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« 

Chaque baron est souverain en sa baronnie, mais le Roi est souverain au dessus de tous »

Philippe de Beaumanoir

Autour de l’an 1000, l’autorité royale était parfois méconnue, soit reconnue mais seulement de
manière théorique.

De nombreux historiens considèrent qu’à cette époque, le roi de France Hugues Capet était un
seigneur parmi les seigneurs. Cependant, si l’on envisage les choses sous un angle plus
théorique, symbolique, nous pouvons remarquer que tout le monde estimait le Roi de France
comme ayant une place à part dans l’ordre féodal, le rendant alors unique. Même si son pouvoir
réel était faible, le monarque incarnait la tradition royal et il était sujet au sacrement, à la
différence des princes territoriaux. Ainsi, contrairement à ce qu’on pourrait croire, le Roi de
France avait une certaine emprise sur les grands seigneurs.

La construction de la souveraineté royale n’est pas le fruit d’une doctrine imaginée, mais elle a
repris la logique politique de l’époque. Alors qu’au Xe siècle, L’abbé de Fleury, Abbon de Fleury,
justifiait la politique du roi par la mission spécifique de la royauté, le bien commun. Au XIIe
siècle, ce fondement traditionnel n’a pas été abandonné mais complété par l’idée que les grands
seigneurs étaient obligatoirement les vassaux du roi de France. En effet, la principauté à laquelle
appartenait ces princes n’était que des démembrements du royaume de France. Nous
retrouvons ici une conception pyramidale de la société, sachant que tout fief provient du
démembrement d’un fief plus grand.

La règle du droit féodal exprimée par l’adage : « le vassal de mon vassal n’est pas mon vassal »,
limite considérablement l’autorité du roi de France. Le pouvoir royal se développant à partir des
années 1250, on commence alors à considérer que cet adage ne jouait pas contre le Roi. Nous
retrouvons cette idée dans le coutumier Livre de Jostice et de Plet.

Juste après l’affirmation « le roi ne doit tenir de personne », il ajoute « duc contre vicomte […]
peuvent tenir les uns des autres et devenirs Hommes, sauf la dignité du Roi contre qui hommage
ne vaut rien ».

Pour l’auteur la règle est simple : si chaque degré de la hiérarchie vassalique pouvait tenir les
terres des uns et des autres ainsi que s’engager dans des rapports vassaliques par des serments
alors, en aucun cas ces engagements vassaliques ne pouvaient jouer contre la dignité royale. En
effet, contre la dignité royale, les hommages ne valent rien.

Sans remettre en cause le principe, la règle n’est pas abandonnée. L’auteur considère que cette
règle s’applique à tout le monde mais ne peut pas aller contre le roi. Il ne remet pas en cause les
principes structurants de l’ordre féodal, mais elle ne peut juste pas porter atteinte à l’autorité
royale.

C’est alors qu’étaient données les bases de la souveraineté telle qu’on la concevait au Moyen-
Âge, résumée par l’auteur qui ajoute que « tous sont en la main du roi ».

Ainsi, l’autorité royale s’impose à tout le monde.

Jean Bodin est né en 1529 à Angers et décède à Laon en 1596. C’est un économiste, philosophe
et théoricien politique français de l'époque de la Renaissance. Célèbre pour avoir initié des
concepts fondamentaux tels que la souveraineté et la théorie quantitative de la monnaie. Il est
imprégné de la scolastique médiévale et de l'humanisme de la Renaissance. Il étudie puis
enseigne le droit romain à l'université de Toulouse dans les années 1550. Il gagne Paris en 1561,
suit les cours de l'université et du Collège de France, et y exerce comme avocat. Sa première
œuvre importante, est « Methodus ad facilem historiarum cognitionem » (la Méthode de
l'Histoire), publié en 1566 où il fait référence à « La République » de Platon, il cherche à trouver
les meilleures lois afin de s'en inspirer. Il publie les "Six Livres de la République", l’ouvrage le
plus célèbre et surnommé « le germe de L'Esprit des lois » par La Harpe. Quelques années après
le massacre de la Saint-Barthélemy, il mène une réflexion sur les affaires publiques et
notamment les pouvoirs du Roi. En effet, l’ouvrage est un exposé sur la nature de la République,
dont l'existence se définit par la souveraineté. Selon l’auteur, l'État souverain est plus fort que les
lois civiles et est uniquement soumis aux lois naturelles et divines.

Comment Jean Bodin grâce à la première définition de la souveraineté, a-t-il démontré que le Roi
de France souverain était au dessus de tous les sujets de son royaume ?

Nous verrons dans un premier temps que l’auteur le justifie à l’aide de la République et ce que
représente la souveraineté pour celle-ci, et dans un deuxième temps, comment le Roi est-il
absous des lois tout en étant soumis à des autorités supérieures

II- Une République ayant pour socle la souveraineté

A) Une République formée sur le droit Gouvernement et les ménages

L’auteur débute avec une caractérisation de la notion de souveraineté, notion clé de sa réflexion.
Il la qualifie à l’aide de 2 adjectifs. Le premier est « absolue », signifiant « Qui n'admet aucune
restriction, aucune exception ni concession. » En philosophie, est absolu ce qui existe par soi-
même, sans dépendance. Étymologiquement, ce mot provient de ab et solutus, voulant dire
« sans », « délier », « retenu par rien ». L’idée ici est que la souveraineté existe par elle-même.
Perpétuelle signifie « qui ne connaît pas de cesse, qui dure indéfiniment. ».

Le support et socle de la souveraineté se trouve être alors, selon Jean Bodin, la République et
donc l’État.

Le mot « république » provient du latin res publica qui signifie au sens propre « chose publique »
désignant l’intérêt général, puis le gouvernement, la politique et enfin l’État. Il est interessant de
noter que le Roi, en récupérant une partie la puissance affaiblie par la féodalité, s’est vu attribuer
le titre de justicier car il défendait le bien commun. Ainsi, le Roi défendant l’intérêt général peut
également apparaître comme une volonté de défendre la République même. République où il se
trouve être le seul souverain et donc, défendre sa puissance.

L’auteur affirme ensuite que la souveraineté assure la puissance au rang le plus élevé, en étant
un pouvoir de commandement, et donc de contrainte. En effet, le commandement est la
capacité de contraindre l’autre à exécuter une action qu’il n’aurait pas fait par lui-même.

L’État est fort, puisqu’il dispose du plus haut pouvoir, l'autorité suprême qu’est la souveraineté.

« Il est ici besoin de former la définition de souveraineté, parce qu'il n'y a ni jurisconsulte, ni
philosophe politique, qui l'ait définie, [bien] que c'est le point principal, et le plus nécessaire
d'être entendu au traité de la République »

L’auteur souligne que son œuvre répond vraisemblablement à une nécessité puisque nul n’a
clairement défini la notion de souveraineté. Il exprime le fait que la souveraineté est inhérente à la
République, citant alors une oeuvre de Cicéron: «traité de la République ». C’est un traité sur la
politique, écrit en 54 av. J.-C. L'ouvrage est écrit sous la forme d'un dialogue platonicien, c’est à
dire des dialogues philosophiques entre différents personnages. Cet ouvrage traite de la
meilleure forme d'État et de la manière de bien conduire un État.

Bien que Jean Bodin s’affirme comme étant le premier auteur à donner une définition de la
souveraineté, Aristote l’avait devancé dans son ouvrage de huit tomes Questions de Politique.
C’est notamment dans les livres III et IV qu’il s’intéresse au fonctionnement de l’État et surtout, à
une une hiérarchie des normes. Celle-ci instaure une souveraineté, c’est-à-dire une suprématie
dans plusieurs domaines. Cependant, Jean Bodin est bien le premier à dédier autant de pages à
la définition même de la souveraineté, et c’est en cela qu’il est généralement désigné comme
étant le seul à cette époque.

L’auteur répète alors ses propos concernant la définition de la souveraineté, cette idée de socle
de la République, en les justifiant par l’œuvre de Cicéron. Il indique que cette puissance est le
« point principal et le plus nécessaire d’être entendu » dans l’ouvrage du « traité de la
République ».

En ce qui concerne la République, il affirme apparement une nouvelle fois qu’elle « est un droit
Gouvernement de plusieurs familles et de ce qui leur est commun ».

La notion de « droit gouvernement » peut servir à marquer la différence existant entre une
République et une troupe de bandits. Il est impossible de commercer ou de s’allier avec des
bandits, mais il est possible de le faire dans une république ordonnée. Les bandits ne respectent
ni les lois, ni le droit commun, alors que le gouvernement est réglé et que ses citoyens sont
contraints de les respecter. Ces bandits sont effectivement des réunions d’hommes, mais il leur
manque la finalité de bien vivre ensemble.

C’est alors que vient la notion de ménages, ceux qui ont accepté de vivre en commun dans cette
République et de suivre ses règles. Ils y possèdent des droits, notamment le droit gouvernement
qui concerne les ménages dans ce qui leur est commun.

En effet selon Aristote, il existe une distinction entre le gouvernement domestique, c’est la famille
sous l’autorité du père de famille, et le gouvernement politique, où la population est soumise à
l’état et au Roi. Le ménage peut alors avoir un droit gouvernement sous l’autorité du chef de
famille, c’est un gouvernement particulier, ce qui leur est propre. Ceci se nomme la puissance
domestique. Dans la République il ne s’agit pas d’une puissance domestique.

En effet, la République est formée de composantes diversifiées, comprenant les familles qui sont
la source et l’origine des républiques. Cependant dans la République même, cette puissance
domestique est dominée par la puissance absolue qui n’est autre que la souveraineté.

Pour les ménages, le droit gouvernement concerne ce qui leur est propre, particulier. Pour la
république, le droit gouvernement concerne ce qui est commun, public.

Ainsi, si les particuliers ont le gouvernement de ce qui leur est propre, ils ne doivent pas en
contrepartie déroger aux lois communes, publiques. Nous pouvons ici faire allusion aux
seigneurs possédant des terres du royaume de France, mais qui ne doivent pas déroger aux
règle du souverain de ce royaume: le Roi.

Après que cadre soit posé, Jean Bodin approfondit la définition de la souveraineté

B) La souveraineté dissociant le Roi, de sa couronne et les sujets, du Roi

L’auteur indique que la souveraineté est est puissance « perpétuelle » dans l’idée d’une
transmission de ce pouvoir, d’une continuité continuité. La souveraineté ici envisagée serait
presque sempiternelle. Le pouvoir est donné de son ancien propriétaire à un nouveau, comme un
héritage. Cela fait écho à l’adage « Le Roi est mort, vive le Roi ». Celui est dérivé d'une
déclaration du Conseil royal anglais au XIIIe siècle : « Le trône ne sera jamais vide ! ». Le
messager criant cette phrase de ville en ville annonçait la mort du roi tout en célébrant l'arrivée
du nouveau monarque.En effet, à la mort d'Henri III, en 1272. Son fils, Édouard Ier, était à
plusieurs lieues de l'Angleterre, participant à une croisade. Pour éviter toute guerre de
succession, le Conseil royal prononça la phrase énoncée plus haut qui obligea les crieurs à
proclamer : « Le Roi est mort, vive le Roi ! ».

L’idée développée par l’auteur peut s’apparenter à la dissociation du roi et de sa couronne.

Bien que la puissance de la souveraineté est infinie, son titulaire est éphémère et sera donc
remplacé.

Une déshumanisation est alors évoquée lorsque l’auteur parle de la délégation de la souveraineté
à « un ou plusieurs à certains temps ». Bien que le Roi prête de sa puissance à d’autres, une fois
que celle-ci est rendue ou reprise, ces personnes reviennent à la normale. Le terme « rien que »
appuie cette idée de déshumanisation en affirmant que lorsque que le pouvoir est repris, la
personne est réduite de manière péjorative à un simple sujet, comme si l’élévation de la
personne ne peut-être atteinte qu’en ayant une partie de la souveraineté et sans cela, elle
redevient une personne parmi tant d’autres.

De plus, une image de fatalité de la perte de ce pouvoir est exprimée dans ce texte. Ces sujets
détenant le pouvoir ne sont que « dépositaires, et garde de cette puissance ». Dépositaire
désigne une personne à qui a été remis quelque chose et qui s'oblige à le garder jusqu'au jour
où elle le restituera à première réquisition. Dans le texte, un sujet à son Roi. Puisqu’il ne sont pas
propriétaires de cette puissance, ils ne peuvent se qualifier de « Princes souverains ».

L’auteur va justifier ses propos après la conjonction de coordination « car ». Jean Bodin va
exprimer la différence entre une donation et un prêt pour illustrer la délégation de la
souveraineté. Si un bien est prêter, le prêteur restera le propriétaire. La personne à qui l’on a
prêté quelque chose ne peut se considérer comme le détenteur. Cependant, le bien prêté peut
être utilisé dans son intégralité. C’est en cela que la personne qui s’est vu recevoir une puissance
« demeure néanmoins saisi de la puissance et juridiction, que les autres exercent par forme de
prêt ou de précaire ». Précaires signifie: qui n'est octroyé, qui ne s'exerce que grâce à une
concession, à une permission toujours révocable par celui qui l'a accordée. En effet, si les autres
sujets n’ont pas reçu cette puissance, ils ne peuvent user d’un pouvoir que de façon incomplète.

Enfin, si que le prince est trop jeune ou ne peut régner, c’est un Régent qui sera le détenteur, de
façon totale, du pouvoir de la souveraineté. Cependant, le prêt n’est pas une règle à laquelle il
peut échapper. Certes, « les édits, mandements, et les lettres patentes [sont] signés et scellés du
seing et [sceau] des Régents », mais « le maître est réputé faire ce qu’il a chargé son procureur
de faire ». Ainsi, le Régent n’est qu’un titulaire temporaire de la souveraineté, mais en plus, il ne
représente que la volonté d’un Roi qui ne peut régner. Jamais un Régent irait contre la volonté,
l’opinion et les idées du véritable détenteur de la souveraineté. Le Régent ne fera rien à
l’encontre de la souveraineté et par conséquent son détenteur. Ceci s’appliquait avant
l’ordonnance de Charles V fixant la majorité des rois de France à 14 ans et l'organisation de la
régence.

L’auteur cite « le bon Comte Thibaut », aussi appelé Thibaut II de Navarre. Âgé de quatorze ou
quinze ans, il hérite du trône de Navarre. Il dut alors subir la régence de sa mère Marguerite de
Bourbon, puisque la majorité en Navarre est fixée à vingt et un ans. Durant cette régence, il fut
désigner comme « procurator regni Francorum », soit gérant de son royaume.

Cependant, même sous régence, « c’est toujours le Roi qui parle, et qui commande. »

II- Une souveraineté absolue ne dispensant cependant pas des lois de Dieu et de la nature

A- Une différence entre souveraineté absolue ou non absolue justifiée par la donation

L’auteur évoque la seconde partie de la définition de la souveraineté : la puissance absolue. Le


texte est construit, on retrouve une cohérence dans la recherche de la définition de la
souveraineté la plus détaillée possible.

Si « le peuple ou les seigneurs d’une République peuvent donner purement et simplement la
puissance souveraine », c’est en effet l’idée reprise des ménages, qui ont une autorité sur leur
particulier vont le transmettre au Roi. L’autorité que les chefs de familles vont ou le propriété du
seigneur sur sa terre vont être transmises au Roi pour que celui-ci mette cette puissance au
service du bien commun. Ainsi, le souverain pourra « disposer des biens, des personnes, et de
tout l’état à son plaisir » ainsi que déléguer ce pouvoir à qui il le souhaite.

L’idée de donation et de prêt apparaît une nouvelle fois, l’auteur utilise la répétition pour
souligner l’importance de ce message. Cependant, il vient rajouter des information et nuancer
ces propos. Une donation semble pour Jean Bodin, être « parfaite et accomplie » si celle-ci ne
contient aucune charge ou condition. Si une donation contient une contrepartie, cela n’est pas
une vraie donation mais s’apparente plus à un échange.

Or, la République comme vue précédemment, est faite et composée de ménages. Donc ces
différents ménages vont donner une partie de leur autorité « particulière » au roi, pour que celui-
ci mette en commun ces autorités, afin qu’il puisse régner sur le bien commun de chacun.

Le Roi obtient donc, par l’accord de tout les citoyens, le droit de propriété du royaume. La
donation des ménage est réelle car par aucune condition ni charge n’est requise.

En contrepartie, si « la souveraineté donnée à un Prince » est sous conditions ou comporte une
charge, alors la souveraineté ne peut être absolue. Cette souveraineté n’est alors plus une
donation, mais un échange ou un prêt. La souveraineté absolue est sans partage et ne peut être
remise en cause.

L’auteur se recentre alors sur le caractère même de l’absolution de la souveraineté. Il explique


que cette « puissance est absolue et souveraine, car elle n’a autre condition que la loi de Dieu et
de nature ne commande ». Le terme condition n’est pas le même ici, il est sous la forme de
l’essence. Jean Bodin affirme donc le caractère divin du pouvoir de la souveraineté.

Le pouvoir est donné et voulu par dieu, c’est dieu qui donne le pouvoir, a des fins précise et
limitées. Sous entendu, si le pouvoir n’est pas exercé à ce pourquoi dieu a voulu, si le pouvoir
n’est pas exercé comme un service, le pouvoir alors perd sa légitimité car il a été voulu par Dieu
y pour être exercé comme un service.

Affirmer que le pouvoir vient du divin légitime le pouvoir du souverain

En effet, l’affirmation de l’origine divine du pouvoir, vient légitimer le pouvoir aux yeux des
chrétiens, mais cette origine divine vient limiter le pouvoir. Car s’il vient de dieu, le pouvoir ne se
légitime pas lui même mais il tire sa légitimité du supérieur. Il la tire de dieu. C’est une simple
domination s’ils n’est pas légitime, une tyrannie.

Ceci explique alors qu’un sujet peut être exempter des lois, mais pas de la souveraineté qui
descend des lois de la nature et de Dieu.

B- Un Roi absous de ses propres lois mais limité par la puissance divine et la nature

Jean Bodin affirme le principe que, si un sujet, qui n’est pas détenteur de la souveraineté peut ne
pas être contraint par les lois, il ne peut cependant pas échapper au contrôle de la souveraineté,
c’est à dire du Roi. Or, il faut que ceux qui détiennent la souveraineté « ne soient aucunement
sujet au commandement d’autrui » Cela signifie que le Roi n’a point de supérieur, d’où la
définition de souverain: qui est au-dessus des autres, dans son genre. Pour que ce Roi ne soit
pas soumis à autrui, Jean Bodin met un point d’honneur sur la législation royale. Il théorise alors
« la puissance de donner et casser la loi » du souverain.

La « puissance de donner et casser la loi » est une notion de droit constitutionnel visant à définir
le pouvoir du souverain. En faisant du Roi la source même de la loi, il légitime le concept de
monarque absolu qui donne et casse la loi sans qu'il soit besoin pour cela du consentement de
ses sujets.

La souveraineté, qui n'a « d'autre limite que la loi de Dieu et de nature » se traduit
immédiatement par un double pouvoir du Prince. Il peut donner et casser la loi mais il est aussi
absous de l'obéissance aux lois qu'il établit. En corollaire, la « puissance de donner et casser la
loi » définit selon l'auteur la « compétence législative » du souverain, dont elle constitue un
« attribut essentiel ». En effet, c'est de cette compétence législative que procèdent toutes les
prérogatives du souverain.

Pour Jean Bodin, en effet, « le point principal de la majesté suprême et absolue gît
principalement à donner loi aux sujets en général sans leur consentement ».

Au début du XIIIe siècle, le Roi légifère mais de façon encore timide. Il va surtout être connu pour
modifier la coutume, bien que très ancienne, pour s’adapter à la société qui l’entoure. L’idée ici
est de ce détacher aussi des liens du passé, c’est ce que l’auteur va également exprimer, en
indiquant que « le Prince souverain est exempt des lois de ses prédécesseurs ».

L’autonomie et la liberté du Roi vont être renforcées par l’image déjà évoquée précédemment
que le Roi est absous de toutes lois, de ses prédécesseurs ainsi que de ses propres lois. En
effet, « il est impossible par nature de se donner loi, non plus que de commander à soi-même
chose qui dépende de sa volonté »

L’auteur cite la phrase indiquée à chaque fin des édits et ordonnances écrite par le Roi, indiquant
que tout est toujours fait selon sa volonté. L’auteur va également citer le Pape en indiquant que
celui-ci ne se « lie jamais les mains ». Par cette phrase, Jean Bodin place le Roi législateur au
même niveau que le Pape, prouvant donc grâce à cette compétence capitale que le Roi est non
seulement le plus puissance de son Royaume mais également à l’égal du Pape. Or, les conflits
entre la papauté et le Roi de France furent nombreux, notamment entre Philippe Le Bel et le
Pape Boniface VIII. En 1302, le Pape produisit une Bulle, Unam Sanctam, afin de démontrer la
supériorité du Pape face au Roi de France. Or Jean Bodin, en passant par le pouvoir législatif du
Roi va le placer à un niveau similaire.

Cependant, sous peine de « faire guerre à Dieu », tout être vivant est inférieur aux lois divines et
de la nature. Tous doivent « baisser la tête en toute crainte et révérence », démontrant une
soumission. Nous voyons ici une hiérarchie logique qui, bien qu’elle assouvisse le Roi à Dieu et à
la nature, le rend cependant intouchable. Si toute personne, même le Roi doit s’incliner face à
ces autorités supérieurs, alors le pouvoir d’origine divine qu’est la souveraineté ne peut être
défier par quiconque. Le Roi devient donc intouchable, bien que soumis.

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