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Produit vectoriel

opération entre deux vecteurs dans un espace euclidien orienté de


dimension 3, dont le résultat est un vecteur orthogonal aux deux
vecteurs

En mathématiques, et plus précisément en géométrie, le produit


vectoriel est une opération vectorielle effectuée dans les espaces
euclidiens orientés de dimension 3[N 1],[N 2],[N 3]. Le formalisme
utilisé actuellement est apparu en 1881 dans un manuel d'analyse
vectorielle écrit par Josiah Willard Gibbs pour ses étudiants en
physique. Les travaux de Hermann Günther Grassmann et William
Rowan Hamilton sont à l'origine du produit vectoriel défini par
Gibbs[1],[2].

Histoire

Résumé

La mise en place de la notion de produit vectoriel prend son essor


dans la deuxième moitié du xixe siècle, même si Lagrange utilise
en 1773 des grandeurs assimilables aux composantes du produit
vectoriel de deux vecteurs. Mais cette utilisation reste limitée à un
usage ponctuel[3]. En 1843, Hamilton invente les quaternions qui
permettent d'introduire naturellement le produit vectoriel.
Indépendamment et à la même période (1844), Grassmann définit
dans Die lineale Ausdehnungslehre ein neuer Zweig der Mathematik
un « produit géométrique » à partir de considérations
géométriques ; mais il ne parvient pas à définir clairement un
produit vectoriel. Puis Grassmann lit Hamilton et s'inspire de ses
travaux pour publier en 1862 une deuxième version de son traité
qui est nettement plus claire[4]. De même, Hamilton lit les travaux
de Grassmann, les commente et les apprécie[5]. Plus tard Maxwell
commence à utiliser la théorie des quaternions pour l'appliquer à
la physique. Après Maxwell, Clifford modifie profondément le
formalisme de ce qui devenait l'analyse vectorielle. Il s'intéresse
aux travaux de Grassmann et Hamilton avec une nette préférence
pour le premier[2]. Dans son ouvrage Elements of Dynamic (1878),
Clifford définit le produit vectoriel de deux vecteurs comme un
vecteur orthogonal aux deux vecteurs et dont la grandeur est
égale à l'aire du parallélogramme formé par les deux vecteurs[6].
En 1881, Gibbs publia Elements of Vector Analysis Arranged for the
Use of Students of Physics s'inspirant des travaux déjà réalisés,
notamment ceux de Clifford et Maxwell. Si les physiciens se sont
empressés d'utiliser le formalisme de Gibbs, celui-ci ne fut
accepté en mathématiques que bien plus tard, et après plusieurs
modifications.
Anecdote

Peter Guthrie Tait, dans la préface de la troisième édition de son


traité sur les quaternions, qualifie le nouveau formalisme créé par
Gibbs de « monstre hermaphrodite, composé des notations de
Hamilton et Grassmann »[7].

Notation
Plusieurs notations sont en concurrence pour le produit vectoriel :

En France, le produit vectoriel de u et de v est noté u ∧ v, où le


symbole ∧ se lit vectoriel (wedge en anglais). Cette notation a
été introduite par Cesare Burali-Forti et Roberto Marcolongo en
1908[8]. Son inconvénient est d'entrer en conflit avec la notation
du produit extérieur ;
Dans la littérature anglophone et allemande (ainsi qu'au Canada
francophone, en Suisse, et parfois en Belgique), le produit
vectoriel est noté u × v. Cette notation est due à Josiah Willard
Gibbs[7]. Son inconvénient est d'induire une confusion
éventuelle avec le produit des réels et le produit cartésien, mais
ces produits ne portent pas sur des objets de même nature[N 4] ;
Une troisième notation, privilégiée par exemple par Arnold, est
l'utilisation des crochets de Lie : [u , v][N 5].

Dans cet article, la première convention sera utilisée (avec ou


sans flèches sur les vecteurs).
Définition
Soit E un espace vectoriel euclidien orienté de
dimension 3. Par le choix d'une base
orthonormée, E peut être identifié avec
l'espace R3, mais cette identification n'est pas
obligatoire pour définir le produit vectoriel.

D'un point de vue géométrique,

le produit vectoriel de deux vecteurs et de E


non colinéaires se définit comme l'unique vecteur
tel que :

le vecteur est orthogonal aux deux vecteurs


donnés ;

 ;

la base est de sens direct,

et le produit vectoriel de deux vecteurs colinéaires


est nul par définition.
Le produit vectoriel (bleu) est perpendiculaire aux deux vecteurs (rouge) et son module est égal à l'aire du parallélogramme défini par ces deux derniers.

En particulier :

deux vecteurs sont colinéaires si (et seulement si) leur produit


vectoriel est nul ;
deux vecteurs sont orthogonaux si et seulement si la norme de
leur produit vectoriel est égale au produit de leurs normes ;
le module du produit vectoriel est égal à l'aire du
parallélogramme défini par les deux vecteurs et .

La notion d'orientation peut ici être comprise [Information douteuse] de


manière élémentaire en utilisant la règle de la main droite : le
pouce, l'index et le majeur écartés en un trièdre indiquent
respectivement le sens de , de et de . Cette
définition [Information douteuse], utilisée dans l'enseignement
secondaire, n'est pas totalement satisfaisante, mais reste une
approche adaptée aux applications, en particulier en physique
(voir l'article orientation (mathématiques) pour une approche plus
théorique).

Définition par le produit mixte

Une seconde définition[N 6] utilise la théorie des déterminants et la


notion de produit mixte comme point de départ. Le produit mixte
de trois vecteurs u, v, w, noté [u, v, w], est le déterminant de ces
trois vecteurs dans une base orthonormée directe (BOND)
quelconque. La formule de changement de base montre que ce
déterminant est indépendant du choix de la base directe ;
géométriquement il est égal au volume orienté du parallélépipède
appuyé sur les vecteurs u, v, w.

Le produit vectoriel de deux vecteurs u et v est


l'unique vecteur u ∧ v tel que, pour tout w, on a :
Le produit vectoriel s'interprète comme les variations du volume
orienté d'un parallélépipède en fonction du troisième côté.

Avec une telle définition, il est possible de définir, dans un espace


vectoriel orienté de dimension n + 1, le produit vectoriel de n
vecteurs.

Cette définition se reformule en recourant au formalisme des


espaces euclidiens. Le produit vectoriel u ∧ v est alors le vecteur
dual de l’application linéaire w : ⟼ [u, v, w], donné par le théorème
de représentation de Riesz.

Calcul en composantes
Une méthode pour calculer le produit vectoriel grâce aux composantes.

Le choix arbitraire d'une base orthonormée directe donne une


identification de E et de . Notons les coordonnées u = (u1, u2,
u3) et v = (v1, v2, v3).

Leur produit vectoriel est donné par[N 7],[9] :

Cette troisième définition, puisqu'elle est équivalente aux deux


précédentes, est indépendante, malgré les apparences, du choix
de la base orthonormée directe dans laquelle on calcule les
coordonnées.

Propriétés

Propriétés algébriques

Le produit vectoriel est un produit distributif, anticommutatif :


Distributivité par rapport à l'addition :
,
Compatibilité avec la multiplication par un scalaire :
,
Antisymétrie :
.
Ces propriétés découlent immédiatement de la définition du
produit vectoriel par le produit mixte et des propriétés algébriques
du déterminant.

Il n'est pas associatif — c'est-à-dire qu'en général u ∧ (v ∧ w)


n'est pas égal à (u ∧ v) ∧ w — et plus précisément, il vérifie les
égalités du double produit vectoriel :

Démonstrations des égalités du double produit


vectoriel

Remarquons d'abord[∧∧ 1] que chacune des deux


égalités se déduit de l'autre par antisymétrie, et
qu'elles sont immédiates lorsque les deux vecteurs
entre parenthèses, dans le double produit, sont liés.
Mentionnons quelques-unes des nombreuses
méthodes pour démontrer l'une ou l'autre, de la plus
calculatoire à la plus savante.

On peut[∧∧ 2],[∧∧ 3] développer les deux membres


de l'équation en coordonnées dans une base
orthonormée directe quelconque, et constater que
les deux résultats sont égaux.
Une méthode standard[∧∧ 1],[∧∧ 4] est de procéder
de même, mais dans une base orthonormée
directe correspondant au procédé de Gram-
Schmidt (en supposant libre), ce qui
simplifie les calculs.
On peut[∧∧ 5] remarquer d'emblée qu'il existe
toujours deux réels α, β tels que

(en effet, si v et w sont indépendants, le plan qu'ils


engendrent est l'orthogonal de leur produit vectoriel,
or le double produit appartient à cet orthogonal), et
même (en effectuant le produit scalaire des deux
membres par u) qu'il existe un réel λ tel que
.
On remarque ensuite que λ est indépendant de u, v
et w (en effet, si deux applications linéaires f et g
sont telles que pour tout vecteur x, f(x) = λg(x), λ ne
dépend en fait pas de x). On conclut en calculant sa
valeur dans une configuration simple : par exemple,
si (u, v) est orthonormée alors u ∧ (v ∧ u) = v donc λ
= 1.

Au lieu de comparer directement les deux


membres de l'égalité, on peut comparer leur
produit scalaire avec un vecteur x arbitraire, en
utilisant les propriétés du déterminant de
Gram[∧∧ 6] :
1. D.-J. Mercier, L'épreuve d'exposé au CAPES
mathématiques, vol. 4, Publibook, 2008
(ISBN 978-2-74834110-2), p. 301.
2. Exercice corrigé (http://uel.unisciel.fr/physique/
outils_nancy/outils_nancy_ch03/co/sexercer_04.
html)  [archive] sur uel.unisciel.fr.
3. H. Muller, R. Weidenfeld et A. Boisseau,
Mathématiques MPSI, Bréal, 2008
(ISBN 978-2-74950033-1), p. 75 (https://books.g
oogle.fr/books?id=Jy-ZHW9HebwC&pg=PA7
5)  [archive].
4. Pour plus de détails, voir le chapitre «  Double
produit vectoriel » (https://fr.wikiversity.org/wiki/
fr:Produit_vectoriel/Double_produit_vectoriel)
sur Wikiversité.
5. R. Ferréol, MPSI 09/10, Exercices sur les
espaces euclidiens (http://mapage.noos.fr/r.ferr
eol/atelecharger/textes/esp%20euclidien.pd
f)  [archive], exercice 46.
6. P. Dupont, Introduction à la géométrie, De Boeck,
2002 (ISBN  978-2-80414072-4), p. 194, donne
même, par cette méthode, une généralisation de
la formule en dimension quelconque.

Il vérifie par conséquent l'identité de Jacobi, ce qui en fait un


crochet de Lie :

En partant et de

on obtient l'égalité :

ce qui donne, en passant aux coordonnées, l'identité de Lagrange :

Applications

Les premières propriétés algébriques ci-dessus (bilinéarité et


formule du double produit vectoriel) fournissent une solution au
problème de la division vectorielle u ∧ x = v, où l'inconnue est le
vecteur x et les données sont les deux vecteurs u et v, en
supposant u non nul et orthogonal à v (sans quoi la résolution
est instantanée).

En effet, de u ∧ (v ∧ u) = ║u║2v, on déduit que x0 = (v ∧ u)/║u║2


est une solution. Or le noyau de l'application linéaire x ↦ u ∧ x est
la droite vectorielle Ru, donc l'ensemble des solutions de cette
équation linéaire est x0 + Ru.

En développant le quadruple produit vectoriel


de deux façons, on obtient une relation de
dépendance linéaire entre les quatre vecteurs a, b, c, d :
.

Invariance par isométries

Le produit vectoriel est invariant par l'action des isométries


vectorielles directes. Plus exactement, pour tous vecteurs u et v
de E et pour toute rotation f de E, on a :

Cette identité peut être prouvée différemment suivant l'approche


adoptée :

Définition géométrique : L'identité est immédiate avec la première


définition, car f préserve l'orthogonalité, l'orientation et les
longueurs.

Produit mixte : L'isomorphisme linéaire f laisse invariant le produit


mixte de trois vecteurs. En effet, le produit mixte de f(u), f(v), f(w)
peut être calculé dans l'image par f de la base orthonormée
directe dans laquelle le produit mixte de u, v et w est calculé. De
fait, l'identité précédente s'obtient immédiatement :

où f(w) parcourt tout l'espace vectoriel quand w le parcourt


puisque f est une bijection, d'où l'égalité souhaitée.

Définitions alternatives

Comme produit de Lie

Toute isométrie directe de R3 est une rotation vectorielle.


L'ensemble des isométries directes forme un groupe de Lie
classique noté SO(3) (autrement dit, un sous-groupe fermé de
GL3(R)). Son algèbre de Lie, notée so(3) est la sous-algèbre de Lie
de gl3(R) définie comme l'espace tangent de SO(3) en l'identité.
Un calcul direct montre qu'il est l'espace des matrices
antisymétriques de taille 3. Cet espace est a fortiori stable par le
crochet de Lie.

Toute matrice antisymétrique A de taille 3 s'écrit de manière


unique
En identifiant A et le vecteur , on définit un
isomorphisme linéaire entre so(3) et R3. Le crochet de Lie se
transporte via cet isomorphisme, et R3 hérite d'une structure
d'algèbre de Lie. Le crochet [u, v] de deux vecteurs est
précisément le produit vectoriel de u et de v.

En effet, si et , leur crochet se


calcule en introduisant les matrices antisymétriques
correspondantes et  :

Le vecteur correspondant, à savoir , a donc pour


coordonnées .
Cette approche redéfinit donc le produit vectoriel.

Si on suit cette approche, il est possible de prouver directement


l'invariance du produit vectoriel par les isométries directes.

En tant qu'algèbres de Lie, so(3) a été identifié à R3. L'action


(linéaire) de SO3(R) sur R3 s'identifie à l'action par conjugaison sur
so(3). SO3(R) opère donc par automorphisme d'algèbres de Lie.
Autrement dit, l'identité ci-dessus est vérifiée.
Comme produit de quaternions imaginaires

Il est possible de retrouver produit vectoriel et produit scalaire à


partir du produit de deux quaternions purs. Pour rappel, le corps
(non commutatif) des quaternions H est l'unique extension de R
de dimension 4. Sa base canonique est (1, i, j, k) où le sous-
espace engendré par i, j et k forme l'espace des quaternions purs,
canoniquement identifié avec R3. Ces éléments vérifient :
 ;
.
Si q1 = a1i + b1j + c1k et q2 = a2i + b2j + c2k, le produit q1q2 se
calcule immédiatement :

La partie réelle est au signe près le produit scalaire de q1 et de q2 ;


la partie imaginaire est un quaternion pur qui correspond au
produit vectoriel, après identification avec R3.

Cette coïncidence trouve ses explications dans le paramétrage du


groupe SO(3) par les quaternions unitaires.

Éléments d'explication

L'application linéaire envoyant 1 sur 1, i sur –i, j sur –


j et k sur –k est appelée la conjugaison. Le conjugué
d'un quaternion q est noté q. Un quaternion est un
réel si et seulement s'il est égal à son conjugué.

L'application définit un produit


scalaire sur l'espace vectoriel H. Un quaternion est
dit unitaire lorsqu'il est de norme 1. Dans ce cas, il
suit de la définition même du produit scalaire qu'il
est inversible et que son inverse est son conjugué.
L'ensemble des quaternions unitaires, la sphère unité
S3, forme un groupe (de Lie) compact et simplement
connexe. Il agit sur l'espace des quaternions
imaginaires par conjugaison. Pour tout quaternion
unitaire u et pour tout quaternion imaginaire q :

Cette action préserve la norme ; autrement dit, c'est


une action par isométries. Elle définit donc un
morphisme de groupes :

Ce morphisme est en réalité le revêtement universel


du groupe SO(3). Il induit donc un isomorphisme
entre les algèbres de Lie.

L'algèbre de Lie de S3 est justement l'espace des


quaternions imaginaires munis du crochet de Lie
obtenu comme la partie imaginaire du produit des
quaternions. Cette algèbre de Lie est isomorphe à
l'algèbre de Lie R3 (munie du produit vectoriel).
C'est la raison fondamentale pour laquelle la partie
imaginaire de deux quaternions imaginaires
s'identifie au produit vectoriel.

Article détaillé : Quaternion.

Il est de nouveau possible de justifier l'invariance par isométrie.


Toute isométrie de l'espace des quaternions imaginaires s'écrit
comme la conjugaison par un quaternion unitaire. Si q est un
quaternion unitaire, et q1, q2 sont des quaternions imaginaires, il
suffit de constater :

pour en déduire l'invariance par isométrie du produit vectoriel.

Par le produit tensoriel

Article connexe : Produit tensoriel.

Soient deux vecteurs u et v dont les 3 coordonnées dans une base


orthonormée directe sont notées respectivement et . On
peut définir le tenseur dont les 9 coordonnées sont
ce qui, en notation tensorielle, s'écrit simplement
.

Ce tenseur peut se décomposer en la demi-somme de deux


tenseurs, l'un complètement symétrique
qui a 6 coordonnées indépendantes
données par , et l'autre complètement
anti-symétrique qui a 3 coordonnées
indépendantes données par .

On peut associer et le vecteur z dont les coordonnées sont :

ce qui, à l'aide du symbole de Levi-Civita peut s'écrire

Selon la convention de sommation d'Einstein, on somme sur i et


sur j dans la formule ci-dessus. Par exemple pour k = 3 (i et j
variant de 1 à 3),
.

Comme cette égalité est conservée lors d'un changement de base


orthonormée directe, z est bien le produit vectoriel de u et v.

Remarque : Dans l'écriture ci-dessus, désigne le produit


extérieur des vecteurs u et v. Avec la notation pour le produit
vectoriel on peut écrire , etc. ce qui ne
pose aucun problème. Avec la notation française pour le
produit vectoriel, on obtient ce qui peut
amener des confusions.

Dans le cas général, la base n'est pas nécessairement


orthonormée directe. Comme le produit extérieur est défini
de manière intrinsèque (définition tensorielle), l'expression de ses
coordonnées est inchangée : . Mais il
n'en est pas de même pour le produit vectoriel. Pour généraliser
au cas d'une base quelconque, (toujours en dimension 3) il faut
introduire les coordonnées covariantes et contravariantes ainsi
que le tenseur de Levi-Civita

On obtient alors ou de manière équivalente

À partir des propriétés algébriques

Caractérisation du produit vectoriel en dimension 3

Théorème : si une application bilinéaire notée de dans


E, E espace vectoriel réel de dimension 3, vérifie pour tout u,v,w :

1. Règle d'échange :
2. Formule du double produit :
Alors il existe une orientation de E telle que est le produit
vectoriel de E.

Étapes successives de la démonstration :

a. On montre en partant de
et utilisant 1. puis 2.
b. On en déduit directement é (égalité
dans l'inégalité de Cauchy-Schwarz) puis en
calculant .
c. Soient deux vecteurs normés orthogonaux,
, alors en utilisant 1. et a. on montre que
est orthonormale, puis que et
.
d. En exprimant u et v dans cette base, décrétée directe, on
calcule les coordonnées de , qui montrent alors que
est bien « le » produit vectoriel.
Autre caractérisation en dimension quelconque a priori

Article connexe : Produit vectoriel en dimension 7.

On appelle produit vectoriel sur un espace euclidien V une


application bilinéaire notée[10] ×, allant de V × V vers V,
, ayant les propriétés suivantes[11],[12] :

   (orthogonalité),

et :
  (relation entre les
normes),

où (x·y) est le produit scalaire et |x| est la norme du vecteur x. Une


formulation équivalente, utilisant l'angle θ entre les vecteurs[13],
est[14] :

ce qui est l'aire du parallélogramme (dans le plan de x et y) ayant


les deux vecteurs pour côtés[15]. Il est également possible de
montrer que l'expression suivante est équivalente aux deux
précédentes[16] :

On démontre alors qu'un produit vectoriel non trivial ne peut


exister qu'en dimensions trois et sept[14] ; de plus, en dimension
trois, ce produit vectoriel est unique au signe près.

Définitions ambigües ou/et obsolètes


La définition mathématique du produit vectoriel nécessite la
notion « d'orientation de l'espace », expression qui, même de nos
jours (2021), est assez peu utilisée en dehors du champ
mathématique[17]. Les mathématiciens définissent l'orientation en
dimensions quelconques sur des objets très généraux appelés
variétés d'une manière nécessairement très abstraite. Même dans
le cas simple des espaces vectoriels, la définition la plus usuelle
fait intervenir la notion de forme volume (elle ne fait pas appel aux
bases) et est assez peu concrète[18]. Les physiciens, entre autres,
préfèrent utiliser « l'orientation d'une base », notion plus
facilement accessible (en dimension 3) à l'aide des trois premiers
doigts de la main : règle de la main droite ou règle de la main
gauche selon le cas. En anglais, on utilise l'expression imagée
"handedness"  .(en)

Définition obsolète

En physique, la définition moderne du produit vectoriel est


conforme à la définition mathématique. Mais il n'en a pas toujours
été ainsi. Par exemple, chez Landau, p. 28, on trouve :

« Lorsque l'on renverse par symétrie le système de


coordonnées, c'est-à-dire quand on change les signes
des trois coordonnées, les composantes d'un vecteur
ordinaire changent également de signe. De tels
vecteurs sont dits polaires. Les composantes d'un
vecteur pouvant être représenté comme le produit
vectoriel de deux vecteurs polaires ne changent pas
de signe lors d'un renversement. De tels vecteurs
sont dits axiaux. […] Un vecteur axial est un pseudo-
vecteur, dual d'un certain tenseur antisymétrique.
Ainsi, si , on a où

. »

En physique, la définition moderne du produit vectoriel de deux


vecteurs ne fait pas intervenir le fait qu'ils soient polaires ou
axiaux et est indépendante de tout système de coordonnées :
c'est donc un tenseur. Plus précisément c'est un tenseur de rang
1, c'est-à-dire un vecteur. Alors que pour Landau, le produit
vectoriel de deux vecteurs polaires (et d'une manière plus
générale, tout vecteur axial) est un pseudo-tenseur de rang 1,
c'est-à-dire un pseudo-vecteur (voir Pseudo-vecteur
(homonymie)). La définition de Landau est donc obsolète mais
elle a le grand mérite d'être clairement obsolète.

Définitions ambigües

« On sait qu'un vecteur axial change de sens quand


on change l'orientation des axes (on le vérifie
aisément par exemple sur le produit vectoriel de
deux vecteurs polaires)[19]. »

À première vue, cette définition semble être analogue à celle de


Landau. Mais le dessin qui l'accompagne permet de mieux la
comprendre. L'auteur utilise un repère orthonormal dans lequel,
par définition, les formules usuelles sont correctes[20]. Il explique
ensuite que par convention on le représente sous la forme d'un
repère orienté à droite (il ne le précise pas mais cela signifie que
l'espace est orienté à droite) mais que l'on pourrait tout aussi bien
le représenter orienté à gauche (l'espace serait alors orienté à
gauche). Le changement de signe du produit vectoriel vient donc
du changement d'orientation de l'espace, ce qui est conforme à sa
définition.

La citation précédente n'est explicitée que grâce au dessin qui


l'accompagne ; seule elle est ambigüe. D'autres auteurs sont sans
doute dans le même cas et il faut être prudent lorsque l'on extrait
une phrase de son contexte. Par exemple

« Or, par définition, le produit vectoriel de


deux vecteurs et est un vecteur [ ] tel que
le trièdre soit de même sens que le trièdre
des axes coordonnées[21] »

Faut-il interpréter cette citation comme celle ci-dessus ? Par la


suite, l'auteur précise sa pensée et en fait il est dans le même
esprit que Landau.

Réconciliation ?

Il apparait donc, comme le dit Jean Sivardière, que « deux


définitions, non équivalentes, du produit vectoriel se rencontrent
dans la littérature[22] ». Est-il possible de concilier ces deux
approches ?

A priori, cela est impossible. On ne peut pas affirmer d'un côté que
le produit vectoriel est un vecteur (la définition est indépendante
de tout repère) et prétendre de l'autre qu'un changement de base
seul peut le changer en son opposé : cela est une contradiction
pure et simple. Il faut que les choses soient claires : le produit
vectoriel de deux vecteur polaires est un vecteur axial mais ce
n'est pas un pseudo-tenseur. En effet

1. lorsque l'on change l'orientation du repère, un pseudo-


tenseur est changé en son opposé tandis que le produit
vectoriel est invariant.
2. lorsque l'on change l'orientation de l'espace, un pseudo-
tenseur est invariant tandis que le produit vectoriel est
changé en son opposé.

Certes, lorsque l'on change les deux en même temps, produit


vectoriel et pseudo-tenseur sont changés en leur opposé mais
cela ne fait que masquer leurs différences.

Certains commentateurs, refusant de voir cette incompatibilité,


ont eu l'idée de redéfinir la notion de "renversement des axes" : un
renversement des axes serait toujours accompagné implicitement
par un renversement de l'orientation de l'espace. Ainsi, le
changement de signe du produit vectoriel serait conforme à la
définition.

L'idée est intéressante mais elle est inapplicable en ce qui


concerne les citations des grands auteurs. Car même si cela
pourrait convenir à certains, pour d'autres ce serait une trahison
de leur pensée ; seule une analyse plus précise du contexte peut
éventuellement permettre de savoir quelle définition du produit
vectoriel l'auteur a choisie.

Applications

Mécanique

On définit l'opérateur rotationnel comme suit :

En mécanique du solide, c'est une opération très employée


notamment dans la relation de Varignon qui lie les deux champs
vectoriels d'un torseur. D'autre part, les équations de Maxwell sur
l'électromagnétisme s'expriment à travers l'opérateur rotationnel,
ainsi que les équations de la mécanique des fluides, notamment
celles de Navier-Stokes.

Le moment d'une force est défini comme le produit vectoriel de

cette force par le vecteur reliant son point d'application A


au pivot P considéré :

C'est une notion primordiale en mécanique du solide.

Équation de plan dans l'espace

Article détaillé : Le plan dans l'espace euclidien.

Soient A, B et C, trois points non alignés de l'espace, grâce


auxquels on peut former le plan (ABC).

Alors est un
vecteur normal non nul à (ABC).

Les coordonnées de dans une base orthonormée


fournissent donc les trois premiers coefficients d'une équation
cartésienne de (ABC) : ax + by + cz + d = 0 dans un repère
orthonormé associé à cette base.

Géométrie métrique

Soit ABCD un parallélogramme, c'est-à-dire qu'on a la relation :

.
Comme indiqué plus haut dans la définition, l'aire de ce
parallélogramme est égale à la norme du produit vectoriel des
deux vecteurs sur lesquels il s'appuie :

Notes et références

Notes

1. Tous les espaces vectoriels euclidiens orientés de dimension 3


sont deux à deux isomorphes ; l'isomorphisme est une
isométrie bien définie à composition près par une rotation.
2. Il est en fait possible de définir une opération ayant des
propriétés analogues dans des espaces de dimension 7 ; voir
« Produit vectoriel en dimension 7 ».
3. On peut aussi définir le produit vectoriel de n-1 vecteurs dans
un espace vectoriel euclidien orienté de dimension n.
4. Un autre inconvénient est que le produit vectoriel n'est ni
associatif, ni commutatif, mais c'est aussi le cas des
« produits » dans les algèbres non associatives.
5. Voir section Définition #Comme produit de Lie.
6. L'équivalence entre cette définition et la précédente est
démontrée, par exemple, dans la leçon « Produit vectoriel » (htt
ps://fr.wikiversity.org/wiki/fr:Produit_vectoriel/Avanc%C3%A9#
Caract%C3%A9risation_alg%C3%A9brique) sur Wikiversité.
7. Pour une démonstration, voir par exemple la leçon « Produit
vectoriel » (https://fr.wikiversity.org/wiki/fr:Produit_vectoriel/A
vanc%C3%A9#Calcul_pratique_avec_les_coordonn%C3%A9e
s) sur Wikiversité.

Références

1. Crowe 1994.
2. Jean-Paul Collette, Histoire des mathématiques, t. 2, Vuibert,
1979 (ISBN 0-7767-0164-9), p. 244.
3. Joseph-Louis Lagrange, « Solutions analytiques de quelques
problèmes sur les pyramides triangulaires », Nouveaux
mémoires de l'Académie royale des sciences et Belles-Lettres,‎
1773, réimprimé dans Serret, Œuvres de Lagrange, vol. 3,
Gauthier-Villars, 1869 (lire en ligne (https://gallica.bnf.fr/ark:/1
2148/bpt6k229222d/f663.image)  [archive]), p. 661-692
4. Jean Dieudonné (dir.), Abrégé d'histoire des mathématiques
1700-1900 [détail des éditions], 1986, p. 107.
5. Crowe 1994, p. 85.
6. (en) William Clifford, Elements of Dynamic : An Introduction to
the Study of Motion and Rest in Solid and Fluid Bodies,
MacMillian and Co (Londres), 1878, p. 95
7. Cajori 1993, p. 134 et 136.
8. Cajori 1993, p. 138.
9. « Produit vectoriel » (https://homeomath2.imingo.net/prodvec
t.htm)  [archive]
10. La notation francophone usuelle du produit vectoriel en
dimension 3 est , mais il ne semble pas y avoir de mention
du cas général dans la littérature
11. (en) WS Massey, « Cross products of vectors in higher
dimensional Euclidean spaces », The American Mathematical
Monthly, Mathematical Association of America, vol. 90, no 10,‎
1993, p. 697–701
(DOI 10.2307/2323537 (https://dx.doi.org/10.2307/2323537) ,
lire en ligne (https://www.jstor.org/stable/2323537)  [archive])
12. Massey (1993) et (en) Robert B Brown et Alfred Gray, « Vector
cross products », Commentarii Mathematici Helvetici,
Birkhäuser Basel, vol. 42,‎1967, p. 222–236
(DOI 
10.1007/BF02564418 (https://dx.doi.org/10.1007/BF02564418)
, lire en ligne (https://link.springer.com/article/10.1007/BF025
64418)  [archive]) demandent que l'application soit bilinéaire.
13. La définition de l'angle dans un espace de dimension n est
généralement donnée à l'aide du produit scalaire, comme
valant

. Par conséquent, et en appliquant le théorème de Pythagore à


la relation entre les normes, , sin θ
étant toujours positif dans cet intervalle. Voir (en) Francis
Begnaud Hildebrand, Methods of applied mathematics, Courier
Dover Publications, 1992, Reprint of Prentice-Hall 1965
2nd éd., 362 p., poche (ISBN 978-0-486-67002-7, lire en ligne (h
ttps://books.google.com/books?id=17EZkWPz_eQC&pg=PA2
4)  [archive]), p. 24
14. (en) Pertti Lounesto, Clifford algebras and spinors, Cambridge,
UK, Cambridge University Press, 2001, 2e éd., 338 p., poche
(ISBN 978-0-521-00551-7,
LCCN 2001025396 (https://lccn.loc.gov/2001025396) , lire en
ligne (https://books.google.com/books?id=kOsybQWDK4o
C)  [archive]), p. 96-97.
15. (en) M. G. Kendall, A Course in the Geometry of N Dimensions,
Courier Dover Publications, 2004, 63 p., poche
(ISBN 978-0-486-43927-3,
LCCN 2004047769 (https://lccn.loc.gov/2004047769) , lire en
ligne (https://books.google.com/books?id=_dFJ6pSzRLkC&pg
=PA19)  [archive]), p. 19
16. (en) Z.K. Silagadze, Multi-dimensional vector product, 2002,
« math.RA/0204357 » (https://arxiv.org/abs/math.RA/020435
7)  [archive], texte en accès libre, sur arXiv..
17. « The third edition [2006] of this highly acclaimed
undergraduate textbook is suitable for teaching all the
mathematics ever likely to be needed for an undergraduate
course in any of the physical sciences ». Bien que cette
préface d'un livre de Riley soit sans aucun doute justifiée, il
n'est pas question "d'orientation de l'espace" dans la définition
(p.222) du produit vectoriel.
18. Voir, par exemple ici,
19. Arzeliès, p. 178.
20. Les mathématiciens diraient repère orthonormal direct, c'est-à-
dire de même orientation que l'espace. Si l'espace est orienté à
droite, "direct" à la même signification en mathématiques et en
physique. Si l'espace est orienté à gauche, les physiciens n'ont
pas de mot pour désigner un repère direct au sens
mathématique. Ce n'est pas bien grave car, en physique,
l'espace est toujours orienté à droite. C'est tellement acquis
que, même dans les ouvrages les plus sérieux (Riley, par
exemple), cela n'est pas précisé.
21. Berthelot, p. 52.
22. Sivardière, p. 1239. La "littérature" en question est
nécessairement non mathématique car en 1988 le produit
vectoriel est mathématiquement parfaitement défini.

Ouvrages cités

(en) Florian Cajori, A History of Mathematical Notations [détail des


éditions], 1993
(en) Michael J. Crowe, A History of Vector Analysis   : The
(en)

Evolution of the Idea of a Vectorial System, Dover, 1994, 2e éd.


(1re éd. 1985), 270 p. (ISBN 0-486-67910-1, lire en ligne (https://
books.google.com/books?id=iVFAVqA91h4C)  [archive])
André Berthelot, Les développements récents relatifs à la
symétrie droite-gauche en physique, Paris, J.-B. Baillière et fils,
coll. « L'information scientifique » (no 2), mars/avril 1965, p. 47-
62
Henri Arzeliès, Electricité macroscopique et relativiste, Paris,
Gauthiers-Villard, 1963
Lev Landau et Evgueni Lifchitz (trad. Edouard Gloukhian),
Théorie du champ, Moscou, Mir, 1966
(en) K. F. Riley, M. P. Hobson et S. J. Bence, Mathematical Methods
for Physics and Engineering, Cambridge, Cambridge University
Press, 2006, 3e éd., 1333 p. (ISBN 978-0-521-86153-3).
Jean Sivardière, Les grandeurs physiques axiales, coll. « Bulletin
de l'Union des Physiciens » (no 709), décembre 1988, p. 1239-
1261
Théodore Vogel, Sur l’utilisation des pseudo-tenseurs en
physique, t. 18, n°2, Paris, coll. « Le Journal de Physique et Le
Radium », 1957
(DOI 
10.1051/jphysrad:0195700180208100 (https://dx.doi.org/10.1051/jp
,
HAL 
jpa-00235630 (https://hal.archives-ouvertes.fr/jpa-00235630) ,
lire en ligne (https://hal.archives-ouvertes.fr/jpa-0023563
0)  [archive]), p. 81-84

Voir aussi

Articles connexes

Calcul vectoriel en géométrie Géométrie vectorielle


euclidienne Produit vectoriel en
Définition générale du produit dimension 7
vectoriel Pseudovecteur
Dérivation vectorielle Tire-bouchon de Maxwell

Bibliographie

Marcel Berger, Géométrie [détail des éditions]


(en) L. L. Boyle et P. S. C. Matthews, On the nature of axial tensors,
vol. 5 issue S5, Wiley, coll. « International Journal of Quantum
Chemistry », 18 janvier 1971, 1re éd.
(DOI 
10.1002/qua.560050866 (https://dx.doi.org/10.1002/qua.56005086
), p. 579-590.

Lien externe

www.isima.fr/~leborgne/IsimathMeca/Produitvectoriel.pdf (htt
p://www.isima.fr/~leborgne/IsimathMeca/Produitvectoriel.pd
f)  [archive]. "Produit vectoriel, pseudo-produit vectoriel, et
endomorphismes antisymétriques". 9 pages.

QCM Prod (https://sciencesindustrielles.com/logiciels)  [archive],


un programme python gratuit pour s'entraîner aux produits
vectoriels.

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title=Produit_vectoriel&oldid=201510760 ».

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