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13/12/2020 La microfinance au Bénin - 1.

Le concept d’exclusion et sa signification en finance - Graduate Institute Publications

Graduate
Institute
Publications
La microfinance au Bénin | Théophile Sossa

1. Le concept
d’exclusion et sa
signification en
finance
Texte intégral
1 L’exclusion est devenue depuis les années 1980 le nouveau
problème ou, comme le soulignent certains auteurs, le
nouveau risque du monde. Ce problème ou ce risque semble
interpeller tous les humains, et des techniques, des actions
et des ressources sont mobilisés afin de le combattre.
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Partout dans le monde, des politiques publiques de lutte


contre l’exclusion sont mises en route. Le mal ou le concept
d’exclusion est très populaire puisqu’il fait l’objet d’un usage
permanent par divers canaux à savoir artistes musiciens,
médias, citoyens, organisations de la société civile, élus,
gouvernements, organisations internationales, académiciens
et manageurs.
2 Cette popularité du concept amène à se demander d’abord, si
tous les acteurs parlent de la même chose lorsqu’ils évoquent
le terme « exclusion » ; ensuite si la représentation qu’ils en
ont permet de mettre en place des moyens de lutte efficaces ;
et enfin, si leurs pratiques coïncident avec le sens qu’ils
donnent à ce concept. La réponse à ces interrogations passe
par une problématisation du concept à travers les questions
suivantes : Que signifie l’exclusion ? A quel objet se réfère-t-
elle ? Qu’apporte ce concept aux sciences sociales ? Et à la
finance en particulier ?
3 Avant de chercher des réponses dans une problématisation
générale du concept, il convient de noter que le terme
« exclusion » est entouré d’un flou conceptuel qui favorise
son emploi par les divers acteurs, et donc explique sa
popularité car « plus un concept reste flou, moindres sont les
tensions entre les acteurs » (Hufty, 2008).

1.1. La problématique de l’exclusion


4 Les usages contemporains de la notion d’« exclusion »
datent en français de l’apparition des essais de P. Massé
(1969), de J. Klanfer (1965) et de R. Lenoir (1974). Cette
notion arrive plus tard au Royaume Uni où « exclusion » en
anglais est comprise comme synonyme de la privation, de la
négation ou du bannissement1. Ce qui permet de l’utiliser
dans diverses situations avec des significations diverses. Au
plan international, elle ne devient courante dans la
littérature et les discours que dans les années 1990. En effet,
dans le contexte de la crise sociale des années 1980-1990,
« exclusion » désignerait avant tout des processus
socioéconomiques de précarisation, d’éviction et de
marginalisation. Elle est censée condenser les effets de la
division internationale du travail, des restructurations

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industrielles et financières, du chômage et de la


précarisation de masse, de la généralisation des rapports
marchands ou la financiarisation, et du processus de
mondialisation sous l’expansion du capitalisme (Karsz,
2000). Les usages de la notion d’« exclusion » sont
également liés aux effets néfastes de la révolution
conservatrice2 et à l’emprise grandissante du néolibéralisme.
5 C’est dans ce contexte que dans les années 1990, le concept
d’exclusion, qui caractérise les conséquences perçues et
vécues des transformations économique, politique et sociale
du monde, acquiert une étrange familiarité auprès de tous
les acteurs. Elle est devenue selon Karsz, « une catégorie
surdéterminée, sans frontières, à la fois interprofessionnelle
et interdisciplinaire », et les acteurs y font recours pour
caractériser la précarisation et la fragilisation d’une franche
sans cesse croissante des populations (2000 : 103). C’est à
travers cette notion que sont désormais appréciées les
questions de pauvreté, d’emploi, d’inégalités, d’intégration,
de lien social ou de citoyenneté. Autrement dit, c’est la
nouvelle représentation de l’objet, ou des objets du
« social ». Avant donc d’aborder les approches théoriques
que mobilise la question de l’exclusion, il convient de
comprendre ce que représente le « social ».

1.1.1. Le concept « social »


6 Selon le Petit Robert, le terme « social » renvoie de manière
générale à tout ce qui est relatif à une société : « qui
appartient à un tel groupe et participe de ses caractères, qui
forme une société ou un élément de la société, qui est relatif
aux rapports entre les personnes ». Lorsqu’on y fait
référence comme un adjectif qualificatif, il prend souvent le
sens de « ce qui est destiné au bien de tous (assurance,
sécurité sociale), venir en aide à ceux qui en ont besoin
(assistance sociale), etc. Cette définition bien focalisée sur
quelques objets du « social » n’est qu’une mise en
perspective simple de ce que représente ce concept. En effet,
le « social », n’est pas quelque chose qui a une existence en
soi. Le concept de « social » désigne essentiellement une
articulation entre la sphère économique et la sphère

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politique. Il s’agit d’une nécessité d’articulation ou tension


qui existe, depuis les révolutions industrielles et politiques
du XVIIIe siècle, entre l’économie de marché et la démocratie
politique qui voit l’individu – son emblème – « contraint,
aliéné, subordonné, exploité dans les rapports de travail »
(Autès, 2000 : 2).
7 Le « compromis social du salariat et de la protection
sociale », loin de résoudre cette tension, n’a constitué qu’un
moyen de la camoufler par l’invention de fictions comme le
contrat de travail (Supiot, 1994). La fragilisation croissante
des relations de travail que traverse le monde contemporain
justifie une telle position car l’intensité du phénomène
montre que ses origines datent de plusieurs décennies.
L’échec d’un tel dispositif est dû à une problématisation du
« social » qui l’oppose à l’économique plutôt que d’opposer
l’économique et le politique (Autès, 2000). Aux sphères de
l’économique et du politique, cet auteur suggère de rattacher
les sphères culturelle et domestique pour former le
« social ». Ces sphères sont également utiles pour
problématiser et analyser le phénomène d’exclusion.
8 En effet, l’exclusion s’étend à un nombre impressionnant de
champs et semble concerner et interpeller tout un chacun.
De ce fait, comme le souligne Karsz (2000), seul le signifiant
« social » peut rendre compte de son envergure et de sa
profondeur. L’auteur fait également remarquer que dans son
usage contemporain, l’« exclusion » est toujours, en dernier
ressort, une exclusion sociale. Mais l’accouplement de ces
deux notions, loin d’être une simple addition de mots, rend
compte de l’emprise des maux sociaux qui transitent par le
canal de l’exclusion. En effet, l’adjectif « sociale » confère à
« exclusion » une puissance sans frontières qui guette
pratiquement partout la cohésion sociale, qui peut éclater
n’importe où, n’importe quand, et qui peut s’abattre sur
n’importe qui, y compris les cadres d’entreprise. L’exclusion
touche « les fondements de l’existence collective et
individuelle, l’être-ensemble autant que l’être tout court.
C’est pour cela que même si elle n’est pas explicitement
adjectivée, l’adjectif « sociale » y brille par son absence »
(ibid. : 109-110). C’est également la raison pour laquelle elle
fait couler beaucoup d’encre sous des approches diverses.
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1.1.2. Les approches théoriques de l’exclusion


9 Il convient d’abord de préciser le type d’exclusion dont parle
ce travail, puisque diverses formes existent. Du point de vue
historique, le monde des humains a connu des formes
d’exclusion de type ostracisme3. On peut citer :

les parias et les intouchables bien séparés de l’ensemble social


en Inde ;
l’expulsion des Juifs (1492) et des Maurisques (héritiers des
anciens musulmans, 1602) en Espagne ;
la mise à mort des hérétiques, bûchers des sorciers, répression
des écarts sexuels comme la bigamie ou la sodomie et
répression de la lèpre dans l’Europe préindustrielle ;
la dotation de certaines populations d’un statut spécial qui les
prive de la participation à certaines activités sociales ou du
bénéfice de certains services sociaux (les juifs en France avant
la Révolution Française, le statut d’indigène dans les colonies
africaines, apartheid en Afrique du Sud) ;
les espaces d’enfermement (asiles, prisons) qui ne relèvent pas
seulement du passé, mais aussi du présent.

10 L’exclusion dont il est question dans le monde contemporain


et dans ce travail relève d’autres processus que les formes
précédemment citées. Il ne s’agit plus d’une action
volontaire officiellement ou publiquement menée contre un
individu ou un groupe social, mais plutôt d’une incapacité
avérée à accéder aux biens (alimentation, logement, eaux
potables, etc.) et services (santé, éducation, crédit, etc.) en
vigueur dans une société. Ainsi, même si dans toute société,
certains groupes sont plus intégrés que d’autres, l’exclusion
concerne actuellement en premier ressort des individus ou
des familles quels que soient le statut social, l’appartenance
religieuse ou ethnique et le lieu de résidence. Ceux-ci ne sont
souvent pas exclus de tout, mais selon les cas, de certains
biens et services qui créent à leur endroit des incapacités à
vivre normalement ou à exercer pleinement leur citoyenneté.
La littérature en science sociale explique de diverses
manières le phénomène d’exclusion. On peut distinguer
quatre approches principales.

Le fatalisme

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11 Cette approche est de type anthropologique à la manière de


Lévi-Strauss. Elle oppose dans l’Anthropologie structurale,
les « sociétés centrifuges » qui tendent à rassembler, aux
« sociétés centripètes » qui excluent, qui rejettent à
l’extérieur tout individu qui s’écarte de la « norme » (Lévi-
Strauss, 1958). L’autre thèse de cette approche est que :
« Toute société comprend un résidu d’inquiétés en quelque
sorte indépassable » (Lévi-Strauss, 1955). Il s’agit là d’un
fatalisme extrême selon lequel il est inévitable que chaque
société ait un groupe d’exclus. Ce qui implique qu’on ne peut
pas traiter l’exclusion en tant que problème social. Cette
approche est statique et n’explique pas le phénomène.

Les carrières et la disqualification


12 Cette approche, développée par S. Paugam (1991, 1996),
aborde l’analyse de l’exclusion en termes de classification
organisée autour de la question de l’intégration et du type de
rapports que la société organise avec ses marges. Sa
perspective d’analyse est de type constructiviste, avec
l’hypothèse que la pauvreté est une construction sociale.
Dans une problématique de construction de carrière, « la
disqualification traduit un phénomène de désintégration
sociale qui apparaît suite à un affaiblissement des liens des
individus avec l’emploi, ce qui entraîne des risques de
désocialisation » (Paugman, 1991). La disqualification est un
processus qui fait que, après avoir perdu leur emploi et les
liens familiaux, les gens se fragilisent et deviennent des
individus à risques. Certains issus de ce groupe de personnes
fragiles tombent dans l’assistanat qui constitue selon
l’auteur un renoncement à l’autonomie. Reste une troisième
catégorie que Paugam appelle les « marginaux » ; ceux-là qui
renoncent à tout, y compris l’assistance des dispositifs
sociaux, tout en s’appropriant la rue et les habitations
abandonnées. Cette dernière catégorie tombe dans le « puits
de l’exclusion ».
13 Cette approche donne une explication du phénomène de
l’exclusion à partir du travail qui permet aux individus de
tisser des liens sociaux et consolider les liens familiaux. Elle
est limitée dans la mesure où la seule variable qui sert à
expliquer l’exclusion est le travail ; alors que d’autres
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variables peuvent intervenir. Par ailleurs, la démarche de


classification ou stratification est source d’étiquetage et de
stigmatisation d’individus aux parcours éminemment
hétérogènes (Sassier, 2000). Cette approche sert l’Etat et les
administrations publiques qui ont besoin d’agir, de cibler les
pauvres et les exclus pour être efficaces, pour réparer les
liens sociaux, pour inclure les exclus.

Les destins individuels et la désinsertion


14 Cette approche, s’intéresse aux destins individuels en
analysant des histoires de vie à partir desquelles est dégagé
le processus de désinsertion (De Gaulejac & Taboada-
Leonetti, 1994). Elle distingue deux étapes de la
désinsertion. La première étape est la « rupture » provoquée
par la perte d’emploi, le divorce ou la maladie qui fragilisent
les individus par la perte des liens sociaux et familiaux. La
deuxième étape, que ces auteurs baptisent le « décrochage »
assimilable au « renoncement » chez Paugam, est
caractérisée par un renoncement à rechercher du travail
parce que les personnes concernées pensent qu’elles ne sont
pas comme les autres, qu’elles ont subi des événements trop
difficiles et se réfugient dans des statuts protégés par les
institutions.
15 Les auteurs expliquent également les types de réaction que
développent les personnes qui tombent dans la trappe de la
désinsertion. Lors de la première réaction, comme
l’expliquait déjà A. Pitrou (1978), elles résistent en essayant
de résoudre elles-mêmes leurs problèmes. Tandis que leur
seconde réaction consiste à développer des stratégies
d’adaptation en considérant qu’elles sont des pauvres,
assistées, malheureuses ne pouvant arriver seules à sortir de
leur situation difficile.
16 Dans cette approche, la dimension de l’histoire individuelle
et du récit est particulièrement intéressante pour montrer
que l’exclusion est purement individuelle et peut arriver à
n’importe qui. Elle a aussi l’avantage, par rapport à la
précédente, d’élargir les variables explicatives de l’emploi à
la maladie, le divorce et les événements malheureux. Le fait
contemporain que les cadres se retrouvent au chômage et
que l’on qualifie de « nouvelle pauvreté » trouve pas mal
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d’éléments d’explication à travers cette approche. Cette


approche possède également une dimension symbolique
originale en ce sens qu’elle montre que l’exclusion entame
profondément les individus dans leur propre identité. En
effet, les individus en situation d’exclusion ne comprennent
plus bien le fonctionnement de la société qui est la leur, ils
ne s’y reconnaissent point, comme le dit A. Touraine, ils sont
out.

La construction du salariat et la désaffiliation


17 Cette approche est inscrite dans l’histoire de la construction
progressive du salariat, par le truchement du rôle important
joué par l’Etat. Cette histoire part des « sociétés de tutelle »
où il y avait des liens de dépendance entre les individus,
passe par des « sociétés de contrat » à la mode libérale, pour
atteindre les « sociétés de protection » ou de statuts qui sont
les formes modernes du salariat (Castel, 1980, 1991, 1995,
2000). A travers cette construction, deux modèles sont en
opposition. Il s’agit d’une part du modèle libéral selon lequel
l’Etat ne doit pas se mêler de ce qui concerne avant tout les
rapports privés et l’entreprise ; et d’autre part, du modèle
républicain qui autorise la mise en place des protections.
L’approche de R. Castel essaie de montrer que l’ensemble de
ces deux modèles se fragilisent et que la vulnérabilité guette
les individus à l’intérieur des rapports de travail.
18 Pour ce faire, il construit la notion de désaffiliation pour
montrer qu’au-delà d’une rupture par rapport au salariat,
c’est le « lien sociétal » qui se rompt. L’appartenance des
individus à la société devient problématique en ce sens que
les pauvres sont des « surnuméraires », des « inutiles au
monde » dont on n’a plus besoin et dont la société peut
assurer, à la limite, l’existence. L’auteur avance que les
choses se défont parce que le compromis social – la fiction
ou le pacte du salariat et de la protection – se fragilise. Ce
qui provoque le retour à la crainte, au début de l’histoire où
l’insécurité, la précarité, la fragilité et la vulnérabilité
menacent et perturbent les individus et les relations de
travail. C’est ce retour malheureux que les gens masquent
selon Castel sous le terme « exclusion », terme que l’auteur
regrette en suggérant que « ceux qui parlent de l’exclusion
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feraient mieux de se taire plutôt que d’employer cette


dénomination purement négative qui ne permet pas
d’analyser les situations des gens » (2000 : 36).
19 L’analyse de Castel distingue au sein de la vie sociale, une
zone d’intégration qui comprend en général des gens qui ont
un travail régulier et de forts liens de sociabilité, une zone de
vulnérabilité composée d’individus au travail précaire et
dont les liens sociaux sont instables, et enfin, une zone
d’exclusion dans laquelle balancent certains vulnérables,
voire des intégrés. On peut représenter la société de cette
façon sur le schéma 1 :
Schéma 1 – Sphères de la vie sociale

Source : inspiré par l’analyse de Castel, 2000.


20 L’exclusion apparaît ainsi comme un processus dynamique
opérant sur tous les maillons de la vie sociale et dont
l’origine se situe, selon Castel, au « centre et non aux
marges » de la société. Et ce centre désigne l’entreprise dont
certaines politiques économiques engendrent la
déstabilisation sociale, la désaffiliation ou ce qu’on appelle
« exclusion ».

1.1.3. Vers une définition opérationnelle de


l’exclusion
21 A l’exclusion du fatalisme, ces trois dernières approches
montrent qu’on a affaire à un défaut ou à une rupture de
liens, à une désintégration sociale. L’exclusion trouve son
origine dans un état de handicap qui affecte des individus ou
des groupes. Elle englobe à la fois les questions liées au bien-
être – pris au sens conventionnel des analyses économiques
de la pauvreté – et aux agents – impossibilité de trouver un
emploi, de participer à l’activité économique, de subvenir à
ses besoins ou de revendiquer un droit. Traiter l’exclusion
revient donc à se demander pourquoi et comment se produit

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la rupture de liens ou la fracture sociale, afin de penser et


d’élaborer les mécanismes qui (re)font des liens.

Le paradoxe de l’exclusion
22 L’exclusion « concerne des gens qui sont en dehors d’une
société dont en même temps ils font nécessairement partie »
(Karsz, 2000 : 122). C’est sans doute ce paradoxe qui amène
certains auteurs à considérer que l’exclusion est une
« nouvelle question sociale » dont la difficulté du traitement
« tient à ce que la relation entre les pôles et la société ne
prend plus les formes d’exploitation, ni de domination, mais
d’un décrochage de la partie “modernisée” de la société qui
s’opère sans utilisation de la partie “inadaptée” ni coercition
à son égard » (Donzelot, 1991 : 9). En effet, pour être exclu, il
faut d’abord appartenir à une société. Les exclus sont,
comme le dit K. Merton, « dans la société mais non pas de la
société : ce sont des véritables étrangers ». L’auteur ajouta
que « sans un fond de valeurs communes à un groupe
d’individus, il peut y avoir des relations sociales, des
échanges désordonnés entre les hommes, mais pas de
société ». (1965 : 177-186). En fait, si « ce n’est pas la même
société qu’ils veulent, ce ne sont plus des inclus et des exclus,
mais par exemple, des classes sociales » (Karsz, 2000 : 137).

L’exclusion à l’intersection de la morale, de l’éthique et de


l’idéologie
23 Dès lors que la société s’organise autour de normes et de
valeurs construites et partagées, la problématique
d’exclusion relève avant tout de la morale, de l’éthique et de
l’idéologie (ibid.). Elle concerne des femmes, des hommes,
des enfants, des familles ou des populations pour lesquels les
défaillances – objectives et/ou subjectives – occasionnent
des malaises, souffrances, manques d’ordre affectif et/ou
matériel injustes et insupportables au regard des
« humains », qu’ils soient in ou out. L’exclusion naît du
décalage entre ce que les individus sont censés être de droit,
de par leur nature humaine, et ce qu’ils sont en réalité dans
l’organisation socio-économique et politique de leur société.
L’idéal et le réel sont donc mis en perspective pour lire
l’exclusion qui apparaît comme un jugement moral porté sur
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la vie individuelle et collective. Un impératif éthique, celui de


ne pas abandonner des humains dans des situations de
souffrances, légitime la problématique de l’exclusion. Enfin,
la catégorie d’exclusion est une idéologie qui véhicule une
« vision d’ensemble des sociétés contemporaines, une
conception du monde à visée globalisante qui ne fait
intervenir ni exploitation, ni domination, et selon toute
vraisemblance même pas, ou pas tout à fait de la coercition »
(ibid. : 145).

Une définition analytique de l’exclusion


24 Au-delà du caractère ambigu et polysémique de la notion
d’exclusion, les approches en termes de continuums de
situation, de processus socioéconomiques dynamiques, de
parcours individuels, présentent beaucoup plus d’intérêt que
les raisonnements par catégorisation ou stratification. Dans
ce travail, qui traite de la finance au Bénin, pays en
développement où le secteur informel prime, il est
nécessaire de situer les causes de d’exclusion dans un
système d’interactions plus large que les transformations du
salariat. Pour cela, l’exclusion s’explique par tous les
éléments qui rendent les individus, les familles et les
populations vulnérables dans un tel contexte. Il peut s’agir
bien entendu d’une perte d’emploi, mais aussi d’une chute
d’activité, de risques économiques et climatiques, de
maladie, de décès, ou tout simplement d’absence de moyens
matériels et/ou financiers pour adhérer aux valeurs
symboliques d’une société. Elle fait référence aux conditions
d’accès à tout ce qui est nécessaire pour vivre normalement
socialement. Aussi, « toute entrave forte dans l’accès à ce qui
est considéré comme un droit est-t-elle interprétée comme
une forme d’exclusion » (Servet, 2002 : 15). En effet, le droit
– ou l’accès – à un minimum vital, à un logement décent, à
la culture, à l’éducation, à la santé, à la justice, à l’expression
politique ou religieuse, à certains moyens de
communication, est considéré comme condition nécessaire à
une vie normale.
25 Dans le contexte actuel de la financiarisation des sociétés
humaines, l’exclusion financière occupe une dimension
importante par rapport à tous les processus d’exclusion dans
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la mesure où tout devient marchand. Mais que signifie cette


notion ?

1.2. De l’exclusion bancaire et financière à


la finance informelle
26 En référence à la définition analytique de l’exclusion, on dit
qu’« une personne se trouve dans une situation de
marginalisation ou d’exclusion financière quand elle ne peut
plus normalement vivre dans la société qui est la sienne
parce qu’elle subit un fort handicap dans l’accès à l’usage de
certains moyens de paiement ou règlement, à certaines
formes de prêts et de financement, aux moyens de préserver
son épargne et de répartir dans le temps ses revenus et ses
dépenses comme dans la possibilité de s’assurer contre les
risques touchant sa propre existence et ses biens et dans
celle de transférer des fonds et des revenus » (Servet, 2006 :
62). L’exclusion financière traduit alors une situation où un
individu éprouve des difficultés d’accès aux services
financiers. La finance et les instruments monétaires peuvent
être des éléments essentiels de construction de solidarités
indispensables à la vie commune ; mais sous certaines
conditions liées à l’organisation sociale ou aux logiques de
fonctionnement des institutions, ils peuvent devenir des
facteurs de fractures, entre pays et régions, entre groupes
sociaux et entre générations (ibid.). Une limitation d’accès
aux instruments monétaires et financiers connus dans une
société à un moment donné et une incapacité personnelle à
les employer constitue une amputation à la capacité d’agir et
d’être.
27 Les termes « exclusion financière » et « exclusion bancaire »
sont souvent utilisés indifféremment, mais ils ne signifient
pas la même chose. L’exclusion bancaire, au sens
notamment de l’accès limité à, et de handicaps dans l’emploi
de certains moyens modernes de paiement ou de règlement
par exemple, n’est qu’un élément d’un ensemble plus vaste
de processus d’exclusion et de marginalisation d’ordre
financier que représente l’exclusion financière, mais elle
peut aussi en être une cause et un instrument de
renforcement (Servet, 2006 : 72). L’exclusion bancaire peut
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toucher des personnes à faible revenu, des interdits


bancaires ou encore des surendettés tandis que l’exclusion
financière concerne les difficultés d’accès à des produits et
services financiers qui durent longtemps (Gloukoviezoff,
2004). On peut distinguer divers aspects de l’exclusion dans
le secteur financier.

1.2.1. Exclusion par accès


28 Elle concerne d’une part en termes géographiques les
régions qui ne sont servies par aucune institution financière.
D’autre part cette forme d’exclusion est biaisée lorsque les
institutions sont physiquement présentes mais n’offrent pas
leurs services à certaines catégories de la population
considérée comme présentant de hauts risques évalués par
des processus de notation. La méthode de « notation
(scoring) » qui consiste à estimer la solvabilité des candidats
à un prêt est particulièrement discriminante puisqu’elle
conduit à l’élimination d’une partie de la population. Le
score obtenu par un candidat exprime la probabilité que
celui-ci rembourse un prêt. Il est estimé à partir des
variables telles que la situation familiale, l’âge, la profession
et l’ancienneté dans la domiciliation bancaire, le taux
d’endettement, l’état de santé.
29 Si aucune mesure réglementaire n’est prise par les
législateurs et contrôlée par les pouvoirs publics afin
d’obliger les établissements financiers à mener des
politiques de discrimination positive – ce qu’on rencontre
aussi bien aux Etats-Unis avec la loi CRA4 qu’en Inde avec
des objectifs de quotas de la population – une immense
fraction de la population, y compris les petits entrepreneurs
qui pourraient parfaitement se révéler des clients rentables
pour les établissements financiers, se trouve ainsi éliminée
de la clientèle bancaire (Servet, 2006 : 70).
30 C’est la raison pour laquelle Servet (2006), citant The
Economist (2005), indique que « la microfinance ne doit pas
seulement relever des problématiques de lutte contre la
pauvreté dans les zones rurales, mais offrir des opportunités
beaucoup plus larges en luttant contre les discriminations

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négatives pratiquées par les établissements financiers, et


ainsi élargir la clientèle des banques commerciales ».

1.2.2. Exclusion par les conditions, les prix et les


stratégies
31 L’utilisation des services financiers est souvent soumise à
des contrats et conditions qui sont spécifiés de telle sorte que
ces services ne sont pas accessibles à toutes les couches de la
population. Au Bénin par exemple, le fait qu’une proportion
importante de la population ne possède aucune pièce
d’identité illustre bien leur exclusion des services financiers
bancaires. Par ailleurs, lorsque les services financiers ne sont
pas adaptés (épargne-prêt, revenu-remboursement, besoins-
produits) aux réalités locales, la participation des
populations s’en trouve freinée.
32 En termes de prix, les produits et services financiers sont si
fortement taxés que les pauvres ne peuvent pas y accéder.
Lorsque les institutions financières désirent sélectionner
leurs clients, les opérations avec la population indésirable
sont facturées à un prix dissuasif, tandis que les opérations
pour lesquelles la banque recherche des clients sont
facturées à un coût moindre et attractif. Ces mécanismes
plus ou moins subtils de bannissement peuvent aller de la
simple capacité d’ouvrir un compte, au niveau de découvert
autorisé, au délai de transfert et aux garanties exigées dans
le cas d’un projet d’investissement (Servet, 2006).
33 Certains groupes d’individus sont souvent effectivement
exclus lorsque les institutions développent des stratégies
pour cibler certains secteurs et abandonner délibérément
certains segments. En effet, un établissement financier dans
une logique de minimisation des risques et d’augmentation
des profits peut rejeter tel ou tel type de clientèle. Il accepte
comme clients potentiels une partie plus ou moins grande de
la population et au sein de cette clientèle, donne accès à tel
ou tel service à une minorité (Servet, 2006 : 68).

1.2.3. L’auto exclusion


34 Les individus des couches inférieures d’une population
peuvent décider de ne pas recourir à des services financiers

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formels parce qu’ils sont méfiants à l’endroit de ces services


et pensent que dans tous les cas, leur demande ne serait pas
prise en compte. La distance sociale entre la banque et les
populations rurales est si large qu’elle conduit à l’auto
exclusion des ruraux. L’exclusion financière n’est pas
toujours un phénomène simplement subi. Par exemple, « les
systèmes d’échanges locaux sont des formes de subsidiarité
monétaire qui montrent que pour certains groupes et
certains de leurs membres, l’exclusion financière peut être à
la fois subie et recherchée dans une quête d’autonomie voire
de résistance » (Servet, 2006 : 62). Pour des raisons
morales, religieuses ou historiques, ou tout simplement de
jugements à priori, des individus peuvent s’auto exclure de la
vie financière de leur société (Gloukoviezoff, 2004). Un
manque de culture financière en matière d’épargne et de
comptabilité monétaire ainsi qu’une diabolisation de l’argent
et du crédit entraînent également l’auto exclusion.
35 Telles peuvent être les situations des populations
financièrement exclues et auxquelles la microfinance
ambitionne d’apporter des solutions, c’est-à-dire traiter
l’exclusion financière. Mais l’exclusion financière, qu’elle soit
collective ou individuelle, n’est jamais totale, du fait de
l’existence des pratiques financières informelles. Lorsque ces
pratiques s’articulent aux autres pratiques (banque,
microfinance), ce qui est souvent le cas, elles engendrent des
risques de surendettement des individus. En effet, dans
beaucoup de pays en développement comme ceux d’Afrique
de l’Ouest, les pratiques financières informelles ne sont pas
réservées aux exclus financiers. Cela s’explique par le fait
que les services et produits financiers ne sont pas bien
adaptés aux besoins des clients, mais ceux-ci y recourent à
défaut de meilleures alternatives, tout en restant attachés
aux sources informelles de financement.

1.2.4. Les pratiques financières informelles


36 Les travaux de Shaw (1973) et Mc-Kinnon (1973) concernant
les systèmes financiers dans les pays en développement ont
révélé l’existence des secteurs financiers parallèles, désignés
souvent par le terme « finance informelle ». Il s’agit de

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pratiques financières puisées dans les valeurs sociales,


coutumières et ethniques des populations. Aux yeux des
théories monétaristes, la finance informelle était comme un
aspect négatif pour la maturité des systèmes financiers en
développement. D’un autre côté, ces pratiques informelles
ont trouvé un grand intérêt auprès des économistes
néostructuralistes. Ces derniers considèrent ce secteur
comme compétitif et agile (Taylor, 1983 ; Jensen, 1989).
Pour ces auteurs, la finance informelle n’est pas
obligatoirement le produit de la répression financière ; elle
renseigne plutôt sur une autre organisation des sociétés en
développement et peut alors constituer un facteur de
développement.
37 Certaines vertus reconnues à la finance informelle
constituent des avantages comparatifs par rapport à la
finance classique. D’abord elle repose sur des rapports de
proximité favorables à une offre financière différenciée et
individualisée. De plus, elle est commode et à la portée de
personnes souvent sans instruction. Par ailleurs, les bailleurs
de fonds informels n’exigent que peu ou pas de garantie ;
souvent, la parole ou l’appartenance à un groupe suffit. Les
coûts de transaction faibles représentent aussi un avantage
comparatif en faveur de la finance informelle (Vonderlack &
Schreiner, 2003).
38 Ces avantages justifient le développement des pratiques
financières informelles en marge du système financier
traditionnel. Par ailleurs, les besoins accrus de ressources
financières générés par le « processus de financiarisation des
rapports sociaux » favorisent le développement de ces
pratiques (Servet, 2006). Et comme les institutions
bancaires n’offrent pas de services financiers aux ménages à
faible revenu, ceux-ci sont obligés de recourir au système
informel pour leurs besoins de financement.
39 Mais certains observateurs jugeaient que le marché financier
informel était porteur de plusieurs vices : appauvrissement
des familles en raison des taux d’intérêt trop élevés, relations
de servitude, insécurité des dépôts. Dans cette vision, l’une
des attentes de l’offre de services financiers via la
microfinance était l’éradication à long terme des pratiques
financières informelles. Malheureusement, de nombreux
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travaux ont démontré les incohérences de cette vision


dualiste et évolutionniste des marchés financiers (Servet,
1995). D’autres études portant sur l’impact de la
microfinance sur les marchés financiers locaux ont mis en
évidence des imbrications et des interactions réciproques
(Morvant, 2006, 2008). Ces résultats s’avèrent utiles à toute
recherche sur les marchés financiers ruraux, et notamment
dans le cas de cette étude, afin de mieux cerner
l’environnement financier dans lequel évoluent les IMF dans
leur lutte contre l’exclusion financière.

1.3. La microfinance face à l’exclusion


financière : De quelques approches
conceptuelles à l’objet de la recherche
40 Le terme microfinance fait référence à un ensemble
d’institutions (ONG, coopératives, banques commerciales,
programmes gouvernementaux, etc.) et de clients desservis
(microentrepreneurs, artisans, commerçants, agriculteurs,
etc.). Les IMF couvrent l’ensemble de la planète et exercent
dans des contextes socio-économiques et culturels divers.
Aussi les logiques qui orientent leurs offres de services
financiers sont-elles différentes. En effet, selon les modes
d’intervention, plusieurs approches conceptuelles sont
mobilisées dans l’offre de services financiers de la
microfinance face aux besoins d’inclusion financière5.
Quelques unes méritent d’être discutées dans le cadre de ce
travail.

1.3.1. Au-dessus ou en dessous de la ligne de


pauvreté
41 L’offre de services financiers des IMF s’adresse à une
clientèle très hétérogène en termes de niveau de pauvreté et
d’exclusion. On peut identifier trois niveaux significatifs de
la pauvreté en rapport avec la problématique de la
microfinance (Hatch, 1998 ; Henry et al., 2003). Il s’agit :

de la pauvreté sévère qui touche les plus pauvres, vivant avec


un maximum de 50 % du revenu nécessaire pour atteindre la
ligne de pauvreté ;

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de la pauvreté modérée qui touche les plus riches parmi les


pauvres, vivant avec plus de 50 % du revenu nécessaire pour
atteindre la ligne de pauvreté ;
des désavantagés non pauvres qui rassemblent les personnes
ayant légèrement franchi la ligne de pauvreté, mais qui
demeurent fortement vulnérables et peuvent basculer en
dessous.

42 Cette catégorisation permet d’analyser la manière dont les


IMF choisissent leur clientèle par rapport à la ligne de
pauvreté. L’orientation des IMF dans ce domaine est
largement influencée par les approches institutionnaliste et
welfariste de la microfinance.

Approche institutionnaliste
43 La thèse des institutionnalistes repose sur l’idée que le
microcrédit ne peut pas engendrer d’impact significatif sur le
niveau général de la pauvreté dans le monde si les IMF
dépendent du financement des donneurs (Otero, 1999 ;
Rhyne, 1998 ; Robinson, 2001 ; Littlefield & Rosenberg,
2004). Les tenants de cette thèse font remarquer que le
capital financier nécessaire pour assurer la viabilité des IMF
d’un tel système dépasse de loin ce que l’aide internationale
est prête ou même capable de fournir. D’autres arguments
institutionnalistes font référence à la volatilité des
ressources financières de l’aide, voire leur cessation en
fonction des intérêts changeants des donneurs pour mettre
en exergue les risques liés au développement d’IMF
dépendant du financement des bailleurs.
44 Dans ces conditions, les IMF se doivent d’aspirer à
l’autosuffisance (Gonzalez-Vega, 1993). La logique de cette
proposition est que la priorité des IMF, pour assurer une
inclusion financière de masse, doit être l’atteinte du plus
grand nombre de pauvres possibles et non pas l’atteinte des
populations les plus pauvres. Par ailleurs, les
institutionnalistes avancent que le ciblage des populations
très pauvres est coûteux tout comme les opérations de prêt à
cette clientèle, notamment les coûts liés à l’octroi d’un grand
nombre de plus petits prêts. Certains observateurs font
remarquer que cette approche implique l’abandon des plus

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vulnérables d’entre les pauvres. A cette critique, les


institutionnalistes avancent qu’une IMF viable, motivée par
la rentabilité et opérant à grande échelle servira – en terme
absolu – plus de clients très pauvres qu’une IMF dont
l’objectif est le ciblage et la provision de services financiers
aux plus pauvres.
45 Ainsi, l’approche institutionnaliste considère “that a
primary objective of microfinance is financial deepening,
the creation of a separate system of ‘sustainable’ financial
intermediation for the poor. Theirs is a ‘financial systems’
approach to microfinance, in which the future of
microfinance is dominated by numerous large-scale, profit-
seeking financial institutions that provide high quality
financial services to large numbers of poor clients” (Woller,
1999, p. 1). Elle est centrée sur une efficacité financière et
technique susceptible d’engendrer un développement
économique et durable à long terme par un effet de trickle-
down6.
46 Afin d’y pourvoir, l’IMF commerciale a pour clientèle cible
les « pas-si pauvres-que-ça » (not-so-poor) qui, grâce aux
sommes prêtées, pourront démarrer ou faire croître leur
microentreprise, ce qui à terme créera de l’emploi pour les
très pauvres. Il est aussi possible que l’accroissement du
revenu des non pauvres engendre une augmentation de leur
consommation. Lorsque cette augmentation de la
consommation est tirée par une demande de biens et
services produits par les plus pauvres, l’effet trickle-down
s’accomplit également. Mais certains observateurs
soulignent que tous ces paramètres (investissement,
emplois, consommation) n’obéissent souvent pas aux
conditions de réalisation de l’effet trickle-down ; et que, si le
microcrédit s’adresse en fait à des clients non pauvres, il
contribue non à restreindre mais à accroître les inégalités de
revenu par rapport aux couches sociales les plus démunies
(Servet, 2008).

Approche welfariste7
47 La pensée welfariste s’articule autour des écrits de Jonathan
Morduch (1998 ; 1999 ; 2000) et de Gary Woller,
Christopher Dunford et Warner Woodworth (1999). Leur
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approche ne vise pas en priorité l’efficacité financière et


technique, mais plutôt une certaine équité sociale qui
consiste à « soulager immédiatement le fardeau quotidien de
la pauvreté, comme premier pas aidant les gens à échapper
de la pauvreté à long terme » (Dunford, 1998). Les IMF
répondant à ces impératifs sont de type « familial », c’est-à-
dire qu’elles ont la famille comme point de focalisation et les
femmes représentent leur clientèle privilégiée. Il s’agit de
faire du “poverty lending” (crédit aux pauvres) destiné aux
plus pauvres des pauvres économiquement actifs et le but
visé est leur auto-emploi.

1.3.2. Approche minimaliste ou intégrale


48 La question centrale au cœur de ce débat est la suivante :
« les IMF devraient-elles adopter une approche minimaliste,
en se contentant de proposer la seule intermédiation
financière ou devraient-elles favoriser une approche intégrée
en associant l’offre d’intermédiation financière à d’autres
types de services ? » (Ledgerwood, 1999, cité
par Wélé, 2008 : 31). Les logiques suivantes influencent la
pratique des IMF sur ce plan.

Les institutions de type minimaliste fondent leur approche sur


l’idée qu’il y a une pièce « manquante » nécessaire à la
croissance des microenterprises ; il s’agit généralement du
crédit, disponible et accessible, qui peut être proposé par une
institution de microfinance. Ainsi, selon cette approche, l’IMF
a un avantage comparatif à se limiter à l’offre de services
financiers, quitte à ce que d’autres institutions offrent les
autres services demandés par la clientèle. Dans cette logique,
on peut souligner le rôle des projets gouvernementaux8
appuyés par les partenaires au développement qui offrent des
services non financiers à la clientèle des IMF. Mais ces projets
ne vivent qu’un certain temps alors que l’activité des IMF
continue ; est-ce l’approche idéale ?
Les IMF de type intégral ont quant à elles, une conception
globale de l’offre qui consiste à combiner et à proposer une
gamme de services d’intermédiation financière et sociale.
Elles basent ce mode d’intervention sur le constat que certains
clients ne possèdent pas les capacités entrepreneuriales
nécessaires à la bonne marche de leur activité. Les services

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d’accompagnement (alphabétisation, formation, etc.) fournis


par les IMF peuvent être bénéfiques pour les deux parties,
notamment en limitant les risques de non-remboursement.

1.3.3. La problématique de genre


49 Autrefois marginalisées sur la sphère économique en raison
des mécanismes de pouvoir et des contextes culturels, les
femmes suscitent désormais un intérêt croissant auprès des
IMF qui intègrent diversement le facteur « genre » dans
leurs stratégies (Wélé, 2008). Ainsi, « la microfinance
apparaît en quelque sorte comme un moyen d’accroître
l’autonomie et la “liberté réelle” des femmes » (Guérin,
2001, p. 3). On peut distinguer deux modes de ciblage des
femmes. Certaines IMF accordent une priorité exclusive à la
clientèle féminine. D’autres quant à elles, visent une clientèle
mixte, mais diversifient leur offre pour prendre en compte
les spécificités de la clientèle féminine : conditions d’octroi
de crédit plus assouplies, absence d’épargne préalable,
caution solidaire, fonds de garantie (ibid.).
50 L’intégration de la dimension genre dans la microfinance
s’explique généralement à l’aide des arguments suivants.
D’abord, une vision unanime semble se développer, surtout
dans le rang des bailleurs de fonds, autour de l’idée que les
femmes sont les plus vulnérables, alors qu’elles n’ont pas
accès aux ressources nécessaires pour participer à l’activité
économique : « il n’y a pas de développement possible sans
la participation des femmes » (Guérin, 2001).
51 Ensuite, certaines études ont montré que les femmes
consacrent une plus large part de leurs revenus
professionnels à leur famille (FAO, 2003). Ainsi, un
portefeuille féminin est censé avoir, par ailleurs, plus
d’impacts positifs sur le bien être familial, qu’un portefeuille
masculin. Cependant, un ciblage des femmes qui exclut les
hommes porte en lui-même ses limites. D’une part, il peut
s’avérer que les femmes ne soient pas les seules rentables
pour les IMF et que des hommes potentiellement rentables
soient exclus en raison de cette discrimination « positive ».
D’autre part, « l’exclusivité faite aux femmes dans l’octroi du
crédit peut les mettre en situation domestique plus risquée
(perte de contrôle de l’activité au profit des hommes, crédit
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pour autrui, etc.), entraînant “in fine”, une baisse des


impacts favorables escomptés au plan familial » (Mayoux,
1998 ; cité par Wélé : 32).
52 Enfin, se basant sur l’expérience des IMF, certains auteurs
font remarquer que les femmes constituent un bon risque
pour les IMF dans la mesure où – comparativement aux
hommes – elles se montrent plus fiables et plus ponctuelles
en matière de remboursement des crédits (FAO, 2003 ;
Soulama, 2005 ; Armendariz & Morduch, 2005). Mais il
importe de nuancer ce constat. Par exemple, dans les régions
à forte émigration d’Amérique latine, les femmes
remboursent bien les crédits parce qu’elles reçoivent des
transferts de fonds des hommes migrants. Si l’on ramène le
débat sur un fond typiquement « genré » qui produit
l’organisation sociale et la division du travail en Afrique de
l’Ouest par exemple, les femmes remboursent mieux que les
hommes parce qu’elles dominent le petit commerce qui
produit de grandes marges sur des périodes courtes ; ce qui
n’est pas le cas des occupations masculines (l’agriculture,
l’artisanat) qui sont beaucoup plus risquées.

1.3.4. Le poids des risques


53 La notion de risque vient immédiatement à l’esprit lorsque
l’on analyse le comportement des individus en situation
d’incertitude. Ces deux notions « risque » et « incertitude »
sont très proches. Toutefois, F. Knight (1921) propose de
nuancer les situations qu’elles caractérisent. Selon cet
auteur, on peut dénommer « risquées » des situations à
l’issue imparfaitement maîtrisée mais dont tous les scénarios
de sortie sont a priori connus et auxquels il est possible
d’affecter une probabilité d’occurrence ; alors que le terme
« incertain » caractérise des situations au devenir inconnu
ou tout au moins non probabilisable (Jessua & al., 2001).
54 Comme le souligne Servet et Baumann (2007), dans les pays
en développement, « la frontière entre ces deux types d’aléas
paraît ténue, d’où une difficulté supplémentaire de se
prémunir contre les aléas de toute sorte » (p. 6). En matière
de finance, ces aléas touchent aussi bien les institutions que
leurs clients.

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Les risques touchant les organisations


55 Certains risques touchent les organisations de microfinance
elles-mêmes, notamment celles dont l’activité principale est
l’offre de microcrédit. Les asymétries d’information9 qui
pénalisent les prêteurs sont bien connues des opérateurs du
marché financier à travers la théorie économique de
l’information (Akerlof, 1970 ; Stiglitz & Weiss, 1981). On
distingue les asymétries précontractuelles qui confrontent le
prêteur au problème d’antisélection et les asymétries
postcontractuelles qui caractérisent le problème d’aléa
moral10. L’antisélection (adverse selection) traduit une
situation dans laquelle les candidats à un prêt disposent de
plus d’informations que le prêteur sur la rentabilité des
projets ou activités à financer. Le prêteur manquant
d’information sur la transaction pourra alors choisir le projet
le plus désavantageux. Tandis que l’aléa ou le risque moral
(moral hazard) traduit le fait que l’emprunteur peut ne pas
respecter ses engagements et que le prêteur est dans
l’impossibilité de déterminer la responsabilité ou non de son
cocontractant dans l’aboutissement du projet.
56 La gestion de ces risques consiste traditionnellement à
« rationner le crédit »11, à suivre et surveiller l’emprunteur
dans la gestion de son projet ou à réaliser des audits à la fin
du projet, notamment pour ce qui concerne les banques
(Lanha, 2006). Mais les audits coûtent chers à réaliser, et ne
sont faits que dans de rares cas. Quant au rationnement de
crédit, il contribue dans beaucoup de cas, contre l’attente des
praticiens de la finance, à accroître les risques. En effet, les
crédits octroyés ne pouvant pas couvrir les besoins de
l’emprunteur, celui-ci se voit obligé de recourir à d’autres
sources de financement. Que ces sources soient d’autres
organisations de microfinance ou des sources informelles, la
multiplication des échéances de remboursement (souvent
intérêts seulement pour les sources informelles, part de
capital plus intérêts pour les IMF) pour un même flux de
revenu souvent irrégulier ne fait qu’accroître le risque de
surendettement des emprunteurs, et par ricochet le risque
crédit des organisations.
57 La gestion des risques par l’octroi de crédit à des groupes de
caution solidaire a été une des plus importantes innovations
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de la microfinance. Mais depuis 2002, la Grameen Bank,


très célèbre par ces petits crédits aux membres de
microgroupes solidaires depuis les années 1970, préfère les
prêts individuels du fait de la montée des impayés (Servet,
2009). Cependant, l’expansion de ce modèle dans le monde
de la microfinance n’a pas pour autant été freinée. C’est le
moment de remettre en cause les théories qui en louent les
vertus afin de pouvoir questionner la manière dont la
solidarité de groupe ou la pression sociale amène les
ménages pauvres à rembourser les crédits.

Les risques touchant les clients


58 Au-delà des asymétries d’information et des méthodes
mobilisées en finance pour leur gestion, les aléas touchant la
vie quotidienne des clients entament la viabilité des IMF dès
lors que la capacité des clients à épargner ou à rembourser
les crédits s’en sort affaiblie (Servet & Baumann, 2007). Le
tableau 1 présente une typologie des risques qui affectent la
vie des ménages.
Tableau 1 – Typologie des risques présents dans les
zones rurales pauvres

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Source : World Bank, 2000-2001.


59 La prise de conscience de l’existence de ces risques et la
nécessité d’aider les pauvres à les gérer, sont à la base du fait
que dans le monde de la microfinance, l’attention se déplace
de l’objectif de réduction de pauvreté stricto sensu « pour se
focaliser davantage sur les risques auxquelles sont
confrontées les populations vulnérables, découlant d’une
vision plus dynamique de la pauvreté et de ses
déterminants » (Servet & Baumann, 2007 : 7). En effet,
soulignent Morvant-Roux et Servet (2007), « de plus en
plus, la pauvreté est pensée en termes de processus où
l’inégalité face à la gestion de la vulnérabilité et l’irrégularité
des ressources jouent un rôle central. Approche qui se
justifie d’autant plus que la proportion des populations
vulnérables est généralement beaucoup plus élevée que celle
des populations à faible revenu », telle que le montre le
schéma 2.
Schéma 2 – Gradient social de la vulnérabilité

Source : auteur.
60 Cette proportion plus élevée de la population, déjà exclue
des circuits financiers formels est également exclue des
systèmes classiques de couverture de risque, en dépit de la
présence d’un nombre non négligeable de sociétés
d’assurance dans les pays en développement. C’est le défi
actuel que doivent relever les IMF par l’offre de produits de
microassurance aux populations démunies. Mais ce produit
est plus complexe (calcul de primes, aléa moral, confiance
des clients en l’assureur, relation tripartite dans le cas de la
santé avec l’implication d’un prestataire de services) que le
microcrédit et demande à être bien pensé afin de pouvoir
bénéficier aux différentes parties impliquées par un contrat
de ce type.

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1.3.5. Le travail de recherche et le cadre d’analyse


61 Les divers défis que doit relever la microfinance dans le
traitement de l’exclusion financière ont déjà été présentés.
Ce travail ne vise pas à déterminer l’approche ou le mode
d’intervention qui réponde le mieux aux besoins d’inclusion
financière. Il part plutôt de ce qui semble être
communément admis par les acteurs, à savoir l’atteinte
d’une certaine performance sociale, c’est-à-dire la
« traduction effective dans la pratique des objectifs sociaux
d’une institution, conformément aux valeurs sociales
reconnues » (CGAP, 2007 : 3), analyse en quoi les pratiques
et comportements des acteurs (IMF et clients) convergent
vers la réalisation de ces objectifs.
62 Il est fondé sur l’hypothèse que la réalisation d’une certaine
performance sociale au niveau d’une IMF dépend de
l’adéquation de ses services financiers aux besoins des
populations servies. Dès lors le travail revient à analyser les
besoins de services financiers en milieu rural en se
demandant « en quoi les institutions de microfinance
répondent à ces besoins ». D’une part et plus précisément, il
s’agit de se demander « en quoi les objectifs poursuivis par
les IMF sont en phase avec les services financiers offerts ».
D’autre part, il s’agit de se demander « en quoi les IMF se
donnent les moyens d’atteindre leurs objectifs, ainsi que les
moyens de vérifier que leurs objectifs sont atteints ».
63 Il convient de noter que les IMF apportent des réponses
indispensables aux besoins des exclus financiers en milieu
rural ; cependant leur offre de service demeure encore peu
adaptée à ces besoins. En effet, les logiques et les contraintes
qui orientent l’utilisation des services financiers par les
clients ne sont pas de nature à permettre l’atteinte des
objectifs que se donnent les IMF. Ces objectifs étant dictés
par l’optimisme et la propagande qui entourent la
microfinance, les moyens pour les atteindre ainsi que leur
vérification dans les contextes spécifiques constituent une
préoccupation mineure.
64 Le débat sur l’adéquation de l’offre de services financiers aux
besoins des clients est issu d’une approche marketing en
microfinance qui avance que l’efficacité des IMF repose

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essentiellement sur leur capacité à satisfaire les besoins de la


clientèle dans toute sa diversité (White, 2005). Cette
approche est fondée sur le constat que les plus pauvres
demeurent en majorité en marge des services financiers des
IMF et que dans leur rang, ceux qui arrivent à joindre des
programmes de microfinance, le quittent après seulement
quelques cycles de prêt et encore beaucoup plus durant les
cycles de prêt suivants » (Woller, 2002, p. 1). Dès lors le
principal défi des IMF consiste à offrir une série de services
financiers durables qui répondent aux besoins de la vie
quotidienne des clients très pauvres (Woller, 2002 ;
Honohan & Beck, 2007).
65 Dans cette perspective, les IMF doivent alors mieux
connaître les logiques, perceptions, besoins et
comportements de leurs clients pauvres et les satisfaire
grâce à une offre diversifiée et appropriée. Le débat sur
l’adéquation offre-besoins en microfinance s’inscrit par
ailleurs dans un mouvement plus large de promotion des
performances sociales qui fournit des outils de mesure des
efforts des IMF en la matière.

Les performances sociales en microfinance


66 La croissance du secteur de la microfinance et les récentes
critiques à son encontre amènent aussi à s’interroger sur son
utilité sociale, qui a longtemps été considérée comme
acquise. Il y a encore quelques années, le thème des
performances sociales était marginalisé dans les débats en
faveur des performances financières dont il ne fallait surtout
pas détourner les IMF. Aujourd’hui, un mouvement général
existe autour de ce thème, de même que des outils existent
pour sa promotion et sa mesure. Selon la Social Performance
Task Force (SPTF), l’organisation qui a en charge de
coordonner les efforts de recherche sur la performance
sociale dans le secteur de la microfinance, « la performance
sociale est la traduction effective dans la pratique de la
mission sociale d’une institution de microfinance en lien
avec des valeurs sociales communément acceptées qui
fixent de servir un nombre croissant de personnes pauvres
et exclues, d’améliorer la qualité et l’adaptation des services

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financiers, de créer des bénéfices pour les clients et


d’améliorer la responsabilité sociale d’une IMF »12.
67 Lapenu (2007) note que pour beaucoup d’IMF, une idée se
dessine selon laquelle le renforcement des performances
sociales permet de s’assurer de la satisfaction et des
bénéfices économiques et sociaux pour les clients tout en
étant un moyen de renforcer leurs propres performances
financières. En effet, la valorisation des efforts des IMF dans
ce sens peut constituer un aspect important pour la
promotion de leur image13 (marketing et recherche de
financement), en jouant un rôle de différenciation et
d’attraction d’investissement (Lapenu & al., 2009). Cette
idée est d’autant plus vraie que les agences d’aide au
développement et les fonds privés s’interrogent de plus en
plus sur la plus-value-sociale attendue de leurs
investissements à travers des exigences en matière de
performances sociales et de responsabilité sociale des IMF. Il
se crée alors, en matière d’évaluation, « un besoin et une
demande qui permettent aux financeurs de la microfinance
de valoriser, outre la rentabilité, leur contribution à la
consolidation d’un secteur viable et socialement
performant » (ibid. : 43).
68 On distingue divers outils d’évaluation de la microfinance
tels que les montre le tableau 2.
Tableau 2 – Outils14 d’évaluation des performances
sociales

Source : Lapenu et al., 2009


69 La SPTF dénombre vingt-cinq outils d’évaluation des
performances sociales qu’elle classe en quatre familles
majeures (audit des performances sociales, rating,
évaluation de la pauvreté et analyse d’impact). Mais
lorsqu’on considère les critères de classification (accès libre,
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spécifique à la microfinance, largement appliqué, reconnu


par le secteur), seuls quelques outils constituent une gamme
complète et innovante en matière d’évaluation sociale du
secteur (Lapenu & al., 2009). Ces outils s’appliquent à divers
aspects d’évaluation des performances sociales.

Cohérence entre mission et activités : l’outil SPI


70 L’outil SPI (Social Performance Indicators), créé par
CERISE15depuis 2001, s’appuie sur des indicateurs
standardisés qui évaluent les principes, les actions et les
mesures correctives mises en œuvre par une IMF pour
atteindre ses objectifs sociaux. Il est fondé sur l’hypothèse
que le fonctionnement d’une IMF suit une chaîne logique
entre intention-action-effet comme le montre le schéma 3.
Schéma 3 – Chaîne de fonctionnement d’une IMF
Image 20001B6B00003A89000013264AEDD35C.wmf
Source : Lapenu & Reboul, 2006
71 Ces auteurs suggèrent que l’analyse des performances en
microfinance soit mise en corrélation avec l’impact
recherché et les moyens mis en œuvre par l’IMF pour
atteindre ses objectifs. Pour se prêter à cette démarche,
l’outil SPI opère suivant quatre dimensions clefs reconnues à
l’échelle internationale : I) le ciblage des pauvres et des
exclus, II) l’adaptation des produits et services, III) les
bénéfices économiques et sociaux, et IV) la responsabilité
sociale de l’institution.

Evaluation de la pauvreté des clients : les PAT


72 Il s’agit de l’index de progression de sortie de la pauvreté
(PPI, Progress out of Poverty Index) et les Poverty
Assessment Tools (PAT) de l’USAID16. Ces outils permettent
de s’assurer que les financements de l’USAID en
microfinance touchent au moins 50 % des personnes en
dessous du seuil de pauvreté d’un dollar par jour ou parmi
les 50 % en dessous du seuil de pauvreté national. Pour
certains observateurs, ces outils qui tendent à focaliser la
microfinance sur les « plus pauvres des pauvres » véhiculent
une approche réductrice de la pauvreté qui ne tient pas

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compte des causes et des effets majeurs en termes de


capacité des ménages. En effet, chercher à cibler « les plus
pauvres » est une bonne initiative en soi puisque l’offre de
services financiers est plus rare pour cette catégorie que
pour les « moins pauvres » et les autres exclus financiers ;
mais le ciblage devient improductif, voire pervers lorsque les
produits et services offerts ne répondent pas à des besoins
précis de la vie quotidienne des clients « plus pauvres »,
condition nécessaire au “progress out of poverty”.

Vérification de l’efficacité des processus : les ratings sociaux


73 Les ratings sociaux évaluent la performance sociale des IMF
comme la probabilité d’atteindre leur mission sociale et
d’avoir un impact, compte tenu de leur vision et des
processus de l’organisation. La démarche d’évaluation peut
être réduite à l’information disponible au niveau des IMF ou
être étendue à des données sur le profil des clients ou le
niveau de satisfaction de ceux-ci.

Analyse d’impact
74 On retrouve encore dans cette catégorie l’outil SPI qui,
partant de la stratégie sociale, définit les voies
d’amélioration des pratiques pour maximiser l’impact au
bénéfice des clients (appoche “improve”). Cette approche
s’intéresse d’abord aux IMF désireuses d’améliorer leurs
performances sociales. La demande des investisseurs privés
et des bailleurs sur l’efficacité de la microfinance nécessite
l’établissement de preuves ou des corrélations entre l’activité
des IMF et les changements intervenus dans la vie des
clients (approche “prove”). Dans ce domaine, on peut citer
les expérimentations par sélection aléatoire17 (ESA). Le
principe général de la méthode ESA « est de s’approcher au
mieux de la méthode de l’essai clinique. On compare des
gens qui ont bénéficié d’un traitement – dans le cadre d’un
essai clinique, ce sera un nouveau médicament – et des gens
qui n’en ont pas bénéficié. À cette fin nous mettons tout en
œuvre pour que ces gens soient le plus comparables
possible »18.

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75 La première application de l’ESA à la microfinance a été faite


dans les bidonvilles de Hyderabad (la 15e plus grande ville de
l’Inde, et capitale d’Andhra Pradesh, l’Etat indien où le
microcrédit a connu l’expansion la plus rapide) en 2005. Sur
les cent quatre ménages sélectionnés au hasard pour
l’expérimentation, l’accès au crédit a été rendu possible à
cinquante-deux d’entre eux par Spandana, l’une des IMF
connaissant une des plus rapides expansions dans la zone,
pendant que rien n’est fait pour les cinquante-deux autres.
Après 15 à 18 mois, les résultats obtenus sont les suivants :
There was no effect of access to microcredit on average
monthly expenditure per capita, but durable expenditure
did increase. The effect are heterogenous: Households with
an existing business at the time of the program invest in
durable goods, and their profits increase. Households with
high propensity to become business owners see a decrease
in nondurable consumption, consistent with the need to pay
a fixed cost to enter entrepreneurship. Households with low
propensity to become business owners see nondurable
spending increase. We find no impact on measures of
health, education, or women’s decision-making (Duflo & al.,
2009 : 1).

76 Selon certains critiques, ces résultats sont valables dans le


cas de la région de l’Hyderabad au moment où l’expérience a
été menée (validité interne solide) ; mais ne permettent pas
d’éclairer sur l’impact de la microfinance en général (déficit
de validité externe) alors que ce que l’on attend de la
recherche est la production de connaissances non seulement
solides, mais aussi généralisables (Deaton, 2009 ; Rodrik,
2008). La Poverty Action Lab entend remédier à ce déficit
par transposition des mêmes expériences dans des contextes
différents afin de pouvoir produire des modèles théoriques
sur l’impact de la microfinance. Là encore des critiques
s’élèvent pour indiquer que le coût financier nécessaire pour
tester ne serait-ce qu’un seul programme de portée nationale
pourrait bien être prohibitif (Ravallion, 2008).
77 Au-delà de ces questions d’ordre méthodologique, les ESA
soulèvent aussi des questions d’ordre éthique comme
l’exclusion financière prescrite à un groupe d’humains afin
de permettre des comparaisons. Mais après soixante ans de
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théories macroéconomiques stériles dans le champ du


développement, et dont les coûts sociaux sont parfois
désastreux, cette approche microéconomique expérimentale
constitue une innovation qui peut ou pourrait véritablement
se consolider pour éclairer de nouveaux chemins à suivre.
78 Pour ce travail et ses centres d’intérêt, les dimensions
d’analyse fournit par l’outil SPI (cohérence entre mission et
activités) s’avèrent utiles. Il sera limité à la prise en compte
des dimensions que sont le « ciblage des pauvres et des
exclus » et « l’adaptation des services et produits » aux
besoins des populations servies. Mais pour cibler des
pauvres et des exclus grâce à des produits adaptés à leurs
besoins, il est indispensable de connaître les caractéristiques
de ces derniers.

La nécessité de mieux connaître la clientèle des IMF


79 L’« une des principales causes de l’échec du Programme de
promotion du petit crédit rural au Burkina-Faso est liée à
l’incompréhension entre l’institution et les populations
rurales » autour du crédit (Marzin, 2006 ; cité par Somê,
2008 : 51). En effet, tandis que les promoteurs considèrent
le crédit comme un accélérateur de croissance, les clients lui
confèrent une fonction d’équilibre social (cohésion sociale,
gestion de trésorerie) et sont réticents à exercer la pression
sociale attendue des groupes de caution solidaire en vue
d’assurer les remboursements. On peut considérer un tel
échec comme un cas heureux. A l’inverse, lorsque la pression
sociale est associée au harcèlement des agents de crédit, la
microfinance peut occasionner des désastres humains dans
les sociétés qui attachent une grande valeur à l’honneur,
comme c’est, en 2006, le cas des suicides de clientes
surendettées dans l’Etat d’Andra Pradesh en Inde (Fouillet,
2006). Une telle situation révèle que le crédit ne peut rendre
service aux populations que si la politique et les procédures
qui l’accompagnent favorisent une bonne utilisation du
crédit, permettent à ses utilisateurs de sortir du cercle
vicieux de l’endettement (Somê, 2008).
80 Pour que ces politiques et procédures soient adéquates aussi
bien avec les besoins des clients qu’avec les logiques et
valeurs sociales locales, les organisations de microfinance
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doivent connaître et intégrer les caractéristiques socio-


économiques et culturelles des clients. À noter que celles-ci
sont dynamiques et nécessitent une adaptation continue des
services et produits offerts par les IMF à leur clientèle,
adaptation à défaut de laquelle les dérives apparaissent par
rapport aux objectifs sociaux de départ, comme
d’abandonner les pauvres et les plus pauvres. Par ailleurs,
une étude sur le Bangladesh (Meyer, 2001, cité par Somê :
2008 : 56) relève les éléments ci-après comme des freins à
une inclusion financière massive :

la condition maximale d’âge, relativement basse, exclue les


personnes âgées qui sont souvent pauvres ;
les réunions des groupes d’emprunteurs (groupes solidaires)
contraignantes en temps et avec des exigences implicites,
comme par exemple l’habillement minimum requis pour
assister aux réunions ;
le fait que les agents de crédit soient évalués et payés sur la
base des résultats de remboursement. Ces derniers peuvent
décourager la participation des plus pauvres dans la crainte
qu’ils ne rembourseront pas ;
les règles strictes de dépôt et de retrait de l’épargne
notamment de l’épargne obligatoire ou encore les frais de
tenue de comptes ;
les modalités de remboursement des prêts inadaptées. En
revanche, la question du taux d’intérêt ne ressort pas souvent
comme un des facteurs de la non-participation aux
programmes de microcrédit.

81 Une bonne connaissance de la clientèle peut, non seulement


servir à développer des méthodologies appropriées pour
l’auto exclusion subie19, mais aussi favoriser la participation
du plus grand nombre possible de personnes aux
programmes de microfinance.

1.4. Conclusion partielle


82 L’objectif de cette partie était, d’une part, d’élever le concept
d’exclusion à un niveau théorique, et d’autre part, de
comprendre son apport pour les sciences sociales et la
finance en particulier. Le concept d’exclusion désignant un
aspect nouveau des maux sociaux et se situant au carrefour
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de ceux-ci constitue en sciences sociales un outil d’analyse


des conditions de la cohésion. Il donne lieu à divers schémas
d’explications qui rendent compte de sa complexité et de son
emprise sur toutes les sphères de la vie sociale. L’exclusion
concerne en effet des individus et des familles, des hommes
et des femmes, des enfants et des jeunes, et prend source à
partir d’un handicap dans l’accès aux biens matériels ou
valeurs symboliques nécessaires à la bonne vie dans leur
société. Qui parle d’une catégorie d’exclus, l’oppose
consciemment ou inconsciemment à une autre catégorie
d’inclus, et le problème naît du fait que des valeurs
communes sont nécessaires à leur vie normale dans la même
société.
83 Dans le domaine de la finance, loin de décrire des situations
statiques d’accès ou de non-accès à des services financiers en
vigueur dans une société donnée, l’inclusion et l’exclusion
financières sont des phénomènes dynamiques à observer sur
deux niveaux. Au premier niveau, il faut distinguer les
personnes qui passent d’une situation d’inclusion financière
à une situation d’exclusion financière par suite
d’endettement et qui se voient retirer carte bancaire,
chéquier ou cartes de crédit. Au second niveau, se trouvent
les exclus financiers auxquels s’adressent les services
financiers des IMF sous des approches conceptuelles
diverses qui témoignent tant de l’insuffisance de la
connaissance du phénomène que des difficultés à satisfaire
les besoins en la matière. Ce qui invite à examiner comment
se positionnent les IMF face aux besoins d’inclusion
financière dans un contexte socio-économique et culturel
particulier.

Notes
1. Oxford advanced learner’s dictionnary, 1997, 7e édition, p. 507.
2. L’expression révolution conservatrice (au sens moderne), est utilisée
au XXIe siècle pour caractériser la période des années 1980 au cours de
laquelle des chefs d’État hostiles au socialisme et à la taille de l’État sont
élus. Elle est caractérisée en particulier par l’arrivée au pouvoir de
Ronald Reagan aux Etats-Unis et de Margaret Thatcher au Royaume
Uni. On emploie également ce terme pour désigner la révolution
néolibérale.

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3. Signifie un rejet hostile par une collectivité, d’un de ses membres ;


vient du mot grec Ostrakon (coquille, tesson) sur lequel était inscrit le
nom du banni ; Dixel Dictionnaire 2010, Le Robert, p. 1376.
4. Community Reinvestment Act.
5. Comme l’inverse de l’exclusion financière, l’inclusion financière
désigne la capacité des individus à utiliser les instruments financiers et
monétaires en vigueur dans leur société.
6. Théorie selon laquelle si les riches d’une société deviennent plus
riches, cela entraînera des effets bénéfiques pour les plus pauvres, par
exemple par la création d’emplois.
7. Wefariste est communément admis en français comme l’adjectif
dérivé du mot anglais welfare qui signifie l’effort social engagé pour
promouvoir le bien-être matériel et physique des personnes dans le
besoin.
8. On peut citer au Bénin le Programme d’appui aux activités
génératrices de revenu (PAGER) qui forment les microentrepreneurs
ruraux dans la conception et la gestion de leurs projets.
9. Situation dans laquelle les parties signataires d’un contrat n’ont pas le
même accès à l’information. On parle aussi d’information imparfaite
dans une relation « principal-agent » où l’agent possède l’information
manquant au principal.
10. Pendant l’exécution du projet, on parle d’aléa moral ex ante,
traduisant l’irresponsabilité de l’emprunteur ou la possibilité qu’il
détourne les fonds pour d’autres fins. Après l’exécution du projet, même
lorsqu’il aboutit, rien ne garantit que l’emprunteur respecte le contrat,
on parle d’aléa moral ex-post.
11. Mesure qui consiste à n’octroyer au demandeur de crédit qu’une
partie des fonds nécessaires pour réaliser son projet. Les banques et les
organisations de microfinance y voient un certain partage des risques.
12. Social Performance Task Force (SPTF),
http://www.lamicrofinance.org/resource_centers/impactperf/impactperf1.,
consultation 09/06/2009.
13. Voir par exemple 2008, le prix européen de la microfinance
socialement responsable attribué par la plateforme européenne de
microfinance avec l’appui du gouvernement du Luxembourg, à l’IMF
éthiopienne Buusaa Gonofaa. Pour plus d’informations, consulter
http://www.lamicrofinance.org/content/article/detail/23311?
PHPSESSID=8f7de7ff97464ff02365388a764bda48.
14. SPI : Social Performance Indicators ; QAT : Quality Audit Tool, PPI :
Progress out of Poverty Index ; PAT : Poverty Assessment Tool ;
AIMS/SEEP : AIMS (Assessing the impact of Microentreprise Services)
projet / Small Entreprise Education and Promotion (SEEP) Network ;

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GRI (Global reporting initiative) ; FMO : Société néerlandaise pour le


financement du développement.
15. CERISE : Comité d’Echanges, de Réflexions et d’Information sur les
Systèmes d’Epargne-crédit. Plus d’informations en ligne :
http://www.cerise-microfinance.org/spip.php?
page=sommaire&id_rubrique=1.
16. Agence des Etats Unis pour le Développement International
17. Développé à l’Abdul Latif Jameel Poverty Action Lab du
Massassuchets Institute of Technologie.
18. Entretien « Vie des idées » avec Esther Duflo, 5 mai 2009, disponible
en ligne : http://www.laviedesidees.fr/L-economie-du-developpement-
a-l.html.
19. Par opposition à l’auto exclusion active comme les systèmes
d’échanges locaux.

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Référence électronique du chapitre


SOSSA, Théophile. 1. Le concept d’exclusion et sa signification en
finance In : La microfinance au Bénin [en ligne]. Geneva : Graduate
Institute Publications, 2011 (généré le 13 décembre 2020). Disponible
sur Internet : <http://books.openedition.org/iheid/354>. ISBN :
9782940415861. DOI : https://doi.org/10.4000/books.iheid.354.

Référence électronique du livre


SOSSA, Théophile. La microfinance au Bénin. Nouvelle édition [en
ligne]. Geneva : Graduate Institute Publications, 2011 (généré le 13
décembre 2020). Disponible sur Internet :
<http://books.openedition.org/iheid/334>. ISBN : 9782940415861.
DOI : https://doi.org/10.4000/books.iheid.334.
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