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LE CENTRE POMPIDOU, UNE UTOPIE ÉPUISÉE ?

Histoire et perspectives

Geneviève Gallot

Gallimard | « Le Débat »

1998/1 n° 98 | pages 102 à 115


ISSN 0246-2346
ISBN 9782070751730
DOI 10.3917/deba.098.0102
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https://www.cairn.info/revue-le-debat-1998-1-page-102.htm
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Le Centre Pompidou,
une utopie épuisée ?
Histoire et perspectives

« C’est bien, mais ça va faire crier ! » Ainsi l’échiquier mondial des grandes institutions
s’exprimait le président Georges Pompidou culturelles ? Mettant à profit la fermeture du
après avoir vu la maquette du projet choisi — à Centre pour ouvrir la réflexion et le débat, nous
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l’unanimité moins une voix — par un jury inter- nous attacherons ici à ces quelques questions en
national pour la réalisation du Centre qui devait évoquant les différentes étapes de l’histoire du
porter son nom. Centre Pompidou et en nous appliquant, dans la
Et, en effet, cela fit crier ! Pendant de nom- mesure du possible, à discerner le vrai de la
breuses années, le Centre Pompidou suscita légende.
passion et colère, éloges et sarcasmes, espoirs
fous et désenchantements. Mais, aujourd’hui, le
tumulte s’est apaisé, le Centre n’est plus l’objet Le projet
de polémique et il affiche « fermé pour travaux »
dans une relative indifférence. À peine si l’on se
soucie réellement des transformations promises Le 11 décembre 1969, le président Georges
pour sa réouverture, le 1er janvier 2000… Le Pompidou proposait la construction sur le pla-
Centre se serait-il banalisé au point de gagner la teau Beaubourg d’« un centre culturel voué aux
sphère plate du consensus, si contraire à sa expressions artistiques contemporaines et à
nature première ? Aurait-il perdu ce caractère la lecture publique ». En octobre 1972, le
hautement emblématique qui, autrefois, forçait Président précisait ainsi son projet : « Je vou-
chacun à rêver son avenir ou fustiger son pré- drais passionnément que Paris possède un
sent ? Projet hier extraordinaire, le Centre ne centre culturel […] qui soit à la fois un musée et
saurait-il plus aujourd’hui se distinguer sur un centre de création, où les arts plastiques voi-

Ancien commissaire du gouvernement auprès du


Centre Georges-Pompidou et conseiller technique au cabi-
net de Jack Lang de 1990 à 1993, Geneviève Gallot est ins-
pecteur général au ministère de la Culture et enseigne l’art
contemporain.
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sinent avec la musique, le cinéma, les livres, la Pompidou que d’avoir accepté que son rêve prît
recherche audiovisuelle […]. La bibliothèque une forme aussi hardie. Porté par un climat
attirerait des milliers de lecteurs qui, du même intérieur bien spécifique, Beaubourg était aussi
coup, seraient mis en contact avec les arts… » une réponse aux pressions extérieures de
Georges Pompidou souhaitait ardemment que l’époque : « New York volait à Paris l’idée de
« les différentes formes d’art réagissent entre modernité 2. » En 1964, Rauschenberg avait
elles ». C’est le 2 février 1977 que le Centre reçu le grand prix de peinture de la Biennale de
Georges-Pompidou devait ouvrir ses portes au Venise. Paris perdait sa suprématie sur la scène
public, soit en réalité près de vingt années après artistique mondiale et de nombreux foyers de
que le Président eut commencé à en rêver 1. création voyaient le jour un peu partout en
Mais si le Centre résulte de l’indéfectible Europe. Une initiative d’envergure devait être
volonté de l’ancien Président, il est aussi le fruit prise pour aider la France à reconquérir son
des circonstances et des nécessités du moment. prestige international : le Centre Pompidou
Les responsables d’alors se trouvaient serait celle-là.
confrontés aux problèmes déjà anciens posés Le concours international d’architecture fut
par la Bibliothèque nationale et par le Musée lancé fin 1970 et jugé en juillet 1971. Le pro-
national d’Art moderne pour lesquels de nou- gramme, on l’a vu, extrêmement chargé, était
veaux bâtiments étaient devenus indispensables. celui d’une sorte de « Panthéon culturel », de
Il fut finalement décidé que le projet Beaubourg « Mecque de l’intelligence », comme on l’a dit à
permettrait de répondre à cette double l’époque 3. Sur les 681 projets présentés, le jury
exigence : on y construirait tout à la fois une présidé par Jean Prouvé choisit, par huit voix
bibliothèque et de nouveaux espaces pour le sur neuf, celui de deux jeunes architectes italien
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musée. S’ajouteraient bientôt un Institut de et anglais : Renzo Piano et Richard Rogers,
recherche musicale, sous l’inspiration de Pierre associés au bureau d’études anglais Ove Arup
Boulez, et la tête chercheuse du vénérable and Partners. Très jeunes, trente-trois et trente-
musée des Arts décoratifs, le Centre de création six ans, ces architectes étaient alors à peu près
industrielle créé en 1969. Ainsi s’explique le inconnus. Piano et Rogers proposaient une
projet que le président Pompidou avait annoncé grande machine urbaine au caractère résolu-
en 1972 et qui allait donner naissance au fameux ment antimonumental, provocateur, faite
mythe fondateur d’« interdisciplinarité » du d’« obéissance » au programme et de « désobéis-
Centre, nommée plus tard « pluridisciplinarité » sance » 4 aux traditions, désireuse d’offrir une
ou « multidisciplinarité ».
En ces années post-1968, l’air du temps por- 1. Le Centre fut inauguré par Valéry Giscard d’Estaing,
président de la République, Jacques Chirac, Premier
tait notre pays à la convivialité, à la désacralisa- ministre, et Françoise Giroud, secrétaire d’État à la Culture.
tion, au refus des dogmes et des contraintes. Le 2. Serge Guibault, Comment New York vola l’idée d’art
moderne, Nîmes, Éd. Jacqueline Chambon, 1992.
projet Beaubourg, projet éminemment officiel 3. André Fermigier, « À l’échelle du siècle », Le Monde,
puisque présidentiel, allait paradoxalement 1er février 1977.
4. Renzo Piano, in Du Plateau Beaubourg au Centre
illustrer ces nouvelles attentes et proposer des Georges-Pompidou, Éd. du Centre Georges-Pompidou,
solutions étonnamment audacieuses, et ce ne 1987, p. 11.
sera pas le moindre des mérites du président
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définition plus conviviale et plus ludique de la en cause d’une forme de « sociabilité guindée 7 ».
culture. Il fallait remplacer « l’intimidation des Par son caractère dynamique et libre, le Centre
musées par la curiosité », créer « la fête » grâce à devait produire une utopie sociale et culturelle
un « grand jouet urbain ». Pour répondre à cette fondée sur l’échange et la mobilité, la rencontre
vaste ambition, le parti architectural était fondé et le plaisir. Lieu festif, le Centre est rapidement
sur les principes de transparence et de flexibilité devenu pour chacun un objet familier. Certains
puisant ainsi à plusieurs sources : à celle du cou- évoquèrent à son propos l’image qu’ils jugeaient
rant constructiviste des années vingt ; à celles de dévalorisante d’une « usine à gaz » ou d’une
Mies Van der Rohe et de Le Corbusier ; à celle « raffinerie ». Loin de s’en offusquer, Renzo
de l’utopie rationaliste et techniciste. Il faut en Piano la revendique volontiers : « Les formes
ajouter une autre : celle de l’éphémère et de auxquelles nous nous étions référés ont été tout
la mobilité incarnée dans les années soixante par de suite reconnues, identifiées ; elles étaient
le groupe anglais Archigram, qui revendiquait familières, même si leur emploi pouvait paraître
les notions de métamorphose continue d’agen- déplacé 8. » L’usage de ce vocabulaire industriel
cement évolutif. Ainsi Beaubourg serait « l’unité relativement simple n’excluait pas le recours à
réalisée des deux utopies architecturales des des solutions techniques sophistiquées inspi-
années 1960 5 », l’une, fonctionnaliste, rigou- rées, par exemple, des expériences faites dans
reuse et systématique, et l’autre, aléatoire, les domaines de la construction des plates-
ludique et instantanée. D’emblée, le Centre est formes pétrolières ou de l’industrie nucléaire.
sous tensions. Pour les résoudre, Piano et Le temps n’a malheureusement pas toujours
Rogers proposent une spatialité ouverte et un confirmé la pertinence des choix techniques
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mouvement permanent. « Au cœur donc de effectués tels que la conception énergétique,
Paris, un cœur… », dira Francis Ponge, « un trop dispendieuse, et a révélé de nombreuses
muscle, une pompe aspirante et refoulante, aux malfaçons.
battements ininterrompus, animant sans repos, Un dernier aspect important du bâtiment
régulièrement, moins régulièrement parfois, tenait au lien créé avec la ville. Les architectes
aux moments d’émotion ou de fièvre, un corps souhaitaient une machine ouverte sur le quar-
en forme d’hexagone et, plus lointainement, tier. Pour cela, un espace vide avait été prévu
d’autres corps auxquels, comme on dit, ce corps devant le Centre avec la création de la place
touche… et, plus lointainement encore, de Georges-Pompidou imaginée sur le modèle des
proche en proche 6… » Le Centre est d’abord un places de Sienne ou de Florence, ainsi que des
corps vivant. rues piétonnes. Ces espaces libres, offerts à l’ap-
Le bâtiment de Piano et Rogers avec son propriation spontanée de tous, devaient per-
architecture agressive, ses énormes rotules mettre à l’édifice de s’ancrer dans le tissu urbain
d’acier, ses couleurs vives traduisant une subtile
répartition des fonctions — le bleu pour la ven- 5. Jean Lanxerois, L’Utopie Beaubourg vingt ans après,
tilation (air), le jaune pour l’électricité (éner- Éd. B.P.I.-Centre Georges-Pompidou, 1996, p. 54.
6. Francis Ponge, « L’écrit Beaubourg », Le Magazine
gie), le rouge pour la circulation (ascenseurs), le du Centre, n° spécial, 1977-1997, 20 ans, janvier 1997.
vert pour l’eau — était foncièrement optimiste. 7. Richard Rogers, in Du Plateau Beaubourg au Centre
Georges-Pompidou, op. cit., p. 15.
Le Centre participait de ce courant de remise 8. Renzo Piano, art. cité, p. 16.
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et créer une animation extérieure symétrique à de football. Le coût de la construction a été de


celle qui se déployait à l’intérieur de la grande 900 millions de francs (un Concorde revenait à
ossature vouée à des évolutions et des renou- l’époque à 350 millions) et le bugdet de fonc-
vellements permanents. On touche ici l’un des tionnement en 1977 s’est élevé à 130 millions
nœuds principaux du fonctionnement du (le budget de l’Opéra était alors de 143 mil-
Centre : machine euphorique, faite de tension lions). Comment le Centre se présente-t-il au-
et de compression, machine ouverte, conviviale jourd’hui ? Le vaisseau a beaucoup vieilli et
et familière, faite de mouvement et de circula- s’est considérablement alourdi. Un exemple
tion, « le Centre Pompidou n’est pas un bâti- éloquent en est fourni par l’organe le plus pres-
ment silencieux 9 ». On perçoit mieux, dès lors, tigieux du Centre, le Musée national d’Art
en quoi l’architecture du Centre, pour géniale moderne (M.N.A.M.), dont les difficultés ré-
qu’elle fût, et les missions de l’institution currentes de croissance n’ont cessé de peser sur
entrent en résonance conflictuelle : les livres et la vie d’ensemble de l’établissement.
les arts plastiques requièrent, aussi, des espaces En 1977, les collections du M.N.A.M. com-
de quiétude propices au recueillement, à la prenaient environ 8 000 œuvres, près de 1 000
méditation et à l’émotion. étaient exposées à l’ouverture et 800 autres
Le Centre Georges-Pompidou porte ainsi, consultables à la demande dans des réserves 10.
dès l’origine, la marque de ses contradictions. Il En 1997, le fonds totalise 40 000 œuvres et
connaît pourtant un immense succès populaire moins de 3 % des collections sont montrés par
et devient rapidement l’édifice culturel français rotation au Centre Pompidou. La consulta-
le plus visité. Cinq à sept mille personnes par tion de certaines pièces dans les réserves n’est
jour étaient attendues au moment de l’ouver- plus possible. Dans de telles conditions, on
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ture. Il en vient depuis vingt ans environ vingt- comprend aisément que la vie du Musée se soit
deux mille, soit plus de sept millions par an et, d’abord traduite par une lutte acharnée pour
au total, cent quarante-cinq millions de per- des mètres carrés supplémentaires, lutte d’au-
sonnes ont visité le Centre depuis 1977. Ces tant plus impérative que la collection se hissait
chiffres confèrent au projet, s’il en était besoin, bientôt au tout premier rang, à l’égal de celle du
sa pleine dimension d’invention du siècle. Museum of Modern Art de New York.
Après le travail entrepris par Jean Cassou,
directeur du Musée national d’Art moderne à
D’hier à aujourd’hui l’époque où celui-ci était encore installé au
palais de Tokyo, Pontus Hulten sut réaliser le
transfert du Musée au Centre Pompidou contre
Le chantier de 100 000 m2 ouvert en 1972 vents et marées. Il avait été décidé de couper les
est achevé cinq ans plus tard. On connaît le liens du Musée national d’Art moderne avec la
résultat : une construction de 8 étages, dont 3 Direction des musées de France, ce qui ne man-
souterrains, représentant 42 m de haut, 166 m
de long et 60 m de large. Les 5 plateaux destinés 9. Richard Rogers, art. cité, p. 35.
aux activités sont tous identiques et chacun 10. Les chiffres varient sur ce point. Certains indiquent
600 œuvres présentées à l’ouverture du Musée au Centre
d’eux (7 500 m2) est équivalent à deux terrains Pompidou, d’autres 1 100.
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qua pas de faire grincer de nombreuses dents, tandis que Renzo Piano installe la salle de
mais donna au Musée l’autonomie indispen- cinéma Garance, la librairie, et restructure les
sable à une politique courageuse d’acquisitions galeries contemporaines du rez-de-chaussée en
que les conservateurs des musées de l’époque, leur conservant souplesse et malléabilité. Pour
très peu ouverts à l’art contemporain, n’au- Piano et Rogers, une telle évolution est légitime
raient pas d’eux-mêmes engagée. Pontus Hul- et confirme la grande « tolérance » du bâtiment
ten imprima au Musée une optique résolument conçu pour répondre au grand rêve de mobilité
internationale et contemporaine, en s’inspirant et « aux demandes des différents clients qui se
de l’expérience du Moderna Museet qu’il avait succèdent ». Pour autant, le problème de l’en-
créé à Stockholm. Le fonds s’enrichit de nom- gorgement des espaces du Musée reste entier.
breuses œuvres dadaïstes, surréalistes, de l’ac- Douze ans plus tard, il s’est encore aggravé. Le
tion painting ou encore du pop’art. Par la suite, Musée sera rénové et installé sur la totalité des
la politique d’acquisition se poursuivit avec la troisième et quatrième étages du bâtiment,
même exigence et la même qualité. Dominique occupera demain près de 14 000 m2 au lieu des
Bozo en particulier, par deux fois directeur du 10 000 m2 actuels, et les salles d’exposition tem-
Musée avant d’être président du Centre, consti- poraires seront agrandies. Nul doute que les
tua des ensembles d’artistes remarquables. conditions de présentation des collections s’en
Nombreuses aussi furent les donations et trouveront améliorées et que, en particulier, la
dations (Matisse, Giacometti, Braque, Kandin- photographie, à l’évidence aujourd’hui confinée
sky, Dubuffet…) que ce grand conservateur de à un rôle de parente pauvre, ainsi que l’architec-
musée suscita ou facilita. Avec lui, également, ture et le design en bénéficieront. Mais l’avenir
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les collections se diversifièrent et s’ouvrirent du Musée s’en trouvera-t-il pour autant assuré ?
pleinement à l’architecture et au design jus- Rien n’est moins sûr. Quiconque observe la
qu’alors négligés. Dans le même temps, les situation sait, en effet, que seule une réflexion
grandes expositions assuraient au Centre un sur les missions du Musée pourrait le garantir.
immense succès populaire : « Paris-New York » Au-delà des difficultés liées au poids crois-
(1977), « Paris-Berlin » (1978), « Paris-Mos- sant des collections, il en est une autre qui se fait
cou » (1979), « Paris-Paris » (1981), « Vienne, désormais de plus en vive : celle relative à la
1880-1938 », « Les Immatériaux » (1985)… Le place donnée à la création et aux artistes
public en plébiscitait le principe : l’immersion vivants. Les premières années, le Centre avait
protéiforme dans une tranche de notre histoire favorisé des expériences originales : des ate-
artistique. liers, des bourses accordées à des artistes en vue
L’année 1985 marque une nouvelle étape. d’une exposition au Centre, autant d’initiatives
On sort de l’idéologie anti-musée et on décide qui semblent désormais oubliées. Il y avait éga-
de transformer les espaces des collections en un lement, hier, le rôle d’aiguillon critique joué par
dispositif plus classique, plus apte à mettre en le Centre de création industrielle (C.C.I.) qui,
valeur les figures majeures de la modernité. À s’il était loin d’être en toutes circonstances
l’instigation de Dominique Bozo et avec le sou- convaincant, représentait au moins un foyer
tien de Jack Lang, ministre de la Culture, Gae d’effervescence décapante. Le C.C.I. se voulait
Aulenti procède avec talent à cet aménagement à la fois centre de design et laboratoire de la
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contestation, et ambitionnait de couvrir tous les à accueillir convenablement les 12 000 per-
produits de l’activité humaine dans leurs rela- sonnes qui se pressent quotidiennement à ses
tions avec la société, qu’il s’agisse de la brosse à portes. Les équipements se sont beaucoup
reluire, de l’aménagement des banlieues ou de dégradés, le personnel s’est démotivé, l’am-
l’architecture. François Barré, l’un de ses cofon- biance de la Bibliothèque est devenue grise, et
dateurs et futur président du Centre Pompidou, ses abords carrément sinistres. Depuis son
rêvait que le C.C.I. devienne un grand « rallye « Café viennois » réalisé dans le cadre de l’ex-
Saint-Germain-des-Prés-Billancourt 11 » . Évi- position « Vienne », la participation de la B.P.I.
demment, la formule était trop hâtive pour aux activités du Centre est plus que réduite. La
constituer un véritable programme intellectuel. demande des lecteurs pourtant ne se dément pas.
Le C.C.I. ne trouva jamais son identité au Composé à plus de 60 % d’étudiants ou
Centre, ses équipes vieillirent prématurément et d’élèves, le public n’a évidemment guère le
la fusion avec le Musée décidée en 1992 par choix tant le réseau des bibliothèques universi-
Dominique Bozo était probablement la seule taires en Île-de-France demeure scandaleuse-
solution pour éviter la dérive complète de cet ment insuffisant à la fois en termes d’espaces et
outil. de ressources documentaires. À titre d’exemple,
Si le Musée est l’organisme le plus presti- on notera que les dépenses documentaires de
gieux du Centre, la Bibliothèque publique d’in- l’université de Philadelphie atteignent 2 500 F
formation (B.P.I.) en a toujours été, et en est par étudiant contre moins de 300 F en France !
certainement aujourd’hui, le plus populaire En outre, la nouvelle Bibliothèque nationale de
avec environ 50 % des visiteurs du Centre. France, située dans un quartier aujourd’hui peu
Inspirée des modèles anglo-saxons, la B.P.I. attirant et encore insuffisamment aménagé, est
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devait permettre à la France de combler un payante. Elle ne souhaite pas revenir sur sa
siècle de retard en matière de lecture publique. vocation initiale « d’étude et de recherche » ni
Jean-Pierre Séguin, son initiateur et premier s’ouvrir plus largement à un public étudiant. Il
directeur, voulut qu’elle soit une bibliothèque n’est pas sûr d’ailleurs que, même dans
d’information encyclopédique, d’accès libre et quelques années, celui-ci serait au rendez-vous
gratuite. Pari tenu. On y trouve des informa- tant le génie du lieu propre au Centre
tions aussi bien sur la vie sexuelle des mouches Pompidou est essentiel à sa fréquentation. La
que sur la fabrication d’un accélérateur de par- conséquence de cette situation est ubuesque, ou
ticules, sur Kant ou sur l’actualité en Algérie. plutôt tragique : d’un côté, un établissement
Également, des bandes dessinées pour les sur-saturé, en essoufflement permanent, de
enfants et une médiathèque de langues où 129 l’autre, un établissement en quête de lecteurs,
langues et dialectes peuvent être appris, du accueillant en octobre 1997 non pas 4 000 per-
bambara au picard. La B.P.I. offre aujourd’hui sonnes comme cela était prévu mais 2 000, pour
500 000 documents dont 300 000 volumes, un coût d’un milliard de francs par an pour la
3 400 périodiques, 10 000 disques, 3 000 films, collectivité nationale !
et autres C.D.-Rom et vidéodisques sur mul-
tiples écrans. Le public afflue, et c’est bien là le 11. François Barré, in Le Nouvel Observateur, 24 janvier
problème essentiel de la Bibliothèque : parvenir 1977.
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En 1990, devant la saturation du M.N.A.M. l’I.R.C.A.M. a atteint son but initial : être le
et l’asphyxie de la B.P.I., Jacques Toubon, alors carrefour exigeant de la création musicale et de
député de Paris, tente un coup de force : il la recherche scientifique. Pour Pierre Boulez,
plaide solennellement pour extraire la B.P.I. du son fondateur, il s’agissait d’« élargir le matériau
Centre et la transférer « dans les bâtiments de la sonore et le vocabulaire du musicien 13 » en met-
future Bibliothèque de France 12 » en cours de tant à sa disposition les formidables possibilités
construction. Aussitôt les réactions se multi- offertes par la technologie moderne. Les scienti-
plient, à commencer par celle de Mme Georges fiques et les industriels ont, eux aussi, progressi-
Pompidou qui s’indigne contre un projet qui vement compris quel pouvait être le bénéfice
serait contraire à la volonté de son mari disparu. d’une collaboration avec l’I.R.C.A.M. et l’in-
Cette idée, qui n’était bonne ni pour le Centre teraction, constamment réactualisée, entre
ni pour les lecteurs, sera rapidement abandon- scientifiques et musiciens constitue plus que
née. En revanche, de nouvelles relations entre la jamais la ligne directrice de l’I.R.C.A.M. Ces-
Bibliothèque de France et la B.P.I. paraissent sion de brevets, vente de logiciels, formations
plus que jamais souhaitables, mais toujours de doctorales, ateliers, académie d’été, concerts,
l’ordre des vœux pieux. Modèle admiré dans le autant d’activités que l’Institut développe avec
monde, mais aujourd’hui terriblement vieilli, la succès. Ou la réalisation, par synthèse, de la voix
B.P.I. sera modernisée et redéployée sur une de Farinelli pour le film de Gérard Corbiau. Ou
surface globale identique. Et si aucune solution encore la collaboration avec Renault-P.S.A.
ne semble prévue pour éviter aux lecteurs leurs pour dégager les critères d’un confort acous-
trois heures d’attente quotidienne, il est au tique optimal dans les véhicules automobiles.
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moins décidé de rendre cette attente moins La grande faiblesse de l’I.R.C.A.M. réside dans
gênante « pour les autres » en créant au Centre son caractère confidentiel, malgré l’ouverture
une entrée spécifique pour les lecteurs de la récente de sa médiathèque et dans son insuffi-
Bibliothèque… sante participation à l’activité générale du
L’esprit de création, on l’a dit, n’irrigue pas Centre. Volonté d’autonomie de la part de
suffisamment les activités du Musée, et la l’I.R.C.A.M., évidemment facilitée par son sta-
Bibliothèque est sous respiration artificielle tut d’association loi 1901, distinct de celui du
continue. Où donc trouve-t-on aujourd’hui au Centre ? Peut-être. Mais l’I.R.C.A.M. n’y est-il
Centre le plus sûrement invention, expérimen- pas naturellement conduit dès l’instant que la
tation, découverte, avant-garde ? Sans aucun programmation du Centre ne prévoit pas expli-
doute à l’Institut de recherche et de coordina- citement son apport et que le Centre, au
tion acoustique/musique (I.R.C.A.M.). Mais contraire de l’I.R.C.A.M., perd depuis plu-
l’I.R.C.A.M. demeure un lieu secret. D’abord sieurs années vitalité, lisibilité et rayonnement ?
exclusivement enfoui à quatorze mètres de pro- D’autres activités se sont développées au
fondeur et ne disposant que depuis peu d’exten- Centre depuis son ouverture : le spectacle vi-
sions à l’air libre avec une tour aménagée par
Renzo Piano, l’I.R.C.A.M. reste réservé aux 12. Jacques Toubon, « Sauver le Centre Pompidou », Le
chercheurs, aux spécialistes et aux amateurs Monde, 28 juin 1990.
13. Pierre Boulez, in Figaro-Beaubourg, Dixième
très éclairés. Il faut, toutefois, admettre que Anniversaire, 4 février 1987.
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vant, le cinéma avec ses grands cycles, les confé- puis par des pratiques quotidiennes fondées sur
rences, les colloques, les activités pédagogiques le repliement. Les départements se sont pro-
et, avec un succès notable, les éditions. Souvent gressivement balkanisés, les personnels, voués
de qualité, mais trop peu coordonnées et sou- au départ à des carrières courtes et à un renou-
vent improvisées, toutes ces initiatives ont fina- vellement régulier, se sont bureaucratisés ou
lement renforcé l’image de multitude brouillée parfois enfermés dans des attitudes strictement
qu’offrait le Centre ces temps derniers. Il faut corporatistes. Toute la structure, matérielle et
dire aussi que cette belle institution n’a pas tou- humaine, s’est ankylosée. Se sont alors trouvées
jours été pilotée par des hommes et des femmes affectées les autres grandes utopies fondatrices,
d’exigence. Le laisser-faire l’a souvent emporté celles de l’incitation à la création et de la pluri-
sur les besoins de rénovation, les petits conforts disciplinarité.
individuels sur l’intérêt général, et l’absence de L’objectif du Centre est de « favoriser la
décision sur l’arbitrage des conflits difficiles. création des œuvres de l’art et de l’esprit, [de
contribuer] à l’enrichissement du patrimoine
culturel de la nation, à l’information et à la for-
Une utopie épuisée ? mation du public, à la diffusion artistique et à la
communication sociale… », est-il indiqué dans
le texte de loi du 3 janvier 1975 portant création
Aujourd’hui, le Centre est en mal d’identité. du Centre national d’art et de culture Georges-
Les grandes utopies fondatrices se sont progres- Pompidou. Pourtant, les activités du Centre
sivement décomposées et, en premier lieu, penchent aujourd’hui irrésistiblement du côté
celles qui étaient liées au bâtiment. La grande du patrimoine. La création, lorsqu’elle se mani-
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machine futuriste s’est rouillée, la transparence feste, n’est guère audible — c’est le cas de
s’est opacifiée et la flexibilité rigidifiée. On sait l’I.R.C.A.M. — ou visible — c’est le cas de la
que le projet initial avait dû être modifié par les vidéo — dont les productions souvent excel-
architectes pour des raisons de sécurité : le rez- lentes sont trop méconnues. Par ailleurs,
de-chaussée de l’édifice qui devait être en les grandes manifestations pluridisciplinaires
grande partie ouvert à l’air libre, entre la place s’étant interrompues depuis 1985 avec, d’une
et la rue du Renard, avait été finalement clos. Et part, « Vienne » et, d’autre part, « Les Imma-
un système de mezzanines mobiles, accroché tériaux » qui était une réflexion sur la modernité
aux poutres maîtresses du bâtiment, supprimé. proposée par Jean-François Lyotard, l’utopie de
D’autres espaces inoccupés furent récupérés la pluridisciplinarité paraît mise à mal. Alimen-
par les pompiers, et les onze entrées prévues tant aujourd’hui toutes les nostalgies, invoquée
pour le public abandonnées. Enfin, plus récem- comme un slogan mythique plus que comme un
ment, dans le hall d’accueil du Centre, le véritable principe productif, cette pluridiscipli-
Forum, conçu pour être le lieu de toutes les narité renvoie à un âge d’or que chacun s’effor-
improvisations, a été comblé. La souplesse et la cerait de retrouver. En vérité, la pluridisciplina-
mobilité se sont ainsi grandement réduites et le rité demeure un rêve largement inaccompli.
cloisonnement s’est développé. D’abord, par la Depuis son ouverture, le Centre a surtout agi
définition de nouveaux territoires physiques, comme un ensemble d’institutions juxtaposées
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dont l’histoire, les besoins et les buts étaient sources et convertit ses contradictions en un
hétérogènes et dont les logiques à l’œuvre, principe actif de production interne. Les croise-
même autour de projets fédérateurs comme les ments entre les arts contemporains, qui con-
grandes expositions citées précédemment, res- naissent un regain de vitalité, trouvent aujour-
taient spécialisées. La pluridisciplinarité offerte d’hui leur expression la plus neuve en dehors du
par le Centre a ainsi plus été le produit d’un col- Centre Pompidou. Ainsi, le festival de Château-
lage d’expressions relatives à plusieurs formes vallon accueille en 1994 une superbe chorégra-
artistiques que celui d’une dynamique réci- phie de Trisha Brown réalisée en collaboration
proque d’activités ou d’un réel dialogue entre avec Robert Rauschenberg. La Ferme du Buis-
les arts. En son temps, par exemple, Pierre son, en région parisienne, invite jeunes choré-
Boulez avait eu un passionnant projet autour graphes et plasticiens à travailler ensemble. La
d’Alban Berg et de Piet Mondrian. Mais les Grande Halle de La Villette multiplie les ren-
résistances institutionnelles ont été les plus contres entre plasticiens, chorégraphes, met-
fortes et le projet n’a pu voir le jour. Les mani- teurs en scène et artistes du cirque. L’inno-
festations et les publics sont restés fragmentés et vation artistique n’est pas morte en France,
l’idée généreuse selon laquelle le visiteur du mais elle doit revenir au Centre Pompidou.
Musée serait enclin à pousser les portes de la L’art, ce « métier de pointe » comme le disait
Bibliothèque et le spectateur de la Cinéma- René Char à propos de la poésie, est audace et
thèque celles de l’I.R.C.A.M. grâce aux liens liberté. C’est cette multiple liberté que nous
tissés entre ces institutions est demeurée, en souhaiterions voir revivre demain au Centre.
grande partie, lettre morte. Le Centre a l’obligation d’évoluer s’il veut
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Pour autant faut-il, au nom de ces réalisa- sortir de son hypertrophie paralysante. Son
tions passées décevantes, condamner le principe excès d’activités fait de lui un système « qui se
de la pluridisciplinarité et déclarer vaine ou développe d’une façon incontrôlable, sans égard
obsolète toute ambition réellement plurielle ? à sa propre définition 16 » et qui est guetté par
Nous ne le pensons pas. « L’unité de l’art « l’implosion » 17, ainsi que le disait Jean
moderne, son émancipation, l’idée de la pleine Baudrillard. Le Centre doit donc procéder par
liberté est saisie au mieux dans cette phrase : les redéfinition, voire par renoncements. Faut-il
extrêmes se touchent 14 », dit Adorno. Et plus loin envisager le départ du Musée ? Cette solution,
il ajoute : « C’est en ce qui les oppose que les maintes fois avancée, est certainement aujour-
arts passent l’un dans l’autre 15. » C’est en exa- d’hui irréaliste compte tenu des charges très
cerbant leurs différences, voire leurs contradic- lourdes qui pèsent sur l’État à Paris après la réa-
tions, que les arts peuvent se rencontrer. C’est lisation du musée d’Orsay, du Grand Louvre,
ce que le Centre n’a pas réussi à faire. C’est de l’Opéra Bastille, de la Cité de la musique et
pourquoi l’on a finalement assisté à un effon- de la Bibliothèque nationale de France. En
drement de ses aspirations initiales, bien plus
qu’à un « crépitement », pour continuer à évo- 14. Theodor W. Adorno, Sur quelques relations entre pein-
ture et musique, Paris, Éd. La Caserne, 1995, p. 29.
quer Adorno, de ses tensions fondatrices. Il 15. Ibid., p. 32.
reste que le Centre peut parvenir dans l’avenir à 16. Jean Baudrillard, La Transparence du mal, Paris,
Galilée, 1990.
inventer, s’il tire pleinement parti de ses res- 17. Id., Libération, 31 janvier 1978.
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outre, n’est-il pas logique d’accueillir la grande « La rénovation physique doit s’accompagner
collection nationale d’art du XXe siècle dans un d’une refondation culturelle », déclarait le prési-
édifice hautement caractéristique de l’architec- dent du Centre, Jean-Jacques Aillagon, au
ture de ce siècle ? Est-ce alors une partie seule- moment de la fermeture de l’institution pour
ment de la collection qu’il faudrait déplacer en travaux. Il entend revenir à sa « mythologie pri-
dehors du Centre et, par exemple, les pièces les mitive » et, comme Michel de Certeau en 1984,
plus contemporaines depuis les années soixante il pourrait affirmer que « le Centre est en crise
ou soixante-dix qui exigent de grands espaces parce qu’il n’est pas assez fidèle au projet d’ori-
pour se déployer ? Mais ne serait-il pas dom- gine ». Une refondation culturelle s’élabore
mage d’exclure du Centre les éléments les plus donc, notamment en ce qui concerne la « pluri-
vivaces de son fonds, de couper les artistes disciplinarité » ou la « pluridépartementalité ».
actuels de leurs racines et de faire définitive- On avait pu regretter qu’en dépit de la fusion du
ment du « complexe Beaubourg » un conserva- M.N.A.M. et du C.C.I. l’exposition « Made in
toire et non plus un laboratoire ? C’est alors la France » (1996) présentât le design et l’architec-
quadrature du Centre, surtout si l’on refuse la ture dans un espace distinct et réduit ; que l’ex-
perspective d’un déplacement de la B.P.I. au position « Fernand Léger » (1997), magnifique
motif, légitime, que celle-ci assure pour une au demeurant, ne fît que peu de place à l’archi-
grande part le succès populaire du Centre et le tecture, au cinéma et au ballet auxquels Léger,
préserve d’une organisation monocorde. Il n’y cet inventeur multiple de la modernité, colla-
aurait donc point de salut pour le Centre bora pourtant en maintes occasions. Avec
Georges-Pompidou : toute tentative pour l’allé- « L’Art de l’ingénieur, constructeur, entrepre-
ger reviendrait à le condamner. Mais laisser en neur, inventeur » (1997), et « Opera Bianca »
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l’état ses missions et son fonctionnement le con- (1997), voici de nouveaux signes et peut-être
damnerait à court terme tout aussi sûrement. d’heureux présages. La première de ces manifes-
Comment agir ? Comment valoriser les col- tations, très spectaculaire, démontrait à travers les
lections et l’accueil du public et, en même réalisations des ingénieurs depuis le milieu du
temps, la recherche et l’innovation dans un XIXe siècle que le génie constructif est bien
établissement qui resterait lui-même ? Sempi- un « art ». La seconde, « Opera Bianca », était
ternelles questions auxquelles on apporte sem- une pièce « multimédia » unissant arts plas-
piternellement les mêmes réponses : par une tiques, musique et littérature selon un principe
politique globale et ambitieuse, par la définition séduisant. Les défaillances techniques ont mal-
d’un nouveau projet culturel pluriel, par la mise heureusement largement gâché la réalisation du
en place de nouveaux outils juridiques et admi- projet.
nistratifs, en bref, par la volonté de faire entrer
véritablement le Centre dans une nouvelle
phase de son histoire… Un tel rebond, on l’a vu, Et demain ?
est aujourd’hui vital. Tout le monde s’accorde
depuis fort longtemps sur ces formules. Il est
désormais essentiel qu’elles deviennent demain Le Centre, on l’a vu, ne jouit plus du pres-
réalité. tige national ni international qui était le sien
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hier. « Le Centre ne compte pas sur le terrain de la création expérimentale. Quant à la program-
l’art aujourd’hui 18 », disait, il y a peu, Catherine mation des années 2000, elle semble s’ouvrir à
Millet. Les artistes et les intellectuels l’ont en des problématiques et à des modalités de fonc-
grande partie déserté et parfois, comme tionnement prometteuses à la condition, bien
Soulages, avouent même avoir été « mal trai- entendu, que l’« étonnement » artistique, au
tés 19 » par tel ou tel conservateur du M.N.A.M. sens où l’entendait Cocteau, soit bien au ren-
En outre, le Centre ne s’attache pas toujours à dez-vous. Les grandes expositions temporaires
défendre dans ses propres murs les artistes fran- concerneront des artistes ou mouvements artis-
çais vivants et se laisse trop souvent imposer des tiques majeurs, également des thèmes de so-
expositions par des musées étrangers. Du coup, ciété, et ne relèveront plus exclusivement du
il ne représente pas cette puissante chambre Musée, mais aussi de la Bibliothèque ou de
d’écho que l’on attendait pour les créateurs l’I.R.C.A.M. C’est là une initiative bien venue
d’aujourd’hui. En perte de sympathie artistique qui renvoie définitivement à l’oubli l’absurde
et d’autorité esthétique, le Centre ne fait plus réaction d’une ancienne responsable du
« sensation », et c’est le rayonnement tout entier Centre : « La B.P.I. n’aura pas le cinquième
de notre politique culturelle qui s’en ressent. étage parce qu’elle ne l’a jamais eu ! »
Les États-Unis, la Grande-Bretagne ou l’Alle- Une réorganisation du fonctionnement
magne en tirent profit, pour leurs artistes. interne du Centre est également décidée ainsi
Mais, précisément, le Centre entre en « ré- qu’une réforme de ses statuts. Le Musée sera
novation » et en « refondation ». Une importante doté de deux pôles clairement distincts, d’une
campagne de travaux (440 millions de F) part les collections, d’autre part l’action
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confiée à Renzo Piano et à Jean-François Bodin contemporaine. Le département du Dévelop-
devrait permettre de redonner au bâtiment tout pement culturel sera rebaptisé « Centre de cul-
son éclat et de mieux distribuer ses espaces. ture moderne et contemporaine » et assorti de
L’administration installée en dehors du bâti- compétences élargies au spectacle vivant et ci-
ment, la Bibliothèque réaménagée, le Musée et nématographique, et aux phénomènes de la
les salles d’expositions agrandis, les salles de société contemporaine. Une réforme des statuts
spectacles et de conférences, hors la salle Ga- du Centre est par ailleurs en cours de prépara-
rance, regroupées au sous-sol, le Forum restruc- tion, et une nouvelle loi modifiant la loi fonda-
turé, les sols et certains mobiliers refaits…, trice de 1975 devrait être soumise au Parlement
autant d’améliorations indispensables que ce dans les prochains mois. Les modifications
chantier réalisera. Une programmation « hors apportées par les nouveaux textes (loi et décret
les murs » très fournie fera vivre le Centre dans afférent) porteraient essentiellement sur deux
plusieurs lieux parisiens, dans de nombreuses points 20 : d’abord, la création d’un conseil d’ad-
villes françaises et étrangères. En outre, avec sa
réouverture, le Centre devrait annexer les
espaces d’une ancienne grande surface com- 18. Jean Lauxerois, L’Utopie Beaubourg, op. cit., p. 104.
19. Ibid., p. 104.
merciale (As. Eco) situés dans le quartier de 20. Une autre modification est envisagée par certains :
l’Horloge et aujourd’hui provisoirement utilisés faire nommer le directeur du musée par le président du
Centre et non plus par le ministre. Cette proposition, peu
par la B.P.I., afin de donner toutes ses chances à raisonnable, ne semble pas devoir être retenue.
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ministration, faisant ainsi entrer le Centre dans dant trente ans ses œuvres au nouveau musée de
le droit commun des établissements publics, Bilbao pour lequel Franck Gehry a conçu une
avec, de manière concomitante, la suppression architecture prodigieuse. Il renforce ainsi à bon
du Conseil d’orientation, du Conseil de direc- compte son prestige déjà considérable. Le
tion et du Conseil artistique, trois instances Musée national d’Art moderne aurait pu tout
devenues au fil du temps tout à fait inopé- aussi bien être cette puissance « prêteuse » s’il
rantes ; ensuite, le mandat, renouvelable, du l’avait voulu, là ou ailleurs. Le voudrait-il dans
président serait porté de trois à cinq ans. Si la le futur ? Il faut l’espérer. De même, quelle sera
première mesure paraît pleinement justifiée, la la politique d’acquisition du Musée ? Quelle
seconde, en revanche, laisse perplexe. Les aire géographique sera concernée ? L’« art intel-
besoins particuliers d’un établissement enga- lectuel » sera-t-il, comme hier, plus favorisé que
geant sa programmation deux ou trois ans à l’art « spontané » 23 ? Le Centre, on l’a dit, ne
l’avance ? Une disposition faisant exception au joue pas son rôle pour faire connaître et aimer
droit commun des établissements publics, mais les artistes français contemporains. Les hono-
déjà prise pour l’Opéra et les théâtres natio- rera-t-il demain afin que nos voisins européens
naux ? La nécessité de stabiliser le Centre qui a et américains se sentent enclins à les honorer à
vu dans le passé ses responsables trop rapide- leur tour ? Contribuera-t-il à faire cesser cette
ment se succéder 21 ? Sans doute. Mais il est cer- étrange « exception » des arts plastiques con-
tain, aussi, que cinq ans peuvent être trop longs temporains pour imposer, aussi, comme dans le
en cas d’inertie ou de dérive. Les autorités de cinéma, l’art né en France ? Autant d’interroga-
l’État doivent donc pouvoir disposer de toute la tions qui appellent des éclaircissements, des
liberté nécessaire pour évaluer l’action conduite prises de position, des engagements. On ne sait
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à rythme raisonnable et, partant, pour sanction- pas, par ailleurs, si la gratuité d’accès au Centre
ner ou renouveler leur confiance. et à la B.P.I. sera maintenue. Ce qui encourage,
Tous ces projets, qui méritent en eux-mêmes bien évidemment, toutes les supputations et
d’être salués, suffiront-ils à faire du Centre toutes les inquiétudes.
l’institution de référence que nous souhaitons Ces incertitudes ne masquent pas, en outre,
tous ? « Il y a un virus dans le système », disait que deux décisions fortes pouvaient être atten-
Margit Rowell lorsqu’elle était conservateur au dues ou, du moins, espérées à l’occasion des
M.N.A.M. Le « virus » sera-t-il demain définiti- changements en cours : l’intégration de la B.P.I.
vement expulsé ? On n’oserait l’affirmer car de dans l’établissement public du Centre Pom-
nombreuses questions demeurent en suspens. pidou et la réforme du statut de l’ensemble du
S’agissant, par exemple, du Musée, la politique personnel. Elles ne sont ni prévues ni annon-
« hors les murs », si dynamique pendant la
période des travaux, fera-t-elle ensuite partie 21. Le M.N.A.M. a vu six directeurs en vingt ans alors
qu’entre 1945 et 1990 le M.O.M.A. de New York et le
des missions constituantes du Musée ? Les col- Stedelijk d’Amsterdam n’ont connu que trois responsables
laborations (expositions, dépôts, acquisitions chacun.
22. L’ensemble des photogrammes de Moholy-Nagy
communes 22…) avec les musées français et ont ainsi été acquis en 1995 conjointement par le M.N.A.M.
étrangers seront-elles amplifiées ? Le musée et le musée d’Essen.
23. Alfred Pacquement, in Figaro-Beaubourg, Dixième
Guggenheim « prête » (c’est-à-dire loue) pen- Anniversaire, 4 février 1987.
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cées. Et pourtant, le problème essentiel du il serait désolant de ne pas profiter des « rénova-
Centre réside aujourd’hui dans le fait qu’il n’a tions » et « refondations » entreprises pour ne
pas su harmoniser ni pacifier sa structuration pas apporter une plus grande cohésion à l’éta-
interne. L’empilement des statuts et des ins- blissement. Depuis l’origine, la Bibliothèque
tances de décision rend l’établissement aujour- entretient des relations tendues avec les autres
d’hui ingérable, improductif, perpétuellement composantes du Centre en raison, principale-
déchiré par des guerres intestines, stériles, para- ment, d’un lancinant « complexe d’infériorité »
lysantes ; les responsables s’y épuisent, les per- qui n’a aucune raison de se dissiper demain si
sonnels en souffrent et l’établissement s’y dis- les données ne sont pas changées. Elle vit mal
sout. La création d’un Conseil d’administration l’attitude des conservateurs du Musée qui, par-
pour l’établissement public du Centre Pom- fois malgré eux, accréditent l’idée qu’ils seraient
pidou ne changera rien au fait que les deux aux prises avec la Beauté et l’Esprit tandis que
« organismes associés », la Bibliothèque et les bibliothécaires côtoieraient la masse et la
l’I.R.C.A.M., continueront d’être gérés de crasse ! La Bibliothèque ne doit plus se sentir
manière autonome ; dans le cadre d’un établis- reléguée au second plan et doit voir son consi-
sement public propre, avec un conseil d’admi- dérable travail pleinement reconnu. Et cela
nistration propre, pour la B.P.I. ; dans le cadre passe, entre autres mesures, par une solution
d’une association loi 1901, avec un conseil juridique loin, au demeurant, d’être excessi-
d’administration propre, pour l’I.R.C.A.M. vement complexe : la B.P.I. deviendrait un dé-
La mise en place, programmée, de nouvelles partement du Centre et ses personnels, fonc-
conventions entre ces organismes et le Centre tionnaires titulaires, seraient affectés à l’établis-
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ne pourra apporter que des améliorations sement du Centre Pompidou. L’intégration de
marginales qui ne feront disparaître ni le cloi- l’I.R.C.A.M., en revanche, semble moins néces-
sonnement des esprits ni le morcellement des saire, d’une part, parce que l’Institut n’est pas
pratiques. installé à l’intérieur du Centre et, d’autre part,
La création d’un statut unique pour le parce que son statut actuel lui confère une sou-
Centre Georges-Pompidou englobant le Musée, plesse précieuse pour son fonctionnement ; elle
le nouveau Centre de culture moderne et serait, en outre, beaucoup plus compliquée à
contemporaine et la B.P.I. représenterait, au réaliser puisque l’I.R.C.A.M. est une institution
contraire, une configuration réellement nouvelle de droit privé.
et doterait le Centre de l’outil conforme à ses Le statut du personnel du Centre, enfin,
ambitions pluridisciplinaires. Mais une telle représente un grave échec 24. « Ce statut, trop
opération, plus lourde que celle qui est actuelle- rigide, combiné avec des sureffectifs et un
ment envisagée, se heurte probablement à cette vieillissement du personnel en place, constitue
situation typiquement française : les juristes et un puissant facteur d’immobilisme alors que le
les administrateurs jugent les réformes toujours Centre Pompidou se veut une institution
difficiles, les responsables culturels et scienti-
fiques les considèrent toujours secondaires, les
politiques les estiment rarement indispensables. 24. En 1996, le Centre a employé environ 1 600 per-
sonnes dont 877 contractuels, 33 fonctionnaires, 664 agents
Résultat : statu quo ante. Aujourd’hui, pourtant, à temps partiel et vacataires.
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d’avant-garde, toujours en mouvement 25… » France à agir pour l’art contemporain. L’ébul-
Un statut qui ne permet ni la mobilité interne ni lition est retombée, le scepticisme s’est installé
la mobilité externe, des règles d’avancement qui dans l’opinion, la lassitude et l’amertume ont
privilégient l’ancienneté et découragent le dyna- gagné les équipes. Fantastique machine urbaine
misme des meilleurs éléments, une ancienneté et énorme fabrique à contradictions, jeune et
moyenne supérieure à onze ans…, autant de rai- déjà trop usagée, le Centre doit à nouveau
sons impératives de revoir ce statut qui consti- inventer, à nouveau explorer, à nouveau prendre
tue désormais un contre-exemple pour les insti- de l’avance pour rendre l’utopie demain pos-
tutions culturelles qui se créent. Il faudrait, bien sible. Machine disparate, le Centre doit rassem-
entendu, pour de tels projets que le Centre bler ses forces humaines pour ancrer son pres-
puisse trouver de nouvelles marges de ma- tige international dans des manifestations
nœuvre financières. Car le Centre n’est pas intellectuelles et artistiques singulières. Ma-
aujourd’hui un établissement riche. S’il était chine fédératrice, il doit être aussi cette « cen-
besoin de s’en convaincre, il suffirait de compa- trale de la décentralisation » largement tournée
rer les moyens consacrés par le Centre aux vers l’extérieur que Michel Guy espérait et qu’il
visites-conférences avec ceux mobilisés par le n’a jamais été. N’est-ce pas finalement dire que,
Louvre. Le rapport est de un à sept en défaveur pour assurer son futur, le Centre Pompidou doit
du Centre. Pour conclure, nous avons dit plus vivre comme « une œuvre ouverte », c’est-à-dire,
haut que le Centre devait aiguiser ses tensions pour reprendre les mots d’Apollinaire cités par
fondatrices pour faire « crépiter » entre elles Umberto Eco, « dans la lutte continuelle de
ses missions et ses ambitions artistiques. Il l’ordre et de l’aventure 26 » ?
n’y parviendra que s’il instaure une simplifica-
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tion dans ses structures juridiques et admi- Geneviève Gallot.
nistratives, et un nouvel élan parmi son per-
sonnel. 25. Étude sur le statut du Centre national d’art et de
L’une des grandes vertus du Centre culture Georges-Pompidou, par H. Savoie et P. Fombeur,
Georges-Pompidou a été de « faire crier », membres du Conseil d’État, janvier 1995, p. 40.
26. Umberto Eco, L’OEuvre ouverte, Paris, Éd. du
de susciter la polémique, d’inciter ailleurs en Seuil, 1965, p. 93.

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