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Casa de

Velázquez
L'Europe héritière de l'Espagne wisigothique
 | Jacques Fontaine,  Christine Pellistrandi

Prose et poésie
latines tardives
transmises aux
Carolingiens par
l’intermédiaire de
l’Espagne
Louis Holtz
p. 213-222

Texte intégral
1 Quel rôle a joué l’Espagne wisigothique dans la transmission
jusqu’à nous de l’héritage littéraire de la Rome antique  ? Il
n’est pas facile de répondre à cette question simple, en dépit
de l’œuvre d’Isidore de Séville qui, à elle seule, remplit la
fonction d’une médiation entre le monde antique et tardo-
antique et l’Europe médiévale1. L’étude de la tradition des
auteurs antiques et patristiques n’est pas encore à ce point
développée qu’il soit possible d’établir un bilan définitif de
ce que fut la contribution de chaque région héritière de
l’Empire Romain.
2 Pour la péninsule Ibérique, notre ami Manuel Díaz y Díaz a
procédé à un large tour d’horizon, il y a seize ans au cours de
la XXIIe Semaine d’études sur le haut Moyen Âge du centre
de Spolète, consacrée à la culture antique dans l’Occident
latin du VIIe au XIe siècle2. Je m’empresse de dire que ses
conclusions ne sont en aucune façon remises en cause, ni par
les recherches de ceux qui depuis 1974 ont travaillé dans le
même sens que lui (la plupart du temps sous sa direction), ni
par la présente communication, qui de toute façon lui doit
beaucoup. Dans la perspective de notre colloque qui prétend,
comme tout colloque du CNRS, dynamiser un peu plus un
secteur important, et qui a aussi pour objectif une
intensification de la recherche sur l’Espagne entre
chercheurs au nord et au sud des Pyrénées, j’essaierai de
mettre l’accent sur la méthode qui pourrait nous permettre
d’en savoir plus encore sur la dette que nous avons à l’égard
de l’Espagne du haut Moyen Âge en matière de transmission
de textes latins.
3 Car, parmi les régions qui ont fourni des manuscrits anciens
aux copistes carolingiens, nous savons mieux ce qu’a apporté
l’Irlande ou l’Italie du Sud, zones marginales par rapport au
royaume franc, où s’est produit le grand mouvement de
récupération des textes de l’Antiquité romaine qui fonde
aujourd’hui la connaissance que nous en avons. En fait
l’Espagne wisigothique elle aussi est, dans une certaine
mesure, marginale par rapport à l’axe principal du
cheminement des livres, qui va de Rome aux îles
Britanniques ou en Germanie à travers les pays
mérovingiens  ; ou plutôt, l’Espagne est située sur un axe
secondaire, d’Afrique en Gaule ou d’Afrique vers les zones
insulaires.
4 Je retiendrai donc les grandes circonstances qui, sur ce plan,
fondent l’originalité de l’Espagne du haut Moyen Âge  :
l’ancienneté de son passé romain et l’existence dans les
siècles antérieurs d’une riche littérature hispano-romaine,
l’unité politique et religieuse acquise au profit du royaume
wisigothique et de l’orthodoxie, le rôle que jouent dans ce
royaume l’Église et ses chefs, qui sont plusieurs à avoir laissé
un nom dans le monde des lettres, mais qu’Isidore surpasse
tous par un rayonnement allant dès son vivant bien au-delà
des frontières du royaume, la conquête arabe et ses
conséquences, le rôle enfin de la Septimanie longtemps
disputée aux Francs, mais qui a fini par être une terre de
rencontres culturelles avec eux.
5 Mais quand nous parlons de textes latins, nous devons, je
crois, tenir compte du fait qu’il s’est produit à la fin de
l’Antiquité, avec plus ou moins de douceur selon les régions,
une substitution d’une littérature à une autre littérature, je
veux dire de la littérature tardo-antique à la littérature
classique et impériale.
6 Rome avait été présente en Espagne de façon continue
depuis la seconde guerre Punique. Des colonies florissantes y
avaient été de longue date établies, avec ce que cela suppose
d’organisation de la vie sociale, notamment dans le domaine
urbain, dans celui de l’école et de la culture. L’histoire de la
littérature latine doit beaucoup à ces Romains d’Espagne
que furent sur trois générations les Sénèque de Cordoue, le
rhéteur, le philosophe précepteur de Néron, mais aussi de
son neveu le poète Lucain. Le même siècle a vu naître
Quintilien à Calagurris et Martial à Bilbilis en Tarraconaise,
à une époque où la Gaule n’avait encore donné aucun
écrivain de premier plan.
7 Bien sûr, l’audience de ces œuvres majeures a tellement
dépassé, dès leur conception, la terre d’Espagne, a tellement
marqué la vie intellectuelle à Rome même, au cœur de la
romanité, puis dans tout l’Empire, qu’il ne faut pas
s’attendre à voir transiter si peu que ce soit par l’Espagne la
chaîne de leur transmission  : ces œuvres avant d’être
hispaniques sont romaines. Mais force est de constater qu’au
VIe et au VIIe siècle le souvenir de ces grands écrivains du
passé hispano-romain n’avait pas complètement disparu de
l’Espagne, bien plus, que des manuscrits de leurs œuvres se
trouvaient encore dans la péninsule. Ainsi le Pannonien
Martin, marchant deux siècles plus tard sur les traces de son
saint patron Martin de Tours, possédait un ou plusieurs
manuscrits de Sénèque3. La correspondance apocryphe entre
Sénèque et saint Paul qu’il avait en main autorisait la
démarche de l’évêque de Braga, qui fit servir l’œuvre du
stoïcien à la conversion des Suèves. Son exemplaire du De
ira était plus complet que les nôtres4. Il lisait le De officiis et
les Lettres à Lucilius et, plus heureux que nous, le De
uirtutibus, qui lui fournit le canevas de sa Formula honestae
uitae, une œuvre morale qui a traversé les siècles en de
multiples exemplaires5. S’agissait-il d’une tradition
hispanique de Sénèque, sauvegardée jusque là par un effet
de patriotisme littéraire, semblable à celui qui a inspiré à
Vérone la conservation des œuvres de Catulle durant tout le
Moyen Âge, ou à celui dont bénéficie pendant des siècles en
Espagne même le poète Prudence  ? Ou bien Martin,
admirateur de Sidoine Apollinaire, correspondant de
Venance Fortunat, qui lui fait compliment de sa culture
philosophique6, a-t-il transporté jusque chez les Suèves sa
bibliothèque personnelle ?
8 Ce patriotisme littéraire explique sans doute indirectement
la présence probable des œuvres de Martial et de Quintilien
dans la bibliothèque d’Isidore de Séville, et sans doute aussi
à Tolède dans celle d’Eugène. Les Versus in bibliotheca, dont
on admet aujourd’hui la paternité isidorienne, s’inspirent
des distiques de Martial7  : tout comme les distiques
d’Eugène. S’inspirer d’un auteur implique lecture et même
rumination, contact direct et non recours à des citations de
seconde main.
9 Quant à Quintilien, Isidore a largement puisé dans
l’Institution oratoire, mais il est difficile de décider s’il l’a
fait directement, ou indirectement par des résumés, ou les
deux à la fois8. Le fait même que le Sévillan lui emprunte de
multiples passages sans prononcer son nom est lui-même
ambigu. S’il s’agissait de Jérôme, on dirait « son silence
équivaut à un aveu  ». Mais vu l’état de la documentation
dont disposait Isidore, il a bien pu puiser dans un résumé ou
dans des extraits anépigraphes de Quintilien  ; de la même
façon, j’ai essayé de montrer qu’il semble avoir recopié
littéralement des pages entières de Cassiodore à partir d’un
exemplaire des Institutions humaines sans nom d’auteur.
10 Et même le souvenir de Lucain ne s’était pas complètement
évanoui du temps d’Isidore qui, à travers quelque
commentaire aujourd’hui perdu, lui emprunte des données
pour son De astronomia. À l’égard de ces trois écrivains
hispano-romains, mais aussi à l’égard de Cicéron et de Pline,
la démarche d’Isidore s’inscrit dans la continuité d’une
longue fidélité  : celle des maîtres d’école de l’Espagne
romaine.
11 Jacques Fontaine, dans son attentive auscultation des
Étymologies d’Isidore, nous a, en tout cas, bien enseigné à
ne pas prendre à la lettre les noms d’auteur qui se trouvent
dans les Étymologies, pas plus qu’il ne faudrait prendre au
sérieux les listes de sources que Jérôme donne dans ses
préfaces  : c’est la plupart du temps à travers d’humbles
manuels scolaires, dont beaucoup ont disparu si quelques-
uns nous sont parvenus, qu’Isidore a composé son
encyclopédie, en faisant des citations de deuxième ou de
troisième main et sans connaître toujours l’origine première
des notes qu’il insérait. Il ne faut donc pas céder à la
tentation d’interroger les sources de nos auteurs
hispaniques, quand ces sources sont des œuvres d’écrivains
profanes de la haute Antiquité. Entre nos auteurs et les
écrivains du Ier siècle auxquels remonte en dernière analyse
telle ou telle formule, se sont intercalés maints écrans. Ce
qui est vrai pour ces textes de l’Antiquité devenus matière
scolaire ne se vérifie pas de la même façon s’il s’agit d’écrits
patristiques ou simplement d’écrits poétiques, hormis
Virgile dont il a été démontré9 qu’Isidore possédait et
exploitait le commentaire perdu de Donat, mais pas
forcément le poète lui-même, ce qui ne veut pas dire non
plus qu’il ne l’avait pas dans sa bibliothèque.
12 Entre Isidore et Eugène ou Julien, comme entre Séville et
Tolède, il y a une différence de nature. L’édition
internationale des Étymologies10 montre, volume après
volume, le très délicat agencement de sources dont résulte
parfois (mais pas toujours) telle notice isidorienne. Les
compilations de Julien sont d’une autre conception et
procèdent par juxtaposition, selon une méthode qui annonce
les compilations carolingiennes  : les longues citations
accompagnées de l’indication de leur provenance ne peuvent
sortir que d’un exemplaire de l’auteur auquel elles sont
empruntées, ainsi l’Antikeimenon.
13 Il ne faudrait donc pas exagérer l’importance de l’apport
antique et profane dans la culture sévillane et tolédane au
point d’oublier la part prépondérante des auteurs
patristiques dans la bibliothèque des grands personnages
que nous venons d’évoquer.
14 Cette disposition entre livres profanes et ouvrages
patristiques est éclatante quand on lit les Versus in
Bibliotheca d’Isidore. Elle est pareillement éclatante quand
on jette un regard sur les manuscrits hispaniques de cette
période qui sont parvenus jusqu’à nous, et c’est une sorte de
contre-épreuve.
15 L’échantillonnage de ces manuscrits reste, bien sûr, soumis
au hasard des circonstances. Lorsque survint en 711
l’invasion arabe, des réfugiés, surtout des clercs, passèrent
en Gaule ou en Italie et emportèrent avec eux des livres.
16 Dans l’Antiquité comme au Moyen Âge, les livres ont
toujours circulé. Il serait du reste faux de penser que les
manuscrits venus d’Espagne n’ont circulé qu’à partir de la
conquête arabe. La Septimanie a joué très tôt son rôle de
zone de contact entre le regnum Gothiae et le regnum
Francorum, et un centre comme Lyon semble avoir été
d’une façon permanente en relation avec l’Espagne, bien
avant l’invasion arabe. C’est ainsi que le manuscrit Berlin,
Deutsche Staatsbibliothek Phillipps 176111 contenant la Lex
Romana Wisigothorum, a été copié dans la seconde moitié
du VIe siècle, vraisemblablement à Lyon même, sur un
original wisigothique, et qu’un demi-siècle plus tard le
commentaire d’Origène sur le Lévitique12 semble avoir été
copié à Lyon encore, à partir d’un original hispanique. Nous
connaissons en tout cas l’intérêt d’Isidore pour l’œuvre
d’Origène et le jugement indulgent qu’il portait à son égard13.
Enfin dans la première moitié du VIIIe siècle, soit à Arles soit
à Lyon, ont été copiés les canons de l’Église d’Espagne qu’on
lit dans le manuscrit 12097 de la Bibliothèque Nationale14.
Ce n’est donc peut-être pas une coïncidence fortuite si au
temps de Leidrad et de son prisonnier Félix d’Urgell, puis au
temps d’Agobard, lui-même de culture hispanique, des
mains wisigothiques copient ou complètent des manuscrits
dans l’ancienne capitale des Gaules : les liens entre Lyon et
l’Espagne étaient anciens.
17 Que contiennent ces manuscrits dont l’écriture à elle seule
dénonce l’origine, qu’elle soit onciale, semi-onciale ou, pour
les plus récents, minuscule ?
18 Un pointage minutieux des Codices Latini Antiquores (CLA)
d’E. A. Lowe montre que nous avons conservé seize
manuscrits15 – l’un est réduit à un seul folio – dont on soit
sûr qu’ils ont été copiés en Espagne avant 711, auxquels
s’ajoutent neuf autres codices dont l’origine hispanique reste
hypothétique16. Sur ces seize manuscrits, les trois plus
anciens17 datent du VIe siècle, cinq n’ont du reste jamais
quitté l’Espagne18, et parmi ces cinq, quatre sont
palimpsestes et ont été réutilisés sur place au IXe siècle, à
une époque où le manque de parchemin, déjà sensible du
temps de Julien de Tolède19, amenait à effacer même des
Bibles ou la Lex Romana Wisigothorum. Les onze autres
manuscrits sont dispersés dans les bibliothèques d’Europe et
sur ce nombre six sont en France, dont les trois d’Autun20,
qui sans doute ont été transférés à Autun après avoir été
quelques années à Lyon.
***
19 Faisons le compte : trois manuscrits de l’Ancien Testament21,
deux du Nouveau22, deux manuscrits d’Augustin23,
Enarrationes in Psalmos, deux manuscrits de Jérôme24,
Lettres et Commentaire sur Matthieu, trois manuscrits
d’Isidore25 ou d’œuvres attribuées à Isidore, un manuscrit
d’Actes apocryphes26, deux manuscrits de droit27, un
manuscrit de médecine28, quelques textes liturgiques. Ni
livre de grammaire, ni d’auteur littéraire antique, ni même
livre de poète chrétien.
20 Il est clair que la littérature ecclésiastique a la meilleure part
et que les arts libéraux ne sont représentés que par des
textes techniques  : le De natura rerum d’Isidore, les deux
livres de droit, le recueil de médecine de Paris et de Berne
contenant la Synopsis d’Oribase, le Depodagra de Rufus et
des recettes médicales variées. Ce manuscrit, comme
d’autres, porte les traces de sa longue migration. À l’époque
carolingienne il se trouvait en Italie du Sud, au Moyen Âge à
Chartres29.
21 Cet important recueil de la fin du VIIe siècle n’est pas le seul
à attirer notre attention sur l’intérêt que l’Espagne du haut
Moyen Âge portait à la médecine, car trois autres
manuscrits30 traitant de cette discipline et antérieurs à l’an
800 nous renvoient à l’Espagne. Sans y avoir été copiés, ils
dépendent d’un original espagnol : ce sont un manuscrit de
Glasgow, un manuscrit des nouvelles acquisitions latines de
Paris et deux feuillets du fonds Baluze, récupérés peut être
sur un manuscrit lyonnais  : les deux premiers datent de la
fin du VIIIe siècle, celui du fonds Baluze est plus vieux d’un
siècle.
22 Aux seize manuscrits que j’ai énumérés tout à l’heure,
sûrement copiés en Espagne avant la conquête arabe, il faut
en ajouter onze autres dont la provenance est incertaine.
23 Quatre d’entre eux datant du VIe siècle posent le problème
du transit par l’Espagne de manuscrits copiés en Afrique, et
incidemment de l’influence qu’ont pu exercer les écritures
africaines sur les écritures espagnoles. Car, sauf dans le cas
des fragments des épîtres de Paul, de Munich et de
Göttweig31, il s’agit d’auteurs africains  : Cyprien, De bono
patientiae, un fragment de l’ouvrage d’Optat de Milev contre
les donatistes32  ; enfin il y a le manuscrit composite de la
Chambre des Reliques de l’Escorial33, dont les deux parties
sont unies entre elles depuis le début du VIIIe siècle au plus
tard, et qui contiennent l’une un fragment du prêtre
Eutrope, l’autre le De baptismo paruulorum d’Augustin.
C’est ce manuscrit composite qui fournit sans doute le plus
ancien exemple de minuscule wisigothique employée dans
un livre, avec l’adjonction, survenue au VIIIe siècle, d’une
formule de bénédiction du cierge pascal. Le livre, considéré
comme une relique parce qu’il a longtemps passé pour être
écrit de la main d’Augustin, se trouvait au VIIIe siècle dans
un centre continental sous influence anglo-saxonne, puis un
siècle plus tard a servi à Lorsch de modèle à un exemplaire
actuellement à Oxford  ; passé peut-être à Wissembourg, il
est devenu la propriété de Trithème, puis acquis par Philippe
II, a été donné à l’Escorial en 1566. En fait, des liens
privilégiés ont toujours existé entre Espagne et Afrique, et
sont illustrés par de multiples faits. Je prendrai deux
exemples  : c’est par l’Espagne, au temps d’Isidore qui en
possède un exemplaire, que le grammairien africain Pompée
commence son périple à travers l’Europe du haut Moyen
Âge, un périple qui le mènera jusqu’en Irlande  ; c’est sans
doute aussi par la voie directe du détroit de Gibraltar que le
texte du poète Dracontius se diffuse en Espagne, où Eugène
de Tolède, à la demande du roi, en procure une édition
corrigée. Mais il doit en être de même des œuvres de Cyprien
et d’Augustin et de celles de Tertullien, que l’Espagnol
Agobard fait recopier à Lyon au début du IXe siècle.
24 L’invasion arabe ne réduisit pas à néant l’activité
intellectuelle outre Pyrénées. En témoignent directement,
dispersés dans le reste de l’Europe, une quinzaine34 de
manuscrits conservés, copiés en Espagne ou en Septimanie
dans la deuxième partie ou dans les dernières années du
VIIIe siècle, dont trois manuscrits des Étymologies d’Isidore,
de la famille dite espagnole35.
25 Il est sûr que nous ne possédons qu’une partie infime des
manuscrits qui existaient dans le royaume wisigothique ou
qui ont été copiés en Espagne après 711, et que ces quelques
survivants rendent insuffisamment compte des textes
transmis par l’Espagne. Mais seule l’étude de la tradition des
œuvres une par une permettrait de voir avec précision
l’apport réel de l’Espagne à la transmission du patrimoine
littéraire de l’Antiquité.
26 J’ai moi-même pris conscience de l’importance que revêtait
pour le texte même la transmission à travers l’Espagne
wisigothique des manuels du grammairien antique Donat, et
de l’originalité de cette transmission, alors que nous ne
possédons à proprement parler aucun manuscrit ancien de
cette œuvre. Si j’évoque aujourd’hui cette recherche, déjà
publiée36, ce n’est pas pour me répéter, mais pour attirer
l’attention sur une méthode. Elle consiste essentiellement à
exploiter les ressources proprement hispaniques, et en
premier lieu les manuscrits, même tardifs, qui sont
l’aboutissement d’une tradition hispanique.
27 Tel est le cas, pour l’Ars Donati, du manuscrit 99-30 du
chapitre de Tolède. La date n’en est pas établie avec
certitude, mais sa première partie est beaucoup plus
ancienne que la seconde  ; j’ai proposé pour les premiers
folios une datation haute au IXe siècle, mais en général cette
première partie elle-même est assignée au Xe s. Ce qui, à mes
yeux, est beaucoup plus important et garderait sa valeur
même pour un manuscrit du XIIe siècle, c’est que dans le
détail cette version, même écourtée, de l’Ars, correspond au
texte qui est commenté à la fin du VIIe siècle à Tolède par
Julien ou par quelqu’un de son entourage, et dont le
commentaire dit de Julien nous a conservé le souvenir37. Je
crois voir à certains détails que cette version était sans doute
la même version que celle d’Isidore. La persistance en terre
hispanique de cette version dont l’écho se retrouve par
exemple à la fin du IXe siècle dans le Donat de Ripoll38,
contaminé il est vrai par des rédactions plus nordiques,
montre que des traditions intellectuelles héritées des temps
wisigothiques se sont longtemps maintenues, en dépit de
l’influence venue du Nord.
28 J’appliquerais volontiers la même méthode à quantité
d’autres textes, dont nous possédons des versions en
tradition indirecte et, juste retour des choses, je mettrais
volontiers, comme on dit, en coupe réglée les compilations
tolédanes, en particulier les ouvrages théologiques de Julien
de Tolède39 ou des autres écrivains hispaniques du VIIe
siècle, qui ne sont que des montages de textes et juxtaposent
de longs passages, nommément empruntés à Augustin,
Grégoire, Jérôme, Origène latin, etc. À partir de ces
fragments, il est sans doute possible de caractériser la
version proprement hispanique de ces textes patristiques, et
de rechercher dans les manuscrits des mêmes œuvres copiés
dans le reste de l’Europe durant tout le haut Moyen Âge ceux
qui présentent cette version, c’est-à-dire qui remontent à des
ancêtres hispaniques.
29 Quand j’applique cette méthode à la grammaire de Donat
qui, avec les Disticha Catonis, est un des seuls textes de
l’Antiquité profane à ne pas avoir été victime de la
substitution de littérature dont je parlais au début, j’aperçois
des descendants de la version tolédane en plein IXe siècle à
Fleury-sur-Loire, à Saint-Gall, au mont Cassin, ce qui du
reste ne m’étonne pas, car des manuscrits d’origine
wisigothique s’y rencontrent aussi ; puis je constate que cette
version subsiste dans des manuscrits plus tardifs, copiés en
France ou en Italie40, avant de se fondre dans une sorte de
vulgate faite du brassage de toutes les versions, brassage qui
résulte du travail intensif des maîtres carolingiens sur ce
texte pédagogique essentiel.
30 Mais pour caractériser une version hispanique, il devrait être
tenu compte aussi des manuscrits copiés en Espagne du IXe
au XIIe siècle, qui ont toute chance d’avoir eu pour modèles
des exemplaires plus anciens, hispaniques eux aussi.
L’attention devrait se porter de préférence sur ceux d’entre
eux qui sont en minuscule wisigothique et qui ont des
chances d’être les héritiers d’une lignée homogène. Car
quelle que soit l’influence des pays francs à partir du IXe
siècle, il est moins facile d’admettre qu’un manuscrit en
minuscule wisigothique ait comme ancêtre un manuscrit en
minuscule Caroline, que la situation inverse.
31 La combinaison de tous ces facteurs, tradition indirecte,
symptômes wisigothiques (je veux dire survivance de
certains abréviations typiques), manuscrits copiés en
Espagne, définit à proprement parler une tradition
hispanique de longue durée, prenant sa source à la fin de
l’Antiquité tardive, quand les écritures communément
employées dans les livres, onciale, semi-onciale et
minuscule, ne s’étaient pas encore localement différenciées
ou commençaient à peine à le faire. Mais d’autres traits,
visibles au premier coup d’œil parce qu’ils sont de nature
codicologique, peuvent également mettre sur la voie d’une
telle tradition.
32 Je prendrai encore un exemple dans le domaine de l’école de
grammaire. On sait que très tôt dans la zone hispanique les
poètes latins classiques, Virgile, Lucain, Térence, par un effet
de la substitution dont je parlais, ont été peu à peu
remplacés dans ce qui subsistait des institutions scolaires
par les poètes chrétiens Juvencus, Prudence, Sédulius,
Dracontius. Ceci peut être montré facilement à l’aide de
quelques textes pédagogiques du haut Moyen Âge41.
33 Ainsi l’opuscule De dubiis nominibus42 sur le genre incertain
des noms, composé à la fin du VIe siècle soit en Aquitaine
soit en Espagne, présente-t-il un nombre considérable de cas
où l’exemple virgilien traditionnel est renforcé d’un autre
exemple emprunté à Prudence ou à Juvencus, deux poètes
espagnols. Tel est encore le cas pour l’Ars de Julien de
Tolède43, qui multiplie elle aussi les citations poétiques de ce
genre, et qui dans le petit traité de métrique de Mallius
Théodorus, qu’elle remanie, double les exemples empruntés
à Horace par d’autres exemples empruntés à Prudence.
Insulaires et Anglo-saxons ne feront du reste que suivre en
ce domaine le modèle hispanique.
34 C’est à la lumière de ces faits qu’il faut interpréter le recueil
poétique à usage scolaire que représente le fameux codex
d’Azagra, le manuscrit 10029 de la Biblioteca Nacional de
Madrid, anciennement au chapitre cathédral de Tolède sous
la cote 30-22. Une excellente analyse en a été présentée en
1979 par Madame Vendrell Penãranda44. Cette étude
remarquable retrace l’origine des différents recueils qui
composent le manuscrit à partir d’éléments originaires, les
uns de Tolède un peu après Eugène, d’autres de Cordoue, où
la plus grande partie du manuscrit a été copié, jusqu’à son
arrivée à Oviedo quelques années plus tard. Là, le manuscrit
a été complété, et Madame Peñaranda croit pouvoir
l’identifier avec un livre porté au catalogue de la bibliothèque
capitulaire d’Oviedo et qui date des dernières années du IXe
siècle.
35 Le contenu en est remarquable : Dracontius avec la préface
d’Eugène, Corippus, Éloge de l’empereur Justin et
d’Anastase, exemplaire unique qui montre qu’il était resté à
Cordoue un fonds important originaire d’Afrique (ce que
confirme la présence, un peu plus loin, de dix vers de
Verecundus de Junca), des hymnes de Sédulius, des
distiques d’Eugène de Tolède, des poèmes de Martin de
Braga, ce qu’on appelle l’Appendix Eugeniana45, poèmes
écrits dans le cercle d’Eugène, des extraits des Disticha
Catonis, les quatre livres de Juvencus, l’épître à Chilpéric de
Venance Fortunat, une série de poèmes d’auteurs cordouans,
Cyprien, Vincent, des anonymes, le dossier de saint Euloge
par Alvare de Cordoue, quelques poèmes rythmiques, et
pour finir les vers de Damase sur saint Paul.
36 Cette remarquable anthologie fait songer à une autre
anthologie, celle que représente le fameux codex
Salmasianus46 copié à Lyon vers l’an 820, du temps
d’Agobard.
37 En dépit d’études remarquables, il reste bien des recherches
à faire sur le cheminement des textes transmis par
l’Espagne  ; il faut tous les prendre en compte, et non pas
seulement ceux qui n’ont été transmis que par l’Espagne, si
importants soient par exemple les poèmes de Corippus, ou le
De mortibus persecutorum de Lactance47, dont toutes les
œuvres, y compris sa correspondance perdue, devaient se
trouver dans la bibliothèque d’Ossius de Cordoue.
38 Dans l’Espagne du VIIe siècle, l’activité scolaire à Tolède,
héritière de Séville, et dans plusieurs autres centres, a été
assez forte et variée pour qu’il se crée un nouveau canon des
auteurs, reflet d’une délicate synthèse à l’intérieur de la
culture chrétienne. Certes, le phénomène est sans doute
resté limité à une petite élite. Mais il a exercé une influence
durable sur les Insulaires dès le VIIe siècle, puis un siècle
après sur les Carolingiens eux-mêmes, qui, d’un même élan,
ont recueilli de l’Espagne, avec passion, les deux éléments de
cette culture nouvelle, le goût pour la poésie, le goût pour
l’étude.

Notes
1. Jacques Fontaine, Isidore de Séville et la culture classique dans
l’Espagne wisigothique, Paris, Études Augustiniennes, 1983, XXI-1017-
1243 (réédition de la thèse de 1959 augmentée d’un troisième volume de
notes complémentaires).
2. Manuel Díaz y Díaz, La transmisión de los textos antiguos en la
peninsula Ibérica en los siglos VII-XI, Settimana XXII, 1, p. 133-178.
3. Cf. K. D. Nothdurft, «  Studien zum Einfluss Senecas auf die
Philosophie und Theologie des zwölften Jahrhunderts  », dans Studien
und Texte zur Geistesgeschichte des Mittelalters, VII, 1963 et c. r. de M.
Spanneut, «  Sénèque au Moyen Âge. Autour d’un livre  », dans
Recherches de théologie ancienne et médiévale, 31, 1964, 32-42.
4. Cf. M. Manitius, Lit., 1, p. 112.
5. Éd. Cl. W. Barlow, dans Martini opera, 1950, p. 236-250.
6. Cf. Venance Fortunat, Epist. 5, 1, 17, MGH, auct. ant., p. 101. Cf. M.
Manitius, Lit., 1, p. 110.
7. Éd. F. Arévalo dans Migne, PL 83, col. 1107-1114  ; A. Riese, «  Zur
lateinischen Anthologie, Nachträge und Beiträge  », dans Rheinisches
Museum, 65, 1910, p. 495-503 ; Charles H. Beeson, dans Isidorstudien,
München 1913, p. 495-503. - Cf. J. Madoz, «  Nuevas fuentes de los
« Versus Isidori », dans Estudios eclesiásticos, 21, 1947, p. 217-223. Sur
la signification de ces Versus, cf. J. Fontaine, Isidore de Séville, p. 735
sqq. Sur la dette d’Isidore envers Martial, ibid., p. 173. - Cf. également A.
Ortega, « Los Versus Isidori », dans Helmantica, 12, 1961, p. 261-299,
et G. Bernt, «  Das lateinische Epigramm im Uebergang von der
Spätantike zum frühen Mittelalter  », dans Münchener Beiträge, 2,
München 1968.
8. Cf. J. Fontaine, ibid., p. 324.
9. U. Schindel, Die lateinischen Figurenlehren des 5. bis 7.
Jahrhunderts und Donats Vergilkommentar, Göttingen, 1975, et L.
Holtz, « À l’école de Donat, de saint Augustin à Bède », dans Latomus,
36, 1977, p. 522-538.
10. Paris, les Belles Lettres 1. II, éd. P. K. Marshall, 1983  ; 1. X, éd. M.
Reydellet, 1984 ; 1. XII, éd. J. André, 1986 ; 1. XVII, éd. J. André, 1981.
11. Cf. E. A. Lowe, CLA 8, N° 1064.
12. Ms. Lyon, Bibl. Mun. 443 (ff ° 162-226 et 232-279) + Paris, Bibl. nat.,
n.a.l. 1591. Cf. E. A. Lowe, CLA 6, 774 b.
13. Cf. Versus in bibliotheca, II, PL 83, col. 1108 sq.
14. Ms. Paris, Bibl. nat. lat. 12907 (ff ° 225-232). Cf. E. A. Lowe, CLA 5,
620.
15. Mss. sûrement copiés dans la zone wisigothique (péninsule Ibérique
ou Septimanie) avant l’invasion arabe  : CLA 2, 263  ; 4, 468a  ; 515  ; 5,
587 ; 592 ; 626 ; 6, 727a ; 728 ; 729 ; 7, 918 ; 10, 1556 ; 11, 1628b ; 1631 ;
1632 ; 1636 ; 1637.
16. Mss. peut-être copiés en Espagne avant l’invasion arabe : CLA 1, 111
(Espagne ou France) ; 6, 806 (Afrique ou Espagne) ; 823 (Espagne, Italie
ou France)  ; 8, 1121 (Espagne, Italie ou France)  ; 11, 1628a (Afrique ou
Espagne)  ; 1629 (Afrique, Espagne ou Italie)  ; 1633 et 1634 (Espagne
probable) ; 1640 (Italie ou Espagne).
17. Mss. Paris B. N. lat. 9533 (Augustin, Enarrationes in Psalmos)  ;
Paris B. N. lat. 12161, écriture inférieure (Codex Euricianus) ; München
Clm 6436 + Universitätsbibliothek 4° 928 + Göttweig s.n. (Épîtres de
saint Paul, version antéhiéronymienne).
18. Deux de ces mss. sont représentés par les écritures inférieures du
cod. León, Arch. Cath. 15 (Bible  ; Lex romana Wisigothornm) et deux
autres par les écritures inférieures du cod. El Escorial R II 18
(Octateuque ; Isidore, De nat. rerum).
19. Cf. Iulianus Toletanus, excerpta ed. H. Hagen dans Anercdota
Helvetica (= G. L. ed. H. Keil, t. VIII), p. CCXXVI, 32.
20. Autun B.M. 27 (+ Paris B.N., n.a.l. 1629) correspond à CLA 6, 727a et
728 ; Autun B.M. 107 (+ Paris B. N. n.a.l. 1629) à CLA 6, 729.
21. S. Gallen (Stiftsb. 194, pal.) contenant les Libri Satomonis  ; León,
Arch. Cath. 15 (pal.) ; El Escorial R II 18 (pal.).
22. Deux exemplaires des épîtres dans la version antéhiéronymienne
(CLA 9, 1286 a et b).
23. Paris B. N. lat. 9533 (s. VI) et Autun B.M. 107 (+ Paris B. N. n.a.l.
1629) s. VI-VII.
24. Worcester, Cath. Add. 2 (s. VII) et Ghent B.M. 246 (s. VI-VII).
25. Autun B.M. 27 + Paris B. N. n.a.l. 1629 (s. VII ex.) ; Autun B.M. 27 (s.
VIII1) El Escorial R II 18 (pal.) s. VII ex.
26. Vercelli, B. Cap. CLVIII (s. VII), Actus Pétri.
27. Paris B.N. lat. 12161 (pal.), Codex Euricianus ; León, Arch. Cath. 15
(pal.), Lex Romana wisigothorum.
28. Paris B.N. lat. 10233 (+ Bern, Stadtb. F. 219.3) s. VII.
29. Cf. E. A. Lowe, CLA 5, 592.
30. Glasgow, Hunterian Lib. T. 4.13 (s. VIII-IX) CLA 2, 156 ; Paris B.N. n
a. I. 203 (s. VIII-IX) CLA 5, 676 ; Paris, B.N. Baluze 270 (s. VII-VIII) CIA
5, 519.
31. CLA 9, 1286 a et b.
32. El Escorial R II 18 (CLA 11 1634).
33. CLA 11, 1628 a, b et 1629.
34. CLA 2, 195 ; 3, 372 ; 373 ; 5, 640 ; 677 ; 6, 705 ; 7, 856 ; 11, 1630 ;
1635 ; 1638 ; Suppl. 1785 et aussi mais d’une façon plus hypothétique 2,
156 ; 5, 653 ; 678.
35. El Escorial &. 1.14 ; P.I.8 ; Madrid B.N. Vitr. 14-3.
36. L. Holtz, Donat et la tradition de l’enseignement grammatical,
Paris, 1981, p. 304 à 307, 384 à 386, 453 à 459.
37. Ibid., p. 260 à 263 ; 459 à 461.
38. Ibid., p. 397 à 399 ; 471 à 475.
39. La première partie des œuvres de Julien est éditée par J. Hillgarth,
CCSL, 115, 1976. L’édition de l’Antikeimenon est programmée dans la
seconde partie.
40. Cf. L. Holtz, op. cit., p. 453-475.
41. Cf. L. Holtz, «  La destinée scolaire des poètes chrétiens dans
l’Espagne wisigothique  », art. à paraître dans les Mélanges Jacques
Fontaine.
42. Éd. Fr. Glorie CCSL 133 A, 1968, p. 743-820.
43. Éd. Maria A. H. Maestre Yenes, Tolède, 1973.
44. M. Vendreu Peñaranda, «  Estudio del códice de Azagra, Bibl.
Nacional de Madrid, Ms. 10029 », dans Revista de Archivos, Bibliotecas
y Museos, 82 (1979), p. 655-705.
45. Éd. Nicoló Messina, Pseudo-Eugenio de Toledo, Spéculum per un
nobile visigoto, Universidad de Santiago de Compostela (Monografías de
la Universidad de S. de C., 85).
46. Ms. Paris, B. N. lat. 8093-1 + Leiden, Bibl. der Rijksun. Voss. Lat. F
111. Pour la bibliographie, voir B. Munk Olsen, L’étude des auteurs
classiques latins au XIe et XIIe siècles, t. 1, Paris, 1982, p. 74 sq.
47. Œuvre transmise par un unique ms., Paris, B.N. lat. 2627, originaire
de Moissac et remontant à un modèle en écriture wisigothique. Cf. éd. J.
Moreau (Coll. Sources Chrétiennes 39, Paris, 1954), p. 73 sq.

Auteur
Louis Holtz
Du même auteur

Préface in Les Douze


compilations pauliniennes de
Florus de Lyon : un carrefour
des traditions patristiques au
IXe siècle, Publications de
l’École française de Rome, 2016
Priscien, Donat en mains in
Grammaticalia, ENS Éditions,
2019
Bède et la tradition
grammaticale latine in Bède le
Vénérable, Publications de
l’Institut de recherches
historiques du Septentrion,
2005
Tous les textes
© Casa de Velázquez, 1992

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Référence électronique du chapitre


HOLTZ, Louis. Prose et poésie latines tardives transmises aux
Carolingiens par l’intermédiaire de l’Espagne In : L'Europe héritière de
l'Espagne wisigothique [en ligne]. Madrid  : Casa de Velázquez, 1992
(généré le 16 février 2023). Disponible sur Internet  :
<http://books.openedition.org/cvz/2130>. ISBN : 9788490960981.

Référence électronique du livre


FONTAINE, Jacques (dir.) ; PELLISTRANDI, Christine (dir.). L'Europe
héritière de l'Espagne wisigothique. Nouvelle édition [en ligne].
Madrid : Casa de Velázquez, 1992 (généré le 16 février 2023). Disponible
sur Internet  : <http://books.openedition.org/cvz/2099>. ISBN  :
9788490960981.
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