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Le carré ROTAS : un talisman ?

Nous savons peu de choses sur l'identité des copistes de manuscrits du Moyen Âge,
sur le regard qu'ils portaient sur leur activité, sur leur responsabilité éventuelle face à
leurs commanditaires ou leurs lecteurs, face au texte qu’ils copiaient. Tout au plus un
colophon généralement situé en fin d'ouvrage nous indique la joie que l'un ressent
d'avoir terminé son travail : (« Finito libro, sit laus et gloria Christo ») ; un autre
exprime la pénibilité du métier, un autre encore réclame de l'argent, un autre du vin ;
un autre enfin exprime indirectement un message politique de refus des Carolingiens
et de leur législation en ajoutant à son manuscrit sur la Loi Salique un texte
parodique (1):

Ici commencent les prélèvements au malberg. INCIPIT TOTAS MALB.


Au nom de Dieu, du Père tout-puissant. Que soit faite In nomine dei patris omnipotentis. Sit
la volonté de Laidobrand et d’Adon : pour que la loi placuit uolumtas laidobranno et adono ut
salique, qui n’a pas d’article à ce sujet, sur leur pactum salicum de quod titulum non abit
demande faite de bon cœur par la grâce de Fredon, gratenter suplicibus aput gracia fredono
ensemble avec sa femme et leurs grands, pour qu’ils una cum uxore sua et obtimatis eorum in
doivent admettre, avec l’aide de Dieu, un article dans ipsum pactum titulum unum cum deo
cette loi adiuturio pertractare debirent
comme quoi, si quelqu’un, que ce soit dans la maison, ut si quis homo aut in casa aut foris casa
ou hors de la maison, pourraient avoir une bouteille plena botilia abere potuerint tam de eorum
pleine, qu’ils n’en versent goutte ni dans leur coupe, niquam de aliorum in cuppa non mittant ne
dans celles des autres. gutta.
Se ullo hoc facire presumserit, mal.
Si quelqu’un a osé le faire, au malberg, leodardi, qu’il
leodardi, sol. xv con. et ipsa cuppa
paie XV sous et la bouteille, qu’on la casse
frangant la tota ad illo botiliario frangant
entièrement ; au bouteiller, qu’on casse la tête ; à
lo cabo at illo scanciono tollant lis
l’échanson, qu’on enlève les boissons. Il faut procéder
potionis. Sic conuinit obseruare aput
de cette façon : qu’ils boivent à la grande coupe et
satubo bibant et intus suppas faciant cum
qu’ils y mouillent des mies de pain. Quand le seigneur
senior bibit duas uicis sui uassalli, la
boit deux fois, ses vassaux la troisième – c’est bien.
tercia bonum est.
Moi qui ai écrit, je n’ai pas écrit mon nom. Qu’on juge
le coupable.

(1) In :Magali Coumert : « Contester l’autorité législatrice ? » La résistance au pouvoir royal dans
les manuscrits carolingiens de la loi salique.
Ce copiste est Agambertus, un bénédictin du IXème siècle exerçant à l'Abbaye
de Fleury qui, bien que de nombreux doutes subsistent, aurait pu être évêque
d'Albi, une Notice de l'Eglise Saint-Eugène de Vioux, tirée des archives de
Sainte Cécile à Albi, en faisant mention sous le « rege Carolo » , c'est à dire
entre 768 et 800, dates où Charlemagne a pu être désigné par ces mots.

Le folio (181v) que nous allons tenter de déchiffrer partiellement fait partie du
manuscrit référencé « Valenciennes. BM. 0059 (052) », dont l'auteur en est
Hieronymus (Saint Jérôme) qui l'écrivit vers l'an 400 et le copiste Agambertus.
Il s'agit d'une lettre de Jérôme à Paulin , où le saint l'exhorte à l'étude de la Sainte
Ecriture, et fait un dénombrement abrégé des livres de l'Ancien et du Nouveau
testament.

On sait que le manuscrit a été écrit en l'an 806, en un mois et demi, pour une
abbesse, qu'il a été conservé longtemps dans un couvent dont les religieuses étaient
lettrées, le document comprenant de nombreuses annotations éclaircissant le texte.

La réforme de l'écriture engagée par Charlemagne voit naître la minuscule caroline


vers la fin du VIIIème siècle, qui s'imposera dans toute l'Europe occidentale dès la
moité du IXème siècle. Elle remplacera les graphies utilisées jusqu'alors, tels
l'alphabet d'Aethicus Ister, l'alphabet grec, l'alphabet hébraïque et l'alphabet
marcomannique (runique).

A l'exception des lettres hébraïques, Agambertus va utiliser ces alphabets pour rédiger
le folio 181v qui nous intéresse et dont la totalité constitue encore une énigme pour
les spécialistes en paléographie et en philologie : monogramme, abréviations, texte
crypté (voyelles remplacées par la consonne suivante), anagrammes, carrés de lettres
dont le carré SATOR.

Tout cela a déjà fait l'objet d'études très minutieuses, à l' exception des carrés de
lettres, qui montrent que ces différents chiffrements étaient destinés à attirer
l'attention sur un message que l'on voulait transmettre secrètement, soit pour exprimer
une pensée non orthodoxe, soit pour garantir qu'un nom, et donc la personne derrière
lui, ne soient pas oubliés.
Ainsi le monogramme nous révèle que le manuscrit était destiné à une Abbesse
nommée vraisemblablement Théotilde (les experts n'arrivant pas à se prononcer entre
Hlottildis ou Theodildis,,,). Aucun autre document datant de cette époque ne faisant
mention d'une Abbesse ayant porté ce nom, l'information ne nous est guère utile, mais
dans l'esprit d'Agambertus, derrière chaque lettre, derrière chaque mot, derrière
chaque nom se cachait l'Esprit de Dieu et cette Abbesse passerait à l'éternité.
Nous verrons que le choix d'Agambertus de s'exprimer au travers d'alphabets anciens,
alors qu'Alcuin, ami et conseiller de Charlemagne, tentait d'imposer la minuscule
caroline depuis plus de 25 ans tant pour les textes administratifs que pour les écrits
religieux, relève certainement plus d'une opposition bien ancrée aux méthodes du
pouvoir carolingien que d'un jeu intellectuel tel qu'il était couramment pratiqué à
cette époque.

Mais revenons quelques années en arrière, plus exactement le 8 octobre 2013, date à
laquelle je découvris ce carré SATOR dans les archives de la BNF (2)

(2) https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8452674f/f364.item
Du long échange qui s'ensuivit après sa publication sur le site du GROUPE SATOR
(Recherches, Hypothèses et inventaire) (3) nous pouvons retenir 3 points essentiels :

1) A l'intérieur du titre du manuscrit écrit en partie en capitales grecques


« In hoc codice sunt explanationum in Hieremia Hieronimi libri sex, a primo usque ad
sextum. — Hieronymus ad Paulinum de studio Scripturarum. Hieremias virgam nuceam et
ollam succensam... » , titre d'Agambertus qui introduit la lettre de Jérôme,
le « virgam nuceam et ollam succensam,,, » fait référence à une citation du prophète
Jérémie (1,11-13) que l'on retrouve au milieu du manuscrit :
« XXXVI -Jérémie décrit une baguette de noyer , et une marmite bouillante du côté
du septentrion, et un léopard dépouillé de ses mouchetures ; et en diversifiant ses vers
il compose quatre chants alphabétiques. » (4)

2) Ce léopard dépouillé de ses taches, il faut aller le chercher dans l'Apocalypse de


Saint Jean (au verset 13): " La bête que je vis était semblable à un léopard ; ses pieds
étaient comme ceux d'un ours, et sa gueule comme une gueule de lion."
Dans Jérémie aussi (également au verset 13): "Un Ethiopien peut-il changer sa peau,
Et un léopard ses taches?"
La vision du léopard dépouillé de ses taches pourrait donc être celle du "deuxième
Adam", d'un homme qui aurait changé de Nature.

3) Jérôme écrit par ailleurs dans cette lettre à Paulin: « Combien en voyons-nous
aujourd'hui qui se flattent d'être savants, et qui ne sauraient ouvrir ce livre scellé, à
moins qu'il ne leur soit ouvert par celui « qui a la clef de David, laquelle ouvre ce que
personne ne peut fermer, et ferme ce que personne ne peut ouvrir. »
Référence au verset 3.7 de l'Apocalypse : « Écris à l'ange de l'Église de Philadelphie:
Voici ce que dit le Saint, le Véritable, celui qui a la clef de David, celui qui ouvre, et
personne ne fermera, celui qui ferme, et personne n'ouvrira, »

Puis le temps passa. Ce temps fut consacré plus à la recherche de spécimens de carrés
ROTAS ET SATOR qu'à la résolution de l'énigme elle-même. Des centaines
d'exemplaires collectés un peu partout dans le monde nous permirent d'imaginer
mieux comment ils avaient été utilisés au cours des siècles, et à quelles fins, aussi
diverses qu'imaginables : dispersés essentiellement pendant les premiers siècles
autour du Bassin méditerranéen, ce qui peut laisser supposer qu'ils ont été importés
en ces pays par les armées romaines sous leur forme ROTAS; disséminés dans des
manuscrits religieux , tant catholiques qu'orthodoxes ou coptes vraisemblablement
après une appropriation chrétienne, sous leur forme SATOR ; utilisés comme
talismans représentant le Christ protecteur contre les démons, la maladie et le
feu...Tout cela dans une atmosphère paradoxale emplie de croyances et de
superstitions, de religiosité et de sorcellerie.
(3) https://www.facebook.com/groups/457148744346444/posts/598664943528156
Pour rester cohérent avec mes écrits précédents, il me faut rappeler brièvement que
dans un premier article, en date du 6 février 2020, je proposais une lecture nouvelle
de ce carré, imaginant qu'il n'y avait aucun mot significatif à y trouver, malgré les
apparences, et que seul, le mot AREPO, disposé en forme de Dièse, suffisait à
construire un talisman en forme de Heaume de protection, tel qu'il avait été utilisé en
certains lieux et siècles par les magiciens et sorciers (4).

Douze manières de lire AREPO, en I, en L, en U.


Le A représentant l'Alpha, le O l'Omega et le REP , le REPARATOR : le
Sauveur

Dans un second article, en date du 25 avril 2020 (5), intitulé AREPO et le Pompéien,
j'imaginais qu'avant son appropriation par les chrétiens, AREPO aurait pu signifier
pour un Romain l'identité cachée d'ApollO.
Je m'appuyais notamment sur l'existence de pièces frappées d'une croix et des deux
lettres A et O, célébrant Apollon, et sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir.

(4) https://www.facebook.com/groups/457148744346444/permalink/2871757479552213
(5) https://www.facebook.com/groups/457148744346444/permalink/3051817884879504

Compte-tenu de tous ces éléments, nous pouvons étudier le dessin en forme de


devinette que propose Agambertus, rappelons le, aux lectrices lettrées que sont
l'Abbesse Théotilde et les nonnes de son Abbaye.
Quelles informations pouvons-nous en tirer, au premier regard ?

1) Un carré SATOR dont nous savons maintenant qu'il représentait le Christ pour
un religieux de cette époque.
2) Deux carrés de 4X4 lettres contenant chacun un mot non significatif, les mots
ENAM et ODOM n'existant pas en latin.
3) Un carré de 4X4 lettres composé de mots sans signification apparente, à
l'exception d'un seul qui peut être lu en anagramme : ALIB = ALBI.
4) La signature en forme de croix d'Agambertus, et en bas de page cette même
signature, écrite à l'envers, mais en trois lexèmes.

Les quatre carrés sont construits selon la même structure « en Dièse »


Les lettres du carré AMEN sont pour certaines colorées intérieurement en rouge,
comme cela se faisait couramment dans nombre de manuscrits. Celles de la ligne
ODOM le sont extérieurement, avec une césure franche coupant le mot ODOM en
OD et OM, comme si la branche verticale d'une croix invisible venait suggérer un
TENET archaïque.

Agambertus nous indique que ce qu'il veut nous faire découvrir peut être un nom
composé de trois lexèmes, et que la solution réside dans le déchiffrement du mot se
trouvant sous le TENET horizontal invisible du carré AMOR, visible du carré
SATOR,
Le secret ne serait donc plus seulement dans l'AREPO, mais dans l'OPERA,
plus exactement dans l'O PER A.

Mais si le nom commence par un O, ODOM doit aussi être lu O DOM.

DOM appelle immédiatement DOMINUS ou DOMO, et les latinistes confirmées


qu'étaient l'Abesse et ses nonnes pensaient instantanément, avec un petit frisson
hérétique, à la citation célèbre de Cicéron (De officiis 1-XXXIX):

« Ornanda enim est dignitas domo, non ex domo tota quaerenda, nec domo dominus,
sed domino domus honestanda est »
soit : « Il faut donc chercher un nouveau lustre dans sa maison, mais ne pas croire que
toute notre dignité puisse venir d'elle; c'est le maître qui doit faire honneur à sa
maison, et non la maison à son maître. ».
Cicéron fait ici état d'une anecdote relative aux qualités humaines d'un certain
Cnaeus Octavius, consul en 165 av. J.-C., mais ce n'est pas nécessairement le
personnage que nous cherchons.

Existe-t-il dans l'histoire un Octavius pouvant répondre aux indices disséminés


par Agambertus ?
L'un d'entre eux pourrait effectivement correspondre à la description du verset de
l'Apocalypse : " La bête que je vis était semblable à un léopard ; ses pieds étaient
comme ceux d'un ours, et sa gueule comme une gueule de lion."

Suétone nous le décrit ainsi :


« Il a le corps couvert de taches de naissance dispersées s ur la poitrine et sur le
ventre qui, par leur disposition et leur nombre, simulent la constellation de l'Ourse. »

Beaucoup de légendes attribuent à la Grande Ourse un rôle créateur et l'on peut


supposer que pour les chrétiens pératiques elle était le symbole de la création avant le
Christ.
Quant à la « gueule de lion », elle nous renvoie à Suétone qui cite C. Drusus, la
nourrice de cet Octave le déposant un soir dans son berceau, l'enfant disparaissant
et faisant l'objet de longues recherches, puis étant retrouvé au sommet d'une tour très
élevée, le visage tourné vers le soleil levant, saluant ainsi son père lumineux,
Apollon, à l'instant où lui-même est né.

La relation d'Apollon au lion étant attestée à la fois par la fameuse Terrasse des lions,
au sanctuaire d'Apollon à Délos, et à la tête de lion figurant à l'avers des pièces de
monnaie de l'époque représentant Apollon. (Cf. photo supra).

Mais cet Octave répond-t-il au verset de Jérémie (1. 11-13), évoqué par Saint Jérôme
et désigné par Agambertus ?
XXXVI -Jérémie décrit une baguette de noyer , et une marmite bouillante du côté du
septentrion, et un léopard dépouillé de ses mouchetures ; et en diversifiant ses vers il
compose quatre chants alphabétiques. »
Ce verset a été diversement interprêté au cours des siècles, mais en l'appliquant à cet
Octave (qu'auront déjà découvert les lecteurs latinistes,,,), on peut prêter au symbole
de la baguette de coudrier le sens du bâton court utilisé par les chefs militaires sur les
champs de bataille, et à celui de la marmite bouillante du côté du septentrion le
danger que représentaient les multiples tentatives d'invasion des peuples germaniques
en Gaule, leurs destructions et la férocité de certains d'entre eux.
C'est Velleius Paterculus qui écrit :
« Furent vaincus les Langobards, le plus féroce des peuples de la féroce Germanie.
En fin de compte [...] l'armée romaine avec ses insignes fut conduite à quatre-cents
milles du Rhin, jusqu'au fleuve Elbe, qui traverse les terres des Semmons et
des Hermundures. »
— Velleius Paterculus, Historiae romanae ad M. Vinicium libri duo, II, 106.2.
Quant aux vers composés en quatre chants alphabétiques, ils se rapportent à
l'anecdote de Plutarque selon laquelle Athénodore de Tarse, l'un des plus vieux
précepteurs d'Octave, rappela lors de ses adieux à son maître, en guise d'ultime
recommandation, qu'avant d'agir, quand il serait en colère, il devrait réciter
mentalement les vingt-quatre lettres de l'alphabet.
Nous savons que cet Octave s'exprimait en de nombreuses langues dont quatre d'entre
elles s'écrivaient avec des alphabets différents : le romain, le grec, l'hébreu et l'arabe.

Connaissant maintenant le fonctionnement de la pensée d'Agambertus, qui nous


conduit à regarder le doigt et non la lune qu'il nous montre, faisons un pas de côté et
examinons le verset précédent de Jérémie (1. 10) :
« Vois : aujourd’hui, je te donne autorité sur les nations et les royaumes, pour
arracher et renverser, pour détruire et démolir, pour bâtir et planter. »

A qui d'autre qu'un empereur ce verset pourrait-il faire allusion ?

Agambertus nous désigne clairement Octave- Auguste « théophanisé », c'est à dire


rendu égal à un dieu avant sa mort, sauveur et maître du monde.

Suétone relate les faits merveilleux qui ont jalonné la vie de cet empereur :
Fils d' Apollon, né d'une vierge, encore enfant, il avait le pouvoir d'imposer le
silence aux grenouilles .
Sa tunique laticlave se fend en deux le jour où il prend la toge virile, symbole à
rapprocher du voile du Temple qui se déchire par le milieu lorsque le Christ meurt en
croix.
Ses taches de naissance, déjà évoquées supra.
Son rapport à la superstition, la divination, les présages, les rêves prémonitoires.
Son regard : « il avait l'oeil clair et brillant, dit Suétone, et il voulait que l'on crût que
son regard avait quelque chose de la puissance divine ; aussi voyait-il avec plaisir, en
regardant fixement quelqu'un, que l'on baissait les yeux comme pour éviter l'éclat du
soleil. »
Les prodiges évidents les « ostentae videntissima », qui annoncèrent sa mort et sa
divinisation suprême :
L'aigle qui l'enclôt dans une sorte de cercle magique, lors des cérémonies du lustre, et
vient se poser sur la lettre A du nom d'Agrippa gravée sur un temple voisin ; Agrippa
étant décédé peu auparavant, la lettre A ayant pour valeur numérique 1, Octave sait
qu'il mourra dans l'année.
Un deuxième avertisement sera plus précis encore : la foudre étant tombée sur la
lettre C de l'inscription sur sa statue, la lettre C valant 100, il ne lui reste plus que 100
jours à vivre. Compensation oblige, il prendra place parmi les dieux puisqu'en
étrusque, le reste du nom, AESAR signifie dieu.

On affirme qu'un aigle s'échappa du bûcher d'Octave, lors de ses funérailles, pour
emporter celui-ci au ciel.

Les autres indices peuvent-ils être reliés à Octave Auguste ?

La clef de David, qui renvoie au verset 3.7 de l'Apocalypse :


« Écris à l'ange de l'Église de Philadelphie: Voici ce que dit le Saint, le Véritable,
celui qui a la clef de David, celui qui ouvre, et personne ne fermera, celui qui ferme,
et personne n'ouvrira. »
peut faire allusion au sacerdoce de Rome et d'Auguste, créé dès 27/26 avant Jésus
Christ à Philadelphie.

Dernier détail : au folio 28 du manuscrit d'Agambertus, ce dernier écrit à la fin du


paragraphe : « Deo gratias, amen, emendavi ».
Ce mot n'est pas coutumier dans les adjonctions des copistes. Il signifie, entre autres
sens : « j'ai réformé », un verbe d'action qui pourrait définir parfaitement ce que
furent la vie et les œuvres (opera) d'Octave Auguste, telles qu'il les a rédigées lui-
même à la fin de sa vie dans les Res Gestae (6), tables de bronze fixées à des piliers
devant son mausolée et reproduites sur les murs de nombreux temples à travers
l'Empire.
On peut y lire tout ce que les Romains lui ont dû, tant en blé qu'en sesterces.
On comprend qu'il ait pu mériter les noms d' OPERATOR ( que l'on peut lire
clairement sur le carré comme la signature verticale d'Agambertus nous y invite) et
de SATOR.

O PER A : d'Octave à Auguste :

Octave (27av. J.-C., 14 ap. J.-C.) se dit fils d'Apollon, refuse d'être divinisé de son
vivant mais laisse se construire des autels et des temples qui lui sont consacrés, à
condition que son nom soit associé à celui de Rome divinisée. Les militaires rendent
hommage à son Genius et à son Numen.
Le Numen est pour les Romains, le signe de la puissance agissante d'un dieu.

(6) http://www.roma-latina.com/res/res1.html
Partout où règne le pouvoir de Rome, Octave Auguste est considéré comme un
homme habité par la puissance d'un dieu. Alors que le feu et l'eau détruisaient sans
cesse depuis des siècles la ville de Rome, il se vanta, dit Suétone, d'avoir trouvé une
ville de briques et d'en avoir laissé une de marbre.
Tous les militaires portent un talisman, celui d'Octave, qui se présente comme le
« Sauveur du monde ». Jusque dans les cités grecques, il est qualifié de « Sôter »,
appelé même « Sauveur des Hellènes et du monde entier ».

« Dans l'épigraphe de Priène remontant à 9 ans avant J.-C, on dit que le jour de la
naissance de l'empereur « a conféré au monde entier un aspect différent. Celui-ci
serait parti en ruine si en lui, l'homme d'ascendance divine, une perspective commune
de bonheur n'avait pas émergé. [...] La Providence qui dispose divinement de notre
vie a comblé cet homme, pour le salut des hommes, de ses dons pour l'envoyer à nous
et aux générations futures comme sauveur. »[7]

Auguste est "sauveur" car il a apporté la paix civile à ses contemporains, et on peut
encore admirer l'autel de la paix d'Auguste (« Ara Pacis Augusti »), consacré par le
sénat romain le 30 janvier l'an 9 avant J.-C. après les victoires d'Auguste en Espagne
et en Gaule.

« L'empereur César Auguste, fils de dieu »; « L'empereur César (Auguste), dieu de


dieu »; « L’empereur César Auguste, sauveur et bienfaiteur ».
Une inscription de Priene, en Asie mineure, célèbre l’anniversaire d’Auguste comme
étant « l’anniversaire de dieu »

Né le 23 septembre 63 av.J.-C.
Princeps senatus en 28 av.J.-C.
Le 27 janvier 27 av.J.-C. le titre d'Augustus lui est accordé par le Sénat.
En 12 av.J.-C, succède à Lépide et devient Grand Pontife et devient le chef de la
religion romaine.
Le 5 février de l'an 2 av.J.-C , accepte le titre de Pater Patriae.

XXX

Selon moi, tel est le personnage qu'Agambertus cherchait à nous faire découvrir.
La christianisation du talisman avait dû se faire peu après que l'empereur Constantin
eût mis fin à la persécution des chrétiens (Edit de Milan en 313).

Le « Emendavi » qui pouvait s'appliquer à Octave-Auguste, pourrait aussi bien


s'appliquer au copiste lui-même , dans l'autre sens possible du mot : « j'ai réparé la
faute », l'Eglise ayant dû effacer tout ce qui pouvait relier ce talisman à celui en
l'honneur duquel il avait été créé et diffusé dans le monde entier.

(7) J. Ratzinger, Benoît XVI, L'enfance de Jésus, Flammarion, Paris 2012, p. 88-89
Nous pouvons donc penser que ce carré ROTAS n'a pu exister avant le 27 janvier 27
av.J.-C, date à laquelle Octave devint Auguste.,,,ou le 5 février de l'an 2 av.J.-C, s'il
avait été conçu à partir du PATER NOSTER.

Nous nous trouvons donc maintenant avec deux noms caractérisant Octave-Auguste,
sa dimension humaine (O PER A) et sa dimension divine (A REP O).

Le T de TENET ne symbolise pas la croix,


TENET ne veut dire que TENET : « Il tient », comme les empereurs tenaient en leur
main gauche l'orbe, symbole de leur puissance sur le monde.
Auguste Pontife tient deux orbes, celui du terrestre et celui du divin.

Une lecture en boustrophédon nous permet de lire :


SATOR OPERA TENET AREPO ROTAS

Le Semeur Auguste Tient d'Apollon les Roues.

Les roues du Char d'Apollon, dans sa dimension verticale et divine,


Les roues représentées sur les oboles à l'effigie d'Apollon dans sa dimension
horizontale et humaine.

Une signification pour le N ?


Pourquoi pas NUMEN ?
Voilà tout ce que l'on peut imaginer de ce qu' Agambertus voulait nous transmettre.

De nombreuses questions restent en suspens, telles celle de l'inventeur de ce carré qui


dut initialement être conçu, non comme un talisman, mais un hommage intellectuel à
la perfection de celui que l'on voulait honorer.

En effet Octave Auguste détestait tant les magiciens qu'il les expulsa d'Italie , le plus
célèbre étant Anaxilaos, , un philosophe, magicien et néopythagoricien qu'il bannit en
28 av. J.-C. par un simple édit. Il fit rechercher dans Rome tous les livres qui
traitaient de cet « art infernal », et « il s'en trouva 2000 qui à l'instant furent mis au
feu ».

On peut supposer que c'est l'un de ses intimes, peut-être Athénodore de Tarse, qui fut
son précepteur (et mourut en l'an 7). S'il fut choisi pour cette fonction, c'est qu'il était
considéré comme le meilleur philosophe, le plus brillant et le plus érudit qui fût
connu à Rome. Connu pour sa tendance evhémériste ( il pensait « que les dieux
avaient été des rois ayant vécu en des temps préhistoriques et qu'ils avaient été
honorés comme dieux après leur mort, à cause de leurs bienfaits et de leurs inventions
civilisatrices »), Athénodore aurait pu jouer un rôle discret et convaincant auprès des
Sénateurs lorsqu'ils accordèrent à Octave le titre d'Augustus.

On peut imaginer que les soldats de ses légions portèrent sur eux ce carré de lettres en
guise de porte-bonheur. Puis que les habitants des provinces qu'ils pacifiaient se le
soient approprié et, les siècles passant, en aient fait des talismans protecteurs.

Une autre question restant encore sans réponse,est celle de la christianisation de ce


« talisman »...

Gérard HAUET 23/01/2022

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