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Société des océanistes
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Estelle Castro-Koshy, Flora Aurima-Devatine, Moana’ura Tehei’ura et Tokai Devatine, « Discussion sur
« Pina’ina’i : écho de l’esprit et des corps » », Le Journal de la Société des Océanistes [En ligne],
142-143 | 2016, mis en ligne le 31 décembre 2018, consulté le 18 avril 2017. URL : http://
jso.revues.org/7603 ; DOI : 10.4000/jso.7603
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RÉSUMÉ ABSTRACT
Depuis 2011 se déroule chaque année à Tahiti l’événement Spectacular “Pina’ina’i: écho de l’esprit et des corps” has
« Pina’ina’i : écho de l’esprit et des corps », pendant lequel taken place every year in Tahiti since 2011. During this
des écrivains et orateurs déclament des textes interprétés par event, choreographed by Moana’ura Tehei’ura and organised
des danseurs et des musiciens. « Danse des mots et poésie des by association Littérama’ohi, writers and orators perform
corps prennent vie sur le Paepae-a-Hiro » (Tehei’ura, 2012) their texts, which are also interpreted by dancers and musi-
lors de ce spectacle mis en scène par Moana’ura Tehei’ura et cians; “danced-dancing words and the poetry of bodies come
organisé par l’association Littérama’ohi. Cet article souligne to life on the Paepae-a-Hiro” (Tehei’ura 2012). his article
l’importance et les résonances poétiques, artistiques, socio- highlights the importance of the poetic, artistic, sociopo-
politiques et axiologiques de Pina’ina’i, dont le succès croît litical, and axiological resonances of Pina’ina’i. Nine-
chaque année. Dix-neuf contributeurs, pour la plupart teen contributors, most of whom are Polynesian – among
polynésiens, chorégraphe-metteur en scène, compositeur, them, the choreographer-director, composer, writer-readers,
auteurs-lecteurs, danseurs, spectateurs, chercheurs analysent dancers, spectators, and researchers – analyse the singularity
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- Chantal T. Spitz : auteure, lectrice, co-fonda- « spectater », qui rend compte de la dimension
trice de Littérama’ohi, présidente de l’association active de la réception des œuvres.
Groupe Littérama’ohi depuis 2010 ;
- hitihiti hiro-Tehei’ura : danseuse depuis le
1er Pina’ina’i ; D’où a germé l’idée de créer Pina’ina’i ?
- hinanui Mongarde : danseuse à Pi-
na’ina’i, auteure de « J’ai mal à ma danse » (Pi-
na’ina’i 2014) ; Moana’ura Tehei’ura : Lors d’une réunion de
- Teruria Taimana : danseuse ; l’association Littérama’ohi en 2010, nous cher-
- Ta’ero Jamet : danseur depuis le 1er Pina’ina’i ; chions des moyens pour faire la promotion de
- karine Taimana : spectatrice ; notre littérature autochtone, et en 2011, nous
- heipua Ah-Lo : spectatrice du Pina’ina’i faisions le point sur la première lecture publique
2014 ; au marché de Pape’ete qui n’était pas, selon la
- valéry Tura : spectatrice en 2014 et 2015 ; majorité d’entre nous, une très grande réussite.
- Taraua Devatine : lecteur de son poème au Malgré tout, je sentais une conviction com-
Pina’ina’i 2012, spectateur en 2013 et 2014 ; mune à l’ensemble des membres de l’associa-
- René-Jean Devatine : spectateur. tion et j’étais moi-même convaincu qu’il fallait
que je propose la seule chose que je sache faire
artistiquement : l’art de la scène. J’étais aussi
convaincu que les autres membres de l’associa-
Préambule tion étaient à 10 000 lieues d’imaginer ce que
j’attendais de cette « Mise en scène de Lectures ».
Flora Aurima-Devatine : on ne sollicite pas Suite à toutes les rélexions que je m’étais faites, il
assez la pensée des gens. Beaucoup ont une vi- fallait partir d’un concept immuable et général,
sion juste de ce qui se passe, sans étalage. Cela qui traverse le temps et les temps et qui, par déi-
rend humble. nition, n’enferme ni ne cloisonne les écrits dans
Estelle Castro-Koshy : L’entrecroisement des un écrin hermétique et inaccessible. il me parut
rélexions proposées dans cet article-discus- évident que l’idée d’« écho » était la plus appro-
sion répond à plusieurs objectifs. il présente priée : échos des écrits entre eux, échos des écrits
des analyses sur l’événement « Pina’ina’i : écho vers les lecteurs, échos des écrits et du mouve-
de l’esprit et des corps » du point de vue des ment, échos des écrits et de la musique, échos
concepteurs, des contributeurs, et des specta- multiples en résonnance autochtone, singulière,
teurs, certains eux-mêmes chercheurs, rendant unique et communautaire. Echo de l’esprit et
ainsi compte de la « difraction » et de la « po- des corps. Pīna’ina’i3 !
lyphonie » « essentielle[s] des éléments consti- F. Aurima-Devatine : Lors d’un séminaire bi-
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2. Passim.
3. Pina’i et pina’ina’i : mots tahitiens qui se traduisent par « écho », « échos », « retentissement ».
PINa’INa’I : ÉCho DE L’ESPRiT ET DES CoRPS 101
gratuité de l’événement ain de pouvoir donner tion envers des auteurs autochtones. En général,
libre accès à n’importe qui sans que la question je rencontre un public adhérant, heureusement.
inancière ne se pose. Moeava Grand : oui, les réactions du public
F. Aurima-Devatine : Le public a été extrême- sont parfois surprenantes. Pendant le spectacle,
ment et savoureusement surpris par la nouveauté ils n’applaudissent pas forcément aux moments
du spectacle, lecture dansée, musiquée, épurée, où nous nous y attendons. Après le spectacle,
simple. D’année en année, un public enthousiaste, nous recevons toutes sortes de commentaires de
plus nombreux, suit Pina’ina’i, certaines personnes la part des spectateurs.
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de vue, mais Pina’ina’i fait évoluer les points de La troisième année, ce fut : « Tu porteras telle
vue sur les sujets abordés. couleur ! » « Ah ! Bien. » (rires).
Cela m’a surpris d’apprendre que Pina’ina’i est
entré dans le calendrier oiciel des événements
du pays ! Sans qu’aucune démarche dans ce sens Comment les costumes sont-ils élaborés ou
n’ait été menée ! C’est une belle reconnaissance ! choisis ?
Toutefois, la 4e édition n’a pas été redifusée télé-
visuellement comme cela a été le cas lors des an-
nées précédentes. Est-ce lié au fait que des textes M. Tehei’ura : Pour les danseurs et les dan-
seuses, le costume est dans son aspect le plus
engagés de jeunes auteurs polynésiens aient été
minimaliste : pareu blanc. Le plus contempo-
lus publiquement ? rain inalement. Les hommes sont vêtus d’un
Valéry Tura : Tout le monde était attentif, pagne appelé maro qu’ils attachent à l’ancienne
même sous la pluie ! Tout le monde était dans (sans velcro comme on l’observe dans le Heiva
l’émerveillement ! d’aujourd’hui). il y a dans cette attache quelque
chose de noble, de simple, de respectueux. Le
fait d’attacher son maro de manière tradition-
Quels sont les enjeux lors des répétitions ? nelle nous plonge dans un processus conscient
de l’exécution. Je n’enile pas juste mon costume
avec des velcro et je vais sur scène. Le geste (pour
M. Tehei’ura : Prendre conscience de ce pour- l’attache) doit être juste et précis ain que le dan-
quoi on est là. nous ne sommes pas là pour bril- seur ne le perde pas sur scène. Le danseur est mis
ler sous les projecteurs. nous sommes ToUS là donc en condition de justesse pour exprimer sa
pour faire briller une lampe, pour protéger sa danse pour qu’elle ne soit pas cacophonique avec
lamme. il faut souvent que je me batte contre le mot.
l’individualisme. Le mien et celui des autres. Au tout premier Pīna’ina’i, aucun costume
Redonner sens au Paepae-a-hiro5 est tout aussi n’était imposé aux lecteurs car je pensais qu’il ne
important. Tas de pierres avec du sable et deux fallait pas brusquer les consciences. Au il des an-
tumu ra’au [arbres] dessus. ok. Mais sous le nées, j’ai intégré les costumes chez les lecteurs ain
sable, il y a notre histoire. Commune. Cette prise qu’ils soient encore plus conscients de leur rôle de
de conscience est importante lors des répétitions. lecteur. Parallèlement, je devenais plus exigeant
il faudrait donc écouter les autres et s’écouter avec les lecteurs. Je devrais même dire que nous
soi-même. Apprivoiser les mots et l’espace du sommes arrivés à un rôle d’acteur pour certains
paepae. nous ne sommes pas là pour construire puisque nous travaillons la gestuelle, la diction,
un autre paepae ou pour lui mettre des parpaings. le volume, le débit, la tonalité et le regard. Et les
nous y sommes pour consolider ses fondations, textes sont appris par cœur. Aujourd’hui les lec-
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Photo 4. – Pina’ina’i 5.15 navigations - karine Taerea, Steeve Reea (© Florent Collet, La Dépêche de Tahiti)
libération des sentiments, de l’expression du des auteurs interprètent les textes qu’ils ont écrits
corps… Liberté des mots qui parlent aussi bien et que la danse et la musique mettent en exergue.
des paripari [poème d’éloge] d’autrefois, des en- J. Tanerii : il y a beaucoup de choses que l’on
gagements d’aujourd’hui que des inquiétudes de fait à Pina’ina’i, et qu’on ne fait jamais au Hei-
demain. va. Le Heiva, c’est un concours, avec un cadre.
Les mots autochtones se libèrent des images cli- C’est limité. Pina’ina’i, c’est souple, ce n’est pas
chéistes qui les condamnaient à une écriture de igé. La seule limite, c’est que la musique créée à
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Photo 5. – Pina’ina’i 4.14 Autochtonie - heinarii Grand, viri Taimana, nailea Foissac (© Matareva/Littérama’ohi)
Taraua Devatine : Pour moi, Pina’ina’i n’a rien dire, nous raconter, nous être. Au passé, au pré-
à voir avec le Heiva, mais tous les deux sont sur sent et au futur. Au conditionnel parfois. Sans
le thème de la culture. impératif. Sans prétendre être plus que parfait.
V. Tura : Les textes sont plus profonds et plus La diversité de lecteurs et d’auteurs nous
provocateurs à Pina’ina’i. Au Heiva, il y a des montre bien la diversité de notre communauté
thèmes traditionnels, des récits mythiques ; il y a dans ses rondeurs et ses formes ines, dans sa jeu-
l’efet spectaculaire par le nombre important des nesse et dans sa sagesse. Le public qui vient est
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rance, l’égalité et la revendication d’être des libres Quels sont les enjeux de Pina’ina’i ?
penseurs au service d’une culture bien vivante.
O. Purue-Colombani : oUi. La liberté d’ex- J. Tanerii : J’aime bien Pina’ina’i. C’est une fa-
pression. L’estime de soi : être capable de parler çon de parler de nous entre nous, de parler de ce
sa langue. L’assurance et l’engagement : assumer qui se passe chez nous. Pina’ina’i donne la possi-
une mission. Témoigner. Le respect et la recon- bilité à ceux qui écrivent de pouvoir dire ce qu’ils
naissance : abattre les préjugés. Accorder à la ont à dire, sans que ça frustre. Et ça passe mieux !
langue sa légitimité. Pina’ina’i, c’est un bon concept, c’est l’oppor-
M. Grand : oui, Pina’ina’i transmet des valeurs. tunité de travailler sur des textes écrits par des
Celles véhiculées dans les textes que nous lisons, auteurs qui ont des choses intéressantes à dire.
et celles qui animent et rassemblent les membres Ta’ero Jamet : Pina’ina’i fait naître la rélexion…
de l’association. La liberté d’expression, la soli- sur notre identité, nos racines, notre vie tout sim-
darité autochtone, la défense et la promotion de plement. Chacun mériterait de vivre cela.
notre culture, de nos langues, le respect de la di- Teruria Taimana : Pina’ina’i doit être un ren-
versité, des personnalités, sensibilités de chacun, dez-vous incontournable pour les amoureux, les
le devoir de mémoire... défenseurs de nos langues, pour ceux qui aiment
H. Grand : il faudrait demander au public les mots, pour ceux qui se laissent toucher par
jusqu’à quel point il se sent impacté. Après le eux, pour nous. Pina’ina’i ramène à qui nous
spectacle, beaucoup de gens éprouvent de la mo- sommes, vers les racines de ce tumu ‘ora [banyan]
tivation pour publier, comme si Pina’ina’i com- qui surplombe le Paepae-a-hiro, ce tumu qui est
muniquait cette impulsion de sortir du mutisme. acteur autant que nous sommes danseurs.
De l’intérieur, cette expérience est extrêmement Pina’ina’i est, par-delà sa beauté et le divertisse-
riche, elle pousse à l’humilité, au partage. Elle ment qu’elle peut engendrer, un rappel à l’ordre
invoque des certitudes en soi, profondes, et les à nous autochtones du xxie siècle.
phases de doutes qu’elle provoque enseignent Hinanui Mongarde : Pīna’ina’i, c’est la non-
elles aussi. Pina’ina’i continuera, je l’espère, à réduction du devoir-être à l’être. C’est une tri-
transmettre ces valeurs qui cultivent le meilleur bune où la liberté est vécue-évacuée, constatée-
de notre autochtonie. contestée, habitée-habillée par tous les moyens
Tokai Devatine : Les valeurs transmises par Pi- dont nous disposons. Pīna’ina’i, c’est la volonté
na’ina’i sont celles de notre temps : la reconnais- de transporter, de transcender, de transcrire, de
sance d’une conscience polynésienne et d’une transmettre.
expression autochtone, l’indépendance d’esprit Un peu comme le kaléidoscope de nos émo-
(textes, chorégraphies, morceaux de musique) et tions. Avec les mêmes ingrédients, composants,
d’actions (organisation et implication bénévole on arrive à faire, refaire, défaire, parfaire mul-
de la manifestation), l’ouverture d’esprit (d’une tiples compositions, à changer les couleurs de
association libre de personnes au-delà de clivages
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Photo 7. – Pina’ina’i 5.15 ne ferme pas ton cœur - heinarii Grand, hitihiti hiro-Tehei’ura (© R.-J. Devatine)
moi d’écrire et de participer au Pina’ina’i. La ren- situation peu confortable. Dans un deuxième
contre et le contact avec des personnes intergé- temps, comprendre l’atmosphère dans lequel le
nérationnelles permettent une évolution riche et metteur en scène souhaite faire exister le dia-
mature, orientée vers plus de connaissances et de logue des sentiments invoqués. L’intérêt de la
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dure des semaines. L’important, c’est cette au- M. Grand : Pina’ina’i est un spectacle à part
tochtonie qu’on incarne en particulier et cet en- entière né du génie créateur de notre concepteur,
semble qu’on révère. Pour le reste, il faut lâcher metteur en scène, chorégraphe... un formidable
prise. Les pré-conceptions se diluent comme si édiice auquel chaque auteur, lecteur, danseur
la conviction devait vibrer nue. C’est peut-être apporte sa pierre. Cela demande davantage de
ça aussi la puissance de Pina’ina’i. travail qu’une lecture au marché et ne laisse pas
de place à l’improvisation, mais le résultat en
Y a-t-il des diicultés, des déis, des découvertes, des vaut largement la peine. Chaque année le public
plaisirs particuliers liés à la lecture à Pina’ina’i ? vient plus nombreux.
H. Grand : Pina’ina’i se distingue par la mise
V. Taimana : La diiculté réside dans le peu en scène des corps, danseurs et lecteurs compris.
de temps à consacrer aux répétitions car nous il y a une forme d’exposition et de conscience
sommes tous engagés dans des métiers diférents de soi qui n’est pas comparable aux autres lec-
et du temps à consacrer à une vie sociale et fami- tures publiques. Le il qui assure la cohérence de
liale capteuse d’énergie. toutes ces actions et notre cohésion au sein de
O. Purue-Colombani : Rien n’est immuable, Littérama’ohi, c’est la cause, l’engagement pour
tout est découverte et nouveauté avec son l’écrit et pour tous ces messages qui composent
lot d’anxiétés, de mésestime, de manque de notre autochtonie.
coniance (suis-je capable ou pas), enin un déi
contre le démon de la timidité, de la réserve, de
la peur du ridicule. ou des plaisirs et ierté cer- Aux spectateurs
tains lorsque je surmonte, je dompte ces diicul-
tés sans omettre l’esprit de solidarité qui s’installe Quelle a été votre réaction devant Pina’ina’i ?
au sein de l’équipe : une famille d’artistes.
En vérité, une victoire sur moi-même et une Tokai Devatine : Pina’ina’i, c’est l’heureux résul-
reconnaissance envers le mentor, toujours en tat d’une année d’attente. Alors même que nous
quête de la perfection. Une stimulation à aller ne sommes pas habitués à apprécier cette asso-
de l’avant, à vaincre les doutes, les craintes de ciation simultanée de représentations culturelles,
l’échec. Pina’ina’i nous semble pourtant familier dans le
M. Grand : oh oui ! S’exposer au public, dé- contenu des messages délivrés. Pina’ina’i nous sur-
couvrir de nouveaux textes, se dépasser pour la prend et nous enchante par le fait que ces lectures
cause, se rassembler pour elle dans un spectacle permettent de nous raconter. C’est un nouveau
qui ne se cantonne pas à la lecture publique mais territoire d’expression qui s’ouvre en Polynésie.
ofre de véritables mises en scènes qui boule- Pina’ina’i est une navigation à bord de la
versent nos confortables habitudes... c’est à la pirogue des arts qui nous transporte sur notre
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Photo 8. – Pina’ina’i 5.15 Lecture de Littérama’ohi - Chantal T. Spitz (© Florent Collet, La Dépêche de Tahiti)
d’une élite intellectuelle, des gens qui ont fait Comment apparaît le travail sur les textes, par les corps ?
des études, qui comprennent le texte. Ce sont
des métro et des demis. C’est un réseau culturel Tokai Devatine : En tant que spectateur, ce
et intellectuel. il y a tout un aspect de revendi- n’est pas du théâtre, c’est autre chose. il s’agit
cation culturelle face aux colonisateurs, aux ins- d’une véritable interprétation de textes. Pina’ina’i
tances politiques, présent à Tahiti où longtemps permet une superposition de narrations.
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Photo 9. – « Et ressortent les racines de l’arbre mûrissant » (F. Aurima-Devatine) (© Florent Collet / La Dépêche de Tahiti)
tienne. Tantôt Moana’ura transgresse les codes de lieu, un moment de partage, d’interprétation des
la danse, tantôt y revient. C’est un équilibre qui textes écrits, publiés ou non, avec les mots mis
peut nous apprendre beaucoup sur la déinition en scène, en danse, en musique, une manière
contemporaine du ‘ori Tahiti. Jusqu’à quel point ludique de faire connaître la littérature autoch-
les danses sont-elles toujours de la danse tahi- tone. Pina’ina’i, ce sont avant tout les jeunes,
tienne ? La démarche de chorégraphes comme danseurs et danseuses expérimentés, superbes,
Moana’ura est très importante pour le monde de lecteurs, auteurs, poètes, artistes, interprètes,
la danse en général. La musique y tient une place orateurs magniiques, autour de Moana’ura,
très importante. metteur en scène, chorégraphe, d’un talent indé-
niable, d’une belle sensibilité, humanité. C’est
Que dire des textes et des lectures par les lecteurs, l’appropriation par les jeunes de la Culture, de la
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nous devions nous-mêmes entamer le processus de rendre hommage à sa vie d’engagement et son
de reconnaissance de nos porteurs de patrimoine immense œuvre.
dans le domaine de la littérature. Flora Aurima-
Devatine me paraissait la seule digne de cette
reconnaissance. J’ai donc soumis à Moana’ura BiBLiogrAPhiE
l’idée de rendre hommage à Flora au travers de
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