Vous êtes sur la page 1sur 28

Exposé sous thème 

« Le ramassage en bourses »

Laboratoire : Justice pénale droit et systèmes comparés encadré par Mr. Jaouhar
Mohamed

Master : Droit des affaires (M1)

Etablissement de rattachement : Facultés des sciences juridiques, économiques et


sociales Ain Chock

Exposé sous l’encadrement de :

Mr. El BELOUI HAMID

Préparé par :

ElFIZAZI ZINEB

Année universitaire : 2022-2023


SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE. Les stratégies de défense préventive

Sous-partie 1. Concentration et stabilité du capital

Sous-partie 2. Le renforcement structurel

DEUXIEME PARTIE. Les stratégies de défense active

Sous-partie 1. La défense financière active

Sous-partie 2. La stratégie du chevalier blanc


Introduction
L’offre publique telle que définie à l’article 2 e la loi n° 26-03, en date du 24 avril 2004,
relative aux offres publiques sur le marché boursier est « la procédure qui permet à une
personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, dénommée l'initiateur, de faire
connaître publiquement qu'elle se propose d'acquérir contre rémunération en numéraire les
titres donnant accès au capital social ou aux droits de vote d'une société dont les titres sont
inscrits à la cote. »1

D’après cette définition, il ressort que l’offre publique d’achat est un engagement unilatéral,
irrévocable et public d’acquérir les titres donnant accès au capital d’une société cotée en
bourse2.

L'objectif d'une OPA est donc la prise de contrôle par une société ou une
personne physique d'une autre société. L'OPA peut s'inscrire notamment
dans un but de fusion, de restructuration ou encore de concentration
verticale ou horizontale.

Une OPA se pratique sur une société faisant appel public à l'épargne. En effet, l'opération
consiste pour le cessionnaire, à racheter les titres cotés en bourse de la société cible.
L'initiateur de l'opération se propose, par toutes voies de presse et de publicité, de racheter
aux actionnaires de la société concernée tout ou partie des titres qu'ils détiennent
généralement à un cours supérieur à celui du marché et pendant un délai déterminé. C’est
l’achat d’actions qui permettra au cessionnaire d’avoir la majorité à l’assemblée des
actionnaires et donc de contrôler la société cible.

« Il existe deux types d’OPA : celles qui sont sollicitées et celles qui ne le sont pas.

 Lors d’une OPA amicale (sollicitée), l’initiateur de l’OPA (le prédateur) et sa cible


sont convenus du rapprochement et ont passé un accord.

1
Art 2 de la loi 26-03 relative aux offres publiques sur le marché boursier
2
Casablancacity, « les offres publiques », 2009, disponible sur : https://jurismaroc.vraiforum.com/t612-Les-
offres-publiques.htm consulté le 23/12/2022

1
 Lors d’une OPA hostile (non sollicitée), la cible refuse l'offre d'achat et construit une
stratégie de défense pour que la tentative de rachat échoue. »3

« Historiquement, l'OPA est née aux Etats-Unis. Ce pays est à l'avant-garde du capitalisme,
que l'on qualifie généralement de sauvage, dont la doctrine économique permet aux
spéculateurs d'opérer des assauts sur des concurrents. C'est pourquoi les offres publiques
inamicales (OPI) se sont considérablement développées outre-Atlantique.

De même, ces techniques ont fortement influencé la Grande-Bretagne alors que la France,
l'Allemagne et le Japon ne semblaient pas se laisser tenter par l'aventure.

En revanche, pays où les OPA sont monnaie courante, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne
ont su développer parallèlement des techniques visant à contrer les OPI tandis que les autres
pays occidentaux adoptaient une législation sur les OPA sans pour autant prévoir de garanties
de défense aux sociétés cible.

Ainsi, pour la France, les OPA sont-elles apparues ponctuellement sur le marché boursier
dans les années 1960. Elles ont cru petit à petit sans toutefois atteindre le rythme connu outre-
manche ou bien outre-Atlantique.

La première OPA sur une société a été réalisée en 1964. A cette époque, aucune règle
juridique n'existait pour encadrer l'opération. Il s'agissait d'un simple et pur ramassage en
bourse ; désormais la loi du 24 juillet 1966 a établi les conditions nécessaires à la réalisation
d'une OPA en toute franchise et les autorités boursières ont également édicté des règlements
afin de défendre les actionnaires contre les manœuvres des uns et des autres tandis que les
sociétés, pour leur part, cherchaient à se prémunir contre les agressions.

Les OPA se sont faites rares jusqu'en 1985 date à laquelle la bourse a connu une vague
d'hostilités qui a poussé les autorités à autoriser les sociétés cibles à parer les attaques
belliqueuses (pour l'année 1985 : 11 OPA ; 1986 : 12 ; 1987 : 12). Le krach boursier de 1987
a considérablement favorisé les OPA hostiles, une trentaine ont été comptabilisées pour
l'année 1988 et ont conduit la Commission des Opérations de Bourse (COB) à adopter le

3
Bouluze Léa, « OPA : définition d’une offre publique d’achat », 2020, disponible sur :
https://www.capital.fr/entreprises-marches/offre-publique-achat-1333980#:~:text=Il%20existe%20deux
%20types%20d,et%20ont%20pass%C3%A9%20un%20accord. Consulté le 23/12/2022

2
règlement du 30 septembre 1989 qui clarifie le marché et évite de faire de toute société cotée
une proie. »4

« Au Maroc, avant la Loi n° 26-03 et en l’absence de toute réglementation spécifique, il y eu


trois OPA notables dont deux ont soulevé pour la première fois la question du sort des
minoritaires dans ce genre d’opération et ont donné lieu à la création de l’AMDAM : celle de
la Société Générale sur Eqdom et celle de la CDG sur la BNDE. Il y a eu ensuite l’OPA de la
Banque Commerciale du Maroc sur Wafabank qui n’a pas soulevé de difficulté particulière. »5

« Le déroulement d’une OPA est strictement réglementé par l’AMF, afin de faire respecter
l’égalité de traitement entre les actionnaires.

L’opération, durant laquelle la cotation des titres est suspendue, se déroule en 4 étapes :

1. Dépôt d’un projet de note d’information présentant les caractéristiques de l’offre de


manière exhaustive. L’AMF peut demander des modifications.
2. L’initiateur publie un communiqué reprenant l’essentiel des informations fournies à
l’AMF. Ce projet présente aux investisseurs les caractéristiques de l’offre boursière :
prix d’achat des titres, nombre de titres que l’initiateur souhaite lever, etc.
3. La société cible remet un projet de note d’information à l’AMF.
4. La société cible publie un communiqué clarifiant sa position en réponse à l’offre.

L’AMF contrôle la conformité de l’offre publique aux dispositions législatives et


réglementaires applicables. »6

La procédure de l'OPA est enfermée dans un cercle de règles strictes que le cessionnaire doit
obligatoirement respecter s'il espère voir son offre aboutir. L’exemple favorable est celui des
actionnaires minoritaires. En effet, à l'occasion de la prise de contrôle par le nouvel
actionnaire majoritaire, celui-ci doit leur offrir les mêmes conditions financières de rachat des
actions détenues par ses coassociés minoritaires. Il a alors l'obligation de racheter toutes les
actions qui lui seront proposées7.
4
Olivier de maison rouge, STRATÉGIES DE DÉFENSE EN MATIÈRE D'OPA, 2000-2001, mémoire soutenu
à l’université Clermont 1, en France, disponible sur : https://www.memoireonline.com/03/10/3216/Les-
strategies-de-defense-en-matiere-dOPA.html#fn17 consulté le 23/12/2022
5
Hamid EL BELOUI, recueil des textes de la doctrine sur les groupements d’affaires, 2022, p.58.
6
Bouluze Léa, op.cit.
7
Art 14 de la loi 26-03 sur les offres publiques sur le marché boursier qui dispose : « Une offre publique doit
proposer les mêmes conditions de prix et d’exécution à tous les porteurs de titres de la catégorie sur laquelle
porte l’offre. Toute convention qui a pour effet de créer une inégalité entre les porteurs de titres est nulle et rend

3
Face aux risques d'une prise de contrôle extérieure inamicale, la société attaquée peut s'armer
à son tour, avant ou pendant l'OPA afin de faire échec à l'initiative.

« De nombreuses possibilités se présentent aux dirigeants de société cible afin de contrer les
OPA.

La combinaison de ces moyens de défense reconnus ou parfois hasardeux forme ce que nous
nommerons les stratégies de défense. »8

Les systèmes de défense anti-OPA sont des systèmes de défense adoptés par les actionnaires
et les dirigeants des entreprises afin de limiter les risques d'une prise de contrôle extérieure
non souhaitée.

Après tout ce qu’on vient de voir, il est convenable de poser la question suivante : Quels sont
les différents mécanismes juridiques et financiers dont dispose la société pour faire face
à une OPA ?

La réponse à cette question fera l’objet de notre développement dans un premier temps par les
stratégies de défense préventive (Première partie) et dans un deuxième temps par les stratégies
de défense active (Deuxième partie).

l’offre publique non recevable. »


8
Olivier de maison rouge, op.cit.

4
PREMIERE PARTIE. Les stratégies de défense préventive

« Les défenses préventives consistent à ce que le management de la société potentiellement


cible d’une offre publique inamicale prenne les mesures statutaires nécessaires pour se
protéger. Ces mesures préventives doivent pour autant obéir à certains principes pour ne pas
en contourner l’objectif. Ainsi, lesdites défenses doivent être en parfaite conformité avec
l’intérêt social et ne pas avoir pour seul objectif l’intérêt des dirigeants qui les ont mises en
place. Egalement, le législateur devra interdire les « Défenses absolues », qui auraient pour
seul objectif de contrer une offre publique et de priver les actionnaires de la société de céder
leurs titres à l’initiateur. Ainsi en est-il des clauses d’agrément, qui ne peuvent, en vertu des
dispositions de l’article 15 de la loi 26-03 relative aux offres publiques, être opposées par les
actionnaires de la société cible à l’initiateur d’une offre publique. Les conventions comportant
un engagement de ne pas céder ou ne préservant pas à leurs signataires la liberté de bénéficier
d’une offre publique concurrente sont quant à elles frappées de nullité, en vertu de l’article 16
de la loi n°26-03. »9

« En adoptant une stratégie de défense préventive, la société recherche avant tout à se rendre
moins « opéable » ; pour se faire, elle combat sa fragilité principale à savoir une trop grande
dispersion du capital entre les mains de petits investisseurs. En effet, si un capital réparti entre
de nombreux actionnaires permet à la société de se financer tout en laissant à certains
actionnaires majoritaires le pouvoir qu'ils possédaient auparavant, tout raider peut tenter une
OPA de ramassage sur ce même capital atomisé. »10

Il appartient donc à la société de se forger une armure autour de deux axes : elle doit tout
d'abord s'assurer de la concentration et de la stabilité du capital pour palier tout ramassage
(Sous-partie 1), elle doit ensuite réaliser des changements structurels de nature à se rendre
plus difficile à avaler (Sous-partie 2).

Sous-partie 1. Concentration et stabilité du capital

9
Abdallah Benzekri, « les offres publiques d’acquisition en droit Marocain », Remald,N°10, Novembre-
Décembre 2011, p.36, disponible sur : Article-les-offres-publiques-acquisition-en-droit-marocain.pdf
(benzekrilawfirm.com) consulté le 23/12/2022
10
Olivier de Maison Rouge, op.cit.

5
Ce mécanisme consiste à concentrer une partie du capital entre les mains de quelques
actionnaires fidèles et sincères, qui ne devraient pas, en principe, céder leurs parts à l'initiateur
de l'OPA. L'objectif est, pour les dirigeants, de conserver le pouvoir quelle que soit la forme
de l'actionnariat.11

A. Capital social et droit de vote

 La technique des obligations convertibles en actions

« L’accès au droit de vote est régi par les articles 316 et suivant de la loi n°17-95. Ce contrat
d'émission peut ainsi prévoir que les obligations souscrites seront converties en actions à
l'occasion d'une OPA. Ces nouvelles actions intégrées au capital peuvent renverser la majorité
au profit des anciens dirigeants.

Il existe également des variantes parmi lesquelles les obligations avec bons de souscriptions
d’actions. A cette obligation sont attachés des bons qui donnent droit à leur propriétaire de
souscrire à des actions à émettre par la société dans les conditions et les délais prévus par le
contrat d'émission. Toutefois, les bons sont détachables de l'obligation et peuvent être cédés
séparément. Il convient donc de les placer dans des mains « sûres ». »12

A l'inverse, le contrat d'émission des obligations convertibles peut prévoir qu'en cas de
changement de propriétaire, c'est-à-dire que si l'obligation est cédée à une autre personne, les
délais de souscription des actions seront reconduits.13

Ces titres, placés entre des mains amies, peuvent, les cas échéant, diluer l’agresseur en
rendant vaine sa tentative de prise de contrôle. Le même résultat peut être obtenu par
l’émission de stock-options (option sur achat d’actions, réservant un prix préférentiel aux
cadres dirigeants de la société), de bons de souscription d’actions ou par l’émission de toutes
valeurs mobilières

11
Olivier de Maison Rouge, op.cit.
12
Ibid, p.17.
13
Ibid.

6
qui donnent droit par conversion, échange, remboursement ou présentation d’un bon, à
l’attribution d’actions à tout moment. En cas d’attaque, l’exercice de l’option de souscription
débouche sur une augmentation de capital qui va réduire l’influence de l’assaillant.
Cette défense suppose que les droits de souscription soient accordés à des alliés qui disposent
de liquidités suffisantes pour les exercer en cas de besoin.
Dans le même ordre d’idées, on peut parfaitement mettre en place un emprunt qui pourrait
être remboursable en actions. Dans un groupe de sociétés, une filiale peut émettre un emprunt
convertible en actions de la société mère.
Ces défenses à effet retard sont mises en place dès que la société devient opéable et qu’une
menace se profile à l’horizon, et elles sont activées au moment où la menace se précise.14

 Les titres sans droit de vote

Cette technique éprouvée permet ici encore de favoriser des bailleurs de fonds qui financent la
société sans pour autant influencer la politique de celle-ci car ses détenteurs ne peuvent
participer aux prises de décisions. Ces titres ne seront donc d'aucune utilité pour un éventuel
raider.

C'est le cas tout d'abord pour le certificat d'investissement (CI). Dans ce cas, il existe deux
titres : le CI et le certificat de droit de vote. Le premier représente les droits financiers de
l'investisseur lui donnant droit aux dividendes et au boni de liquidation ; le second représente
le seul droit de vote qui est un droit politique au sein de la société. Seul un quart du capital
peut faire l'objet de certificats.

Le CI peut donner droit à des dividendes prioritaires et/ou à des dividendes plus élevés que
pour l'action « simple ». Cela permet d'attirer des investisseurs sans interférer sur le
fonctionnement politique de la société.

Toutefois, comme moyen anti-OPA, le procédé est un peu limité : une société ne pouvant
émettre plus du quart de son capital sous cette forme, elle ne peut se protéger qu'à cette
hauteur sous cette forme. Encore faut-il donc combiner ce moyen avec d'autres techniques.

Les observateurs ont nommé ces titres « capital muet ». C'est effectivement le cas.15

14
Hamid El Beloui, op.cit, p.90.
15
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.8.

7
Les statuts peuvent limiter le nombre des voix dont chaque actionnaire dispose dans les
assemblées, sous la condition que cette limitation soit imposée à toutes les actions, sans
distinction de catégorie, autres que les actions à dividende prioritaire sans droit de vote
(article 260 de la Loi n° 17-95). Le plafond de voix est librement fixé. La limitation peut
porter sur un nombre déterminé de voix (10, 50, 100, 1 000) ou sur un pourcentage déterminé
du nombre total des droits de vote (6% chez Danone, Lafarge et Total, 8% chez Alcatel).
Puisque cette limitation doit s’appliquer à tous les actionnaires, les actions détenues par le
groupe contrôlaire doivent être dispersées sur un nombre suffisant de personnes pour ne pas
être affecté lui-même par la limitation16.

 L’aménagement du droit de vote

« Ce mécanisme consiste en l’aggravation des conditions de quorum et de majorité (article


114 de la Loi n° 17-95) : Les règles de quorum et de majorité prévues par la loi n’établissent
qu’un minimum légal pouvant être augmenté par les statuts. Cette aggravation rend plus
difficile une prise de contrôle inamicale puisque l’assaillant aura du mal à atteindre les seuils
statutaires. »17
 Le droit de vote double

« Droit de vote double (alinéa 2 de l’article 257 de la Loi n° 17-95) : Il peut être institué au profit des
actionnaires qui justifient d’une inscription nominative pendant au moins deux ans. Cette durée doit
patienter augmentée sans limitation dans les statuts de sorte que l’assaillant doit patienter longtemps avant
de profiter lui-même de ce droit. En attendant, et pour contrer l’effet multiplicateur du droit de vote double,
il doit acheter davantage de titres pour avoir le contrôle de la société. C’est une précaution nécessaire pour
toute société qui s’introduit en bourse et dont le capital n’est pas verrouillé. » 18

B. Stabilisation et fidélisation du capital

 Déclaration de Franchissement de seuil

« Pour des considérations de transparence du capital des sociétés cotées en bourse, les articles
97 et 98 de la loi 19-14 sur la bourse imposent aux actionnaires de ces sociétés de déclarer
l’acquisition ou la cession de participation significatives et d’informer le public de leurs
intentions à l’égard de la société cible. »19

16
Mohamed El Mernissi, « Traité marocain de droit des sociétés », LexisNexis, 2019, p.1102.
17
Ibid, p.1103.
18
Ibid, p.1102.
19
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.776.

8
« Les franchissements de seuils sont des dispositifs d’alerte permettant essentiellement à
l’entreprise d’avoir une bonne image de son actionnariat. Les obligations de déclaration de
franchissement de seuils permettent ainsi de détecter une prise de contrôle rampante de l’un
des actionnaires. Cependant, ces dispositifs d’alerte peuvent se retourner facilement contre
l’actionnariat qui franchira certains seuils, en défendant la société contre une montée
inquiétante d’un ou de plusieurs actionnaires. »20

Lors d'un franchissement de seuil, l'actionnaire concerné doit se faire connaître et également
faire connaître ses intentions.

la déclaration de l'actionnaire permet à la société de connaître l'actionnaire devenu hostile , et


révéler le ramassage en bourse ou les acquisitions, qui sans cette déclaration, seraient restées
occultes.21 Il donne une information non négligeable sur l'acheteur qui aurait voulu avancer à
visage découvert. Il donne en outre une meilleure connaissance de l'évolution de
l'actionnariat.

L’absence de déclaration est sanctionnée par la privation du droit de vote des actions qui
excédent le seuil statutaire.22

 L’identification de l’actionnariat

Connaître ses actionnaires principaux est d'une importance cruciale pour une société et ses
dirigeants, notamment afin de détecter les éventuels ramassages en Bourse.

Le procédé consiste, pour la société cotée, à insérer dans leurs statuts une clause selon
laquelle les actions émises doivent obligatoirement revêtir la forme nominative.23

À cet effet, il est possible de mettre au nominatif toutes les actions ou seulement les actions
des actionnaires qui dépassent un certain seuil de capital ou de droits de vote. Ainsi, la société
peut surveiller l’évolution de son actionnariat pour déceler les acquisitions suspectes(s).24

 Fidélisation de l’actionnariat

20
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.21.
21
Hamid El Beloui, op.cit, p.82.
22
Ibid, p.82.
23
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.22.
24
Mohamed El Mernissi, op.cit, p1100.

9
« En fidélisant ses actionnaires, la société stabilise son capital, crée une relation de confiance
avec ses investisseurs qui se montreront moins sensibles aux sirènes des investisseurs.

Pour se faire, la société doit instaurer une forme de climat détendu au sein de la société. Outre
les actions à droit de vote double qui est une forme de fidélisation et de récompense pour les
actionnaires les plus méritants, la société aura tout intérêt à développer à l'égard de tous ses
actionnaires une politique de large information, de distribution généreuse de dividendes et
d'actions gratuites de nature à mettre son actionnariat en confiance. De même, elle trouvera
son intérêt à faciliter les blocs d'actionnaires qui pourront faire échec aux tentatives de prise
de contrôle intempestives.

La large information passe notamment par la mise au courant des développements de la


société, par la mise en place d'une politique d'information étendue et surtout appropriée. Cette
information spécifique doit également être continue, rapide et stratégique. Elle ne doit pas être
mensongère. La sincérité des dirigeants est au contraire un gage de confiance mutuelle.

La société peut également envisager de faire une place aux « petits actionnaires » au sein du
Conseil d'Administration ainsi qu'aux salariés actionnaires. »25

 La constitution de blocs d’actionnaires

« Pour parvenir à une meilleure cohésion des actionnaires, la société trouve son intérêt en
favorisant la constitution d'associations d'actionnaires. Selon les cas, ces associations seront
des blocs, des pactes, des noyaux stables ou encore des noyaux durs.

Ainsi, cette association devra-t-elle regrouper les principaux actionnaires de la société qui,
opposant leur refus, empêcherait tout raider de prendre le contrôle de la société, ne pouvant
atteindre la majorité requise des actions.

Ces mêmes actionnaires doivent également prévoir entre eux des pactes aux termes desquels
ils se reconnaissent un droit de préemption avec option d'achat en cas de décision de vente de
leurs titres par l'un d'eux

25
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.23.

10
Selon cette convention, l'actionnaire qui désire vendre ses titres s'engage à ne pas vendre ses
titres à des tiers sans avoir au préalable proposé à ses cocontractants de les acquérir à égalité
de prix et similitudes de conditions. »26

Sous-partie 2. Le renforcement structurel

Pour se renforcer structurellement, une société peut agir sur deux tableaux : en premier lieu,
sur le choix de sa forme (A), en second lieu, sur le fonctionnement interne de celle-ci (B).

A- La restructuration de la société

La société peut alors tout aussi bien choisir de changer de forme sociale mais également opter
pour une autre démarche à savoir absorber elle-même d'autres sociétés afin de ne pas se voir
elle-même absorbée à son tour.

 Société en commandite par action (SCA)

« Cette mesure anti-OPA est très certainement la plus efficace en ce qu'elle permet d'opérer
une dissociation entre détention du capital et exercice du pouvoir.

La société en commandite par actions est une société par actions. Elle comporte trois organes
d'origine légale : les commanditaires, qui sont les actionnaires, les commandités, désignés par
les statuts et le gérant.

Les commanditaires n'assument les pertes que dans la limite de leurs apports ; ils sont
vocation à recevoir des dividendes, droit financier également étendu aux réserves et au boni
de liquidation. Ils sont exclus de la gestion de la société. Un commanditaire ne peut être
gérant. Ici réside l'intérêt de la SCA comme arme anti-OPA.

Cette forme de société permet :

- La dissociation structurelle entre le pouvoir de gestion détenu par les commandités et


le capital détenu par les commanditaires ;
- De cantonner l’assaillant dans le statut de simple commanditaire puisque seules les
actions des commanditaires sont négociables ; celles appartenant aux commandités ne
peuvent être cédées qu’avec le consentement de tous les actionnaires ou, si les statuts

26
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.24.

11
le prévoient, avec le consentement de tous les commandités et de la majorité en
nombre et en’ capital des commanditaires (dernier tiret de l’article 27 de la Loi n° 5-
96) ;
- D’empêcher l’assaillant d’être gérant dans la mesure où cette fonction est l’apanage
des commandités et qu’il est presque impossible à un assaillant d’être commandité ;
- La quasi-irrévocabilité des gérants par le jeu des dispositions statutaires imposant des
majorités très élevées pour la révocation, voire même l’unanimité (alinéa 3 de l’article
32 de la Loi n° 5-96). Il est possible d’être gérant à vie et même d’organiser une
gérance héréditaire dans les groupes familiaux, sous réserve du droit donné à tout
actionnaire de demander en justice la révocation du ou des gérants pour cause légitime
(alinéa 4 de l’article 32 de la Loi n° 5-96). Si le gérant est une personne morale, les
statuts peuvent prévoir une clause de révocation ou même d’exclusion en cas de
changement de contrôle.

De grands groupes français se sont transformés en commandite par actions : Hermès, Yves
Saint Laurent, Eurodisney, Pinault, Castorama.

Au Maroc, la seule SCA cotée en bourse actuellement est la société Mutandis SCA.

Lorsque l’assemblée générale extraordinaire est convoquée pour décider la transformation en


société en commandite, l’AMMC peut imposer le dépôt d’une offre publique de retrait aux
personnes détenant seules ou de concert 66 % des droits de vote si cette offre est demandée
par les actionnaires minoritaires. »27

 La composition d’une holding non cotée

« Les principaux actionnaires d'une société cotée peuvent être tentés d'en organiser le contrôle
et de le conserver par le biais de holdings non cotées.

Il est même possible d'imaginer toute une pyramide de holdings qui auront l'avantage de
permettre l'association de nouveaux investisseurs à chaque étage tout en accroissant l'effet de
levier financier.

Ainsi le contrôle du holding de tête contrôlant lui-même des holdings subordonnés permet de
garder la possession majoritaire de la société cotée avec un minimum de capital.

27
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.1100 -1101.

12
En cas de lancement d'une OPA, le coût financier d'une stratégie de défense fondée sur une
augmentation de capital réservée sera ainsi partagé entre les différents holdings.

Cependant, une telle structure, pour être pleinement efficace, ne peut être envisageable que
dans des hypothèses de concentration du capital social d'une société cotée qui serait détenue
en majorité par les membres d'une même famille ou d'un même groupe.

Si cette méthode présente de nombreux avantages, elle n'est pas non plus sans présenter des
inconvénients.

Tout d'abord, en cas de holding contrôlant plusieurs sociétés cotées, il conviendra de s'assurer
que leur gestion sera bien conforme à leur intérêt social propre.

Ensuite, il est bien clair que les actionnaires du ou des holdings non cotés risquent d'apparaître
comme prisonniers de leurs titres dans la mesure où leur négociation en est rendue plus
difficile, les conditions de cession pouvant être de surcroît restreintes par des clauses
statutaires particulièrement rigides. »28

 Les participations réciproques ou croisées

« Elles permettent à une société d’assurer son propre contrôle à travers une ou plusieurs
sociétés qu’elle contrôle directement ou indirectement. Les actions de la société sont détenues
par ses filiales et ses sous filiales ; ces actions sont dites actions d’autocontrôle.
Au sens de la Loi n° 26-03 sur les offres publiques (art. 57), les participations d’autocontrôle
sont celles détenues, directement ou indirectement, par la société cible dans le capital de la
société qui la contrôle au sens de l’article 144 de la loi 17-95.
C’est une arme redoutable contre les agressions d’autant plus qu’elles ne sont pas
réglementées. Elles ont pour effet de rendre les sociétés alliées interdépendantes et
autocontrôlées.
Si la société fait l’objet d’une OPA, elle ne peut pas pendant la durée de l’offre, accroître ses
participations d’autocontrôle (article 57 de la Loi n° 26-03 déjà analysée ci-dessus). »29

 L’absorption d’autres sociétés

28
Olivier de Maison Rouge
29
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.1104.

13
L'absorption de filiales cotées ou non peut accroître considérablement la taille boursière de la
société et rendre ainsi toute OPA plus onéreuse. Le but ici recherché est donc de « grossir
pour être plus difficile à croquer ou à digérer ».30

Cette stratégie suppose que la société cible potentielle exerce son activité dans un secteur à
forte concentration. Cette société peut acquérir une entreprise du même secteur, de sorte que
si l’assaillant est une société concurrente, sa tentative sera vouée à l’échec dans la mesure où
il risque de se trouver dans une position dominante sur le marché31.

B- Le renforcement du fonctionnement de la société

Si, pour contrecarrer les plans d'un raider, il convient de s'assurer de la fidélité des
actionnaires, ceux-ci, et notamment les plus gros, c'est-à-dire ceux qui désirent conserver la
majorité sans pour autant prendre les rênes de la société, doivent soutenir les dirigeants.

 L’accès au conseil d’administration

« Les statuts de la société « opéable » peuvent encore fortifier les conseils d'administration et
assurer la sécurité de leurs membres par diverses dispositions relatives aux conditions de
renouvellement des conseils, à leurs conditions de fonctionnement ou encore aux modes de
révocation des administrateurs.

L'objectif avoué est de verrouiller l'exécutif de la société. De la sorte, un raider aura plus de
mal à prendre le contrôle de la société s'il lui faut franchir d'autres barrières juridiques
internes à la société dont il a pourtant la majorité à l'assemblée des actionnaires.

En premier lieu, afin de rendre plus difficile les changements dans la composition du conseil
d'administration, les statuts d'une société cible peuvent exiger que, pour être valablement
désignés, les administrateurs doivent justifier d'une compétence ou d'une qualité particulière
(diplôme ou ancienneté dans la profession).

Dans le même esprit, les statuts peuvent envisager d'imposer des conditions particulières
d'éligibilité plus draconiennes encore aggravant les règles relatives au cumul des mandats ou à
l'obligation de non concurrence. Ces mesures peuvent instaurer un régime d'interdiction visant

30
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.23.
31
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.1107.

14
la nomination d'un administrateur par ailleurs actionnaire, salarié ou dirigeant d'une société
concurrente.

En second lieu, certains auteurs s'accordent à penser qu'une société peut instaurer une
procédure d'agrément pour la nomination d'un membre du conseil d'administration.

Dans un tel cadre, un candidat au conseil d'administration doit donc correspondre en tous
points aux exigences érigées par la société. Cette procédure serait admise à condition toutefois
qu'elle ne supprime pas toute liberté de choix dans la composition des organes de la société.

A cette condition sine qua non, la jurisprudence semble favorable à ces clauses relatives aux
nominations des administrateurs. Elle affirme qui plus est qu'une telle rédaction des statuts
assure un équilibre au sein des conseils d'administration entre les différentes catégories
d'apporteurs de capitaux (notamment les minoritaires).

En revanche, outre la liberté de choix évoquée plus haut, une telle clause ne doit pas non plus
porter atteinte à la révocation ad nutum des dirigeants.

En outre, à la condition expresse que leur accord soit reproduit dans les statuts, les
actionnaires alliés auront intérêt à prévoir ainsi une répartition catégorielle des sièges,
destinée à interdire à une nouvelle majorité d'occuper à elle seule l'ensemble des fauteuils.

Un renversement de majorité sera encore retardé grâce à un échelonnement des mandats.

Il existe enfin le cas des pactes extrastatutaires. Dans un tel cas, les actionnaires s'entendent
pour faire entrer une personne déterminée dans le conseil d'administration. Il y véritablement
collusion. Dans la pratique, ils s'avèrent prendre la forme de pactes d'actionnaires. Or la licéité
semble douteuse à première vue car elle s'oppose à la liberté du droit de vote, principe d'ordre
public. »32

 Contrôle de l’administration de la société

« Des clauses statutaires peuvent subordonner l’accès au conseil d’administration à des


conditions particulières (ancienneté, obligation de non concurrence, cumul de mandats,
nationalité) ou organiser une affectation des sièges à des groupes d’actionnaires ou à des
catégories d’actions. Ces clauses peuvent aboutir à écarter l’assaillant de l’administration de
32
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.36.

15
la société ou, à tout le moins, à l’empêcher d’avoir la majorité au conseil grâce à une
répartition catégorielle des sièges.

Les statuts peuvent exiger une majorité qualifiée pour la prise de décision au sein du conseil
et que l’assaillant aurait du mal à obtenir. Pour se protéger d’une révocation intempestive, les
dirigeants peuvent bénéficier de clauses de sortie, appelées « golden parachutes », stipulant
des indemnités de départ importantes qui peuvent donner à réfléchir à l’assaillant. Encore
faut-il que les montants prévus ne soient pas de nature à faire échec au principe de la
révocation ad nutum (de manière immédiate, sans formalités) des administrateurs qui est
d’ordre public. »33

 Les restrictions à la cessibilité des titres

Même si dans une société anonyme le principe est la libre négociabilité des titres, il est
toutefois possible de limiter statutairement ou conventionnellement leur cessibilité. Ces
clauses ont généralement pour but d’empêcher un tiers indésirable, tel un concurrent, de
s’introduire dans le capital de la société afin d’éviter une modification du pouvoir. Nous
voyons donc toute leur importance dans le contexte d’une O.P.A. hostile.

Le Code des sociétés prévoit trois types de clauses: les clauses d’inaliénabilité, les clauses
d’agrément et les clauses de préemption.

- Les clauses d’inaliénabilité

Il s’agit de la conclusion d’un accord statutaire ou conventionnel entre les actionnaires d’une
société en vertu duquel ceux-ci s’engagent à ne pas céder leurs titres pendant une période
donnée. L’interdiction peut être générale ou viser les cessions à certaines personnes
déterminées, tels des concurrents de la société. Ce type de clause peut constituer une mesure
de défense utile dans la mesure où les actionnaires qui y sont soumis ne pourront céder leurs
titres, ni dans le cadre d’une O.P.A. volontaires ni, selon certains auteurs en cas d’O.P.A.
obligatoire.

- Le droit d’agrément et le droit de préemption sont des limites à la cessibilité des titres
d’une société. Le droit d’agrément demande à ce qu’avant que les titres ne soient
cédés, le cédant obtienne l’agrément des actionnaires pour pouvoir aliéner ses titres.
Le droit de préemption quant à lui exige de l’actionnaire cédant d’offrir en premier

33
Hamid El Beloui, op.cit, p.85.

16
lieu la possibilité pour les autres actionnaires d’acquérir les titres cédés. Ceux-ci ne
sont opposables aux tiers que s’ils sont statutaires ou connus de l’acquéreur s’ils sont
conclus sous seing privés

 Pacte d’actionnaire

« Ces pactes sont d’une grande diversité, Ainsi, il est fréquent de trouver, dans les pactes
d’actionnaires, des clauses de préférence, de sortie conjointe ou encore d’agrément. On peut y
lire également des clauses sur le contrôle de la société et sur l’organisation de ce contrôle.

En effet, tous les pactes d’actionnaires sont pourvus d’une dimension politique, c’est-à-dire,
d’une politique que les parties au pacte souhaitent adopter à l’égard de la société. Il s’agit
notamment d’une politique de prise de contrôle, d’exercice de contrôle ou de défense du
contrôle. Les actionnaires vont mettre en place une politique commune de défense contre les
offres publiques hostiles. La notion de concert est alors indissociable des pactes d’actionnaires
dans la mesure où, pour agir de concert, les parties s’appuient sur des pactes. Ce sont ainsi des
pactes de mise en concert utilisés par des actionnaires de la société qui se mettent d’accord en
vue de prendre le contrôle de la société ou encore pour se défendre d’une prise de contrôle
interne. Ces objectifs sont mis en œuvre par le ramassage des actions de la société cotée afin
d’augmenter la participation dans le capital de la société lorsque les concertistes ont
l’intention d’en prendre le contrôle. Lorsque le concert est mis en œuvre pour protéger la
société visée contre une prise de contrôle et donc dans l’optique d’une défense, les
actionnaires vont également augmenter leur participation dans le capital de la société ou
encore constituer une holding afin de mettre à l’abri un bloc majoritaire d’actions donnant
accès au capital ou au droit de vote. Malgré les différentes finalités des concerts, elles ont
toutes pour effet ultime de déclencher des franchissements de seuils. »34

 Les poisons pills

« Les poison pills, littéralement « pilules empoisonnées » sont une série de mesure qui font
perdre à la société toute sa substance en cas d'OPA.

34
Barbey, Eloise, « les défenses Anti -OPA en droit français et en droit Américain des affaires », université
Panthéon-Assas-2016.

17
Le procédé consiste à consentir à un tiers une option sur les actifs les plus intéressants de la
société ou à permettre audit tiers de rompre brutalement une relation contractuelle continue et
essentielle pour la société.

Potentiellement vidée de sa substance, la société n'a plus d'intérêt pour l'assaillant.

Cette stratégie est née aux Etats-Unis où elle est fréquente. En France, elle se rencontre peu
car la COB jette un regard défavorable sur ce moyen anti-OPA.

Toutefois, il n'est pas rare que de nombreux contrats commerciaux ou financiers marqués par
un fort intuitu personae contiennent une clause de changement de contrôle selon laquelle le
cédant ou le créancier sont en mesure de mettre fin par anticipation au contrat si le
cessionnaire ou le débiteur viennent à passer sous le contrôle d'un tiers.

Une clause de ce genre se rencontre notamment dans des contrats commerciaux tels que la
cession de licence de marque ou l'octroi de licence d'exploitation de brevet ou dans les
contrats de prêt. Ainsi, en cas d'OPA, entraînant un changement de contrôle du breveté ou du
licencié, le donneur de licence peut procéder à la résiliation anticipée du contrat ou à tout le
moins se réserver un droit d'agrément ; de la sorte, l'initiateur de l'OPA sur le licencié sera
dans l'incertitude quant à la possibilité de continuer à exploiter ladite licence de brevet ou de
marque, ce qui est un facteur évident de dissuasion.

De même, il n'est pas rare de rencontrer une telle clause dans les contrats de prêt. Il peut en
effet être stipulé que le changement de contrôle affectant la société débitrice constituera un
cas de remboursement anticipé.

Aussi, malgré l'avis de la COB, ces mesures peuvent être incluses dans une stratégie de
défense anti-OPA si le public en est informé avant toute offre et si elles s'appliquent à une
réalité industrielle.

 Ainsi, en cas de changement de contrôle, il pourrait être prévu :

- prêt à rembourser intégralement ;

- fin de collaboration ou de partenariat avec une autre société ;

- fin d'exploitation de brevet ;

18
- fin du soutien d'une banque « amie » ;

- fin d'un contrat essentiel ;

- vente d'une filiale. »35

DEUXIEME PARTIE. Stratégies de défense active

La contre-attaque est difficile pour la société une fois l’OPA est déclenchée. Il faut pour s’y
lancer, avoir une grande capacité stratégique. La guerre ouverte entre deux sociétés peut être
sans pitié.

« Si l'OPA est lancée sur la société cible, il faut en conclure à un échec de la stratégie de
défense préventive »36. Tous les plans adoptés par la société tombent donc à l’eau. « Les
dirigeants de la société doivent entreprendre de mettre en place une nouvelle stratégie de
défense active.»37

L'objectif est de contre-attaquer l'initiateur de l'OPA ; les stratégies de défense préventive ne


sont plus utiles. Donc, il est nécessaire d'envisager des moyens plus féroces.

En cours d'OPA, il existe parallèlement deux types d'intérêts au sein de la société cible : en
premier lieu l'intérêt des dirigeants qui exprime la volonté des actionnaires majoritaires ou
leur propre intérêt, désirant à tout prix conserver leurs avantages, leur indépendance, leurs
salaires... et l'intérêt social incarné par les actionnaires minoritaires et les salariés de
l'entreprise38. On s’intéressera uniquement à l’étude des défenses émanant des dirigeants. Pour
se faire, on traitera la défense financière active dans une première sous-partie (Sous-partie 1)
et la stratégie du chevalier blanc dans une deuxième sous-partie (Sous-partie 2).

Sous-partie 1. La défense financière active

 La contre-OPA

Cette stratégie de défense est soumise à certaines conditions pour sa réalisation. Elle est
également appelée offre concurrente ; elle est considérée comme une contre-offensive. Cette

35
Olivier de Maison Rouge, op.cit, p.38.
36
Ibid.
37
Ibid.
38
Olivier de Maison Rouge, op.cit.

19
stratégie de défense puise ses origines aux Etats-Unis, où elle est dénommée Pac-Man. « Elle
consiste, pour la société cible, à lancer à son tour une OPA sur l'initiateur de l'OPA.

Elle doit donc répondre aux mêmes conditions et se voir appliquer la même procédure. »

Cette offre nouvelle peut faire échouer l'offre initiale, le nouvel offrant cherche à prendre lui-
même le contrôle de la société ou plus simplement à contraindre le cessionnaire initial à
surenchérir.

Le problème majeur que soulève l'offre concurrente est celui du financement. Le succès de
cette stratégie dépend du pouvoir financier, de la société cible, d'acheter suffisamment
d'actions de la société acquéreuse pour constituer une menace crédible.

Les dirigeants de la société cible doivent chercher des capitaux auprès d'alliés capables de leur
prêter les fonds nécessaires pour appliquer la contre-OPA. Ceci implique que les initiateurs
doivent être eux-mêmes « éligibles ».

En outre, ces batailles boursières vont s’enchainer et chaque société va se voir tenue envers
une autre. Très affaibli, le vainqueur, quel qu'il soit, sera contraint de vendre des actifs.

De tels risques expliquent que nombre de batailles boursières se terminent sur un accord afin
de mettre fin à celles-ci.

 Le rachat par la société cible de ses propres actions

« Bien qu'en principe l'achat par une société de ses propres actions soit interdit, il existe
certains cas où cela est possible sans que la société soit tenue d'annuler les actions ainsi
acquises. Il s'agit des achats réalisés pour attribuer des actions aux salariés ou pour régulariser
le cours de la Bourse. »39

« La société peut utiliser ses fonds sociaux pour racheter ses propres actions. Cette opération
peut avoir deux effets :

- Si les achats sont suffisamment importants, le contrôle de la société sera verrouillé


puisque la masse des actions disponibles sur le marché (flottant) pouvant être acheté
par l’assaillant se trouve diminué ;

39
Olivier de maison rouge, op.cit

20
- Un rachat plus ou moins massif sera de nature à générer une hausse des cours rendant
plus onéreuse toute tentative de prise de contrôle. »40

« La société pourra opérer directement ou par l'intermédiaire d'autres sociétés de son groupe.
Toutefois, la loi ne permet ce genre d'opérations que dans deux cas:

- En cas de réduction de capital non motivée par des pertes, la société peut racheter ses
actions en vue de les annuler41 ;
- La société dont les actions sont cotées peut racheter ses actions en vue de favoriser la
liquidité du marché desdites actions ou de les céder, à titre onéreux ou à titre gratuit,
aux salariés ou aux dirigeants de la société. Cette opération est soumise à l'autorisation
de l'assemblée générale ordinaire 42
ne peut dépasser un pourcentage du capital fixé
par voie réglementaire.43 Les actions rachetées ne donnent pas droit ni au vote ni aux
dividendes.44

Cependant, pendant la durée d'une offre publique qui se situe entre la date d'ouverture et la
date de clôture de l'offre, la société visée et les personnes agissant de concert avec elle, ne
peuvent intervenir ni directement ni indirectement sur ses propres titres.45 »46

 L’achat d’une autre société

La société peut acheter une autre société pendant l'OPA en vue d’augmenter la valeur
de ses actions. Ce mécanisme renvoie à une stratégie de défense préventive mais celle-
ci voit également son intérêt durant la phase de défense active.

« Au lieu de lancer une défense Pac-Man sur le cessionnaire, la société cible peut
acquérir une autre société dans un secteur concurrent pour faire augmenter sa valeur
boursière. Pour se faire, la société cible engager des capitaux pour pouvoir racheter
cette société tierce rapidement. En effet, la réussite de cette technique de défense
réside dans la rapidité de l'achat de la société tierce et la capacité à le faire savoir. »47

40
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.1105.
41
Art. 280-1, al. 1 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
42
Art. 281, al. 2 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
43
Art. 279, al. 1 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
44
Art. 279, al. 5 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
45
Art. 53 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
46
Mohamed El Mernissi, op.cit, p.1105-1106.
47
Voir dans ce sens le mémoire d’olivier de maison rouge, op.cit.

21
Cependant, si la société cible envisage en amant l'acquisition d'une autre société, cette
opération ne sera pas inutile. Elle permet une concentration nécessaire. En outre, si
l'OPA initiale lancée par le raider réussit, celui-ci peut se voir condamner par les
autorités boursières pour abus de position dominante et encourir les sanctions du
conseil de la concurrence.

 L’augmentation du capital

L’augmenation du capital est une stratégie de défense courante. La décision d'augmenter le


capital revient à l'assemblée générale extraordinaire (AGE) ; mais cette assemblée peut
déléguer aux dirigeants le pouvoir d'augmentation ultérieure si les conditions le permettent et
ont été approuvées par cette même assemblée.

En période d'OPA, l’adoption de la stratégie d'augmentation de capital constitue un moyen de


défense active efficace.

« Dans un tel cas, l'augmentation de capital permet à la société de placer les actions
nouvellement émises entre des mains « fidèles » et ferait échec à la tentative d'OPA initiée par
le cessionnaire. Il faut que cette portion de capital récemment émise soit suffisante pour palier
la tentative de prise de contrôle. L’initiateur devra donc prévoir un coût supplémentaire
d'acquisition de nature à le dissuader. »48

« À travers l'augmentation de capital immédiate ou différée, deux objectifs peuvent être
recherchés :

- Diluer le capital pour rendre l'opération plus difficile et plus coûteuse pour l’initiateur
- Décider une augmentation de capital réservée avec renonciation ou suppression du
droit préférentiel de souscription pour renforcer la position au sein de la société d'un
ou plusieurs actionnaires de référence ou pour permettre l'entrée dans la société d'un
allié et ce pour faire, contrepoids au cessionnaire. »49

« Toutefois, il ne peut être procédé à une augmentation de capital réservée pendant la période
de l'offre publique qui se situe entre la date de publication de l'avis de dépôt à l'AMMC du

48
Olivier de maison rouge, op.cit.
49
Hamid El Beloui, op.cit. p.88.

22
projet de l'offre et la date de publication par l'AMMC de l'avis relatif au résultat de l'offre. 50

»51

Sous-partie 2. La stratégie du chevalier blanc

« Option de dernier recours, le chevalier blanc vient au secours d’une société amie ou alliée
qui est confrontée à une imminente offre publique d’achat hostile. Le chevalier blanc est
principalement bien vu par la direction et les salariés de la société-cible.

Cette stratégie de chevalier blanc repose sur le fait que la société qui, avec l’accord de
la direction de la société cible, essaie d’en prendre le contrôle pour empêcher que
l’OPA hostile n’aboutisse. L’imagerie du chevalier blanc est claire : il vole au secours
de la société cible, il est la solution de dernier recours. En principe, il surenchérit sur
l’offre du premier initiateur, ce qui présente toujours un intérêt pour les actionnaires.
Cette technique de défense est souvent utilisée comme dernier recours face à un
cessionnaire tenace et bien souvent, la société considère que son indépendance ne peut
être maintenue qu’en procédant au transfert d’un large bloc d’actions ayant le droit de
vote au profit de ce « grand frère ».

En droit français, la recherche d’un chevalier blanc est de la compétence exclusive du


conseil d’administration ou de surveillance. Ce transfert s’opère généralement par le
biais d’une émission réservée de nouvelles actions et parfois par la cession d’un bloc
d’actions déjà existantes. »52

Certes, la société cible échappe à la prise de contrôle par un étranger ; toutefois, il s'opère bien
un changement de contrôle au profit de la société amie.

La stratégie du chevalier blanc ne constitue donc pas un moyen de défense efficace car la
société ne conserve plus son autonomie. Autrement dit, si les intentions du chevalier blanc
sont en réalité hostiles, la société cible se trouverait victime d’une OPA.

50
Art 55 de la loi 17-95 sur les sociétés anonymes
51
Hamid El Beloui, op.cit.
52
GIRIBALDI, Virginia, « Les stratégies de défense anti-OPA en droit français et américain des sociétés »,
mémoire soutenu à l’université pantheon-assas - institut de droit comparé, à Paris, en France, 2013-2014, p.89
disponible sur : http://idc.u-paris2.fr/sites/default/files/memoires/memoire_virginia_giribaldi_groak_0.pdf
consulté le 24/12/2022.

23
Conclusion

Face aux OPA, les sociétés cotées peuvent adopter diverses mesures de protection. Une
société menacée doit commencer par se prémunir en renforçant ses positions dans le cadre
d'une défense passive. Une fois la guerre boursière déclarée, il restera à cette société divers
recours, d'efficacité généralement moins que les précédents.

Certes, les dispositifs de défense qui ont été étudiés montrent l’arsenal défensif dont disposent
les sociétés cotées pour contrer toute offre publique d’achat non désirée. Toutefois, la mise en
œuvre d’une défense ne sera jamais un obstacle absolu à une OPA hostile.

24
BIBLIOGRAPHIE

 Ouvrages spéciaux

Mohamed El Mernissi, « Traité marocain de droit des sociétés », LexisNexis, 2019

 Recueil

Hamid EL BELOUI, recueil des textes de la doctrine sur les groupements d’affaires, 2022,
p.58.

 Mémoires

Olivier de maison rouge, STRATÉGIES DE DÉFENSE EN MATIÈRE D'OPA, 2000-2001,


mémoire soutenu à l’université Clermont 1, en France.

GIRIBALDI, Virginia, « Les stratégies de défense anti-OPA en droit français et américain des
sociétés », mémoire soutenu à l’université pantheon-assas - institut de droit comparé, à Paris,
en France, 2013-2014.

Barbey, Eloise, « les défenses Anti -OPA en droit français et en droit Américain des affaires
», mémoire soutenu à l’université Panthéon-Assas-Pais, en France, 2013-2014.

 Articles de revue

Abdallah Benzekri, « les offres publiques d’acquisition en droit Marocain », Remald, N°10,
Novembre-Décembre 2011.

Bouluze Léa, « OPA : définition d’une offre publique d’achat », 2020.

Casablancacity, « les offres publiques ».

 Textes de loi

La loi 26-03 sur aux offres publiques.

La loi 17-95 sur aux sociétés anonymes.

La loi 5-96 sur les sociétés en nom collectif, la société en commandite simple, la société en
commandite par actions, la société à responsabilité limitée et la société en participation.

 Webographie

25
http://idc.u-paris2.fr/sites/default/files/memoires/memoire_virginia_giribaldi_groak_0.pdf
consulté le 23/12/2022.

Article-les-offres-publiques-acquisition-en-droit-marocain.pdf (benzekrilawfirm.com)
consulté le 23/12/2022.

https://www.memoireonline.com/03/10/3216/Les-strategies-de-defense-en-matiere-
dOPA.html#fn17 consulté le 23/12/2022.

https://www.capital.fr/entreprises-marches/offre-publique-achat-1333980#:~:text=Il
%20existe%20deux%20types%20d,et%20ont%20pass%C3%A9%20un%20accord. Consulté
le 23/12/2022.

https://jurismaroc.vraiforum.com/t612-Les-offres-publiques.htm consulté le 23/12/2022.

26

Vous aimerez peut-être aussi