'Aide Ma-
Ame aussi éclairée, il a été dissipé par le glo- nuce, sur de très-anciens manuscrits dont un,
rieux éclat de son sang répandu {lour Jésus- qui était de l'Eglise de Vérone, avait plus de
Clu'ist, d;iiis la paix de son cœur et dans l'u- neuf cents ans. Outre beauté des carac-
la
nité de l'Eglise. Il est inutile de remarquer tères, cette édition surpa^^se toutes les précé-
que saint Cyprien ne * croyait pas qu'un dentes, en ce qu'elle est augmentée d'un cin-
évoque schismatique pût oflrir les divins quième livre Morel en donna une
de lettres.
mystères et sanctifier le pain qu'on y offrait; nouvelle, en l,56i, in-fol., à Paris, dans la-
c'était une suite de son principe sur l'invali- quelle il prétendait avoir mis les lettres de
dité du baptême des hérétiques. un meilleur
saint Cyprien ilans oi-dre ; mais
3. L'édition des œuvres de saint Cyprien Pamélius, ayant remarqué tout le contraire,
(les iSMiocs
latineâ de
miiit Cy-
que l'on estime la plus ancienne, est sans les rangea suivant l'ordre des temps, dans
prieu.
date et ne porte ni le nom de l'imprimeur, l'édition qu'il donna des écrits de saint Cy-
où elle a été laite. Conrad
ni celui de la ville prien, avec la Vie de ce Saint, et de savants
Sweinlieim et Arnoul Paunartz les réimpri- commentaires, qui sont toutefois moins utiles
mèrent à Rome, en 1471, in-fol. Vindclinus, pour l'intelligence du texte que pour faire re-
de Spire, les donna la même année à Venise. marquer le rapport qu'il y a entre la doctrine
EUes parurent à Paris, en 1512, in-4°, par et la discipline de notre temps avec celui de
les soins de Rembold et de Jean Yaterloës ; saint Cyprien ; cette édition parut à Anvers,
à Cologne, en 1520 et en 1G18; à Bàle, en en 1568, chez la veuve et les héritiers de Jean
1520, par les soins d'Erasme, qui augmenta Stellius, et en 1589, chez Bellerus, in-fol., et
cette édition d'une prélace et de quebiues en 1593, en 1574, in-fol., chez
16312; à Paris,
notes, et c'est ainsi qu'elle fut, dit-on, réim- Nivelle, eten 1603, 1607, 1616, 1633, 1644;
primée en 1525, 1549, 1558, et à Cologne, en à Cologne, en 1617, 1618, 1632; à Genève,
1521, 1522, 1525, 1575, et avec les notes de en 1593 et 1617, avec les notes de Goulart et
Gravius, en 1544, 1549. Erasme a inséré dans de Pamélius ; mais le premier a ajouté à cette
son édition un traité de Duplici Martyrio, qui édition de longues et ennuyeuses observa-
n'est pas de saint Cyprien, que plusieurs au- tions, dans lesquelles il s'efforce de réfuter le
teurs ont cru d'Erasme lui-même. En effet, second et de rendre saint Cyprien calviniste.
on y reconnaît son style et sa manière de En 1600, Thomas James donna son Cypria-
penser. Ce traité des Deux sortes de martyres nus redivivus, à Londres ; Possevin en a tiré
a été traduit en italien par un moine de Flo- plusieurs variantes et corrections touchant le
rence, et imprimé dans cette ville, en 1567, livre de l'Unité de V Eglise, recueillies de qua-
in-8°.Les œuvres de saint Cyprien ont en- tre manuscrits d'Angleterre '.
tion est pleine de fautes et l'auteur, qui s'y Pamélius, mais il chargea le texte de quantité
est caché sous le nom d'Erasme, a altéré le de notes pour en éclaircir les endroits diffi-
texte de saint Cyprien par des additions con- ciles, et d'observations sur la discipline usitée
sidérables ; à Anvers, en 1541, de l'édition du temps de saint Cyprien. La liberté qu'il
d'Erasme, in-S", et en 1542, in-8'', par Pierre s'y donna et qu'il s'était déjà donnée, dans Té-
* Ad martyrii coronam meruit pervenire; ut si qua ligionp sacrilegus, inobsequens servus, filius impius,
in ejus lucidam meniem ex hurnana conditione nebula frater inimicus, contempiis episcopis et Dei sacerdoti-
irrepserat, gloriosa seremtate fulgentis sanguinis fu- bus derelictis , consliluere auclet aliud altare , precem
garetur Quod ergo ille vir sanctus de ba/jHsmo altérant iliicitis vocibus facere, doniinicœ hostiœ veri-
aliter sentiem quant se res hahebat, quœ postea pér- tutem ptr f'alsa sacrificia profanare. Cyprian., lib. de
ir actata et diligentissima consideratione firmata est, Unit. Ecoles., pag. 83. Qui ergo nec unitatem spiri-
in catholica unitate permansit, et charitaiis ubertate tus, nec conjanctionem pacis observât, et se ah Eccle-
compensutum est, et passionis fulce purgatum. August., siœ vinculo atque a sacerdotum collegio séparât epis- ,
lib. I de Bupt., cap 18, pag. 94 lom. IX. copi nec potestatem potest habere, nec honorent, qui
' Aversandus est talis atque fugiendus quisquis fue- episcopatus nec umtatem voluit tenere, nec pacem. Cy-
rit ab Ecclesia separatus Hostis altaris, adversus prian., Epist. 35, pag. 249.
sacrificium Chmti rebellis, pro fide pvrfidus, pro re* s Posseviu, tom. I Appendix.
[ni* SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 383
dition de Tertullien, d'affaiblir par ses gloses des écrits do saint Cyprien; ces dissertations
les endroits qui établissent les prérogatives avaient été imprimées à Oxford, en 1 eS^, in-
des évêques de Rome, et de combattre des 8°. Dans la première, Dodwelle examine si le
sentiments reçus dans l'Eglise, lui a attiré nom de clergé signifiait également les minis-
des ennemis, entre autres de l'Aubespine ;
tres de l'Eglise et le peuple; dans la seconde,
et Grotius témoigne que Rigaut aurait été
' quelles étaient les marques distinctives des
déclaré hérétique, si ce prélat, qui avait déjà lettres que
évêques s'envoyaient en signe
les
recueilli les censures des universités et quel- de communion, ou pour quelques affaires qui
ques autres suffrages, eût vécu plus long- concernaient l'Eglise; la troisième est tou-
temps. Il est inexcusable, en particulier, sur chant les femmes convaincues d'avoir couché
la manière dont il parle du baptême des en- avec des clercs; il appuie, dans la quatrième,
fants, qu'il nie être de tradition apostolique, ce qui est dit des fréquentes visions dont Dieu
et sur quelques autres points que l'on a re- favorisait saint Cyprien ; dans la cinquième,
levés dans le tome premier des Remarques il traite des dyptiques, de l'usage de réciter à
sur la Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques l'autel, pendant le sacrifice, les noms des fi-
de Dupiu. Dupuy, qui avait imprimé le saint dèles vivants et morts dans la communion de
Cyprien de Rigaut, en i648, le réimprima en l'Eglise, et des billets que les martyrs don-
1666, augmenté des commentaires de Phi- naient aux tombés; la sixième regarde les
lippe le Prieur, et y ajouta quelques notes prêtres qui étaient chargés d'instruire les ca-
choisies de Pamélius, avec les écrits de Mi- téchumènes, et les clercs qui étaient porteurs
nuce- Félix, d'Arnobe, de Firmicus et de des lettres des évêques; dans la sep^
il traite,
Commodianus. L'édition d'Altdorf, en 1681, tième de l'unité de l'Eglise et de la primauté
par Frédéric Reinard, ministre d'Allemagne, de saint Pierre; dans la huitième, de quelle
ne contient que les lettres de saint Cyprien autorité étaient les lettres d'indulgence que
revues sur un grand nombre de manuscrits ; lesmartyrs accordaient aux tombés; dans la
celle d'Oxford, en 1682, réimprimée à Paris, neuvième, du pouvoir des prêtres pendant la
en 1700, in-fol., à Brème, en 1690 et à Ams- vacance du siège; dans la dixième, de la dis-
terdam, en 1699, est plus étendue, plus tinction des évêques et des prêtres; il prétend,
exacte, plus utile que toutes les précédentes; dans la onzième, qu'il y a eu beaucoup moins
les caractères en sont beaux, et le texte, revu de martyrs dans les premiers siècles qu'on ne
sur quatre nouveaux manuscrits, est très-cor- le croit ordinairement; c'est contre cette dis-
rect; lesmarges sont chargées de sommaires sertation que Dom Thierry Ruinart a fait
qui mettent d'abord le lecteur au fait de ce celle qu'ila mise à la tête des Actes sincères
qui est contenu dans le corps de l'ouvrage ;
des Martyrs; la douzième marque les motifs
on trouve au-dessous du texte les différentes de la confiance des martyrs dans les tour-
leçons des manuscrits et des éditions, et au ments, et la treizième, l'excellence du bap-
bas des pages de savantes notes, tant de l'édi- tême de sang.
teur que de Rigaut et de quelques autres, qui Enfin Baluze, ayant remarqué des défauts
ont travaillé à éclaircir le texte de saint Cy- dans toutes ces éditions, et ne désespérant
prien. Les traités de ce Père tiennent le pre- pas d'en donner une meilleure, s'appliqua
mier rang, viennent ensuite ses lettres, puis avec soin à lire les ouvrages imprimés de
les ouvrages qu'on lui a faussement attribués. saint Cyprien et à examiner tous les manus-
Jean Fellus, évêque d'Oxford, qui a pris soin crits qu'il en put trouver. Son éloignement
de cette édition, a mis à la tête des œuvres de de Paris, en 1710, n'interrompit presque
saint Cyprien la Vie de ce Père par Ponce, pas l'application qu'il apportait à ce travail,
diacre; quelques témoignages qu'on trouve et il profita de son exil pour visiter tous les
de lui dans les anciens; l'histoire de sa vie et manuscrits des œuvres de saint Cyprien qu'il
de ses ouvrages, composée par Jean Pear- put trouver dans les différents lieux par où
son, évêque de Chester, en Angleterre ^. On il passa. Etant de retour, à la fin de 1713
a ajouté à la fm, dans les éditions de Brème, il redoubla son application et commença à ,
1690, et d'Amsterdam, 1699, treize disserta- faire impinmer en 1717 ; mais la mort l'ayant
tions de Henri Dodwelle sur divers endroits enlevé l'année suivante, à l'âge de quatre-
» Hugo Grotius ad Gallos, Epist. ad Salmas,, de propositions hétérodoxes, qui ont rendu l'évêque
pag. 323. Fell suspect d'arianisme. Voyez, entre autres, la note
' Il se rencontre dans cette édition grand nombre de la page 79. {L'éditeur.)
38 i HISTOIRE Gl'NÉRALE DES AT3rEURS ECCLÉSIASTIQUES.
vingt-huit ans, le soin do cette édition a ùUi avait été imprimé, en 1500, à Paris, sous le
confie à Dom^Prudont Maran. [ Le savant re- nom de saint Cyprien •.
in-8°. —
Le livre de l'Unité de l'Eglise, daus lume. Les livres de l'Unité de l'Eglise ca-
les éditions de la Bibl. Maxim. Pont., 6 vol., tholique, des Tombés et de l'Habit des vierges,
imprimées à Rome, en 1695 et 1099. Ce même ont paru à Tubingen, en 1853, in-8°, revus
livre avait été imprimé en 1657, avec celui sur d'anciens manuscrits et annotés par J.-G.
de saint Augustin qui traite de la même ma- Krabinger. ] Edi
lixte. La préface est de Georges Calixte, son noine de Metz, fit imprimer à Paris, chez Ni- prkn."
père ; le Père Combefis a donné, daus sa Jii- colas Chesneau, les œuvres de saint Cyprien
bliothè'jue des prédicateurs, le petit livre de la traduites en français. Simon Goulart, do la
Mortalité, qui a été aussi donné séparément secte des calvinistes, donna, la même année,
avec des notes par Barlhélemi Frank, minis- une nouvelle traduction du livre des Tombés,
tre de l'église de Neustad, à léua, en 1092, qu'il fit imprimer avec une remontrance de
in-12. Oq trouve, dans la même Bibliothèque sa façon aux apostats. Le sieur de Laval, c'est-
des prédicateurs, le discours de la Louange des à-dire, comme on le croit, le duc de Luynes,
martyy's, à Moïse et à Maxime. Le traité de Car- fit aussi imprimer, en notre langue, à Paris,
dinalibus Christi operibus, que les nouvelles en 1004, les traités de l'Oraison dominicale
éditions ont restitué à leur véritable auteur. et de la Mortalité. Celui des Bonnes Œuvres
Ces différentes éditions sont indiquées par D. Ceillier dans les corrections à la fin du 3» volume. {L'édit.)
fin' SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — SAINT CYPRIEN. 385
se trouve à ]^ fin du second volume de r Au- 1831, tom. V-IX de la collection. Une ver-
mône chrétienne, ouvrage de M. de Saiut-Cy- sion anglaise a paru à Oxford en 1841, c'est
ran. Lonibert donna, en HilH, à Paris, tous la deuxième édition.] Le célèbre Cochlée a
les ouvrages de saint Cyprien on l'runcais; et donné en allemand le traité de la Singularité
ils ont été réimprimés en la même langue, à des clercs, 1538. Un moine de Florence a tra-
Rouen, en 1716, in-i". Cette traduction, que duit plusieurs sermons de saint Cyprien en
l'on estime pour son élégance et sa pureté, langue italienne; ils ont été imprimés à Flo-
est accompagnée de remarques très-reclier- rence avec beaucoup d'autres sermons et
chées et d'une nouvelle Vie de saint Cyprien traitésde plusieurs Pères, chez les Juntes,
tirée de ses écrits. Lombert a aussi traduit la en lo72, iu-4°. Le commandeur Annibal Caro
Vie de saint Cyprien, par le diacre Pouce, a donné, dans la même langue, le premier
avec les divers actes de son martyre et le discours de saint Cyprien sur l'Aumône, Ve-
traité de la Réitération du baptême, dont l'au- nise 1567, in-4''; il y a joint deux discours
teur est incertain. Quoiqu'il suive, pour l'ar- de saint Grégoire de Naziauze.
rangement des lettres de saint Cyprien, ce-
lui qu'elles ont dans l'édition de Pamélius, ARTICLE VII.
il reconnaît néanmoins que cet arrangement
DE LA VIE DE SAINT CYPRIEN, ÉCRITE PAR SAINT
n'est pas- exact, et marque la suite naturelle
PONCE, ET DES DIVERS ACTES DE SON MARTYRE.
où elles devaient être. En 1088, Lenfant, si
connu par de Pise,
ses Histoires des conciles Quelqu'abrégée que soit la Vie de saint
1 .
SaintPon-
ce a<itei!r
de Constance et de Bâle, fit imprimer en fran- Cyprien par saint Ponce, elle a paru assez de
,
la Vie de
saint Cy-
çais, à Amsterdam, in-l^, les lettres de saint considérable à saint Jérôme pour mettre ce- prien.
Cyprien aux confesseurs et aux martyrs, avec lui qui en est l'auteur au l'ang des écrivains
des remarques historiques et morales. Long- ecclésiastiques. Il appelle même son ouvrage
temps auparavant, c'est-à-dire en 1565, un écrit ' excellent. Scaliger en estime l'élé-
François de Belleforest, qui a tant travaille gance et la politesse ^. Il faut néanmoins
sur l'histoire de France, avait donné, à Paris, convenir que son style est trop affecté et peu
in -8°, les sermons de ce Père, traduits en naturel, et que sa narration tient plus de l'o-
français. rateur que de l'historien. Mais elle n'en est
Le traité de la Singularité des clercs, qu'on pas moins certaine, témoignage seul de
et le
trouve ordinairement parmi les oeuvres de ce saint Jérôme pour lever tous les dou-
' suffît
saint docteur, a paru en français, en 1719, tes que l'affectation et les autres défauts du
chez Lottin. Les œuvres complètes de saint style pourraient répandre sur l'authenticité
Cyprien ont été traduites en français par Mgr de cette pièce. Ponce était diacre de saint Cy-
Guillon, évêque du Maroc, Paris, chez Auge prien, et il paraît, par le détail qu'il nous a
et C"; par M. de Genoude, tom. V bis, les laissé de ses actions, qu'il eu avait été témoin
Pères traduits en français, Paris, 1842, chez oculaire *, ou qu'il les avait apprises de per-
Sapia. Dans cette traduction se trouvent les sonnes dignes de foi; ce qu'il y a de certain,
traités des Spectacles, desDouze illusions du c'est qu'il l'accompagna dans son exil * et
monde, de la Gloire du martyre. jusqu'au jour de sa mort ; et il proteste « que
L'Allemagne possède une version en alle- s'il eut une extrême joie de le voir entrer dans
mand des œuvres de saint Cyprien, faite par la gloire par le martyre, il eut encore plus
Feyerabend, 4 volumes in-8% Munich 1818- de douleur de ne pas mourir avec lui. 11 com-
d 820; et une autre dans les Œuvres complètes posa cet écrit aux instantes prières de quel-
des Pères qui s'impriment à Kempten, depuis ques fidèles ' qui souhaitaient d'avoir une
* Pontius, diaconus Cypriani, usque ad diem passio- necesse est, ignorantiœ meœ potius quam illius glorics
nis ejus, cum ipso exilium sustinens, egrcgium volu- deroyelur. Pont., in Vita Cypr., pag. 2.
men Vilœ et Passionis Cypriani reliquit. Hieron., in 6 Hieronym., ubi supra.
Catal., cap. 68. 6 Multumac nimis multum de gloria ejus exulta;
^ De hac pestilentia consule cuîtissimum volumen plus tamen doleo quod remansi. Pont., in Vita Cypr.,
Pontii diaconi de Vita Cypriani. Scaliger, in notis pag. 11.
ad Chronicon Euseb., pag. 216, col. 1. 'In qua parte si dixero nos opibus facundiœ defici,
3 Hieronym., iu Cataloyo, cap.
68, ubi supra. minus dico, facundia enim ipsa déficit diyna facultate,
* Si quibus ejus inlerfui, si qua de antiquioribus quœ desiderium vestrum pleno spiritu satiet. Ita
ejus operiùus contperi, dicam : Hanc tamen petens ve- utrimque graviter uryemur. llle nos virtutibus suis
niam ut quidquid minus dixero, minus enim dicam onerat, vos nos precibus fatigutis. Idem, pag. 1.
u 25
380 IlISTOTUE GÉNhlRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
counaissancc plus particulière de la vie de chez Guérin. Le R. P. Dom Prudent Maran,
ce saint martyr, et afin qu'il fût connu dans bénédictin de la congrégation de Saint-INIaur,
la postt'^rité * par ses actions, comme il ne qui a eu soin <le l'éthtion des œuvres de saint
pouvait manquer de l'être par ses écrits. Tri- Cyprien, que Raluze avait enli'cprise et pres-
thème l'a ronlondu avec saint Pouce, mar- que finie lorsqu'il mourut, a orné aussi cette
tyr dans les Gaules, sous Valcrien et Gai- édition d'une longue Vie de saint Cyprien,
lien *; ne paraît pas avoir été mieux
et il qui peut être regardée comme un excellent
informé, lorsqu'il a dit que Ponce, disciple morceau d'histoire ecclésiastique, et qui mar-
de saint Cyprien, avait engagé, par la dou- que l'érudition de celui qui en est l'auteur.
ceur de ses discours, les deux Philippe, em- On y examine d'abord la chfférence qui est
Artfs (In pereurs, et les principaux de l'Empire ro- entre saint Cyprien de Carthage et Cyprien
mnityre (le
saint Çy- main, à embrasser la religion chrétienne ^. d'Antioche ; on s'étend sur la conversion du
prien.
2. Outre la Vie de saint Cyprien dont nous premier, sur ses études et sur ses écrits avant
venons de parler, nous avons encore les Ac- et depuis son épiscopat. On fait connaître
tes de son martyre, qui conlionuent sa pre- l'origine et le progrès de la persécution de
mière et sa seconde confession devant le Dèce, le nombre des tombés et des confes-
proconsul, dans la persécution de Valérieu. seurs; ce qui donne lieu de parler au long
On ne doute point qu'ils n'aient été tirés du des libellatiques, dont il est si souvent fait
greffe ou écrits par des témoins oculaires ; mention dans les écrits du saint évoque de
et on voit, par la lettre LXXVII% que Némé- Carthage. Ce qui regarde les lettres de ce
sius et les autres martyrs écrivirent au saint saint docteur, et l'ordre qu'on doit leur don-
évèque de Carthagc qu'ils avaient en main ner, est traité avec exactitude; et l'on peut
les Actes de sa première confession *. Saint dire que ce point demande encore plus de
Augustin les avait aussi tout entiers, comme sagacité que de recherches. Toute raffaire de
il paraît par les sermons 309 et suivants, Novatien occupe une partie de cette Vie, et
qu'il a en l'honneur de saint Cyprien.
faits ce morceau n'est pas un des moins curieux.
On a imprimé
ces Actes, avec la Vie de ce Il s'en rencontre ainsi plusieiirs autres dans ,
Saint par le diacre Ponce , dans les éditions cette Vie, qui sont traités avec le même soin
de Fellus, et dans le recueil de Dom Thierry et la même Avant cet ouvrage,
exactitude.
Ruinart, et ils ont été traduits en français Dom Gervaise, ancien abbé de la Trappe,
par Lombert et de Maupertuy. Le premier avait donné, en français, une Vie très-détaillée
les a donnés au commencement de son ex- de saint Cyprien, avec quelques dissertations
cellente traduction française des ouvrages sur plusieurs points difficiles de l'histoire de
de saint Cyprien, dont nous avons plusieurs ce temps-là. Mais il n'a presque rien dit de
éditions. Le second les a mis dans la traduc- nouveau que l'on ne trouvât déjà épars
et
tion qu'il a donnée, en français, des Actes dans Mémoires pour servir à l'His-
les savants
sincères recueiUis par Dom Ruinart, et qu'il toire ecclésiastique , de le Nain de Tillemont.
a fait imprimer, en 1708, en deux volumes Ainsi cette Vie de saint Cyprien ^, qui est
in-8°. On en a donné une nouvelle édition, en à la tète de l'édition des œuvres de ce Père,
1732j en plusieurs volumes in-12, à Paris, entreprise par Baluze et finie par Dom Pru-
' Cyprianus tametsi multa conscripsit, per quœ me- tième jour de mai, tom. I, pag. 750.
moria digni nominis supervivet, eloquentiœ ejus ac ' M. Migne a reproduit cette Vie dans le tome III
Dei grattœ larga fœcunditas ita se copia et ubertate de sa Patrologie latine, avec les Actes proconsulaires
sermotiis exiendit, ut usque in fmem mundi for tasse de saint Cyprien. M. de Genoude a traduit la Vie,
non taceat ; tamen quia operibus ejus ac meritis etiam donnée par le diacre Ponce, t. V bis des Pères. [L'édit.)
hcec prœrogativa debetur, ut exemplum suum in litte- * Quasi bonus et verus doctor, quid nos discipuli
ras digeratur, placuit summatim pauca conscribere. secuti apud prœsidem dicere debemus, prior apud acta
Pontius, in Vita Cgpr., pag, 1. proconsulis pronuntiusti, et tuba canens Dei milites
* Pontius, presbyter beati Cypriani auditor atque cœlestibus armis instructos ad congressionis prœlium
discipulus , vir doctus et sanctus, et dcclamator egre- excilasti. Nemesius, Epist. 77 ad Cyprian.
gius, post magistri sui gloriositriumphum veniens in 6 La Patrologie de M. Migne, tom. IV, a reproduit
Gallias apud Cymellam. urbem, pro fide Chtùsti mar- cette Vie. Lefort, libraire, a publié une Vie de saint
tyrii palmam adeptus est. Hic Pontius sua melliflua Cyprien contenant des extraits des ouvrages de ce
prœdicatione et industria duos Philippos imperatores Père elle est estimée. Ou trouve aussi, à la librai-
;
ad Christum convertit, et primos ex romanis princi- rie Périsse, une Vie de saint Cyprien écrite en an-
pibus idolis renuntiare persuasit. Tritheinus, in Cata- glais par Poole et traduite en français par CoUom-
iogoy cap. 42. Voyez les Actes de BoUaudus, au hui- bet, in-S», 1842. {L'éditeur.)
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XV. — ACTES DU MARTYRE DE SAINT FRUCTUEUX. 387
dent Maraii, est préféral)le à celle de Doni lire les dillerentes Vies du saint évêque de
Gervaise. Nous avons cru que ce petit dé- Carthai^e, dont nous avons parié dans le pré-
tail ne serait pas inutile à ceux qui voudraient sent chapitre.
CHAPITRE XV.
Marien, lecteur.
1. La conformité des Actes du martyre de et plein de joie, priait sans cesse, et les frères
saint Fructueux, que nous avons aujourd'hui, qui s'y trouvaient se recommandaient à lui.
avec ceux qu'on lisait * publiquement dans Il baptisa en prison un nommé Rogatien et
les Eglises d'Afrique, du temps de saint Au- célébra la station du mercredi, dans laquelle
gustin^ ne nous permet pas de douter de leur on avait coutume de jeûner jusqu'à trois
authenticité. Ce saint docteur les cite * sou- heures après midi. Le sixième jour depuis
vent dans le sermon qu'il prononça, en son leur entrée en prison le vendredi 24 jan- ,
honneur, le jour de son martyre et Prudence , vier ^, le gouverneur Emilien, s'étant fait
'
les a copiés presque tout entiers dans l'éloge amener Fructueux et ses deux diacres, leur
qu'il en a fuit. Ils sont un peu plus amples demanda d'abord s'ils ne savaient pas ce
dans certains manuscrits que dans d'autres, que les empereurs avaient ordonné. Fruc-
mais sans que cela change rien au sens. tueux dit « Je ne sais ce qu'ils ont ordonné
: :
2. Saint Fructueux était évêque de Tar- pour moi, je suis chrétien. » Emilien dit que
ragone, alors la principale ville d'Espagne, les empereurs ordonnaient que l'on adorât
et encore aujourd'hui la métropole de la Ca- les dieux. Fructueux répondit qu'il n'adorait
talogne. Un jour de dimanche, qui était le qu'un seul Dieu qui a fait le ciel et la terre,
16 janvier de l'an 259, sous les empereurs la mer qui y est compris. Emilien,
et tout ce
Valérien et Gallien , et les consuls Emilien et se tournant vers Augure, lui dit de ne pas
Bassus , il dans sa chambre, lorsque six
était imiter les discours de Fructueux. Ce diacre
soldats, de ceux que l'on appelait bénéficiers, répondit : « J'adore Dieu tout-puissant. » —
et qui étaient du premier rang, vinrent à son « Adorez-vous aussi Fructueux? v répondit le
logis, par ordre du gouverneur *. Les ayant en- proconsul. Augure lui fit cette belle réponse,
tendus frapper à sa porte avec leurs baguet- relevée par saint Augustin ^ : « Je n'adore
tes, il se leva aussitôt et ouvrit. Ils lui ordon- point Fructueux, mais celui que Fructueux
nèrent de venir trouver le gouverneur, avec lui-même adore. » Emilien demanda à Fruc-
.ses diacres; il y alla accompagné de deux tueux s'il était évêque « Je le suis, lui dit le
:
S20, qu'ils furent arrivés, on les mit en prison, et verneur, et commanda qu'ils fussent brûlés
il
ils y demeurèrent six jours. Fructueux, as- vifs. On mena Fructueux, avec ses diacres, à
suré de remporter la couronne du martyre, l'amphithéâtre tout : le peuple le plaignait, car
episcopi..,. Me orare necesse est.... Beati quorum Numquid et tu Fructuosuna colis? Et ille : Ego non
passio recifata est. August., serm. 273 in Nat. mart. colo Fructuosum, sed Deuiu colo quem coliL et
Fruct. episc, Augur. et Euiog.diac, pag. 1105, 1106, Fiucluosus. Quomodo nos adntonuit ut martyres hono-
1107, lom. V. reinus, et cum martyribus Deum colamus. Aug., ubi
2 Idem, ibid. — 3 Prudent., Hijmn. 6, lib, de Co- supra.
ron. — * Ruinart., Acta si?icer. Martyr., pag. 219.
388 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
il était aimé, même des infidèles, à cause de pas encore brûlés , ils appelèrent Emilien lui-
sa vertu. Les chrétiens se réjouissaient plus de même, et lui dirent de venir voir comment
sa gloire qu'ils ne s'affligeaifînt de le perdre. ceux qu'il avait condamnés étaient accueillis
Plusieurs, par uu mouviîmcnt de charité, lui dans la gloire. Il vint, mais il ne fut pas di-
ofl'raient un breuvage pour le fortifier, mais gne de les voir. Cependant les fidèles vinrent
il dit: « Il n'est pas encore l'heure de
rompre la nuit à ramphithéàtre, avec du vin, pour
le jeûne; » car que dix heures du ma-
il n'était éteindre les corps demi-brûlés. Ils en amas-
tin, et il espérait finir la station et le jeûne de sèrent les cendres, dont chacun prit ce qu'il
ce jour dans le paradis, en la compagnie des put. La martyrs se faisait
fête de ces saints
martyrs et des prophètes». Le Saint étant ar- en Afrique, du temps de saint Augustin ', le
rivé à ramphithéàtre, un nommé Augustal, mémo jour que l'on y célébrait celle de sainte
qui était son lecteur, le pria, en pleurant, Agnès, c'est-à-dire le 21 janvier, qui fut en
de lui permettre de le déchausser. Le Saint efiet le jour de leur martyre.
s'en excusa, et, après qu'il se fut déchaussé 3. L'histoire du martyre des saints Luce,
lui-même, un chrétien nommé Félix, lui pre- Montan, Flavien, Julien, Victoric, Ilhénus,
nant la main, le pria de se souvenir de lui. Primole et Donatien est un des plus authen-
,
Pag. 221; Fructueux lui dit tout haut, en sorte que tout tiques et des plus précieux monuments de
le monde l'entendit '':
« Je dois avoir dans l'antiquité *. Tout y est également édifiant et
l'esprit toute l'Eglise catholique, étendue de- digue de foi; la constance des martyrs y est
puis l'Orient jusqu'à l'Occident. » Ensuite il représentée d'une manière à la faire estimer
consola les frères, les assurant qu'ils ne man- et admirer de tout le monde. Cette histoire
queraient pas de pasteur. Les saints martyrs est composée de deux parties la première :
que les bandelettes qui leur liaient les mains etami de saint Flavien qui lui avait recom-
,
et donnèrent aux martyrs la liberté de les mandé, en allant à la mort, d'écrire le reste
étendre vers le ciel en forme de croix, et de de leurs soufirances. Ces saints martyrs fu-
prier, comme ils firent, en la manière ordi- rent arrêtés peu de temps après la mort de
naire et à genoux, assurés de la résurrection. saint Cyprien, sous le proconsul Maxime, en
Deux chrétiens, Babylon et Magdonius, do- l'année 2S8; mais ils ne moururent que l'an-
mestiques du gouverneur, virent le ciel ouvert née suivante , étant restés plusieurs mois en
pour recevoir les martyrs, et montrèrent à prison ^.
une petite fille d'Emihen l'évêque avec ses , A. Entre ces martyrs, il y en avait deux
• deux diacres, qui y montaient couronnés les :
qui n'étaient que catéchumènes, savoir Pri-
poteaux auxquels on les avait attachés n'étant mole et Donatien. Celui-ci, ayant été bap-
* Cutnque midti ex fraterna charitate eis offerreni, c'onslantiœ fam illustria sunt argumenta, ut omnibus
uti conditi permixti pocu/um sumerent, ait : Nondum omnino jure sint adinirationi.... Id certe patebit ex
est hora solvendi jejunii. Agebatur enim hora diei eorum Actis, fide omnino dignis et talibus quœ merito
quarta siquidem in carcere quarto feria stationem ce- inter pretiosiora et sinceriora sacrœ antiquitatis monu-
lebritcr celebraverant ; igitur sexta feria lœtus atque menta computentur. Ruin., Adtnonit. in Acta SS. Mon-
securus festinabat, ut cum martyribus et prophetis in tant, Lucii, etc., pag. 229.
paradiso, quem Dominus prœparavit amantibus se, ^ Jllic nos m latere ejus constltuti eramus. Ruinart.,
solvei-et stationem. Ruiu., Act. Mart. sine, pag. 220. Act. Martyr, sine, pag. 236.
* Inter cœtera, quule erat illud beati Fructuosi * Exinde jam guudens Flavianus, quia per senten-
episcopi ? Cum quidam et peteret ut eum in
ei diceret tiam datam passionis suœ erat certior, et tam jucundo
mente haberet, et oraret pro illo, respondit : Me orare colloquio fruebalur. Et sic effectum est ut juberet hœc
necessc est pro Ecclesia catliolica ab Oriente usque scribi, et ad propria verba conjungi. Ruinart., Act.
ad Occidentem diffusa. Quis enim orat pro singulis ? sine, martyr., pag. 237. Hœc omnes simul de carcere
Sed neminem singulorum prœterit, qui orat pro uni- scripserant. Sed quia necesse erat omnem Actum mar-
versis. Ab eo nullum membrum prcetermittitur, cujus tyrum beatorum pleno sermone complecti, quia et ipsi
oratio pro toto corpore funditur. S. Augustin., ubi de se per modestiam minus dixerant , et Flavianus
supra. quoque privatim hoc nobis munus injunxit, ut quid-
3 S. Augustin., ubi supra. quid litteris eorum deesset adderemus, necessario reli-
* Pauca tamen quas nobis supersunt eorum fidei et qua subjunximus. Ibid., pag. 234.
[iii" SIÈCLE.] CHAPITRE XV. — ACTES DU MARTYRE DE SAINT FRUCTUEUX. 389
l'autre mourut de même et n'eut point d'au- mort que les évêques, les prêtres et les dia-
tre baptême que la confession qu'il avait cres Le juge ordonna donc que l'on recon-
.
faite quelques mois auparavant. Luce, Mon- duisit Flavien en prison, et condamna les au-
tan, Flavien, Julien et Victoric étaient, ce tres à la mort Luce, Montan, Ju-
*, savoir :
semble, des ecclésiastiques, et, comme l'on lien et Victoric. On les mena au lieu de l'exé-
croit, disciples de saint Cyprien, puisque Fla- cution, où il y eut un grand concours de
vien, qui était certainement diacre, en par- gentils, et tous les fidèles
y vinrent; car ils
lant de saint Cyprien, l'appelle noire évêque. avaient appris de saint Cyprien à bonorer
p«j.230. Dès qu'ils furent arrêtés, on les donna en particulièrement les martyrs **. Quoique Luce
garde aux oflBciers de quartier *. Mais ensuite fût abattu par la maladie et par l'incommo-
231. le gouverneur les fit mettre en prison. Là, dité de la prison, il ne laissait pas d'instruire
Rbénus eut un songe où il vit plusieurs des ceux qui l'accompagnaient. Les frères lui di-
coufesseurs, que l'on tirait l'un après l'au- saient^:« Souvenez-vous de nous.» «Vous- —
tre de la prison, en sortir avec un flambeau mêmes, répondait-il, souvenez-vous de moi,»
qu'on portait devant chacun d'eux. Ceux de tant il présumait peu de la gloire de son mar-
sa compagnie en étaient, et ils se réjouirent tyre. Julien et Victoric s'étendirent beaucoup
beaucoup, lorsqu'il leur rapporta ce songe le à exhorter les frères à la paix, et leur recom-
lendemain, dans la confiance qu'ils eurent mandèrent tous les clercs, particulièrement
que Jésus-Christ, la véritable lumière des ceux qui les avaient assistés dans la prison,
âmes, était avec eux. Le même jour on les Montan répétait souvent tout haut ces parolea
mena, chargés de chaînes, au procurateur ou de l'Exode ': «Quiconque sacrifiera à d'autres
intendant, qui faisait la fonction du défunt dieux, qu'au Seigneur, sera exterminé de la
proconsul. Ils confessèrent hautement leur terre. » Il réprimait aussi l'orgueil et la té-
foi devant lui, et il les renvoya en prison, mérité des hérétiques en leur disant ' qu'ils
où ils souffrirent la faim et la soif pendant devaient connaître la vraie Eglise, au moins
plusieurs jours par l'avarice de Solon, ofïï-
^, par la multitude de ses martyrs. Il exhortait pag. 235.
cier du fisc, qui leur refusait même de l'eau les tombés à faire pénitence , les fidèles à de-
232. fraîche. Dieu consola ses serviteurs par plu- meurer fermes, les vierges à conserver leur
sieurs visions ', dont il gratifia en particulier pureté, tous généralement à honorer lesévê-
le prêtre Victor, qui mourut aussitôt après, ques, ceux-ci à vivre entre eux dans unepar-
et une chrétienne nommée Quartillosa, dont faite union: «Car, disait- il, c'est soufi'rir
le mari et le fils avaient soufî'ert le martyre pour Jésus-Christ ®, que de l'imiter, et donner
233. trois jours avant Montan. Lucien, alors prêtre par nos exemples des preuves de notre foi. »
de Carthage, leur fit aussi apporter de la nour- Comme il était sur le point d'être décapité, il
riture eu abondance, par le sous-diacre Héren- étendit les mains au ciel, il pria à haute voix,
nien et un catéchumène nommé Janvier. en sorte que les païens mêmes l'entendirent,
5. Après plusieurs mois de prison, ils fu- demandant que Flavien pût les suivre dans
rent présentés au gouverneur, et confessèrent trois jours. Puis, pour montrer combien lise
tous généreusement leur foi. I^lais les amis tenait assuré de l'effet de sa prière, il déchira
de Flavien se récrièrent et soutinrent qu'il en deux le mouchoir dont il devait se bander
n'était point diacre, quoiqu'il l'avouât, et par les yeux, et en fit garder la moitié pour Fla-
conséquent qu'il n'était point compris dans vien. Il fit aussi garder pour lui une place
t Ad. sincer. Mart., pag. 230. bus pro religione et fide quant Cypriano docente di»
,
* Dum per plurimos menses reclusi tulissent carceris dicerant, tune tamen officia pleniore et copia majors
pœnas, et famé ac siti l adorassent, tandem sero pro- connenerant. Ruinart., Acta sine, pag. 234.
duci jubentur et ad prœtorium prœsidis admoveri. 8 Cui cum dicerent fratres : Mémento nostri; Vos,
Ibid. inquit, mei mementote. Ibid.
2 Cum adhuc episcopus noster soltis passus fuisset, Exod. XXII, 20.
''
ostensum est mihi, quasi Cyprianum ipsum interroga- 8Hœreticorum quoque superbiam et improbarrt con-
rem, an pati ictus doleret. Ibid., pag. 237. tumaciam retundebat, contestons eos ut vel de copia
* C'est ce qui fait juger que ces quatre étaient martyrum intelligerent Ecclesiœ veritatem. Ruinart.,
ministres de l'Eglise, et au moins diacres, aussi bien Acta sine, pag. 234.
que Flavien. Car le rescrit de l'empereur ne décerne • Hoc enim est propter Christum pati, Christum
rieu contre les clercs inférieurs. etiam exemple sermonis imitari, et esse probationern
' Qui qmmvis obsequentes aliis et cceteris Dei testi" maximum fidei. Ibid., 235.
390 niSTOiriK OÉNM^^RALK DES AUTEURS ECCLltSIASTIQUES.
dans l'aire où l'on devait les enterrer, afin de beaucoup de i)rêtres. Une pluie douce et
qu'ils ne fussent pas séparés de sépulture, aboudiinte survint, qui tit dire à Flavitin que
Soit'i
G. Flavien qui voyait (juo l'heun ux ino- l'eau serait jointe au sau^ dans sa passion,
meut dtî sou martyre semblait s'éloigner de Cette pluie servit aussi à arrêter la mauvaise
lui toutes les fois qu'il s'en croyait le plus curiosité des infidèles, et fournit au martyr
proche, n'en était ni moins ferme dans sa l'occasiou d'entrer dans une hôtellerie, où il
foi, ni moins résolu à mourir. Sa constance douna la paix à tous les frères, sans qu'au-
invincible lui faisait regarder tous les obsta- cun i)rofanc en lut témoin. Il sortit de cette
clés comme des obstacles passagers, qui pou- maison et arriva à Fuscien, où, étant monté
valent bien retarder son bonheur, mais non sur un lieu un peu élevé, il dit ^: « Vous avez,
l'eu priver pour toujours. Il consolait même mes très-chers frères, la paix avec vous, si
sa mère, qui ne le quittait point, et que ce vous avez la paix de l'Eglise et si vous gar-
retard affligeait. « Vous savez, ma mère, lui dez l'union de la charité. » Ensuite il fit l'é-
disait-il, que j'ai toujours souhaité de jouir loge du prêtre Lucien, et sembla prophéti-
du martyre, de paraître souvent couvert de ser qu'il serait bientôt évêque de Carthage,
chaînes, et d'être souvent rappelé aux tour- comme il le fut en effet. Puis, étant dcs-
ments. » Une des deux nuits qu'il resta en- ceudu au lieu destiné jiour son martyre, il
coréen ce monde, comme il lui parut, dans se banda les yeux de la moitié du mouchoir
un songe, être fort triste d'être demeuré que Montan lui avait fait garder, et reçut le
après ses confrères, apparut un homme lui coup de la mort en priant.
Pag. 237. et lui dit: «De quoi vous affligez-vous ? vous 7. Les Actes du martyre de saint Jacques us A<-t
êtes confesseur pour la troisième fois, et vous et de saint Marien ne sont ni moins respec- qnef."iiac
serez martyr par le glaive. » Il eut encore tables, ni moins authentiques que les pré- Marien, lè
une autre vision dans laquelle il fut assuré cédents. Leur sincérité se fait sentir d'elle- 'vnsîs .
23G. de sa mort prochaine. Eu eûet, le troisième même en les lisant', et ils sont cités par saint '^^'•^»-
jour étant venu, le gouverneur, se Tétant fait Augustin * dans le sermon qu'il a fait au |
amener, lui demanda * pourquoi il mentait, jour de leur fête. Ces Actes ne portent aucun
se disant diacre, quoiqu'il ne le fût pas. Fia- caractère de temps mais ce qui y est dit
;
238. sitôt et le condamna à mort. Cet arrêt redou- frit aussi la mort pour Jésus-Christ, et il dit
bla sa joie, et il fut conduit au lieu de l'exé- que sa narration est digne d'un homme tout-
cution, accompagné d'un grand peuple et à-fait animé de l'esprit divin, qu'il ne respire
1 Et cum admoveri j'ussus esset, interrogatus a prœ- prodit. Ruin., Admon. in Acta SS.Jacobi et Mariani,
side, quare mentiretur se diaconum, cum non esset, pag. 2-22.
mentiri se negavit. Et cum centenarius diceret nota- * Augustin., Serm. 284, tom. V, pag. 1140. Saint
riam sibi datam esse, qua contineretur eum fngere, Auguolin rapporte, dans ce sermon, ce qui est dit
respondit : An non est verisimile me menliri, et de la mère de saint Marien au nombre 2 des Actes
illum verum dicere, qui notariam falsam (ledit? Et de son martyre. —
^ Act. sine. Mart., p. 226, n. 6.
noveritis Ecclesiœ pacem, et dilectionis unilatem ser- hiabat, coronam martyrii, fuso sanguine, percepisse.
vaveritis. Nec puletis pauca esse quœ dixi, cum et Quem fuisse episcopum, nec levis eruditionis virum,
Dominus noster Jésus Chrislus passioni pjroximm, liœc diviitoque afflatum Spiritu, atque martyrii cupidissi-
eadem sic prosecutus : Hoc est, inquit, mandatum micm, eadem ipsius scriptio sanguine propemodum
œeuin ut diligatis iuvicera. Act. sine. Mari., p. 238. exarata, fidem aperfissimam facit. Baron., ad aimum
* Hujus uutein opusculi sinceritas seipsam legenlibus 262, num. 54, tom. Il, pag. 583.
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XV. ~ ACTES DU MARTYRE DE SAINT FRUCTUEUX. 391
que le martyre, et que sa plume semble être qu'il avaiteu et qui était une prédiction de
trempée dans le sang. Il ajoute que son style son martyre. Jacques, de son côté, en avait eu
imite assez celui de saint Gyprien *, ce qui un en chemin, qui l'assurait aussi de son mar-
donne lieu déjuger qu'il était un de ses dis- tyre et de celui de Marien.
ciples. 9. Dieu fit connaître, dans une troisième Suite de
ces Actes.
Analysa
décos Actes.
8. Saint Jacques était diacre et saint Ma- vision, à un confesseur nommé Emilien, de
Pas. 227.
Fig. 223.
rien lecteur. Comme ensemble en
ils allaient Tordre des chevaliers, qui, bien qu'âgé de près
Numidie, ils s'arrêtèrent quelques jours en un de cinquante ans, avait toujours vécu dans la
lieu nommé Muguas, assez proche de Cirtlie % continence, et qui faisait, dans la prison, des
où la persécution sévissait avec violence. On jeûnes de deux jours de suite et des prières
recherchait même ceux qui avaient été bannis très-fréquentes, qu'il recevrait aussi la cou-
pour la foi, afin de les mener au gouverneur, ronne du martyre, comme il l'avait souvent
224. qui voulait les faire mourir. Parmi eux se demandée. Quelques jours après ces visions,
trouvèrent les évêques Agapius et Secondin, Jacques et Marien furent amenés une seconde
tous deux recommandables par leur charité, fois devant le magistrat de Cirthe, qui les
et l'un même, par la peri'ectioii de sa conti- renvoya au gouverneur de la province, afin
nence. Comme on les menait du lieu de leur qu'il donnât contre eux le dernier arrêt. Les
exil, pour les présenter au gouverneur, ils confesseurs allèrent le trouver aussitôt par
passèrent à Muguas, logèrent avec Jacques et un chemin fâcheux et difficile, de huit à neuf
Marien et les fortifièrent par leurs exemples lieues, et, quand ils lui eurent été présentés,
et par leurs discours, les exhortant vivement on les mit dans la prison de Lambèse. Ils y
à la constance. Us furent pris deux jours après demeurèrent plusieurs jours, durant lesquels
le départ des évêques et emmenés à Cirthe le gouverneur fit mourir un grand nombre de
225.
par une troupe d'infidèles. Plusieurs chrétiens chrétiens, tous laïques, avant que d'en venir
les suivirent, non en pleurant, mais en se ré- à Jacques et à Marien; car il séparait à des-
jouissant de leur bonheur et les animant au sein les laïques des clercs, croyant les vain-
combat. Les païens s'en aperçurent et leur cre plus aisément quand ils seraient seuls,
demandèrent s'ils étaient chrétiens; comme Saint Jacques et les autres ecclésiastiques qui
ils l'avouèrent sans crainte, on les mena en étaient avec lui, affligés de cette distinction,
prison, et ils souffrirent le martyre avant les commençaient à s'attrister du retardement de
deux Saints. Jacques Marien y furent mis
et leur victoire, lorsque saint Agape lui apparut
228.
aussi, puis exposés aux tourments par un et l'assura de la proximité de son martyre et
stationaire ', accompagné de quelques cen- de celui des autres clercs. La même chose
turions et des magistrats municipaux de Cir- lui lut dite par l'un des deux jumeaux qui,
the. Jacques confessa qu'il était chrétien et trois jours auparavant, avaient souffert avec
même diacre. Marien se confessa lecteur * : leur mère. En effet, le lendemain, Jacques,
on le pendit par les pouces, avec de lourds Marien et tous les autres clercs furent con-
poids aux pieds ; et, après ce tourment, on le damnés à mort. On les mena au lieu de l'exé-
remit en prison avec Jacques et les autres cution, situé sur le bord d'un fleuve, dans
226,
chrétiens. Marien s'y endormit profondément, un vaUon, et parce qu'ils étaient en grand
et quand il fut éveillé, il raconta un songe nombre, on les fit placer sur diverses files,
1 Quantum aufem ex stylo conjicere licet, videtur alla au martyre accompagné de plusieurs chrétiens
fuisse discipulus Cypriani, cujus in scribendo nonnihil qui ne se cachaient nullement et qui lui rendaient
imitatus est didionem. Idem, ibid., num. 34. toute sorte d'offices de charité, à la vue même des
2 Acta sincer. Martyr., pag. 223. païens. Post hanc vero sententiam turba fratrum di»
* On appelait stationnaires certains officiers du cebat: Et nos cum ipso decoUemur. Propter hoc tU'
gouverneur, distribués en divers lieux pour l'avertir multus fratrum exortus est, et multa turba eum pro-
de ce qui se passait. Fleury, tom. II, pag. 322. secuta est. Cum venisset autem spiculator, jussit suis
* L'édit de Valérien ne condamnait à mort que ut eidem spiculatori viginti quinque aureos durent.
les évêques, les prêtres et les diacres; mais on voit, Linteamina vero et manualia a fratribus ante eum
par la suite de ces Actes, que la persécution s'exer- mittebantur. Postea vero beatus Cyprianus manu sua
çait plus généralement dans Cirthe qu'ailleurs, et oculos sibi texit. Qui cum lacinias manuales ligart
que l'on y faisait mourir non-seulement tous les sibi non potuisset, Julianus presbyter et Julianus sub-
clercs sans distinction, mais encore les laïques qui diaconus ei ligaverunt. Ruinart., Act. sine. Martyr.,
ee confessaient chrétiens; au lieu qu'à Cartilage on pag. 218. Nous avons remarqué la même chose dans
n'en voulait qu'aux ecclésiastiques, comme il paraît les Actes de saint Fructueux martyrisé à Tarra-
,
CHAPITRE XVI.
Actes du martyre de saint Nicépliore , de saint Cyrille , de saint Prisque
et de quelques autres martyrs de Palestine.
[L'an 260.]
Les Actes 4 . Il n'y a rien que de beau dans les Actes lié à un prêtre d'Antioche, nommé Saprice, pag. 239
du niartvrri
(le saint Ni- du martyre de saint Nicéphore ; ils sont reçus qu'on les eût pris pour deux frères. Mais ils
céphoresont
sincères. de tout le monde comme sincères et très-fi- se divisèrent dans la suite ^, et devinrent tel-
présentent l'histoire de ce Saint ^ plus pure- rentrant en lui-même, s'adressa aux amis de
ment qu'on ne dans Surins et dans
la trouve Saprice pour obtenir de lui de le recevoir
les Actes qui portent le nom d'un Jean, évê- de nouveau en sou amitié. Saprice ne voulut
que de Sardes*. On ne sait point en quel lieu point lui pardonner ; et quoique Nicéphore
saint Nicéphore souffrit le martyre; ses Actes l'eût fait prier une seconde et troisième fois,
marquent que ce fut en Orient ; Métaphraste et qu'il fût allé lui-même se jeter à ses pieds,
le met à Antioche, dans la Syrie: ce quia ce prêtre endurci ne voulut point se récon-
quelque vraisemblance, puisque les anciens cilier.Cependant, la persécution de Valérien
s© servaient du mot d'Orient ^, pour marquer étant survenue, Saprice fut pris et présenté
la province d'Antioche. On est plus certain au gouverneur qui, ayant su de lui qu'il était
de l'année de son martyre, que ses Actes chrétien et qu'il tenait le rang de prêtre, lui
mettent sous Valérien et Gallien, c'est-à-dire ordonna, de la part des empereurs, de sacri- 241.
vers l'année 260 de Jésus-Christ, pendant fier aux dieux immortels « Nous autres chré- :
laquelle ces deux princes persécutaient les tiens, répondit Saprice, nous avons pour roi
chrétiens avec beaucoup de chaleur et de Jésus-Christ, qui est le vrai Dieu créateur du
cruauté. ciel et de la terre ''
: périssent les idoles qui
AiialyS'î 2. Nicéphore était laïque et si uni d'ami- ne peuvent faire ni bien ni mal! » Le gouver-
(JecesAou-s.
1 Saint Augustin la nomme Marie et en fait un II n'a fait qu'amplifier les Actes de saint Nicéphore,
grand éloge. Seirn. 284. sans rieu retrancher du fond de l'histoire. Bolland.,
2 Baron., ad aun. 260, nura. 32; Tillemont, p. 17
'
9 fehruarii.
tom. IV Hisi. ecclés.; Ruin., Admonit. in Acla S. Ni- * Et apud antiquos Antiochena diœcesis, seu, ut ^
cep/i., pag. 239. vu/go nwic loquimur, pat ri arc ha (us, specialiler Orien-
3 Eadem quoique Ada sincera quidem
uUo et sine tis nrrmine designabatur. Rviinart, ubi supra.
additamento grœce descripta reperimus duobus in 6 Acta sine. Martyr., pag. 239.
aliis manuscriptis codicibus grœcis optimœ notœ ' A'o* christiani Chrislum Deum habenms regem,
Quare visum est, rejectis quihuscumque additioniius, quoniam ipse est soins verus Deus et Creator cœli et
ea prout in islis codicibus fiabentur grœce ex/iibere, terrœ , et maris et omnium quœ in eis sunt. Ruinart,
simul cum veteri latina versione. Idem, ubi supra. Act. sine. Martyr., pag. 241.
* On ne sait qui était ce Jean, évèque de Saides.
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XVI. — ACTES DU MARTYRE DE SAINT NICÉPHORE. 393
neur, irrité, le fit d'abord tourmenter cruelle- qui est celle dont se sont servis les Bollan-
ment, et ensuite le condamna à être décapité, distes dans leur septième tome le 29 mai. ,
Nicéphore, l'ayant su, accourut en toute hâte. Ces Actes sont en forme de lettre en voici :
se jeta à ses pieds, et, en le traitant de mar- la substance Sous l'empire de Valérien , il
: Pag. 246.
le punit et le priva de la couronne du mar- l'en empêcher, ni par des paroles, ni par des
tyre. Les bourreaux lui dirent de se mettre à coups. Plusieurs enfants de son âge se décla-
genoux pour avoir la tête tranchée. Saprice raient ses ennemis. Son père, pour ébranler
en ayant demandé la cause « C'est, dirent- : sa foi, le chassait de sa maison et lui refu-
ils, que tu n'as pas voulu sacrifier, à cause sait tout secours. Mais Cyrille s'en consolait,
243. d'un homme que l'on appelle Christ. » « Ne — dans l'espérance que sa foi lui acquerrait des
me frappez pas, leur dit Saprice, je fais ce biens d'autant plus grands dans le ciel, qu'il
qu'ordonnent les empereurs, et je sacrifie aux aurait eu moins de part à ceux de la terre,
dieux. » Nicéphore l'entendit et le conjura. Le juge, se l'étant fait amener, fit tous ses
en lui disant : « Non, mon frère S n'aposta- efiforts pour l'amollir et l'intimider ; quand
siez pas et ne renoncez pas à Notre-Seigneur il vit qu'il ne gagnait rien, il le fit lier publi-
Jésus-Christ ; ne perdez pas la couronne que quement comme pour le mener à la mort,
vous avez gagnée par tant de tourments. » mais en effet pour lui faire peur. A la nou-
214. Mais Saprice ne l'écouta point. Nicéphore, le velle que l'enfant était allé au lieu du sup-
voyant ainsi abandonner la foi, dit aux bour- plice sans donner aucune marque de tristesse
reaux « Je suis chrétien, et je crois au nom
: ni de crainte, le juge le rappela et lui dit :
moi donc mourir. » Les bourreaux n'osaient sois sage pour rentrer en la maison et en
le frapper ; au gouverneur
l'un d'eux courut la fortune de ton père. » Cyrille répondit ^ :
et lui dit « Saprice a promis de sacrifier, mais
: « Tyran, tu m'as fait grand tort de me rappe-
il y en a un autre qui crie hardiment Je suis : 1er ton feu et ton glaive sont inutiles. Je vais
:
chrétien, je ne sacrifie point à vos dieux.» — à une plus grande maison et à des richesses
« S'il en est ainsi, repartit le gouverneur, qu'il plus excellentes : fais-moi mourir prompte-
meure par le glaive. » Nicéphore eut donc la ment, afin que j'en jouisse. » Ensuite il con- 247.
tête tranchée * et reçut la couronne du mar- sola les assistants, qui ne pouvaient l'enten-
tyre pour récompense de sa foi en Jésus- dre parler de la sorte sans verser des larmes.
Christ de sa charité envers le prochain, et
', et alla ainsi à la mort avec l'admiration de
de son humilité. ' tous les habitants de Césarée.
Martyre Nous nc conuaissons point l'auteur des
3. Ce fut encore dans la persécution de Va-
4. Martyrs
rfire"!"V'^ers Actes du martyre de saint Cyrille. Quelques- léricn, mais à Césarée en Palestine, que souf- ''ivi^ief
vïïéweu'."' uns les ont attribués à saint Firmihen,évêque frirent les saints Prisque Malch et Alexau- , lexaùd.'/'
vers l'an 260
de Césarée en Cappadoce *, et ils sont assez dre. Eusèbe, de qui nous apprenons ce qui
bien écrits pour n'être pas indignes de ce ce- regarde ces Saints, dit que, comme ils de-
lèbre évêque, qui pouvait avoir été témoin meuraientà la campagne, ils se reprochèrent
oculaire de ce qui y est rapporté; mais on n'en d'abord à eux-mêmes leur lâcheté ', de n'a-
a qu'une traduction latine assez mauvaise , voir pas le courage de remporter la couronne
in Christum, charitatemque et hurnilitatem. Ideo fuit 5 Acta sincer. Martyr., pag. 240.
redirnitus corona mariyrii, et diynatus est referri in « Nocuisti, o tyranne, me revocans, nocuisti et peS'
numerum martyrum ad laudem et gloriam magni sime Frustra succendisti ignem, sine causa
gessisti.
Dei et servatoris nostri Jesu Christi, cui gioria et po- gladium acuisti. Multo major est domus quam habi-
tentia nunc et semper, et in sacula sœculorum. Ruin., tare festino ; multo divitiœ prœstantiorcs : has acci-
Act. sine. Martyr., pag. 244, 245. père a Domino accéléra. Celerius me consumma^ et
* Cceterum, si conjecturis indulgere licet, isiam celerius fruar. Ibid., pag. 246.
beati Cyrilli passionem sancto Firmiliano Cœsareœ ' Euseb., lib. VU Hist., cap. 12.
391 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
du martyre, dans un toinps où Dien distri- tecne, et, soutenli de sa grâce, vous obtien-
buait des récompenses à ceux qui brûlaient drez ce que vous avez choisi: allez en paix. »
de son amour ; (|u'cnsuite, ayant pris ensem- Comme il sortait de l'église^ le crieur l'ap-
ble leur résolution, ils s'en allèrent à Césarée, pela pour comparaître devant le juge. Ma-
se présentèrent au juge et lurent condamnés rin se présenta au tribunal, et, comme il
à être déchirés par les bêtes. témoignait une foi encore plus vive et plus
fie
Martyre
suint Mn-
5. Cette Eglise eut aussi un illustre martyr courageuse (ju'aiiparavant, il fut aussitôt con-
riD.TiTs l'ail en la personne
^
de saint INlarin. Il était égalc-
'~ duit au siqjplict; et exécuté à mort *. Astèrc,
t6 ou 16:1.
ment considérable par sa naissance ,
par ses sénateur romain, comnide tout le monde par
richesses et par le rang qu'il tenait entre les la splendeur de sa naissance et par l'éclat de
officiers du gouverneur Son rang étant venu '. ses richesses, se trouva présent au martyre
de parvenir à une place de centurion qui était de saint Marin, et, (pioit^u'il fût couvert d'ha-
vacante, un autre, qui y prétendait après lui, bits très-précieux, il prit le corps du Saint sur
se présenta au tribunal, et dit que, suivant ses éj)aules, l'ensevelit richement et l'enterra
les lois. Marin ne pouvait posséder aucune avec l'honneur qu'il méritait. Entre plusieurs
charge, parce qu'il était chrétien et ne sacri- choses merveilleuses que l'on racontait de ce
fiait point aux empereurs. Sur cela, le gou- sénateur, Eusèbe en rapporte une des plus
verneur de Palestine, qui se nommait Achée, extraordinaires et qui fait voir quelle était
demanda à Marin de quelle religion il était; la grandeur de sa foi *. Les païens préten-
et, comme il avoua généreusement qu'il était daient qu'il se faisait tous les ans un miracle
chrétien, on lui donna trois heures pour pen- dans une des sources du Jourdain, qu'ils ap-
ser à ce qu'il avait à faire. Théotecne, alors pelaient la coupe, à cause de la rondeur du
évoque de Césarée, sachant ce qui se passait, bassin: on y jetait une victime que le démon
alla trouver Marin, le prit par la main et, en faisait disparaître aussitôt. Astère, s'étaut une
l'entretenant, le conduisit insensiblement à fois rencontré à cette cérémonie, eut pitié de
l'église, où il le fit entrer jusqu'auprès de l'au- l'aveuglement de ce peuple, et, levant les
tel. 11 leva ensuite sa casaijue, lui fit jeter yeux au ciel, il pria Dieu, par Jésus-Christ,
les yeux sur l'épée qu'il portait, et, lui pré- d'arrêter cette illusion et de découvrir l'im-
sentant en même temps le livre des Evan- posture du démon. Aussitôt qu'il eut achevé
giles , il lui dit : « Choisissez celui que vous sa prière, on vit paraître la victime sur l'eau
aimez mieux des deux. »
le Marin, sans hé- de la fontaine, et depuis ce temps il ne fut
siter, de la main droite
prit le livre sacré. plus parlé de ce faux miracle.
« Attachez-vous donc à Dieu , lui dit Théo-
CHAPITRE XVll.
Actes de saint Félix, prêtre de IVole, et confesseur.
[L'an 256.]
Les Acte» 1,Quoique saint Félix ait survécu aux de confesseur, qui était propre à tous ceux
de saint Fé-
lix, tirés <lii tourments qu'il endura pour la foi, dans les qui, ayant confessé le nom de Jésus-Christ,
poème quin-
zième de persécutions de Dèce et de Yalérien, on n'a avaient souffert la prison, l'exil ou quelque
«aiut Paulin
pas laissé de lui donner quelquefois, dans tourment. Il était originaire de Syrie, mais Pag. 250.
l'Eglise, le nom de martyr *. Cependant saint né en Italie, dans la ville de Noie, où son père,
Paulin * lui donne ordinairement la qualité nommé Hermias, était venu s'établir. Dès son
» Eu3eb.,lib. —
VU Ilist., cap. 15. »Euseb.,lib. VII, ^ Diximus et tetro toleratas carcere pœnas,
Nflw confesser obit pœnas, non sponte lucratus. Prœlia quam validis confessor gesscrat armis.
Paiilinus , Natali 3. Vide et Martyrolog. rom., ad Idem, ibid.; Aug., lib. VIII, Quœst. ad Dulcitium,
ditim 14 jaauarii. quaest. 2, et lib. de Cura pro mortuis gerenda, cap. 16
(m* SIÈCLE.] CHAPITRE XVll. — ACTES DE SAINT FÉLIX. 395
253. chaînes. On lui passa les pieds dans des en- qu'il était au miheu de la ville, accompagné pag. 25c.
traves, et, afin de lui ôterle repos et la con- de plusieurs amis, occupé à instruire les fidè-
solation du sommeil , on sema le lieu où il les :ils accoururent vers lui l'épée à la main.
était de têts et de morceaux dépôts cassés. Mais, soit que Dieu leur eût troublé la vue, soit
Cependant l'évéque Maxime se trouvait seul qu'il eût changé le visage de Félix, ils ne le re-
dans les montagnes, exposé au froid et à tou- connurent point. Quelqu'un, s'étant aperçu de 257.
tes les injures de l'air, sans aucune nourriture, leur méprise, les en avertit. Ils retournèrent
accablé d'années, de tristesse et d'inquiétude sur leurs pas. Félix, averti de leur venue, se 258.
pour le salut de son troupeau : quoique Dieu cacha promptement dans une masure qui se
eût pu le secourir en cet état, comme il avait trouva proche et qui n'était fermée que par
autrefois nourri Elle dans le désert, il aima un pan de muraille à demi ruinée: il y eût été
254- mieux se servir du ministère de Félix. Au si, dans le moment, une araignée
bientôt pris,
milieu de la nuit, un ange, tout environné n'eût fait sa toile, qui ferma l'ouverture de ces
de lumière, lui apparut dans la piison et lui ruines. Les persécuteurs y étant venus, ne
commanda de se lever pour aller secourir son purent s'imaginer qu'un homme eût pu pas-
évèque. A l'instant, les fers tombèrent de ses ser par là sans rompre la toile d'araignée,
mains et de son cou,trouvant ses pieds en
et, ou qu'elle eût été faite si promptement: ils
liberté, il sortit de la prison et airiva, par des crurent qu'on s'était voulu moquer d'eux, afin
chemins inconnus, au lieu où était le saint de faciliter au Saint le moyen de se sauver
255. évêque près de rendre le dernier soupir. Il fit par un autre endroit. Ainsi ils se retirèrent
ce qu'il put pour le réchaufl"er, mais inutile- et cessèrent de le chercher. Lorsque la nuit 259.
ment, jusqu'à ce que, s'étant adressé à Jésus- fut venue, Félix alla se cacher dans un quar-
Christ, il aperçut une grappe de raisin pendue tier plus éloigné, dans une vieille citerne,
à des ronces. Il la prit, et, ayant fait entrer creusée en un deux mal-
lieu fort étroit, entre
le suc de quelques grains dans la bouche du sons. 11 y avait, dans une des maisons voisi-
saint vieillard, après lui avoir desserré les nés, une sainte femme dont Dieu se servit
dents avec grand'peine , il lui fit revenir la pour nourrir Félix, sans qu'elle-même en sût
connaissance et la parole. Alors Maxime re- rien; car, quand elle avait fait du pain ou cuit
connut Félix, Tembrassa avec joie, se plai- de la viande pour elle-même, elle en portait
gnant doucement de ce qu'il avait trop tardé; au lieu où était le Saint, sans y songer en
« Car il y a longtemps, ajouta-t-il, que Dieu aucune manière, croyant avoir serré dans sa
m'avait promis que vous viendriez à mon maison ce qu'elle avait porté sur le bord de
secours. L'état où vous me trouvez fait bien la citerne. Félix passa six mois dans cette ggo.
voirque je n'ai pas fui par la crainte de la retraite: un puits voisin lui fournissait de
mort; mais je me suis défié de la faiblesse de l'eau; mais il sécha quelquefois, et la pluie y
mon corps: reportez-moi, je vous prie, à mon suppléa. La persécution étant finie, il sortit
256. troupeau. » Félix le mit sur ses épaules et le de la citerne, par ordre de Dieu, et retourna
reporta en sa maison, où il était logé pauvre- dans sa patrie, où il fut reçu de tout le monde
ment avec une vieille femme pour tout do- avec une joie incroyable. Le saint évêque Ma- 201.
mestique. Tout cela se passa dans une même xime mourut vers ce temps-là, et on pensa
nuit. Maxime, pour récompenser Félix de sa à lui dormer Félix pour successeur; mais il
piété, lui mit, en le quittant, la main droite le refusa, et fit élire un autre prêtre, nommé
CHAPITRE XVlll.
[L'an 264.]
reurs du paganisme dont il avait d'abord fait qui avait aussi exercé cet emploi ', fut établi
évèque de cette ville. Il avait dès- lors la di- attendit pendant quatre jours » dans sa mai-
gnité de prêtre. Denys ne s'occupait pas
* son l'arrivée de cet archer, qui le cherchait
tellement du soin des catéchèses, qu'il ne se partout ailleurs, dans les chemins, sur la ri-
trouvât quelquefois aux leçons des héréti- vière, à la campagne et dans tous les endroits
être pas sans contracter quelque légère souil- s'imaginant point que, poursuivi comme il
lure do leurs pensées exécrables; mais il en était, il fût resté chez lui. Au bout de quatre
de les pouvoir condamner avec
tira ce profit, Denys sortit de sa maison, par or-
jours, saint
plus de certitude et d'avoir plus d'horreur dre de Dieu ^, accompagné de ses serviteurs
de leurs sentiments. « Un de nos frères, qui et de plusieurs frères, entre lesquels étaient
était prêtre, voulut, dit-il, m'en détourner Caïus, Fauste, Pierre et Paul. Sur le soir, il
et me faire un scrupule de m'engager dans tomba, avec ceux qui l'accompagnaient, en-
mi hourbicr, m'avertissant que cela me fai- tre les mains des persécuteurs, qui les lièrent
sait toi't, et.il me semblait qu'il disait vrai. et les emmenèrent ainsi à Taposiris, petite
Alors Dieu m'envoya une vision qui me for- villed'Egypte, dans la Maréote. Le prêtre
tifia, et j'entendis une voix qui me dit eu Timothée, qui s'était trouvé absent lorsque
termes fort clairs : Lisez tout ce qui vous tom- saint Denys de sa maison, fut bien sur-
sortit
bera entre les mains, car vous êtes capable de pris de trouver des gardes et d'apprendre
discerner ce que vous lisez et de rejeter ce qui que le Saint avait été pris. Il s'enfuit plein
mérite de l'être : c'est par la foi que vous avez de trouble, et, ayant dit ' à un paysan qu'il
commencé à ent?'er dans la vérité. Je me rendis rencontra le sujet de sa fuite et de son agita-
à cette révélation voyant qu'elle était con-
,
tion, cet homme, qui s'en allait à une noce,
forme à cette parole que l'Apôtre adresse aux raconta aux conviés ce qu'il venait d'appren-
plus forts : Soyez bons changeurs, c'est-à-dire, dre de Timothée. Ceux-ci, comme de concert,
examinez bien toutes choses. » se levèrent aussitôt de table tous ensemble,
2. Saint Héracle étant mort, saint Denys coururent au lieu où saint Denys se trouvait
Il est
évoque d'A-
fait
délivré par cinquième année du règne de Philippe. L'E- avoir mis en fuite les soldats qui les gar-
des paysans. i ^ '-' >-
glise jouissait alors d'une paix profonde sous daient. Le saint évèque les prit d'abord pour
la protection de ce prince ; mais Dèce, ayant des voleurs et leur offrit le peu qu'il avait,
usurpé l'empire sur la fin de l'année sui- même ses habits. Mais, comprenant ensuite
vante, fit cesser ce calme. « Ou apporta aus- pourquoi ils étaient venus, il les conjura de
sitôt les nouvelles du changement de l'em- se retirer, ou bien, s'ils lui voulaient faire une
pire *, dit saint Denys, et la crainte de toutes plus grande grâce, de lui couper eux-mêmes
sortes de rigueurs dont on menaçait l'Eglise, la tète, et de prévenir ainsi les persécuteurs.
le règne précédent, qui lui avait été très-fa- force et, comme il se jetait par terre pour ne
,
vorable. » L'édit de la persécution ordonnée point sortir, ils le prirent par les pieds et par
par Dèce ayant été publié et affiché au com- les mains et le portèrent hors du bourg, où
mencement de l'an 250, à Alexandrie, Sabin, ils le firent monter sur un âne et l'emme-
préfet d'Egypte, envoya, à l'heure même, un nèrent dans un autre endroit. Echappé ai^si
archer pour arrêter Tévêque Denys. Le Saint malgré lui des mains des persécuteurs, il se
* Dicnyiius, Âlexandnncë urbis epîscopus, sub f/era- alio migrarem prœcepisset, ac prœter opînionem om-
cla scholam cafecheseon presbyter tenuit. Hieronym., nium viam aperuisset, ego et famuli, multique ex
in Catalogo, cap. 68. fratribus simul egressi sumus. Idem, ibid. S. Denys
2 Euseb., lib. VII Hist., cap. 7. allègue les services qu'il rendit alors à quelques
5 Euseb., lib. VI Hist., cap. 35. personnes, pour preuve que sa retraite était, en
* Sed continua imperii erga nos benignissimi
illius effet, un ordre de Dieu. Atque id divinœ providentice
mutatio nobis nuntiata gravissimus nobis mi-
est , et opus fuisse, rerum eventus posiea declaravit. Siquidem
narum terror inlentabatur. Jamque aderat edictum nonnullis fartasse haudquaquam inutiles fuimus. Eu-
imperatoris, illud ipsum fere quod a Domino nostro seb., lib. VI Hist., cap. 40.
prœdictum est, horrificuin ac terribile exhibens, adeo ^ Saint Denys lui-même racontait toutes ces par-
ut ipsi eliam elecii, si fieri posset, scandalum pateren- ticularités dans ses lettres où il prend à témoin
,
tur. Idem, lib. VI, cap. 41. ^ Idem, ibid., cap. 40. — Caïus, Fauste, Pierre et Paul, de la vérité de tous
* Vixque post diem quartum, cum Deus mihi ut ces faits. Idem, ibid.
308 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dans un lieu iléscrt, à trois jouriKîes
relira 11 fut même résolu de tenir un concile en
(le Paréloiiie, dans la .Marniarique, et s'y en- cette ville, pour empêcher les progrès que
l'erma avec doux des siens seulement, Pierre l'erreur et la division commençaient à y
et Gains, (]ni avaient aussi été contraints par faire; et saint Denys fut prié de s'y trouver,
CCS paysans de le suivre et de se sauver avec par Hélène " de Tarse en Cilicie, par Fir-
lui. milien de Cai)padoce et par Tbéociiste de
9oin lie 3. Saint Dcnys demeura dans cette retraite Césarée en Palestine, tous trois évêques des
jnint Dcnys
pour son jusqu'à la fin de la persécution mais, quoi- métroi)oles voisines d'Antioche. Mais Fabien
;
piMiple pi-ii-
tliiiit
traite.
sa re- qu'absent, il n'al)andonnait point son peuple. étant mort dans le temps que l'on se prépa-
11 avait soin de faire lisser dans Alexandrie
i- rait à la tenue de ce concile, on ne sait s'il
quelques-uns de ses prêtres *, entre autres se tint elleclivement. Ce ([u'il y a de certahi,
Maxime, qui lui succéda depuis dans l'épisco- c'est qu'après que la persécution de Gallus
pat, Dioscore, Démètre et Luce. Il se servait fut apaisée **, toutes les Eglises rejetèrent
encore, pour secourir son troupeau, des dia- l'hérésie de Novatien, et se réunirent.
cres Fauste, Eusèbe et Quérémon, qui furent, 5. Nous apprenons cette réunion des Egli- Pnint Dc-
nys ('•nrit nu
aussi bien que le prêtre Maxime, les compa- ses ^' première des lettres que saint De-
par la pnpe suint
Ktieiine sur
gnons de sa confession et de son exil, sous Va- nys écrivit au pape saint Etienne touchant le In i|urstion
ilii bapU^me.
lérien. Eusèbe est loué *, en particulier, pour baptême des hérétiques; car il lui en écrivit Il en
eiilrc-
(i)rirén"(Mif-e
avoir assisté les confesseurs qui étaient dans plusieurs sur cette matière, dont le but était avec )es nr-
sinoites, on
les prisons, pour avoir eu grand soin d'ense- de conserver l'union entre les deux par- 254,255,258.
velir et d'enterrer les corps des martyrs, ce tis durant la chaleur de la dispute. Ce Saint
qu'il ne pouvait faire qu'au péril de sa vie. fit erjcore voir son zèle pour la vérité et
4. L'élection du pape saint Corneille ayant son amour pour la paix dans la conférence
été troublée par le scbisme de Novation, saint qu'il eut avec les arsinoïtes '*, au sujet de
Denys ' écrivit, de sa retraite, aux Romains, Népos, leur évèque, qui suivait l'opinion des
une lettre pour réunir leurs esprits. 11 en millénaires et l'avait inspirée à beaucoup
écrivit une autre à Novatien sur le même su- de personnes, particulièrement dans le can-
jet; et, pour montrer combien il était éloigné ton d'Arsinoë en Egypte. Saint Denys alla
des erreurs de cet hérésiarque, il ordonna/ exprès dans ce pays, et y passa plusieurs
que l'on accorderait l'absolution et la com- jours, depuis le matin jusqu'au soir, à exa-
munion à tous ceux qui la demanderaient à miner, avec les prêtres et les docteurs qui ins-
la mort, particulièrement s'ils l'avaient de- truisaient les chrétiens dispersés dans tous
mandée avant leur maladie. Saint Dcnys écri- les villages, la doctrine qui les divisait, jus-
vit aussi plusieurs lettres sur le sujet de la qu'à ce que Coracion, chef de ceux qui sou-
pénitence, à diverses Eglises, comme à celle tenaient l'erreur de Népos, la trouvant sufli-
de Rome *, à celle de Laodicée en Syrie, à samment détruite par les raisons qu'on lui
celle d'Arménie, où
marquait l'ordre des
il avait opposées, l'abandonna et se réunit, avec
péchés % afin que l'on sût combien en devait ceux de son parti, au sentiment de l'Eghse
durer la pénitence ; à Conon, évèque d'Her- catholique.
mopole, en Egypte, et une lettre générale 6. En
257, la persécution s'étant renouve- Il confesse
Jésus-
à toute l'Egypte, où il déclarait son senti- lée sous l'empire de Valérien, Emilien, alors Christ est
,
banni à Ké-
ment ' sur ceux qui étaient tombés durant préfet d'Egypte, fit venir " devant lui saint pliroetdans
la Maréote,
la persécution, et distinguait aussi les divers Denys, suivi du prêtre Maxime, des trois dia- en 257.
degrés de péchés; une exhortation à son cres F^auste, Eusèbe et Quérémon, et d'un
troupeau d'Alexandrie*; une lettre à Ori- chrétien venu de Rome, nommé Marcel. Il
gène, en particulier, sur le martyre ', ce qui leur proposa d'abandonner la religion chi^é-
marque qu'il le tenait en sa communion ; tienne pour adorer les dieux conservateurs
et une à Fabius i°, évèque d'Antiocho, pour de l'Empire. Saint Denys répondit: « Tous
le détourner du schisme et de l'hérésie de n'adorent pas les mêmes dieux; mais chacun
Novatien, dont il paraissait prendre le parti. adore ceux qu'il croit. Pour nous, nous n'ado-
1 Euseb., lib. VII, cap. 11. — « Idem., ibidem. — « Euseb., lib. VI, cap. 46.— « Idem, ibid.— i« Id.,
s Idem, lib. VI, cap. 46. — Idem, ibid., cap. 4i. — ibid., cap. 41 et 44. — n Idem, ibid. et 45. — '^ idem,
* Idem, ibid., cap. 46. — «Hieronym., in Catalogo, lib. VII, cap. 4 et — idem,
5. »3 ibid., cap. 4. —
cap. 69. — ' Euseb., lib. VI Hist., cap. 46. 14 Idem, ibid., cap. 24. — Idem,
'* ibid., cap. 11.
[III' SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. — SAINT DENYS. 399
rons qu'un seul Dieu S le Créateur de toutes que ce lieu, étant
frères lui firent considérer
choses, qui a mis l'empire entre les mains des plus près d'Alexandrie, pourrait lui donner
Augustes Valorien et Gallien. C'est à lui que le plaisirde voir plus souvent ses amis, et
nous faisons continuellement des prières pour même de tenir des assemblées, tantôt d'une
leur règne, afin qu'd soit tranquille. » Le partie de son peuple, et tantôt de l'autre,
préfet leur dit « Qui vous empêche d'adorer
: comme dans un faubourg éloigné; et la chose
ce Dieu, avec ceux qui le sont naturellement? arriva ainsi.
car on vous ordonne d'honorer les dieux, et 7. Pendant cet exil, qui dura environ deux
les dieux que tout le monde connaît. » Saint ans, puisqu'il écrivit durant ce temps-là deux
Denys répondit : « Nous n'en adorons aucun lettres pascales, saint Denys répondit « aux ca-
autre 2.» Emilien dit : « Je vois bien que vous lomnies d'un certain évèque d'Egypte, nom-
ètes ingrats et insensibles à la bonté des em- mé Germain, qui l'accusait d'avoir eu, durant
pereurs; c'est pourquoi vous ne demeurerez la persécution, plus de soin de sa personne
pas en cette ville, mais je vous enverrai du que de son peuple. Il écrivit aussi plusieurs
côté de la Libye, en un heu nommé Képhro, lettres au pape Sixte, dans l'une desquelles il
que j'ai choisi par leur ordre ; et il ne vous lui donnait avis de l'hérésie de Sabellius, qui
sera pas permis, ni à vous, ni à aucun autre, commençait à se répandre une aux prêtres ;
de faire des assemblées, ni d'entrer dans ce d'Alexandrie, et quelques autres dont nous
que vous nommez cimetière '. Allez donc où parlerons dans la suite. Saint Denys ne re-
il vous est ordonné. » Quoique samt Denys tourna à Alexandrie qu'après la défaite de
fût malade et qu'il ne sût pas même où était Valérien par les armes des Perses, et après
le lieu où on l'envoyait, il y alla de bon cœur que GaIJien eut apaisé la persécution, en 260.
et sans aucune inquiétude. Il y fat suivi par II trouva cette ville affligée par la famine,
plusieurs chrétiens d'Alexandrie, et il y attira déchirée par une sédition si violente ', qu'il
quantité de personnes de divers endroits de n'y avait point de commerce d'un quartier de
l'Egypte, de sorte qu'il y tenaitdesassemblées la ville à l'autre. La peste, qui survint, aug-
nombreuses *. Dieu lui ouvrit aussi à Képhro menta tous ces maux; mais, quelque grands
une porte pour annoncer l'Evangile; et, quoi- qu'ils fussent, les chrétiens ne laissaient pas
que d'abord les habitants de ce lien pcrsécu- de dans la paix dont ils jouissaient
se réjouir
tassent le Saint et ses disciples, jusqu'à leur seuls en Jésus-Christ *. Le Saint, ne pouvant
jeter des pierres, il y en eut enfin un assez leur rendre en personne tous les devoirs d'un
grand nombre qui quittèrent les idoles pour évêque, fut obligé de leur écrire d'Alexandrie
se convertir à Dieu. Le préfet Emilien fit en- même ®, comme s'il eût été dans une province
suite transférer confesseurs de Képhro
^ les éloignée.
à CoUouthion, dans la Maréote, assignant à L'an 263, l'hérésie de Sabellius ayant in-
8.
chacun le village où il devait demeurer. Ce fecté non-seulement quelques personnes du
changement fit peine à saint Denys, à qui on peuple, mais même des évèques de la Li
avait dit qu'il n'y avait point de chrétiens ni bye *°, saint Denys i* envoya pour engager
de gens raisonnables en ce lieu, et que d'ail- ceux qui s'étaient laissé séduire à revenir'de
leursil était exposé à Timportunité des voya- leurs erreurs. Il écrivit encore sur ce sujet à
geurs et aux courses des voleurs. Mais les Euphranor et à Ammon *^; mais comme les
guli colunt quos arbitvantur Deos. Nos quidem unum pour mettre en fureur la populace d'Alexandrie.
Deum omnium rerum opificem, qui Valeriatio et Gal- Fleury, tom. II Hist. ecclés., pag. 341.
lieno socratissimis Auguslis imper ium tradidit, coli- ^ Sed rursus oblectauit nos pax illa
quam Christus
mus et adoramus. Huic continuas preces offerimus pro nobis solis induisit. Euseb., lib. VII, cap. 22.
imperioillorum, ut stabile et inconcussum permanent. 9 Idem, ibid., cap. 21.
Idem, ibid. 10 In Pentapoli superioris Libyœ quidam episcopo-
' Nos nullum alium adoramus. Idem,
ibid. rum tune temporis cum Sabellio sentiebant, tantum-
' Nullatenus autem licebit vobis nec quibuscumque
que suis commentes invaluerant, ut vix ultra Filius
conventus agere, aut ea quœ vocantur cœmeteria
ttliis,
Dei in Ecclesiis prœdicaretur Atban., Epist. de Dio-
.
adiré. Euseb., lih. VII, cap. 11. nysii sententia, pag. 246, tom. I.
» Idem, ibid. — s Idem, ibid. — s Idem, ibid. H Rei certior foetus Dionysius , cui earum cura Ec-
' Cette sédition commença par une querelle par- clesiarum incumbebat,mittit suadetque rei auctoribus,
ticulière d'un esclave du curateur d'Alexandrie avec ut a pravis opinionibus désistant. Idem, ibid.
un soldat. L'esclave disait que ses souliers étaient 12 Necessitate pulsus est humana Salvatoris ex Evan-
meilleura que ceux du soldat il fut battu, le peu- : geliis exponere, ut cum audacius illi Filium negarent
400 HISTOIRE Gl'NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
sahellicns,en confontlant lo Fils avec le Père, s'en allèrent à Rome et l'accusèrent, auprès
atlrihuaieut au Tcre ce qui appartenait à du pape saint Denys, qui avait succédé à
l'humanité de Jésus- Christ, saint Dcnys se saint Sixte, le 2^2 juillet de l'an 2o9, d'avoir
contenta de faire voir dans cette lettre que ce enseigné que le Fils de Dieu était une créa-
qui ai)paitoMait au Fils, en tant qu'homme, ture et un ouvrage d'une autre sul)stance que
n(îpouvait être dit du l'ère, voulant, par ce le Père. Le ])ape * assembla ini concile où la
moyen, obiifi^er les hérétiipies à reconnaître doctrine attribuée à saint Denys fut désap-
la distinction du Père et du Fils, et les ame- prouvée, et il lui écrivit suivant l'avis de tous,
ner ensuite, par un nouvel éclaircissement, à le priant d'édaircir les points sur lesipiels il
il imitait la conduite et la discrétion des A[iô- il condamnait également les deux erreurs op-
tres qui se contentaient souvent de prêcher
*, posées : celle de Sabellius, qui confondait le
l'humanité de Jésus-Christ, pour préparer les Fils avec le Père et celle que l'on attribuait
,
hommes à croire sa divinité. C'est pour ce à saint Denys, de proclamer (jue le Verbe de
sujet qu'il disait * que le Fils de Dieu avait Dieu était sa créature et son ouvrage, et n'é-
été lait et formé, qu'il n'était pas de la mê- tait point consubstantiel au Père. Saint De-
me nature que le Père, qu'il en était différent nys d'Alexandrie répondit aussitôt ' par un
quant à la substance, comme la vigne l'estdu ouvrage divisé eu quatre livres, intitulé Ré- :
vigneron, et comme un navire est d'une au- futation et Apologie, et l'accompagna d'une
tre substance que l'ouvrier qui l'a lait; qu'il lettre au pape, à qui il l'adressait. Il avait
n'était pas avant d'avoir été fait, et beaucoup dessein * de lui envoyer également la lettre
d'autres choses semblables qui n'eussent pas même qu'il avait écrite à Ammon et à Eu-
été recevabies % s'il eût écrit alors pour faire phranor, mais il ne put en avoir de copie,
s'il n'eût pas depuis éclairci ses sentiments, soit à cause des troubles qui agitaient alors la
comme il a fait eu plusieurs autres ouvrages. vdle d'Alexandrie. Ce saint évèque fit aussi
Quelques * fidèles bien instruits de la foi,
, voir la pureté de sa foi dans beaucoup d'au-
ayant lu cette lettre, en furent frappés; mais, tres lettres ^
Saint Athanase le croyait si or-
au lieu de demander à saint Denys lui-même thodoxe, qu'il permet '° aux ariens de se servir
l'éclaircissement de ce qu'il avait écrit, ils de ce qu'ils trouvaient de plus avantageux
et humana ejus Patri adseriberent , ostendens ipse re accusatus ab illis fuisset. Ille vero quamprimum
non Patrem, sed Filium pro nobis facium esse, impe- sut purgandi causa libros edidit, quos inscripsit:
rilis mis persuadeiet Patrem non esse Filium, eoque Elenclius et Apologia. Athan., ibid., pag. 232,
pacto tiomines ad veram Filii deitatem credendam, Cutn autem quidam ad romanum episcopum Ale-
5
et ad Patris cognitionem sensim reduceret. Ibid. xandri?ium detulissent, quod Filium rem factam et
Quapropter beati Apostoli prudenti admodum con-
1 Patri non comubstantialem affirmaret, sijnodus Roma
silioprimum humana Salvatoris Judœis enarravere, coacta rem indigne tulit: romanus autem episcopus
ut eos ex editis conspicuis'jue miraculis hinc ad cre- omnium sententiam rescripsit ad gentilem suum.
dendam ejus divinitatem deducerent , demonstrando Atbanas., lilj. de Sijnodis, pag. 757 tom. II.
6 Idem, ubi supra, Epist. de Diontjs., pag. 252.
opéra quai édita fuerant, non hominis, sed Dei esse.
Allianas., ibid., pag. 248. Quatuor ctiam hbros de endem argumenta compo'
"'
* Aiunt igitur beatœ memoriœ Diomjsium in epis- suit, quos gentili suo Diongsio Romanorum episcopo
opus et rem factam esse Filium nuncupavit. Euseb.,lib. VII Hist., cap. 26.
tola sua dixisse,
Dei, non iiatura proprium, sed alienum a Paire se- Epistolam autem, ut anie dixi, ob jjrasentem re-
8
cundum substanliam, qualis est agricola a vite, et rum conditionem pênes 'me non habeo, alioquin ipsa
etenim cum res facla, non erat tibi quœ tune scripsi verba, imo epistolœ totius
faber a scapha : sit
antequam fieret. Etium scripsit: ejusmodi epistolam exemplar misissem, mitfamque, si quundo mihi ejus
copia fuerit. Apud. Atban., Ep. de sentencia Dionys.,
esse et nos ultro fatemur. Idem, ibid., pag. 246.
» Tiliemout, tom. IV Hist. ecclés., pag. 279. pag. 255.
8 At in aliis epistolis nequaquam ita scripsit, sed
>>
Quidam ex Ecclesia fraires, sanœ quidem doctrinœ
homines, non scisciiaii iamen eum qua de causa ita conspicuum est in Us illum recte sentire, quibus sane
scripsisset, Romam se conlulere, illumque apud co- epistolis adversum hœreticos quodam modo exclamât
gnominem Diomjsium romanum episcopum accusarunt. his verbis : Vestraî non sum sententiœ, o Dei hos-
Quiitus aie auditis una scripsit et contra Sabellii tes.... quas misi epistolas ve.strae impudentiae
alias
sectatores et contra eos qui ejus essent sententiœ oppouo, ut hinc sapientibus nota sit mea defensio,
aequalem aiens, licet ex diametro oppositam Sabellii necnon recta mea in fide Chrisli sententia. Athan.,
impietatem, eorum blasphemiœ, qui dicunt Verbum Epist. de sent. Dionys., pag. 251.
>o Aut si putant impietutis patroni secum sentire
Dei creaturam, opificium et rem factam esse. Misit
qvoque ad Dionysium litteras, ut indiearet qua de Dionysium, eadem qua ille scriùant, eadem profitean-
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. — SAINT DENYS. 101
pour eux dans ses écrits, pourvu qu'ils ron- n'y prend point la qualité d'évêque, peut-
fessassenl avec lui la consubstaiitialité, l'ôtor- être pour ne point blesser Novaiien en la lui
nité et les autres perfections qu'il attribue au refusant, comme il ne pouvait pas aussi la
Fils de Dieu. lui doimer sans blesser sa conscience. Voici
Il ap-
est Cependant
9. Paul de Samosatc,' qui était le contenu de sa lettre « Si Ton * vous a or-
:
peie au cim- ^ '
''che'^"u°'
nioiité stir le siècle d'Antioclie, eu l'an 260, y donné malgré vous, comme vous dites, vous
meurt en veniu de son hérésie, souhînaut nous en assurerez en cédant volontairement,
répandait le
que le Père, le Fils et le Saint-Esprit n'é- car il fallait tout souffrir, pour ne pas diviser
taient qu'une seule personne, en sorte qu'il l'Eglise de Dieu ; et le martyre que vous au-
n'y avait véritablement ni Père, ni Fils, ni riez enduré, pour ne point faire de schisme,
Saint-Esprit, mais seulement un Dieu. Saint vous eût été aussi glorieux, et plus encore,
Denys, en ayant eu nouvelle, combattit aussi- selon moi, que de mourir pour ne pas sacri-
tôt cette erreur; il écrivit même à Paul pour fier, puisqu'ici chacun souffre pour sauver
l'en dissuader ; mais le mal ne cessant point son âme pour le salut de toute
seule, et là,
dans Antioche, les évèques s'y assemblèrent l'Eglise. Néanmoins, si vous persuadez aux
pour travailler à conserver la pureté de la foi frères de se réunir, le bien que vous ferez
et réfuter en même temps cotte nouvelle héré- sera plus grand (jue la faute que vous avez
sie. Saint Denys fut invité à s'y trouver; mais faite n'a été grande; on ne vous l'imputera
comme il ne le pouvait, à cause de son grand plus, et vous recevrez des louanges. Si vous
âge et de la faiblesse de sa santé, il écrivit n'êtes plus le maitre des autres, sauvez au
aux Pères du concile pour rendre témoignage mohis votre âme, à quelque prix que ce soit.
de son sentiment sur les contestations pré- Je prie le Seigneur de vous donner la santé
sentes. Eu effet, il mourut avant la fin de ce avec l'amour de la paix. » Saint Jérôme ^ a
concile, la dix-septième année de sou épisco- inséré cette lettre tout entière dans son Ca-
pat, la douzième de l'empire de Gallien, de talogue deshommes illustres. Nous rapportons
Jésus-Christ 2G4. au même lemps la lettre que saint Denys
adresse ^ aux confesseurs de Rome qui sui-
ARTICLE II.
vaient Novaiien et qui étaient le principal
DES ÉCRITS DE SAINT DENTS.
appui de son schisme. A cette même époque
Lettre de ^ • ordonner évèque de
Novaticn, s'étaut fait se rapportent plusieurs autres letlies qu'il
rN'ova!i"en! Romc, du vivaut de saint Corneille élu pape , écrivit ^ sur le sujet de la pénitence, à diffé-
m^à'i^ns et'à vcrs Ic mois de juin de l'an 251, envoya aus- rentes Eglises, comme à à cell<; de Rome •*;
amresT en sitôi dcs députés à diverses Eglises, avec des celle de Laodicée en Syrie dont Théliinidre ,
lettres par lesquelles il donnait avis de son était évêtpie ; à celle d'Arménie, gouvernée
élection et feignait d'avoir été élu malgré par JNIérusane, où il marquait l'ordre des pé-
lui. Il écrivit en particulier à saint Denys, chés, pour savoir combien en devait durer
qui lui répoîidit par une lettre fort courte, la pénitence ; dans une lettre à Conon », évè-
mais où les lumières de son esprit et bi ftiu
'
que d'Hermopole en Egypte; et dans une au-
de sa charité paraissent avec un pareil éclat. tre générale à toute rEgy[)te, il déclarait son
Il lui donne, dans le titre de la lettre, la qua- sentiment louchant la conduite qu'on devait
lité de frère *, et le salut; quoiijue ^ l'un et tenir envers ceux qiù étaient toml)és durant
l'autrene se dussent donner, dans la rigueur, la persi-cution. et il distinguait aussi les di-
qu'à ceux de la communion catholique et il ; vers degrés des péchés "*
: il y en avait une
iur, scnhani exémpla ilta, âe vinca ner>ipe ei agricoîn, ^ Tilipmont, ubi snpra. — '^
Âpiid Euseb., lib. Vî,
de scn])]ie et fnhro, et una confitcantnr quœ ipse con- cap. 45; el Hierouyiu., in Catal., cap. 69. — ° Idcm^
sutjitantialitatts projiugrinndœ causa iivdnlit. scriten- ibid.
tiam item qua dicit FUium esse ex su/jstantia Pntris, 6 Apud Euseb., lib. VI, cap. 46. — ''
Idem, ibid.
ncc non aterndatcm cjtis, coynationem mentis cum — Idom, ibid.
8
Verbci, fontis cum fluvia, et crptera ; ut vel ex i/isa 9 Ibid. M. dn Valois donne à cette lettre le titre
rerum discrepnntia noverint quomodo prioru quidem ,
de livre. [Le Spicilérje de Solesme contient un frag-
illa per ceconomwm dixerit, liœc venu ut piœ fidei ment de cette lettre, t.om. I, pag. 16.] [L'éaiteur.)
postulat ratio. Idom, ibid., pag. 259 et 200. 10 Le cardinal Mai a publié daus son Spicdége,
1 TilhMiiont, lom. IV Hist. ecclés., pag. 250. tome X, un fragment d'un ouvrage d'un ,<aint Denys
* Dionijsius Novatiano fralri sulutem. Him-onym., sur la péuiteuce. 11 croit que ce fragment e?t du
in Catalofjd, cap. C9. Eusèbe Novat au lieu do No-
lit patriarche d'Alexandrie. On le trouve aussi dans le
vaiien; mais il est certain qu'on doit lire Novaiien. Spiciléye de Solesme, lom. I, pag. 17. (L'éditeur.)
11. 20
402 HISTOmi- C.ÉNltRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
aux fidèles (le Rome • touchant le devoir d'un ceux qui les insultaient, ayant confessé de-
diacre, et une autre dn la paix et de la péni- vant le juge, eut la tele tranch(';e; un autre,
tence ; deux aux confesseurs de la même ville * natif d'Afrique, qui se nommait Macaire, ai-
depuis leur retour à l'unité de rKfj,lise ; une ma mieux être brùlô vif que de renoncer à la
à son peuple d'Alexandrie, oii il le reprenait foi. Kpimaque et Alexandre, après ime lon-
sévèrement de ses fautes et l'exhortait à s'en gue prison, lurent déchirés avec des ongles
corriger. Toutes ces lettres sont perdues, et de fer et enfin brûlés dans de la chaux vive.
Lettres <io
ïiO"s n'cu savous aucuu détail. Quatre femmes, savoir: Ammonarion, Mercu-
2. C'est à Eusèbc ' que nous sommes redc- rie, Denise, et une autre Ammonarion, souf-
'ù"'Frbmr
fn^M.M'!.'rl vablcs de quelques fragments des lettres (pie rirent aveceux et eurent la tète tranchée.
'^îand'ritT saiut Deuys écrivit à P'abius, cvê(|ue d'Antio- Le juge condamna au feu. Héron, Ater, Isi-
sousDèce.
^.^^^^^^ évèque paraissait avoir de l'inclina- dore et Némésion, après leur avoir fait en-
tion pour le parti de Novatien et pour sa doc- durer les plus rigoiu'eux supplices. Il y avait
trine, ce qui obligea saint Denys de lui écrire avec eux un jeune homme de ([uinze ans,
diverses lettres sur ce sujet, pour l'engager, nommé Dioscore ; mais le juge, a[)rès l'avoir
à l'exemple des martyrs dont il y racontait tenté par les tourments, le renvoya en lui di-
les combats, ù user d'indulgence envers les sant qu'en faveur de son âge, il lui donnait
tombés. Les martyrs dont il fait mention sont du temps pour changer de sentiment. « Il de-
saint Mètre, sainte Quiuta et sainte Apolline, meure parmi nous, dit saint Donys, et Dieu
qui souffrirent à Alexandrie, dans une persé- le réserve à un combat plus illustre. » Une
cution particulière, sous l'empire de Philippe, troupe de soldats, Ammon, Zenon, Ptolémée,
etdont nous avons parlé ailleurs. Il fait cette Ingénuus et Théophile étant debout devant le
observation dans cette persécution il n'y en
: tribunal du juge, s'aperçurent qu'un homme
eut * qu'un seul qui renonça ù Jésus-Christ ; accusé d'être chrétien, était prêt de le nier :
mais dans celle de Dèce, qui suivit de près, à llieure même ils lui firent signe des yeux
les plus considérables d'entre les chrétiens, et de la main, de tout le corps, de
et ensuite
avoir supporté les premiers tourments avec vis de joie d'avoir confessé si glorieusement
quelque constance, finirent par céder aux se- Jésus-Christ. Plusieurs autres furent mis en
conds. Mais les bienheureuses ^ colonnes du pièces par les païens ", dans les villes et dans
Seigneur, appuyées sur le fonde-
qu'il avait lesbourgs, sans autre forme de procès; entre
ment immobile de la foi, demeurèrent fermes autres Iscurion, qu'un homme de qualité, dont
et inébranlables, et furent d'intrépides té- il faisait les affaires, tua en lui enfonçant un
moins de la vérité de son royaume. Julien pieu dans les entrailles, parce qu'il n'avait
fut le premier; c'était un homme malade de pu l'engager à sacrifier aux idoles. Il y en
la goutte, qui ne pouvait ni marcher ni se sou- eut un grand nombre qui, ne croyant pou-
tenir debout. Il fut traduit avec deux autres voir vaincre les persécuteurs que par la fuite,
qui I3 portaient. L'un de ces deux renonça moururent de faim, de soif et de froid, ou fu-
d'abord à la foi. L'autre, nommé Croniou et rent emportés par les maladies, ou tués par
surnommé Euue, confessa Jésus-Christ. Ju- les voleurs, ou dévorés par ou me-
les bêtes,
lien etCroniou furent mis sur des chameaux, nés en captivité par les Sarrasins '. Saint De-
fustigés le long de la ville et ensuite brûlés. nys remarque, en particuher, qu'un vieillard
Un soldat, nommé Besas, qui avait servi à les nommé Quérémon, évèque de Nilus, s'étant
conduire au supplice et qui avait repoussé enfui avec sa femme dans la montagne d'A-
de l'Eglise.
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. SAINT DENYS. 403
rabie exposée aux courses de ces barbares, apjielle le fils de sa fille et lui dit Jusqu'à
:
non-seiileraejit ils ne revinrent plus, maisqne quand veut-on me retenir ici ? Je vous prie ^
beaucoup de frères, qui les cherchèrent, ne qu'on se hâte et qu'on me laisse prouipte-
purent avoir aucune nouvelle, ni d'eux, ni de ment mourir : allez, mon fils, a]»peler un
leurs corps. Après ce lon^ détail, saint Denys prêtre. Après cela, il perdit encore la parole.
ajoute, en s'adressant à Fabius : « Je vous L'enfaiit courut chercher le prêtre ; mais il
écris tout ceci ', mon très-cher fi'ère, pour malade il ne put
était nuit, et le prêtre était :
vous faire connaître quelle a été la persécu- donc y aller. J'avais prescrit de donner l'ab-
tion dont ceux qui l'ont souflerte compren- solution aux mourants, s'ils la demandaient,
nent mieux la grandeur et la violence que surtout s'ils l'avaient instamment demandée
personne. Au reste, les saints martyrs, qui auparavant, afin qu'ils s'en allassent avec
sont maintenant assis avec Jésus-Christ dans une bonne espérance. le prêtre donna donc à
son royaume, et qui jugeront avec lui le l'enfant une portion de l'eucharistie , lui or-
monde, ont reçu ceux qui tombés du-
étaient donnant de la détremper et de la faire couler
rant la persécution. Ils les ont admis dans huir dans la bouche du vieillard. L'enfant s'en re-
compagnie, ils ont prié et mangé avec eux, tourna, et, avant qu'il entrât dans la cham-
dans la croyance que leur pénitence pour- bre, Sérapion, encore revenu à soi, lui dit :
rait être agréable à celui qui aime mieux la Mon fils, vous voilà donc? Le prêtre n'a pu
conversion que la mort du pécheur. Quelle venir : faites promptement ce qu'il a ordonné,
conduite nous conseillez vous donc de tenir à et me délivrez. L'enfant détrempa la portion
leur égard? Que devons-nous faire? Suivrons- de l'eucharistie et la fit couler dans la bou-
nous Tavisdes saints martyrs? Confirmerons- che du vieillard, qui rendit aussitôt l'esprit,
nous la sentence qu'ils ont rendue, ou })lutùt après un léger soupir. N'est-il pas manifeste,
la grâce qu'ils ont accordée, en traitant ces conclut saint Denys, qu'il fut conservé jus-
pénitents avec douceur, ou bien nous éta- qu'à ce qu'il exit été absous de son péché et
blirons-nous juges des saints martyrs ? Exa- reconnu pour fidèle, à cause de tant de bon-
minerons-nous leur sentence ? La casserons- nes œuvres qu'il avait faites? » Voilà tout ce
nous ? Renverserons-nous ce qu'ils ont établi? qui nous reste des lettres de saint Denys à
Ferons-nous injure à leur douceur, et excite- Fabius, évêque d'Antioche.
rons-nous la colère de Dieu ? » Dans une au- 3. Cet évêque d'Antioche mourut au com- l,p(tre de
saint Denys
tre lettre au même Fabius ^, saint Denys lui mencement de l'année 252, et c'est ce qui à saint Cor-
nfille , en
allègue encore une preuve éclatante de la nous oblige de mettre quelque temps après * 252. Son é-
°""
douceur de l'Eglise envers ceux qui, étant la réponse que saint Denys fit au pape saint gène.^
faveur de Sérapion. « Il y avait ici, lui écri- core qu'Hélène de Tarse, et ceux qui étaient
vait-il, un vieillard fidèle, nommé Sérapion, avec à Antioche, pour faire cesser la divi-
lui
qui, après avoir passé sans reproche la plus sion qui y régnait à l'occasion du schisme et
grande partie de sa vie, tomba enfin durant de riiérésie de Novatien, l'avaient prié de se
la persécution et sacrifia. 11 demandait sou- trouver au concile qu'ils y tenaient à ce sujet;
vent pardon, et personne ne voulait l'écouter; que Démètre avait été choisi pour évèciue de
étant depuis tombé malade, il demeura trois cette ville, en la place de Fabius, et que saint
jours de suite sans voix et sans sentiment. Alexandre , évêque de Jérusalem , était mort
Le quatrième jour, revenu un peu à lui, il saijitement dans la prison où il avait été mis
* Euseb., lib. VI, cnp. 42.— 2 Idem, ibid., cap. 44. rum senex, Vcnisti, inquit, fili; ac presbyter qnidetn
2 Properate, quaeso, et me qiiaulocius absolvite, ipse venire non potuit. Tu vero fac citius quod im~
Accerse milii unum ex presbyteris. Hœc cum dixis- peratum est; et dimitte me. Max puer buccellam
$et, rursus illutn vox destituit. Puer ad presbyierum intinxit , et in os senis infudit ,
qui ea paulatim
cucurrit. Jarn
nox erat, prcsbi/fer autem œgrotabdt, absurpta, continua animam exhalavit. Annon igitur
Sed quoniam in mnndatis dcderam ut morituris, si apparet cwn reservatum fuisse, ac tantisper in vita
pelèrent, et maxime si antca suppliât 1er postulassent, permansis^c, quoud reconciliaretur, et deleto jam cri-
venia mdulgerelur, quo ionœ spei p/eni ex lutc vita mine, pro tuultis quœ gesserat bonis openbus, a Christo
migrarenl, cxigaom eucharistiœ partem puero iradi- agnosci posset et prœdicari? Hœc Diouysius apud Eu-
dit, juùens ut in uqua inlinctam seni in os instilla- seb., lih. VI, cap. 44.
ret. Redit igitur puer buceellam a/ferens. Et cum ap- * Apud Euseb., lib. VI, cap. 46.
propinguaret, priusquam ingrederetur, recreatus ite- s idem, ibid.
.
à Origcne sur le sujet du martyre, n'est pas piré un peu de temps, eux et nous, lorsque la
venue jusqu'à nous; mais on en pi.'ut infé- guerre et la famine ont cessé-. Mais aussitôt
est venue l;i peste, (|ui a été pour eux la chose
rer • qu'il le tenait en sa coininiuiion ce qui ;
paraît encore par les éloiies qu'il lui donna du monde la plus terrible et la plus fâcheuse,
et jamais accident ne les a plus étonnés. Pour
après sa mort, dans sa lettre à Thcotecne de
Césai'ée.
nous, nous l'avons regardée d'un autre oeil,
et elle ne nous a été, non plus que les autres
uisconrs Eusèbc * nous a donné un assez long
4.
Dys"5ur"h: fragment d'un discours qne saint Dcnys lit à maux, qu'un sujet d'épreuve et d'exercice.
Quoiqu'elle se soit jetée sur les païens avec
son peuple sur la solennité de Fàqtu's, en 2o3.
'
vt^ls.
qui affliscait l'Empire plus de fureur que sur nous, elle ne nous a
On y voit que la peste,
depuis i'an 'ioO, était encore très-violente, ce pas néanmoins épargnés. Plusieurs de nos
frères, ncghgeant le soin de leur propre santé,
qui n'empêchait point les chrétiens de passer
cette fête dans la joie. « Ceux qui ne sont pas par l'excès de la charité qu'jls avaient pour
chrétiens, dit-il, ne prennent point ce temps- les autres, sont morts en pansant les mala-
tend que cris de tous cotés; tout le monde enlevés de la sorte, quelques-uns étaient prê-
pleure, toute la ville ne retentit que de gé- tres, quelques-uns diacres, d'autres, les plus
missements et de soupirs, par lesquels on re- pieux du peuple. Ce genre de mort a son mé-
grette, ou ceux qui sont morts, ou ceux qui rite *, que l'ardeur de la piété et la fermeté
se meurent. On peut dire ici avec l'Ecriture, de la foi ne rendent guère inférieur à celui
lorsqu'elle parle de la mort des premiers-nés du martyre. Après avoir tenu les corps des
d'Egypte, qu'il s'est élevé un grand cri car il :
saints entre leurs bras, après leur avoir fer-
n'y a point de maisons où il n'y ait des fu- mé la bouche et yeux, les avoir portés sur
les
nérailles; et plût à Dieu qu'il n'y eût qu'un leurs épaules, les avoir embrassés et baisés,
précédée d'autres disgrâces: on nous a chas- bits, ils ont reçu, peu de temps après, les mê-
sés de nos maisons; mais nous n'avons pas, mes devoirs par d'autres qui ont imité leur
pour cela, négligé de célébrer les jours de zèle et leur charité.Les païens ont gardé une
fêtes. Tous les lieux oîi nous avons souffert conduite toute opposée. Dès que quehpi'un
persécution, les champs, les déserts, les vais- était frappé de la maladie, ils le chassaient;
ils fuyaitmt la présence de leurs proches, les
seaux, les hôtelleries, les prisons, nous ont
servi de temples pour faire nos assemblées; jetaient à demi-morts dans les rues, laissaient
avec tant de joie que ceux dont la charité a de gagner un mal qu'ils n'ont pu toutefois
reçus au fesUn du Ciel. La persécution a été 5.L'Egypte était depuis longtemps infec- saint p(
suivie de la guerre et de la famine ; et, au tée de l'erreur des millénaires. Le principal confre "m
lieu que nous avions supporté seuls celle-là. auteur de ce mal avait ele un eveque de cette n confère «
» Ëuseb., lib. VI Hist., cap. A6. Apud Euseb., lib. VIT, cap. 22. L'Eglise a suivi le
Afluinasius Alexandrimis jugemont que saint Deny» fait de ces saints qui ont
* Origenem magnus ille
in mullis libris admitiit.... Et Dionysius Alexundri- souffert non pour la foi mais pour
, la charité ; et
1 Euseb., lib. VII Hist., cap. 24. ter has duas mortuorum resurrectiones, gentes igno-
* In plurimis quidem aliis rehus laudo
Nepotem ac rantes Deum in angulis terrarum in carne reservan-
diligo, cum propter fidem ac dtligcntiam et studium das : quœ post mille annos regni in terra justorum
Hcripturarum, postremo ob psalmorum cantus niulti- instigunte movendœ sint ad pugnum contra
diabolo
plices quibus plerique ex fratribus etiamnum niagno- Domino pro justis pugnante imbre
justos régnantes, et
père delectantur. Idem, ibid. igneo compescendas : atque ita mortuas, cum cœteris
^ Euseb., lib. VII Hisf., cap. 24. in impietate anie mortuis ad œterna supplicia in in-
* GeDDade marque eu ces termes divers points Geunad., lib. de Ec-
corruptibili carne resuscitandas.
de
doctrine que Népos enseignait dans son traité iVe- : Dogmnt., cap. 25, tom. VIII Oper. Augustin.,
clesiast.
que per mille annos post resurrectionern regnum Chri- in Append., pag. 78.
sti in terra futurum, et sanctos cum illo in deliciis ^ Cum essem, inquit, in Arsinoitica prœfectura, in
regnaturos speremus, sicut Nepos docuit, primam juS' qua jampridem, ut nosti, increbuit hœc opinio. Apud
torum resurrectionern, et secundam impiorum : et in- Euseb., lib. VII, cap. 24.
m HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
point, n'en parlerait pas, et n'en ferait au- Pierre et de Paul. On croit que c'est de ces
cune mention; et tous les frères qui étaient deux livi-es contre Nt'pos (|ue saint Jérôme a
pri^sents se réjouirent de cette coiifurinité de voulu parler, lorsqu'il a 'que saint Uenys
dit
sentiments. » Saint Denys traitait ensuite de avait un ouvrage
écrit, contre saint Irénée,
l'autoritéde l'Apocalypse, qui était le i)rin- très-élégant, où il se moquait des fables des
cipal appui des millénaires, et il disait ' millénaires; et il y a aussi toute apparence
« que quelques-uns de ses ])rp(lécoss(Mirs que c'est encore de ces livres (jue parle Théo-
avaient rejeté ce livre, parce qu'ils n'y trou- dorct, quand il dit ® que saint Denys a réfuté
vaient ni sens, ni raisonnement; qu'ils en Cérinthe, auteur de ces rêveries des millé-
croyaient l'inscription fausse et qu'ils la re- naires; car nous ne voyons point qu'Eusèbe
gardaient comme l'ouvrapje de l'hérésiarque fasse mention d'autres livres où saint Denys
Cérinthe. Pour moi, ajoutait-il, je n'ose reje- ait combattu cette erreur, et il n'y a aucune
une raison de l'admirer '. » Saint Denys exa- que toutes les Eglises répandues dans l'Orient
minait ensuite tout le livre de l'Apocalypse, et dans les autres pays les plus éloignés, qui
et, après avoir montré qu'on ne pouvait l'en- s'étaient séparées, se sont réunies, et que les
tendre selon le sens que les paroles présentent évoques, en particulier Démétrien d'Antioche,
à l'esprit, il ajoutait « J'avoue que l'auteur
: Théoctiste de Césarée, Mazabane, successeur
de ce livre s'appelle Jean; que cet ouvrage d'Alexandre dans le siège de Jérusalem; Ma-
est de quelque saint homme, inspiré par l'es- rin de Tyr, Héliodore de Laodicée, qui a suc-
prit de Dieu '; mais je n'accorderai pas aisé- cédé à Thélymidre; Hélénus de Tarse, Firmi-
ment que ce soit Jean, fils de Zébédée, frère lien de Cappadoce, et les autres de la môme
de Jacques, auteur de l'Evangile selon saint province, sentent une joie incroyable de la
Jean et d'une épître canonique. » Il rapportait paix rendue à l'Eglise, contre leur attente, et
ensuite les raisons qu'il avait de ne pas croire n'ont plus tous qu'un même sentiment, L'A-
que l'Apocalypse fût de l'apôtre saint Jean, rabie et la Syrie, que vous avez soulagées par
et témoignait être persuadé que celui qui en vos aumônes et consolées par vos lettres , la
est auteur, avait ])ris le nom de Jean *, par Mésopotamie, le Pont, la Bithyuie, et enfin
amour pour la personne de cet apôtre, par toutes les provinces se rejouissent et louent
l'admiration et l'émulation de ses vertus, et Dieu de la paix et de l'union qui est rétablie
par le désir d'être aimé du Seigneur comme entre les frères, » Il lui écrivit aussi plusieurs
lui, ainsi que nous voyons, dit-il, que les en- lettres touchant la question du baptême des
fants des fidèles portent souvent les noms de hérétiques ^, agitée alors avec beaucoup de
chaleur. Mais ces lettres sont perdues, de envoie des copies. Dans une autre lettre
»
même que celles que saint Etienne lui avait adressée encore à saint Sixte au sujet du bap-
écrites sur le même sujet Nous savons seu-
*. tème ^, après y avoir dit beaucoup de choses
lemeut qu'il y priait le saint pape * de traiter contre les hérétiques, il cite cette histoire re-
avec beaucoup de douceur et de modération, marquable, arrivée de son temps. « J'ai be-
une question de si grande importance , et de soin, lui dit-il, mon frère, de votre conseil sur
ne point aisément séparer de sa communion un cas qui nous est arrivé ici, et je vous prie
ceux des évèques qui rebaptisaient les héréti- de m'en dire votre sentiment, car j'ai peur de
ques. C'est ce que nous lisons dans un frag- me tromper. Un de nos frères, qui passe pour
ment de sa première lettre au pape Sixte, que ancien fidèle et qui était dans notre com-
,
Ton comptait pour la seconde de celles qu'il munion dès avant mon ordination, et je crois
avait écrites sur le baptême, où, parlant de même avant celle du bienheureux Héraclas,
saint Etienne ', il dit: « Il avait déclaré, par s'étant trouvé présent depuis peu au bap-
ses lettres, qu'il ne communiquerait plus avec tême de quelques personnes, et ayant enten-
Hélénus, Firmilien et les autres évèques de du les interrogations et les réponses qui s'y
Cappadoce et des pays voisins, parce qu'ils faisaient, est venu me trouver ', fondant en
rebaptisaient les hérétiques. Considérez, je larmes; il s'est jeté à mes pieds, il m'a juré
vous prie, l'importance de cette affaire ; car que le baptême a reçu chez les héréti-
qu'il
j'apprends qu'il a été ordonné, dans de grands ques n'est point tel que le nôtre, que même il
conciles, que les hérétiques qui reviendraient n'a rien de commun avec lui, et qu'il est plein
à l'Eglise catholique, seront mis d'abord au d'impiété et de blasphèmes. Il sentait, disait-
rang des catéchumènes, et qu'ils seront en- il, eu son âme de grands remords, et n'osait
suite lavés de l'impureté de leur levain dans lever les yeux, tant il était frappé de l'impiété
l'eau du baptême. Je lui écrivis en le priant des actions et des paroles qui avaient accom-
pour eux tous. » Et ensuite «J'écrivis eu peu : pagné son baptême. C'est pourquoi il priait
de mots à nos chers confrères, les prêtres De- qu'il put recevoir cette ablution très-pure, et
nys et Philémou *, qui étaient de l'avis d'E- être admis à l'Eglise et à la grâce. Je n'ai pas
tienne, et qui m'avaient écrit sur la même osé le faire, ajoute saint Denys, et je lui ai
matière; et maintenant je leur écris plus au dit que c'était assez qu'd eût joui depuis long-
long. » Dans cette même lettre, saint Denys tempsdelacommunionderEglise. Car, après
donnait avis au pape Sixte de la naissance qu'il a entendu les paroles de l'Eucharistie ',
d'une nouvelle hérésie, dont l'auteur était et répondu, Amen, avec tous les autres; après
Sabellius \ « Il s'est élevé, dit-il, à Ptolémaïde qu'il s'est présenté debout à la table, qu'il a
dans la Pentapole, une doctrine véritablement étendu les mains pour recevoir la sainte nour-
impie; elle renferme plusieurs blasphèmes riture, et qu'il a participéau corps et au sang
contre Dieu le Père, tend à ne point croire de Notre-Seigneur Jésus-Christ pendant long-
son Fils unique, le premier de toute créature, temps, je n'oserais recommencer à l'initier
le Verbe incarné, et à ne point reconnaître le tout de nouveau, comme s'il n'avait encore
Saint-Esprit. On m'a écrit de part et d'autre rien reçu. Mais je l'ai exhorté â prendre cou-
sur ce sujet; j'en ai conféré avec quelques- rage et à s'approcher, avec une ferme foi et
uns des frères qui sont venus m'en parler, et une bonne espérance, de la participation des
j'ai écrit quelques lettres sur ce point, comme saints mystères. Cependant il ne cesse point
j'ai pu avec le secours de Dieu en traitant la de s'affliger; il tremble d'approcher de la ta-
question assez dogmatiquement; je vous en ble, et à peine peut-on lui persuader d'assis-
1 Euseb., lib. Vil Hist., cap. 5. chait presque plus le Fils de Dieu dans cette pro-
2 De omnibus ad illum epistolam misi ro-
his ertjo vince. Epiphan., Hœres. 62, num. 1; Athauas., de
yans atque oùfesians. Idem, ibid. * Idem, ibid. — Dionysii Senteniia, pag. 246 et seq.; Fleury, tom, II
*•
C'est le même qui fut depuis pape. Hist. eccle's., pag. 929.
8 L'hérésie de Sabellius était la même, dans le 6 Apud
Euseb., lib. VII Hist., cap. 9.
fond, que celle de Praxéas et des patropassiens, qui ^
Nam
qui gratinrum actiojiern audierit fréquenter
niaient la Irinilé et la distinction réelle des person- et qui cum cœteris responderit Amen; qui ad sacram
nes divines, et Sabellius l'avait apprise de Noëtus, mensam adstiterit, et manus ad suscipiendum sacrum
dont il était disciple. L'hérésie de Sabellius s'étendit cibum porrexerit qui illum exceperit, et corporis ac
;
fort loin; il avait plusieurs sectateurs eu Mésopota- sanguinis Domini nostri Jesu Christi particeps fuerit
mie, et plusieurs à Rome. Les évèques de la Libye diutissime, eum ego de intégra renovare non ausim.
s'en laissèrent tellement infecter, que l'on ne prê- Apud Euseb., lib. VII, cap. 9.
408 IllSTOlUI' GI':M^RALE DKS auteurs ECCLltSIASTIQUES.
1er aux prières. » Saint Donys t'-crivit encore l'avons on horn'ur \ lui (jui a dcohir»'! l'Edise,
une lettre ,
conjointement avec son peu|)Ie, à qm a enlranui qiiel<ines-uns des hères dans
saint Sixie et à loiite lEgiise romaine, où il l'impiété et dans le blasphème, qui a intro-
traitait au loni? la question du l)ai)tcnie. Eu- duit une doctrine sacriléi;e touchant la divi-
sèJMî ne nous a rien couseivé de rctte lettre. nité (en voulant que Dieu ne paidoinie point
Il ne (lit pas non plus d(î quel sentiuimt était au pécheur), (jui attribue une dureté inijji-
saint Uenys an .sujet du baptême des héréti- toyable à l'extrême boule'; de Jésus-Christ,
ques, s'il suivait le iiarti de saint Cyprien, qui rejette et a'iéanlit le bain sacré (en reje-
comme l'assure saint Jérôme ', ou si, comme tant hi ba[itème de l'E.nlisc), qui ruine la loi
le dit saint l'asile *, il tenait pour valide le et la conl'ession de la rémission des péchés,
baptême des héré'.icines, celui même des pé- que l'on nous oblii^e de reconnaître avant
puzéniens ou montanistes, condamné de|mis de recevoir le baptême *, et qui chasse pour
par le septième, canon du premier concile de jamais l'Esprit-Saint des tond)és, bien qu'il y
Constantinople. S'il en faut juf^er par les frag- ait encore quelque lieu ou de croire qu'il est
ments qui nous restent de ses lettres', il sem- demeuré en eux, ou d'espérer qu'il y retour-
ble jihitot avoir suivi le sentinuiut de saint nera bientôt, Eusébe nous a conservé de
»
Etienne, mais sans oser condamner celui des plus longs fragments de la lettre à Philémon,
autres, et sans approuver la manière même entres autres ce que nous avons dit plus haut
dont ce pai>e se conduisit envers eux. Il y de la vision que saint Uenys eut sur les livres
parait toujours médiateur en cette affaire*, des liérétiijiies ^, dans laquelle il lui fut ré-
pour maintenir la paix partout et l'aire, au- vèle de hre tout ce qui lui tomberait entre les
près d'Etienne et de Sixte, cci qu'avait fait mains. Il remarque encore
que le saint évê- *°
saint Irènée auprès du pape Victor, dans la que, après y avoir traité de toutes les héré-
question de la Pàque, Or, il n'est pas aisé de sies, ajoutait : « J'ai reçu cette règle et cette
comprendre comment il eût pu faire l'office forme de notre bienheureux pape Héraclas.
de médiateur auprès des papes, s'il eût été II ue recevait jamais ceux qui revenaient de
lui-même dans le sentiment qu'ils improu- quel([ue hérésie, lorsqu'après s'être séparés
valent et qu'Etienne jugeait digue d'excom- de l'Eglise, ou plutôt, lorsque, ne s'en étant
munication '. point séparés, ils en avaient été chasses pour
Lettresde 7. Saiut Dcuys uous apprend lui-même ® avoir prêté l'oreille en seciet aux auteurs des
èsainiDe- qu'il avalt fait réponse aux lettres que les mauvaises doctrines, qu'ils n'eussent rapporté
me et d Phi- prêtrcs Ueuys et Philémon lui avaient écrites publiquement tout ce qu'ils avaient entendu
s57etîS8. touchant la question du baptême. Dans sa dire aux ennemis de la vérité. Alors il les
lettre à saint Denys de Rome, dont nous n'a- recevait sans les baptiser de nouveau, ne ju-
vons que peu de cho-es, il lui rendait témoi- géant point que cela fût nécessaire, parce
gnage que c'était un homme admirable et qu'ils avaient reçu de lui le Saint-Esprit
d'une grande doctrine , et parlaitde Novatien longtemps auparavant. » Eusébe ajoute *• que
en ces termes : « C'est avec raison que uous saiut Denys, après avoir amplement examiné
' Hic [Diomjiius] in Ci/priani et Africnnœ synodi Qui prœferea sacrum lavacrum oblitérât, fidemque
*
dogma consenliens , de hœreticis rehaptizandix, ad di- et confessionem quœ buptismum pru-xedunt , everlit, et
verses p/urimas misit epistolas , quce usque hodie Spiritum Sanctum penitus ah ill>s fugat, tametsi spes
extunt. Hinronym., in Calu/ogo, cap. G9. o.liqua subsit, vel quod in illis adhuc maneat, vel quod
* Pepuzenorum niite^n tnptisnius nullam mihi ha- ad eos reversurus sit. Ibid., cap. 8.
bere rationem videtur miratus sum quomodo hoc
: et » Ibid., cap. 7
magnum Dionipium, qui fuit canon'-m pcritus, prate- '0 Ua}ic ego regulam et formam
a becfissimo papa
riit. Basil., Ejnst. cfmon. prima, can. 1. nostro Herac/a accepi ;enim qui ab hœreticis ve-
eos
3 Toiu. M Cortcil. Lalibœi, pag. 952.— * Tillemont, tiicbant, tametsi de/ecissenf, seu potius non dejecissent
tom. IV Hist. eccle's., pag. 142. illi quidam, sed m speciem cum fratrihus communi-
5 Saint Denys ne rpRardait cette dispute que cantes, clam pcrversœ doctrinœ magistros uudire de-
comme un point de disciplin-^ sur lecjuel ou pouvait luti essent: ab Ecclesia éjectas, posl mu/tas tandem
laisser régner la liberté. Il n'en avait pas apprécié preces, non prius admisit, quam quœcumque ab adver-
la ]>rofoiide importance dogmatique. La position de sariis audierant, palam exposuissent, ac tum dcmum
l'Eglise romaine était bien différente. Le pontife ro- eos admitteijat, ncquaquam existimuns iterato baptis-
main était iutimemeul convaincu du principe qu'il male eis opus esse. Quippe jam antea Spiritum Sanc-
s'agissait de maintenir. (L'éditeur.) tum ab ipso acceperant. Apud Euseb., lib. Vil, cap. 7.
« Apud Euseb., lib. VU, cap. 5. — ' Idem , ibid,, " Euseb., lib. Vil Hist., cap. 7,
cap. i.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. — SAINT DENYS. 409
toucbant Lucien ^, qu'on croit avoir été élu ce nombre. Le Seigneur qui dit Je vous ai :
évèquc de Carlbage, en 259, vers le même exaucé dans un temps propre, et je vous ai
temps que saint Denys fut fait pape. Mais on secouru au jour du salut, m'a réservé pour le
ne sait quel était le sujet de cette lettre. temps qui lui est connu. Mais parce que vous
Réponse 8. Il uous rcstc un assez lon^ fragment témoignez désirer d'être instruits de l'état
n?s^a'?x?al dc cellc qu'll écrivlt contre Germain, évêque de nos affaires, vous avez déjà appris que,
Gé"mafn.eS d'Egyptc, qui avait tàcbé de rendre odieuse comme le ccntenier et les soldats me condui-
Sa Lettre À la condultc quB le saint évêque d'Alexandrie saient lié avec Caïus, Fauste, Pierre et Paul,
quelques-uns, survenus de la Maréote, nous
""
DÔmice." avait tenue pendant la persécution de Valé-
rien. Il y témoigne, en général, qu'il a beau- enlevèrent malgré nous. Nous fûmes privés,
coup souffert pendant les différentes per- moi, Caïus et Pierre, delà compagnie de nos
sécutions qui se sont élevées de son temps; frères, et renfermés dans un lieu affreux et
qu'il a été condamné par diverses sentences désert Libye, à trois journées de Paré-
df> la
des païens ; que ses biens ont été vendus pu- tonion. Maxime, Dioscore, Démètre et Luce,
bliquement; qu'après avoir été proscrit, on prêtres, se sont cachés dans la ville, à des-
lui a ravi tout ce qu'il possédait; qu'au lieu sein de visiter en secret les frères. Faustin
des plaisirs et des lionneurs du siècle dont et Aquila, étant trop connus, sont errants à
il avait pu jouir, il s'est vu menacé des der- travers l'Egypte. Il ne reste plus de diacres
nières extrémités; qu'il a vu peuple de-
le que Fauste, Eusèbe et Quérémon; les autres
mander publiquement son supplice; qu'il a sont morts de maladie. Dieu a fortifié Eusèbe
couru les plus grands dangers ;
qu'il a été dès le commencement rendu capable
® et l'a
persécuté de tout le monde et réduit à er- d'assister les confesseurs qui étaient daus les
rer de tous côtés ;
qu'il a enduré toutes k'S prisons et d'ensevehr les martyrs, bien qu'il
nécessités et toutes les fatigues imaginables. ne pût sans se mettre en danger de la vie ;
le
« Et où a été Germain durant tout cela? car gouverneur n'épargne aucun des nô-
le
ajoule-t-il ;
qu'a-t-on dit de lui? Mais il faut tres qui lui sont présentés. Il en fait mourir
revenir de cet excès de folie où Germain m'a cruellement quelques-uns ; il en tourmente
fait tomber, et laisser raconter le particu- d'autres par de rigoureux supplices; il en en-
lierde tout ce qui m'est arrivé, à mes frères ferme d'autres dans des prisons obscures et
qui en ont la connaissance. » Nous avons rap- incommodes, et les accable de chaînes, dé-
porté ailleurs ce que le Saint dit, dans cette fend de les visiter et de leur parler. Mais Dieu
lettre, du témoignage qu'il rendit à la vé- les console continuellement, par le soin et la
rité,avec quelques chrétiens d'Alexandrie, charité de leurs frères. »
devant le gouverneur Emilien. Eusèbe joint 9. Outre cette lettre à Domice et à Di- Lettres
pascale» de
à la lettre contre Germain ', celle que saint dvme, qui paraissent avoir été deux frères, '«'r''^^"?''
Denys écrivit à Domice et à Didyme. Il leur ou au moins deux personnes unies d'amitié, nonf'^e^'^'r
Basilide.
1 Ces deux conciles sont les mêmes dont parle Maxime, à qui saintDenys donne la qualité de prê-
Firmilien dans sa lettre à saint Cyprien. tre, lui succéda daus le gouvernement de l'Eglise
' Deuter. xlî, 14. —
' Euseb., lib. VII, cap. 9. — d'jilexandrie, enfin que Fauste, après avoir confessé
*Idem, ibid., cap. s 11. —
ideiu, ibid. généreusement la foi sous Valérien, eut la tête
6 Eusèbe remarque que cet Eusèbe fut, peu de tranchée dans la persécutioo de Dioclétieo. Idem,
temps après cela, évêque de Laodicée eu Syrie ; que ibid.
410 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
saint Denys en écrivit une antre ', qui conte- soit parce que les évang(^.listes ne l'oiit point
nait un cycle de huit années, et montrait marquée, soit parce (pi^ils se sont exprimés
qu'on ne doit célébrer la Pàque qu'après l'é- diliéreminent sur l'heure à la(|uelle les saiu-
quinoxe du iirintemps. il écrivit sur le même les femmes vinrent au sépulcre. Car saint
sujet à Flavius*. Mais ces deux lettres sont Matthieu dit le soir du samedi ";. saint Jean
perdues, ainsi que celles qu'il écrivit dans le matin, lors(pril était encore nuit '; saint
le même
temps, c'est-à-dire durant la perse- Luc, à la première pointe du jour »; saint
cntion de Valérien, aux prêtres d'Alexandrie Marc, le soleil étant déjà levé ^. Il fait voir
et à quelques autres personnes qu'Eusèbe ne néanmoins qu'on peut les concilier, et que
nomme pas. La seule qui noi'.sresle ' est sa tous les évangélistes s'accordent à mettre la
lettre canoni(|ue à Rasilide, évèque de l'enta- résurrection de Jésus -Christ le dimanche,
pole *, qui l'avait consulté sur plusieurs points avant le répond
jour. Après quoi « Cela il :
de disciphne. Le principal était de savoir à étant ainsi, nous déclarons à ceux qui veu-
quclle heure ou pouvait rompre le jeune le lent savoir précisément à quelle heure, quelle
jour de Pâques. Car quelques-uns étaient demi-heure, ou quel quart-d'heure, il faut
d'avis qu'il fallait attendre le chant du coq ", commencer la joie pascale, que nous blâmons
après avoir passé tout le samedi sans mau- d'intempérance *° ceux qui se hâtent trop et
ger: et tel était l'usage de Rome. Eu Egypte, qui rompent le jeune lorsqu'ils voient appro-
ou rompait le jeune plus tôt, c'est-à-dire dés cher minuit; que nous louons le courage de
le soirdu samedi. Avant de répondre, saint ceux qui tiennent fermejusqu'à la quatrième
Denys pose pour principe, que Ton ne doit veille, et que nous n'inquiétons pas ceux qui
commencer la fête et la joie pascale, qu'au se reposent cependant selon leur besoin ".
temps de la résurrection de iNotre-Seigneur Aussi bien, ajoute-t-il, tous n'observent pas
Jésus-Christ. 11 ajoute qu'il est difhcile de dé- également les six jours de jeiîne : il y en a
terminer Theure précise de sa résurrection, qui les passent tous six sans manger; d'au-
cupavit ; alteram Domitio ac Didymo, in qua probans 8 Luc. XXIV, 1. — * Marc, xvi, 2.
festum paschœ diem, nonmsi post œquinoctiurn ver- 1" Hœc auiem cum ita se habeant, illis qui hoc ac-
num, celebrari oportere, octo annorum canonem publi- curatius subtiliusque considérant, cnuntiamus quota
cavit. Euseb., lib. VII Hist., cap. 20. hora, vel etiam semi-horula, tel quarto horœ, oportet
' Les évèques d'Alexandrie avaient coutume d'é- incipere lœtitiam, ob Domini noslri a mortuis resur-
crire de ces sortes de lettres tous les ans. Nous eu reciionem, et eos quide/n qui nimium festinnnt et ante
avons encore quelques-unes parmi celles de saint mediam noctem, jejunium solvunt, ut négligentes et
Athanase et de saint Cyrille. Ces lettres, après un intempérantes reprekendimus, ut qui propernodum an-
discours sur la fêle, marquaient le commencement tequarn par sit, cursum abruperint.... eos aulem qui
du carême, et le jour auquel Pâques tombait en differunt et plurimum perferimt, et ad quartam usque
cette année. Celles de saint Denys étaient écrites vigiliam fortiter abstinent, ut generosos et laborum
d'un style fleuri et orné, tel que celui dont ou se tûlera7ites, suscipimus : ils aulem qui interea, ut moti
sert dans les panégyriques et dans les déclamations. sunt, vel ut potuerunt, quiescunt, non valde molesti
Euseb., ubi supra; Tillemont, tom. IV Hist. ecclés., sumus : quandoquidem nec sex jejuniorum dies, œquali
pag. 274. aut simili tolerantia, omnes perferunt : sed alii qui-
* On voit par là que les évèques d'Alexandrie n'a- dem vel omnes transmittunt, jejuni permanentes alii ,
dressaient pas toujours leurs lettres pascales à des duos, alii très, alii quatuor, alii nullum, et iis qui-
Eglises entières, mais quelquefois à des particuliers. dem qui in transmittendis valde laboraverunt,
illis
dans celle des Pre'dicateurs du Père Combeti-. Ou la missis, parasceve et subbuto, magnum quid
et egregium
trouve en grec et en latin dans le premier tome ^e facere existimunt, si ad auroram usque permanse-
des Conciles du Père Labbe, pag. 831. [On la trouve rint, non existimo eos ex œquo certamen subiisse, cum
aussi dans Galland, tom. 1; dans Mansi, Coll. Conc, iis qui se pluribus diebus prius exercuerunt. Dionys.,
tom. I.] Epist. ad Basil., tom. I Conc. Labb., p. 834 et 835.
Ais enim aliquos fratres dicere, quod oportet, hoc
' 11 C'est que les plus fervents passaient la nuit en-
in gain cantu facere ; alios vero, quod id sit facien- tière sans dormir.
[iii^ SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. — SAINT DENYS. 411
très en passent deux, d'antres trois, d'autres règles de discipline; c'est d'elle que parlent
quatre, d'autres pas un. Ceux qui ont poussé les Pères du concile appelé In Trullo, lors-
le jeûne le plus loin, et qui ensuite se trou- qu'ils disent * qu'ils reçoivent les canons de
veut faibles et presque défaillants, méritent saint Denys d'Alexandrie. Il est remarquable
qu'on leur pardonne, s'ils mangent plus tôt. que, dans cette lettre, il qualifie plusieurs
Quant à ceux qui, non-seulement n'ont poijit fois Basilide du titre de son fils bien-aimé ",
continué le jeûne, mais n'ont point jeûné, quoiqu'il le reconnaisse aussi pour évêque,
ou même ont fait bonne chère pendant les en l'appelant son frère et le compagnon de
quatre premiers jours, et qui, venant ensuite son ministère ®. Il lui avait écrit beaucoup
aux deux derniers, au vendredi et au same- d'autres lettres qui ne sont pas venues jus-
di, les passent sans manger , et croient faire qu'à nous ', dans l'une desquelles il témoi-
beaucoup d'attendre jusqu'à l'aurore, je ne gnait qu'il avait fait un commentaire sur le
crois point que leur combat soit égal à ceux commencement de l'Ecclésiaste *.
qui se sont exercés pendant plusieurs jours. » 10. Les troubles qui agitaient la ville d'A- Diverses
Basilide demandait encore si l'on devait per- lexandrie, en 260, ne permettant pas à saint très pasça-
mettre l'entrée de l'église et la participation Denys de faire en personne tous les devoirs cenys, en
aux saints mystères aux femmes nouvelle- d'un évêque, il se vit obligé d'écrire d'Alexan-
ment accouchées, ou à celles qui souflraient drie même une lettre pascale, pour l'an 261,*
leurs incommodités ordinaires. Saint Denys au peuple chrétien de cette ville ^, comme
répond ' qu'il ne croit pas qu'une personne s'il eût été dans quelque province éloignée,
de piété ose s'approcher en cet état delà table. Nous n'avons plus cette lettre ; mais il nous
ni toucher le corps et le sang du Seigneur, reste quelques fragments d'une autre lettre
qu'on ne doit recevoir que lorsqu'on est pur pascale qu'il écrivit quelque temps après à
de corps et d'esprit. Il prescr-it, sur la con- Hiérax, évêque d'Egypte, pour l'année 262,
tinence que les personnes mariées doivent et dans laquelle il lui décrivait en ces termes
garder, en certains temps, les mêmes règles l'état pitoyable où était la ville d'Alexan-
données par saint Paul. Quant à ceux à qui drie : « Il ne faut pas s'étonner si j'ai de la
il est arrivé la nuit quelqu'impureté invo- peine à m'entretenir par lettres avec ceux
lontaire *, il laisse à leur conscience de s'ap- qui sont fort éloignés de moi *", puisqu'il
proeher ou de s'abstenir des saints mystères, ne m'est pas même aisé de m'entretenir avec
Il conclut ainsi sa lettreVous nous avez ; « moi-même, vaquer à mes propres affai-
ni de
adressé ces questions, mon
fils, non par cher res. Pour parler à mes frères, aux fidèles de
ignorance, mais pour nous faire honneur et mon Eglise, qui demeurent dans la ville où
entretenir la concorde; et moi j'ai déclaré je suis, ou plutôt qui sont mes propres en-
ma pensée, non en maître, mais avec la sim- trailles, qui ne sont qu'une seule âme avec
convient de garder entre nous. »
plicité qu'il moi, il faut que je leur écrive, et à peine
L'humilité le faisait parler de la sorte ^ : car, trouvai-je le moyen de leur faire tenir mes
en effet, son autorité était très-grande par lettres. Car il est plus aisé, je ne dis pas de
la dignité de sou siège, par son âge, par la passer aux extrémités de la province, mais
gloire de sa confession, qu'il avait deux fois de voyager depuis l'Orient jusqu'à l'Occident,
acquise, par ses vertus et par sa science, que d'aller d'un quartier d'Alexandrie à un
Aussi cette lettre a-t-elle toujours été comp- autre. La grande place est plus déserte que
tée, par l'Eglise d'Orient, entre les canons ou cette affreuse solitude, que les Israéhtes ne
1 De mulieribm autem quœ sunt in abscessu, an sic filio et fratri in sacris comministro. Tom. I Concil.,
eas affedos oporteat domum Dei inyredi, supervaca- pag. 831. — 6 Ibid. — '^
Euseb., lib. VII, cap. 26.
neum tel interrogare existimo. Neque enini ipsas arbi- ^ Ipse prœterea in epistola , quam ad Basilidem
tror, si sini piœ et fidèles, sic affectas ausuras, vel ad Pentapolitanum scripsit, commentarium se compo-
sanctam mensam accedere, vel corpus vel satiguinem suisse testalur in prinripium libri, qui Ecclesiastes
Domini ailingere. Tom. I Concil., pag. 834 et 835. diciiur. Euseb., ibid. Sixte de Sienne, lib. IV Bibl.
2 Qui autem in non voluntario nocturno f},uxu fue- sanclœ, dit que Procope de Gaza tire ce commen-
rint, a quo'jue propriam conscient lam sequontur, taire de saint Denys. [Gallaud a retrouvé ce com-
seipsos an de eo discernant, annon, considèrent. Ibid. mentaire et l'a publié, tom, lll Biblioth. Veter. Patr.
Fleury, loin. II Hist. ecc/e's., pag. 353.
3
Le Spicilége de Solesme a publié quelques fragments
* Quin etiam canones Dionysii, qui fuit archiepis-
d'un auteur qui avait sous les yeux le commentaire
copus magnœ Alexandrinorum civttatis. Tom. VI Con- de saint Denys. Voy. tom. I, pag. 17 et seqq.]
cil., pag. 1141. — 6 Uionysius Basilidœ dilecto mihi » Euseb, lib. Vil Hist., cap. 21. ^° Idem, ibid. —
,
cellesque Moïse changea en sang en présence ment Gallien avait été proclamé empereur
de Pharaon. De quelle eau peut-on donc se par la voix de tout le monde; la paix dont
servir pour purifier celle qui sert elle-même l'Eglise jouissait sous son règne, et le temps
à purifier les autres choses?... Les exhalai- auquel il écrivait, en disant; «Les impies qui
sons de la terre, les vapeurs des fleuves, les étaient autrefois si célèbres se sont évanouis,
vents de la mer, les brouillards des ports por- et notre très- religieux empereur, chéri de
tent partout la corruption que les éléments Dieu, ayant déjà régné plus de sept ans, est
ont tirée des corps morts dont ils sont cou- dans neuvième année de son règne, en la-
la
verts. Faut-il s'étonner après cela des ma- quelle nous célébrons la fête. »
ladies contagieuses qui nous affligent et des 12. On ne sait si cette fête était celle de Lettre
pascale de
morts subites? A compter depuis les enfants Pâques, ou une fête particulière, indiquée saint Denys
aux fidèles
jusqu'aux vieillards décrépits, il y a moins pour rendre grâces à Dieu de la paix qu'il dueypte,
n y en avait dans une forte et vigoureuse Hermammon, dont nous venons de parler, TimoHiée.
vieillesse; et taudis que, dans les anciens re- était une lettre pascale. Eusèbe ne s'explique
gistres de ceux qui devaient recevoir leur point là-dessus mais il marque une lettre
;
subsistance du public, on ne mettait que ceux pascale de soiiit Denys ^, adressée aux fidèles
qui étaient entre quarante et soixante- dix répandus dans l'Egypte, et ajoute qu'il en
ans, on met, dans ceux que l'on fait aujour- écrivit encore d'autres depuis. Il lui attribue
d'hui, les enfants depuis l'âge de quatorze encore une lettre touchant le sabbat*, et une
ans, jusqu'aux vieillards qui en ont quatre- autre sur la manière de s'exercer ; quelques
vingts et les registres se trouvent encore
, discours assez longs ', mais en forme de let-
moins remplis qu'ils n'étaient alors. Ceux tres, dont un qui traitait des tentations, était
qui sont dans un âge peu avancé paraissent adressé à Euphranor; dans les autres adres-
vieux, tant ils sont abattus de misères et de sés'à Tiniothée, et intitulés: De la Nature, il
maladies. Comment ne tremble -t- on point, réfutait les atomes de Démocrite et d'Epi-
1 Euseb., lib. VII Hist., cap. 23. » Apud Euseb., lib. VII, cap. i. 10, 22 et 23. —
* GaUienus solus imperium obtinens , modcratius se ' Idem, ibid., cap. î4. — ^ Apud Pliotium, Cod. 232,
gessit , utque religionis nostrœ antistites secure delri' pag. 904.— « Apud Euseb., lib. VI, cap. 22 et 23.
munus suum obirenl, hujusmodi rescripto prœce- ^ Apud Euseb., lib. VII Hist., cap. 22.
ceps
pit. Imperator Cœsar P. Licinius GaUienus, pius, 8 Exslat etiam episfola ejus de Sabbato, et alia de
felix, augustus, Dionysio, Pinnœ, Demetrio et reli- Exercitatione. Pvœterea ad Hermammonem fratresque
quis episcopis. Indulgentiam beneficii nosiri per uni- in l'gypto degentes epistola. Apud Euseb., ibid.
versum orbem diffundi prcecipinivs, ut cuncti a rcli- 9 Sed et aliœ plures sunt apud nos illius epistolœ
giosis locis abscedant. Quocirca et vos rescripti nosiri et prolixiores libri epistolari forma ac stylo conscripti,
forma uti potestis, ut nul/us deinceps vobis molestiam Timollieo puero dicati. Item liber de Tenlalionibus,
facessat. Atque id quod vobis exsequi licet jamdudum quem etiam Euphranori nuncupavit. Euseb., ibid.,
a me concessum est. Apud Euseb., lib. VII, cap. 13. cap. 26.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XVIII. — SAINT DENYS. 413
cure, et marquait assez clairement que son de Sabellius '. Il y en avait une adressée à
dessein * était de démontrer la fausseté de Ammon, évêque de Bérénice dans la Penla-
toutes les opinions des philosophes touchant pôle *, une à Télesphore , une à Enphrauor,
la naturf, pour faire voir ensuite qu'elle n'a une à Ammon et à Eupor. Nous avons aussi
point d'autre auteur que Dieu : nous n'avons plusieurs endroits considérables ^ des quatre
plus ces discours en entier; mais Eusèbe nous livres que saiut Denys composa pour se dé-
en a conservé de fort longs extraits dans son fendre des faux soupçons qu'on avait donnés
livre xiv« De la Pi'épwation évangélique -. de sa foi au pape saint Denys. Il y répondait
Pour montrer que Dieu a fait tout ce qui est à toutes que l'on avait produites
les paroles
dans le monde, et que rien ne s'est fait par contre lui ^, particulièrement à celles qu'on
le -concours fortuit des atomes, saint Denys avait tirées de sa lettre à Ammon et à Euphra-
apporte pour exemple ce qui se fait tous les nor; et, sans rien rétracter de ce qu'il y avait
jours pour l'utilité et le commerce de la vie, avancé, il faisait voir que ses accusateurs
les étoffes, les maisons, les vaisseaux, et de- avaient donné à ses paroles un sens qu'elles
mande s'd est possible que de si beaux ou- n'avaient pas, qu'ils les avaient tronquées et
vrages, composés de tant de parties si bien séparées de la suite de" son discours. Saint
unies ensemble et avec tant de rapport, se Alhauase de qui nous ap])renons toutes ces
s,
fassent sans le secours de l'ouvrier ? 11 en tire circonstances, ajoute que saint Denys, après
des consé([uences pour l'admirable construc- avoir réfuté dans ses autres écrits l'hérésie
tion de l'univers, la structure du corps hu- de Sabellius, avait fait voir dans celui-ci la
main, l'étendue des coimaissances de l'ame, pureté de sa foi. Aussi saint Basile qui, dans
l'arrangement et le cours des astres. une de ses lettres, avait parlé désavantageu-
Ecrits de 13. 11 uous reste quelques passages des let- sement de la doctrine de saint Denys sur la
saint Denys
contre Sa- tres que saint Denys écrivit contre l'hérésie Trinité ', ayant lu sou apologie au pape,
bellius.
1 Hune enim ex sapientissîmœ provideniiœ operibus ierioribus suis fidem suam omnino pi'am déclarai.
summatim pauca tantvjyi aliqua percurrimus, iidem Atbaoas., du Sentent. Dionys., tom. I, pag. 252 et
paulo post, cura adversus illum, aijus major est éru- 253.
dition opimo, dtsputabimus, uberius Dco duce, ac
<> Quœ de Dionysii rébus sciscito.ris, venerunt qui-
^
futationent, et ad deriionstrundam eorum calurnniam, hendimus. Hic nempe dum impietoti Afri illius se
quod Dionysivs de iis etiain fjuœ isti jactitant, sese Opponit acriore impetu, mihus prudenter sibi prospi~
: non enim conteridendi animo scripsit, sed
puryo.verit ciens in malum huic oppositum abiit, et quidem ni-
sui defendendi suspicionisque amovendœ causa :cum mio contendendi studio. Satis enim huic fuit , si ar-
vero eus depellit crtunrMtiimes ,
quid aliud agit quam gumentis doceret Putrem et Filium non idem esse
quod (inncm criminis smpicioncm levât. Et primo subjecto Personal i, ac palmarium hoc jjrœsumptœ
quidem epistolam suam inscripsit , Apologiam et victoriœ ex lioste blasphemo, nimirum Sabellio, re-
Elenchuiu. Quid sibi vult illud, nisi quod et obtrec- porturet. Atqui is Dionysius, quod unum expetebat,
tatores suos aryuit , et sciptu sua propugnat. oslen' perspicue admodum obtinuit, sed ex superfluo. Nam
dens se, non ea mode qua suspicatus est Arius, scrip- non solum diversitatem hyposiaseon, sed et substan-
sisse; sed licet eorum meruinerit quœ de domino tiœ di/ferentiam constituit , polenttatn Filii imminuit
secundum humanitutem dicta sunt non ignorasse ta- , et ipsius gloriam immutat ac mujestatem. Hinc adeo
men, ipsum esse Verburn et sapicntium a Paire invi- contigit ut malum permularet malo, atque aberravit
sibdem. Quœritur deinde quod accusatores senten'.ias a scopo rectissimœ et sincerioris doctrinœ, quo factum
suas non intégras référant, sed truncatas, et quod non est, ut varius sit deprehensus et inconstans in conscri'
bona cunscientia, sed mala pro libidine loquantur ptiontbus suis ; et quidem nunc iollit to ôaoudiov
Certe singulis accusatorum verbis oceurrens, omnibus per ea quibus in recta hypostaseon constttuiione minus
eorum. argumentis soluttonem adliibet, cumque Subel- recte usus est: nunc contra admtttit dum respondet
lium prioribus scriptis plunisstme confulurit, his pos- sibi cognomini.Nechis contenlus,et de Spiritu Sancto
ii4 HISTOIRE GI'NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
trouva qu'il parlait d'une manière si ratho- sont indivisililes et de iiiênie temps; il ensei-
lique sur ce j)oint , (ju'ii alli'';j;iia son anîo- gne que Jésus-Clirist a toujours été, qu'il est
rite et ses paroles pour i»rouv(;r la divinité le Verbe, la sagesse; et la vci-tu de Dieu;(|uil
du Saint-Esprit également à
'. Elles servent n'y a point de temps où Dieu n'ait été Fère;
montrer que saint Denys pensait sainement que Père étant éternel, il ne se peut que
le le
de la divinité du Père et du Fils, puisqu'il Fils ne soit éternel. Il dit du Sainl-Esi)iit ^'^
rend à chaque personne de la Trinité une qu'il a^t inséparable et du Père et du Fils,
gloire égale. Il dit encore, en parlant du Fils, conmie le Père et le Fils sont inséparabliîs
que, quoiipi'il tienne son être du Père, il lui l'un de l'autre, et il reconnaît dans la Trinité
est néanmoins coéternel *, étant la splendeur l'unité indivisible de substance. Saint Denys
de la lumière éternelle: ce qu'il rend sensible avoue qu'il ne du terme de
s'est point servi
par l'exemple du soleil et de la clarté qui consubstantiel *, pour marquer l'unité de subs-
voces edidit, quœ nulla prorsus sui parte competunt igitur Deus sit lux, Christus est splendor; cum au-
Sancto Sptrititi, divinum illi atque adorandam adi- tem ipse spintus quoque sit : Nam spiritus, inquit.
metis mnj estatem et eumdem ad hœc infeviora deve-
, est Dewi. Joan. iv, 24, congruerder rursum Cliristus
xum, creatœ adnumerat, ac sevvili naturœ. Basilius, vapor diclus est: Est enitu, inquit, vapor virtutis
Epist. 41. Dei. Sap. vu, 25, et ilerum ail : Solus autem Filius,
• Cœterum cum apud mereputo, si quis veterum qui Patri semper coexistit, et illo qui est plenus,
ac heatorum virorum
quibus nunc reclnmatur,
his, ipse quoque est ex Paire. Ilœc si ambiguë dicta
vocibus usus sit, mv.ltos reperio, quibus antiquitas fuissent, interprète opus habere?it : al cum palam et
fidem conciliât, qui juxta exactam erudiiioncm, non plerumque Arius qui-
haec in scriptis suis pertractarit,
juxta horum temporum hommes, quorum alii prœpo- dem dentibus stridet, quod suam hœresim cernai a
sitione, aliï conjunctione in glorificationesermonem Dionysio eversam, audiatque vel invitus hœc illius
copuiant, statuerunt nihil ref'crre, sane quod attinet verba: Semper Deus Pater fuit., et Filius non absque
ad rectam pietatis intelligentiam, Jrenœus ille et Cle- causa aeternus dicilur sed quia aeternus est Pater,
;
mens Romanus et Alexandrinm Dtonysius, id quod aeternus est et Filius, illique coexistit, quemadmo-
etiam auditu mirum est, in secuiida ad sibi cognomi- dum splendor luci Deus œterua lux est quae
nem ac defensione
epistola de accusutione hune in , nunquam incœpit, nunquam desinet: aeternus ergo
modum finit Transcribam autem vobis
sermonem. splendor prœlucet ac coexistit, qui absquc ini-
ipsi
tias agere, ac nunc etiam vobis scribere desinemus. aiuni : Cum Patrem dicit Diongsius, Filium non no-
Deo autem Patri, et Filio Domino nostro Jesu minal, et vice versa, cum Filium dicit, Patrem non
Christo, cum Sancto Spiritu, gloria et imperium, in memorat : sed dœidit, amovet et séparât Fdium a
sœcula sœculorum. Amen. Basilius, lib. de Spiritu Pâtre: ita respondet Diongsius, hominesque pudore
Sancto, cap. 29. suffundit in secundo libre, his verbis : Singula no-
' Itaque purgandi sui causa, in primo libro cui ti- mina a me prolata a se invicem nec separari , nec
tulus, Êlenchus et Apologia, quibusdam prœmissis, dividi queuut: Patrem dixi, et priusquam Filii men-
sicad verbum scripsit: Numquam enim fuit, quando tionem facerem, jam illum in Pâtre siguificaram :
Deus non erat Pater; et in sequentibus profitetur Filium adjunxi, ac etiamsi Patrem non prius nomi-
Christum semper fuisse, ac Verbum, sapienliam et nassem, is tamen in Filii nomiue compreliensus
virtutem exiiiisse. Neque enim Deus cum bis autea fuerat: Spirilum Sanclum addidi, srd simal, et unde
Neque a seipso Fi-
caruisset, postea filium geuuit. et per quem processerit adjunxi. Illi vero ignorant,
lius, sed a Paire habet esse. Et paucis intcrjectis, neque Patrem qua Pater est a Filio alienari posse:
eadem de re ilerum dicit : Cum sit splendor lucis nam nomeu illud est origo conjunetionis, neque
aeternaî, et ipse omuiiio ceternus est. Luce enim Filium a Paire separari, namque Palris vocabulum
semper existente, manifeslum est et splendorem commune quidpiam indicat. In manibus autem illo-
semper existere eo enim ipso lucem esse iutelii-
;
rum est Spiritus, qui neque a mitteute, neque a fe-
gitur quod splendeat, ac iîeri nequit ut lux non lu- renle separari polest. Quomodo igitur ego qui tali-
ceat. Rursum enim ad exempla veniamus. Si sol est, bus utor nominibus illa a se invicem separata et
est quoque splendor, est et dics si vero horum : omnino divisa existimem ? Et paucis interjeclis, hœc
nihil est, niuUum abest adesse solem. Quod si addit : Sic quidem nos indivisibilem unitatem in
aeternus sol esset, dies etiam nunquam cessaret Trinitatem dilatamus, et Triuilatem ilerum quœ im-
Deus autem œterna lux est, quae nunquam incœpit, minui nequit in unitatem contrahimus. Dionysius
nunquam desinet... Jitemus ergo s[)lendor ipsi apud Athauas., ibid., pag. 255.
praelucet ac coexistit, qui absquc initio est et ab * Hinc accusatores suos, qui cum mentiebantur di-
œterno genilus anle eum emicat... Pauloque postea xisse, Filium inter res fados computuri, et neqtia-
de eodem resumit his verbis : Cum igitur aeternus sit quam esse Patri consubstantialem ; iterum in primo
Pater, aeternus est et Filius, lumen de luniine. Nam libro courgttit his verbis : Caeterutn ubi res factae et
si genitor est, est et Filius: quod si Filius non est, opiticiaquaedam considerauda dixi, eoruni exempla
qua ratione et cujus potest esse genitor? atqui ut minus utilia cursim proluli, cum dixi neque :
ambo suut et semper sunt. Deinde hœc addU: Cum planta idem est quod agricola, neque scapha idem
[tii« siècle.] CHAPITRE XVIII. SAINT DENYS. 415
tance eutre le Père et le Fils, parce que, dit- est un en substance avec le Père; que le Fils
il, il ne se trouve pas dans l'Ecriture; mais est dans le Père et le Père dans le Fils; que
il soutient que, s'il n'a pas employé ce terme, le Fds n'est pas une créature et n'a point été
prouvé, par plusieurs arguments, que le Fils qu'il est Fils de Dieu, non par adoption ^,
quod navium faber: deinde in congriiis et naturae Deum dixisset Christi factorem, sui purgandi causa,
rei accommodalioribus magis siini immoratus, ac varia adhibuit argumenta : neque sic aiens reprehen-
pluribus ea quœ certioris fidei erai^.t exposui, variis denda esse enim factor is nomine usum
sua verba, se
excogitatis exemplis quse tihi in alia epistola scripsi, affirmât propter carnem quam Verbum assumpserat,
quibus criminationem eorum depuli, mendacemque utique factam. Quod si quis illud de Verbo dictum
ostendi, qua aiebant me Gliristum negare esse Deo fuisse suspicetur, eo etiam modo absque coutentio-
consubstautialem. Tametsi enim fateor me hoc vo- nis studio, audiisse oportuit. Ut enim Verbum rem
cabulum nusquam in Scripturis sacris, vel invenisse factam non sentio, et Deum non factorem, sed Pa-
Tel legisseattamen argumenta mea quœ subse-
, trem ejus dico, si quando de Filio disserens Deum
quuntur, quœque isti tacuerunt, ab bac senteutia obiter dixero factorem ejus, eliam tune res defen-
nihil diâcrepant. Etenim bumanam prolem in exem- sione non caruerit. Nam sapientes Graeci se suorum
plum attuli, quam
patet esse ejusdem generis ac librorum factores appellant, tametsi iidem proprio-
genitorem dixique rêvera in boc solum parentes
: rum librorum patres sunt: divina autem Scriptura
differre a filiis, quod ipsi non sint filii alias ne- : nos cordis motuum factores nuncupat, cum nos di-
cesse fore neque parentes existere, neque fiiios. cit factores legis et judicii et justitiœ. Itaque qua~
Epistolam autem, ut ante dixi ob praeseutem rerum cumque ex parte res specletur, probe commonstrat
conditionem, pênes me non babeo; alioquin ipsa Filium nec creatam, nec factam rem esse, seque a
tibi, quœ tune scripsi verba, imo epistolœ totius prava Arianorum doctrina alienum. Dionysius apud
exemplar misissem, mittamque si quaudo mihi ejus Atbanas., de Seid. Dionys., tom. I, pag. 258.
copia fuerit. Memini porro me plurimas ex rébus ^ Cu7n autem Arius ad cœtera sua mala hanc quo-
inter se cognatis similitudines conglobasse. Etenim que sententiam quasi ex sterquilinio sibi corisarcinarit,
plantam sive ex semine, sive ex radice succrescen- et hœc udjecerit : Verbum non est proprium Patri,
tem, aliam dixi esse ab eo unde pupullarit, etsi sed aliud est in Deo verbum : bic vero Dominus
ejusdem omuino sit uaturœ: fluviumque a fonte extraneus quidem et alienus est a Patris substantia^
fluentem, aliam formam et nomen accipere : neque et duntaxat secundum cogitandi modum, dicitur
enim aut fontem fluvium, aut fluvium fontem dici, Verbum, et non est secuudum naturam ac verus
sed utrumque existere, ac fontem quasi patrem esse, Dei Filius sed per adoplionem bic quoque Filius
;
fluvium vero aquam ex foute manantem. Sed bœc dicitur, utpote creatura. Et dum hœc ait, apud eos.
quideu! et similia scripta se non videre quasi cœcu- qui rei veritatem ignorant, glorialur, quasi in hoc
tientes dissimulant: duabus autem voculis incon- Dionysius sentiat secum : tute quœso videas quœ de ils
nexis, quasi lapidibus eminus me impetere conan- fuerit Dionysii fides et qua vi il/os Arii oppugnat er-
tur non adverlentes, perobscuris rébus quœ ut in-
: rores ; in primo enim libro sic scribit : Dictum est
telligantur additione indigent, plerumque non modo superius Deum esse fontem omnium bouorum, Fi-
aliéna, sed et contraria exempla lucem afferre. lius vero dictus est fluvius ab ipso emanans ver- :
In tertio nutem libro ait : Vita ex vita genita est, bum quippe est mentis emanatio, et, ut bumano
quemadmodum flumen a foute emanavit, et a luce more loquamur, ex corde per os emittitur; mens
inextincta lux accensa est. Dionysius
splendida vero quœ per linguam prosilit, diversa est a verbo
apud Atbanas., 255 et 25G. Eos iyitur qui
ibid., pag. quod in corde existit: istud enim postquam illud
se accus, lOard, ut qui negarct Fitium esse Patri con- prœmiserit, remanet, et est quale ante erat: illud
substantiulcm, his argunicntis a se confutatos décla- vero prœmissum evolat et circumquaque ferlur: et
rât, modo, sed sapientissime et cum vera
haud levi sic est utrumque in altero, tamelsi diversum est ab
demonstratione, dum hœc ait : Etsi banc vocem in altero : et unum sunt, licet duo sint ; sic namque
Scripturis non iuveui, attamen earumdem Scriptu- Pater et Filius unum sunt et in se invicem illos
rarum mentem coUigens, aguovi ipsum, cum Filius esse comprobaLum est. In secundo autem libro hœc
et Verbum sit, non posse a Patris substanlia esse habet : Ut enim mens nostra éructât a seipsa ver-
alienum. Quod autem non senserit Filium esse rem bum, ut ait Propheta Erucfavit cor meum verbum
:
creatam aut factam, ut illi pervulgarunt, in secundo bonum : estque utrumque alterum ab altero, pro-
libro irstatur lus verbis : Si quis autem ex syco- prium et ab altero distinctum oblinens locum, cum
pbantis, eo quod Deum, omnium dixi factorem et illud quidem in corde, istud in lingua et ore com-
creatorem, existimat me Cbrisli creatorem dixisse, moretur et moveatur; non tamen alterum ab altero
advertat me
Patrem ipsum appellasse, in quo
prius distat, nec se invicem privanlur, neque mens sine
vocabulo Filius adscriptus est. Postquam enim dixi verbo est, neque verbum sine mente sed mens :
Patrem factorem esse, subdidi Neque pater eorum : verbum facit et in ipso apparet, et verbum mentem
est quorum factor est, si proprie pater intelligatur exliibet, in qua factum est, mensque est quasi ver-
esse is latitudinem enim vocabuli bu-
qui genuit ( bum immanens, verbum autem quasi mens prosi-
jus, Pater, in sequentibus inquiremus); neque factor liens mens in verbum transit, verbum mentem in
:
pater o?t, si solus opifex factor dicatur apud Grœ- : circumstantes auditores insinuât: et sic mens per
cos enim ii qui sapienles sunt, suorum librorum verbum in auditorum animis collocatur, et una cum
factores vocantur. Idem, pag. 257. verbo iuirat. Ac mens quidem est quasi pater verbi,
* Quibusdam autem imparité sibi reponeniibus, quod in seipsa existens verbum autem quasi filius men-
:
il6 HISTOIRE r.T^NltRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
mais par nature ; et que, quoique le Père et sur son erreur, les remontrances convenables.
le Fils soient dislinf^ués l'un de l'autre, ils Mais ni l'une ni l'autre ne sont venues jusqu'à
sont toutefois un en substance. Saint Atha- nous. Car nous ne croyons ])oint que la let-
uase trouvait cette doctrine si clairement éta- tre à Paul do Samosate, dont parle Théoiloret,
blie dans de saint Denys, qu'il per-
les écrits soit celleque l'on a imprimée sous le nom
mettait aux ariens de parler eu tout comme de saint Denys dans la Hihiiotltèque des Pères
ce Saint «, pourvu (lu'en même temps ils en- et dans le Recueil des Conciles, et (pii parait
seignassent ce qu'il a enseigne toucliant la avoir été inconnue avant (juc Turiien la fit
Efiiis fie li. En 264, les évoques, assemblés à An- rien de la noblesse de celui do saint Denys:
contie Paul tiocue coutrc I*aul de Samosate , mvileient il est bas, dilTus et embarrassé; les preuves
de SunioïA-
te. r«n ï6*, saint Denys à s'y mais ne l'ayant
trouver '; sont faibles, et les applications de l'Ecriture
pu à cause de son grand âge el de la faiblesse peu lieiireuses. L'auteur parait même n'avoir
de sa sanlé, il écrivit tant pour s'excuser de pas été au l'ait de la matière (ju'il tiaite; car
venir au concile, que pourfendre témoignage ilreproche à Paul de Samosate *' d'admettre
de sa foi sur les articles que Paul contestait *. en Jésus -Christ deux hypostases , deux per-
Nous n'avons plus cette lettre, et tout ce que sonnes, doux christs et deux fils, dont l'un
nous en savons, c'est qu'elle était adressée, était iils de Dieu par sa nature et éternel , et
non à Paul, mais à l'Eglise d'Antioclie ®, et l'autre de David, né dans le temps. Or, on
fils
qu'il n'y donnait pas même à Paul un salut ne voit nulle part que Paul de Samosate ait
de civilité. L'estime que le concile fit de cette enseigné ces erreurs. Le concile d'Antioche
lettre, l'engagea à la rendre publicpie ^, en assemblé contre lui, saint Epiphane, saint Hi-
l'envoyant à toutes les autres provinces. On laire, Théodoret et Philastre, ne l'accusent de
croit que c'est d'elle dont parle saint Jérôme', rien de pareil. Il enseignait, au contraire **,
lorsqu'il dit que saint Denys écrivit, peu de que le Père, le Fils et le Saint-Esprit n'é-
jours avant sa mort, une lettre insigne et taient qu'une seule personne; que le Verbe
célèbre contre Paul de Samosate. Tbéodoret et le Saint-Esprit étaient dans le Père, mais
lait mention d'une autre lettre de ce Saint de même manière que la raison est dans
la
aux évèques assemblés à Antioche », pour les l'homme, sans avoir d'existence réelle et per-
exciter à défenilre la vérité avec un zèle gé- sonnelle ; en sorte que, selon lui, il n'y a vé-
néreux. Ilen cite encore une à Paul de Samo- ritablement ni Père , ni Fils, ni Saint-Esprit,
sate •, dans laquelle saint Denys lui faisait. mais seulement un Dieu. C'est pourquoi ildi-
tis,ûoù ante îpsam quidem, sed neque extra îpsam untversam Antiochensium Ecclesiam lit feras suas di-
factum esse polest. sed cum ipsa existit et ab ipsa rexif,quorum etiam exemplar hic subjecimus. Ibid.,
germinavit. Eodem quoque modo Pater ille maxi- cap. 30.
mum, et mens illa universalis, ante omnia Filium '
Sed et aàversus Panlum Samosoienum ante pau-
habet. Verbum, Interpretotn, Anseium suum. Dio- cns dies quam morerefur, insiynts ejus fertur episfola.
nys. apud Alhnnas., ibid., pasr. 259. Hierou., in Cutulogn, cap. 69.
* Si putaiii impietatis puironi sccum senfire Diowj- * Dionysius quidem Alexandrinus episcopus , vir
sium, eadcin quœ ille scnhant, ewlein pro/ileantur : dodrina insigjvs, profcctionem dintulil propfer se-
scribant exemplu illa, de vinna nempe et ayricola, de nectutis imhecillitutem, per litteras aufem suasit illi
scap/ia et fab>'0, et iina confiteantur qnœ ipse coii.w.h- {Paulu) quœ conveniifbanf, et episcopos qui corivenC'
propuynarulœ caiisci trndidit: senlentium
stantialitalis rauf ad zelum pro veriiafe suscipiendum excitavit.
item qiia Filium es^e ex substanlia Pulris, nec-
dicit, Tlieodori't., lib. II Hœrelic. FabuL, cap. 8,
non œter/iitatem ejiis, coynationem mentis cum verbo, 9 Idmii, ibid.
fontis cum fluvio, et catera ; ut vcl ex ipsa rerum '0 Voyez Mcnthor, Patrolog., lom. II, qui révoque
discrepiantia noverint, quomodo priera illa quidem aussi l'aiitliPiiticité de cette lettre. Gallaud, dans la
per œonomiam dixerit ; liœc vero ut piœ fulei postu- préface des œuvres de saint Denys, eu soutient au
lat ratio. Ibid., pag. 260. contraire l'autbenticité Simon de Maiiislris avait
:
' Voyez Bulluà ou Bull, Defensio fidei Nicœnœ ; tàcbé d'en montrer l'autlicnliciti^ par beaucoup de
Plaqnpl, Dict. des Hérésies, art. Sabellius. (L'éditeur.) raisons. Prœfatio, rum. 10-24. {L'éditeur.)
s Euseb., lib. VII, cap. 30.— * Idem, ibid H Dicis duas hypostases esse et duas personas unius
, cap. 27.
" Idem, ibid., cap. 30. et solius ChriHi et duos Christos ac duos Filios,
,
Vierge ? Car, excepté saint Athauase et saint avait composé un commentaire sur TEcclé-
Grégoire de Nazianze ^, il n'y en a aucun qui siaste, comme il ressort du témoignage d'Eu-
donne à Marie la qualité de Mère de Dieu, sèbe "*, qui, eu parlant des lettres de saint
1 Tom. I ConciL, pag. 870, 871, 874, 883, 887 et lis hominis dicit, quia dixit Dominus gloriœ discipu-
890. lis : Accipite et dividite; Novum Testaraentum est
'Méthode de Palare, contemporain de saint De- in meo sanguine , hoc facile in meam commemora-
nys; Origène, maître de saiut Denys, dans son com- tionem. Et quia dicit idem : Qui pro vobis effunde-
mentaire sur saint Luc, avaient déjà appelé Marie tur Hœc cum audisset Samozatenus , videtur in hac
:
©eoTo'xoç, Mère de Dieu. (^L'éditeur.) voce Domini, niti contra veritatem, qui ignorai quod
' Athanas., in Psalm. Lsxxiv, pag. 1151; Orat, 3 ab Apostolo dictutn est : Quanto magis putalis dété-
contra Arianos, pag. 563; ibidem, pag. 579; ibidem, riora mereri supplicia, quam qui legem Moysis a Dec
pag. 583, et Orat. 4, pag. 642. datam rejicit, eum qui FiUum Dei cooculcaverit, et
* Tom. III ConciL Labbœi, pag. 508. — 5 Ibidem, sanguinem Testament! pollulum duxerit, iu quo sanc-
pag. 508, 509 et seq. — « Ibid., pag. 513. tificatus est ; Spiritui gratiae contumeliam fecerit?...
"^
Desertum dtcis eum qui erat natura Dominus et Nunc vero Samosatensis , ut placeat Satanœ. qui eum
Verbum Patris per quem omnia fecit Pater, et quem delegit, surrexit contra sanguinem vivificum et con-
sancti Patres ôu.oû(jiov Patri vocaverunt. Tom. I Con- tra Spiriium Sanctum, conculcuns ea. Si enim sangvis
ciL, pag. 855. sanctus corruptibilis est, quia dividitur et effunditur,
* Eusèbe lui-même nous assure que, parmi les an- sic erit Spiritus Sanctus sicut sanguis vitœ En in
ciens, plusieurs doctes et illustres évêques et plu- omnibus osfendimus torrenti iniquitatis, non esse cor-
sieurs écrivains, en parlant de la divinité du Père et ruptibilem sanguinem sanctum Dei nostri Jesu Christi,
du Fils, se sont servis du mot consubstantiel. Voyez nec esse fiominis mortalis sicut nos, sed Dei veri qui
Socrate, lib. I, cap. 8, pag. 26. [L'éditeur.) est torrens voluptatis iis qui eum participant. Tom. I
9 Surrexit itaque prirnum Samosatensis loquens ConciL, pag. 866 et seq.
iniqua, qui diceret esse corruptibilem sanguinem Jesu, 10 Ad Basilidem Pentapolitanarum Ecclesiurum
qui est Deus Israël, Jésus et qui omnem
corruptionem episcopum scribens, ait se elucubrasse enarralionem in
et passionem et mortem solvit : qui redemil nos a principium Ecclesiasta. Euseb., lib. VII Hist, eccles.,
gervitute corrupiionis. Sanguinem mortalis et passibi- chap. 26.
II. 27
;
scoliesde saint Denys sur l'Ecclésiaste. Fes- lui l'ignorance et le doute ". Ces paroles :
seler, dans ses Institutions de Patrologie, Pourquoi m'avez-vous délaissé ? il les entend
tome I page 308, observe que saint Uenys y
,
ainsi « Pourquoi la mort, jusqu'à présent,
:
donne l'explication abrégée des versets qui m'a-t-elle été unie, et ne portais-je pas à mes
pourraient arrêter le lecteur, et qu'elle est lèvres le calice o? » il avait dit auparavant que
comme sa clef pour ouvrir le scus du livre en- boire le calice, c'était, en accomplissant le mi-
tier. L'autre fragment de saint Denys donné nistère que Jésus avait reçu, et toute l'écono-
par le cardinal Mai au tome VI de sa Biblio- mie de la tentation, faire avec courage la vo-
thèque nouvelle, d'une manière plus étendue, lonté de son Père, qui voulait qu'il embrassât
est une exposition sur le chapitre xxii de et surmontât les épreuves. On y voit encore
saint Luc, à partir du verset 42 jusqu'au 48 que les anges portent secours à ceux qui su-
inclusivement. Aucun auteur n'indique que bissent, pour la religion, les combats sacrés
saint Denys ait commenté l'Evangile de saint des épreuves que l'âme captive et livrée â
'';
Luc ; mais nous savons que le saint patriar- toutes sortes de crimes, ne tire aucun profit
che a composé beaucoup d'écrits qui ne sont de l'avertissement qu'elle reçoit, non parce
pas parvenus jusqu'à nous, et d'ailleurs l'au- qu'elle ne peut point, mais parce qu'elle ne
teur de la Chaîne d'où ce fragment est tiré, veut pas, comme, cela est arrivé dans Judas*.
a pii le prendre dans d'autres ouvrages de Le troisième fragment, tiré de la Panoplie
saint Denys, comme le fait saint Thomas d'Euthyme de Zigaba, est très -court et est
dans sa Chaîne d'or. Rien donc n'empêche intitulé : Que le Fils n'est pas étranger à la
d'attribuer ce fragment à saint Denys. Ce qui nature du Père, mais qu'il lui est connaturel
pourrait faire de la penie, c'est que l'auteur et consubstantiel. C'est ce que l'auteur mon-
y parait dire que Jésus- Christ n'a pas éprou- tre par l'exemple de la plante et de la racine;
vé une sueur de sang ', mais qu'ici l'évaugé- du fleuve et de la fontaine, qui sont des cho-
liste a usé d'une locution passée en proverbe :
ses distinctes et pourtant connaturelles et con-
substantielles ^.
comme une sueur de sang ^. Quoi qu'il en soit
tastice homo erat Salvator, et naturalibus hominum, ditus haberet, riullarn et admonitione recipnt emolu-
inculpatis tamen, serviebat passionibus. Ibid. mentum non quia non potest, sed quia non vult ; hoc
:
tem Patris. Ibid. Voyez aussi verset 42. unde germinavit, est tamen illi connaturalis. Fluvius
î Illud namque : Si vis, subjectionis et docilitatis est, item a fonte fluens, aliud est ab eo. Neque enim flu-
non ignorantiam aut dubietatcm indicabat. Verset 42. vium foniem, neque fontem fluvium dici fas est. Unam
« Illud : Quid me dereliquisli ? sequebatur utique vero utraque esse confitemur secundum naturam et
ex iis quœ antea poslulaverat. Cur mihi hactenus consubstantialia : fontemque quasi patrem mente con-
mors conjuncta es , et nondum ca/icetn circumfero? cipi, fluvium vero esse quod ex fonte nascitur. Ce frag-
Hanc puto fuisse Saivatoris senlentiam in confusa hae ment a été tiré par ranon^ime du manuscrit de la
fui* SIÈCLE.] CHAPITRE XVm. — SAINT DENYS. 449
[Le cardinal Mai a donné au tome VI de sa rudition du siècle * et la science des Ecri-
Bibliothèque nouvelle, un court fragment d'un tures. Ils l'ont appelé un homme très-élo-
commentaire de saint Denys sur l'Evangile quent ', très -savant défenseur
de l'Eghse •,
de saint Jean. Saint Denys avait en effet com- et illustrepour sa doctiine '. [Denys, dit Mœ-
menté cet évangéliste comme on le voit à la
, Iher ®, est aussi grand comme écrivain que
fin du second fragment donné ci-dessus.] comme évêque; il sait toujours trouver l'ex-
Jngemeut 16. Nous ne dirons rien des deux lettres pression convenable aux pensées et aux sen-
des écrits de
saint Denys. que Lambécius a attribuées à saint Denys, timents sublimes dont il est pénétré. Son
sur la foi d'un manuscrit de la Bibliothèque style est vigoureux, clair et serré, et offre
'
impériale ' : l'une à un moine nommé Théo- souvent une majesté imposante. Il est sur-
dose, l'autre à Ursinuphius, lecteur. On con- tout heureux en tableaux moraux, quand il
vient que ces deux pièces ne sont point de désire exciter daus les esprits un noble en-
saint Denys, mais de saint Isidore de Pé- thousiasme.]
luse, sous le nom duquel on les a imprimées 17. Le premier qui rassembla les frag- Editions.
dans le recueil de ses œuvres ^. On convient ments épars de saint Denys-le-Grand, fut Gal-
aussi que c'est une faute à Auastase Sinaïte land dans sa Bibliothèque Veterum Patrunij
,
d'avoir cité, sous le nom de saint Denys ^, tome III, pages 481-54U; il le sdivisa en deux
un ouvrage contre Origène, dont ce Saint a parties, dont la première contient les restes
toujours été le défenseur et le panégyriste des diverses dissertations, avec VFpistola ca-
même après sa mort. Il serait à souhaiter, nonica, et la seconde les lettres, le tout enri-
pour le bien de l'Eglise, qu'au lieu des écrits chi des notes des Pères Valois sur l'Histoire
qu'on a faussement attribués à saint Denys, ecclésiastique d'Eusèbe, et de Coûtant, sur
on recouvrât ceux qui sont véritablement de l'Apologie de saint Denys au pape. Les œu-
lui, spécialement ses lettres, qui, au jugement vres complètes qui nous restent ont été éditées
d'Eusèbe, étaient d'une grande utilité et se en grec et en latin, par Simon de Magistris,
trouvaient, par cette raison, entre les mains Rome 1796, in-fol., et en 1857, par M. Migne,
d'un grand nombre de personnes. On voit par dans sa Patrologie grecque, dans sa double
ce qui nous en reste, et par quelques frag- édition, tome VII de l'édition latine et tome X
ments de ses autres ouvrages, qu'il avait un de l'édition grecque. On y trouve tous les
génie très-élevé, une érudition profonde et fragments pubhés par le cardinal Mai dans
une connaissance exacte du dogme et de la la Collection des anciens Ecrivains , tome VI.
discipline de l'Eglise ; il était modeste dans On regrette néanmoins d'être obligé de re-
ses sentiments, persuasif dans ses discours, courir à la Patrologie latine, tom. V, pour
plein de zèle pour l'honneur de la religion, une portion notable des œuvres de saint De-
pour la pureté de la foi, la paix et l'unité nys. Le Père Cailleau a aussi donné en latin
de l'Eglise. Les plus judicieux critiques de les écrits dogmatiques et les fragments dans
l'antiquité ont admiré également en lui l'é- sa Collection choisie des Pères.]
avec celui publié par Galland dans le tome 111 de sa siœ pontifex, elegantem scribit librum, irridens mille
Bibliothèque, pag. 497. annorum fabulam. Hieronym., Prologo in lib. XVIII
< Fabricius, tom. V Biblioth. grec, pag. 262, et in Isaiam, pag. 478, tom. III.
Cave, Hist. litt., pag. 84, in verbo Dionysius. ^ Dionysius quoque Alexandrinus episcopus, eruditis~
* La lettre à Tbéodose est la trente-neuvième du simus assertor ecclesiasficœ fidei , veritatem atque
premier livre, et celle à Ursinuphius la deux cent œqualitatem Trinitatis défendit. Rufinus, de Adulte-
dix-neuvième du troisième livre. ratione librorum Origenis, tom. V oper. Hieronym.,
2 Anastas. Sinaïta, quaest. 23. pag. 250.
*
* Extant et Julii Africani libri et Dionysii Et Dionysius quidem Alexandrinus episcopus, vir
Âlexandrini episcopi qui omnes in tantum philoso- doctrina insignis ,
per litteras suasit illi ( Puulo Sa-
phorum dodrinis atque sententiis suos resarciunt li- mosateno) quœ conveniebat. Tbeodoret., lib. II Uœre'
bros, ut nesciasquid in illis primum admirari de- tic. Fabul., cap. 8, pag. 222 tom. IV.
CHAPITRE XIX.
Bérylle,
1. Nous avons parlé de Bérylle dans l'his- de douceur et de charité, et en même temps
^vfi|iie de
lînsties en toire de la vie d'Origène ', et si nous répétons par des preuves si fortes, qu'il le convainquit
Aialiie. 11
tombe duD5 ce que nous eu avons dit, ce n'est que pour et le ramena à la foi orthodoxe qu'il profes-
l'erreur.
imiter saint Jérôme, qui on a fait un chapitre sait auparavant. On voyait encore, du temps
particulier * dans son Catalogue des Hommes d'Eusèbe, les Actes de tout ce qui s'était passé
illustres. Bérylle était évèque de Bostres, en dans cette affaire ^, les décrets du concile as-
Arabie. Après avoir gouverné quelque temps semblé sur ce sujet, les écrits de Bérylle et
son Eglise avec beaucoup de réputation et les conférences qu'Origène avait eues avec
d'honneur ', il voulut y introduire une doc- lui dans l'église de Bostres.
trine étrangère à la foi en enseignant que *, 3. Saint Jérôme avait lu les conférences Les écrits
d Béryle
Jésus-Christ n'avait eu aucune existence pro-
.
comme dans les Prophètes «. Ainsi il anéan- que pas le sujet ", et dont aucun n'est venu
tissait la personne divine du Verbe éternel, jusqu'à nous. Socrate cite la lettre des évo-
comme avaient fait Artémon et Sabellius ^. ques assemblés contre Bérylle •*, pour mon-
Les évê-
2. Plusieurs évèques s'assemblèrent et dis- trer qu'ils croyaient, ainsique saint Irénée,
ques s'as-
semblent putèrent contre lui pour le tirer de cette er- Clément d'Alexandrie et beaucoup d'autres
pour le tirer
de l'erreur. reur '. Mais, le voyant opiniâtre, ils appelè- anciens, que Jésus-Christ avait pris une âme
Il estcon-
verti par O- rent Origène, qui se trouvait alors en Grèce, humaine. Bérylle fleurit sous les règnes d'A-
rigène, l'an
m. et peut-êire à Athènes. Il s'entretint d'abord lexandre-Sévère, de Maximin et de Gordien ".
familièrement avec Bérylle, pour le souder 4. Vers le même temps florissait Ti'yphon, Tryphon,
;
(lisoiiiled'O-
que saint Jérôme met au nombre des dis-
•
1 Tom. II, pag. 595. — ^ Hieronym., in Catalogo, l'un des premiers auteurs de l'hérésie de Sabellius.
cap. 6t). Neque sic est natus de Virgine, ut et deitalis initium
Benjllus Ai'abiœ Bostrenus episcopus , cum ali-
3 homo nascendo acceperit , quasi cntequam nasceretur
quanto tempore gloriose rexisset Ecclesiam, ad extre- ex virgine, Deus non fuerit sicut Artémon et Beryl-
,
mum lapsus in hœresim, quœ Christum ante incarna- lus et Marcellus docuerunt. Gennad., de Dogmat. Ec-
tionem negat, ab Origène correctus, scripsit varia opus- des., cap. i in append., tom. VIII op. Aug., pag. 75.
'
cula, maxime epistolas in quibus Origeni gratias agit. Euseb., lib. VI, cap. 33.
Sed et Origenis ad illum litterœ sunt. Exstat dia- * Exstatd hodieque turn Berylli, tum synodi, ipsius
logus Origenis et Berylli, in quo hœreseos coarguitur. causa congregatœ , édita monumenta, in quibus et
Hieronym., ibid. quœstiones adversus illum propositœ ab Origène, et
* Tune iemporis Beryllus Bostrorum in Arabia epis- disputationes in Ecclesia ejus kabitœ et singula quœ
copus ecclesiasticam pervertens regularn , nova quœ-
,
gesta sunt, continentur. Euseb., lib. VI, cap. 33.
dam aliéna a fide culholica inducere conatus est;
et ^ Exstat dialogus Origenis et Berylli, in quo hœre-
ausus asserere Dominum ac Servatorem nostrum ante- seos arguitur. Hieronym., in Catalogo, cap. 60.
quani inter homines versaretur, non substiiisse in pro- 10 Scripsit varia opuscula, et maxime epistolas in
priœ personœ differentia : nec propriam, sed pater- quibus Origeni gratias agit. Idem, ibid.
nam duntaxat divinitatem in se residentem habere. 11 Idem, ibid. — ^^ Socrat., lib. III Hist. Eccles.,
Euseb., lib. VI, cap. 33. cap. 7.
6 Voyez la noie que nous avons faite sur cet en- *3 Claruit sub Âlexandro, Mammœœ filio, et Muxi-
droit, tom. II, pag. 136; et Tillemont, note 26 sur mino et Gordiaiio, qui ei in imper ium successerunt.
Origène, pag. 771, tom. III Hist. erclés. Hieronym., in Catalogo, cap. 60.
• C'est pourquoi Geaaade joint Bérylle à Artémon, ** Tryphon, Origenis auditor, ad quem nonnulla eius
[ni* SIÈCLE.] CHAPITRE XX. — SAINT ETIENNE. 421
les saintes Ecritures, et composa divers trai- la tourterelle ni la colombe. Nous |avons''re-
tés pour en expliquer quelques endroits as- marqué ailleurs que c'est sans raison qu'on
sez singuliers. On cite de lui un traité sur la lui a attribué le Dialogue de saint Justin avec
vache rousse, dont il est parlé dans le cha- Tryphon *. Il n'y en a pas plus de le faire
pitre XIX des Nombres, un autre sur le cha- auteur d'un discours, que l'on dit être ma-
pitre XV de la Genèse où il est dit qu'A- ,
nuscrit dans la Bibliothèque de Thomas Ga-
braham ayant pris, par ordre de Dieu, une leus ^, ni de le confondre avec Diodore Try-
vache, une chèvre et un bélier, avec une phon ', auteur d'un écrit contre les erreurs
CHAPITRE XX.
[L'an 256.]
le 4- mars de l'année 253, après trois ans et Martyrologes qui portent le nom de saint Jé-
huit mois de pontificat, on élut en sa place rôme, dans plusieurs anciens monuments, et
saint Etienne, le 3 mai suivant, et qu'il il est honoré sous ce titre dans toute l'Eglise.
gouverna l'Eglise quatre ans et près de trois Nous avons môme les Actes de son martyre ';
mois 6. Il mourut le deuxième jour d'août mais les plus habiles ne les croient pas assez
de l'année 257, la troisième du l'ègne de authentiques, quoique cités par saint Pierre
Gallien, et fut enterré dans le cimetière de Damien, pour faire foi dans l'histoire les :
Calliste. Saint Augustin, qui ne manque ja- dates en sont fausses, les miracles y sont
exstanf epistolœ, in Scripturis eruditissimus fuit : et Gallieno IL Apud Bûcher., Catalogo Rom. Pontif.,
quod quidem et multa ejus sparsim ostendunt opus- pag. 271; et Euseb., lib. VU Hist., cap. 2.
cula ; quem composuit de vacca
sed prœcipue liber ' ApudBûcher., pag. 267, 269.
rufa, in Deuteronomio et de dichotomematibus, quœ
,
^ Cum ergo undique ad novitatem rei cuncti recla-
cum columba et turture Abraham ponuntur in Genesi. murent, atque omnes quaquaversum sacerdotes pro
Hieronym., in Catulogo, cap. S7. suo quisque studio reniterentur, tune beatœ memoriœ
1 Tom. II, pag. 2G. papa Stephanus, Apostolicœ Sedis autistes, cum cœte-
2 Fabriciiis , note in cap. 57 Catalogi ; S. Hiero- ris collegis suis, sed tamen prœ cœteris restitit, di-
nym., de Viris illustrihus; et lib. V Bibiioth. Grœcœ, gnum, ut opinor, existimans, si reliquos omnes tan-
cap. 1, pag. 272 tom. V. tum fidei devotione vinceret, quantum loci auctoritate
3 Idem, ibid. superabat. Vincent. Lirin., in Commonit., pag. 331.
* BoUandus, in Apparatu ad Bibliothecam pontifi- 9 Ils sont rapportés conjointement avec ceux de
coup de païens présents au baptême de saint lettres de saint Etienne aux Eglises de Syrie d'Aiabîe'.'«*u
>". prien * lui écrivirent au sujet de Warcien, éye- tait à la vertu. Il pouvait aussi les détourner
que d'Arles ', qui s'était séparé de l'Eglise, du schisme de Novatien, qui avait fait de
pour se mettre du parti de Novatien. L'iiis- grands ravages dans ces cantons.
toire ne nous apprend rien de la réponse que 5. Il nous reste quelques fragments de la ii écrit
leur fit le pape saint Etienne. Nous savons lettre qu il écrivit a saint Cyprien, pour re- prien et à
seulement que, conformément à ce que saint pondre à celle du concile d'Afrique, qui avait sur le bap-
1 • 1 1 /-v
tême,enî5«
Cyprien lui avait demandé *, Marcien fut ordonne de rebaptiser les hérétiques. On y
privé dé la communion de l'Eglise et cbassé voit qu'il appuyait beaucoup sur la dignité
de son siège; car son nom, de même que de sou Eglise » et l'honneur qu'il avait d'être
celui de Saturnin, un des cbefs des ariens, le successeur de saint Pierre. Il y soutenait
ne se trouve pas dans les Dyptiques de l'E- cette maximeimportante de notre reli-
si
glise d'Arles, imprimés dans le troisième to- gion, qu'il faut s'arrêter à ce que nous avons
me des Analectes de Dom Mal^illon. reçu de nos pères par tradition ', sans y rien
Il se laisse Ce fut vers le même temps qu'il se lais-
3. changer de nous-mêmes, et il s't'devait avec
su rpremiio - T» •! ni i- ^ 1 1
par Basiii- sa surprendre par Basilide et par Martial ^ force contre ceux qui s'éloignaient de cette
^
de, en»5*. / .
\ _ , ,
plus que ceux de saint Eusèbe et de saint Marcel, tia gestiunt, ob hanc concordiam fraternamque chari-
qui ne peuvent passer pour authentiques. Voyez Til- tatetn laudantes Deum. Euseb., lib. VU, cap. 5.
^
lemont, pag. 593, tom. IV Hist. ecclés. Nous avons déjà remarqué sur saint Soter la
1 Voyez le P. Honoré de Sainte-Marie, Réflexions coutume qu'avait l'Eglise romaine de répandre ses
sur les règles et l'usage de la critique, tom. II, pag. 7, aumônes dans les provinces les plus éloignées.
* Stephanus de episcopatus sut loco gloriatur, et se
dissert. 4. Il juge ces Actes et ceux de saint Eusèbe
et Marcel, de saint André, de saint Hippolyte très- successionem Pétri tenere contendit, super quam fun-
légrtimes et très-sincères, l'histoire de ces martyrs dameata Ecclesiœ collata sunt. Firmilian., Epist. 75
très-belle, agréable, édifiante, ancienne et écrite avec ad Cyprian.
9 Si quis ergo a quacumque hœresi venerit ad nos,
beaucoup de gravité. Ainsi pense aussi Rohrbacher,
tom. V, pag. 83 et seq. [L'éditeur.) nihil innovetur nisi quod traditum est, ut manus illi
2 Faustinus collega noster Lugduni consistens, semel imponatur in pœnitentiam ; cum ipsi heretici proprie
atque iterum mihi scripsit significans ea quœ etiam ,
alterutrum ad se venientes non baptizent sed commu- ,
vobis scio utiqiie nurdiata, tam ab eo quam (^cœteris nicent lanium. Steph. apud Cyprian., Epist. 75. De-
coepiseopis nostris in eadem provincia constiiutis, quod nique in epistola quœ tune ad Africain missa est, his
Marcianus Arelale consistens, Novatio.no se conjunxe- verbis sflnxîï ; Nihil innovandum nisi quod traditum
nostri et sacerdotum consemu discesserit. Cyprianus, dens, nihil aliud rationem pietatis admiitere, nisi ut
Epis t. 78 ad Stephan. papam. omnia, qua fide a Patribus suscepta forent, eadem fîde
» Signifient plane nobis quis in locum Marciani Are- filiis consignarentur ; nosque religionem , non qua vel-
late fuerit substitutus. Idem. ibid. lemus, ducere ; sed potius qua illa duceret, sequi opor-
* Pag. 342. tere; idque esse propriuM christianœ modestiœ et
5 Cyprian., Epist. 67. gravitatis non sua posteris tradere, sed a majoribus
,
devait excommunier ', ou même chasser de d'un endroit que saint Etienne avait agi
°,
l'Eglise *, ceux qui seraient assez hardis pour ainsi sans faire attention ' que la vérité,
rebaptiser les hérétiques. Il écrivit sur le mê- dont il prenait le parti, n'était pas encore,
me sujet à saint Denys d'Alexandrie, et lui ni assez éclaircie pour lever toutes les diffi-
témoignait ' qu'il ne voulait plus communi- cultés, ni décidée par l'autorité de toute l'E-
quer avec les. Eglises de la Gilicie, de la Cap- glise ^. Il ajoute néanmoins que saint Etienne
padoce, de la Galatie et des provinces voisi- et saint Cyprien', quoique d'un sentiment dif-
nes, parce qu'ils rebaptisent les hérétiques. férent sur la question du baptême des héréti-
Comme ces lettres regardaient Hélène de ques, furent toujours unis dans la charité. On
Tarse et Firmilien *, celui-ci s'en plaignit cite, sous le nom de ce saint pape, deux Epi-
dans sa lettre à saint Gyprien ^, et accusa le tres décrétales, dont il sera aisé de faire voir
pape d'avoir rompu la paix avec un grand la fausseté dans la suite. [ Les divers monu-
nombre d'évêques répandus par tout le mon- ments relatifs à saint Etienne se ti*ouvent dçins
4e. Mais saint Augustin remarque , eu plus le tom. III de la Patrologie latine de M. Migue.]
CHAPITRE XXI.
[L'an 258.]
de saint
Laurent
le uom
dcvcnu SI célèbre
soit
l
que celui de l
Saint *", et toute la terre, dès le V* siècle,
,
-ii i i-.
sont sincè- samt Laurcut. Les 'idus uiustres Pères ont célébrait son triomphe par une dévotion gé-
res. Il souf-
frit en 25S.
1 Dat honorem Deo, qui hœreticorum amicus, et ini- * Saint Augustin a-t-il pensé que le concile Plé-
micus christianorum sacerdotes Dei, veritaiem Chri-
, nicr dont il parle sans le nommer, aurait seul défi-
stï ,et Ecclesiœ unitatem tuentes, abstinendos putat. nitivement jugé la question de la rebaptisation, mal-
Firmilian., Epist. 75 ad Cyprian. gré le jugement dogmatique du pape saint Etienne?
2 Beatus quoque Stephanus, prœsul Apostolicœ Sedis, Pour l'affirmative en général, les adversaires de l'in-
:
saint Elienne dans la question des rebaptisants. (i.'cy.) 303, 304 385; Petrus Ghi-ysolog., Serm, 135; S. Léo,
in IJISTOIUE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
iiérale et unanime *. H parait n(''anm()ins que, lant s'en assurer, se fit amener saint Laurent
martyre
dès-lors, les véritai)le3 Actes de sou qui en avait la garde comme le premier des
étaient perdus, puisque saint Augustin, au sept diacres de l'Eglise romaine. Quand il le
lieu de les citer comme il a coutume de citer vit en sa présence, il lui dit ®: « Vous vous Pag. loo.
les autres Actes des martyrs, rapporte seu- plaignez ordinairement que nous vous traitons
lement ce qu'il avait appris du Saint ])ar cruellement il n'y a i)oiut ici de tom-ments;
:
tradition *. Mais cette traditi(jn était si cons- je vous demande doucement ce qui dépend
tante et si \uiiforme ,
qu'il n'y a presque de vous. On dit que, dans vos cérémonies, les
aucune variété dans la manière dont les au- pontifes ofi'rent des lii)ations avec des vases
teurs de divers pays et de différents âges, d'or *; (jue le sang de la victime est reçu dans
racontent les circonstances de son martyre. des coupes d'argent, et que, pour éclairer vos
Nous nous arrêterons particulièrement à ce sacrifices noctinnes, vous avez des cierges
qu'en ont écrit saint Ambroisc et le poète sur des chandeliers d'or; que, pour fournir à
Prudence. Car, quant aux Actes de saint Lau- ces offrandes, les frères vendent leurs héri-
rent donnés par Métaphraste ou embellis par tages et réduisent souvent leurs enfants à la
les nouveaux Espagnols, ils ne méritent de pauvreté. Mettez au jour ces trésors cachés :
croyance que dans les endroits qui sont ti- le priuce en a besoin pour l'entretien de ses
rés de saint Ambroise, de saint Augustin et troupes. Aussi bien j'apprends que, selon vo-
des autres anciens Pères qui ont fait l'éloge tre doctrine, il faut rendre à César ce qui lui
de ce saint martyr. Il souffrit sous Valérien, appartient. » — « J'avoue, répondit saint Lau-
l'an 258 de Jésus-Cbrist, trois jours après saint rent sans s'émouvoir *
,
que notre Eglise est
Sixte, dont il était disciple. riche, et l'empereur n'a pas de si grands tré-
Analyse 2. Comme on menait ce saint pape au mar- sors. Je vous ferai voir ce qu'elle a de plus
decesActes.
tyre, saint Laurent le suivait en i)leurant, et précieux, donnez- moi seulement un peu de
lui disait ': « Où allez-vous, mon père, sans temps pour mettre tout en ordre, en dresser
votre fds? vous n'avez pas coutume d'offrir l'état et en faire le calcul. » Le préfet lui ac-
vous laisse, mon fils; mais un plus grand aveugles, les boiteux, les estropiés, les ulcé-
combat vous est réservé : ou nous épargne, rés. Il y joignit les vierges sacrées et les veu-
nous autres vieillards; vous me suivrez dans ves qui se ressentaient aussi des libéralités de
trois jours. » Sixte rendit cet oracle du haut l'Eglise, et, ayant fait assembler toute cette
de la croix où il était attaché, et on en vit multitude auprès de l'église, il prit leurs
l'accomplissement dans le temps marqué. Le noms et en dressa un catalogue. Le jour qu'il
préfet de Rome ^, croyant que les chrétiens devait se présenter étant venu, il amena le
avaient de grands trésors en réserve, et vou- préfet pour voir ces riches trésors. Le préfet, igj.
à la vue de ces troupes de pauvres, demanda prien. Les Actes de ces martyrs ont eu le
ce que c'était que ces gens-ià et où était ce même sort que ceux de saint Laurent, et
qu'il lui avait promis. Saint Laurent répondit nous n'en savons autre chose que ce que Pru-
en montrant les pauvres « Voilà les trésors
: dence en avait appris par tradition. Il rap-
que je vous ai promis; j'y ai ajouté les perles porte que le proconsul, ayant fait mettre le
et les pierreries *; vous voyez ces vierges et feu à un grand four pour faire de la chaux *,
ces veuves, c'est la couronne de l'Eglise; pro- et ayant fait poser un autel au haut du trou,
fitez de ces richesses pour Rome, pour l'em- commanda aux chrétiens, ou de sacrifier du
Pag. 193. pereur et pour vous-même » « C'est donc
. — sel et un foie de cochon sur l'autel, ou de se
ainsi que tu me joues? dit le préfet. Je sais jeter eux-mêmes dans ce four ardent. Les mar-
que vous vous piquez, vous autres, de mépri- tyrs ne délibérèrent point et, sans lui faire ;
ser la mort, aussi ne te ferai-je pas mourir d'autre réponse, coururent de toutes leurs
ils
promptement. » Il le fit étendre sur un gril, forces se jeter tous ensemble dans le four, où
sous lequel il fit mettre de la braise à demi ils furent vite consumés. On en retira ensuite
éteinte pour brûler le martyr plus lentement. leurs reliques, et comme elles ne faisaient
Son visage parut, aux clirétiens nouvellement qu'un corps avec la chaux, on les nomma la
baptisés, environné d'un éclat extraordinaire, Masse-Blanche, à cause de la blancheur de la
et l'odeur que la flamme faisait sortir de son chaux. Saint Augustin a composé un sermon
corps leur fut agréable. Mais les infidèles ne à l'honneur de ces martyrs, et il y remarque
purent la supporter et ne virent point cette qu'on leur avait donné le nom de Masse, à
lumière. La tranquillité de son âme était si cause de leur grand nombre. Il en parle en-
grande dans ce supplice, que, se voyant brûlé core dans l'explication du psaume xlix, et dit
197. d'un côté, il dit au préfet; « Faites-moi re- qu'ils étaient plus de cent cinquante-trois '.
tourner de l'autre; » et quand cela fut fait, Mais il ne détaille nulle part l'histoire de leur
194. il ajouta: * Il est assez cuit, vous pouvez en martyre. On trouve dans un sermon, fausse-
195. manger. » Puis, levant les yeux au ciel, il pria ment attribué à ce Père , et que l'on suppose
Dieu pour la conversion de Rome et rendit être de quelque évêque d'Afrique du même
l'esprit. Son corps fut emporté par quelques temps, que la Masse-Blanche était composée
personnes considérables, qui s'étaient conver- de toutes sortes de personnes de diverses na-
ties à la vue de sa constance, et il fut enterré tions, d'hommes, de femmes, de vieillards, de
à Véran, près le chemin de Tibur, dans une jeunes gens et même d'enfants *. Il y est dit
grotte. encore qu'ils furent appelés la Masse-Blan-
Martyrs 3. Il faut rapporter à la même persécution che, à cause de leur nombre, de l'éclat de leur
appe'és la
Masse-Blnu-
che.eu 258.
le triomphe de trois cents martyrs, qui souf- gloire, et parce qu'ils avaient été comme blan-
frirent ensemble à Utique, où se trouvait le chis par le martyre ^. Ici cet auteur se ren-
proconsul d'Afrique, en 258, comme nous l'a- contre avec saint Augustin ^, qui dit que le
vons remarqué dans l'histoire de saint Cy- titre de Masse-Blanche fut donné à cette com-
1 Nunc addo gemmas nobiles, Gurgite pulvereo mersos liquor avidus voravit,
iVe pauperem Christum putes : Prœcipitemque globum fundo ternis implicavit imo.
Gemmas corusci luminis, Corpora candor habet, candor vehit ad superna mentes.
Ornatur hoc templum quittes. Candida Massa dehinc dici meruit per omne sœclum.
Cernis sacratas virgines, Prudent., Hymn. 13 de Coronis; Ruinart., Act. sine.
Miraris intactas anus, Martyr., pag. 202.
Primique post damnum thori, ' Quœ dicitur Massa Candida plus habet quam cen-
Ignis secundi nescias, tum quinquaginta très martyres. Aug., in Psal. XLIX,
Hoc est monile Ecclesiœ : num. 9.
His illa gemmis comitur, ^ Massa hœc ,
frafres , sicut audistis , ex'omni po-
Saxa recocta vomunt ignem, niveusque pulvis ardet, pr opter meritum, Nam quid aliud massa candida,
Urere tncta potens, et mortifer ex odore flatus. nisi multitudo intelligenda est martyrio candidata.
Appositam memorem axam fovea stetisse summa, Idem, ibid.
Lege sub Uac salis aut micam, jecur aut suis litarent 8 Hœc est prima martyrum causa, hœc est candida
Christicolœ, aut mediœ sponte irruerent in ima fossœ. mariyrum massa, si causa candida, et massa candida;
Prosiluere alacres cursu rapide simul trecenti. massa enim dicta est de numeri multitudine, candida
426 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pagnie de martyrs, à cause de leur grand nom- Augustin *, qui dit qu'ils souffrirent à Utique.
bre et parce qu'ils avaient souffert pour la II une basilique en leur
y avait dans cette ville
pureté de la loi. Quelques anciens mettent le honneur, dans laquelle ce Saint prononça le
lieu de leur martyre à Cartilage *. Mais nous sermon sur le psaume cxliv; c'est du moins
croyons qu'il faut s'en tenir à l'autorité de saint ce que l'on peut ini'érer de ses paroles *.
CHAPITRE XXII.
lit.Après sa guérison^ il ne reçut point le les diacres le priaient d'en sortir pour assis-
sceau du Seigneur de la main de l'évêque *, ter les frères qui avaient besoin de secours,
c'est-à-dire, la confirmation ni le reste de ce non-seulement il le refusa , mais il se sépara
que l'on fait après le baptême, selon la règle d'eux tout eu colère, en disant qu'il ne vou-
de causœ fulgore. Augustin., Seitnone 306, pag. 1239 * La plupart des auteurs grecs ont confondu No-
tom. V. vatien avec Novat, deux personnages bien distincts.
^ Usuard, ad diem 24 augusti; Prudence, qui croyait {L'éditeur.)
que ces saints martyrs étaient au nombre des iidè- Nec vulnus suum miser ( Novatianus ) curât sed
^
,
les dont saint Cyprien était le pasteur, semble dire adhuc gravius, et se, et suos vulnerat, in pe?'niciem
aussi qu'ils souffrirent à Carthage car, après avoir
; fratrum, lingua sua perstrepens, et facundiœ venenata
rapporté la manière dont ils remportèrent la cou- jacula contorquens. Cyprianus Epist. 60, pag. 270.
,
ronne du martyre, il ajoute, en parlant de saint Cy- Non quod non potuerim et ad illas ( quœstiuneulas )
prien, qui souffrit peu de temps après eux : aliquid respondere ; sed quod ab eloquentissimis viris,
Lœtior interea jam Tliascius ob diem suorum, Tertulliano nostro scillicet et Novatiano latino sermone
Sistitur indomiti proconsulis eminus furori. sint editœ. Hieronym,, Epist. ad Damasum , tom. II,
lait plus être prêtre, et qu'il embrassait une qu'on devait secourir les tombés et chasser
antre philosophie. C'était apparemment celle de l'Eglise l'auteur de l'hérésie, avec tous
des stoïciens, dont il paraît avoir d'abord fait ceux de sa secte. Les confesseurs se réuni-
profession. donc une doctrine sé-
Il affecta rent ensuite à l'Eglise ' ; et Novatien, pour ne
vère S se plaignit qu'à Rome on accordait pas voir son parti entièrement abandonné,
trop facilement la pénitence aux apostats. se trouva réduit à obliger ses sectateurs de
Cette apparence de zèle pour la discipUne, jurer, par le corps et par le sang de Jésus-
séduisit plusieurs membres du clergé de Ro- Christ Notre-Seigneur *", qu'ils ne le quitte-
me, qui étaient en prison pour la foi. raient jamais et ne retourneraient point à
3. Saint Corneille ayant été élu pape, le Corneille. Il fut condamné dans les conciles
schismatique Novat, nouvellement venu d'A- de Rome et de Carthage, et rejeté par toutes
frique à Rome, et Novatieu * répandirent di- les Eghses d'Orient. Ses erreurs ne laissèrent
verses calomnies contre lui et se séparèrent pas de se répandre ; et, du temps du concile
de sa communion. Novatien alla plus loin de Nicée ", il y avait encore des ecclésiasti-
et se fit lui-même ordonner évêque de Rome : ques qui les soutenaient, puisque ce concile
il avait fait venir à cet effet, d'un coin de l'I- ordonne que les clercs novatiens, après avoir
talie, trois évêques, gens rustiques et très- reçu l'imposition des mains, conserveront le
simples , qu'il força de lui imposer les mains degré ecclésiastique qu'ils avaient dans leur
après les avoir fait boire et manger avec ex- hérésie. On remarque que les novatiens de
cès ^. dans son schisme par une
Il fut suivi Phrygie mettaient des évêques dans des vil-
partie du peuple *, par cinq prêtres^ par un lages ** et qu'ils avaient des monastères où
grand nombre de confesseurs, et par quel- ils pratiquaient de grandes austérités *'.
ques évêques des provinces éloignées. Car il 4. Les sectateurs de Novatien prétendaient Novatien
écrivit à toutes les Eglises pour leur faire qu'il avait souffert le martyre **, et ils allé- mort paHe
'"'^' ^'^°"
savoir son ordination, leur recommandant guaient, pour le prouver, l'autorité de saint
en même temps, dit l'historien Socrate, de ne Cyprien. Mais saint Pacien les défie de mon-
*"
pas admettre aux mystères ceux qui avaient trer dans les ouvrages de ce Père ce qu'ils
sacrifié pendant la persécution *, mais de en citaient. Saint Cyprien témoigne, au con-
les exhorter à la pénitence, en les remet- que
traire '®, les novatiens n'étaient point
tant à Dieu, à qui il appartient de pardon- compris dans les persécutions que le diable
ner les crimes. Il envoya même des députés excitait contre les chrétiens. Ils ne laissaient
en Afrique pour obtenir la communion de pas de produire des Actes qu'ils disaient être
cette Eglise, et il n'oublia pas de les char- de leur maître martyr ". Saint Euloge, pa-
ger de diverses calomnies contre saint Cor- triarche d'Alexandrie sur la fin du VI" siè-
neille ^. Mais les évêques de cette province cle, a montré la fausseté de ces Actes.
s'étant assemblés ', rejetèrent les légats de 5. Novatien composa un grand nombre d'é- Ecrits <ie
^°^*"*"-
Novatien ®, et écrivirent apparemment au crits sur divers sujets •*; entre autres, sur
pape saint Corneille qu'ils étaient tous d'avis la Pâque, sur le Sabbat, sur la CirconcisioUy
elles-mêmes. « Si la loi distinguait les ani- il établit, par les paroles de l'Ecriture, la dis-
maux en purs
impurs, ce n'était qu^une
et tinction du Père et du Fils, et répond aux
figure, et ainsi la loi ayant cessé, cette dis- objections de ces hérésiarques. Ensuite il
tinction est abolie. Pour montrer que les ani- montre, par l'autorité des mêmes Ecritures,
maux déclarés immondes par la loi, ne le qu'outre le Père et le Fils, nous devons croire
sont pas absolument, il a recours à la per- au Saint-Esprit. Revenant au Fils, il dit qu'il
lumen, quasi epitomen operis Tertulliani faciens, necessitatem. Novatian., lib. de Cibis Judaicis, cap. i.
quod plenque nescientes, Cypriani existimant. Hiero- * Idem, ibid. — * Idem, ibid,
nym., in Catalogo, cap. 70. s Quam perversi sint Judœi duabus epistolis supe-
' Et ne putes modica esse quœ deprecor com- rioribus plene ostendit, in quibus jjrobntum est pror-
mentarios Fortunati simulque epistolas Novatiani, sus illos ignorare qua sit vera circumcisio et quid ve-
qui, bien que susceptibles d'un sens ortho- 8. On rencontre, parmi les œuvres fausse- Traité de
la Circoaci-
doxe, paraissent contraires à la divinité du ment attribuées à saint Jérôme *, un livre sur sioo.
Fils et du Saint-Esprit. Aussi les macédo- la vraie Circoncision, que l'on convient n'être
niens de Constantiuople s'en servaient pour point de ce Père. Il ne peut être non plus
autoriser leur erreiir et l'attribuaient à saint de Novatien, puisqu'il y est parlé des mani-
Cyprien : en quoi ils ont été suivis par plu- chéens 5 et des ariens. Ainsi il faut dire que
sieurs autres, comme on le voit par Rufin *. le traité qu'il avait composé sur cette matière
Mais saint Jérôme soutient que le titre de est perdu, de même que ceux qu'il avait écrits
l'ouvrage, dans les différents exemplaires, et sur le vrai Sabbat, sur la Pâgue et sur divers
le style faisaient voir qu'il était de Novatien. autres sujets dont nous avons parlé plus
On l'a aussi attribué quelquefois à Tertul- haut.
lien ^, peut-être parce que ce Père a traité 9. ne faut pas oublier que l'on fait hon-
Il Novatien
est auteur
la même matière dans son livre contre Pra- neur à Novatien de l'excellente lettre du cler- de la letira
(lu CWrgô
xée, etque les principes qu'il y établit sont gé de Rome à saint Cyprien, et qui se trouve do Rome
à saint Cy-
ceux dont Novatien s'est servi dans ce traité. la trentième dans l'édition d'Oxford. On se priea.
D'après saint Jérôme, ce traité ne serait qu'un fonde sur le témoignage même de saint Cy-
abrégé de celui de Tertullien: ce qui n'est prien, qui paraît assez clair; car, après avoir
pas aisé à comprendre, puisque le livre de cité quelques paroles de cette lettre «, « les
1 Hic ergo cum sit genitus a Paire, semper est in Deus ostenditur verus et œtemus pater a quo solo hœc
habet qua nascitur, vicinus in nativiiaie , dum ex eo Trinitate, sub nomine ejus Constantinopoli a Macedo'
pâtre, qui originem solus non habet, nascitur. Hic ergo nianœ partis hœreticis lectitari. In quo crimine men"
quando pater coluit, processit ex pâtre; et qui in titur duo; nam nec Tertulliani liber est, nec Cypriani
pâtre fuit, processit ex pâtre; et qui in pâtre fuit, dicitur, sed Novatiani , cujus et inscribitur titulo ; et
quia ex pâtre fuit, cum pâtre postmodum fuit, quia auctoris elor/uiwji sfyli proprietas dcmonstrat. Hiero-
ex pâtre processit : substantia scilicet illa divina, cu- nyni., lib. II Apol. contra Rufin., pag. 415 tom. IV,
jus nomen est Verlmm, per quod factu sunt omnia, et 2 De Adulteratione , lib. Origen., pag. 253, tom. V
sine quo factum est nildl Deus utique procedens ex oper. Hieronym.
Deo secundam personam efficîens , sed non eripiens isam Manichœi quod videri non potest credentes,
*
illud patri quod unus est Deus Est ergo Deus, sed id quod potest videri credunt hanc partem libri
in hoc ips<m genitus, ut esset Deus. Est et Dominus, Manichœus ignorât. Hieronym., tom. V, pag. 154.
sed in hoc ipsmn ex pâtre , ut esset Dominus. Est et ^ Sed hic Manichœus , Arianus iterum superiorem
Angélus; sed ad annuntiandum magnum Dei consi- partem libri utraque amplexus manu, illam interio-
lium ex pâtre suo Angélus destinatus, cujus sic di-
, rem paginam sic reserare formidat, quasi sacrilegium
vinitas traditur, ut non aut dissonantia, aut inœ- facturus sit, si Deus in carne veniens non amiserit
qualitate divinitatis duos Deos reddidisset videatur : deitatem. Idem, Ibid.
subjectis enim ei, quasi filio, omnibus rébus a paire, ^ Nam in epistola sua ita posuerunt Quanquam :
divinitatis auctoritatem rursus patri remittit ; unus est etiamy Novaiiano tune scribente, et quod scripserat.
430 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Homaius ajoutaient, dit- il, et c'était Nova- en donna une édition séparée faite sur celle
tieului-même qui l'écrivait, et qui relisait ce de Pamélius. Depuis ce temps-là, M. Welch-
qu'il avait écrit, Us ajoutiileut, dis-je, qu'il man a fait réimprimer Novatien, sur les édi-
fallaitdouuer la paix aux tombés, lorsqu'ils tions de Froben, dont le texte est plus con-
seraient malades à l'extrémité. » Il est encore forme à l'orthodoxie, et il y a ajouté des no-
à remarquer que, dans les lettres que Nova- tes. Mais la plus belle édition de cet auteur
tien a écrites à toutes les Eglises ', pour leur est celle que Jean Jackson, prêtre de l'Eglise
donner avis de son élection, suivant la cou- anglicane, a donnée à Londres en 1728, ili-8";
tume, il feignait d'avoir été ordonné malgré cette édition revue, après celle de Pamélius,
lui, comme on le voit par la réponse que lui sur les plus anciennes, est ornée d'un grand
fit saint Denys d'Alexandrie, en ces termes : nombre d'observations et de notes, mais dans
a Si l'on vous a ordonné malgré vous, comme lesquelles l'éditeur est loin de se montrer or-
vous dites , vous le montrerez eu cédant vo- thodoxe à l'égard du dogme de la divinité
loutaircmeut. » du [ La dernière et la meilleure est celle
Fils.
Novatieu écrivait avec beaucoup d'agré- de Galland, tome IV*^; elle est mieux ordon-
ments et de douceur. Son discours est métho- née, revue sur celle de Pamélius et collation-
dique et bien suivi, ses raisonnements sont née avec les éditions anglaises. L'édition de
solides et souteiuis par des autorités de l'Écri- Wurtzbourg, 0pp. lat., 3 volumes, dans le
ture qu'il allègue ordinairement très-à -propos. deuxième volume de saint Cyprien, a repro-
Jusqu'en 1709, les ouvrages de Novatien duit le texte de Galland, 1782. La Patrologie
n'avaient paru qu'à la suite de Tertullieu ou de M. Migne, tome IIP, reproduit le texte et
de saint Gyprien; mais, en 1709, M. Vhiston les commentaires. ]
CHAPITRE XXIU.
-, ... 1, Comme nous Tavons vu dans l'article fin d'Aquilée , d'avoir donné, sous le nom de
mitêur" !iês
^^ ^^^^* Denys d'Alexandrie, ce saint docteur saint Sixte, pape et martyr, un livre de sen-
ÎHUunbue! ^^ trouvant embarrassé au sujet d'un hom- tences de Xyste ou Sexte, qu'il traduisit en
me qui demandait à être rebaptisé consulta, latin elles passent pour être l'œuvre d'un
:
saint Sixte; et, dans la première lettre qu'il philosophe pythagoricien de ce nom, qui vi-
lui écrivit sur le baptême, il lui donnait avis vait sous le règne de Marc-Aurèle. Saint Jé-
que l'hérésie de Sabellius commençait à pa- rôme fit un crime à Rufin de cette méprise *.
raître dans la Libye. Mais nous ne savons Eu faisant saint Sixte auteur d'un tel livre,
point si ce saint pape répondit à la consul- qui ne faisait mention ni des Prophètes, ni des
tation de saint Denys, ni s'il travailla pour Patriarches, ni de Jésus-Christ, ni du Saint-
s'opposer aux progrès de l'hérésie de Sa- Esprit, ni du Père, il avait donc prétendu
bclhus il n'y a donc aucune raison de le
: qu'un évêque et un martyr ne croyait pas en
mettre au nombre des écrivains eccli'îsias- Jésus-Christ. Les pélagiens ne laissèrent pas
tiques; car presque tout le monde convient de citer ces sentences sous le nom de saint
aujourd'hui que c'est une méprise de Ru- Sixte, parce qu'elles favorisaient leur héré-
sua voce recitante, et presbytère Moyse, tune adhuc » Socrat., lib. IV, cap. 28; Euseb., lib. VI, cap. 45;
con fessore , nunc jam martyre subscribente, ut lapsia Hieronym., in Catalogo, cap. 69.
infîrmis et in exitu constitutis pax daretur. Gypr., ' Hieron., Epist. ad Ctesiptiontem , et in cap. Tzn
Episè. 85, pag. 24Î. Jerem. et ivin Ezechiel.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XXIII. - SAINT SIXTE II, NÉPOS, ETC. 431
sie; l'auteur, y égalant l'homme à Dieu, sou- qu'il avait répandue dans les divers cantons
tenait qu'il était sans passions et sans péché ». de TEgypte, particulièrement dans celui d'Ar-
Pélage en ayant quelques-unes dans un
cité sinoé. Nous avons vu pareillement tout ce que
de ses livres, saint Augustin essaya de leur l'on sait de Basilide, évèque d'une des Egli-
donner un bon sens, supposant qu'elles étaient ses de la Pentapole. Pour achever l'histoire
de saint Sixte, comme Pelage le disait. Mais il de Paul de Samosate , que nous avons com-
remarqua depuis qu'elles étaient d'un Sixte, mencée, il nous reste à parler de Malchion,
philosophe païen, et non d'un Sixte chrétien*. qui fut un des principaux défenseurs de la
On les a imprimées dans le troisième tome foi contre cet hérésiarque, dans les conciles
de la Bibliothèque des Pères, et séparément d'Antioche.
avec la préface de Rufin adressée à Apro- 3. Il était très-éloquent, et, après avoir en- Malchion.
prêtre fl'An-
nien, à Bâle, en 1520; à Cologne, en 1522; à seigné la rhétorique dans Antioche avec beau- tioehe, con-
vainc d'er-
Louvain, en 1618; à Amsterdam, en 1688, coup de réputation, il y avait été fait prêtre reur Paul do
Samosate.
dans les Opuscules mythologiques physiques ,
à cause de la pureté et de l'ardeur de sa foi.
Yves de Chartres, est tiré d'une fausse décré- core les Actes lorsque saint Jérôme composa
tale qui porte le nom d'Adrien ^. son Catalogue des Hommes illustres *°. Léonce
avons aussi remarqué dans l'arti-
2. INous de Bysance nous en a conservé deux frag-
cle de que l'histoire nous
saint Denys, tout ce ments dans son troisième livre contre Nesto-
apprend des écrits que Népos, évèque dans rius; et Pierre diacre, un troisième, dans sa
l'Egypte composa pour la défense de l'opi-
,
lettre à saint Fulgence et aux autres évèques
nion des millénaires dont il était infecté et d'Afrique. [ On trouve ces fragments dans
nempe Rufini, quis digno possit explicare sermone, ' Quod nolens Paulus Samosatenus confiteri, damna'
quod liLrum Xysti Pythagorei, hominis absque Christo tus ab Antiocheno concilio, Malchione presbytero
est
aiguë ethnici, immutato nomine Sixti martijris et Ro- ejusdem Antiochenœ Ecclesiœ, vira per omnia erudi'
mancE Ecclesiœ episcopi prœnotavit : in quo juxta tissimo, et ab universis sacerdotibus, qui contra eum-
dogma pythagoricorum, qui hominem exœquant Deo, dem Paulum convenerant, tune electo, qui summum
et de ejus dicunt esse substantia, multa de perfectione disputationis certamen a concilio memorato suscipiens,
dicuntur : ut qui volumen philosophi nesciunt , sub ita eumdem hœreticum inter cœtera redarguit dicens :
martyris nomine bibant de aureo calice Babylonis. Ex simplicibus fit certe compositum, sicut iu Christo
Denique in ipso volumine nulla proplietarum , nulla Jesu qui ex Deo et Verbe et humano corpore, quod
patriarcharum , nulla apostolorum , nulla Christi fit est ex seuiine David unus factus est, uequaquam
mentio : ut episcopum martyrem sine Christi fide uUerius divisione aliqua, sed unitate subsistens. Pé-
fuisse contendat. Unde et vos {pelaginni) plurima con- trus Dlacon., lib. de Incarn. et Grat. Christi, cap. 3,
tra Ecclesiam uswpatis testimonia. Hieron., Episi. 43 pag. 196, tom. IX Biblioth. Patr.
8 Idem, ibid., et Tbeodoret., lib. II Hœret. Fabul.,
ad Ctesiphont., pag. 476 tom. IV.
* In libro de Natura et Gratia, verba quœdam quœ cap. 8, et Euseb., lib. VII, cap. 29.
velut Sixti, romani pontificis et martyris, Pelagius po- 9 Theodoret., lib. II Hœretic. Fabul. , cap. 8.
suit, lia defendi tanquam rêvera ejusdem Sixti essent, 10 Malchion, disertissimus Antiochenœ Ecclesiœ près-
etenîm pulaveram : sed postea legi Xysti philosophi byter, quippe qui in eadem urbe rhetoricam florentis-
esse, non Sixti Cliristiani. August., lib. II Rétractât., sime docuerat, adversum Paulum Samosatenum, qui
3 Tom. IV Conc, pag. 1264. —
» Quaest. 2, cap. 6, Antiochenœ Ecclesiœ episcopus dogma Artemonis ins»
et quaist. 3, cap. 17. tauraraf, excipientibus notariis disputavit, qui Dialo-
Les lettres se trouvent dans la Pairologie latine
^ gus, usque hodie exstat. Hieronym., in CatalogOy
de Migne, tom. V. {L'éditeur.) cap. 71.
432 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Galland, tome avec des prolégomènes, et
III, les diacres et à toute l'Ef^lise catliolitjue '. II
dans la Patrol. grecque de M. Migne, tom. IX y faisait voir le soin que les évoques avaient
de la série grecque et VII de la série latine.] apporté pour conserver la pureté de la foi,
Paul est convaincu ', fut aussitôt dé-
4. Paul, ainsi pour découvrir et combattre la pernicieuse
déposé et
rhussè de posé, d'un commun consentement^ et (!xcom- doctrine de Paul de Samosate ; les artifices et
l'Eglise.
munié. On mit à sa place Domnus, fils de Dé- les supercheries dont cet hérésiarque s'était
métrien *, homme digne de l'épiscopat par servi pour couvrir ses impiétés; les preuves
ses excellentes qualités. Mais Paul se main- par lesquelles on convaincu d'erreur;
l'avait
tintdans sa maison épiscopale jusqu'à ce que les dérèglements de sa vie, son avarice, son
Zénobie, sa protectrice ' et la maitresse de ambition, son attachement pour les femmes
rOrient, ayant été vaincue par Aurélicn, cet et pour la bonne chère. Léonce de Bysaiice
empereur ordonna, sur les plaintes que lui cite quelque chose de cette lettre 8. Elle porte
en firent les évoques, que la maison serait en tète les noms de seize évèques, en co:np-
adjugée à ceux à qui les évèques d'Italie et de tant Malcbion ^, que l'on croit être différent
Rome adresseraient leurs lettres *; il jugeait du prêtre d'Antioche de même nom, attendu
que celui qui ne se soumettait pas à la sen- qu'il n'est pas ordinaire que des prêtres soient
tence de ceux qui étaient de sa religion '', ne nommés parmi évèques à la tête d'une
les
devait plus avoir rien de commun avec eux. lettre synodale. Malcbion fleurit sous les rè-
Paul de Samosate fut donc chassé de l'Eglise gnes de Claude II et d'Aurélien *°. [Les frag-
par le magistrat séculier, avec la dernière in- ments de la lettre et des Actes de la con-
famie ®. férence se trouvent dans jNlansi, Collection des
Errits de Nous avons encore une partie de la let-
5. Conciles, tom. I, col. 109-2 et suiv.; chez Gal-
Malcbion.
tre synodale que jNlalchion écrivit, au nom land, Biblioth. Patrum, tom. III, pag. 558, et
des évèques du concile d'Antioche, à Denys, dans la Patrol. grecque de M. Migne, tom. X
évèque de Rome, à Maxime d'Alexandrie, à de l'édition grecque et tom. VII de l'édition
tous les évèques, à tous les prêtres, à tous latine.]
CHAPITRE XXIV.
[L'an 269.]
* Euseb., lib. VII, cap. 3. — * Idem, ibidem. — lorum enim cultui deditus œquum existimavit, eum qui
' Idem, ibid. fidei suce hominum sententiœ non acquiesceret, ab eo-
* Sed cum Paulus e domo ecclesiœ nullatenus ex- rum consortio resecari. Theodoret., lib. II Ilœretic.
cédera vellet, interpellatus imperator Aurelianus rec- Fabul., cap. 8.
tissime hoc negoUum dijudicavit, iis domum iradi prœ- 6 iloc modo vir supra memoratus cum summo dede-
cipiens (juibus Ilalici christianœ religtonis antistites et core per sœcularem potestatem ab Ecclesia exturbatus
romanus Epùcopus scriberent. Euseb., lib. VU, cap. 30. est. Euseb. lib. Vil, cap, 30.—'' Id., ibid , cap. 29 et 30.
11 était donc notoire, même aux païens, que la * Leont. Bysant., lib. III in Nestorium et Eutychen.
marque des vrais chrétiens était la communion avec 9 Tillemont, tom. IV Hist. ecclés., pag. 299.
l'Eglise romaine. Fleury, tom. II Histoire ecciésiast. *<>
Alia grandis epistola ex persona sijnodi ab eo
5Tune itaque concordi in eum lata sententia ex sa- Malchione, scripta ad Dionysium, et Maximum Roma-
cris illum catologis mérita expunxerunt. Et quoniam nœ et Alexandrinœ Ecclesiœ episcopos diriyitur. Flo-
resistehat, Ecclesiœque principatum obtinebiit Aure- , ruit sub Claudio et Aureliano. Hieronym., in Cata-
lianutn, qui tune imperabat, de Pauli audacia edoceiu logo, cap. 71.
les, persuaserunt ut ex ecclesia illum expelleret, ido- " Euseb., lib. VII, cap. 32. — " Idem, ibid., cap. 11.
[m' SIÈCLE. 1 CHAPITRE XXIV. — SAINT EUSÈBE, SAINT ANATOLE. 433
force particulière pour rendre toutes sortes depuis peu 8. Vers le même temps, Théotecne
de services aux confesseurs qui étaient dans de Césarée en Palestine, imposa les mains à
lesprisons S et pour ensevelir et enterrer les saint Anatole et le destina pour son succes-
corps des martyrs, quoiqu'il ne pût le faire seur ^; ils gouvernèrent ensemble cette Eglise.
qu^en exposant sa vie. Il fut depuis le com- durant quelque temps, c'est-à-dire jusqu'en
pagnon * de la confession de son évêque, 269. Mais Anatole passant cette année par
,
dans la persécution de Valérien, et, selon Laodicée, en allant au dernier concile qui se
toutes les apparences, il fut banni avec lui tenait à Antiocbe contre Paul de Samosate,
à Képhro, et ensuite à la Maréotte, où ils fut aussi retenu par les fidèles de cette Eglise
restèrent jusque vers la fin de l'an 260. pour être leur évêque à la place d'Eusèbe, son
2. L'an 262, un quartier de la ville d'A- ami, qui était mort '°. Saint Anatole florissait
lexandrie, nommé Brucbium, qui en était encore sous l'empire de Carus, l'an 282 ou
comme la citadelle, ayant été assiéf^c par les 283 de Jésus -Christ ".
Romains ', Anatole, qui s'y trouvait enfermé, 4. Possevin raconte que, sous le pontificat Ecrits
voyant que le blé manquait aux assiégés *, de Grégoire XI on trouva en terre plusieurs
**^
/uribu'érà
^""*"
en donna avis à Eusèbe resté dans l'autre livres écrits en arabe et en syriaque, dont un be."'
partie de la ville unie aux Romains. Fort con- qui avait pour titre Les Doctrines sacrées
:
,
dont ils avaient besoin après les souffrauces d'un Eusèbe, évêque d'Alexandrie, et non
d'un long siège. d'un Eusèbe de iiaodicée •'.
3. La guerre étant finie, saint Eusèbe passa 5. Nous sommes mieux informés de ce qui Ecrits ds
saint Ana-
en Syrie, l'an 264 ', pour assister au concile regarde les écrits de saint Anatole. Eusèbe
tole.
qui se tenait à Antioche, contre Paul de Sa- nous le représente comme un des plus ha-
mosate. Gomme il se disposait à retourner en biles de son temps pour la connaissance des
Egypte, il fut arrêté à Laodicée et fait évê- lettres humaines **, pour la philosophie, l'a-
que de cette ville à la place de Socrate, mort rithmétique, la géométrie, l'astronomie, la
cap. 32. —
Idem, ibid.3 * Idem, ibid. —
^ Idem, — 13 Quadam die sandorum in urbe coramemorationes
ibid. —
6 ijem, ibid. Idem, ibid.— * Idem, ibid.
''
— cehbrubantur, cum accedcns Alexandriam, ad Euse-
9 Anatolio Theotecnus, Cœsareœ epiacopus, primus ma- bium episcopum dixit : Veueraude Pater, etc. Biblioth.
nus imposuit, eumque episcopum ordinavit : successo- Pair., tom. XXVII pag. 479,
1* Anatolius ipse quoque Alexandrinus, hic tum in
rem illum Ëcclesiœ suœ despondens. Euseb., ibid.
10 Postea cum eum synodus adversus Paulum congre' liberalibus disciplinis, tum in philosophia
principem
gâta evocasset, per urbem Laodicœam iter faciens, a inter doctissimos nostri lemporis
locum sine
viras
fratribus illius loci, mortuo tune Eusebio, detentus est, controversia tenuit : quippe ad sumrnum apicem arith-
Euseb., ibid. meticce, geometriœ atque astronomiœ ; ad hœc ad
1' Anatolius Alexandrinus, Laodiceœ Syriœ episcopus, dialecticœ et physicœ et rhetoricœ supretnum fasti-
sub Probo et Cai'o imperatoribus floruit. Hieronym., gium pervenissei : qua de causa rogatus fuisse dicitur
in Catalogo, cap. 73. ab Alexandrinis, ut Aristotelicœ successwnis scholum
12 Possevin., in Apparatu sacro, vide Fabricium, ibidem institueret. Euseb., lib. VII, cap. 32,
u. 28
AXi HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
lotïiqno,!.! physique ot In rluHoriquo. Los ha- de ses amis à qui il le dédie sans le nommer^.
bitants d'Alexandricî, (jui avaioal la [ihis haute Ce Canon connucnce à l'an de Jésus- Christ
estime pour son érudition lo prièrent dit- , , 270, et contient un cycle pascal de dix -neuf
on, d'étabhr dans leur ville une école pour ans, dans lequel saint Anatole ii.Ke l'équinoxc
enseigner la philosophie d'Aristote, mais il du printemps au 22 mars. 11 fait voir, par Pay. 4i2.
qui nous restent de lui, et principalement ceux à qui il était ordonné de la célébrer le
par ceux qu'il a faits pour confirmer l'opi- dimanche, pouvaient la retarder jusqu'au 20
nion où il était touchant le jour auquel on de> la lune; mais il fait un crime à ceux qui
doit célébrer la fête de Pàque. » Saint Jé- ne commençaient cette solennité que le 22
rôme, qui loue ses écrits en général, comme ou le 23. De son temps il était encore d'u-, 444.
remplis de la science des Ecritures et de celle sage chez les Ai^iatiqiies de faire la Pàque
de la philosophie, faisait un cas très-particu- le 14 de la lune ', en quelque jour de la se-
lier de son livre sur la Pâque *. maine qu'il tombât, pourvu que ce fût après
Son fa- 6. Des Canons su?' la Pâque, composé's par l'équinoxe ; mais à Home et en tous les en-
non pascal.
^^^[^^1 uc uous rcstc quo celui que
Aiiatolc, il droits où saint Pierre et saint Paul avaient
le P. Boucher a fait imprimer à Anvers, en prêché l'Evangile on ne la célébrait que le
,
163A; encore est-il contesté, sous prétexte dimanche. Il établit pour règle * que si le 448.
qu'il est plein de paradoxes qu'on a peine à septième jour des calendes d'avril se rencon-
déveloi)per. Mais il faut reniarquer que nous tre au jour de dimanche avec le quatorzième
ne l'avons que d'une traduction très-vicieuse, de la lune, on doit, en cette année, célébrer
qu'on croit être de Rufîn; d'ailleurs, dans le la Pàque le 14 de la lune. Il appelle Origène
siècle de saint Anatole, l'astronomie était le plus savant homme de son siècle et le plus
fort négligée , et la matière qu'il traite dans habile computiste ^, et cite de lui un traité
cet écrit n'avait jusque-là été traitée que excellent sur la Pâque, comme aussi le Cycla
très-imparfaitement. Ainsi il vaut mieux re- pascal de saint Hippolyte, et en général les
connaître que ce Canon pascal est véritable- écrits d'Isidore, de Jérôme et de Clément,
ment de saint Anatole; les passages qu'Eu- sur la même matière '°. Outre cet écrit, saint
sèbe ' et Bède le Vénérable en ont rapportés Jérôme fait mention de dix livres sur les
dans leurs écrits * s'y retrouvent en termes principes de l'arithmétique '*, également pro-
p«f. 440.
exprès '^. Anatole le composa à la prière d'un pres à faire connaître l'étendue de génie de
* Cœterum Anatolius non multos libros composait. rer, hoc modo inchoatur. Anatolius apud Bûcher.,
Verum ex iis qui ad 7ios pervenerunt, cloquentiam si- pag. 448.
mul et multiplicem ejus eruditionem abunde licet co- '
Sed in illis nihil arduum fuit, quibus licitum erat
gnoscere. Prœcipue vero ex iis in quibus suam de omnibus, quando XIV lunœ post œquinoctium advc-
Pasclia sentcntiam confirmât. Idem, ibid. nisset, Pasclia celebrare. Quorum exem/ilum scquentes
* Analolii , ingenii magnitudinem de volu-
Cujm usque liodie omnes Asiœ episcopi, indubitunter omni-
mine quod super Pascha composait et decem, librù> de bus annis quando XIV luna adfuisset et aynus apud
arithmeticœ institulio7iibus , inttlligere jjossumus. Ilie- Judœos immolaretur, œquinoctio transvadato, Pascha
ronym., in Catalogo, cap. 73, Extant et Julii Afri- celebrabant. Non acquiesccntes auctoritati quorum-
cani libri Analolii quoque Luodiccenœ Ecclesiœ sa- dam, id est, Pétri et Pauli successorum, qui omnes
cerdotis qui omnes in tuntum phiiosop/torum doc- Ecclesias in quibus spiritualia Evangelii semina seve-
tritiis atque sententiis suos resarciunt libros, ut nes- runt solemnitatem resurrectionis Domini in die tan-
cias quid in illis primum admirari debeas, eruditio- tum dûminica posse celebrari docuerunt. Anatol. apud
nem sœculi an scientiam Scripturarum. Idem, Epist. 83 Bûcher, pag. 444.
ad Magnum. * Nobis ergo simililer si eveniat ut VII kalendas
s Eudoh., lib. Vil Ilist., cap. 32. aprilts et dies dominica et lana XIV invenialur XIV
* Beda, lib. de Ratione temporum, cap. 33. Pascha celebrandum est. Aualol. apud Buch., p. 448.
* Anatol., Can. Paschal., pag. 440. 9 Sed et Origenes omnium eruditàsimus et calculi
* Il marque que cet ami lui avait écrit pour ce compoiiendi perspicucissimus libellum de Pasclia lucu-
sujet : Cœterum quod tuœ epistolœ subjeceras ut solis lentissime edidit. Idem, ibid., pag. 439.
ascensum descensumque, huic opusadu insmuare cona- 10 Idem,, ibid. —
u Hicron., ubi supra, in Catal.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XXV. — SAINT FIRMILÎEN. 435
grecque, nous en a conservé quelques frag- tom. III, pag. 545, 558, et dans la Palrologie
ments. [Le Cycle pascal fut d'abord publié et gj^ecque de M. Migne, tom. X de la série grec-
commenté par Boucher De Doctrina tempo- : que-latine et tom. VII de Tédition latine.]
rum, Anvers 1634; puis, avec le texte grec
CHAPITRE XXV.
i. Firmilien, l'un des plus grands ', des passa deux ans caché chez une vierge nom-
plus illustres et des plus savants évêques de mée Julienne, pour se soustraire à la persé-
sou siècle ^, était originaire de la Cappa- cution de Maximin. Ce fut apparemment vers
doce *; il était né de parents célèbres pour ce temps-là que saint FirmiUen fît connaître
leur noblesse, mais engagés dans les supers- à Origène saint Grégoire le Thaumaturge et
titions du paganisme s. On croit qu'il fut con- son frère Athénodore, qui devinrent ses dis-
verti à la foi chrétienne par Origène, pour le- ciples et furent convertis par lui à la foi vé-
quel conserva une estime et un respect ex-
il ritable.
traordinaire ^. Dès la dixième année du règne 3. L'an 251, le schisme de Novatien infec- Il visite
saint Dunys
d'Alexandre, la deux cent trente-unième de tant l'Eghse d'Antioche, saint Firmilien, Hé- uu concile
Jésus -Christ, Firmilien paraissait dans l'E- lène de Tarse et Théoctiste de Césarée en e^'^s"""''^'
gnait à lui pour engager Origène à la venir cita de nouveaux troubles entre les évêques. ii" baptême
visiter et à y faire un long séjour '". On voit ** Saint Firmihen, fondé sur un usage qu'il
qu'Origène y était vers l'an 255, et qu'il y prétendait avoir de tout temps existé dans la
1 Tom. II, pag. 275, lib. III, cap. 10, et tom. IV, visendum in Judœam usque proficisceretur, et una cum
pag. 295, lib. IV, cap. 29, et in Theologumenis graece ipso aliquandiu maneret ut majorem rerum divinurum
editis Parisiis, ann. 1543, in-A». nolitiam perciperet. Euseb., lib. VI, cap. 26 et 27.
* Inter episcopos qui prœ cœteris insignes fuerunt, ''
Euseb., lib. 27.—
» Idem, ibid.—
VI, cap. 26 et
maxime eminebat Firmilianus Cœsareœ Cappadocum 9 Idem, ibid.
episcopus. Euseb., lib. VII, cap. 28. 10 Quanta autem gloria fuerit Origenes, tune
appa-
* Firmilianus , Cœsareœ Cappadociœ episcopus, vir ret quod Firmilianus , Cœsareœ episcopus, cum omni
illustris, et qui scientia utraquc pollelmt tum externa, Cappadocia eum invitauit et diu tenuit, et postea sub
tum divina. Theodoret., lib. II Hœret. Fabul., cap. 8. occasione sanctorum locorum Palœstinam veniens, diu
*Nysseiius, in Vita Gregorii Thaumat., pag. 974. Cœsareœ in sanctis Scripturis ab eo eruditus est. Hie-
5 Idem, ibid. ronym., in Catalogo, cap. 54.
* Florebat tune temporis Firmilianus Cœsareœ apud 11 Euseb., lib. VI, cap. 28, et Pallad., Hist. Lau-
Cappadocas episcopus, qui tam propenso erga Orige- siaca, cap. 147.
nem animo fuit, ut modo illum in suam provineiam "Euseb., lib. VI, cap. 58. — »Mdem, lib. VII,
ad Ecclesiarum utilitatem evocaret : modo ad ipsum cap. 4 et 6.
A3Ù HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Cappadocc *, et sur la décision du concile qu'on y avait indiqué contre Paul de Samo-
d'Iconc, où il avait asS'isté, soutenait qu'on sate, sur la fin de l'an 2G9, mais il tomba
devait rebaptiser les hérétiques. Le pape malade et mourut à Tarse '. Il avait paru
saint Etienne .s'oi»posa à cette pralitjue *, et avec distinction dans les deux conciles qui
déclara qu'il ne comuiunitiuorail plus avec s'étaient déjà tenus au même lien contre cet
Firniilien , ni avec Ilélènt; de Tarse , ni avec hérésianjuc. Nous avons la lettre synodale
quantité d'autres évoques qui étaient dans de celui de 2G9 : cette lettre le représente
lesmêmes sentiments. Nous ne savons pas comme principal agent dans l'afTaire de Paul
comment Firniilien accueillit cette excom- de Samosate Nous avons aussi écrit, di-
". a
munication; mais, sur la fin de l'autonine sent les Pères, à Denys, évoque d'Alexandrie,
de l'an 256, ayant reçu une lettre de saint évoque de Cappadoce, d'heu-
et à Firniilien,
Cyprien, par le diacre Rogatien, il fit une reuse mémoire. Le premier a écrit à Antio-
réponse que nous avons encore ' et qui sert che et a adressé sa lettre à l'Eglise, sans sa-
de témoignage qne, quoique d'un sentiment luer l'auteur de l'erreur. Le second est venu
différent de saint Etienne sur le baptême des deux fois à Antioche et a condamné la nou-
hérétiques, il néanmoins uni par les
lui était velle doctrine. C'est ce que nous savons et ce
liens de la charité, et qu'il reconnaissait que que nous attestons nous qui avons été pré-
,
ce saint pape était, aussi bien que lui, dans sents à ces assemblées, et ce qu'un grand
l'Eglise unique et catholique *. nombre d'autres savent aussi. Paul ayant
Antres 5. Nous avons marqué ailleurs qu'on attri- promis de changer de sentiment, Firmilien
écrits de
saiDtFirmi- buait à saint Firmilion VHisioire de saint Cy- le crut et espéra que l'affaire se pourrait ter-
lien. Il as-
siste an con- rille, enfant martyrisé à Césarée en Cappa- miner sans que la religion en souffrît aucun
cile d'Anlio-
clie. Sa doce. Saint Basile ' cite de lui plusieurs dis- préjudice. Riais il fut trompé par la perfidie
mort, en a6t
cours, sans en marquer le nombre ni le sujet. d'un homme qui avait renié Dieu et renoncé
Il faut bien que saint Jérôme n'en ait pas eu à la foi. » [Les Orientaux honorent saint Fir-
connaissance, puisqu'il ne met pas saint Fir- milien le 23 octobre. Benoit XIV ne l'a pas
milien au nombre des auteurs ecclésiastiques. admis dans le Martyrologe romain.]
Firmilien se rendait à Antioche an concile
1 Firmilian. apud Cyprian., Episl. 73, — 2 Euseb., donatiste du 1V« siècle. Elles ont été imprimées à
lib, VII, cap. 5. Munster, en 1790, in-'t". Cependant, généralement
s Elle est la soixante-quinzième parmi celles de tous les critiques regardent cette lettre comme au-
eaint Cyprien. Nous en avons donné l'analyse en cet tbentique. Quant à l'excommunication contre Fir-
endroit. milien et les rebaptisants, l'opiuion commune ad-
* La lettre de Firmilien annonce une grande irri- met qu'elle n'a pas été portée. Voyez Noël Alexandre,
tation; l'auteur s'exprime à l'égard des personnes Thomassin, Tournély, de Sacramentis; Billuart. Pour
qui ne partageaient pas son opinion, tantôt avec l'aflirmative, Baronius, année 258 Roncaglia, p. 98.
;
Marcellin Molkenbulir, récollet, a composé deux dis- ' Idem, ibid. [Baronius et Mûlkembubr placent la
sertations pour prouver que cette lelltre est fausse- mort de Firmilien en 272.]
ment attribuée à Firmilien et qu'elle est de quelque
[m* SIÈCLE.) CHAPITRE XXVI. — SAINT GRÉGOIRE LE THAUMATURGE. 437
CHAPITRE XXVI.
aux charges, et même le Droit romain, mais à celle de son maître, que l'âme de Jonathas
par pure complaisance pour son maitre qui à celle de David ; et oubliant l'étude des lois,
le savait ^ et le pressait beaucoup de l'étu- sa patrie et ses parents *', il se livra unique-
dier. Cette étude , bien qu'entreprise contre ment à lui et à la philosophie. Il étudia d'a-
son gré, le porta à faire des voyages pour bord la logique •^, ensuite la physique , puis
s'y perfectionner. Ils
y pensaient, son frère les mathématiques, et surtout la géométrie
Athénodore et lui, incertains toutefois s'ils et l'astronomie, enfin la morale; et il rend
iraient à Rome ou
ailleurs ; mais leur sœur cette justice à Origène, qu'il n'excitait pas
devant rejoindre à Césarée son époux, qui moins à la vertu par ses exemples que par
était assesseur auprès du gouverneur de Pa- ses discours *'.
lestine, ils se déterminèrent à aller à Bérite, 3. Origène , après avoir ainsi instruit son
peu éloignée de Césarée, où se trouvait une disciple dans toutes les parties de la philoso-
école célèbre des lois romaines. phie, lui donna des leçons de théologie; car
Il devient 2. Origcne tenait alors école publique à Cé- il croyait que la connaissance la plus néces-
disciple d'O-
rigène, vors sarée, où il s'était retiré pour éviter les pour- saire est celle de la première cause de toutes
l'an 231 jus-
qu'en 233. suites de Démétrius, évêque d'Alexandrie. choses Mais pour le conduire, comme par
•*.
Arrivés en celte ville, les deux frères entrèrent degré, à la connaissance de cet être souve-
en relation avec Origène et s'attachèrent à l'é- rain, il lui faisait lire tout ce qu'en avaient
couter. Celui-ci, charmé de la beauté de leur écrit les anciens, soit philosophes, soit poètes,
* Gregor. Nyssen., in Vita Thaumaturg., pag. 669. ibid., pag. 60. — ^^ Idem, ibid., pag. 63, 64 et 65.
* Gregor. Thaumat., Orat. de Origen., pag. 35. 2Vow sic iste {Origenes) nobis de virtutibus vcrbis
13
'
niaient, contre le sontimont unanime de tous
"^
et de ses voyages. Us avaient étudié cinq ans eoiîc.
les hommes, l'existence de Dieu et de sa pro- ensemble sous Origène ^. Mais, avant de par-
vidence. Craignant toutefois qu'il ne s'éga- tir, Grégoire voulut témoigner sa reconnais-
rât dans celte étude *, il le conduisait par la sance à son maître par un discours qu'il pro-
maiu, lui faisait remarquer ce que chaque nonça en sa présence et devant beaucoup
secte avait d'utile et de véritable, la fausseté de j)ersonncs. Les titres de divin et de doc-
de leurs principes, surtout de leur morale, teur inspiré de Dieu, qu'il y donne à Ori-
et lui apprenait que, dans ce qui regarde la gène ', font bien voir l'estime (ju'il eu faisait.
divinité, il ne faut ajouter foi qu'à Dieu seul Origène n'en avait pas moins pour son dis-
et à .ses Prophètes : il lui en expliquait les ciple, comme on par la lettre *° qu'il
le voit
endroits les plus difficiles, à mesure qu'il li- lui écrivit quelque temps après sou retour à
sait leurs écrits, car il lut l'Ecriture sous la Néocésarée. U l'y ajipeUe sou Seigneur très-
conduite d'Origène. saint et son vénérable fils, l'exhorte à em-
11 Ta à A- 4. Cependant la persécution de Maximin ployer, pour l'avantage de la religion clu-é-
iexandi le
en l'an Î35 ; ayant oblige Origène de se cacher, Grégoire tieiiue, tous les que Dieu lui avait
talents
retourne à
Césarée a\i- se retira à Alexandrie '. Quoiqu'il n'eût pas donnés, et à n'emprunter à la géométrie, à
prèa d'Ori-
gène, en 237 encore reçu le baptême, sa vie était déjà si l'astronomie, ou même à la philosophie des
ou 238; est
bajitité.
réglée, si pure, qu'il semblait reprocher aux païens, que ce qui était nécessaire pour l'in-
jeunes gens de son âge le dérèglement de la teUigence des Ecritures, comme les Israéli-
leur. Pour s'en venger. Us lui suscitèrent une tes emportèrent les richesses des Egyptiens
femme débauchée qui, dans le temps que pour s'en servir dans la construction du Ta-
Grégoire s'entretenait avec d'autres person- bernacle. Il l'exhorte, en finissant, à étudier
nes de quelque question de philosophie, vint avec soin les saintes Ecritures, en y joignant
se plaindre de ce qu'il ne lui payait pas le la prière, qui est, dit-il, très-nécessaire pour
salaire qu'elle prétendait avoir mérité par ses les entendre.
crimes. Ceux qui connaissaient la pureté de sa 6. L'embarras des afîaires pour lesquelles Il «juitle
Néocésarée,
vie étaient indignés d'une calomnie si atroce. Grégoire fut rappelé dans sa famille, le dé- et se retire
i la campa-
Lui, sans s'émouvoir, pria un de ses amis goûta bientôt du séjour de Néocésarée. Il gne.
de donner à cette femme l'argent qu'elle de- quitta donc la ville '*, se l'etira à la campa-
mandait, afin, disait-il, quelle ne nous in- gne, et abandonna tous ses biens, sans se ré-
terrompe pas davantage. Saint Grégoire de server d'autres richesses que sa vertu et sa
Nysse, qui rapporte ce fait*, dit que cette foi.
malheureuse n'eut pas plus tôt reçu l'argent, 7. Il jouissait depuis peu de temps des Il est fait
qu'elle fut possédée du démon, dont elle fut douceurs de la solitude, lorsque Phédime, lietcésarée!
vers
"""' '*"
toutefois délivrée par les prières de celui évèque d'Amasée *% métropole de la province Ï40.
qu'elle avait offensé. L'Eglise étant en paix du Pont, informé de l'éminence de sa vertu
sous le jeune Gordien, Grégoire retourna à et de son savoir, résolut de l'ordonner évê-
Césarée ^, où il passa encore quelque temps que de Néocésarée. Mais Grégoire, qui crai-
sous la conduite d'Origène, pour achever de gnait un si pesant fardeau, se cachait et pas-
s'instruire. On croit que ce fut eu ce temps- sait d'une solitude à l'autre pour se dérober
là qu'il se fit baptiser s. à Phédime. U acquiesça toutefois dans la sui-
Il retoHP- Après s'être fait un trésor de toutes
o. te, et fut ordonné évêque avec les cérémo-
ne en son
pays, aiiifs sortes de richesses spirituelles, sous la disci- nies accoutumées. U était encore jeune *=^;
avoir fait
reloge U'O- pline d'Origène, Grégoire retourna dans son et, pour ne point s'engager avec trop de
rig«ue, en
» Gregor. Thaumat., Orat. ad Origen., pag. 69. — règne de Maximin. Ainsi, ayant commencé en 213 à
*Idem, ibid., pag. 72. —
s Gregor. Nyssen., in Vita étudier sous Origène à Césarée, il aura passé les an-
Thaumat., pag. 972. —
* Idem, ibid., pag. 973. nées 235, 236 et 237 à Alexandrie; et, étant retourné
» Euseb., lib. VI Hist., cap. 30. à Origène en 237 ou 238, il acheva ses études sous
« TillemoQt, tom. IV, pag. 669; Fleury, tom. II, l'empire de Gordien. Tillemont, tom. IV, pag. 669.
9 Gregor. Tliaumat., Orat. ad Orig., pag. 56 et 73.
pag. 127.
10 Origen., PKilocaliœ, cap. 13, pag. 41, ni et 43.
' Hieronym., in Catalogo, cap. 65; Euseb,, ubi
Bupra. 11 Gregor. Nyssen., in Vita Thaumat., pag. 975 et
Ces cinq années ne furent pas continues, mais
• 976. — 12 Idem, ibid.
interrompues durant trois ans, qui eat le temps du " Euseb., lib. VI Uist., cap. 30.
i
fin* SIÈCLE.] CHAPITRE XXVI. — SAINT GRÉGOIRE LE THAUMATURGE. 439
précipitation dans l'exercice de son minis- dix-sept, ail est fâcheux, dit-il, regardant
tère il obtint de Phcdime quelque temps
, le ciel, qu'il man jue (juelque chose à la plé-
pour s'y préparer, par une plus parfaite con- nitude de ceux qui se sauvent; mais je dois
naissance de nos mys^tères. Ce fut pendant à Dieu de grandes actions de grâces, de ne
ce temps qu'il reçut de saint Jean l'évangé- laisser à mon successeur qu'autant d'infi-
liste * le symbole de la foi qu'il prêcha de- dèles (jue j'ai trouvé de chrétiens. » Il de-
puis à son Eglise et dont nous aurons lieu manda à Dieu la conversion de ce petit nom-
de parler dans la suite. bre de païens et l'accroissement des grâces
Son zple 8. Sou épiscopat ne fut qu'une suite de mi- nécessaires à ceux qui s'étaient convertis.
pour la foi,
ses mira- racles et de conversions. 11 s'appliqua à éta- Ensuite il défendit que l'on achetât aucun lieu
cles. Il se re-
tire durant blir la foi, non -.'seulement dans Néocésarée, pour servir à sa sépulture, « afin, dit-il, que la
la persi^cu-
tion, en 250. où il convertit une infinité d'idolâtres, mais postérité sache que Grégoire n'a eu la pro-
Il retourne
en son Egli- encore dans les villes voisines, et il donna priété d'aucun héritage, et qu'après sa mort
se, en iïl.
des évèques à celles qui en manquaient. Mais il a emprunté le sépulcre d'un autre. » Le
l'empereur Dèce ayant excité une sanglante grand nombre de ses miracles le fit appeler
persécution contre l'Eglise, notre Saint se par les ennemis m.êmes de l'Eglise un autre
crut obligé de fuir dans le désert *, d'où il Moïse '.
ne que lorsque l'Eglise eut recouvré sa
sortit
liberté. Ce fut alors qu'il engagea son peuple
ARTICLE Tï.
à célébrer tous les ans les fêtes des martyrs ^, DES ÉCRITS DE SAINT GRÉGOIRE LE THAUMATURGE.
jugeant ce moyen très -propre pour retirer
§ 1er. — DISCOURS EN L^HONNEUR D'ORIGÈNE.
de l'idolâtrie, un grand nombre de person-
nes accoutumées à célébrer des fêtes en l'hon- 4. Saint Grégoire, après s'être instruit pen-
neur de leurs idoles. dant cinq ans dans l'école d'Origène *, c'est-
11 assiste 9. En 264, les évêques s'étant assemblés à-dire jusqu'en l'an 238 ou 239, retourna en
au contile
d'Anlioche à Antioclie contre Paul de Samosate, notre son pays avec son frère Athénodore. Mais, Î39.
en 26*. Il
meurt vers Saint s'y trouva avec son frère Atkénodore *; avant de partir, saint Grégoire voulut témoi-
270.
ils sont même nommés des premiers parmi gner à Origène sa reconnaissance par un dis-
les évêques de ce concile. Mais cet hérétique cours qu'il prononça en sa présence et de-
y ayant dissimulé son erreur, on fut obligé vant une grande assemblée Nous avons en- *.
* Idem, ibid., pag. 978 et 979. 9Quinquennio itaque eniditi ab eo {Origène) remit-
' Descendit 7-ursus ad urbem, et omni circa regione tuntur ad matrem, e quibus Theodorus proficiscens
peragrata ac perlustrata additamentum et quasi corol- orationem panegyricam et c/iaristeriam scripsit Ori'
larium siudii erga numen divinum instituebat apud geni, et convocata grandi frequentia, ipso quoque Ori-
omnes ubique populos, sanciens, ut nomine eorum qui gène prœsente recitavit, qui usque hodie extat, Hiero-
pro fide decertassent dies fesli atque solemnes conven- nym., in Catalog., cap. 65.
tus celebrarentur : curnque alius in alium locum cor- 1" Hujus mcntionem facit etiam Pamphilus martyr,
pora marlyrum diduxissent per anniversarium circuli in libris quos pro Origenis defensione scripsit : quibus
ambitum congregari lœtabantur in honorem martyrum etiam adjuncta est oratio, quam ille ab Origène sece-
ferias agentes. Idem, pag. 1006. dens, in ejus laudem composait. Socrates, lib. IV Hist.,
* Euseb. lib. VII, cap. 28.— s Idem, ibid., cap. 30. cap. 27,
« Gregor. Nyssen., in Vita Thaumat., pag. 1006 et 11 De viro enim dicere institui qui homo quidem esse
1007. videtur et talis apparet; iis vero qui magnitudinem
' Sed omnino longum fuerit viri percensere tnira- ejus habitus moresque intueri possunt, majoribus qui-
cula qui propter donorum excellentiam, quœ in ipso deiiiornamentis vtstructus ac prope divinis videatur,
operabatur Spi7-itus, in omni virtute signis ac prodi- Gregor., Orat. panegyric, pag. 50. Hœc vero ille non
giis, ab ipsis etiam veritaiis hostibus, aller Mogses aliter, opinor, enuntiat, quam ex divini Spiritus coni'
appellatus fuit. Basilius, lib. de Spiritu Sancto, municatione. Ibid., pag. 731. •
,
63. sion il vint à Césarée en Palestine, et com- mais, avant de commencer lexercice de son boie de u
foi.
ment Origène, qui l'y arrêta, le conduisit ministère, il pria Phédime, qui l'avait or
69. peu à peu à la lumière de la loi, lui faisant donné ', de lui laisser un peu de temps pour
lire, pour ce sujet, tous les ouvrages des an- s'instruire plus exactement de nos mystè-
ciens philosophes sur la théologie, excepté res, et demanda à Dieu de lui en accorder la
ceux qui enseignaient expressément l'athé- connaissance. Une nuit, comme il était fort
78. isme; afin que connaissant le fort et le fai- occupé à examiner la doctrine de la foi, pour
ble de toutes les opinions, il put se garantir éviter les erreurs de plusieurs qui y mêlaient
des préjugés, mais surtout appremh'e ce que des raisonnements humains, il vit paraître
73. chaque secte avait d'utile. Il relève le don un vieillard vénérable par son visage et par
qu'Origène avait reçu de Dieu pour l'intelli- son habit *. Il se leva de son lit tout étonné,
gence et l'explication des divines Ecritures*, lui demanda qui il était et pourquoi il était
et la manière dont il eu développait à ses venu. Le vieillard, d'une voix grave, le ras-
auditeurs les endroits les plus difficiles et sura et lui dit que Dieu l'avait envoyé pour
les plus mystérieux. Il se loue lui-même du lui découvrir la vérité de la foi chrétienne.
contentement et de la paix dont il jouissait à Puis, étendant la main,il lui montra de l'au-
Césarée auprès d'Origène, et témoigne qu'il tre côtéune personne qui paraissait en forme
n'en sort que malgré lui, et avec d'autant de femme, mais au-dessus de la condition
plus de peine, que c'était pour reprendre le humaine. Grégoire, épouvanté, baissait les
maniement des affaires de la maison de son yeux et ne pouvait supporter l'éclat de cette
père, et pour rentrer par là dans les soins et vision quoique la nuit fût obscure, ces
: car,
les inquiétudes du siècle qu'il avait aban- deux personnages étaient accompagnés d'une
données. En finissant, il prend congé d'Ori- vive lumière. Cependant il entendait que la
gène, lui demande le secours de ses prières femme, nommant Jean l'évangéhste, l'exhor-
et lui témoigne un ardent désir de venir le tait à découvrir à ce jeune homme le mys-
retrouver. [Cet ouviage nous fait connaître tère de la vraie religion, et que saint Jean
la méthode de l'enseignement chrétien, qui répondait qu'il était prêt à le faire, puisque
différait de celle qu'avaient adoptée les païens la Mère du Seigneur l'avait pour agréable.
par rapport aux sciences ; nous y trouvons Quand le vieillard eut exposé la doctrine, la
en outre, plusieurs notices intéressantes sur vision s'évanouit, et Grégoire écrivit aussitôt
les principes et les systèmes qui régnaient eu ces termes ce qu'il venait d'apprendre :
alors dans les académies. Quant à la pureté 2. « Il n'y a qu'un Dieu *, Père du Verbe
ce Symbole,
i Ac si quid altius porro de lis, qui non cernun- subsistentis, et potentiœ, et fiqurœ œternce, perfectus
iur, divinioribus, et hominum curnm gerentiùus loqui perfecti genitor ; Pater Filii Utiigeniti. Unus Dominus,
velim, huic etiam, qui me a puero, magno quodam solus ex solo, et imago deitatis,
Deus de Deo, figura
judicio regendum educandumque sortitux est, sacer Vevbum efjxcax, Sapientia constitutioriis rerum univer-
angélus Dei, qui pascii me ab adolescentia mea, ut sarum comprehensiva, et potentia totius creaturœ ef-
ait ille chorus Deo (Jacob Gen. 48), suum ipsius vi' fectrix FiUus verus veri Patris, visum effugientis, et
:
delicet inteltigeris. Ibid. pag. 54. corruptioni non obnoxius non obnoxii corruptioni,
' Donum hoc ille maximum divinitus concessum, et mord non obnoxius morti non obnoxii, et œter-
sortemque de cœlo optimum habet, ut Dei sermonum nus œterni. Unus Spiritus Sanctus ex Deo ortum ,
interpres sit apud homines, Deique verba, quasi Deo et existentiam habens; quique per Filium apparuit
loquente, inlelligat, et hominibus, ut homines perci- videlicet hominibus; imago Filii perfecti perfecta,
piant, enarret. Quare nihtl nobis arcanum, nihil ab- vita viventium causa, fons sancius, sanctificationis
ditum et inaccessum erat. Quin omnia perdiscere dog~ suppedilatrix, per quem manifestatur Deus
Pater, qui
muta licebat, et barbarum, et grœcum, et mysticum, est super omnia et in omnibus, et Deus Filius per
et civile, et divinum, et humanum cum omni libertaie omnin permanat. Trinitas perfecta, quœ gloria atque
cuncla indaganiibus. Ibid. 73. œterniiate et regno non dividitur, neque abalienafur.
' Greg. Nyss., in Vita Thaum.,p.9n. —
*Id., ibid. Ergo neque creatum quidquam aul servum in Trinitate
* Unus est Deus, Pater Verbi viventis, sapientiœ est, neque adscititium quidquam. et adventitium, ut
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XXVI. — SAINT GRÉGOIRE LE THAUMATURGE. 441
*par"" /^ ^'"^ ^'^^ unique. Il n'y a qu un Seigneur, gle divine ^. Il la transmit à ses successeurs
i"5' seul d'un seul, Dieu de Dieu, caractère et comme patrimoine ou l'unique héritage
le
image de la di'dnité, Verbe efficace. Sagesse qu'il leur laissait. On s'en servait à Néocésa-
qui comprend l'assemblage de toutes choses, rée pour préparer les catéchumènes au bap-
et puissance qui a fait toutes les créatures ;
tême, ou pour initier le peuple, comme parle
vrai Fils d'un vrai Père d'un
, Fils invisible saiut Grégoire de Nysse, qui semble le regar-
Père invisible. Fils incorruptible d'un Père der comme le moyen dont Dieu s'était servi
incorruptible, Fils immortel d'un Père im- pour conserver cette Eglise pure de toutes
mortel, Fils éternel d'un Père éternel; et il les hérésies jusqu'à son temps. Elle en con-
n'y a qu'un seul Saint-Esprit qui tient son servait encore à cette époque l'original écrit
être de Dieu, et qui, par le Fils, a paru aux de la main de son saint évêque '. « C'est de
hommes; image du Fils, parfaite comme lui; quoi, ajoute saint Grégoire de Nysse, chacun
vie cause des vivants, source sainte, sainteté peut s'assurer, par ses yeux, en l'allant voir
qui donne la sainteté; par qui est manifesté dans les archives de cette Eghse. » Il le rap-
Dieu le Père, qui est sur tout et en toutes porte lui-même tout entier. Saint Grégoire
choses, et Dieu le Fils, qui est par toutes de Naziauze en cite les dernières paroles *;
les choses. Trinité parfaite, sans division ni Rufin l'a aussi inséré tout entier dans le li-
changement en sa gloire, en son éternité, vre VII de l'Histoire ecclésiastique d'Eusèbe ®.
en son règne. Il n'y a donc rien de créé * On le lisait dans le Psautier latin, écrit en
ou d'esclave dans la Trinité, rien d'ajouté, lettres d'or ®, que Gharlemargue donna au
rien d'étranger, rien qui n'ait pas été pen- pape Adrien P% et il est cité, sous le nom de
dant un temps et qui depuis ait commencé saint Grégoire, par les Pères du cinquième
d'être: le Père n'a jamais été sans le Fils, ni concile œcuménique '; par saiut Germain,
le Fils sans le Saint-Esprit; mais la Trinité patriarche de Constantinople *; par les apo-
a toujours été immuable et invariable. » crisiaires de Grégoire IX, dans la conférence
onnepeut 3. Tel Bst Ic Symbole qui fut donné à saiut qu'ils eurent avec les Grecs au concile tenu
douter qu'il
quod prius quidem non esset nec suppeteret, posterius * Sed et ingenii sui nobis in parvo monumenta re-
autem introductum ait; neque vero deest unquani Fi- liquit : in Ecclesiasten namque metaphrasim idem
lius in Pâtre, neque in Filio Spiritus : sed imrimta- Greqorius magnifîcentissime scripsit, et catholicœ fi-
eadem semper Trimtas est. Gre-
bilis et inalterabilis dei expositionem breviter editam dereliquit, quam pro
gor. Nyssen.jin Vita Thaumat.,çaig. 978 et 979. œdtficatione Ecclesiarum adsociare hic commodum
1 Ces paroles et les suivantes se trouvent séparées duxi. Unus Deus, Pater Verbi viventis, sapientiae
du Symbole de saint Grégoire le Thaumaturge, dans subsistentis et virtutis suae et figurae, etc. Rufin.,
les éditions des œuvres de saint Grégoire de Nysse; lib. VII Hist. eccles. Euseb., cap. 25.
mais il paraît indubitable qu'elles en font partie : Lambécius, tom. Il, pag. 270.
6
au moins ^
est-il certain que Rufin et les autres écri- Tom. II Conc, edit. BiniauEB, pag. 774, in Ap-
vains qui les attribuent à saint Grégoire le Thauma- pendice ad Goncil. Constautinop. sub Menna habi-
turge, le croyaient ainsi. tum.
2 Atque hune extemplo divinam illam institutionem * Cum magnus pater noster et miraculorum effector
ac disciplinam litteris mandasse, et secundum illam Gregorius de his inquireret, admiranda dogmatis
postea in Ecclesia sermonem prœdicasse, ac posteris hujus doctrina et patefacta est quando divam Virgi-
,
Jean Veccns % par Constantin McUitcniotc *, foi, pour les oxpli(|uer. « Ils ont fait, dit-il "
par Cioori^es Métoclùto " ; par Grégoire, pa- en parlant des sabelliens, quelque tentative
triarche (le Coiistantitioplc
jiar le con- °, et sur Anthime, évoque de Thyane, qui par-
cile de Florence '. On croit aussi que saint tage les mômes sentiments
avec nous. Ils
Basile, dans une de ses lettres adressées aux n'ont pas compris que Grégoire, qui a dit,
fidèles de Ncocésarée, parle de ce symbole, dans son Exposition de foi, que le Père et
quand il dit ": « Peut-on avoir une preuve le Fils sont deux selon la pensée, et ne font
plus certaine de ma foi, que de savoir que qu'un selon l'hypostaso, ne l'a point dit dog-
j'ai été nourri et élevé par Macrine, cette matiquement, mais en disputant contre Elien.
femme si illustre et si vertueuse, qui doit sa Ils n'ont pas fait cette réflexion, eux qui s'ap-
naissance à votre ville, et qui m'a instruit plaudissent de leur subtilité. Ceux qui ont
dans les maximes du bieidieureux Grégoire, écrit cette dispute, ont fait plusieurs fautes
dont elle m'a rempli l'esprit dès le berceau; en écrivant, comme je le ferai voir par les
car elle en avait encore la mémoire toute paroles expresses, avec la grâce de Uieu. Il
fraîche? » Enfin un célèbre protestant sou- faut ajouterque Grégoire, ayant pour but
tient *que l'on ne peut douter que ce sym- d'amener un païen à la foi, ne prenait pas
bole ne vienne de saint Grégoire, et qu'il garde à l'exactitude de ses expressions; il
ne doit point paraître incroyable qu'un saint s'accommodait, en certains endroits à l'u- ,
dont la vie a été pleine de miracles, l'ait reçu sage de celui contre qui il disputait, afin qu'il
par révélation, en la manière exposée plus ne s'opiniatràt pas contre les points princi-
haut. paux. Voilà aussi pourquoi ou trouve dans
Exposition 4. Mais il faut distinguer ce symbole de cette dispute beaucoup d'expressions qui fa-
de foi de , , _ . .
''
**lre à^E-
'^^^po^^^^onde [01, ou de la dispute que saint vorisent les hérétiques, même les ariens, dont
Ren. Gi'égoire eut sur les matières de religion avec l'erreur était directement contraire à celle
un gentil nommé Elien. Il y disait « que le de Sabellius, savoir termes de fait et de
: les
Père et le Fils sont deux, selon la pensée, et créé, et quelques autres semblables qui re-
un selon l'hypostasc. » Comme les sabelliens gardent rimmanité, qui pourraient être rap-
abusaient de cette la(;on de parler, pour au- portés à la divinité par des gens qui pren-
toriser leurs erreurs, et prétendaient mettre draient grossièrement les choses à la lettre,
saint Grégoire le Thaumaturge de leur côté, comme font ceux qui nous objectent ces dif-
saint Basile en prit la défense, et fit voir ce cpie nous savons de
ficultés. » C'est tout
qu'outre les fautes des copistes, qui étaient la disputede saint Grégoii-e avec Elien; et il
en grand nombre dans cet écrit, il était visi- y a apparence que Facundus n'en savait pas
ble que saint Grégoire, occupé à combattre davantage, et que cette pièce était alors per-
son adversaire, n'avait pu s'appliquer à par- due, puisqu'il n'en rapporte autre chose que
ler avec la même exactitude qu'il l'eût fait ce que nous en trouvons dans saint Basile ".
sic apertissime exclamavit dicens : Unus Deus, Pater ad unanimem Antirnuni, Tyanorum episcopum, quod
Verbi vivenlis, sapientiœ subsistpulis, etc., tom. XI magnus Gregorius dixerit in Expositione fidei Pa-
Conc. Labb., part. 1, pag. 326 et part. II, pag. 233. tris et Filii personas, intellectu quidem esse duas
* Nicelas, in T/iesauro orthodoxes fidei , lib. II, subsistentiam autem esse unam. Hoc autem, quia non
pag. 8, tom. XXV Dilliot. Pat. dogmatice dictum est, sed certative in sermone. ad
3 Vcccus, in Camuteri animadversiones tom. II , Eltanum, non potuerunt conspicere, qui in subtilitaie
GrcEciœ orthodoxœ , pag, 484 oditionis romauai, semuum sentetipsos beatificant in qua sunt multœ
,
Sancfi, pag. 735, codem tomo Grœciœ orthodoxœ. pagano satisfaciens, non arbitrabatur opus esse subti-
s Georgius Metocbita, Orat. contra Maximum Pîa- litatis rutione circa verba, est eliam ubi et consenfien-
nudem, pag. 953 et 1057, eodem tomo. dum sit consuetadini, ut non ad necessaria reluctetur.
' Gregor., ad Imperatorem. Trapesuntinum,
p. 426, Quapropter et inultas inventes ibi voces quœ nunc
tom. I Grœciœ orthodoxœ. hœreticis maximum virtutem prœbeant, sicut creatu-
' Concil. Florentin., sessione xxui, pag. 351, ram et facturam, et si quid taie est. Multa autem
tom. XIII Concil. Labbsei. dicta, et de conjunctione quœ ad hominem facta est,
[iil« SIÈCLE.] CHAPITRE XXVI. — SAINT GRÉGOIRE LE THAUMATURGE. 443
L'Exposi- Car nous ne croyons pas que l'Expo-
5. si elle était de ce Père *; il la rejette lui-
tion (le foi
à Elien est
difféiente
sition de foi, que Gérard Vossius a fait im- même assez formellement, en refusant de ré-
de celle ijue primer parmi les œuvres de saint Grégoire pondre aux arguments que les hérétiques en
Vossiiis R
donnée Ol- le Thaumaturge, soit celle dont saint Basile tiraient, et il dit qu'elle est d'Apollinaire. Les
le-ci n'est
pas de saint fait mention '. Les sabelliens trouvaient dans
Grégoire, ni
Douze Chapitres ou Anathèmes , que l'on a
les douze A-
celle-ci des termes qui semblaient favoriser joints au symbole de saint Grégoire, ne peu-
nathèmes.
leurs erreurs au lieu qu'elles sont nommé-
, vent pas non plus lui être attribués, particu-
ment réfutées dans l'autre -. On y réfute en- lièrement le dixième et le onzième, qui con-
core très- clairement les ariens ', et Tauteur damnent visiblement l'hérésie d'Apollinaire^.
y regarde , comme étranger à la foi, quicon- En 553, les sévériens ayant allégué un
l'an
que communique avec ceux qui rejettent le traité, sous le nom de saint Grégoire, contre
terme de consubstantïel et qui disent qu'il y la Foi des deux natures ^, les catholiques ré-
a quelque chose de créé dans la Trinité ce : pondirent qu'il n'était point de ce Saint, et
qui prouve qu'il écrivait longtemps après ou ne voit pas que les hérétiques se soient
saint Grégoire le Thaumaturge. On trouve mis beaucoup en peine de prouver qu'il en
quelques paroles de cette Exposition de foi fût. On voit aussi que les euty chiens débi-
dans Léonce de Bysance, et cet écrivain re- taient plusieurs écrits sous le nom de saint
marque que, de son temps, on l'attribuait à Grégoire le Thaumaturge , qui n'étaient pas
saint Grégoire le Thaumaturge. Il ajoute en de lui, et qu'ils séduisaient, par ce moyen,
même temps que les anciens avaient douté beaucoup de personnes '.
ad divinitatis referunt rationem qui inerudite audiunt Bysant., tom. IX Bibliot. Pat., pag. 707. Lib. ad-
Scripturas; quale est et hoc guod ab lus circumfertur. vers. fraudes Apollinaris. Proferunt nobis et aliam
Facundus Hermian. ex Basilio, lib. X pro Deferi- quamdam auctoritatem sancti Gregorii, quem prodi-
sione trium capitulorum , cap. 6, pag. 445 edit. an- giorum effectorem nominamus, ex illius confessione
no 1629. fidei, seorsim exposita : Non duas personas, inquit,
1 Mœlber range
cette pièce parmi les ouvrages non duas naturas, quia non adoranda sunt quatuor;
supposés. Léonce de Bysance, dit-il, observe déjà et alla qaœ sequuntuv. Ad hoc quoque respondemus
que les anciens doutaient de son authenticité, et en primum de hac itidem dubitatum apud antiquiores
effet aucun d'eux ne l'a connue Saint Basile ne se an sit Gregorii. Deinde Gregorius Ngssenus oratio-
prononce pas contre son authenticité. Le cardinal nem de illo prodigiorum effectore funebrem scribens,
Mai a publié le texte grec de cette Exposition dans nullum ait opus ipsius in rnanibus esse prœter solam
le septième volume des Ecrivains anciens. {L'éditeur.) fidem quam in visione conspexerit. Leont. Bysant.,
' Sceleratum opus aliqui contra sanclam Trinitu- tom. IX Bibliot. Pat., pag. 672; lib. De Sectis, art. 8.
tem meditantur qui affirmant non esse très personas,
,
^ Si quis dicat partem duntaxat hominis assump-
ut qui personam non subsistentem introducunt. Quo- sisse Chrislum , et non confitetur ipsum per omnia
circa Sahellium fugimus, qui dicit eumdem esse Pa- similem nobis, excepta peccato,anatliama e^to. Cap. 10,
trem et Filiurn; Patrem quidem dicit eum qui loqui- pag. 5, inter opéra Gregor. Thaumat. Si quis dicit
tur, Filium vero verbum in Pâtre manens et temporc corpus Christi esse inanimatum, aut sine mente, et
creutionis patefactum ; completis vero rébus, in Deum non confitetur ipsum perfectum esse hominem per om-
remeans. Idem dicit de Spiritu Sancio. Nos enim nia unum, et eumdem, anathema esto. Ibid., cap. 11,
credimus très personas unam habentes divirtitatem de- pag. 5 et 6. Les apoUiuaristes distinguant l'âme
clarari nominibus Patrts, Spiritus Sancti.
et Filii, et qui nous fait vivre de l'intelligence par laquelle
Expositio fidei inter opéra Gregor. Thaumat., pag. 99. nous raisonnons, n'accordaient à Jésus-Christ que la
* Inimicissimi et alieni a confessione apostolica première, et soutenaient qu'il n'avait point eu l'au-
sunt qui dicunt esse Filium ex non extantibus et ex tre, mais que la Divinité en faisait les fonctions.
principio emittente externum et foris adscitum Patri. Ainsi, dit saint Augustin, ils lui accordaient l'âme
Ibid., pag. 97. Eos vero qui communicant cum iis, qui des bêtes, et lui refusaient celle de l'homme. Au-
rejiciunt consubstantiale tanquam alienurn a Saip- gustin., tract. 47 in Joan., tom. III, pag. 2 et 611.
turis, et qui dicunt aliquid ex Triniiate creatum 8 Quoniam vero jam a multis hi qui adversantur
ab una naturali divinitate séparant : aliénas
esse, et orthodoxœ duarum naturarum confessioni, illa anti-
existimamus, et cum nullo ex istis communionem ha- qua apud se retinent, indulgete nobis, si adversarios
bemus. Ibid., pag. 101. nostros testes suscipere dubitamus : nam et beati Julii
Quidam ex hœresi Apollinaris, vel Eutychis, vel
''
famosam epistolam manifeste Apollinaris ostendimus
Dioscori , cum vellent suam hœresim confirmare fuisse scriptam ad Dionysium ; illam autem quam
quasdam orationes Apollinarii Gregorio Thaumaturgo, sancti Gi'egoni mirabilium factoris dicitis testifica-
aut Athanasio, aut Julio inscripserunt, ut simpliciores tionem, svadete Severo et liis qui ea quœ illi sapiunt
fallerent;
quod quidem per.fecerunt : auctoritate enim confiteri : quia incorrupium carnis ipse decrevit, et
hujusmodi pjersonurum fide digna multos Ecclesiœ ca- tune vobis credendum est : quoniam et ea quœ de una
tholicœ capere potuerunt, et apud multos ex recte natura dicta sunt ipsius sunt. Tom. IV Concil. Labb.,
credentibus reperire poteris librum Apollinaris oui , pag. 1767.
fUulus.Fides parlicularis, inscriptum Gregorio. Leont. '
Nam et Patrum libros Eutychiani sœpenumero
444 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
§ 3. — DES LETTUES DE SAINT GRÉGOmE LE maturge des règles pour mettre les coupables
THAUMATURGE.
en pénitence ce Saint lui répondit en ces
:
Jérôme \
\. Saint et après lui Suidas et termes « Ce qui nous fait peine , très - saint
: Can. 1,
Ilonorius d'Antun, remaniuont que l'on avait pape, ce ne sont pas les viandes que les cap-
plusieurs Lettres de saint Gréf^oirc le Thau- tifs peuvent avoir mangées ', telles qu'elles
maturge, mais sans en spécifier le sujet ni leur ont été ofi"ertes par leurs maîtres, vu
les personnes auxquelles elles étaient adres- principalement que l'on convient tout d'une
sées. Honorius dit seulement qu'elles trai- voix que les barbares qui ont parcouru nos
taient des matières qui appartiennent à la quartiers n'ont point sacrifié aux idoles. L'A-
foi *. Il ne nous en reste qu'une aujourd'hui, pôtre dit * La viande est pour l'estomac, et
:
qui est reçue unanimement de tout le mon- l'estomac est pour les viandes, et Dieu un jour
de ', comme digne d'un homme aussi saint détruira l'un et l'autre; et le Seigneur, qui
et aussi apostolique que saint Grégoire. Elle purifie les viandes, dit ®Ce n'est pus ce qui
:
porte le titre à'Epiti'e canonique, et c'est sous entre qui souille l'homme, mais ce qui sort.
ce nom dans le second canon
({u'elle est citée Nous ne sommes pas non plus si touchés des
du concile in Trullo *, et par Zonare et Ral- violences qu'ont soufièrtes les femmes cap-
samon, qui l'ont commentée avec les autres tives. Car si, avant cet accident, il y en avait
épîtres canoniques. Ou croit que saint Gré- dont la vie fût notée, l'habitude criminelle
goire l'écrivit vers l'an 2o8, dans le temps forme contre elles un grand soupçon pour
que les Goths et les Dorades , profitant de la le temps de la captivité ; et elles ne doivent
faiblesse de l'empire de Gallien*, après avoir pas être facilement admises à la communion
ravagé la Thrace et la Macédoine, passèrent des prières mais s'il y en a quelqu'une qui
:
dans l'Asie et dans le Pont, pillèrent et brû- ait vécu dans une parfaite continence qui ,
une occasion de commettre divers crimes : 71 est point digne de mort. Car c'est comme si
les uns s'emparèrent des biens de ceux qu'on un homme s'élève contre son prochain et le tue:
avait emmenés captifs; d'autres, par une la fille a crié, et il ne s'est trouvé personne
cruauté inouïe, retinrent en captivité ceux pour la secourir. »
de leurs frères qui se sauvaient ®; enfin, il y 3. Saint Grégoire décide ensuite que les Suite de
cette Lettre.
en eut qui s'enrôlèrent avec les barbares et usurpateurs du bien d'autrui doivent être
Can. 2,
firent des courses avec eux. bannis de l'Eglise et excommuniés tous, de pag.38.
Analyse
2. Un évêque du Pont, dont on ne sait pas peur que la colère de Dieu ne tombe sur tout
decette Let-
tre.
le nom demanda à saint Grégoire le Thau-
, le peuple, et premièrement sur les prélats
corruperunt, ac multos Apollinarii libros Athanasio, 6 Zosim., lib. I Hist., pag. 352 edit. Lugd., an-
Gregorio, miraculorum opérât ori, et Julio inscriptio- no 1624. — « Gregor., Epist. can., pag. 38, 39 et
nibus suis tribuerunt, quibus potissimum multos ad seqq.
'
impietates suas attraxerunt . Evagrius, lib. III Hist., Nos non cibi gravant, si captivi comederint ea
cap. 31. et hoc quoque quod mulieres' captivœ corruptœ fue-
Et aliœ hujus vulgo feruntur Epistolœ. Hioro-
• runt, barbaris earum corporibus abutentibus : sed si
nym., in Catal., cap. 65. Multos prœterea et varias prius damnata vita fuerat, procul abeuntibus oculis
Epistolas composait. Suidas, in Gregor. fornicatoribus, ut scriptum est, fornicarius scilicet ha-
2 Theodorus, qui posteu Gregorius appellatus est, bitus susceptus est etiam tempore captivitatis, et non
NeocŒsareœ Ponti episcopus, Origenis auditor, scripsit oportet facile orationibus cum ejusmodi communicare.
metaphrasin in Ecclesiasten, irevem quidem, sed valde Sed siquidem aliqua quœ in summa continentia vixe"
utilem, et alias de fide epistolas. Honor., de Script. rit, et puram ab omnique suspicione aliénant priorem
Nous avons donc envoyé notre frère, le prê- de Dieu , doivent le faire sans aucun intérêt
tre Euplirosine, vers vous pour ce sujet ', sordide, sans rien demander, ni pour avoir
afin que, suivant la forme que nous observons indiqué , ni pour avoir sauvé , ni pour avoir
ici, il nous marque ceux dont il faut recevoir trouvé, ni sous quelque autre prétexte que
les accusations et ceux qu'il faut exclure des ce soit '. Telle e«t VEpître canonique de saint
prières. » Grégoire le Thaumaturge. On y voit plu-
Suite de A. Il comme une chose incroyable
regarde sieurs degrés de pénitence distingués dès-
cette Lettre.
que certains chrétiens soient allés jusqu'à cet lors * : quelques-uns étaient admis aux priè-
Can. 6,
î>»g. 40. excès d'inhumanité, de retenir en captivité res publiques, mais prosternés ; d'autres n'é-
ceux qui prenaient la fuite, et ordonne d'en- taient admis qu'aux instructions; d'autres en
voyer quelqu'un dans le pays, sans doute étaient même exclus. On y voit encore
pour faire cesser une oppression si criante, de comme dans celle de saint Denys d'Alexan-
peur que la foudre ne tombe sur les coupa- drie, que ces anciens casuistes décidaient
Can. 7, bles. « Quant à ceux, ajoute-t-il, qui se sont tout par l'autoritéde l'Ecriture, non par des
enrôlés avec les barbares, dont ils étaient opinions humaines.
captifs; qui se sont mêlés à leurs courses, 6. La Lettre canonique de saint Grégoire Addition à
cette Lettre.
sans se souvenir qu'ils étaient Pontiques et est distribuée, dans l'édition deVossius, en
chrétiens, et qui sont devenus barbares jus- onze canons ^ ; mais il y a tout lieu de croire
Père Morin dit avoir lue dans la bibliothèque on convient communément que ce sont des
de M. le Chancelier *. ÎNlais Balsamou l'a pièces supposées •°. Le Ti'aité de l'Ame n'a
commentée. Les quatre dot^rés dos pénitents rien de la politesse ni de l'élégance du style
y sont marqués fort distinctement ^, même de saint Grégoire, et parait être l'ouvrage de
les places de l'église qui leur étaient propres. quelque philosophe du moyen-âge, temps au-
quel la philosophie d'Aristote commençait à
§ *. — DE LA PARAPHRASE DE SAKs'T GRÉGOIRE SUR prendre du crédit. Le' style des quatre Ser-
L'ECCLÉSIASTE et de quelques AUTRES OUVRAGES
QUI PORTENT SON NOM.
mons est aussi différent de celui de saint Gré-
goire, et on y trouve plusieurs expressions
La Par», 1. On ne doute plus aujourd'hui que la qui font voir que l'auteur vivait après la te-
phrase
pbrase sur
l'Ecciésiaste
•, , > r-i
Faraphrasc suri Lcclesioste, que nous lisons
/ . •
i
•
< Fabricius, tom. V Bibliot. Grœcœ, pag. 253, lib. V, » Honorius Augustodunensis, lib. I de Scriptoribus
cap. 1. Ecclesiastii.is,pag. 77 editionis Fabricii.
* Morin., lib. VI de Administ. sacram. Pœnit., 9 Lambecius, lib. llf, pag. 182, 187 et 190; apud
pag. 357, num. 9. Fabricium^ Bibliothecœ Grœcœ, tom. V, pag. 2i9.
3 Fletus seu lucfus est extra porfam oratorii, ubi 10 Le cardinal Mai a publié un extrait d'un dis-
peccatorem stantem oportei fidèles ingredientes orare cours de saint Grégoire de Néocésarée sur la Tri-
ut pro se precentur. Auditio est intra portam in loco nité, tom. Il du Spiciiége romain; il l'a tiré d'un ma-
quem vap6'/",xa vacant, in feruta : ubi oportet eum qui nuscrit arabe. Dans la Patrologie grecque de M. Migne
peccavit, stare post catechumenos et illinc egredi. Au- on trouve cet extrait parmi les ouvrages douteux
diens enim, inquit, post Scripturas et doctrinam eji- de saint Grégoire. {L'éditeur.)
ciatur; et precaiione ne dignus Cfnseatur : subjectio H Dominas noster Jésus Chris tus inconfuse et immu-
antem seu substratio est, ut intra templi portam, tabiliter ex pura, casta et impolluta ac sancta Maria
sians cum catechumenis egrediatur. Congregalio seu Virgine progreditur in deitate perfectus, et in huma-
consistentia est ut cum fidelibus consistât, et cum ca- fiitate perfectui, Patri per omnia similis, et nobis per
techumenis non egrediatur. Postremo est participatio omnia consubstantialis ^ sed omnis peccati expers.
Sacramentorurn. Greg., Epist. Canon., can. 11. Serm. 1, pag. 13.
* Vir sanctus Gregorius, Ponti epivcopus, Origenis 12 Si autem Filius Dei, etiam Deus, efusdem formée
auditor, in methaphrasi Ecclesiastœ ita hune locum: cum Pâtre, et coœternus, in quo omnem Pater possi-
Melior est puer pauper et sapieus, quam rex senex det clarificationem : character atque imago in persona;
et sluUus, intellexit. Ego vero praefero atlolescentn- et per spkndorem gloriœ refulget. Serui. 1, pag. 11.
lum pauperem régi seni et stulto. Hieronymus, in Tecum Deus, et ex te Deus et perfectus hoino, in quo
cap. lY Ecclesiastœ, pag. 741, tom. II. omnis plenitudo divinitatis inhahitat. Ibid., pag. 12.
' Scripsit et metaplirasim in Ecclesiastem, brevem 1* Non enim soli Joseph, sed et Dei Genetrici Maries
guidem, sed valde utilem. Hieronym., ia lib. de Viris testimonium perhibet Lucas. Ibid., pag. 14.
illustribus, pag. 147. 1* Quicumque digne Dei Genitricis Virginis Maria
en quatre lignes * ; et la divinité du Saint- l'ont rendu célèbre dans l'Eglise; il a paru
Esprit ^
y est exprimée en des termes aussi comme une brillante lumière et une lampe
clairs que dans les écrits des Pères qui ont éclatante qui, par la puissance que le Saint-
vécu depuis le concile de Constautinople ^.
Esprit lui communiquait, faisait trembler les
[Gallaad a pu])lié un fragment sur les versets démons. »
22 23 du chapitre vi de l'Evangile de saint
et 4. Ses écrits ont été recueillis par Gérard Editions
des œuvre»
Matthieu. Ce fragment est tiré d'une Chaîne Vossius, protonotaire apostolique et prévôt de saint
Grégoire le
manuscrite publiée par MitarelU. Mingarelli de l'Eglise de Tongres,et imprimés à Mayen- Thaumatur-
ge.
a publié à Bologne, en 1770, iu-4% un ser- ce, en 1604, in-4°; à Paris, en 1622, iu-fol.,
mon de saint Grégoire le Thaumaturge sur avec les ouvrages de saint Macaire d'Alexan-
les Saints, avec épitre préliminaire où il éta- drie, de saint Basile de Séleucie et de quel-
blit l'authenticité de cet écrit, et avec un ques autres anciens; à Cologne en 1618,
commentaire. On trouve aussi un extrait d'un dansla Bibliothèque des Pères et dans celle de
discours sur la Trinité dans le tome II du Lyon, en 1677. Son Discours en l'honneur
Spicilége romain. Tous ces écrits sont repro- d'Origèîie fut imprimé séparément de la tra-
duits dans la Patroloqie grecque de M. Mignc, duction latine du Père Sirmond, à Augs-
tome VII de l'édition latine et X de la série bourg, en 1605, in-4°, avec les livres d'Ori-
grecque , les deux premiers parmi les pre- gène contre Celse; en 1613, à Anvers, in-8°.
^ Per te, 6 gratia plena , Trinitas sancta et consub- soutiennent l'authenticité des sermons et des Ana-
staniiali^, tecum iti mundo cognoscitur. Ibid., pag. 25. thèmes. Saint Grégoire, en effet, ne dit rien de
* Vade {archangele Gabriel) ad Mariam Virginem, plus ni de moins que son condisciple, saint Denys
abi ad animatam civitatem, abi ad paradisum meum d'Alexandrie, et les six évêques dans leurs lettres à
ratione prœditutn, abi ad portam orientalem, abi àd Paul de Samosate. Le mot consubslaniiel , d'après
domicilium Verbo meo dignuni abi ad nuhem levem,
, Eusèbe, avait été employé parmi d'anciens et illus-
et adventus mei imbrem ipsi armuntia ; abi ad sanc- tres évêques et de doctes écrivains saint Athanase
;
tuarium mihi prœparaturn, abi ad incarnationis meœ nous atteste que, du temps de saint Grégoire le Thau-
cubiculum ; vade ad purum meœ secundum carnem nati- maturge, ce mot était connu des simples fidèles et
vitaiis thalamum, etc. Serm. 3, pag. 27. regardé comme l'expression de la foi catholique.
' Adesdum, o Archangcle, minisier tremendi et ar- On parle dans ces discours des erreurs de Nestorius,
cani esta mysterii , miraculo deservi , etc. Serm. 3, mais c'est une chose constante que Nestorius a re-
pag. 37. nouvelé certain-es erreurs de Paul de Samosate. Près
* Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi com- de quarante aus avant cette époque, Tertullien réfu-
placui : Filins consubstaniialis non alterius substanfiœ; tait ces mêmes erreurs. {Uédifeur.)
^
consubstantialis mihi, in eo quod a vobis non cerni- Saint Jérôme parle de plusieurs lettres de saint
tur; et consubstantialis vobis, in eo quod a vobis vide- Grégoire Thaumaturge et saint Basile d'une Ex-
le ,
iur sine peccato. Serm. in Theoph., ivàg. 36. position de foi que nous n'avons plus, aiusi que
" Sempe?- una tecum est Spivitus Sanctus, et ejusdem nous l'avons remarqué plus haut. On lit aussi quel-
voluntatis atque sententiœ, œqualis potestatis, ac paris ques passages sous le uom de saint Grégoire le Thau-
honoris, iecumque ab omnibus adorationem suscipit. maturge daus la Chaîne de Ghislérius sur Jéréœie.
Ibid., pag. 33. Mais on sait que l'on ne peut guère compter sur
* Malgré ces raisons, plusieurs critiques, entre au- les fragments des Pères que l'on trouve dans ces
tres Rohrbacher, Hist. Univ. de l'Eglise, tom. V, sortes d'ouvrages.
,
qui est le meilleur que nous possédions. De Grégoire, a été imprimé en grec et en fran-
M. Migne l'a reproduit dans sa Palrologie Langelier, avec quelques homélies de saint
grecque, tome VII.] Sa Paraphrase sur l'Ec- Jean-Chrysostome, etc. [La collection des
désiaste se trouve dans les éditions de saint SelectaPatrum de M. Cailleau renferme les
Grégoire de Nazianze, et elle y est comptée œuvres complètes de saint Grégoire le Thau-
pour la LIU^ oraison de ce Fère, On rimi)rima maturge, avec œuvres de saint Uenys d'A-
les
aussi à Bàle, dans leM6To/)rei%</c«s, en 1550, lexandrie, saint Archelaiis, Arnobe, saint
dans les Orthodoxographes, et avec la Chai ne Pamphile. Le cardinal Mai a publié le texte
des Pères grecs sur les Proverbes de Salo- grec de V Exposition, tome VI des Ecrivains
mon, à Anvers, en 1614, in-8°. On lit son anciens. Tout ce qui nous reste de saint Gré-
Symbole dans les éditions des Conciles de Bi- goire a été publié par M. Migne dans le
nius et du Père Labbc; parmi les œuvres de tome VII de la Patrol. grecque, série latine, et
Zonare, dans la Bibliothèque grecque de Fa- dans le tome X de la série grecque latine. On
V, cli. \, et dans beaucoup d'au-
bricius, liv. y a joint une notice considérable d'AUatius
sur saint Grégoire, d'après card. Mai. On a
tres que nous avons cités plus haut. Son
le
Fpitre canonique a éié imprimée séparément cependant omis quelques fragments qui se li-
à Tarragone, en -i58i, in-4'', avec les Canons sent dans les Chaînes, et un passage cité par
péniteutiaux, par les soins d'Antoine Augus- Jean Veccus dans les Opuscula aurea d'Ar-
en 1641, in-fol., dans le recueil
tin; à Palis, cudius. M. Guillon, dans sa Bibliothèque des
CHAPITRE XXVII.
Saint Denys, pape.
de Rome en
266, et pape
en 259. 11 é-
Denys jus- tiens sur le baptême. Saint Sixte II ayant
crit tou- 1. Nous ne savons rien de saint
chant le
martyre au mois de juillet de l'an
baptême . et qu'en l'année 256. Il était alors prêtre de souffert le
259, saint Denys fut mis en sa place sur le
aux Qdeles
de Cappado- Rome » et fut un de ceux qui, suivant le sen-
ce.
timent de saint Etienne, voulaient qu'on ex- Saint-Siège, et il l'occupa jusqu'au 26 dé-
communiât tous les évèques de Cilicie, de cembre de l'an 269. On croit que ce fut pen-
Cappadoce, de Galatie et des autres provin- dant son pontificat qu'il reçut la lettre de
saint Denys d'Alexandrie touchant Lucien
'.
ces, qui rejetaient le baptême donné par les
écrivit même sur cette affaire Il en écrivit une lui - même à l'Eglise de Cé-
hérétiques. Il
sarée en Cappadoce pour la consoler des
à saint Denys d'Alexandrie; mais, dans la
*,
1 Euseb., lib. VII Hisi., cap. 5. — » Idem, ibid. — Novimus enim partim beneficio memoriœ per succès-
s Idem, ibid., cap. 9. — * Apud Basil., Epist. 200, sionem rerum a Patribus ad nos deductarum partim ,
d'éclaircir les points sur lesquels il avait été lettre était- elle commune pour
toute l'Eglise
accusé. nous reste un long fragment de
Il
d'Alexandrie. L'auteur des Fausses Dècréta-
cette lettre, où l'on voit qu'en combattant les les en a supposé deux à saint Denys, une à
sabelliens, attaque l'erreur opposée ^, qui
il
un préfet chrétien, l'autre à Sévère, évêque
depuis a été soutenue par les ariens. Il prouve de Cordoue. On veut aussi qu'il ait assemblé
contre eux que le Verbe n'a point été fait ni un concile à Rome contre Paul de Samo-
créé, mais engendré du Père de toute éter- sate ^ , et qu'il l'ait premier. condamné le
nité. Il y combat encore une erreur des mar-
Mais on n'en donne d'autre preuve qu'un
ciouites ', qui divisaient l'unité de Dieu en
passage de saint Athanase mal traduit '. Ce
per litteras suas Ecclesiam nostram Cœsareensem cu- magistros esse, qui quidem ex diamètre, ut ita loquar,
rasse, misisseque tune de suis qui fratres liherarent a Sabellii sententiœ adversantur. lllius enim in eo con-
captivitate. Basil., Epist. 220, pag. 1003.
sistit impiétés, quod dicat Filium esse Patrem et vi-
1 Quidam de Ecoles ia fratres, non sciscitati tamen cissim , illi autem très deos quodammodo prœdicant,
eum ( Dionysium AlexandrinuM qua de causa ifa ) cum sanctam unitalem in très diversas hypostases
scripsisset, Romam se contulere, illumque apud cogno- inter seomnino separatas dividunt. Necesse est enim
mi?iem Dionysium Romanum episcopum accusaruni. divinum Verbum Dec universorum esse unitum et
Quibus ille auditis una scripsit et contra Sabellii Spiritum Sanctum m Deo itia?iere et habitare , ac de-
seciafores et contra eos qui ej'us essent sentent
iœ nique divinam Trinitatem in unum quasi in quemdam
quam cum Arius protulisset , ab Ecclesia est éjectas.'..
verticem, Deum universorum omnipotentem dico re-
Misit quoque ad Dionysium litteras ut indicaret
qua duci et colligi. Nam futtlis Marcionis doctrina, quœ
de re accusatus ab illis fuisset. Atban., de
Sententia monarchiam in tria principia secat et dividit,
Dionysii, tom. I, pag. 252. Cum autem
diabo-
quidam ad lica est,non autem verorum Christi discipulorum, vel
Romanu?n episcopum Alexandrinum detulissent quod
eorum quibus Sal votons disciplina placet: hi enim
Filium rem factam Patri non consubstantialem af-
et
Trinitatem quidem non ignorant in divina Scriptura
firmuret, synodus Romœ
coacia rem indigne tulit : Ro-
prœdicari, très autem esse deos nec in Vetere, nec in
manus autem episcopus omnium sententmm rescripsit
Novo Testamento doceri. Dionys. apud Athanas., ibid.
ad gentilem suum. Idera, lib. de Synodis, I, tom. Itaque admirabilis divinaque unitas in très divinitates
pag. 757. Il semble qu'on pourrait
distinguer la let- non est separanda, neque factionis vocabuli dignitas
tre que saint Deuys de Rome écrivit à celui d'A-
summaqite Domini magnitudo est diminuenda , sed
lexaudrie, au toom du concile, d'avec l'écrit
où il credendum est in Deum Patrem omnipotentem, et in
réfutait les sabelliens et les autres hérétiques
dont Cliristum Jesum ejus Filium, et in Spiritum Sanctum
nous avons parlé; mais on peut dire aussi
que ce ac Verbum Deo universorum esse unitum. Ego enim,
n'étaient pas deux pièces séparées.
[ Mœlher admet inquit, et Pater unum sumus. Joan. x, 30, et Ego in
deux pièces séparées.]
Paire, et Pater in me est. Ha scilicet divinœ Trinitati
2 A'on minus etiam illi culpandi
sunt, qui Filiutn et sanctce monuj'chiœ prœdicatio intégra servabitur.
opus esse existimant Dominum fuctum esse sentiunt,
et
Idem. ibid.
quasi videlicet unum esset ex his quœ vere facta simt,
Les trois principes de Marcion étaient le Dieu
4
cum divina Scnptura illum genitum e.yye, ut eidem mauvais, le Dieu juste et le Dieu bon, ce qui n'a
convenu congruitquc, non autem formatum et factum aucun rapport avec l'erreur qui fait trois dieux dis-
esse Non levis igitur, sed summu est im-
testetur.
tincts des trois personnes de la Trinité. [L'éditeur.)
pietas Dominum aliquo modo manufactum
dicere. ^ Sed quid pluriLus de his apud vos disseram, viros
Namsi factus est Filius, fud aliquundo cum non esset:
Spiritu plenos quibus utique explorata sunt quœ ah-
atqui fuit semper. si utique sit in Pâtre,
ut ipse décla- surda sequuntur ex illorum sententia. Idem. ibid.
rât , et si Christus ipsum sit Verbum,
sapientia et * Baronius, ad ann. 265, num. 10, et ad ann.
272,
virtus. Dionys. apud Athauas., de Decretis Nicœnœ
num. 13.
synodi, tom. I, pag. 231 et 232. ^
Voici le passage de saint Athanase, de la traduc-
3 Jam vero œquum fuerit adversus illos disputare, tion de Dom Montfaucon ; Si quis igitur eos qui Ni-
qui augusttssimam Dei Ecclesiœ
prœdicationem mo- cœœ convenerunt argutt, quod prœter majorum dé-
narchtum, in très quasdam virtutes ac
sépara tas hij- créta quœdum protulerunt, is jure septuaginla epis-
postases tresque divinitates dwidunt
, discindunt des- copos reprehendat, quod majorum suorum décréta non
truuntque. Audivi entm quosdam
ex lus qui apud vos servarint. Prius quippe erant ambo Dionysii atque ii
divmum verbum prœdicant et docent, hujus opinionis
qui tune temporis Roynœ conveneranf episcopi, sed neu-
29
,
adressée à toute l'Eglise, et uoinmémeut à les Sabelliens setrouve chczGalland, tom. III,
saint Denys de Rome *. pag, 538, et chez Constant, Epht. rom. Pont.,
Estime Ce saint 'pape fut estimé 'pour son savoir
3. et dans Schram, Analysis oper. SS. PP.,
nu on a fait ^
•le saint De- et pour SOU eloqucnce ', et compté entre les tom. VI; Alansi, Coilect. Conc., tom. I; Routh^
Pères dont on avait suivi la doctrine ^ et les Reliquiœ Sacrœ, vol. III; iM. Migne, Patrolog.
manières de parler dans le concile de Nicée. lalina, tom. V, avec notice, variantes et com-
Ilne fut pas moins recommandable par ses mentaires do Constant. On trouve dans le
\)ixv l'intégrité de sa foi * ; et
vertus, surtout même volume le concile romain et les lettres
de grands saints lui ont donné le titre douteuses du pape saint Denys.]
CHAPITRE XXVIII.
Théognoste d'Alexandrie.
Qni était 1 . On ne trouve rien de Théognoste dans reux '. Il était d'Alexandrie *» et avait com-
Tht^ngnoste.
Ses écrits.
Eusèbe ni dans saint Jérôme; mais saint posé sept livres intitulés Des Hypotyposes :
Alhanase en jiarledans jJusieurs endroits, et dont il ne nous reste que quelques fragments.
toujours avec honneur il l'appelle un homme
: 2. Photiu!>, qui avait lu l'ouvrage entier, idée de
ses écrits.
savant *, un homme admirable et digne d'es- dit que , dans le premier livre ",
Théognoste
time. Il semble dire qu'il vivait avant saint traitait du Père et tachait de montrer qu'il
Denys Denys de Rome,
d'Alexandrie et saint de toutes choses, contre l'opi-"
est le créateur
en le nommant avant eux et immédiatement nion de ceux qui veulent que la matière soit
après Origène^: au moins ne peut-on douter éternelle; dans le secoml, il rapportait les ar-
qu'ils n'aient été conteraporaius '. Pholuis» guments qui prouvent que Dieu a un Fils;
parle aussi de Théognoste; et on voit, par mais, en parlant de ce Fils, il disait qu'il est
l'inscription qu'il nous a conservée de ses une créature et qu'il préside à toutes celles
écrits qu'on lui donnait le titre de bienheu-
,
qui ont de la raison; dans le troisième, il par-
tros fas est culpare : omnes quippe res Christi cu- copus erat. Albanas., de Synodis, pag. 757.
rahant, omnes sludin sua convertebant adversus hœ- * Basil., Epist. 220, pag. 1003, ubi supra. Le même
reticos, al H
samosatensem , alii ariunam damnarunt saint Basile allègue l'autorité de saint Denys pour
hœresim. Albanas., lib. de Si/nodis, pag. 758. prouver la divinité du Saint-Esprit; mais il ne rap-
» Dionysio et Muximo, et omnibus per univcrsum porte point son passage. Basil., lib. de Spiritu Sancto,
orbem commintslns nosiris, episcopis ,
presbijtevis et cap. 29.
diaconis, et universœ Ecclesiœ cutliolicœ (juœ sub cœto ^ Prisci certe viri , Origenes , eruditissimus et labo-
est. Apud Eusebium, Epist. syr.od. concil. Antioch., riosus scriptor, et Theognostus. admirandus \lle et stu-
lib. VU, cap. 30. diosus hnmo ambo eam rem pertractant. Athanas.,
* ( Dionysii Alexandrini ) de
Queuta cjus Baptismo Epist. 4 ad Serap., pag. 70-2. Discile igitur, o Christi
Epistola ad Dionysium scripia est, tune qutdem Ro' hoste^ ariani , Tlieognostum virum eruditum minime
manœ urbis preshyterum, sed qui aliquanto post tem- refugisse ab hac ijtsa dictione ex substautia. Alban.,
pore ejusdem urbis episcopus est constitulus, ex qua de Decretis Nicœnœ synodi, pag. 230.
'
hune ipsum Romanum Dionysium, eruditissimum pla- 8 Idem, ibid. "' '
'
neque admirandum virum fuisse, testimnnio Dionysii Idem, ubi supra, Epist. 4 ad Serapion.
Alexandrini licet cognoscere. Euseb., bb. VU, cap. 7. Pbotius avait marqué en quel temps Théognoste
*
» Omnes enim, uti supra dictum est, Patres sunt : a vécu; mais l'endroit est imparfait, et on n'y lit
neque tamen trecenti illi uliquam novam scripsere que ces paroles Floruit vero: Photius, Cod. 106.
senlentiam, ne'jue sibiipsis confisi, verbis non antea Lectœ sunt Theoynosti Alexandrini orationes sep-
9
scriptis patrocinati sunt; sed exemplo Putrum tem, cuj'us operis hœc est inscriptio : Beati Theo-
incitati,
eorum verba usurparunt, dtu namque ante illos sep- gnosti Alexandrini et interpretis Hypotyposes. Pho-
tuayinta qui Samosatensem deposuerunt, duo Dionysii tius, Cod. 106,
extitere, quorum alter Romœ , aller Alexandrias epis- '0 Idem, ibid. —
H Idem, ibid.
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XXVIII. — THEOGNOSTE. 451
lait du Saint-Esprit d'une manière aussi peu mière; mais ni l'un ni l'autre n'est étranger
orthodoxe qu'Origèue en a parlé dans son à ce qui le produit ainsi le Fils est comme
:
livre des Principes; dans le cinquième, il at- l'écoulement de la sid)stance du f*ère, en sor-
tribuait des corps aux auges et aux démons; te néanmoins (jue le Père ne souffre aucune
dans le sixième et dans le septième, il traitait division; et de même que le soleil ne dimi-
de l'incarnation et essayait d'en faire voir la nue pas, quoiqu'il produise continuellement
possibilité; mais beaucoup de ses preuves des rayons, de même aussi le Përe ne souffre
étaient mêlées de plusieurs imaginations sans aucune diminution en engendrant le Fils qui
fondement : comme lorsqu'il voulait prouver est son image. » Saint Allianase avoue, tou-
que le Fils de Dieu est enfermé dans le lieu tefois, qu'il y avait des expressions embar-
par notre imagination, quoique réellement il rassantes dans Théognoste sur le divinité de
ne puisse y être contenu. Le septième avait Jésus-Christ*; mais il ajoute (ju'il ne les avait
pour titre : De la Création; il traitait des ma- dites que comme pour discuter la vérité, et
tières de religion d'une manière conformé à qu'il exprimait ensuite son vrai sentiment
la doctrine de l'Eglise, et principalement du par les paroles que bous venons de rapporter.'
Fils de Dieu, dont il parlait dans cette dernière Ce qui doit encore mettre cet écrivain à cou-
partie de son ouvrage. vert de toute accusation sur ce point, c'est
Eclaircis- 3. Il y avait donc , selon Photius *, des en- que, de l'aveu de Photius ', il s'expliquait ca-
qneiqiies droits daus Ics écrits de Théognoste qui '='
fa- tholiquement sur la divinité du Fils dans le
difficultés • jr 1.
qm
1 .
«ur^ia doc- vorisaient l'arianisme, et d autres le dé- septième livre de ses ni/polyposes , et cest
Théognoste. truisaicnt. Mais saint Athauase en a jugé bien apparemmeut ce qui a engagé ce critique à
autrement, et il était si persuadé de la catho- chercher un bon sens dans les endroits du se-
licité des sentiments de Théognoste sur la di- coud livre qui lui paraissaient favoriser llié-
vinité du Fils, qu'il l'oppose aux ariens et le résie des ariens, et à dire que Théognoste avait
cite parmi les auteurs dont le concile de Ni- parlé de cette sorte, plutôt par manière dé
cée avait tiré sa doctrine sur la consubstan- dispute que pour proposer son véritable sen-
du Verbe « Apprenez, leur
'
du Fils n'est pas une suJistance étrangère ni péché ni en ce monde ni en l'autre ', » dit
produite de rien ; mais elle est engendrée de qn'Oiigène et Théognoste ont écrit que le
la substance du Père, comme le rayon de la blasphème contre le Saint-Esprit était la re-
lumière, la vapeur de l'eau; car la vapeur chute dans le péché après le baptême % selon
n'est point l'eau , le rayon n'est point la lu- ce qui est écrit dans l'Epitre aux Hébreux :
1 Cum de Filio dissent, eum rem creatam esse de- libro hoc de Filio scribit : Non extrinsecus adinventa
clarat, solisque rébus ratione praditis prœsidere : et est Filii substanlia, neque ex nihilo educta, sed ex
alia quœdam, ut Origenes, Filio affingit, sive eadem Palris substanlia nata est, xit hicis âpiendor et aquaB'
ac aie impietute in/'ectus, sive, ut guis forte dixerit vapor neque euim splendor aut vapor ipsa aqua
:
ad illum uicumque defendendum, hœc exercitationis vel ipse sol est, neque rursus aliquid est alienum,
gratia, non autem ex propria sententia prnposuerit... sed est aliquid emanans ex Patris substanlia, ita
In septima autem orat'one quam et de Dei opificio,
tamen ut nullam divisionem eadem Patris substan-
inscribit magis pie cum de alus rébus tum prœcipue
, lia sit perpessa. Ut enim sol idem manens radiis ab
in fine orationis de Filio disputât. PLotius, Cad. 106. ipso proflueutihiis non minuitur, ita neque Patris
* Itaque cum Patines Nicœnœ synodi ita sentirent, substanlia miitalionem uUam patitur, cum Filiumsui
hujusniodi dictiones ex substantia et consubalautialis ipsius imaginem Label. Sic igitur Theognostus suam
illis scribere visum est. Quod vero ipsi eas non sibi ipse mentem his verbis aperuit cum ea quœ antea ,
excogitaverint, ut illi quidem objiciunt, sed ab aliis se proposuerat 7ion nist exercitationis gratia expiendisset.
antiquionbus acceperint, âge id quoque osfeudamus, Athan., de Décret, synodi Nicœnce, pag. 230.
lib. "
ne tel hœc ipsa incusatio illis supersit. Dicile igitur, Idem, ibid.
'• —
^ phoLius, Cod. 106, ubi supra.
Cliristi hostes ariani, T/teognostum virum eruditum Le jugement et le témoignage de saiot Atha-
fi
minime refugisse ab hac ipsa dictione ex substanlia. nase, dit Mœlher, nous paraissent Lieu plus dignes
Alhan., de Décret. Nicœ?iœ synodi, pag. 230. de foi que la critique de Photius souvent partiale, ,
' Discite igitur, o Christi hostes arinni , Theognos- surtout eu cette matière. {L'éditeur.)
tum virum eruditum minime refugisse ab hac ipsa ''
Matlh. XII, 31.
dictione ex subtantia. Nam in secundo Hypotyposeon • Prisci certe^ viri, Origenes et Theognostus aiunt
452 HISTOIRE GI':NÉRAIE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
« Il que ceux qui ont été une
est impossible Jésus-Christ, mais que le Sauveur se rabaisse
fois éclairés, qui ont goûté le don du ciel, en faveur de ceux qui ne sont pas encore par-
qui ont été reudus parliripants du Sainl-Es- faits;au lieu que le Saint-Esprit est le sceau
prit, (jui se sont nourris de la sainte parole de la perfection qu'on reçoit dans le baptême.
et de l'espérance îles grandeurs du siècle à Ainsi ce qui rend le blasphème contre le Saint-
venir, et.qui, après cela, sont tombés, il est Esprit irrémissible, ce n'est pas que le Saint-
impossible, dis-je, qu'ils se renouvellent par Esprit soit plus excellent que le Fils, mais c'est
la pénitence *. » Et, après avoir rapporté le que les imparfaits , c'est-à-dire ceux qui ne
passage d'Origène, il ajoute celui de Tliéo- sont point baptisés, peuvent oi)tenir la rémis-
guoste, conçu en ces termes • : « Celui qui n'a sion de leurs péchés : ceux, au contraire, qui
outrepassé que les premières ou les secondes ont goûté les dons célestes et reçu le bap-
bornes est moins coupable; mais celui qui tême, n'ont plus d'excuse ni d'espérance de
a passé les troisièmes, n'a plus aucune espé- pardon. » Comme cette explication, prise à
rance de pardon. La première et la seconde la lettre, paraissait favoriser le sentiment de
borne sont la connaissance du Père et celle Novatien, saint Athanase en donne une plus
du Fils; la troisième est le baptême, qui nous naturelle, sans toutefois censurer celles d'O-
fait participants du Saint-Esprit. » Tbéo- rigène et de Théognoste, mais en témoignant
gnoste confirmait son sentiment par ces pa- que leur pensée ne lui était pas assez connue*.
roles du Sauveur à ses disciples ' « J'ai en- : Le style de lliéognoste était, au jugement de
core beaucoup de clioses à vous dire, mais Photius, plein, sans être trop chargé ^; poli,
vous ne pouvez les porter présentem(>nt. mais sans affectation; de sorte que, sans se
Quand l'Esprit de vérité sera venu, il vous rabaisser, il se servait de locutions ordinaires
enseignera. » Puis il ajoutait « Le Sauveur : avec clarté et exactitude ^. [ Les fragments
rabaisse, pour ainsi dire, ses discours en fa- citéspar saint Athanase ont été recueillis par
veur de ceux qui ne peuvent encore com- Galland, Biblïoth., tom. III, p. 062, G63; dans
prendre ce qu'il y a de plus parfait, au lieu Routh, Reliquiœ Sacrœ, tom. III, et dans la
que le Saint-Esprit habite dans ceux qui sont Palrologie grecque de M. Migne, tom. XVIII*
parfaits : et il ne faut pas dire pour cela que de l'édition grecque et latine, et tom. VII»
la doctrine du Saint-Esprit surpasse celle de de l'édition latine, col. 193 et 194.]
illam esse in Spiritum Sanctum Uasphemiam, cum ii sigillum sit perfectorum; sic non propter excellen-
quitus in baptismate donum Spiri tus Sonet i tribuiiur, tiam Spiritus Sancti prae Filio inexpiabilis et citra
ad peccata recidutd, ideoque illos remissionem non veniam est blaspbemia in Spiritum Sanctum sed :
consecuturos ulunt. Atbanas., Epist. 4 ad Serapion., quia imperfectis datur venia, iis vero qui donum
pag. 702. cœleste gustaverunt et initiati sunt, nulla vcniae re-
Hebr. vi, 4.
1 linquitur excusatio vel deprecatio. Atban., Epist. 4
*Theognostus autem hac adjicit : Qui primum et ad Serapion., pag. 703.
secundum terminum transgressus est, minori sup- ' Joan. XVI, 12.
plicio dignus videri possit; qui autem terlium con- * Ego autem ex iis quœ didici arbitrer utriusque
tempserit, non ulterius veniam consequelur. Pri- {Origenis et Theognosti) sentenfiam, mcdiocri quadam
mum autem terminum et secundum terminum ait inquisitioné et observutione indigere , ne forte pro-
doctrinam de Pâtre et Filio acceptam : tertium vero fundior quœdam in ipsis iilorum dictis mens lateat.
verbum in initiatione et in participatione Spiritus Athanas., Epist. 4 ad Serapion., pag. 703.
Iraditum quod confirmare volens adducit illud dis-
:
^ Dictio ej'us plena est et nihil habet redundans,
cipulis a Salvatore diclum : Adbuc multa babeo vo- vocibus item ut in attica minimeque affectata oratione,
bis dicere, etc. Joan. xvi, 12. Deinde ait : Sicut eos ita utitur venuste, ut nec in compositione quidem a
qui perfecta nondum capere possunt alloquitur Sal- consueto loqucndi modo recédât, imo nec perspicuita-
vator, ad iilorum sese parvitatem demittens cum :
tis et accurationis causa a magnitudine deflectat,
CHAPITRE XXIX.
[L'an 277]
Disputes 4 . Cet évêque , qui ne nous est connu que par laiis n'avait pas fait mention; car il est certain
d'Archélaûs
contra Mâ-
nes, rers
ses disputes contre l'hérésiarque Manichée ou que ces Actes sont de deux auteurs ''.
La tra-
Ï77. Manès, florissait sous l'empire de Probe, vers duction latine que nous en avons, a été faite
277. Il en syriaque ^;
écrivit ses conférences sur le grec et non sur le syriaque, ce qui pa-
mais elles furent bientôt traduites en grec et raitpar plusieurs endroits ^ où le traducteur^
devinrent ainsi fort répandues. Nous les avons trompé par la ressemblance des termes grecs,
encore aujourd'hui d'une ancienne traduction a mal rendu le sens de son original. 11 paraît
latine', et l'on eu trouve plusieurs fragments aussi avoir supprimé beaucoup de choses, et
considérables, en grec, dans saint Epiphane, l'on croit, avec beaucoup de vraisem])lance,
dans saint Cyrille de Jérusalem et dans l'His- qu'au lieu de traduire les Disputes d'Arché-
toire ecclésiastique de Socrate. Un ancien au- laûs avec Manès, il n'en a fait que l'abrégé.
teur, nommé Héraclieu, cité dans Photius*, Par exemple, il ne rapporte pas les preuves
dit qu'Hégémone écrivit les Réfutations de qu'Archélaiis produisit pour montrer que non-
Manès par Archélaûs; on peut concilier ces seulement la loi de Moïse, mais tout l'Ancien
deux versions en supposant que cet Hégémone Testament, était parfaitement d'accord avec
traduisit en grec les Actes de la dispute d'Ar- le Nouveau. Cependant Archélaûs lui-même
cliélaiis, ou qu'il les publia de nouveau en y dit avoir prouvé cet article contre Manès ',
ajoutant plusieurs circonstances dont Arché- et saint Cyrille de Jérusalem a transcrit cet
' D'autres disent Garrhes ou Haran, mais ils ont ipsum perscripsii. Photius, Cod. 83.
tort. Voyez Galland reproduit dans la Patrologie ^ Cela parait par ce qu'on lit à la fin de ces Actes,
grecjue, tora. XVllI. [L'éditeur.) num. 55, pag. 193 cdit. Fabr. : Quibus postea agnitis
2 Archélaûs, episcopus Mesopotamiœ, librum disputa- Archélaûs adjecit ea priori disputationi , ut omnibus
quam fiuôuit aduersus Manichœum exeun-
tionis suce, innotesceref, sicut ego qui inscripsi in priori bus expo-
tem de Perside, Syro sermone composuit, qui transla- sui. [ Voyez Assémani, appendice au tom. l^^ de la
tus in Grœcum habetur a multis, r/aruit sub impera- Bibliotlièquii orientale ; il prétend que Archélaûs n'a
fore Probo. Hieronyiu., iu Cataloyo, cap. 72. point écrit la relation de cette conférence.]
3 Valois à donné ces Actes en partie, sur un ma- ® On en voit un exemple au nombre 8 des Actes
nuscrit de l'abliaye de Bobio, à la suite de ses Notes de cette dispute, où le traducteur a pris âvïjp pour
sur ï'Histoire de Socrate, pag. 197, à Paris, en 1678. àrip, comme nous lisons dans le texte grec de saint
Laurent Zaccagni, bibliothécaire du Vatican, les Epiphane. Ainsi, au lieu de traduire permanent illœ :
ayant trouvés plus amples dans un manuscrit du in columna gloriœ quœ vocatur aer perfectus; aer
Vatican, les fit imprimer à Rome, en 1698, in-A», autem iste est columna lucis ; il a traduit mal à pro-
avec plusieurs anciens monuments; et c'est cette pos cum igitur luna onus quod gerit animarum
:
édition que Fabricius a suivie dans la réimpression sœculis tradiderit Patris, permanent illœ in cohunna
qu'il en a faite à Hambourg, en 1716, in -fol., à la gloriœ, quod vocatur vir perfectus. Hic autem vir est
suite des œuvres de saint Hippolyte. On y voit d'a- columna lucis. De même, au nombre 8, il a confondu
bord les remarques de Zaccagni sur ces Actes, p. 136; Xiixoç famés avec Xoiuloç pestis ; ce qui ne serait pas
ensuite un grand éloge de Marcel, pag. 142; puis arrivé s'il eût traduit sur le syriaque, dont les mots
la lettre de Manès à Marcel, pag. 145; celle de Mar- n'ont point de ressemblance qui occasionne de pa-
cel à Manès, pag. 146; enfin l'histoire et les actes de reilles équivoques. Voyez les Prolégomènes de Zac-
la conférence d'Archélaûs avec Manès, pag. 146 la ; cagnius, pag. 146, 137 edit. Fabr.
conférence de Diodore avec Manès, et sa lettre à ''
Nos vero ex eadem ipsa Scriplura non solum con-
Archélaûs, pag. 177; la réponse d'Archélaûs à Dio- firmavimus legem Moysis et omnia quœ in ea scripta
dore, pag. 178; son discours sur l'histoire de Manès, sunt, verum eiiam omne Vêtus Testamentum convenire
pag. 183. Novo Testamento , et consonure probuvimus unumque ,
* Recensât item Heraclianus eos qui ante se in ma- esse textum ianquam si una vestis videatur ex subteg-
w'chœorurn impietatem calamum stritixerunf, Hegemo- mine atque staminé esse contexta. Archel., Epist. od
nium nimirum, qui diuputationem Arcltelai aduersus Diodor., pag. 178 edit. Fabr.
1 i
peut se laiic aussi que la traduction de ces Terébiidhe passa de Judée en Perse, et, pour
Actes ne soit pas venue entière jus(|u'à nous, n'y être pas coium, il changea de nom et se
et que le défaut que nous y trouv(^i^ vienne ;lit appi^ey ^iuilde '. Il y eut pour adversaires
moins de la part du traducteur que delaperte les prêtres de Mithra ou du Soleil, qui, après
d'une partie de sa tiaduction '. Quoi qu'il eu l'avoir convaincu d'erreur dans plusieurs dis-
soit, voici quelle fut l'occasion lUîs, disputes putes, le chassèren<4,et l'obligèrent de se re-
d'Archélaûs avec .Manès , et ce qu'elles ren- tirer chez une vieille veuve, sans avoir pu
ferment de plus reniar(|uablo. , liiire un monté sur
seul disciple. Alors, étant
Orieineet 2. Vers le milieu du III» siècle, il y avait
proines dis la terrasse maison pour invoquer les
de la
erreiira
UaDès.
<lf
eu Egypte, un nommé 3cyt\iien, sarrasin de démous de l'air *, il fut frappé de Dieu, tomba
nation ', homme extrêmement riche, d'un de la terrasse et expira. La veuve hérita de
esprit vif et brillant, qui le faisait pénétrer ses livr(;s et de son argent!'; mais comme elle
dans toutes les sciences des Grecs. Quoiqu'il n'avait ni enfants ni parents, elle acheta un
eût quelque connaissance de la religion chré- esclave persan, nommé Cubrique '°, qui n'a-
tienne et des saintes Ecritures, néanmoins vait encore que sept ans : elle l'affranchit,
il n'avait rien de commun avec le cln-istia- l'adopta pour son fds, et le fit instruire dans
uisme ni avec le judaïsme. L'envie de se voir les sciences et dans la philosophie des Per-
à la tète d'un parti lui fit inventer de nou- ses; et il devint ainsi considérable entre leurs
veaux dogmes. Il se mit donc à raisonner sur sageç. .Après la mort de cette veuve, il hérita
les principesde Pythagore et d'Empédocle ; de tout son bien, avec les livres qu'elle avait
et, secondé par le démon, il s'imagina que, eus de Térébiuthe ; et, afin d'efî'acer plus aisé-
puisque le monde était rempli de choses con- ment la mémoire et la honte de sa servitude,
traires et opposées l'une à l'autre^ il fallait il quitta le nom de Cubrique et piit celui de
que cette opposition vint de deux racines et Maiiès ", qui, en persan, signifie discours ou
de deux principes ennemis. Pour établir cette conversation, comme pour marquer qu'il ex-
doclrine, il composa quatre livres *, tous assez cellait dans la dialectique. Il disait qu'il était le
courts le premier intitulé, de l'Evangile ; le Paraclet et '*.
: s'3 vantait de faire des miracles
second, des Chapitres; le troisième, des Mys- Le roi de Perse avait son fils malade dans la
tères; le quatrième, des Trésors. Le premier capitale du royaume "; et, comme il craignait
ne renfermait aucune des actions de Jésus- beaucoup de le perdre, il fit publier un édit
Christ et n'avait de commun, avec l'Evan- où il promettait une grande récompense à
gile, que le titre. Scythien s'était proposé celui qui le guérirait. Il se trouva grand nom-
d'infecter la Judée de ses erreurs; mais il bre de méjlecius ; mais Manès promit de gué-
mourut peu de temps après qu'il y fut arrivé % rir ce prince par ses prières. Le malade lui
laissant Térébinthe, son disciple, héritier de ayant été confié, il lui appliqua quelques
* Cyrillus, Calèches. 6, num. 11. saurum appellavit, et erant ei isti quatuor libri et
L'authenticité des Actes que nous possédons a été
* unus discipulus nomine Terebinllius. Archel., Acla,
contestée par Beausobre Histoire des Manichéens.
, pag. 191, num. 52; mais, au nombre 53, ces livres
Voyez la Préface de Zaccagiii ,
qui l'établit, et Gal- sont attribués à Scythien universa bona sua tradidit
:
land, BUA. vet. PP., qu'on trouve dans D. Lumper, et cum reliquis, etiam quatuor illos libellas quos Sq/-
avec Zaccagui, tom, XllI. Voyez aussi Cacciari, de ihinnus scripserat non viultorum versuum singulos,
,
discipulum habiiit quemdam nomine Terebinlhum, qui — 10 Theodoret., lib. I Hœretic. FahuL, cap. 26. —
scripsit ei quatuor hbros, ex quibus unum quidem <1 Cyrillus, ubi supra, num. 24. » Idem, ibid/îm, —
appellant Mysteriorum, alium vero Gapitulorum, ter- num. 23. i* —
Idem, ibid.
tium autem Evangelium, et novissimum omnium The-
[m* SIÈCLE.] CHA.PITRE XXIX. — AUCHÉLAUS. 455
remèdes ', mais imitilement, et il mourut descendu du sein du Père, est fils d'une cer-
entre ses mains. Manès
mis en fut aussitôt taine Marie, formé du sang et de la chair et
prison; mais, après y avoir demeuré quelque du reste de l'impureté des femmes! Je n'en
temps, il trouva moyen de s'échapper, s'en- dirai pas davantage dans cette lettre, de peur
fuit en Mésopotamie, et se retira dans un de vous fatiguer, n'ayant pas l'éloquence na-
château nommé Àrabion, sur la rivière de turelle. Mais vous apprendrez tout quand je
Stranga, situé dans les déserts qui séparaient serai aujjrès de vous, si vous avez encore soin
l'empire romain de celui des Perses. Là, de votre salut ^; car je ne mets la corde au cou
ayant entendu parler de Marcel, homme de à personne, comme fout les moins sages du
grande piété, qui demeurait à Cascare, ville vulgaire. Comprenez ce que je dis, mou très-
nés, il lui écrivit en ces termes, par un de 4. Marcel, quoique extraordinairement sur- 11 entre
en conféren-
ses disciples appelé Turbon ^. pris de cette lettre, ne laissa pas de recevoir ce avic Ar-
cliPlaûs , é-
Lettre 3. « Manès, apôtre de Jésus - Christ ',' et fort, bien ' Turbon qui la lui avait apportée; vèc|ue de
de Manès à r ' Cascare.
Marcel. Ses tous Ics saiuts ct Ics viergcs
o qui
*
sont avec mais Archélaûs, évèque de Cascare, qui s'é-
erreurs. .
moi, à Marcel mon fils bien-aimé, grâce, mi- tait trouvé chez Marcel à l'ouverture de la
séricorde, paix de la part de Dieu le Père et lettre, sentant ranimer tout son zèle *, grin-
de Notre-Seigueur Jésus-Christ, que la main çait des dents et voulait, à Theure môme,
droite de la lumière vous préserve du siècle aller chercher Manès et le prendre comme un
présent, de ses accidents et des pièges du transfuge des Barbares. Marcel modéra son
méchant. Amen. J'ai eu beaucoup de joie ardeur, et croyant qu'il était plus à propos
d'apprendre la grandeur de votre charité; de faire venir Manès, il lui écrivit par un de
mais je suis fâché que votrç foi ne soit pas ses gens nommé Calliste, pour le prier de
conforme à la vraie doctrine. C'est pourquoi, veair éclaircir les difficultés qu'il trouvait
étant envoyé pour redresser le genre humain, dans sa lettre. Cependant Turbon instruisait .
pas la lumière des ténèbres, ni ce qui est mort comme une bête dangereuse: toutefois,
hors de J'homme d'avecpe, qui est dedans: de l'avis de Marcel qui, sans s'émouvoir *°,
jils mêlent incessamment l'un avec l'autre; espérait que Dieu prendrait en cette occasion
mais pour vous, mon fils, ne les unissez pas, la défense de la vérité, il convint de conférer
.comme le commun des hommes fait sans paisiblement avec lui. La conférence se fit
raison; car ils attribuent à Dieu le commen- publiquement dans la maison de Marcel '*,
cernent et la fin de ces maux. Leur fin est et, d'un commun accord, on convint de pren-
proche de la. malédiction *. Ils ne croient pas dre pour juges des païens, savoir Marsipe, :
même ce que Notre-Seigneur dans l'Evan- dit philosophe; Claude, médecin; Egialée, gram-
gile •, que le bon arbre ne peut produire de mairien, et Cléobule, sophiste; tous fort ha-
mauvais fruits, ni le mauvais arbre de bons biles dans les lettres humaines: et on en usa
fruits : ci ie m'étonne comment ils osent ainsi, de peur que si l'on eût choisi des chré-
'
dire que Dieu soit l'auteur et le créateur de tiens, on ne les eût soupçonnés d'avoir favo-
Satan et de ses mauvaises œuvres. Mais plîit risé le parti de l'Eglise. Quand on fut assem-
à Dieu qu'ils n'eussent pas été plus loin et blé, Manès déclara d'abord qu'il prétendait
qu'ils n'eussent pas dit que le Fils unique, être le Paraclet ; puis U se répandit en in-
lesme, tom. I, pag. 406, et la note qui y correspond. 10 Hœc cum Turbo dixisset vehemetiter accendebatur
,
vectives contre les catholiiiuos «, soutint qu'ils à cliacun do remarquer, par le cours ordi-
iaisaient Dieu le Père auteur des maux, du p6 naire du que nous ne sommes privés
soleil,
chf'! de l'injustice, parce qu'ils le reconnais-
et de sa lumière que par l'interposition de quel-
saient pour auteur de la loi. Il consentit nc^an- que corps solide obscur, entre lui et nous.
nioins à recevoir cette on pouvait lui
1(m *, si Les jui::os approuvèrent ce qu'Archélaiis avait
prouver que tout ce qu'elle enseigne est juste. dit •" et pressèrent I\Ianès de déclarer qui
Les juges lui ayant demandé d'exiiliquer avait formé le mur de séparation qui doit
clairement sa doctrine, il avança qu'il recon- être, selon lui, entre le royaume de la lu-
deux natures ', l'une bonne et l'autre
naissait mière et celui des ténèbres. Mauès répondi*
mauvaise, mais placées en différents lieux : que le Dieu bon avait mis au milieu le fir-
comme il ne put donner de ]treuves d'un mament pour maniuer son éloignement à l'é-
principe si étrange, les juges accordèrent à gard du mauvais principe, avec lequel il n'a
Arcbélaiis liberté de pailer *. Il réfuta avec rien de commun. Arcbélaiis, prenant la pa-
force les impiétés de Manès et fit voir l'ab- rôle, dit (jue Dieu n'était donc Dieu que de
surdité qu'il y avait de faire du mal " un nom, puisque, selon Manès, il était sujet aux
être incréé, éternel et sans principe, comme faiblesses bumaines, comme à la crainte, et
Dieu. prouva, par l'barmonie qui existe
11 avait besoin d'un mur de séparation pour se
entre 1 ame et le corps de l'homme ®, que ces défendre de son ennemi. Manès, ne sachant
deux parties ne peuvent être de deux prin- que répondre, se trouva réduit à dire que
cipes opposés, mais d'un seul et unique au- tout le monde n'était pas capable de com-
teur, et remarqua, on passant, qucriiomme se prendre ces mystères *'. Archéldûs l'attaqua
conduit par son libre arbitre ». Tous ceux qui ensuite sur la qualité de Paraclet qu'il af-
étaient présents applaudirent aux discours fectait de prendre; il fit voir qu'il n'y avait
d'Archélalis, et il eut beaucoup de peine à nulle apparence que Jésus - Christ **, après
empêcher que la foule ne mit Manès à mort, avoir promis, sous le règne de Tibère, d'en-
Suite de la 5. Arcbélaiis continua de parler et dit que voyer dans peu l'Esprit consolateur, eût dif-
•onférence.
l'on ne pouvait admettre deux principes in- féré l'exécution de ses promesses jusqu'à l'em-
nés ®, bien moins encore les placer chacun pire de Probe, et eût ainsi laissé ses disciples
en différents lieux; car ce serait diviser Dieu orphelins pendant plus de 300 ans *^.
moins grand que l'espace dans lequel il est l'a point créée ; la loi n'est appelée par saint
contenu. Si Dieu est lumière, comme on en Paul un mystère de mort, qua parce qu'elle
convenait ^, il fallait qu'il éclairât tout l'u- condamnait à mort les prévaricateurs; au
nivers sans y laisser de place aux ténèbres contraire, elle préservait de la mort ceux qui
incréées des manichéens et qu'il en fût le , l'observaient, et elle leur procurait la gloire 's,
maître unique sans le partager avec la puis- mais avec le secours de Jésus-Christ Notre-
sance des ténèbres. Il observe que Moïse, Seigneur; l'homme est hbre de sa nature **;
en parlant des ti-nèbres, n'a pas dit qu'elles le diable n'est pas mauvais par sa nature,
fussent ni créées ni iucréées, car il est facile mais il s'est porté de lui-même au mal.
1 Sum quidem ego Paraclitus qui ab Jesu mitli ii/o tempore usque nunc ? Nonne hœc apud eum alle-
prcedictus sum. Idem, ibid., num. 13. gabunt, noli nos cruciare, si opéra tua non fecimus ;
2 Archel., pag. 155. —
3 idem, ibid., num. 14. — car enim cum promiseris sub Tiberio Cœsare missu-
* Idem, ibid., pag. 156, num. 15. ^ Idem, ibid., — rum te esse Paraclitum, qui arguet nos de peccuto et
pag. 158, num. 18. —
6 jj.^ ibid., pag. IGO, num. 19. de juslitia, sub Probo demum imperatore romano mi'
— Idem, ibid., num. 20.
'' * Idem, ibid. ^ Idem, — sisti , orphanos dereliquisti ? lûem, ibid., pag. 165,
ibid., pag. 261, num. 22 et 23. '0 —
Idem, ibid.. num. 27.
'3 II n'y avait pas 300 ans que Jésus-Christ était
pag. 162, num. 24.
*' Idem, ibid., pag. 103, num. 25. mort, lorsqu'Arcbélaûs conféra avec Manèo; mais
** Hœc igitur signa quœ in prœdictis comprehendi- la cbaleur de la dispute ne lui permit pas uu calcul
mus exempliSj iste non deferens adest, dicens esse se exact; ou bien cette leçon est fautive et vient d'un
Paraclitum, qui ab Jesu prœsignnius est mitti, in que copiste du IV* siècle.
mendacem, ignorons fartasse, asseret Jesum ; qui enim Idem, ibid., num. 29, pag, 166.
»^
dixerut se non mulio post misiurum esse Paraclitum, Defendebat a morte servantes se et constituebat
1»
invenitur post trecentos et eo amplius onnos misiise in gloria, ope atque auxilio Domini Nostri Jesu
hune sicut ipse siùi teitimonium perlubet. Quid dicent C/iristi. Idem, ibid., pag. 168, num. 30.
neur Archélaûs. Les enfants commencèrent rencontre ; il le pria même de venir, s'il était
les premiers à crier contre Manès, à le pour- possible, afin de rassurer par sa présence le
suivre pour le lapider, et ils furent imités troupeau de Jésus-Christ ". Archélaiis répon-
aussitôt par la multitude. Mais Archélaûs dit aussitôt à cette lettre par un assez long
conjura le peuple de ne pas souiller, par un discours, que nous avons encore *^ et qui
homicide, la victoire que la vérité venait de tend principalement à prouver la haison et
remporter il ajouta qu'il fallait, selon ce qui
: le rapport qu'il y a de l'Ancien avec le Nou-
est écrit dans la première Epitre de saint veau-Testament ; il priait aussi Diodore de
Paul aux Corinthiens, qu'il y eût des héré- lui marquer ce qui se serait passé entre lui
sies, afin qu'on découvrit par là ceux qui sont et Manès ". Ceux-ci entrèrent en dispute **, et
solidement à Dieu. Archélaûs mit ensiûte par Diodore sut se servir si à propos des preuves
écrit, à la prière de Marcel, ce qui s'était dit qu'Archélaûs lui avait fournies pour l'ac-
de part dans la conférence.
et d'autre cord des deux Testaments, qu'avec plusieurs
Dispute
7. Manès, ainsi convaincu, prit le parti de autres raisons qu'il apporta lui-même, il eut
de Diodore
Ma-
eoDtre
Dèi.
g'enfuir et se retira dans un bourg nommé l'avantage sur Manès, de l'avis de tous les
Diodorc ou Diodoride *. Le prêtre ou curé assistants.
de ce lieu, qui s'appelait aussi Diodore ^, était 9. Diodore fit connaître le résultat de cette Seconde
un homme d'une grande probité, d'une foi conférence à Archélaûs, qui lui envoya un se- d-ASéiaus
très-pure et d'une piété éminente, mais d'un cond discours et promit en outre de venir lui- ^°^°'''^ ***'
esprit doux, simple, paisible, qui n'était pas même '^. 11 vint en etliet des le matin à Dio-
fort en paroles, ni tout-à-fait instruit dans doride *^; et quand dans le lieu
il fut entré
Manès, ayant re-
les difficultés des Ecritures. où se livrait la dispute au cou de , il se jeta
connu son faible, assembla une grande mul- Diodore et lui donna le baiber de paix. Dio-
titude de peuple ®, se mit à prêcher, et pu- dore et tous ceux qui étaient présents admi-
'
blia qu'il venait pour accomplir l'Evangile rèrent la Providence qui envoyait ce secours
et faire rejeter la loi de Moise comme don- si à propos. Manès, au contraire, en fut in-
née par le mauvais principe et contraire à terdit; il cessa de parler dès qu'il aperçut
la loi de Jésus-Christ. Diodorc répondit aux Archélaiis, et on voyait, à son air déconcer-
vaines déclamations de Manès par ces pa- té, qu'il ne voulait plus disputer. Archélaûs,
roles de Jésus-Christ ^: Je ne suis pas venu ayant fait faire silence de la main *'', fit l'é-
abolir la loi, mais l'accomplir^ : ce qui rédui- loge de Marcel et de Diodore, et dit, en par- •
sit cet imposteur à nier que Jésus-Christ eût lant de ce dernier, qu'il le savait capable de
parlé ainsi et à dire qu'il valait mieux s'ar- réfuter Manès, mais qu'il croyait y réussir
rêter à ses actions qu'à ses paroles. Il ne avec plus de facilité, connaissant déjà cet
laissa pas d'objecter à Diodore plusieurs ma- imposteur. Il pria donc les assistants de l'é-
ximes de la loi de Moïse et de les opposer à couter et de prononcer ensuite en faveur
i Idem, ibid., num. 34, pag. 172. — ' Idem^ ibid., 12 Archel., pag. 178, num. 41. — " Idem, ibid.,
num. 36, pag. 174. — ^ idem, ibid., num. 39, p. 176. pag. 183, num. 44. — '* Idem, ibid., num. 45.
— * Idem, ibid. 'S Archélaûs, his acceptis litteris , duos ad eum lU
*ldem, ibid. Saint Epipbane l'appelle Tryphon, promptu facileque comprehenderet
bros mittit quos in
Eœres. 66. num. 11, et lib. de Mensuris et Ponderi- contra Maneiem conscriptos. Cœterum id adventum
bus, cap. 20. suum prœstolaretur admonuit. Epipban., Hceres. 66,
Arcbel, pag. 176, num. 39.
« " Epist. Diodori — num. 11. Il n'est rien dit de ces deux circonstance»
ad Arche/aum, ibid., pag. 177, num. 40. ^ idem, — dans la relalion d'Arcbélaûs.
ibid. —
9 Matlb. v, 17. —
"> Idem, ibid.. pag.
176, 16 Arcbel., pag. 184, oum. 46.
num. 39. — il Epiphan., Eœres. 66, num. il. " Idem, ibid.
458 HISTOIRE GI-.NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de celui qu'ils juporaiont avoir ilit la vérité. nés, du temps ,ct des matières qu'il traitait.
Maiiès riutcrruiiipit pour
reprocher los lui 10. La conférence achevée, les assistants Troisièma
termes durs dont il s'était sorvi en parlant ne voulurent pas (|u 'Archélaûs s en retournât «lArohéiaùs
l'incarnation avec tant de succès ", qu'il ré- en conséquence de la mort de son tils, taisait
duisit encore une fois Manès au silence et encore chercher Manès pour le faire mourir,
s'aitira les applaudissements de tous ceux le peuple voulut arrêter Manès pour l'en-
qui étaient présents. Il répondit à l'objection voyer en Perse. Mais il prit la fuite, repassa
de Manès ^, que Jésus-Christ n'avait point la rivière de Stranga, et retourna secrète-
réprimandé celui (^i lui avait parlé de sa ment en Perse au château d'Arabion d'où
,
mère et de ses fn'res, mais qu'étant occupé, il était venu. Il y fut pris par les soldats per-
selon le précepte de son Père, à instruire sans qui le cherchaient de tous côtés *% et fut
ceux qu'il était venu sauver, il n'avait pas conduit au roi; ce prince, pour venger la
cru devoir interrompre son ministère pour mort de son des gardes dont Ma-
fils et celle
aller converser avec sa mère et avec ses nès avait été cause par son évasion *% con-
frères. Quant à saint Pierre, ce ne fut pas la damna imposteur à être écorché vif avec
cet
confession de la divinité de Jésus-Christ qui des roseaux **. Son corps fut abandonné aux
lui mérita alors le titre de Bienheureux, au- chiens et a,ux oiseaux *', et sa peau remplie
trement Jésus-Christ aurait dû aussi appe- de paille fut exposée sur la porte de la ville ",
ler bienheureux les démons qui lui disaient: où on la gardait encore du temps de saint
Nous savons gui vous êtes : vous êtes le Saint Epiphane *'.
verses circonstances des lieux, des person- Cinquième chapitre de 1 Epitre aux Romains,
• Archélaûs, pag. 185, num. 47. — * Matth. xii, même, ce qu'Arciiélaûs en dit alors. Sed ne ipse qui-
47.— s Matlh. xvi, 16. * Archel., — ibid., pag. 186, dem Sisinnus dicere recusavit eadem quœ nos dicimus,
num. 48. —
' Idem, ibid., num. 49, pap. 187. — prœsente Mane. Pag. 190, num. 51.
« Idem, ibid., num. 48, pag. 186. Luc. iv, 34. — "^
11 Idem, ibid., pag, 193, num. 54 et 55. " Idem, —
— 8 Idem, ibid., pag. 190, uum. 51. ibid.
• Serf guis plura ? Apjiellati sumus ex Salvaforis " Idem, ibid. Archélails, après avoir rendu publi-
desiderio christiani sicut universus orlis tervarum tes- ques ses disputes contre Manès, y ajouta le récit dô
timonium perhiOet, atque apostofi edocent. Sed et op- la mort de cet imposteur.
timus architerlus ejus, fundamentum nostrum, td est, 1* Epiphan., Hœres. 66, num. 12. '* Archélaûs, —
Ecclesiœ, Paulus posait et lerjem tradidit, ordinatis pag. 139, uum. 5, et Cyrillus, Catech. 6, num. 30. —
minùtris et presbt/teris et episcopis in ea describens *6 Idem, ibid.
per singula loca, quomodo et qualiter oporteat minis- " Sed Persarum rex, comperta Manichœi fuga,
et
. tros Dei, quales et qualiter fieri presbijteros qualesque missis satellitibus ineodem illo castello comprehen-
esse debeaiU, qui episcopntum desiderant , quœ omnia sum hominem ignominiose in Persidem abduxit, ubi
bene nobis, et recte disposita usque in hodiernum, sta- calamo cute detrarta, ultimum de eo suppltcium
tum suum custodiunt, et permanet apud nos hujus ré- sumpsit. Quam quidem cutem utris in modum, in far-
gules disciplina. Idem, ibid,, pag. 190, num. 51. tis paleis, ad hodiernum diem in Perside servant. Epi-
*" Siàine avait soutenu, eu présence de Manès phan., Hœres. 66, num. 12.
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XXIX. — ARCHÉLAUS. 459
manichéens *, il ne laisse pas de défendre en disons, afin qu'il n'y ait que les fidèles
la nécessité En effet, selon lui,
de la grâce. qui, sachant ce que l'on dit, le retiennent,
il dépend de rhomme,4e ppche^.pi^ die ne et de peur que cqux qui ne les entendent pas
pas pécher nous péchons par nous-mêmes,
'; ne s'en scandalisent ou ne s'en ofiensent. Ce-
mais ne point pécher, c'est un don çle Dieu; pendant il est permis à tous d'écouter l'E-
chacun mourra dans ses péchés, s'ils ne lui vangile; mais la gloire de l'Evangile est ré-
sont remis par le baptême institué exprés servée aux vrais chrétiens *. »
pour les remettre *; si Jésus-Christ s'est fait [Outre les éditions dont parle l'auteur dans Editions.
baptiser, ce n'a pas été pour effacer ses pé- une note du 4er numéro, on cite comme plus
chés, mais les nôtres dont il s'était chargé. complète et meilleure celle de Galland, BibL,
Les chrétiens avaient des lieux destinés pour tom. IlL II a suivi celle de Zacagni et y a
écrire et conserver les Livres saints *, et l'on joint de bonnes notes pour l'éclaircissement
en donnait quelquefois des copies pour de du texte. On trouve encore ces Actes dans la
mais aux chrétiens seulement. Les
l'argent, Collection des Concles de Mansi, tom. I;
livres que Manès avait composés pour la dé- dans Roulh, Relïquiœ Sacrœ, tom. IV; dans
fense de sa doctrine étaient très -difficiles à les Selecti Patres de M. Cailleau, tom. XV,
entendre^. L'Eglise n'expliquait les mystères et dans la Patrologw grecque de M. Migne ,
•qu'à ceux qui n'étaient plus au rang des ca- tom. VII de l'édition latine, tom. XVllI de
téchumènes ^; ce n'était pas sa coutume d'en l'édition grecque-latine.]
donner la connaissance aux Gentils : « Car,
• Scriptum est: In eos qui non peccaverunt. flow.v, propter quod ex muliere natus est, et propter quod
14.1 Archélaiis, pag, 166, nuin. 29. Saint Irénée lisait ad baptisma venit ut bujus partis perciperet purifî-
(de niême, lib. III advers. Hœres., cap. 20. Saint Au- cationem, ut Spiritum. qui descenderat in specie co-
gustin rpcpnnaîl qu'il y avait des exemplaires latins lumbae, corpus quod susceperat, portare possit. »
qui ne portaient pas la négation, mais que presque Archel., pag. 190, num. 50.
tous les grecs la contenaient. Hilaire, diacre, soutient °Tune deinde jubet {Mânes) in carcere positus, legis
au contraire qu'il faut lire sans négation Ceux qui : christ iunarum libros comparari... Sumpto ergo ali-
ont Mais son sentiment a été rejeté, et l'on a
]ie'ç/iç'. quantiflo auri,modo abierunt ad loca in qmbus chris-
6uivi dans la Yulgate la manière de lire, des an- tianorum libri conscribebantur. ; et simulantes se nun-
ciens, qui est ,1a meilleure et la mieux appuyée. tios esse christianos, rogabant prœsturi sibi libros
Voyez saint Augustin, lib. I de Peccatorum meritis Scripturarum nostrarum, et deferunt ad eum in car-
ettremissione, cap. 11, et Ëpist. 157 nov. edit. cere constitutum. Idem,, pag. 192, num. 55.
•,y* Deus enim omnia. quœ J!ecit,\bona valdç fecit, li- ^ Omnes ejus libri difficiliaquœdam et asperrima
beri ay^bitrii sensum unicuique dédit, qua ratione etiam continent. Idt^m, pag. 193, num. 55.
legem judicii posuit : peccare nostruin est, ut autem Hœc mysteria nunc patefacit Ecclesia ei qui ex
"^
non peccemus Dei dorium est : ex eo quod in nostro catecbumeuis excedit nec moris est gentilibus ex-
:
sit arbttrio constitutum peccare. Archelaus, pag. 169, ponere. Non enim gentili cuiquam de Paire et Filio
num. 32. et Spiritu Sancto arcana mysteria declaramus, ne-
Idem, ibid.
' que palam apud catecbumenos de mysteriis verba
* Baptisma autem si non est, nec erit remissio facimus; sed multa sœpe loquimur occulte, ut fidè-
peccatorum, sed in suis peccatis unusquisque morie- les, qui rem tenent inlelligant; et qui non tenent
.tur. Mânes dixit: « Ergo baptisma prupler remissio- ne laeilantur. Ibid., pag. 195, ex S. Cyril. Hierosoiy-
nem peccatorum datur?» Arclielaus rfîxiï." « Etiam.» mit., Catec/iesi 6, num. 29.
\Manes dixit: « Ergo peccavit Cbristus, quia baptiza- * Nam Evangelium audire ab omnibus expetitur :
•tus est? » Archelaus dixit : « Absit. Quin potius pro at Evangelii gloria solis Ghristi germanis tribuitur.
oobis peccalum factus est, nostra peccata suscipiens, Ibid,
,
CHAPITRE XXX.
Saint Vie- ^- Saint Victorin, que saint Jérôme met sage, vaut mieux qu'un roi vieux et insen-
qoe"ie pl-t cntrc Ibs colonnes de l'Eglise évèque
*, était sé ;un sur
» le Cantique des Cantiques ; un
J"i"iëm''r: dePettau', ville du duché de dansStyrie, sur l'Evangile ® de saint Matthieu et un sur
D^ïïétun' l'Autriche, sur la rivière de Drave. On ne l'Apocalypse. Mais il n'est pas certain si ces
sait pas au juste en quel temps il souffrit le Commentaires étaient entiers, ni si saint Vic-
martyre ; mais il y a apparence que ce fut torin y expliquait les Livres saints d'un bout
dans la persécution de Dioclétien % puisque à l'autre. Cassiodore dit assez clairement que
saint Jérôme le place dans son Catalogue des ce saint évèque n'avait exphqué que quel-
écrivains ecclésiastiques , entre saint Anatole, ques endroits du livre de l'Ecclésiaste ', de l'E-
qui a vécu jusqu'au règne de Carus, et saint vangile de saint Matthieu ^ et quelques-uns de
Pamphile, qui souffrit en 309, sous Maxi- ceux qui sont difficiles dans l'Apocalypse s.
mien. 3. Nous avons perdu tous ces ouvrages,
Ses écrits 2. Il avait composé divers ouvrages, la plu- excepté un Commentaire sur l'Apocalypse
font per'lus.
Qiii'ls ils é- part sur TEciiture, savoir un Commentaire : qui n'en explique que les principales choses
taieot.
sur la Genèse, cité dans saint Jérôme *, à l'oc- et que l'on trouve sous le nom de ce Saint
casion de ce qui est dit sur la bénédiction qu'I- dans la Bibliothèque des Pères, tom. I" de l'é-
sur ces paroles du chapitre iv« de l'Ecclé- sens prêtés à saint Jean '* sont relevés, leur
siaste ; a Un enfant pauvre, mais qui est beauté égale leur sainte gravité; mais le style
bat, dum nulli molitur insidias. De las omnibus ia- bris exposuit, quem etiam sa?ictus Hilarius in uno vo-
cet, et quasi columnis Ecclesiœ prwtermissis, me solum lumine declaravit, de quo et Victorinus ex oratore
pulicem consectatur. Hicronym., lib. I in Rufin., episcopus nonnulla disseruit. Cassiod., lib. de Instit.,
pag. 351. cap. 7.
9 Apocalypsis vero quœ studiose legentium animos
2Victorinus Petabionensis episcopus non œqiie latine
ac grœce noverat. Hieronym., iu Catalogo, cap. 74. ad supernam contemplationem deducit Sancti Hie-
Pettau est une ville du duché de Slyrie, qui appar- ronymi expositione conspicua est, de quo libro et Vic-
tient aujourd'hui à l'archevêché de Sallzbourg. torinus scepe dicius episcopus difficilia qucedam loca
» Tillemout, tom. V Hist. ecclés., pag. 312. [Le tvactavit. Cassiod., ibid., cap. 9.
1" Tillemont, tom. V, pag. 708 Hist.
Martyrologe romain admet celte opinion.] ecclés.
* Sunt auliim liœc Commentarii in Genesim, in Exo-
:
11 Victorinus non œque tafme ac grœce noverat; unde
dum, in Leviticum, in Isaiam, in Ezcchielem, in Haba- opéra ejus grandia sensibus, viliora videntur compo-
cuc, in Ecclesiasien, in Cunticum Canticotum, in Apo- sitione verborum. Hieronym., in Catatog., cap. 74.
calypsim Joannis oduersum ontnes hœreses, et multa Inclyto Victorinus marfyrio coronatus, quod infelli-
alia. Hieron., in Catolog., cap. 74. git etoqui non potest. W\eTon.,Epist. 49 ad Paulin.,
* Idem, Epist. ad Damas., Quœslione 3; pag. 566, tom. IV, pag. 567. — 1^ Tillemout, ubi eupra.
<
[III» SIÈCLE.] CHAPITRE XXX. — SAINT VICTORIN, PIPiRÎUS, ETC. 461
douter, d'ailleurs, que l'auteur ne soit fort hèresne fout qu'une seule Eglise catholique ';
ancien, puisqu'il témoigne que de son temps le baptême efface le péché ; selon la tra-*<>
Il est vrai que l'on n'y trouve point l'er- colas, diacre *^
croyaient qu'après avoir
; ils
reur des millénaires, que saint Victorin ensei- exorcisé les viandes offertes aux idoles, il
gnait dans son Commentaire sur l'Apocalypse, était permis d'en manger; ils donnaient le
ainsi que l'assure saint Jérôme '; elle y est, pain aux fornicateurs, huit jours après leur
au contraire, rejetée et condamnée comme chute; Néron ressuscitera pour être l'Anté-
une hérésie de Cérinthe *. Mais il y a appa- christ ". L'auteur compte vingt-quatre livres
rence qu'on a supprimé les passages de saint de l'Ancien-Testament '*, sur l'autorité d'un
Victorin en faveur de ce sentiment, comme certain Théodore que nous ne connaissons
on a fait dans le dialogue de Sulpice-Sévère, pas. Mais , en faisant le dénombrement des
intitulé : Gallus ®, et comme on avait lait Epîtres de saint Paul ne dit rien de celle
, il
autrefois à l'égard des cinq derniers chapi- aux Hébreux. On trouve dans l'appendice du
tres du cinquième livre de saint Iréuée ^, troisième tome des ouvrages de saint Augus-
où le saint évêque de Lyon se déclare pour tin un commentaire anonyme sur l'Apoca-
cette opinion; on avait retranché ces passages lypse, tiré pour la plus grande partie de celui
pour y subtituer une doctrine opposée. En qui porte le nom de saint Victorin de Pettau.
effet, le style de cet endroit du Commentaire 4. Ce Père, outre ses Commentaires sur TE- Antres
de saint Victorin est différent et plus élégant criture, composa encore beaucoup d'autres safQt'viclo-
""'
que le reste du semble même qu'il
traité '. Il écrits que nous n'avons plus. Entre autres,
soit resté quelque vestige du sentiment de ce il y en avait un contre toutes les hérésies 's,
Saint touchant le règne de mille ans, dans ce qui l'a fait mettre par saint Optât entre
l'endroit où il dit que tous les saints s'assem- les défenseurs de la vérité catholique qui
bleront dans la Judée * et y adoreront le Sei- ont ruiné les hérésies »^. Il traduisit aussi di-
gneur. Voici ce qu'on peut remarquer daus vers endroits des Commentaires d'Origène,
i Et vidi, inquit, mulierem ebriam de sanguine * Ubi illi [Apostoli] prtmum steterunt, Ecclesiam
sanctorum, décréta senatus illius consummatœ nequi- confirmaverunt , id est in Judœa, ubi omnes sancti
tice et omnein contra fidei pr-œdicationem etiam latam conventuri sunt et Dominum suurn adoraturi. Victor.,
indulyentiam ipse dédit decretum in universis genti- in Apccal., pag. 415.
bus. Victor., Comment, in Apocalyps., tom. III Btbl. 9 In toto orbe septem Ecclesias omnes esse, et septem
Pair., pag. 420. nominatas, unam esse catholieam, Puulus docuit. Vic-
^ Basnage ne regardent pas ce commen-
Cave et tor., ibid., pag. 415.
taire comme authentique. Dupin, Tillemout, Galland '0 Improperiumest peccatum pristinum, quod au-
lui sont favorables. D. Lumper en adjugerait une fertur in baptismo et incipit vocari homo christianus :
partie à Cassiodore et l'autre à S. Victorin. Mœlher quod est, invocetur nomen tuum super nos. Ibid.
le regarde comme autheutique, en avançant que les 11 Multi putant eum Heliam esse aut Elisœum, aut
preuves ne s'élèvent pas jusqu'à Févidence. {L'édi- Moysen, sed utrique mortui sunt. Hieremiœ autem
teur.) mors non invenitur, quia omnes veteres nostri trudi-
Hic [Papias] dicitur mille annorum juduicam cdi-
3 derunt illum esse Hieremiam. Pag. 418.
12 Nicolaïtœ autem
disse Deuterosin, quem secuti surd Irenœus et Apolli- erant illo tempore ficti homines
narius, et cœteri qui post resuvreciioncm aiunt in et pestiferi, qui sub nomine Nicolai ministri fecerunt
carne cum sanctis Dominum régna turum. Ter lu/ lia- sibi hœresim, ut delibatum exorcisaretur, et mandu-
nus quoque in libro de Spe fidelium, et Vtctorinus Pe- cari posset, et ut quicumque fornicatus esset, octava
tabionchsis, et Lactantius hac opinione ducuntur. Hie- die pacem acciperet. Victor., ibid., pag. 415.
13 Unum autem de capitibu^ occisum in morte, et
ronym., in Catal., cap. 18.
* Ergo audiendi non sunf, qui mille annorum 7'e- plaga mortis ejus cwata est, Neronem dicit. Constat
gnum terrenum confirmant , qui cum Cerintho
esse enim dum insequeretur eum equitatus missus a senatu,
hœretico sentiunt. Victor., in Apocalgp., pag. 421. ipsum sibi gulam succidissc. Hune ergo suscitatum
* Saint .lérôme assure que Sulpice-Sévère ensei- Deus mittet regem diynum dignis, et Cliristum qua-
gnait l'erreur des millénaires dans son dialogue in- lem meruerunt Judœi. Ibid., pag. 420.
1* Sunt autem libri Veteris Testamenti qui acci-
titulé Gallus, ce que nous n'y trouvons plus au-
:
jourd'hui. Hieronym., in Ezech., cap. 36, pag. 952, piuniur, vigmti quatuor, quos in epitomis Theodori
tom. in. invenies. Ibid., pag, 417.
* Feuardent, qui fait cette remarque, est le pre- 15 Victorinus scripsit adversum omnes heereses et
mier qui ait fait imprimer ces cinq chapitres. mulia alia. Hieron., in Catalogo, cap. 74.
' TiUemont, tom. V Hist. ecclés., pag. 708. i« Marcion, Praxœas, Sabellius, Valentinus et e<ç-
.
extjémement courts : l'un contre les mani- Les discours qu'il faisait au peuple le mirent
chéens, l'autre contre les marcionites*. L'ei*- en si grande réputation, qu'on l'appelait le
reur des millénaires, qui se rencontrait en jeune Ongéne. U se rendit également recom-
divers endroits des Commentaires de saint mandable par son amour pour la pauvreté *%
"Victoriu de Pettau mettre ses écrits
', a fait par l'austérité de sa vie et par les sciences
au rang des apocryphes par le pape Gélase ^. divines et humaines qu'il possédait. Ou mar-
Editions. [Le traité De Fubrica înundi fut d'abord que, en particulier, qu'il savait parfaitement
publié par Gave, Bist. litt. de Script, eccles., la dialectique et la rhétorique ". Quelques-
tom. \, Londres IGSO^ jmis, avec des notes uns ont cru qu'il était mort par le martyre;
de \Valker, O.vford 1740, Bâle 17-41 ; et enfin mais d'autres assurent qu'il survécut à la
par Galland, tom. IV. La Patrolnyie latine de persécution de Dioclétien et passa le reste de
M. Migne, tom.V, a reproduit l'édition donnée sa vie à Rome '*. Une veille de Pâques *', il
par Roulh, d'Oxford, avec notes et commen- expliqua la prophétie d'Osée par un sermon
taire du même. Les scholies sur l'Apocalypse très-long que l'on voyait encore du temps de
tevi, temporibus suis a Vicforino Petabionensi et Ze- Oriyenes junior vocaretur. Constat hune mirœ exerci-
pherino urbico, ei Teriulliano Carthayiniensi ustjue ad taiioms, et apjetttorem volim'.ariœ paupertatis scien-
Calajjhrygas, et ub altis assertoribus Ecc/esiœ catho- tissimumque dialecticœ et rhctoricœ urtis et post ,
licœ superati sunt. Oplat., lib. I, pag. 37 edit. Al- persecutionem omne vitœ suœ iempus Romœ fuisse
baspiuaei. versatum. Hujus et longissimus tractatus de propheta
' Nec disertiores sumus Hilario, nec fideliores Vic- Osée, quem in viyilia Paschœ habitum, ipse sermo de-
torino, qui ejus {Oriyenis) tractutus non ut interprètes monstrat. Hieronym., in Catalogo, cap. 76.
sed ut auctores proprii operis, transtulerunt. Hieron., ^ Lectum est Pierii presbyteri... quefn Alexandrinœ
Epist. 41, pag. 346. Taceo de Viclorino Petabionensi scfiolœ prœfectum fuisse trudunt, votumen libvorum
et cœteris qui Oriyenem in explonatione dumtaxat duodecim. Phot., Cad. 119.
Scripturarum secuti sunt et expresserunt. Hieronym., 9 Hieronym., ubi supra. — lo Hieronym., in Catal.,
Epist. 36, pag. 276. cap. 7C. — Il Ibid.
« Hierouym., Epist. 36, pag. 276. '2 Ibid. [Il est certainque du temps de saint Epi-
'TillemoDl, lora. V Hist. ecclésiast., pag. 313. — phane il y avait à Alexandrie une église dédiée à
* Idem, ibid. Piérius.]
* Neque enim juxta judaicas fabulas, gemmatam 13 Ibid. Saint Jérôme dit ailleurs que Piérius n'ex-
et auream de cœlo expectamus Jérusalem ; nec rursum plique que le commencement de la projibélie d'O-
passuri circumcisionts injuriam ; nec oblaturi tauro- sée. Piera legi tructatum lonyissimum, quem in exor-
rum et arietuni victimas ; nec sabbati otio dormiemus. dto hujus propheice die vigitiarum Domtnicœ Passionis
Quod et rtiulti nostrorum, et prœcipue Tertulliuni li- ex temporali ei diserto sernione profudil. Hieronym.,
ber qui inscribitur, De Spe fidelium ; et Laclantii Prœfat. in Osée. Ce même Père remarque que la
Institutionum votumen septimum pollicetur, et Victo- tradition des Juifs était que le Christ devait venir
rini Petabionensis crebrœ exjiositiones, et nuper Seve- au milieu de la nuit, et croit que de là est venue la
rus noster in Dialogo cui Gallo noi/ien imposait. Hie- coutume de ue pas tinir l'assemblée la veille de Pâ-
ronym., in cap. XXXVI Lzcc/iiel., pag. 952. ques avant minuit. Traditio Jwtœorum est Christum
* Opuscula y tctorini Petabionensis apocrypha. Gelas., média nocte ventUrum, unde n^or et apostolicam tra-
tom. IV Concil., pag. 12GS. ditionenl permansisse ut in die vigitiarum Puschce,
' Pieriu^, Alexandrinœ' Ecclesiœ presbyter sub Caro ante nocfis dii)ii)îtUm populos dimitiere non liceufeit/-
et Dioc/étiano principibus, eo tempore qûù eam Eccle- pecttintes adûentum Christi, et p'/ilquam illud tempus
siam Theonas episcopus reyeljàt, florentissime docuit tramiertt securitate prœsumpta festum cuncti agunf
populos; et in tantum sermonis diversorumque trac- diem. Hieronym., in cap. xxv Matth., pag. 120.
tatuwn qui usque liodie extant, venit elegantium, ut
[ïii« SIÈCLE.] CHAPITRE XXX. — SAINT MGTORIN, PIÉRIUS ETC. 463
Photius qui dit aussi avoir lu un volume cir la censure qu'il tau de la doctrine de
des ouvrages de Piérius divisés en douze li- Piérius sur la divinité du Saint-Esprit, qu'il
vres, dont uu était sur l'Evangile de saint recoiuiait que le langage de ce Père ®, pour
Luc. 11 ne nous reste rien de cet auteur; nous être diflérent de celui des écrivains du IX"
savons seulement que, dans son discours sur siècle, pouvait être conforme avec les ma-
Osée *, il traitait des chérubins que Moïse nières de parler du III" et des précédents.
mit sur l'Arche, et de la pierre que Jacob Photius ajoute, en parlant du style de Pié-
mit sous sa tète lorsqu'il voulut se reposer rius ', qu'il était clair, net et coidaut sans
en allaut à Haran. Dans son livre sur saint être étudié, semblable à un discours fait sur
Luc % il prouvait que l'honneur ou l'irrévé- le champ, souvent d euthy-
et qu'il se servait
rence faite à l'image, retombe sur ce qu'elle mêmes.
représente, et semblait professer, comme Oii- [7. La science clu-étienne se déployait sans Théonss.
gène, 1 erreur de la préexistence des âmes. interruption daus l'Eghse d'Alexandrie. Ma-
Photius dit que sa doctriue sur la Trinité xime, étant mort en 282, eut pour successeur
était orthodoxe touchant les personnes du sur le siège épiscopal, Théonas, qui l'occupa
Père et du Fils *, bien qu'il admit deux na- jusqu'en 300 : c'est ià tout ce que nous savons
tures et deux substances; car il paraît qu'il de sa personne; mais nous possédons encore
ne se servait de ces termes que pour signitier de lui une lettre dont la suscription est Lu- :
les personnes; mais que la manière dont il nanocwô/cî//anorww jorœ/ec^o, dans laquelle il
parlait du Saint-Esprit était dangereuse, transmet à ce personnage des instructions sur
parce qu'il disait que sa gloire était moindre la manière de remplir ces hautes fonctions
que celle du Père et du Fils. Nous avons auprès de l'empereur, sans manquer à ses
montré plus haut que c'était à tort que Pho- devoirs de chrétien, et l'exhorte à engager ses
tius accusait Théognoste d'errer sur la divi- subordonnés à la même iîdélité. Cettre lettre
nité du Fils, à cause de quelques manières de a été écrite dans la première année du règne
parler qui ne revenaient pas à celles de son de Dioclétien. D'après le contenu, on voit
siècle, sans prendre garde que, bien que ces que les principaux emplois à la cour et dans
anciens aient parlé difîéremment, le fond de le gouvernement étaient alors entre les mains
la doctrine a toujours été le même, et que ce des chrétiens, qui exerc^aient leur culte en
serait une injustice d'exiger d'eux qu'ils eus- pleine liberté. La première édition de cette
sent parlé aussi exactement et avec autant d'Achéry, Spicilcge, tom. XII,
lettre est celle
de précaution que ceux qui sont venus depuis pag. 545, Paris 1655, et réimprimée en 1723,
la naissance et la condamnation des liérésies. tom. III; Galland, Bibliotli. tom. IV; dans la
Mais c'est, selon la remarque d'un habile /*«^ro/o^?e ^recç^we de Migne, tom. VIL Quant
critique °, le défaut ordinaire de Photius qui, à son authenticité, voyez Continuation des Bol-
vivant dans un siècle où les m\ stères étaient laudistes, tom. IV, mens, august., pag. 583,
éclaircis et daus lequel on parlait avec beau- 585, et Galland, Biblioth. Vet. Pat. hrolegom.
coup d'exactitude, a condamné les anciens, tom. VIIL]
presque partout, avec trop de sévérité. Ainsi 8. On peut mettre encore parmi les au- Athéno-
gène, mar-
l'on doit, avec d'autant plus de raison, adou- teurs du III* siècle le martyr Athénogène, tyr. Son
hymne est
perdue.
inscribitur, In Evaugelium Lucae; ex quo demonitrare tome 1, pag. 52-2 édition de Paris, 1G86.
licel, imaginis lionorem et irreverardiam, prototypi esse * Pluruna prœter eu quœ in Ecclesia hodie obtinent,
honorem stve irvevercrdtani. Obscurius deinde etiam veteri fortassis more trudit. Piiot., Cod. 119.
CIÏAPITIIE XXXI.
Martyre des saints Victorin, Victor, IVicéphore, Claudien, Diodore,
\ Sérapion et Papias.
Analyse 1. Ces saints martyrs étaient célèbres dans grâce ? Mais non, le secours divin les assistait
de leure Ac-
tes. l'Eghse grecque et dans l'Eglise latine mais , comme un compagnon d'armes et avait son
leurs Actes n'avaient jamais été recueillis ; action propre sans étouffer la leur.
ceux que donne Etienne Assémani * sont les Après ce préambule vient l'histoire du
seuls qui existent. Ces saints martyrs étaient triomphe de nos héros.
de Corinthe, y confessèrent le foi en
et ils 2. Après les avoir soumis à toute sorte Suite de
l'analyse,
%i9, devant le proconsul Tertius, au com- d'outrages et de tourments, le tyran essaya
mencement du règne de Dèce. Après cela ils sur eux la douceur et les caresses, espérant
passèrent en Egypte, ou y furent relégués, séduire par ces moyens fallacieux ceux dont
et en l'an 284, sous l'empire de Numérien il n'avait pu vaincre le courage. Mais tout
et sous le gouverneur Sabin, ils moururent fut inutile; mu par une inspiration vraiment
pour Jésus-Christ à DiospoUs. M. Belouino, diabolicjue, il résolut alors de déshonorer par
Histoire des PeTsécutions, croit qu'il y a une les plus indignes traitements ces hommes
laute dans la première date, à moins qu'on vénérables : ici encore leur patience et leur
n'admette que les martyrs ne fussent dans vertu surmonta sans s'altérer tous les affronts
un âge peu avancé. L'auteur commence par dont il les abreuva. Enfin, vaincu de toutes
exalter les saints martyrs dont il va retracer les manières, il imagina un supplice affreux,
la constance magnanime et vraiment surhu- et résolut de les faire mourir successivement
maine. Ils ont vaincu le feu qui dompte tout, dans les plus cruelles tortures, afin de les
ils ont vaincu le feu qui amollit le fer, ils épouvanter par le spectacle du trépas les uns
l'emportent sur diamant; car on trouvera
le des autres.
peut-être dans la nature quelque chose plus 3. Victorin, le premier, fut jeté dans un Suite de
puissant que le diamant, tandis que rien ne mortier et pilé comme on pile les viandes; ''«n»'y»e
pourra jamais surpasser le courage de ces et au milieu d'un traitement si atroce, le glo-
martyrs. Armés de la force toute puissante rieux confesseur soutint avec héroïsme son
de Dieu, ces martyrs furent invincibles. Tou- courage magnanime. En vain les bourreaux,
tefois, si la force de Dieu les soutint, n'allons à chaque coup qu'ils donnaient, l'invitaient
pas croire que la grâce, étouffant en eux le à avoir pitié de lui et à sauver son corps en
libre arbitre, ait fait violence à la nature, au- reniant son Dieu; en vain le tyran ajoutait
trement la grâce ne serait pas la grâce ; ou à ces exhortations des menaces terribles, le
que, stérile et inerte, elle les ait laissés faire généreux athlète restait inébranlable et in-
tout d'eux-mêmes; car alors à quoi bon la sensible, et sa constance remplissait ses com-
1 Qtiod si guis etiam novit Athenngenis htjmnum, Spiritu Sando, cap. 29, pag. 62 edit. 1730.
quem lamen amuhtum aliquod discipulis suis reli- ' Acta Martyrum orierdalium et occidcntaliurn^
quit, festinans jam ad consummationem per ignem ; is RomîE 1748, 2 vol. in-fol., lom. II, pag. 60.
novit martyrum sententiam de Spiritu. Basil., lib. de
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XXXII. — SAINTS CLAUDE, ASTÉRÉ, ETC. 465
pagnons d'une ardeur nouvelle pour le mar- couper par morceaux et de jeter ses mem-
tyre. A la fin le tyran, confondu, fit décapiter bres palpitants sous les yeux de ses compa-
Victorin. gnons, Claudien se montra supérieur aux
A. Après lui, Victor fut jeté dans le mor- tortures au milieu desquelles il expira. Le
tier. Le tyran, avant de faire commencer le tyran, non content d'avoir mutilé ses mem-
supplice, lui proposa l'alternative d'accéder bres, semblable à une bête féroce, lui fit en-
à ses désirs ou de subir le sort de son com- core déchirer les entrailles.
pagnon. Mais Victor, enflammé d'un saint 7. Puis, appelant Diodore, Sérapion et Pa- Suite de
l'analyse.
désir de mourir pour son Dieu, répondit en pias, et leur montrant les restes dispersés et
montrant le mortier : « Là est pour moi le sanglants du martyr, il leur dit: «Si vous vou-
salut et le vrai bonheur. » Son souhait fut lez éviter ce supplice, je ne vous force pas à
aussitôt accompli. le subir. » Animés de l'esprit de Dieu, les con-
5. Quand Victor se fut envolé vers le ciel, fesseurs s'écrièrent: «Avez-vous des tourments
Nicéphore, impatient du martyre, se jeta de plus affreux? vous pouvez les essayer. Jésus- /
lui-mème dans le mortier. Le juge, se voyant Christ est notre créateur et notre Dieu, c'est
bravé, se mit en fureur, et appela plusieurs lui seul que nous aimons.» Transporté d'une
bourreaux pour tourmenter le courageux nouvelle fureur par la foi des martyrs dont
chrétien. Il appelait sa générosité de l'or- il ne comprenait pas la générosité, le tyran
que
gueil et de l'ostentation, et ne savait pas ordonna de livrer Diodore aux flammes, de
cette constance est un don ,que Dieu répand trancher la tête à Sérapion et de jeter à la
en ses serviteurs quand ils sont persécutés mer jeune Papias. C'est ainsi que les saints
le
CHAPITRE XXXll.
Actes des saints martyrs Claude, Astère et Néon, et ceux de saint Génès *,
Les Actes !• Lcs Actcs de saint Astère et de ses com- version que Dom
Ruinart croit plus ancienne
marfyrs'^ pagnous sout du uombrc de ceux que l'on que celle dont Surins et Baronius se sont
xèreJmoâ appelle Proconsulaires ^, c'est-à-dire, tirés servis. On lit, à la fin de ces Actes *, que ces
«ont sincè- -,
co -i ^ • i
res. Ces dcs grcnes
^ des proconsuls ; on y rapporte les Saints souffrirent le 23 août, sous le consu-
martyrs ont
proprcs parolcs du juge et/ des
i l
• ^ n -
souffert en
I
peut douter de leur authenticité. Baronius y n'ont persécuté les chrétiens par des édits
remarque toutes les formalités que les Ro- publics qu'à la fin de leur règne. Mais il est
mains observaient dans leurs jugements ^. certain qu'il y eut des martyrs dès le com-
Ces Actes furent d'abord écrits en grec, mais mencement; car les gouverneurs des pro-
nous ne les avons plus qu'en latin, d'une vinces agissaient en vertu des anciennes lois.
1 Voyez Mœlher, tom. II, pag. 226 et seqq. (L'édi- 3 Baron., ad annum 285, num. 9 et 10.
teur.) * Habita est passio hœc in civitate jEgea sub Lysia
* Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 266; Tillemont, prœside X
kalendas septembris, Augusto et Aristobulo
tom. IV Mém. ecclés., pag. 414. consulibus. Ruinart., Acta sine. Martyr., pag. 269.
IL 30
im HisTomE r.ÉNr:RALE des auteurs ecclésiastiques.
quand l'orrasion s'en présentait % ou qu'ils veront mon unie «. Je compte comme un
(itaiout (l'humeur à nuire aux chrétiens. grand profit de soulïrirpour Dieu, et comme
(isfi^Aa!?
^- ^ Egée, ville de Cilicie, Claude, Astère une grande richesse de mourir pour Jésus-
Pag. 2GC.
et Néon furent di-férés au magistrat muni- Christ. » Lysias dit : « Uétachez-le, recondui-
cii»al, par leur belle-mère, comme chrétiens sez-le en prison et amenez-en un autre,
et ennemis des dieux *. Domuine et Théo- 3. Eulale, geôlier, préseuta Astère, le se-
nille, avec un petit enfant ', furent accusés cond des trois frères, qtii répondit nettc-
du même crime, et on les mit tous en prison ment 'qu'il n'aimait et n'adorait
qu'un Dieu,
jusqu'à l'arrivée du proconsul Lysias. Le selon qu'il l'avait appris de son père et de
proconsul arriva, et, s'étant assis sur son tri- sa mère. On l'attacha au chevalet et on lui
bunal, se fit présenter les chrétiens prison- déchira les côtés avec des ongles de fer; et
niers. Eulale, geôlier, dit : « Suivant vos or- comme Lysias le pressait de sacrifier aux
dres, seigneur, le magistrat de cette ville dieux, Astère dit: «Je suis le frère de celui
vous présente ce qu'il a pu prendre de chré- qui vient de vous répondre, nous n'avons
tiens; il y a trois jeunes frères, deux fcm- qu'un même esprit et une même confession;
mes et un petit enfant. » Lysias, s'adrcssant mon corps est en votre pouvoir, mais non
à Claude, lui demanda son nom et l'exhorta pas mou âme. » Lysias lui fit mettre des
2G7. à sacrifier aux dieux. Claude dit: «Mon Dieu charbons ardents sous les pieds, qu'on lui
n'a pas besoin de tels sacrifices *; il aime avait liés auparavant avec des moufles de
mieux les aumônes et l'innocence de la vie; frapper ensuite avec des verges
fer, et le fit
mais vos dieux sont des démons impurs qui et des bœuf sur le dos et sur le
nerfs de
se plaisent à ces sacrifices et qui préparent ventre. Astère ayant demandé qu'aucun de
Pag. ÎG8.
des peines éternelles à ceux qui les font : ses membres ne fûtexempt du martyre, le
aussi vous ne me persuaderez jamais de les proconsul le fit détacher et ordonna qu'on
adorer. » Le proconsul le fit attacher pour amenât le troisième. Lysias le traita avec
être battu de verges; mais en même temps douceur, en l'appelant son fils, et l'exhorta
il essaya de le vaincre en lui promettant des à sacrifier aux dieux, afin d'éviter les tour-
honneurs et des récompenses de la part des ments. Néon répondit qu'il n'adorait que le
empereurs, s'il voulait obéir à leurs ordres. Dieu du ciel et de la terre, et qu'il n'obéis-
Claude dit : « Leurs récompenses sont tem- sait pas â des dieux qui n'avaient pas même
porelles; la confession de Jésus-Christ sauve le pouvoir de se défendre contre ceux qui les
éternellement "*. » Alors Lysias commanda méprisaient. Après celte réponse, on le bat-
qu'on le pendit au chevalet, qu'on lui appli- tit rudement sur la tête comme un blasphé-
jetant lui-même dans le feu, il parut en quel- de bœuf, sans qu'on pût lui faire dire autre
que sorte avoir sacrifié. « Le feu et les tour- chose que ces paroles : « Je sais ce qui m'est
ments, répondit Claude, ne font point de mal avantageux et ce qui est utile à mon âme :
à ceux qui craignent Dieu, cela leur sert on ne peut me faire changer de résolution^.»
pour le salut éternel. » On le déchira ensuite Lysias, voyant la constance des trois frè-
avec des ongles de fer et avec des morceaux res, prononça la sentence par laquelle il les
de pots cassés, et on appliqua sur ses plaies condamnait à être crucifiés hors de la ville,
des torches ardentes, ce qu'il souffrit en di- ordonnant eu outre d'abandonner leurs corps
sant : « Votre feu et tous vos tourments sau- aux oiseaux.
* Ruinart., Prœfat. generalis in Ad. Mart., nntn. 55, àeo magnum, et pro Christo mori divitias multas.
pag. CO. —* Ruiuart., Ad. suie. Mart., pag. 2G6. Ibid.
* Les Actes ne marquent point ce que devint ce ' Deus unus est, qui venturus est, solus in cœlo ha-
petit enfant, qui pouvait être Ois de Domnine. , bitans et humilia respidens in magna virtute sua. Ut
Deus meus talia sacriflda opus non habet, sed hune coterem diligercm a parentibus mihi
et est ira-
eleemosynas et conversationes justas. Ruinart., Act. ditum. Idem., Act. sine. Martyr., pag. 207.
sine. Martyr., pag. 267. * Quod mihi utile esse seio et animœ meœ lucrum,
• Confessio Christi œtettia est salus. Ibid. id faciam. Non possum proposilum meum mutare.
• Mihi ignis et tormenta tua salvam facient anî- Ruinart., Act, sine. Martyr., pag. 268.
mam : quoniam qua patior proptcr Deum lucrum ha-
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XXXII. — SAINTS CLAUDE, ASTÈRE, ETC. 467
Martyre
de sainte
4. Le proconsul se fit ensuite amener Dom- lui mît des charbons sur le ventre et qu'on
Doainiiie et
de sainte
nine que, pour éviter les feux et
et lui dit ne cessât point de la torturer jusqu'à la mort.
ThéODille.
les autres tourments qui lui étaient prépa- La sentence exécutée, il fit jeter à l'eau son
rés, elle devait sacrifier aux dieux. Domnine corps cousu dans un sac.
répondit : « Je ne le ferai point, de peur de 5. On rapporte vers le même temps le mar- Saint Gé-
nès, comé-
tomber dans le feu éternel '. J'adore Dieu et tyre de saint Génès *, dont les Actes, aussi dien , mar-
tyr à Kf)mp,
édifiants qu'ils sont courts et simples, méri- vers l'an 285
son Christ, qui a fait le ciel, la terre et tout
on 286. Ana-
)y-e <le ses
ce qu'ils contiennent. Vos dieux sont des tent une entière croyance. Il était comédien Actes.
dieux de pierre et de bois, faits par la main à Rome, et excellait dans son art; il repré- Pag. aïo.
des hommes. » Lysias la fit étendre sur le sentait au naturel les mœurs des hommes, et
chevalet et battre de verges sur tous les men- surtout le ridicule qui se rencontre dans la
bres avec tant de rigueur qu'elle rendit l'es- plupart de leurs actions. Comme il jouait un
prit dans ce supplice. Son corps fut jeté dans jour devant Dioclétien, qui était venu à Rome
la rivière. Théonille ne témoigna pas moins pour en prendre possession après la défaite
de mépris pour les feux et les autres tour- de Carin, il se coucha comme s'il eût été
ments dont Lysias la menaça il lui fit don- : malade, et dit s « Ah! mes amis, je me sens
:
ner des soufflets, la fit jeter par terre liée par bien pesant, je voudrais être soulagé. » Les
les pieds et tourmenter cruellement. « Est-il autres répondirent : « Comment te soulage-
raisonnable *, lui dit Théonille, de faire souf- rons-nous? Veux-tu que nous te fassions
frir de telles peine à une femme étrangère, raboter pour te rendre plus léger ?» « In- —
de condition libre? Vous le savez, et Dieu voit sensés, dit-il, je veux mourir chrétien, car je
ce que vous faites. » Lysias la fit pendre par sens bien que ma fin approche. » « Pour- —
les cheveux et frapper sur le visage. Théo- quoi, » reprirent les autres? — « Afin, ré-
nille, voyant qu'on la dépouillait, reprocha au pondit Génès, qu'en ce grand jour Dieu me
proconsul l'injure qu'il lui faisait, et ajouta : reçoive comme un déserteur de vos dieux. »
« Ce n'est pas moi seule, c'est voti-e mère et On fit venir un prêtre et un exorciste, c'est-
votre femme que vous avez couvertes de con- •
à-dire des comédiens qui en faisaient le per-
fusion en ma personne : nous sommes toutes sonnage. Quand ils furent assis prés de son
de môme nature.» Lysias lui demanda si elle lit, ils lui dirent: « Mon enfant, pourquoi
avait un mari : « Je suis veuve depuis vingt- nous changé tout-
as-tu fait venir? » Génès,
trois ans ^, répondit Théonille, et je suis d.ër à-coup par une vertu toute divine, leur ré-
meurée dans pour l'amour de mon
cet état pondit sérieusement^; « Parce que je veux
Dieu, m'appliquant aux jeûnes, aux veilles et recevoir la grâce de Jésus-Christ et renaître
aux prières, depuis que j'ai quitté les idoles pour être délivré de mes péchés. » Ils accom-
impures. » Lysias lui fit raser la tête, croyant plirent les cérémonies du baptême; et, quand
par là la couvrir de confusion, et commanda on l'eut revêtu de la robe blanche des néo-
qu'on lui mît une couronne d'épines, qu'on phytes, des soldats, croyant toujours conti-
l'attachât à quatre pieux, qu'on la frappât nuer le jeu, le saisirent et le présentèrent à
avec des courroies par tout le corps, qu'on l'empereur pour être interrogé comme les
1 Ne in ignem œfernvm incidam et tormenta per- de Carin, rien n'empêche qu'on ne rapporte h. ce
pétua, Deum col.o, et Chrislum ejus gui fecit cœlum temps-là ou à l'année suivante le martyre de saint
et terram et universa quœ in eis sunt. Nam dit vestri Génès.
lapidei sunt et lignei, facti hominum manibus. Ibid. 5 Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 270,
^ Si tibi bonum videtur, ut ingenuam mulierem et ^ Evocato autem presbytero et exorcista, repente,
peregrinam sic torqueas, tu sois. Videi Deus quid agis. Deo inspirante credidit et jam noji simulate ac
Ibid. ficte, sed ex puro corde respondit : Qaia. accipere cu-
2 In hodiernum diem viginfi très annos habeo ex pio gratiam Christi, per quam renatus libérer a ruina
quo sum vidua, et propter Deum meum sic mansi je- iniquitatum mearum. Act. sine, pag. 270. Il semble
junans et pervigitans in oratiornbus ex quo recessi ab qu'il devait se déclarer en même temps, pour ex-
imrnundis idolis , et cognovi Deum meum. Ruinart., pier ses péchés ou par un baptême plus saint, si on
Âcta sine. Martyr., pag. 268. lui en donnait le loisir, ou en les lavant dans son
* Ruinart., Act. Martyr., pag. 269 ; Tillemont, sang par le martyre, et ne pas continuer ce qu'il
tom. IV Hist. ecclés., pag. C94 et 695. D'autres le avait commencé mais Dieu, dont les raisons sont
;
mettent en 303, lorsque Dioclétien vint à Rome cé- bien au-dessus des noires, ne le conduisit pas par
lébrer la vingtième année de Maximien Hercule et cette voie, aimant mieux faire honorer les mystères
triompher des Perses. Mais comme on ne peut dou- de sa religion par le jeu même qu'on avait entre-
ter qu'il n'y soit aussi venu en 283, après la défaite pris d'en faire. Tillem., tom. IV Hist. ecclés., p. 418.
408 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
maitjTS. Alors il parla ainsi ilu lieu élevé où brûlé avec, les torches ardentes, sans que sa
il était : « lù'oiitcz, lùnpcrour, et que toute loi en fût ébranlée; mais il disait constam-
rassemblée^ nrentcudt', l"s sa.ges et W. peuple ment :« Il n'y a pas d'autre roi que celui (jue
de cette ville. Toutes les fois que j'ai seule- j'ai vu •, je l'adore et je le sers; et, quand
ment entendu nommer un chrétien, j'en ai on me tuerait mille fois pour son service,
eu horreur, et j'ai insulté à ceux (pii persé- je serai toujours à lui;tourments ne
les
véraient dans la confession de ce nom. J'ai m'ùleront Jésus-Christ ni de la bouche ni du
délesté même mes parents et mes alliés, à cœur; j'ai grand regret de mon égarement,
cause du nom chrétien; j'ai méprisé cette de l'horreur que j'ai eue de son saint nom et
religion jusqu'à étudier avec soin ses mys- d'avoir commencé si tard à l'adorer. » Il eut
tères pour les tourner en ridicule et vous enfin la tète tranchée et obtint ainsi la cou-
en divertir mais, quand l'eau a touché mon
: ronne du martyre, le 25 août. La Chronique
corps et que, sur la demande qui m'a été
' d'Alexandrie rapporte un événement tout-à-
faite, j'ai répondu Je crois; à ce moment,
: fait semblable arrivé à Iléliople, dans la Plié-
dis-je, j'ai vu une main qui venait du ciel et nicie, en l'an 297, en la personne d'un nommé
des anges éclatants de lumière au-dessus de Gélasin ' qui, ayant voulu aussi jouer sur le
moi; ils ont lu dans un livre tous les péchés théâtre les mystères des chrétiens, se trouva
que j'ai commis depuis mon enfance, les ont tout-à-coup changé, confessa sincèrement la
tous lavés dans la même eau dont j'ai été foi de Jésus- Christ, et fut assommé à coups
arrosé en votre présence, et m'ont ensuite de pierres dans l'haljit blanc dont les autres
montré le livre plus blanc que la neige. Vous farceurs l'avaient revêtu au sortir d'une
donc maintenant, grand Empereur, et vous, grande cuve d'eau tiède dans laquelle ils
peuple, qui avez ri de ces mystères, croyez l'avaient baptisé. On croit que Théodoret a
avec moi que Jésus -Christ est le véritable voulu marquer l'une de ces deux histoires,
Seigneur, qu'il est la lumière et la vérité, et lorsqu'il dit que des personnes nourries sur
que c'est par lui que vous pouvez obtenir des théâtres s'étaient tout d'un coup con-
le pardon. » Dioclétien, étrangement irrité verties *, avaient combattu pour la foi, rem-
de ce discours, fit battre Géuès à coups de porté la couronne du martyre et étaient de-
bâton, et le mit entre les mains du préfet venues, après leur mort, terribles aux dé-
Plautien. Pour le contraindre à sacrifier, le mons, dont elles avaient été esclaves durant
préfet le fit étendre sur le chevalet, où il fut leur vie.
déchiré longtemps avec les ongles de fer et
• At ubi me aqua nudum tetigit et interrogatus, ipsius ero ut cœpi.Christum mihi de ore, Christum
credere me rcspondi, vidi super me manum cœlitus mihi de corde auferre tormeuta non poterunt; valde
venientem et Angelos radiantes super me stetisse, enim pœnitet me errasse, quod ante nomen sanctum
qui omuia peccata quœ ab infantia feci recitaveruut in hominibus sauctis exhorrui, salis tardius ad ado-
de libro, quae mox in ipsa aqua laverunt in qua in randum verum Regem superbus miles accessi. Ibid.,
conspeclu vestro perfusus sum, et milii candidiorem pag. 270 et 271.
nive postmodum ostenderuut. Nunc ego, inclyte Chrome. Alexand., ad annum 297.
3
Imperator, et vos omnes populi, qui de his myste- Audio ego vero nonnullos etiam in scena cducatos,
*
riis risistis, mecum crédite verum Dominum esse repente in athletarum ordinem transiisse, victoresque
Christum, hune esse lumen, hune esse veritatem, factos coronam esse consecutos. et postquam renuntiati
hune esse pietatem et per ipsum vos ad indulgen- fuerunt niagno dœmonas terrore concussisse, quitus
tiam posse pertingere. Act. sine. Martyr., pag. 270. olim subditi fuerant. Théodoret., sermone 8 de Mar-
* Non est rex prœter cum quem vidi, et adoro et tyribus, pag. 606, tom. IV.
colo eum; et pro ejus cultura, si miilies occidor,
[III» SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIII. — fflPPARQUE, PHILOTHÉE, ETC. 469
CHAPITRE XXXIU.
de son règne, après avoir remporté une vic- la brique se durcit par le feu et ne devient
toire insigne sur les Perses , avait publié par utile qu'après cela; de même commencez par
tout l'empire l'ordre d'offrir aux dieux des recevoir le baptême, et vous ne craiudrez
sacrifices solennels. Lui-même présidait les plus de périls. » —
«Nous le voulons, » répon-
pompes religieuses à Samosate. Or, pendant dirent-ils; et en ce moment le secours céleste
que tout le peuple se pressait dans le temple, agit si vivement sur eux, qu'ils insistèrent
Hipparque et Philotliée, deux des priucipaux pour qu'immédiatement on les admît à faire
citoyens, qui avaient embrassé la religion partie du troupeau de Jésus-Christ.
chrétienne, étaient à prier dans un petit ora- 2. Comblés de joie à la vue de cette ardeur, Suite da
l'analyse.
toire appartenant à Hipparque et où était re- Hipparque et Philothée envoyèrent aussitôt
présentée l'image de la croix. Cinq jeunes mander le prêtre qui les avait baptisés eux-
gens de leurs amis, Jacques, Paragrus, Ha- mêmes et qui venait de temps en temps leur
bibe, Romain et Lollien, étant venus les vi- distribuer le corps et le sang de Jésus -Christ.
siter, furent surpris de les voir ainsi renfer- A la réception de la lettre qui l'avertissait
més dans cet obscur sanctuaire, taudis que de ce qui se passait, le prêtre fut ravi, et,
tout le peuple au temple avec l'empe-
était après avoir prié Dieu de bénir ses serviteurs
reur. Les deux chrétiens répondirent que là Hipparque et Philothée, il partit, portant sous
ils adoraient le Dieu cj'éateur du monde : son manteau l'appareil des saints mystères.
« Eh quoi! dit l'un des jeunes gens, pensez- Il trouva les deux chrétiens et leurs cinq
vous que cette croix de bois est le créateur? » compagnons tous en prières, et les salua par
— Hipparque répondit : « Ce n'est pas la croix ces mots « La paix soit avec vous. » Les
:
que nous adorons, mais celui qui y a été jeunes gens se jetèrent à ses pieds, deman-
attaché , le Fils de Dieu engendré et noa , dant le baptême. « Mais, dit le prêtre, si
fait , Dieu comme
cousubstantiel à son Père , vous êtes persécutés > soufFrirez-vous pour le
lui, et dout la puissance a créé et conserve Christ comme il a souffert pour vous? Car
le monde. Il y a trois ans que nous lui ap- nous, nous regardons les tortures comme un
partenons, et c'est pourquoi nous nous gar- juste retour que nous payons à sa bonté. Ce
dons de nous produire en public et de respi- Dieu qui ne devait rien à sa créature est des-
rer l'odeur des victimes qui infecte la ville.» cendu jusqu'à notre néant; il est né de la
On voit ici une preuve de plus de l'admis- vierge Marie, il est mort, il est ressuscité, il
sion du terme de consubstantiel au IIP siècle. a vaincu le démon qui avait fait perdre le
Alors démontra aux jeunes gens le néant
il paradis à Adam notre premier père. » L'i-
des idoles et la sagesse du vrai Dieu, les in- mage des persécutions n'effraya pas les jeu-
gnons; mais Hipparque et Philothée étant dans des cryptes profondes, humides, téné-
seuls désitîués, invitèrent les autres à se ca- breuses, où ils restèrent quinze jours. Au bout
cher et à se taire, attendu que, n'étant chré- de ce temps, le tyran, après s'être assuré qu'ils
tiens que d'hier, ne seraient peut-être ils n'avaient vu personne, ni pris de nourriture,
pas assez forts pour les tourments. Mais ils se les fit amener et leur demanda s'ils vou-
s'écrièrent a Non, nous ne nous séparerons
: laient sacrifier. « Eh quoi! rcpliquèrenl-ils,
pas de vous; nous sommes sûrs de supporter on vous a dit cent fois que rien ne nous
tous les tourments et la mort pour Jésus- pourrait séparer de Notre -Seigneur Jésus-
Christ. » On les emmena donc tous devant Christ? Avez-vous donc, comme vos idoles,
l'empereur. des oreilles pour ne pas enb-ndre. » Celte ré-
Suite de 4. Le prince s'adressa d'abord à Hippar- ponse leur valut d'être déchirés cruellement
que, qui lui parla avec une noble nerte et sur le chevalet ; puis on les ramena en prison,
répondit avec intrépidité à toutes les propo- avec ordre de ne leur donner à manger que
sitions qui lui furent faites. Aussi ordonna- le nécessaire pour qu'ils ne mourussent pas
t-iide lui donner cinquante coups de fouets de faim.
garnis de plomb et de l'enfermer dans une 6. Deux mois après ils comparurent de snite a»
'""^'J'^-
obscure prison. Après lui, Philothée fut en- nouveau, exténués et défigurés par la souf-
suite interrogé par l'empereur, qui lui pro- france mêmes promesses de la part de l'em-
:
mit honneurs et richesses, s'il renonçait à Jé- pereur, même constance généreuse dans les
sus-Christ. « Ces honneurs seraient ma honte, confesseurs. « Ah! disaient-ils, laissez-nous
repiit le martyr, et le déshonneur que je puis aller jusqu'au bout dans la voie que Jésus-
souffrir pour Jésus -Christ est ma gloire. » Christ, le Fils du Dieu vivant, notre Sauveur,
Puis il parlait de la puissance et de la gran- nous a ouverte. » Le tyran les condamna à
deur de Jésus-Christ qui, cependant, a voulu être crucifiés comme leur maître, hors de la
être injurié et crucifié, et rester devant ses ville. Ils partirent donc pour le lieu du sup-
bourreaux comme la brebis devant celui qui phce, bouche bâillonnée et suivis d'une
la
la tond; et, se retournant vers le t3'ran, il foule immense au milieu de laquelle leurs
ajoutait : « Ne pensez donc pas que c'est par parents, leurs amis, leurs esclaves faisaient
manque de puissance que ce Dieu nous livre entendre des cris déchirants. Alors plusieurs
à vous; nous avons appris à espérer e.a son des personnages les plus distingués s'en vin-
'
royaume éternel; mais vous, vous mourrez rent trouver 1 empereur et lui représentèrent
un jour, et alors tout sera fini pour vous. » comment le traitement ignominieux infligé
Le prince voyant que c'était un homme let-
, à des citoyens illustres avait ému toute la
tré et instruit, se contenta de le faire mettre ville et le prièrent de vouloir du moins dif-
I
en prison. férer le supplice, afin qu'ds pussent mettre
Suite ,1e 5. Viut alors le tour des cinq néophytes. ordre à leurs affaires. Le prince consentit.
*" '*^'
L'empereur les sollicita en leur représentant Aussitôt les magistrats coururent vers les
leur jeunesse qu'ils allaient sacrifier, les tour- martyrs, les débarrassèrent de leurs liens,
ments qu'ils allaient endurer. Ils réponUi' et, se jetant à leur cou , leur dirent : « Les
[m* SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIV. - ACTES DE SAINT MAURICE. 471
affaires n'ont étéqu'un prétexte; nous vou- traordinaire de supplices : a De même, dit
lions vous pour nous et
prier d'intercéder Hipparque qui était chauve de même que,
,
pour la ville auprès de votre Dieu. » selon la nature, mon front ne se couvrira pas
7. Arrives au milieu de la ville, où la mul- de cheveux, de même ma résolution ne peut
titude les entourait, les confesseurs s'écriè- changer. » L'empereur, après avoir fait met-
rent au milieu d'un silence général : a Nous tre en croix les confesseurs, lit attacher avec
prions le Sauveur pour qui nous avons souf- des clous -une peau de chèvre sur la tête
fert de faire fleurir la religion chrétienne d'Hipparque, et il l'insultait en lui disant
sur les ruines de l'idolâtrie, de remplacer les d'apostasier, puisqu'il avait des cheveux sur
temples païens par les églises du Christ, la la lôtc. Le saint martyr expira presqu 'aussi-
corruption des mœurs païennes par la pu- tôt. Sa mort redoubla le courage de ses com-
reté et la sainteté chrétienne. » Le peuple pagnons. L'empereur, désespérant de les sé-
répondit : « Amen. » Hipparque ajouta ; duire , se retira en les laissant en croix. Les
« Nous vous conjurons d'aflVanchir les escla- païens se moquaient d'eux et demandaient
ves, car les Saintes Lettres enseignent qu'il où était le pouvoir de leur Dieu ; cependant
n'y a d'esclaves que ceux qui le sont du pé- des femmes chrétiennes obtinrent de s'ap-
ché. » Le peuple, en les entendant, fondait procher d'eux et là elles recueillaient avec
,
en larmes. Or le prêtre qui les avait bapti- des linges le sang qui coulait de leurs plaies.
sés était présent, et c'est lui qui a écrit ces Ils restèrent en croix jusqu'au lendemain:
Actes, ainsi que le précepteur de Gallus, que Jacques, Romain et LoUicn y expirèrent poi-
les magistrats en chargèrent. gnardés par les soldats; Philothée, Habibe et
Suite da L'empereur ne tarda pas à apprendre
8. Paragrus furent détachés, et le tyran leur fit
l'émotion qu'avait causée dans la ville la ha- enfoncer des clous dans la tête, et ils mouru-
rangue des confesseurs ; il lit des reproches rent de la sorte.
aux magistrats, qui dirent qu'ils avaient dû Quoique l'empereur eût ordonné de jeter
le permettre pour éviter un plus grand trou- les corps dans l'Euphrate, un homme riche
ble. Ensuite il se rendit dans un temple où nommé Bassns, qui était chrétien au fond du
il fitcomparaître les martyrs; là il essaya cœur, gagna les soldats et ensevelit les mar-
en vain de les effrayer par un appareil ex- tyrs dans une de ses maisons de campagne.
CHAPITRE XXXIV-
[L'an 252.]
évêque de Lyon, avant le milieu du Y* siè- pelle son bienheureux seigneur en Jésus-
1 Dom Ruinart remarque que le nom de saint Eu- à de saint Maurice dans d'excel-
la suite des Actes
cher se trouve à la tête des Actes du martyre de ces lents et de très-anciens manuscrits, en particulier
Saints dans divers manuscrits, et qu'il y en a d'au- dans celui du monastère du Mont-Jura, et dans un
tresoù il ne se trouve point mais il suffit qu'il soit
; de la Bibliothèque du roi; car cette lettre, qui porte
dans quelques-uns pour qu'il y ait lieu d'attribuer à le nom de saint Eucher et qui en est digne, le fait
ce Saint une pièce si belle, qui est vraiment digne auteur de l'histoire du martyre de ces Saints. Rui-
de son éloquence et de son esprit. Cela peut se nart., Prœfat. in Act. SS. Maurit. et socior., pag. 271;
confirmer encore par la lettre qu'où lit à la tête ou Tillemont, tom. lY Hist, ecclés,, pag. 695 et auiv.
472 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Christ. «J'envoie, dit-il, à Votre Béatitude, Mont-Jura, et ensuite par Dom Ruinart, sur
la relation de ce qui s'est passe à la mort divers autres manuscrits, et particulièrement
de nos martyrs, dans la crainte que les cir- sur celui de l'abbaye de Saint-Maur-dcs-Fos-
constances d'un combat aussi glorieux ne sés, qui a près de neuf cents ans, d'avec les
s'effacent insensiblement de la mémoire des Actes communs de saint Maurice, que l'on
hommes. Au reste, je les tiens d'auteurs di- trouve dans Surius et dans Monbricius. Car,
gnes de foi S auprès desquels je m'en suis quoique ces derniers soient conformes aux
informé, de ceux-là mêmes qui m'ont assuré premiers en beaucoup de choses, ils en sont
les avoir apprises de saint Isaac, évêque de différents en plusieurs autres, et quelques-
Genève, à qui le bienheureux évoque Théo- unes sont contraires à la vérité de l'histoire.
dore en avait fait le récit *. Ainsi, comme on Ily est d'abord parlé de plusieurs événe-
voit les fidèles venir de divers lieux et de dif- ments postérieurs au siècle de saint Eucher;
'
rentes provinces aux tombeaux de ces Saints par exemple, de la mort de saint Sigismond,
y offrir de l'or, de l'argent et d'autres choses roi de Bourgogne, qui n'arriva que dans le
précieuses, nous leur offrons cette histoire VI* siècle, vers l'an 524, et d'une translation
sous vos auspices, les conjurant d'intercéder de saint Innocent faite par Uomitien, évêque
pour le pardon de nos fautes et de nous ac- de Genève, Gratus d'Aouste et Protais, évê-
corder dans la suite leur protection, comme que du lieu, c'est-à-dire d'Octodure, qui as-
nos patrons *. » Il ne faut pas oublier qu'il est sista au concile de Châlons, vers l'an 644. De
parlé du martyre de la légion Thébaine dans toutes ces preuves il résulte que les Actes de
les Actes de saint Victor, martyrisé à Mar- saint Maurice, rapportés par Surius, ont été
seille ', et dans la Vie de saint Romain®; faits au plus tôt à la fin du VII« siècle. On sui-
mais ou doit bien distinguer les Actes du vait les Actes de saint Eucher dans l'ancien
martyre de ces Saints donnés par le Père Missel des Gaules ', et il paraît, par l'homélie
Chifilet, sur un manuscrit du monastère du que saint Avit de Vienne prononça en l'hon-
1 Porro ab idoneis auctoribus rei ipsius verilatem quem per totum orbem crudelius aliis maximeque per
quœsivi; ab his utique qui œstimabant ab e^tiscopo totas Gallias recentius fuderat, et prœcipue pro fu-
Genevensi sancto Isaac, hune quem retuli passionis or- mosissima illa Thebœorum apud Agaunum cœde, nos-
dinem cognovisse ;
qui, credo, rursum hœe rétro a bea- trorum plurirnis nimium terribilis factus, Massiliam
tissimo episcopo Theodoro, viro temporis anterioris, advenisset, ut secundum scripturam impius adhuc im-
acceperat. Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 274. pie ageret. Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 292.
Ce Théodore est sacs doute celui d'Octodure,
* ® Basilicam sanctorum martyrum Agaunensium lo-
qui assista au concile d'Aquilée en 381, et qui ainsi curn, sicut ]MSsionis ipsorum corporum relatio digesta
pouvait avoir appris le martyre de saint Maurice, ar- testatur, quœ sex millia sexcentos viros; non dicam
rivé dans son diocèse, de ceux qui en avaient été ambitu corporum, in Fabricis, sed nec ipso, ut reor,
témoins oculaires. Tillem., ubi supra, pag. 69G. campo, illic potuit conseptre, fidei ardore succensus
' Itaque cum alii ex diversis iocis et provinciis, in beatusRomanus deliberavit expelere. Apud Bollan-
honorem ofjîciumque Sanctorum, o.uri atque argenti, dum, tom. 111 februarii, pag. 704, num. 15.
^
diversarumque rerum munera offerant, nos scripta hœe Cet endroit de la liturgie de l'Eglise Gallicane
nostra, vobis suffragantibus , dignanter offerimus ex- : mérite d'èlre rapporté tout entier. Vere œquum et
poscens pro his intercessionem omnium delictorum, at- fustum est, 7ios tibi grattas agere, Domine suncte, Pa-
que in posterum juge prœsidium patronorum semper ter omnipotens, œterne Deus. Tu enim, Domine, The-
meorum. Ruinart., Act. sine.Martyr., pag. 275. bœorum exercilum ad populi tui supplicium desti-
* Au commencement de sa lettre, saint Eucher natum ita subita jussionis tuœ gratia revocasti, ut
appelle saint Maurice et ses compagnons, nos mar- pjotius eltgerent sedula devotione interfici, quam de
tyrs, NOSTRORUM martyrum passionern. Ici il les ap- chrislianorum sanguine satiari ; nec cum tantis ut te
pelle ses Patrons, peut-être parce qu'ils étaient ho- [legcndum puto, nec cunctantes te ] uuxiliante per-
norés d'un culte particulier dans l'Eglise de Lyon secutionis onus excepere, cervices suas persequentibus
et que l'on y conservait de leurs reliques, comme il inclinare. Et cum rabies inimici decerneret, ut Dei
y en avait en beaucoup d'autres endroits, selon qu'il populus denumerationis instantia deperirct, ille rap-
est remarqué au commencement de leurs Actes. tus est decimus qui anticipalione martyrii fieret pri-
Nam per succedentium relationem , rei gestce me- mitivus. Clamor in castris oritur ; virtus dimicandi
moriam nondum intercepit oblivio : et si pro marty- contemnitur, de assumptione martyrii conientio ardua
ribus singulis loea singula, quœ eos possident , vel commovetur. Dei populus ferro confoditur, sanguis
singulœ urbes insignes habentur, nec immerito, quia innocentum effunditur, fides illibata servatur. Sic,
pro Deo summo pretiosas anitnas fuderunt : quanta Domine, milites protegis tuos, ut nec defuerit in pas-
reverentia excolendus est sacer ille Agaunensium lo- sionc patientia, nec in con/essione constantia. Inier
cus, in quo tôt pro Christo martyrum millia ferro beatorum bella et beata certamina, plus mctuit glo-
casa referuntur? Ruinart., Act. sine. Mart., pag. 275. riosa confessio de commilitonum consortio dividi,
' Maximinus enim cum pro Sanctorum sanguine. quam manus carnificis gloriuri. Totus namque Dei
[m' SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIV. — ACTES DE SAINT MAURICE. 473
neur de ces saints martyrs le jour de leur nom de Saint-Maurice, au pied de la monta-
fête dans l'église même d'Agaune *, que c'é- gne que l'on nomme le Grand-Saint-Bernard,
tait la coutume de les lire en ce jour. Car ce à soixante milles de la ville de Genève. La fu- Pag. 276.
que ce Saint dit de la passion de ces martyrs reur que leur désobéissance excita dans l'es-
est tout-à-fait conforme à ce que saint Eu- prit de Maximien, naturellement cruel et vio-
clier en a dit dans leurs Actes, et on ne voit lent, fut si grande, qu'U ordonna sur-le-champ
point qu'il y en ait eu d'autres avant le VP siè- que la légion Thébaine fût décimée ^, et il
cle. Nous avons aussi une hymne de Fortu- réitéra ses ordres pour contraindre ceux que
nat * à la louange de ces martyrs et nom- , le sort avait épargnés, à persécuter les chré-
mément de saint Maurice, dans laquelle il tiens. Les soldats thébains, ayant appris ce
nomme la légion Tliébaine, la Légion heu- second ordre, commencèrent à crier par tout
reuse '. le camp ® qu'ils ne prêteraient jamais leur mi-
Anyse L'empereur Maximien-Hercule avait fait
2. nistère à des exécutions si sacrilèges, qu'ils dé-
des Actes de
(aint Mail- venir cette légion
'^
d'Orient dans les Gaules,' testaient les idoles qu'ils persévéraient dans
,
"ce.
pour l'aider à éteindre la rébellion d'Amand le culte d'un seul Dieu éternel, et qu'ils souf-
et d'EIien, ainsi qu'à apaiser la faction des friraient plutôt toutes sortes d'extrémités que
Pajr.275. Bagaudes, qu'il défit. Il voulut ensuite s'en de rien faire contre la religion chrétienne.
servir comme il se servait des autres soldats Maximien, entrant en fureur sur le rapport
pour persécuter les chrétiens; mais, comme qu'on de leur réponse ordonna
lui vint faire ,
les soldats de cette légion étaient tous chré- qu'on les décimât une seconde fois. On fit
tiens, ils refusèrent d'obéir. Maximien, pour encore mourir le dixième, suivant le sort, et
se reposer de la fatigue du voyage, s'était ar- les autres s'exhortaient mutuellement à de-
rêté dans les Alpes, en un lieu nommé Octo- meurer fermes dans une si belle résolution.
dure *, aujourd'hui Martignac ou Martigny, "Ils étaient surtout encouragés par trois de
populus tanta ardoris fide alacritate flagrabat, ut si qu'une petite paroisse de l'évêché de Sion en Valais,
iardaretur persecutio corporis, prœcederet devotio où l'on croit que le siège épiscopal a été transféré
passionis. Tanta enim fuit constantia populi, et sur lafin du VI^ siècle.
inimici, ut nec furor invenerit postmodum quod occi- ^ La décimation était une peine militaire, chez les
deret ; nec gloriosum remanserit quod periret. Factus Romains, contre les corps coupables. Baronius en
est sacer ille A'jaunensium locus per suffragia niartij- rapporte quelques exemples dans ses Notes sur le
rum, salies prœsentium, prœsidium futurorum quem Martyrologe au 22 septembre.
,
sanguinis unda perfudit, pretiosorum corporum socie- ^ Vociferatio passim ac tumultm in castris exori-
tas consecravit. Unde tnerito tibi, Domine, etc. Rui- tur afp,rmantium : Nunquam se ulli in hœc tam sa-
nart., Ada sine. Martyr., pag. 272. crilega ministeria cessuros : idolorura profana sem-
1 Prœconium felicis exercitus in cujus congrega- per detestaturos sacrœ et divinae religionis cultui
,
injustam sanctorum martyrum mortem quasi soi^tis trema experiri satius esse qnam adversus christia-
justitia judicaret, quia bis super aciem dispei^sa nam fidem venire. Ruin., Act. sine. Mart., pag. 276.
mansuetam, centuplex decimatis fructus adcresceret, ^
Saint Eucher marque en ces termes les qualités
et odio in prosperum snffragante eatenus eligerentur , de cette officier Incitamentum pênes sanctum Mau-
:
singuli, donec.simul colligerentur electi ex consueiu- ricium fuit, primicerium tune, sicut traddur, legio-
dinis débita séries lectce passionis explicuit. Avit. nis ejus, qui cum Exuperio, ut in exercitu appellant,
Viennens., in fragmentis op. a Sirmondo pag. 164, ,
campiductore, et Candido, senatore militum, accende-
2 Fortunat, lib. Il, cap. 15. On dit aussi que les bat. Ibid. Ce que Drouet de Maupertuis traduit ainsi:
Actes de saint Maurice ont été rais en vers par Mar- Mais celui qui leur inspirait le plus cette admirable
bodus, évêque de Rennes, qui vivait sur la fin du fermeté, était saint Maurice, leur colonel, auquel se
XI« siècle. Vossius. de Hist. latinis, lib. II, cap. 44. joignirent Exupère, maréchal de camp, et Candide,
5 Plusieurs protestants ont contesté la vérité de prévôt de la légion. Tillemont traduit primicerius
l'histoire des saints martyrs, entre autres le ministre par premier capitaine de la légion campiductor, par;
des Saints, 22 septembre. {L'éditeur.) ducenarius, biarchus, cirmicitor, eques, deinde tiro.
solde, il nous a donné la vie nous ne pouvons: de cette légion et ne portait même plus les '"'
278.
vous obéir en reniant Dieu notre créateur, armes, ayant obtenu des lettres de vétéran, 1""^.
notre maître et le votre, quand même vous voyageait; le hasard le conduisit au milieu
ne le voudriez pas. Si l'on ne nous demande de ceux qui avaient fait mourir les martyrs,
rien qui l'offense, nous vous obéirons comme au moment où ils faisaient grande chère et
nous avons fait jusqu'à présent; dans le cas se réjouissaient des dépouilles de leurs vic-
contraire, nous lui ol)éirons plutôt qu'à vous. times. Ils l'invitèrent à manger avec eux et
Montrez-nous l'ennemi quel qu'il soit, nos lui racontèrent ce qui venait de se passer.
mains sont prêtes au combat; mais nous ne Mais lui, plein d'horreur pour un tel festin
croyons pas qu'il nous soit i)ermis de les trem- et pour ceux qui le faisaient, chercha à se
per dans le sang des innocents. Nous avons retirer promptement; mais les soldats, s'en
fait serment à Dieu avant de vous le faire; apercevant, lui demandèrent s'il n'était pas
pourriez-vous encore vous fier au second, si chrétien. 11 répondit qu'il l'était et qu'il le
l'af. 277.
noiis violions le premier? Vous nous com- serait toujours ^. Aussitôt ils se jetèrent sur
mandez de chercher des chrétiens pour les lui et le massacrèrent. Dans la même légion
égorger; vous n'avez que faire d'en chercher étaient, dit-on, Ursus et un autre Victor, dont
d'autres, nous voici. Nous confessons Dieu le les reliques restèrentà Soleure, en Suisse,
Père, auteur de toutes choses, et son Fils Jé- capitale du canton de ce nom, l'un des cinq
sus-Christ '. Nous avons vu égorger nos com- cantons catholiques, sur la rivière d'Aar. Saint
pagnons sans les plaindre; nous nous sommes Eucher ajoute que les corps des martyrs de la
réjouis de l'honneur qu'ils ont eu de soufirir légion Thébaine ayant été révélés longtemps
pour leur Dieu ; ni la crainte de la mort, ni après à Théodore évêque du lieu , on bâtit
,
le désespoir ne nous ont point portés à la une éghse en leur honneur, et que, pendant
révolte; nous avons les armes à la main, et qu'on la bâtissait, il arriva un miracle en fa-
nous ne résistons pas, parce que nous aimons veur d'un des ouvriers qui était païen et qui
mieux mourir innocents que vivre coupables. se convertit ensuite. Il rapporte aussi la gué-
Employez donc contre nous les tourments, risou d'une dame de qualité, paralytique, qui
le fer et le feu, nous sommes prêts à tout vivait encore, ce semble, lorsqu'il en parlait,
souffrir; nous avouons que nous sommes ou du moins dont la guérison miraculeuse,
chrétiens, mais nous ne pouvons nous ré- opérée par l'intercession des saints martj^rs *,
soudre à verser le sang des chrétiens. » Maxi- était connue et avérée dans toute la province,
mien, désespérant de vaincre leur constance, et il ajoute qu'il se faisait en ce lieu beau-
envoya ses autres troupes les environner et coup d'autres miracles, pour la guérisou des
les tailler en pièces. Us ne firent aucune ré- malades ou pour la délivrance des possédés •.
> Habes hic nos confitentes Deum Patrem aucto- Muterfamilias Quintii egregii atque honorati viri
rem omniuca, et Filiuni ejus Jesum Glirisluin Deum cum ita parahjsi fuisset obslricta, ut ei etiam pedum
credimus. Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 277. mus uegaretur, a viro suo, ut Agaunum per multum
* Legio autem vocabatur (/uœ tune sex millia ac itineris spatium deferretur, poposcit. Quo cum perve-
sexcentos viras in arrnis hubebat. Ruinart., Act. sine, niiset sanctorum martyrum basilicœ famulantmm ma-
pag. 273. nibus illatu, nunc rniraculum suum ipsa circumfert.
3 C/tristianum se esse ac semper futurum esse res- Ruinart., Acta sine. Martyr., pag. 278.
pondit. Idem, ibid., pag. 278. * Cœterum satis multa sunt, quœ vel in purgatione
* Neque illud in miruculis Sanctorum prœtermit- dœmonum, vel in 7'eliquis curationibus illic per sanc-
tam, quod perinde clarum atque omnibus notum est. tos suos Domini virhis operatur. Ibid.
[iii« SIÈCLE.] CHAPITRE XXXV. — SAINTS DONATIEN ET ROGATIEN. 475
CHAPITUE XXXV.
Actes de saint Donatien et de saint Rog-atien, martyrs à Nantes.
Les A''te«
1.rapporte aux voyages que Maximien
On Gaules; et on trouve des Actes où ces expres-
fit claus Ics Gaulcs ', solt coutre Ics Bagaudes, sions, les empo'eurs ®, ne marquent qu'une
natien'luie
Rogatien, qui souffrirent à Nantes, nommé Donatien, illustre par sa naissance, "** *""
et saint
qui, après avoir passé de l'idolâtrie à la re- '^'
en Armorique, appelée aujourd'hui la Basse-
Bretagne. Nous avons les Actes de leur mar- ligion chrétienne et avoir reçu le baptême,
tyre, qui, au jugement des plus habiles ^ ont vivait d'une manière très-édifiante et travail-
le mérite des originaux, quoiqu'ils parais- lait avec beaucoup de zèle à la conversion des
sent n'avoir été écritsque dans le V"^ siècle, autres. Rogatien, son frère aîné, en fut tou-
Ou y lit que Dioclétien et Maximien avaient clié et pria Donatien de lui faire recevoir
envoyé au préfet des Gaules un ordre par lebaptême avant que la persécution éclatât,
écrit de faire mourir tous les chrétiens qui afm qu'elle ne le surprit pas étant encore
persistaient dans la confession du nom de païen ou catéchumène. Mais l'absence de
Jésus-Christ *, ce qui obligerait de reculer le l'évêque, qui s'était enfui, l'empêcha d'être
martyre de ces Saints jusqu'à la grande per- baptisé ne le fut que dans son sang,
', et il
sécution de Dioclétien, arrivée en 303, si l'on Cependant gouverneur qui persécutait les
le
ggj
ne savait que ces empereurs firent mourir chrétiens étant venu dans la ville de Nantes,
plusieurs chrétiens dans les diverses provin- Donatien lui fut déféré, non-seulement com-
ces de l'empire, bien avant leur édit gêné- me chrétien, mais comme détournant les au-
rai contre les chrétiens, en 303 '. D'ailleurs, trèsdu culte des dieux, et particulièrement
quoique ces Actes parlent comme si les em- son frère. Le gouverneur se le fit amener; il
pereurs eussent écrit au préfet des Gaules confessa constamment le nom de Jésus-Christ
contre les chrétiens, cela peut n'être vrai que et fut mis en prison les fers aux pieds. Roga- 2S2.
de Maximien-Hercule, qui était alors dans les tien fut aussi présenté au gouverneur, qui
l
1 Ruinart., Act. sine. Martyr., pag. 279 ; Fleury, ne fut créé césar qu'en 291, et il est certain qu'il ne
lib. VIII lUst. ecctés., pag. 397, num. 19; Tilleniont, voulut pas qu'on condamnât les chrétiens pour leur
tom. IV Hist. ecclés., pag. 733. religion. Voyez Alban Butler, Vies des Saints, notes a "
' Carause était un grand capitaine qui avait eu la et b : les saints Donatien et Rogalien, 24 mars. Le
commission de tenir la mer libre sur les côtes de martyre de ces saints arriva vers l'an 287. [L'édi-
la Belgique et de l'Armorique contre les courses
, teur.)
des Francs et des Saxons, et qui enfin, étant devenu Tillemont, note 3 sur les Actes de saint Sébas-
«
suspect, se révolta et se rendit maître de la Grande- tien, pag. 744, tom. IV Hist. ecclés.
Bretagne, où il subsista sept ans. Fleury, ubi supra, Quod ad prœsens ne susciperet bapfisma, audita
"^
CHAPITRE XXXVI.
saint Maximilien.
recueil des Actes sincères des Martyrs. Fleiiry consul, ot Maximien pour la troisième fois,
l'a aussi insérée tout entière dans son His- c'est-à-dire en 290, excitèrent ime persécu-
toire ecclésiastique ne paraît pas que ni
; et il tion três-violente contre tous les chrétiens,
Bigot, qui nous en a donné le texte grec dans et qu'ils firent publier contre eux des édits.
son Pollade, ni BoUandus, qui Ta fait impri- Néanmoins cette persécution générale ne com-
mer parmi les Actes des saints du 14 mai, mença qu'en l'an 303,à Nicomédie, Dioclétien
aient formé quelques doutes sur sa sincérité. étant consul pour la huitième fois, et Maxi-
Il faut cependant avouer de bonne foi qu'elle mien pour la neuvième fois. Ily a moins de
est bien éloignée de la pureté des Actes ori- difficultédans ce qu'on y lit qu'Aglaé, avertie
ginaux, et qu'elle n'en a ni le mérite ni l'au- de l'arrivée des reliques de saint Boniface,
torité : il y a même certaines circonstances alla les recevoir avec des cierges et des par-
qui paraissent la décréditer entièrement, et fums à cinquante stades de Rome ® ; car il lui
porte le texte grec de ces Actes, qu'Aglaé re- de Jésus -Christ, il ordonna qu'on aiguisât
nonça au monde et distribua ses hiens aux des roseaux, et les lui lit enfoncer sous les
monastères et aux hôpitaux * ; car il est cer- ongles des mains. Boniface regardait le ciel
tain qu'à Rome il n'y avait, dans le IIP siè- et souffrait patiemment. Le gouverneur com-
cle, ni monastères, ni hôpitaux. La confes- manda qu'on lui ouvrit la bouche et qu'on
sion même du saint martyr fait peine, tant y versât du plomb fondu. Avant que l'on en
elle est remplie d'injures et d'invectives =. vint à l'exéculion, Boniface, regardant le ciel.
Voici ce que son histoire contient en su])s- rendit grâces à Jésus- Christ, Fils de Dieu,
tance. lui demanda son secours et pria les martyrs
Analyse 2. Bouifacc était intendant d'une des pre- d'intercéder pour lui. Us prièrent en effet,
lecesActes.
^^^j,^^ dames de Rome, nommée Aglaé, et et, après qu'ils eurent achevé, le peuple se
avait vécu avec elle pendant plusieurs années mit à louer le Dieu des chrétiens et courut
Pag. 284. dans le crime *. Aglaé, touchée de la crainte de renverser l'autel. Le gouverneur, voyant que
Dieu, exhorta Boniface à changer de vie, en l'on en voulait même à sa personne, se leva
lui représentant le compte qu'ils auraient à et se de ce tumulte. Le
retira tout effrayé
rendre à Dieu de ce qu'ils avaient fait de mal lendemain de nouveau présenter
il se lit
en ce monde. Elle lui parla ensuite du désir Boniface le trouvant toujours également
;
qu'elle avait de bâtir des oratoires en l'hon- ferme, il le fit jeter dans une chaudière de
neur des martyrs, et le chargea d'aller en poix bouillante avant d'y entrer, le martyr
:
Orient, où la persécution sévissait alors, afin fit le signe de la croix et en sortit sans avoir
de lui apporter le corps de quelqu'un de ceux reçu aucun mal. Le gouverneur, surpris de
285. qui avaient souffert pour Jésus-Christ. Boni- la puissance de Jésus-Christ et de la patience
face prit de l'or en quantité pour acheter des du martyr, le fit enfin décapiter. Les compa-
reliqui's et pour donner aux pauvres s. Après gnons de son voyage, ayant appris ce qui
quelques jours de chemin, il arriva à Tarse ; s'était passé, rachetèrent le corps de saint
et, sachant qu'il y avait des martyrs qui com- Boniface et le portèrent à Aglaé, qui lui bâ-
battaient, il dit à ceux qui l'accompagnaient: tit une église à deux lieues de Rome.
« Mes frères, allez chercher une hôtellerie et 3. Les Actes de saint martyr à Mar- A'ictor, Les Actes
de saint Vic-
faites reposer les chevaux, je m'en vais voir seille, paraissent beaucoup plus sincères que tor, mnrtyr
à Marseille,
286. ceux que je désire le plus. » Il trouva au lieu les précédents et ^, quoiqu'ils ne soient pas
',
versl'anaSO,
sont sincè-
du combat vingt martyrs que le gouverneur, originaux ', ils sont néanmoins très-bien écrits res.
nommé Simplice, faisait tourmenter par les et dignes de Cassien, à qui on les attribue,
supplices les plus cruels. Boniface, s'appro- ou de quelqu'autre auteur célèbre du Y" siè-
chant de ces martyrs, baisait leurs liens en cle. Du Bosquet les fit imprimer parmi les
criant ; « Qu'il est grand le Dieu des chré- pièces justificatives de son quatrième livre
tiens, qu'il est grand le Dieu des saints mar- de VHïstoire ecclésiastique de France, et c'est
1 Inde per nodem sublalum cum cereis et scholaci- contre l'originalité de ces Actes. Il y a des Actes
bus, ad areas Macrobii. Ruinart., Acta sine. Martyr., originaux qui n'ont pas un style simple et qui ren-
pag. 218. ferment des harangues assez longues, comme ceux
2 Beata autem Aglaes abrenuntiavit mundo et pom- d'Acace, de Taraque, de saint Pione, etc. Voyez Ho-
pis ejus, universa quœ possidelat distribuens eyenis, noré de Sainte-Marie, tom. II, diss. 4, pag. 41. (L'é-
monasteriis et xenodochiis. Ruinart., Act. sine. Mart., diteur.)
^
pag. 291. Le style et les harangues font assez voir qu'ils
> Idem, ibid., pag. 287 et 288. ont été composés à avec étude , et la fia
loisir et
Idem, ibid., pag. 284. marque que c'était assez longtemps après le mar-
* aurum copiosum
Accepit autem puer Bonifacius tyre du Saint. Multis usque in hune diem miraculis
ad comparationem corporum sanctorum, et ad minis- honorantur, multaque bénéficia pie petentibus ipsorum
trationcm egenorum. Ruinart., Acta sine. Martyr., meritis conferuntur per Deum et Dominum nostrum
pag. 285. Jesum Christum. Ruinart., Acta sine. Mart., pag. 299;
« Le style et les harangues ne sont pas une preuve Tillemont, tom. IV, Hist. ecclés., pag. 754.
478 HISTOIRE nÉNl'RALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
de là que Doin Ruiiiart les u tirés pour les tout déchiré et tout sanglant au tribunal des
insérer dans le Recueil des Actes sincères des préfets, qui,lecroyant abattu par cet affront,
Mar/j/rs, ajjrès les avoir revus et corrif^és le pressèrent une seconde fois de sacrifier
qu'il fit ensuite *, se rendit à Marseille, ré- son respect pour l'empereur * et son mépris 29C.
solu d'y exercer toute l'étendue de sa rage pour les faux dieux, dont il fit voir les in-
contre les chrétiens. Le bruit de sa cruauté, famies et leur opposa la véritable grandeur
qui les tenait tous dans l'effroi, n'ébranla de Jésus-Christ. Ensuite, pour confirmer son
point saint Victor. C'était un soldat chrétien discours par son exemple, il ajouta « Je mé- :
exercice et conduit aux préfets, qui l'exhor- nommé Euticius, se retira, laissant la charge
tèrent d'abord à ne pas perdre ses services de tourmenter martyr à Astérius. Celui-ci
le
mort. Victor répondit avec liberté « * que le lement et longtemps. Le martyr, levant les
Seigneur Jésus, du Dieu très-haut, s'é-
Fils yeux au ciel *, demanda la patience au Père
tait à la vérité fait homme
mortel par amour des miséricordes, dont il savait qu'elle est le
pour la nature humaine, qu'il avait même don. Jésus-Christ lui apparut tenant sa croix
été mis à mort par les impies de la manière entre les mains, hii donna la paix, l'assura
que lui-même avait désirée; mais que, par que qui souffrait dans ses saints
c'était lui
sa vertu toute divine, il était ressuscité le et qui les couronnait après la victoire. Ces
troisième jour et ensuite monté au ciel, où paroles firent évanouir toutes les douleurs
il avait reçu de son Père un royaume iné- du martyr, et les bourreaux s'étant lassés de
branlable. » A ces paroles, les assistants je- le tourmenter, enfermer dans
le préfet le fit
tèrent des cris furieux et accablèrent d'inju- un cachot très-obscur. Mais, au milieu de la
res le saint confesseur; mais comme c'était nuit, Dieu y répandit, par ses anges, une lu-
un homme de considération, les préfets ren- mière plus brillante que celle du soleil, et ou-
voyèrent sa cause à César. Victor le confon- vrit la prison. Les gardes , nommés Alexan-
dit par sa sagesse et sa fermeté, en faisant dre, Longiu et Félicien, voyant ce prodige,
voir clairement la vanité des idoles et la di- se jetèrentaux pieds du Saint pour lui de-
594.
vinité de Jésus-Christ '. L'empereur, irrité de mander pardon et en même temps le baptê-
ses discours, le fît traîner dans la boue avec me. Le martyr les instruisit soigneusement,
des cordes par toutes les rues de la ville, à selon que le temps le permettait, et, ayant
la vue de toute la populace, et reconduire fait venir des prêtres la même nuit % il les
1 Maximianus cum pro Sanctorum sanguine, quem nos ab illis eriperet non suam minuens deitatem,
per totum orbem crudelius aliis, maximeque per totas sed nostram vestiens humanitatem, inter nos Deua
Gallias recentius fuderat, et preecipue pro famosissiina permanens, homo factus apparuit. Ibid., pag. 295 et
illa Thebœorum apucl Agaunum cœde, nostrovurn plur- 296.
rimis nimium terribilis fadus, M'issiiiam advenisset, * Tum martyr de primo jam impetu plene vicior et
etc. Ruinart., Acta sine. Martyr., pag. 292 et 293. Sancti Spiritus factus oraculum, imperterrilo et infa-
* DomiDum antem Jesum Cbrislum AUissimum tigabili anima, Deo confortante, persistens ad hune mo-
Dei Filium pro charitate restaurationis humanae vere dum concionatus, ait: etc. Ibid., pag. 294.
quidein hominein fuisse mortalem, et ah impiis, se ^ Quo facto, cum diutius acerrime torqueretur, attol-
volente, occisum, sed divinae suae virtulis polentia lens in cœlum lumina, piam tolerantiam a misericor»
die tertia suscitatum, cœlos ascendisse, et a Deo Pâ- dissimo Pâtre Deo, cujus id esse donum noverat, pre-
tre regnum super omnia stabile suscepisse. Ruinart., cabatur. Idem, ibid., pag. 297.
Acta sine. Martyr., pag. 293. * Milites ergo claritatem tanti cémentes fulgoris,
lUum sane quanta veneratione dignum est ado-
* ad pedes Sancti, cernui proctdunt, veniam flagitant,
rare, qui cum inimici essemus, prior nos dilexit; baptismum petunt. Quos pro tempore diligenter ins'
qui et deorum turpimu nobis fraudes aperuit, et ut tructos, adscitis sacerdotibus , ipsa nocte ad mare
,
mena à la mer, où ils furent baptisés : lui- risbery, avec les Actes de sainte Perpétue ;
même les retira de Teau, c'est-à-dire qu'il fut puis dans le quatrième tome des Analectes
leur parrain, et il retoui*na ensuite à la pri- de Dom Mabillon, et ensuite dans le Recueil
Pag. 298. son. Le lendemain matin. Maximien, Infor- des Actes sincères de Dom Ruinart, qui a re-
méde la conversion des gardes, en fut extrê- vu et corrigé ceux-ci sur un manuscrit de
mement envoya des appariteurs qui
irrité; il l'abbaye du mont Saint-Micbel.
les prirent avec Victor et les amenèrent tons 6. Ces Actes portent que sous le consulat , Analyse
de ces Actes.
quatre à la place publique, où presque toute de Tuscus et d'Anulinns, le 12 mars de l'an
Saint Ma-
la ville accourut. Les trois gardes persévé- 295, ù Tbébeste en Numidie, Fabius Victor ximilien
gonllrit en
rèrent dans la confession de Jésus -Christ fut présenté, avec son fils Maximilien, au pro- 295.
et eurent sur-le-cbamp la tête tranchée par consul Dion *. Pompéien, avocat, demanda Pai:-300.
ordre de l'empereur. Victor priait Dieu avec qne ce jeune homme fût mesuré pour être
larmes qu'il put être le compagnon de leur engagé au service des empereurs, dans les ar-
martyre ; mais, après l'avoir tourmenté de mées; car, chez les Romains ^, tous les jeu-
nouveau à coups de bâton et de nerfs de nés gens étaient obligés de servir un certain
bœuf, on le remit eu prison, où il demeura nombre de campagnes; et, sur le grand nom-
trois jours en prières, recommandant à Dieu bre de ceux qui étaient en âge, on choisissait
son martyre avec une grande componction l<'s plus grands et les mieux faits. Le pro-
de cœur et aussi beaucoup de larmes. Ensuite consul Dion lui demanda comment il s'appe-
l'empereur le fit encore amener devant lui, l^^it. Maximilien répondit Pourquoi vou- : «
et, ayant fait apporter un autel et préparer lez-vous savoir mon nom?
ne m'est pas Il
I le sacrifice, il commanda au martyr d'offrir permis de porter les armes, parce que je
de l'encens à Jupiter. Victor, animé de l'es- suis chrétien. » Ce n'était pas précisément la
prit de Dieu, s'approcha de l'autel et le ren- profession des armes que les chrétiens reje-
versa d'un coup de pied. L'empereur lui fît talent ^, mais l'idolâtrie qui en était insépa-
couper le pied aussitôt *, puis il fit mettre rable. Après les ordres quu Dioclétien venait
Victor sous la meule d'un moulin ambras, que de donner, comme on voit en d'autres Actes,
les bourreaux firent tourner. Comme ils corn- le proconsul dit «Appliquez la mesure. »
;
mençaient ainsi à l'écraser et à lui briser les Maximihen reprit «Je ne puis porter les ar-
:
os, la machine se rompit, et, le Saint respi- mes, je ne puis mal faire: je suis chrétien. »
rant encore, on lui trancha la tête et on jeta H fut néanmoins mesuré, par ordre du pro-
son corps dans la mer avec les corps des au- consul, et on trouva qu'il avait cinq pieds
très martyrs. Mais ils revinrent au rivage, et dix pouces, selon la mesure des Romains,
les chrétiens les enterrèrent dans une roche plus petite que la nôtre, et que c'était une
que l'on avait creusée et où Dieu les rendit grandeur suffisante pour être enrôlé. Ainsi
célèbres par plusieurs miracles. le proconsul commanda qu'on le marquât
Actes fln 5. Les Actes de saint Maximilien ont , de comme on avait coutume de marquer tous
martyre de
saint Maxi- l'aveu des plus habiles critiques ', tous les les soldats, savoir, par des piqûres sur la
railien. Ils
sont sincè- caractères d'une pièce entière et originale, et peau \ ou de quelqu'autre manière qui ne
»t8.
l'on convient que, y a quelques endroits
s'il put s'effacer. Maximilien résistait en disant :
obscurs, c'est ou parce qu'il y a faute dans « Je n'en ferai rien; je ne puis porter les
le texte, ou parce que nous ne savons pas as- armes je ne sers point le siècle ®, je sers
:
sez l'antiquité ^. Ces Actes ont été d'abord mon Dieu. » Dion lui demanda qui lui avait
imprimés à Oxford, sur un manuscrit de Sa- mis cela dans l'esprit, et il lui répondit :
Cœsaris amputatum, Deo et régi suo Domino Jesu s'engager aussi dans les armes. Tillemont, ubi supra.
Christo, velut quasdam suaveolentes primitias intérim s Fleury, tom. II Hist. ecclés., lib. VIII, num. 23,
mi corporis dedicavit. Ruinart., Acta sine. Martyr., pag. 406.
pag. 299. 6 Idem, ibid. — ''
Tillemont, ubi supra, pag. 562.
" Tillemont, tom. IV Hist. ecclés., pag. 561; Mabil- 8 Non milito saeculo sed milito Deo meo. Ruin.,
;
lon, tom. IV Analect., pag. 666; Ruinart., Acta sine. Acta. sine. Martyr., pag. 300.
480 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
« C'est moi-même, et celui qui m'a appelé à paiement sous des empereurs païens. Dion,
la foi •. » Dion dit à Viotor de porter son fds voyant qu'il ne pouvait le persuader, fit effa-
à l'aire son devoir; mais il répondit : « 11 sait cer son nom du registre et le condamna à
bien ce qu'il a à faire et ce qui lui est bon. » être puni par le glaive. Maximdien, en en-
Le proconsul voulait l'obliger à recevoir une tendant prononcer sa sentence, s'écria « Dieu :
manjue de plondj que l'on portail au cou et soit loué! » Il était âge de vingt-un ans trois
Pag. 301. qui était comme le sceau de la milice. Ma- mois et dix-huit jours. Comme on le condui-
ximilien la refusa, et dit : « Je ne recevrai saitau supplice, il dit aux chrétiens qui l'ac-
point la marque du siècle; si vous me la compagnaicnt: «Mes chers frères, hâtez-vous
donnez, je la romprai, parce qu'elle ne vaut de toutes vos forces et avec tout l'emprcsse-
rion : ne m'est pas per-
je suis chrétien, et il ment possilde d'aller voirie Seigneur et d'ob-
mis de porter du plomb à mon cou *, après tenir de lui une couronne pareille à celle que
le signe salutaire de Jésus-Christ, Fils du je vais recevoir » 11 dit à son père, avec un
'.
Dieu vivant, que vous ne connaissez point. » visage gai « Donnez à cet exécuteur l'ha-
:
Le proconsul lui représenta qu'il y avait des bit neuf que vous m'aviez fait préparer pour
soldats chrétiens dans les troupes ' et même la guerre : ainsi puissions-nous être bientôt
à la cour des quatre princes qui régnaient ensemble dans la gloire avec le Seigneur. »
alors, Dioclétien et Maximien, Constance et Aussitôt il fut décapité. Une dame ®, nommée
Maxime. « Ils savent^ répondit Maximilien, Pompéienne, obtint son corps du juge et le
ce qui leur est utile; pour moi, je suis chré- fit porter dans sa litière à Carthagc où elle ,
tien et je ne puis faire de mal. » « Quel — l'enterra près de saint Cyprien, sous une pe-
mal font ceux qui servent? » dit le proconsul. tite montagne. Elle mourut treize jours après
Maximilien répondit « Vous savez ce qu'ils
: et y fut aussi enterrée. Victor, père du mar-
font. » On voit par là * qu'il ne refusait pas tyr, retourna chez lui plein de joie, louant
le service de guerre comme mauvais par lui- Dieu de ce qu'il lui avait fait la grâce de lui
même, mais â cause des occasions où l'on offrir un tel lui-même, peu de
présent. Il fut
était de pécher dans cette condition, princi- temps après, réuni à son fils par le martyre.
CHAPITRE XXXVU.
[Martyre de sainte Stratomie et de Séleucus, son époux, à Cyzique
» en Mysie ; et du saint prêtre Eusèbe.
vait sous Constantin et qu'il parle de l'é- Alors, quittant précipitamment sa place et
glise bâtie par ce prince sur le tombeau de fendant la presse, seule et sans suite, Stra-
ces martyrs. Voici la substance de son récit, tomie va se jeter sur les corps des martyrs,
qui est des plus touchants. qu'elle embrasse avec larmes, en priant le
Analyse 2. Durant l'atroce persécution de Maxi- Sauveur de la réunir à eux et de lui accor-
de ces Actes.
mien-Galère, un faraud nombre de chrétiens der la grâce de mourir pour son nom.
de tout âge, de toute condition et de tout 4. A cette nouvelle, Apollonius, son père, Snife de
l'analyse.
sexe furent conduits à Cyzique pour y subir accourt sur le lieu de l'exécution, en proie à
les plus afFrcux tourments. On les suppliciait une vive douleur et éclatant en lamentations;
aux pieds des murailles de la ville, et la foule, à quoi la nouvelle chrétienne ne répond que
du haut des remparts, les regardait mourir. par les sentiments de rattachement le plus
La fille du préfet nommée Stratomie mariée , ferme au Dieu qu'elle vient de connaître. Ce-
à un des jeunes gens les plus distingués du pendant le juge fait jeter à la mer les corps
lieu, y vint elle-même avec ses esclaves et ses des Saints, et la jeune femme est ramenée
suivantes : le spectacle dont elle fut témoin la de force à la maison paternelle.
frappa profondément et l'impressionna vive- Là, retirée seule dans ses appartements,
ment. Surprise de la constance et de la joie des elle passa la nuit en prière : « Seigneur Jé-
martyrs, elle s'entretenait avec ses suivantes m'abandonnez pas, puis-
sus, disait-elle, ne
de ce prodige étonnant, demandant quelle que j'ai cru en vous. » Le Seigneur, en effet,
pouvait être la cause de leur bonheur au mi- l'exauça, et un ange éclatant de lumière vint
lieu des tortures, et quel était ce Jésus qu'ils lui apporter ces paroles de consolation : « Cou-
invoquaient à leur dernier soupir? rage, Stratomie, après les tourments des mar-
Suite de 3. Un jeune chrétien qui entendait ses dis- tyrs, la gloire des saints. » Dès le lendemain
r«Dalyse.
cours s'approcha d'elle et lui parla des espé- son père vint la trouver avec
et la supplia
rances immortelles et de la vie bienheureuse larmes de changer de sentiments ; mais, tout
réservées à ceux qui souffrent pour Jésus- étant inutile, sa douleur se convertit en fu-
Christ. Stratomie demanda qui lui révélerait reur, et il alla trouver le juge.
cette vie éternelle et glorieuse; et le jeune Stratomie voulut profiter de son absence
homme de lui apprendre que tout ceci lui pour aller visiter le lieu où étaient morts les
sera manifesté par la foi au Sauveur crucifié martyrs; mais voici qu'à la porte de la ville,
pour nous. Stratomie écoutait avec attention, elle rencontre Séleucus entouré de ses amis;
et pendant ce temps la grâce agissait effica- elle s'élance vers lui et s'écrie : « Séleucus,
cement sur son cœur. Tout- à- coup elle se mon frère, je t'invite à une vie nouvelle. »
II. 31
48îi IIISÏOIUE GÉNÉRALE DES AUTEUUS 1<:CCLÉSIASTIQUES.
Elle lui dcveloppo avoc chaleur ce qu'elle sait saison des chaleurs excessives, et leur rési-
(le Jésus- Christ, Dieu et Sauveur des chré- gnation, leur courage ravit tout le monde.
tiens, et du bonheur réservé à ceux qui l'ai- Le lendemain, le juge, après de nouvelles
ment, suppliant en même temps le Seigneur tentatives pour les amener à l'apostasie fit ,
d'éclairer son époux. Voyant qu'il commetice allumer du souffre, afin de les étouffer sous
à être ébranlé, elle lui prend la main et le son odeur infecte; mais, par un miracle ad-
conduit à l'endroit où avaient triomphé les mirable, ne se répandit autour des mar-
il
martyrs, et là elle conjure avec larmes le Ciel tyrs qu'un suave parfum. En vain le juge
de lui être propice, confondu les fit-il rouler sur des lames rou-
sniie de 5. A du iuqre auff-
CCS nouvcllcs, la colère gies au feu; ces lames se refroidirent immé-
menta, et il résolut d employer les tortures diatement, et triomphè-
les saints conl'esseurs
contre Stratomie. Cependant son père ob- rent. La
foule cria au miracle; mais le magis-
tint un délai de sept jours; alors Apollo- trat endurci, attribuant tout à la magie, fit
nius épuisa tout ce que lui purent suggérer frapper Séleucus et Stratomie de la façon la
l'amour paternel et l'indignation de se voir plus cruelle. Puis on les reconduisit en pri-
méconnu. La jeune héroïne résistait à tout : son, où ils restèrent trois jours sans nourri-
vous restez l'esclave des faux dieux, di-
« Si ture; mais l'auge du Seigneur les assista et
sait-elle, je serai obligée de vous méconnaî- les consola.
tre; Jésus-Christ me tiendra lieu de tout; sa Le quatrième jour, quand on alla les voir,
force me soutiendra dans mes épreuves, et on fut grandement surpris de les trouver en-
j'espère en triompher par lui. » tièrement guéris et chantant des psaumes.
On l'enferma, avec Sélcucus, dans une Le juge croyait qu'un médecin s'était intro-
chambre obscure; on envoya des dames de duit auprès d'eux à la dérobée; mais le geô-
sa connaissance pour essayer de la gagner, lier et les gardes jurèrent que personne n'é-
pendant que les amis de son époux travail- tait entré; il voulut interroger lui-même les
laient à le séduire : tout fut inutile. Ils pas- prisonniers « Le médecin qui nous a gué-
:
sèrent en prières ferventes la nuit qui suivit; ris, lui dit Stratomie, est Jésus-Christ même,
im ange vint les encourager. Puis les portes c'est lui qui nous a sauvés miraculeusement;
de leurs appartements s'ouvrant d'elles-mê- et quel homme l'eût pu faire? » Alors on sus-
mes, ainsi que celles de la ville, ils allèrent, pendit au chevalet les glorieux confesseurs,
conduits par un guide mystérieux, à l'en- et durant trois heures les ongles de fer dé-
droit où avaient péri les martyrs et c'est là ; chirèrent leurs corps, sans qu'une plainte
qu'on les trouva prosternés le lendemain. Le s'échappât de leurs lèvres, au point que tous
juge furieux demanda qui leur avait frayé étaient dans l'admiration. « Il semble que
les issues? « C'est Jésus-Christ, » reprit Stra- vous ne souffrez pas, » dit le juge à Stra-
tomie, et, s' adressant à tout le peuple, elle tomie. « Non, répondit celle-ci, l'espérance
exposait avec chaleur les miracles du Sau- d'un bonheur futur, d'autant plus grand que
veur, citant les saiiites Ecritures au grand
, vous m'aurez tourmentée davantage, m'em-
étonnement du magistrat qui savait qu'elle pêche de sentir la douleur. » — « Vous êtes
ne les avait jamais lues. Elle se riait des me- ivre, » continuait le magistrat. « Oui, je le
naces et bravait les tortures. Rempli d'une suis, non de vin, comme vous dans vos or-
nouvelle colère, le juge ordonna de l'étendre gies, mais de l'amour de Jésus-Christ, dont
sur le chevalet, où l'on fit voler sa chair en ime seule goutte a suffi pour emtlammer mon
lambeaux. Après avoir essayé d'ébranler Sé- âme. Oui, nous foulons aux pieds les édits de
leucus, il le livra aussi aux bourreaux mais, ; vos empereurs et nous rions de vos dieux. »
à la vue d'un supplice atroce et honteux pour 7. A ces mots le juge, plus furieux, voulait s„i,e a,
''"*'?»«•
une personne de sa condition, le jeune athlète lui faire arracher la langue , mais le peuple
commença à trembler. Stratomie lui saisit l'empêcha. Cependant on conduisit les mar-
la main et lui cria d'invoquer Jésus -Christ : tyrs dans un temple pour leur faire brûler
« Seigneur Jésus, dit le martyr, assistez- de l'encens aux dieux; mais ils se moquè-
moi. ))Et en même temps un ange parut à ses rent des idoles, ce qui augmenta la colère du
côtés, qui le fortifia. juge, qui, croyant prendre Stratomie par le
Suite de 6. Quand le suppHee fut terminé, on les re- côté sensible, la menaçait de la faire défigu-
analyse,
1
conduisit cu prisou, où il fut défendu de leur rer : « La beauté sans la vertu est toujours mé-
donner des rafraîchissements ; or, c'était la prisable, répondit-elle; mais, avec la vertu,
[iii« siÈCLE.l CHAPITRE XXXVII. — SAINTE STRATOMIE ET SAINT SÉLEUCUS. 483
on et toujours belle. » Alors on leur appliqua y conduisit Stratomie et Séleucus, accompa-
des lampes ardentes aux côtés; mais les mar- gnés d'une multitude innombrable. Au mo-
tyrs ayant invoqué Jésus-Christ, les lampes ment où l'on mettait le feu, les saints martyrs
I sans qu'il fût possible de prièrent Jésus-Christ de faire encore
s'éteignirent les une fois
rallumer. Le tyran^ confondu, les lit de nou- éclater sa puissance; et voici qu'à l'instant
veau étendre sur le chevalet, et on les frappa la terre tremble , le tonnerre gronde, et une
jusqu'à ce que leurs corps ne fussent plus pluie de feu consume en un instant les bû-
qu'une plaie. Puis on les renferma en pri- chers, les bourreaux et les plus proches des
son, où ils furent mis aux fers et où ils res- spectateurs. Mais,au milieu des flammes, les
tèrent durant cinq jours, sans qulls pussent martyrs semblaient se jouer comme les pois-
recevoir aucun rafraîchissement, malgré les sons au sein des ondes; les anges vinrent les
chaleurs excessives. protéger et les conserver sains et saufs. Le
Pendant ce temps on cherchait par quel peuple s'écria : « Il est seul grand le Dieu
nouveau supplice on pourrait les tourmenter; des chrétiens; » et beaucoup se convertirent.
on fît venir leurs parents pour savoir d'eux Le juge découragé renvoya la cause des
9. y,,;,, ^e
ce que les deux confesseurs avaient le plus confesseurs à l'empereur, qui ordonna de les ''"""'J''^-
douces mélodies sortir de la tombe, et les ma- recevez mon àme, » elle reçut le coup moi'tel.
lades sont guéris en respirant l'odeur déli- Séleucus expira eu disant les mêmes paroles.
cieuse. Quand, au bout de sept jours, on retira Quand le juge fut rentré dans la ville, le
les confesseurs, ils étaient souriants et ra- peuple se précipita en foule sur les corps des
dieux, la foule immense se pressait sur leurs Saints, répandant sur eux des larmes et des
pas en chantant : « Il est grand le Dieu des chré- parfums. On les ensevelit avec honneur dans
tiens ; » et plusieurs païens se convertirent, le même tombeau; Constantin y fit dans la
Suite de 8. Mais le juge, toujours aveuglé par la suite bàtii" une église.
l'analyse
passion, résolut de hvrer les confesseurs à un
ARTICLE II.
nouveau et dernier supphce dont le Christ,
vince, informa contre Eusèbe, qui se distin- tous vos tourments. » Le juge, désespérant de
guait entre tous par son zèle à invoquer et le vaincre, le condamna à être décapité. En
à prêcher Jésus-Christ. Ni les promesses, ni écoutant sa sentence, Eusèbe s'écria « Sei- :
les menaces ne purent l'ébranler. Sa cons- gneur Jésus, je rends grâces à votre bonté
tance au milieu des supplices étonna le ju- et je loue votre puissance de ce qu'en met-
ge, qui le fit remettre en prison jusqu'au len- tant ma ù l'épreuve vous me traitez
fidélité
demain. L'empereur, l'ayant fait paraître comme un de vos disciples. » Il entendit en
devant lui, sembla remarquer dans le Saint même temps une voix du ciel qui di.sait « Si :
quelque chose de divin. Eusèbe garda d'a- vous n'aviez été trouvé digne de souffrir,
bord le silence ; mais comme l'empereur le vous n'auriez pu être admis dans la cour
pressait de parler, il déclara qu'il était chré- du Roi céleste, ni vous asseoir au milieu des
tien et qu'en cette qualité, ne pouvait pas il justes. » Etant arrivé au lieu de l'exécution,
adorer du bois ou de la pierre. Le prince, il se mit à genoux et eut la tête tranchée.
malgré son caractère féroce, ne voulut pas C'est ce saint Eusèbe qui est nommé le
être son juge, et il le renvoya à Maxence, en \A août dans les anciens Martyrologes qui
lui ordonnant de le juger selon les régies de portent le nom de saint Jérôme.]
CHAPITRE XXXVlll.
[L'an 298.]
Les Actes i . On met communément le martyre des tenant cette fête pour profane et supersti-
de' saints
Marcel et saints Marcel et Cas.sien en 298 •, sous le con- tieuse, quitta la ceinture militaire devant les
Cassien,
marlyis, en sulat de Faustus et de Gallus. Leurs Actes, enseignes de la légion, et dit à haute voix :
qu'ils souffrirent à Tanger, en Mauritanie, Il jeta aussi son sarment de vigne ' et ses
aujourd'hui capitale d'uue province du royau- armes, et ajouta : « Je ne veux plus combattre
me de Fez, appelée Habata. Voici ce qui don- pour vos empereurs : jeméprise vos dieux de
na occasion à leur martyre. bois et de pierre, qui sont des idoles sour-
Analyse 2. Le jour de la naissance de l'empereur des et muettes. Si l'on ne peut porter les ar-
/les Acteî (le
saint Mar- Maximien-Hercule, pendant que tout le mon- mes sans aux dieux et aux empe-
sacrifier
cel.
de était occupé aux festins et aux sacrifices reurs 'abandonne le sarment et le baudrier,
*, j
Paf . 302,
Marcel, centenier dans la légion de Trajan, et je renonce au service. » Les soldats, surpris
* Ruinart., Acfa sine. Martyr., pag. 30î; Floury, des centurions. Car ils s'en servaient pour châtier les
Hist. ecclés., tom. II, lib. VIII, num. 27, pag. 412; soldats et ne les frappaient point autrement. Fleury,
-
Tillemont, Ihst tom. IV, pag. 769.
ecclés., ubi supra.
' Et pourtant il y a des paroles un peu rudes pro- * Si talis est conditio militantium, ut diis et im-
noncées par les martyrs! [L'éditeur.) peratoribus sacra facere compellanlur, ecce projicio
3 La ceinture où pendait l'épée était la marque vitem et cingulum; renuntio signis, et militare ré-
de la milice, et le sarment de vigne était la marque cuse. Ruinart., Acta sine. Martyr,, pag. 303. On voit
[m" SIÈCLE.] CHAPITRE XXXVIII. — SAINT MARCEL ET CASSIEN. 485
d'entendre Marcel parler ainsi, l'arrêtèrent aveu, il fut condamné à avoir la tête coupée,
et en donnèrent avis à Anastase Fortunat, et mourut ainsi pour le nom de Jésus-Christ ».
président de la légion, qui le fit mettre en 3. Cassien servait de greffier dans l'inter- An alyse
des Actes ds
prison. Lorsque la fête fut finie, Fortunat, as- rogatoire de saint Marcel. Mais quand il vit saint Cas-
sien.
sis dans son consistoire, se fit amener Mar- qu'Agricolaûs, vicaire des préfets du pré-
P.ig. 304
cel et lui demanda pourquoi, contre l'ordre toire, vaincu par la constance du martyr, et 303.
légion, que j'étais chrétien * et que je ne répondit Cassien, que vous avez dicté une
pouvais plus servir que Jésus-Christ, Fils de sentence injuste. »Le juge, craignant qu'il ne
Dieu le Père tout - puissant. » Fortunat dit lui dit encore quelque chose de plus fort, le
qu'il était obligé d'informer de sa témérité fit aussitôt prendre et mettre en prison. Saint
les empereurs et Constance de qui l'Espa- Marcel, qui avait ri de joie, connaissant, par
gne dépendait; en même temps il le fit me- la lumière du Saint-E.sprit, que Cassien serait
ner sous bonne garde dans la Mauritanie bientôt son compagnon dans le martyre, fut
Tingitaine, devant Aurélien Agricolaùs, vi- exécuté le même jour, 30 octobre. Un mois
caire des préfets du prétoire ^. Agricolaùs, in- après, le 3 décembre, Cassien fut ramené au
formé par une lettre de Fortunat de l'affaire même endroit où saint Marcel avait été inter-
de Marcel, lui demanda s'il était vrai qu'il rogé ; on lui fît à peu près les mêmes deman-
eût jeté la ceinture militaire et prononcé des '; il fit les mêmes réponses et obtint, com-
plusieurs blasphèmes, en présence de tout le me lui, la couronne du maityre, soutenu
Pag. 304. monde, contre les dieux et contre César. Mar- qu'il était par le secours puissant de Notre-
cel répondit affirmativement *, et, sur son Seigneur Jésus-Christ.
et sacramento huic militare non posse nisi Jesu tom. IV Hist. ecclés., pag. 576 et 577.
Christo Filio Dei Patris. Ruinart., Acta sine. Martyr., 6 Ruinart., Acta sine. Martyr., pag. 304 et 305.
^
pag. 303. Tertio nonas deeembris die, in eodem loco in quo
* Régulièrement, le préfet de la légion devait ju- Marcellus fuerat auditus introductus est, et iisdem
,
ger les soldats sans les renvoyer au gouverneur de fere responsionibus, iisdemque sententiis, quibus sane-
la piovince mais le préfet du prétoire, dont Agri-
: tus Marcellus, triumphuni meruit obtinere martyrii
colaùs tenait la place, avait jurisdiction sur les gens adjuvante Domino nostro Jesu Christo. Ruinart., Acta
de guerre. Fleury, ubi supra. sine. Martyr., pag. 305.
* Projeci. Non enim decebat christianum hominem
CHAPITRE XXXIX.
ArnoLe orateur*.
par quelques songes ' de renoncer aux su- Arnobe écrivit ses livres contre les Païens. composa ses
écrits.
perstitions païennes *, il les quitta entière- Quelques savants ont cru que ce fut en 297;
ment pour suivre la vérité de l'Evangile, que ils se fondaient sur ce que, dans son second
Jésus-Christ lui-même lui avait fait coniiaitre, hvre, il compte 1050 ans depuis la fondation
ainsi qu'il l'assure dans ses écrits ^. de Rome jusqu'au temps auquel il écrivait '";
11 reçoit 2. Quoique sa conversion fût très -sincère, ce qui revient, disent-ils, à l'an 297 de Jésus
le baptême,
écrit contre cependant, comme il avait toujours déclamé Christ. Mais cette preuve ne paraît pas bien
la religion
des païens. contre la religion chrétienne dans les écoles solide; car, outre qu'Arnobe ne détermine
pubhques ®, l'évêque de Sicque ne voulut point pas en quelle année précisément Rome fut
l'admettre au baptême avant qu'il n'eût ren- bâtie, et qu'il n'en marque le temps que
du un témoignage public de la foi qu'il venait d'une manière incertaine, il ne dit pas non
d'embrasser et qu'il avait autrefois combat- plus quelle époque suivaient les auteurs des
tue. Pour lever cet obstacle, Arnobe, qui dé- annales de la ville de
qu'il cite et sur Rome
sirait avec empressement être baptisé, com- l'autorité desquelles fonde sa supputation; il
posa aussitôt plusieurs écrits également pleins ce qu'il serait cependant nécessaire de sa-
de force et d'esprit ', dans lesquels il fit voir voir, puisqu'il y a plusieurs chronologies dif-
clairement le ridicule et l'impiété de la reli- férentes, comme celles de Varron, de Caton et
gion païenne. Sur ces témoignages, l'évêque de Fronton. Il y a plus : si Arnobe avait mis
lui accorda la grâce qu'il demandait, et le au jour ses avant l'an 300, il n'aurait
écrits
reçut dans le seiu de l'Eglise. Il fut même pas fait dire aux païens « Il y a quatre cents
:
élevé dans la suite aux ordres sacrés, si l'on ans, la religion chrétienne ne subsistait pas
en Trithème *. Mais aucun des anciens
croit encore *'. » Il est bien plus vraisemblable
qui ont parlé d' Arnobe ne dit rien de cette qu'Arnobe ne composa ses livres (ju'au com-
circonstance, ni de tout ce que fit cet orateur mencement du IVe siècle
, dans le temps de
depuis son baptême. Son nom a été célèbre lapersécution de Dioclétien, vers l'an 303.
dans toute la postérité, soit pour ses écrits, Car il parle de cette persécution en des ter-
soit pour avoir été le maître de Lactance, mes si clairs, qu'on ne peut douter qu'elle ne
celui des Pères latins qui a écrit avec plus fût déjà allumée dans le temps qu'il écrivait.
* On l'appelle aussi Arnobe l'Ancien, pour le dis- * Hieronym., in Chronic., ad ann. 20 Constantin.
tinguer d'Arnobe Jeune, qui vivait dans ' Idem, ibid.
le le V» siè-
cle. (L'éditeur.) * Tritbem., lib. de Script. Eccles., cap. 53.
* Hieronym., in Catalogo, cap. 79. 9 Hieronym., Epist. 49 ad Paulin.
* Dieu employait alors souvent les songes et les '* JUtatis urbs Roma cujus esse in annalibus indici-
visions pour opérer les conversions. Voyez Doddwel, tur? Annos ducif quinquaginta et mille, avt non mid-
diss. 5 sur les Epltrei de saint Cijprien. ( L'éditeur.) tum ab his minus. Arnob., lib. II, pag. 459, tom. III
* Hieronym., in Chronic, ad ann. 20 Constantin. Biblioth. Patr. Lugdun.
» Arnob., tom. III Bibhoth. Pair., pag. 436. 11 Idem, ibid.
,
ff Pourquoi, dit-il, en s'adressant aux païens *, parce que vous rendez les honneurs divins à
avez-vous brûlé nos Ecritures? Quelle raison un homme mort sur une croix. Arnobe ré-
avez-vous eue de renverser si inhumaine- pond «Les dieux du paganisme sont donc
:
ment nos lieux d'assemblées?» Or, c'est pré- envieux et jaloux, puisqu'ils trouvent mau-
cisément ce qui arriva dans la persécution vais qu'on accorde à un autre des honneurs
de Dioclétien; car la dix-neuvième année du qu'ils ne reçoivent eux-mêmes que parce
règne de ce prince , 302^ de l'ère vulj^aire qu'on a bien voulu les leur accorder, sans
on publia un édit * « par lequel il était or- qu'ils les aient mérités auparavant, et les
donné de démohr les églises, de brûler les païens sont injustes, en ce qu'adorant des
livres saints et de priver les officiers de leurs hommes qui ont été sujets à toutes les infir-
charges. » Eusèbe, qui en rapporte la teneur, mités humaines, ils trouvent à redire que les
dit en avoir vu l'exécution de ses propres chrétiens adorent Jésus -Christ, qui leur a
yeux. , fait infiniment plus de bien qu'ils n'en ont
Analyse 2. Nous n'avons que sept livres d'Arnobe jamais reçu de leurs dieux. Le supplice de Pag.43c.
contre les Gentils, et on convient qu'il n'en la croix ne donne aucune atteinte à la gloire
Pag. 431. composa pas un plus grand nombre '. Dans de Jésus-Christ; l'ignominie de cette mort ne
le premier il reconnaît sans peine que, si la diminue en rien l'éclat de ses discours ni de
religion chrétienne était la cause de toutes ses actions; au surplus il l'a endurée, non
les calamités publiques, comme le disaient pour l'avoir méritée, mais par la cruauté
les païens , ce serait une preuve de sa faus- de ceux qui l'ont fait mourir. » Enfin, pour
seté. Mais il leur voir en même temps
fait mettre la mort de Jésus -Christ à couvert de
que rien n'était plus faux que cette accusa- tous reproches, Arnobe rappelle aux païens
tion ,
puisque tous les fléaux dont ils reje- la mort que l'on fit souffrir à Aghus, à Tré-
taient la cause sur le mépris de leurs dieux, bonius, à Régulus et à plusieurs autres per-
s'étaient fait sentir longtemps avant l'éta- sonnages illustres du paganisme; ces morts,
432. blissement de la religion chrétienne. Il ajoute bien que honteuses en elles-mêmes, n'a-
que l'on remarquait au contraire que, depuis valent cependant apporté aucune tache à leur
la prédication de l'Evangile, ces calamités réputation.
433. étaient moins fréquentes. Au reste, s'il était Arnobe prouve ensuite la divinité de Jésus- 437.
vrai que les chrétiens fussent la cause des Christ 1" par le grand nombre de miracles
:
guerres, des famines et autres fléaux sem- qu'il a faits, non avec le secours de la magie,
blableSjils auraient dû, depuis trois cents comme quelques-uns avaient l'impudence de
ans ou environ que la religion chrétienne est le soutenir, mais par sa propre puissance;
établie, ressentir tous ces maux sans aucune ilguérissait les maladies les plus incurables
interruption. « A moins, dit-il, en s'adressant par une seule parole, chassait les démons des
aux païens, que vous ne vouliez faire de vos corps de ceux qui étaient possédés, ressusci-
dieux des dieux de théâtre, qui se fâchent et tait les morts et opérait une infinité d'autres
s'apaisent dans le moment, et qui s'irritent merveilles impossibles aux hommes; 2° par
ensuite au souvenir des injures qu'on leur a la rapidité avec laquelle sa doctrine s'était
'
faites, sans prendre garde qu'ils les avaient répandue dans tout le monde, quoiqu'il n'eût
pardonnées, ce qui ne saurait convenir à un employé à cet eflet que des gens sans lettres
434. véritable Dieu. » De là il conclut que c'est et de la lie du peuple; mais, observe Arnobe,
donc fort injustement que l'on persécutait il leur avait donné le pouvoir de parler les
les chrétiens, attendu qu'ils n'adoraient point langues de toutes les nations, et de faire en
d'autre Dieu que le souverain créateur de son nom toutes sortes de prodiges.
toutes choses, infini, éternel, incorporel, et Les païens niaient tous ces faits; ils di- ^gg^
qui existe avant toutes les fausses divinités, saient que les livres des chrétiens où ils sont
sans être resserré dans l'espace d'aucun lieu, rapportés, avaient été composés par des liom-
435. Mais, disaient les païens, ce n'est point mes grossiers et ignorants, qui n'avaient pas
pour adorer un Etre souverain que vous en- moins péché contre la vérité de l'histoire
courez l'indignation de nos dieux, mais c'est que contre la pureté de la langue dans la-
1 Nostra quidem scripta cur ignibus meruerunt ^ Euseb., lib. VIII in Supplem., cap. 17.
dari? Cur immauiter conventicula dirui? Arnob., ^ Voyez ce que nous avons dit dans l'article 2 de
lib. IV, pag. 480. Minucius-Félix.
,
tout l'univers, et l'on n'aurait pas vn tant de touchant l'origine et la nature de l'âme, est
nations, si éloignées les unes des autres et si fausse et de dangereuse conséquence pour
difTcrentes dans leurs mœurs
dans leurs et les mœurs; on en peut dire autant de celle
coutumes, se réunir en peu de temps à l'eni- d'Epicure, qui enseignait que l'âme mourait
Lrasser. Tous les miracles de Jésus -Christ avec Arnobe soutient que l'âme est
le corps. 453
n'ont point été transmis à la postérité, bien immortelle, mais il avoue ingénument qu'il
loin que les écrivains sacrés lui en aient at- ne sait pas d'où elle tire son origine, et il con- 454.
tribué de faux ou qu'ils aient exagéré les vé- vient aussi que l'on ignorait parmi les chré-
ritables. S'il se rencontre quelques fautes ou tiens quelle était l'origine du mal et pour-
quel<|ues altérations dans leurs écrits, il faut quoi Dieu permet qu'il en arrive; ce qui, se-
les attribufT à la malice des démons, qui no lon lui, peut s'ignorer sans préjudice de la
cherchent qu'à dérober la vérité à nos yeux; religion et sans que les païens en puissent 455,
les livres des païens, pour être plus anciens tirer aucun avantage C(mtre nous , puisqu'ils
que les nôtres n'en Sinit pas plus dignes de ignoraient eux-mêmes beaucoup plus de cho-
foi, l'antiquité étant une source féconde d'er- ses touchant la création du monde, le lieu
Tag. 43'j. reurs; ceux des chrétiens sont d'autant plus et la situation du soleil et de la lune, le chan- 45C.
dignes de croyance, qu'ils ont été composés gement des saisons , la multitude d'insectes
par des hommes simples et qui ne savaient qui sont sur la terre.
pas exagérer les choses. Arnobe répond ensuite à plusieurs ques- 457.
439. Si Jésus -Christ est Dieu disaient encore , tiens que les païens proposaient sur la ma-
les païens, pourquoi s'est- il montré comme nière dont Jésus-Christ avait racheté les hom-
un homme, et pourquoi est-il mort ainsi? mes. Il dit âmes de ceux mêmes qui
que les
« C'est, répond Arnobe, afin de pouvoir con- sont morts avant la venue de Jésus -Christ
verser avec les hommes, de sa
les faire jouir ont eu part à la rédemption commune; qu'il
présence et accomplir ainsi l'ouvrage pour appelle tous les hommes au salut et leur ac-
lequel il était venu; au reste il est mort, non corde également le pouvoir de venir à lui, de
comme Dieu, mais comme homme, par un quelque sexe et condition qu'ils soient; mais
effet de sa volonté, et ses ennemis n'auraient qu'il laisse à chacun la liberté de profiter ou
pu en aucune manière le faire mounr, si lui- de ne pas profiter de cette grâce. D'après Ar-
même ne l'avait pas voulu. » nobe, Dieu ne contraint personne d'ajouter
Analyse ^* ^^ ^"^^ grauds sujcts de plainte pour les foi à ses promesses ; excepté les chrétiens
duiiTieli.
païens, c'est que Jésus -Christ avait entié- nul homme ne peut espérer le salut, Jésus-
Pag. ui;. rement aboli le culte de leurs dieux. Arnobe Christ ayant seul le pouvoir de donner à nos
en convient; mais en cela, dit-il, Jésus-Christ âmes le salut et l'immortalité. On doit esti- 458.
est bien moins digne de leur haine que de raer une religion, non par l'antiquité de son
leur amour, puisqu'il leur a fait connaître établissement, mais par la grandeur du Dieu
l'objet de la véritable religion, le vrai et seul qu'elle adore. Les dieux des païens ne sub-
Dieu que tout homme est forcé naturellement sistaient pas il y a deux mille ans, tandis
de reconnaître pour l'auteur de tout bien et que Dieu tout-puissant, que les chrétiens
le
447. le créateur du ciel et de la terre. Ensuite, adorent, n'est point né dans le temps, mais
après leur avoir mis devant les yeux le grand est immortel, éternel et l'éternité même. 459,
nombre de personnes qui dans tous les en-, Ainsi on ne pouvait pas leur reprocher d'a-
droits du monde, ont embrassé le christia- dorer un Dieu nouveau, bien qu'ils n'eussent
[iv« SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIX. — ARNOBE. 489
su qu'assez tard qu'à lui seul sont dus les posé. Ce qui rendait encore le culte des dieux Pag. «6.
honneurs divins. Ils ne savent pourquoi Dieu indigne de tout esprit raisonnable, c'est qu'il
a envoyé son Clirist si tard ; mais ils sont y en avait plusieurs de même nom : trois Ju-
convaincus que tout ce qui regarde notre sa- piter, quatre Vulcain, trois Diane, quatre
lut a été accompli dans le temps et en la ma- Vénus; en sorte qu'il n'était pas possible de i^^.
nière que Dieu l'avait ordonné par ses dé- distinguer entre eux le véritable Vulcain ou
crets immuables. Les persécutions auxquelles le véritable Jupiter. Outre cela, leur origine 478.
Dieu permet que les chrétiens soient expo- était honteuse et infâme, et les païens n'hé- 479.
ses, ne peuvent fournir aux païens aucun sitaient pas à les reconnaître pour coupables
sujet de reproches, puisque leurs dieux ne de plusieurs crimes, comme de vols, d'adul-
les mettent pas eux-mêmes à l'abri de la tères, de rapts, d'homicides et autres actions
peste, de la guerre et de tant d'autres fléaux de cette nature. Certes, ils n'auraient pu
dont ils sont affligés. Au reste, il importe peu sans impiété leur attribuer de tels forfaits,
aux chrétiens d'être persécutés et maltraités ni permettre aux poètes de les rapporter et
en ce monde, puisque, n'ayant rien à y espé- de les représenter dans les spectacles publics,
rer, ils n'ont point lieu de craindre ce qui s'ilsne les eussent poiut crus véritables.
peut
^ les en faire sortir et les conduire ù une 5. Les différents événements de la vie des Analyse
ou livre V.
Vie éternelle. dieux fournissent encore à Arnobe des preu- „ ..,
Pag. 483.
Analyse 4. Daus Ics troisième et quatrième livres, ves de la fausseté de leur culte. En effet, les
m et IV. Arnobe explique, par diverses raisons, le re- artifices que Numa Pompilius, second roi de
Lib. III, fus que faisaient les chrétiens d'adorer les Rome, employa pour apprendre de Jupiter
^'^ '
idoles : la première, c'est que, reconnaissant l'expiation des foudres, c'est-à-dire le moyen
pour leur Dieu le souverain Maître et Créa- d'expier et d'effacer les crimes qui attiraient
leur de toutes choses, ils uetaient nullement la. du ciel marquée par les foudres;
colère
daus l'obligation d'en adorer d'autres, d'au- les amours de Cybele et d'Atys, celles de Ju- 484.
tant plus que les païens n'avaient jamais pu piter; l'histoire de la bonne déesse que son 486.
prouver qu'il en existât, et qu'ils ne savaient mari Faunus fît mourir à coups de bâtons
pas même où résident ceux qu'ils ailoraient faits de branches de myrthe, parce qu'elle
466. comme dieux ; ils n'eu connaissaient point le avait bu avec excès et s'était enivrée les dis- ;
487.
rents sexes, et mâle et femelle tout ensemble. sans fondement. D'ailleurs, si toutes les ac-
Les dieux des païens étaient non-seulement tions des dieux étaient des mystères, c'était
corporels et matériels, mais les Gentils n'en une témérité de les exposer, comme ils fai-
adoraient aucun qui n'eût exercé quelque art salent, aux yeux de tout le monde, et, bien
468. ou quelque métier sur la terre. Les uns avaient plus, une impiété révoltante d'appliquer leurs
été médecins, les autres chasseurs, d'autres noms à des choses indignes, sales et déshon-
470. pasteurs, et ainsi du reste; la plupart n'é- nètes. C'est ainsi qu'ils avaient déshonoré le 49i.
consacrer des autels et des temples maguifi- emiiloie le reste de son ouvrage à détruire ^%^^'
Lib. IV, ques. En vain ils prétendaient que ces dieux, les objections qu'ils formaient à leur tour
pap. 475
invoqués par leurs devins ou aruspices, et ap- contre celle des chrétiens. La principale était
pelés chacun par leur nom, se présentaient que les chrétiens n'avaient pas de temples,
aussitôt et répondaient exactement à ceux Arnobe avoue le fait, et il dit que les chré-
qui venaient les consulter. Rien n'était moins tiens en agissaient de la sorte dans la per-
avéré que ces faits, et, tout au contraire, l'on suasion que c'était faire injure à la divinité
voyait souvent que ces sortes de prédictions que de l'enfermer entre des murailles et de
et d'oracles étaient 'suivis d'un effet tout op- la soumettre aux besoins d'une demeure ma-
400 HISTOIRE GI'NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
térielle, commn les hommes, les chats, les ces deux motifs sont également déraisonna-
rats et les fourmis. —
Ce n'est point pour
« blcs, puisqu'il ne convient point aux dieux
mettre nos dieux à couvert des iusuUcs de d'être sujets ni à la faim ni à la colère.
l'air que nous leur bâtissons des temples, Sur la fin de l'ouvrage, Arnobe fait voir la Pag. 509.
répondaient les païens, c'est afin que nous fausseté de plusieurs histoires que les païens
puissions leur parler de plus près , nous en- avaient inventées pour autoriser le culte de
treteniren quelque manière avec eux et jouir leurs dieux; mais ne répond point à une
il 5io.
de leur présence, d'autant qu'ils n'enten- objection qu'il s'était faite à l'occasion de la
dent point lorsqu'on les invoque en plein foudre qui tomba sur le Capitole et de la sta-
Pag. 495. air „ c'ggt ujjg erreur qu'Arnobe réfute sans tue de Jupiter qui fut renversée. Ce silence Ml.
peine, puisqu'il est essentiel au vrai Dieu de prouve , ce semble ,
que le dernier de ses 11-
connaître, dans tous les endroits du monde, vres n'est pas venu jusqu'à nous,
les prières qu'on lui adresse, de pénétrer mê-
me jusqu'aux plus secrètes pensées de ceux
ARTIfT F TII
qui l'invoquent, d'être également présent en
tout lieu et de remplir tout l'univers par de la doctrine d'arnobe.
son immensité.
Un autre chef d'accusation que les païens 1 , Voilà, en abrégé, ce que contiennent les Doctrine
^*''''°''*-
faisaient valoir contre les chrétiens, c'est sept livres qu'Arnobe composa pour la reli-
qu'ils n'avaient point d'idoles et ne leur of- gion chrétienne. Bien qu'il n'eu eût pas alors
fraient point de sacrifices.Pour y répondre, une entière connaissance, puisqu'il n'avait pu
Arnobe fait ce raisonnement « Ou il est cer- : encore obtenir de l'évêque de Sicque d'être
tain que les dieux sont dans le ciel, ou cela initié aux saints mystères, il en savait néau-
n'est pas certain. Dans le premier cas, c'est moins assez pour se convaincre qu'elle était
donc à eux et non point à leurs idoles qu'il la seule véritable, et pour en prendre la dé-
faut adresser ses prières; dans le second cas, fense contre les païens. Aussi avons-nous vu
pourquoi ériger des statues à des êtres dont qu'il emploie utilement contre eux les argu-
*9''-
on suspecte la divinité? » Ensuite il déifion- menls généraux dont nous nous servons pour
tre qu'ils avaient tort de prétendre que les établir la vérité de la religion, et que nous ap-
idoles étaient, aussitôt après leur consécra- pelons communément motifs de crédibilité:
tion, la demeure des dieux : est- il vraisem- tels sont tous les miracles de Jésus-Christ et
blable que ces prétendues divinités voulus- de ses disciples, la constance des martyrs, la
sent quitter qu'on suppose être leur
le ciel, rapidité avec laquelle le christianisme s'est
demeure naturelle pour venir habiter dans
,
établi dans toutes les parties du monde et
des idoles, si peu propres à les mettre à cou- chez les nations les plus barbares, par le mi-
498. vert des insultes de leurs ennemis, qu'on est nistère de pauvres pêcheurs; son accroisse-
obligé d'employer le secours des chiens pour ment au miUeu des plus sanglantes persécu-
501.
veiller à leur conservatiou? Quant aux sacri- tions. Les sentiments d'Arnobe sur la nature
fices, Arnobe soutient qu'on ne doit point en divine sont très-orthodoxes ; il prouve l'exis-
offrir aux dieux et il se fonde spécialement
; tence de Dieu par les effets dont il est l'auteur
sur l'autorité de Varron, qui dit en termes et par l'idée que les hommes en ont naturel-
exprès que les dieux ne se soucient point de lement parle de ses attributs et de ses
*
; il
personne ; secon-
sacrifices et n'en exigent de perfections en des termes qui font bien voir
dément, sur ce qu'on ne peut offrir des sa- que incom-
ces perfections lui paraissaient
crifices aux dieux que pour deux raisons : ou préhensibles * et infiniment au-dessus de
bien afin qu'ils se nourrissent des viandes celles qui se trouvent dans les créatures les
qui leur sont immolées; ou bien pour apaiser plus parfaites '. Il reconnaît que Jésus-Christ
n'est pas moins vrai Dieu que vrai homme *,
502.
leur colère et se les rendre favorables. Or,
1 Quem omnes naiuraliter scimus, sivecum exclu- impressum, non insitum , esse regem ac Dominum,
mamus : Deus .'
sive cum illum testem Deum cons- cunctorum quœ sunt modcratorem? Idem, ibid.
tituimus improborum,et quasi nos cernât, faciem su~ ^ Arnob., lib. III. * Idem, ibid.—
blevamus ad cœlum. Aroob., lib. II. Quisnum ne est Nihil, ut
•> memini,magicum,nihil humanum, prœS'
hominum, qui non cum istius principis notione diem tigiosum aut subdolum,nihil fraudis delituit in Cfiri-
primœ nativitatis intraverit? Cui non sit ingenitum, to. Derideatis licet ex -more, atque in lasciviam dissol-
non affixum, imo ipsi pêne in genitalibus matris non vamini cachinnorum, Deus ille sublimis fuit, DeUs
[1V« SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIX. — ARNOBE. 491
du Verbe avec
et qu'en lui s'est faite l'union dans les assemblées des chrétiens, puisqu'il
la nature humaine '. dit qu'ils y priaient non -seulement pour les
Il avoue ingénument qu'on ne peut assi- vivants, mais encore pour les morts ^, tous
gner d'une manière certaine pour les motifs ensemble, afin que leurs vœux étant réu-
lesquels Jésus-Christ a tardé si longtemps nis ^, ils fissent à Dieu une sainte violence et
venue au temps auquel la nature humaine 2. Mais, quelques pures qu'aient été les Erreurs
attribuées fc
devenait de jour en jour plus fragile *. II se intentions d'Arnobe dans ce qu'il a écrit en Arnobe.
moque des païens qui croient pouvoir se ren- faveur de la religion chrétienne, on n'a pas
dre heureux par leurs propres forces, et sou- laissé d'y trouver beaucoup de choses à re-
tient quf! personne ne saurait parvenir à la prendre. Saint Jérôme ne croyait pas ses ou-
gloire éternelle que par Jésus-Christ, à qui il vrages tout-à-fait orthodoxes; on le voit par
appartient d'accorder l'entrée du ciel '. Le
« sa Lettre à TranquiHin, où il dit «qu'on peut
nom seul de Jésus-Christ, ajoute-t-il, met en lire quelquefois Origène, à cause de son éru-
fuite les mahns esprits, fait cesser les oracles, dition, comme on lit Tertulhen ", Novat, Ar-
rend inutiles tous les efforts de la magie, tant nobe, Apollinaire et quelques autres écrivains
est grand son pouvoir.» Arnobe apporte en ecclésiastiques, tant grecs que latins, mais
preuve ce que l'oii disait de Simon le Magi- avec cette précaution, qu'on n'en prenne que
cien * qui, s'étant élevé en l'air par la vertu ce qu'il y a de bon, et qu'on laisse ce qu'il ya
de ses enchantements, était tombé honteuse- de mauvais.» y Il dans Arnobe plu-
a, en effet,
ment par terre dès que saint Pierre eut pro- sieurs propositions qui semblent d'abord hé-
noncé le nom de Jésus-Christ. Il paraît aussi rétiques. Ainsi il dit que l'àme de l'homme
qu'Arnobe était informé de ce qui se passait n'a point été créée de Dieu ^ ; qu'elle n'est
radice ab intima, Deus ab incognitis regnis, et ab om- fueris adrnissus ad vitam. Arnob., lib. II.
nium principe sospitato?^ est missus ,
quem neque sol * Videront currum Simo7iis Magi, et quadrigas
ipse, neque ulla, si sentiunt sidéra, non redoi-cs, non igneas, Pétri ore difflatas, et nominato Christo eva-
principes mundi non denique dii magni, aut qui fin-
, nuisse : videront, inquam, fidentem diis falsis, et ab
gentes se Deos, genus omne mortalium territant, unde eisdem metuentibus proditum, pondère prœcipitatum
aut qui fuerit potuerunt noscere vel suspicari. Arnob., sua, cruribus j'ucuisse prcefractis : post deinde perla-
lib. II. Ac rursum Chnstus vobis invitis Deus, Deus,
: tum Brundam, cruciatibus et pudore defessum, ex al-
inquam, Christus hoc enim sœpe dicendum est, ut infi- tissimi culminis se i-ursum prœcipitasse fastigio. Ar-
delium dissiliat et disrumpatur auditus, Dei principis nob., lib. II. Plusieurs Pères rapportent cette môme
jussione loquens, sub hominis forma. Arnob., lib. II. histoire. Cyrill. Hierosol., Caieches. 6; Ambr., lib. IV
1 An aliter potuit invisibilis illa vis, et habens nul- Hexam., cap. 8, n. 33; Aug., lib. de Hceres., pag. 6;
lom corpovalem substantiam, inferre et commodare se Isid. Pelus., lib. I Epist. 13; Theodoret., lib. I
mundo , conciliis interesse mortalium ,
quam ut ali- Hceretic. Fabul., cap. 1 ; Maxim. Taurin., hom. 5 in
quod tegmen materiœ solidioris as.iumeret, quod ocii- SS. Pet. et Paul. Const. Apostol., lib. 6, cap. 9.
lorum susciperet injectum, et ubi se figere posset con- * Nam nostra quidem scripta cur ignibus merue~
templationis obtutus? Quis est enim mortalium qui rttnt dari? Cur immaniter conventicula dirui? In
quiret eum videre ,
quis cernere, si talem voluisset quibiis summus oratur Deus, pax cunctis et venta pos-
inferre se terris, qualis ei igiiur primigenia natura tulatur, magistratibus, exercifibus, regibus, familia-
est, ei qualem seipse in sua esse voluit vel qualitate, ribus, inimicis, adhuc vitam degentibus, et resolutis
vel numine? Assumpsit hominis formam et
igitur , corporum unctione. In quibus aliud auditur nihil>
sub nosiri generis similitudine potentiam suam clausit, nisi quod humanos faciat, nisi quod mites, verecun-
ut et videri posset et conspici, verba facerel et doceret, dos, pudicos, castos, familiaris communicatores reï, et
atque omnes res exequeretur eas propter quas in mun- cum omnibus consolidœ germanitatis necessitudine co-
dum venerat faciendas, summi Régis imperio et dis- pulatos. Arnob., lib. IV.
pesitione servatU. Arnob., lib. I. 6 Huic omnes ex more prosternimus, hune collatis
Potest fieri ut tum demum émisent Christum Do-
' precibus adoramus.Ab hoc justa et nuditu ejus con-
minus omnipofens, postquam gens hominum fractiov digna deposcimus. ^on quo desideref supplices nos
et infirmior cœpit esse nosti'a natura. Arnob., lib. II. esse, aut omet substerni, tôt millium venerationem
s Per hune solum est ùigressus ad lucem, neque videre. Utilitas hœc nostra est et commodi nostri ra-
alias datum est vel irrepere, vel invadere; cteteris om- lionem spectans. Arnob., lib. I.
nibus clausis atque inexpugnabili arce munitis. Licet ">
Ego Origenem propter eruditionem, sic interdum
ergn purus et ab omni fueris vitiorum contaminatione legendum arbitror, quomodo Tertullianum, Novafum,
purgatus, conciliaveris atque inflexeris potestates, ad Ai-nobium Apollinarem et nonnullos ecclesiasticos
,
cœlum redeunti ne vias claudant, atque obsepiant scriptores, ut bona eorum seligemus , vitemusque con-
transitum, ad immorta/itatis accedere nullis poteris traria, juxia Apostolum dicentem : Omnia probate,
contentionibus prœmium, nisi quod ipsam immortali- quod bonum est tenete. Hier., Epist. 36 ad Tranquill.
tatem facit, Christo attribuente, perceperis, et veram 8 Non inaniter credimus medice qualitatif esse ani-
492 HISTOIRE GÉNI'IKALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ni mortelle, ni inunortolle de sa uature «; que Dieu a laissé à chacun le libre pouvoir
qu'elle peut mourir, si Dieu, par une grùce d'agir et ne contraint personne. Il s'en faut
particulière, ne la rend immortelle, et qu'ei- doue beaucoup qu'Arnobe ait donné dans
fectivement lésâmes des impies et des infidè- l'erreur de ceux qui, au rapport de Lac-
les meurent *; enfin que l'homme pcchc par tance ^, soutenaient que l'homme ne péchait
l'infirmité de sa nature, et non par le choix point de son plein gré; et lorsqu'il a dit que
de son libre arbitre *. Mais il faut considé- le péché venait moins du choix de notre vo-
rerque, lorsqu'Arnobe parlait ainsi, il n'était lonté que de la faiblesse de notre nature, il
que médiocrement instruit des dogmes de no- faut entendre ces paroles de la pente que
tre religion et des vérités contenues dans nos nous avons au péché, qui, effectivement, est
divines Ecritures. Il venait de renoncer aux moins l'eflfet de notre choix qu'une suite du
erreurs du paganisme et n'avait pas encore dérangement causée par le péché originel
reçu la grâce du baptême, et par conséquent dans la nature humaine. On doit interpréter
n'avait pu encore s'instruire à fond des vé- aussi bénignement ce qu'il dit de la nature
rites catholiques. On doit donc lui pardonner de l'àme, car tout son raisonnement se réduit
aisément son défaut d'exactitude en ce point, à dire qu'il n'est point aussi essentiel à nos
vu surtout qu'il ne s'est jamais opiniâtre à âmes de durer éternellement qu'à Dieu mê-
soutenir aucune erreur, et que l'on rencon- me, puisqu'elles ne durent et ne subsistent
tre même dans ses écrits de quoi le justifier que parce que Dieu veut qu'elles subsistent,
sur tous les points dans lesquels on pourrait 3. Arnobe, au jugement de saint Jérôme, jugement
croire qu'il a erré. Car il recoimait, en ter- est inégal et confus °, et il n'y a ni ordre ni d\LnobT'*
mes formels, que Dieu est créateur de toutes méthode dans ses ouvrages ; son style est
clioses et de l'homme même *; que c'est de dur et enflé, et il se sert de plusieurs locu-
lui que nous tenons Fètre, la vie et le mou- tions peu usitées et éloignées de la pureté de
vement; immortel, éternel et
qu'il est seul la langue latine, ce qui le rend difficile à en-
sans commencement '; que c'est une foUe tendre en beaucoup d'endroits. On ne laisse
aux païens de prétendre à la même immor- pas cependant de remarquer de l'élégance dans
talité que Dieu ®; que les impies sont desti- son discours, et il l'aurait sans doute mieux
nés à des feux qui ne s'éteindront jamais ' ; poli, s'il ne se fût pas tant pressé de le finir,
que Jésus-Christ, qu'il reconnaît pour \Tai H attaque ses adversaires avec beaucoup de
Dieu, aide également les bons et les mau- force et d'énergie, et on trouve dans ses rai-
vais * et ne refuse son secours à personne; sonnements certains tours subtils, délicats
mas hominum, utpote a rébus non principalibus edi- per quas nostra fukitur salus variarum munificeniia
tas. Arnob., lib. encore: Sacrilegœ crimen
II, et voluptatum? Mundus iste in quo degitis, cujus est?
impietatis incurrit quisquis ah eo Deo conceperit
,
etc. Arnob., lib. I.
homineni esse prognatum, rem infelicem et miseram. ^ Nonne solus {Deus), ingenitus, immortalis et per-
tore comperlum est, et inlerire quce possint, si Dcum intelledum Dei suspicio7iis alicujus acciperent aura,
ignoraverint vitœ, ab exitio iiberari si ad ejus
et , nunquam sibi adsciscerent divmam immortalemque
se minas atque mdulgentias applicarent. Arnobius, naturam. Arnob., lib. II.
lib. II. Audetis ridere nos cum gehennas dicimus et inex'
"^
* In flumina torrentia flammarum jaciuntur, et ad tingutbiles quosdam ignés in quos animas dejici ab
nihilum redadœ, interitionis perpetuœ frustratione va- earum hostibus inimicisque cognovimus. Arnob., lib. II.
nescunt. Aroob., lib. II. * Christus œqualiter bonis malisque subvenit... Hoc
catorem hommem faciat, non voluntatis, seu judica- quisquam prchibetur, aut pellitur quid invitans in
tionis electio. Arnob., lib. I. te peccat, cujus solce sunt hœ partes, ut sub tui juris
* Nos hebetes stolidique pronuntiamur, qui dedimus arbitrio fructum suce benignitatis exponat?... An num-
nos Deo, cujus nutu et arbitrio omne quod est, constat, quid orandus es ut beneficium salutis a Deo digneris
et in sententiœ suce perpetuitatedefixum est nonne accipere, et tibi aspernanti fugientique longissime in~
huic omnes debemus hoc ipsum primum quod summ? fundenda in gremiumest divinœ benevolentiœ gratia?...
Quod esse homines dicimur? Quod ab eo vel missi, Nulli Deus in/ert necessitatem imperiosa, formidine
vel lapsi cœcitate hujus in corporis continemur? Non nullum terret. Arnob., lib. II.
quod incedimus, quod sptramus et vivimus et ab eo ^ Lactant., lib. VI Instit., cap. 14.
ad nos venit, vique ipsa vivendi efficit nos esse et ani- *" Arnobius inœqualis et nimiuset absque operis sut
mali agitatione motari? Nonne ab hoc effluunt causœ, partitione confusus. Hieronym., Epist. 46 ad Paulin,
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIX. — ARNOBE. 493
et enjoués qui font plaisir. Jamais il ne cite d634, in -S», avec les notes choisies de Go-
l'Ecriture; et bien qu'il rapporte plusieurs deschalcius et des sommaires de Léandre de
miracles contenus dans les saints Evangiles, Saint-Martin ; à Leyde, en 1651, uï-A°, par les
il ne dit point d'où il les a a[tpris, ce qui soins de Claude Saumaise et avec les notes
porte à croire qu'il les savait plutôt pour en de Cantérus, de Stewechius, d'Elmenshortius
avoir entendu parler, que pour les avoir lus et d'Héralde. Saumaise en préparait une nou-
lui-même dans les livres sacrés. Cependant il velle édition; mais il mourut, eu 1652, sans
dit assez clairement qu'avant d'écrire pour la avoir pu l'achever; on en trouve les premiè-
religion chrétienne, il parcourut les ouvra- res feuilles dans letome II des oeuvres de
ges de tous les Pères '
qui avaient, avant lui, imprimées à Hambourg, en
saint Ilippolyte,
traité la même matière. Il emprunte même 1716, 1718. A Leyde encore, en 1657, in-4";
très-souvent les propres paroles de Clément à Paris, en 1666, iu-fol., à la fin des ou-
d' Alexandrie, mais il ne le cite point. Il en vrages de saint Cyprien, de l'édition de Phi-
use de même à l'égard des ouvrages de Cicé- lippe Le Prieur. Mursius et Jules-César Bou-
ron, dont il a copié tant de choses, que saint langer ont donné aussi des observations sur
Jérôme n'a pas craint de dire « que les sept Arnobe, l'un à Leyde, en 1598, sous le titre
livres d'Arnobe ne sont presque qu'un abré- Criticus Arnobianus; le deuxième à Toulouse,
gé des Dialogues de cet orateur. en 1612, sous le titre d'Eclogœ ad Arnobium.
Aea
Editions
écrits
La première édition des livres d'Ar-
4. [Une dissertation sur Arnobe a aussi paru dans
d'Arnobe. nobe est celle de Rome, en 1542, in-fol., par l'Apparatus de D. Le Nourry.] Les bvres d'Ar-
Faustus Sabœus. Gelénius les fît imprimer nobe se trouvent aussi dans le tome III de la
ensuite à Bâle, eu 1546, 1560, in-8», et y cor- Bibliothèque des Pères, à Cologne, en 1618;
rigea plusieurs endroits qu'il croyait défec- dans le tome I du Supplément à cette Biblio-
tueux dans l'édition précédente.
Les suivantes thèque à Paris, en 1639, et dans le tome III
,
sont celle d'Heidelberg, en 1560, par Fran- de celle de Lyon, en 1677, in-fol. [Le texte
çois Baudouin, avec le Dialogue de Minucius- de l'édition de Leyde se retrouve chez Gal-
Féhx; de Paris, en 1570, par Thomas-
celle land, tome IV, avec des notes choisies. En
sin, et en 1580, iu-fol,, à la fin des œuvres 1773 parut à Longosalissa l'édition de Lind-
de Trrtullien, par René de la Barre; celle ner, in-8". Oberthur, qui adopta l'édition de
d'Anvers, en 1582, in-8°, avec les notes de Cantérus, y ajouta beaucoup de corrections
Théodose Cantérus; de Rome, en 1583, in-8'', d'après Saumaise, Wurtzbourg 1783, 1 vol.
par les soins de Fulvius Ursinus, qui y ré- in-8°, et ensuite dans la collection des Œu-
forma plusieurs leçons fautives et contraires vres choisies des Pères, même ville. L'édition
à la saine doctrine, que quelques personnes d'Orelha paru àLeipsick, en 1816, en 2 vol.,
mal intentionnées avaient insérées dans les dont le second renferme le commentaire. La
écrits d'Arnobe, et dédia son édition au pape pbilologie, dit Mœlher, y tient trop de place,
Grégoire XIII. Il dit, dans son cpitre dédica- et l'exécution n'est pas belle. Le Père Caillau
toire, qu'il y avait déjà quarante ans qu'Ar- a publié Arnobe complet dans les Selecti Pa-
nobe, sorti de la bibliothèque du Vatican, avait très. Ou le trouve aussi dans les publications
vu le jour pour la première fois à Rome, et des Pères de Gauthier, Besançon 1836, et
que, depuis ce temps-là, la plupart des sa- dans l'édition d'Edde Muralto, à Zurich, mê-
vants, même étrangers, s'étaient empressés me La Patrologie Migne contient Ar-
année.
comme à l'envi de donner leurs soins à cet nobe avec une notice sur sa vie et sur ses
auteur. Les ouvrages d'Arnobe furent impri- diflerentes éditions par Galland et Schœnne-
més depuis à Anvers, en 1586 et 1604, in-8°, man, une dissertation préliminaire par D. Le
avec les notes de Godeschalcius Stewechius ; Nourry, les arguments et les commentaires
à Hanovre, en 1603, in-8", avec les notes de variorum , avec un appendice qui renferme
Elmenhorstius; à Cologne, en 1604, in-8", le commentaire d'Orelli. Œhler a donné en
de l'édition de Stewechius; à Paris, eu 1605, 1847, à Leipsick, une édition in-8° d'Arnobe.
in-8o, avec les notes de Didier Héralde; à Le docteur Hildebrand en a publié une nou-
Hambouig, en 1610, in-fol., avec les notes velle édition revue sur le manuscrit parisien
d'Elmenhorstius, mais plus amples que dans et enrichie d'une suite de commentaires,
l'édition de Hanovre, en 1603; à Douai, en 1 vol. in-8'', Halles 1848. Mesnard a fait pâ-
CHAPITRE XL.
Lactance^ orateur et défenseur de l'Église.
Etudes de
Lactaoce.
4. Lactancenommé aussi Firmien, et
*, Lu il apprenait aux jeunes gens, comme il
par quelques-uns, Lucius Cselius *, ou mieux, le dit lui-même ^, non à pratiquer la vertu,
Cécilius, fut mis dés ses premières années mais à être ingénieux pour couvrir et dé-
sous la discipline d'Arnobe ', qui professait fendre le mal; mais comme on parlait plus
alors la rhétorique à Sicque, ville de la pro- grec que latin dans cette ville, il y trouva
vince procousulaire d'Afrique *. C'est ce qui peu de disciples, ce qui lui fit employer ses
nous porte à croire qu'il était de ce pays, loisirs à la composition '". Il resta à Nicomé-
bien que d'autres le fassent naître à Fir-
'^
die pendant les dix années que dura la per-
mium, ville d'Italie, à cause du nom de Fir- sécution de Dioclétien, et il y vit les violen-
mien qu'il portait. Il y a beaucoup d'appa- ces que l'on exerça contre l'Eglise ".Ce qui
rence qu'il passa du paganisme à la religion le toucha davantage et ce qui fît murmurer
chrétienne mais nous n'en avons point de
®; les païens mêmes '*, fut que tandis qu'on ,
preuves positives; on ne sait rien de ses pa- employait le fer et le feu à détruire la reli-
rents, et nous avons perdu les ouvrages qu'il gion chrétienne, deux philosophes, dont l'un
composa dans sa jeunesse. Il était encore était Hiéroclès *', s'avisèrent de l'attaquer par
1 Quelques-uns croient que le nom de Lactance sait que ce n'était pas la coutume des chrétiens, de
lui a été donné à cause du rapport que sa manière confier l'éducation de leurs enfants à des maîtres
d'écrire douce et agréable présente avec le lait, mais païens. La manière dont Lactance lui-môme avoue
sans aucun fondement, de sorte qu'il vaut mieux qu'il avait professé la rhétorique, en enseignant aux
dire qu'il le tirait de sa famille. jeunes gens, non la pratique de la vertu, mais l'art
2 Ces noms ne se trouvent que dans un manus- de couvrir et de défendre le mal, ne paraît pas
crit de la bibliothèque de Colbert, où Lactance est chrétienne. Les écrits qn'il composa dans sa jeunesse,
appelé Lucius Cœcilius Firmien Lactance. Saint
, autant qu'on en peut juger par le titre, traitaient
Jérôme et saint Augustin, en parlant de lui, ne le tous de matières profanes.
nomment pas autrement que Firmien Lactance, et 7
Hieronym., in Catal., cap. 80.
il ne porte que ces deux noms dans un manuscrit 5 Idem, ibid. Lactance composa en vers hexamè-
très-aucien de Bologne, et dans neuf autres de la tres la relation de ce voyage, mais nous l'avons per-
Bibliothèque de Turin. C'est ce qui fait croire que due.
ceux de Lucius Cœcilius ont été ajoutés, et qu'ils ne * Quœ professio mulio melior, utilior, gloriosior
lui ont jamais été propres. Voyez Pfaffius, Dissert, putanda est, quam illa oratoria, in qua diu versait,
praelim. in Epist. Lact., § 13. non ad virtutem, sed plane ad argutam malitiam ju-
' Hieronym., in Catal., cap. 80 . — * Idem, ibid., venes erudiebamus. Lactant., Inst. Div., lib. I, cap. 1.
cap. 79. 10 Firmianus qui et Ladantius Arnobii discipulus,
^ Entre autres, le P. Franchesani, qui a publié ses sub Diûcletiano principe accitus Nicomediœ rheto-
œuvres et a fait une dissertation spéciale sur ce su- ricam docud et penuria discipulorum, ob Grœcam vi-
leurs écrits ; on trouva mauvais qu'ils insul- une extrême pauvreté; et c'est, selon la pen-
tassent à des gens déjà accablés par la vio- sée d'un habile critiquecette vertu si ad- ^,
lence, et dès-lors Lactance prit la résolution mirable qu'Eusèbe a voulu relever en lui,
de les réfuter *; néanmoins n'avoir
il parait lorsqu'après avoir dit qu'il manquait non-
exécuté ce dessein que longtemps après. seulement des choses délicieuses, mais sou-
Constan' 3. Lactance était auprès de Constantin, en vent même des nécessaires, il remarque en
tin le choi
iîtp'ourêtre 315 s'il est vrai, comme pense Godefroi 2, même temps que Constantin lui donna le
précepteur
de Crispe,
... i- 'i<i_
Quc CB soit lui QUI outiut les lois celeDres
.
i-i soin de son fils '. Son seul but, dans ses
son fils.
données cette année pour abolir le supplice écrits, étaitde pouvoir ramener quelqu'un
de la croix, défendre de marquer les crimi- dans la voie de la vérité *. Saint Eucher,
nels sur le front, et pour faire subsister les évêque de Lyon, le met au nombre de ceux
pauvres. Toutefois, il est certain que l'em- qui ont fait violence au royaume du ciel ®.
pereur Constantin le choisit comme précep-
teur d'éloquence latine, pour Crispe, son fils ARTICLE n.
aîné '. Il vint à cet effet dans les Gaules, DES ÉCRITS DE LACTANCE.
étant déjà fort âgé; ce qui porte à croire
ne survécut pas longtemps à Crispe,
qu'il
§ lef. — LIVRE DE L'OUVRAGE DE DIEU.
que Constantin fit mourir l'an de Jésus 1 Le plus ancien écrit qui nous reste de
.
urte de
Christ 323. Lactance, est un livre intitulé : De l'Ouvra- deDÎJii?^*
par les plus habiles comme le Cicéron de auteur. semble qu'il y a eu particulière-
Il
son temps, il
y parle néanmoins de manière
ment eu vue *• de corriger les mauvaises im-
à nous persuader qu'il était très - éloigné pressions qu'il avait autrefois données à Dé-
d'avoir de lui-même l'idée que les autres s'en métrien, son disciple **, à qui il adresse cet
sont justement formée ". Quoique, en qua-
si ouvrage. Ou croit qu'il l'écrivit lorsque la
lité de précepteur du lils aîné d'un priuce persécution de Dioclétien durait encore ": il
aussi libéral qu'était Constantin, il eût tout est certain, au moins, que ce fut avant ses
à espérer, il vécut cependant toujours dans livres des Institutions divines^ où il est cité **.
avons encore. Voyez l'article d'Eusèbe. niciosi et graves. Lact., lib. de Opific, cap. 20.
1 Lact., Instit., lib. V, cap. 4. — 2 Cod. Theod., " Quam minime sim quietus,etiam in summis ne-
tom. III, pag. 295, 2. ex hoc libella poteris existimare, quem ad
cessitatibus,
Hic (Lactantius) extrema senectufe, magister CcB'
3 terudibus pêne verbis, prout ingenii mediocritas tulit, .
saris Crispi, filii Constantini in Gallia fuit, qui pos- Demetriane , perscripsi , ut et quotidianum studium
tea a pâtre interfectus est. Hieronym., in Catalogo, meum nosses, et non deessem tibi prœceptor etiam
cap. 80. , nunc, sed honestioris rei meliorisque doctrines. Lact.,
* Ladontius, vir omnium suo tempore eruditissimus. lib. de Opif., cap. 1.
la première partie, Loctance traite du corps vraie religion à ceux qui l'ignoraient '; car
humain, qui est, dit-il, comme un vase de idnsieurs s'étaient fatigués inutilement à la
terre dans lequel l'homme véritable, c'est-à- chercher, ne sachant pas que la vérité, qui
Il usquo dire l'âme est renfermée. Il étale la merveil- est le secret du souverain Dieu, n'est point
ad XVII.
leuse structure de ce corps, relève l'accord à la portée de l'esprit de l'homme. C'était
parfait qu'il y a entre tous ses membres, et aussi pour y affermir, par de solides raisons,
les usages auxquels ils sont destinés d'où il : ceux qui la connaissaient déjà. Il voulait
conclut que ce ne peut être que l'ouvrage de ainsi montrer aux sages quelle est la vraie
Dieu. Il en infère encore que sa proviiJence sagesse, et aux ignorants quelle est la vraie
règle tout; et il réfute, par des raisons soli- religion. D'aUleurs, l'exemple des plus fa-
des, les épicuriens qui niaient l'un et l'autre. meux orateurs et jurisconsultes qui avaient
xTùi et XIX. Dans la prouve que Tâme
dernière partie, il consacré les dernières années de leur vie,
est immortelle, qu'elle ne viunt point des les nus à faire l'éloge de la vaine philosophie
parents; (^ue nos dispositions naturelles et des Gentils, les autres â donner des institu-
nos actions ne dépendimt en aucune manière tions de droit civil, lui paraissait une raison
du destin ni de l'influence des astres. Saint assez forte pour l'engager à faire pour la vé-
Jérôme dit, en parlant de ce livre * et de ce- rité ce qu'ils avaient pour le mensonge.
fait
cette question, et il le blâme d'avoir traité tres apologistes de la religion chrétienne '';
si légèrement une matière d'aussi grande m;iis il faut avouer que, s'il les a surpassés
qu'il faut sans doute entendre des livres des a facilement ruiné les fondements des reli-
Institutions divines,que Lactance lui-même gions étrangères.
cite comme son propre ouvrage dans plu- 2. Quant au temps auquel Lactance écrivit Lactance
sieurs endroits de ses écrits, et particulière- ses livres des Institutions, y a quelque lieu il vers'm?""
ment dans celui qui a pour titre De la Colère : de croire que ce fut vers l'an de Jésus-Christ
de Dieu *, où, en parlant de ceux qui atlorent 320. On présume d'après différents pas-
le
des êtres crées, il dit qu'il les a déjà réfutés sages de cet ouvrage, où l'auteur se dit déjà
dans le hvie II des Institutions divines. Ainsi fort avancé en âge ^ et où l'on voit qu'il n'é-
le titre et la division de l'ouvrage sont de tait plus à Nicomédie de Bithynie *°, et il ne
création et des membres humains) ego nunc idcirco Sed horum imperiiiam,jam coarguimus in secundo
''
prœtereo, quia nuper proprium de ea re librum ad Divinarum Inslilutionum libro. Lact., lib. De Ira Dei,
Demetrianum, auditorem nieum, scripsi. Lact., lib. H cap. 2. Et encore Quos ex parte lefutavimus in
:
Instii., cap. 10. quarto supradicti operis libro. Idem, ibid., cap. 2 et
* Hieronyra., Epist. 83 ad Magnum. — ^ Lact., lib. 11.
de Opific, cap. 1. s Lact., lib. Il Instit., cap. 1. — ^ Lact., lib. V
* Quis mihi interdicere potest ne legam Institutio- Instit., cap. 2. — ' Ibid., lib. V, cap. 1.
Dum ejus (Lactnntii) lihros, quihus contra génies scrip- * Lactantius quasi quidam fluvius eloquentiœ Tul-
sit Hieronym., Epist. 41 ad Pammach.
fortissirne? liatiœ, utinatn tam nostra affirmare potuisset, quam
et Océan. Seplem libros adversus génies Arnobius facile aliéna destruxit ! Hieron., Epist. 49 ad Paulin.
edidit, totidemque discipulus ejus LÔctantius. Idem, » Lact., lib. I Instit., cap. 1.
Epist. 83 ad Magn. 10 Idem, ibid., lib. V, cap. 5.
,,
tantin. L'Eglise souffrait alors une violente aux raisons qui établissent l'uiiité de Dieu; il
persécution '
; ce qui a bien plus de rapport montre qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait
à celle de Licinius qu'à celle de Dioclétien, plusieurs dieux, qu'il est absurde qu'il y ait
dont Lactance ne parle dans cet ouvrage plusieurs âmes pour gouverner le monde
que comme terminée. Or, la persécution de qu'un Être souverainement parfait doit être
Licinius ne s'échauffa si fort qu'en l'an 319. un, que la divinité ne peut être partagée en-
Quoique Lactance n'ait écrit son livre qu'en tre plusieurs, tout ce qui se divise étant su-
320, il paraît m'-anmoins en avoir formé le jet à être détruit; qu'il n'est pas moins ab-
dessein longtemps auparavant ', et peut-être surde de croire que le monde soit gouverné
même dès l'an 303, alors qu'il se proposa par plusieurs dans un même corps. Comme
de répondre à tous ceux qui avaient écrit on aurait pu répondre que les dieux su-
lui
qui déjà s'était déclaré pour la rehgion chré- tous n'ont pas la même puissance, ils ne soat
tienne , et, dans les éloges que l'auteiu' lui pas dieux, puisqu'il est contre la nature de
donne, il le félicite principalement de ce qu'il Dieu d'être soumis à un autre.
4. Il prouve la même vérité par l'autorité
*
était le premier des empereurs romains »^-
qui avait su préférer à l'erreur la connais- des Prophètes, et, afin que l'on ne pût discon-
sance et le culte du vrai Dieu. Il déclare que venir de la certitude de leurs oracles, il fait
Dieu a suscité ce prince pour être le restau- voir qu'ils ont dit vrai, par révéuement des
rateur de la justice * et rétablir la tranquil- choses qu'ils ont prédites, par la conformité
lité dans le monde, et il lui promet un règne de leurs sentiments avec la doctrine qu'ils
long et heureux ®; il ajoute qu'il aura la con- prêchaient, par leur détachement des plaisirs
solation, dans sa vieillesse, de transmettre à de cette vie, par leur entière résignation à
Analyse SCS cufauts l'empire qu'il avait reçu tout la Providence pour les choses nécessaires à
fntilnVé". De jeune de son père. la vie , par leur disposition à souffrir la mort
ReUgiôn^.*^ 3. Le titre d'Institutions divines, que Lac- pour la vérité, enfin parce que la plupart
buîlt'. Patr'." tance donne à ses livres, est général pour tout d'entre eux ayant été princes ou rois, il n'est
^*^" *
l'ouvrage. Chaque livre a ensuite le sien par- pas permis de les soupçonner d'ambition ou
'^' " ticulier, conforme à la matière qui y est trai- de mensonge. Il ajoute à ces preuves le té- v.vietwi:
tée. Dans le premier, intitulé De la Fausse : moignage d'un grand nombre de poètes et
Religion, l'auteur attaque les erreurs des de pliilosophes païens : d'Orphée, d'Homère,
gentils touchant la divinité. 11 établit d'abord d'Hésiode, de Thaïes, de Pythagore, d'Ana-
une Providence qui gouverne toutes choses, xagore, d'Antisthène, de Cléanthe, d'Anaxi-
contre l'opinion des épicuriens qui préten- mènes, de Chrysippe, d'Aristote, de Cicéron
daient que rien ne se faisait que par hasard ;
et de Sénèque, qui tous, de même que Mer-
mais il s'arrête peu aux preuves, soit parce cure Trismégiste et les sibylles, animées de
cfu'il prévoyait qu'il aurait lieu de traiter plu- l'esprit de Dieu, d'après le sentiment même
sieurs fois cette matière, soit parce qu'il n'i- des païens ont enseigné qu'il n'y a qu'un
,
gnorait pas que les stoïciens, et en particulier seul Dieu. Il attaque ensuite les fausses divi- vinetseq.
Cicéron, avaient répondu solidement à ceux nités des païens et montre que ceux qu'ils
qui niaient la Providence, soit enfin parce adoraient comme dieux , étaient de simples
qu'ilne pouvait croire qu'il y eût personne hommes, dont quelques-uns s'étaient rendus
assez grossier ni assez barbare qui, élevant recommandables par leurs beaux faits, mais
les yeux vers le ciel et voyant l'accord qu'il dont la plupart n'étaient connus que pour
y a entre toutes les parties de l'univers, leur leurs crimes. Il découvre aussi toutes les m-
1 Nous suivons Eusèbe, qui a placé en cette an- * Lactant., lib. V, Instit., cap. 1. — ' Ibid., cap. 4.
née le voyage de Lactance. Euseb., in Chron., ad — 4 Ibid., lib. l, cap. 1. — ^ Idem, lib. VII, cap. 26.
an. 318. — 6 Idem, lib. I, cap. 1.
H. 32
498 HISTOIRE Gl-.NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
abominations qui se commettaient dans leurs autres motifs qui retenaient les païens dans
mystères, étreinte queUiues-uns do leurs au- l'erreur : après avoir montré que Dieu est le
teurs, qui avaient essayé de les jiistilier. créateur de l'univers, et rapporté en abrégé
Aniiiyse 5. Dans le second livre, qui a pour titre : la manière dont il le créa et dont il punit les
iniitnié" i)a Dc V Orùj'me de l'erreur, Lactanco entreprend hommes par un déluge universel , il vient à
rc'rr'"ur. de uioutrcr comment l'idolâtrie est entrée dans son sujet principal, qui est de faire voir l'ori-
paB. 6»i. le monde, et comment elle s'y est conservée. gine de l'idolâtrie.
Cap. 1. Iltémoigne être fort surpris que les hommes, 7. Il la fait commencer aux Chananéens, Cap. xm.
malgré les lumières de la nature qui les con- c'est-à-dire aux enfants de Cham. Celui-ci,
traignent en quelque sorte à avoir recours à ayant été maudit de son père pour l'insulte
Dieu, surtout dans leurs adversités, se soient qu'il lui fit dans son ivresse, fut jugé indigne
néanmoins oubliés jusqu'au point d'adorer de la connaissance du vrai Dieu; de là vint
tout, à la réserve du seul Dieu adorable. Cet l'ignorance de ses descendants. De ceux-ci
aveuglement vient, selon lui, d'une puissance elle se répandit dans les pays circonvoisins,
maligne, ennemie de la vérité, toujours oc- premièrement en Egypte, et ensfuite par tout
cupée à répandre des ténèbres dans les es- le monde; non content d'adorer le soleil,
et,
prits des hommes, et qui se plaît uniquement la lune et les astres, on s'accoutuma à ren-
Il et seq. à les retenir dans l'erreur. Il réfute la plu- dre le même honneur à des figures mons-
part des raisons alléguées par les païens trueuses d'animaux. D'abord on sacrifiait en
pour justifier le culte qu'ils rendaient à leurs pleine campagne, et, hors de l'Egypte, il n'y
idoles; et, après avoir montré qu'il est ab- avait ni temple ni autel; mais, dans la suite
surde d'adresser des vœux et des prières à des temps, on bâtit des temples et on dressa
des statues inanimées, qui, bien loin de pou- des autels, chaque peuple le fit en l'honneur
voir aider ceux qui les invoquent, ont elles- de ses rois les plus puissants. Ainsi s'établit xiv.
mêmes besoin de leur secours pour se ga- l'idolâtrie, qui s'est toujours fortifiée depuis
rantir de la violence et des insultes, il fait par mauvais
les artifices et la puissance des
voir que le penchant si violent qu'ont les démons, appelés génies. Lactance dit que ce
hommes pour les choses sensibles, est moins sont des substances spirituelles d'une nature
l'eliet de leur amour pour les dieux, que par moyenne l'homme et Tange, engen-
entre
yi. leur cupidité propre. « On se plaît, dit-il, à drées du commerce infâme que les anges,
voir des images revêtues d'or, d'ivoire et de envoyés dès le commencement à la garde
pierres précieuses; ou se laisse éblouir par des hommes, eurent avec les femmes. Ce
l'éclatde ces choses, et l'on pense qu'il n'y sont ces anges qui affligent les hommes par
a plus de religion partout où ces ornements diverses maladies, afin de les retenir par la
extérieurs ne brillent point. C'est ainsi que, crainte; mais, quelle que soit leur puissance, ^
sous prétexte d'honorer les dieux, on sert elle ne s'étend que sur ceux qui les révèrent,
l'avarice et la cupidité. » et, bien loin de pouvoir quelque chose contre
G. Mais, disaient les païens, telle est la les adorateurs du vrai Dieu, ils les craignent
religion que nous avons reçue de nos pères. et les respectent. Les chrétiens ,
par la seule
^.„_
Lactance répond « L'autorité des anciens
: invocation du nom
de Dieu, les obligent à
doit céder aux lumières de notre propre rai- sortir des corps de ceux qu'ils obsèdent, et
son. Dieu a donné à chacun de nous une les forcent non -seulement à confesser qu'ils
portion de la sagesse, par laquelle nous pou- sont des démons , mais encore à se nommer
vons découvrir ce qui est caché et juger de par leur nom ; car ils n'osent mentir à Dieu,
ce qui est connu parmi les hommes. De ce au nom duquel on les conjure, ni aux justes,
que les anciens nous ont précédés d'âge, il ne dont la voix seule les tourmente. Us ont en- ^^^
s'ensuit pas qu'ils nous -^ient surpassés eu core inventé l'astrologie, les aruspices, les
lumière, et il est déraisonnable de se laisser augures, nécromaucie, la ma-
les oracles, la
conduire par eux comme des bètes, sans con- gie, l'idolâtrie. Us se cachent dans les tem-
sulter la raison ;
nous ont transmis
puisqu'ils ples, sont présents à tous les sacrifices que
tromper les pre-
l'erreur après s'être laissé l'on offre aux idoles et opèrent souvent des
miers, il est beaucoup plus juste que nous choses merveilleuses, par lesquelles ils sédui-
transmettions à nos descendants la vérité sent ceux qui en sont spectateurs. Mais ce
viu ei ie<i.
qus nous avons reconnue. » Il traite ensuite qui retient surtout les peuples dans l'erreur,
des songes, des augures, des oracles et des c'est que ces génies ou démons, ayant été,
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE, 499
avaut leur chute, les miuistres des voloutcs qualité ne peut coiivenir à là religion des Cap. li, ui
de Dieu, connaissent bien mieux que nous païens, dont le culte est non-seulement vain et IV.
la conduite ordinaire qu'il tient à l'égard des et superstitieux, mais entièrement contraire
hommes. Lors donc qu'ils ont quelque pres- à la lumière naturelle. Il établit, avant toutes
sentiment de ce qui doit arriver, soit en choses, l'autorité des Prophètes, et marque en
bien, soit en mal, ils en avertissent par des peu de mots le temps auquel chacun d'eux
songes et se font passer pour auteurs de ces avait paru, pour fermer
la bouche aux païens
Cap. XVII. différents événements. Dieu ne per- Au reste. qui prétendaient leurs écrivains beaucoup plus
met tout ceci qu'afîn de nous éprouver et en- anciens. Puis il prouve, par le témoignage de
suite nous récompenser ou nous punir, selon Mercure Trismégiste, des sibylles et de Sa-
que nous nous serons portés au bien ou au lomon, que, conformément à la croyance des
mal. chrétiens. Dieu, avant de créer le monde, en-
8. Le troisième livre est intitulé : De la gendra un esprit de même puissance et de
Fausse Sagesse. Lactance appréhendant que même majesté que lui-même, qu'il nomma
le beau titre de sagesse, donné par les païens son Fils. Le vrai nom de ce Fils n'est counu vil.
Cap.
à leur philosophie, ne fût une occasion pour que du Père seul, qui ne doit nous le révéler
plusieurs d'en préférer l'étude à celle de la qu'après que toutes choses seront accomplies
vérité, se propose de montrer la vanité et selon ses desseins. Il y a en deux généra-
lui vin, IX et X.
rinutilité de la philosophie. Il nie d'abord tions, l'une spirituelle, lorsque, dès le com-
qu'on doive la nommer sagesse, puisque, sui- mencement, il est sorti de la bouche de Dieu,
vant son étymologie elle signilie seulement , comme sa parole ; d'où vient qu'il est appelé
l'amour ou le désir de la sagesse. Aussi Py- par les Latins Verbe, et mieux par les Grecs
thagore, quoique beaucoup supérieur à tous Aoyoç ; l'autre charnelle, lorsqu'envoyé par le XII.
les autres philosophes et le premier qui ait Père, il est descendu sur la terre pour y en-
pris ce titre, reconnaît qu'il est impossible à seigner aux hommes la justice et établir son
rhomme de parvenir par son propre travail Eglise, en transférant aux Gentils la vraie
à la vraie sagesse. En effet, la philosophie religion, dont les Juifs s'étaient rendus indi-
n'enseigne rien de certain, soit touchant les gnes. Lactance s'arrête particulièrement à
causes naturelles, soit sur le souverain bien cette dernière génération, comme à celle qui
de l'homme; ce qui paraît par la diversité paraissait la plus incroyable aux ennemis des
des opinions qui partageaient les philosophes chrétiens. Pour en convaincre les Juifs, il
XII, XIV et
sur ces points. Lactance rapporte en particu- rapporte plusieurs prophéties tirées de leurs *^i
lier celles des plus fameux d'entre eux: d'E- propres écrits, où il est dit que le Fils de
picure, qui mettait le souveram bonheur dans Dieu devait un jour devenir Fils de l'homme
Providence et l'immor-
le plaisir et niait la par la chair; qu'il naîtrait d'une Vierge, de
talitéde l'âme ; des Stoïciens et de Pytha- la maison de David; ferait un grand nom-
gore, qui croyaient à la métempsychose ; de bre de miracles, i-épandrait le culte de Dieu
Platon, qui enseignait la communauté des par toute la terre, mettrait fiu à la loi de
femmes; de Zenon, qui prétendait que tous Moïse pour fonder une nouvelle religion;
les péchés sont égaux et mettait la misé- qu'il serait battu de verges, couronné d'épi-
XXlll.
ricorde dans la catégorie des vices. Il réfute nes et souffrirait plusieurs outrages, même
toutes ces différentes opinions et le sentiment la mort de la croix; que le troisième jour il
de ceux qui voulaient qu'il y eût des antipo- ressusciterait, et enfin monterait au ciel qua-
XXV. des. Enfin il conclut que la seule véritable rante jours après sa résurrection.
sagesse consiste à connaître et à adorer un 10. C'est ainsi qu'il établit contre les Juifs
XXII.
XXVI. seul Dieu ; et il la représente comme d'autant la vérité de l'incarnation. A l'égard des païens,
XXlll et XXIV.
plus aimable que, pour l'acquérir, il n'est be- il preuves tirées de la raison, mais
se sert de
soin ni de travail ni de dépenses ni de li-
, , telles que la matière le permet, c'est-à-dire
vres , Dieu l'accordant gratuitement à tous de pure convenance. Il pose pour principe
ceux qui la désirent. qu'un législateur doit pratiquer lui-même ce
9. Après avoir ainsi prouvé que la vérita- qu'il enseigne aux autres, tant pour montrer
ble sagesse est inséparable de la vraie reli- que ses préceptes ne sont pas impraticables,
gion, il fait voir dans le quatrième livre, qui que pour ne pas détruire, par sou exemple,
a pour titre De la Vraie Sagesse, que la reli-
: ce qu'il enseigne de vive voix. Il fallait donc
gion des chrétiens est la seule véritable. Cette que Jésus -Christ notre maître fût Dieu et
500 HISTOIRE GI-NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
homme tout ensemble, sujet aux infirmités de palibles avec la justice. II leur reproche, en Cap. mu
notre nature et à la mort. Un pur homme particulier, Ifes cruautés qu'ils exerçaient con-
ne pouvait atteindre au suprême degré de tre les chrétiens, et soutient que ce sont ces
sagesse nécessaire à un législateur, et un Dieu impiétés et ces violences contre des innocents
ne nous eût pas animés par son exemple à qui leur attiraient les malheurs qu'ils rejc-
Cap.xxv. la pratique de ses préceptes. D'ailleurs, nous talent mal à propos sur la fortune. Il rcmar-
avions besoin d'un médiateur qui, par l'union que en même temps que les chrétiens, bien
de notre nature avec la nature divine, nous loin de diminuer par les tourments qu'on
xm. conduisit à Dieu. S'il a bien voulu mourir sur leur faisait souffrir, croissaient, au contraire,
une croix, c'était pour accomplir les décrets à mesure qu'on les mettait à mort. Répandus
de son Père et les prédictions des Prophètes; d'une extrémité de la terre à l'autre, de tout
xxvu. pour nous enseigner le mépris de la mort, et sexe, de tout âge, de toute condition, de tout
afin que le nouveau peuple qui devait se for- pays, ils n'avaient tous qu'une môme reli-
mer de toutes les nations, rangé sous l'éten- gion et un même culte; partout ils étaient
dard de la croix, combattit et surmontât ses également à l'épreuve des supplices, en sorte
xxviii. ennemis. Lactance prend de là occasion de qu'une multitude innombrable d'hommes, de
relever le pouvoir merveilleux du signe de la femmes et même d'enfants avaient poussé la
croix, pour chasser les démons et pour faire constance jusqu'à aimer mieux mourir que
taire les oracles, et il exhorte les païens à de trahir leur foi. A la vérité, il yen avait eu x.vetxt.
quitter la vanité des idoles pour embrasser qui, vaincus par les tourments, avaient sa-
le culte du vrai Dieu. crifié aux idoles; mais aucun de ceux-là n'a-
«ox. 11. Il traite ensuite de Jésus-Christ en tant vait manqué, à la première occasion, de re-
que Fils de Dieu, et soutient qu'en cette qua- courir à Dieu par la pénitence et de rentrer
lité il est un même esprit et une même subs- à son service avec plus de ferveur qu'aupa-
tance avec le Père; qu'ils ne sont point sépa- ravant.
non plus que le soleil de
rés l'un de l'autre, 13. C'est ainsi qu'il prouve que les chré-
son rayon, ni une source de son ruisseau; tiens sont les seuls chez qui se trouve la vé-
XXX. en un mot, que le Père et le Fils sont un seul ritable justice, puisqu'ils sont les seuls qui
Dieu. A la fin, il avertit ceux qui voudront honorent Dieu dans la vérité et qui lui ren-
recevoir la vérité, de se tenir en garde con- dent le culte qui lui est dû. Il ajoute qu'ils
tre plusieurs qui portaient à faux le nom de n'étaient pas moins exacts à observer les rè-
chrétiens, puisqu'ils s'en étaient rendus in- gles de la justice à l'égard du prochain; ils
dignes par des dogmes contraires à ceux que sont tous frères en esprit , ils se regardent
nous tenons de Jésus- Christ, Il nomme en comme coserviteurs d'un même Dieu, sans
particulier les phryges, c'est-à-dire les mon- distinction de pauvres ou de riches, et con-
tanistes, les novatiens, les valentiniens, les servent entre eux une égalité parfaite, par
marcionites, et détermine que là est la véri- le mépris des richesses et des honneurs,
table Eglise, où Dieu
adoré dans la vérité,
est 14. Il vient ensuite à un examen plus par-
où sont en usage la confession des péchés et ticulier de la nature de la justice, et avoue
ia pénitence, remède salutaire aux plaies de qu'en certaines occasions elle peut paraître
notre âme. folie; mais il nie qu'elle le soit jamais effec-
Anaiyse l^- D^ms le cinquième livre, qui a pour ti- tivcment, etil réfute, par de solides raisons,
fn"tit»ré'fDl tre : De la Justice, il dit que cette vertu, qui quelques philosophes païens, entr'autres Car-
pag.'sss'."'*' avait disparu de dessus la terre en même néade, qui le prétendait. La justice, disait
Cap. v,vi temps que l'idolâtrie s'y était établie, y avait ce philosophe, ne permet pas de tuer un
'''^"-
été ramenée dans les derniers temps par Je- homme ni de lui ravir son bien. Que fera
sus-Christ. Celui-ci ne l'a pas néanmoins com- donc un juste qui aura fait naufrage et qui
muniquée à tous indifféremment, afin que verra quelqu' autre moins fort que lui saisir
l'on en fit d'autant plus de cas qu'elle serait une planche pour se sauver? S'emparera-t-
plus rare; mais de l'acquérir à qui-
il est aisé il de cette planche pour se sauver lui-même,
Tiueiix.
conque désire sincèrement adorer le vrai Dieu surtout quand personne ne le voit? S'il est
X xietxiu et garder ses préceptes. Pour prouver que sage, il le fera, puisqu'autrement il périrait;
cette vertu n'était pas du côté des païens. Lac- mais s'il aime mieux périr que de faire ce
tance fait une longue énumération des crimes tort à son compagnon, ne faut-il pas avouer
qui se commettaient parmi eux, tous incom- qu'il sera plutôt fou que sage? Les païens
[iV SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 501
raisonnaient de même et traitaient de folie la nom avec autant d'impiété que d'injustice.
justice des chrétiens qui aimaient mieux en- 45. Dans le sixième livre, il prescrit la Analyse
j 1 . •. ,-,1 . . •- 1 1 - T^- , • ''" livre VI
durer la mort que de manquer a ce qu us de- vraie manière de rendre a Dieu un culte qui intituié:Du
valent à Dieu ou à leur prochain; mais Lac- lui soit agréable. Ce culte consiste, selon lui, Pag. eos.
tance leur fait voir le peu de solidité de leur dans le sacrifice intérieur qu'une âme épu- Cap. lein.
raisonnement. Ne croyant pas à Timmortalité rée des vices, fait à Dieu d'elle-même, et non
de l'âme et ignorant quel crime c'est d'adorer pas, comme pensaient les païens, dans l'ap-
autre chose que le Dieu créateur du ciel et de pareil extérieur de victimes d'animaux, de
la terre, ils étaient dans la fausse prévention itarfums, de bougies allumées. A propos de metiv.
que tout doit se rapporter à la vie présente, culte spirituel, il distingue deux chemins par
et c'était là le fondement de leur raisonne- lesquels tous les hommes tendent à leur fin :
ment. Il leur représente combien ils étaient l'un est celui de la vertu, épineux et difficile,
coupables, non-seulement de préférer le culte mais où Dieu lui-même sert de guide; l'au-
des idoles à celui du vrai Dieu, mais de vou- tre est celui du vice qui, à la vérité, n'a rieu
loir encore entraîner les chrétiens dans la que de doux, d'agréable et de facile, mais qui
même impiété. Il se moque du mauvais pré- nous précipite enfin dans l'enfer et dans une
texte dont ils tâchaient de couvrir leurs vio- mort éternelle. Il montre ensuite que ce se- veiseq.
lences, en disant que leur intention était de rait ignorer l'essence de la vertu, que de la
ramener les chrétiens à leur devoir, et il sou- faire consister, comme les philosophes païens,
tient que la religion doit se défendre par la dans la connaissance du bien et du mal ou ,
raison et non parla force. Les chrétiens, ajou- dans le bon règlement de sa famille, ou dans
tent-ils, étaient prêts à prouver la vérité de une certaine équité naturelle qui nous fait
leur religion, pourvu qu'on voulût les écou- aimer les bons et haïr les méchants, ou dans
Cap. XX, ter. S'ils faisaient quelqu'outrage aux dieux, l'amour de la patrie, ou même dans la fuite
en refusant de les adorer, c'était à eux à se des vices. Il soutient qu'il n'y a de vraiment
venger de ce mépris, sans qu'il fût besoin vertueux que celui qui connaît Dieu et l'ho-
que d'autres s'y intéressassent. Un sacrifice nore comme il doit.
forcé ne pouvait être ni honorable à ceux 16. Il veut néanmoins que le premier de- xetn.
auxquels on l'offrait, ni utile à celui qui Tof- voir de la justice ne soit point séparé du se-
frait ou qui contraignait â l'oÛrir. 11 était cond, qui consiste à aimer le prochain comme
visiblement faux que l'amour de la religion étant l'image de Dieu ; ce qu'il nomme liu-
fît agir les païens, puisque, tandis que sous manité ou miséricorde. Il dit qu'en général
ce prétexte ils maltraitaient si fort les chré- cette dernière vertu est très-digne de l'hom-
tiens, ils souffraient que l'on rendît à des me, mais qu'elle convient plus particuhère-
fîgiires d'animaux le même culte qu'aux ment aux justes, et il fait voir dans quelle x».
dieux; ils ne réprimaient pas même ceux qui exactitude les chrétiens la pratiquaient, en
niaient formellement qu'il y eût des dieux, exerrant l'hospitalité envers les étrangers, en
ni ceux qui ne croyaient pas que les dieux nourrissant les pauvres, en rachetant les cap-
prissent aucun soin de ce qui nous regarde; tifs, veuve et l'orpheUn , en
en protégeant la
ce qui, pourtant, était renverser la rehgion soulageant les malades, en donnant la sépul-
XXI et xxii. de fond en comble. De là il conclut qu'ils ne ture aux pauvres et aux étrangers. C'est ce xmetxw.
haïssaient les chrétiens qu'à cause de la vé- que les païens traitaient de moyen sûr de se
rite qu'ils défendaient, et qu'il était vrai de voir réduit en un jour à la mendicité ; mais
dire à leur égard : « La vérité produit la Lactance répond que, dans ce cas, elle n'est
haine. que Dieu permettait les per-
» Il dit point à craindre, parce que celui qui est ri-
sécutions, soit pour éprouver la fidélité et che devant Dieu, ne peut être pauvre il :
la patience des siens, soit pour les punir de avoue toutefois que la charité ne nous o])li-
leurs fautes, soit enfin pour les détacher de ge à ces devoirs, qu'autant que nos facultés
cette vie, à laquelle les prospérités ont coutu- le permettent, c'est-à-dire qu'il suffit d'y em-
me d'attacher, et pour s'attirer de nouveaux ployer le superflu de nos biens,
adorateurs par les exemples de constance de 17. 11 attaque, en passant, les philosophes xvetseq.
xxiii. ceux qui sont déjà à lui. Dieu néanmoins, stoïciens et péripatéticiens; il prouve contre
ajoute-t-il, se vengera des persécuteurs com- eux que l'on doit se garder des vices, même
me ayant abusé de la puissance qu'il leur a médiocres, et que la crainte et les autres pas-
donnée et ayant foulé aux pieds son saint sious humaiues, qu'ils mettaient au nom-
502 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
bre des plus grands vices non-sculemcnt ne
, présente, dont elle nous interdit môme les
l'étaient point, mais pouvaient inèiiie dcve- plaisirs, il faut que sa récompense soit réser-
uir de grandes vertus dans un homme qui vée à une autre vie; Dieu, éternel comme il Cap. XI.
Cip. xxm. sait les modérer par la raison. Puis il revient est, doit procurer aux justes un bonheur éter-
à son sujet , et continue de marquer les de- nel; les ouvrages du corps sont sujets à périr
voirs du serviteur de Dieu. Il veut qu'il ne comme le corps; par une raison contraire,
recherche pas à être loué de ses bonnes ac- l'esprit ne peut finir, parce que ses produc-
tions; qu'il ne mente jamais, soit pour nuire tions durent à jamais; le corps ne recherche
aux autres, soit pour les tromper; qu'il prête que ce qui regarde la vie actuelle, tandis que
sans usure, qu'il ne reçoive point le présent l'àme, portant ses désirs plus loin, ne les
du pauvre qu'il bénisse celui qui lui donne
,
borne qu'à ce qui est éternel, et cela par un
des malédictions, qu'il évite de se faire au- penchant naturel qui ne peut être sans rai-
cun ennemi par sa faute, qu'il ne fasse in- son; comme le corps n'est sujet à mourir que
jure à personne, et qu'il souffre avec patience parce qu'il est matériel, l'àme est immortelle,
celle qu'il a reçue, bien loin de chercher à en parce qu'elle n'est point composée de ma-
tirer vengeance, suivant le pernicieux con- tière. »
seil de Cicéron; qu'il réprime ses passions, la 19. On que l'âme nait avec le
objectait xu.
xa et seq. colère, la cupidité, la volupté; qu'il mortifie corps, que ses forces diminuent avec l'âge,
ses sens, en se refusant les spectacles, les co- qu'elle est sujette à la douleur et aux autres
médies, les chansons, la bonne chère, les passions corporelles, et qu'elle compose avec
parfums, les plaisirs charnels qui passent les le corps un tout dont les parties ne peuvent
XXIV. justes bornes du mariage. Si toutefois il arri- subsister l'une sans l'autre. Lactance répond
vait que, vaincu par la violence de ses pas- que «l'âme, quoique produite en même temps
sions ou par la force extérieure, il déchût de que le corps, est néanmoins d'une substance
la voie de la justice, il ne faut pas pour cela toute différente, c'est-à-dire spirituelle, et
qu'il désespère, puisqu'il a le moyen d'y ren- par conséquent qu'elle n'est point corruptible
trer par la pénitence; ne doit pas se
mais il comme le corps, qui a été tiré de la terre. Il
flatter de pouvoir cacher à Dieu son péché, est vrai que l'âme, par laquelle nous vivons,
quelque secret qu'il soit, parce que Dieu voit se fortifie ou s'afi'aiblit avec l'âge, mais celle
jusque dans les replis les plus impénétrables par laquelle nous pensons, c'est-à-dire l'âme
XXV, du cœur de l'homme. Si le serviteur de Dieu raisonnable, est toujours la même; bien loin
veut lui offrir des sacrifices, que ce soit des de se laisser abattre par la douleur, c'est
sacrifices purement spirituels , la pureté de elle qui, par sa sagesse et sa vertu, aide le
cœur, les louanges, les hymnes, les actions corps à souffrir; enfin elle ne fait point par- xuu
de grâces; telle est la manière dont il veut tie du corps, bien qu'elle lui soit unie. » Il
être honoré des siens, ainsi qu'il le déclare ajoute à ces preuves le témoignage des plus
par ses Prophètes. célèbres d'entre les païens qui avaient re-
Analyse 18. Le livre VU est comme la conclusion connu l'immortalité de l'âme, et il fait voir XlV.
du livre VU
intitulé De:des six premiers. Lactance, après y avoir qu'il n'y a que la justice qui puisse procurer
la Vie ben-
reuse. l'sg. montré quelle est la vraie religion et la vraie à cette âme un bonheur éternel, et qu'elle
eu.
justice, et quels sont les devoirs de l'homme doit l'attendre de Dieu seul.
Cap. I et
»eq. juste, propose dans celui-ci les récompenses 20. Il soutient que le monde finira, et que XT et leq.
destinées à ceux qui auront pratiqué ces de- ce sera six mille ans après sa création, parce
voirs. Pour cet effet, après un long exorde qu'il a été crééen six jours; il parle, à cette
où il prouve que Dieu a créé le monde et occasion, des signes avant-coureurs de la fin
qu'il a fait l'homme pour être heureux, il du monde et mêle, avec ce que Jésus-Christ
entre dans le point principal de la question, nous en a prédit, plusieurs circonstances in-
qui est de montrer que l'âme est immortelle. certaines qu'il ne prouve point. Il passe à la XX et scq.
v;ii et X. Voici ses preuves: « L'homme est le seul des résurrection et au jugement dernier, et ex-
animaux qui ait la connaissance de Dieu et plique comment les âmes des impies seront
qui lui rende un culte; il est aussi le seul tourmentées par le feu, quoiqu'immortelles et
qui ait su mettre en usage le feu qui est un d'une substance spirituelle. « Les justes pas-
élément céleste, lui seul est capable de ver- seront aussi par le feu, mais sans en être en-
tu : ce qui prouve qu'il est immortel, car la dommagés; après la résurrection et le grand XXIT.
vertu n'étant d'aucune utilité pour la vie jugement, Jésus-Christ régnera pendant mille
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 503
ans sur la terre en la compagnie des justes. Le avec autant de science que d'éloquence et ,
Cap. XXV, inonde ne devait plus durer que deux cents qui peut seul suffire pour sa matière. L'au-
XXVI. ans; le règne de mille ans étant passé, le teur y cite souvent ^ ses Institutions et l'a-
prince des démons serait lâché de prison et dresse à un nommé Donat ', qui peut avoir
causerait beaucoup de maux aux saints et à été son disciple. Il y attaque deux sortes de Cap.ueun.
la ville sainte; ensuite toute la race des im- philosophes, les épicuriens et les stoïciens,
pies serait exterminée, de sorte que, pendant qui niaient qu'il y eût en Dieu une colère.
sept années entières, le peuple de Dieu reste- Les premiers prétendaient qu'il est dans une
rait seul sur la terre; enfin il se ferait une indifférence parfaite au sujet de ce qui nous
seconde résurrection et un second jugement regarde; les autres, qu'il ne convient pas de
après lequel les justes seraient transformés lui attribuer des mouvements dont tout hom-
en anges, et les impies condamnés à des pei- me raisonnable doit rougir. Lactance prouve iv.
venons de parler, et nous a donné Touvrage ne peut être vraie lorsqu'elle détruit la reh-
dans son entier, à quatre chapitres près, le gion, la seule chose qui nous distingue pro-
quinzième et les trois suivants. Lactance en- prement des animaux sans raison, il soutient
treprit ce travail ' à la prière d'un nommé que c'est ,1a renverser absolument que de
Pentadius, qu'il appelle son frère, soit qu'il croire ou que Die.u ne s'irrite pas contre les
le fût en effet, soit seulement parce qu'il était méchants, ou qu'il ne favorise pas les bons.
chrétien. représente la difficulté qu'il y
Il lui Car peut-il y avoir une plus grande folie que
avait de réduire en un seul livre ce qui fai- de rendre un culte religieux à celui dont
sait la matière de sept grands volumes: puis, nous ne devons rien espérer, ou de le crain-
venant à l'exécution, il propose en peu de dre, s'il ne saurait nous faire de mal? D'ail- xiietseq.
mots les points principaux de doctrine traités leurs, il y a dans le monde des actions mau»
dans ses Institutions ; ce qu'il fait sans répé- valses comme il y a en de bonnes, et il est
ter ni les mêmes termes, ni les mêmes tours impossible que Dieu soit également disposé
de phrase, et ajoutant de temps en temps de à l'égard des unes et des autres. ne s'ensuit Il
I
nouvelles explications sur les endroits qui le pas néanmoins qu'il soit sujet à la crainte, à
demandaient. la cupidité et aux autres passions de l'hom-
I
lui qui apour titre De la Colère de Dieu ; : doive être indigné à la vue d'une mauvaise
ouvrage écrit, au jugement de saint Jérôme s, action, et faire autrement, ce serait ou l'ap-
• Scripsit {Ladantius) Institutionum divinarum ad- puto eiad irœ intelledum satis abundeque passe suffi-
versum génies libros septem, et epitomen ejusdem ope- cere. Hieronym., in cap. iv Epist. ad Ephes., tom. IV,
ris in libro uno acephalo. Hier., in Cafal., cap. 80. pag. 373. 11 l'appelle ailleurs un très-bel ouvrage.
2 Idem, ibid. ^ praefat. —
in Epitom. divin, hist. Habemus ejus {Ladantii) librum pulcherrimum de Ira
* Lactant., lib. II Institut., cap. 17. Dei. Idem, in Catatogo, cap. 80.
5 Firmianus noster librum de Ira Dei dodo pariter 6 Lact., lib. de Ira Dei, cap. 2, et alibi.
et eloquenli sermont conscripsit, quem qui legerit. "^
Ibid., cap. 1.
504 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
c»p. xu- prouver ou la toh-rer. Dieu, ayant donné aux tance, ou du traite de la Mort des Persécu-
boraaics des lois très-saintes et voulant que teurs en particulier. On ne trouve guère que
tous vivent dans l'innocence, doit s'irriter le R. P. Dom Lenourry, bénédictin, qui ait em-
contre ceux qui méprisent ces lois et qui re- brassé une autre opinion ; il a été contredit
noncent à la vertu pour suivre leurs plai- parles plus habiles critiques, et plusieurs ont
«• sirs. La prospérité dont jouissent souvent réfuté ses raisons. Cependant, comme elles
les impies n'est pas une preuve du contraire, ne sont pas destituées de toute force, nous
comme les maux qui arrivent aux bons ne avons cru qu'il ne serait pas inutile de les
sont pas une marque que Dieu ne les aime rapporter en abrégé. Selon lui *, si les au-
point parce (jue c'est le propre de la vertu
, teurs du manuscrit dont s'est servi Baluze,
de soufifrir, et du vice d'être dans les plaisirs. eussent été persuadés que l'ouvrage était de
«'• Il est vrai que Dieu défend la colère, mais Lactance, ils n'eussent pas supprimé son nom
celle-là seulement qui n'est pas juste; c'est propre, qui se lit à la tète de tous les écrits qui
pourquoi il dit Fâchez-vous, et gardez-vous
: sont véritablement de lui, pour y mettre seu-
xxiietxxiii.
jjjgjj jg pécher. » Il confirme son sentiment lement les noms de Lucius Cécilius, sous les-
par les témoignages des sibylles, qui étaient quels il n'est presque connu que dans ce ma-
en grande vénération chez les païens; puis il nuscrit ''; car saint Jérôme ne le nomme ja-
ajoute que, bien que les Prophètes inspirés mais * que Firmien Lactance, et il n'est pas
de Dieu nous aient aussi enseigné qu'il y a cité autrement par saint Augustin, par Hono-
en Dieu une colère , il ne les cite pas, parce rius d'Autun, par l'abbé Trithême. 11 est
que leur autorité n'était pas reconnue de ses vrai, avoue Dom Lenourry, que saint Jérôme
adversaires. compte, entre ses ouvrages, un livre de la
Persécution: mais la ressemblance, dit-il, ne
§ 4. — DU LIVRE DE LA MORT DES PERSÉCUTEURS,
parait pas aussi entière que l'a cru Baluze,
ATTRIBUÉ A LACTANCE.
entre ce titre et celui de la Mort des Persécu-
Le liTie 1 . Baluze est le premier qui ait donné cet teurs. Quant au style, où ce savant critique
despersécM- écrit au pubHc ', et il n'a pas fait difficulté a cru reconnaître celui de Lactance, on y re-
lesté ùu"- de Tattribuer à Lactance. Entre autres rai- marque ', selon le bénédictin, plusieurs fa-
t&DC6 UAP
queiquesau- SOUS , il a CFu que
^ le titre ,
'
de la Mort des Per- çons de parler o])scures, peu latines et tout-
leur». ,
secutturs ,
porté par cet ouvrage dans le ma- à-fait éloignées de la politesse et de l'élé-
nuscrit trouvé par lui, lequel date de huit gance qui ont fait regarder ce Père comme
cents ans, et est l'unique que l'on connaisse, le Cicéron de son siècle; à moins qu'on ne
équivalait à celui de la Persécution , cité par dise que ces endroits obscurs et ces expres-
saint Jérôme* dans le catalogue des livres de sions peu cicéroniennes viennent de la négli-
Lactance. Il s'est encore fondé ' sur ce que les gence des copistes. De plus, continue-t-il, il
noms de Lucius Cécilius ,
qu'on lit à la tète n'est fait dans ce livre aucune mention des au-
du Mort des Persécuteurs, dans ce
livre de la tres écrits de Lactance, quoiqu'il ait coutume
manuscrit, sont joints à ceux de Firmien et de les citer, lorsque l'occasion s'en présente,
de Lactance dans un autre manuscrit des au- et on y trouve même
quelques opinions con-
tres ouvrages ([ui sont reconnus pour être traires à celles qu'il soutient dans des ouvra-
certainement de cet auteur; enfin il a cru voir ges qui sont certainement de lui par exem- :
le style de Lactance dans cet écrit, sa manière ple, cet écrit met la mort de Jésus-Christ à la
de parler et ses citations fréquentes de Vir- findu règne de Tibère ^, tandis que Lactance,
gile. Le sentiment de Baluze a été suivi par dans son quatrième livre des Institutions , la
presque tous les savants qui ont donné des met en la quinzième année de ce prince ^. Ils
éditions ou des traductions des écrits de Lac- diffèrent aussi l'un de l'autre sur le jour de
* Balus., tom. II Miscell. — * Hieron., in Catal., ^ Nourry, loco citato, pag. 1663.
cap. 80. * Extremis iemporibus Tiierii Ccesaris, ut scriptum
' Balus., tom. II Miscell., p. 351 in Notis. legimus, Dominus noster Jésus Christus, a Judoeis
* Nourr., tom. IIApparat, ad Bibl. Patr.,p. 1658. cruciatus est post diem decimum calendarum aprilis.
* Voyez la note sur le nom de Lactance dans l'ar- Lib. de Mort. Persecut., cap. 2.
ticle de sa vie. 8 Anno Tiberii Ccesaris quinto decimo, id est, duO'
quel qu'il soit, vivait dans le même temps vernement cruel et tyrannique ; mais ses
que Lactance, et qu'il écrivit son livre après violences , quoiqu'extrêmes , n'empêchèrent
la persécution de Dioclétien et avant celle de point qu'il ne régnât en paix tout le temps
Licinius, c'est-à-dire, vers Tannée 314 *. que, content de vexer ses sujets, il n'osa point
2. Il l'adressa à un nommé Donat ', illus- s'attaquer à Dieu même en persécutant les
tre par la confession qu'il avait faite du nom chrétiens; car, dès qu'il eut ouvert la persé-
de Jésus-Christ dans la persécution de Dio- cution, en fut puni on l'assassina dans sa
il :
clétien. Son dessein est de faire adorer la jus- propre maison, et, après sa mort, tout ce qu'il
tice de Dieu dans la punition et la mort des avait fait, fut cassé par le sénat. L'Eglise, à
Cap. 11. persécuteurs de l'Eglise. Après avoir décrit la la faveur de la paix dont elle jouit sous les
manière dont les Apôtres travaillèrent pen- empereurs suivants, se répandit dans les pro-
dant vingt- cinq ans à jeter par toute la terre vinces de l'Orient et de l'Occident, et il n'y
lesfondements de cet édifice céleste, il conti- eut point de pays si reculé, où elle ne pé-
nue ainsi « Néron, voulant ruiner leur en-
: nétrât; point de nation si farouche, qu'elle
treprise , commença par faire crucifier saint n'adoucît par la prédication de l'Evangile.
Pierre, dont la prédication et les miracles L'exécrable Décius, ayant de nouveau per- cap. iv.
put pas même découvrir le lieu de sa sépul- de durée, ne laissa pas de coûter bien du
ture. Quelques visionnaires, ajoute l'auteur, sang aux chrétiens. Dieu en châtia ce prince
se sont imaginé que Dieu le réservait pour d'une façon toute nouvelle il fut fait pri- :
servir de précurseur à Tantechrist et être le sonnier par les Perses, et toutes les fois que
1 On
ignore qui était ce Cécilius on sait seule- ; avaient rétabli la paix dans le monde. Excitavit Deus
ment y avait chez les Romains une famille en-
qu'il principes qui tgrannorum nefaria et cruenta imperia
tière très-illustre qui portait ce nom, et qu'il était resciderunt. Lib. de Mort, persec, cap. 1.
commun du temps de saint Cyprien, qui l'avait lui- * Nous apprenons de Cécilius même quel était ce
même. Donat. Il avait confessé Jésus-Christ sous trois pré-
2 à la mort de Valéria,
Cécilius finit son histoire fets, premièrement sous Flaccin, préfet du prétoire,
fillede Dioclétien, qui arriva l'an 314; il ne peut puis sous Hiéroclès, gouverneur de la Bithynie, et
donc l'avoir écrit avant cette année mais aussi il y ; ensuite sous PrisciUien, son successeur. Il avait été
a beaucoup d'apparence qu'il ne tarda pas longtemps appliqué neuf fois à la question, et neuf fois il en
après, puisqu'il y parle de la paix de l'Eglise comme ayant souffert tout ce que la ma-
était sorti victorieux,
d'une chose toute récente. Restituta per orbem fran- lice des démons est capable d'inventer, les fouets,
quillitate, profligata nuper Ecclesia rursum exurgit, les ongles de fer, le feu et divers autres genres de
et majore gloria templum Dei, quod ab impiis fuerat supplices. Enfin le diable, vaincu par la grandeur de
eversum, miserkordia Domini fabricatur. Lib. de sa foi et lui enviant la couronne du martyre qu'il
Mort. Persec, cap. 1. Celebremus igitur triumphum était sur le point de remporter, le fit renfermer
Dei cum exultatione, vicioriam Domini cum laudibus dans une prison, dont il ne sortit qu'à la fin de la
frequentemus, diurnis nocturnisque precibus celebre- persécution, après y être demeuré six ans entiers.
mus, ut pacem post annos decem Ecclesiœ datam con~ Cécilius attribue à ses prières et à celle des autres
firmet in sœculum. Lib. de Morte Persecutor., cap. confesseurs la paix que Dieu venait de rendre à son
ult. Il n'est fait, dans cet ouvrage, aucune mention Eglise. Il l'exhorte à en demander la conservation
de la persécution de Licinius au contraire, l'auteur ; et l'assure qu'il recevra la couronne du martyre,
le représente comme étant encore favorable aux bien qu'il ne soit pas mort dans les tourments. Il
chrétiens, et il dit de lui, comme de Constantin, que n'y a pas d'apparence que ce soit le même Donat
Dieu avait suscité des princes qui en abolissant , auquel Lactance adressa son livre de la Colère de
les édits impies et cruels de leurs prédécesseurs, Dieu. Lib. de Mort. Persecut., cap. 1, 16, 35, 52.
506 HISTOIRE GÉiNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Sapor, leur roi, moulait à cheval ou dans son en deux manières : hi partie supérieure, jus-
cliariotjil commandait à ce misérable de se qu'à la plaie, n'était qu'un squelette; nue mai-
courber et mettait le pied sur son dos. Il eut greur affreuse avait attaché sa peau à ses os;
encore à essuyer les railleries piquantes de ses pieds, par leur enflure excessive, avaient
son vainqueur; mais le comble de ses maux perdu leur forme. Vaincu par la violence de
fut d'avoir un fils empereur, sans que per- ses douleurs, il a recours à Dieu, promet de
sonne se mit eu peine de le venger. La mort rétablir son temple et de satisfaire pour son
même ne le mit pas à couvert des insultes; crime. L'auteur décrit tout au long Tédit que
les barbares lui ayant ôté la peau , la pei- ce prince, dans cette extrémité, fit pubher en
gnirent de rouge et la suspendirent dans un faveur des chrétiens, et qui porte en subs-
temple pour servir de monument à leur vie- tance, que, nonobstant les lois faites contre
toire et d'humiliation aux Romains. Une pu- eux , il leur permettait désormais le libre
niliou si extraordinaire ne fut pas capable exercice de leur religion, espérant, disait-il,
d'arrêter Aurélien, prince naturellement em- qu'eu reconnaissance ils prieraient Dieu pour
porté; mais ses édits sanguinaires n'étaient sa santé et pour la prospérité de l'empire,
pas encore parvenus aux provinces les plus Mais Dieu ne fut point touché de son repen-
éloignées, que ses amis mêmes l'avaient déjà tir; il expira après une année entière d'une
mis à mort près de Cénofrurium, bourg de maladie si extraordinaire, ayant le corps ré-
laThrace. duit en pourriture.
Cap. VI et ô. De ces premières persécutions, l'auteur 7. main ven-
Dioclétien ressentit aussi la
feq
passe à celle de Dioclétien, sur laquelle il geresse de Dieu. La vingt- et- unième année
s'étend beaucoup plus. Il en rapporte l'occa- de sou règne, dans le temps qu'il retournait
sion et les motifs, détaille toutes les cruautés d'Italie en Orient, un mal, qu'il avait gagné
inouïes que l'on y exerça contre les chrétiens, l'année précédente en voyageant pendant
et enfin les divers fléaux par lesquels la ven- un temps froid et pluvieux, mais qui n'avait
geance divine éclata contre cet empereur et pas eu de suite jusque-là, le reprit avec tant
xxvi.xxvii ses associés à l'empire. Sévère, l'un d'entre de violence que, pendant quelque temps, on
eux, abandonné des siens devant Rome, d'où le crut mort et qu'il lui en resta une aliéna-
il était venu chasser Maxence, et contraint tion d'esprit à certaines heures de la journée,
de s'enfuir, se livra, à Ravenne, au vieil Her- Ayant ensuite quitté l'empire, à la persuasion
cule, qui pour toute grâce, lui fit couper les
,
de Galère, retourna simple particulier dans
il
veines. Celui-ci, craignant la vengeance de sa patrie. Ce fut là qu'il apprit, après la mort
Galère, protecteur de Sévère, s'enfuit dans de Galère, les mauvais traitements que Valé-
les Gaides auprès de Constantin; mais bien- ria, sa fille,veuve de cet empereur, recevait de
tôt, convaincu de perfidie et d'avoir même Maximin Daïa, et comment Constantin avait
attenté à la vie de ce prince, fut étranglé, fait renverser ses statues avec celles du vieux
n'ayant eu que le choix de son supplice. Maximin. Outré de cet alfront, inouï jusqu'a-
xxxm, 6. Galère, la dix-huitième année de son lors à l'égard d'un empereur vivant, il se ré-
eueq.*"^^ règne, est frappé d'une plaie horrible dans solut à mourir. Il ne se trouvait bien nulle
les parties pudeur défend de nommer,
que la part; l'inquiétude lui ôtait l'appétit et le re-
Tout l'art de la médecine, Apollon, Esculape pos; il soupirait, il gémissait, se roulait con-
n'y font rien; le mal ronge d'abord l'exté- tinuellement, tantôt dans son lit, tantôt par
rieur, puis pénètre au dedans et gagne les terre. Il se laissa ainsi mourir de faim, acca-
intestins. Il s'y forme des vers; une odeur in- blé de tristesse et réduit à une condition pri-
supportable se répand non-seulement dans le vée, lui qui, pendant vingt ans, avait éprouvé
palais, mais dans toute la ville de Sardique, tout ce que la fortune a de plus favorable.
où il était. Les conduits de l'urine et des ex- 8. Il ne restait plus que Maximin Daïa. Cet cap.xun.
^''"' ^' '^'''
créments étaient confondus; ses vives dou- ennemi des chrétiens eut d'abord le chagrin
leurs lui faisaient jeter des cris horribles. On d'apprendre la défaite de Maxence, avec qui
faisait cuire des animaux, qu'on lui appli- il s'était ligué contre Constantin et Licinius.
quait tout chauds, afin que la chaleur attirât Enfin, ayant été entièrement défait lui-même
la vermine au dehors; mais quand on avait à la bataille de Serènes, puis assiégé par terre
nettoyé ses plaies, les vers en ressortaient en et par mer dans la ville de Tharse, se voyant
plus grand nombre, ses entrailles étaient une sans nulle espérance de secours et dans l'im-
source inépuisable. Son corps était défiguré poisibiUté d'éviter de tomber entre les mains
[iV SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 507
du vainqueur, il voulut prévenir son mal- pecteur du collège de Gottingen, nous possé-
heureux en avalant du poison; mais
sort dons depuis longtemps cet écrit sans en re- ,
comme auparavant il avait bu et mangé avec connaître le vrai père. Ce savant professeur
excès, selon la coutume de ceux qui, pour la dit que les énigmes données sous le nom de
dei-nière fois, veulent goûter le plaisir de la Symposius, auteur entièrement inconnu d'ail-
bonne cbère, le poison, trouvant un estomac leurs, et publiées pour la première fois, Tan
rempli, ne put agir assez vite; il luiconsuma 1500, par les soins de Pierre Pithou, dans
les entrailles peu à peu avec des tourments sa Collection d'épigrammes et d'autres i)etits
quileportaient jusqu'à la fureur, de sorte que, poèmes anciens, ne sont autre chose que le
quatre jours avant sa mort, il prenait de Symposion ou le Banquet de Lactance. Tout
la terre et la mangeait. Il se heurtait la tête semble appuyer cette conjecture. 1° 11 parait,
contre les murailles avec tant de violence, par la préface des Enigmes, qu'elles furent
que ses yeux sortirent de leur orbite. Enfin, proposées dans un banquet. 2° Saint Jérôme
devenu aveugle, il vit Dieu environné de ses dit que l'ouvrage de Lactance était écrit en
anges, qui lui faisait son procès. Il s'écriait, vers hexamètres; tels sont ceux des Enig-
comme ceux qui sont au milieu des tour- mes. 3° Il n'est pas dilBcile de voir qu'un co-
ments Ce n'est pas moi qui suis coupable,
: « piste négligent a pu écrire Symposius pour
ce sont les autres. » Puis il avouait son cri- Symposion mettre le nom d'une personne
,
me et priait Jésus-Christ avec larmes d'avoir pour celui d'une chose, à cause de la resr
égard à son repentir. Ainsi il rendit son âme semblance. 4** Cselius Firmianus, qui sont
criminelle au milieu de ces inutiles gémis- des surnoms de Lactance, sont aussi ceux du
Cap. LetLi. sements. La vengeance divine s'étendit même prétendu Symposius. Voilà les raisons qui
jusque sur les enfants de ces impies, qui pé- ont engagé Heumann à rendre ce petit ou-
LU. rirent tous misérablement. « Cette histoire, vrage à son véritable auteur, et il faut conve-
ajoute l'auteur, est fondée sur le rapport de nir que ces conjectures paraissent assez fortes
personnes dignes de foi. J'ai cru devoir rap- pour faire douter au moins si ces Enigmes
porter les choses de manière qu'elles se la ne seraient pas en effet l'écrit même de Lac-
mémoire de
sont passées, afin de conserver la tance. Quoi qu'il en soit, ces Enigmes ne sont
tous ces fameux événements et afin que ceux point à mépriser on y voit de l'esprit et de
:
qui écriront l'histoire après nous ne puis- la facilité : mais comme nous n'en pouvons
sent en corrompre la vérité, en passant sous rien tirer qui aille à notre but, il nous suffit
silence les crimes de tant d'empereurs, et la de les avoir indiquées.
vengeance que Dieu en a tirée. » Il est plus certain que nous avons perdu
• Habemus ejus Symposium, quod adolescentulus scrip- sibi locum divinam providentiam dédisse ei, qui pu-
sit 'OSoiTTopixov de Africa usque Nicomediam, he-
j* ordinationem suam.
tuerit intelligere
xametris scriptum versibus, et alium librum qui inscri- 3 Saint Jérôme cite un fragment de la troisième
bitur Gramruaticus ad Asclepiadem libros duos ; épitre à Probe Lactatitii nostri, quœ in tertio ad
:
De Persecutione librum unum; ad Probum episto- Probum volumine de hac {Gatatarum) génie opinatus
iarum libros quatuor; ad Severum epistolarum libros sit, verba ponemus : Galli, inquit, a cajidore corporis
duos; ad Demeirianum auditorem suum libros duos. Galatce nuncupantur, et Sibylla sic eos appellat. Quod
Hieron., in Catalogo, cap. 80. siynificare voluit Poeta cum ait : Tum lactea colla
2 Asclépiade était ami de Lactance, auquel il avait aura innectuntur, cum posset dicere candida. Hinc
dédié un écrit où il traitait de la Providence et du utique Galalia provincia in quam Galli aliquando
,
souverain bien. Voici comment en parle Lactance venientes, cum Grœcis se miscuerunt. Unde primum ea
lui-même dans le septième livre de ses Institutions, regio Gallo-Grœcia 7iominata est. Nec mirum si hoc
chap. 4. Optime Asclepiades noster de providentia de Galatis dtxerit. Hieronym., in Proœm. lib. II in
summi Dei disserens in eo libro quem sa^ipsit ad me ; Epist. ad Galat., pag. 253, tom. IV. GallaBus rapporte
atque ideo, inquit, merito quis arbitretur proximum qu'il se trouvait, il n'y a pas longtemps, deui ma-
508 inSToniK (ll-NKRALE DKS AUTl'URS ECCLÉSIASTIQUES.
deux à Démétricn; ulupart de ces éctits
l;i premier paraît être d'un poète païen, puis-
sont cités par saint Jérôme. Presque toutes qu'il y est parlé d'Apollon comme d'une véri-
ses lettres étaient fort longues; elles trai- table divinité, et du Phénix comme d'un prê-
taient des mesures, de la situation des pays, tre admis aux mystères de ce Dieu. L'autre
pres qu'à dos avocats et à des gens de lettres; le nom parmi ses ouvrages, tant manuscrits
ce qui en dégoûta le pape Damase *, à qui qu'imprimés. On en chante encore une par-
saint Jérôme les avait données à lire. Il y en tie dans quelques Eglises, au temps pascal.
avait néanmoins où Lactance traitait des ma- Quant au poème de la Passion du Seigneur,
tières de la foi, puisque saint Jérôme l'accusa il y a beaucoup de goût et d'érudition, et il
d'avoir nié la personne du Saint-Esprit dans n'est pas indigne de Lactance, mais il ne se
ses E pitres à Démétricn *. rencontre dans aucun manuscrit de ses ou-
2. Nous ne savons point s'il exécuta tous vrages. D'ailleurs, il n'y a pas d'apparence
les projets d'ouvrages que l'on voit en divers que, du temps de ce Père, on exposât un
endroits de ses écrits. Dans son livre de l'Ou- crucifix au milieu des églises, comme on le
v}'age de Dieu, il promet d'écrire contre les fait aujourd'hui. On n'est pas mieux fondé à
philosophes ', qu'il prétendait réfuter tant lui attribuer des commentaires sur Stace, des
par les lumières de la religion chrétienne, arguments sur les livres des Métamorphoses
que par la diversité des sentiments qui exis- d'Ovide, et un livre des Spectacles, que l'on
tait entre eux *. Peut-être n'est-ce autre chose imprima sous son nom à Venise, en 1705.
que ses Institutions, où il attaque souvent les
philosophes, principalement dans le dernier ARTICLE m.
livre '. On voit aussi qu'il avait dessein d'é-
DOCTRINE DE LACTANCE; JUGEMENTS DE SES
crire contre les Juifs ,
pour les convaincre
ÉCRITS ; CATALO&UE DES ÉDITIONS QU'ON EN
d'erreur et de crime ^; et il déclare, en plu-
A FAITES.
sieurs endroits, qu'il méditait un ouvrage
particulier contre toutes les espèces d'héré- 1. Quoique Lactance se soit plus appliqué Doctrine
sies '. Baluze a donné, sous le nom de Lac- à détruire la religion des païens qu'à établir suMe'^c'uitS
dernier, qu'il dit avoir trouvé parmi les œu- ver dans ses écrits plusieurs choses qu'il est qio^èonsfs"
vres de ce Pèx'e, quoique sans nom d'auteur. important de remarquer, pour montrer qu'il bonheui\
C'est ce que nous connaissons de ses écrits, n'était nullement étranger à la connaissance
soit vrais, soit douteux. de nos dogmes et qu'il possédait les règles
Voici ceux qui lui sont faussement attri- les plus pures de la morale chrétienne. Se-
bués, au jugement de tous les savants: un lon Lactance, l'homme a été créé pour vivre
poème intitulé Du Phénix , un sur la Pâque, dans la piété et dans la justice ^, et tel doit
et un troisième de la Passion du Seigneur. Le être l'objet de ses désirs; tout son bonheur
nuscrifs des Epîtres de Lactance dans un couvent viiœ beatœ statum spectenf, et quidem contra philoso-
d'Egmont, en Hollande, mais qu'ils sont perdus. phos.... quospartim nostris armis, partim vero ex ip-
GallaBus, in Vit. Lad. Proleg., pag. 13. sorum inter se concertatione sumptis
revihcemus, ut
1 Fateor tibi eos quos mihi jampridem dederas Lac- appareat eos induxisse potius errorem quam sustulisse.
tantii libros, ideo non libenter lego, quia et plurimœ Idem, ibid., cap. 20.
episfolœ hujus usque ad mille spatia versuum tendun- » Tiilem., Me'm. ecclés., tom. VI, pag. 211.
tur, et raro de nostro dogmate disputant : quo fit ut 6 Erit nobis contra Judœos separata materia, in qua
et legenti fasiidium generet longitudo,et si quœ hrevia illos erroris et sceleris convincemus. Lact., lib. VII
sunt, scholasticis magis sint apta, quam nobis, de me- Instit., cap. 1.
tris, et regionum situ, et philosophie disputantia. Dam., ^ Postea plenius et vérins contra omnes mendaciorum
Epist. ad Hieron., pag. 579, tom. I Epist, Sum. Pont., sectas proprio separatoque opère pugnabimus. Lact.,
edit. Coûtant. lib. IV Instit., cap. 30.
* Lactantius in libris suis, et maxime in Epistolis 8 II MiscelL, pag. 46,
Baluze, tom.
ad Demetrianum, Spiritus Sancti negat substantiam, Apparet nullam aliam spem vitœ homini esse pro-
9
et errore Judaïco dicit eum tel ad Patrem referri, tel positam, nisi ut, abjectis vanitatibus et errore misera-
ad Filium, et sanctificationem utriusque personœ sub bili, Deum cognoscat et Deo seniat; nisi huic tempo-
ejus nomine demonstrari. Hieronym., Epist. 41 ad rali renuntiet vitœ, ac se rudimentis justitiœ, ad cul-
Pammach. et Océan., pag. 345, touj. IV'. tuni religionis instituât. Hac enim conditione gignimur,
* Sed erit nobis contra philosophas intégra disputa- ut generanti nos Deo justa et débita obsequia prœbea-
tio. Lact., lib. de Opif., cap. 15. mus, hune solum noverimus, hune sequamur. Lactant.,
* Statut quam multa potero litteris tradere, quœ ad lib. IV Instit., cap. 28. Ergo in Dei agnitione et cultu
[IV« SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANGE. 509
consiste à connaître le vi'ai Dieu, à l'aimer tenir les plus grossiers par la crainte s, mais
et à le servir, en sorte qne tous nos soins un devoir de l'homme qui , a été fait le corps
et toutes nos actions tendent à mériter de le droit et la tète élevée de la terre, pour mar-
posséder; le vrai culte de Dieu cousiste à lui que qu'il doit r-e porter à la contemplation
offrirun cœur pur *, ou bien, ce qui revient de son créateur «. En effet, Dieu ne nous a
au même, les sacrifices dignes de lui sont créés qu'à condition de lui rendre nos justes
riiumilité du cœur, l'innocence de la vie ^, obéissances ', de le connaître et de le servir
les lionnes œuvres, jointes à l'observation seul, et c'est de cette obligation de piété en-
de ses commandements; la justice n'est au- vers lui que la religion a pris son nom *.
tre chose que le culte saint et religieux que 2. Les arguments dont il se sert pour éta- Sur la vé-
rité de la re-
nous rendons au vrai Dieu ^, l'injustice est la blir la vérité de la religion chrétienne sont ligion chré-
tienne et
désertion de ce culte ; ainsi il n'y a de vraie l'accomplissement de toutes les prophéties l'atitorilé
des Ecritu-
religion que celle qui est appuyée sur la ver- eu personne de Jésus-Christ ', ses miracles
la res.
ne doit reconnaître de sagesse que là où se constauce des martyrs '*, le changement des
trouve la religion; de là vient encore que mœurs *'; et afin de faire tomber le reproche
celle des païens doit être tenue pour fausse, de nouveauté •* que les païens faisaient à no-
parce qu'elle n'a pas la sagesse. La religion tre religion, il entre dans le détail des temps
n'est pas une invention des sages pour con- auxquels nos écrivains sacrés ont vécu, et
quisitionem aliquam veritatis, sed tantummodo ritum catorem : continuo et œquus ,.et prudens, et innocens
colendi, qui non ofjficio mentis, sed ministerio corporis erit. Uno enim lavacro malitia omnis abolebitur
constat. Et ideo non est illa religio vera judicanda, pauca Dei prœcepta sic totum hominem immutant, et
quia nullis justitiœ virtutisque prœceptis erudit, effi- exposito vere 7iovum reddunt, ut no9i cognoscas eumdem
citque meliores. Lib. IV Instit., cap. 3, pag. 571. esse. Lact., lib. III Instit., cap. 25,pag. 567.
^ Falsa igitur est et illa sententia, qua putant ter- 1* Antiquiores etiam Grœcis scriptoribus Prophetœ
roris ac metus gratia religionem a sapientibus insti- reperiuntur : quœ omnia eo proféra, ut errorem sen-
tutam, quo se homines imperiti a peccatis alistinerent. tiant, qui Scripturam coarguere nituntur tanquam no-
Lib. de Ira Dei, cap. 10, pag. 644. vam et recens pctam, ignorantes ex quo fonte sanctœ
* Nam cum cœterœ animantes pronis corporibus in religionis origo manaverit. Quod si quis, collectis
humum spectent, quia rationem ac sapientiam non ac- perspectisque tempo? ibm, fundamentum doctrinœ salu-
ceperunt, nobis autem status reclus, sublimis vultus briter jecerit, et veritatem penitus comprehendet, et
ab artifice Deo datus sit, apparet, istas religiones errorem cognita veritate deponet. Lact., lih.lW Instit,
deorum non esse rationis humanœ; quia curvant cœ- cap. 5, pag. 572.
GiO HISTOIRE n]':NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
prétend qu'ils sont pins anciens que les au- plus deux autres passages qu'il cite sous *
teurs grecs, et que Moïse écrivait près de le nom de SalOmon. Il fait Esdras auteur du
neuf cents ans avant la guerre de 'l'roie *. livre qui, chez les Latins, porte le nom de
Lactanco rcniar(]nc en même temps • que, Néhémie ', suivant en cela les Hébreux et
pour bien entendre les écrits des Proi)liètcs, les Grecs, qui ne font qu'un livre de ceux
ilne suffit pas de s'appliquer à Tintelligence d'Esdras et de Néhémie •°. Lorsqu'il allègue
du texte de leurs prophéties, qu'il est encore quelques passages des Psaumes, c'est tou-
besoin de s'instruire du temps auquel elles jours sous le nom de David : il paraît môme
ont été écrites, et qu'alors, en combinant, ne pas douter qu'il ne soit auteur de tous ces
on trouvera aisément après combien d'années cantiques ", qu'il nomme divins '^ Il recon-
elles ont eu leur accomplissement ; car tous naît Salomon pour auteur des livres de la
ont marqué sous quel règne ils ont prophé- Sagesse et de l'Ecclésiastique ", et dit que
tisé. Il attribue à Moïse ^ le livre des Nom- le Filsde Dieu a parlé par la bouche de ce
bres et du Deutéronome, et à Josué celui prince inspiré par le Saint-Esprit •*, lorsqu'il
qui porte son nom *. Il donne à Esdras ^ le a dit : Dieu m'aau commencement de ses
fait
nom de prophète, et cite de lui un passage " voies Suivant la coutume de plusieurs an-
'S.
que nous ne lisons point dans nos Bibles, ciens, il cite le petit livre de Baruch sous le
et que saint Justin dit avoir été retranché nom de Jérémie '^.
par les Juifs ' . Nous n'y trouvons pas non 3. Dieu est la raison éternelle " et un être Sur la
nature da
per annos quadraginla populum rexisset, successorem minus terrae buic et huic domui mala? Et dicent :
habuit Josuen, qui septem et viginti annos tenuit prin- Quia reliquerunt Dominura Deum suum, et persecuti
cipatum, etc. Ibid. sunt regem suum diloctissimum Deo, et cruciave-
Idem, ibid.
* runt illum in bumilitate magna propter hoc im- :
nomio ita scriptum reliquit : Et dixit Dominus ad runt a te et ai)jecfcrunt legem tuam post cor suum;
me Prophetam excitabo eis de fralribus eorum si-
: et prophetas tuos interfeceruut, qui obtestabanlur
cut te. Lib. IV Instit., cap. 17, pag. 580. eos, ut revertereuturad te. Lact., lib. IV Instit., c. 11,
^ Item Jésus Nave, successor Moysi. Et dixit Domi- pag. 575. Nous lisons ce passage de Lactance dans
nus ad Jesum : Fac tibi cultellos petrinos nimis acu- le secoûd livre d'Esdras. Or, il est certain que Né-
tos. Ibid. hémie en est l'auteur, comme nous l'avons fait voir
BEsdras etiam propheta, qui fuit ejusdem Cyri dans notre premier volume, chap. 6, art. 2, pag. 108.
temjjoribus, a que Judœi sunt*restituti, sic loquitur : '" Apud Hebrœos, Esdrœ Nehemiœque sermones in
Desciverunt a te et abjecerunt legem tuam. Lib. IV unum volumen coarctantur. Hieron., Praefat. in Esdr.
Instit., cap. 11, pag. 575. )' Hujus [Salomonis) pater divinorum scriptor kym-
trum, quouiam habemus humiliare eum in signe : '2 Salomon in libro Sapientiœ his vei-bis usus est :
et posthœc sperabimus in cum, ne descratur biclo- Circumveniamus justum, quoniam insuavis est nobis,
cus in œternum tempus, dicit Dominus Deus virtu- et exprobat nobis peccata legis. Lib. IV Instit., c. 16,
tum. Si non crediderilis ei, neque cxaudierilis an- pag. 619. Salomon ipsum verbum Dei esse demonstrat...
nunciationem ejus, eritis derisio in gentibus. Lib. IV Ego, inquit , ex ore Altissimi providi. Ecclesiastici
Instit., cap. 18, pag. 581. cap. 24, V. 5. Lib. IV Instit., cap. 8, pag. 574.
^
Ex verbis quœ Esdras de lege et constitutione ^'^
Ipse est Dei Filius, qui per Salomonem, supientis-
Paschce commemoravit, hune lucum abstulerunt : Et simum regem, divino spiritu plénum locutus est ea quœ
dixit Esdras populo : Hoc pascba, etc. Justinus, in subjecimus : Deus condidit me in inilio viarum sua-
Dialogo cum Tryphone, pag. 292. rum, in opéra anle stecula. Proverb., cap. 8, v. 22.
8Salomon ita dicit: Infirmatus est utérus virginis, Lib. IV Instit., cap. 6, pag. 573. — »» Ibid.
et accepit fœtum; et gravala est, et facta est in Item propheta Jeremias sic ait : Hic Deus noster
18
mulla miseratione mater virgo. Lact., lib. IV Instit., est, etnon deputabitur alius absque illo qui inve- ;
cap. l'î, pag. 576. Sed et Salomon, filius ejus (David), nit omnem viam prudentiœ, et dédit eam Jacob
qui Hierosolymam condidit, eatn esse perituram in puero suo, et Israël dilecto sibi. Baruch, cap. 3,
ultionem sanctœ crucis prophetavit : Quod si averti- V. 36 et 37. Lib. IV Instit., cap. 13, pag. 576. Libellum
mini a me, dicit Dominus, et non custodieritis veri- autem Baruch vulgo editioni Septuaginta copulalur,
tatem meam, rejiciam Israël a terra, quam dedi nec habetur apud Hebrœos. Hieron., in Prologo in Je-
illis, et domum banc, quam œdificavi illis in nomine remiam, pag. 526, tom. III.
meo, projiciam illam ex omnibus, et erit Israël in *'
Deus autem, qui est œtema meris, ex omni uti'
[iV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 511
rituelle ', ainsi que sa vertu ; et quand Lac- c'est-à-dire une puissance suprême, et qu'il
tance admet en Dieu une certaine figure *, soutient contre les Gentils que, bien que les
il n'entend autre chose sinon que Dieu est chrétiens admettent en Dieu un Fils, ils ne
un être invariable , incapable de prendre dif- reconnaissent pas pour cela plusieurs dieux
férentes formes et différentes figures, comme ce Fils n'étant qu'une même substance avec
le voulaient les stoïciens s, que l'auteur com- son Père *', de qui il procède, comme le
bat en cet endroit. Il dit que le nom du Fils rayon du soleil, et comme le ruisseau de
que parte perfedœ consummatœque virtutis est. Lact., lib. I Physiolog. Stoicorum, Dissert. 7, pag. 541, ex
lib. I Instit., cap. 3, pag. 517. edit. Antverp., an. 1637.
1 Retrahant ergo se homines ab erroribus
, et abjec- 1" Primum scire nos convenit nomen ej'us neque an-
tis religionibus pravis, parentem suuni Dominunique gelis quidem notum esse, qui morantur in cœlo, sed
cognoscant : cujus nec virtus œstimari potest, nec ipsi soli, ac Deo Patri ; nec ante id publicabitur, ut
mugnitudo perspici , nec principium comprehendi. est sanctis litteris traditum, quant dispositio Dei fue-
Lib. I Instit., cap. 7, pag. 520. rit impleta. Lactant., lib. IV Instit., cap. 7, pag. 573.
2 Nam si Deus est nomen summœ potestatis, incor- 11 In primis enim testificamur illum bis esse natum,
ruptibilis esse débet, perfectus, impassibilis, nulli rei primum in carne. Lactant., lib. IV
in spiritu, postea
subjectus. Lib. I Instit., cap. 3, pag. 517. Ex seipso est, Instit., pag. 573. Idcirco etiam Filium bis nasci
cap. 8,
et ideo talis est, qualem se esse voluit; impassibilis, oportuit, ut ipse fieret aTCaxwp atque OL\t.-f\-nùç : in
immutabilis, incorruptus, beatus, ceternus. Lib. II prima enim nativitate spiritali afAï^Toip fuit, quia sine
Instit., cap. 8, pag. 542. Deus divina mens et œterna officia matris a solo Deo Pâtre generutus est : in se-
dicitur corpore soluta et libéra. Idem, lib. VII Instit., cunda vero curnali aTTattop fuit, quoniam sine Patris
cap. 3, pag. 623. Est Deus et incorporalis, et invisibi- officio virginali utero procreatus est. Lib. IV Instit.,
Its, et œtemus. Ibid., cap. 9, pag. G28. cap. 13, pag. 576.
12 Deus antequam hoc opus mundi adoriretur, sanc-
3 Dei Spiritus ac numen ubique diffusum abesse
nunquam potest. Lib. II Instit., cap. 2, pag. 535, et ium et incorruptibilcm spiritum genuit, quem Filium
lib. VII Instit., cap. 3, pag. 624. nuncuparet, et quamvis alios postea innumerabiles
per
* Posse Dei est : nam si non potest, Deus non est. ipsum creavisset, quos angelos dicimus, hune tamen
Homo facit ex eo quod est, quia per mortalitatem im- solum primogenitum divini nominis appellatione di-
becillis est, per imbecillitatem , definitœ uc modicœ gnatus est, patria scilicet virtute ac majestate pollen-
potestatis. Deus autem fecit ex eo quod est, quia per tem autem summi Dei Filium, qui sit potestate
; esse
œternitutem fortis est; per fortitudinem , potestatis maxinta prœditus, non tantum congruentes in unum
immensœ, quœ fine ac modo caret sicut vita factoris. voces Propheiarum, sed etiam Trismegisti prœdicatio,
Lib. II Inst., cap. 8, pag. 542. et sibyllarum vaticinia demonstrant. Lib. IV Instit.,
* Deum
quœro, ultra quem nihil est omnino : qui cap. 6, pag. 572.
fons rerum. Hic sit necesse est, qui ccelum
et origo sit quomodo cum Deum nos
13 Fartasse quœrat aliquis,
ipsum condidit terramque fundavit. Lactant., lib. I unum colère dicamus, duos tamen esse asseveremus,
Instit., cap. H, pag. 524. Deum Patrem et Deum Filium ; quœ asseveratio ple-
* Deus vero si perfectus est [nam perfectus est) ut rosque in maximum impegit errorem. Quibus cum
esse débet, non potest esse nisi unus, ut in eo sint om- probabilia videantur esse quœ dicimus, in hoc uno la-
nia. Lib. l Instit., cap. 3, p. 517, et cap. 4 et 5, p. 518. bare (editio romana, laborare) nos arbitranlur, quod
''
Nam cum {animœ) in se nihil habeant solidum et et alterum et mortalem Deum fateamur.... Cum dici-
contrectabile, a solidis et corporalibus nullam vim pati mus Deum Patrem. et Deum Filium, non diversum
possunt, sed quia in solis spiritibus vivunt,a solo Deo dicimus nec utrumque secernimus ; quia nec pater sine
tractubiles sunt, eut virtus ac substantia spiritalis est. filio potest, nec filius a pâtre secerni : siquidem nec
Lib. VII Inst., cap. 21, pag. 635. pater sine filio nuncupari, nec filius potest sine pâtre
8 Aliter de unica il/a majestate sentiunt, quam Ve- generari. Cum igitur et pater filium faciat, et films
ritas habet, qui aut figuram negant habere ullam jiatrem , una utrique mens, unus spiritus, una substan-
Deum, aut ullo affectu commoveri putant. Lib. de Ira tia est; sed ille quasi exuberans fons est, hic tan-
Dei, cap. 2, pag. 639. Omitto de figura Dei dicere, qunm ille tanquam sol , hic quasi
defluens ex eo rivus
;
quia stoici negant habere ullam formam Deum, et in- radius a sole porrectus ; qui quoniam summo Patri et
gens alia maieriu nascitur, si eos coarguere velimus. fidelis et charus est, non separatur, sicut nec rivus a
Ibid., C'ip. 18, pag. 649. fonte, nec radius a sole, quia et aqua fontis in rivo
9 Deus est spiritus intelligens et igneus, formam ipse est, et solis lumen in radio : œque neque vox ab ore
non habens, sed in omnes se vertens et omnibus assi- sejungi, nec virtus aut manus a corpore divelli potest,
milans. Possidonius in Stobœo, apud Lipsium, tom. IV, IV pag. 587.
I Lib. Instit., cap. 29,
KI2 HISTOmn GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
sa source, sans eu être séparé. II n'est pas la mer Rouge ®; ils ont été créés spirituels % It ftTtiee et
«les bonnes
moins formol sur la natiu-o humaine en Je- immortels *, mais doués du libre arbitre », (Tiivres , et
sur les sa-
sus-Christ, dont il [trouve la réalité par les avec lequel ils pouvaionl déchoir de Iji jus- crements.
diverstîs actions de sa vie, particulièrement tice ou y pei-sévérer. L'ùme de l'homme est
par ses soullrances '. Il met sa mort en la aussi spirituelle de sa nature '°, ou au moins
quinzième année de Tibère*, sous le consu- elle n'est rien de terrestre oii de sensible;
lat des deux Geminus, comme l'avait fait elle " est immortelle et libre dans ses opéra-
Tertidlien, et dit que Jésus-Christ ne resta lions '*. L'homme n'est pas capable, par Ini-
que deux jours dans le tombeau ^ ce qu'il : même, d'approfondir le secret de Dieu ni ses
faut entendre de deux jours entiers, en sorte desseins éternels "; il ne peut non plus, par
qu'il soit seulement ressuscité le troisième, ses propres forces, arriver à la connaissance
selon cette prophétie d'Osée, à laquelle Lac- de la vraie religion **. La bonne vie elface les
tance parait faire allusion : « Il nous rendra péchés passés •*, comme la mauvaise rend
la vie daus deux jours *, le troisième jour il inutiles les actions de justice qui ont précédé;
nous ressuscitera. » les œuvres de miséricorde sont surtout effi-
Fnr la un i. « Les anges ont été créés pour exécuter caces pour nous mériter la rémission de nos
tiiro ries an
me*V!iVtâ ^^^ volontés dc Dieu "; l'un d'eux fendait les offenses *^ et nous rendre Dieu propice '^
uécessitéde
eaux ct ouvrait Ic passage aux IsraéUtcs daus mais elles ne doivent jamais être un titre
» Lact., lib. IV Instit., cap. 12, 13, 14, 15, 16, 17, fugit, nullo ictu dissolvi potest. Lib. VII Institut.,
18 et 19. cap. 12, pag. 629.
* An7io quinto decimo {Tiberii Cœsaris), id est duo- 11 Ergo si opéra corporis ideo mortalia sunt, quia
bus Geminis consulihus, ante diem septimam calendu- ipsum mortale est, sequitur ut anima ex eo immortalis
rum aprilium {duo auti'juiores manuscripti codices appareat, quia videmus opéra ejus non esse mortalia.
regii et alii quidam aute diem X cal. april.), Judœi Eodem modo desideria quoque corporis animique dé-
Christum crucifixerunt. Lib. IV Instit. , cap. 10. clarant, ulterum esse mortale, alterum sempiternum.
pag. 574, et lib. de Mort. Persecut., num. 2, pag. 2. Corpus enim non nisi temporal,ia desiderat, id est ci-
^ Non amplius quarn biduo apud inferos fuit (C/irts- bum, potum, indumentum, quielem, voluptatem , et
tus). Lib. IV Instit., cap. 27, pag. 586. tamen hac ipsa sine nutu et adminiculo animi nec
* Vivificabit nos post duos dies : in die tertia susci- cupere, nec assequi potest. Animus autem per se multa
tabit nos. Osée, cap. G, v. 3. desiderat, quœ ad officium fructumve corporis non
* Neque cngeli, cum sint immortales, dici se Deos redundent, eaque non fragilia, sed œterna sunt, ut
aut patiuntur, aut vohint, qtcorum unum solumque of- fama virtutis , ut memoria nominis. Ibid., cap. 11,
ficium est servire nutibus Dei : nec omnino quicquam pag. 629.
nisi jussu facere. Lact., lib. II Instit., cap. 16, p. 549. 1* î^on enim cancre sua sponte fidcs possunt, ut sit
In eductione [llcbrœorum) ostendit virtutem suœ
* ulla in lus comparatio, ac similitudo viventis, Animus
majestatis Deus. Trajecit enim populum medio mari autem sua sponte et cogitât et movetur. Lact., lib. de
Rubro, prœcedente angelo et scindente aquam, ut po- Opificio Dei, cap. 16, pag. 662.
pulus per siccum gradi posset. Lib. IV Inst., cap. 9, 13 Veritas, id est arcanum summi Dei, qui fecit
J hlam et angeli Deum metuunt, quia castigari ab eo omnia, ingenio ac propriis sensibus non potest com-
possunt inenarrabili quodo.m modo nam cum in se prehendi ; alioquin nihil inter Deum hominemque
nihil habeant solidum, et contrectabile, a soUdis et distaret, si consilia et dispositiones illius majestatis
corporalibus nullam vim pati possunt, sed quia in so- œtemœ cogitatio assequeretur humana. Lib. VII Ins-
lis spiritibus vivutit a solo Deo tractabiles sunt. Lib. VII tit., cap. 1, pag. 515.
Instit., cap. 21,pag. 035. i* Homo autem per seipsum pervenire ad hanc scien-
lati substantiœ cœlestis amitterent dignitatem. Lib. II tœ vitoE probitas, quia superveniens nequitia justitiœ
Instit., cap. 14, pag. 548. opéra delevit, ita nihil officiunt peccata vetera correc-
"> Solidum et comprehensibile corpus est, et oculis, to, quia superveniens justitia labem vitœ prioris abo-
et manu videtur, et tangitur; anima vero tenuis et levit. Lib. VI Instit., cap. 24, pag. 620.
tacturnvisumque fugiens. Corpus e terra fictum atque 1^ Magna misericordiœ merces,cui Deuspollice-
est
solidatum est : anima in se nihil concreti, nihil ter- tur, peccata se omnia remissurum. Si audieris, inquit,
reni ponderis habet, ut Plato disserebat : nec enim preces supplicis tui, et ego exaudiam tuas ; si miser-
tantam posset habere solertiam, tantam virii, tantam tus laborantium fueris, et ego in tuo labore miserebor.
celeritatem, nisi originem traheret e cœlo. Corpus igi- Si autem non respexeris, nec adjuveris, et ego animum
tur quoniam fictum ex ponderoso et corruptibili ele- tuum contra te geram, tuisque te legibus judicabo.
menlo, et tangibile est et visibi/e, corrumpitur et oc- Ibid., cap. 13, pag. 612.
cidit... anima autem, quia tenuitate sua omnem iactum "Sj quis victu indiget, impertiamur: si quis nudus
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 513
chés, dit-il, sont efTacés lorsque nous faisons Il n'y a que TEgUse catliolique où l'on ob-
l'aumône dans le regret de les avoir commis, tienne la rémission des péchés par la péni-
et non lorsque nous les commettons dans tence 5; les sectes hérétiques ou schismatiques
l'espérance de les racheter par les aumônes. n'ont point cette prérogative. » Lactance de-
Les vertus des infidèles sont vaines ^, Le bap- mande, dans un vrai pénitent, qu'il confesse
tême efïace tout d'un coup tous nos péchés 5, ses péchés ®, môme cachés, qu'il en ait de la
tant est grande la force de la sagesse divine, douleur % qu'il ait un désir sincère * de mieux
dont il se fait une infusion dans ce sacre- vivre à l'avenir, et qu'il satisfasse pour ses
*
ment. Ce fut pour purifier l'eau du baptême fautes passées ^.
que Jésus voulant, par son moyen, sauver 5. Il ne
pas qu'il soit jamais '« per-
croit Sur le
mensonge,
les nations, comme il sauvait les Juifs par mis de mentir, ni de prêter à usure ", à un sur la pro-
occurrerit, vestiamus. Si quis a potentiori injuriam cata non sua, quœ utique non habebat, sed carnis
sustinet, eruamus. Pateat dotnicilium nostrum vel pe- quam gerebat, aboleret : ut quemadmodum Judœos
reg-.inis, vel indigentibus tecto. Pupillis defensio, suscepta circumcisione , sic etiam gentes baptismo, id
vidais tutela nostra non desit. Redimere ab hoste cap- est purificati roris perfusione salvaret. Lact., lib. IV
tivas, magnum misericovdiœ opus est ; item œgros Instit., cap. 15, pag. 578.
pauperes visttare atque fovere : inopes, aut pauperes, ^ Sed tamen quia singuli quique cœtus hœreticorum
si obierint, non patiamur insepultos jacere. Hœc sunt se potissimum chrisfianos, et suam esse catholicam
opéra, hœc officia miser icordiœ : quœ si qi'.is perfece- Ecclesiam putant, sciendurn est, illam esse veram, in
rit, verum et acceptum sacrificium Deo immolabit. Hœc qua est confessio et pœnilentia; quœ peccata et vul-
litabilior victima est apud Deum : qui non pecudum nera, quibus subjecta est imbecillilas carnis, salubriter
sanguine, sed homittis pietate placatur : quem Deus, curât. Lib. IV Instit., cap. 30, pag. 588.
quia justus est, sua et ipsum lege, sua et conditionc * Volens (Deus) vitœ ac salut i nostrœ pro œterna
Jnstit., cap. 13, pag. 613. 8 menteni suam quasi ab insania reci-
Resipiscit, ac
* Sed putemus péri posse ut aliquis naturali et in- pit, quem errati piget, castigatque seipsum dementiœ,
genifo bono veras virtutes copiât, qualem fuisse Ci- et confirmât animum suum ad rectius vivendum : tum
monem Athenis, qui et egentibus stipem dédit, et pau- illud ipsum maxime cavet, ne rursus in eosdem la-
peres invitavit, et nudos induit ; tamen cum illud queos inducatur. Ibid.
unum, quod est maximum, deest, agnttio Dei ; jam 9 IV Instit., cap. 17, pag. 580.
Ibid. et lib.
illa bona omnia supervacua sunt, et inania, ut frustra Cœtera quœ observare cultor Dei débet, facilia
10
in his assequendis luboraverit.... quare non dubium, sunt, itlis virlutibus comprehensis, ut non mentiatur
quin impius sit, quisquis Deum non agnoverit, omnes- unquam, decipiendi aut nocendi causa. Est enim nefas,
que virtutes ejus quas iiahere aut tenere se putat; in eum qui veritatt studeat, m aliqua re esse fallacem,
illa mortifera via reperiuniur, quœ est tota lenebra- atque ab ipsa, quam sequitur, veritate discedere. In
rum. Lib. VI Jnstit., cap. 9, pag. 609. hue justitiœ virtutumque omnium via, nullus menda-
* Dainjustum, insipicntern, peccutorem : continua cio locus est. Lib. lusiit., cap. 18, pag. 615.
et œquus, et prudens, et innocens erit. Uno enim lava- 11 Pecumœ, si quam crediderit, non accipiat usuram,
cro malitia omnis abolebitur. Tanta divinœ supientiœ ut et beneficium incolume, quod succurrat necessi-
sit
vis est, ut inhominis pectus infusa, matrem delicto- tati et abstincat se prorsus aliéna. In hoc enim génère
rum ; ad quod
stultitiam uno semel ir/ipetu expeilat officiidébet suo esse contentus, quem oporteat alias
efficiendum, non mercede, 7ion libris, non lucubratio- ne proprio quidem parcere, ut bonum faciat, plus au-
nibus opus est. Gratis ista fiunt, facile, cito, modo tem accipere quam dederit, injustum est. Quod qui
pateant aures, et pectus sapientiam sitiat. Nemo ve- facit, insidiatur quodam modo, ut ex alterius necessi-
reatur nos; aquam non vendimus, nec solem mercede tate prœdelur. At justus nunquam prœtermittet, quo-
prœslamus. Dei fans uberrimus atque plenissimus pa- minus aliquid misericordiier faciat, nec inquinabit
let cunctis, etc. Lib. 111 Insiit., cap. 25, pag. 567. se hujusmodi quœstu sed efficiet, ut sine ullo suo
,
* Cum cœpit adolescere {Jésus) tinctus est a Joanne damno, idipsum quod commodut, inter bona opern
propheta in Jordane flumine, ut lavacro spiritali pec- numeretur. Ibid.
II. 33
rii.t ÏIISTOIRF, GÉNÉIULE DES AUTl-XmS ECCLl^lSl ASTIQUES.
fession des olirétioii d'allcr à la guerre »,de contribuer ment à mourir, il dit que celui qui prend
Cerrànllv; ù lu uiort clo persouno *; ce qu'il entend plaisir à le voir étrangler * est aussi coupa-
morale.
''"
souS doutc d'uu liouiicide et d'une guerre in- ble que s'il était spectateur et complice d'un"
juste, ou dans laiiuelle on s'engagerait moins homicide secret; ainsi il marque clairement,
par devoir que par choix et par inclination en ces deux endroits, qu'il reconnaissait des
pour une profession tumultueuse. Car il n'y guerres justes et des coupables condamnés
a aucune api>arence qu'il ait fait un crime justement.
6. Lactance souhaitait, pour le bien de la psmœiir»
aux chrétiens de servir l'Etat en portant les ^ des cliré-
grand nombre engagés dans cette profession, tassent la piété ^, la douceur, l'innocence, la
"eré^te»»**
ni qu'il ait ignoré que, suivant la doctrine bonne foi et les autres vertus des chrétiens,
même de l'Evangile, il est permis aux prin- qui étaient si unis entre eux par les liens
ces du siècle de punir celui qui fait le mal '
de la charité, qu'ils donnaient, même à leurs
et de se servir, à cet effet, du glaive qu'ils por- serviteurs, le nom de frères '. Bien que les
tent, comme ministres de Dieu, pour exécuter chrétiens pussent vivre dans les délices ',
sa vengeance. En effet, il dit, dans le chapitre ajoute-t-il, ils aimaient mieux souffrir e_t
précédent *, que les lois diviues défendent mourir, ou passer leur vie dans mépris et le
même endroit d'un homme condamné juste- du corps sacré de l'Eglise, ont été prédites par
precanles, non tantum patiuntur occidi, sed flagitant et fides moraretur. Lib. V Instit., cap. 8, pag. 693.
feruntque ad morlem cruddia et inhuntana suffragia,
^
Nam cum
omnia humana non corpore, sed spirilu
nec vulneribus satiati, 7iec cruore content i; quin etiam metiamur; tametsi corporum sit diversa conditio, no-
percussos jacentesque repeti jubent, et cadavera ictibus bis tamen servi non sunt, sed eos et habemus et dici-
dissipari ne quis iKos simulata morte deludat Hu- mus spiritu fratres et religione consenos. Lib. VI
Jus igitur publici homicidii socios et participes esse Instit., cap. 15, pag. 597.
non convenit eos qui justitice viam tenere nituniur. * Nam mm
liceat nobis jucundissimis frui volupta-
inférât, sed ut iltatam sibi non vindicet nocitu- aliquod bonum ussequatur necesse est quœ sunt illa
rum esse dixit (Cicero) bonum virmn, si fuerit iaces- quœ spernit. Atvero morte suscepta, quod ulterius bo-
situs, jam ex hoc ipso boni viri nomen amittat necesse num sperari potest, nisi œtermtatis? Lib. VII Instit.,
est, si nocebit. Non minus enim mali est, referre in- cap. 9, pag. 628.
juriam quam inferre. Nam unde certamina mter ho- ^ Anie omnia scire nos convenit, et ipsum (Deum) et
mines, unde pugnœ contentionesque nascuntur, nisi legatos ejus prœdixisse quod plurimœ sectœ et hœre-
quod improbitati opposita impatientia magnas sœpe ses huberent existere, quœ concordiam sancti corporis
concdat tempeslates ? Lactant. , lib. VI Institut., rumpererd fuerunt quidam nostrorum vel minus
cap. 18, pag. 615. Rerum imper iti, et rationis ignari, stabilita fide, vel minus docti, vel minus cauti, qui
eos affectu-o qui sunt homini ad usus bonos duti ex- dissidium facerent unitatis et Ecclesiam dissiparent ;
terminaverunt, et latius quam ratio postulat evagan- sed a, quorum fides fuit lubrica, cum Deum nosse se
tur. Inde injuste atque impie vivitur. Utuntur ira et colère simularent, augendis opibus et honori stu-
contra pares, liinc dissidia, hinc expulsiones, hinc dentes, affectabant maximum sacerdotium, et a potio-
bella contra justUiam nota sunt. Lib. VI Instit., ribus victi secedere cum suffragatoribus suis malue-
cap. 19, pag. 617. runt, quam eos ferre prœpositos , quibus concupierant
» Qui hominem, quamvis ob mérita damnatum, in ipsi ante prœponi nonnulli autem falsorum pro-
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 5ii
Jésus-Christ et ses Apôtres, il dit que le désir avoir par écrit les prédications et les prophé-
d'obtenir des évéchés a été une occasion à ties (ju'ils y avaient faites, entre autres une
queli[ues-uns de faire schisme, n'ayant pu se prédiction touchant la ruine prochaine des
résoudre à obéir à des gens qu'ils regardaient Juifs. Ce fut Néron qui fit mourir les deux
comme indignes de leur être préférés; que apôtres. Lactance fait honneur à Constantin
la séduction des faux prophètes en a porté d'avoir, le premier des empereurs romains,
d'autres à abandonner la doctrine de Dieu et connu et honoré le vrai Dieu '. Les païens
la vraie tradition, mais que ces diverses per- accusaient les chrétiens d'avoir composé les
sonnes étaient, ou moins fermes dans la foi, vers qui portent le nom des sibylles * : ce qui
ou moins instruites, ou moins vigilantes. n'empêchait pas les chrétiens d'en admettre
Sur les
7. On peut en outre remarquer dans les l'autorité ^, particulièrement de celle d'Ery-
Sibylles et
diverses au-
écrits de Lactance les choses suivantes. Les thrée, dont les vers étaient entre les mains de
res matiè-
res.
exorcismes faits au nom de Dieu sur les ' tout le monde. Vespasien aux avait défendu
possédés avaient tant de force dans la bou- Juifs de rentrer dans la Judée Lactance ne ^.
che des chrétiens, que non-seulement ils fai- croyait pas qu'il y eût des antipodes, ni que
saient fuir les démons, qui se plaignaient la terre fût ronde '. Il était persuadé que le
d'en être tourmentés et brûlés, mais qu'ils monde devait finir six mille ans après la créa-
les forçaient encore à confesser qu'ils étaient tion ^; que les anges qui avaient été envoyés
ces mêmes divmités qu'on adorait dans les pour la garde des hommes ^ s'étaient perdus,
temples, et à avouer les prestiges dont ils se ayant été trompés par le diable, et qu'ayant
servaient pour abuser les idolâtres. On ne aimé les femmes, ils en avaient eu des démons
doutait point que saiut Pierre * et saint Paul terrestres. Après que Dieu aura jugé les hom-
n'eussent été à Rome ou ; prétendait même mes,contiuue-t-il *", il examinera par le feu les
^
phetarum de quibus et veri Prophetœ
vaticinio illecti, Lib. III Instit., cap. 23, pag. 566.
et ipse prœdixerat, exciderunt a doctrina Dei, et tra- 8 Sciant igitur philosophi qui ab exordo mundi
,
ditionem veram reliquerunt. Lib. IV Instit., cap. 30, sœculorum milita enuoierant, nondum sextum tnillesi-
pag. 588. mum annum esse conclusum. Quo numéro expleto,
1 Justos autem, id est, cultores Dei metuunt [dœ- consummationem fieri necesse est, et humanarum re-
mones), cujus nominc adjurati, de corportbus excédant, rum statum in melius reformari. Lib. VII Instit.
quorum verbis tanquam flarjris verberati, non modo cap. 14, pag. 631.
dœmonas se esse confitentur : sed etiam nomina sua 8 Cum ergo numerus hominum cœpisset increscere,
edunt, illa quœ in templis adorantur, et quod pie- providens Deus, ne fraudibus suis diabolus, cui ab
rumque coram cultoribus suis fuciunt, non utique in dederat potestatem, vel corrumperet, vel
initia terrce
opprobrium religionis, sed fionoris sui, quia nec Deo dispergeret homines misit angelos ad tutelam cul-
per quem adjurantur, nec justis quorum voce torquen- tumque generis humani, quibus quia liberum arbi-
tur, mentiri possunt. Vaque maximis sœpe ululatibus trium erat datum, prœcepit ante omnia, ne terrœ
editis, verberari se, et ardere, et jam jamque exire contagione maculati, substantiœ cœlestis amitterent
proclamant, tantum habet Dei cognitio ac justitia dignitatem itaque illos cum hominibus commo'
potestatis. Lact., lib. II Instit., cap. 15, pag. 549. rantes dominator ille terrœ fallacissimus, consuetu-
^Petrus et Paulus Romœ prœdicaverunt : et eaprœ- dine ipsn paulatim ad vitia pellexit, et mulierum
dicatio in memoriam scripta permansit, m qua cum congressibus inquinavit, tum in cœlum ob peccata qui-
mulfa alia mira, tum etiam hoc futurum esse dixe- bus se immiserant, non recepti, ceciderunt in ierram;
runt, ut post brève tempus immitteret Deus regem, qui sic eos diabolus ex angelis Dei suos fecit satellites
expugnaret Judœos, et civitales eorurn solo adœqua- ac minisfros. Qui autem sunt ex his procreati, quia
ret itaque post illorum obitum, cu.n eos Nero in- neque angeli, neque liomines fuerurd , sed mediarn
teremisset, Judœorum nomen et gentem Vespasianus quamdam naturani gerentes, non sunt ad inféras re-
extinxit, fecitque omnia quœ illi futura prœdixerant. cepti, sicut in cœlum parentes eorum. Itu duo gênera
Lib. IV Instit., cap. 21, pag. 583. dœmonum facta sunt, unum cœleste, alterum terre-
3 Opus nunc nominis tui auspicio inchoamus, Cons- num. Hi sunt immundi spiritus malorum quœ gerun-
tantine, imperator maxime, qui primus Romanorum tur auclores , quorum idem diabolus est princeps.
principum, repudiatis erroribus, majestatem Dei sin- Lib. H Instti., cap. 14, pag. 548.
gularis ac veri, et cognovisti et honorasti. Lib. I 1" Sed et justos cum judicaverit, etiam igné eos exa-
Instit., cap. 1, pag. 516. minahit, tum quorum peccata vel pondère, vel numéro,
* Mis testimomis quidam revicti, soient eo confu- prœvuluerint, peistringentur igni atque amburentur
;
gere, ut aiant non esse illa carmina sibyllma, sed a quos autem plena justitia et maturitas virtutis inco-
nostris conficta atque composita. Quod profecto non xerit, ignem illum non sentient ; hahent enim in se
putabit, qui Ciceronem Vurronenique legerit, aliosque aliquid inde quod vim flarnmœ repellat ac respuat.
veteres, qui Erythraam sibyllam cœterasque commé- Tanta est vis innocent iœ, ut ab ea ignis ille réfugiât
morant, quarum ex libris ista exempta proferimus. innoxius, qua accepit a Deo liane potestatem, ut impios
Lib. IV Instit., cap. 15, pag. 579. urat, justis oitemperet. Lact., lib. VU Instit., cap. 21,
» Ibid. — 6 Lact., lib. IV Instit,, cap. 21, pag. 383. pag. 635.
516 HISTOIRE GÉNI'RALK DKS AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
actions des justes, et ceux dont les p(^chés fût une troisième personne en Dieu. Mais
excéderont le nonibiv des bonnes ouivrcs se- nous ne trouvons point cette erreur dans les
ront punis par le feu, qui épargnera au con- écrits de Lactance qui nous restent, et il n'y
traire ceux dont la justice se trouvera par- parle en aucun endroit du Saint-Esprit. Peut-
faite; néanmoins ce jugement ne se fait pas être u'a-t-il voulu dire autre chose dans ses
aussitôt aitrès notre mort mais nos âmes '
;
lettres à Démétrien, qui ne sont pas venues
sont détenues toutes ensemble dans un même ju>qu'à nous, sinon que les noms de Saint
lieu jusqu'à l'avénemeut du souverain Juge, et d'Espritdans l'Ecriture sont communs au
qui récompensera les bons d'une immortali- Père et au Fils, quoiqu'ils conviennent par-
tébienheureuse, et condamnera les im[iies à ticulièrement au Saint-Esprit, comme l'a re-
des supplices certains. Cette félicité des justes marqué saint Augustin *. Le même Père, ré-
comment era par un régne de mille ans *; ils pondant à Pelage *, s'est appliqué à donner un
resteront sur la terre avec Jésus-Christ, crois- bon sens à quelques passages que cet héré-
sant à TinOni, par une multitude d'enfants siarque alléguait de Lactance, sans le nom-
saints et agréables à Dieu. Saint Jérôme ac- mer, et dans lesquels il semblait qu'on admit
cuse Lactance d'avoir nié dans ses écrits ^, en Jésus-Christ un combat contre les vices et
surtout dans son huitième livre à Démétrien, contre les désirs de la concupiscence. Saint
que le Saint-Esprit fût quelque chose de réel, Augustin dit, premièrement^, que ces passa-
et d'avoir dit, en suivant l'erreur des Juifs, ges étaient conçus de telle manière qu'on n'en
que ce n'est qu'un nom relatif, tantôt au pouvait rien conclure ni contre la foi catholi-
Père, tantôt au Fils, pour exprimer la sain- que, ni contre l'hérésie de Péhige; eu second
teté ou la vertu de sanctifier, qui leur est lieu % que de la concupiscence, dont
les désirs
commune ; en sorte que, selon saint Jérôme, parle Lactance, sont la faim, la soif, le désir
Lactance ne croyait pas que le Saint-Esprit du repos et autres passions semblables dont
1 Nec tamen quisquam putet animas post mortem Spiritus Sanctus. Quia enim est communis ambobus,
protinus judicari ; omnes in una communique cusiodia id vocaiur ipse proprie quod ambo communiter. Au-
detineniur donec iempu.i advenial, quomaximus judex gustinus, lib. XV de Civit. Dei, cap. 19, num. 37,
meritorum faciat examen. Tum quorum fuerit probata pag. 993, Iom. VIII.
justifia, a prœmium immortaiilatis accipient: quo- 5 Ac per hoc et ea testimonia qucp non quidem de
rum autem peccaia et scelera détecta, non résurgent, Scripturis canonicis, sed de quibusdam catholicorum
sed cum impiis in easdem tenebroj^ recondeutur ad tractiitorum opusculis posuit, volens occurrere iis qui
certa supplicia destinati. Lact., lib. VIII Instd., ibid. eum solum dicerent ista defendere, ita sunt média ut
* Veniet igitur summi et niaximi Dci Filius , ut neque contra nostram sententium sint, neque contra
vives ac mortuos judicet verum ille cum deleverit ipsius Prima quœ posuit, quia nomen ejus qui ea
injustitiam, judidumque magnum fecerit, ac justos^ dixit, non ibi legi, sive quia illa non scripsit, sive
qui a principio faerunt, ad vifarn restauraient, mille quia codex quem tnisistis, id aliqua forte mendositate
annis inter homines versabitur, eosque justissimo im- non habuit, pertractare quid opus est? Maxime quo-
peno reget Tum qui erunt in corporibus vivi, non niam me in hujusmodi quorundibet hominum scriptis
morientur, sed per eosdem mille annos infinitam mul- lilierum {quia solis canonicis debeo sine ulla récusa-
titudinem generabunt, et erit soboles eorum sancta et tione consensum ) nihil movct quod de illis scriptis,
cara Deo. Lib. VII Instit., cap. 24, pag. 636. cujus nomen non ibi inveni, ille ;>o»!/!7.0porluit ma-
ï Laclantius in libris suis, et maxime in Epistolis gistrum doctoremque virtutis homini simillimum
ad Demeirianum, Spiritus Sancti negat substantiam ; fieri, ut vincendo peccatum doceat bominem posse
et erroreJudaïco dicit eum tel ad Patrem referri, vincere peccatum. Lactant., lib. IV Instit., cap. 24.
velad Filium et sanctificalionem utriusque personœ,
, Quomodo enim dictum sit, auctor hujus sententiœ vi-
sub ejus nomine demonstrari. Quis milii interdicere der it, qualiter possit exponere: dum tamen nos minime
potest, ne legam Institutiouum ejus libres, quibus dubitemus, peccatum CUristum in se non habuisse
contra génies scripjsit fortissime, quia superior sen- quod vinceret, qui natus est in similitudine carnis
tentia detestanda est? Hieronym., Epist. 41 ad Pam- peccati, non in carne peccati. Aliud ejusdem ita po-
machium et Océan., pag. 345, iom. IV, parte II. suit : Et iterum ut desideriis carnis edomitis doce-
Multi per imperitiam Scripturarum, quod et Firmia- ret non necessitatis esse peccare, sed propositi ac
nus in octavo ad Demetrianum libro facit, asserunt voluutatis. Ibid., cap. 25. Ego desidena carnis {si
Spiritum Sanctum sœpe Patrem, sœpe Filium nominari. non illicitarum concupiscentiarum hic dicuntur) acci-
Et cum perspicue in Trinitate credamus, tertiam per- famés, sitis, refectio lassitudinis, et s%
pio, sicuti est
sonam auferentes, non substantiam ejus volunt esse, quid hujusmodi est. Per licec enim quidam, quamvis
sed nomen. Hieronym., lib. II in Epistolam ad Ga- ea sint inculpabilia, in culpas decidunt, quod ab illo
latas, cap. 5, pag. 268. tom. IV, part prim. Salvatore abfuit, etiamsi ha:C in eo fuisse propter si-
* Sicuf non solus est in ilta Trinitate, vel Spiritus, mililudinem carnis peccati, Evangelio teste, videamus.
vel Sanctus, quia et Pater Spiritus, et Filius Spiritus, Auguslinus, lib. de Natura et Gratia contra Pelag.,
et Pater Sanctus, et Filius Sanctus, quod non ambi- tom. X, pag. 158, cap. 61.
git pietas : et tamen isle non frustra proprie dicitur * Ubi supra. —
' Ibid.
[IV* SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 517
on peut bien ou mal user, mais dont le Sau- l'avantage d'avoir non-seulement traité des
veur a toujours fait un usage légitime. matières plus sublimes et plus intéressantes,
Jufrement 8. Les sentiments erronés que nous venons mais d'avoir encore enrichi ses ouvrages d'un
des écrits lie
Lactonce. de remarquer dans les écrits de Lactance les grand nombre de maximes plus pures et
ont fait mettre au rang des livres apocryphes plus excellentes. Il est le seul des anciens qui
par pape Gélase : mais ils ne leur ont
le * ait parlé d'Asclépiade ', auteur d'un traité
rien ôté de l'estime qu'ils méritent, soit pour qui n'est pas venu jusqu'à nous et qui avait
l'importance de tant de vérités saintes qu'ils pour titre : De la Providence du souverain
renferment, soit pour la manière claire, no- Dieu. Celui qui est intitulé :De la Mort des
ble et éloquente dont elles y sont développées. Persécuteurs, est écrit avec beaucoup d'art et
Les erreurs qu'on lui reproche lui sont com- de politesse, et on y trouve plusieurs traits
munes avec beaucoup d'autres anciens, aux- importants pour l'histoire de l'Eglise. L'au-
quels il faut moins les attribuer qu'au temps teur y remarque qu'après que les onze Apô-
où ont vécu, alors que l'on n'avait pas en-
ils tres se furent associésamt Paul et saint Mat-
core examiné certains articles de la foi avec thias *, ils dans toutes les
se répandirent
autant d'exactitude et de précision qu'on a provinces de l'empire romain et y jetèrent,
fait depuis. Saint Jérôme, qui n'approuvait pendant l'espace de vingt-cinq années, jus-
pas les expressions de Lactance touchant le qu'au commencement du règne de Néron,
Saint-Esprit, relevait néanmoins ses livres les fondements de l'Eglise que cet empereur ;
des Institutions comme un ouvrage excellent', était déjà sur le trône lorsque saint Pierre
et il admirait également le solidité et l'élo- vint à Rome ^. Ce grand Apôtre, par la vertu
quence du pour titre De la Colère
livre qui a : des miracles que Dieu lui donnait la force
de Dieu '. On peut dire, en effet, que personne d'opérer, ayant converti plusieurs païens,
n'a combattu l'idolâtrie avec plus de force * soit dans cette ville, soit dans les provinces,
et avec un style plus beau et plus éloquent. le tyran, pour s'en venger, le fit crucifier et
Ses autres ouvrages sont écrits avec autant fit tuer saint Paul. Lactance réfute certains
de noblesse et de pureté, et c'est avec justice philosophes spéculatifs " qui, ajoutant foi à
qu'on le met entre les hommes les plus élo- la prophétie de la Sibylle, s'étaient imaginé
quents qu'ait eus le christianisme *, et qu'on que Dieu réservait Néron en cette vie pour
le regarde comme une fleuve d'éloquence servir de précurseur à l'Antéchrist, et être
comparable à Cicéron ^, sur qui même il a le dernier, comme il a été le premier des
ter et eloquenti sermone conscripsit. Hierouym. venif, et edilis quibusdani miraculis, quce virtute ip-
lib. II in Epist. ad Ephes.,
cap. 4, pag. 373, tom. IV. sius Dei, data sibi ab eo potestate, fuciebat, convertit
* Quis mihi interdicere potest, ne leyam Institutio- multos ud justitiam, Deoque templum fidèle ac stabile
num ejus libros, quibus contra gentes scripsit fortis- collocavit. Qua re ad Neronem deluta, cum animad-
sime? Hieron., Epist, 41 ad Pammachium et Océan,, verteret, non modo Romœ, sed ubique quotidie magnam
pag. 345, tom. IV, parte II. multitudinem deficere a cultii idolorum, et ad religio-
* Clarissimos facundia Firmianum, Minutium., Cy- nem novam damnata vetustate transira, ut erat exécra-
prianum, Hilarium, Joannem, Ambrosium evolvam. bilis ad excidendum cœ-
ac nocens tyrannus prosilivif
Eucherius, Epistola ad Valerianum, de Contemptu lestetemplum delendamque justitiam, et primus om-
mundi, pag. 21 editionis Parisiensis, anni 1672. nium persecutus Dei servos, Petrum cruci adfixif, et
Crispum Lactantius latinis litteris erudivit, vir om- Paulum interfecit. Lact., lib. de Mort. Persecutor.,
nium suo tempore eruditissimus. Hieron., in Chron. pag. 3.
ad ann. 318, pag. 180. 10 Dejectus itaque {Nero) fastigio imperii, ac devo-
' Lactantius quasi quidam ftuvius eloquentiœ Tul- lutus a summo tyrannus impotens, nusquam repente
lianœ, utinum tain nostra affirmare potuisset, quam comparuit, ut ne sépultures quidem locus in terra tam
facile aliéna destruxit. Hieron., Epist. 49 ad Pauli- malœ bestiœ appareret. Unde illum quidam deliri
num., pag. 567, tom. IV, parte II. credunt esse translatum ac vivum reservatum, Sibylla
Optime igitur Asclepiades noster, de Providentia
''
dicente matricidam profugum a finibus esse ventu-
Summi Dei, disse7'ens in eo libro, quem scripsit ad rum, ut quia primus persecutus est, idem etiam novis-
me. Lactant., lib. VU Instit., cap. 4, pag. 625. simus persequaiur, et Antichristi prœcedaf adventum.
* Inde discipuli, qui tune undecim, assumptis in Ibid.
518 HISTOIRE r.ÉNÉBALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
persécuteurs. Dioclétieu ayont fait un jour la démolition de l'église de Nicomédie *, que
ofïrir (les satriiicos *, qiielqu(>s-uns de ses ces édifices sacrés, chez les chrétiens, étaient
olliciers, «jui étaient chrétiens et (jui assis- dès -lors fort exhaussés et fournis de diûe-
taient à ces cérémonies profanes, marquèrent rentes choses on ne
se faisait pas scrupule
;
leurs fronts du signe immortel, ce qui mit de appeler temples, ou y conservait les
les
les dénions en fuite et troubla la cérémonie; Ecritures saintes; on croyait, quoique faus-
car les sacrificateurs, ne trouvant plus les sement, parmi les païens, que les chrétiens
marques accoutumées dans les entrailles des y plaçaient une idole de leur Dieu. Il désap-
bêtes avaient beau immoler, les dieux ne se
, prouve l'action du fidèle " qui, en ce temps-
rendaient point propices à leurs offrandes. là, un édit qu'on
eut la hardiesse d'arracher
L'auteur rapporte ce fait, sans désapprouver avait affiché contre ceux de sa religion, et de
en aucuue manière la coutume qu'avaient le mettre en pièces, en se moquant des sur-
ces chrétiens, officiers de l'empereur, d'assis- noms de Gothiques et de Sarmudques, que les
ter,avec leur maitre, aux sacrifices des faux empereurs s'arrogaieut. Ce chrétien fut pris
dieux. Ce qui fait voir qu'il partageait absolu- et souflrit la question et le feu avec une cons-
ment les principes de Tertullien, qui croyait tance admirable. L'auteur remarque qu'on
qu'un chrétien pouvait, sans scrupule *, exer- obligea Valéria, fille de Dioclétien, et Prisque,
cer ses emplois chez les païens et assister mê- sa femme, à sacrifier ^; mais il ne dit point
me aux cérémonies profanes, pourvu qu'il le qu'elles fussent chrétiennes. La persécution
fit en s'abstenant de toute sorte d'idolâtrie. désola toutes les provinces de l'empire ', et,
Il ajoute ' néanmoins que les chrétiens évi- excepté les Gaules,depuis l'Orient jusqu'à l'Oc-
taient de se trouver aux festins que la mère cident, tout gémissait sous la fureur des per-
de Galérius, femme fort superstitieuse, fai- sécuteurs. Eu parlant de la victoire de Li-
sait à ses domestiques, et qu'ils passaient en ciuius surMaximin, qui mit fin au règne du
prières et en jeûnes le temps que leur maî- dernier des persécuteurs, il dit que, les deux
tresse employait à la bonne chère; apparem- armées étant prêtes d'en venir aux mains,
ment, dans ces sortes de repas, on servait des tandis que Maximin faisait des vœux à Jupi-
viandes immolées aux idoles. Ou voit, par ce ter s
et lui promettait, s'il remportait la vic-
qu'il rapporte de l'édit de Dioclétien pour toire, d'abolir à jamais le nom chrétien, un
1 Cum ageret in partibus Orientis {Diocletianui) ut timque productus, non modo extortus, sed etiam legi-
erat pro timoré scrulator rerum futurarum, immola- time coctus. cum admirabili patientia postremo exus-
bat pecudes, et in jecoribus earum ventura quœrebat. tus est. Pag. 12.
Tum quidam ministrorum scientes Dominum , cum ^ Furebat ergo imperator jam non in domesticos
adsisterent immolanti, imposuerunt frontibus suis im- tantum, sed in omnes, et primam omnium filiam Va-
mortdle signum. Quo facto, /tcgntis dœmonibus, sacra leriam, conjugemque Priscam sacrificio pollui cosgit.
turbata sunt. Trepidabant aruspices, nec solitas in Pag. 12.
extis notas videbant : et quasi non li tassent, sœpius ^
Vexabatur ei^go universa terra, et prœter Gallias,
immolobant ; verum identtdem mactalœ hostiœ nihil ab Oriente usque ad Occasum ires acerbtssimœ bestiœ
ostendebant, douée magister ille aruspicum Tagis, seu sœviebant. Non mihi si linguce centum, oraque centum,
suspicione, seu visu, nit idcirco non respondere sacra, ferrea vox omnes scelerum comprehendere formas,
quod rébus divinis profani homines intéressent. Idem, omnia pœnarum percurrere nomma possem, quœ jw
pag. 9. dices f'Cr provincias justis atque innocentibus intule'
* Tortull., lib. de Idolol., cap. 6. runt. Pag. 13.
s Erat mater ejus (Gu/erii Maximiani) deorum Propinquantibus ergo exercitibus, jam futurum
*
montiwn cultrix, mulier admodum superstitiosa. Quœ propediem prœlium videbatur. Tum Maximinus ejus-
cum esset, duptbus sacrificabat pêne quotidie, ac vica- modi votum Jovi vovtt, ut si victoriam cepisset, chris-
riis suis epulis exhiljtbot. Cliristiani abstinebant ; et tianorum nomen extingueret funditmque delerel. Tune
illa cum gentihus epulnnte, jejuniis In et orutionibus proxima nocte Licinio quiescenti adsistit Xingelus Dei
insistebant. Lacl., de Mort. Persecut., pag. 10. monens ut ocius surgeret atque oraret Deum summum
* Repente ad/iuc dubia luce ad ecclesiam profectus cum omni exercitu sue, illius fore victoriam si fe- ,
(Galérius) cum ducifjUi et tribunis et rationalibus ve- cissef : post fias voces cum surgere si/ii visus esset, et
nit; et simulacrum Uei r/uœritur.
revu/sis foribus, cum ipso qui monebat adstaret, tune docebat eum quo-
ScripturcB repertœ tncenduniur.,.. ipsi vero [imperw modo et quibus verbis orandum. Discusso deinde
esset
tores) in specuUs, in alto enim constitufa ecclesia ex somno, nolarium jussit adsciri, et sicut audierat, hœc
palatio videbatur, diu inter se concertabant utrum verba dictavit : Summe Deus, te rogamus. Sancte
ignem potius supponi oporteret. Iljid., pag. 11. Deus, te rogamus. Omnem jnsliliam tihi commpnda-
* Quod edictum quidam, efsi non recte, magno ta- mus, salutem nostram libi cotnmcndamus, imperium
men animo dtripuit et conscidil, cum irridens diceret nostrum tibi cooiruendamus. Per te vivimus, per te
victoj'ias Gothorum et Sarmatarum prœpositas. Sta- victores et felices exiàtimus. Summe Sancte Deus,
[IV" SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — LACTANCE. 519
ange apparut en songe à Licinius, lui com- les bras. Dieu saint et grand, exauce-nous. »
manda de de Dieu de se lever et de
la part En actions de grâce de la victoire , Constan-
faire une prière, avec promesse de vaincre, tin et Licinius portèrent un édit ordonnant
s'il obéissait. Licinius, à qui il avait semblé de rendre aux chrétiens *, même sans en exi-
qu'il se levait et que l'ange lui enseignait les ger d'argent, les lieux destinés à leurs assem-
termes de cette prière, s'étant ensuite éveillé, blées et les biens dépendant de ces lieux : il
la dicta à un secrétaire, en fit tirer plusieurs est donc visible que, dès ce temps, les églises
aux colonels et aux ca-
copies, les distribua avaient des fonds. Les empereurs ne se con-
pour l'apprendre à leurs soldats, la
pitaines tentèrent point d'avoir porté l'édit, ils ex-
commença lui-même, et la fit répéter trois hortèrent de vive voix les habitants de Nico-
fois à toute l'armée à voix haute, avant de mcdie à remettre les églises dans l'état où
donner la bataille. Cette prière était conçue elles avaient été auparavant. Ainsi, depuis la
preces nostras exaudi. Brachia nostra ad te tendi- corporis eorum, id est, ecclesiarum, non hominum
inus. Exaudi, Saucte summe Deus. Scribuntur hœc in singulorum pertinentia , ea omnia lege qua superius
libellis pluribus, et per prœpositos tribunosque mitlun- comprehendimus citra ullam prorsus ambiguitatem vel
tur, ut suos quisque tnilites doceat. Crevit animus controversiam iisdem christianis , id est corpori et
universis victoriam sibi credent ibus de cœlo nuntia- conventiculis eorum reddi jubebis.... H>s litteris pro-
tam.... erat jam utraque acies in conspectu. Liciniani posais etiam verbo hortatus est ut conventicula in
scuta deponunt, galeas resolvunt , ad cœ/um manus statum pristi?ium redderentur. Sic ab eversa Ecclesia
tendunt, prœeuntibus prœpositis, et post imperatorem usque ad resiitutam fuerunt anni decem, menses plus
precem dicunt. Audit acies peritura precantium mur- minus quatuor. Lactant., de Mort. Persec, pag. 41 et
mur, un, oratione ter dicta, virtute jam pleni, repo- seqq.
nunt capiiibus galeas, scuta tollunt.... propius acce- sD. de Montfaucon dit avoir vu une édition de
ditur, tubce canunt, signa procedunt, Liciniani impetu Lactance à Sublac, en 1461. Quod autem Martinelli
facto adversarios invadunt. llli vero ptrierriti, nec sente7ilium fulcire videatur, anno 1461. Instituliones
gladios expedire, nec tela jacere quiverunt. Maximi- Lactantii Firmiani in monasterio Sublacensi cusœ
nus cciem circumire, ac milites Licinianos nunc pre- sunt, quam ego editionem vidi in musœo D. de la
cibus sollicitare, nunc donis. Nullo loco auddur. Fit Thuiilière. In fine Hbri isthœc leguntur : Lactantii
impetus in eum, et ad suos refugit. Cœdebatur acies Firmiani Instituliones cusœ in venerabili monasterio
ejus impune, et tuntus numerus legionum, tanta vis Sublacensi, anno 1461, ante penultima octobris, in-fol.
militum a paucis metebatur. ^emo nominis, tiemo Montfaucon, in Diario Italico, pag. 255 et 256. Jam
virtutis, nemo veterum prcemiorum memor, quasi cd diximus Sublaci primum Instituliones typis datas
devotam mortem, non ad prœlium venissent , sic eos fuisse anno Christi, 1461. Quod an observatum pri-
Deus sumrnus jugulandos subjecit inindcis. Lactant., dem fuerit ignora. Idem, ibid., pag. 339. Mais, ayant
lib. de Mort. Pers., pag. 39 et 40. depuis fait examiner l'époque de cette édition par
' Licinius Nicomediam ingressus, gratiam Dec, eu- quelques-uns de ses arais, ils trouvèrent que le der-
JUS auxilio vicerat, retulit ac de restituenda ecclesia nier chiffre était brouillé et difficile à lire, et qu'au
hujusmodi litteras ad prcesidem datas proponi jussit... lieu de 1461, il fallait lire 1465. Ce qui se confirme
Hoc in persona christianorum statuendum esse duxi- par un exemplaire de la même édition de Sublac,
mus, quod si eadem, loca ad quœ antea convenire con- que l'on conserve dans la Bibliotliôque Barberine,
sueverant , de quibus eiiam datis ad officium tuum et à la fin duquel on lit qu'il fut imprimé en 1465.
litteris cerf a ante hac forma fuerat comprehensa, Noster D. Bernardus de Montfaucon in suo Diario
priore tempore aliquid vel a fisco nostro, vel ab alio Italico scripsit se cum Romœ degeret, vidisse in mu-
quocumque videntur esse mercati eadem christianis , sœo D. de la Thuiilière vetcreni operum Lactantii edi-
sine pecunia et sine ulla pretii petitione, postposita tionem, in cujus fine hœc leguntur : Lactantii Fir-
omni frustratione atque ambiguitate restituant. Qui miani venerabili monasterio
Institutiones, cusae in
etiam dono fuerint consecuti, eadem simihter iisdem Sublacensi anno 1461, antepenultima octobris, in-fol.
christianis quantocius reddant, etiam vel hi qui eme- Quod quidcm si verum sit, illa editio omnium procul
runt, vel qui dono erunt consecuti, si putaverint de dubio prima dici débet. Sed subodoratus est sodalis
nostra benevolentia aliquid, vicarium postulent qui et noster in assignato hujusce editionis anno aliqvod su-
ipsis per nostram clementiam consulatur. Quœ omnia besse tijpographorum erratum. Quamobrem re matu-
corpori christianorum protinus , per intercessionem rius ab atiis, quos rogaverat expensa, nuntiatum ipsi
tuam ac mora tradi oportebit. Et quoniam iidem
sine fuit obscurum omnino, ne facile legi posse ultimum
chrisiianinon ea loca tantum ad quœ convenire con- numerum, atque 1 pro 5, ibi positum ideoque legen-
sueverunt, sed alla etiam habuisse noscuntur ad jus dum 1465. Nam in alio efusdem Sublacensis editionis
5-20 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pontificat de Paul II, le 27 du mois de sep- édition fut revue et corrigée sur divers ma-
tembre, et ensuite à Rome, eu i k)8, in-fol., nuscrits, l'un de Leipsick, et l'autre de la Bi-
dans la maison de Pierre et François Maxime, bliotiiêque Palatine?. L'étlition suivante, qui
par Conrade Swep;nheym et Arnold Paunartz, est de Lyon, en 1587, in-8'', fut encore revue
avee la censure d'Antoine d'Orande sur divers et corrigée sur plusieurs manuscrits de Jac-
endroits qui n'eu méritaient point; à Rome, ques Cujacius. On trouve dans les deux édi-
eu 1470, par les mêmes auteurs, avec une tions suivantes , à Anvers, en 1587, in-8°, et
préface d'André, évèqne d'AIérie, dans l'île à Paris, en 1589, in-8°, les notes de Michel
de Corse; à Venise, en 1274, iu-fol., chez Vin- Thomasins. L'édition de Lyon, en 1594, in-
delin; à Rome, en 1474, in-fol., par Nico- 12, et celle de Genève, en 1G13, in-12, sont
lai de Luca; àRostoch, dans la Basse-Saxe, faites sur celle de Jacques Cujacius, en 1587,
en 1476, in-fol., par les soins d'une commu- de même que celle de Cologne, en 1G13, iu-12.
nauté religieuse de la même ville à Venise,
; Les suivantes sont de Lyon, en 1616, in-12;
en 1478, in-fol., aux dépens de Jean de Ghe- de Césène dans la Romagne, en 1646, iu-fol.,
retzen et de Joseph Colonia ; à Venise , en et de Rome, eu 1650, in-fol., avec les notes
1478,1483,1490,1493, 1497, iu-fol.: cette der- d'Iseeus; de Leyde en 1652, iu-8% avec les
,
nière édition n'est qu'une réimpression de notes d'Antoine Thysius. Gallœus iit réim-
celle de Rome, en 1470; mais on y ajouta le primer Lactance en la même ville, en 1660,
poème du Phénix, attribué à Lactance; V Apo- avec les commentaires de plusieurs savants;
logétique de TertuUieu, les livres de la Prépa- il y ajouta diverses notes de sa façon et pro-
ration évangélique d'Eusèbe et quelques opus- fita, pour rendre cette édition plus complète
cules de saint Jean Chrysostome; à Venise que toutes celles qui avaient paru jusqu'a-
encore, en 1502 et 1509, iu-fol.; à Paris, chez lors, des lumières de Saumaise et d'Isaeus.
Jean Petit, en 1509, iu-4°. On trouve dans Thomas Sparck en donna une nouvelle édi-
cette édition l'Apologétique de Tertullien, le tion à Oxford, en 1684, iu-8'', et y joignit le
sermon de saint Chrysostome sur la première livre de la Mort des Persécuteurs qui ne se ,
aux Corinthiens et quelques autres ouvra- trouvait pas dans les précédentes. Nous en
ges : l'endroit de l'impression est marqué m avons une autre de Cambridge, en 1685, et
Bello yisw; à Venise, en 1511 iu-fol., chez Jean
, deux de Leipsick la première, avec les notes
:
exemplari, in Bibliotheca Barberina asservato, nume- Lad., art. 2, pag. 651, tom. II Apparat, ad Bibliot.
rus ille ullimus habetur. Nourry, Dissertât. 3 in Patr.
[IV* SIÈCLE.]