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LE TYPE IDÉAL COMME INSTRUMENT DE LA RECHERCHE

SOCIOLOGIQUE
Jacques Coenen-Huther

Editions Technip & Ophrys | « Revue française de sociologie »

2003/3 Vol. 44 | pages 531 à 547


ISSN 0035-2969

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R. franç. sociol., 44-3, 2003, 531-547

Jacques COENEN-HUTHER

Le type idéal comme instrument


de la recherche sociologique

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RÉSUMÉ
L’expression « type idéal » fait partie du vocabulaire courant de la sociologie. Ces ter-
mes sont néanmoins fortement chargés d’ambiguïté. Les débats récurrents en la matière ont
porté non seulement sur la signification et la portée méthodologique de la notion mais aussi
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sur son origine. Celle-ci est le plus souvent située dans une tradition intellectuelle allemande
mais elle émerge également dans une sociologie d’inspiration durkheimienne. Le type idéal
est lié tantôt à un procédé de conceptualisation propre aux sciences sociales, tantôt à une
volonté de réduction sélective de complexité, tantôt à une méthode particulière. En fait, le
type idéal est un modèle. Dans la pratique de la recherche de terrain, la distinction entre
type idéal et type moyen s’estompe cependant souvent. Pourtant si le type idéal était ramené
à une synthèse de faits d’observation, c’est la raison d’être du concept qui s’en trouverait
compromise.

L’expression « type idéal » fait actuellement partie du vocabulaire courant


de la sociologie. Rares sont les ouvrages de référence – manuels, diction-
naires, encyclopédies – qui n’en font pas mention. Rares sont pourtant les
termes si chargés d’ambiguïté et si propices à susciter des malentendus de
tous ordres. Il y a près d’un demi-siècle, Don Martindale voyait dans la notion
ainsi évoquée et les débats qui l’entouraient « a major mystery story » ; il se
demandait ironiquement s’il ne conviendrait pas de « reconstruire la scène du
crime » pour y voir plus clair (1959, p. 57). Quelques années plus tard,
Lazarsfeld jugeait « regrettable » l’incessante discussion « confuse » au sujet
des types idéaux (Lazarsfeld et Oberschall, 1965, p. 198). Dans la même
veine, Raymond Boudon estimait que la notion de type idéal contribuait
davantage à « décrire une difficulté » qu’à définir une méthode (1969,
p. 101). À peu près à la même époque, Pierre Bourdieu et ses collaborateurs
présentaient le type idéal comme un instrument précieux pour autant « que
soient levées les ambiguïtés » qui l’entourent (1968, p. 79). Plus tard, Boudon
et Bourricaud reviendront sur la question, indiquant que cette notion, décidé-
ment, « paraît résister à l’exégèse » (1982, p. 621).
De fait, la littérature exégétique en la matière est considérable. Ce n’est pas
seulement la signification et la portée méthodologique de la notion qui firent
l’objet de débats récurrents : c’est son origine même. Le plus souvent, celle-ci
est située dans une tradition intellectuelle allemande et l’on crédite Max Weber

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d’un apport méthodologique décisif à ce sujet. Plus récemment, on fit toute-


fois observer que la traduction française (1) de l’Idealtypus wébérien ne
comporte aucune innovation de sens par rapport à l’usage durkheimien du
terme (Isambert, 1993, p. 361 ; Schnapper, 1999, p. 14) (2). La référence
courante à l’œuvre wébérienne recouvre néanmoins un certain nombre de
points de vue divergents. Le type idéal est tenu tantôt pour le résultat d’un
procédé de conceptualisation qui ne peut que s’imposer aux sciences sociales,
tantôt pour l’expression d’une volonté de réduction de complexité et d’un
principe de sélection des données lié à un rapport aux valeurs, tantôt, plus
pragmatiquement, pour le noyau d’une méthode particulière, dite « idéal-
typique ». Mais loin des débats érudits, dans la pratique de la recherche empi-
rique, une telle méthode idéal-typique se confond très fréquemment avec de
banales opérations de typologie. La distinction entre type idéal et type moyen

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s’estompe alors et l’invocation de Max Weber ne sert plus qu’à parer le
reproche de simplification abusive dans l’analyse. Le type idéal devient ainsi
trop souvent le terme fétiche du chercheur de terrain en position défensive (3).
Il n’est donc peut-être pas inutile de rappeler les particularités de ce mode de
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conceptualisation, d’en retracer la genèse, d’indiquer dans quelle stratégie


d’analyse il joue un rôle, de préciser enfin sa fonction dans la réalité d’une
séquence de recherche empirique. C’est à quoi l’on s’emploiera ici.

Le type idéal : ce qu’il est et ce qu’il n’est pas

Même si l’œuvre wébérienne n’inaugure vraiment ni le recours à la notion


ni l’usage du terme qui lui sont tous deux antérieurs, c’est incontestablement
dans les écrits de Max Weber, et tout particulièrement dans le texte Die
« Objektivität » sozialwissenschaftlicher und sozialpolitischer Erkenntnis de
1904 (4) que l’on trouve la tentative la plus élaborée – bien qu’un peu labo-
rieuse – de préciser en quoi consiste le type idéal, tout à la fois résultat d’un
certain mode de conceptualisation, expression d’une certaine conception de
l’activité scientifique et instrument d’une stratégie d’analyse spécifique. Le
type idéal, on l’a répété à satiété, est une construction intellectuelle obtenue
par accentuation délibérée de certains traits de l’objet considéré (Weber,
[1922] 1988, p. 191 ; 1965, p. 181). Cette création conceptuelle n’est pas sans
lien avec la réalité observée mais elle en présente une version volontairement
stylisée. Weber lui-même, et divers commentateurs à sa suite, mettent l’accent

(1) Sous ses diverses variantes : type idéal, Claude Passeron alla jusqu’à dire que le terme
idéal-type, idéaltype. On s’en tiendra ici à la est souvent utilisé pour défendre une définition
première, plus conforme au génie de la langue insuffisante (Troisième cycle romand, Morges,
française. avril 2001).
(2) Dans un ouvrage récent, Charles-Henry (4) Repris dans les Gesammelte Aufsätze
Cuin fait observer que l’analyse durkheimienne zur Wissenschaftslehre ([1922] 1988, pp. 146-
des causes du suicide repose sur la construction 214) et, en traduction française, dans les Essais
d’un acteur idéal-typique (2000, p. 162). sur la théorie de la science (1965, pp. 117-
(3) Au cours d’un colloque récent, Jean- 213).

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sur le « caractère fictionnel » de l’objet sélectivement construit de la sorte


(Hennis, [1987] 1996, p. 150 ; Martuccelli, 1999, p. 224).
L’idée de fiction – tout comme le terme « utopie » également employé par
Weber ([1922], 1988, p. 191 ; 1965, p. 181) – pourrait prêter à confusion si
les écrits wébériens ne nous offraient plusieurs illustrations détaillées de ce
qu’il faut entendre par là. Il y a, d’une certaine façon, fiction dans la mesure
où les objets définis de manière idéal-typique n’émergent pas de la réalité
empirique. Ils en offrent une représentation « purifiée de variations contin-
gentes » (Rocher, 1993, p. 629), réduite à ce qui est « strictement nécessaire »
pour comprendre « la logique d’une certaine conduite » (Weinreich, 1938,
p. 99). Mais le lien avec la réalité empirique reste un impératif, au point que
Weber assigne au chercheur la tâche d’apprécier dans chaque cas « combien

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la réalité se rapproche ou s’écarte de cette représentation idéale » (5) ([1922],
1988, p. 191). Et si le terme « utopie » s’impose, c’est parce que la réalité
présentée de façon idéal-typique relève de ce que l’on a appelé une « Sozio-
logie des Als-Ob », une sociologie du « comme si » (Tenbruck, 1959, p. 625).
Cette formule n’a rien de dépréciatif. Il faut entendre par là que la présenta-
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tion ainsi faite serait conforme à la réalité empiriquement observable si les


actions et interactions en cause obéissaient à une logique pure que ne vien-
drait affecter aucun facteur extérieur à cette logique. Ceci fait dire à Philippe
Raynaud que le type idéal suggère le déroulement de l’action « qu’il aurait
fallu attendre dans l’hypothèse d’un comportement rationnel » et met a
contrario en évidence les « irrationalités de toutes sortes » qui interviennent
dans l’activité réelle (1987, p. 51). Et, certes, Raynaud est fondé à affirmer
que l’économie classique a « valeur paradigmatique pour la méthodologie des
types idéaux » (ibid., p. 54). La théorie économique offre à Weber un terrain
de choix pour l’illustration de sa conception du type idéal. Elle présente en
effet « un cosmos non contradictoire de relations pensées » ([1922], 1988,
p. 190 ; 1965, p. 180, terme souligné par le traducteur). Le « sujet écono-
mique » construit à l’encontre de l’individu empirique, fait observer Weber,
n’est en aucune façon affecté par des motivations qui ne seraient pas spécifi-
quement économiques mais qui influencent bel et bien le comportement des
êtres humains réels (Weber, [1922] 1925, pp. 2-3). Martuccelli a raison de
souligner que « de manière sournoise, l’action rationnelle en finalité devient
le modèle d’où découle la construction significative » (1999, p. 226). Il n’en
reste pas moins que la prise en compte de la rationalité axiologique autorise à
dépasser la référence exclusive à la rationalité économique. C’est l’idée de
logique pure – dépouillée de tout élément parasite – qui est à la base de la
notion de type idéal, quelle que soit par ailleurs la logique prise en considéra-
tion. Et c’est également cette idée qui justifie l’expression « type idéal ». Bien
sûr, comme on l’a dit souvent, il s’agit d’un type « idéel », c’est-à-dire
abstrait, pensé, construit. Et Guy Rocher juge opportun d’écrire à ce propos

(5) Ma traduction qui s’écarte légèrement volontiers « Idealbild » par « représentation


de celle de Julien Freund (1965, p. 181). À ce idéale » que par « tableau idéal ».
niveau de généralité, je traduis en effet plus

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qu’il est « idéel plutôt qu’idéal » (1993, p. 629). Mais le qualificatif « idéal »
exprime aussi la référence à des notions qui ne deviendraient réalité que dans
un univers social gouverné entièrement par des logiques abstraites. C’est
cognitivement, et sans aucune visée normative, que cette création concep-
tuelle est tout à la fois idéelle et idéale (6).
Max Weber place toutefois sous la rubrique « type idéal » des objets de
diverses natures : actes singuliers, états de choses ou dispositions d’esprit
(Weinreich, 1938, p. 101) ; il n’y a, en principe, pas de limite à leur diversité
(Albrow, 1990, p. 154). Ceci nous invite à distinguer des variantes du type
idéal. Un des premiers exégètes de l’œuvre wébérienne, Alexander von Schelting,
y relève la présence de types idéaux individualisants et généralisants en y
voyant d’ailleurs une source de confusion (7). Dans le même esprit, Watkins

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distinguera ultérieurement chez Weber des types idéaux « holistes » et « indi-
vidualistes ». Les premiers sont construits en mettant en évidence les aspects
majeurs d’une situation historique prise dans son ensemble, organisés de
façon à faire apparaître une image cohérente. Les seconds résultent de
l’examen de la situation d’acteurs individuels et se fondent sur l’abstraction
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d’éléments tels que des schèmes de préférences personnelles, des modes de


connaissance de la situation ou des types de relations entre individus (1952-
1953, p. 723 et sq.). C’est notamment sur l’examen critique de ces deux
procédés de conceptualisation que Watkins fonde son adhésion au principe de
l’individualisme méthodologique (ibid., p. 729). Talcott Parsons, qui s’appuie
fortement sur Schelting, reprend à son compte la distinction entre types indi-
vidualisants et types généralisants. La catégorie individualisante recouvre
pour lui des processus historiques singuliers ou des mouvements d’idées
apparaissant dans l’histoire comme des phénomènes singuliers. Le caractère
idéal-typique du concept tient alors à la sélectivité dans les critères de défini-
tion, laquelle dépend de la nature des intérêts scientifiques en cause. La caté-
gorie généralisante a une autre fonction logique : elle vise à dégager des traits
essentiels. Dans ce cas, le concept est dit « idéal-typique » parce qu’il permet
la construction d’une séquence événementielle hypothétique (Parsons, 1937,
pp. 604-605) (8). De façon analogue, Runciman propose une distinction entre
types idéaux descriptifs et types idéaux explicatifs (1983, pp. 291-294). Le
type idéal descriptif est « idéal » en ce sens qu’il ne correspond à aucun exem-
plaire empiriquement observable mais qu’il peut servir de critère (yardstick)
pour la définition et la comparaison des objets individuellement observables
(ibid., pp. 291-292). On se trouve ici dans la logique opératoire du type indi-
vidualisant de Schelting et Parsons. Le type idéal explicatif n’émerge pas
davantage de la réalité empirique mais il est exigé logiquement par extrapola-

(6) Ce qui a suscité les hésitations de Julien Begriffscharakters », 1934, p. 332).


Freund quant à la traduction la plus adéquate (8) Parsons crédite Schelting d’avoir noté
(Weber, 1965, p. 485). pour la première fois que Weber place sous le
(7) Schelting évoque à cet égard « la terme « type idéal » deux catégories « tout à
confusion du caractère généralisant et indivi- fait hétérogènes » (« the two quite heteroge-
dualisant du concept » (« die Verwischung des neous categories of generalizing and individua-
generalisierenden und individualisierenden lizing concepts », 1937, p. 604).

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Jacques Coenen-Huther

tion à partir d’une théorie qui s’adapte au monde de nos observations (ibid.,
p. 292).
À la suite de Bernhard Pfister (1928, p. 170 et sq.), Judith Janoska-Bendl
estime quant à elle que les deux variantes de la notion de type idéal recou-
vrent une dimension historique et une dimension proprement sociologique. Le
type idéal sociologique reposerait dès lors sur des propositions à caractère
intemporel, exprimant soit le sens subjectivement possible (« überzeitliche
Aussagen über möglichen gemeinten Sinn ») de certaines catégories d’actions
soit la probabilité qu’elles interviennent. Le type idéal historique isolerait au
contraire une configuration empiriquement donnée en lui conférant une signi-
fication culturelle (« anhand der Kulturbedeutung ») (1965, p. 39). D’un
point de vue sociologique, le mode de conceptualisation idéal-typique corres-

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pond incontestablement à des intentions théoriques variées (Saegesser, 1975,
p. 107 et sq.). Il peut s’agir de proposer une interprétation crédible de l’émer-
gence d’un phénomène social particulier. Il peut s’agir de construire des caté-
gories fondées sur des logiques de comportement diverses, souvent extraites
de leur contexte d’origine. Il peut s’agir enfin de comprendre la signification
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d’écarts observés par rapport à une logique de comportement donnée.

Les origines de la conceptualisation idéal-typique

La diversité des intentions théoriques véhiculées par la conceptualisation


idéal-typique reflète la diversité des influences intellectuelles qui s’exercèrent
en la matière. Celles qui viennent le plus directement à l’esprit et qui sont le
plus fréquemment citées émanent des controverses de méthode dans
lesquelles fut impliqué Max Weber dans l’Allemagne de son temps. De
nombreux auteurs attribuent son choix du terme Idealtypus à l’influence de
Georg Jellinek, juriste et spécialiste de l’étude comparative des systèmes poli-
tiques, avec qui il était lié (Albrow, 1990, p. 151 ; Antoni, 1938, p. 282 ;
Ringer, 1997, p. 110). Cette opinion peut se prévaloir du témoignage de
Marianne Weber qui note que Jellinek utilise l’expression dans le même sens
que Weber après lui ([1926] 1989, p. 327) (9). Elle gagne toutefois à être
soumise à la critique car elle a donné lieu à des exégèses contestables, comme
le fait observer Tenbruck (1959, p. 620). En fait, si Weber a emprunté le
terme à Jellinek, il ne lui donne pas le même contenu conceptuel ; ceci est
souligné non seulement par Tenbruck (op. cit.), mais aussi par Fleischmann
(1964, p. 199), Pfister (1928, pp. 138-139) et Runciman (1972, p. 9). Weber
applique le terme « type idéal » à ce que Jellinek qualifie de « type empi-
rique » (1905, p. 34) (10).

(9) Selon Marianne Weber en effet, on a (10) À savoir « eine Zusammenfassung von
affaire à « ein Ausdruck, den schon Georg Merkmalen, die ganz von den Standpunkt,
Jellinek in seiner allgemeinen Staatslehre in abhängt, den der Forscher einnimt » (Jellinek,
demselben Sinn wie nach ihm Weber 1905, p. 34).
verwendet » ([1926], 1989, p. 327).

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C’est toutefois le Methodenstreit opposant les économistes néoclassiques


aux tenants de l’école dite « historique allemande » qui fournit le stimulant
principal aux réflexions méthodologiques de Weber (Burger, 1976, p. 140 ;
Käsler, 1988, pp. 180-181 ; Ringer, 1997, p. 110 et sq.). La science écono-
mique allemande avait longtemps été dominée par une tradition de pensée
historisante, mettant principalement l’accent sur l’historicité des faits écono-
miques. Cette orientation était poursuivie par Gustav Schmoller qui occupait
une position influente dans le Verein für Sozialpolitik dont faisait également
partie Weber. Ce dernier considérait les options de politique sociale défen-
dues par Schmoller comme excessivement paternalistes et bureaucratiques. Il
les tenait en outre pour le fruit de compromis ad hoc davantage que pour le
résultat de visées socioculturelles solidement étayées (Ringer, 1997, p. 15). Il
en résulta un débat sur le rôle des jugements de valeurs dans l’activité scienti-

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fique, auquel Weber participa et dont on retrouve l’écho dans la conférence
Wissenschaft als Beruf ([1919] 1959). Les conceptions de Schmoller furent
également critiquées d’un autre point de vue par Carl Menger, figure impor-
tante de l’école néoclassique autrichienne. Celui-ci était d’avis que la science
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économique ne pouvait être fondée ni sur l’accumulation de données histori-


ques relatives aux activités économiques ni sur des choix de politique écono-
mique non fondés en théorie.
Pour Menger, la science économique devait viser à une connaissance à
portée générale. Ceci posait le problème du degré d’abstraction dans
l’analyse. La théorie ne pouvait prétendre appréhender la réalité dans toute sa
complexité ; elle se devait de dégager des éléments essentiels, de façon à
mettre en évidence des acteurs, des comportements, des processus typiques
qui auraient valeur de modèles mais dont la réalité empiriquement observable
s’écarterait nécessairement. Max Weber fut sensible aux arguments de
Menger et le construit du type idéal dérive en partie des conceptions modéli-
santes de Menger. Mais Weber avait également pratiqué l’étude historique à
la manière de Schmoller et de ses prédécesseurs ; il se préoccupait donc aussi
de l’introduction de normes de scientificité dans l’analyse historique quoi
qu’ait pu en penser Lazarsfeld (11). Dès lors, la question de l’abstraction
sélective se posait à lui de deux façons et pour deux raisons. Il s’agissait
certes de fournir aux sciences sociales des procédés de conceptualisation
propices à la généralisation en vue de permettre l’attribution causale. Mais il
s’agissait aussi de se donner des règles présidant à l’indispensable sélection
dans la reconstitution de séquences historiques. Cette double préoccupation
rend compte du caractère apparemment hétérogène du concept wébérien de
type idéal.
Le type idéal généralisant est certainement celui qui doit le plus aux impul-
sions intellectuelles provoquées par le Methodenstreit. C’est plus particulière-
ment par le souci de généralisation que Weber rejoint certains des principes
énoncés par Durkheim, comme on l’a rappelé plus haut. L’évolution du type

(11) Qui y voyait une source d’ambivalence créée précisément par un intérêt pour « two types
or two fields of work » (Lazarsfeld et Oberschall, 1965, p. 194).

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généralisant vers des formes intemporelles doit beaucoup à l’influence de


Simmel et à l’orientation formaliste de celui-ci ; ceci est signalé par Tenbruck
(1959, p. 620 et sq.) et par Fleischmann (1964, p. 201). Le type individuali-
sant, quant à lui, a une longue histoire qui doit beaucoup moins aux contro-
verses théoriques et méthodologiques traversant les sciences humaines
allemandes et qui remonte aux classifications aristotéliciennes. L’intention
première qui s’y rattache est avant tout comparative. La principale source
d’inspiration est à cet égard l’œuvre de Montesquieu. Boudon et Bourricaud
nous mettent sur sa piste lorsqu’ils suggèrent que « par bien des côtés, Max
Weber est le Montesquieu du XXe siècle » (1982, p. 624). Or, nous le savons
car Marianne Weber nous l’indique ([1926], 1989, p. 267), Max Weber lisait
Montesquieu. Il s’y réfère explicitement dans Wirtschaft und Gesellschaft
([1922] 1925, p. 166 et p. 393). De fait, Montesquieu adopte des procédés de

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raisonnement fondés sur des principes de compatibilité ou d’incompatibilité,
qui préfigurent la démarche idéal-typique. Ainsi, par exemple, écrit-il dans De
l’esprit des lois que « dans une nation libre, il est très souvent indifférent que
les particuliers raisonnent bien ou mal ; il suffit qu’ils raisonnent : de là sort
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la liberté qui garantit des effets de ces mêmes raisonnements. De même, dans
un gouvernement despotique, il est également pernicieux qu’on raisonne bien
ou mal ; il suffit qu’on raisonne pour que le principe du gouvernement soit
choqué » (1748, Livre XIX, chapitre 27). Ce qui est en cause est ici le maté-
riau historique : comme le fait observer Raymond Aron, il s’agit pour
Montesquieu de « passer du donné incohérent à un ordre intelligible » ([1967]
1991, p. 28) ; c’est également l’objectif déclaré de Max Weber.
L’influence bien réelle de Montesquieu – plus que n’importe quelle activité
d’ordre performatif ultérieure – aide également à comprendre la parenté de
méthode qui lie Weber à Tocqueville et qui pousse parfois les commentateurs
à l’anachronisme. Tocqueville se situe également dans la lignée de
Montesquieu pour lequel il ne cachait pas son admiration et auquel on le
comparait à son époque. Sainte-Beuve, par exemple, évoque De la démocratie
en Amérique comme l’ouvrage qui fait « naturellement songer à Montesquieu »
([1860] 1948, p. 94). Au surplus, l’œuvre de Tocqueville était connue dans les
milieux que fréquentait Max Weber (Lepenies, [1985] 1990, p. 288). On
pouvait y trouver une stratégie idéal-typique avant la lettre, au service de
l’analyse comparative, genre dans lequel Tocqueville excellait (12).

Procédés de conceptualisation à caractère idéal-typique

En dépit des réserves exprimées plus haut, la notion de type idéal restera
sans doute définitivement associée dans la vulgate sociologique aux écrits de
méthode de Max Weber. L’histoire de la sociologie comporte néanmoins une
tradition durable de recours à la conceptualisation et au raisonnement sur le

(12) Voir à ce sujet Coenen-Huther (1997a, chap. III).

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mode idéal-typique. Weber lui-même a fait observer que diverses propositions


marxiennes deviennent tout à fait acceptables – et ont une valeur heuristique
indéniable – si on les tient pour l’expression d’une vision idéal-typique de
l’évolution sociale et non pour une description à caractère réaliste (Weber,
[1922] 1988, pp. 204-205 ; 1965, pp. 199-200). Pareto, autant que Marx ou
Weber, a le souci de l’abstraction sélective en fonction d’un point de vue
particulier. S’agissant de la circulation des élites, il écrit « [...] il faut
s’efforcer de simplifier le problème [...] Nous considérons le problème seule-
ment en rapport avec l’équilibre social, et nous tâcherons de réduire le plus
possible le nombre des groupes et des modes de circulation [...] » (Pareto,
[1916] 1968, § 2025, p. 1295). Plusieurs commentateurs considèrent la théorie
parétienne des élites, prise dans son ensemble, comme une construction théo-
rique à caractère idéal-typique (Lopreato et Alston, 1970 ; Eisermann, 1989).

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Pour Pareto, si l’on établit une distinction dichotomique entre élite et non-
élite pour les besoins de l’analyse, il est possible de poser en principe que les
fonctions dirigeantes dans la politique et l’administration sont assumées par
les plus qualifiés pour le faire. C’est alors que les aptitudes de la classe diri-
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geante correspondent à la dénomination d’élite. Toutefois, comme le font


observer Lopreato et Alston, une telle « loi » ne peut se rapporter – de façon
idéal-typique – qu’à un état de « libre circulation » des élites ne comportant
aucun facteur particulariste ou encore à une phase d’équilibre temporaire,
alors qu’une classe dirigeante serait à peine arrivée au pouvoir (1970, p. 94).
Ultérieurement, d’autres auteurs importants se sont distingués par une
conceptualisation à caractère implicitement ou explicitement idéal-typique.
Ainsi en est-il de MacIver et de la « reconstruction imaginative », de Parsons
et du recours aux pattern-variables, de Merton et de son usage de la notion de
paradigme, de Howard S. Becker ou de John McKinney et du « type cons-
truit ». Martindale (1959) a ébauché un premier inventaire de leurs travaux,
sans toutefois mettre leurs stratégies d’élaboration théorique en rapport avec
les différents types idéaux distingués plus haut. C’est ce que l’on va tenter ici.
Pour MacIver, la tâche prioritaire de la sociologie consiste à établir des rela-
tions de causalité. Une procédure expérimentale devrait permettre de
comparer des situations se distinguant par la présence ou l’absence de l’un ou
l’autre facteur causal. Lorsque la mise en œuvre d’un tel plan expérimental est
impossible – ce qui est le plus souvent le cas en sociologie – il ne reste plus
que l’expérience mentale qui consiste à envisager une des deux situations par
la « reconstruction imaginative » (MacIver, 1942). Que se serait-il passé si les
Perses avaient gagné la bataille de Marathon ? Il va de soi qu’un scénario de
substitution ne peut se présenter dans la réalité ; il ne peut qu’être imaginé. Le
processus, fait observer Martindale, s’apparente à la construction d’un type
idéal (1959, p. 73). Mais dans de tels cas, l’intention généralisante n’est pas
prioritaire. Il s’agit avant tout de reconstruire la logique possible d’un enchaî-
nement d’actions. C’est le type idéal individualisant qui est ici pertinent.
Talcott Parsons, au contraire, vise à l’élaboration d’une théorie générale se
situant à un degré élevé d’abstraction. La notion wébérienne de type idéal ne
l’intéresse que dans la mesure où elle apporte des matériaux à une telle

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Jacques Coenen-Huther

théorie. Ses pattern-variables suggèrent des alternatives d’orientation aux


valeurs se présentant sous la forme de dichotomies dont chaque pôle est un
cas limite relevant de la conceptualisation idéal-typique. Sur un plan rela-
tionnel, les permutations et combinaisons de ces variables définissent un
système de types d’attentes de rôles possibles. Parsons dépasse ainsi le type
idéal isolé pour l’intégrer à une logique systémique (Parsons, 1951,
p. 66) (13). Comme le note malicieusement Martindale, Parsons, à la manière
de Henry Ford pour les automobiles « [...] seems to have indicated the way to
mass produce ideal types on an assembly-line basis [...] » (1959, p. 75). Mais
dans ce cas, c’est bien le type idéal généralisant qui est visé.
Un procédé du même genre est mis en œuvre par Robert K. Merton dans la
construction d’un paradigme pour l’analyse des modes d’adaptation indivi-

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duelle aux contraintes structurelles. Les cinq catégories distinguées – confor-
mité, innovation, ritualisme, retraite, rébellion – permettent de combiner de
différentes façons l’adhésion ou le rejet de buts culturellement acceptés et de
moyens institutionnalisés (Merton, [1949] 1968, p. 194). Que les catégories
ainsi obtenues aient le caractère de types idéaux n’est guère douteux (Martindale,
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1959, pp. 79-80). Comme les pattern-variables parsoniennes, elles présentent


un potentiel de généralisation incontestable (14) et sont ainsi également en
affinité avec le type idéal généralisant. Davantage que les dichotomies de
Parsons toutefois, elles combinent des formes intemporelles et des conditions
historiquement observables : en l’occurrence, des particularités de la culture
américaine au XXe siècle (ibid., p. 79). La conceptualisation idéal-typique se
situe ici au niveau des théories de portée moyenne.
Dans un style un peu différent, Howard S. Becker et John McKinney se
situent plus directement dans la mouvance wébérienne tout en renonçant au
terme « type idéal » qu’ils jugent trop chargé d’ambiguïté et qu’ils remplacent
par « type construit », ce qui ne trahit en aucune façon l’esprit de la concep-
tualisation idéal-typique (Becker, 1940 ; McKinney, 1954). Pour l’un comme
pour l’autre, le type construit revêt le caractère d’une théorie implicite plus ou
moins élaborée ; il en résulte que les écarts entre le construit idéal-typique et
la réalité empirique doivent faire eux-mêmes l’objet d’une explication
(Janoska-Bendl, 1965, pp. 79-83). À cet égard, McKinney insiste – de
manière quelque peu irréaliste – sur la nécessité d’une mesure quantifiée du
degré de déviation (1954, pp. 144-145). Becker, pour sa part, associe le type
construit à l’élaboration de propositions conditionnelles de la forme « si A,
alors B » : si les facteurs impliqués dans la construction du type sont effecti-
vement repérés, alors certaines conséquences présumées s’en suivront (1950,
p. 108).

(13) En conformité logique avec les (Parsons, [1947] 1964, p. 28).


réserves qu’il avait émises précédemment à (14) Comme je l’ai montré dans Coenen-
l’égard des potentialités théoriques du type Huther (1997b, pp. 295-298).
idéal non intégré dans un système de types

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Revue française de sociologie

Becker et McKinney se livrent à une démarche idéal-typique au second


degré dans la mesure où ils soumettent le type idéal à des opérations de clas-
sement. La distinction opérée par Becker est sommaire : le type daté et loca-
lisé qui intéresse l’historien, opposé au type non daté ni localisé qui sert les
buts du sociologue (1950, p. 90) ; il ne s’agit de rien d’autre que de la distinc-
tion entre type individualisant et type généralisant. McKinney propose des
catégories plus élaborées qui constituent un véritable essai de typologie fondé
sur six axes bipolaires : ideal-extracted, general-specific, scientific-historical,
timeless-time-bound, universal-local, generalizing-individualizing (1966,
chap. 2). Ce qui est ainsi gagné en précision ne l’est certainement pas en
clarté opératoire. On a pu faire observer à ce sujet que les distinctions effec-
tuées de la sorte ne sont pas toujours mutuellement exclusives (Lopreato et
Alston, 1970, p. 90). Il n’en reste pas moins qu’elles offrent les éléments

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d’une critique de la conceptualisation idéal-typique elle-même. Le type idéal
wébérien de l’entrepreneur capitaliste ainsi considéré est une combinaison
ideal-extracted incorporant à la fois les éléments de la logique d’action du
personnage et des caractéristiques concrètes fondées sur des moyennes obser-
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vées (McKinney, 1966).

Type idéal et modélisation

La construction de types idéaux, on l’a rappelé plus haut, correspond à une


volonté de « stylisation de la réalité » (Schnapper, 1999, p. 18). Le type idéal
ne décrit pas la réalité empirique mais reflète un « construit mental » (Burger,
1976, p. 164). Ce construit mental n’entretient une relation avec le monde réel
que moyennant un certain nombre de conditions qui doivent être spécifiées
dans chaque cas. Il s’agit donc bien d’une logique de modélisation, avec tout
ce que cela implique ; les rapprochements possibles de la réalité modélisée
avec le monde réel peuvent sans doute être une source de satisfaction pour le
chercheur mais ce sont les écarts constatés et leur analyse qui ont les vertus
heuristiques décisives. Il s’ensuit que des propositions relatives au type idéal
tenant lieu de modèle ne peuvent être confondues avec la théorie d’un
ensemble de faits empiriquement observables. Les raisonnements relatifs aux
fondements wébériens de la légitimité ne fournissent pas une théorie de la
légitimation de l’un ou l’autre régime concret, bien qu’ils puissent être d’un
grand secours pour l’élaboration d’une telle théorie. De même, ce qui peut
être dit du type idéal de la bureaucratie ne nous apprend rien sur le mode de
gestion réel de telle ou telle organisation à caractère bureaucratique ; on y
trouve en revanche les principes de fonctionnement d’une organisation de ce
genre, sous une série de conditions restrictives.
Pas plus que la sélection d’un modèle, la construction d’un type idéal ne
peut être assimilée à une procédure de vérification d’hypothèses. Au
contraire, c’est le type idéal – comme le modèle – qui est fondé sur une série
de présuppositions implicitement tenues pour acquises concernant le compor-

540
Jacques Coenen-Huther

tement humain (Burger, 1976, p. 165). En tant que « type construit », il a le


caractère d’un « modèle théorique » et fonctionne comme une théorie impli-
cite (McKinney, 1957, p. 226). La parenté du type idéal et du modèle apparaît
clairement dans les constructions théoriques qualifiées par certains auteurs
d’« idéalisations » (Lopreato et Alston, 1970, pp. 93-94) mais que l’on pour-
rait aussi bien traiter de modélisations. Ainsi en est-il du modèle de « l’égalité
complète » (full-equality model) (15). Celui-ci implique que dans des condi-
tions de mobilité parfaite, la position professionnelle d’un individu est déter-
minée exclusivement par ses qualifications professionnelles, ses origines
familiales n’ayant aucun effet sur sa profession. Il va de soi que les conditions
d’application du modèle ne sont jamais réunies dans la réalité empiriquement
observable. On peut néanmoins y avoir recours pour en dériver des fréquences
attendues de mobilité intergénérationnelle. La fameuse théorie de la stratifica-

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tion sociale de Davis et Moore (1945) est du même type. En bref, elle propose
l’idée que les gratifications matérielles et symboliques attachées à une posi-
tion professionnelle sont déterminées par la contribution de cette position à un
état valorisé de la société. Les conditions d’application de cette proposition
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théorique n’étant jamais réalisées, celle-ci ne peut que revêtir le caractère


d’un modèle pour l’examen systématique de tous les écarts par rapport à un
état « idéal » de la société où la position dans une hiérarchie des professions
serait déterminée par l’importance fonctionnelle de cette position (Lopreato et
Alston, 1970, pp. 93-94). Dans les cas de ce genre, on n’a pas affaire à une
description de réalité, mais la congruence avec des faits empiriquement obser-
vables est logiquement du domaine du possible. Le mode de raisonnement est
fondé sur l’énumération d’une série de conditions permettant le passage du
pensé à l’observé (Burger, 1976, pp. 164-165). Pour que cette congruence
logique s’actualise, il faut cependant que les conditions stipulées ne relèvent
pas de l’utopie sociale. Dans le cas contraire, ce sont les réflexions sur les
écarts observés – et sur les causes de ces écarts – qui prennent le pas sur la
constatation de rapprochements plausibles.
L’idée de construit mental – sous-jacente à la notion de type idéal tout
comme à celle de modèle – implique que des éléments formels de connais-
sance préexistent à tout traitement analytique de données d’observation. Cette
intuition kantienne s’accorde avec l’épistémologie piagétienne dont elle est
une source d’inspiration ; un ensemble de faits n’acquiert un sens qu’après
passage par le filtre d’une structure de connaissance. Dans cette perspective,
le rapprochement quelque peu inattendu qui a été fait entre le type idéal
d’inspiration wébérienne et la structure, telle que la conçoit Lévi-Strauss
(Moreux, 1975, pp. 14-15) mérite que l’on s’y attarde. Dans l’un et l’autre cas
en effet, on a affaire à un « modèle synthétique » fondé sur l’attribution de
sens par renoncement délibéré à l’exhaustivité. L’accentuation unilatérale
ainsi produite résulte de la priorité accordée à l’un ou l’autre aspect de l’objet
considéré. Ceci est vrai par exemple du type idéal de l’entrepreneur capitaliste

(15) Commenté par Lopreato et Alston (1970, p. 93) qui s’appuient sur Jackson et Crockett
(1964).

541
Revue française de sociologie

tel que le construit Max Weber ; c’est tout aussi vrai du principe d’échange
que Claude Lévi-Strauss situe à la base des alliances matrimoniales dans un
système d’exogamie (ibid., p. 23). Le recours au type idéal comme l’élabora-
tion du modèle structurel ont ceci de commun qu’ils fondent l’intelligibilité
sur une recherche de rationalité poussée à l’extrême et sur la pluralité des
interprétations possibles (ibid., pp. 23-26). Il faut bien voir néanmoins que la
rationalité du type idéal est en principe accessible à l’acteur social quelque
peu lucide, par l’intermédiaire des raisons qu’il peut avoir de se comporter
d’une certaine manière. En revanche, le lieu d’où s’élabore la rationalité du
modèle structurel lévi-straussien exclut l’intervention de telles raisons. La
crédibilité des deux démarches requiert néanmoins un pari sur l’existence de
mécanismes fondamentaux de la vie en société et d’invariants du comporte-
ment humain. C’est ce qui permet de se placer mentalement – selon la formule

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de Boudon (1986) – dans la logique d’un « acteur banalisé » dans le premier
cas, d’adopter une logique surplombante, insensible aux motivations des
acteurs sans être arbitraire pour autant, dans le second.
La parenté entre type idéal et modèle implique qu’il ne peut être véritable-
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ment question d’une méthode idéal-typique au sens strict ; une telle expres-
sion – quoique fréquemment utilisée dans la littérature et d’un emploi tentant
– est par trop restrictive. On peut certes parler d’une méthode dont la concep-
tualisation par types idéaux n’est qu’un aspect : cette méthode est la modéli-
sation qui, pour faire bref, consiste à se donner une représentation
volontairement simplifiée de la réalité comme guide pour des investigations
empiriques ultérieures. Lorsque la modélisation comporte déjà un schéma
d’interaction entre variables jugées pertinentes, on peut y voir un modèle
générateur au sens que Raymond Boudon donne à ce terme (16) : le modèle
engendre des théories. Quand, au contraire, on en reste au stade de la concep-
tualisation plus ou moins élaborée, il est prématuré de parler de modèle géné-
rateur mais c’est à bon droit que l’on peut parler de « concepts générateurs ».
Si le modèle générateur est à même de produire directement de la théorie par
vérification ou par transposition, le concept générateur peut produire des
diagnostics sociologiques qui constituent, eux-mêmes, l’assise d’une élabora-
tion théorique subséquente. Ainsi en est-il, par exemple, du « type aristocra-
tique » et du « type démocratique » chez Tocqueville, de la Gemeinschaft et
de la Gesellschaft chez Tönnies, ou encore des pattern-variables chez
Parsons. En tant que concept générateur, le type idéal fournit une base utile à
l’approche comparative par son caractère sélectif. Il offre un principe d’intel-
ligibilité par la mise en évidence de contrastes. De la sorte, il amorce un
raisonnement théorique plus élaboré en suggérant des compatibilités et des
incompatibilités pouvant donner la clé de tensions au sein d’un système
social (17). Ainsi, le type idéal peut être mis au service de la comparaison, au

(16) Voir par exemple Boudon (1991, une source interne de tensions au sein d’une
p. 162). collectivité, en l’occurrence un kibboutz
(17) J’ai moi-même utilisé les pattern- (Coenen-Huther, 1995, chap. 1).
variables de Parsons pour mettre en évidence

542
Jacques Coenen-Huther

service de la recherche de sens ou au service de l’analyse causale. C’est dire


qu’il ne saurait y avoir de démarche spécifiquement « compréhensive » à
laquelle serait liée la conceptualisation idéal-typique. Non que la compréhen-
sion ne soit indispensable à la construction d’un type idéal, mais elle constitue
une phase implicite ou explicite de tout processus de recherche en sociologie.
Dès lors, la conceptualisation idéal-typique peut être associée à des stratégies
de recherche diverses dans la mesure où l’opération mentale de reconstruction
de sens que nous appelons compréhension joue nécessairement un rôle à l’un
ou l’autre stade de la réflexion, fût-ce à l’insu des chercheurs. C’est bien
pourquoi elle est présente aussi bien chez Durkheim, opposant la solidarité
organique à la solidarité mécanique, que chez Weber, s’interrogeant sur les
affinités entre l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme.

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Le type idéal et la recherche empirique
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Nombreux sont les jeunes chercheurs qui sont très au fait des particularités
de la conceptualisation idéal-typique dans l’œuvre wébérienne, mais qui n’en
restent pas moins perplexes lorsqu’il s’agit de transposer ce mode de concep-
tualisation dans la pratique d’une recherche de terrain. La confusion termino-
logique qui accompagne fréquemment les opérations de typologie le montre à
suffisance. Loin des types idéaux wébériens consacrés de longue date, comme
ceux du capitalisme ou de la bureaucratie, il importe donc de s’interroger sur
les fonctions du type idéal dans une séquence de recherche actuelle. On l’a
souligné à maintes reprises, le type idéal reflète la vie sociale telle qu’elle
pourrait être sous certaines conditions de cohérence rationnelle. Pour ce qui
est de l’étude de la vie sociale dans sa réalité observable, il ne peut donc que
servir de terme de référence (Albrow, 1990, p. 157).
Il en résulte qu’un programme de recherche ne peut avoir pour but de
présenter des types idéaux, à moins qu’il ne s’agisse précisément d’une
recherche à caractère exploratoire, visant à mettre au point des outils concep-
tuels à des fins ultérieures. La conceptualisation idéal-typique est la construc-
tion logique sous l’angle de laquelle sera examinée la réalité empirique. Il
s’agit donc d’une opération intermédiaire entre l’interrogation initiale du
chercheur et les conclusions auxquelles ses travaux le conduisent. Ce sont les
écarts enregistrés entre la réalité préalablement construite et la réalité mise au
jour par la recherche qui sont de nature à fournir des hypothèses relatives aux
motivations ou aux comportements des acteurs. Rappelant l’aspect artisanal
pouvant être attribué à la société médiévale, Max Weber évoque les consé-
quences qui peuvent logiquement en être tirées pour la suite du développe-
ment économique. Il ajoute que si « le cours réel des choses » ne correspond
pas à l’évolution conçue de manière idéal-typique, cela signifie nécessaire-
ment que « la société médiévale n’a pas été rigoureusement artisanale sous
certains rapports » (Weber, [1922] 1988, pp. 203-204 ; 1965, pp. 197-198).

543
Revue française de sociologie

Voilà bien un mode de raisonnement qui illustre les vertus heuristiques de


la conceptualisation idéal-typique et que l’on peut reproduire, quel que soit
l’objet de la recherche. Un exemple simple, inspiré de la logique wébérienne
en la matière, permettra de le montrer sans difficulté. Le comportement habi-
tuel d’un marchand, envisagé de façon idéal-typique, sera dominé par une
logique économique inspirée de la recherche d’un profit optimal. Qu’un
nombre non négligeable de marchands observés dans la conduite de leurs
affaires se conforment effectivement à cette logique est une constatation rela-
tivement banale. En revanche, qu’une série d’individus – puciers, brocanteurs,
bouquinistes –, relevant incontestablement de la catégorie « marchand » selon
les critères aristotéliciens du genre prochain et de la différence spécifique,
présentent des conduites s’écartant délibérément du comportement typique du
marchand : voilà une constatation qui ne peut qu’exciter la curiosité. Surgit

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alors la question du « pourquoi », ne pouvant être satisfaite que par la mise en
évidence de causes, les motivations des acteurs pouvant être en l’occurrence
des causes. Pourquoi, étant engagé dans des opérations commerciales, fait-on
volontairement fi des stratégies habituelles d’optimisation du profit ? Pour-
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quoi, dans la même situation, en vient-on à négliger en toute connaissance de


cause un profit possible ?
C’est le modèle rationnel de l’action véhiculé par le type idéal du
marchand qui suscite de telles questions en contribuant implicitement ou
explicitement à mettre en évidence les écarts par rapport à la logique
marchande. Mais c’est aussi ce modèle qui transforme les écarts constatés en
autant de « faits-polémiques » au sens de Bachelard. Les divergences entre la
réalité imaginée de prime abord et les faits réellement observés ne peuvent
que susciter un jeu d’hypothèses visant à en fournir une explication. Le type
idéal offre des motivations plausibles et pousse à anticiper le comportement à
prévoir dans la logique qu’il représente. Les personnages empiriquement
observables dont le comportement s’écarte de la logique du type idéal substi-
tuent à ces motivations plausibles d’autres motivations qui deviennent tout
aussi plausibles quand on a réussi à en reconstruire le sens. Comme le note
Fritz Ringer, le type initialement construit – le type idéal – est avant tout « a
counterfactual projection, which facilitates the causal ascription of deviations
from it to motives other than those attributed to the ideal agent » (1997,
pp. 114-115 ; termes soulignés par l’auteur).
Pour la recherche de terrain, il y a donc à ce propos deux questions à
résoudre : tout d’abord, de quoi les écarts observés sont-ils faits, exactement ;
ensuite, en quoi consistent les motivations qui interfèrent avec celles de
l’acteur idéal-typique ? Une dialectique s’instaure ainsi entre le type idéal –
type construit sur la base d’évidences antérieures – et le type moyen, émer-
geant d’observations effectuées en raison même du stimulant intellectuel
offert par le type idéal. De cette façon – mais de cette façon seulement – les
procédures idéal-typiques adoptées consciemment ou intuitivement par ceux
que nous considérons à présent comme nos classiques – Marx, Tocqueville,
Durkheim, Tönnies, Weber, Parsons et d’autres – gardent leur fécondité
analytique. Voudrait-on au contraire ramener le type idéal à une synthèse de

544
Jacques Coenen-Huther

faits d’observation, c’est alors la raison d’être du concept qui s’en trouverait
compromise.
Jacques COENEN-HUTHER
Département de Sociologie – Université de Genève
CH-1211 Genève 4 – Suisse

Jacques.Coenen-Huther@socio.unige.ch

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