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INTRODUCTION
I. La notion d’obligation
L’obligation vient du latin obligatio, d’obligare. Être obligé, c’est être
lié par une loi, un ordre, un accord, un service… Elle désigne un lien de
droit qui unit le débiteur à son créancier. Ainsi considérée, l’obligation
exprime deux idées : d’une part celle de la dette dont est tenu le débiteur
et, d’autre part, celle de créance dont bénéficie le créancier, et qui peut en
exiger l’exécution au débiteur.
Elle est définie par l’article 1er COCC un lien de droit en vertu duquel
le créancier a le droit d’exiger une prestation ou une abstention à son
débiteur1.
II. La classification de l’obligation
Il existe trois principales classifications de l’obligation. Il s’agit de la
classification de l’obligation selon sa force contraignante, selon sa source
et son objet.
a. La classification selon la force contraignante
Cette distinction concerne l’obligation civile et l’obligation naturelle.
L’obligation civile est celle assortie d’une sanction, c’est-à-dire une
obligation que le créancier peut contraindre son débiteur à exécuter en
exerçant une action en justice. L’obligation civile est ainsi susceptible
d’exécution forcée. A l’inverse l’obligation naturelle est celle qui est
insusceptible d’exécution forcée. Elle est sans sanction juridique. C’est un
devoir de conscience, une obligation morale.
1
1 COCC Art. 1er.
b. La classification selon la source de l’obligation
L’obligation peut être d’origine légale ou volontaire. Il y a donc une
dualité des sources de l’obligation.
- Les obligations volontaires : l’obligation peut naître d’une
volonté commune, celle du créancier et du débiteur. C’est ce qu’on
appelle l’obligation conventionnelle. L’obligation peut également
résulter de la volonté unilatérale du débiteur. Dans ce cas, on
parle de l’engagement unilatéral de volonté.
- Les obligations non volontaires : ces obligations prennent leur
source indépendamment de la volonté des parties. D’une part,
elles résultent de la loi, par exemple obligation alimentaire prévue
entre parents et enfants. D’autre part, elles peuvent naître aussi
du fait personnel, par exemple les délits et les quasi-contrats.
c. La classification selon l’objet de l’obligation
L’obligation a pour objet de donner, de faire ou de ne pas faire.
L’obligation peut également être de résultat ou de faire.
- L’obligation de donner, de faire ou de ne pas faire :
Selon l’article 4 COCC, l’obligation de donner a pour objet d’exiger de
son débiteur de transférer la propriété ou les droits qu’il a sur la chose
principale ou ses accessoires.
Le transfert de la chose doit intervenir au moment de la délivrance,
sauf disposition ou convention contraire.
S’agissant de l’obligation de faire, elle a pour objet une prestation
positive autre qu’un transfert de propriété. Quant à l’obligation de ne pas
faire a pour objet une abstention. Le débiteur doit s’abstenir de certains
actes qu’il pourrait accomplir.
- L’obligation de résultat ou de moyens :
Le débiteur d’une obligation de résultat s’est engagé à obtenir un résultat
2
déterminé qu’il est tenu d’atteindre. Par contre, l’obligation est de moyens
lorsque le débiteur s’est engagé «simplement à apporter tous les soins d’un
bon père de famille à l’exécution de son obligation » (art. 7 al.1 COCC).
Par ailleurs, l’obligation est une valeur patrimoniale parce qu’elle est
susceptible de faire l’objet d’une évaluation pécuniaire. Elle peut faire
l’objet de circulation, de protection et d’extinction
Par conséquent, il y a trois chapitres : la circulation de l’obligation
(chapitre I), l’extinction de l’obligation (chapitre II) et la protection de
l’obligation (chapitre III).
3
CHAPITRE I. LA CIRCULATION DE L’OBLIGATION
L’obligation peut être transmise. Il y a plusieurs techniques de
transmission qui sont : la cession d’obligation, la subrogation, la
délégation et la novation. Les deux premiers techniques entrainent une
circulation de l’obligation sans modification (Section I) alors que pour les
deux dernières techniques, la circulation de l’obligation entraine sa
mutation (Section II)
4
auprès d’une tierce personne appelée cessionnaire. Ce dernier peut faire
une bonne affaire en acquérant la créance à un prix inférieur à son
montant. Toutefois, il peut s’agir d’une créance douteuse que certaines
personnes rachètent à bas prix qu’elles exécutent ensuite très
énergétiquement.
1. Les conditions de la cession de créance
La cession de créance est soumise à des conditions listées par l’article
241 COCC. En effet, la cession de créance est une convention, en tant que
telle elle est soumise aux conditions générales de validité des contrats 2. En
outre, la cession doit être écrite mais elle ne nécessite pas le consentement
du débiteur. Cependant, elle doit être signifiée au débiteur pour qu’elle lui
soit opposable. En plus, la cession ne doit pas être interdite ni par la loi,
ni par la convention ou la nature de l’obligation.
2. Les effets de la cession de créance
La cession de créance transmet le montant de la créance auquel il
faut ajouter les garanties et accessoires, c’est-à-dire les sûretés. Le
cessionnaire peut demander au débiteur-cédé le montant de la créance
même s’il a acquis la créance au-dessous de sa valeur, il devient créancier
pour la valeur normale initiale. Mais, la cession de créance n’entraîne pas
un changement de l’obligation : c’est la même obligation, celle qui existait
entre le cédant et le débiteur cédé qui est transférée au cessionnaire. Le
débiteur cédé peut opposer au cessionnaire les mêmes exceptions qu’il
aurait pu opposer au cédant3.
Le cédant ne garantit pas au cessionnaire la solvabilité du débiteur,
il lui garantit tout simplement l’existence de la créance et cette créance est
transmise en même temps que les accessoires qui l’accompagnent 4.
5 6
Code de travail, Art. L. 66.
subrogation, le débiteur est tenu de payer entre les mains de celui qui a
désintéressé son créancier.
1. Les modalités de la subrogation
La subrogation peut avoir origine la loi (subrogation légale) ou volontaire
(subrogation conventionnelle prévue par les parties).
a. La subrogation conventionnelle
La subrogation conventionnelle peut être consentie par le créancier ou par
le débiteur.
- La subrogation consentie par le créancier6 : le créancier qui reçoit
son paiement d’un tiers peut le subroger dans ses droits. Cette
subrogation obéit à des conditions. Elle doit être expresse : aucune
formalité particulière n’est exigée, mais elle est souvent constatée
dans un document remis au tiers appelé, « quittance subrogatoire ».
en outre, cette subrogation doit intervenir en même temps que
le paiement.
- La subrogation consentie par le débiteur : le débiteur qui
emprunte une somme d’argent ou une autre chose fongible pour
payer sa dette peut subroger le prêteur dans les droits du créancier,
même sans le consentement de celui-ci. Ce type de subrogation obéit
à des règles particulières. D’abord, le consentement du créancier
n’est pas exigé. Elle peut même être faite à son insu puisque la loi
ne prévoit pas l’information du créancier. Cependant, le créancier
peut s’opposer au paiement par subrogation d’une créance non
échue dont le terme a été stipulé en sa faveur7. Ensuite, la loi exige
trois autres conditions. Primo, le prêt et la quittance de
8 Selon l’article 24 COCC, l’acte acquiert date certaine du jour où il a été enregistré, du jour du 8
décès d’une des parties ou du jour où l’acte a été enregistré dans un acte dressé par un officier
public.
9 Ces règles sont prévues par les articles 535 et suivants du COCC.
10 COCC Ar. 252.
convention contraire11. Deuxièmement, dans le cas de subrogation d’une
dette solidaire, le débiteur qui a payé et qui se retourne contre les
codébiteurs ne pourra poursuivre ceux-ci que chacun pour sa part, on dit
qu’il diviser son action après déduction de sa part12.
Section II. La circulation de l’obligation consécutive à sa
modification
Ici, la transmission de l’obligation s’opère avec mutation, c’est-à-dire
après changement. C’est une nouvelle obligation qui se crée, totalement
différente de l’ancienne, ce qui entraîne certaines conséquences. Cette
situation vise deux cas. Il s’agit de la délégation et de la novation.
Paragraphe 1. La délégation
C’est une opération par laquelle le délégant donne l’ordre au délégué
de s’engager désormais envers une troisième personne qu’on appelle le
délégataire. La délégation met en relation trois personnes qui sont toutes
parties à la convention. Il s’agit du délégué, le déléguant et le délégataire.
Ainsi, le délégué, en payant le délégataire, éteint les deux dettes : la sienne
envers le déléguant et celle du déléguant envers le délégataire. C’est
pourquoi, la délégation est considérée comme un moyen d’extinction
simplifié des obligations.
Par ailleurs, il y a deux types de délégations qui engendrent des effets
dans les rapports entre les personnes impliquées.
1. Les différents types de délégation
La délégation est parfaite ou imparfaite.
- Lorsqu’il s’agit d’une délégation parfaite, le délégant est
totalement libéré vis-à-vis du délégataire. On dit que la délégation parfaite
opère novation par le changement du débiteur. Cette délégation ne joue
10
- Rapport délégant et délégataire : la dette du délégant est
également éteinte.
c. Les effets communs aux deux délégations
Ces effets communs existent d’une part entre le délégué et délégataire
et d’autre part en cas de conflit entre délégataire et créancier du
délégant.
- Rapport délégué et délégataire : le délégataire, dans son action
contre le délégué, bénéficie de l’inopposabilité des exceptions, c’est-
à-dire le délégué ne peut opposer au délégataire les exceptions
antérieurement acquises contre le délégant.
- Rapport délégataire et créancier du délégant : si la créance du
délégant sur le délégué s’éteint par le fait de l’exécution de la
délégation, ni le délégant, ni ses créanciers ne peuvent exiger
paiement, avant la défaillance du délégué envers le délégataire.
Paragraphe 2. La novation
C’est une convention par laquelle les parties décident de remplacer
l’obligation ancienne par une obligation nouvelle. Les parties décident donc
de mettre fin à une obligation ancienne pour la remplacer par une nouvelle
obligation. Il y a un lien de cause à effet entre la création de la nouvelle
obligation et l’extinction de la précédente. La novation est soumise à des
conditions et produit des effets.
A. Les conditions de la novation
La novation est d’abord soumise aux conditions générales de validité
des conventions, à savoir les dispositions des articles 47 et suivants COCC.
Ensuite, la novation est soumise à des conditions spécifiques :
La validité des deux obligations : la novation suppose la validité des
deux obligations ; il s’agit de l’obligation initiale et de la nouvelle obligation.
L’obligation initiale ou primitive doit être valable car on ne pas opérer la
11
novation d’une dette nulle. L’obligation nouvelle doit également être valable
car une obligation nulle n’a aucun effet extinctif.
L’existence d’un élément nouveau : cet élément porte sur plusieurs
éléments de l’obligation13. Il peut s’agir de l’objet ou de la cause ou des
modalités de l’obligation. Le changement de l’objet de l’obligation peut
consister à l’obligation de payer une somme d’argent au lieu de livrer une
marchandise. Le changement de la cause de l’obligation peut être relatif à
une dette de loyers remplacée par une dette ayant pour cause un prêt. Il
peut s’agir aussi des modalités de l’obligation à savoir le terme 14 ou la
condition15.
L’intention de nover : la novation ne se présume pas, elle doit être
expresse. C’est cette volonté de nover que l’on appelle animus novandi.
B. Les conditions de la novation
La novation produit deux effets simultanés : un effet extinctif et un
effet constitutif.
- L’effet extinctif consiste à l’extinction de l’obligation initiale. Cette
extinction de l’obligation primitive est la condition de la naissance de
la nouvelle obligation.
- L’effet constitutif consiste à la création de la nouvelle obligation.
Cette création est la condition de la disparition de l’ancienne
obligation. la création de l’obligation nouvelle. La seconde obligation
est tout à fait nouvelle, par conséquent les parties ne peuvent plus
invoquer les exceptions qui étaient liées à l’ancienne obligation. Il y
a une mutation de l’obligation par la novation.
En conclusion, la valeur patrimoniale constituée par l’obligation peut
circuler d’un patrimoine à un autre. Les techniques utilisées par le droit
13
1. Les parties au paiement
Les parties au paiement sont le solvens et l’accipiens.
Le solvens est celui qui paie. C’est le débiteur ou ses ayants droit. Il
peut s’agir aussi du mandataire, du codébiteur ou une caution.
Le paiement peut également être fait par un tiers. Mais, le créancier a le
droit de refuser le paiement d’un tiers s’il s’agit d’une obligation conclue
intuitu personae16.
Par ailleurs, celui qui paie doit être capable. Cependant, le débiteur qui
paye la prestation due ne peut contester le paiement en raison de son
incapacité17.
L’accipiens c’est celui qui reçoit le paiement. Ce peut être le créancier
lui-même, son représentant légal ou un mandataire. Le bénéficiaire du
paiement doit être capable. Cependant, si le solvens prouve que le
paiement a tourné au profit du créancier ; son incapacité ne rend pas le
paiement nul.
Le paiement fait au créancier apparent est valable s’il est fait de bonne foi.
Si le créancier refuse de recevoir le paiement, on applique la procédure
des offres réelles. C’est une procédure qui consiste à adresser au
créancier une notification officielle de payer, et s’il persiste dans son refus,
solliciter du juge une autorisation de consigner l’objet du paiement et le
débiteur est libéré.
2. La date du paiement
En principe, le paiement se fait dès la naissance de l’obligation,
immédiatement, à moins que son exigibilité ne soit différée parce que
l’obligation est assortie de modalités, c’est-à-dire le terme et la condition.
3. Le lieu du paiement
18V°. D. MAZEAUD, « Nature et régime du pouvoir du juge en matière de délai de grâce », R.D.C. 15
2007/2, p. 263 et s.
- Enfin les aliments alloués en justice doivent être versés, sauf décision
contraire du juge, au domicile ou à la résidence de celui qui doit les
recevoir.
4. L’objet du paiement
17
il n’est plus possible de convertir les billets de banque par de l’or.
En conclusion, le droit monétaire fait l’objet d’un contrôle rigoureux
parce que la monnaie fait partie des aspects de la souveraineté d’un Etat.
C. Le paiement pur et simple avec la satisfaction indirecte du
créancier
Ce sont des hypothèses dans lesquelles le créancier ne reçoit pas
exactement ce qui lui est dû et pourtant le débiteur est libéré. On
comprend alors pourquoi il n’est que partiellement satisfait. Cela renvoie à
deux réalités : il y a d’une part la dation en paiement (1), il y a d’autre part
la compensation (2).
1. La dation en paiement
C’est une convention par laquelle le créancier accepte de recevoir à
titre de paiement une prestation de remplacement en nature 19. Elle
constitue une exception à la règle de l’identité du paiement20.
La dation en paiement est donc soumise à des conditions suivantes :
- La nécessité du consentement du créancier. La loi ne précise pas la
forme du consentement ; celui-ci peut donc être express ou tacite.
- Le débiteur doit être propriétaire de la chose qu’il remet parce qu’il
ne peut pas transférer plus de droit que lui-même n’a.
Quant aux effets de la dation en paiement, ils sont prévus par l’article
213 COCC. D’abord, la dation en paiement emporte transfert de propriété
dans les conditions du droit commun. Ici on applique la théorie du risque
à savoir les dispositions de l’article 109 COCC. Ensuite, l’exécution de la
convention entraine l’extinction de l’obligation primitive. Cependant, à
défaut d’exécution, le créancier a le choix de demander, soit l’exécution de
l’obligation primitive, soit celle de la prestation de remplacement.
19
21 COCC, Art. 216.
elles peuvent aménager librement les conditions de mise en œuvre de la
compensation sous réserve de l’ordre public et des bonnes mœurs.
II. Le payement forcé
Si le débiteur n’exécute pas volontairement son obligation, le créancier
peut avoir recours aux tribunaux ou la force publique pour contrainte son
débiteur à s’exécuter. Cette exécution forcée est soumise à des conditions
(A). Elle peut être en nature ou par équivalent (B). Elle peut aussi être
assortie d’astreinte (C).
A. Les conditions du paiement forcé
L’exécution forcée de l’obligation est soumise à certaines conditions liées à
la créance, au titre exécutoire et à la mise en demeure.
1. La créance
La créance susceptible d’exécution forcée doit présenter certains
caractères :
- Elle doit être certaine, c’est-à-dire non contesté dans son montant et
dans son principe ;
- Elle doit être liquide, c’est-à-dire le montant de la créance doit être
déterminé ou déterminable ;
- Elle doit exigible, c’est-à-dire que la dette doit arriver à terme.
2. Le titre exécutoire
Le créancier doit disposer d’un titre exécutoire. Ici l’article 33 de l’Acte
uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement est d’une
grande utilité puisqu’il donne une liste de titres exécutoires. Il
s’agit notamment:
- Les décisions juridictionnelles revêtues de la formule exécutoire et
celles qui sont exécutoire sur minute ;
- Les actes et les décisions juridictionnelles étrangers, ainsi que les
sentences arbitrales déclarées exécutoires par une décision
20
juridictionnelle, non susceptibles de recours suspensif d’exécution,
de l’état dans lequel ce titre est invoqué ;
- Les procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties ;
- Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ;
3. La mise en demeure
C’est un acte par lequel un créancier demande à son débiteur d’exécuter
son obligation. Elle est une condition d’exigibilité de la dette. Cependant,
la mise en demeure n’est pas obligatoire. Elle peut être écartée par la
convention des parties, par la loi ou les usages.
- Les conditions de la mise en demeure : la forme de la mise en
demeure relève du principe du consensualisme. Elle peut être verbale
(il y a cependant un inconvénient lié aux difficultés probatoire), par
support électronique (article 28 de la loi de 2008 sur les transactions
électroniques) ou par support papier (acte sous seing privé ou acte
authentique). Il y a cependant des limites prévues par le législateur
dans certains cas notamment les articles 133 AUDCG et 25
AUCTMR indiquent que la mise doit être écrite. Quant au fond, la
mise en demeure doit indiquer le montant exact de la créance,
l’identité des parties et elle doit être assortie d’un délai
supplémentaire d’exécution.
- Avantage de la mise en demeure : Elle permet de rendre la dette
exigible (Art. 172 COCC) : une créance exigible est celle qui est
arrivée à échéance. En outre, elle fait courir les intérêts
moratoires (Art. 291 AUDCG) ;
B. Les modalités de l’exécution forcée
L’exécution forcée peut être, soit en nature, soit par équivalent
1. L’exécution forcée par nature
Elle constitue la sanction principale de l‘inexécution contractuelle. Le
21
créancier a le droit d’exiger du débiteur l’exécution forcée de sa prestation.
Ainsi, il résulte de la décision de la Cour de Cassation française que « la
partie envers laquelle un engagement contractuel n’a point été exécuté a la
faculté de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsque celle-ci est
possible »22. La sécurité contractuelle et le respect de la parole donnée
commande une condamnation in rem. Cette possibilité de condamnation
du débiteur à exécuter en nature est même prévue pour la violation des
obligations de faire ou de ne pas faire. Ainsi, selon l’article 6, al. 2.
C.O.C.C, « […] Le juge peut ordonner la destruction de ce qui aurait été fait
contrairement à l’obligation ». L’exécution forcée en nature peut se traduire
par la saisie des biens du débiteur, la vente de ses biens sur autorisation
judiciaire, et sur le produit de cette vente on va désintéresser le créancier.
2. L’exécution forcée par équivalent
Elle donne lieu à des dommages et intérêts. L’exécution forcée par
équivalent est de mise lorsque l’exécution forcée par nature est impossible.
Or, il existe des cas dans lesquels l’exécution en nature est impossible.
Cette impossibilité peut être matérielle, juridique ou morale. L’impossibilité
est matérielle, lorsque le corps certain qui devait être livré « vient à périr ou
se perd sans la faute du débiteur »23, ou lorsque le retard ou lorsque le
retard est tel que l’exécution ne présente plus aucun intérêt pour le
créancier. L’impossibilité est juridique « si celui qui en est le débiteur s’en
trouve devenir créancier » ou lorsqu’un tiers de bonne foi possède un droit
acquis qui paralyse l’exécution du cas24. S’agissant de l’impossibilité
morale, elle résulte du non-respect de la liberté individuelle. Il doit s’agir
donc d’une obligation à caractère personnel que seul le débiteur pouvait
23
consentie. En cas de solidarité des débiteurs, la remise de dette profite à
tous les codébiteurs.
B. La présomption de paiement
Cette situation est prévue par l’article 211 COCC. Elle intervient
lorsque le créancier remet volontairement son titre de créance au débiteur.
Dans une telle hypothèse, la loi en déduit que c’est parce que le débiteur a
payé, car on ne comprend pas pourquoi le créancier remettrait son titre de
preuve sans avoir été payé.
Mais, il faut qu’il s’agisse d’une remise volontaire, ce qui exclut les
hypothèses de perte ou de dépossession involontaire.
Mais, il ne s’agit que d’une présomption simple. Par voie de
conséquence, le créancier peut rapporter la preuve contraire, c’est-à-dire
que malgré la remise du titre, le débiteur n’a pas payé. Cette preuve peut
être rapportée par tous moyens. À défaut, le débiteur est libéré sans que le
créancier obtienne satisfaction. Il en va aussi de même lorsqu’il y a
prescription.
Paragraphe 2. La prescription
Selon l’article 217 COCC, la prescription extinctive est un mode
d’extinction de l’obligation résultant de l’inaction du créancier pendant un
certain délai. Elle serait justifiée par la négligence du créancier à faire
respecter son droit ; une négligence qui profite au débiteur. En outre, elle
est considérée comme une présomption de paiement25. En effet, on estime
que si le créancier ne réclame le paiement, c’est qu’il a obtenu satisfaction.
La prescription extinctive ne doit pas être confondue avec la
prescription acquisitive qui est l’écoulement d’un temps au-delà duquel on
acquiert un droit. Quant à la prescription extinctive est subordonnée à
l’écoulement d’un certain. Elle peut faire l’objet de suspension ou
24
25 C’est une présomption simple qui peut combattue par la preuve contraire.
d’interruption. Mais, elle produit un effet extinctif.
1. Le délai de la prescription
Il y a un délai de droit commun, celui qui a son support dans l’article
222 COCC qui dispose que : « Sauf disposition contraire de la loi, le délai
de la prescription extinctive de droit commun est de 10 ans ».
Mais, il peut y avoir des prescriptions abrégées compte tenu de la
nature des obligations en cause. Ainsi par exemple, aux termes de l’article
224 COCC : « Les obligations à exécution périodique se prescrivent par 5
ans » : exemple des loyers ou des aréages.
Mais, la prescription peut aussi être d’une année, notamment pour
les émoluments, les honoraires ou les frais d’hôtel.
Sous réserve de ces délais de prescription abrégée, le point de départ
du délai c’est le lendemain du jour où l’obligation est devenue exigible, et
le délai se compte par jour et non par heure.
2. La suspension de la prescription
La prescription est suspendue, lorsque le temps qui a couru avant la
suspension va être comptabilisé lorsque le délai va recommencer à courir.
Les causes de suspension sont l’état d’incapacité légale du créancier
ou encore la force majeure empêchant de poursuivre l’exécution forcée de
l’obligation.
3. L’interruption de la prescription
La prescription est interrompue lorsque le temps qui a couru avant
l’interruption est totalement effacé. C’est un nouveau délai, qui va
recommencer à courir.
Les causes d’interruption sont notamment l’aveu du débiteur ou la citation
en justice.
Il faut enfin préciser qu’il y a des délais de prescription qui ne peuvent
être ni suspendus ni interrompus. On les appelle des délais préfix.
25
Le débiteur ne peut renoncer à l’avance à la prescription extinctive.
Il peut l’invoquer à toute étape de la procédure, mais le juge ne peut pas
invoquer d’office la prescription.
4. Les effets de la prescription
- Effet extinctif : elle éteint l’obligation mais elle ne s’opère pas de plein
droit, le débiteur doit l’invoquer. Celui-ci ne peut renoncer par avance
cet effet extinctif de la prescription. La renonciation est possible
lorsque le temps fixé est expiré26.
- Effet libératoire pour le débiteur : le débiteur n’a pas à rapporter la
preuve du paiement, le créancier peut déférer le serment au débiteur.
Si celui-ci refuse de prêter serment, il perd le bénéfice de la
prescription extinctive.
- Cependant, si le débiteur s’exécute malgré la prescription, il ne
pourra pas en réclamer restitution.
26 26
COCC, Art. 220.
CHAPITRE III. LA PROTECTION DE L’OBLIGATION
27
B. Obligations alternatives
L’obligation est alternative lorsqu’elle a pour objet plusieurs
prestations entre lesquelles le débiteur peut choisir pour se libérer. Cela
signifie que l’obligation a plusieurs objets, mais un seul peut être exigé. En
principe, c’est le débiteur qui a le choix sauf clause contraire. Cependant,
le débiteur ne peut aussi contraindre le créancier à recevoir de l’une et
partie de l’autre prestation.
En cas de perte, il convient de distinguer plusieurs situations :
Si le choix appartenait au débiteur :
il doit la chose qui reste
si les deux choses ont péri par faute du débiteur, il doit le prix
de celle qui a péri la dernière.
Si le choix appartenait au créancier :
Sans la faute du débiteur, il doit la chose qui reste par la
faute de débiteur, le créancier a le choix entre la chose qui
reste et le prix de la chose périe.
Si les deux ont péri par la faute du débiteur : le créancier peut exiger
le prix de l’une ou de l’autre.
C. L’obligation facultative
L’obligation est dite facultative lorsqu’elle a pour objet une seule
prestation, en laissant au débiteur la possibilité de se libérer par une
prestation de remplacement. Par exemple, un menuisier dit « je vous vends
cette table, mais à défaut, je pourrai me libérer en vous vendant cet
armoire ». Ici une seule est due, c’est l’obligation principale (la vente de la
vente) et le choix n’appartient qu’au débiteur.
Les obligations alternatives engendrent des effets suivants :
Si la chose principale disparaît par cas de force majeure (sans faute) ;
l’obligation est éteinte et le débiteur n’a rien à payer. Ceci constitue la
28
différence principale entre obligation facultative et obligation alternative où
la disparition de l’une des prestations n’entraine pas la libération du
débiteur.
Paragraphe 2. Les obligations à sujets multiples
Dans cette hypothèse c’est qu’il y a soit plusieurs débiteurs ou soit
plusieurs créanciers. Le principe aurait dû être qu’on parle d’obligations
conjointes (A), mais la garantie se trouve dans l’obligation solidaire (B).
A. L’obligation conjointe
Les obligations conjointes sont des obligations qui ont pour sujets
plusieurs débiteurs ou plusieurs créanciers, chacun d’eux ne pouvant
réclamer ou n’étant tenu qu’une fraction de la dette.
Avec l’obligation conjointe chaque sujet subit une fraction de
l’obligation, ou a droit à une part de cette obligation.
L’obligation conjointe a des effets suivants :
- La demande est limitée au montant de la part de chaque créancier
ou de chaque débiteur ;
- La mise en demeure d’un débiteur est sans effets à l’égard des
autres ;
- L’interruption de la prescription ne profite qu’au créancier qui en est
l’auteur et l’égard du seul débiteur qui en est l’objet
B. L’obligation solidaire
L’obligation solidaire est une obligation qui ne se divise pas entre pas
entre les différents sujets ; ceux-ci sont liés par un lien de solidarité : active
ou passive.
1. La solidarité active
La solidarité est active lorsque l’un quelconque des créanciers d’un
même débiteur peut exiger à ce dernier le paiement de la totalité de la dette
sans avoir reçu mandat des autres (Art. 235 al. 1 COCC).
29
En fait, la solidarité active met en scène plusieurs créanciers contre
un seul débiteur. Chaque créancier a le droit d’exiger le paiement total de
la créance. Cette solidarité entraine des conséquences suivantes :
- D’abord, le débiteur qui paie est libéré à l’égard de tous les autres
créanciers (Art. 235 al. 2 COCC).
- De plus, le créancier qui a reçu paiement doit rembourser les autres
créanciers pour leur part et portion (Art. 235 al. 3 COCC).
- Les actes accomplis par un créancier solidaire profitent aux autres,
mais ne peuvent leur nuire. Par exemple, la mise en demeure ou
l’interruption de la prescription profitent aux autres.
Cette forme de solidarité est très rare car elle présente peu d’intérêt pour
les créanciers.
2. La solidarité passive
Il y a solidarité passive lorsque le créancier peut exiger de l’un
quelconque de ses débiteurs, le paiement de la totalité de la créance. Cette
forme de solidarité est plus fréquente car elle constitue pour le créancier
une véritable garantie contre l’insolvabilité de l’un des débiteurs.
La solidarité passive engendre les effets suivants :
a. Effets dans les rapports entre le créancier poursuivant et le
débiteur poursuivi :
- Le créancier peut s’adresse à l’un quelconque des débiteurs (la plus
solvable) pour lui payer l’intégralité de la dette ;
- Le débiteur poursuivi ne peut obliger le créancier à poursuivre
chacun des codébiteurs pour partie de sa dette ;
- Cependant, le débiteur poursuivi peut opposer au créancier
poursuivant toutes les exceptions qui touchent à l’objet ou à la cause
de l’obligation, ainsi que celles qui proviennent de leurs rapports
personnels ;
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- Cette solidarité produit les mêmes effets entre les hérités de chaque
débiteur à l’égard du créancier ;
- Si la dette est payée intégralement tous les débiteurs sont libérés vis-
à-vis du créancier ;
- Si la dette est payée partiellement, les autres débiteurs sont libérés
à concurrence de qui a été payé ;
- La mise en demeure d’un des codébiteurs et les actes conservatoires
accomplis à son égard sont opposables à tous débiteurs solidaires ;
b. Les rapports entre codébiteurs solidaires
- Le débiteur poursuivi peut agir en remboursement contre ses
codébiteurs pour leur part et portion. Si l’un des codébiteurs est
insolvable, la perte se répartit entre tous (Art. 237 al. 2 COCC);
- L’appel interjeté par l’un d’entre eux du jugement pris contre tous
profite à tous les codébiteurs solidaires.
En définitive, la solidarité passive constitue effectivement une
garantie. C’est l’hypothèse où il y a un créancier et plusieurs débiteurs qui
doivent la même obligation. Dans ce cas, le créancier peut poursuivre
n’importe lequel des débiteurs pour la totalité. Et, il va choisir le débiteur
qui lui paraît le plus solvable.
Et, si l’un des débiteurs est insolvable, cette insolvabilité ne sera pas
supportée par le créancier, mais par les autres codébiteurs.
Mais, la solidarité ne se présume pas, elle peut être conventionnelle,
elle peut aussi être d’origine légale.
Le débiteur qui a payé la totalité a une action récursoire contre les
codébiteurs. Mais, il devra diviser ses poursuites et réclamer à chaque
codébiteur une fraction de la dette. En d’autres termes, le débiteur qui paie
ne bénéficie pas de la solidarité.
Par ailleurs, il faut distinguer l’obligation solidaire de l’obligation in
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solidum. Cette dernière ne renferme pas d’effets secondaires. Par exemple,
dans l’hypothèse d’un dommage causé par plusieurs auteurs, ces co-
auteurs sont tenus in solidum en ce sens que la victime peut poursuivre
n’importe lequel d’entre eux pour la totalité de l’obligation due.
C. Les obligations indivisibles
L’obligation est indivisible lorsque la prestation n’est pas susceptible de
division. L’indivisibilité de l’obligation permet à chaque créancier d’exiger,
soit l’intégralité de la dette du débiteur, soit le paiement intégral à chaque
débiteur.
L’indivisibilité de l’obligation peut naturelle lorsque l’obligation porte sur
un objet qui ne peut être fractionné. Elle peut être aussi conventionnelle
lorsque les parties ont volontairement convenu de façon expresse qu’elle
était indivisible ; elles s’engagent « solidairement et indivisiblement ».
Par rapport aux effets, l’article 239 al. 2 énonce, que l’indivisibilité produit
les mêmes effets que la solidarité.
Section II. La protection des créanciers chirographaires
Les créanciers chirographaires, sont des créanciers qui n’ont aucune
garantie de leur débiteur, sauf son patrimoine, gage général. Donc, ces
créanciers, pour qu’ils soient payés, il faudrait que le patrimoine de leur
débiteur soit consistant à l’échéance. Or, ce patrimoine peut fluctuer entre
temps, des biens peuvent y sortir d’autres y entrer.
Ainsi, ces créanciers bénéficient d’un droit de gage général
(Paragraphe I) et des actions spécifiques (Paragraphe II).
Paragraphe I. Le droit de gage général
L’expression « droit de gage général » signifie que le droit du créancier
est une garantie ; il a un caractère personnel et général.
A. Le droit du créancier : une garantie
Cela signifie que le créancier a le droit de faire procéder à une saisie
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sur tous les biens meubles ou immeubles faisant partis du patrimoine du
débiteur.
Cette garantie qui se matérialise par la saisie a des conséquences
suivantes :
- La garantie porte sur des biens entrés dans le patrimoine
postérieurement à la naissance du droit du créancier ;
- Cette garantie ne donne pas au créancier le droit de suite, c‘est-à-
dire de poursuivre les biens sortis du patrimoine ;
- Tous les créanciers chirographaires d’un même débiteur ont les
mêmes droits ; l’antériorité ne donne aucune préférence.
B. Le caractère personnel du droit de gage
Ce droit est contre une personne (le débiteur) et non pas sur une chose.
Ce n’est pas un droit réel contrairement au contrat de gage. Il n’emporte
donc pas droit de préférence.
C. le caractère général du droit gage
Tous les biens du débiteur garantissent toutes les dettes. Les créanciers
souffrent ou profitent de la diminution ou de l’augmentation du patrimoine
du débiteur. Ils bénéficient cependant certaines actions de protection.
Paragraphe II. Les actions spécifiques de protection
Ce sont des actions qui permettent aux créanciers chirographaires
de se prémunir contre la négligence ou la fraude de leur débiteur.
C’est d’abord l’action oblique accordée au créancier chirographaire
et qui lui permet d’agir directement contre le débiteur de son débiteur
négligent, ce qui constitue une immixtion du créancier dans un rapport
contractuel qui lui est étranger.
Il y a ensuite l’action paulienne qui permet au créancier de faire
révoquer, de faire annuler les contrats frauduleux conclus par son
débiteur.
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L’action oblique et l’action paulienne permettent donc à des tiers,
créanciers chirographaires de s’impliquer, de s’immiscer dans un contrat
qui leur est étranger.
En matière d’action paulienne, on présume s’il s’agit d’un acte à titre
gratuit qu’il y a fraude parce que nul ne peut faire des libéralités tant que
lui-même n’est pas libéré (Nemo liberalis nisi liberatus).
Par contre, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, le créancier doit
prouver que le débiteur a voulu porter atteinte à ses intérêts.
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