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Université de Béjaia – Faculté des SHS – Département des SIC

Master 1 – Presse imprimée et électronique


Module : Genres journalistiques dans la presse imprimée – assuré par M. CHAMI, Docteur en SIC

Cours 3 : L'interview/Entrevue/Entretien

Toute interview (ITW) rentre dans un cadre bien précis. La personne à interviewer doit bien sûr
accepter de répondre directement ou en différer aux question que le journaliste souhaite lui poser.
Ce n'est pas toujours facile de faire parler une personne surtout sur des sujets tabous et
sensibles. L'ITW nécessite plus d'habileté, savoir faire et de confiance. Dans la pratique
journalistique, l'interview est art. Car, il nécessite de créer un climat de confiance. Il est toujours
délicat de mener les interviews. Le journaliste l'aborde en position de faiblesse parce qu'il est le
demandeur. Alors, il faut approcher l'interviewé avec douceur. Par exemple, le contacter par écrit
avant le contact par téléphone. Il faut trouver les mots justes et convaincants pour décrocher son
accord. Le rassurer par exemple que ses propos seront respectés, vérifier avant publication...
Avant de solliciter l'interviewé, le journaliste doit être sûr qu'il est prêt à le mener, quand il est
soigneusement préparé et assez documenté. Le tout doit être organisé suivant ce qu'on appelle
"le guide d'entretien", qui regroupe l'ensemble des questions imaginées, les relances prévues pour
le pousser dans ses retranchements.

L'interview recouvre deux réalités distinctes1 :


- Elle représente un moyen de se documenter - presque - comme un autre. Elle fournit des
informations en complément de ressources écrites. L'interview constitue aussi l'indispensable
support de certains articles du type portrait ou papier d'ambiance.

- Elle est un genre journalistique à part entière, c'est-à-dire un mode de présentation des
informations suivant un jeux d'alternance de questions et de réponses.
Si vous optez pour cette formule, demandez-vous toujours quelle est la valeur ajoutée qu'elle
apporte. Si elle n'est pas évidente, il vaudra mieux y renoncer.
La maîtrise du temps représente aussi une marque de courtoisie (Une ITW dure 30mn à 1h/
Parfois plus selon l'importance du sujet et de la personne), et commence d'ailleurs par le respect
de la ponctualité.
La disposition matérielle a son importance ; ne pas être ni trop proche ni trop éloigné de la
personne interrogée : pour être productive, la rencontre devra être équilibrée, entre deux
personnes dont aucune ne dominera l'autre.
Ne vous sentez pas investi d'une mission de grand inquisiteur, mais n'hésitez pas non plus à poser
des questions potentiellement gênantes. Ce qui est souvent difficile dans la presse institutionnelle.

Une relation humaine à établir


La qualité de l'information que vous obtiendrez dépendra beaucoup de celle de la relation
humaine que vous établirez avec la personne à interviewer. Le téléphone ou l'émail remplacent
difficilement une vraie rencontre en face à face.
Tout interview est précédé par une prise de contact au préalable. Un contact préalable
s'impose, par courrier ou - mieux - par téléphone.
Expliquez à votre interlocuteur la raison de votre démarche et ce que vous attendez de lui.

Pour commencez, vous poserez des questions plus générales au premier, plus pointues au second.

1 Gérard Hoffbeck, écrire pur un journal. Paris : Dunod, p. 104.


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Pas d'intérêt de commencer par une question trop polémique.


Évaluez aussi son comportement intellectuel : a-t-il tendance à rester au ras des anecdotes ?
Amenez-le aussi à en dégager la signification.
Au contraire, reste-t-il dans les généralités abstraites et théoriques ? Dans ce cas faites-lui donner
des exemples. Ce sont d'ailleurs ces derniers qui intéresseront le plus votre lecteur.

Le respect de l'interlocuteur/ Engagement sur parole :


S'il vous a confié des informations off record, littéralement « hors enregistrement », vous ne les
reproduirez pas, ni dans une interview rédigée, ni même dans un article. Mais cela ne vous
interdit pas de vous en servir, pour mieux comprendre les enjeux de ce qui se dit par ailleurs, ni
même d'utiliser ces informations de manière plus indirecte.
La personne interviewée a-t-elle le droit de demander la vérification de l'ITW avant sa
publication ? Par éthique et rigueur oui, même si vous n'apprécier pas parfois, mais cette
opération de relecture et de vérification peut se révéler utile pour rectifier des erreurs de fait
surtout quand il s'agit de sujet sensible. Cet acte renforce aussi la confiance et la relation avec
l'interlocuteur pour les futurs sollicitations.

Une information à obtenir


L'enjeu de toute interview est la qualité de l'information. Alors, une interview se prépare : pas de
bonnes questions sans connaissance préalable du dossier, ni même sans un minimum de
renseignements pris sur la personne à interviewée.
Préparez aussi un ensemble de questions que vous poserez à votre interlocuteur pour cerner le
sujet abordé et le contexte.
Le recours à une question ouverte permet de planter le décor ; une question fermée précise peut
être utilisée plus comme complément à la question ouverte.

Évitez soigneusement de prendre parti personnellement : vos opinions risquent de mettre votre
interlocuteur en situation défensive, ou ne pas exprimé le fond de sa pensée.

La question « pourquoi ? » est un moyen particulièrement efficace de réactiver le questionnement.


Vous pourrez la croiser avec toutes les autres ; elle vous permettra aussi de mettre votre
interlocuteur dans l'obligation de justifier ses affirmations et ses jugements de valeur.

Ne posez qu'une seule question à la fois, sous peine de n'obtenir de réponse qu'à la dernière. Mais
si vous avez posé une seule question et que la réponse vous paraît insuffisamment précise, ou
même à côté de la plaque, n'hésitez pas à remonter à l'assaut : même si on vous a déjà répondu,
il n'est toujours utile de demander plus de précision quand si nécessaire. Demandez tout de suite
la signification des sigles, l'orthographe des noms propres...

Des questions auxquelles vous n'aviez pas pensé peuvent évidemment surgir dans le feu de
l'action. Il faudra parfois les poser tout de suite. Mais, pour ne pas perdre le fil, vous pourrez aussi
choisir de les poser en bloc à la fin : notez-les quand même au moment où elles vous viennent à
l'esprit.

Munissez-vous d'un bloc note et de deux stylos (ou plus) de couleurs différentes : ils serviront à
distinguer les types d'informations notées (commentaire personnel, etc.), et le second pourra être
utile en cas de défaillance du premier.

Inscrivez les questions sur la première page du bloc, numérotez-les, essayez de les mémoriser et
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notez les réponses sous le simple rappel du numéro de la question. Utilisez des abréviations de
circonstance et un style télégraphique.

Il est impossible de noter tout. Alors, il faut prendre l'essentiel ; mots et expressions
significatives...Notez au passage une anecdote - parfois un mot clé suffira pour vous en souvenir -
ou une formule personnelle et significative ; pensez alors aux guillemets.

Utiliser un magnétophone ?
Prudence ! Sa présence risque d'intimider, et surtout son exploitation ultérieure est toujours
longue et fastidieuse. Son usage ne vous dispensera, en aucun cas, de prendre des notes. Avant
de l'utiliser, il faudra demandé l'autorisation de l'interviewé.

Retranscription de l'ITW
L'exploitation des informations recueillies doit se faire le plus tôt possible : vous serez encore dans
le bain et votre mémoire est plus fraîche pour reprendre le fil et remplir plus facilement les
trous/passage d'une prise de notes un peu elliptique
Les propos doivent être reproduits fidèlement, la traduction dans le cas échéant doit refléter le
sens exprimé par l'interlocuteur. On est pas obligé de reprendre tous les propos, le superflu peut
être éliminé mais sans touché au sens.

Le papier à construire
Dans le cas où vous avez décidé de présenter l'interview rédigée, vous penserez à :
- L'habillage : un chapô s'impose comme pour tout autre article au-delà de deux feuillets ; il
servira en particulier à indiquer les enjeux et l'importance de la rencontre, voire à donner
quelques informations biographiques ;
La mention « interview » doit être signalée ;
Le titre peut reprendre par exemple une formule clé de l'entretien ;
Les intertitres sont inutiles : l'alternance questions-réponses (avec des caractères différents) suffit
à aérer et à dynamiser typographiquement la page.
- Laisser la flagornerie/flatterie/louanges de côté : les remarques obséquieuses et les
mentions politesse du type : « Monsieur le Directeur a bien voulu répondre à nos questions » dans
le chapô, ou encore « Merci, Monsieur le Directeur » à la fin, sont inutiles.
- Traitement de contenu de l'interview : lors de la réécriture de l'ITW, il ne suffit pas de
recopier le contenu brute de l'échange. Il faudra rester veillant sur certains passage et détails et
ce dire : Est-ce que ce propos est utile pour mon lecteur ? Qu'apporte-t-il de nouveau, de
spécifique ?
Il faut veiller évidemment à l'exactitude de ce que vous dites, à supprimer des questions dont les
réponses sont sans intérêt, non fructueuses, à regrouper des réponses sous une question unique -
même si vous ne l'avez pas posée pendant l'entretien. Cela enrichira le texte et réduira la
multiplication des questions
L'enfilade et la succession des question peut provoquer de la monotonie surtout si les réponses
sont moins longues.

Le choix du type de question donnent des types d'interviews différents.


L'interview directif est plus "agressif", les questions sont dirigées et précises, on cherche des
réponses courtes et précises. Ce type est valable plutôt dans le genre "micri-trotoir" avec le
minimum de questions. Mais, ceci ne s'applique pas à certaines personnalité ou l'entretien dure
parfois plusieurs heures.
L'interview non directif, contrairement au premier, celui-ci est plus libre avec des questions
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plus ouvertes qui donne la possibilité à l'interlocuteur de monologuer. L'inconvénient de ce type


d'entretien c'est qu'il est parfois non productif, car l'interlocuteur qui n'est pas forcé par des
questions ne parlera pas de certains aspects controversés du sujet d'échange.
L'interview semi-directif, il est le plus approprié à la pratique journalistique. L'alternance des
questions ouvertes, fermées et de relance sur les détails permet au journaliste de recueillir des
informations plus fructueuse. A condition de rester attentif et souriants aux réponses de
l'interviewé ce qui le mettra davantage à l'aise, donc plus bavard. Et revenir à la charge sur
certains aspects annoncés pour plus d'explications, de détails ou le confronter à d'autres
données...
ex : vous dites que le taux de chômage est moins de 10%, or que, l'institut national des
statistique annonce un taux supérieur à 15%.

Quand il s'agit d'une interview en face à face, le choix de l'endroit est primordial pour
assurer un bon déroulement de l'entretien loin de tout élément qui pourrait perturber son
déroulement.

Le choix du ton est aussi délicat, beaucoup d'interviewés arrêtent leur entretiens. Durant
l'entretien, le journaliste doit garder son calme et nouer un rapport de respect mutuel. Ne pas
jouer le héro, l'opposant ou le policier...Le meilleur ton est celui de la neutralité et de
bienveillance. C'est à dire respecter les dires de l'interviewé, même si vous ne les partagez pas, si
vous les objectez, faites-le avec professionnalisme et courtoisie, en posant des questions qui
poussera l'interlocuteur à montrer par lui même sa contradiction.
Mais poser des questions ne veut pas dire piéger son interlocuteur, les bonne pratiques
journalistiques exigent une formulation de questions plus claires, plus précises qui ne suscitent
pas la méfiance chez l'interviewé. Vaut mieux posé une question directe, intelligible mais assez
lourde de sens qu'une question biaisée qui rétracte la personne dans son silence.

D'où l'importance de la préparation des questions au préalable, qui permettent au journaliste de


garder le fil conducteur de l'entretien et de contrôler les débordement de son interlocuteur. Il est
toujours préférable de commencer par des question plus simple pour finir avec des question/sous
questions plus complexes.
Même si, parfois, l'interviewé essaye d'esquiver aux questions sensibles ou refuse totalement d'y
répondre, le journaliste ne doit pas renoncer. N'oubliez pas, sa fonction demeure la recherche
d'informations/vérité. Alors, il est tenu de revenir à la charge, calmement et poliment au moins
une fois, quitte à reformuler la question en gardant le même sens. S'il persiste dans sa position, et
la réponse à la question n'est pas aussi fructueuse, le journaliste peut le rapporter dans son
papier.
La retranscription du contenu doit se faire fidèlement, et juste après son déroulement, car la
mémoire est toujours fraiche pour le faire convenablement. L'enregistrement de l'ITW, par contre,
doit être en accord avec la personne en question. On l'arrête aussi quand celui le demande,
comme on peut aussi le faire le journaliste volontairement à la moindre interférence dans la
conversation (ex : appel téléphonique...). Le recours à l'enregistrement ne doit pas bien sûr
éliminer la prise de notes. Surtout pour noter ce qui n'apparait pas dans l'enregistrement, comme
les sourires, les grimaces, hésitations, silence, interruption, larmes, colère...signalés lors de la
retranscription de l'entretien

Toute élimination de passages doit être en concertation avec le concerné. Le journaliste peut aussi
rappeler la forme de diffusion de l'ITW ; forme questions-réponses, extraits libres...Mais la
diffusion finale peut être sous réserve de relecture par l'interviewé.
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Différentes sortes d’ITW

Témoignage: Peut être intégrée dans le cadre d’un reportage. On recueille un fait auquel on n’a
pas assisté. Vérifier et recouper, car ce n’est pas forcément la vérité.
Pédagogique: avis d’un expert ou d’une personne qui par sa fonction, son expérience, peut nous
éclairer sur une situation. (semi-directif)
Opinion (la parole d’une personne qui s’engage)
Réaction (personne qui réagit à un événement ou une info)
Exclusive (crée l’événement)
Portrait : on part à la découverte d’une personne. (Plutôt non directif.)
Express : « Trois questions à » Percutant quand les réponses apportent beaucoup de valeur
ajoutée : révélations, prises de position inattendues ou courageuses, infos attendues depuis
longtemps. (directif)
Micro-trottoir : Instantané sur un sujet donné. On pose la même question à plusieurs personnes
prises au hasard dans la rue, pour voir comment elles réagissent à tel ou tel actualité.
Interpellation à chaud qui n’a rien d’un sondage, ni d’une enquête sociologique.
Interview croisée ou contradictoire. Oppose deux interlocuteurs d’avis différents auxquels on
pose les mêmes questions. On peut les interroger séparément.
Table ronde. Plus analytique que la simple interview contradictoire. Apporte les éclairages de
plusieurs sources pertinentes. Difficile à maîtriser.

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