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: LA RELIGION
« Ceux qui se réclament de la foi, ce sont eux les fils d’Abraham » Saint Paul, Galates 3, 6-14.
Pour les trois grandes religions monothéistes - judaïsme, christianisme et islam - Abraham est le
modèle de l’homme de foi et d’un monothéisme pur, l’homme qui se soumet absolument à l’Absolu et
qui place toute sa confiance en l’unique Dieu. Ces religions sont dites « abrahamiques » ou
« religions du Livre ».
Mais les trois Livres étant différents, trois figures d’Abraham, sensiblement différentes sont
présentées.
Des trois religions, l’islam cependant accorde une place prépondérante au Prophète Abraham, à tel
point que l’islam se présente avant tout comme « la religion d’Abraham », laquelle doit être restaurée
Se reporter section II, en II.3 et section III, en VI.5.
OBSERVATIONS
Nous avons vu dans les leçons précédentes que la philosophie n’imposait aucune limite à la curiosité
de la raison ; rien de ce qui est humain ne lui étant étranger, nous allons maintenant porter notre
attention sur le fait religieux.
« C’est l’office de la philosophie de tout comprendre, même la religion » écrit Jules Lachelier,
(philosophe français 1832 - 1918) dans le Vocabulaire technique et critique de la philosophie de
Lalande.
Définition(s) : deux définitions, l‘une subjective, l’autre objective, peuvent être proposées de la
religion.
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- Subjectivement, pour St.Thomas d’Aquin (religieux dominicain italien 1225 – 1274), la
religion est une vertu (=force) morale dont Dieu est la fin et le culte rendu à Dieu
l’objet ou la matière.
- Objectivement, pour Emile Durkheim (sociologue français 1858 – 1917), la religion est un
« Système de croyances (dogmes) et de pratiques (rites) relatives à des choses sacrées
(≠profanes) et qui unissent en une même communauté morale appelée église, tous ceux
qui y adhèrent »
Remarque : les sciences humaines ont pour objet d’étude l’homme non pas en tant qu’être
biologique, mais en tant qu’il est engagé, par la culture, dans des rapports sociaux,
économiques, politiques, psychologiques, etc. L’histoire, la géographie, les sciences
économiques, les sciences politiques, la psychologie, la sociologie, etc. sont des sciences
humaines. Les sciences ont pour objet d’étude la nature : la physique, la médecine, la
botanique, etc. sont des sciences.
Les sciences humaines considèrent que la religion est une expression de la culture c’est-à-dire une
production de l’homme au même titre que la technique, l’art, la science, etc.
Ainsi, pour Karl Marx (économiste et philosophe allemand, 1818 - 1883), la religion est l’expression
compensatrice de l’aliénation économique du prolétariat et joue une fonction dormitive. « La religion
est l’opium du peuple, l’âme d’un monde sans âme, l’esprit d’un monde sans esprit » écrit-il. C’est
donc l’homme qui crée la religion et non pas la religion qui crée l’homme.
Ainsi pour Sigmund Freud (psychanalyste autrichien, 1856 - 1939), la religion est l’expression d’une
angoisse infantile par laquelle l’homme cherche la sécurité auprès de sa mère, puis de son père, puis
d’un Père d’une dignité plus élevée, c’est à dire de Dieu lui-même qui apparaît alors comme
l’expression d’une névrose par conversion hystérique de l’angoisse.
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Autrement dit, Dieu ne dépend pas de moi, c’est moi qui dépend de lui. La religion ne dépend pas de
l’homme, c’est l’homme qui dépend de la religion. En ce sens, la religion est donc l’expérience de
notre dépendance.
Nos analyses oscilleront entre ces deux extrêmes, en fonction des aspects du fait religieux que nous
voulons mettre en évidence.
On définit aussi l’homme, entre autres, avec Armand de Quatrefages (anthropologue français 1810 -
1892) comme un « animal religieux » puisque « partout où il y a des hommes, il y a aussi un Dieu ou
des dieux » : la religion est un phénomène universel.
On ne peut pas penser l’homme à l’état de nature ; on doit d’emblée le penser comme un être de
culture. D’ailleurs chez des philosophes comme Thomas Hobbes au XVIIème s. et Jean-Jacques
Rousseau au XVIIIème s., l’état de nature et l’homme à l’état de nature sont de simples hypothèses.
Cela signifie que le problème de l’origine de l’homme reste un mystère ; on ne peut pas penser
l’homme en dehors de la culture. Autrement dit, penser l’homme c’est le penser d’emblée comme être
social, politique, ayant un langage donc une pensée, possédant une technique, et ayant une forme de
religiosité même primitive. Le désir, et le désir religieux en particulier, est donc constitutif de la
conscience.
Remarque : La société, le langage, la technique, l’art, le désir, la religion, etc. étant des
activités conscientes sont exclusivement humaines puisque la conscience est une prérogative
exclusivement humaine. On réserve pour l’animal les notions de communauté, de
communication, de production, de besoin, etc. et toutes relèvent de l’instinct, c’est-à-dire
de la nature. On doit bien distinguer, ici, ce qui relève de la nature et ce qui relève de la
culture : la conscience est la frontière entre la nature et la culture, c’est le Rubicon que
l’animal ne franchit pas.
Définition : la valeur est une qualité présentée comme objective qui constitue un idéal à
atteindre et qui, par sa dignité, mérite d’être défendue. Exemples : la Vérité, la Justice,
la Paix sont des valeurs.
Pour le philosophe, la culture est, d’une part, le résultat du travail de l’homme en tant qu’être
conscient et, d’autre part, la prise de conscience de la valeur puisque toutes les productions
humaines n’ont pas la même valeur, la même dignité.
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La religion est une des plus hautes manifestations de la culture : elle exprime le désir absolu qui
anime l’homme et qui est le désir de l’Absolu en même temps la religion nous rend attentifs à notre
existence, à son sens. Elle résout, en partie, l’énigme de la condition humaine : la faiblesse, l’infirmité,
la souffrance, la maladie, la mort. La religion propose une réponse à la condition humaine et à notre
destinée. En mettant l’homme en rapport avec le sacré, elle rend intelligible ce qui sans elle serait
absurde. Une promesse de bonheur est alors possible ; par la religion la mort et le temps sont
vaincus puisque l’homme possède une âme qui survit au corps.
La religion, dans un certain sens, répond aux grandes interrogations de la métaphysique :
Qui suis-je ? Où vais-je ? Quelle est ma destinée ? La vie a-t-elle un sens ? Qu'est-ce que la mort ?
Dieu existe-t-il ?
L’homme, étant à l’image et à la ressemblance de Dieu, acquiert une dignité absolue, laquelle
implique un respect absolu quelles que soient les actions accomplies. Ce respect dû à la Personne
humaine est une exigence religieuse mais aussi morale, et par-là on peut mettre en évidence une
continuité entre de nombreuses prescriptions religieuses et les impératifs moraux même si les
fondements sont différents.
On peut citer comme autres valeurs religieuses communes aux trois religions abrahamiques et qui
sont même des valeurs universelles : la Charité, le Pardon, l’Amour du Prochain, la Paix, etc.
Nous avons signalé, dès l’introduction, la double définition que l’on rencontre pour le mot religion ;
nous allons expliquer les raisons de cette dualité. Le mot religion vient du latin « religio ». Mais il
existe une ambiguïté quant à l’étymologie.
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La religion est en ce sens une conversion au sens étymologique : conversio en latin revoie à l’idée de
retournement, de changement de direction.
Mais le mot latin conversio renvoie, en grec, à deux mots de sens bien différents : épistrophé et
métanoïa.
Epistrophé qui traduit l’idée de retour peut être assimilé à conversio, mais métanoïa qui signifie
changement de pensée, re-naissance, possède un sens beaucoup plus fort. La conversion du
profane au sacré est une métanoïa, la religion est une conversion au sens où un homme nouveau est
né. Dans cette transformation toutes nos pratiques anciennes cèdent la place aux nouvelles, et cela
dans tous les ordres de la vie : dans la vie publique comme dans la vie privée. C’est notre être même
qui est transformé lors de la conversion, d’où la définition de la conversion comme re-naissance.
Définition : La sociologie est une science humaine, elle étudie la vie sociale, ses types, et
ses lois c.-à-d. les rapports de cause à effet. A. Comte et E. Durkheim sont les
fondateurs de cette discipline.
Définition : transcendant (≠immanent). « Une réalité est transcendante par rapport à une
autre quand elle réunit les deux caractères : 1° de lui être supérieure, d’appartenir à un
degré plus élevé dans une hiérarchie ; 2° de ne pouvoir être atteinte à partir de la
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première par un mouvement continu. » A. Lalande. Vocabulaire technique et critique de la
philosophie.
Dieu est donc, du point de vue de la définition, un être transcendant. En parlant de Dieu on dit aussi :
la Transcendance, ce qui exprime l’indépendance absolue de Dieu par rapport au monde créé et la
dépendance absolue de l’homme par rapport à la Transcendance.
Nous venons de voir que Dieu est transcendant, mais pour être plus précis il nous faut affirmer qu’il
est aussi immanent. Dieu n’a pas créé le monde une fois pour toutes, puis se serait retiré
abandonnant sa création ! Pour la conscience religieuse, Dieu intervient dans l’histoire des hommes
et, de ce point de vue, il y est présent. Par exemple pour le christianisme, le Christ réunit en sa
Personne la nature de Dieu et la nature de l’Homme et il est présent dans les sacrements ; pour les
trois religions monothéistes, Dieu en tant que créateur est transcendant à sa création c.-à-d.
extérieur, mais Dieu étant omnipotent et infini est partout et par conséquent il est immanent à sa
création. C’est là un point théologique qui dépasse une simple analyse philosophique.
- c’est avant toutes choses l’expérience que la conscience religieuse fait de sa dépendance absolue
par rapport à la Transcendance, se reporter supra III.1. C’est ainsi que Friedrich Schleiermacher
(philosophe et théologien allemand (1768-1834) déclare : « la religion consiste dans le sentiment
absolu de notre dépendance ».
- c’est une rencontre dans un effusion de joie mais aussi de crainte ; cette rencontre prend des
formes différentes selon les diverses religions, puisque Dieu vient à la rencontre de l’homme dans
l’histoire et qu’il se fait connaître par des textes sacrés et par des prophètes. Nous analyserons dans
la section III le cas particulier de la religion musulmane où Allah donne à Mohammed le Coran sous la
dictée de Djibrîl (l’ange Gabriel) et va ainsi se révéler dans 114 sourates (chapitres).
- c’est un acte de foi (du latin fides = confiance). La foi qui est traduite en arabe par Al-Iman renvoie à
l’idée de connaissance et de croyance ferme à l’image d’Abraham, modèle de tous les croyants.
Cette foi fonde l’Ihsane c.-à-d. les comportements vertueux qui doivent incarner dans la pratique cette
même foi.
La foi fonde aussi la piété qu’on peut définir comme un comportement qui manifeste le respect pour le
sacré et pour les piliers de la religion c’est la fidélité aux devoirs religieux.
La foi n’est pas de type intellectuel, elle engage toute la personne ; elle exerce une sorte de causalité
dynamique par laquelle le croyant s’applique à vivre en conformité avec sa croyance et à incarner
cette croyance dans le monde. Elle continue et parachève en quelque sorte l’œuvre de Dieu ; en ce
sens on peut également parler d’une immanence de Dieu Cf supra II.1.
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D’ailleurs dans le Coran, Dieu déclare sans aucune ambiguïté possible : « Pas de contrainte en
religion ! La voie droite se distingue de l’erreur ». (Sourate II, verset 256).
« Il (le philosophe) comprend que trois choses sont nécessaires pour qu’il y ait institution religieuse :
1° Une visée d’absolu, c’est-à-dire une mystique vécue ; 2° Une symbolique expressive, ou encore,
au sens technique (non péjoratif), une mythique ; 3° Une régulation sociale, une organisation qui
rende cette mystique vivable en rendant cette mythique communicable ». Henry Duméry,
Phénoménologie et religion P.U.F., 1958, p. 72.
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IV.1.3 Une régulation sociale
On appelle régulation sociale l’ensemble des règles qui assurent un certain mode de fonctionnement
de l’activité sociale, ici de la religion comme institution d’un type particulier.
Les religions monothéistes sont structurées et présentent, en effet, un corps doctrinal précis, de plus
l’expérience religieuse est mise en forme par les différentes religions. Enfin ces religions ne sont pas
de vagues élans sentimentaux personnels vers Dieu, elles se définissent, pour une religion donnée,
par des pratiques cultuelles communes sous formes de rites, de fêtes à l’intérieur d’un temps religieux
propre, le tout en lien avec ou sans clergé.
Le culte : c’est l’honneur rendu à Dieu. Les rites sont des règles précises et contraignantes qu’exige
la célébration du culte. Cultes et rites ont une dimension collective et individuelle.
Les fêtes religieuses : elles rythment, pour chaque religion, le temps religieux : elles rappellent à la
conscience religieuse des événements importants révélés par les textes sacrés. Par exemple : Yom
Kippour (Le Jour du Grand Pardon) chez les juifs, Pâques (Résurrection du Christ) chez les chrétiens,
Aïd El Adha ou Aïd El Kébir (fête du Sacrifice d’Abraham) chez les musulmans. Ces fêtes sont, à la
fois des manifestations individuelles et collectives.
Le clergé : sa définition varie d’une religion à une autre : largo sensu, c’est l’ensemble des prêtres ou
des responsables d’une communauté, d’une religion ; chaque religion a donc son clergé.
Mais on doit distinguer rabbin, prêtre et imam.
. Dans le judaïsme : il y a eu des prêtres, mais il n’y en a plus depuis la destruction du
Second Temple de Jérusalem en 70 après J.C. par les Romains. Tous les juifs sont donc des laïcs, le
rabbin est ordonné au terme de ses études. Cette ordination est une autorisation qui lui permet
d’exercer son ministère de gardien de la loi religieuse. L’ordination du prêtre catholique est d’une
autre nature.
. Dans le christianisme et pour les catholiques : le prêtre, par son ordination, est seul à
pouvoir rendre présent le Christ par les sacrements, lors du sacrifice de la messe. Ici, le prêtre est
médiateur entre le sacré et le profane, entre Dieu et les hommes. C’est un Pont entre les deux
mondes, au sens où on parle d’un Souverain Pontife.
. Pour la religion musulmane : il n’y a jamais eu de prêtre, et il n’y en a pas ; l’imam est
un laïc instruit dans les choses de la religion, il a la responsabilité d’une mosquée et dirige la prière.
L’imam n’est investi d’aucun pouvoir surnaturel : il n’y a pas d’intermédiaire entre la créature et le
Créateur. La notion de sacrement est étrangère au judaïsme et à l’islam.
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Naturelle), révoquent, des religions révélées, toutes les données non démontrables et en
contradiction avec les principes de la rationalité.
« Naturelle » ici s’oppose à « révélée ». La Raison étant commune à tous les hommes, la religion
naturelle est une et, contrairement aux religions révélées, elle réunit tous les hommes par l’évidence
de ses raisons. Autrement dit, la religion naturelle est un résidu : c’est ce qui reste des religions
révélées après que la critique philosophique a détruit tout ce sur quoi le doute a prise. Ce
rationalisme est l’une des caractéristiques du XVIIIème siècle, le Siècle des Lumières. Des philosophes
comme Voltaire et Rousseau, entre autres, sont des représentants de ce mouvement.
Pour la religion naturelle, la religion doit avoir son fondement dans la Raison, celle-ci doit prouver
l’existence de Dieu et son essence, partir de l’ordre de la nature et en déduire les principes moraux
universels. On a là un refus de la foi et des vérités révélées des dogmes des diverses églises et des
arguments d’autorité qui aliènent l’exercice libre de la Raison souveraine.
Définition : le fidéisme (du latin fides, confiance) est la doctrine selon laquelle la foi
religieuse dépend du sentiment et non de la raison.
Définitions :
- l’existence est pour une chose le fait d’appartenir au réel, c’est le fait d’être.
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- l’essence d’une chose est sa nature, sa définition.
Etape 1 Je suis (existence) et je suis quelque chose qui pense (essence). Telle est la vérité
indubitable c.-à-d. évidente de notre point de départ. « Et remarquant que cette vérité je pense donc
je suis était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques
n’étaient pas capables de l’ébranler, je jugeai que je pouvais le recevoir sans scrupule, pour le
premier principe de la philosophie que je cherchais ». Descartes, Discours de la Méthode, 4ème partie,
p .603.
Etape 2 Dans ma pensée c.-à-d. dans ma conscience, je découvre l’idée d’un être parfait. Cette
idée de perfection, c’est l’idée même de Dieu, puisque : « Par le nom de Dieu j’entends une
substance infinie, éternelle, immuable, indépendante, toute connaissante, toute puissante et par
laquelle moi-même et toutes les autres choses ont été créés et produites » (M.M. III §22 p. 445).
Etape 3 Par le principe de causalité, je suis tenu d’affirmer qu’« Il n’y a aucune chose existante de
laquelle on ne puisse demander quelle est la cause pourquoi elle existe ». (Descartes, Réponses aux
Secondes Objections, pp 591-592). Cela signifie que tout a une cause, y compris les idées.
Etape 4 Le principe de causalité, qui lie une cause à un effet, est tel qu’il doit y avoir au moins
autant de réalité et de perfection dans la cause que dans l’effet, puisque la cause produit l’effet alors
que l’effet est produit par la cause : « Maintenant c’est une chose manifeste par la lumière naturelle
qu’il doit y avoir pour le moins autant de réalité dans la cause efficiente et totale que dans son effet :
car d’où est-ce que l’effet peut tirer sa réalité, sinon de sa cause ? Et comment cette cause la lui
pourrait-elle communiquer, si elle ne l’avait en elle-même ? » (M.M. III §16 p. 438).
Etape 5 Appliquons le principe de causalité ainsi défini aux idées et à l’idée de perfection que je
découvre dans ma pensée. Je ne peux pas être cause de cette idée de perfection puisque je suis un
être imparfait, qui doute, qui n’est ni omniscient, ni omnipotent, etc. et que la cause doit être au moins
aussi parfaite que l’effet : « Et certes on ne doit pas trouver étrange que Dieu, en me créant, ait mis
en moi cette idée (de perfection, N.D.A.) pour être comme la marque de l’ouvrier empreinte sur son
ouvrage ; et il n’est pas aussi nécessaire que cette marque soit quelque chose de différent de ce
même ouvrage.» M.M. III § 39 p.453. Donc la cause de l’idée de perfection ne peut être qu’un être qui
possède en tant que cause au moins autant de perfection que je m’en représente en tant qu’effet ;
cette cause ne peut être que la perfection elle-même, c.-à-d. Dieu.
Etape 6 Conclusion. Dieu existe C.Q.F.D. : « Mais de cela seul que Dieu m’a créé, il est fort
croyable qu’il m’a en quelque façon produit à son image et semblance (…), lorsque je fais réflexion
sur moi, non seulement je connais que je suis une chose imparfaite, incomplète, et dépendante
d’autrui, qui tend et qui aspire sans cesse à quelque chose de meilleur et de plus grand que je ne
suis, mais je connais aussi, en même temps, que celui duquel je dépends (Dieu, N.D.A.), possède en
soi toutes ces grandes choses auxquelles j’aspire, et dont je trouve en moi les idées, non pas
indéfiniment et seulement en puissance, mais qu’il en jouit en effet, actuellement, et ainsi qu’il est
Dieu. Et toute la force de l’argument dont j’ai usé pour prouver l’existence de Dieu, consiste en ce que
je reconnais qu’il ne serait pas possible que ma nature fût telle qu’elle est, c’est-à-dire que j’eusse en
moi l’idée d’un Dieu, si Dieu n’existait véritablement. » (M.M. III § 39 pp. 453-454)
Etape 7 Adoration de Dieu, dont nous venons de démontrer l’existence. Après avoir démontré
l’existence de Dieu, Descartes, dans un élan quasi-mystique écrit : « (…) il me semble très à propos
de m’arrêter quelque temps à la contemplation de ce Dieu tout parfait, de peser tout à loisir ses
merveilleux attributs, de considérer, d’admirer et d’adorer l’incomparable beauté de cette immense
lumière, au moins autant que la force de mon esprit, qui en demeure en quelque sorte ébloui, me le
pourra permettre. Car, comme la foi nous apprend que la souveraine félicité de l’autre vie ne consiste
que dans la contemplation de la Majesté divine, ainsi expérimentons-nous dès maintenant qu’une
semblable méditation, quoique incomparablement moins parfaite, nous fait jouir du plus grand
contentement que nous soyons capables de ressentir en cette vie. » (M.M. III § 41-42 p.454)
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Définition : l’ontologie est étymologiquement la science de l’être ; ce mot peut être pris
également dans le sens d’étude de Dieu, de l’âme, du monde ; c’est la métaphysique
spéciale.
Il ne s’agit pas, ici, d’une longue démonstration semblable à la précédente, mais d’un argument ou
d’une preuve immédiate que la conscience ne peut qu’accepter, dans une expérience intellectuelle, à
cause de la force de son immédiate évidence qui s’impose à la conscience, par-delà tout discours.
L’argument ontologique a été énoncé pour la première fois par St Anselme de Cantorbéry (moine
bénédictin italien, philosophe et théologien 1033-1109) dans le Proslogion ». « Fides quaerens
intellectum » c.-à-d. « La foi cherche l’intelligence », telle est la méthode théologique de St Anselme.
Cet argument ontologique est repris par Descartes : « Lorsque j’y pense avec plus d’attention, je
trouve manifestement que l’existence ne peut non plus être séparée de l’essence de Dieu que de
l’essence d’un triangle rectiligne la grandeur de ses trois angles égaux à deux droites. » (M.M. V §7 p.
473) En effet, penser Dieu, c’est penser un être parfait. Donc dans le même moment où je pense
Dieu, c.-à-d. la perfection, je dois nécessairement penser qu’il existe car l’existence est une
perfection. Déclarer que Dieu qui est parfait n’existe pas reviendrait à dire que ce qui est parfait n’est
pas parfait, ce qui est absurde. On déduit donc immédiatement l’existence de Dieu de son essence :
penser Dieu c’est penser son existence nécessaire ; Dieu est l’être nécessaire au sens où est
nécessaire ce qui ne peut pas ne pas être.
Cette évidence qui affirme l’existence à partir de l’essence n’est valable que pour la seule idée de
Dieu, la seule idée qui me représente un être parfait. L’argument ne peut s’appliquer à d’autres
idées : j’ai l’idée d’un cheval ailé (essence), je ne peux évidemment pas en tirer l’existence.
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Ainsi le Saint-Père met-il en lumière les relations complémentaires que la foi et la Raison
entretiennent ; les Pères de l’Eglise ont su en tirer avantage, notre époque marque
malheureusement, selon Jean-Paul II, la fin de cette fructueuse collaboration.
« LA FOI ET LA RAISON sont comme les deux ailes qui permettent à l'esprit humain de s'élever vers
la contemplation de la vérité. C'est Dieu qui a mis au cœur de l'homme le désir de connaître la vérité
et, au terme, de Le connaître lui-même afin que, Le connaissant et L'aimant, il puisse atteindre la
pleine vérité sur lui-même. ». Ibidem, incipit.
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Le sacrifice d’Abraham
Mais la critique de la religion va surtout prendre une forme systématique et radicale inaugurée au
XIXème siècle par Ludwig Feuerbach (philosophe allemand, 1804-1872) et Karl Marx (philosophe
allemand, 1818-1883).
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production de l’activité cérébrale. Le réél est posé comme un donné et non comme la base de
l’activité de l’homme, de la praxis c.-à-d. de la pratique sociale. Marx reproche également à
Feuerbach d’occulter la dimension historique par laquelle l’homme se transforme. Selon Marx, il n’y
a pas d’essence absolue de l’homme : « l’histoire tout entière n’est qu’une transformation continue
de la nature humaine ».
Autrement dit, la religion pour Marx, en tant qu’élément de la superstructure, trouve sa raison d’être
en dehors d’elle-même. Elle doit être comprise à partir de la base que constitue l’infrastructure, la
religion obéit donc à une logique qui lui est extérieure.
Si l’infrastructure détermine la superstructure, la superstructure en retour peut agir sur
l’infrastructure et maintenir en place un mode de production économique particulier. La causalité
n’est pas à sens unique, il y a une action réciproque entre les deux niveaux de la réalité.
N.B. : l’opium est une drogue qui présente la propriété d’induire notamment un état hypnotique et
onirique.
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Pour Marx, les racines de la religion étant la misère qui traverse la société et son mode de
production économique qui vise toujours la recherche exclusive du profit, la religion n’a pas à être
combattue. La fin de l’exploitation de l’homme par l’homme doit conduire naturellement à la
disparition de l’illusion religieuse. Dans une société juste, sans misère ni exploitation, dans une
société des droits humains réels, la religion privée de son terreau devient alors caduque.
Mais pour atteindre ce but, la prise de conscience par le prolétariat, de ses diverses aliénations est
nécessaire. C’est pourquoi Marx considère que :
« L'abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du peuple est l'exigence que formule son
bonheur réel. Exiger qu'il renonce aux illusions sur sa situation c'est exiger qu'il renonce à une
situation qui a besoin d'illusions. La critique de la religion est donc en germe la critique de cette
vallée de larmes dont la religion est l'auréole »
K. Marx, Contribution à la critique de la philosophie du droit de
Hegel
Le bonheur réel se substitue au bonheur illusoire promis par la religion. La société sans classes
sociales et donc la fin de la lutte des classes, la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme, la
disparition de la recherche exclusive du profit par le travail aliéné dont le prolétariat est la victime,
tout cela conduit à la disparition de la misère sociale, de « cette vallée de larmes » sur laquelle la
religion prend racine et prospère. Tel est l’idéal visé par Marx.
FIN DU COURS
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