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9. T. TRANG QUOC, Du livre illustré au texte imagé : image, texte et production du sens
au XVIe siècle, Thèse de doctorat (dir. M. HUCHON), Université de Paris-Sorbonne (Paris
IV), 2004.
10. Quand ce n’est pas la seule intentio lectoris qui est considérée ; sur ces trois
« intentions », voir U. ECO, Les Limites de l’interprétation, Paris, 1992, p. 29-32.
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remembering, Athènes-Londres, 1990, p. 4-5). Pour une analyse du jouel de paix, voir
F. POMEL, Les voies de l’au-delà et l’essor de l’allégorie au Moyen Âge, Paris, 2001, p. 173-
174. Pour la description de l’escherpe de Foi, voir PH1, p. 108-114, v. 3467-3672, PH2,
fol. 24 r°-24 v°, v. 3764-3923.
12. Machina memorialis. Méditation, rhétorique et fabrication des images au Moyen
Âge, trad. fr., Paris, 2002, p. 37.
13. Patrologie latine, éd. J.P. MIGNE, t. 176, Paris, 1854, col. 622.
14. Ibid., col. 681. Voir CARRUTHERS, Machina memorialis, p. 305-306.
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15. Jean voit, dans sa vision, un ange mesurer la cité céleste avec une règle d’or
(Ap 21,15) ; sur le lien entre ce topos scripturaire et la fabrication d’images de mémoire,
voir CARRUTHERS, Machina memorialis, p. 193.
16. De rares exceptions : les manuscrits PARIS, BnF, fr. 825, BnF, fr. 823 (fol. 18 v°)
et, selon LOFTHOUSE, le manuscrit fr. 2 de la Rylands library, fol. 18 v° (M.A. LOFTHOUSE,
Le Pèlerinage de Vie Humaine by Guillaume de Digulleville with special reference to
the french manuscript of the John Rylands Library, Bulletin of the John Rylands Society,
t. 19, 1935, p. 200).
17. Ainsi des manuscrits de PH1 : PARIS, Arsenal, 3170 (fol. 15 r°) ; BnF, fr. 1140
(fol. 19 r°) ; BnF fr. 19158 (fol. 22 v°), et du manuscrit de PH2 : PARIS, Arsenal 3646,
fol. 18 v°. Même remarque pour l’édition imprimée de la seconde rédaction par Petit
et Rembolt, dont le bois est un remploi de l’édition d’Antoine Vérard (1511).
18. Voir H. TOUBERT, Fabrication d’un manuscrit : l’intervention de l’enlumineur,
Mise en page et mise en texte du livre manuscrit, sous la dir. de H.J. MARTIN et J. VÉZIN,
Paris, 1990, p. 417-420. Les exemples d’illustration du jouel qu’elle donne sont bien
extraits du Pèlerinage de Vie Humaine et non du Pèlerinage de l’âme, contrairement à
ce qu’elle écrit.
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19. Ceci sans présumer bien entendu du symbolisme des positions affectées aux
lettres, en vertu duquel X (le Christ) par exemple doit être au sommet, pointé vers
le haut ; voir le commentaire de POMEL, op. cit., p. 183.
20. Le promontoire sur lequel figure l’équerre, dans le manuscrit 1130 de Sainte-
Geneviève, me semble en appeler moins directement au souvenir de la Passion, ne
serait-ce que par la construction, correcte ici, de l’image, où l’équerre est bien posée,
et non plantée dans le sol (voir l’ouvrage de vulgarisation de P. AMBLARD, Le Pèlerinage
de Vie Humaine, Paris, 1998, p. 49).
21. Lorsqu’elle est la seule illustration du Pèlerinage, elle est dessinée à l’encre
rouge ou noire, sans cadre, en marge ou dans la colonne de texte ; ailleurs, elle fait
généralement l’objet d’une miniature peinte et s’inscrit dans le programme icono-
graphique comme une image parmi d’autres : même cadre, même « texture » (voir
par exemple la reproduction en couleurs du manuscrit 1130 de la bibliothèque Sainte
Geneviève dans l’ouvrage cité ci-dessus).
22. Notons que ce traitement analytique de la figure, décomposée en la somme
de ses attributs, est privilégié dans les manuscrits uniquement en ce qui concerne
Orgueil : pour les autres vices, c’est la représentation du personnage dans son en-
semble qui est choisie. Voir, comme exemple de ces séries iconiques, les manuscrits
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la Nef de Religion, l’image peinte, si elle n’est pas appelée directement par le
texte, est en tout cas suscitée par lui pour prévenir les risques de confusions
portant sur la semblance et l’identité des personnifications. Invariablement,
l’illustration se densifie en cet endroit pour distinguer les différentes vertus
et les articuler au sein d’une même série figurative23. Dans le manuscrit
Douce 300 d’Oxford, la peinture forme une frise sur tout le registre supérieur
d’une double page (fol. 114 v°-115 r°) : les Vertus prennent place dans un
vaste ensemble architectural cloisonné de colonnes, portails, clochers qui
facilitent leur distinction. La miniature, par le moyen de l’attribut et sur le
mode de la désignation métonymique, affermit dans l’esprit la relation qui,
dans le discours, relie chaque figure à sa senefiance.
Tel traitement iconographique est-il pour autant conforme à l’intention
d’auteur ? Quel est le statut de ce modèle de congruence entre image rhé-
torique et image peinte ? Fournit-il à l’imagier l’exemple d’une illustration
raisonnée applicable à l’ensemble du texte, ou assigne-t-il au contraire
l’image à un lieu défini, celui du diagramme, hors duquel elle serait illégi-
time et indésirable ? La réponse est donnée par le texte lui-même, celui de
la première rédaction.
PARIS, BnF, fr. 1818 (fol. 68 r°-70 v°) ; BnF, fr. 1645 (fol. 57 v°-60 r°), LONDRES, B.L., 25594
(fol. 27 r°-28 v°) ; B.L., Harley 4399 (fol. 49 v°-52 v°).
23. Pour les représentations de la nef de Religion en PH1, voir entre autres les
manuscrits PARIS, Arsenal, 5071 (fol. 80 r°-80 v°), AIX-EN-PROVENCE, Bibl. Méjanes, 110
(p. 183-184) ; ARRAS, B.M. 532 (fol. 151 r°) ; PARIS, BnF, fr. 376 (fol. 82 v°-83 r°) ; LONDRES,
B.L., Harley 4399 (fol. 82 v°-83 r°) ; B.L., Add. 38120 (fol. 102 v°-103 r°).
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[…] a senestre vi
Une vielle qui chevauchoit
Les undes de la mer34.
39. Le manuscrit PARIS, BnF, fr. 12462 notamment, où le lien entre texte et image
est particulièrement lâche : l’imagier a en réalité illustré les rubriques très générales
et pauvres en informations, et non le texte lui-même.
40. Voir par exemple les manuscrits PARIS, Sainte-Geneviève 1130 (PH1) et BnF, fr.
377, fol. 70 r° (PH2) où les deux compositions sont très proches (l’Avarice, de face, en
pied, présente et déploie ses attributs (ses mains) autour d’elle), BnF, fr. 1818 (fol. 80 r°)
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45. Défi souvent relevé d’ailleurs par les illustrateurs de Dante. Dans l’Advision
Cristine en revanche, les descriptions liminaires des parties I et II, celles du Chaos
engloutissant la narratrice et celle d’Opinion aux formes mouvantes comme les nuées
n’ont fait l’objet d’aucune figuration peinte. Les seules miniatures dans les trois
exemplaires conservés de l’Advision représentent Christine écrivant (voir L’Advision
Cristine, éd. C. RENO et L. DULAC, Paris, 2001, introduction p. XLIII-XLIX).
46. Le texte donne : Ce veneeur vi moult hideus, / Lait et orrible et tenebreus, / Et de
son regart m’effraia / Plus que n’avoie esté pieça. (PH2, v. 12405-12408).
47. Voir, pour une synthèse historique sur la légitimité de l’image dans les prati-
ques cultuelles chrétiennes, l’article de J.C. SCHMITT, De Nicée II à Thomas d’Aquin :
l’émancipation de l’image religieuse en Occident, Le corps des images. Essais sur la
culture visuelle au Moyen Âge, Paris, 2002, p. 63-95.
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ner, pour son voyage, le bourdon d’Espérance et l’escherpe (la besace) de Foi,
mais, et c’est là que le texte de PH2 diffère de PH1, à la condition qu’il place
d’abord ses yeux aux oreilles afin de les « voir » :
L’escherpe et le bourdon que veulx
Ont tel condition en eulx
Que veoir tu ne les pourras
Se les ielx es oreilles n’as,
Et croy se ne les veoies
Que trop pou les priseroies.
Si que les iex je t’osteray
De la ou sont et les mettrai
En tes oreilles par dehors,
Sique veoir les pourras lors48.
Sidération légitime du pèlerin encore accroché au sens littéral, et qui ne voit
là que monstruosité :
Qu’est ce, dis je, que dites vous ?
Vous me donnés au cuer courous
Quant de tel chose me parlés !
Ne say se a fin me temptés
Qu’en ce prengne occasion
De laissier escherpe et bourdon,
La quel chose je feroie
Plus tost que ne soufreroie
Que fusse monstre ou transfourmés,
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55. Adonc les iex me transporta / Com dit est, et puis defferma / La huche ou estoient
mis / L’escherpe et bourdon dessus dis. / Hors les mist et de l’oreille / Les regardé a merveille.
(PH2, fol. 23 v°, v. 3682-3687) ; […] Et me vint en souvenance / De ce qu’avoit fait muance
/ Grace de mes iex par devant / En mes oreilles ens mettant, / Pourquoy a regarder la (i.e.
Mémoire) pris / Mieux a certes, si que depuis / Li vi les iex derriere avoir / U haterel sans
eulx mouvoir (PH2, fol. 38 r°, v. 6130-6137).
56. Op. cit., p. 20.
57. Le corps d’Avarice, par exemple, est un montage rhétorique : à la subdivision
du corps en ses parties correspond la déclinaison de la notion matrice (main aux
ongles de griffon = rapine ; main cachée = coupe bourse et larcin ; main portant la
lime et le zodiaque = usure ; main à l’écuelle = coquinerie et truanderie ; main au
crochet = simonie ; main à la hanche = barat, tricherie ; langue de parjure ; hanche de
mensonge ; bosse de propriété ; pour la semblance d’Avarice, voir PH1, p. 282-283,
v. 9059-9104 et PH2, fol. 70 r°-70 v°, v. 11051-11091).
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58. Entre autres exemples en PH1 : description de Paresse (p. 219-220, v. 7033-
7072), questions du pèlerin et exposition du vice (p. 220-226, v. 7073-7248), assaut du
vice (p. 226-229, v. 7249-7338) ; cf. la séquence correspondante en PH2, fol. 55 r°-56 v°,
v. 9015-9276. Il va sans dire que l’attaque du vice est justiciable d’une lecture allégo-
rique (le pèlerin en proie à la paresse), mais celle-ci ne suspend pas pour autant le
charme de la fiction romanesque qui tient au pittoresque du combat et à l’indécision
de son issue. La conception même de la vie au Moyen Âge et l’incertitude qui pèse
sur le devenir eschatologique préfigurent parfaitement l’existence de tout « pèlerin »
pour de telles représentations narratives et dramatiques.
59. Ceci dans l’épisode du bivium : le pèlerin doit choisir entre la voie du nattier
Labour et celle de Huiseuse, vouée aux trufes et fables, / roumans, choses mencongables
(PH1, p. 213, v. 6853-6856 ; cf. PH2, fol. 48 r°, v. 7689-7692).
60. Voir PH1, p. 357-358, 363-364, v. 11425-11433, 11615-11654 ; PH2, fol. 78 v°,
v. 12463-12471 et 12499-12535.
61. PH1, p. 363, v. 11595-11596.
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64. Cette visée édifiante du Pèlerinage de Vie Humaine est proclamée dès le prolo-
gue de PH1 : La pourra chascun aprendre / La quel voië on doit prendre, La quel guerpir et
delessier (p. 2, v. 25-27).
65. F. POMEL, Mémoire, mnémotechnie et récit de voyage allégorique. L’exemple
du Pèlerinage de Vie Humaine de Guillaume de Digulleville, Medieval Memory. Image
and Text, éd. F. WILLAERT, H. BRAET, T. MERTENS et T. VENCKEKEER, Turnhout, 2008, p. 97.
Plus haut, F. Pomel rappelle que « les textes littéraires allégoriques sont le fruit de
traditions plurielles et diversement dosées selon les textes. Voir dans les récits de
voyages allégoriques un transcodage des procédés mnémotechniques, outre l’occul-
tation de la spécificité littéraire, c’est oublier cet arrière-plan complexe » (p. 93).
66. Machina memorialis, p. 186.
67. Sur Mémoire portefaix du pèlerin, voir PH1, p. 149, v. 4815-4948, et PH2,
fol. 37 v°-38 r°, v. 6102-6175.
68. Voir YATES, op. cit., p. 68-69.
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