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PAUL ET LES ÉPICURIENS D'ATHÈNES ENTRE POLYTHÉISMES

ATHÉISMES, ET MONOTHÉISMES
Renée Koch Piettre

Presses Universitaires de France | « Diogène »

2004/1 n° 205 | pages 52 à 68


ISSN 0419-1633

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Pour citer cet article :


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Renée Koch Piettre, « Paul et les Épicuriens d'Athènes entre polythéismes
athéismes, et monothéismes », Diogène 2004/1 (n° 205), p. 52-68.
DOI 10.3917/dio.205.0052
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PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES
ENTRE POLYTHÉISMES ATHÉISMES,
ET MONOTHÉISMES
par

RENÉE KOCH PIETTRE

L’épisode néotestamentaire de la rencontre de Paul et des


philosophes épicuriens et stoïciens d’Athènes, au chapitre 17 des
Actes des Apôtres (v. 16-24), éclaire les relations entre les
commencements du christianisme et son environnement intel-

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lectuel et religieux dans l’empire romain. L’apôtre Paul y est en
effet conduit à expliquer son message en des termes qu’il essaye de
rendre compréhensibles à un public d’Athéniens cultivés, en
fonction de ce que lui-même croit connaître de ce public. C’est du
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moins ainsi que Luc, le rédacteur des Actes, tâche de rendre


compte de l’épisode, auquel apparemment il n’avait pas assisté1.
Or, cet épisode offre simultanément l’occasion de s’interroger
sur les rapports paradoxaux qu’on peut soupçonner entre
l’épicurisme et la pratique missionnaire de Paul, ou plus largement
entre l’épicurisme et le christianisme naissant. La recherche là-
dessus a déjà une assez longue histoire, mais n’a sans doute pas
encore trouvé ses marques, ni le ton juste, ni sa conclusion2. Une
sorte de préjugé chrétien paraît y être la règle. Ceux qui s’y
risquent rencontrent généralement tout aussitôt deux sortes de
réactions indignées :
– Du côté de ceux qui abordent l’épicurisme dans la tradition
d’un humanisme libertin et d’une philosophie matérialiste, on se
récrie : comment peut-on introduire dans la genèse du christia-
nisme ces pères de l’atomisme et d’un hédonisme matérialiste, ces

1. Voir Actes des Apôtres 17.14-15 : Paul était seul à Athènes. On suppose que
le témoin fut Denys l’Aréopagite, qu’il convertit ce jour-là.
2. L’épicurisme a-t-il été absorbé par le christianisme, comme le voulait N. W.
DE WITT (Epicurus and his Philosophy, 1954 ; St. Paul and Epicurus, 1964) ? W.
SCHMID, Epicuro e l’epicureismo cristiano, 1984 [1964], démontrait pourtant que les
Pères de l’église n’avaient pas une connaissance profonde de l’épicurisme. La
comparaison a repris avec par exemple Diskin CLAY sur l’organisation de la secte
épicurienne, David KONSTAN sur l’amitié en Grèce (voir le volume collectif édité par
John T. FITZGERALD, Friendship, Flattery, and Frankness of Speech : Studies on
Friendship in the New Testament World, 1996, ou la publication collective du traité
de Philodème « Sur la liberté de parole », Philodemus On Frank Criticism, 1998),
Clarence E. GLAD sur la psychagogie épicurienne et paulinienne (Paul and
Philodemus: Adaptability in Epicurean and Early Christian Psychagogy, 1995).
Également Abraham J. MALHERBE, Paul and the Thessalonians. The Philosophical
tradition of Pastoral Care, 1987 ; Id.., « Hellenistic Moralists and the New
Testament », 1992, notamment p. 301-304.

Diogène n° 205, janvier-mars 2004.


PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 53

libérateurs de l’humanité, voire ces ancêtres du marxisme


dialectique3, que furent Épicure ou Lucrèce ? Toutes les religions
ne sont-elles pas un « opium du peuple » ?
– Du côté des historiens et des théologiens du christianisme,
même scandale : comment peut-on oser déceler même un voisinage,
encore moins un cousinage contre nature, entre deux doctrines
aussi opposées que cet athéisme que l’on reproche couramment à
Épicure et aux siens4, et la foi chrétienne ? Paul a d’ailleurs mis ses
disciples en garde contre la philosophie, ainsi en Col. 2.8 : « Veillez
à ce que nul ne mette le grappin sur vous par le moyen de la
philosophie, cette creuse duperie qui suit la tradition des hommes,
les éléments de l’univers5 et non plus le Christ ».

Épicurisme et christianisme : les raisons d’une comparaison

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Il y a néanmoins pour les hellénistes de bonnes raisons de
conduire une telle exploration, fût-ce, à terme, pour en déjouer
l’hypothèse. En voici quelques-unes :
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Il est arrivé que les Anciens mettent l’épicurisme et le


christianisme dans le même sac et les tiennent tous deux pour
également abominables et impies, athées : on cite couramment, à
ce sujet, un passage d’un opuscule de Lucien de Samosate,
Alexandre le faux prophète : cet Alexandre se donna dans la
seconde moitié du IIe siècle de notre ère pour le prophète d’un
nouveau dieu, le serpent Glycon, enfant du dieu guérisseur
Asclépios. Il établit les mystères de ce dieu dans la cité
d’Abonotique, sur l’actuelle rive turque de la mer Noire. Or la
liturgie de ces mystères commençait par le solennel bannissement
des impies, Alexandre lançant un « Dehors, les Chrétiens ! » et la
foule en chœur enchaînant par ce répons : « Dehors, les
Épicuriens6 ! »
Ces deux doctrines de salut (en cette vie ou en une autre vie)
remontent à un fondateur charismatique dont elles entretiennent
la mémoire et le culte. Épicure était salué par ses adeptes comme
un dieu sauveur (sôtêr), ce qui n’a d’ailleurs rien de très original
durant la période hellénistique, où des rois en particulier purent
être pareillement salués (mais notons que le roi séleucide
Démétrios Ier Sôter était lui-même un fervent adepte de
l’épicurisme7). Elles enseignent notamment, mais diversement, à

3. Rappelons que Karl Marx avait consacré sa thèse de doctorat à la philosophie


de la nature dans l’épicurisme et dans Démocrite.
4. Voir Dirk OBBINK, « The atheism of Epicurus », 1989.
5. En grec : stoicheia tou kosmou.. Dans cette expression, si les « éléments »
(stoicheia) peuvent faire penser aux atomes (EPICURE, Lettre à Pythoclès, 86), le mot
kosmos, « l’univers ordonné », est incompatible avec la pensée épicurienne, pour
laquelle aucun ordre ne régit l’univers.
6. LUCIEN, Alexandre le faux prophète, 38.
7. Voir un papyrus d’Herculanum sur la vie de l’Épicurien Philonidès, dont le roi
54 RENÉE KOCH PIETTRE

ne pas craindre la mort8.


Les Épicuriens, qui paraissent avoir réussi une remarquable
intégration dans les sociétés hellénistique et romaine, entretinrent
néanmoins dès le début une controverse très vive avec les autres
écoles philosophiques, notamment l’école stoïcienne ; ils se
rendirent à l’occasion coupables de diverses manœuvres politiques
obscures9, et furent sporadiquement l’objet d’un rejet et d’un
mépris dont l’ampleur est difficile à mesurer, de campagnes de
calomnies, notamment (ce n’est pas nouveau) quant à leurs mœurs
sexuelles, – et même, pour finir, d’une véritable chasse aux
sorcières, avec destruction de leurs écrits, à peu près à l’époque
même de la persécution des chrétiens10. La différence, c’est que les
Épicuriens disparurent quasiment, cependant que le christianisme
s’imposait comme la religion dominante dans l’empire romain.

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Renvoyons au discours de Cicéron Contre Pison, aux pamphlets
anti-épicuriens de Plutarque, aux autodafés des écrits épicuriens
organisés et encouragés par Alexandre d’Abonotique selon
l’opuscule précédemment cité, à quelques anecdotes scandaleuses
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contées dans Athénée et dans Élien11, ce qui nous mène jusqu’à la


première moitié du troisième siècle. Mais déjà, les chrétiens eux-
mêmes ont pris la relève dans la critique anti-épicurienne
(Origène, Lactance), cependant que des connexions troublantes
apparaissent pourtant entre les deux courants, par exemple chez
un Minucius Félix, qui, originaire d’Afrique, tente de concilier la
nouvelle foi avec la tradition philosophique, vers le second ou le
troisième siècle12. En l’an 367 l’empereur Julien l’Apostat se réjouit
de ce que les dieux aient presque anéanti les ouvrages d’Épicure13 :
mais Augustin, né en 354, déclare avoir été, dans sa jeunesse, tenté
par la doctrine d’Épicure14.
On décèle des ressemblances entre l’organisation et le
fonctionnement de ces deux sectes (j’emploie le mot secte dans le
sens que les Grecs donnaient au mot hairesis, qui a donné hérésie :
un choix de doctrine, qui chez les Anciens qualifiait, à partir de
________________________
er
Démétrios I suivait quotidiennement les leçons (édité par I. Gallo, 1980).
8. Sur ce plan, les sectes, philosophiques ou religieuses, renchérissent l’une sur
l’autre : les Épicuriens resteraient fermes dans leur bonheur « jusque dans le
taureau de Phalaris » (un taureau de bronze placé sur un feu), les Stoïciens, acculés
à ne plus supporter la douleur, se suicideraient, et les Chrétiens se précipitent au
martyre en riant et en chantant. Voir Glen W. BOWERSOCK, Martyrdom and Rome,
1995.
9. Voir par exemple PLUTARQUE, Moralia, 434d ; Athénée, V, 215b.
10. LUCIEN, Alexandre le faux prophète, 47.
11. ÉLIEN, Varia Historia IX, 12, voir ATHÉNÉE, XII, 547 a ; ÉLIEN, fr. 92a-92k
dans l’édition de Domingo-Forasté.
12. A. D. SIMPSON, « Epicureans, Christians, Atheists in the Second Century »,
1941.
13. JULIEN, Épître 89b, I, 2, 169, 15-18 (éd. BIDEZ). Augustin témoigne à son
tour que les Épicuriens ont quasiment disparu à son époque (Épîtres 118, 21).
14. AUGUSTIN, Confessions VI, 26.
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 55

l’époque hellénistique, les options philosophiques présentes, en


quelque sorte, sur le marché, options qui comportaient toutes une
théologie et un mode de vie dont les spécificités allaient jusqu’à
régenter l’activité politique, l’habillement et l’alimentation15). Par
exemple, le recours de Paul à la correspondance épistolaire, tant
pour l’élaboration et pour la diffusion de la doctrine que pour la
direction spirituelle de communautés nombreuses dispersées dans
le monde gréco-romain, n’est pas sans ressemblance avec le réseau
de communautés épicuriennes qui restait sans doute très actif à
son époque, et fonctionnait par circulation interne d’hommes, de
libelles et de lettres, constituant par ailleurs un véritable réseau
d’influences présent jusque dans les cercles les plus élevés du
pouvoir. La grande vitalité de ce réseau nous est bien connue
depuis le vivant d’Épicure jusqu’à notre Alexandre de Lucien :

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notamment par les textes, toujours en voie de déchiffrement, des
papyri de la bibliothèque d’Herculanum, dont le fonds originel
appartint à l’Épicurien Philodème, et ceux du portique de
l’Épicurien Diogène d’Œnoanda, véritable bibliothèque sur pierre,
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sur le continent turc à peu près à la hauteur de Rhodes. Le réseau


s’auto-finançait par les contributions de ses membres. Pour la
diffusion du réseau épicurien, nos informations permettent de
tracer un grand fuseau qui va de l’Égypte à la Gaule (on a trouvé
une mosaïque épicurienne du IIe s. en France, à Autun), en passant
par la Syrie, la Mer Noire, la Macédoine, la plaine du Pô pour l’arc
Nord d’une part ; Chypre et Rhodes, le Péloponnèse, la Campanie
d’autre part pour l’arc Sud du fuseau, la présence en Afrique du
Nord restant, pour autant que je sache, incertaine16, et dans la
péninsule ibérique, sans nul indice17.
Parmi ces ressemblances, j’en retiendrai trois qui touchent au
climat même des communautés, aux comportements et à
l’ambiance affective – ce sont des choses qui ne s’inventent pas, et
qui se diffusent de manière presque inconsciente :
a) l’agapê chrétienne n’est pas sans rappeler la philia épicu-
rienne, qui régit les relations entre les membres de la secte, et il
est même significatif que Paul n’emploie pas ce dernier terme,
comme pour marquer sa différence et désigner la communauté
chrétienne comme une famille nouvelle, régie par une parenté
spirituelle. Il s’agit néanmoins dans les deux cas d’une relation de
confiance et d’affection mutuelles qui impliquent la solidarité
interne et l’abolition de toutes les hiérarchies sociales externes :
pour ce qui concerne les Épicuriens, rois, femmes, esclaves, tout en
restant rois, femmes, esclaves, n’en seront pas moins traités, dans

15. Voir Pierre HADOT, Qu’est-ce que la philosophie antique ?, 1995.


16. Mais voir De WITT, Epicurus…, p. 351 sq.
17. Voir par exemple L. CANFORA, « Sulla diffusione dell’epicureismo a Roma »,
1993. L’auteur du présent article prépare la parution d’un ouvrage sur l’épicurisme
aux éditions Belin (Paris).
56 RENÉE KOCH PIETTRE

les réunions de la secte, avec les égards nécessaires pour ménager


les susceptibilités, à égalité avec les autres membres. Il ne s’agit
sans doute pas d’une contestation de l’ordre social établi. Mais, un
peu comme, à l’intérieur d’une maisonnée, la femme ou l’esclave
aussi peuvent jouir d’une confiance et d’une autorité incontestées,
nos deux sectes fonctionnent à la manière d’un espace privé. Les
différences toutefois demeurent importantes : pour Paul la femme
reste soumise à l’homme, même dans l’espace communautaire
(quelle que soit par ailleurs la place éminente des femmes parmi
ses coreligionnaires), alors que les femmes du temps d’Épicure
peuvent même diriger la communauté en son absence ; d’autre
part, Paul évoque ou met en œuvre de véritables procès internes,
une sorte de gouvernement interne, ainsi qu’une réglementation
morale18, dont nous n’avons pas d’exemple pour les Épicuriens. Une

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autre différence, c’est qu’en épicurisme un lien d’amitié privilégié
lie le maître à l’élève et est exalté jusqu’à un véritable culte19, mais
sans la moindre idée de subordination. Au contraire, Paul, qui se
dit « serviteur du Christ » agit en chef et en censeur, même quand
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il témoigne aussi la tendresse d’un grand frère.


b) La coexistence des hiérarchies sociales externes et de l’égalité
interne est commune aux deux sectes ; mais elle pose aux
Épicuriens un certain nombre de problèmes diplomatiques : il
faudra quand même tenir compte des susceptibilités de chacun !
D’où la nécessité d’adapter les relations et le langage en fonction
des interlocuteurs, même dans l’espace interne. De cela nous avons
une bonne connaissance grâce à un traité de Philodème sur la
franchise ou liberté de parole (la parrhêsia), dont le principe réglait
les relations internes mais exigeait en même temps toute une
casuistique20 : pour affermir la foi21 dans la doctrine il convenait
d’entretenir des relations de franchise entre les membres, qui
devaient servir les uns aux autres de confesseurs et s’ouvrir du
moindre doute, s’alarmer de la moindre déviance, au besoin en
avertissant la communauté entière. Cependant on a des cas
d’exclusion pour les Chrétiens, on a même l’idée qu’il faut savoir
couper les branches pour assainir l’arbre, alors qu’on n’a qu’un tout
petit nombre de cas de transfuges chez les Épicuriens22.

18. I Corinthiens 5-7. Voir Glad, Paul and Philodemus, p. 315-332.


19. Voir Diskin CLAY, «The Cults of Epicurus», 1986 (voir Paradosis and
Survival: Three Chapters in the History of Epicurean Philosophy, 1998).
20. Par exemple, il convenait de savoir que la franchise est beaucoup plus
délicate d’utilisation à l’égard des femmes que des hommes, celles-là se montrant
souvent très susceptibles.
21. Le mot pistis est utilisé par les Épicuriens aussi, mais avec un sens différent
(persuasion, conviction emportée par un discours rationnel).
22. Comme on demandait à Arcésilas, sixième successeur de Platon à
l’Académie, « pourquoi les étudiants désertaient les autres écoles pour celle
d’Epicure, mais jamais de celle des Épicuriens », Arcésilas répliqua que « les
hommes peuvent devenir eunuques, mais les eunuques ne peuvent devenir des
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 57

c) Il y a lieu de comparer le « parler en langues » des chrétiens


envahis par l’esprit saint au cours de leurs réunions, comme les
pentecôtistes d’aujourd’hui, et le climat qui devait régner aux
réunions festives des Épicuriens23, si on le rapporte à la doctrine de
l’expression spontanée de la voix de la nature qui serait à l’origine
du langage et à laquelle une parole vraie se conforme
nécessairement24. Paul dit que de l’extérieur les réunions des
fidèles possédés par l’esprit saint faisaient plutôt mauvais effet, et
paraissaient une espèce d’orgie ou de pandémonium25. Dans ces
réunions, le partage de la nourriture, la circulation du vin, ont une
importance dont la portée symbolique est évidemment très
différente d’une secte à l’autre.
La comparaison rencontre cependant assez vite ses limites,
dans la mesure où chez les Épicuriens le salut est dans l’ascèse

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spécifique menant à la conversion intellectuelle, et chez les
chrétiens dans un avenir eschatologique proche pour tous mais où
la conversion les a fait entrer eux-mêmes de plain-pied, et dont ils
ne cessent de préparer l’apocalypse, par des encouragements
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mutuels et des renoncements exaltés. Cette circonstance


recommande à l’Épicurien toute la disponibilité nécessaire aux
activités de loisir, cependant que la mise en commun régulière
d’une part des ressources, voire du travail26, forme la base de
l’indépendance alimentaire. Paul, qui vante à l’occasion des
bienfaits reçus27 et lance de grandes collectes de solidarité28, refuse
au contraire que l’on soit à la charge de ses frères, et demande à
chacun de vivre du travail de ses mains, circonstance peu propice à
l’étude. On rencontre enfin des exhortations à l’endurance, au
combat moral, à la peine et à la souffrance de l’effort athlétique,
qui sont impensables en épicurisme et s’apparentent à la morale
stoïcienne29.
C’est sur ces bases que N. W. De Witt avait cru pouvoir dire
qu’en plusieurs passages de ses épîtres Paul s’adressait à d’anciens
Épicuriens (notamment parmi les Thessaloniciens et les
Corinthiens), en utilisant certains mots-clefs de leur propre
langage, dont il pervertit subtilement le sens : « paix et salut »,
« plénitude », « corruption » et « incorruptibilité », ou l’image d’un
« chant de victoire » sur la mort désormais privée de son aiguillon,
image déjà présente dans la Sentence vaticane 47 ; cependant que
les trois notions phares, « foi, espérance et charité », formeraient

________________________
hommes » (Diogène Laërce, IV, 43).
23. PLUTARQUE, Moralia, 1098b et 1125b.
24. LUCRÈCE, V, 1028-1090 ; ÉPICURE, Lettre à Hérodote, 76.
25. I Corinthens 14.
26. DIOGÈNE D’ŒNOANDA, fr. 56 (éd. SMITH).
27. Philippiens 4, 12-16.
28. 2 Corinthiens 9.
29. 2 Timothée 2, 3-6.
58 RENÉE KOCH PIETTRE

ensemble un slogan anti-épicurien caractérisé30.

Paul devant l’Aréopage d’Athènes


Il n’existe pourtant qu’une seule rencontre explicite entre Paul
et les Épicuriens, précisément notre chapitre 17 des Actes des
Apôtres. C’est, répétons-le, un témoin indirect qui nous rapporte
l’épisode, et peut-être l’arrange-t-il à sa manière.
Nous sommes au début des années cinquante de l’ère
chrétienne. Paul, lors de sa seconde mission, est à Athènes, atten-
dant d’être rejoint par ses compagnons Silas et Timothée. Il prêche
dans la synagogue mais aussi sur la place publique, au premier
passant venu. Depuis Socrate et Platon, nous savons que les places
d’Athènes grouillent de gens qui n’ont rien de mieux à faire que de

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bavarder avec jactance, en monopolisant l’écoute des jeunes gens
désœuvrés31. Ces gens s’appellent des philosophes, et justement il y
en avait là – des Épicuriens et des Stoïciens, les autres sectes, en-
dehors des Cyniques, ne daignant plus enseigner en pleine rue –
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qui s’intéressèrent à ce concurrent et, au milieu des quolibets, se


trouvèrent néanmoins assez curieux de nouveautés pour désirer
l’entendre. On remarquera que, dans la comparaison implicite avec
Socrate, c’est pourtant Paul qui tient le rôle du philosophe,
puisqu’il est supposé, comme dans l’acte d’accusation de Socrate
inculpé de croyance en de nouveaux dieux, enseigner « des dieux
étrangers32 », ou « une doctrine nouvelle33 ». Ils « mirent la main sur
lui34 » et l’emmenèrent à l’Aréopage pour l’interroger. Le texte est
ambigu : Paul est-il traîné en justice ? Les intentions ne paraissent
pas hostiles : on lui offre une tribune plutôt qu’on ne lui oppose un
tribunal, pour s’y faire entendre plutôt que juger35. Et Paul se met
à prêcher « debout au milieu » des Aréopagites36, en s’adressant

30. Voir I Corinthiens 13. Pour les références, on se reportera à l’« Index » de DE
WITT, Epicurus, s.v. « Paul, Saint ».
31. Voir PLATON, Gorgias, 485d. Celse, au second siècle, décrira un
comportement tout semblable chez les Chrétiens (ORIGÈNE, Contre Celse III, 50).
32. Xenôn daimoniôn, v. 18.
33. Kainê didachê, v. 19.
34. epilabomenoi de autou, ibid. Outre la comparution de Socrate devant ses
juges, le rédacteur avait peut-être aussi à l’esprit celle de Jésus devant le « Conseil
des anciens du peuple, des grands prêtres et des lettrés », le Sanhédrin de
Jérusalem, LUC 22.63-71 (MATTHIEU 26.57-66 ; MARC 14.53-65).
35 On s’est longtemps demandé s’il s’agissait de la colline de ce nom, ou du
Conseil de l’Aréopage : il s’agit bien évidemment du Conseil, qui à l’époque de Paul
« exerçait… le gouvernement de la cité, … en particulier chargé de contrôler
l’éducation donnée aux jeunes », et ne siégeait plus sur la colline mais sans doute
« dans les salles du Portique royal, voisin du Portique de Zeus Éleuthérios, sur le
bord ouest de l’Agora, au débouché de la voie des Panathénées ». Paul « pouvait
attendre de cet examen une autorisation officielle pour enseigner en public » (H. D.
SAFFREY, Histoire de l’apôtre Paul, 1991, p. 79). Voir aussi N. HUGÉDÉ, Saint Paul
et la Grèce, 1982, p. 99-154.
36. Ce texte a reçu d’amples commentaires. Renvoyons à E. NORDEN, Agnostos
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 59

pourtant aux représentants du peuple comme le faisait Socrate, les


appelant « Messieurs les Athéniens », « Citoyens d’Athènes37 ». Il
commence en les qualifiant d’une expression bien étrange : « Vous
êtes en toutes choses un peu trop superstitieux38 », mais ce n’est
pas pour leur en faire reproche, c’est pour les féliciter d’avoir
réservé un autel au « dieu inconnu39 », un scrupule que la
prédication de Paul va révéler plein de sens et de prescience,
puisqu’il se serait agi en fait du dieu même que Paul est venu
annoncer, un dieu créateur, un dieu vivant comme les hommes – et
non une sorte d’« empreinte », de moulage en or, en argent, en
marbre, « œuvre de l’art ou de la pensée humains40 ». Là encore
l’expression est intéressante. Elle évoque tant une technique de
sculpteur, l’incision, l’empreinte ou le moulage, que le signe écrit,
la trace, mais aussi toute la réflexion de la philosophie grecque

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(Platon, Aristote, les Stoïciens, les Épicuriens) sur le procès de la
représentation mentale, envisagé comme une empreinte déposée
dans l’âme par les perceptions, fussent-elles par ailleurs
perceptions intellectives. L’expression associe donc l’objet-image, et
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la représentation subjective de la divinité, pour les rejeter tous


deux, au nom d’un dieu en effet inconnaissable, puisque c’est par
« tâtonnement41 » aveugle seulement qu’on pourrait le trouver, et le
trouver non pas éloigné en vérité, mais « tout proche de chacun et
bien existant42 ». Pour un Grec, voilà qui est déjà totalement
étrange, cette négation de la connaissance de dieu par la
représentation, ce tâtonnement et cette proximité au lieu d’un
emplacement fixe (le sanctuaire, l’astre ou l’Idée) dont il serait
possible de se rapprocher ou de s’éloigner, par la distance ou par la
pensée. Néanmoins il existait l’idée d’un dieu-monde, ou d’un dieu
immanent au monde, dans la pensée philosophique au moins
depuis Xénophane, et la formule du v. 28, « C’est en lui qu’il nous
est donné de vivre, de nous mouvoir, d’exister », pouvait être
agréée par les auditeurs Stoïciens43. L’Aréopage pouvait également

________________________
Theos, 1913, p. 3-140 ; M. DIBELIUS, Paulus auf dem Areopag, 1939 ; É. DES PLACES,
La religion grecque, 1969, p. 329-361 ; J. DUPONT, « Le discours à l’Aréopage »,
Nouvelles Études sur les Actes des Apôtres, 1984, p. 380-423.
37. Andres Athenaioi, v. 22.
38. Kata panta hôs deisidaimonesterous : ou bien « particulièrement religieux » ?
(v. 22).
39. Agnôstôi theôi, v. 23. Pour la discussion archéologique concernant cet autel,
voir H. LECLERCQ, « Paul (saint) », Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de
liturgie, 1938, p. 2605-2608. Pour l’interprétation, voir E. NORDEN, Agnostos Theos.
40. Charagmati technês kai enthumêseôs anthrôpou, v. 28.
41. Psêlaphêseian, v. 27. Le verbe employé est familier aux utilisateurs de la
Bible grecque, la Septante ; Luc l’emploie dans le passage où Jésus ressuscité invite
ses disciples à le « palper » (Lc 24.39), mais il est attesté aussi chez des Épicuriens
(Épicure et Philodème).
42. Ou makran apo henos hekastou hêmôn huparchonta, v. 27.
43. Voir DIOGÈNE LAËRCE VII, 147, et en général CICÉRON, De natura deorum,
II.
60 RENÉE KOCH PIETTRE

se sentir en terrain connu lorsque Paul évoque ensuite un mythe


du premier homme mêlant la tradition grecque et la Genèse juive :
ce dieu est installé non dans l’immuabilité d’un éternel présent,
comme les « dieux bienheureux qui toujours sont » des poèmes
homériques, ou comme le dieu immobile de Parménide, mais simul-
tanément à la source du devenir et dans le devenir, puisque les
hommes sont de sa « race » (genos)44, comme s’il siégeait aussi dans
leur corps, dans leur propre capacité d’engendrement. Deux autres
traits, compréhensibles pour des philosophes, s’opposent néan-
moins à la piété traditionnelle des Athéniens : ce dieu n’a pas
besoin des hommes45, mais c’est lui qui a fixé l’espace et le temps de
la vie des hommes46, alors que les dieux grecs doivent
traditionnellement être nourris des sacrifices des hommes47, et
honorés aux dates et aux lieux que les hommes ont découpés pour

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eux sur leur territoire et dans leur calendrier. Chez les Grecs, hors
récits et expériences d’épiphanies divines, les hommes vont aux
dieux et leur assignent leur place, avec leur consentement et
parfois à leur demande ; ici c’est le Dieu de Paul qui vient aux
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hommes, lesquels se trouvent pris dans un dessein général,


assignés au destin de la création entière. Mais la fin a dû paraître
ubuesque aux oreilles de nos Athéniens : maître du temps, mais
engagé lui-même dans le temps, ce dieu a « fixé un jour » pour un
jugement qu’il confie à un homme désigné, et en guise de preuve et
de gage, parce qu’en effet la créance n’allait pas de soi, il a
ressuscité cet homme d’entre les morts, inaugurant du même coup
le présent48 de l’accomplissement, où tous sont appelés à la
conversion et au repentir49.
Le texte contient ainsi un jeu mi-savant, mi-embrouillé, un jeu
d’échos et de contrastes avec la tradition grecque, philosophique
surtout, mais aussi de pratique cultuelle. Paul y est campé en
philosophe plutôt qu’en prophète. Or c’est bien sur le terrain de la
philosophie, et non sur celui des croyances, que christianisme et
hellénisme se sont affrontés, et nous en voyons ici les premiers
symptômes50. Pour les Grecs les Juifs n’avaient pu être acceptés

44. Paul cite à cet endroit un vers d’un poème d’Aratos, originaire comme lui de
la ville de Tarse : « Nous sommes de la race de Dieu » (opposer à PINDARE,
Néméenne VI, 1-3). Ce même vers avait déjà été cité deux siècles plus tôt par
l’écrivain alexandrin juif Aristobule. Ce n’est, explique H.D.SAFFREY (l.c.), « que
l’interprétation juive hellénistique du texte de la Genèse ».
45. L’idée de l’autarcie divine est solidaire de celle de la perfection divine, et elle
entre dans toute définition rationnelle du dieu.
46. V. 26. Ces mots peuvent à la rigueur se comprendre à partir de la doctrine
de la Providence, telle que la défendaient les Stoïciens.
47. Comme il apparaît dans l’ Hymne homérique à Déméter, ou les Oiseaux
d’Aristophane.
48. Ta nun, v. 30.
49. Metanoein, ibid.
50. Avec des accents variés, c’est comme un tel affrontement que les auteurs ont
généralement rendu compte du discours de Paul à l’Aréopage. Outre E. NORDEN, M.
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 61

jusque-là, dans leurs étranges coutumes, qu’en tant que


philosophes renonçants, pratiquant, par leur refus des nourritures
communes, une ascèse comparable à celle des pythagoriciens ou
des brahmanes de l’Inde51. La qualification philosophique de
l’action de Paul est confirmée, plus loin dans les Actes, par le refus
de Gallion, proconsul d’Achaïe, de connaître des crimes qui sont
reprochés à l’apôtre par ses coreligionnaires juifs. Ces derniers
accusent Paul d’impiété52. Gallion répond que ce n’est qu’une
affaire de raisonnement, de mots, et d’une loi interne à la
communauté juive, qui ne relèvent pas de sa juridiction. Depuis
Socrate, au moins aux yeux d’un administrateur romain, la
philosophie paraît avoir gagné le droit de parler des dieux à son
aise et d’importer tous les nouveaux dieux qu’il lui plaira, s’agît-il
de la déesse « Résurrection53 ».

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Notons d’autre part que, dans cette catéchèse adressée aux
Athéniens, l’accent n’est pas mis du tout sur une opposition entre
le polythéisme grec et le monothéisme judéo-chrétien, ni même
entre le multiple et l’un. Paul dit apporter simplement un dieu de
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plus, un dieu dont la place était comme en attente, sous les espèces
d’un autel anonyme, dans le panthéon des Athéniens. Une telle
situation n’est d’ailleurs pas du tout nouvelle dans le panthéon
grec : Dionysos par exemple est par définition un dieu qui vient de
l’étranger, avec des caractères bizarres54. La différence se situe
ailleurs, dans l’opposition entre des dieux fabriqués et visibles, et
un dieu vivant mais invisible, dans l’opposition entre des statues
brillantes et un modeste autel ; l’originalité du message de Paul est
dans la dimension temporelle d’une révélation, dans l’accès
« tâtonnant » à la connaissance du dieu, dans la sommation, qui lui
fait suite, à une conversion spirituelle, et dans le brouillage des
repères entre la vie, la mort, et l’éternité divine. Encore n’est-ce
pas tout cela qui paraît choquer les Athéniens. Ce qui les offusque,
c’est surtout la question de la résurrection des morts, dont ils ont
d’ailleurs d’abord compris (ou feint de comprendre) le mot comme
le nom propre d’une nouvelle divinité féminine. Inversement, ce
qui avait choqué Paul, c’est la multiplicité des images plastiques
des dieux à travers la cité.

________________________
DIBELIUS, É. DES PLACES, J. DUPONT, cités supra, voir A. D. NOCK, Essays on
religion and the Ancient World, I, 1972, p. 63-68 ; Abraham J. MALHERBE, Paul and
the Popular Philosophers, 1989.
51. Voir Théophraste cité par PORPHYRE, De l’abstinence II, 26 ; Cléarque cité
par FLAVIUS JOSÈPHE, Contre Apion I, 179 ; Mégasthène cité par CLÉMENT,
Stromates I, 15, 72, 5 (textes cités dans P. BORGEAUD, Aux origines de l’histoire des
religions, 2004, p. 84-87).
52. « C’est contre la loi que cet homme persuade les gens d’honorer Dieu » (Actes
18.12-16).
53. Les auditeurs de Paul confondent-ils la Résurrection (anastasis en grec) avec
une déesse qui ferait couple avec Jésus ?
54. Voir par exemple les Bacchantes d’EURIPIDE.
62 RENÉE KOCH PIETTRE

Donc, les Athéniens ont rencontré, malgré toute l’étrangeté55 des


paroles de Paul, un philosophe parmi d’autres philosophes, qui
n’agit pas en prophète d’un monothéisme, mais plutôt en apôtre
d’une vie nouvelle, une vie métamorphosée par la conversion
morale et mentale, et – seule véritable anomalie – par le signe
bizarre de la résurrection.
L’honneur d’être admis à disputer avec ou contre l’Aréopage, ou
plus sûrement avec les Épicuriens et les Stoïciens à l’Aréopage,
constituait sans doute un des sommets enviés d’une carrière
d’intellectuel dans la Grèce des premiers siècles de notre ère. On
en a quelques autres exemples. Paul sachant toujours extraordi-
nairement adapter son langage à son public (c’est vrai même pour
l’emploi des langues : Paul est Juif pour les Juifs, Grec pour les
Grecs, Romain pour les Romains), il a choisi ici un langage de

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philosophe. Non pas seulement par ruse et par calcul : si cette
histoire est vraie, et non simplement une vignette ajoutée à une
légende, Paul se livre sans doute de bonne foi à un exercice de
persuasion qui a pu être pour lui, quoi qu’en dise le narrateur de la
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scène, de la plus haute importance, car il s’adresse à ceux qu’on


tenait de son temps pour l’élite des citoyens et des penseurs
d’Athènes, voire de tout le monde grec. À travers les paroles de
l’apôtre, le Christ devra en quelque sorte pouvoir s’imposer aussi
sur ce terrain–là, il devra revêtir les habits de son temps, et se
laisser lire dans des mots qui ne sont pas son langage naturel. Des
consonances étonnantes, non certes de doctrine, mais de langage,
apparaissent, de ce fait, même avec la philosophie épicurienne..
Quel que soit son mépris pour l’incurie bavarde des Athéniens, la
chance d’accéder à la tribune de l’Aréopage constitue pour Paul un
défi à relever.

Paul et les Épicuriens d’Athènes


Parmi les modèles théologiques qui sont à l’arrière-plan du
discours de Paul, il convient en effet de ne pas oublier la doctrine
épicurienne. Pourquoi accorder ici un privilège à la philosophie
épicurienne, et non pas plutôt aux Cyniques, à l’Académie ou au
Portique, que chacun cite d’ordinaire abondamment en rapport
avec les lettres pauliniennes56 ? Et cela malgré l’athéisme si
souvent reproché aux Épicuriens ? – Paul sans doute les
connaissait de près, et il y avait de bonnes raisons à cela.
Tarse où Paul grandit était, selon l’opinion de Strabon, une cité
de haute culture57. Des philosophes de tendances opposées la

55. Cette idée d’étrangeté figure au v. 20 dans le mot xenizonta.


56. Voir par ex. MALHERBE 1989. Épicure n’est cité qu’en tant que repoussoir, ce
qu’il restera en effet largement dans la tradition patristique, voir R. JUNGKUNTZ,
« Fathers, Heretics and Epicureans », 1966.
57. Strabon notait que « les habitants de Tarse se sont adonnés avec tant de
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 63

gouvernèrent alternativement. La douceur de son climat et


l’indolence de ses mœurs étaient également célèbres58. Paul, qui
s’enorgueillit du titre de citoyen romain59, devait appartenir à une
riche famille juive bien implantée, et il avait sûrement bénéficié de
la meilleure éducation, laquelle ne pouvait guère être différente du
modèle grec : les archéologues ont même exhumé, lors les fouilles
de Sardes en Lydie, un gymnase, assorti de bains, auquel était
intégrée une synagogue60 ! Or, l’environnement syrien et anatolien
était le lieu d’une forte implantation épicurienne, dont nous
possédons de nombreuses attestations, jusqu’au second et peut-être
au troisième siècle de notre ère61. Et l’épicurisme avait ceci de
particulier, qu’il était répandu, en forme de minorité agissante,
dans toutes les couches de la société, et pas seulement dans des
cercles intellectuels.

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Paul n’a donc pas dû avoir trop de mal à se mettre au niveau
des Athéniens philosophes, et il a pu retrouver sans peine le ton
familier à ce milieu, mêlant les jargons de diverses écoles, veillant
à ne pas tomber dans le ridicule devant son auditoire : rien
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n’aurait dû l’empêcher de recevoir même des honneurs de la part


de l’illustre Aréopage. Une comparaison s’impose ici avec une
inscription grecque postérieure d’au moins un demi-siècle au
passage de Paul à Athènes. Cette inscription provient de la cité de
Rhodiapolis, sur la côte sud de l’Anatolie62. Le texte date sans doute
du règne de Trajan (98-117). Voilà un certain Héraclite,
personnage bien extraordinaire. Il s’est fait remarquer par un
assemblage unique de talents poétiques et philosophiques, et par
son évergétisme, qui lui valurent, outre les éloges de sa patrie, les
honneurs des plus grandes cités de la Grèce des lettres,
Alexandrie, Rhodes et Athènes. Or à Athènes, il a été félicité, et il
s’en vante, à la fois par les philosophes épicuriens et par
l’Aréopage. L’Aréopage était un tribunal prestigieux à la fois par
son antiquité et par sa composition : y entraient les anciens
archontes, chefs annuels de la politique athénienne. Nous savons
par exemple qu’un certain Lysiadès, fils de Phèdre l’Épicurien, et
________________________
passion non seulement à la philosophie, mais aussi à l’ensemble des disciplines
intellectuelles, qu’ils ont surpassé Athènes, Alexandrie, et tout autre lieu où des
philosophes ont dirigé des écoles et donné des cours » (XIV, 5, 12-15, voir John
Clayton LENTZ, Le portrait de Paul selon Luc dans les Actes des Apôtres, 1998, p. 47.
58. Voir PHILOSTRATE, Vie d’Apollonios de Tyane I, 7.
59. Pour un dossier sur la citoyenneté romaine de Paul : John CLAYTON LENTZ,
Le portrait de Paul, p. 63-73.
60. A. T. KRAABEL, « Paganism and Judaism : the Sardis evidence », dans
Paganisme, judaïsme, christianisme, 1978, p. 13-33 ; P. TREBILCO, Jewish
Communities in Asia Minor, 1986, voir John CLAYTON LENTZ, Le portrait de Paul, p.
51.
61. Wilhelm CRÖNERT, « Die Epikureer in Syrien », 1907 ; M. F. SMITH, « An
Epicurean Priest from Apamea in Syria », 1996.
62. Voir M. N. TOD, « Sidelights on Greek Philosophers », 1957 ; J. H. OLIVER,
« The Empress Plotina and the Sacred Thymelic Synod », 1975.
64 RENÉE KOCH PIETTRE

sûrement Épicurien lui-même, avait été archonte et par


conséquent aréopagite en 50 av. J.-C63. Il n’y a pas de raisons que
d’autres Épicuriens ne l’aient pas rejoint dans cette position, au fil
des ans. Mais sans doute y eut-il tout autant de Stoïciens dans la
place, puisque nous connaissons aussi, par le témoignage de
Plutarque64 et par un décret honorifique de l’Aréopage65, un
philosophe stoïcien, cette fois, nommé Sarapion, qui aurait eu des
talents tout semblables à ceux d’Héraclite : sur des sujets
philosophiques et sérieux il aurait composé des poèmes dont l’art
faisait penser à Homère et à Hésiode plutôt, dit le texte, qu’aux
« proférations de la Pythie66 ». On ne sait lequel, d’Héraclite ou de
Sarapion, voulut rivaliser avec l’autre, si c’est l’Épicurien ou le
Stoïcien qui eut le premier l’honneur d’un décret de l’Aréopage,
mais la comparaison de l’art savant de Sarapion avec l’emphase

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oraculaire suggère une critique d’un prédécesseur – pourquoi pas
notre Héraclite épicurien ? Une comparaison d’Épicure avec un
prophète apparaît justement chez Lucrèce, qui adopte lui-même un
ton inspiré67. Notons qu’il est possible que les honneurs accordés
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par l’Aréopage au poète épicurien Héraclite aient été encouragés


par l’influence d’une grande dame épicurienne de son temps,
l’impératrice Plotine, épouse de Trajan68.
Nous ne sommes pas encore, avec Paul, au temps de Plotine,
mais l’Aréopage a pu être dès son temps investi par des Épicuriens
plus ou moins nombreux, car certains éléments du discours de
l’apôtre paraissent orientés vers des oreilles épicuriennes.
Énumérons les traits qui permettent d’avancer cette thèse.
Lorsque Paul reproche aux Aréopagites d’être « un peu trop
superstitieux », il emploie un terme qui veut dire « craignant les
dieux », et qui peut renvoyer aussi bien au scrupule religieux qu’à
la superstition ; or la grande voie du salut épicurien consiste
justement à enseigner à ne plus craindre les dieux. Si ce sont des
Épicuriens que Paul a en face de lui, l’expression se charge de sens,
à la fois flatteuse dans le ton et cinglante sur le fond. Mais par
ailleurs les Épicuriens pratiquaient précisément une telle forme
mixte de blâme et d’éloge, comme on le voit faire par Épicure lui-
même lorsque dans une lettre il vante un geste d’enthousiasme
d’un disciple en le qualifiant pourtant de contraire à la doctrine

63. Voir A. E. RAUBITSCHEK, The School of Hellas, 1991, p. 337-344.


64. Sur les oracles de la Pythie, Moralia 396f, voir 402f.
65. J. H. OLIVER, « Imperial Commissioners in Achaia », 1973.
66. On peut penser à l’art de Lucrèce, le poète latin : un poème didactique, un
ton oraculaire, sur un hexamètre emprunté à la tradition épique.
67. LUCRÈCE, III, 14.
68. Celle-ci avait simultanément encouragé aussi le « sacré synode des gens du
théâtre », association d’acteurs, d’auteurs dramatiques et autres intellectuels réunis
sous le patronage « sacré » de l’empereur : ce « sacré synode » dont nous lisons,
justement, dans l’inscription de Rhodiapolis, qu’il y alla lui aussi de ses honneurs
envers le poète Héraclite.
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 65

physique69. L’expression par laquelle Paul, ensuite, rejette les


idoles moulées ou imprimées dans l’âme, peut être une allusion à
la doctrine épicurienne de la perception mentale des images
divines70, soutenue par l’omniprésence de leurs représentations
dans la statuaire religieuse. Au lieu de cette pure représentation
visuelle et intellective, Paul suggère un autre accès au divin, et cet
accès est justement celui qui passe par le sens roi selon les
Épicuriens, celui auquel toute connaissance se ramène en dernier
ressort : à savoir le toucher71, un « tâtonnement » aveugle. De
même, c’est par contraste avec la doctrine épicurienne de dieux
sans rapport avec les hommes, éloignés dans les intermondes, que
prend tout son sens l’indication de la proximité du dieu des
chrétiens, cependant que la plénitude de ce dieu chrétien, et son
caractère vivant rejoignent, cette fois, l’autarcie et la vie des dieux

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d’Épicure (la négation du besoin d’autrui, prosdeêsis, se rencontre
chez Épicure dans le contexte des dieux72). L’insistance sur la
résurrection des morts contredit directement la maxime
épicurienne selon laquelle la mort est une fin qui ne nous concerne
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plus : à la dissolution des liens du corps, agrégat matériel (sustasis)


du langage épicurien, le chrétien oppose la recomposition physique
du corps après la mort (anastasis). Enfin l’idée d’avoir à changer de
mentalité, l’idée d’une conversion (metanoein), est, sous un autre
nom (epi-spasmos : l’idée d’une attraction irrésistible vers l’image
mentale des dieux dès lors qu’ils sont postulés anthropomorphes) au
cœur de la doctrine et sans doute, nous avons pour notre part essayé de le
montrer ailleurs73, au cœur d’une certaine pratique épicurienne.
*
Pourquoi serait-ce en des termes parlants pour des Épicuriens
que Paul s’est exprimé devant l’Aréopage ? Outre la présence
probable, suggérée par le contexte et par les inscriptions que nous
citions, d’Épicuriens dans ce Conseil vénérable, la philosophie du
Jardin devait être (avec celle, caricaturée et caricaturale, des
Cyniques, mais aussi en des formes de syncrétisme à l’œuvre dans
la morale stoïcienne qui s’écrit à la même époque avec Sénèque et
bientôt avec Musonius Rufus ou Épictète), la doctrine que tout le
monde avait le plus de chances de connaître, parce que, comme

69. Emploi du terme aphusiologêtôs, voir PLUTARQUE, Contre Colotès, Moralia


1117 b-f.
70. Qualifiées d’eidôla, voir plus haut dans le texte des Actes le terme kateidôlon
décrivant Athènes « pleine d’idoles ».
71. Toute sensation provient, selon les Épicuriens, d’un contact entre des
émanations des corps perçus et les organes sensoriels. Voir LUCRÈCE, IV, pour le
détail des processus.
72. ÉPICURE, Lettre à Hérodote, 77 (pas de prosdeêsis tôn plêsion, de « besoin des
proches »).
73. Renée PIETTRE, « La proscynèse de Colotès », 1998. La référence principale
est un texte attribué à l’Épicurien Démétrius Lacon, récemment publié sous le titre
La forma del dio, par Mariacarolina SANTORO, Naples, Bibliopolis 2000.
66 RENÉE KOCH PIETTRE

nous l’avons suggéré, c’était la plus répandue, et aussi la plus facile


à approcher, notamment en Syrie où elle s’était implantée dès le
troisième siècle av. J.- C. : Paul avait précisément longuement séjourné à
Antioche en Syrie. L’épicurisme avait sans doute acquis une image à la
fois académique et accessible néanmoins à un public moyen : on se
sentait d’autant mieux honoré de pouvoir approcher ces
intellectuels-là, qu’on était flatté de réussir à les comprendre,
malgré la barrière, assez facile à lever, de leur jargon d’école. Mais
Paul, lui, les connaît même trop bien : il est capable de jouer de
leurs références, de les tourner à son profit, à la gloire de sa
doctrine. Peut-être en a-t-il déjà converti beaucoup, en Syrie
comme ailleurs.
Nous pouvons alors nous demander si dans le discours de Paul
tout est ruse et adaptabilité. Un effort sincère n’est-il pas

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nécessaire pour expliquer, et s’expliquer à soi-même, le système
doctrinal que l’on défend, lorsque l’on fait face à des contradicteurs
respectables qui usent de leur langage propre ? Paul a dû être
obligé d’entrer dans ce langage, d’entrer même dans ce mode de
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pensée matérialiste, pour expliquer où il en était lui-même. S’agis-


sant des Épicuriens, il ne pouvait pas leur reprocher un athéisme :
n’avaient-ils pas au contraire trop de dieux, et n’aurait-on pas pu
lui renvoyer très facilement cette accusation, qui n’épargna pas les
chrétiens ? Ni leur polythéisme : les Athéniens n’avaient-ils pas
réservé la place du dieu qu’il leur apportait ? Lui-même n’insiste
nullement sur l’unicité de son dieu, mais sur son activité créatrice,
sur sa providence, et sur sa proximité en quelque sorte physique,
ce qui le rend jusqu’à un certain point adaptable à une doctrine
matérialiste comme celle des Stoïciens. L’ontologie divine est ici
essentiellement matérialiste. La spiritualité chrétienne, et plus
spécifiquement le cadre philosophique d’inspiration platonicienne
dans lequel le christianisme se définira ensuite, ne sont pas encore
en place.
On comprend, dans ce cas, en quoi Paul a échoué devant
l’Aréopage : il n’a pas remporté la couronne ni les honneurs qui
furent plus tard décernés à un Héraclite de Rhodiapolis ou à un
Sarapion. Il a dû renoncer à se battre sur le terrain des valeurs
intellectuelles du monde grec, où d’autres juifs, comme Philon
d’Alexandrie, avaient tenté de s’illustrer. À Corinthe, sa prochaine
étape, il se résolut à travailler de ses mains pour vivre : la rupture
intellectuelle entraînait de facto une rupture sociale, bien plus
profonde que la retraite lettrée ou semi-lettrée du Jardin.
Ce que nous montre cet exemple, c’est qu’il n’existe pas, à
l’époque de la rédaction des Actes, d’opposition massive entre
athéisme, polythéisme, monothéisme. Nous voyons ici au travail un
essai d’auto-définition religieuse en fonction de l’environnement où
le sujet se place. La doctrine naît d’interactions constantes et
s’alimente de ce qu’elle nie.
PAUL ET LES ÉPICURIENS D’ATHÈNES 67

Renée KOCH PIETTRE.


(École Pratique des Hautes Études, Paris.)

BIBLIOGRAPHIE

BORGEAUD, P., Aux origines de l’histoire des religions, Paris, Seuil 2004.
BOWERSOCK, G. W., Martyrdom and Rome, Cambridge, Cambridge
University Press 1995.
CANFORA, L., « Sulla diffusione dell’epicureismo a Roma », dans Studi
di storia della storiografia romana, Bari, Edipuglia 1993, p. 263-273.
CLAY, D., « The Cults of Epicurus », Cronache Ercolanesi 16, 1986, p. 11-28.
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Philosophy, Ann Arbor, Michigan, 1998.
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