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Edmund Burke, philosophe et homme politique irlandais du XVIIIe siècle, a dit “Un Etat qui n’a
pas les moyens d’effectuer des changements n’a pas les moyens de se maintenir”. En effet,
cette citation prend tout sens dès lors que l’on sait ce que la Révolution française a apporté à
la France, notamment en matière juridique.
La Révolution française s’étend sur plus de 10 ans. Elle commence par l’ouverture des Etats
Généraux, le 5 mai 1789 par Louis XVI, jusqu’au coup d’Etat du 18 Brumaire par Napoléon
Bonaparte (autrement dit le 9 novembre 1799). C’est cette décennie pleine de
rebondissements qui va marquer la fin de la monarchie absolue et le début d’une entrée en
monarchie constitutionnelle, puis en République.
La Révolution française voit le jour dans un contexte particulièrement tendu. En effet, elle
découle de nombreux problèmes d’ordre politique, social et économique. La société d’ordre,
c’est-à-dire le tiers-état, le clergé et la noblesse, est vivement critiquée par les français. On
parle de grandes inégalités entre les français, mais également de grands privilèges pour la
population la mieux placée, soit le clergé et particulièrement la noblesse. De plus, la crise
touche également l’Ancien Régime ; la dette publique grandit à vue d'œil et l’économie
française est en souffrance.
En 1788, Louis XVI décide de doubler le nombre de députés du Tiers-Etat, mais cette décision
n’apaise pas les français, car les députés du Tiers-Etat demeurent minoritaires face à ceux
du clergé et de la noblesse. C'est à la suite de cette crise généralisée que le peuple se révolte,
et que la France connaît une véritable révolution juridique. Ainsi l’on peut se demander
comment les institutions juridiques ont évolué suite à la Révolution française.
Il s’agira dans un premier temps de démontrer que l’essoufflement de la royauté devient
créateur de nouvelles sources du droit (I). Nous expliquerons dans un second temps comment
la codification du droit devient un instrument infaillible du légalisme (II).
Dès son commencement, la Révolution française proclame la portée universelle des idées
révolutionnaires par ses partisans, et cela notamment avec la rédaction et la mise en vigueur
de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, ainsi que par l’abolition de la royauté
(A). Elle montre également l’importance du pouvoir législatif suite à la décision de séparer les
pouvoirs en France (B).
L’Assemblée constituante s’est donc attribuée le pouvoir législatif. Elle refuse désormais toute
initiative en matière législative face au pouvoir exécutif. Au sein de l’Assemblée, une chambre
seule et unique va être mise en place au profit du pouvoir législatif. Cette dernière occupe la
principale place dans les trois Constitutions, c’est l’Assemblée législative. Elle a des pouvoirs
importants puisqu’elle est à l’initiative des lois et elle les vote. Le développement de la
suprématie du pouvoir législatif va ainsi entraîner une surpuissance de la loi en tant que
source du droit. La distinction entre le pouvoir législatif et le pouvoir réglementaire était en
germe sous l’Ancien régime, mais elle prend, à partir de la Révolution française et grâce à
l’évolution constitutionnelle qui en découle, une extension considérable. Si le pouvoir
réglementaire est rattaché à l’exécution des lois et prend source dans un texte constitutionnel,
les idées du début du XIXe siècle gardent une référence tenace. Il y a désormais une place
dans les Constitutions françaises pour l’évolution de l’équilibre entre pouvoir législatif et
exécutif, puisque chaque texte jusqu’à la Constitution de 1958 apporte sa version précise et
particulière.
Le travail de codification reçoit un contenu très philosophique d’autant que la vraie évolution
entre dans une phase de durcissement : il s’agit alors de créer (éventuellement en dehors des
juristes) un code « simple comme la nature », s’adressant à tous les cœurs et tous les esprits,
s’expliquant à tous les hommes, avec pour projet de « tout changer à la fois » (Cambacérès).
Le premier projet est rejeté par la Convention. D’autres projets suivront, sans aboutir
davantage : à mesure que se développe le travail de codification, on revient au contraire à
une conception plus juridique, voire à une synthèse relativement traditionnelle, en renouvelant
avec le droit de l’Ancien régime encore en vigueur.
La philosophie des rédacteurs du Code civil, Portalis en particulier, comporte le souci de l’unité
du droit et la croyance en la valeur du droit naturel. D’elles-mêmes, la souveraineté de la loi
et l’égalité entre les individus sont autant de dogmes fondamentaux. Mais « la Révolution est
finie » et la nation ressent le besoin d’ordre et de stabilité. La réflexion sur l’évolution sociale
et l’évolution du droit sera alors profondément marquée par la critique de l’esprit
révolutionnaire, premièrement, qui considérait la codification comme un moyen d’utiliser le
droit pour imposer une transformation radicale de la société. Puis une conception de
l’assouplissement du rôle du législateur et de la loi de codification va se faire pour tenir compte
de l’évolution inévitable. En effet, le juge retrouve un rôle primordial d’interprétation de la loi.
Enfin, la fidélité au droit français dans son ensemble est une idée qui va être conservée et qui
va être une nécessité et un fondement. C’est un support, dont nous allons voir que le légalisme
dans les sources du droit connaît des limites.
B) Les limites risquées du légalisme au sein des sources du droit
À partir de la Révolution française, la loi est devenue le fondement du système juridique. Mais
pour autant la loi peut-elle écarter toute formation d’usage ou de coutume ? La loi fixée à un
moment déterminé ne peut tout prévoir et ne peut avoir la souplesse de la coutume qui
réapparaît alors aux frontières du légalisme dans la pratique et qui a soulevé un problème
doctrinal par la même occasion.
Dans la nouvelle tradition française issue de la Révolution, la légalité est devenue un cadre
général des sources de droit. En effet, celle-ci se voit être un titre important. Elle va créer une
supériorité de la loi et cela parce que la coutume n’est que peu reconnue en tant que source
de droit. Le rôle de la coutume va donc devenir de plus en plus flou. D’un point de vue formel,
c’est une source du droit selon la loi du 30 ventôse XII, mais seulement du point de vue du
Code civil. Ainsi, la loi elle-même renvoie parfois aux usages de la coutume. Mais la coutume
pourrait être reconnue dans d’autres disciplines que celle du droit civil, comme en matière
commerciale par exemple.
C’était le point de vue formel de la coutume mais le fond reste différent. La question est
beaucoup plus subtile puisqu’il est difficile de connaître l’influence des usages, surtout dans
un système où l'on a une suprématie législative. Le système tendra inévitablement à faire
rentrer les usages dans un sens formel de la loi et de « légaliser » l’élément coutumier.
En somme, “toute révolution sociale est une révolution juridique” selon l’article nommé “La
Révolution Française et le droit constitutionnel”, au sein de la revue de Yaroslav Radev. Il est
donc certain que la Révolution française est une révolution juridique, de par les changements
qu’elle a opérés ; changements qui perdurent dans notre système juridique actuel, celui du
XXIe siècle.