Vous êtes sur la page 1sur 11

Quelle liberté dans la création des règles ?

la hiérarchie
Comment la loi est-elle soumise à un principe hiérarchique ?
Si on dit que le principe est hiérarchique c’est que chaque autorité qui est habilitée à édicter
des règles de droit doit respecter les règles de droit édictées par l’autorité hiérarchique
supérieure. Est-ce que le Parlement doit respecter une hiérarchie ?
Dès lors que dans la conception française, la loi au sens étroit exprime la volonté du peuple
souverain, on ne voit pas trop comment le peuple puisqu’il est souverain devrait avoir à
respecter une autorité hiérarchiquement supérieure.
On a précisément défini le souverain comme celui qui n’était soumis à personne et qui au
contraire soumettait les autres. Donc si le peuple français est souverain, il n’y a personne au-
dessus de lui, donc lorsqu’il édicte par le biais de ses représentants à l’Assemblée nationale
et au Sénat des règles de droit, il n’y a rien au-dessus de ces règles. Personne ne peut
imposer au Parlement de respecter une autorité, une hiérarchie.
Le seul truc que peut faire le peuple, c’est que lorsque l’on dit que les règles de droit doivent
respecter des valeurs, ils doivent donc respecter un idéal de justice.
I/ LE CONTRÔLE DES LOIS
A. PRINCIPE D’UN CONTRÔLE.
1. Possibilité ?
Comment est-il possible, qu’il puisse y avoir un contrôle hiérarchique des lois ?
Le peuple, parce qu’il est souverain, a décidé dans un texte fondamental (la
Constitution) de se doter de règles qui permettent de mettre en œuvre son
fonctionnement. Lorsque le peuple a adopté la Constitution, il a limité lui-même
par sa propre volonté la manière dont il allait exercer sa souveraineté.
2. Légitimité
La Constitution que le peuple français s’est donné à lui-même est une norme qui
est hiérarchiquement supérieure à la loi parce qu’il l’a bien voulu.
Les lois doivent respecter la Constitution.
Ne pas confondre la liberté et la licence où la liberté est l’anarchie.
La vraie liberté ce n’est pas faire ce que je veux quand je veux, ça c’est être
esclave de ses caprices.
La vraie liberté c’est de pouvoir définir les lois auxquelles j’entends obéir =
autonomie.
Socrate : « Connais-toi toi-même »
Les grecques : « connait les règles auxquelles tu entends te soumettre ».
B. L’INSTRUMENT : LA CONSTITUTION
1. Origines : les lois du royaume
On la retrouve sous l’Ancien régime, dans les lois du royaume. Les juristes de
l’Ancien régime avaient distingué les lois du roi (édits royaux) et les lois du
royaume c’étaient des règles qui constituaient une sorte de « normes
constitutionnelles » qui était supérieure à la volonté du roi. Même le roi ne
pouvait pas modifier ces règles du royaume.
En pratique, ces règles étaient fondamentalement les règles qui présidaient à la
dévolution de la couronne de France, des principes d’hérédité, d’ainesse, de
masculinité et de catholicité (Ex : Henri de Navarre, protestant, renoncé à sa
religion. « Paris vaut bien une messe »).
Comment c’est traduit historiquement cette supériorité des lois du royaume à la
volonté du roi ?
 Charles VI : défait à Azincourt en 1415. Il décide, pour mettre fin à la
guerre avec les anglais, d’écarter son fils du trône de France et de marier
sa fille avec le roi d’Angleterre, et la fille a porté en dote au roi
d’Angleterre le royaume de France. Cependant, les juristes français ont
refusé catégoriquement car le traité signé avec les anglais n’a aucune
valeur.
 François I : défait à Pavie devant les troupes de Charles Quint. Il est fait
prisonnier.
Il trouve une idée, celle d’abdiquer la couronne de France et la met aux
mains de son fils. Mais les juristes ont dit que c’était impossible car la
couronne doit se garder jusqu’à la mort du roi.
2. La naissance des constitutions modernes
On trouve une source historique et une source philosophique.
Source philosophique : c’est lié à la philosophie du contrat social.
Une Constitution c’est la transcription politique, juridique, concrète de l’idée
philosophique de contrat social.
 Le contrat social de Rousseau (1762) : dans l’esprit de Rousseau c’était
une introduction à un traité de législation théorique. Rousseau insiste
dans l’idée d’égalité entre les citoyens.
 Cependant, l’idée de contrat social a été développée avant lui par des
anglais, notamment Thomas Hobbes qui écrit en 1651 le Léviathan qui
désigne en réalité l’organisation étatique. Pour lui, la question était de
savoir pourquoi les Hommes qui vivaient à l’état de nature avait décidé de
passer un contrat social dans lequel ils abdiquent en faveur du souverain
une partie de leur liberté c’est tout simplement pour éviter l’état
d’anarchie et de guerre civile. D’où la phrase « Homo homini lupus » qui
signifie que « l’Homme est un loup pour l’Homme ».
 Un second philosophe, John Locke qui écrit en 1690, le traité du
gouvernement civil (ouvrage philosophique et politique), pour lui le
contrat social passé par les Hommes est fondamentalement tourné vers la
protection des libertés individuelles.
Source historique : En France, on a l’exemple américain, avec l’indépendance des
États-Unis (4 juillet 1776), les États américains se sont dotés les uns après les
autres de Constitution et ces Constitutions américaines sont traduites en France
par la Rochefoucauld et à la fin de l’ancien régime, à la veille de la Révolution, on
parle beaucoup de la Constitution des américains, et on prend la décision d’en
faire une en France aussi.
3. Les constitutions françaises
Les Constitutions apparaissent en France avec la Révolution. La France a connu 5
Républiques et on ne dénombre pas moins de 15 constitutions.
Montesquieu a imprimé sa marque avec son idée de la séparation des pouvoirs
(pouvoir législatif, exécutif, judiciaire) mais attention ce n’est pas son idée clé,
c’est plutôt l’idée de contre-pouvoir.
Au début de la Révolution française, c’est le pouvoir législatif qui a la meilleure
part dans la Constitution. Puis, on va renforcer peu à peu dans les Constitutions le
poids du pouvoir exécutif jusqu’à arriver à l’Empire (Constitution du consulat)
dans lequel c’est le pouvoir exécutif qui a quasiment tous les pouvoirs.
C. L’ÉMERGENCE D’UN CONTRÔLE DE CONSTITUTIONNALITÉ
A l’origine, sous la Révolution française, en dépit de l’importance que la Constitution a
attaché à l’idée de Constitution, elle n’a jamais garanti la soumission des lois à la
Constitution.
Cette émergence de l’idée de contrôle est liée à un double facteur :
 Facteur des idées : c’est le concept d’état de droit. Il y a état de droit lorsque
l’État lui-même accepte de se soumettre à des normes supérieures.
 Les faits : au lendemain de la 2nd guerre mondiale, on s’aperçoit que le
gouvernement de Vichy a adopté une législation antisémite contraire à toutes les
valeurs de la France et que l’on ne peut pas laisser un Parlement sans contrôle
voter des lois racistes.
Dans la Constitution de la Vème République (du 4 octobre 1958), on va mettre en place
le Conseil constitutionnel.
D. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
1. Le rôle initial
Au début, en 1958, la grande innovation de la Constitution avec les articles 34 et
37 de la Constitution. Dorénavant, en 1958, on n’a plus un Parlement qui est
compétent dans n’importe quelle matière et où il peut prendre des lois dans
n’importe quelle matière. L’article 34 lui donne une compétence limitée et dans
tous les domaines qui ne sont pas attribués au Parlement et bien la compétence,
c’est la compétence du Gouvernement.
Dans la Constitution de 1958, c’est de Gaulle (autocrate) qui voulait renforcer la
puissance de l’exécutif. Il craignait que le Parlement empiète sur l’exécutif, il a
donc créé le Conseil constitutionnel dont le but était de dire que lorsqu’une loi
était votée et qu’elle intervenait dans le domaine de l’article 37 c’est-à-dire dans
le domaine réservé au gouvernement, que le Conseil puisse dire que cette loi est
inconstitutionnelle.
Quand en 1982 l’occasion s’est présentée d’une loi qui n’intervenait
effectivement pas dans le domaine de l’article 37, le Conseil a dit que ce n’était
pas son travail et que si le Parlement voulait voter une loi dans le domaine
réservé à l’exécutif, ce n’est pas grave, la loi est quand même conforme à la
Constitution.
2. Nouveau rôle
Le Conseil constitutionnel s’est attribué un autre rôle car il trouvait cela plus
intéressant c’était de contrôler la conformité des lois à la Constitution sans tenir
compte des articles 34 et 37.
Le Conseil constitutionnel a rendu une décision qui a été qualifiée de « coup
d’état judiciaire ». Une décision du 16 juillet 1971 : la liberté d’association.
Le Conseil dans cette décision dit : « mon rôle ça n’est pas forcément contrôler la
conformité de la loi à la Constitution du 4 octobre 1958 mais de contrôler la
conformité de la loi à la Constitution de 1958 et du préambule de la
Constitution » (renvoi au préambule de la Constitution de 1946 et de la DDHC).
En se servant du prétexte d’un contrôle hiérarchique, de dire que la loi doit être
conforme à la norme supérieure qui est la Constitution, le Conseil s’est arrogé le
pouvoir de faire un contrôle des valeurs véhiculées par une loi.
A chaque fois qu’une loi est contraire à un principe fondamental (préambule de la
Constitution de 1946 et DDHC) ou remet en cause une liberté fondamentale, je
peux la déclarer inconstitutionnelle.
La Cour suprême des États-Unis a accepté d’opérer un tel contrôle de vérifier la
conformité des lois à la Constitution des États-Unis et aux 10 amendements
depuis 1803 d’après l’arrêt Marbury versus Madison.
Pendant très longtemps, le contrôle de constitutionnalité des lois en France s’est
limité à un contrôle apriori c’est-à-dire que le Parlement votait la loi mais avant
qu’elle rentre en vigueur, elle devait être promulguée par le Président de la
République.
L’idée c’est qu’entre le moment où elle est votée par le Parlement et le moment
où elle est promulguée, on peut saisir le Conseil constitutionnel. Le Président de
la République, 6O députés, 6O sénateurs, le président de l’assemblée nationale,
celui du sénat, peuvent le saisir par exemple.
On saisit le Conseil et c’est celui-ci qui examine la loi et si le Conseil dit que la loi
est inconstitutionnelle le président n’a pas le droit de la promulguée et la loi ne
rentre donc pas en vigueur et inversement. Le contrôle est avant que la loi rentre
en application.
Sous Nicolas Sarkozy un changement s’est opéré, en effet, la réforme de mars
2010 de la Constitution française par laquelle on a mis en place ce qu’on appelle
la QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité), ce mécanisme est très
important car il permet de vérifier la conformité d’une loi à la Constitution alors
que la loi est déjà en vigueure.
Comment ça marche ?
Nous sommes en procès, on veut nous appliquer une loi, mais on considère que
cette loi est contraire à la Constitution, on va soumettre au juge une QPC en
disant : « Monsieur le juge avant de m’appliquer cette loi, assurons-nous d’abord
qu’elle est bien conforme à la Constitution ». Le juge va se dire qu’effectivement
étant donné qu’on lui pose la question, il y a un doute, il va transmettre la
question d’abord à la Cour hiérarchiquement supérieure c’est-à-dire pour l’ordre
administratif le Conseil d’État et pour l’ordre judiciaire la Cour de cassation. La
Cour de cassation examine la question :
 Sérieuse, transmission au Conseil constitutionnel. Le Conseil examine, soit
elle est conforme et on applique la loi, soit elle n’est pas conforme et là, la
loi ne sera plus du tout applicable (disparait de l’ordre juridique).
 Fantaisiste, pas de doute donc pas de transmission au Conseil
constitutionnel.

II/ LE CONTRÔLE DES RÈGLEMENTS


Loi au sens large = loi au sens étroit (voté par le parlement) + les décisions prises par le
pouvoir exécutif des règlements.
Les règlements peuvent émaner pour des décrets du Premier ministre, du Président de la
République ou des ministres. Il peut y avoir des arrêtés ministériels, arrêtés préfectoraux ou
municipaux. Un maire est soumis au préfet qui lui-même est soumis au Président de la
République.
A. DIFFICULTÉ
La hiérarchie interne à l’administration est respectée. La difficulté se situe plus dans la
hiérarchie externe.
Une règle de droit prise par le pouvoir exécutif, doit-elle être conforme à une autre
source de droit (conforme à la loi à la constitution) ?
Oui, il y a un contrôle de la conformité des règlements du pouvoir exécutif à des règles
de droit hiérarchiquement supérieures
B. LE RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR
Le but est d’obtenir l’annulation du règlement définitivement (disparait de l’ordre
juridique). Il faut saisir le tribunal administratif dans un délai de 2 mois à partir du
moment où la loi est entrée en vigueur. Le tribunal va faire une vérification pour savoir si
le règlement est conforme aux règles de droit qui lui sont hiérarchiquement supérieures.
Il y a 2 vérifications qu’il faut distinguer :
 Règlements d’application : ceux pris en application d’une loi c’est-à-dire
que le Parlement vote une loi selon son domaine de compétence (article
34) et comme le parlement ne rentre pas dans les détails il renvoie au
pouvoir exécutif c’est-à-dire à un règlement d’application des modalités
concrètes de mises en œuvre de cette loi.
Le juge va par la suite vérifier au prétexte d’appliquer la loi, le règlement
ne va pas contredire la loi. Soit le juge estime que la loi est conforme, soit
il estime que le règlement dénature la loi => annulation du règlement.
Cependant, il n’y a pas de contrôle de conformité des règlements envers
la Constitution.
Théorie de la loi écran : on contrôle la conformité du règlement à la loi,
mais la loi fait écran à un contrôle du règlement par rapport à la
Constitution. Si le règlement est conforme à la loi mais contraire à la
Constitution, cela voudrait dire que la loi est contraire à la Constitution.
Seul le Conseil Constitutionnel peut dire que la loi est contraire à la
Constitution.
 Règlements autonomes : interviennent dans le domaine de l’article 37 de
la Constitution c’est-à-dire dans les domaines qui ne sont pas réservés au
Parlement. Comme le règlement autonome n’a pas de loi qu’il est censé
appliquer, le Conseil d'État a toujours refusé de considérer qu’un
règlement autonome était l’équivalent d’une loi. Il considère que ces
règlements autonomes émanent du pouvoir exécutif et sont donc soumis
à l’ensemble des lois (« à l’esprit des lois » selon Montesquieu).
C. L’EXCEPTION D’ILLÉGALITÉ
Elle vise quelque chose de plus limitée c’est-à-dire que dans le procès qu’on est en train
de me faire aujourd’hui, l’administration veut m’appliquer un règlement et moi j’estime
que le règlement est illégal je peux l’écarter dans mon procès.
Le résultat est mince car même s’il n’est pas appliqué à moi, il peut être appliqué à
quelqu’un d’autre car celui-ci ne disparait pas. Il est mis à l’écart pour mon procès.
Avantage de la procédure : soulevé l’exception d’illégalité à n’importe quel moment.

III/ LE CONTRÔLE DES AUTRES SOURCES DE RÈGLES DE DROIT.


A. COUTUME.
1. Coutume secundum legem (qui suit la loi)
Dans le cas où c’est la loi qui dit qu’il faut appliquer la coutume.
Code civil, article 671 : lorsque vous voulez planter un arbre près de la limite de
notre terrain qui nous sépare de notre voisin, à quelle limité peut-on le faire ?
La loi dit : pour savoir à quelle distance il faut planter l’arbre il faut d’abord aller
voir la coutume de son pays, s’il n’y en a pas, il faut appliquer une règle
subsidiaire : si l’arbre fait plus de 2m vous devez le planter à 2m de distance.
2. Coutume praeter legem (d’après la loi)
La loi ne fait pas de référence à la coutume. La loi manque d’être assez précise
donc on va compléter la loi en décidant d’appliquer la coutume (Ex : Le code civil
ne prévoyait aucune règle pour dire que le mariage était entre un homme et une
femme. Donc, il y a un maire (de Bègles), Noel Mamère, qui a dit que comme ce
n’est pas marqué dans la loi, je vais marier deux hommes. Le procureur a
demandé l’annulation du mariage et l’a obtenu. Le tribunal a dit qu’il n’y a pas
uniquement la loi qui s’applique, il y a également la coutume. En France, il y a une
coutume qui considère que le mariage peut être célébrer qu’entre un homme et
une femme)
3. Coutume contra legem (contre la loi) ?
La loi accepte que la coutume dise le contraire.
(Ex : article 521-1 du Code pénal « les actes de cruauté envers les animaux sont
réprimés » : les corridas, combat de coq ? « Il est interdit de mettre à mort ces
animaux mais s’il existe une tradition locale ininterrompue contraire, on peut
procéder à ces actes sans sanction pénale »).
Caton l’ancien disait que « la loi est formidable car c’est la loi que le peuple se
donne à lui-même ».
Pourquoi préférer la loi à la coutume ? Dans la loi, il y a un côté obligatoire
(commandement du souverain) donc on nous impose quelque chose même si le
peule fait différemment, s’il y a une loi, la loi est un commandement donc on doit
la respecter. La loi est le commandement du peuple donc pourquoi le peuple
ferait quelque chose et en même temps se commanderait quelque chose de
contraire ?
La réponse se trouve dans la distinction entre les lois impératives (lois d’ordre
public) et les lois non impératives : s’il y a une coutume contraire, on va appliquer
la coutume.
(Ex : La solidarité. Lorsqu’une personne prête de l’argent à plusieurs personnes,
normalement elles ne sont pas tenues de rembourser. La loi dit en revanche que
l’on peut dire dans le contrat avec une clause de solidarité en mettant à
l’intérieur le jour où je veux me faire rembourser et la personne qui va me
rembourser l’intégralité de la somme « prêtée ». Mais, il y a une coutume en
matière commerciale qui veut qu’entre commerçant, si ABC sont commerçants, la
solidarité est automatique entre eux. Cette coutume s’applique contre ce que dit
la loi).
L’hypothèse où on a eu une coutume qui va contre une loi d’ordre publique ?
Impossible. La coutume ne peut pas déroger à la loi.
La Cour de cassation a dit dans un arrêt de 1957 : « l’usage ne saurait prévaloir
contre une disposition légale présentant un caractère d’ordre public ».
(Ex : l’anatocisme = intérêt sur l’intérêt. Interdit par le code civil, pour protéger
les débiteurs. Cependant, la Cour de cassation a estimé qu’il y avait un usage
bancaire contraire qui permet au banquier de payer les intérêts sur les intérêts).
B. JURISPRUDENCE
Désigne deux choses :
 Ensemble des décisions rendues par les tribunaux.
 Règles de droit qui émanent des tribunaux et des Cours. Édictées par les
juges.
1. Hiérarchie externe
La règle édictée par un tribunal ou une cour doit respecter la loi au sens large. Le
meilleur signe en est que lorsque le juge créé une règle de droit et qu’elle ne plait
pas au Parlement ou au Gouvernement on va voter une loi qui va remettre en
cause la règle jurisprudentielle, qui va l’effacer et la remplacer.
Comme le dit la sagesse populaire : « il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut
pas entendre ». Or, si la Cour chargée d’appliquer la loi veut faire la sourde
oreille, elle peut le faire en disant que le sens de la loi votée vient confirmer ce
que j’avais dit antérieurement.
2. Hiérarchie interne
Les juridictions françaises sont organisées en 3 instances :
 Première instance
 Cour d’appel
 Le Conseil d’État (ordre administratif) et dans l’ordre judicaire on a la Cour
de cassation
Lorsqu’une règle de droit a été élaborée par un tribunal ou une Cour d’appel et
que la Cour de cassation ou le Conseil d’État considère que cette règle de droit
est infondée, ils peuvent la remettre en cause.
Conclusion : une règle de droit élaborée par la Cour de cassation ou le Conseil
d’État est obligatoire pour les autres juridictions. C’est vrai et faux. C’est faux,
parce qu’en théorie les règles de droit qui émanent de la Cour de cassation ou du
Conseil d'État n’ont aucun caractère obligatoire pour les juridictions inférieures.
Quand on parle de force obligatoire d’une décision de justice, cette force
s’adresse aux parties du procès. En revanche les tiers n’ont pas à la respecter et
les autres juges.
Le Tribunal de grande instance sait que s’il applique une règle qui n’est pas celle
de la Cour de cassation ou celle du Conseil d’État, la partie à laquelle cette
application n’est pas favorable va faire appel et si elle perd en appel, elle va aller
en Cour de cassation et la Cour de cassation va dire que le tribunal a appliqué une
règle qui n’est pas celle que j’ai fixé donc je ne suis pas d’accord et donc je remets
en cause la décision du tribunal. Le juge voit sa décision cassée, il devra reprendre
son boulot.
La Cour de cassation et le Conseil d'État doivent-ils respecter les propres règles de
droit qu’ils ont fixé il y a 1 an, 2 ans, 3 ans ? Non, ils peuvent changer la règle de
droit (revirement de jurisprudence). Ils sont liés au fait, que la Cour de cassation
et le Conseil d'État s’aperçoivent que les tribunaux et les Cours d'Appel refusent
d’appliquer la règle de droit car ils pensent que la règle de droit n’est pas bonne,
ils s’expliquent et n’appliquent pas cette règle de droit parce qu’elle n’est pas
bonne et ils appliquent une autre règle.
La Cour de cassation écoute ce qu’on lui dit et très fréquemment, elle se range
aux arguments des juges de fond et va modifier la règle qu’elle avait énoncée.
Comparaison avec le système anglo-saxons : Chez les Bretons (outre-manche), on
avait une règle différente qui est la règle de la force obligatoire du précédent
(obligé de respecter la décision de la Cour supérieure (chambre des Lords)).
Toutes les juridictions doivent l’appliquer même la chambre des Lords.
Depuis 1960, en Angleterre, on peut remettre en cause un précédent et les
juristes anglo-saxons déploient des trésors d’ingéniosité avec le distinguo.
C. DOCTRINE ?
La doctrine ne doit pas respecter un principe hiérarchique. On fait ce que l’on veut et on
dit ce que l’on veut. Pas de hiérarchie interne et externe. La doctrine a une liberté totale.
Un membre de la doctrine n’impose rien à personne.

IV / LE CONTRÔLE HIÉRARCHIQUE INTERNATIONAL


A. PRINCIPES
La France est liée par divers traités internationaux.
 Doit le respecter
 Surtout quand elle décide d’édicter des lois
 Ne doit pas être contraire au Tribunal d'instance.
Article 55 de la Constitution française : « les traités internationaux ont une force plus
grande que les lois votées par le Parlement ».
Dans la Hiérarchies des normes le traité est au-dessus des lois votées par le Parlement
français.
Texte au sens étroit (dans ordre interne) qui est contraire à un texte qui a une dimension
internationale et c’est ce que l’on appelle : « le contrôle de conventionalité ».
1. Cas de l’Union Européenne
Le droit de l’Union Européenne, qui se divise en 2 catégories :
 Droit de l’union originaire : ensemble des différents traités qui depuis sa
fondation (1957 par traité de Rome) qui ont mis en place la Construction
de l’Union Européenne (compétences des organes de l’Union Européenne
et fonctionnement). Traité de Rome en 1957, traité de Maastricht en
1992, traité de Lisbonne en 2009 ce qui donne naissance à une refonte
des traités : le TFUE (Traité de Fonctionnement de l’Union Européenne) et
le TUE (Traité de l’Union Européenne).
C’est l’équivalent de notre Constitution.
 Droit de l’union dérivé : un traité se borne à prévoir des obligations
mutuelles entre les États signataires. Mais les traités qui ont mis en place
l’Union Européenne ont créé des organes : le Parlement Européen, la
Commission européenne, le Conseil des ministres, la Conseil de justice de
l'Union Européenne, ils ont pour fonction de créer des nouvelles règles de
droit applicable à tous les pays membres de l’Union Européenne.
Ces organes qui mettent en place ces traités (que met en place le droit
Constitutionnel européen) ont à leur tour créé des règles de droit dérivées :
 Les règlements européens
 Les directives (fixent un objectif à atteindre)
Quels sont les conflits que l’on va rencontrer ?
B. CONSTITUTION NATIONALE ET DROIT DE L’UNION ORIGINAIRE
1. Absence de difficulté en théorie
Il ne peut pas y avoir de conflit. Comment ça marche quand on veut adhérer à un
traité ? Celui qui signe les traités en France c’est le Président de la République
mais le traité ne va pas rentrer en vigueur pour autant. Il faut pour cela une loi
votée par le Parlement : une ratification de traité qui sera soumis au Conseil
Constitutionnel pour vérifier sa conformité à la Constitution. Soit le Conseil
Constitutionnel dit que le traité est conforme et celui-ci rentre en vigueur soit il
dit que non, et là, il faudra modifier la Constitution française.
2. Existence de difficultés en pratique
Par exemple, on prend le cas de la Nouvelle Calédonie, qui est rentrée dans un
processus d’indépendance qui prévoyait que 10 ans après l’amorce de ce
processus (1998), il devait y avoir transfert de compétences par la France aux
autorités locales. Et ce transfert devait être soumis à un référendum local. Or à
l’occasion de la révision de la Constitution, pour que la France donne son
autonomie à une fraction de son territoire, le pouvoir constituant (Assemblée
nationale + Sénat) qui se réunit à Versailles et qui peut décider de modifier la
Constitution avec une majorité des 3/5ème, a dit que pour l’organisation, il
renvoyait ça au pouvoir exécutif qui a prit un décret pour pouvoir organiser ce
référendum mais comme il a pris ce décret directement sur délégation du pouvoir
constituant, dans la hiérarchies des normes ce règlement qui mettait en œuvre le
référendum d’accession à l’indépendance avait la force d’une disposition de la
Constitution.
Or ce décret prévoyait que pour voter, il fallait que les calédoniens puissent
justifier de 10 ans de résidence en Nouvelle Calédonie.
Cependant, un homme a dit : « bah moi j’habite depuis moins de dix ans mais je
veux quand même voter car je me considère comme calédonien » et cette
disposition du règlement qui organise le référendum est contraire à un traité
international signé par la France : le traité des communautés européennes et
c’est contraire à l’article 6 qui prévoit l’ancrage démocratique des États.
 Réponse du Conseil d'État et réponse de la Cour de cassation dans un
arrêt fraisse le 2 juin 2000 par l’Assemblée plénière de la Cour de
cassation : « la suprématie conférée aux engagements internationaux ne
s’appliquent pas dans l’ordre interne aux dispositions de valeur
constitutionnelle ». Même réponse du Conseil d’État dans un arrêt Sarran
Levacher en 1998.
 La Cour de justice de l’Union Européenne dit le contraire dans un arrêt
Costa contre Enel du 15 juillet 1964 : « issu d’une source autonome le
droit né du traité ne pourrait donc en raison de sa nature spécifique
originale se voir opposer un texte interne quel qui soit sans que soit mise
en cause la base juridique de communauté elle-même ».
C. LOIS NATIONALES ET DROIT DE L’UNION ORIGINAIRE
1. Position du conseil constitutionnel ?
Il aurait très bien pu dire « j’accepte » de contrôler si une loi est conforme à la
Constitution française mais aussi aux traités internationaux signés par la France.
Dans la Constitution, le Conseil Constitutionnel est chargé de protéger via un
texte qui est l’article 55 de la Constitution qui nous dit que : « les traités ou
accords régulièrement ratifiés ont dès leur publication une autorité supérieure à
celle des lois ».
Mais le Conseil dans une célèbre décision du 15 janvier 1975 a refusé de procéder
à ce type de contrôle. Elle a été rendue à propos de la loi Veil (légalisation de
l’avortement en France). Le Conseil a refusé de vérifier si la loi Veil était conforme
à la Constitution mais aussi aux traités internationaux parce que la France a ratifié
la CEDH et cette convention protège le droit à la vie. Le Conseil ne se sentait pas
légitime et a donc refusé de vérifier la conformité aux traités internationaux. Mais
en faisant cela, il a laissé le champ libre aux autres institutions qui elles ont
accepté de contrôler cette conformité des lois.
2. Position de la Cour de Cassation
La Cour de cassation accepte de contrôler la conformité d’une loi envers les
traités internationaux. Elle l’a fait notamment dans une célèbre affaire qui est
l’affaire Jacque Vabre (café) en 1975, la Cour de cassation dit que s’il y a une loi
que l’on veut appliquer et que cette loi est contraire à un traité international, la
Cour de cassation refusera d’appliquer la loi française.
3. Position du Conseil d’État
Le Conseil d'État a dans un premier temps refusé d’écarter une loi sous prétexte
qu’elle était contraire à un traité international (car il pensait que ce serait facile
pour un juge de ne plus effectuer son travail en refusant d’appliquer une loi) =
arrêt des semoules en 1979.
Dans l’arrêt Niccolo en 1989, il s’est rangé à l’avis de la Cour de cassation et a
accepté d’écarter les lois qui sont contraires aux traités internationaux.
4. Appréciation
La Cour de cassation le Conseil d'État font des contrôles de conventionalité à
chaque fois qu’on leur demande alors que le Conseil Constitutionnel fait un
contrôle de constitutionnalité.
D. CONSTITUTION ET DROIT DE L’UNION DÉRIVÉ (DIRECTIVE).
1. Transposition par une loi
La directive européenne a été transposée en droit français par une loi votée par
le Parlement.
Une fois transposée, peut-on vérifier oui ou non si cette loi de transposition est
conforme à la Constitution française ?
Le Conseil Constitutionnel dans une décision du 10 juin 2004 : « la transposition
en droit interne d’une directive communautaire résulte d’une exigence
constitutionnelle à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu’en raison d’une
disposition expresse contraire à la Constitution ; qu’en l’absence d’une telle
disposition, il n’appartient qu’au juge communautaire, (Cour de Justice de l'Union
Européenne) de contrôler le respect par une directive communautaire tant des
compétences définies par les traités que des droits fondamentaux ».
Le Conseil Constitutionnel dit qu’il veut bien contrôler la conformité des lois à la
Constitution mais que quand il s’agit d’une loi de transposition d’une directive, il
n’opère aucun contrôle sauf dans le cadre d’une loi de transposition ou d’une
directive qui viole d’une manière évidente une disposition expresse de la
Constitution. Il laisse ce travail à la Cour de Justice de l'Union Européenne.
2. Transposition par un règlement
Lorsque la directive a été transposée par un règlement autonome, le Conseil
d'État qui est saisi d’une question d’inconstitutionnalité du règlement a une
position un peu plus complexe que le Conseil Constitutionnel.
Le Conseil d'État dit qu’il faudrait voir si le contrôle de la directive qui sera fait par
la Cour de justice de l’Union Européenne au regard du droit constitutionnel
européen est un contrôle qui sera de même intensité et de même qualité que
celui que je peux faire moi-même alors il n’y a pas de contrôle. En revanche, si
j’estime que le contrôle que va faire la Cour de Justice de l'Union Européenne est
un contrôle moins abouti, moins sérieux, je me réserve moi Conseil d'État la
possibilité de vérifier si oui ou non le règlement qui transpose une directive
européenne est conforme à la Constitution française (arrêt Arcelor du 8 février
2016).
E. LOIS ET DROIT DE L’UNION DÉRIVÉ (RÈGLEMENTS)
Le Conseil d'État lorsqu’il est saisi pour ce type de conflit entre la loi française qui dit
blanc et le règlement européen qui dit noir, comme il pense qu’ils ont la même valeur,
on va appliquer la disposition la plus récente.
Cependant, le Conseil d'État est revenu sur sa décision, et aujourd’hui, il considère
depuis 1990 que lorsqu’il y a un conflit entre une loi française et un règlement européen,
comme les règlements européens découlent des traités européens qui ont une force
supérieure à la loi française, c’est le règlement qui va l’emporter.

Vous aimerez peut-être aussi