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Docteur Babacar DIAO Cours d’Urologie Niveau IDE 3

Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar Année Universitaire 2010-2011


Maître de Conférences Agrégé Urologie - Andrologie

Traumatismes du bas appareil urinaire

Objectifs d’apprentissage : théorique et pratique

Objectifs spécifiques :

- Reconnaître le traumatisme du bas appareil urinaire


- Citer quatre complications de la rupture de l’urètre postérieur et deux
complications de la rupture de l’urètre antérieure
- Citer deux complications de la rupture sous péritonéale de vessie et trois
complications de la rupture intra péritonéale de vessie
- Décrire le rôle de l’ICP dans la prise en charge initiale d’un traumatisme du bas
appareil urinaire

Contenu :

- Bases anatomiques,
- Mécanismes des lésions
- Manifestations cliniques et paracliniques
- Prise en charge thérapeutique
1. Généralités
1.1. Définition 
Ces traumatismes se définissent comme des lésions intéressant tout ou partie de la
paroi vésicale et ou urétrale, consécutives à une agression extérieure. Ce vaste
chapitre comprend les traumatismes de l’urètre (contusion et rupture) ainsi que les
traumatismes de la vessie. Dans un souci de didactique nous nous appesantirons
essentiellement sur les ruptures de la vessie et de l’urètre.
1.2. Intérêt
- Epidémiologique : causes les plus fréquentes sont les AVP et les sujets
jeunes sont le plus souvent concernés
- Gravité : urgences médico-chirurgicales
- Pronostic : conditionné par la précocité de la prise en charge. Le risque
évolutif des ruptures de l’urètre est dominé par: la sténose’ incontinence, et
la dysfonction érectile.

1.3. Rappel anatomique


1.4. Etiopathogénie
Les traumatismes de l’urètre postérieur concernent l’adulte jeune. Ils peuvent
exister chez femme. Dans 90% des cas, il existe une fracture du bassin ou une
disjonction pubienne (symphysaire).

Quatre mécanismes peuvent expliquer les ruptures de l’urètre postérieur :


 Choc antéro-postérieur avec fracture du cadre obturateur, provoquant le recul
du bloc prostate-vessie et la section de l'urètre selon l’effet guillotine
(mécanisme du coupe-cigare)
 disjonction symphysaire responsable d'une déchirure de l'aponévrose périnéale
qui peut se propager à l'urètre. Effet de distraction.
 Chute d’une hauteur avec réception sur un membre, responsable d’une fracture
du cadre obturateur et de l’aile iliaque homolatérale. L’urètre membraneux est
rompu par effet de cisaillement.
 Quant à l’urètre prostatique, elle est rompu dans les traumatismes violents
chez l’enfant par exemple lorsqu’une roue de véhicule écrase les os du bassin
et entraine un éclatement de la prostate.
La rupture totale est marquée par un écart important entre les extrémités (aucune
chance de rétablissement spontané de la continuité). La conséquence en est
l'apparition d'un hématome ou d'un uro-hématome dont la topographie dépendra de
l’intégrité ou non du diaphragme uro-génital. Cet hématome est particulièrement
vulnérable en cas de passage intempestif d'une sonde urétrale (risque infectieux ++
+).Une fois la vessie drainée et en l'absence de complication, cet hématome laissé
à lui-même va se résorber peu à peu et la rupture urétrale va évoluer vers un
rétrécissement cicatriciel

Les traumatismes de l’urètre antérieur sont le plus souvent la conséquence,


notamment chez les motocyclistes (réservoir, cadre). Ils peuvent exister lors
d’accidents travail (chute à califourchon) et de sports (coup de pied).

2. La rupture urétrale
2.1. Tableau clinique
La rupture de l’urètre membraneux doit être systématiquement évoquée chez un
traumatisé du bassin présentant l’un des symptômes suivants :
 urétrorragie
 globe vésical
 hématome périnéal
D’une façon plus générale, tout traumatisé présentant une fracture du bassin doit
être considéré comme suspect de lésion urétrale jusqu’à l’émission spontanée
d’urines claires.

Toute suspicion de traumatisme urétral contre-indique le sondage et impose la


mise en place en urgence d’un cathéter suspubien, qui règle le problème du
drainage urinaire et permet d'attendre le moment le plus favorable pour traiter la
lésion urétrale +++.
2.2. Explorations complémentaires
A la phase initiale, les explorations radiographiques sont celles de tout
polytraumatisé :
- Radios sans préparation du cadre osseux.
Des clichés du bassin sont indispensables, en précisant l'absence de
corrélation entre importance des lésions osseuses et présence ou non d'une lésion
urétrale.
- Echographie abdominale et pelvienne : visualise
- un épanchement sanguin dans les gouttières pariéto-colique, une
contusion intra-abdominale (rate, foie), une contusion rénale,
- l’épanchement périfracturaire du petit bassin (dont l’importance
peut parfois suffire à entrainer une hypovolémie),
- la vessie qui est refoulée et ascensionnée par l’hématome
fracturaire, de vérifier la réplétion vésicale et peut donc permettre de
guider un cathéter suspubien.
- L’examen tomodensitométrique abdominal et pelvien complète le bilan
lésionnel échographique. Il est indispensable en urgence, dès que l'état du blessé le
permet. Il permet de confirmer ou non la réplétion vésicale, une rupture vésicale,
en suivant la progression du produit de contraste.
- L’artériographie en urgence peut s’avérer nécessaire en cas d’hémorragie
persistante sans cause évidente, pour objectiver une lésion d’une des branches de
l’artère hypogastrique lésée par le traumatisme et qui peut être embolisée.

- Le bilan lésionnel repose sur l’urètrographie rétrograde et mictionnelle (UCRM)


entre le 4° et le 7° jour dans de strictes conditions d'asepsie. Cet examen doit
comporter une opacification à la fois antégrade et rétrograde sur le même cliché
(par le cathéter suspubien et par le méat urétral), avec des incidences d'oblique et
de profil.
- L'UCRM met en évidence une extravasation de produit de contraste dans la région
de l'urètre postérieur, avec très schématiquement deux possibilités :
- rupture totale caractérisée par un écart plus ou moins important entre
les extrémités urétrales avec décalage
- rupture partielle à évoquer devant une simple extravasation avec
alignement des fragments et opacification de l'urètre d'aval.
2.2. Complications
- Pendant la première semaine :
- Choc hypovolémique, du fait des lésions associées (polytraumatisme), ou
par lésion de branches de l'artère hypogastrique (artériographie suivie si
besoin d'embolisation).
- Surinfection de l'uro-hématome, parfois déclenchée par le passage
intempestif d'une sonde (choc septique gravissime).
- A distance :
- Récidive de la sténose nécessitant un traitement endo-urologique
(urètrotomie) ou chirurgical (urètroplastie)
- Incontinence en cas de lésion associée touchant le col vésical qui suffit
en principe à assurer la continence si le sphincter strié a été lésé.
- Dysfonction érectile d'origine vasculaire et/ou neurologique, d'autant plus
redoutable qu'il s'agit le plus souvent de patients jeunes.

2.3. Traitement
Le choix de l’attitude thérapeutique dépend des caractéristiques de la lésion
urétrale (totale ou partielle), de l’existence éventuelle de lésions associées
(polytraumatisme) et des habitudes de l’équipe chirurgicale urologique.
Très schématiquement il faut retenir que :
 La mise en place d’un cathéter suspubien est le seul geste nécessaire en
urgence. Le traitement de la lésion urétrale sera réalisé dans un deuxième
temps.
 Les techniques de réalignement endoscopique (fin de la 1 è
semaine après le
traumatisme) ont pour objectif de mettre en place une sonde qui servira de
tuteur pour la cicatrisation. Il faut garder à l’esprit que c’est un procédé
approximatif et que moins de 50 % des patients ainsi traités auront un résultat à
distance correct.
 L'anastomose termino-terminale en urgence différée (entre le 5 è et le 15 è jour)
représente en théorie le traitement idéal en cas de rupture complète : elle vise
une restauration quasi-anatomique par affrontement précis de deux extrémités
urétrales bien vascularisées. Elle donne des résultats supérieurs à ceux des
techniques de réalignement.
 Autre possibilité : traiter au stade de la sténose tardive (3 à 6 mois après le
traumatisme). L’hématome s’est transformé en fibrose, la rupture urétrale en
sténose. Le but de l’intervention est de réaliser une anastomose après excision
la plus complète possible de la fibrose et du rétrécissement. C’est la seule
possibilité chez un sujet initialement comateux ou polytraumatisé. Les résultats
sont comparables à ceux de la réparation en urgence différée, avec
l'inconvénient pour le patient d'imposer le maintien du drainage sus-pubien
pendant la période d'attente. Son seul avantage : laisser le temps nécessaire à
une évaluation précise des séquelles liées au traumatisme avant l'intervention.
 Les ruptures partielles sont traitées en général par une simple prolongation du
drainage vésical sus-pubien. Le risque d'apparition ultérieure d'une sténose est
élevé.

3. Tableau clinique de la rupture vésicale

Deux types de lésions peuvent s'observer : rupture intra-péritonéale (la plus rare)
et rupture sous-péritonéale (moins de 10 % des traumatismes du bassin) qui
s'opposent en tous points sur le plan du traumatisme en cause, du tableau clinique
et de la prise en charge.

3.1. Rupture intra-péritonéale de vessie

- Mécanisme : contusion hypogastrique sur vessie pleine (choc direct) en dehors de


tout contexte de fracture du bassin le plus souvent. La face supérieure est la plus
fragile (elle s'amincit lors de la réplétion vésicale) et c'est à ce niveau que survient
la rupture.
- Tableau clinique : absence de miction, absence de globe. Rarement signes de
choc. Contracture abdominale +++ lié à l'épanchement urinaire responsable d'une
péritonite.
- Le diagnostic repose sur l'imagerie : à l'échographie épanchement intra-
abdominal. Le scanner avec injection (plus performant que l'UIV) montre le passage
intra-péritonéal du produit opaque qui dessine les anses et se collecte dans les
gouttières pariéto-coliques.
Complications :
- Choc hypovolémique, du fait des lésions associées (polytraumatisme), de
l'hématome fracturaire ou par lésion de branches de l'artère hypogastrique.
- Infection de l'uro-hématome : rare mais très grave, aboutit à une péritonite avec
possibilité de septicémie…
- Troubles de la conscience rentrant dans le cadre d’une véritable auto-dialyse
- Hernie d’anses dans la vessie si la brèche est importante
- Traitement : laparotomie d'urgence, fermeture de la plaie vésicale sous couvert
d'une sonde urétrale laissée en place dix jours. Pronostic excellent sauf si lésions
associées d'autres organes abdominaux.

3.2. Rupture sous-péritonéale de vessie

- Mécanisme : presque toujours dans un contexte de fracture du bassin.


Conséquence d'un embrochage de la paroi vésicale par une extrémité osseuse,
aboutit à la constitution d'un uro-hématome qui peut communiquer avec le foyer
de fracture (risque d'infection +++).

- Diagnostic clinique difficile : en théorie absence de miction et absence de globe,


dans la réalité miction possible d'urines hématiques. L'empâtement hypogastrique
est difficile à percevoir car masqué par l'hématome de la fracture du bassin et la
douleur.
- Là encore, c'est la TDM avec injection qui objective le passage du produit de
contraste dans l'espace de Retzius ou l'espace paravésical, ce qui affirme la
rupture.
Complications :
- Choc hypovolémique, du fait des lésions associées (polytraumatisme), de
l'hématome fracturaire ou par lésion de branches de l'artère hypogastrique.
- Infection de l'uro-hématome : rare mais très grave. Aboutit à une cellulite
pelvienne avec possibilité d'ostéite, de septicémie…

- Traitement : une rupture sous-péritonéale de vessie cicatrise en 2 à 3 semaines


sous couvert d'un drainage vésical par sonde urétrale.
- Le véritable problème est de ne pas méconnaître une rupture associée de l'urètre
membraneux +++ : la lésion vésicale peut masquer une lésion urétrale (pas de
globe).
- Lorsque la rupture vésicale est affirmée au scanner, une opacification rétrograde
prudente par le méat urétral (UCRM) est indispensable pour affirmer l'intégrité de
l'urètre avant de mettre en place la sonde.
- La chirurgie est indiquée en cas de rupture de vessie intéressant le col (rôle de
celui-ci dans la continence), en cas de mauvais fonctionnement du drainage (sonde
bouchée par des caillots) et, bien entendu en cas de complication septique.

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