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Gynécologie Obstétrique & Fertilité 36 (2008) 969–977


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Faits et arguments
Perturbateurs endocriniens environnementaux et cancer du sein :
de nouveaux facteurs de risque ?
Breast risk cancer and environmental endocrine disruptors
P. Fénichel *, F. Brucker-Davis
Inserm U895, service d’endocrinologie et médecine de la reproduction, hôpital de l’Archet I,
CHU de Nice, BP 3079, 06202 Nice cedex 03, France
Reçu le 8 avril 2008 ; accepté le 25 mai 2008
Disponible sur Internet le 19 septembre 2008

Résumé
Les données épidémiologiques du cancer du sein, en faveur d’une véritable pandémie, et le caractère bien établi de son estrogéno-dépendance
suggèrent de nouveaux facteurs de risque qui pourraient impliquer les xénoestrogènes, en particulier les pesticides organochlorés. Leur présence
ubiquitaire dans l’environnement, y compris dans le sang, le lait maternel et le tissu adipeux, les caractéristiques de perturbateurs endocriniens de
ces composés, leur aptitude à exercer, in vitro et chez l’animal, un effet carcinogène sur les cellules mammaires, invitent, au nom du principe de
précaution, à analyser attentivement leur participation éventuelle aux facteurs étiologiques du cancer du sein. En effet, une exposition prolongée à
faibles doses à un cocktail de produits organiques persistants pourrait être délétère, en particulier dans des périodes critiques d’exposition comme la
période fœtale, associée à une susceptibilité génétique individuelle. Les études épidémiologiques prospectives quantifiant le risque en fonction de
l’exposition, l’évaluation de l’exposition chronique à l’aide de biomarqueurs et l’identification des gènes de susceptibilité et/ou soumis à empreinte
épigénétique devraient permettre de clarifier la responsabilité de ces nouveaux facteurs étiopathogéniques, conduire à un dépistage précoce de
sujets à haut risque et faciliter l’établissement de normes internationales plus draconiennes pour l’utilisation des produits chimiques de synthèse
industriels ou agricoles.
# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Abstract
Human epidemiological studies and experimental animal data strongly suggest that xenobiotics with estrogenic activity may participate in to
the increasing incidence of breast cancer, the most frequent cancer all around the world. Several reports have since 15 years reported positive
correlations between blood or peritumoral adipose tissue levels of persistent organic compounds including organochloride pesticides and breast
cancer risk. Moreover, fetal or perinatal exposition to low doses of such endocrine disruptors induce premalignant or malignant transformation of
adult mammary gland in rodents. However, this environmental endocrine disrupter hypothesis still needs to be demonstrated. Further human
studies are needed which will consider the exposition window, the association of several xenoestrogens, the molecular mechanisms involved and
the possible individual genetic susceptibility in order to identify pertinent biomarkers and to define acceptable environmental concentration levels
for agricultural or industrial chemical new products to be used.
# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Cancer du sein ; Xénoestrogènes ; Perturbateurs endocriniens environnementaux ; Pesticide ; Exposition fetale

Keywords: Breast cancer; Xenoestrogens; Environmental endocrine disrupters; Pesticide; Fetal exposition

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : fenichel.p@chu-nice.fr (P. Fénichel).

1297-9589/$ – see front matter # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.gyobfe.2008.05.006
970 P. Fénichel, F. Brucker-Davis / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 36 (2008) 969–977

1. Introduction Concernant l’exposition aux estrogènes durant les différentes


périodes de la vie, développée dans la section suivante, ni l’âge
L’augmentation de l’incidence du cancer du sein, cancer plus élevé de la première grossesse, ni le raccourcissement de la
féminine le plus fréquent, et son extension progressive à toutes durée d’allaitement, ni l’augmentation de l’utilisation des
les régions du globe suggèrent fortement la participation de estroprogestatifs contraceptifs ou de l’hormonothérapie sub-
facteurs d’environnement. La plupart des facteurs de risque stitutive de la ménopause ne peuvent à eux seuls expliquer les
connus concernent d’une manière ou d’une autre une exposition données extensives de l’épidémiologie. Quant aux expositions
anormale aux estrogènes qui jouent certes un rôle essentiel dans spécifiques reconnues, elles incluent surtout les radiations et
le développement normal de la glande mammaire mais certains agents chimiques carcinogènes [7]. C’est la raison pour
influencent aussi sa susceptibilité [1] à la carcinogenèse. Les laquelle il paraı̂t plausible, lors de l’examen des différentes
xénoestrogènes organochlorés, en particulier les pesticides, données épidémiologiques, d’évoquer d’autres facteurs envi-
pourraient représenter une piste sérieuse en raison de leur ronnementaux.
aptitude à se comporter comme des perturbateurs endocriniens,
de leur caractère ubiquitaire, leur persistance dans l’environ- 3. Estrogènes et cancer du sein
nement que ce soit l’eau, l’air ou la chaı̂ne alimentaire et leur
aptitude à exercer in vitro ou chez l’animal un pouvoir L’estrogéno-dépendance du cancer du sein est une notion
carcinogène sur les cellules mammaires [2–4]. Mais leur classique, ancienne et actuellement bien établie qui repose sur
implication est loin d’avoir été formellement démontrée [4–6]. des considérations épidémiologiques, cliniques, physiologi-
Nous analyserons les arguments qui existent aujourd’hui en ques et expérimentales. Hormis les mutations germinales
faveur de leur responsabilité, les doutes qui persistent et les transmissibles responsables de moins de 10 % des cancers du
voies d’investigation qui permettraient de préciser leur sein, la plupart des facteurs de risque connus de ce cancer sont
véritable participation. en relation avec une exposition anormalement prolongée aux
estrogènes – que ce soit aux estrogènes endogènes (puberté
2. Cancer du sein : une maladie environnementale précoce ou ménopause tardive), exogènes (prise d’estropro-
gestatifs contraceptifs ou traitement hormonal substitutif de la
Parmi les données de l’épidémiologie descriptive, le cancer ménopause) – ou influencée par l’alimentation et le mode de
du sein se caractérise par sa fréquence, sa gravité, l’augmenta- vie (obésité, consommation excessive de lipides de viande
tion de son incidence et sa répartition géographique inégale [7]. rouge riche en graisse, ou d’alcool). Mais son positionnement
Il s’agit, en effet aujourd’hui, du premier cancer féminin ; il par rapport au développement et la différentiation normale de
représente par exemple, en France, un tiers des cancers chez la la glande mammaire, les mécanismes d’action en jeu, les
femme. Ce rang est retrouvé en fait, non seulement dans les périodes d’exposition critique soumises à plus grande
pays industrialisés, mais dans le monde entier, même si la vulnérabilité et sa relation avec des facteurs de susceptibilité
répartition géographique semble inégale avec des zones à haut individuelle restent largement à préciser. Les estrogènes sont
risque, comprenant l’Amérique du Nord, certains pays nécessaires en effet au développement de la glande mammaire
d’Europe, d’Amérique du Sud, l’Australie et la Nouvelle- qui démarre au cours de la vie fœtale, se poursuit en période
Zélande et certaines zones à faibles risques comprenant l’Asie péripubertaire et lors des phases folliculaires des cycles
et l’Afrique. L’incidence à travers le monde, soit 1,15 million menstruels et dont la différenciation complète ne survient
de nouveaux cas par an environ [8], augmente considéra- qu’au cours de la grossesse [9] et l’allaitement du post-partum
blement puisqu’elle a doublé sur une période de 20 ans. Cette [10–12]. L’exposition exagérée aux estrogènes à certaines
augmentation est retrouvée à peu près partout avec de plus périodes clefs pourrait perturber ce développement et
fortes augmentations là où les taux étaient les plus faibles, et les imprimer une empreinte particulière favorisant la carcinoge-
plus faibles augmentations là où l’incidence était la plus élevée nèse future [11,12]. Ainsi, l’importance de l’exposition in
[7]. Il est responsable de 410 000 décès par an [8], et ce malgré utero est suggérée par différents états associés à une variation
l’amélioration de la prise en charge et une plus grande efficacité du climat estrogénique et corrélée à une protection ou au
thérapeutique. Cette fréquence, cette augmentation de l’inci- contraire à un risque relatif de développement à l’âge adulte
dence et cette répartition géographique qui s’étend, bien d’un cancer du sein, à savoir l’éclampsie, les petits poids à la
qu’inégale, ne peuvent être expliquées dans la plupart des cas naissance, les grossesses gémellaires [7]. Plus récemment,
par le renforcement du dépistage ou l’augmentation de l’importance de la fenêtre d’exposition a été confirmée
l’espérance de vie (l’âge en soi étant en effet un facteur de expérimentalement chez la souris soumise en périnatal au
risque majeur) ni par des facteurs de risque reconnus de cancer bisphénol A, un produit organique persistant estrogénique
que sont la génétique, la vie reproductive et hormonale, [13].
l’alimentation et quelques expositions spécifiques [7]. En effet, Il est classique de considérer les estrogènes comme des
les formes familiales liées à des mutations germinales ne sont facteurs de croissance impliqués dans les voies de signalisation
responsables que de moins de 10 % des cas, même s’il est contrôlant la prolifération cellulaire via son récepteur
possible que l’on découvre par la suite de nouvelles anomalies nucléaire ERa qui, en tant que facteur de transcription, joue
génétiques et qu’il existe vraisemblablement une susceptibilité le rôle de promoteur tumoral. Une exposition prolongée
individuelle liée aux polymorphismes de certains gènes. pourrait induire cet effet promoteur et favoriser ainsi la
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prolifération de cellules mammaires déjà modifiées généti- 4. Les xénoestrogènes


quement. En revanche, il semble que ERb, récepteur plus
récemment caractérisé, soit impliqué dans la différenciation Depuis plusieurs décades, des observations, réalisées aussi
terminale de la glande mammaire et joue plus volontiers le rôle bien dans le monde animal que dans l’espèce humaine, ont
au contraire de suppresseur tumoral [9]. Sa présence est suggéré que certains xénobiotiques (substances présentes dans
corrélée avec un meilleur pronostic dans les cancers estrogéno- l’environnement et mimant des molécules à activité biolo-
dépendants et il pourrait transduire l’effet protecteur de gique) à activité hormonale seraient susceptible d’induire
certains phytoestrogènes [9]. Plus récemment, des récepteurs des troubles du développement, de la reproduction ou du
membranaires des estrogènes proches ou totalement différents comportement [19]. L’activité de perturbateurs endocriniens à
des récepteurs classiques nucléaires ont été identifiés, qui activité estrogénique ou anti-androgénique a été particulière-
pourraient participer au contrôle de la prolifération cellulaire ment évoquée pour un certain nombre de produits chimiques à
[14] et dont l’affinité pour certains xénoestrogènes est usage agricole ou industriel. Qu’est-ce qu’un perturbateur
différente, voire supérieure, à celle des récepteurs nucléaires endocrinien ? Un perturbateur endocrinien est, selon la
a et b classiques [15]. définition précisée lors du Workshop Européen de Weybridge
En dehors de ce rôle de promoteur tumoral bien documenté en décembre 1996 : « un agent exogène capable d’entraı̂ner des
des estrogènes, il reste à démontrer formellement que ces effets délétères sur un organisme vivant ou sa descendance en
hormones puissent également jouer un effet initiateur de interférant avec la synthèse, le stockage, le transport, le
tumeur par l’intermédiaire de certains de leur métabolites qui métabolisme, la fixation, l’action ou l’élimination d’une
pourraient être plus dangereux que les stéroı̈des eux-mêmes, et hormone endogène intervenant dans les mécanismes de
capables d’entraı̂ner des altérations génomiques [10–12,16]. régulation de l’homéostasie, du développement ou de la
C’est le cas de certains catécholestrogènes non pas le 2- reproduction ». En fait, de nombreux xénobiotiques à activité
hydroxy-estrone mais le 16-b-hydroxy-estrone qui pourrait estrogénique (Tableau 1), androgénique ou anti-androgénique
avoir un effet délétère direct sur l’ADN, d’où l’importance sont présents dans l’environnement quotidien, qu’ils soient de
pour certains du rapport 2-hydroxy-estrone sur 16-b-hydroxy- synthèse (produits chimiques à usage agricole ou industriel,
estrone ; pour d’autres, les composés métaboliques délétères médicaments humains ou vétérinaires, hormones utilisées dans
seraient les dérivés 4-hydroxylés 4a-hydroxy-estrone qui se l’élevage, solvants, plastiques ou produits cosmétiques) ou
transformeraient en quinones [10] délétères en soi, et qui naturels comme les phytoestrogènes (soja, froments, pois
pourraient également produire des composés oxygénés actifs chiche), qu’ils soient présents dans l’eau, le sol, l’air, les objets
responsables des altérations génomiques [17]. Dans ce cadre, domestiques ou la chaı̂ne alimentaire. Toutes ces substances
certains auteurs ont rapporté un polymorphisme du gène seraient théoriquement susceptibles d’interférer avec les
codant pour la COMT (ou catécholméthyltransférase) impli- hormones stéroı̈diennes endogènes. Dans le domaine du
quée dans l’inactivation des catécholestrogènes et qui pourrait cancer du sein, ce sont bien entendu les xénoestrogènes qui ont
être associé à une susceptibilité particulière à développer un fait l’objet depuis 15 ans [20] d’une attention particulière
cancer du sein [18]. (Tableau 2). Les xénoestrogènes peuvent avoir une action

Tableau 1
Perturbateurs endocriniens environnementaux estrogéniques
Classe Source Molécules
Estrogènes
Endogènes Ovaires, surrénales, placenta, tissu adipeux Estradiol, estrone, estriol
Phytoestrogènes Plantes, épices, aliments Genestène, coumestrol
Mycoestrogènes Champignons Zéaralénone
Estrogènes de synthèse
Thérapeutique Pharmaceutique Éthinyl estradiol, diéthylstilbestiol
Usage vétérinaire Viande Zéranol
Produis chimiques
Usage agricole Pesticides Op0 DDT, op0 DDE, métoxychlore
Organochlorés Képone, dieldrin, atrazine, lindane
Usage industriel Isolants électriques Pyralène
PCB (biphényl polychloré) Plastiques
Phtalates
Bisphénol A
HCB (hexachlorobenzène) Solvants
PAH (hydrocarbures aromatique polycycliques)
Anti-estrogènes
Thérapeutique Pharmaceutique Tamoxifène
Industriels Déchets toxiques Dioxine (TCDD)
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Tableau 2
Perturbateurs endocriniens environnementaux estrogéniques et cancer du sein : études significatives ( p < 0,05)
Agent chimique Source R.R. Caractéristique Références
PCB Tissu adipeux 3,9 (1,7–8,9) Selon statut ménopause [64]
105
2,5 (1,2–6,5)
170
2,4 (1,1–5,4)
180
PCB 118 Tissu adipeux x4 T. non métastasiques [64]
Heptachlore Tissu adipeux p < 0,007 [65]
HCB hexachlorobenzene Sérum 5 (2,9–8,4) [66]
et DDT Sérum 2,2 (1,4–2,4) [66]
0
pp DDT Sérum x5 Exposition avant 14 ans [47]
DDE Tissu adipeux péritumoral 2,5 (1,2–5,4) Selon stade tumoral [30]
DDE, DDT, PCB Tissu adipeux péritumoral [67]
PBB Sérum 3,1 (0,8–12) [68]
Dieldrin Sérum 2,1 (1,2–3,6) [69]
Dieldrin Sérum 2,78 (1,8–5,6) Corrélé à la survie [70]
Organochlorés Tissu adipeux péritumoral REa+ corrélé à l’agressivité tumorale [36]
bHCH Sérum 10,5 (9,3–55) [71]
DDE Sérum 3,8 (1,1–12,8) Selon statut ménopause [32]
PCB 153 Tissu adipeux 2 (1,2–3,4) Selon statut ménopause [61]
DDE et PCB Tissu adipeux 2,4 (1–5,4) Selon stade tumoral [72]
DDE Sérum 4 (1,2–5,6) [73]
Le risque relatif (R.R.) avec l’intervalle de confiance à 95 % sont indiqués ainsi que les caractéristiques cliniques ou tumorales pour lesquelles la corrélation a été
retrouvée.
T. : tumeur.

estrogénique ou anti-estrogénique. Leur classification peut se croissance utérine. Son métabolite principal, le pp0 DDE,
faire en substances naturelles comme les phytoestrogènes qui possède plutôt une activité anti-androgénique qu’estrogénique
sont présents de façon modérée dans de nombreuses plantes avec une durée de vie très longue. Le méthoxychlore, la
dont le soja et sont consommées à la fois par les animaux et chlordinone, la dieldrine ou l’endosulfan [20] ont des activités
l’homme. Ils possèdent une structure similaire à celle de estrogéniques reconnues in vitro et in vivo. Leur administration
l’estradiol et comprennent les isoflavones, comme la génis- en période néonatale accélère, chez le rat, l’ouverture vaginale
téı̈ne, les coumestans et les lignans. Contrairement aux et la précocité de l’œstrus [22]. Le lindane, ou hexachorohe-
xénoestrogènes d’origine chimique, ils sont hydrophiles, ne xane, un pesticide bien connu, est estrogénique sous sa forme
s’accumulent pas dans le tissu gras et sont facilement éliminés. bHCH [23]. Les PCB, qui sont très largement répandus dans
Les substances chimiques de synthèse possédant des effets l’environnement, comprennent généralement un mélange
estrogéniques peuvent se diviser principalement en pesticides d’isomères dont il existe plus de 200 formes différentes et
organochlorés, biphényls polychlorés (PCB), composés dont certains sont estrogéniques in vitro et in vivo, alors que
phénoliques, bysphénol A et esters de phtalates. Ces produits d’autres peuvent être anti-estrogéniques [24]. Les PCB sont
chimiques ont généralement la caractéristique d’être très retrouvés dans des isolants électriques utilisés encore il y a peu
lipophiles, d’avoir une durée de vie prolongée (produits de temps de façon courante et dans certains plastiques.
organiques persistants ou POP) et d’être difficilement éliminés Plusieurs de leurs isomères ont été retrouvés abondamment
par les organismes vivants qui les stockent dans leur tissu dans les tissus humains ; ils se lient aux récepteurs des
graisseux où ils s’accumulent. Parmi les pesticides organo- estrogènes et induisent la prolifération des cellules mammaires
chlorés, le chef de file est bien sûr le DDT qui a été utilisé dans malignes humaines in vitro [25]. Les phénols sont largement
les pays développés jusqu’aux années 1960 comme insecti- utilisés dans l’industrie comme surfactant dans les détergents,
cides. Il est actuellement interdit dans la plupart des pays les peintures, les cosmétiques, et dans de nombreux plastiques.
occidentaux mais continue à être largement utilisé dans les L’octylphénol et le nonylphénol ont montré clairement des
pays en voie de développement. Plusieurs de ses isomères propriétés estrogénique in vitro et in vivo [26]. Le bisphénol A,
actifs dont le pp0 DDT sont estrogéniques et se lient aux polymère carboné et ses dérivés sont largement employés dans
récepteurs aux estrogènes, entraı̂nant in vivo chez l’animal une les plastiques, emballages, résines, matériels dentaires. Leur
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estrogénicité a été également démontrée in vivo et in vitro [27]. conduites en général sur des sérums ou le tissu adipeux
Les phtalates sont utilisés dans de nombreux plastiques et sont péritumoral, de façon prospective, avec des effectifs plus
extrêmement ubiquitaires dans l’environnement quotidien. importants. L’analyse de ces études, ne montrant pas de
L’absorption humaine quotidienne est de plusieurs milligram- corrélation, amenait, dans le cadre d’une analyse critique, S.
mes. Ils sont également utilisés comme anti-oxydants dans Safe à remettre totalement en cause dans le New England
l’alimentation et considérés comme faiblement estrogéniques Journal of Medicine [5,6,4] l’hypothèse de l’exposition aux
in vitro [26]. D’autres produits industriels ont au contraire un xénoestrogènes en tant que facteur de risque du cancer du sein.
effet anti-estrogénique, comme la dioxine ou 2,3,7,8-tétra- Il s’appuyait pour ce faire sur différents arguments, à savoir que
chlorodibenzo-p-dioxine (TCDD) ou dioxine de Seveso, les corrélations retrouvées par ces études ne signifiaient pas
substance chimique produite en grande quantité comme forcément une relation causale, que les effectifs de ces études
déchets toxiques par les incinérateurs. étaient souvent inférieurs à 100, le ratio taux de POP dans le
cancer du sein versus témoins était faible et inférieur à 1,1, que
5. Perturbateurs endocriniens environnementaux et l’interdiction dans les pays développés de certains de ces
cancer du sein pesticides, comme le DDT et le lindane, n’avait pas provoqué
une diminution du cancer et que paradoxalement, là où il n’était
5.1. Données épidémiologiques et cliniques pas interdit, comme au Mexique, il n’avait pas été retrouvé plus
de cancer qu’aux États-Unis. Une étude d’observation dans un
Depuis une quinzaine d’années, des données épidémiolo- groupe exposé professionnellement a montré au contraire une
giques [20] suggèrent que l’exposition prolongée à de faibles corrélation inverse [34], certains POP ayant d’ailleurs aussi une
doses de certains xénoestrogènes pourrait effectivement action anti-estrogénique, comme la dioxine. Enfin les taux de
représenter un facteur de risque et influencer la survenue, le pesticides retrouvés dans l’environnement sont particulière-
développement, voire la gravité du cancer du sein. Dans deux ment faibles par rapport aux taux considérés classiquement
études d’exposition, une augmentation de la fréquence du comme toxiques chez l’animal et ces différents xénoestrogènes
cancer du sein a été mise en évidence chez des travailleuses ont généralement une très faible activité estrogénique [21].
exposées soit à la dioxine [28] soit au PCB [29]. Par la suite, des Si ces critiques ont pu paraı̂tre un temps pertinentes et semer
études cas–témoin ont cherché à mettre en évidence un certain le doute quant à la responsabilité réelle des PEE dans la
nombre de xénoestrogènes dans le sang ou le tissu adipeux carcinogenèse mammaire humaine, le développement de
péritumoral chez des femmes présentant un cancer du sein et nouveaux concepts concernant la fenêtre d’exposition, la
ont rapporté un risque relatif augmenté à partir d’une certaine synergie entre plusieurs POP ou l’exposition prolongée à faible
concentration de produits organiques persistants (Tableau 2) dose, les données expérimentales et épidémiologiques très
[64–66,47,30,67–70,36,71,32,61,72,73]. Cela a été montré récentes ainsi que la mise en évidence de nouveaux mécanismes
pour le lindane, la dieldrine et l’HCB dans le sérum, le d’action possibles sont venus en fait renforcer la suspicion vis-
DDT ou son métabolite persistant le dichlorodiphényldichlo- à-vis de la responsabilité de ces facteurs environnementaux [4].
roéthène (DDE) et les PCB dans le sérum et le tissu adipeux
avec des risques relatifs en fonction des concentrations limites 5.2. Analyse critique
choisies allant de 1,2 à 10,5. Ces risques relatifs sont parfois
limités au cancer du sein avec récepteurs aux estrogènes positifs 5.2.1. Dose d’exposition
[30], aux tumeurs invasives [31] ou au statut post-ménopau- Une des critiques majeures faites par les toxicologues
sique [32]. Une étude sur le DDE corrèle la concentration concerne effectivement les doses de PEE retrouvées dans
sérique à l’agressivité tumorale [33]. En revanche, un certain l’environnement ; celles-ci apparaissent à première vue
nombre d’études similaires ne retrouve pas de différences pour particulièrement faibles comparées aux doses capables
les même produits (Tableau 3) [57,58,34,59–63] en particulier d’induire expérimentalement un effet notable en toxicologie
pour le DDT, DDE, PCB et l’atrazine, dans des études classique. Néanmoins, cette approche toxicologique classique

Tableau 3
Perturbateurs endocriniens environnementaux estrogéniques et cancer du sein : études non significatives
Agent chimique Source R.R. Caractéristique Références
DDE, PCB Sérum N.S. États-Unis : trois groupes ethniques [57]
DDE, PCB Sérum N.S. Boston [58]
PCB, DDT Exposition N.S. Suède [34]
DDE Sérum N.S. Europe :selon statut ménopause [59]
DDE Sérum N.S. Mexique [60]
Pesticides organochlorés Tissu adipeux péritumoral N.S. New York [61]
PCB Sérum N.S. New York [62]
DDE Sérum N.S. New York [62]
PCB et organochlorés Sérum Missouri [63]
R.R. : risque relatif ; N.S. : non significatif.
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n’intègre ni la notion de bioaccumulation ni celle de fenêtre xénoestrogènes par chromatographie, Ibarluzea et al. [45] ont
d’exposition. En effet, il est important de tenir compte, lors de pu mettre en évidence dans la région de Grenade un risque de
l’exposition prolongée à faibles doses à ces produits souvent cancer du sein proportionnel à ce marqueur alors que la mesure
lipophiles, de leur bioaccumulation comme cela a été bien de 16 pesticides organochlorés ne montrait pas isolément de
montré dans le monde animal [35]. Ainsi, a-t-il été possible corrélation significative [45].
d’évaluer que, dans le lac Ontario, certains POP, comme les
PCB présents dans l’eau à des concentrations relativement 5.2.3. Fenêtre d’exposition
faibles, s’accumulaient d’abord dans le plancton puis succes- La plupart des études qui ont tenté de retrouver une
sivement dans les crustacés, les petits puis les plus gros corrélation entre le cancer du sein et la présence de tel ou tel
poissons avalés ensuite par les mouettes ou les cormorans chez POP dans le sang ou le tissu graisseux concerne des
qui la concentration finale dans le tissu graisseux était retrouvée prélèvements effectués une fois le diagnostic de cancer établi,
avec un facteur multiplicatif chez le prédateur de 25  106 par ou peu de temps avant, et présentent de ce fait une limitation
rapport à la concentration initiale de l’eau du lac. Cette importante concernant la période d’exposition véritable.
concentration finale devenait en fait compatible car reproduite Beaucoup ont dosé le DDE, un métabolite durable du DDT
expérimentalement à ces doses, avec l’induction des étranges qui, lui, possède une durée de vie courte et qui en outre a été
troubles du comportement sexuel observés chez les mouettes et interdit dans la plupart des pays occidentaux dans les années
des malformations majeures observées chez les cormorans 1970. En fait, une étude de Cohn et al. [46,47] a eu recours à une
[35]. Dans un travail clinique très récent [36], l’équipe autre stratégie. Elle a bénéficié de façon exceptionnelle d’une
argentine de Munoz-de-Toro démontre que la somme des collection de prélèvements sanguins effectués chez des jeunes
pesticides organochlorés, retrouvés dans la graisse péritumo- accouchées à partir de 1960 et du suivi prospectif de cette
rale de femmes ménopausées présentant un cancer du sein ERa cohorte de femmes. Le pp0 DDT a été dosé dans des sérums
positif, est corrélée strictement à l’expression tumorale des prélevés avant et après son interdiction et la période
récepteurs à la progestérone, ce qui atteste de l’estrogénicité de d’exposition (l’âge de la femme) a été considérée. La courbe
ces pesticides, et également à l’agressivité tumorale, ce qui des valeurs de pp0 DDT retrouvée suit bien entendu celle de
atteste du rôle promoteur délétère de la persistance de ces l’introduction, l’utilisation et l’interdiction du DDT aux États-
résidus organochlorés [37]. Concernant les doses dites faibles, Unis. Mais de façon surprenante une corrélation très étroite est
les travaux expérimentaux récents, par exemple sur le retrouvée entre l’importance de l’exposition au DDT pendant
bisphénol A, démontrent que l’exposition à des doses présentes l’enfance et l’adolescence avant 20 ans et le risque de survenue
dans l’environnement et compatibles avec les taux retrouvés de cancer du sein [47] alors qu’une telle corrélation n’est plus
couramment dans le plasma ou les urines de populations retrouvée lorsque l’exposition a eu lieu après 20 ans. Voilà
humaines tout venant [38,39] était capable d’induire une qui n’est pas sans rappeler la particulière sensibilité de la
carcinogenèse mammaire chez la souris [40] et chez le rat [41] glande mammaire à se cancériser lorsqu’elle est irradiée en
pour peu que l’exposition ait lieu dans la période fœtale in utero période de développement pré- ou péripubertaire [48].
ou en période postnatale immédiate [42,43]. L’importance de la fenêtre d’exposition, en particulier de la
période fœtale dans la programmation de pathologies à l’âge
5.2.2. Association d’un cocktail de POP et leur synergie adulte et même dans les générations suivantes, est aujourd’hui
éventuelle bien documentée. Cette notion de programmation fœtale a été
Un autre aspect important, non pris en compte jusqu’à rapportée pour la première fois pour le risque métabolique et
présent par les toxicologues mais qui apparaı̂t depuis peu dans cardiovasculaire associé à une hypotrophie fœtale [49].
les travaux publiés, est de considérer l’ensemble des molécules L’expérience malheureuse du distilbène chez l’Homme,
chimiques environnementales auxquelles un individu est reproduite chez les rongeurs, illustre parfaitement cette notion
soumis tout au long de son existence, ce que les Anglo-Saxons de programmation fœtale. Ainsi, l’exposition in utero au
appellent « mixture ». Le dosage d’un seul de ces facteurs ne distilbène a-t-elle été capable d’induire à l’âge adulte la
permet pas d’appréhender objectivement la toxicité, par survenue de cancer du vagin chez la fille ou de l’utérus chez la
exemple l’estrogénicité, à laquelle il a été soumis. L’effet de rate [22], risque persistant à la génération suivante suggérant
ces molécules peut également s’additionner [43] ou se des modifications du génome soit de type épigénétique [50] soit
potentialiser, comme cela a bien été mis en évidence par par une plus grande instabilité génomique. Concernant les filles
Coumoul et al. [44] pour la dioxine et certains pesticides au exposées in utero au distilbène prescrit à leur mère pour réduire
niveau du rapport des enzymes de détoxification hépatique, les le risque de fausses couches, une étude prospective réalisée à
cytochromes CYP1B1/CYP1A1. Aussi est-il nécessaire de Boston par Palmer et al. [51] rapporte en 2002, à partir d’une
mettre au point des tests in vitro afin d’évaluer leurs effets en comparaison portant sur 4821 femmes exposées et 2095
aval, soit sur les effets biologiques, comme la prolifération contrôles suivies pendant 19 ans, un risque majoré de
cellulaire, soit sur l’expression de gènes cibles. Ainsi, utilisant développer un cancer du sein à partir de 40 ans avec un risque
un marqueur d’exposition globale aux xénoestrogènes (TEXB relatif (RR) de 2,5 et un intervalle de confiance de 1,0 à 6,3 [52].
pour total effective xenoestrogen burden), fondé sur l’effet des Le rôle de l’exposition aux estrogènes in utero et le risque de
xénoestrogènes sur la prolifération de cellules cancéreuses survenue de cancer du sein ont également été évoqués pour
mammaires in vitro après séparation des stéroı̈des sexuels des expliquer les corrélations retrouvées avec le poids à la
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naissance, l’existence d’une toxémie gravidique ou le type de chlorés pouvaient orienter plus volontiers vers la voie délétère
gémellité [7]. Ces différentes observations suggèrent la 16-a-hydroxyestrone et abaisser le rapport 2-hydroxyestrone/
vulnérabilité de l’exposition aux estrogènes lors de la période 16-b-hydroxyestrone [54]. La plupart de ces xénoestrogènes
fœtale pour le développement de la glande mammaire et donc le a cependant une affinité pour les récepteurs nucléaires
risque lié à une exposition éventuelle aux xénoestrogènes. Cette classiques des estrogènes plus de 1000 fois plus faible que
notion de programmation fœtale et/ou périnatale par exposition l’estradiol, ce qui a fait douter de leur intervention effective. Il a
à des xénoestrogènes, d’une susceptibilité à développer à l’âge été évoqué récemment, en particulier pour le bisphénol A [15],
adulte une tumeur mammaire maligne, a été parfaitement que les xénoestrogènes pourraient intervenir via les récepteurs
démontrée chez la souris ou le rat exposés à des doses faibles de membranaires des estrogènes caractérisés plus récemment et
bisphénol A [41,13]. En effet, de telles souris, soumises in utero impliqués dans le cancer du sein [15]. Une hypothèse
à des doses de 25 à 250 mg/kg par jour, montrent dès la période alternative consiste à considérer que la présence de taux plus
pubertaire et à l’âge adulte une altération du développement et élevés d’organochlorés chez une femme représente un
de l’histoarchitecture de leurs glandes mammaires [41]. Avant marqueur de risque lié à une susceptibilité génétique
la puberté, de façon paradoxale, on note un ralentissement particulière. Ces composés sont en principe métabolisés par
initial de la migration canalaire dans le stroma et une synthèse des enzymes de la famille des cytochromes P450, les mêmes
diminuée d’ADN dans l’épithélium. Après la puberté en utilisés d’ailleurs pour les estrogènes endogènes avec lesquels
revanche, la prolifération cellulaire est exagérée dans le stroma ils seront en compétition, et capables de donner naissance à des
et il existe une augmentation franche du développement des produits intermédiaires capables de réagir avec l’ADN ou de
canaux, des canaux terminaux, des bourgeons terminaux et des stimuler la prolifération cellulaire, comme cela a été montré
bourgeons alvéolaires avec sécrétion alvéolaire exagérée, tous pour les hydrocarbures aromatiques [17]. Ces produits sont
ces changements étant associés à la carcinogenèse aussi bien ensuite détoxiqués par conjugaison en glucuronides sous l’effet
chez la souris que dans l’espèce humaine. Les mêmes souris de la glutathione-S-transférase (GST). Or des polymorphismes
soumises aux mêmes doses de bisphénol A en période des gènes P450 CYP1A1 et CYP1A2 et GST [54] ont été
périnatale montrent à la puberté une sensibilité exacerbée de rapportés associés aux tumeurs du sein. L’exposition prolongée
la glande mammaire aux estrogènes, une augmentation de la à faibles doses à des organochlorés pourrait, chez certaines
surface et du nombre des bourgeons terminaux rapportés à femmes, conduire à une augmentation de ces taux en raison
l’ensemble des structures canalaires, avec une diminution de d’une altération de la détoxication et à une surproduction de
leur activité apoptotique, une augmentation du nombre de dérivés métabolites intermédiaires capables d’exercer une
cellules épithéliales exprimant le récepteur à la progestérone action carcinogène ou génotoxique [55]. Les taux élevés
[13], une augmentation des ramifications canalaires latérales et d’organochlorés servent alors de révélateur d’un sous-groupe à
donc de leur densité ; tous ces éléments évoquent une susceptibilité génétique à développer un cancer du sein. En ce
augmentation de la susceptibilité à développer un cancer aussi qui concerne les mécanismes moléculaires de programmation
bien chez la souris que dans l’espèce humaine [13]. fœtale à distance de cancers hormono-dépendants à l’âge
adulte, l’hypothèse la plus récente concerne des modifications
5.3. Mode d’action possible des xénoestrogènes épigénétiques induites par l’exposition in utero délétère et
favorisant la carcinogenèse [56].
Une des questions majeures concernant la participation
éventuelle des PEE dans la carcinogenèse mammaire est leur 6. Perspectives
mode d’action. Certains d’entre eux possèdent très clairement
un pouvoir génotoxique direct au niveau de l’ADN mis en Au total, si l’hypothèse des xénoestrogènes comme
évidence chez l’animal et sur des lignées cellulaires [52]. Mais nouveaux facteurs de risque du cancer du sein susceptibles
cet effet carcinogène indépendant de leur éventuelle estrogé- d’expliquer l’augmentation de son incidence paraı̂t plausible,
nicité survient à des concentrations bien supérieures à celles elle reste pour l’instant à confirmer. Les travaux à venir devront
retrouvées dans le sang ou les tissus. C’est en général la réponse s’efforcer de relier le niveau d’exposition prolongée à de faible
des toxicologues. Il en va de même pour d’autres effets non doses de produits organiques persistants au risque relatif en
hormonaux, comme l’altération des communications jonction- tenant compte de la bioaccumulation, de l’association ou de la
nelles intercellulaires induites par plusieurs d’entre eux sur des potentialisation de plusieurs molécules, surtout de l’exposition
cellules de cancer du sein MCF-7 exposées [53]. Un autre à des périodes critiques de vulnérabilité (fœtale, périnatale et
mécanisme plausible est bien entendu leur aptitude à se péripubertaire) et de la susceptibilité individuelle liée aux
comporter comme des xénoestrogènes et à agir indirectement polymorphismes génétiques. Des études épidémologiques
par un effet promoteur tumoral surtout et, éventuellement, prospectives, la mise au point de tests d’estrogénicité globale,
génotoxique via les métabolites actifs. Ils se lient alors aux la caractérisation de biomarqueurs moléculaires en aval de
récepteurs pouvant agir comme des agonistes et sont l’action des perturbateurs et l’identification de gènes de
métabolisés alors de façon similaire à l’estradiol vers la voie susceptibilité devraient permettre de clarifier la responsabilité
du 2-hydroxyestrone, métabolite bénin et peu actif ou la voie du de ces nouveaux facteurs de risque potentiellement curables par
16-a-hydroxyestrone, un estrogène puissant et produisant des une prévention adaptée, comprenant entre autre l’établissement
métabolites délétères. Il a ainsi été postulé que les organo- de normes internationales plus fiables pour les seuils sans effet
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