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NOISE ET NOSTALGIE.

L’APPEL DE L’INNOCENCE PERDUE

Catherine Guesde

Audimat Éditions | « Audimat »

2020/1 N° 13 | pages 91 à 111


ISSN 2261-3595
DOI 10.3917/audi.013.0091
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Noise et nostalgie

de l’innocence

Catherine Guesde
L’appel

perdue
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Catherine Guesde

Catherine Guesde a obtenu son doctorat de philosophie il y


a quelques mois. En 2018, elle a écrit avec Pauline Nadrigny
un court ouvrage percutant, The Most Beautiful Ugly Sound in
the World, sur l’écoute des musiques (harsh) noise — un livre
qui évite l’écueil des références érudites à l’ineffable ou à la
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pure transcendance, pour se concentrer sur les manières de les
écouter. C’est l’une de ces écoutes possibles que Catherine entre-
prend de développer dans cet article : elle y médite, en effet, sur
la façon dont les mélodies continuent de hanter ces musiques
et comment elles manifestent, en retour, un certain idéal de
l’innocence perdue. Au-delà du défi que les musiques noise
commencent souvent par nous lancer, Catherine Guesde nous
montre comment elles portent une certaine éthique du sensible,
comment elles nous apprennent à ne plus approcher le monde
à travers des catégories périmées, sans nier ce qu’il coûte de
s’en arracher.

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Noise et nostalgie

J’ai récemment donné un concert dans un cadre inha-


bituel, auprès d’un public coutumier d’un répertoire de
musique classique. Le set, guitare, EBow et pédales, était
court et jouait du contraste entre la saturation et le delay
qui noyaient le son, et des échos de mélodie encore
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audibles. À la fin du concert, une dame d’un certain âge,
manifestement intriguée, vient me demander comment
je produis mes sons. Le ton poli de ses questions peine
à dissimuler une certaine inquiétude : « Mais vous ne per-
dez pas les notes, tout de même ? Ce serait dommage, de
perdre les notes ».

La noise n’a eu cesse de perdre les notes. La rupture qu’ef-


fectue Russolo au début du XXe siècle part du constat
suivant : se limiter aux notes et aux instruments, c’est se
condamner à n’accéder qu’à une partie infime du monde
sonore. L’ouverture au son-bruit qu’il prône dans son mani-
feste de 1917 [1] se justifie pour lui par la richesse des sons
jusque-là exclus du domaine du musical : ceux-ci ont un
timbre plus riche, une variété interne supérieure à celle
des sons réglés produits par des instruments. Là où les
contours définis des hauteurs musicales permettent de
les cerner aisément, le bruit, « jaillissant confus et irrégu-
lier hors de la confusion irrégulière de la vie, ne se révèle
jamais entièrement à nous et nous réserve d’innom-
brables surprises. » [2] Le manifeste propose une rupture
nette avec le passé – celui des mélodies et des sons des

[1]  Luigi Russolo, L’Art des bruits, manifeste futuriste, Éditions Allia, 2016.
[2]  Ibid.

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Catherine Guesde

instruments –, non pas par pure provocation révolution-


naire, mais au nom d’un territoire nouveau à conquérir :
celui des timbres bruiteux. Russolo appelle ainsi de ses
vœux des auditeurs de musique bruitiste à l’oreille aigui-
sée   : « En comparant les timbres variés des bruits aux
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timbres des sons, ils comprendront combien les premiers
sont plus variés que les seconds. On développera ainsi la
compréhension, le goût et la passion des bruits. » [3]

De cette tabula rasa, qui est une ouverture au monde des


bruits, résulte un voile jeté sur le passé – celui, plus tra-
ditionnel, des instruments, des hauteurs réglées, des sons
purs et des mélodies. Dès lors, ce qui peut éveiller une
curiosité inquiète dans les musiques héritières du brui-
tisme telles que la noise, ce n’est pas que l’on perde les
notes – dont Russolo nous affirme qu’on en a fait le tour – ;
c’est plutôt qu’on trouve encore des notes. Pourtant,
dans certaines formes de noise, des mélodies refont sur-
face – comme si ce refus sur lequel se fonde le bruitisme
devait nécessairement se traduire par un retour du refoulé.
C’est sur ces résurgences de la mélodie, qui sont pour la
noise une façon d’intégrer le passé de la musique, que j’ai-
merais me pencher ici.

[3] Russolo, op. cit., p. 30.

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Noise et nostalgie

L’INCONSCIENT DE LA NOISE

La noise entretient un rapport ambigu avec la musique.


On est tenté d’y voir un simple négatif de la musique – un
chaos sonore fait de timbres abrasifs. Et de fait, dans la
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lignée du geste bruitiste, elle coupe avec tout ce qui est
réputé faire la spécificité du musical. En renonçant aux
instruments de l’orchestre classique, elle rompt avec la
tradition de domestication du son qui fonde la musique :
construire des instruments de musique [4], c’est organi-
ser le domaine sonore, choisir un timbre, se donner les
moyens de produire des hauteurs définies – la musique
étant traditionnellement conçue comme cette organi-
sation, suivant des principes harmoniques, de sons déjà
polis. Là où la musique a longtemps pensé en référence à
l’harmonie du monde – les notes de l’octave étaient, chez
les Pythagoriciens, mises en correspondance avec les pla-
nètes du système solaire, modèle d’ordre immuable et
parfait –, la noise cultive le chaos. Plutôt que de domes-
tiquer les sons, la noise travaille à les rendre à leur état
sauvage. La pratique du détournement – d’instruments,
de technologie liée à l’amplification  –  permet de pro-
duire des sons loin d’une logique de contrôle, dans une
culture de l’accident sonore. Brancher des pédales d’ef-
fet pour les boucler sur elles-mêmes, créant un feedback

[4]  Les instruments auxquel nous faisons référence ici sont ceux de la
musique classique occidentale – la possibilité de fabriquer des instruments étant,
de fait, infinie, comme le montrent les pratiques de bricolage et de détournement.

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Catherine Guesde

qui va pouvoir être modulé [5] – plutôt que de les utiliser,


comme le fait la tradition du rock, pour affecter le son
d’une guitare ou d’un clavier –, c’est se préparer à être
dépassé par son propre dispositif de jeu. Le feedback ou
effet larsen – qui naît lorsque le signal en sortie d’un sys-
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tème d’amplification est lui-même injecté en entrée de
ce système [6]  –  est l’exemple même de la machine qui
s’emballe, produisant du son de manière pour ainsi dire
autonome, menaçant à tout moment de dépasser celui qui
a mis en place le dispositif. Comme l’explique l’anthropo-
logue américain David Novak, chez les performeurs noise,
« l’expression personnelle se transforme en conflit avec le
système (…). Les noisiciens apparaissent comme étant en
pleine bataille contre leurs machines. » [7] Loin du son pur,
loin de l’ordre rendu possible par la maîtrise d’instruments
musicaux, la noise cultive l’accident et le chaos sonore. Il
est dès lors peu surprenant que la thématique de l’anti-
musique soit récurrente lorsqu’il s’agit de décrire ce que
fait la noise.

[5]  Pratique courante dans la noise ; on parle de « no input » pour décrire
le fait que le son n’est le fruit d’aucune source externe.
[6]  Un exemple courant de ce phénomène est celui du microphone
placé devant un amplificateur, créant un sifflement aigu.
[7]  David Novak, Japanoise: Music at the Edge of Circulation, Duke
University Press, 2013, p. 159. Notre traduction : “ Noisicians, in contrast, use their
electronics to embody the self-destructive imbalances of positive feedback. Personal
expression is transformed in conflict with the system (…) This is not a relationship
that creates a balanced sound environment. On the contrary, Noisicians appear to
be in the midst of battle with their machines.”

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Noise et nostalgie

Dans un entretien recueilli dans Esoterra [8], Merzbow


situe la noise au sein de l’ensemble plus vaste qu’est la
musique – en utilisant deux analogies : celle du rebut et
celle de l’inconscient. La première analogie est employée
pour expliquer le choix du nom de scène de Masami
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Akita – le nom de Merzbow s’inspirant du Merzbau de
Kurt Schwitters (1920-1923), une construction architec-
turale faite de matériaux récupérés : « De même que le
dadaïste Kurt Schwitters créait des œuvres d’art à partir
d’objets récupérés dans les encombrants, j’ai fait des sons
à partir du rebut qui m’entoure dans la vie. » [9] La création
prolonge ici le geste de récupération – du sculpteur qui
fait les poubelles, du performeur noise qui nourrit sa pra-
tique des sons du quotidien que l’on se refuse à écouter.
Or cette récupération s’inscrit à rebours de la discrimina-
tion opérée par les usages habituels : à rebours du geste
qui consiste à jeter des objets devenus indésirables car
trop vieux, abîmés ou simplement plus au goût du jour ;
à rebours du geste qui consiste à se boucher les oreilles
pour ne pas entendre certains sons urbains (une sirène au
volume sonore excessif, un train entrant en gare à pleine
vitesse…). La création sonore ou plastique révèle des pos-
sibilités cachées de ce que l’on avait jugé indésirable et,

[8]  The Beauty of Noise. An interview with Masami Akita of Merzbow


by Chad Hensley », in Esoterra, consultable en ligne : http://www.esoterra.org/
merzbow.htm (consulté la dernière fois le 02/02/2020).
[9]  « Just as Dadaist Kurt Schwitters made art from objects picked up off
the street, I made sound from the scum that surrounds my life ». Notre traduction :
“Just as Dadaist Kurt Schwitters made art from objects picked up off the street, I
made sound from the scum that surrounds my life.” (Ibid.)

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Catherine Guesde

pour ce faire, elle remonte le temps : elle franchit en sens


inverse la frontière établie entre objets (ou sons) dési-
rables et indésirables, pour réintégrer ces objets honnis
dans le domaine du sensible et les placer au cœur de l’ex-
périence esthétique.
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La deuxième analogie suppose un mouvement semblable :
« Si la musique était la sexualité, Merzbow serait de la por-
nographie (…) La pornographie est l’inconscient de la
sexualité. Donc la noise est l’inconscient de la musique. » [10]
L’équivalence posée entre sexualité et domaine conscient,
pour penser la musique, d’une part, et pornographie et
inconscient pour penser la noise, d’autre part, peut sur-
prendre. En réalité, le dénominateur commun de ces deux
termes est la question de la censure. De même que l’in-
conscient est ce qui a été rejeté hors du domaine de la
conscience, pour devenir seulement accessible par des
voies détournées (le rêve, le lapsus), la pornographie est
ce qui, dans la sexualité, doit rester caché, et ne peut circu-
ler à découvert. Ici encore, on voit que la noise est définie
comme le retour du refoulé : si le domaine du musical a été
conquis à partir du monde des bruits et contre celui-ci – les
notes, les timbres définis des instruments, les mélodies, les
rythmes mesurés se distinguent du chaos du monde natu-
rel ou urbain –, alors cette sélection discriminante doit

[10]  Nous traduisons : “If music was sex, Merzbow would be porno-
graphy. (…) pornography is the unconsciousness of sex. So, Noise is the uncons-
ciousness of music.” Merzbow in “ The Beauty of Noise. An interview with Masami
Akita of Merzbow by Chad Hensley”.

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Noise et nostalgie

nécessairement voir revenir, comme pour un sujet psycha-


nalysé, le retour du refoulé. La noise serait ce qui, au terme
d’une psychanalyse de la musique, de tous ses non-dits et
des zones d’ombre qu’elle suppose, serait remonté à la sur-
face – un « ça » déterré et révélé au grand jour.
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Ces deux comparaisons, qui présentent la noise comme
un retour en deçà des discriminations et des refoulements,
montrent cependant que la noise se construit également
contre quelque chose : contre cette frontière qui détermine
ce qui peut ou non entrer dans le domaine du sensible et
de la conscience. Faire de la noise, c’est refuser cette dis-
crimination entre son désirable et indésirable. Comme le
résume John Wiese : « Si tu veux entendre un son, alors ce
n’est plus un son indésirable. Il n’y a pas de raison de faire
d’autre distinction. » [11]

La dissolution de cette frontière et l’ouverture au refoulé


revient à rendre caduque la délimitation ancienne du
domaine du musical et à l’étendre au domaine du sonore
tout entier, dans une démarche héritière de John Cage : est
musical tout son que l’on se donne la peine d’écouter. Mais
dans cette ouverture, ce qui devient refoulé, c’est l’ancienne
délimitation d’un domaine que l’on appelait « musique » – ce
monde de sons réglés, avec lesquels on compose mélodies et
accords. Certes, la noise proclame l’ouverture du musical à

[11]  Entretien que j’ai effectué en 2015 et publié en annexe de Catherine


Guesde, Pauline Nadrigny, ‘The Most Beautiful Ugly Sound in the World’ : à l’écoute
de la noise, Musica Falsa, 2018.

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tous les sons, mais le privilège reste accordé aux bruits si long-
temps restés exclus de cet art. Dans cette nouvelle démarche
de transgression des frontières, ce qui devient refoulé, c’est
la musique telle qu’elle est traditionnellement conçue. D’où la
possibilité de formuler la réciproque de l’équation posée par
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Merzbow : la musique est l’inconscient de la noise.

HANTISES SONORES

Dès lors, si la noise repose, elle aussi, sur un refoulement,


ne faut-il pas s’attendre à ce que refasse surface ce qui en
avait été exclu – des mélodies composées selon la tona-
lité, des cadences et des accords parfaits ? Certes, la noise
n’exclut que rarement les mélodies de manière radicale ; à
l’exception de la harsh noise, on trouve souvent des mélo-
dies sous la forme de résidus – des fragments produits par
des oscillateurs, par exemple. Mais les phrases musicales
au sens classique du terme – non pas une succession de
hauteurs, mais des hauteurs articulées entre elles et exi-
geant une certaine durée pour se déployer – sont, elles,
balayées par le principe même de la composition de la
noise, qui valorise l’accident et l’interruption davan-
tage que la continuité dans l’articulation des hauteurs.
Je voudrais m’intéresser ici aux formes que prennent les
mélodies – au sens plein du terme – lorsqu’elles resur-
gissent. Ce qui, me semble-t-il, mérite qu’on y prête
attention, c’est le fait que, même lorsqu’elles s’inscrivent
dans la durée, elles ne refont jamais surface à l’état pur ;
elles se construisent à travers la mutilation du son clair

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Noise et nostalgie

que constitue la noise. Différentes relations existent entre


le son bruiteux et les mélodies qui refont surface, de sorte
que l’on peut essayer d’esquisser une typologie de ces
mélodies. [12]
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Débris
Sur le deuxième album de son projet Pita, Peter Rehberg,
connu pour être l’un des pionniers du laptop noise, nous
donne à entendre cette tension entre un certain usage de
la mélodie et sa déconstruction. La troisième piste de Get
Out, sobrement intitulée « 3 », construit un thème lanci-
nant : une mélodie qui sera reprise en boucle tout au long
des 11 minutes qu’occupe cette plage. Celle-ci commence
par saturer, tout en subissant des secousses, des hachures
qui se créent avec une variation périodique de volume
sonore. Une deuxième mélodie se dessine en accompagne-
ment, tandis que la saturation croissante instaure une sorte
de grésillement, l’effet de trémolo continuant de découper
la mélodie en parcelles, portant atteinte à sa continuité.
L’ensemble est rythmé, comme le serait un titre de techno,
et l’accompagnement forme, avec la mélodie principale,
un ensemble harmonieux. Une certaine progression est
perceptible, de l’intro constituée seulement de quelques
notes, à la mélodie accompagnée et rythmée, qui gagne
en épaisseur tout au long du morceau. Par moments, la
mélodie d’accompagnement est masquée – comme si le
morceau enregistré en stéréo mais diffusé sur une chaîne

[12]  Cette typologie ne prétend pas à l’exhaustivité ; elle n’est qu’un


début de mise en ordre d’un corpus bien plus vaste et appelle à être poursuivie.

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Catherine Guesde

hi-fi endommagée ne nous parvenait que partiellement,


l’une des deux pistes restant masquée. En raison de la satu-
ration, de l’effet de hachure, des approximations dans la
mélodie variant de demi-tons jusqu’à devenir fausse, les
problèmes de diffusion et les oscillations de volume, la
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mélodie qu’on entend est une mélodie mutilée de mille
manières ; par les effets de glitch, d’endommagement
volontaire, celle-ci nous parvient en fragments – comme
les débris de ce qui autrefois était intact, mais que l’on doit
à présent reconstituer, par la seule force de l’attention, en
prêtant l’oreille. Comme s’il n’était possible d’entendre la
mélodie qu’à travers sa brisure.

Mirages et spectres
Le groupe australien de noise-rock the Dead C opère à
partir d’un ensemble d’instruments fréquents dans le
rock – deux guitares, une batterie. Sur « Empire » de l’al-
bum Patience (2010), les deux guitares nous donnent
à entendre deux modes de production de la mélo-
die – tous deux faisant la part belle aux sons parasites.
L’une des guitares occupe la part grave du spectre et se
charge de l’accompagnement ; le son est saturé et bai-
gné de reverb ; si ses contours sont imprécis, des riffs
restent cependant détectables. Ce premier jeu de gui-
tare ne fait qu’exacerber une pratique courante dans le
rock et dans le shoegaze, celle qui consiste à altérer le
son par l’intermédiaire des pédales d’effet. La deuxième
guitare, qui occupe la part plus aiguë du spectre sonore,
s’apparente davantage à un larsen saturé et hachuré. Il est

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Noise et nostalgie

vraisemblable, à écouter le titre, que ces sons soient pro-


duits sans gratter les cordes – en jouant de la proximité
et de la distance de l’amplificateur, pour moduler le lar-
sen, ou en variant les positions sur les frettes et en jouant
d’une pédale de volume. Deux mélodies autonomes se
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déploient ; la première guitare suit une mélodie tonale,
tandis que la seconde enchaîne de longs arpèges disso-
nants. La structure se délie progressivement au fil de ce
morceau de 16 minutes ; la première guitare se lance dans
des riffs rythmiques répétitifs tandis que les arpèges de
larsens finissent par se transformer en des hauteurs tenues
longuement, toujours saccadées ; les trois dernières
minutes donnent naissance à une fusion des différentes
guitares dont les hauteurs se succèdent de manière chao-
tique et dont les timbres se rejoignent. Malgré cette
tendance au délitement, ce titre nous donne à entendre
des formes  –  arpèges, mélodies entremêlées sur fond
de structure rythmique. Seulement, l’un des modes de
production de ces formes consiste non plus à produire
directement des hauteurs, mais plutôt à créer des sons
parasites – larsens saturés – et à voir comment, de l’in-
térieur de ces sons, peuvent émerger des hauteurs, pour
ensuite les moduler. Cette manière de produire des sons,
assortie aux contours imprécis des notes produites, nous
donne l’impression de mirages lointains – comme si, plutôt
que de créer directement des mélodies avec les moyens
fournis par l’instrument, il fallait partir de l’altération née
des accidents d’amplification, pour reconquérir un espace
sonore harmonieux. Ce qui se dessine, apparaissant de

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Catherine Guesde

manière furtive et imprécise sur fond de brouillage sonore,


c’est moins une mélodie que son fantôme.

Voilages
Secret Abuse, l’un des multiples projets de Jeff Witscher
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parus chez Not Not Fun, fait coexister une masse de
bruit informe, créée par une longue chaîne de pédales
d’effet, et, à l’arrière-plan, des mélodies simples, d’une
innocence frappante, qui, sans le brouillage sonore
seraient des comptines folk. Les mélodies apparaissent
voilées, presque inaccessibles : elles ne se donnent qu’à
travers leur brouillage ; les écouter c’est en même temps
constater leur perte irrémédiable. La simplicité harmo-
nique, le minimalisme des mélodies – souvent en mode
mineur, empreintes d’une mélancolie indéniable – donne
l’illusion que celles-ci doivent exister intactes quelque
part. Seulement elles ne nous sont accessibles qu’à travers
leur mutilation – par la distorsion et les bruits parasites.
Le voilage des mélodies par la masse de bruit crée non
seulement une tension – entre deux régimes musicaux,
celui des mélodies tonales et expressives, et celui du bruit
pur –, mais également des effets de spatialisation : le son
de guitare, réverbéré et moins élevé que celui du bruit,
apparaît comme au loin, voilé par le mur de bruit qui nous
empêche d’y accéder. Le fait que le bruit soit une masse
distincte de la mélodie, plutôt que la résultante d’une
mélodie interprétée avec un son sale, crée l’illusion d’une
existence autonome de ces mélodies : celles-ci doivent
exister à l’état de pures mélodies au son clair, simplement,

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Noise et nostalgie

elles sont devenues inaccessibles. L’impression suscitée


est proche de celle que créent de vieilles bandes dont le
temps a dégradé la qualité : elles nous donnent à entendre
un son dont on suppose qu’il a existé intact, clair et pur,
mais l’accès à celui-ci nous est voilé par l’épaisseur du
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temps et l’érosion de la bande. Le jeu spatial entre mélodie
lointaine et bruit proche peut dès lors devenir un jeu tem-
porel – entre les bribes d’un passé devenu inaccessible et
un présent qui y fait écran.

Ce jeu de distance et de proximité, où la forme d’un élé-


ment du passé nous reste perceptible sans que l’on ne
puisse accéder à cet élément dans son intégrité, exemplifie
le rapport qui se joue dans la noise à la tonalité : la bri-
sure, les échos, le voilage sont trois modalités de cet accès
incomplet, entravé, à un vocabulaire mélodique dont l’im-
médiateté est perdue.

LA LANGUE DU PASSÉ

Qu’elles se présentent sous la forme de débris ou de


spectres, ou qu’elles apparaissent à travers un voile qui
nous les rend inaccessibles, ces mélodies ne semblent plus
pouvoir nous parvenir à l’état pur. Pourtant, alors même
que tout dans la composition prend le son sale et l’accident
comme point de départ – qu’il s’agisse des assemblages de
pédales d’effet ou des glitch –, ces mélodies, dont on voit
bien qu’elles n’appartiennent plus au vocabulaire sonore
déployé, insistent pour revenir, même à l’état de  ruine.

105
Catherine Guesde

Comment comprendre cette insistance d’un langage


désuet – cette coexistence des vocabulaires musicaux ?

Dans son ouvrage Listening Through the Noise. The


Aesthetics of Experimental Electronic Music [13], la musico-
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logue américaine Joanna Demers s’interroge sur le motif
conduisant des artistes dont les compositions font une
place importante au bruit et au haut volume sonore, à
recourir à un langage tonal. Ces artistes héritent des rup-
tures du début du XXe siècle et l’on peut dès lors s’étonner
de les voir se tourner, lorsqu’il s’agit de jouer des notes
et des mélodies, non pas vers des structures atonales,
mais vers des formes classiques. Quoique les œuvres
qu’elle aborde – My Bloody Valentine, Sunn o))), Kevin
Drumm…  –  n’exhibent pas tout à fait la même relation
entre bruit et mélodie que celui que ne venons d’aborder
ici, sa conclusion nous semble particulièrement adap-
tée à ce corpus : « Un bon nombre des musiciens que
j’ai étudiés – sinon tous – disposent d’une culture musi-
cale sophistiquée et vaste, de sorte qu’ils sont conscients
des implications historiques qu’engage le fait d’invo-
quer la tonalité. Dans la musique contemporaine savante,
entendre une consonance employée sans distance cri-
tique (…) serait considéré comme naïf. Cela ne signifie
pas qu’il faut écouter ces œuvres comme dialoguant avec
Schoenberg ou Boulez, mais plutôt qu’il faut les écouter
comme on écouterait un auteur contemporain qui parle

[13]  Joanna Demers, Listening Through the Noise. The Aesthetics of


Experimental Electronic Music, Oxford University Press, 2010.

106
Noise et nostalgie

l’anglais de Shakespeare : comme un recours délibéré à un


langage qui est, en un sens, déjà mort » [14].

La mélodie noise comme pratique archéologique, qui


déterre des arrangements sonores du passé, pour les exhi-
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ber en même temps qu’on signale leur inaccessibilité ? La
noise mélodique serait-elle un musée des sons disparus ?
Bien sûr, les mélodies tonales n’ont, depuis le dodécapho-
nisme, pas disparu ; elles sont même omniprésentes – de
la radio diffusée dans les rayons du supermarché aux hits
de boîtes de nuit. Seulement, elles ont changé de statut
et sont devenues entachées du soupçon qui les asso-
cie aux industries culturelles et à une fonction de plaisir
immédiat [15]. Dès lors, ce retour des mélodies dans la noise
peut s’entendre comme le souhait d’un retour à la possibi-
lité de cette écoute naïve des mélodies. Joanna Demers y lit
« non pas la déconstruction critique des frontières qui ont
rejeté le bruit aux marges du langage musical pendant tant
de temps, mais plutôt le souhait d’un retour à un langage

[14]  “Many, if not all, of the musicians I consider here possess a sophis-
ticated knowledge of many types of music, so much so that they are aware of the
historical implications inherent in any invocation of tonality. In contemporary art
music, it would be considered naive to hear any consonance uncritically, as merely
an isolated instance without connection to the rise and fall of functional harmony.
This does not mean that we need to hear these works as engaging in a dialogue
with Schoenberg or Boulez but only that we should hear them as one might hear
a contemporary writer who employs Shakespearean English: as a purposeful use
of a language that has in some sense already died.” Joanna Demers, Listening
Through the Noise. The Aesthetics of Experimental Electronic Music, Oxford
University Press, 2010.
[15]  Theodor Wiesengrund Adorno, Le Caractère fétiche dans la mu-
sique, Ed. Allia, 2001.

107
Catherine Guesde

esthétique conventionnel, assorti de la conscience du fait


qu’un tel retour est tout simplement impossible. » [16] Les
sons parasitaires viendraient ici indiquer métaphorique-
ment l’impossibilité d’un retour en arrière dans l’histoire
du matériau musical après le dodécaphonisme et après
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les commentaires formulés par Adorno au sujet d’une
tonalité désormais chargée car investie par la musique
standardisée.

LA CONQUÊTE DE LA NAÏVETÉ

Il semble à partir de là possible d’effectuer une lec-


ture commune du feedback musicalisé de The Dead C,
des mélodies mutilées à coups de glitch chez Pita et des
arpèges voilés par un mur de bruit chez Secret Abuse.
Tous donnent à entendre une version négative des mélo-
dies tonales produites de manière traditionnelle avec un
instrument. Dans tous ces cas, c’est la différence du bruit
par rapport au son pur qui est rendue manifeste – que ce
soit dans le mur de son ou dans les contours flottants du
feedback –, en même temps qu’il est écouté avec comme
horizon la mélodie. En s’opposant à la musique tout en pre-
nant son apparence, le bruit en vient à signifier la nostalgie
d’un son pur dont il prend l’apparence tout en en mon-
trant l’impossibilité. Ces quelques exemples nous donnent

[16]  Nous traduisons : “not the critical deconstruction of the boundaries


that have marginalized noise from musical language for so long, but rather the
desire for a return to conventional aesthetic language mixed with the knowledge
that such a return is impossible.” Voir Joanna Demers, op. cit., p. 107.

108
Noise et nostalgie

à entendre de nouvelles connotations du bruit : non plus


simplement un son sale, parasitaire, emblématique de la
contre-culture, mais plutôt l’indice irrévocable du passage
du temps et d’un impossible retour en arrière. Par analogie
avec la dégradation d’un enregistrement ou d’un support
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d’écoute, le bruit indique ici l’éloignement, l’épaisseur
temporelle. Associé à des mélodies minimales, réduites à
quelques notes, il en vient à renvoyer à la nostalgie d’une
expression naïve, celle des ritournelles tonales.

Mais au-delà de ce qui s’apparente à une nostalgie du


matériau, à une tension vers un retour en arrière impos-
sible, ce retour des mélodies indique autre chose. Si la
mélodie a, traditionnellement, été chargée de porter les
émotions dans la musique, son retour sous une forme
mutilée peut également signaler le désir d’un retour à
une expression pure et simple des émotions : un retour au
lyrisme, dont on sait qu’il est, lui aussi, entaché de soupçon
depuis Adorno [17]. La noise, pas plus que la pop contem-
poraine [18] – et sans doute encore moins –, ne peut être le
lieu d’une expression individuelle ouverte des émotions ;

[17]  Ibid. Voir la critique du lyrisme des musiques standardisées par


Adorno : la musique pop, qui prétend à la véracité du lyrisme individuel, est
nécessairement fausse, puisque la production même de ce bien destiné à la
consommation la met en péril dès l’origine.
[18]  Je me réfère ici à l’intervention d’Agnès Gayraud lors des journées
d’études « Cultures populaires » à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne qui, à
partir de l’ouvrage de Carl Wilson sur Céline Dion, s’interroge sur l’interdit jeté sur
le lyrisme dans la pop contemporaine et le fait remonter à Adorno (voir Carl Wilson,
Let’s Talk About Love, Le Mot et le reste, 2016). Voir également Agnès Gayraud,
Dialectique de la pop, Ed. La Découverte, 2018.

109
Catherine Guesde

elle ne peut le faire qu’à condition d’inclure des média-


tions, des formes de mise à distance, que fournissent ici le
son sale, les interruptions et les accidents. S’il y a expres-
sion, elle ne peut se faire que de manière distanciée et,
surtout, teintée de cette nostalgie née de l’écart entre la
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mélodie et sa mutilation. Mais de ce contraste naît aussi,
du côté de l’auditeur, un mouvement inverse : puisqu’il
faut tendre l’oreille pour écouter la mélodie, inaccessible
à l’état pur, c’est que la naïveté se mérite.

110
Noise et nostalgie

OUVRAGES CITÉS /
POUR ALLER PLUS LOIN

• Theodor Wiesengrund Adorno, Le Caractère fétiche dans la


musique, Ed. Allia, 2001
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• Chris Atton, « Fan Discourse and the Construction of Noise
Music as a Genre », in Journal of Popular Music Studies, vol. 23,
nº3, 2011.
• Sarah Benhaïm, « L’expérimentation noise : en(  )quête de
liberté », in Tacet 2, L’expérimentation en questions, vol. 2, 2013.
• Ray Brassier, « Genre Is Obsolete », in Multitudes, vol. 1, nº28,
2007.
• Joanna Demers, Listening Through the Noise. The Aesthetics
of Experimental Electronic Music, Oxford University Press, 2010
• Agnès Gayraud, Dialectique de la pop, Ed. La Découverte,
2018.
• Catherine Guesde, Pauline Nadrigny, ‘ The Most Beautiful Ugly
Sound in the World ’ : à l’écoute de la noise, Musica Falsa, 2018
• Paul Hegarty, Noise/Music: A History, Bloomsbury, 2015.
• David Novak, Japanoise: Music at the Edge of Circulation,
Duke University Press, 2013
• Luigi Russolo, L’Art des bruits, manifeste futuriste, Éditions
Allia, 2016.
• « The Beauty of Noise. An interview with Masami Akita of
Merzbow by Chad Hensley », in Esoterra, consultable en ligne :
http://www.esoterra.org/merzbow.htm

ALBUMS CITÉS

• The Dead C, Patience, Da Da Bing!, 2010


• Pita, Get Out, Mego, 1999
• Secret Abuse, Violent Narcissus, Not Not Fun, 2008

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