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Référence de cet article : Lazare Yera AKPENAN (2013), Les Morofoue : des origines diverses de

l’Aowin à la création du royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780), Rev iv hist,22,102-130.

LES MOROFOUE : DES ORIGINES DIVERSES AU DECLIN DE


L’AOWIN A LA CREATION DU ROYAUME EMBRYONNAIRE DU
MORONOU (1721-1780)

Dr Akpenan Yéra Lazare


Département d’Histoire
Université Alassane Ouattara
Bouaké-Côte d’Ivoire

RESUME
Avec la débacle de l’Aowin en 1721, les peuples qui vont devenir des Morofoué sont issus de trois
principaux Etats de la Gold Coast : il s’agit de l’Aowin pour les Amantien, les Ahali, les Sahoua, les Alangoua,
les Essandané, et les N’Gatiafoué ; le Sefwi pour les Sahié ; l’Ashanti pour les Assié. A ces populations
représentatives dans le Moronou, d’autres populations « résiduelles » se sont mêlées à la migration
Aowin en direction de la Côte d’Ivoire actuelle. Il s’agit notamment des Wassa qu’on retrouve dans les
villages d’Abongoua en pays Ahua, à Bananbo dans le N’Gatia ; des Denkyira qu’on retrouve à Niandian ;
des Abradé à N’Guinou en pays Essandané. Tous ces peuples se mettront à la disposition de Dangui
Kpangni une fois parvenus sur les bords du « Moro », ce petit ruisseau dont le nom finira par les désigner.
Les émigrants s’installent dans une première localité appelée Kassiadagouabo. La pression démo-
graphique en ce lieu et les problèmes de terres font que le leader des Morofoué quitte cette localité pour
s’installer à Elubo, une zone riche en or et située en zone de forêt. Malheureusement au moment où il
organise son royaume, survient la guerre Agni-Baoulé en 1780 où non seulement Dangui Kpangni, le
leader des Morofoué est tué par les Baoulé mais aussi tous les premiers chefs de l’émigratrion à savoir
Boa Badjo, son général des armées, Aklatia le commandant personnel de Dangui Kpangni etc. Ses suc-
cesseurs, incapables de poursuivre l’œuvre de Dangui kpangui, le royaume du Moronou éclate. Tous les
groupements politiques en profitent pour prendre leur indépendance vis-à-vis du siège du N’Gatianou.
Mots clés : Aowin, Ashanti, Sefwi, Wassa, Denkyira, Kassiadagouabo, Elubo, Moro.
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ABSTRACT
With the debacle of Aowin in 1721, the peoples who were going to become Morofoué were stemming
from three Main States of Gold Coast: it is about Aowin, for Amantien, Ahali, Sahoua, Alangoua, Essan-
dané, and them N’Gatiafoué; Sefwi for Sahié; Ashanti for Asia. With these representative populations in
Moronou, other “dust of populations” mixed themselves with the Aowin migration in the direction of the
current Ivory Coast. It deals also with the Wassa that is found in the villages of Abongoua in country Ahua
at Bananbo in Gatia; Denkyira that are found at Niandian; Abradé at Guinou in country Essandané. All of
these peoples will make themselves available to Dangui Kpangni once parvenu on the edges of “Moro,”
this small brook which will finish by designate them.
The emigrants settle in a first locality called Kassiadagouabo. The demographic pressure in this place
and the problems of lands make that the leader of the Morofoué leaves this locality to settle down to Elubo,
an area rich in gold and situated moreover in forest zone. Unfortunately at the time where he organised his
Kingdom, occurs the Agni-Baoulé war in 1780 where not only Dangui Kpangni, the leader of the Morofoué
is killed by Baoulé but also all the first heads of the emigration of whom Boa Badjo, his general of the
armies. His successors unable to continue the work of Dangui kpangui, the kingdom of Moronou bursts. All
the political groupings take advantage of it to take their independence regarding the siege of N’ Gatianou.
Keywords: Aowin, Ashanti, Sefwi, Wassa, Denkyira, Kassiadagouabo, Elubo, Moro

102 © EDUCI 2013. Rev iv hist,22,102-130. ISSN 1817-5627


INTRODUCTION
Avec la débâcle de l’Aowin en 1721 face à l’Ashanti, les peuples qui vont devenir
des Morofoué sont issus de plusieurs Etats. Or les Morofoué d’aujourd’hui parlent
de venir tous d’Anyuan-yuan, une localité de l’Aowin où Ano Assoman a été défait
par l’armée Ashanti.
Tous donnent l’impression d’être liés au pays des ancêtres, à Ano Assoman, le
roi de l’Aowin comme s’ils viennent tous de cet Etat. Ainsi dans le Sahié, l’Assiè,
l’Amantien, L’Alangoua… bref dans tous les neuf groupements politiques (N’Gatia,
Amantien, Ahua, Ahali, Alangoua, Assiè, Essandané, Sahié, Sahua), les traditionnistes
situent leur origine de la Gold Coast vers la Côte d’Ivoire actuelle à Anyuan-yuan
(Enchi), la capitale de l’Aowin.
Le Moronou est situé entre les 6°30 et le 7° de latitude Nord, c’est-à-dire dans
la zone de transition de la Côte d’Ivoire. Il a une superficie de 5.570 km². Il est
couvert de forêt mésophile. Il est limité au Nord par les départements de Daoukro
et de Bocanda, au Sud par les départements d’Akoupé, d’Agboville et de Tiassalé;
à l’Ouest, il est limité par le N’zi, le séparant de celui de Dimbokro et à l’Est par la
Comoé le délimitant de celui d’Abengourou. Le relief de la région est dominé par les
bas plateaux aux sols schisteux, mais surplombés au centre et dans le Nord Ouest
par des collines d’altitude variant entre 400 et 600 m.
Le Moronou comprend trois départements: Bongouanou, la capitale de région, les
départements d’Arrah et de M’Batto auxquels s’ajoutent onze sous préfectures (Andé,
Assiè-Koumassi, N’Guessankro et la sous préfecture centrale de Bongouanou dans
le département de Bongouanou; Abongoua, Krégbé et la sous préfecture centrale
d’Arrah dans celui d’Arrah ; Assahara, Anomanba, Tiémélékro et M’Batto dans celui
de M’Batto). Sa population est estimée à plus de 350.000 habitants aujourd’hui.
C’est dans cette zone, qu’à la chute de l’Aowin en 1721 face à l’Ashanti, plusieurs
peuples du pays des ancêtres venus également de plusieurs Etats de la Gold Coast,
lieront leur sort à Dangui Kpangni, le neveu d’Ano Assoman, le guide des Morofoué
pour s’établir sur les bords du ‘’Moro’’, ce petit ruisseau dont le nom finira par les
désigner.
D’où la question de savoir les origines diverses de ces Morofoué et leur organisa-
tion socio politique après leur installation dans le Moronou entre 1735 et 1780, date
de l’éclatement du royaume embryonnaire créé par Dangui Kpangni.
Ainsi cette étude sera axée sur deux parties :
• la première portera sur les origines diverses des morofoué en 1721 au moment
de l’émigration. Cette première partie nous permettra de remonter aux origines
lointaines des émigrants avant d’aborder leurs lieux de migration dans le pays
des ancêtres, de la Côte de l’or à la Côte d’Ivoire actuelle en 1721, date de
la chute dénitive de l’Aowin.
• la seconde partie nous permettra d’étudier et d’identifier les différents groupes
d’émigrants à travers leurs Etats respectifs, de parler brièvement de leur his-
toire et d’étudier la formation du royaume, c’est-à-dire, sa naissance et son
organisation jusqu’en 1780.

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La région du Moronou
dans la Côte d’Ivoire

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I- LES ORIGINES DIVERSES DES MOROFOUE A L’EMIGRATION
DE 1721
Les Morofoué qui s’établissent dans le Moronou après la débâcle Aowin face à
l‘Ashanti en 1721 sont issus de plusieurs Etats de la Côte de l’or dont trois Etats
principaux qui ont des populations représentatives dans le Moronou : il s’agit de
l‘Aowin, du Sefwi (Sahié) et de |’Ashanti. Ainsi nous commencerons par montrer
l‘origine lointaine de ces peuples dans la Côte de l’or avant leur migration en 1721
en direction de la Côte d’Ivoire actuelle.

I.1- les origines lointaines des Aowin, des Sahié et des Ashanti

I.1.1- De Bono à l’étape d’Adansi

Nous avons voulu éviter ce grand débat sur l‘origine lointaine des Akan. En effet pour
certains historiens, les Akans seraient partis de la Rift vallée pour remonter vers l’Egypte1
au Nord. Pour d’autres, ils viendraient du Soudan. Pour d’autres encore ils viendraient de
quelque part entre Tchad-Bénué dans la trouée du Dahomey, c’est-à dire le Benin actuel2
. Selon les tenants de cette thèse, c’est de là que les Akan auraient progressé jusqu’au
foyer de l’Adansi entre Pra et Offin.
Pour notre part, nous pensons qu’il ne faut pas aller au-delà de l’espace Bono d’où
seraient descendus au Sud plusieurs clans d’Akan, certainement sous la menace
des Dagomba et des Mamprussi, des peuples du Nord. Par conséquent, après s‘être
imposés aux Akan par la force des armes, ces derniers ne se sentent plus en sécurité
et ont fuit leur zone d’origine où ils y étaient établis depuis des millénaires. Car entre le
5e et le 15e siècle de notre ère ces peuples Akan étaient établis encore dans l’espace
Bono qui était une constellation de petites chefferies Akan. L’espace Bono comprenait
trois royaumes : le Bono, N’Sawkaw, Wenchi. Outre ces trois royaumes, d’autres tels
que Takyiman, héritier du Bono, l’Abease seront créés autour de 1723 / 1730.
Mais jusqu’au 15e siècle de notre ère, tous ces royaumes étaient de petites chef-
feries autonomes dirigées par des Akan. Ainsi sous la menace des Dagbon, des
Mamprussi et des Dagomba, certaines populations de ces chefferies émigrent en
zone forestière pour se mettre à l’abri de leurs ravisseurs. C’est le cas des ancêtres
des Aowin qui sont partis de Takyiman, plus précisément de la localité de Sessiman.
Il en est de même des Sahié wiawso, c’est-à-dire le clan Assakyiri qui est partie de
la même localité que les ancêtres des Aowin. Les Oyôko sont également partie de
Bono pour fonder l‘Ashanti, l’Aowin. Par conséquent la cité de Bono la plus célèbre
de l’histoire sera Takyiman fondée par Takyi Firi du groupe Djomo3.
Outre les originaires de Takyiman, on a d‘autres clans qui sont partis de Wenchi.
C’est le cas des Asona, les fondateurs du Sahié Wenchiman supplantés par les Adum-
Aduana, du groupe Ahua et Sahoua. Tous ces groupes parlent de sortir de terre dans
1 R.K.Allou, Thèse d’Etat, T1, P.92-94
2 W.T.Balmer, op. cit, P.27 CF. J.B. Danquah, op.cit. P968-997 et L.107—111
E.Meyerowitz; T2. Akan traditions of origin, op, cit. P. 23-25
R. Mauny, Africa , n°24, op. cit. P108-211
3 Waren (D.M,), Brempong (K.O.), Techirnan traditions State, Part I , Stool and town histories, Techiman
Ghana, 1971, INS, (legon Ghana, 176. P., P.100)

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l’espace Bono et disent n’être venus de nulle part. Ainsi les Aduana autochtones du
Bono vénèrent la grotte d’Atumkoroase comme celle d’où leurs ancêtres sont sortis.
En somme pour les traditions, les ancêtres des Bono, de N‘Saukaw et de Wenchi
ont émergé des grottes. Il en est de même des Bono qui parlent d’avoir émergé  de
la grotte d’Amuovi, des N’Sawkaw (Soco) sortis de terre à N’Sesrekesieso à 5 km au
Nord Ouest de Hani, des Wenchi sortis d’une grotte près du village d’Ayesu4. Même
les Denkyira qui vivaient dans le Bono à NKyira disent être sortis de la grotte située
à Nrob5. Chaque peuple donc dans l’espace Bono affirme n’être venu de nulle part.
Car ils y étaient établis pendant de longues années avant que l’insécurité orchestrée
par les Dagbon ne les oblige à descendre au Sud, en zone forestière. Le Bono était
donc composé de plusieurs clans parmi lesquels les Djomo, N‘yina, Dwanti, Atumfo
(ancêtre des Aduana), Ahemfi, Aboso, Werempe, Tetea, Adowa, Adiaka, Adakwa,
Nyaforman, Dewoman, Oyôkô etc. Tous ces clans affirment leur primauté sur les
terres qu’ils ont occupées dans l’espace Bono. C’est pourquoi ils disent n‘être venus
de nulle part et qu’ils sont sortis de trous.
Ainsi même si nous écartons ce débat sur |’origine lointaine des peuples, pour
nous il ne faut pas aller au-delà de l‘espace Bono pour rechercher l’origine profonde
des Akan. Certes des similitudes culturelles existent entre eux et les Egyptiens. C’est
le cas de la croyance dans l’au-delà où un roi Akan était enseveli avec certains de
ses serviteurs. Ces derniers dans la cosmogonie des Akan, devraient continuer de
servir le roi dans l’au-delà. Les Egyptiens partageant la même croyance de la vie
après la mort, faisaient les mêmes sacrifices humains que les Akan pour les mêmes
buts. De même on a les éponymes tels que le nom Amon chez les Akan qui étaient
un dieu chez les Egyptiens. Mais ces similitudes de noms et de culture ne sont pas
des preuves suffisantes pour dire que les Akan viennent d’Egypte.
Au total, c’est à partir du XVle siècle que tous les clans menacés par les attaques
des peuples du Nord, les Dagomba et les Mamprussi cherchent refuge au Sud en
s‘implantant d’abord dans l‘espace Asantemonso dirigé par l’Adansi. Tous les peuples
fuyant donc l’espace bono se rassemblent dans l’Adansi sous la domination d’Eponon
Enin, le roi de cet Etat.
Le chef guerrier d‘Eponon Enin s’appelait Ewouradi Bassa. Il vivait à Dompoase
où il était le chef. Il détenait le sabre sacré, l’Afenakwa qui lui conférait effectivement
le titre de chef militaire et de s’imposer à tous les peuples qui vivaient dans l’espace
Adansi appelé Asantemanso. Dans l’Adansi, chaque clan avait créé des localités: les
Oyôkô vivaient généralement à Edubiase et à Abadwan. Les Asona étaient rassemblés
dans les localités d’Ansa, Sodua, kokobiante et les Bretuo à Ahensan6, etc.
Pour une cohésion politique et sociale, tous les peuples de l’espace Adansi vont
conclure une alliance de non agression qui s’appuie sur le culte du génie «bona»
dont le siège est à Akrokeri. Il est secondé par le génie «abosam» dont le sanctuaire
se trouvait à Patakro dans l‘Adansi. En effet la grande divinité supranationale du
monde Akan de l’époque était le génie bona de l‘Adansi en face duquel se prêtaient

4 R.K. Allou, Thèse d’Etat, T.l, P.92-94 et cf. également Warren (D.M.) « A re-appaisal of Mrs
Eva Meyerowitz’s work on the Brong », P. 68-9
5 R.K Allou, Thèse d’Etat, 11, P. 94
6 cf. R.K.Allou, Thèse d’Etat, T.1, op. cit.P.357

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les serments et se concluaient les alliances politiques. Mais au milieu du XVlle
siècle, le Denkyira va fouler aux pieds les alliances politiques entre les peuples de
l’espace Asantemanso et briser la paix entre ceux-ci. Car le Denkyira va s’opposer
à la centralisation du pouvoir décidée, par Ewouradi Bassa qui était le chef militaire
d’Eponon Enin. Il va imposer des taxes annuelles à tous les peuples de l’Adansi
pendant l’Odwira considérée comme la fête annuelle de l’empire en même temps
fête des ignames de l’Etat. Au cours de cette fête, des présents doivent être versés
au roi, constitués singulièrement de la poudre d’or et d’autres biens précieux. D’où
le mécntentement du Denkyira.

I.1.2- La guerre Denkyira - Adansi et la dispersion des peuples


de l’espace Asantemanso

Le Denkyira va protester contre cette mesure d’Ewouradi Bassa. C’était également


l’époque où le commerce atlantique a commencé à prospérer sur la côte avec les
Hollandais. Le Denkyira entendait alors s’adonner à ce commerce. De plus il voulait
desserrer la pression démographique exercée sur l’espace Antemanso ou vivaient
tous les clans d’Akan venus de l’espace bono et trouver des solutions aux problèmes
de terres qui créaient des conflits réguliers entre les peuples (Ies Adansi, Denkyira,
Sefwi, Nzima, Asin, wassa, Ashanti, etc). Enfin le Denkyira voulait s’approprier les
mines d’or des autres Etats.
Tout ceci amène le Denkyira à fouler aux pieds les alliances de non agression
et de bonne cohabitation dans l’Adansi scellées devant le culte du génie «bona» à
Akrokeri. Il attaque ainsi l’Adansi et réussit à le vaincre en 1659, instaurant du coup
l’insécurité dans la région de l’Adansi. Cette situation de désordre oblige les peuples
qui étaient regroupés dans l’Adansi, le premier «Etat Akan», à se disperser pêle-mêle.
C’est ainsi que les Aowin, les Ashanti, les Sahié et d‘autres peuples s’enfuient de
l’espace Adansi pour se réfugier soit à l’Est, soit à l’Ouest de la Côte de l’Or. Ainsi
les Aowin, les Sahié, les Ashanti etc. partent de l’Asantemanso pour trouver refuge
à l’ouest. Au même moment l’Akwamu exerçait sa suprématie sur les Etats situés à
l‘Est de la Côte de l’or. Sa domination s’étendra jusqu’au Dahomey, le Bénin actuel
entre 1790 et 1702.
Les Aowin partis de l’Adansi s’orientent sur les rives du fleuve Offin sous la
conduite de Nanan Ebi. Malheureusement ils seront poursuivis par le Denkyira qui
les soumet grâce à son général d’armée, Agya Ananse Obooman. Ce dernier a
profité des divisions internes des armées aowin pour les tailler l’une après l’autre
dans des combats isolés. L’Aowin devient alors dès 1677, le vassal du Denkyira. Le
Sahié Wenchiman sera soumis à son tour en 1680 et le Sahié Wiawso vers 1690
. Il en sera de même pour l‘Asin, le Twifo entre 16907 et 1696. Mais ces différents com-
bats ont donné une certaine maturité au groupe de Nanan Ebi, les anciens Teckyiman.
Car ils estiment avoir grandi, mûri et acquis de l’expérience. Ils prennent alors le nom
de « Aowin ou Agni » à l’issue de ces différents combats même s’ils ont été vaincus.
Le Denkyira va alors s’approprier les immenses richesses de l’Aowin et devient ainsi
leur maître. Il va imposer aux Aowin tout comme à tous leurs dépendants de lourds
tributs dont un panier de poudre d’or pendant l’Odwira (la fête annuelle de l’empire),

7 K.Y.Daaku,»A History of Sefwi...», P. 37

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reclamer la femme préférée de chaque souverain (yèrè yèrèbla), des esclaves. C’est
contre tous ces abus du Denkyira que l‘Ashanti se révolte. Il crée une confédération
regroupant tous les membres du clan ôyôkô. Cette confédération créée à l’initiative
d’Oséi Tutu appelé à succéder à son oncle, Obiri Yoboua, bat le Denkyira à la bataille
de Feyassé en 1701.
En effet appelé à succéder à son oncle Obiri Yoboa, tué au cours d‘une bataille
par les ex-Akwamu à Suntreso, il part de l’Akwamu où il s’est réfugié après avoir
flirté avec une princesse Denkyira, Adoma Akosua. Celle-ci tombe enceinte de lui.
Craignant les représailles du roi Denkyira, Boa Amposen, il se réfugie en Akwamu.
C’est de là-bas qu’il est donc appelé à succéder à Obiri Yobona, son oncle, l’ex-roi
de Kumassi. Ansa Sasraku, le roi de l’Akwamu met alors à sa disposition au moins
70 soldats. Après deux batailles décisives, la première à Edunku et la seconde à
Feyassé, Ntim Gyakari, le roi du Denkyira est vaincu et tué. Son successeur Boadu
Akafu Brempong est également fait prisonnier. C’est la débâcle complète du Denkyira.
L’Ashanti devient alors la nouvelle puissance dominante de la zone Ouest de la Côte
de l’or en ce début du XVIII siècle.
La création de l‘Ashanti remonte au roi Oti Akenten qui avait succédé à plusieurs
rois. Car ils partent de l’espace bono pour l’Adansi sous la conduite de NananTwum.
Il sera succédé par Nanan Antwi, succédé également par Kwabia Amanfi. Ce dernier,
émasculé par l’une de ses épouses meurt en Adansi8. Les Ashanti seront alors conduits
par Oti Akenten à Juaben avant de s’installer à Koumassi. Il est le fondateur de cette
cité et de la chefferie de kwaman. Il sera succédé à son tour par Obiri Yoboua, l‘oncle
d’Osei Tutu qui a été tué par les ex-Akwamu à Suntreso vers 1680. 0biri Yoboua sera
succédé à son tour par Osei Tutu né de Manu kotosi, sa mère. Cette dernière avant
la naissance d’Osei Tutu souffrait de stérilité. Son frère Obiri Yoboa l’a envoyée au
sanctuaire de Tutu Abo en Akwamu pour y être soignée. Guérie, elle donne naissance
à Osei surnommé Tutu à cause du génie Tutu Abo grâce à qui l’enfant est né9.
Osei grandira à la cour royale du Denkyira. C’est en Akwamu qu’il fait la connais-
sance de Konvo Anotchi, le grand prêtre qui deviendra son ami. Son vrai nom est
Kwame Frimpong Anotchi. Osei appelé-donc à succéder à son oncle arrive à Kou-
massi avec son ami Konvo Anotchi10. Il va unifier toutes les chefferies du clan ôyôkô
telles que Juaben, N’Suta, Mampong, Bekwai, Eloso, Kumawu, Edweso, Amakrom,
Kokofu, Asumegya...et tissera une alliance avec les Ekôona installés dans l’Aman-
sie11. Toutes ces chefferies seront unifiées et transformées en une confédération. Un
siège nouveau, le «Sika Dua Kofi» est créé un vendredi pour servir de fondement
au projet politique d’Oséi.
En effet le siège fonde l’autorité de toute chefferie et de tout royaume chez les
Akan. Ainsi «Sika Dua kofi» fonde l’unité de la nation Ashanti. Il est couvert de feuilles
d’or. Mais le siège consacré est le ‘’biablé» (siège noir) dont tout chef décédé en
fonction en est honoré. II est censé posséder l’esprit de celui à qui il est dédié. Il est
au centre du culte des ancêtres. Cette confédération créée à l’instigation d’Oséi Tutu
8 R.K.Allou, Thèse d’Etat, T.1, op.cit., P363 et Cf. Ameyaw(kwabena), ‘’kwahu, An early forest state’’
Seminar papers read at legon, 1965, P.40
9 R.K.Allou, Thèse d’Etat,T.1,op.cit.,P.368
10 Ibid
11 J.K. Fynn,op.cit., P.24-3O

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s’élève contre tous les abus du Denkyira et le bat à la bataille de Feyasse en 1701.
Alors que les Etats soumis au Denkyira pensent avoir retrouvé à jamais la liberté,
I’Ashanti va les soumettre.
Au total si le milieu du XVIIe siècle était la période de domination du Denkyira et
de l’Akwamu situés respectivement à l’Ouest et à l’Est de la Côte de l’Or, le XVIIIe
siècle apparaît cependant comme la création et l’affirmation de plusieurs Etats au
stade embryonnaire entre le milieu du XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle. Tel
est le cas de l’Ashanti avec Oséi Tutu et l’Aowin d’Ano Assoman, de l’espace Sahié
dominé par Kwa Okodom. C’est ainsi que l’Ashanti devenu l’Etat le plus fort en ce début
du XVIIIe siècle contraint par la force des armes tous les Etats à se soumettre à lui.

I.2- Les guerres Ashanti-Aowin et l’émigration des Aowin en 1721

I.2.1- Les guerres Ashanti-Aowin

Les guerres Ashanti-Aowin débutent en 1701 au moment de la préparation des


affrontements entre l’Ashanti et le Denkyira. Chacun de ces Etats compte sur l’Aowin
pour se débarrasser de son adversaire. C‘est ainsi que le Denkyira envoie des
émissaires, les ancêtres des N’Denyé à savoir Ehouman Kabran et Ahi bahié auprès
d’Ano Assoman, le nouveau roi de l’Aowin qui vient de succéder à Amon Wanda
Wanda. Car le Denkyira de N’Tim Gyakari compte sur son vassal, l’Aowin pour battre
l’Ashanti. Dans le même temps, l’Ashanti aussi mise sur l’Aowin pour se débarrasser
de son adversaire. L’Ashanti reçoit même le soutien théorique de l’Aowin.
Mais Ano Assoman lui, souhaite la défaite du Denkyira pour étendre son hégé-
monie à l’Ouest de la Côte de l’Or. Il va donc convaincre les émissaires du Denkyira
de demeurer avec lui. Le soutien théorique promis à l’Ashanti ne se traduit pas dans
la réalité. Ce double jeu d’Ano Assoman l’expose aux attaques de l’Ashanti, et du
Denkyira représenté par l‘armée du Wassa de Krokro Bomany. Il est délogé des
terres Amanfi et se réfugie avec son groupe à l’Ouest de la Tanoé, plus précisément
à N‘gwanda Eya où il crée le nouvel Aowin.
Dans cette région, Ano Assoman s’impose aux peuples autochtones que sont
les Sohié, et les Anaboura. Il mène là une politique d’ouverture en recevant le corps
expéditionnaire Ashanti composé de 300 hommes, envoyé pour livrer bataille au
Wenchi dans le Brong Ahafo. Après donc le sac de la capitale du Wenchi, Awhene
koko12, les soldats de l’armée Ashanti se réfugient dans l’Aowin avec tout le butin.
Ils y sont accueillis par les chefs Aowin représentés par Dangui Kpangni, le neveu
d‘Ano Assoman, le futur leader des morofoué. Cette situation sera l’une des causes
de la deuxième guerre Ashanti-Aowin de 1715. Mais pour l’instant en 1712, l’Ashanti
ne réagit pas car elle est engagée dans une guerre contre l’Akyem depuis 170313.
En 1715, les ambitions hégémoniques de part et d’autre les amènent à s’affronter.
Car l’Aowin va occuper principalement le Sefwi Anhwianso. L‘Ashanti trouvera que
l’Aowin lui rivalise les terres. Ce sera le casus belli de la deuxième guerre Ashan-
ti-Aowin. Cependant les raisons profondes découlent de l’asile accordé au corps
12 Ahwene-koko, la capitale du Wenchi était une localité où on trouvait des perles rouges. D’où son nom
«Ahwene»= perle «koko ou koklo»=rouge
13 S.P.Ekanza,Thèse d’Etat, T.1, P. 71

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déserteur de l’armée Ashanti en 1712 d’une part, et d’autre part de l’occupation du
sefwi Anhwianso. Car cette situation empêche l’Ashanti de s‘engager véritablement
vers le Nord Ouest, en direction de Bondoukou. Enfin la dernière raison, c’est qu’entre
le Sefwi Anhwianso et l’Ashanti, un accord militaire les lie. Cet accord stipule qu’en
cas d’attaque de l’un ou l‘autre par un Etat ennemi, ils s’assisteront mutuellement14
. Cet accord a été scellé sous Kyim Kpangni, l‘Omanhene qui a jeté les bases du
Sefwi Anhwianso après l’attaque meurtrière du Denkyira qui a détruit définitivement
la chefferie du Sahié wenchiman.
En effet l’attaque du Denkyira autour de 1680 contre le Sahié wenchinan a anéanti
tous les héritiers mâles de cet Etat. C’est ainsi que Kyim Kpangni, un Aduana et l’un
de ses successeurs Nipa Kpangni s’emparent du siège des Asona et créent le Sahié
Anhwianso. Et c’est pour se protéger contre une attaque ultérieure du Denkyira que
les Anhwianso signent une alliance militaire avec l’Ashanti. Ainsi en s‘engageant dans
une guerre contre l‘Aowin, l’Ashanti entend voler également au secours de son allié. Il
attaque donc l’Aowin. Ano Assoman est délogé de N’gwanda Eya. Il se réfugie avec
ses partisans qui lui sont restés fidèles appelés désormais les «Ebrossa»15 à Bessi-
bemanyn sur la rive droite de la Tanoé où il recrée l’Aowin. C’est de là qu’en 1718,
son général de conquête, Ebiri Moro en réaction à l‘attaque Ashanti de 1715 lance
une expédition à la fois contre le Wassa et l‘Ashanti. Il ramène de cette expédition
plusieurs prisonniers Ashanti. Car les chefs de guerre de l’Ashanti étaient absents
parce que partis en guerre contre les Akyem.
L’Ashanti miné par des problèmes politiques à cette époque, ne réagit pas de
sitôt16. Car d’une part il est en guerre contre les Akyem et d’autre part il est traversé
par une crise politique de succession due à la mort d’Oséi Tutu tué par les Akyem
en 1717. En effet depuis 1703 les Ashanti ont engagé une guerre contre les Akyem.
Jusqu’en 1717, ils ne sont pas parvenus à les vaincre. C’est ainsi qu’Oséi Tutu est
tué lors des affrontements de 1717. Son corps est emporté par les eaux du Pra. Sa
succession crée des rivalités entre les héritiers que sont : Opoku Ware, Boa Kwati,
Okuku Adani et Dakon, le frère aîné de la Reine Abla Pokou. Opoku Ware va réussir
à se défaire de tous ses concurrents, particulièrement de son «concurrent ‘’ le plus
sérieux, Dakon qu’il fait assassiner. Cette situation provoque la fuite de Kumassi de
la reine Pokou et de ses partisans qui se réfugient à Enchi chez Ano Assoman vers
1718. Elle le sollicite pour renverser Opokou Ware. Mais après avoir brisé toutes les
résistances à Kumassi en 1720, Opokou Waré se lance à la poursuite de ses ennemis.
Il affronte Ano Assoman à Bessibemanyn. Les partisans d’Ano Assoman, les
«Ebrossa» regroupés à Enchi (Anyan yuan) sont vaincus et se dispersent dans tous
les sens. Quant à Ano Assoman, devenu vieux, ne peut se déplacer sur une longue
distance. Il confie sa chaise à son neveu Dangui Kpangni de la mettre en lieu sûr.
Car en 1712 déjà il est aux affaires politiques de I’Aowin17. Ano Assoman se réfugie

14 K.y.Daaku, «Sefwi wiawso...», op.,cit.,P. appendix Il, 3b


15 Ebrossa ou bonou Sawolo, signifie en agni que dans la brousse, Il y a des difficultés, des dangers.
16 Van Dantzig, the Deutch and the Guinea Coast... NBKG 84.....P.188
17 Dangui Kpangni connu au pays des ancêtres sous le nom de Dinckie était en 1712 déjà aux affaires
politiques de I’Aowin. Car c’est lui qui en 1712 reçoit le corps expéditionnaire Ashanti qui, envoyé au
wenchi par l’Ashantihéne, se réfugia dans I’Aowin avec tout le butin pris dans la capitale du wenchi,
Ahwene koko.

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derrière la Tanoé. Avec I‘exode de la plupart de ses partisans vers l’ouest, il sera
succédé après sa mort par Aka Awanzi Kpangni18.

I.2.2- Les Etats d’émigration des futurs Morofoué après la débâcle


Aowin face à l’Ashanti en 1721

Après la chute définitive de I’Aowin en 1721, la plupart de ses habitants quittent


leur pays d’origine et s‘orientent vers l’ouest. Car depuis 1715 où les Ashanti ont
attaqué pour la deuxième fois les Aowin, l’Ouest est devenu la zone de repli et de
refuge de la plupart des fuyards Aowin. C’est ainsi qu’à cette époque, les Sanwi,
sous la conduite d’Amalaman Ano et les N‘denyé dirigés par Ehouman kabran et Ahi
Bahié y trouvent refuge.
En 1721 Dangui Kpangni ne déroge pas à la règle. Il quitte I’Aowin avec ses
partisans, traverse le Sefwi au Nord tout comme les Baoulé Assabou de la reine
Abla Pokou, et tous s’orientent vers l’ouest, en Côte d’Ivoire actuelle. Dangui Kpan-
gni traverse la Comoé, les pays Attié et Abbey et s’implante avec ses partisans au
bord du «Moro» autour de 1735. Mais quels étaient les Etats de la Côte de l’or d’où
les populations vont émigrer massivement sous la conduite de Dangui Kpangni en
direction du Moronou ?
L’identification des migrants nous permet de distinguer trois grands Etats : l’Aowin
représentés par sept sous-groupes (les Amantien, les Sahoua, les Alangoua, les Ahali,
les Ngatia, les Essandané et les Ahua). S’y ajoutent l’Ashanti avec les Assié et le
Sahié avec les Sahié. Ces trois grands Etats de la Côte de l’or ont des populations
représentatives dans le Moronou. Elles étaient sous la conduite de Dangui Kpangni
qui les conduit dans le Moronou à la débâcle de l’Aowin face à l‘Ashanti en 1721.
Mais pour ce qui est des Ahua et des Sahoua, ils sont partis de l’Aowin et du
Sefwi Anhwianso. Cette chefferie du Sahié était dirigée par les Ahua après que le
Denkyira ait attaqué la première chefferie du Sahié, le Sahié wenchiman où il décime
tous les héritiers mâles du clan Asona. Ils seront alors détrônés par les Ahua de Kyim
Kpangni et de Nipa Kpangni. Ces Ahua en provenance de wenchi sous la conduite
de Nanan Adou Wenciri, s’implantent d’abord dans l’Aowin avant de s’établir dans le
Sahié Wenchiman où ils dirigeaient une petite chefferie dans la localité d’Anhwianso.
La guerre entre le Denkyira et les Asona du Sahié Wenchiman leur donne l‘occasion
de s’imposer aux Asona qui n’ont plus eu d’héritiers mâles pour diriger le siège de
cette chefferie. Il en est de même des Sahoua qui sont aussi du clan Aduana venus
de Kumassi pour s’implanter dans le Sefwi Ahwianso.
Au total il s’agit donc de l’Aowin, du Sefwi et de l’Ashanti. Mais des populations
résiduelles venues de certains Etats de la Côte de l’or ont suivi les futurs Morofoué
et sont plus ou moins connues dans le Moronou. Il s’agit des Wassa qu’on retrouve
dans le village d’Abongua en pays Ahua, des Denkyira dans le N‘gatianou à Nian-
dian et à Banabo, des Abrade en pays Essandane plus précisément à N’guinou19
et des Ano dans le Sahié. Ainsi la deuxième partie de notre étude sera consacrée
à l’étude détaillée des populations de ces trois Etats qui sont significatives dans le
Moronou.
18 R.K. Allou, Thèse d’Etat, T.1., op. cit., P. 572
19 S.P.Ekanza, Thèse d’Etat, T.1., p.149-153

Lazare Yera AKPENAN (2013), Les Morofoue : des origines diverses de l’Aowin à la création du
royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
111
II- L’ETUDE DETAILLEE DES ORIGINAIRES DE L’AOWIN, DE
L’ASHANTI, DU SEFWI (SAHIE ) ET LA FORMATION
DU ROYAUME EMBRYONNAIRE DU MORONOU (1735-1780)
L‘étude détaillée des trois grands Etats du pays des ancêtres desquels sont parties
des populations pour s’établir dans le Moronou, nous permet de localiser géogra-
phiquement ces Etats dans la Côte de l’Or et d‘étudier leurs populations implantées
dans le Moronou. Ainsi nous commencerons par l’Etat le plus grand pourvoyeur de
populations au Moronou avant de parler du Sahié et de l’Ashanti.

II.1- L‘étude détaillée des originaires de l’Aowin, de l’Ashanti et du Sahié

II.1.1- Les originaires de l‘Aowin

Ils sont composés de sept sous-groupes : ce sont les Ngatia, les Essandané,
les Alangoua, les Ahali, les Amantien, les Ahua et les Sahoua. Mais pour ces deux
derniers groupes (les Ahua et les Sahoua), ils étaient partis soit de la chefferie du
Sahié Anhwianso, soit de l’Aowin et même des deux Etats à la fois. L‘Aowin d‘où
sont originaires les sept sous-groupes est situé au Sud-ouest du Ghana actuel. Il
est limité au Nord par le Sefwi (Sahié), au Sud par le N’zima et le Wassa, à l’Est par
le Denkyira et à l’Ouest par le Sanwi.
Nous rappelons encore que l’origine profonde des Aowin avant de s’établir dans
le Sud du Ghana actuel est Teckyiman, dans l’espace bono. Le bono est situé à la
lisière de la forêt et de la savane au Nord-Ouest du Ghana actuel. C’est là qu’ils étaient
jusqu’au 15e siècle. Au début du XVle siècle, les Aowin entament une migration qui
les conduit de Teckyiman à l‘Adansi sous la conduite de Nanan Ebi, puis s’implantent
entre le Pra et l’Offin à cause du désordre politique orchestré par le Denkyira. Au milieu
du XVII siècle, sous la conduite d‘Amon Wanda Wanda, ils se fixent sur les terres
Amanfi. La guerre Ashanti-Denkyira de 1701 les déplace encore vers N’Gwanda Eya,
cette fois-ci sous la conduite d’Ano Assoman parce qu’il est délogé des terres Amanfi
par Krokro Bomany qui représentait le Denkyira et l’armée l’Ashanti.
Attaqués par les Ashanti en 1715, Ano Assoman et son peuple trouvent refuge
à Enchi non loin de Bessibemanyn. C‘est là qu’Ano Assoman et ses partisans, les
«Ebrossa» sont attaqués et vaincus par les Ashanti d’Opokou Waré en réplique au
raid mené par Ebiri Moro sur kumassi en 1718. Battus sur tous les fronts de combats
en 1721, les Aowin émigrent. Ainsi sept sous-groupes d’Aowin quittent à jamais leur
pays d’origine parce qu’iIs ont voulu sauver Ieur vie et leurs biens. Ce sont: les N’gatia,
les Amantien, les Ahali, les Alangoua, des Ahua, les Essandané et les Sahoua qui
suivent Dangui Kpangni dans le Moronou.

II.1.1.1- Les N’gatiafoué

Dans le Moronou, les Ngatia sont le groupe suzerain, c’est-à-dire le groupe qui a
préséance sur les autres. Ce sont les parents de Dangui Kpangni. Le nom N’Gatia
se compose de N’GA qui signifie en langue agni, ‘’cette affaire’’ et TIA qui veut dire
‘’marcher dessus’’. Ainsi selon les traditionnistes du N’Gatianou, le roi Dangui Kpan-
gni étouffait toutes les querrelles qui surgissaient en leur sein lors de la migration.

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D’où leur nom N’Gatia20. Mais c’était un groupe composite. Ils appartiennent pour
certains au clan Oyôkô, celui d’Ano Assoman comme Ies Ahougnanbossoufouè et
les Téhouabossofouè, des proches parents de Dangui Kpangni auxquels s’ajoutent
les Asangulo de N’guessankro, fondateurs de Yakassé un quartier de Krinjabo. A côté
d‘eux, gravitent plusieurs lignages. Il s’agit :
• des Agoubla21, fondateurs de N’zanfouénou en territoire Ahua. Ils sont une
fraction des Agni Brafè, c’est-à-dire les soldats regroupés autour d’Amalaman
Ano, le fondateur du royaume du Sanwi ;
• des Ehuaklé, fondateurs des villages d’Ehuaoso, M’baoucesso, Nzuekokoré22
etc. ;
• des Elusofoè qui sont les membres du matrilignage d’Ebiri Moro, le général
de conquête de l‘Aowin. Ils ont différents noms selon les régions. Ainsi dans
le Ndenyé et à Bettié, on les appelle les Apesemondi, quand dans le Sanwi,
on les appelle les Sohié qui étaient les autochtones de l’Aowin ;
• les Affafié qui s’installent respectivement à Akwe fêtê, Totobébo, N’glibo23.
L’origine profonde des Affafié du Morohou est le Wassa fiansé. Ils sont venus
de Benso pour s’intégrer à l’Etat Aowin ;
• les Adade créent Koyonou et Fronobo24. Ils sont une fraction des Dadéfoué du sanwi
et de Sankouoadiokro. Dans le sanwi, ils sont établis dans les villages d’Ehwia-
nu et de Kouakro. Ils sont partis d’Ehwianu pour assurer la défense de Kouakro25
et s’y sont établis. Leur orignine profonde dans le pays des ancêtres est l’Etat
d’Abease situé dans le bono.
Mais comme nous l’indiquions plus haut, à l’émigration, c’était un groupe hétéro-
gène qui va suivre Dangui Kpangni. Ainsi dans le N’gatianou, les Denkyira s‘y ins-
tallent et créent des villages comme Niandian, Essoinkro, Egualènou etc. De même
des N’gan de l‘Ano quittent leur région à cause de la guerre qui les a opposés aux
Ano d’Adikulo. Expulsés de l’Ano pour n’avoir pas respecté les décisions du roi Aka
fondo qui avait tranché l’affaire en faveur des Ano d’Adikulo, ils sont conduits dans le
Moronou au XIXe siècle par Amon Tindin. Ce dernier bénéficie de la complicité d’Aka
Kpoli, le chef des Adade de koyonou, et s’installe dans le Moronou. Les N’Gan créent
Nyakonkro, Adekro, Adakro, Kplekro (actuel Ahongnanfoutou). Ils sont installés sur
la rive Est du N’zi. Ce fleuve les sépare des Baoulé Agba. Ils forment aujourd’hui un
sous-groupe des N’gatiafoué.
Les N‘gatiafoue detiennent le siège le plus prestigieux du monde Agni. C’est le
siège d‘Ano Assoman, le roi de l‘Aowin. Il confiera ce siège à son neveu, Dangui
Kpangni en 1721 au moment de la troisième confrontation Ashanti-Aowin après celles
de 1701, 1715. Celle de 1721 entraine la chute définitive de l’Aowin. Déjà en 1715, à
l’issue de la deuxième confrontation, Ano Assoman prend des mesures de sécurité. Il

20 Kassi André, enquête réalisée à N’Dolikro le 29 juillet 2009


21 Kouamé Aka, Résumé de mémoire de maîtrise in Annales de l’université d’Abidjan, 1980, série 1
Histoire, tome VIII, p. 213-236.
22 S.P. Ekanza, Thèse d’Etat, T.1., op.cit., p.528
23 R.K Allou, Thèse d’Etat., p.649
24 S.P. Ekanza, Thèse d’Etat., p.156
25 R.K Allou. Thèse d’Etat., p.633

Lazare Yera AKPENAN (2013), Les Morofoue : des origines diverses de l’Aowin à la création du
royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
113
charge Amalaman Ano, Ebiro Moro, Ehouman Kabran et Ahi Koffi dit Ahi Bayé de lui
trouver un refuge en cas de défaite. C’est ainsi qu’Amalaman Ano conduit un groupe
d‘Aowin, les Agni brafè dans le Sanwi. Ahi Bayé et Ehouman Kabran également quittent
l’Aowin pour le N’dényé. Mais c’est Ahi Bayé qui installera les Ndenyé à N’zaranou
après la mort d’Ehouman Kabran à Konvi Andé dans le Sahié Wiawso.
En 1721, Dangui Kpangni, conduit lui aussi des Aowin et d’autres peuples venus
de d’autres Etats dans le Moronou avec le siège d’Ano Assoman pour le mettre en
lieu sûr. C’est le siège de nanan Ebi, l’ancêtre des Aowin. Il est donc le siège qui
s’impose à tous les Agni installés à l’ouest de la Côte de l’or, le Ghana actuel. Mal-
heureusement ce siège ne pourra pas s’imposer au monde Agni encore moins au
groupe restreint du Moronou pour des raisons que nous évoquerons dans la troisième
partie de cette étude, consacrée à la désintégration du royaume du Moronou. Au Sud
des N’gatiafoé, se trouvent les Sahoua.

II.1.1.2 Les Sahoua

L’origine profonde des Sahoua est le Bono. Ils sont du clan Aduana. Du
Bono, ils transitent par l’Adansi et s’implantent avec les Abradé dans l’Akwamu.
Les exactions d’Ansa Sasraku, le roi des Akwamu les obligent à s’enfuir de
l’Akwamu et ils s’installent au Sud-Est de Kumassi, à 24 Km de cette localité26
où ils prêtent main forte au roi Oti Akenten dans la création de Kumassi.
A la fin du XVlle siècle, ce groupe se déplace et ‘s‘installe dans l’Aowin,
sous la protection d‘Ano Assoman, le roi de l’Aowin. Ils fuiront les environs
de Kumassi à cause des affrontements entre les ex-Akwamu et les Ashan-
ti. Les Ex-Akwamu vont tuer Obiri yoboua, le roi de Kumassi à Suntresso27
vers 1680. Les Sahoua se réfugient alors dans l‘Aowin et se mettent sous la protection
du roi de cet Etat, Ano Assoman. Les Sahoua de l’Aowin qui émigrent en 1721 étaient
installés dans le village d’Assoumoukro, devenu aujourd’hui une localité du Sahié. Car
Koa Ekodom, le roi du Sahié wiawso l’a intégré à son royaume entre 1721 et 1722 en
combattant les ex-Abradé de ce village.
Une fraction de Sahoua s’installe dans le Sahié Anhwianso et crée la localité de
Chirano. Ils font partie des Aduana qui exproprieront les Sahié Wenchiman de leur
chaise avec la complicité de Nipa Kpangni chargé de garder la chaise des Asona
du Sahié Wenchiman. Par manque d’héritiers mâles, Kyim Kpangni et Nipa Kpangni
ainsi que les membres de son clan Ahua se réclament désormais les autochtones du
Sahié. Ils affirment eux-aussi comme le font les Sahié Wenchiman, que leurs ancêtres
sont sortis également du trou à Wenchi, dans l’espace bono, d’où ils émigrent les
premiers au Sahié.
Les Sahoua sont donc du clan Aduana. Leurs symboles sont le chien, le feu, le lion,
la banane plantain. Ceux qui suivront Dangui Kpangni dans le Moronou sont d’abord
conduits par Aka Boni, qui après la traversée de la Comoé est retourné s’installer
dans le N’denyé28. Il sera succedé par Asa Awoua qui poursuivra l’exode des Sahoua.

26 R.K Allou, thèse d’Etat., op. cit., p.362


27 R.K Allou, thèse d’Etat., op cit., p.366
28 R.K Allou, thèse d’Etat., op. cit., p.645

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Ils suivront par la suite le fils de la reine mère Agboman, un certain Ebli Moro qui
s’installe sur le site de M’Batto. Le nom Sahoua se compose comme suit en Agni :
SA = guerre où événement malheureux.
HOUA (woua) où AHOUA = arrive où survenu
De par la composition du nom «Sahoua», nous disons que les Sahoua ont d‘excel-
lents guerriers. Déjà au pays des ancêtres, ils soutiendront Oti Akenten, le fondateur
de Koumassi dans la création de la capitale Ashanti.
La branche des Sahoua qui s’installera dans le Sahié Anhwianso sera oppo-
sée aux Ahua. Les deux branches du clan Aduana se diront autochtones et vont
se disputer la chaise des Asona. Ces Sahoua soutiendront même les Sahié
Wenchiman dont les héritiers ont été décimés par la guerre de conquête du
Denkyira du général, Agya Ananse Obooman sous Boa Amposem vers 169029
. De sorte que le siège du Sahié Anhwianso, le premier dans l’espace Sefwi, restera
instable. Il sera déplacé régulièrement. Car ils estiment avoir été évincés de la suc-
cession à la chefferie du Sahié Anhwianso par les Aduana Ahua. Ce désordre politique
dans le Sahié Anhwianso profitera au Sahié Wiawso. Ainsi le successeur de Kwasi
Bomankuman, le fondateur de la chefferie du Sefwi Wiawso, Kwa Okodom, soutenu
par Osei Kodjo, le roi de l’Ashanti au milieu du XVIIIe siècle, s‘imposera comme la
chefferie la plus puissante de l‘espace Sahié de la Côte de l‘or.
Dans le Moronou, les Sahoua en occupant le site de M’batto
ont combattu les Abey autochtones que sont les Okudjelè, les Yavodjelè 30
et les Krobu qui, ravagés par la traite négrière sur la côte d’Accra se sont réfugiés
au Sud du Moronou31. Leur ardeur au combat les a poussés à mener une expédition
sur Tiassalé en l’absence des Elomoin partis eux aussi pour une expédition en pays
Adjoukrou. A leur retour, ils trouvent leur capitale, Tiassalé pillée. Car un chef agni
sahoua s’est emparé de leurs richesses et a emmené en captivité plusieurs femmes32.
Cette expédition sur Tiassalé sera l’une des causes de la guerre Agni-Baoulé.
Les Sahoua mèneront d’autres combats contre les Attié Kettin pour l’extension de
leur territoire. Ils créeront plusieurs villages dont Assouakro, Kouamékro, Eblie,
Kouadiokro, M’batto, Assoumoukro, Bonikro, Gramassabo, Ehounoukro, Etienna-
mouenou. D’autres Sahoua se sont installés dans l’Ano particulièrement à Cokonou
et à Samanza. Au Sud-Ouest des Sahoua sont installés les Amatien.

II.1.1.3 -Les Amantien

Le nom «Amantien» se compose comme suit en Agni :


AMAN = le monde
TIEN = crier
Ce nom Amantien signifie littéralement «ceux qui ont crié dans le monde» où «ceux
qui s’agitent dans le monde». Selon les traditionnistes du village d’Angamankro, les
29 R.K Allou, thèse d‘Etat, op., cit., p.559
30 R.K Allou, thèse d‘Etat, op., cit., p.642
31 S.P. Ekanza, Thèse d’Etat, op.,cit., p.137
32 Salverte Marmier, histoire du peuplement..., p.32

Lazare Yera AKPENAN (2013), Les Morofoue : des origines diverses de l’Aowin à la création du
royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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Amantien avaient l’habitude de prendre la parole à chaque occasion qui se présentait
aux premières heures de leur installation dans le Moronou. Leur nombre fort impres-
soinnant à l’émigration fait qu’ils avaient pris l’habitude de paraître. Ils prenaient la
parole à tout moment car ils étaient beau parleurs. C’est de là que dérive leur nom
«Amantien». Ceux qui viendront s’établir dans le Moronou, particulièrement dans le
département de M’batto ont été dirigés par la reine-mère Aku Assué et son frère Kassi
Anda, fondateur du village de Kassiadagoabo, non loin d’Ehuikro.
Ce village sera le centre de regroupement de tous les Morofoé avant que Dangui
Kpangni, le guide de l’exode ne crée Elubo au Nord d’Ehuikro, près de N‘dolikro.
Les Amantien crééront plusieurs villages dont Diékadiokro, Angamankro, Assokro,
Agoua, Aoussoukro, Assémienkro, Djadoukro, Tongbakro, Kadiokro, Krofoinsou,
Alina, Ebanamouenou, Kouakro, Adouakoikro etc. ils feront partie de l’expédition
Sahoua sur Tiassalé de laquelle ils ramèneront des prisonniers et pilleront la capitale
des Elomouin. Dans ce groupe on y trouve également des fractions d’Assonvon à
Angamankro, Kouakro et à Adouakouakro.
D’autres Amantien s’établiront dans le bas Bandama précolonial à cause du com-
merce précolonial qui était devenu très actif au milieu du XVIIIe siècle à Tiassalé et
dans ses environs. Ils y crééront des villages comme Morokro. Ils feront partie tout
comme les Elomouin, les Agni Alangoua, les Abey, les N‘gban, les Swamalan, les
Abidji, les Ahizi, les Avikam, les faafouè, des Warebo, des Aïtou, des populations du
bas- Bandama.

II.1.1.4- les Alangoua

Les Alangoua sont les descendants de Boafo N’da, le fils présumé d’Ano Asso-
man. Ils sont du clan Ôyôkô. Après la débâcle de l’Aowin face à l’armée d’Opokou
Waré en 1721, des Alangoua quittent I’Aowin sous la conduite de Boafo N’da. C’est
ainsi qu’en 1715 déjà Ano Assoman charge son fils, Boafo N‘da de s’enfuir avec les
Alangoua pour leur trouver une cachette dans une zone paisible. Boafo N’da choisit
alors le Ndenyé. Ils transitent par Konvi Andé dans le Sahié Wiawso et arrivent dans
le N’denyé à un lieu nommé ‘Afewa“ parce qu’en arrivant là, à Afewa (fatigué en
agni), ils étaient fatigués.
Ils étaient en compagnie des Denkyira. Ils vont alors essaimer dans le confluent du
Comoé et du Manzan. Sous la conduite du chef guerrier de Boafo N’da, Ehui Kutua,
les Alangoua crééront plusieurs villages dans le N’denyé: Bebou, Kodjina créé par
Ehui Kutua lui-même, Bèdènou, Anzemi, Kaniango (lieu de résidence de Boafo N’da),
Blekum, Adoubaassué créé sous le règne du successeur de Boafo N’da, N’da Adou.
Pendant son règne entre la deuxieme moitié du XVIIIe siècle et le début du XlXe
siècle, l’Alangoua deviendra un vassal de l‘Ashanti tout comme l’espace N’denyé (le
N’denyé, le Bettié, I‘Abrade). Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, l’Alangoua sera
une zone prospère à cause des gisements aurifères qu’on y a découverts, notamment
le site aurifère d’Ewiawoso sous le règne de Nanan Edoukou. Cette localité sera même
la capitale de l’Alangoua en cette deuxième moitié du XIXe siècle. C’est d’Ewiawoso,
probablement vers le milieu du XVllle siècle que des Alangoua essaiment à Assuba

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dans le Sanwi, à Assahara dans le Moronou sous la conduite de Nanan Kplatou, le
guide de l’exode Alangoua dans cette région, l’un des Safohènè de Dangui Kpangni.
D‘autres Alangoua s’installeront dans le Baoulé à Alangouasso dans les environs
de M’bahiakro.
Le groupe qui s’installe dans le Moronou crée des villages comme Asanfoué (N’zi-
nou), Kassi Akakrou, N’drikro, Assahara etc. Mais ce groupe se fractionne à cause
de la quête de l‘or qui s‘est emparée de lui depuis le N’denyé. Ainsi une fraction des
Alangoua du Moronou se détache et s’installe dans la région de Tiassalé. Ils y crééront
les villages d’Adawu-Alangoua (Binao), Gbrugbru (Brou-Brou), Botende et Bosué
. Le groupe Alangoua situe son origine profonde dans l’espace Bono. Ils sont une
fraction des Adakwa du Bono, de matrican Ôyôkô. Ils ne sont pas d’origine Denkyira.
Les Adakwa qui donneront chez les Agni le groupe Alangoua étaient d’excellents
chasseurs. C’est certainement la chasse et l‘orpaillage qui ont poussé ce groupe à
s’établir dans différentes zones de la Côte d’lvoire actuelle : N’denyé, Sanwi, Moronou,
dans le Baoulé à M’Bahiakro et dans l’Ano. Dans le N‘dényé Boafo N’da s‘est installé
à Kaniago. On dit que la chefferie Alangoua a une prééminence sur les groupes Agni
car certains historiens pensent que Boafo N’da, le fils d‘Ano Assoman a reçu comme
consigne de son père, de partir avec la chaise de celui-ci pour la mettre en lieu sûr
après la deuxième guerre Ashanti-Aowin de 1715. Par conséquent, ils estiment que
c’est la chaise d’origine, celle d’Ano Assoman que détient le groupe de Boafo N’da.
Or dans le monde Akan et particulièrement chez les Agni la matrilinéarité fait que
l‘enfant appartient à la famille de sa mère. Il ne peut pas assurer de charge politique
réelle dans la famille de son père. Mais les fils de chef étant des princes, bénéficient
souvent de sièges appelés «Mamabia» où «Famienbabia». Les Alangoua du Moro-
nou sont séparés des Agba-Satiahyri par le N’zi qui est la frontière naturelle entre
les Baoulé Agba et les Morofoué. Ils sont donc situés dans la partie occidentale du
Moronou. Au Sud de leur territoire se trouvent les Ahali.

II.1.1.5- Les Ahali

Le nom Ahali se compose de la façon suivante


Aha = piège, chasse / Li = prendre (a pris).
Littéralement Ahali veut dire le «piège a pris». C’est le signe que les Ahali avaient
pris l’habitude de tendre des embuscades à leurs adversaires. Ils étaient des guerriers
intrépides à l‘instar de leur guide, Boa Badjo. Ce nom, ils l’ont hérité depuis le pays des
ancêtres où ils étaient installés à Ahali, dans le Souammalan dépendant de l’Aowin.
Le guide de l’exode des Ahali du Moronou est Boa Badjo, le premier Safohènè
de Dangui Kpangni. Ils sont également originaires de l‘Aowin. Leur nombre fort
considérable à l’émigration fait qu’ils peupleront plusieurs régions. Ainsi, outre ceux
du Moronou, des Ahali s‘intégreront au groupe Elomouin de Tano Adjo qui s’implante
à Tiassalé. D’autres s’implanteront dans le Baoulé et crééront le village de Brobo
au Sud-est de Bouaké. Puis d’autres encore s’installent entre les N’gban de Didiévi
et les Saa de Djébonoua en créant le village de Menou sous la conduite de Nanan
Bomoli Awodjo.
Les Ahali du Moronou peupleront leur zone en créant plusieurs villages dont
Menou, Agnikro, Kamrankro, Amangoua, Kouadioniangorankro, Ahrakro, Kassikro,

Lazare Yera AKPENAN (2013), Les Morofoue : des origines diverses de l’Aowin à la création du
royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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Kassi-kokorekro, ohoumi. Comme chaque sous-groupe du Moronou constitue une
chefferie autonome, les Ahali auront d’abord pour capitale Adibrobo où Abikouassikro,
village créé par Boa Badjo. A sa mort le siège de la chefferie sera transféré à Menou.
De Menou, il sera transféré à Koffikro à l’époque du chef Koffi Srè puis finalement
à Tiémélekro sous le chef Aka Tiémélé. Leurs compagnons d’exode sont les Ahua
avec qui ils transiteront à Tiassalé avant de s‘installer dans le Moronou. Les Ahali
ont donné naissance à plusieurs fractions dont les Baoulé nanafouè de Yamous-
soukro et de Tiébissou appelés encore Ahuafouè. Outre ces différents sous-groupes
de l’Aowin concentrés pour l’essentiel dans le département de M’batto à l’exception
des N’gatiafouè qui font partie de l’actuel département de Bongouanou, nous allons
étudier ceux du département de Bongouanou.

II.1.1.6- Les Essandané

Ils sont une fraction du groupe Alangoua. Leur leader est Nanan Sangban, proche
parent de Nanan Kplatou, le leader des Alangoua. Les Essandané et les Alangoua
formaient le même peuple à l’exode. De l’Aowin comme tous les autres groupes du
Moronou, après la traversée de la Comoé, ils sont passés par le pays Attié, puis par
Gbogbobo, l‘actuel Rubino, chez les Abey Okodjélé et Yavodjélé qui étaient alors les
autochtones de la région.
Dans le Moronou, ils se séparent des Alangoua, leur groupe d’origine après la guerre
Agni-Baoulé et sous la conduite de Nanan Sangban, s’installent à Kangandi, non loin
du «Sokoté», la mare qui traverse la localité de Bongouanou sur une partie de son
étendue. Et c‘est Ie «Bofoué» (chasseur) de Sangban, Takimanso qui découvre le site.
Les traditionnistes de Bongouanou et de Kangandi disent que c’est au cours d’une
partie de chasse, à la poursuite d‘un éléphant que le regard de Takimanso a été
attiré par le vol tourbillonnant des hérons (Bongô). Les oiseaux s’élevaient très haut
dans le ciel puis piquaient- du nez vers le sol. Il prend peur. Comme la nuit tombait,
Takimanso décide d’attendre le lendemain pour percer l’énigme du vol des «Bongô».
II est surpris le lendemain lorsqu’il s’est rendu sur les lieux du vol des oiseaux en
découvrant au pied d’un fromager une mare aux eaux limpides.
Ainsi le nom Bongouanou vient de «Bongô» (héron) et «Ewanu» (clairière, savane)
. Donc en Agni on disait ceci : «Bongo mo be goua éwanou» (les hérons sont dans
la mare). D‘où le nom Bongouanou. Les Essandané crééront plusieurs villages dont
Assaoufoé, Bocassi, Kangandi, Bongouanou, Broukro, Anékro, Dibikro, Ahorosso,
N’guinou, Kotossimabo, Djadoukro, Salékofikro, Abonamouénou, Kassikro, Ndata-
nonamouénou. Une fraction d’Essandané vit également dans le sanwi, à Assouba.
Le dernier groupe venu de l’Aowin est l’Ahua.

II.1.1.7- Les Ahua

Le nom Ahua dérive de «Tchoa» (chien). La tradition Ahua dit qu’après avoir
oublié de prendre du feu à une étape de leur exode, le chien est renvoyé à l’étape
précédente et revient, tenant dans la gueule un tison qu‘il maintient au dessus de
l’eau. D’où leurs symboles, le chien et le feu. Les Ahua sont un sous groupe des Ahali.
Leur leader s‘appelle Ané Kpangni qui avait autour de lui Ano Koa Akpahu, Adjoka

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Kpangni. Ils sont le seul groupe du département d’Arrah. Ils sont certes originaires
de l’Aowin, mais leur origine profonde dans le Bono est Sessiman.
En 1721 certains Ahua sont aussi partis du Sefwi Anhwiansso où ils étaient établis
depuis 1680. Car c’est de l’Aowin que les Adum Aduana sont partis s’installer au
Sud du Sefwj, dépossédant les Sahié Wenchiman de leur trône entre 1660 et 1670.
Ils rebaptisent le Sahié Wenchiman en Sahié Anhwianso. Ces Adum-Aduana sont
constitués de deux groupes : les Aduana Sahoua et les Aduana Ahua. Par conséquent
en 1721 à la débâcle de l’Aowin face à l’Ashanti où s’instaure le grand désordre poli-
tique, des Ahua sont partis de l’Aowin et aussi du Sahié Anhwianso pour s‘établir à
l‘Ouest, dans le Moronou, le N’dényé et d’autres dans Ie Baoulé notamment chez les
Elomouin de Tiassalé, les Nananfoué de Tiébissou et de Yamoussoukro. D’autres
Ahua s’installeront dans l’Ano, à N’zanzanou et à Atoumanbo. Ceux qui vont s’établir
dans le Moronou vont suivre les Ahali de Boa Badjo. Donc les Ahua du Moronou
s’intègrent aux Ahali et ont eu pour guide Boa Badjo. Ceux du N’dényé seront guidés
par Ano Koa Kpangni et s‘installeront à Aniansué.
C’est après la guerre Agni-Baoulé vers 1780 que les Ahua par souci de sécurité,
se détachent des Ahali et quittent alors Abi-kouassikro (Adibrobo), village créé per
Boa Badjo. Ané Kpangni est le neveu de Boa Badjo. Il s‘installe avec son groupe à
Akakro en territoire Essandané, à 3Km de Bongouanou. C’est de là que son chasseur
(Bofoè), un certain Edi Ewaya se dirigera vers l’Est et découvrira le site de Kulon-
galewa (Arrah), riche en or. Alors Ané Kpangni et sa suite rejoignent Edi Ewaya et
s‘établissent sur ce site dans la première moitié du XIXe siècle, autour de 1830.
De Kulongalewa (Arrah), les Ahua essaiment jusqu’à la Comoé. Ainsi, les neveux
d’Ané Kpangni s’établissent à Dalosso, non loin d’Arrah. Ano Koa Akpahou, l’un des
compagnons d’exode de Dangui kpangni se fixe au Nord de l’Ahuanou, faisant frontière
avec les Baoulé sur les bords de la rivière Krégbé, riche en or également. Les proches
parents de Nanan Adjoka Pangni dont Eponon Kouassi et d’autres, crééront Etienkro.
Au terme de l’immigration, les Ahua crééront au total, Krégbé, Koyina, Ehikro, Tano
Kouamékro, Abongoua (Agbogoua), Arrah, Kouadiobiiékro, Sénékro, Akpaoussou-
Kotobi, Dalosso, Gouabo. N’zanfouénou en terre Ahua sera créé par les Angoubla,
un sous groupe des N‘gatiafoué. Les Ahua peupleront cet espace jusqu’à la Comoé
faisant ainsi frontière au Nord avec les Baoulé de Daoukro, au Sud avec les Attié
et au Sud-ouest avec les Essandané, à l’Ouest avec les Sahié. Avant de peupler le
Moronou, des Ahua se sont établis dans le sanwi en créant le village de Blaka.
Au total dans le Moronou, le groupe Aowin est au nombre de sept : les Amantien,
les Sahoua, les Ahali, les Alangoua, localisés dans le département de M’Batto ; ensuite,
les N‘gatiafouè, les Essandané regroupés dans celui de Bongouanou et enfin les
Ahua dans le département d’Arrah. Seuls deux groupes ont des origines différentes
: il s’agit des Assié et des Sahié.

II.1.2 -Les Assié et les Sahié

II.1.2.1- Les Assié

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royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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Les Assié sont des Ashanti. Ils formaient avec les Baoulé N’zikpli un même peuple
au départ. Ils sont originaires d’Apremso, un quartier de Koumassi. L’Ashanti d’où
sont originaires les Assié est limité au Nord par le Brong Ahafo, à l’Ouest par Ie Sefwi
(Sahié), au Sud par I’Adansi et l’Akyem, à I’Est par le Kwahu. Leur origine profonde
est Ie bono dans l’espace Brong-Ahafo. De cette région, ils s’impIantent dans l’espace
Adansi sous la conduite de nanan Twum qui sera succédé dans l’Adansi par nanan
Antwin, succédé également par Kwabia Amanfi. Au moment où les Ashanti s’apprê-
taient à quitter l’Asantemanso à cause de la guerre Denkyira-Adansi de 1659, Kwabia
Amanfi, émasculé par l’une de ses épouses meurt. Les Ashanti seront alors conduits
par Oti Akenten à Juaben avant de s’installer à Kumassi. II est le fondateur de cette
cité et de la chefferie de Kwaman. Il sera succédé à son tour par Obiri Yoboua, l’oncle
d’Oséi Tutu qui a été tué par les ex-Akwamu à Suntreso vers 1680. Il sera succédé
à son tour par Oséi Tutu dont les origines profondes ont été rappelées ci-dessus.
Son grand projet politique a été de créer la confédération Ashanti avec la complicité
de son ami Konvo Anontchi. L’Ashanti au même titre que l’Aowin, Ie Sefwi, Ie Wassa,
Ie Zima, l’Ahanta etc, versait des tributs au maître Denkyira au moment de l’Odwira,
la fête de l’igname, fête annuelle de l’empire. C’était une obligation pour chaque Etat
soumis de verser à cette fête un panier plein de poudre d’or, des esclaves et pour le
chef de la confédération Ashanti d’ajouter en plus de ces présents, sa femme préférée
(yéré yéré bla). C’est contre tous ces abus que l’Ashanti se révolte et bat le Denkyira
à la bataille de Féyassé en 1701. Alors que les Etats soumis au Denkyira pensent
être délivrés de toute sujétion, l’Ashanti va les soumettre. C’est le cas de l’Aowin à
qui il va livrer des batailles en 1701, 1715 et 1721 où les Aowin sont vaincus. Les
Sahié wiawso seront soumis dès 1701.
La ruse et l’intelligence de Koa Okodom feront qu’il sera préféré aux rois Aduana
qui supplanteront les rois du Sahié Wenchiman. Et pourtant une alliance liait les
Sahié Anhwianso à l‘Ashanti sous les rois Kyim Kpangni et Nipa Kpangni. Cette
alliance conclue vers 1680 après l’incursion de l’armée du Denkyira au Sahié Wen-
chiman qui a décimé tous les héritiers mâles du clan Asona de cet Etat, avait pour
but de rapprocher les deux peuples (les Ashanti et les Aduana du Sahié Ahwianso)
et de soumettre même les Anhwianso aux Ashanti. Par cette alliance, ils devraient
s’assister mutuellement en cas d’attaque par un Etat ennemi. Mais elle a commencé
à se fissurer sous le successeur de Nipa Kpangni, Kwow Nipa. Elle sera totalement
brisée sous Eduapom qui a refusé de fournir des troupes auxiliaires à l’Ashanti.
La politique impérialiste de l’Ashanti imposée à tous les Etats de la Côte de l’Or
pour les soumettre, mécontente certaines de ses populations. Ainsi en 1712 un corps
expéditionnaire Ashanti fort de 300 hommes, envoyé pour livrer bataille au Wenchi,
se réfugie après le sac de la capitale de cet Etat, Ahwene Koko en Aowin avec tout
le butin. Il en est de même des Assié où Nzi Kpli qui résidaient à Apremso, un quar-
tier de Kumassi, de prendre la fuite de cette localité à partir de 1718 où le désordre
politique occasionné par l’Ashanti avait presque atteint son paroxysme.
Les Assiè se réfugient à Bosomoiso, dans le Sefwi Wiawso. Ainsi, en 1721 au
moment du grand désordre politique, ils transitent par le Sahié sous la conduite de
Nzi Kplé et d’Ano Koa Pokou, respectivement leaders des Nzi kpli et des Assié. Ils
vont rejoindre la Reine Abla Pokou et ses partisans réfugiés en Aowin et prendront

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ensemble la fuite vers la Côte d’Ivoire actuelle.
Le nom Assiè signifie en Agni «terre».
Les Assiè disent que leurs ancêtres sont sortis de terre près de Bataaman avant
de s’établir à Apremso. Apremso était la poudrière des rois Ashanti. C’est là que les
canons et les armes de l’Ashanti étaient stockés. Les Nizikpli (Assiè) avaient pour
rôle au pays des ancêtres de surveiller cette poudrière. C’est parce qu’ils étaient
mécontents de la politique impérialiste d’Oséi Tutu et d’Opokou Waré qu’ils ont quitté
Apremso et ont traversé le Sahié pour se réfugier à l’Ouest, hors de la Côte de l’or.
Le leader de l’exode des Assiè, Ano Koa Pokou, après la traversée de la Comoé
tente de rejoindre la reine Pokou avec son groupe et la trouve à Tiassalé. Les Assié
et les Assabou marcheront ensemble jusqu’à la hauteur de Toumodi où ils se séparent
de la reine Pokou. Ils s‘orientent à l’Est avec les Sahié, traversent le N‘zi et s’installent
à Fronobo, un petit campement où ils trouvent beaucoup d’or. C’est après la guerre
Agni Baoulé qu’ils créent Assiè Kumassi et essaiment dans les environs de cette
localité en créant les autres villages Assiè. Leurs compagnons d’exode sont les Sahié.

II.1.2.2- Les Sahié

L’espace Sahié est limité au Nord par le brong Ahafo et l’Ashanti, à l‘Ouest par le
Ndényé, à l’Est par le Denkyira et le Wassa et au Sud par l’Aowin.
Le nom sahié ou sefwi se compose comme suit : Sa = Se = événement malheureux
Hié ou Hué ou Safwi = Wahué = fini. Donc le Sahié ou Sefwi signifie que l’évè-
nement malheureux est terminé ou que la guerre est finie. Ils s’attribuent ce nom
à l’issue de la guerre qui a opposé l’Ashanti au Denkyira en 1701 où ils se disent
que la guerre est terminée. Ils pensent qu’ils ne seront plus soumis à un autre Etat.
Malheureusement l’Ashanti va les soumettre. Les Sahié étaient en compagnie des
Assié. Ils sont issus de trois chefferies: le Sahié Wiawso, le Sefwi Anhwianso et le
Sefwi Bekwai.
Le Sefwi Wiawso est la plus grande chefferie de l’espace Sahié. Il a été créé par
Obumankoman en provenance de l’espace bono, précisément de Teckyiman vers
1660. Il est du clan Asakyiri. L’exode de Teckyiman est conduit par Boa Ankye. Il conduit
son peuple sur Ies terres Amanfi en compagnie des Aowin où il s‘installe à Afienso.
Il sera succédé par Esomowe, succédé à son tour par Amekyie. Ce dernier est suc-
cédé également par Ehyia. Mais c’est Kwasi Bumankuman, successeur d‘Ehyia qui
conduit le groupe près de Bosomoiso, sur les rives du Soboré (soblo en Agni). Mais
attaqué par le Denkyira, Kwasi Bumankoman s’installe sur les collines des environs
avec son peuple. Son successeur, Koa Okodom (Koa le conquérant) accepte de se
soumettre au Denkyira de Boa Amposem et créé wiawso sur une colline. Wiawso veut
dire en Sahié que «le soleil est haut dans le ciel». Il est la capitale du sahié actuel.
Ensuite on a la chefferie du Sahié Anhwianso qui s’appelait au départ le Sahié
Wenchiman. C’est la première chefferie qui s‘installe dans l’espace Sahié sous la
conduite de Nanan Ese Bombo. C’est lui qui a créé le Sahié Wenchiman vers 1650.
II a été un grand et puissant roi. Tout le monde l’a suivi avec admiration et amour. Il

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royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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continue d’être vénéré car il bénéficie du culte des ancêtres. Il est considéré comme
le plus grand homme de l’histoire du Sahié wenchiman. Leur vrai nom est «Wenchi
Akyempem».
Comme leur nom l’indique, ils viennent de Wenchi dans l’espace bono. A sa mort il
sera succédé par Owusu Akyempem. C’était un célèbre guerrier qui a créé une armée
d’un millier de boucliers, les «Akyempem». Il est succédé par Nanan Kanga Benié Il
qui lui également est succédé par Kwaku Adje qui a eu un règne très mouvementé.
Car il était fréquemment opposé à son propre peuple. C’est sous son règne également
que le Denkyira a fait une incursion dans le Sahié Wenchiman avec la complicité de
la femme de l’Omanhene, Biba Ala Adjoua.
Cette vieille femme qui n’a pas voulu que son peuple se batte contre le roi du
Denkiyira le trompe. Elle le rassemble la nuit venue autour d‘un grand feu. Profitant
alors de l’obscurité, l’armée du Denkyira surprend les Sahié Wenchiman et les décime
presque tous. Les quelques rescapés de ce massacre s‘éparpillent dans les villages
de la chefferie du Sahié Wiawso et dans les autres Etats de la Côte de l’or. C’est ainsi
qu’ils seront supplantés par les Adum-Aduana qui se sont installés au Sahié près de
la localité de Wenchi sous la conduite de leur chef, Nanan Adu Wenciri.
Comme les Asona ont perdu tous leurs héritiers mâles au cours de la guerre qui
les a opposés aux Denkyira, leur chaise a été confiée à Nipa Kpangni dont la mère est
du clan Aduana. Ainsi, Kyim kpangni un des successeurs de Nanan Adu Wenciri, est
le premier Aduana à être intronisé chef de l’Etat d’Anhwianso. Il a réussi à rassembler
les «résidus» de Sahié et recrée le royaume autour de 1680. Il signe une alliance
avec les Ashanti et prennent ensemble le « fétiche » pour dire que désormais les
Sahié Anhwianwso et les Ashanti s’assisteront en cas d’attaque par un Etat ennemi.
Par cet accord, les Sahié Anhwianso promettent de servir les Ashanti.
A sa mort, il est succédé par Gyansi, succédé également par Benié lui aussi
par M’Beh. Mais ils ont eu un règne terne et n’ont pas marqué l’histoire du Sahié
Anhwianso. Ensuite est venu le règne de Nipa Kpangni qui s’approprie définitivement
la chaise des Asona au profit de son propre clan. Il déplace cette chaise de Wenchi à
Subiri puis à Brahababome. Ainsi les Adum Aduana composés des deux fractions, les
Ahua et les Sahoua par le truchement de Nipa Kpangni exproprient les Asona qui
n‘ont plus d’héritiers mâles après la guerre qui les a opposés aux Denkyira. Jusqu’à
cette guerre, les fils du clan Aduana étaient les Adumfo (exécuteurs des œuvres
sombres) du royaume.
Ainsi les Asona et Aduana (Ahua et Sahua) vont s’opposer. Les deux fractions
(Ahua et Sahoua) seront opposées également entre elles car les Sahoua de Chirano et
les Ahua vont se disputer le siège. En effet, les Aduana Sahoua de Chirano contestent
l’autorité des Aduana Ahua car ils indiquent que c’est Mé Kwao, un membre du clan
Aduana Sahoua qui avait été pressenti pour hériter de Nipa Kpangni. Mais il s’est
désisté à cause de son âge fort avancé. Confisqué par Nipa Kpangni, un Aduana,
les Asona, fondateurs du Sahié Wenchiman réclament leur siège. Mais les Aduana
se disent autochtones de la région car le nom Aduana signifie chez les Akan, les
premiers sur une terre. Ils rebaptisent alors la chefferie du Sahié Wenchiman en
Sahié Anhwianso.

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Enfin, une troisième chefferie sera créée au début du XIXe siècle avec le concours
d’Oséi Kodjo, le roi de |’Ashanti. Il négociera auprès de l’Omahené du Sahié Anhwianso
en l’occurrence auprès de Benié III successeur de Kwow Nipa, lorsque les Bekwai
seront chassés du Sefwi Wiawso, particulièrement de la localité d’Ewumanso. Ils vont
s’installer dans la grande palmeraie située au Sud du Sefwi Anhwianso. Ainsi nait le
Sefwi Bekwai des Ekôona sous Kwamé Gyapon. Cette chefferie des Ekoona vient
de Fomena, dans l’Adansi. Elle est du clan Bretuo.
L’émigration des Sefwi (Sahié) en 1721 est due au désordre politique occasionné
par I‘Ashanti à savoir les levées de troupes régulières en leur sein pour les conquêtes
militaires de l’Ashanti. Car ils étaient les Adamfo (amis de la cour) et Ahenakwa (ser-
viteurs) de l’Ashanti. De plus ils faisaient l’objet de pillages, de razzias et ployaient
sous des taxes diverses qui leur étaient imposées etc. Et lorsqu’en 1721 l’Ashanti
attaque l’Aowin, il profite pour attaquer le Sefwi Anhwianso reproché d‘avoir fourni
des troupes auxiliaires au Denkyira. Le choc sera alors grand. Ainsi les Sahié des
différentes chefferies se rassemblent à Bosomoiso. Ils se placent sous la conduite de
Koffi Djomlessou. Ce dernier n’avait qu’un hamac et un tambour en quittant le pays
des ancêtres. Cet hamac est attribué aux valeureux combattants de l’espace Bono,
particulièrement de l‘Etat d’Abease.
Cet hamac fait partie également des attributs du pouvoir du village de Kouakro
dans le Sanwi. Il est également attribué à de hauts dignitaires du royaume de l‘espace
Sahié. C’est la preuve que les fractions de Sahié (wiawso, Anhwianso, Bekwai), n’ont
pas pu emporter les sièges de leurs chefferies. Le hamac (moga) était le plus grand
insigne de leur pouvoir dans le Moronou.
Donc sous la conduite de Koffi Djomlessou et de sa sœur Nakedé, les Sahié en
provenance d’Asafo, de Bosomoiso, d’Affery, d’Antobia, de Bodi (les Assabibosofoué
d’Ellinzué dont une branche est celle des Attabosofoué d’Andé), d’Etuebouo, de
Konvi Andé, de Debisso rassemblés à Bosomoiso se mêlent aux Assiè et font route
ensemble jusqu’à Fronobo, dans le Moronou sous le commandement d’Ano kwa
Pokou, le guide des Assiè autour de 1740.
Du reste les fractions de Sahié aprés avoir transité par le Moronou s’installent à
Akessékro, à N’zanzanou et à Samanza dans l’Ano. D’autres encore après l’étape
de Toumodi suivront les Baoulé Assabou dans le Walébo sous la conduite de leur
leader, Epekou avant d’être expulsés du Ndranouan parce que voulant instaurer le
régime patrilinéaire dans le mode de succession à la cour royale de Sakassou. Car
pour Epekou et ses partisans pensaient que c’étaient les pères de l’enfant sacri-
fié au fleuve Comoé qui devaient hériter et non les mères (la famille maternelle)
. Combattus par les Walèbo, ils s’enfuient de cette localité et s’installent dans la
région de Sikensi.
Après cette premiere phase de peuplement qu’on peut situer entre 1735 et 1780,
le royaume embryonnaire du Moronou commence à prendre forme.

II.2- LA FORMATION DU ROYAUME EMBRYONNAIRE DU MORONOU

II.2.1-La naissance du royaume

Les Aowin de Dangui Kpangni auxquels sont mêlés les Sahié, les Ashanti et

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royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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quelques fractions de population du Denkyira, du Wassa et bien d‘autres encore
non identifiées parce que non représentatives, s‘implantent d’abord sur les bords du
Moro. C’est dans Ie département actuel de M’Batto où ils créent une Iocalité appelée
Kassiadagoabo. C’est le premier site d’établissement des émigrants. Ils se rassem-
blérent tous dans cette Iocalité.
Mais la pression démographique y devient forte avec l’arrivée d’autres immi-
grants au fil des années. De sorte que Kassiadagoabo est saturée d’hommes.
Cette pression démographique voire ce surpeuplement s’explique aussi par le
fait que ce territoire n’était pas vide d’hommes. Car les traditionnistes du Sahié
évoquent la présence de Gouro au Nord du Moronou.
D’après Delafosse, Ies Morofoué auraient trouvé à Ieur arrivée dans Ie pays, les Akyé,
les Abey et même les Adyoukrou et auraient donné avec eux la tribu actuelle du Moronou
. Toutefois I’identité de ces groupes, surtout les Attié et les Abey revélée sous la
plume de Delafosse mérite d’être clarifiée car les Abey, les Akyé et les Morofoué
appartiennent à la même migration. Comment alors expliquer que ces peuples qui
quittent le pays des ancêtres au même moment que les futurs Morofoué peuvent être
au terme de I’immigration Ieurs hôtes ?
Cette interrogation mérite d’être posée car Delafosse n’est pas le seul à parler
d’Abbey. En effet, A.Tano Brou, parlant du peuplement du Moronou, dit ceci dans son
mémoire de maîtrise: «Au terme de la migration, les Agni atteignirent une rivière. Là,
ils trouvèrent des Abbey qui extrayaient du vin de palme. Ceux-ci en donnèrent aux
émigrants pour étancher leur soif». Quelle est donc I’identité réelle de ces groupes ?
L‘examen de la carte ethnique du Moronou nous renseigne qu’à la périphérie
Sud du Moronou, précisément dans la région d’AgbovilIe subsistent des krobou qui
seraient partis du pays des ancêtres dans la deuxième moitié du XVIle siècle. Ce
peuple était «ravagé» par la traite négrière. Ils se sont orientés alors à l’Ouest et se
sont enfoncés au cœur de la forêt pour trouver refuge dans la zone méridionale du
Moronou. S’ajoutent aux Krobou, les Abbey, notamment les Okundjelé et les Yavod-
jélé, les Abbey autochtones différents des Abbey morié. Ce sont donc les Okundjélé
et les yavodjélé qui offrent du vin de palme aux futurs morofoué exténués de soif
. En outre on a des Agouoa et au Nord du moronou, des Gouro. Ainsi les nouveaux
venus, phagocytent ou assimilent ces groupuscules de peuples déjà établis dans le
Moronou et amènent d’autres à résipiscence pour accroître leur nombre. C’est ainsi
que des Sahoua ont livré des guerres aux Abbey pour combler leur déficit démogra-
phique. Plus tard, les N’Gatiafoué en feront autant contre les mêmes Abbey.
Au total la naissance du royaume se fait avec un apport humain composé d’Abbey,
d’Akyé, d’Agoua, et d’émigrants venus du pays des ancêtres. Mais le royaume a
besoin d’être organisé.

II.2.2-L’organisation de l’espace

Cet espace devenu exigu, Dangui Kpangni juge utile de desserrer la pression
démographique et s’installe à Elubo, une localité située à une trentaine de kilomètres
au Nord de Kassiadagoabo. Il le fait pour mieux organiser son royaume naissant et
même l’agrandir. Mais le départ de Kassiadagoabo peut être considéré comme étant

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un besoin économique, stratégique et politique :
Au plan économique parce que des «bofoué» avaient effectué des missions de
prospection dans la brousse pour découvrir des sites propices à l’installation des
hommes, regorgeant d’animaux tels que des phacochères, antilopes, singes, civettes,
panthères et toutes sortes de reptiles et d‘insectes. Et comme à cette époque, la
première nourriture à portée de main était le gibier, il fallait se situer d’une part sur
un site où le gibier abondait, et d’autre part sur un site propice à la fouille de l’or.
Ces conditions semblaient être réunies à Elubo situé au coeur de la forêt où le
gibier abondait au contraire de Kassiadogoabo où la viande se faisait rare à cause de
la forte pression démographique et l’ensoleillement du lieu. Car il est situé en zone de
savane. De plus le sol à Elubo se prêtait à l’activité agricole. Ce sol était composé de
terre noire, riche en humus même si la latérite ferrugineuse se constatait en maints
endroits. Ces terres ferrugineuses de couleur rouge étaient réputées pour leurs
richesses en or. Et comme l’exploitation de l’or était une survivance de leur passé
Aowin, ils étaient passés maîtres dans la technique du forage des puits et doués à
répérer les terrains propices à l’exploitation aurifère. Elubo et ses environs dans le
N’gatianou étaient des zones très riches en or. D’où le choix d’Elubo par rapport à
celui de Kassiadagoabo par le roi des Morofoué entre 1738 et 1740.
De plus l‘installation de Dangui Kpangni à Elubo était également stratégique. Car
ce départ de Kassiadagoabo lui permettait d’agrandir son royaume et de l’organiser.
En effet de Kassiadagoabo à Elubo, il y a une distance de 30km environ. Ainsi le
royaume naissant qui fait frontière avec les Abbey au Sud jusqu’à la latitude d’Elubo,
pouvait s’étirer sur une cinquantaine de km. Cette superficie acquise lui permettait
déjà de commencer à organiser le royaume sur le plan défensif. C‘est pourquoi en
partant de Kassiadagoabo, les Sahoua et les Amatien sont laissés sur place pour
veiller sur les frontières Sud du moronou.
Implanté à Elubo, Dangui Kpangni demandera à Boa Badjo, le chef des Ahili d’assu-
rer la défense occidentale du Moronou avec les Alangoua. Et quand les Assié et les
Sahié y débarquent dans la zone autour de 1740, il leur demandera de s’implanter
dans la zone de Fronobo avec les Alangoua juste au Nord du N’gatianou pour assurer
la sécurité Nord du royaume.
Dangui Kpangni et ses parents proches resteront au milieu de tous ces Morofoué.
Cette organisation du royaume avait déjà poussé les «bofouè» des premiers chefs
de l’émigration à s’élancer dans la brousse sur les conseils de leurs maîtres pour
leur trouver des sites propices à l’établissement. Ainsi il serait illusoire de croire que
c’est après la guerre Agni-Baoulé que les groupes Essandané, Assiè, Sahié, Ahua
vont parcourir la brousse pour se trouver des sites propices à l’établissement. Ces
sites qu’ils vont occuper après l’éclatement du royaume étaient longtemps connus.
C’étaient même des campements provisoires pour lesquels les créations avaient été
encouragées par Dangui Kpangni en vue de l’agrandissement et de l’organisation
de son royaume.
Ainsi chaque groupement politique avait reçu des consignes pour le rôle qu’il devait
jouer dans le royaume en création. Mais pour l’heure les groupes étaient encore
compacts. Ainsi les Ahili et les Ahua formaient le même peuple, placé sous les ordres
de Boa Badjo, le général de conquête de l‘armée de Dangui Kpangni ; les Assié et

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royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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les Sahié étaient placés sous les ordres d’Ano Koa Pokou, le leader des Assié ; les
Alangoua et les Essandané de Nanan Sangban formaient le même peuple placé
sous le commandement de nanan Kplatou, le chef des Alangoua ; les N’gatiafoué
comprenaient plusieurs sous-groupes regroupés autour de Dangui Kpangni. Seuls les
Sahoua et les Amantien n’étaient rattachés à un autre groupe. Mais ils dépendaient
de Dangui Kpangni et leurs chefs lui rendaient régulièrement compte de tout ce qui
se passait dans leur zone.
Enfin au plan politique, les groupements politiques n’étaient pas autonomes.
Tous devaient allégeance à Dangui Kpangui installé à Elubo. Par conséquent les
différents chefs des différents groupements politiques le fréquentaient régulière-
ment pour s’enquérir de ses nouvelles, reçevoir des conseils et des consignes pour
la conduite de leur peuple. Ils lui versaient même l’asasituo, le droit d’exploitation
sur les sites d’or. Car il était le chef suprême et il devait être entretenu par tous les
premiers chefs de l’émigration. Tous les jugements importants du royaume étaient
rendus chez Dangui Kpangni, à Elubo quand cela dépassait les compétences des
chefs des groupements politiques.
Malheureusement cette vie paisible retrouvée par les Morofoué depuis leur départ
du pays des ancêtres, sera bouleversée par l’attaque des Baoulé autour 1780. L’incur-
sion des Morofoué sur leur territoire, notamment avec la découverte des gisements
d’or par les Morofoué à Dimbokro et à Bocanda, freine du coup l’expansion Moro-
foué vers le Nord au-delà du N’zi. Elle détruit du coup l’ambition de Dangui Kpangni
de bâtir un royaume à l’instar de celui de l’Aowin, l’Etat mère des Morofoué. Car ils
seront attaqués par les Baoulé. C’est la fin des illusions avec le décès de Dangui
Kpangni et de ses lieutenants de conquête, tués dans la guerre que les Baoulé vont
leur livrer. Ses successeurs incapables de s’imposer aux groupements politiques
réunis auparavant autour de Dangui Kpangni, ne peuvent poursuivre l’œuvre de leur
leader décédé. D’où l’éclatement du royaume.

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CONCLUSION
En 1721 avec la chute définitive de l‘Aowin face à l’armée Ashanti d‘Opoku Waré,
les populations qui prennent le chemin de l’exode et qui vont devenir entre 1735
et 1740 les Morofoué, sont issues de trois origines principales dans le pays des
ancêtres, la Gold Coast : l’Aowin, pour les sous groupes, Amantien, Ahali, Sahoua,
Alangoua, Essandané, N‘gatuafoué, et Ahua ; Le Sahié (Sefwi) pour les Sahié ; et
enfin l’Ashanti pour les Assié qui sont une fraction des N‘zikpli venus d’Apremso,
un quartier de Kumassi où ils avaient la charge de surveiller les armes qui y étaient
stockées par l’armée Ashanti. Mais certains Ahua et certains Sahoua sont partis du
Sahié. Ils étaient les fondateurs du Sahié Anhwianso qui a supplanté le Sahié wen-
chiman de nanan Esé Bombo.
La plupart de ces fuyards ont transité soit par le Sanwi sous la conduite d’Amalaman
Ano au Sud, soit par le Nord sous la conduite de Dangui Kpangni qui lui a préféré
transiter par le Sahié au Nord avant d’atterrir à N‘Zaranou et traverser la Comoé au
Sud de Bétié. D’autres encore comme des fractions de Sahié ont émigré avec les

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royaume embryonnaire du Moronou (1721-1780)
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Assié d’Apremso qui étaient sous le commandement d’Ano Koa Pokou qui lui-même
était soumis au cours de cet exode avant l‘étape de Toumodi à N‘zi Kplé, le chef des
N’zikpli. Donc les Assiè et les N’zikpli formaient le même peuple à l’exode. C’est
après la traversée de la Comoé que les N’zipkli rattrapent la reine Abla Pokou à la
latitude de Toumodi au moment où les Assié se détachent de ce groupe et s’implantent
à Fronobo dans le Moronou où ils se sont mis à la disposition de Dangui Kpangni.
A l’intérieur de ces groupes, s’y sont trouvés d‘autres peuples, venus de d‘autres
Etats de la Côte de l’or, comme les Wassa qu’on retrouve aujourd’hui à Banabo et
Abongoua tout comme les Denkyira, qu’on retrouve à Niandian. Parvenus donc
dans le Moronou, sous la conduite de Dangui Kpangni, ils resteront tous unis autour
de lui et formeront un royaume embryonnaire. Ce royaume se maintiendra jusqu’à
la guerre Agni-Baoulé de 1780 où Dangui Kpangni et son général des armées, Boa
Badjo sans oublier Aklatia et Tingbo, des lieutenants valeureux seront tous tués par
les Baoulé. Le royaume du Moronou éclate.

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

I- SOURCES

1- Sources orales
KABLAN Kacou, Traditionniste, originaire du village d’Andé dans le Sahié, octobre 2002
KASSI André, Traditionniste, à N’Dolikro. Enquête réalisée à N’Dolikro le 29 juillet 2009

2- Les Sources d’archives

Archives Nationales de Cote D’Ivoire (Abidjan)


•Série E : Affaires Politiques
• Sous série 1EE : Politique générale

ANCI, 1EE 138, Rap. 8486, situation politique du N’zi Comoé, Bingerville le 14 Octobre 1908.
ANCI, 1EE 138, pièce 4 : tournée de Sahoua de l’administrateur Marchand Assoumoukro, le
22 Février 1907.
ANCI, 1EE 141(2), réponse n°103 à la lettre n°40 T de Hostains au gouverneur de la Côte
d’Ivoire, Sahoua, août 1908.
ANCI 1EE 141 Rap. n°207 de l’administrateur du cercle au lieutenant gouverneur de la Côte
d’Ivoire, Sahoua, le 29 Septembre 1908.
ANCI, 1EE 140(3/5), Rap. de la situation politique du poste de Sahoua pendant le mois d’août
1908.
ANCI, 1EE (2), tel. 207 du 26 Octobre 1908 du capitaine délibéros au lieutenant gouverneur.
ANCI, 1EE 141 (2), rep 306 de l’administrateur du cercle du N’zi Comoé au lieutenant gouver-
neur, sanction infligé dans le Moronou, Bongouanou le 15 Octoobre 1909 (dans le même
rapport, un lit “groupe Assiè pour partiicipation aux ménées de Tano Kakou“)
ANCI 1EE 141 (2), tel 763 du 7 Novembre 1908 de l’administrateur à zaranou au lieutenant
gouverneur à Bingerville a/s opérations militaires du Moronou.
ANCI, 1EE 144, rapports de tournées du cercle du Nzi Comoé, n°27, Sahoua, le 2 Mai 1908.

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ANCI 1EE 144 n°32, rap. de Marchand, administrateur Adjoint à l’administrateur du cercle des
lagunes, Sahoua le 8 février 1908.
ANCI 1EE 146, n° 5 tournée de Janvier 1908, sahoua le 9 février 1908

3- Ouvrages ayants valeur de sources


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D’Ivoire, Paris, J. André, 1900, 227p.
DAAKU, K.Y., UNESCO research project on oral tradition, part II, Sefwi Wiawso IAS, January,
1974, n°4, 159p.
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II- BIBLIOGRAPHIE

1- Les Ouvrages de Références


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6 vol.
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3- Les articles
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LOUCOU J.N., “Notes sur l’Etat Baoulé précolonial“, in annales de l’université d’Abidjan“ série
I, tome XIII, histoire, 1985, p25-53

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