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Généralités sur les Ouvrages d’Art

Définition d’un ouvrage d’art : Pour élaborer des routes, on


rencontre différents obstacles tels que les oueds ou rivières, les
montagnes, les chemins de fer et les autres routes. Pour les
franchir, on construit des ouvrages artificiels, qui portent le nom :
Ouvrages d’Art. Ce terme est composé de deux mots :
Æ « Ouvrages » indiquant les constructions,
Æ « Art » indiquant l’importance de l’aspect esthétique et
architectural dans ces constructions.

Exemples : Ponts, tunnels, buses, dalots.

Remarque : Lorsque un ouvrage d’art franchit un cours d’eau tel


qu’un oued, il porte aussi le nom d’ouvrage hydraulique.

Fév, 2006 M. Ben Ouézdou 2


OUVRAGE D’ART FINAL
Sommaire
 1 Famille d'ouvrages d'art
o 1.1 Les ouvrages d'art liés à des voies de communication
o 1.2 Les ouvrages d'art destinés à la protection contre
l'action de la terre ou de l'eau
o 1.3 Les ouvrages d'art destinés à la retenue des eaux
 2 Fonction d'un ouvrage d'art
 3 Nature d'un ouvrage d'art
 4 Ouvrages d’art routiers courants et non courants
o 4.1 Ouvrages d’art non courants
o 4.2 Ouvrages d’art courants
INTRODUCTION
Un ouvrage d’art est une construction de grande importance et de grande taille
appartenant à l'une au moins de ces catégories :

 ouvrage permettant de franchir un obstacle sur une voie de


communication routière, ferroviaire ou fluviale (dalot, buse, ponts,
tunnels) ;
 dispositif de protection contre l’action de la terre ou de l’eau (murs,
tranchée couverte, digue) ;
 dispositif de transition entre plusieurs modes de transports (quais et autres
ouvrages portuaires).

De tels ouvrages sont qualifiés « d’art » parce que leur conception et leur
réalisation font intervenir des connaissances où l’expérience joue un rôle aussi
important que la théorie. Cet ensemble de connaissances constitue d’ailleurs ce
que l’on appelle l’art de l’ingénieur.

Les ouvrages d'art liés à des voies de communication

 les ponts et viaducs(pont haut et long), qui sont des ouvrages aériens qui
permettent de franchir une rivière, un bras de mer, une vallée, une autre
voie de communication ou tout autre obstacle ;
 les tunnels, qui sont des ouvrages souterrains permettant le franchissement
de tous les obstacles similaires à ceux franchis par les ponts ;
 les structures en élévation comme les auvents de péage ou les grands murs
anti-bruit, les grands mâts et portiques1 ;
 les écluses(cloture en forme de bassin, faite de terre, de bois sur une
rivière ou un canal avec des portes ayant la capacité de retenir ou de
laisser passer l’eau) et les ascenseurs à bateaux sont des ouvrages d'art liés
à des voies navigables.

Les ouvrages d'art destinés à la protection contre l'action de la terre ou de


l'eau

 les murs de soutènement, qui sont des ouvrages assurant la stabilité des
terres
 les gabions,
 les digues.
 les perrés
Les ouvrages d'art destinés à la retenue des eaux

 les barrages, qui sont des grands ouvrages de génie civil.

Fonction d'un ouvrage d'art


La fonction d'un ouvrage d'art est liée à la fonction de la voie de communication
à laquelle il est lié :

 un ouvrage d'art routier supporte une route ;


 un ouvrage d'art autoroutier supporte une autoroute, qu'il s'agisse de la
voie principale ou d'une bretelle de raccordement à l'autoroute ;
 un ouvrage d'art ferroviaire supporte une voie ferrée.

Les voies navigables, canalisations d'eau (aqueducs) ou d'autres fluides ne


donnent pas lieu à la définition d'une typologie spécifique à ces voies.

Nature d'un ouvrage d'art


L'ouvrage d'art peut être qualifié selon le milieu dans lequel il est construit, on
rencontre ainsi des ouvrages d'art terrestres, maritimes ou de montagne.

Ouvrages d’art routiers courants et non courants


Les grands ouvrages routiers sont différenciés des petits par la dénomination
d’ouvrages non courants.

Ouvrages d’art non courants

Sont considérés comme ouvrages non courants, d'une part, les ouvrages
répondant aux caractéristiques suivantes :

 les ponts possédant au moins une travée de plus de 40 mètres de portée ;


 les ponts dont la surface totale de l'un des tabliers dépasse 1 200 mètres
carrés3 ;
 les murs de plus de 9 mètres de hauteur ;
 les tranchées couvertes ou semi-couvertes de plus de 300 mètres de
longueur ;
 les tunnels creusés ou immergés ;
 les ponts mobiles et les ponts canaux.

Sont également considérés non courants tous les ouvrages ne dépassant pas les
seuils précédents, mais dont la conception présente des difficultés particulières,
par exemple :
 celles provenant du terrain (fondations difficiles, remblais ou tranchées de
grande hauteur, risques de glissement…) ;
 celles sortant des conditions d'emploi classiques (grandes buses
métalliques d'ouverture supérieure à 8 mètres, voûtes en béton d'ouverture
intérieure supérieure à 9 mètres ou dont la couverture de remblai est
inférieure à ⅛ de l'ouverture intérieure, utilisation d'un dispositif ayant
pour but de limiter la charge sur l'ouvrage) ;
 celles liées à des modifications de solutions types résultant de la
géométrie du tracé ou de recherches architecturales (ponts très biais ou à
courbure prononcée…) ;
 celles dues à l'emploi de techniques non codifiées et n'ayant pas fait l'objet
d'un avis technique du SETRA (procédés de soutènement spéciaux…) ;
 celles dues au caractère innovant de la technique ou du procédé.

Ouvrages d’art courants

A contrario sont considérés comme ouvrages d’art courant les ouvrages ne


répondant pas aux critères ci-dessus.
Types des OA

• Buses et Dalots
• Tunnels
• Ponts; …

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Partie I:
Buses et Dalots

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Buses rigides: section circulaire

Autoroute A3: Tunis-Oued Zargua

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Buse souple: forme ovoïde

RN5, Oued Medjerdah

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Dalot simple: section rectangulaire (carré)

Intercommunale à Tunis

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Buses souples multiples

RN5, Oued Medjerdah

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Buses souples multiples

RN5, Oued Medjerdah

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Buses souples multiples

RN5, Oued Medjerdah

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Buse en charge RN5, Oued Medjerdah

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Dalots multiples (2 dalots triples)

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Dalot Multiples

Dalot triple

Autoroute A1: Tunis-M’saken

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Buses souples multiples

Remblais important

Autoroute A1: Tunis-M’saken

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Liaison entre tôles ondulées galvanisées:
Boulons

Autoroute A1: Tunis-M’saken

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Liaison entre tôles ondulées galvanisées:
boulons

RN5, Oued Medjerdah

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Dalots préfabriqués

RN3, Sidi Bouzid

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RN3, Sidi Bouzid
Dalot préfabriqué, face femelle

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Dalot triple préfabriqué, après sa mise en place

RN3, Sidi Bouzid

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Dalot semi-préfabriqué Autoroute A1: Tunis-M’saken

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Dalot triple coulé sur place

rotule
Encastrement

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Ferraillage d’un dalot

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Ferraillage et coffrage d’un dalot

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Dalot simple

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Dalot simple

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Coffrage de la traverse supérieur d’un dalot

Autoroute A3: Tunis-Oued Zarga

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Buses et dalots: comparaison
Type Buses
Dalots
Rigides Souples
Forme circulaire ovale rectangulaire
matériaux BA Acier BA
préfabriquées tôles Coulé sur place
Mise en oeuvre préfabriquées et ou éléments
assemblés préfabriqués
Emploi Petit débit Sous Remblais Les plus
important employés
Avantages Economique Supporte des Débit relativ.
charges important
importantes
Inconvénient petit débit Importé: Chère Plus de durée
de construction
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Partie II:
Tunnels

28
Type de Tunnel selon la destination

• Tunnel ferroviaire;
• Tunnel Routier;
• Tunnel hydraulique.

29
Tunnels
• Coût de construction+ Coût d’exploitation

Eclairage Surveillance Ventilation

Nécessaire pour les tunnels routiers

30
Ventilation des tunnels routiers

Longueur des tunnels routiers limitée

Tunnel Routier Tunnel Ferroviaire

1- Tunnel de Laerdal (Norvège, 2000); 1- Tunnel de St Gothard (Suisse, 2013);


L=24,510 km. L= 57 km.
2- Tunnel de St-Gothard (Suisse, 1980); 2- Tunnel de Seikan (Japon,1988);
L= 16,918 km. L=53,850 km.
2- Tunnel ss la Manche(FR-Ang,1994);
L= 50,450 km.
31
Ventilation des tunnels routiers
Air frais Air vicié

Tunnel à section voûté

Air vicié

Tunnel à section circulaire

Air frais

Air vicié Air frais

Tunnel cadre

32
Tunnel ferroviaire à Béjà

33
Tunnel Hydraulique
du Barrage de Barbara à Fernana
(Nord-Ouest de la Tunisie).

Longueur = 7 km; diamètre = 4 m.

Creusement par tunnelier


1999
34
Algérie

35
Aperçu général du chantier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


36
Entrée du Tunnel

Rail pour les wagons


des déblais

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


37
Train emportant les
6 voussoirs et les wagons vides de déblais

Vers le
Tunnel
Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)
38
Six voussoirs pour la couverture intérieure du tunnel

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


39
Deux voussoirs pour la couverture du tunnel

Clé de
voûte

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


40
Intérieur du Tunnel
ventilation

Couverture intérieure:
voussoirs assemblés

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


41
Intérieur
du Tunnel

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


42
Intérieur du Tunnel

Sortie d’eau

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


43
Vue à l’intérieur du Tunnel

Wagon Couverture
intérieure

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


44
Déblai sortant
dans un wagon

Tunnel Hydraulique de
Barbara (Fernana)
45
Limite entre tunnelier et
couverture par voussoirs

voussoir

lier
n ne
Tu

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


46
Tunnelier

47
Éléments du tunnelier
Bras pour l’avancement du tunnelier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


48
Éléments du tunnelier

Bras pour l’avancement du tunnelier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


49
Éléments du tunnelier
Bras pour la pose des voussoirs

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


50
Contact latéral Tunnelier-sol
À 3,5 km de longueur du tunnel

Coque du Sol
tunnelier (schiste)

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


51
Contact latéral Tunnelier-sol

Coque du Sol
tunnelier (schiste)

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


52
Appareil de commande du tunnelier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


53
Intérieur du Tunnel

Faisceau Laser pour vérifier la bonne direction du tunnelier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


54
Éléments du tunnelier
Plaque recevant le faisceau laser

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


55
Éléments du tunnelier
Vérin

Bras pour
l’avancement
du tunnelier

Tunnel Hydraulique de Barbara (Fernana)


56
Partie III:
Ponts

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Pont

Tablier
Appareil d’appui
Culée Culée
Pile

Fondation

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Pont

Tablier
Culée

Pile

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FONDATION
PROFONDE

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Semelle Filante

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APPUIS

Chevêtre

Culée

Pile

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Pile en voile

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Tablier

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Pont à Poutres
hourdis

re
ut
Po
e
ois
t
tre
En

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Pont Dalle
Dalle

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Appareils d’appui

Bossage fretté

Appareil d’appui
en caoutchouc fretté

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Equipements
Corniches
Etanchéité

Evacuation
des eaux

Joint de chaussée

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Pont à poutres

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Schéma transversal d’un pont à poutres

Hourdis

Tablier
Poutre
Entretoise
Appareil d’appui
Chevêtre

Pile
Colonne

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Pont à poutres

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Schéma transversal d’un pont dalle

Dalle
Appareil d’appui

Voile

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Pont Dalle

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Ouvrages « d'Art »
par M. Jean-Louis JOLIN, membre associé libre

Les mots ne sont jamais neutres. Si l'on utilise le terme « d'ouvrages


d'art » pour désigner les ouvrages de travaux publics, c'est sûrement
qu'au-delà de leur stricte utilité ils possèdent des qualités qui les rappro-
chent de ce qu'on appelle des « œuvres d'art ».

Le pont d'Asfeld à Briançon : ouvrage et œuvre d'art


e
Il faut convenir que jusqu'au début du xx siècle, la plupart du temps,
l'appellation « ouvrages d'art » était parfaitement justifiée. Qu'il s'agisse
d'un pont modeste ou monumental, l'ouvrage répondait au but qu'on lui
avait fixé, il était solide mais il apportait également un plus à la fois sur le
plan de l'organisation du paysage ou de la ville et sur celui de l'esthétique.

Il semble que depuis un bon demi-siècle, ces préoccupations aient


disparu de l'esprit des concepteurs. Le résultat n'est pas fameux et on ne
compte plus les ouvrages d'une parfaite médiocrité, aux proportions mal-
encontreuses, aux dispositions délirantes et, pour arranger le tout, aux fini-
tions bâclées. Il n'y a plus « d'art » dans les « ouvrages ». C'est le degré
zéro de la qualité architecturale. Il n'y a pas de quoi en être fier: nous ne
devons pas avoir à rougir de ce que nous laissons au jugement des généra-
tions à venir.

Le pont de Moulins-lès-Metz sur la Moselle : le degré zéro de la qualité architecturale

Qu'est-ce que l'Art ?


Mais qu'est ce que l'art? Comment se manifeste la qualité architectu-
rale ? Le mot, comme le concept, est bien difficile à cerner, les diction-
naires n'en donnent pas une définition convaincante. Physiologiquement,
l'art ne sert à rien; il n'aide pas un homme à accomplir une action, une
construction à tenir debout, un pont à franchir un espace.
Qu'est-ce que l'art?

L'art se situe dans le domaine de la sensibilité. S'il fait appel au cer­


veau, c'est bien plus à l'affectif qu'au raisonnement, c'est ainsi que
l'homme est sensible à un coucher de soleil, à une fleur, au visage d'une
jeune fille autant qu'il rejette l'affreuse grimace d'un enfant. C'est instinc­
tif, pas raisonné.

L'homme est sensible à la beauté. A la laideur aussi. C'est instinctif, pas raisonné
L'art n'est pas la manifestation de la richesse d'un peuple. C'est un
besoin inné et irrépressible pour l'homme de manifester son existence et sa
singularité. Dans tout le monde, les peuplades, des plus pauvres aux plus
riches, ont éprouvé le besoin de se parer de colliers, de bijoux qui les diffé-
rencient de l'animal.

C'est par l'art, par des monuments modestes ou spectaculaires que


l'on a témoigné de la puissance de certains hommes, de peuple ou de Dieu.
L'art est perceptible à un niveau plus modeste dans le « plus » que les
hommes ont ajouté à l'aspect purement fonctionnel de leurs constructions ;
les belles voitures, les locomotives puissantes, les ouvrages militaires et
les ponts, évidemment.

L'art ne se manifeste pas seulement dans le domaine visuel. Il appa-


raît avec autant de vigueur dans la littérature, la poésie, la chanson, la
musique... toutes activités que seule l'espèce humaine pratique de façon
consciente et qui l'aident à vivre, à survivre souvent. Je dirai donc que
l'art est un concept complètement inutile à l'animal, mais totalement indis-
pensable à l'homme. A un point tel que c'est l'art qui caractérise les civili-
sations. L'art reste généralement le seul témoin de celles qui ont disparu...
C'est dire son importance.

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Petra. L'art, par ses monuments, reste généralement le seul témoin des civilisations disparues
Comment se manifeste la qualité architecturale

Dans le domaine des ouvrages « d'art » l'art se manifeste par la qua-


lité architecturale. Le mot « harmonie » me semble le mieux adapté pour
résumer la notion de qualité architecturale. Je le préfère à « esthétique »
qui sonne mal à l'oreille et qui, comme tous les mots en « tique » sont
maintenant d'autant plus utilisés qu'ils ne veulent rien dire.

Harmonie donc, que Larousse définit par: « accord bien réglé entre
les diverses parties d'un ensemble », c'est-à-dire:

Le Petit Trianon à Versaille, caractéristique par sa mesure et par l'harmonie des proportions

- la justesse des proportions entre les divers composants de la


construction et entre les pleins et les vides ;

- l'équilibre des volumes, entre eux autant qu'avec le paysage ;

- l'expression la plus satisfaisante du mode constructif adapté au cas


précis. Il doit être le témoin de son époque par l'utilisation de la technique
la plus innovante car, disait Auguste Perret, « être moderne c'est faire ce
que les anciens auraient fait à notre place ».
La pyramide du Louvre (Pei, architecte)
L'expression la plus satisfaisante de la technique d'une époque

- une notion de l'échelle aussi exacte que possible, tant pour la


construction elle-même que celle-ci par rapport à son site ;

- l'affirmation du caractère voulu pour le programme. Par exemple:


monumental pour un palais de justice, modeste pour une maison paysanne ;

- enfin un peu d'aberration. C'est le piment qui donne du goût, qui


fait passer du « bâtiment » à « l'architecture ». Le dosage en est délicat et
le « trop » est souvent pire que le « pas assez ».
Une des «Folies» du parc de la Villette (B. Tschumi, architecte).
Un peu d'aberration est nécessaire pour pimenter une architecture.
Mais «trop» est parfois pire que «pas assez»

Et pour revenir aux ouvrages d'Art

Rien de mieux que de citer J.-R. Robinson (sur l'esthétique des ponts.
Dunod 1958) pour recentrer le propos :

« C'est par un abus du langage que l'on dit que l'on calcule un pont;
jamais un pont n'est sorti d'un système d'équations, telle Pallas casquée du
cerveau de Zeus. On ne calcule jamais que ce que l'on a projeté aupara-
vant. Le calcul indique si ce que l'on a conçu tient ou ne tient pas, si la
matière est bien utilisée ou si elle est gaspillée. On n'a d'ailleurs vraiment
projeté que ce que l'on a dessiné et c'est par le dessin que l'on juge et des
dispositions constructives et des qualités esthétiques. L'élaboration d'un
projet comporte en réalité l'élaboration d'une série de projets successifs,
soit d'ensemble, soit de détail, de plus en plus poussés, que l'on juge, cor-
rige et améliore à chaque stade à tous les points, économie, art de la
construction et style ».
L'arc d'Antrenas. Autoroute A75 (M. Virlogeux, ingénieur).
Un franchissement élégant où la structure est judicieusement exprimée

L'intervention de l'architecte
A des ingénieurs en panne de conception architecturale, des décideurs
ont proposé, ou imposé, la collaboration d'architectes. Cela n'a pas tou-
jours été efficace. Paul Séjourné assurait, il y a un siècle, ne pas connaître
de résultat heureux de la collaboration d'un architecte et d'un ingénieur à
l'érection d'un pont. Il précisait: « Le choix d'un architecte est fort diffi-
cile, car très rares sont les architectes qui sont véritablement préparés à
l'étude d'un pont et conçoivent ce que doit être le style d'un ouvrage
moderne. Il en a été d'ailleurs toujours de même: les architectes qui ont
décoré des ponts ont quelquefois oublié qu'un pont n'est pas une maison,
ni un théâtre, qu'on regarde de tout près, et les ont chargés de petites
choses qu'on ne voit pas de loin ». (Grandes voûtes. 1914, p. 102). Il avait
parfaitement raison car certains architectes ajoutant un décor par trop rap-
porté - comme de la crème fouettée sur un gâteau - ont parfois aggravé
l'aspect de certains ouvrages, déjà mal partis.

Mais depuis quelques décennies, des architectes se sont spécialisés


dans le domaine des ouvrages d'art et ils interviennent avec talent: beau-
coup de leurs œuvres sont systématiquement distinguées dans les
« RUBANS D'OR » du Ministère de l'Equipement. Ils ne sont pas nom-
breux : on a parlé de la « bande des 10 » et même de la « bande des 5 ».
C'est peu en effet mais la discipline est difficile et le marché étroit.

Pont sur l'autoroute A75 (Ch. Lavigne, architecte)


Participation heureuse d'un architecte de talent pour un ouvrage modeste

L'architecte - s'il a du talent évidemment et s'il a le sens des


ouvrages d'art, de leur échelle, de la perception qu'on en a - peut être le
complément efficace de l'ingénieur. Il sait apprécier l'intégration de l'ou-
vrage dans son site, déterminer la plus juste répartition des travées pour
allier l'économie à une harmonieuse répartition des appuis. Il peut égale-
ment, dans un site donné ou dans un but déterminé, proposer une solution
moins rabâchée que le traditionnel duo pile / tablier.

Il est capable de concevoir - pour chaque cas particulier - la corniche


qui soulignera le tablier, le garde-corps ou la protection latérale qui l'ac-
compagneront harmonieusement au lieu d'avoir l'air posés par erreur. Il
sait dessiner des piles, les traiter comme des sculptures monumentales sans
pour autant en torturer les coffrages.
Le viaduc de Longwy (Ch. Lavigne, architecte)
L'architecte intervient comme un sculpteur pour donner à chaque pile une volumetrie
satisfaisante.

Il connaît les matériaux, leurs caractéristiques, leurs limites, leur


pérennité, la façon dont la lumière joue sur leurs parements. Il saura donc
proposer - encore une fois pour chaque cas - le produit, le traitement de
surface et la polychromie qui conviennent. Il n'oublie pas que, dans la
construction, chaque détail est important et saura préciser - pour autant
qu'on lui demande à temps - les points singuliers qui éviteront des ratages
parfois spectaculaires.

Le surcoût architectural

Dès qu'on parle d'architecture des ouvrages d'art on évoque la notion


de « surcoût architectural ». C'est la différence de coût entre un ouvrage
ordinaire, moyen - je dirai presque, médiocre - et celui qui résulte de l'in-
tervention d'un architecte de talent. Les maîtres d'ouvrage imaginent
immédiatement une dérive des coûts importante, voire exorbitante. Elle
n'est pas liée au montant des honoraires qui vont de 0,3 % pour un grand
ouvrage à moins de 2 % pour un seul petit. Il est plutôt dépendant d'une
exécution sans défaut - ce qui semble normal - et d'ajouts ou de disposi-
tions plus coûteux que le strict minimum.

Il en est de l'architecture comme des voitures. Le coût de ces der-


nières varie dans des proportions de 1 à 10, voire davantage. Elles ont
pourtant toutes 4 roues, et ce ne sont pas les plus pratiques ou celles qui
offrent le plus de place qui sont les plus chères, au contraire. Le coût
dépend finalement de l'image que son propriétaire veut donner de lui-
même. Il en est de même pour une maison, un bureau, un palais ou un
pont. Un tiers de la dépense du pont Alexandre III à Paris a été affecté à la
décoration. C'est beaucoup. Cela le vaut bien. Le très bel arc d'Antrenas
(A75) imaginé par M. Virlogeux a coûté 25 % de plus qu'un pont ordi-
naire. La passerelle de Solferino par Mimram et le pont d'Orléans par
Calatrava ont très allègrement dépassé les ratios habituels, mais quelle
allure ! Quand c'est réussi cela vaut la peine de dépenser plus. Mais il est
possible de dessiner des ouvrages élégants sans dépasser les coûts habi-
tuels. C'est pourquoi je suis fier d'un surcoût nul pour les ouvrages que
j'ai dessinés pour les autoroutes A16 et A26 ainsi que la LGV Est.

Le viaduc d'Orléans sur la Loire (S. Calatrava, architecte).


Cher, très cher même, mais quelle allure.
Mon expérience d'architecte

Les ponts sont entrés dans ma vie il y a plus de 50 ans, lorsqu'à


l'épreuve orale d'architecture, à l'examen d'admission à l'Ecole des Beaux
Arts de Paris, le Jury me demanda de parler d'un sujet qui, à l'évidence, ne
faisait pas partie du programme: les ponts. Je réussis avec le peu de
connaissances que j'avais à 18 ans, à convaincre le jury. Mais ce n'est
qu'en 1970 que j ' e n t r a i vraiment dans le vif du sujet. La ville de
Sarreguemines était en train de bâtir un nouveau pont sur la Sarre. La DDE
avait prévu, pour descendre de la nouvelle voie à la berge de la rivière, un
escalier colossal en béton.

Il était si monstrueux que mon confrère Jacques de Bary, alors urba-


niste de la ville, s'en inquiéta et conseilla une solution plus allégée et
ludique. A sa demande, je conçus une rampe hélicoïdale en béton s'enrou-
lant en douceur autour d'une structure en acier auto-patinable, avec 6 hauts
mats en profilés du commerce portant des consoles raccordées souplement
par de larges goussets. L'ouvrage, adopté par le carnaval qui a suivi sa
construction, fait maintenant partie du paysage des bords de Sarre.

La rampe de Sarreguemines (J-L. Jolin, architecte). Elle s'enroule en spirale autour d'une
structure affirmée, en acier autopatinable.
J'ai dessiné un grand nombre d'ouvrages courants sur routes et auto-
routes. La marge de manœuvre, pour l'architecte, est alors particulièrement
réduite : contraintes techniques, coût minimum, parfois coups déjà partis.
Je me suis cependant attaché à en simplifier l'aspect - de tels ouvrages
sont en général très petits dans un paysage - à leur donner des proportions
équilibrées et à en rendre la perception animée grâce au modelé des piles
que je conçois comme des sculptures entre lesquelles on passe. Le béton,
qui se prête à toutes les formes et des coffrages suffisamment répétitifs
permettent encore bien des solutions.

Un des nombreux ponts sur l'autoroute A16 (J-L Jolin, architecte).


Pas plus cher qu'un pont médiocre, mais discret et élégant.

Avec Scetauroute pour les ouvrages des autoroutes A26 puis A16, j ' a i
mis au point une gamme d'ouvrages épurés, avec des piles simples mais
sculptées, des culées animées et un groupe corniche-garde-corps métal-
liques dont la coloration évolue tout au long du tracé. Pour la liaison
Sarreguemines - Bitche, l'ample courbe de la corniche répond à celles des
piles dont le volume exprime la fonction.

La technique détermine les formes et, pour des cas particuliers, j ' a i
proposé des architectures adaptées comme les piles à chevêtre de
Gondreville ou Koenigsmacker. Sur l'autoroute A l , il a fallu remplacer des
ouvrages sur les voies en circulation et je me suis attaché à exprimer au
mieux le système constructif du bureau d'études JMI. A Albi, Europe-
Etudes a proposé une travée unique dissymétrique ancrée dans un long
soutènement où j ' a i fait alterner galets et briques locaux. De l'autre côté,
vers la ville, j ' a i proposé deux pylônes cylindriques revêtus de la même
brique qu'à la cathédrale.

Pont sur l'autoroute A l (J-L Jolin, architecte). Il s'agissait de remplacer un pont sans
interrompre la circulation. L'architecture met en valeur le système constructif JMI.

J'ai œuvré dans le même esprit pour les grands viaducs où j ' a i fait en
sorte que l'ensemble soit bien à sa place dans le site et que les piles alors
très visibles de loin comme de près, toujours sculptées, aient une juste pro-
portion quelles que soient leurs hauteurs. A Chatelle (RN 59) les piles en
losange, donc vues de façon plus animée, s'ouvrent avec des chapiteaux à
la volumétrie assez simple. Le nombre de réemplois m'a permis de perfec-
tionner la forme des chapiteaux en passant des dièdres aux surfaces
courbes ou gauches, pour les viaducs de la Schwalb, de Meaux ou de
Jaulny (ces deux derniers étant des concours ratés) ou le petit viaduc du
TGV près du couvent de Benoite-Vaux (dans la Meuse) dont les piles dis-
symétriques se font face comme deux mains jointes.

Les grands ponts urbains constituent à chaque fois un cas particulier


qui implique une architecture spécifique, adaptée à une technique précise.
Pour le pont des grilles à Metz, il s'agissait de doubler un pont du
e
xvin siècle en plein centre ville, au droit d'une promenade fréquentée. J'ai
proposé d'être modeste en prolongeant la forme des arches, et moderne en
mettant en valeur, sur le parement aval, un béton contemporain coloré,
traité en désactivé et en cannelé-cassé.
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Viaduc de la Schwalb. Liaison Sarreguemines - Bitche (J-L Jolin, architecte). Un viaduc


doit s'inscrire avec élégance dans son site et les piles êtres conçues comme des sculptures

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Le doublement du pont des Grilles à Metz (J-L Jolin, architecte).


J'ai proposé d'être modeste et contemporain
Toujours à Metz sur la Moselle, l'élargissement du pont de Thionville
se présentait différemment. Construit en 1735 il a été habilement élargi un
siècle plus tard. La solution retenue, d'une architecture très contemporaine
ne masque pas les évolutions précédentes. Elle prolonge par des arrière -
piles effilées se retournant aux tympans en surface gauches, allant d'un arc
tendu, au fond, à une corniche rectiligne, en avant.

:
7 X

mm
A

L'élargissement du pont de Thionville à Metz (J-L Jolin, architecte). Sans masquer les
deux premiers états de l'ouvrage, le dernier stade exprime l'époque actuelle.

Un pont se conçoit dans l'espace et pas seulement longitudinalement :


les piles peuvent être sculptées dans le sens du courant. J'ai repris l'idée de
celles du pont Jean Monnet à Metz, pour en faire une longue pirogue sur le
pont de la Vezouze à Lunéville.

A Pontoise, sur l'Oise, il s'agissait de remplacer dans un site sensible


un vieux pont ferroviaire par trois ouvrages plus longs et posés plus haut
dans un site sensible. Avec le Bureau d'Etudes JMI nous avons gagné le
concours avec un triple ouvrage à 2 travées, dont un bow-string de 104 m.
La frilosité des communes riveraines nous a conduit à abaisser les arcs en
les raccourcissant et en multipliant les travées. Malgré sa grande largeur (3
fois 14 m) le viaduc s'inscrit avec une relative légèreté dans le paysage. En
contraste avec la structure métallique j ' a i voulu des soubassements massifs
et animés. J'y suis arrivé par des parements de béton dont les fortes canne-
lures sont interrompues par des coupures obliques.

ruina irf tm i tmtk'mlrni flulli riti irrfn imfct; tf(mwàtMm*mÉtm&i*ÊÊÊËm


Le viaduc de Pontoise (J-L Jolin, architecte) ou comment rendre supportable, dans un site
urbain, un triple ouvrage ferroviaire.

Vous retiendrez de cet exposé, j'espère, que la présence des archi-


tectes n'est pas inutile lors de la conception et pendant la construction
aussi, et que c'est un peu grâce à eux que les ouvrages sont « d'art ».
L'autre message est que, contrairement à ce que pensent certains ingé-
nieurs pour qui toute étude consiste à revenir au cas précédent, chaque
ouvrage - même modeste - est un cas particulier qui justifie une étude spé-
cifique. Même si l'on est tenté de croire que tout a déjà été imaginé, heu-
reusement il reste encore beaucoup à faire.
ARCHITECTURE DE QUELQUES OUVRAGES D’ART

PONT DE MOULIN (France)

PONT ERNEST KELLER (BERLIN)


VIADUC DE MILLAU
Ouvrages d’art : rôle des ingénieurs,
architectes et plasticiens
par Maurice NOVARINA
Membre de l’Institut
Architecte en Chef des Bâtiments Civils et Palais Nationaux
Ingénieur de l’École Spéciale des Travaux Publics (ETP)
et Jean-Pierre BAYARD
Ingénieur ETP
Docteur ès Lettres
Écrivain

vec l’évolution des techniques de plus en plus complexes, faisant appel à


A des connaissances dont l’ampleur nécessite la spécialisation, une rivalité
s’est tout d’abord instaurée entre ingénieurs et architectes, ceux-ci dépendant
d’un ordre bien établi grâce à son ancienneté. Les ingénieurs, qui ont su
calculer les structures, la stabilité des ouvrages, ont mal supporté que le nom
de l’architecte soit seul retenu, alors que son intervention n’apparaissait que
secondaire. Plus qu’une opposition, on reconnaissait une incompréhension
entre deux catégories d’hommes qui auraient dû s’entendre. Ce phénomène a
été particulièrement ressenti au moment du grand emploi du béton armé ; il a
fallu tout le génie des frères Perret pour donner ses lettres de noblesse à un
matériau riche dans ses infinies possibilités d’emploi (figure A).
À notre époque, nous comprenons mieux le message technique des architec-
teurs, ces merveilleux constructeurs médiévaux qui ont réalisé d’étonnantes
performances ; les cathédrales, ces bibles de pierre qui escaladent le ciel,
témoignent des connaissances des maîtres d’œuvre, à la fois techniciens avertis,
architectes et imagiers. Si leurs œuvres défient le temps, les noms de ces maîtres
sont le plus souvent inconnus, l’œuvre d’art restant anonyme, comme un dépôt
sacré appartenant à tous. Grâce à la statique, aux crémonats, aux épures du trait,
des voûtes en pierre ont pu être lancées à 49 m du sol, comme à Beauvais,
dentelle de pierre qui semble se jouer de la pesanteur, être ascension du ciel.
Toute cette période médiévale, qui a été bien décriée, n’est en réalité
qu’inventions ; utilisant principalement la force hydraulique, modifiant les
moyens de transport, une révolution s’est accomplie dans tous les domaines.
Notre époque se rapproche énormément de l’esprit d’invention médiévale, et
nous sommes en droit de nous demander ce qui peut correspondre à la réalisation
de ces milliers d’églises, dont le luxe nous émeut ; de l’an mil jusqu’à
l’achèvement du gothique flamboyant, il a été transporté plus de pierres que
pour la construction de toutes les pyramides d’Égypte. Toute la population d’une
ville pouvait entrer à la fois dans une cathédrale : quelle hautaine fantaisie a pu
présider à établir ces constructions aux si vastes proportions ? Par quelle audace
un constructeur a-t-il pu lancer une flèche à 161 m comme à Ulm, à 142 m comme
à Strasbourg ? Notre époque cependant rivalise avec ces édifices majestueux
8 - 1990

et orgueilleux, non pas dans la construction de cathédrales – notre foi s’est


émoussée – mais dans celle d’ouvrages d’art. Sans doute réalisons-nous des
chapelles où nous pouvons exalter nos sentiments à partir de nouveaux
matériaux, en faisant encore appel aux valeurs sacrées, mais c’est bien dans les
ponts, les barrages, les viaducs, que nous trouvons toute la richesse créatrice
C 4 505

de notre siècle. Les autoroutes, en dehors de l’ampleur de leurs courbes


harmonieuses, du confort de leur profil, de la qualité de leurs revêtements, sont
à l’origine de la création de ponts, de viaducs mais aussi d’aires de repos qu’il
faut aménager. Toutes ces constructions marquent notre époque ; comme nous
l’avons signalé, nous sommes en présence de la « route-moteur » qui traverse
le paysage, coupe et surplombe notre sol, car nous ne pouvons plus musarder
selon la fantaisie des chemins qui collent à la terre (figures B, C et D).

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Figure A – Piles du viaduc de Nantua-Neyrolles


Architecte : Maurice Novarina. Études : Scetauroute (Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

L’autoroute possède ainsi des ouvrages utilitaires construits tout d’abord dans
un souci d’efficacité et de rapidité ; les ingénieurs ont choisi une solution leur
paraissant satisfaisante sans trop se préoccuper de valeurs artistiques qui
auraient entraîné des études complémentaires et des délais supplémentaires peu
compatibles avec des plannings draconiens ; il fallait rattraper le retard pris par
la France dans la construction des voies rapides adaptées à une nouvelle cir-
culation. Puis, petit à petit, on a admis qu’avec un peu plus de temps de réflexion
il était possible de réaliser dans la même enveloppe budgétaire des ouvrages
mieux conçus, s’adaptant au cadre naturel ; les écologistes, en menant des
campagnes souvent tapageuses, ont fait prendre conscience que nous devions
rechercher les solutions les plus agréables à partir d’études plus poussées, que
nous n’avions pas à enlaidir le paysage mais bien à le protéger. L’ingénieur doit
toujours faire un choix dans la conception de son ouvrage : charpente métallique
ou bois, béton... Il faut en déterminer le type qui doit s’intégrer dans un site
particulier ; l’ouvrage qui franchit un fleuve large et plat ne peut avoir la même
structure qu’un pont établi dans une vallée encaissée. Il faut tenir compte non
seulement de la topographie du lieu, mais également de la nature du sol et des
différentes contraintes locales. On peut ainsi faire varier les dimensions des

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travées, même l’épaisseur d’un tablier ; il faut aussi déterminer si l’on crée un
pont en arc, par encorbellements, un pont à béquilles, un pont à poutre continue
de hauteur variable ou constante, un pont suspendu, un pont à haubans ; on
peut envisager un ouvrage symétrique ou dissymétrique : autant de possibilités
parmi lesquelles le choix d’une solution n’appartient pas totalement à l’ingénieur,
mais bien à un parti auquel il faut se soumettre. Comme le fait remarquer Michel
Virlogeux, Chef de la Division des Grands Ouvrages du SETRA (Service d’Études
Techniques des Routes et Autoroutes), on doit associer architecte et ingénieur
dès le début des opérations ; cet Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées
reconnaît que bien des erreurs de conception auraient été écartées si un homme
ayant le sens des proportions, des volumes, était intervenu lors de l’élaboration
du projet (figures E, F et G).
Le rôle de l’architecte ne se borne pas à esquisser les formes générales, en
leur donnant des proportions agréables à l’œil, mais il doit aussi étudier les
détails en les humanisant ; la hauteur d’un parapet, la moulure d’une rampe,
peuvent apporter une note agréable et rendre vivant un ouvrage ; il faut porter
un jugement critique sur tout ce qui pouvait paraître insignifiant et qui, tout à
coup, marque l’ouvrage en lui donnant son rythme intérieur. Freyssinet aimait
dire que tout est détail, que nous devons tout contrôler pour parvenir à l’unité
d’un ensemble créé par l’homme pour les besoins des hommes.
D’ailleurs, grâce à Freyssinet et à sa merveilleuse théorie de la précontrainte,
le béton est devenu un matériau noble ; au-delà de sa résistance, ses qualités
esthétiques surprennent : il sait se plier à toutes nos exigences. Sans doute sa
couleur peut subir des variations, tout comme la pierre d’ailleurs ; mais n’est-ce
pas là signe de vie ? L’architecte sait jouer avec les vibrations de la lumière.
Un de nos professeurs de ponts commençait ses cours en déclarant qu’un pont
requiert la participation de l’ingénieur, de l’architecte et d’un statuaire. Si la
facture de nos ouvrages d’art a été volontairement dépouillée, l’ornementation
paraît revenir à la mode. Le sculpteur est aussi un excellent conseiller qui s’intègre
dans une équipe formée dès l’origine du projet ; il doit y avoir osmose entre
ces divers courants qui concourent à réaliser dans une pensée commune un
ouvrage sans doute utilitaire, mais possédant aussi sa valeur plastique.

Figure B – Viaduc de Nantua-Neyrolles


Architecte : Maurice Novarina. Études : Scetauroute (Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

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Figure C – Pont de l’île de Ré Architecte : Charles Lavigne. Études : SETRA (Doc. Bouygues)

Des aires de repos permettent aux usagers des autoroutes de se détendre ;


elles doivent être attrayantes et même éducatives. Il faut donc les répartir
géographiquement, doter certaines de bâtiments de qualité, différents les uns
des autres, afin d’y abriter des manifestations propres à une région déterminée.
Toutes ces réalisations doivent posséder leur valeur particulière ; elles ne doivent
pas créer une monotonie par la répétition de locaux types ; il est de même fort
souhaitable de repenser l’architecture des gares de péage trop souvent
construites avec le seul souci de percevoir une dîme de passage, comme il était
d’ailleurs pratiqué au Moyen Âge ; l’indigence de conception de gares rééditées
à maints endroits engendre l’ennui, provoque la fatigue des conducteurs. De
même, les restaurants sont trop souvent établis dans un cadre banal, sans
recherche architecturale, et ne donnent pas le goût d’y flâner. Il faudrait cependant
savoir attirer, distraire grands et petits, leur apporter une salutaire détente.

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Figure D – Mur en terre armée du Pré-Martinet à l’extrémité du viaduc de Nantua-Neyrolles


(Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

Figure E – Viaduc de Sylans


Architecte : Bogumil Serafin. Études : Scetauroute (Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

Des sculptures ornent des autoroutes ; il faut créer des œuvres d’art qui peuvent
captiver ; elles ont un langage international et peuvent être comprises par la
sensibilité de tous ; il faut encourager des réalisations insolites à l’image de la
pyramide du Perthus, conçue à partir des déblais du chantier ; il est nécessaire
que l’imaginaire créateur suscite une expression artistique de qualité ; des
artistes et des critiques d’art devraient présider au choix de ces œuvres en déter-
minant leur emplacement. Plus spécialement nous aimerions que l’autoroute
A 40, Mâcon-Genève, soit réellement une liaison internationale puisqu’elle doit
desservir, en 1992, les Jeux Olympiques d’hiver. Il faut que la France affirme sa

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OUVRAGES D’ART : RÔLE DES INGÉNIEURS, ARCHITECTES ET PLASTICIENS ______________________________________________________________________

position culturelle, qu’elle se montre compétente par rapport aux expériences


faites tant à Mexico qu’à Séoul, où des œuvres d’art ont souligné les exploits
des athlètes ; on ne peut séparer la beauté du corps humain de sa puissance
spirituelle, son expression la plus achevée. Nous aimerions que la France, qui
a toujours eu un grand rayonnement à l’étranger par la hardiesse et la qualité
de ses artistes, montre son effort dans la création, qu’elle soit un exemple pour
les autres nations. Ce serait adapter le souci des premiers organisateurs de ces
jeux, les grecs, pour qu’il fallait honorer tant le physique que le moral.

Figure F – Pont de Seyssel


Architectes : Alain Spielmann et Jean Berlottier. Études : SETRA
(Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

Figure G – Viaduc de Bellegarde


Architecte : Philippe Fraleu. Études : Scetauroute (Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

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Sur cet axe routier, nous pensons voir surgir l’exposition mondiale des arts,
en rendant hommage à des Andréou, Calder, Cardot, César, Albert Féraud,
Leygues, Étienne Martin, Miro, Oudot, Nicolas Schöffer, Soulages, Vasarely et
tant d’autres artistes que nous aimons et fréquentons. Un souhait qui sans
doute se réalisera car il est dans la lignée de notre passé créateur.
Ainsi l’autoroute unit fraternellement les humains, les mondes : elle est le
cheminement harmonieux qui conduit la pensée, et ses ouvrages d’art resteront
la marque de notre époque, de notre civilisation qui a ses beautés et sa grandeur
(figure H).

Figure H – Viaduc de Francin


Architecte : Bogumil Serafin. Études : Scetauroute (Doc. Scetauroute Rhône-Alpes-Bourgogne. Photo Patrice Pettier)

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Ouvrages d’art
Aspect architectural et environnement
par Anne BERNARD-GÉLY
Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées
Professeur à l’École nationale des ponts et chaussées
Adjoint au directeur de la Sécurité et de la circulation routières
et Jean-Armand CALGARO
Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées
Professeur à l’École nationale des ponts et chaussées
et au Centre des hautes études de la construction
Chef de la mission Recherche et réglementation du SETRA

1. Ouvrages d’art et environnement ....................................................... C 4 501 - 2


2. Quelques règles élémentaires d’esthétique ..................................... — 2
2.1 Première règle : rapport des dimensions .................................................. — 2
2.2 Deuxième règle : un ouvrage ne doit pas fermer l’espace ...................... — 3
2.3 Troisième règle : bonne ordonnance de la structure................................ — 5
2.4 Quatrième règle : mise en valeur de l’intention structurale .................... — 5
2.5 Cinquième règle : intégration de la structure dans son environnement — 6
2.6 Dernière règle : aspect final des parements.............................................. — 6
3. Préoccupation esthétique dans la démarche du projeteur .......... — 7

ès les premières esquisses, l’ingénieur doit se préoccuper de l’aspect de


D son ouvrage. Ni la réalisation d’un exploit technique, ni la recherche de
l’économie à tout prix ne peuvent justifier qu’on enlaidisse villes et paysages.
Projeter des ouvrages qui soient réellement des ouvrages d’art doit être une
préoccupation essentielle de l’ingénieur.
5 - 1997
C 4 501

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OUVRAGES D’ART ______________________________________________________________________________________________________________________

1. Ouvrages d’art 2. Quelques règles


et environnement élémentaires d’esthétique
Les problèmes relatifs à la qualité paysagère et architecturale des L’analyse architecturale d’un grand nombre de ponts mène à pro-
ouvrages routiers sont traités dans une circulaire ministérielle en poser certaines règles qu’il semble nécessaire de respecter pour la
date du 24 septembre 1984. Cette circulaire insiste sur le fait création de formes harmonieuses ; mais il n’est pas possible
qu’aucune décision quant à la qualité paysagère et architecturale des d’arrêter des règles permanentes et universelles d’esthétique car
ouvrages routiers ne doit être prise sans une connaissance suffisam- elles sont, au moins en partie, fonction de la mode, de l’évolution
ment approfondie du site (caractère des espaces, perception de de la technique et des impératifs économiques et, de plus, elles ne
l’ouvrage, potentialités en aménagement, etc.). C’est à partir de cette sont ni suffisantes, ni peut-être toujours nécessaires ; nous en
analyse du site et d’une réflexion sur le projet que le projeteur aboutit citerons néanmoins quelques-unes parmi les plus couramment
au choix de l’objectif paysager et architectural et ce, dès le stade admises. En les respectant, l’ingénieur fera, en général, un ouvrage
de l’étude préliminaire. acceptable et, s’il y ajoute du talent, il fera un ouvrage esthétique ;
La circulaire du 5 mai 1994, relative aux modalités d’instruction cependant le respect de ces règles ne doit pas gêner son esprit créatif.
des dossiers techniques pour les opérations d’investissements
routiers, reprend ces idées et décrit, en particulier, la consistance
minimale d’une étude préliminaire d’ouvrage d’art vis-à-vis des 2.1 Première règle : rapport
problèmes d’environnement :
des dimensions
— établissement d’un programme précisant l’ensemble des
contraintes, en particulier les contraintes esthétiques (qualité du
Il est fondamental de donner à l’ouvrage de bonnes proportions
site et de l’environnement, site classé, etc.) ; (figure 1). En effet, une caractéristique importante de la beauté d’un
— choix du parti (analyse des solutions envisageables) en monument est donnée par l’harmonie de ses proportions dans
proposant l’adoption d’un objectif architectural. l’espace : la hauteur, la largeur et la profondeur, le contraste entre
Pour les ouvrages courants, il est dit : « lorsqu’un objectif archi- surfaces pleines et ajourées ainsi que le rapport clair – obscur
tectural spécifique conduit à des caractéristiques particulières, provoqué par l’ombre et la lumière.
l’étude préliminaire contient les documents graphiques nécessaires Le choix des proportions n’est pas simple et dépend du caractère
à la compréhension de l’intention ». Quant aux ouvrages non que l’on veut donner à l’ouvrage (robustesse, minceur, etc.) ; les
courants, il est précisé : « l’étude préliminaire de l’ouvrage comporte proportions ont, bien sûr, une importance très inégale selon
au moins quelques dessins sommaires des solutions envisageables, qu’elles se rapportent à des dimensions de parties principales ou
des perspectives dans le site et une analyse détaillée du programme secondaires et selon la position du point de vue.
et des éléments de choix du parti ».
En plus des proportions entre les diverses dimensions géo-
En effet, contrairement à l’objet d’art qui a une beauté intrin- métriques de l’ouvrage, il est nécessaire de veiller aux proportions
sèque, un pont ne saurait être dissocié de son environnement, entre les masses de ses éléments. C’est le cas, en particulier, du
dont il fait partie intégrante. Il est donc indispensable que l’auteur rapport entre les piles et le tablier. D’une façon générale, un
du projet connaisse bien le site dans lequel l’ouvrage sera placé et ouvrage doit nécessairement donner une impression de stabilité et
en tienne compte au niveau de la conception. de sécurité (figure 2) : il convient donc de proscrire les appuis trop
La préoccupation de l’aspect doit toujours être présente au cours grêles (figure 3), susceptibles de créer un sentiment de malaise.
de l’étude de l’ouvrage, jusqu’au niveau de l’exécution. Ce serait, Dans le cas de piles de grande hauteur, la prise en compte des
en effet, une grave erreur de penser qu’il suffit de quelques critères de résistance (flambement) et de sécurité lors de la
aménagements partiels et tardifs (corniche, garde-corps), ou d’une construction du tablier conduit généralement à leur conférer des
décoration surajoutée, pour essayer de rendre plus beau ou dimensions proportionnées à celles du tablier.
simplement convenable un projet dont les formes générales ne Le problème est nettement plus ingrat à traiter lorsqu’il s’agit
seraient pas harmonieuses au départ : ce sont les grandes lignes du d’un tablier de grandes portées (donc relativement épais) et dont
pont qui commandent l’impression plus ou moins agréable qu’il pro- le profil en long est proche d’un terrain naturel sans relief.
duira, ce qui n’exclut pas la nécessité d’en étudier avec soin tous
les détails. On peut, dans ce cas, être amené à prévoir des piles très
massives qui souligneront l’impression de robustesse donnée par
L’intervention des architectes dans la conception des ouvrages l’ouvrage (figure 4).
d’art est relativement courante. Mais les rôles ne doivent pas être
confondus : l’ingénieur reste le responsable de son projet comme La question des ouvertures sous un ouvrage, ou plus générale-
le souligne la lettre-circulaire ministérielle du 21 novembre 1989 ment du choix de la travure, est des plus importantes. D’une manière
relative à la qualité des études d’ouvrages d’art : générale, les ouvertures de forme voisine du carré sont maladroites,
qu’il s’agisse de petits ou de grands ponts. En modifiant la répartition
« Il doit être entendu que l’étude d’un ouvrage d’art doit être des travées ou en s’orientant vers un autre type de structure, le
menée par un ingénieur spécialiste, de compétence proportionnée projeteur peut toujours trouver une solution conduisant à des ouver-
à l’importance et à la complexité de l’ouvrage, et personnellement tures plus équilibrées d’aspect satisfaisant (figure 5). Si, comme
attentif aux aspects esthétiques de la conception. Pour les ouvrages nous l’avons dit, une ouverture carrée est plutôt maladroite, une
qui méritent une recherche architecturale particulière, et cela doit ouverture rectangulaire allongée dans le sens de la hauteur (cas d’un
être systématiquement le cas pour les grands ouvrages ou les pont cadre de faible largeur ou de fort tirant d’air) (figure 6) est fran-
ouvrages en milieu urbain, il est nécessaire qu’un architecte soit chement disgracieuse.
associé à la conception dès le début de celle-ci, le spécialiste restant
responsable de l’ensemble de la conception ».

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Figure 3 – La minceur des poteaux donne une impression de fragilité


(doc. SETRA)

Figure 1 – Dans le cas d’appuis de grande hauteur,


un pont à béquilles est préférable à un pont-dalle

Figure 4 – Ouvrage bien proportionné et de bonne qualité d’aspect


(doc. SETRA)

Figure 2 – La forme et les proportions des piles donnent une bonne


impression de stabilité (doc. SETRA)

2.2 Deuxième règle : un ouvrage


ne doit pas fermer l’espace
Selon la circulaire du 24 septembre 1984, on distingue :
— les ouvrages essentiellement destinés à s’adapter au site exis-
tant sans intention de transformer celui-ci ;
— les ouvrages destinés à constituer un élément d’un site futur ;
— les ouvrages inévitablement voués à retenir l’attention ;
— les ouvrages sur lesquels on veut attirer l’attention.
La première catégorie est principalement constituée d’ouvrages Figure 5 – Ouvrage qui dégage particulièrement bien l’espace
aux dimensions modestes : ils doivent en général être aussi (autoroute A 13) (doc. SETRA)
« transparents » que possible et ne pas s’imposer. Dans le cas d’un
passage supérieur d’autoroute, par exemple, où il est indispensable
de dégager la meilleure visibilité pour l’automobiliste, il faut éviter
la multiplication des appuis intermédiaires ou la présence de culées

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Figure 6 – Mauvaises proportions : le tirant d’air est trop grand Figure 7 – Viaduc de Garabit et emplacement du nouvel ouvrage
pour l’ouverture (doc. SETRA) (doc. DDE du Cantal)

trop massives. On préfère donc projeter un ouvrage de portée net-


tement plus importante que la largeur de la plate-forme autoroutière
et, si possible, sans appui sur le terre-plein central. Il sera intéressant
de choisir un tablier élancé et de chercher à diminuer l’importance
des culées en les éloignant de la plate-forme ou en les remontant
suffisamment au sommet des talus.
Dans des contrées vallonnées, il pourra être judicieux de prévoir,
si le terrain est de bonne qualité, un pont à béquilles qui, dégageant
bien l’espace, est en général plus esthétique et peut être choisi pour
marquer un point particulier d’un tracé (point haut, col) et rompre
la monotonie d’une autoroute.
Par contre, pour un grand ouvrage, les contraintes techniques
s’imposent et le pont devient nécessairement un élément dominant
de l’environnement dont il faudra tirer le meilleur parti.
C’est pourquoi, un tel ouvrage doit être traité avec beaucoup de
sensibilité. Même lorsqu’il s’agit d’un pont sur lequel on veut attirer
l’attention, il ne doit pas masquer le site dans lequel il est implanté,
mais le mettre en valeur. Par exemple, lorsque nos anciens ont
construit, il y a un siècle, le viaduc de Garabit dans une vallée peu
marquante, ils ont réellement embelli et mis en valeur le site ; la tâche
fut donc encore plus difficile lorsque nos ingénieurs ont eu à projeter Figure 8 – Pont sur la Truyère (doc. DDE du Cantal)
un nouvel ouvrage dans cette vallée pour porter l’autoroute A75. Le
parti retenu (figure 7) fut d’implanter l’ouvrage loin du précédent, Le projeteur devra souvent faire preuve d’imagination ; par
à 1 100 m, en veillant à ne porter aucune atteinte visuelle au site de exemple, pour le viaduc du Magnan (cf. article Conception des
Garabit et de projeter un élégant pont à béquilles (figure 8 ) ponts [C 4 500] dans ce traité), le système des doubles piles parti-
enjambant de façon semblable, avec majesté, la vallée. culièrement apprécié pour la construction en encorbellement, per-
Dans un grand nombre de cas, c’est la recherche de l’impression met d’atténuer quelque peu la lourdeur des poutres continues à
de légèreté qui prédominera. Les développements récents en hauteur variable surtout si les piles vont en se rétrécissant vers le
matière de conception des structures (précontrainte extérieure, haut ; le profil en I des piles contribue également à la beauté de
extension du domaine d’emploi des ponts à haubans aux portées l’ouvrage.
moyennes) et de qualité des matériaux (bétons de fibres, bétons à On remarquera aussi (figure 9) l’élégance du pont de Cheviré,
hautes performances) permettent, dans les cas complexes, d’alléger ouvrage très large au gabarit contraignant, dont les études de
substantiellement le poids des tabliers. conception assez complexes ont permis d’en alléger l’aspect : une
On préférera souvent, pour des portées supérieures à 70 m, un solution avec deux tabliers parallèles a été écartée car ses appuis
tablier d’épaisseur variable dont l’aspect paraîtra plus agréable : les encombraient trop l’espace. La force du caisson nervuré transver-
droites donnent toujours une impression de rigidité et leur forme salement à âmes inclinées et la conception du chevêtre en tête des
technique et dépouillée contraste avec celles de la nature. Si piles, ainsi que celle du socle à la base des appuis lui donnent une
l’épaisseur de l’ouvrage est constante, il faut veiller à la forme de impression de puissance et de majesté.
la corniche et des piles pour ne pas donner une impression de rigi- La technique des ponts à haubans permet de donner un très
dité, surtout si le site en vaut la peine. grand élancement au tablier du pont et confère à ce type d’ouvrage
La conception des piles elles-mêmes joue également un rôle un charme esthétique indiscutable.
capital dans l’aspect général de l’ouvrage. Pour des franchisse-
ments de vallées profondes, les appuis doivent paraître les plus
« transparents » possibles pour ne pas donner l’impression
d’obstruer la vallée ; le critère essentiel sera donc de chercher à
réduire au maximum la somme des masses des piles.

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Figure 9 – Pont de Cheviré (photo G. Forquet)

2.3 Troisième règle : bonne ordonnance


de la structure

L’ordre est expression de beauté et inversement le désordre crée


un malaise. Un observateur est troublé et se sent mal à l’aise
lorsque les directions des membrures, supports, arêtes et autres Figure 10 – Pont en arc de Trellins (photo G. Forquet)
sont trop diverses.
Il s’agit donc de limiter le nombre des directions dans l’espace ;
dans le cas de certains ouvrages biais, par exemple, les lignes Il convient de respecter les principes suivants :
d’appui non parallèles sont à éviter. L’unité dans les lignes est — donner, dans toute la mesure du possible, la même hauteur
également à rechercher ; c’est ainsi que l’aspect donné par des aux deux tabliers, mêmes s’ils sont confectionnés à partir de maté-
lignes à courbure discontinue n’est jamais heureux car l’œil est très riaux différents (béton et acier, par exemple) ;
sensible à de telles discontinuités. Il convient de traiter les profils — éviter impérativement de raccorder deux travées de hauteur
en long des tabliers en raccordant les parties rectilignes par des variable (la pile-culée apparaîtrait comme une « béquille » destinée
arcs de parabole et de ne jamais passer brutalement d’un segment à soulager un ouvrage qui aurait du mal à se porter lui-même) ;
de droite à un arc de cercle. — si l’une des deux travées est de hauteur variable, prévoir une
Il convient également d’éviter les profils en long concaves : ils partie de hauteur constante suffisamment longue pour que la pile-
donnent la fâcheuse impression que le tablier est en train de plier culée apparaisse comme un appui courant ;
sous son poids propre ! Lorsqu’un tel profil en long ne peut être — éventuellement, traiter la pile-culée comme un ouvrage fonc-
évité, le tablier doit être impérativement conçu de hauteur tionnel pour marquer la séparation entre les deux ouvrages
constante. Il convient aussi de rechercher, selon le cas, la symétrie (figure 11).
ou un rythme particulier. La notion de rythme procure souvent de Le second problème concerne l’unité de structure des ouvrages
la satisfaction au regard, mais il faut absolument éviter toute courants. Ainsi, la coexistence de murs en aile et de murs en retour
exagération qui renverserait l’impression. donne un aspect peu satisfaisant (figure 12), tout comme la dissy-
Pour le pont en arc de Trellins (figure 10), dont on pourra métrie flagrante d’un ouvrage « hybride » (figure 13). Sur un
remarquer les proportions harmonieuses, le concepteur a cherché tronçon routier ou autoroutier de caractéristiques géométriques
à simplifier la structure en supprimant l’entretoise de liaison prévue hétérogènes, il est déconseillé de projeter des ouvrages de
entre les deux fûts de la pile principale, au droit des culées de l’arc, caractéristiques hétérogènes, c’est-à-dire les uns, par exemple,
car elle constituait un élément supplémentaire dans le système avec travées de rive sur talus et les autres avec culées apparentes.
formé par l’arc, le tablier et les pilettes. De même, dans la disposition
des pilettes entre l’arc et le tablier, il a préféré ne pas prévoir de pilette
à la clé pour bien marquer l’absence de liaison et a donc projeté
un nombre pair des pilettes.
2.4 Quatrième règle : mise en valeur
Citons, pour terminer, quelques problèmes parmi les plus ingrats
de l’intention structurale
à traiter. Le premier concerne les « piles-culées », c’est-à-dire les
appuis situés à la jonction de deux ouvrages qui peuvent différer
Le fonctionnement statique apparent d’un ouvrage doit être intel-
par le mode de construction ou même par la structure. Ce cas se
ligible, procurer une bonne impression de stabilité et tendre vers
présente, par exemple, lorsque les deux ouvrages constituent deux
une grande simplicité. L’observateur a besoin de sentir intuitivement
lots confiés à des entreprises différentes et franchissent des
la fonction d’utilité de l’ouvrage et la forme qui en découle ; « la
brèches de nature différente. Leur juxtaposition sans précaution
forme suit la fonction » pourrait-on dire pour cette règle. La forme
peut conduire à une esthétique très discutable.
de la structure porteuse, qui dépend du matériau, la descente de
charges, les transferts d’efforts doivent paraître simples et clairs.

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Dans un ouvrage, les parties composantes, éléments porteurs et


éléments portés, doivent être nettement exprimées et la nature de
leur liaison doit le plus souvent être affirmée ; par exemple, le
mécanisme de la structure d’un pont à béquilles inclinées, avec
articulation à la base est bien apparent.

2.5 Cinquième règle : intégration


de la structure
dans son environnement
Le concepteur doit réfléchir à l’incidence qu’aura l’échelle de
l’ouvrage sur le site, en imaginant notamment la manière dont
l’ouvrage sera éclairé ; un petit ouvrage (quelques mètres) passera
plus ou moins inaperçu, tandis qu’un ouvrage important s’imposera
d’autant plus que ses dimensions seront plus importantes, jusqu’à
devenir un élément majeur du site (par exemple, les grands ponts
suspendus). Cette règle a une certaine incidence sur le choix de la
Figure 11 – Pile culée entre le viaduc et le pont de Gennevilliers structure, du matériau, de la couleur de l’ouvrage ou de ses
(photo JAC) équipements.
Les dimensions des constructions doivent aussi être à la mesure
de l’homme : les formes lourdes et agressives angoissent l’obser-
vateur ; il faut donc impérativement les éviter. C’est pour cela que
le projet doit être contrôlé de tous les points de vue que pourra pren-
dre le futur observateur. Le dessin géométrique d’une élévation peut
être très satisfaisant mais s’avère souvent insuffisant. Plusieurs pers-
pectives en diagonale doivent être réalisées (si besoin de façon infor-
matisée) car elles peuvent révéler des recoupements inélégants. Il
faut également tenir compte de l’effet des ombres et de la lumière
qui peuvent modifier l’aspect de l’ouvrage.

2.6 Dernière règle : aspect final


des parements
Un bel ouvrage est avant tout un ouvrage dont l’exécution est soi-
gnée. L’intégration d’un pont dans l’environnement dépend
largement du choix des matériaux de construction et de la texture
des surfaces. Par exemple, des surfaces rugueuses sont bien
Figure 12 – Déséquilibre certain entre les extrémités adaptées aux piles et aux culées alors qu’une texture lisse convient
gauche et droite (doc. SETRA) mieux aux corniches, aux poutres et aux colonnes élancées. De
même, en règle générale, une surface mate est plus appréciée qu’une
surface brillante.
En plus de la texture, la couleur du parement est un élément
essentiel de l’effet esthétique global que présentera l’ouvrage
lorsqu’il sera réalisé ; les différents types de matériaux ou de
composants permettront de jouer sur cet effet.

Figure 13 – Ouvrage disgracieux (doc. Slater)

Figure 14 – Conséquences d’un défaut d’étanchéité (doc. SETRA)

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Figure 15 – L’ornement et les équipements ne sont pas à l’échelle Figure 16 – Enchevêtrement de poteaux (doc. SETRA)
de l’ouvrage (PS sur l’autoroute A61) (doc. SETRA)

Au cours de la mise au point du projet, le concepteur devra


également toujours penser à l’exécution et éviter des dispositions
irréalistes ; dans le cas d’un ouvrage en béton, il ne devra pas
prévoir des formes trop complexes ou délicates à coffrer et à
démouler sans être sûr que l’aspect final correspondra à son
attente.
Le projeteur doit aussi penser aux détails dont l’oubli pourrait
nuire à l’aspect final de l’ouvrage, notamment à tout ce qui
concerne l’étanchéité et l’évacuation des eaux (figure 14).
La beauté n’ayant besoin d’aucun ornement et se suffisant à elle-
même, un ouvrage gagne à être sobre ; toutefois, l’ornement (pare-
ments ouvragés, corniches, garde-corps spéciaux, etc.) peut inter-
venir pour agrémenter et parfois souligner l’architecture, à
condition d’être à l’échelle de l’ouvrage (figure 15), mais il doit
alors être prévu dès l’avant-projet.

Figure 17 – Effet désagréable : pile en retrait au droit du gousset


3. Préoccupation esthétique (doc. SETRA)
dans la démarche
travées, leurs proportions, la forme du tablier, celle des appuis, la
du projeteur présence éventuelle de culées apparentes.
En deuxième phase, le projeteur doit inventorier les différents
La démarche du concepteur présentée dans l’article Conception types de structures techniquement envisageables, puis ne retenir
des ponts [C 4 500] doit être suivie en prenant en compte l’aspect que des solutions répondant à l’intention esthétique.
esthétique du futur ouvrage.
Afin de mieux percevoir les solutions envisageables, le projeteur
Dans la première phase, le recueil des données, les données natu- peut faire appel aux techniques d’approche visuelle telles que pers-
relles sont à compléter en fonction des préoccupations esthétiques ; pectives, photomontages ou même maquettes : ces techniques, qui
orientation de l’ouvrage, façon dont il sera éclairé par le soleil, points sont d’une très grande aide pour le projeteur, permettent de juger
de vue réels. les volumes et les formes qui peuvent difficilement être appréhendés
Dans le cas d’ouvrages hors agglomération, le point de vue à par le dessin courant à base de plans, élévations et coupes, car on
considérer est celui des automobilistes circulant sous l’ouvrage ; voit presque toujours un ouvrage dans ses trois dimensions.
quant aux ouvrages urbains, il y a lieu d’envisager des points de Les vues en perspective, élaborées à partir des points de vue d’où
vue variés. Il est également indispensable de savoir comment l’ouvrage pourra être regardé, permettent d’imaginer l’ouvrage tel
l’observateur verra l’ouvrage ; un automobiliste passant sous un qu’il apparaîtra en réalité ; le simple examen de vues en perspective
ouvrage et roulant vite verra l’ouvrage d’assez loin et observera sur- suffit en effet pour se rendre compte, par exemple, qu’un pont droit
tout la silhouette, les proportions, la forme générale et la couleur ; et un pont biais identiques en élévation présentent un aspect très
par contre, en milieu urbain, l’automobiliste roulant lentement, le différent lorsqu’ils sont vus dans leurs trois dimensions, que les
piéton et le riverain auront l’occasion, quand ils côtoieront et verront lignes d’appuis même peu nombreuses peuvent se transformer en
la structure, de remarquer les détails constitutifs, les parements, les une forêt enchevêtrée de poteaux (figure 16) ou qu’une pile en retrait
défauts qui résulteront d’un mauvais entretien, etc. au droit d’un gousset peut procurer un effet désagréable suivant le
C’est dans un souci d’objectivité que l’analyse des données rela- point de vue (figure 17).
tives au site s’appuiera sur des photographies prises des points de Une fois le choix de l’ouvrage effectué, la troisième phase de la
vue définis au préalable. À partir de l’ensemble des données démarche du projeteur consiste à étudier la forme et les détails des
concernant l’ouvrage futur et son environnement, il s’agit pour le différents éléments de la structure, la mise en proportion et
projeteur de définir une forme générale qui soit en harmonie avec l’harmonisation de ces éléments les uns par rapport aux autres.
l’environnement, appelée l’intention esthétique. Cette forme
générale sera obtenue en jouant sur les portées et le nombre des

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