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Basaltes et gabbros 

: deux roches de la croûte océanique


Basaltes et gabbros sont deux roches volcaniques à l'aspect sombre. L'étude de leur
composition chimique montre une similitude entre elles, similitude que l'on retrouve dans leur
composition minéralogique : pyroxènes, plagioclases et olivine.

% masse d'oxydes Basalte océanique Gabbro Péridotite ophiolitique


SiO2 47,1 49 42,3
TiO2 2,3 1,9 0,1
Al2O3 14,2 14,2 0,5
FeO 11 7,3 7,1
MnO 0,2 0,2 0,1
MgO 12,7 7 49,6
CaO 9,9 9,4 0,1
K2O 0,4 1,0 0,005
Na2O 2,2 2,7 0,1

Cependant, l'observation de lames minces révèle une différence


importante dans la structure des deux roches.
Le basalte apparaît constitué de cristaux de taille variable noyés
dans une « pâte » non cristallisée, un verre. Certains cristaux
présentent une forme de baguette de petite taille, les microlites ; le
basalte a une structure microlitique.
Les gabbros révèlent quant à eux une structure entièrement
cristallisée avec des minéraux de grande taille, les phénocristaux.
Les gabbros présentent une structure qualifiée de grenue.

Un modèle de cristallisation des roches utilisant la vanilline permet de


comprendre cette différence de structure. L'expérience de
cristallisation après fusion montre que les cristaux se développent plus
ou moins selon la vitesse de refroidissement. Dans le cas d'un
refroidissement lent, les cristaux formés sont de grande taille, type
phénocristaux. Au contraire, un refroidissement rapide donne
naissance à des cristaux de petite taille, type microlites, accompagnés
d'un verre.

Comme les basaltes et les gabbros ne différent que par la taille de


leurs cristaux, on en déduit que leur origine est commune, et qu'ils
sont issus respectivement d'une cristallisation rapide et d'une
cristallisation lente d'un magma basaltique.

 Une cristallisation fractionnée du magma dans la chambre


magmatique

Le magma issu de la fusion des péridotites est collecté dans la


chambre magmatique. Dans ce réservoir, il va subir une
différenciation chimique liéée à son refroidissement progressif. En
effet, les minéraux ne cristallisent pas à la même température :
ainsi par exemple l'olivine est un minéral de « haute température ». La
formation de ces cristaux d'olivine s'accompagne de leur
sédimentation par gravité au fond de la chambre magmatique, donnant
naissance à des accumulations minérales au fond de celle-ci.

L'observation de séries ophiolitiques, vestiges de lithosphère


océanique charriés sur les continents sous l'effet de mouvements
tectoniques, permet de reconstituer cette cristallisation, qu'elle soit
progressive ou fractionnée, et qui produit olivine, plagioclase et
pyroxène.
Le liquide résiduel, appauvri en certains minéraux ou en éléments
(comme le magnéisum dans le cas de l'olivine), atteint la surface en
fracturant le toit de la chambre comme le montrent les filons sous la
couche de basalte. Contre les parois de la chambre les gabbros vont
cristalliser, alors que la lave épanchée en surface donne naissance au
basalte, au contact de l'eau de mer.

L'essentiel
La croûte océanique est constituée de basaltes
surmontant des gabbros. Ces deux roches de même
composition chimique sont issues d'une
cristallisation fractionnée du magma dans la
chambre magmatique.
Les gabbros se forment par un refroidissement
lent en profondeur, les basaltes par un
refroidissement rapide au contact de l'eau de mer.
Metamorphisme des gabbros
Lors de l'ouverture d'un océan, la croûte océanique s'est créée
(en partie) sous forme de gabbro. Mais au cours de son
existence notre gabbro va évoluer à cause de variations de
température et/ou de pression. 
:
 

 
Rappellons que le gabbro est une roche qui se
forme au niveau des dorsales océaniques et qui
compose une bonne partie de la croûte
océanique (C.O.). Les conditions de formation
sont  donc hautes températures mais basses
pressions, d'où un refroidissement lent et donc
une cristallisation assez lente. Les minéraux
formés caractéristiques du gabbro sont le
plagioclase et le pyroxène. Voilà à peu près la
tête de notre gabbro à sa naissance :
 

Gabbro :
Pyroxène + Plagioclase

Mais notre C.O. à laquelle appartient notre gabbro s'éloigne au cours du temps de sa dorsale
natale. Et au fur et à mesure, les péridotites sous-jacentes vont s'accrocher à notre C.O., et sa
densité va augmenter. Et lorsque cette densité sera trop élevée, la croûte va s'enfoncer sous
une autre : c'est la subduction, dont d'autres marqueurs sont le prisme d'accrétion (voir le
schéma ci-dessous), les séismes, ou du volcanisme :
 
La subduction
 
 
Et durant tout le temps où la C.O. vieillit, le gabbro, qui se trouve depuis longtemps sous
l'eau, va subir une première transfomation : certains pyroxènes et plagioclases, sous l'effet de
cette eau, vont donner de l'hornblende puis des chlorites et des actinotes. C'est de
l'hydrotermalisme qui change notre gabbro en schiste vert (puisque chlorites et actinotes sont
des minéraux plutôt verts). A ce moment-là, voici la tête de notre gabbro, devenu un
métagabbro :

              Gabbro :                                                                             Métagabbro
schiste vert :
Pyroxène + Plagioclase + H2O  =>   Hornblende  =>   Pyroxène + Plagioclase +
Chlorite + Actinote
Donc avant même le début de la subduction, notre gabbro a déjà été un peu changé. Et ensuite
ça va être encore pire puisque la subduction va encore maltraiter le gabbro. D'abord, le fait de
s'enfoncer va provoquer une augmentation de la pression subie par le gabbro. Heuresement
pour lui, la température reste basse car le phénomène est "tellement" rapide, que la C.O. qui
s'enfonce n'a pas le temps de se réchauffer. Et sous l'action de ces hautes pressions et des
basses températures, les différents minéraux déjà présents vont former de la glaucophane, de
la jadéite et de l'eau. Le gabbro/schiste vert devient du schiste bleu (la glaucophane est un
minéral bleu qui se place autour des pyroxènes et on ne voit qu'un fin trait foncé à l'oeil nu) :

                  Métagabbro schiste vert :                                          Métagabbro


schiste bleu :  
Pyroxène + Plagioclase + Chlorite + Actinote   =>   Pyroxène + Plagioclase +
Glaucophane + H2O

 
Au bout d'un certain temps, la C.O. va finir par se réchauffer, et le gabbro va continuer à se
déshydrater et la glaucophane va devenir du grenat (minéral rouge). De la jadéite va aussi
apparaître. Notre métagabbro s'appelle maintenant de l'éclogite.
 

  
            Métagabbro schiste bleu :                                                
Métagabbro éclogite :
(Pyroxène + Plagioclase +) Glaucophane    =>  (Pyroxène + Plagioclase +) Grenat +
Jadéite + H2O

Voilà donc l'histoire de notre gabbro ! Mais bon, cette histoire peut aussi s'arrêter à n'importe-
quelle étape énoncée ci-dessus, et c'est ce qui nous permet aujourd'hui, des millions d'années
après chaque étapes, de les connaître en retrouvant des morceaux de gabbros plus ou moins
métamorphisés, plus ou moins avancés dans ce processus.
 

Avant de finir, nous avons encore deux autres choses à signaler :


- d'une : lorsqu'on dit que les minéraux se tranforment, il faut rappeller que cela se passe à
l'état solide, et qu'à aucun moment le gabbro ne se met à fondre puis à redevenir solide ! De
plus, lors d'une transformation, tous les minéraux ne changent pas forcément et on peut très
bien trouver de l'actinote et de la glaucophane dans un même échantillon (comme sur la photo
au microscope montrant de l'actinote).
- de deux : lors de la déshydratation du gabbro, de l'eau (attention, pas de l'eau liquide mais de
simples ions HO- et H3O+) sont tranférés à la péridotite alentour, et la péridotite hydratée
arrive à franchir la limite du solidus (qui est moins élevée pour une roche hydratée, que pour
une qui ne l'est pas), et cela forme alors du magma qui va remonter et former soit des volcans
(et il se passe alors un refroidissement rapide en surface et on obtient de l'andésite), soit des
"bulles" (refroidissement lent en profondeur et on a du granodiorite). C'est cela qui est à
l'origine du magmatisme plutonique et volcanique des zones de subduction.
 
Allez, pour bien se quitter, nous vous offrons maintenant un schéma-bilan de tout ce qui vient
d'être dit !
 

différentes étapes du métamorphisme du gabbro

Diagramme
pression/température du gabbro

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