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Cancérologie Générale 2021

FACTEURS DE LA CANCEROGENESE
INTRODUCTION

1. GENERALITES
1.1. Définition

Ce sont des facteurs dont la présence induit une augmentation de la probabilité


d'apparition d’un cancer.

1.2. Rappels

Le cancer est une prolifération cellulaire anarchique conduisant à une néoformation tissulaire
ayant tendance à croitre, à envahir les tissus voisins et à donner des localisations secondaires
à distance (métastases). C’est le résultat d’une altération de gènes qui contrôlent la vie de la
cellule. En effet, dans un tissu normal, il existe un équilibre entre la prolifération qui génère de
nouvelles cellules, la différentiation qui conduit ces cellules vers une spécialisation irréversible,
et les pertes par sénescence (vieillissement) ou apoptose (mort programmée). Cet équilibre
est appelé homéostasie tissulaire. Il peut être rompu par des facteurs qui vont agir en activant
ou en inactivant certains gènes liés au processus de cancérisation. Il s’agit de :

 Gènes qui stimulent à l’état normal la prolifération cellulaire (proto-oncogènes) : leur


activation incontrôlée favorise le cancer ;
 Gènes qui inhibent à l’état normal la prolifération cellulaire (anti-oncogènes) : leur
inactivation favorise la survenue de cancer ;
 Gènes qui réparent les lésions induites sur la molécule d’ADN (gènes de réparation) :
leur inactivation favorise l’accumulation de lésions génétiques susceptibles d’induire le
cancer.

Ces altérations de gènes sont le résultat de l’action de facteurs génotoxiques, c’est-à-dire


des facteurs capables de compromettre l’intégrité physique ou fonctionnelle du génome
cellulaire. Ces facteurs sont dits cancérigènes lorsqu’ils induisent des altérations géniques qui
conduisent au développement du cancer. Ils peuvent être exogènes, c’est-à-dire provenant
de l’extérieur de l’organisme, ou endogènes, c’est-à-dire due à une cause interne à
l’organisme. Nous allons les passer en revue dans les prochains chapitres en commençant
par les facteurs exogènes.

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2. FACTEURS EXOGENES
2.1. Comportementaux

Ce sont des facteurs liés au mode de vie et aux habitudes des individus.

2.1.1. Tabagisme (20%)

C’est une consommation répétée de l’un ou l’autre des produits fabriqués à partir des feuilles
de tabac créant un état de dépendance psychique ou physique. Il peut s’agir notamment de
cigarettes, cigares, tabac à pipe, tabac à priser et à chiquer.

On assiste depuis les années 1950 à une augmentation rapide du tabagisme à l’échelle
mondiale, ce qui peut être convenable de qualifier d’épidémie. En Afrique, cette épidémie est
limitée, mais en développement rapide du fait des stratégies de marketing des fabricants de
tabac. Au Burkina Faso, la prévalence du tabagisme est de 20% chez l’homme et 4% chez la
femme selon Tobacco Atlas. La prévalence est plus élevée dans la frange de 13 à 15 ans
(28%).

La fumée de cigarettes contient environ 4 000 substances chimiques différentes, dont 60


substances cancérigènes. Elle est dangereuse pour le fumeur et pour son entourage.

Le tabagisme passif, qui est le fait d'inhaler involontairement de la fumée dégagée par la
combustion de cigarettes ou cigares, ou rejetée par un ou plusieurs fumeurs, est également
un facteur de risque de cancer.

Le tabagisme est associé aux cancers broncho-pulmonaire, des voies aéro-digestives


supérieures, de la vessie, du pancréas, du sein et du col de l’utérus chez la femme.

2.1.2. Alcoolisme (8%)

L'alcoolisme est l'incapacité à maîtriser sa consommation d'alcool en raison d'une dépendance


à la fois physique et émotionnelle aux boissons alcoolisées.

L’alcool induit le cancer par divers mécanismes dont l’effet génotoxique de son principal
métabolite (l’acétaldéhyde). Il interagit aussi avec la consommation de tabac par une
association synergique.

Les cancers dont le lien avec la consommation d’alcool est avéré sont les cancers des voies
aérodigestives supérieures (VADS) , de l’œsophage, du foie, du sein chez la femme, et
le cancer colorectal.

Au Burkina Faso, une enquête a révélé que la prévalence de la consommation d’alcool est de
27,3% chez les de jeunes de 25- 64 ans avec une moyenne d’âge à la première consommation

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d’alcool de 14 ans selon l’enquête STEP-BF. Aucune donnée n’est disponible sur la notion de
dépendance.

2.1.3. Alimentation (5%)

L’alimentation peut constituer un facteur de risque de cancer par :

Sa composition : alimentation pauvre en fibres, fruits et légumes ; riche en graisse animale,


en matière carnée.

Ses contaminants : liés aux conditions de conservation (aflatoxine, salaison, fumage), de


préparation (hydrocarbure aromatiques polycycliques), de production (pesticides).

Les cancers les plus associés à l’alimentation sont les cancers de l’estomac, de l’œsophage,
du colon, du sein, du pancréas, de la cavité buccale.

2.1.4. Sédentarité (5%)

Dans le domaine de la santé, la sédentarité est caractérisée par une position assise la plus
grande partie de la journée. Ce mode de vie, caractéristique des civilisations modernes, est
nuisible à la santé physique (facteur aggravant de l'obésité, de la fatigue, etc.) et psychique
(dépression, trouble du comportement alimentaire, etc.).

La sédentarité est associée à un risque plus élevé de cancer du côlon. Elle favorise l’obésité
qui est, elle, associée au cancer de l’endomètre, de la vésicule, du sein et du côlon.

2.2. Environnementaux (9%)


2.2.1. Environnement général (physiques et chimiques)

Est représenté essentiellement par la pollution de l'air ou pollution atmosphérique qui est une
altération de la qualité de l'air par des polluants chimiques, biologiques ou physiques.
C’est le résultat de l’activité humaine (activité humaine, moteurs diesel, cyclomoteurs). Elle
varie selon les pays et les saisons. Les principaux polluants de l’air sont : les particules ou
poussières en suspension, les composés organiques volatiles (COV), les hydrocarbures
aromatiques polycycliques, le radon, les métaux lourds (plomb, nickel, mercure, cadmium), le
monoxyde de carbone, le dioxyde de soufre. La pollution atmosphérique est un facteur
cancérigène même si son impact sanitaire en termes de cancer est difficile à chiffrer.

Le rôle des radiations UV dans la cancérogénèse cutanée est essentiel : elle est responsable
de la plupart des mélanomes et de presque tous les carcinomes baso et spinocellulaires.

2.2.2. Environnement intérieur (physiques et chimiques)

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La pollution intérieure désigne classiquement la pollution présente dans les environnements


clos intérieurs non industriels tels que les habitations, les établissements recevant du
public, les lieux de garde et d’enseignement, les immeubles de bureaux, les établissements
de santé et médico-sociaux ou les moyens de transport.

Les polluants intérieurs sont les composés organiques volatiles (formaldéhyde), les
insecticides, les gaz issus de la combustion par le bois, le charbon de bois (dioxyde de
carbone, monoxyde de carbone). Les femmes courent un risque accru du fait de leur rôle dans
la préparation des aliments.

L’irradiation naturelle par le radon (gaz rare radioactif) et de ses descendants contaminent
l’environnement domestique et serait la 2ème cause de cancer pulmonaire, à égalité avec le
tabagisme passif.

2.2.3. Environnement professionnel (chimiques et physiques)

En milieu professionnel, certains facteurs de risque de cancers sont identifiés (expositions à


certaines substances, à certains rayonnements…). D’autres facteurs, notamment individuels,
peuvent influencer la survenue de cancers en milieu professionnel : facteurs liés au mode de
vie (consommation d’alcool, alimentation, tabagisme…) ou facteurs génétiques.

2.3. Biologiques (26%)

Les micro-organismes sont responsables de 26% des cancers en Afrique, 13% dans le monde
et 7% dans les pays développés.

2.3.1. Virus

Sont les principaux agents infectieux responsables de cancers. Ils procèdent par différents
mécanismes. Mécanisme direct : mutagénèse insertionnelle, protéines virales oncogènes ;
mécanismes indirects : par le biais d’une inflammation chronique (hépatite chronique,
immunodépression). On peut citer :

 Virus de l’hépatite B et virus de l’hépatite C : responsable du carcinome


hépatocellulaire ;
 Virus du papillome humain : responsable du cancer du col utérin ;
 Herpès virus humain type 8 : responsable du sarcome de Kaposi ;
 Virus d’Epstein Barr : responsable du lymphome de Burkitt ;
 Virus de l’immunodéficience humaine : différents cancers via les autres virus
oncogènes.

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2.3.2. Bactéries

Peu de bactéries sont impliquées dans la cancérogénèse. On peut citer l’Helicobacter pylori,
impliqué dans le cancer de l’estomac.

2.3.3. Parasites

Certains parasites sont reconnus pour favoriser le cancer chez les humains : Schistosoma
haematobium (bilharziose urinaire), responsable du carcinome épidermoïde de la vessie ;
Clonorshis sinensis et Opistorchis viverinii, responsable du cancer des voies biliaires
(cholangiocarcinomes).

2.3.4. Champignons

L’implication des agents fongiques dans la cancérogénèse est plus hypothétique. Le rôle de
Candida albican dans la genèse des cancers oraux est encore discuté.

2.4. Autres
2.4.1. Iatrogènes

Les traitements peuvent aussi être à l’origine de cancers :

 Chimiothérapie anticancéreuse : certains médicaments peuvent être à l’origine de


cancers secondaires (moutardes azotés : cyclophosphamide).
 Radiothérapie : sarcomes secondaires à une irradiation pelvienne ou mammaire.
 Traitements immunosuppresseurs

3. FACTEURS ENDOGENES
3.1. Génétiques

Deux types d’altérations génétiques sont à considérer :

Les altérations héréditaires : on parle de prédisposition génétique quand le risque de cancer


est augmenté par la présence d’une mutation sur un gène transmissible d’une génération à
une autre et hérité d’un parent. Les formes familiales de prédisposition concernent environ 5%
des cancers (exemple : mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2 qui confèrent un haut risque
de cancer du sein d’environ 70% au cours de la vie).

Les altérations acquises : elles le sont à la suite de l’exposition répétée aux facteurs de
risque de cancer.

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3.2. Immunitaires

La diminution ou la suppression des défenses immunitaires naturelles, qu’elles soient


congénitales ou acquises, favorise l’installation des cancers ou augmente la fréquence de
certains. L’exemple bien connu est celui de l’effondrement du système immunitaire par
l’infection par le VIH.

3.3. Hormonaux

Plusieurs cancers sont en relation souvent complexe avec l’état hormonal chez la femme
(cancers du sein et de l’endomètre sous influence oestrogénique) et chez l’homme (cancer de
la prostate sous imprégnation androgénique).

4. APPLICATIONS
4.1. Dans la prévention

La connaissance des facteurs de la cancérogénèse est essentielle pour orienter la prévention


primaire. La prévention primaire consiste à éviter l’apparition de cancer par la suppression des
facteurs qui peuvent l’induire.

Elle vise donc à réduire le contact entre l’homme et ces facteurs. Exemple : lutte contre le
tabagisme et l’alcoolisme, la vaccination contre certains agents infectieux, en adoptant des
comportements alimentaires et sexuels sains.

En améliorant la recherche de nouveaux facteurs cancérigènes et en évaluant le risque de


certains agents connus.

4.2. Dans le dépistage

Le dépistage consiste à réduire les conséquence d’un cancer par un diagnostic précoce,
notamment le dépistage, qui permet de reconnaitre la maladie à un stade débutant plus facile
à traiter et à guérir.

Il s’adresse aux individus et groupes de personnes à risque de certains cancers du fait de leur
exposition à des facteurs cancérigènes déjà connus. Elle a pour objectif de détecter un cancer
à un stade infraclinique ou préclinique par des tests de dépistage efficaces et non
contraignants pour les populations. Son efficacité a été démontrée pour certains cancers, en
termes de réduction de l’incidence.

Exemple : dépistage du cancer du col de l’utérus par le frottis cerco-vaginal ou l’inspection


visuelle à l’acide acétique et au lugol, le dépistage du cancer du sein par la mammographie.

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