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ALIMENTATION DU NOURRISSON NORMAL

J.Ph. GIRARDET - P. TOUNIAN

A - PRINCIPES DE L'ALIMENTATION DU NOURRISSON NORMAL

L'alimentation du nourrisson se divise en deux périodes consécutives : une


première d'alimentation lactée exclusive par allaitement maternel, artificiel ou mixte,
suivie de la diversification de l'alimentation. Pour plus de clarté, chaque type
d'alimentation sera étudié séparément.

I) ALLAITEMENT MATERNEL
1) Contre-indications
Elles sont rares. Elles sont presque toujours en rapport avec la mère lorsque celle-ci présente une
maladie pouvant mettre en jeu la vie de son enfant ou la sienne : insuffisance cardiaque, rénale ou
hépatique grave, maladie infectieuse contagieuse (tuberculose, syphilis....) ou importante altération
de l'état général. La plupart des médicaments administrés à la mère ont un passage dans le
lait maternel ; certains d'entre eux, potentiellement dangereux pour l'enfant, contre-
indiquent formellement l'allaitement maternel (antivitamines K, salicylés, barbituriques....)
; pour les médicaments passant dans le lait mais dont la toxicité pour l'enfant n'est pas clairement
établie, leur prescription devra toujours évaluer les effets bénéfiques attendus chez la mère et
les éventuels risques encourus par l'enfant ; au moindre doute, un arrêt provisoire de
l'allaitement pourra être effectué. Le tabac est, de la même façon, contre-indiqué pendant
l'allaitement.

Les contre-indications à l'allaitement maternel liées au nourrisson se limitent aux maladies


métaboliques contre-indiquant toute forme d'alimentation lactée : galactosémie
congénitale, phénylcétonurie, intolérance vraie au lactose.

2) Conduite pratique
Elle doit être clairement enseignée à la mère.

- 118 -
Le nouveau né devra être mis au sein le plus précocement possible, dans les heures suivant la
naissance. Une telle attitude permet de lui faire bénéficier du colostrum (particulièrement riche en
moyens de défense anti infectieuse), supprime une période jeûne dangereuse autrefois préconisée, et
facilite la montée laiteuse.

La tétée répond à une technique précise :


- dans un premier temps, les mamelons sont nettoyés avec de l'eau bouillie ;
- puis, après s'être confortablement installée, la mère offre un premier sein, alternativement
différent lors de chaque tétée, puis ne passe au second qu'après avoir vidé totalement le premier ;
- après la tétée, les mamelons sont nettoyés, séchés et protégés à l'aide d'une compresse
stérile jusqu'à la tétée suivante.

L'allaitement maternel est adapté à la pratique d'un régime libre. C'est l'enfant lui-même qui doit
fixer la quantité ingérée, la durée et le rythme des tétées. La quantité ingérée est très variable d'une
tétée à l'autre, la durée des tétées est de 15 à 20 minutes environ et le rythme des tétées
est généralement de 6 à 8 par jour le premier mois puis s'espace après.

L'allaitement maternel seul est suffisant pour couvrir tous les besoins du nourrisson jusqu'à l'âge
de 5-6 mois, excepté ceux en vitamine D. Il est donc totalement inutile de diversifier avant l'âge de
5-6 mois. Même si la durée de l'allaitement maternel exclusif doit être la plus longue possible, il est
rare qu'il puisse être assuré aussi longtemps, soit à cause de l'indisponibilité de la mère qui reprend
ses activités professionnelles, soit du fait d'une hypogalactie ; il devra alors être complété par un
aliment lacté diététique industriel.

Le sevrage devra toujours être très progressif, étalé sur deux semaines au minimum.

3) Avantages et inconvénients
Les premiers prédominent largement sur les seconds. Les nombreux avantages de l'allaitement
maternel justifient pleinement la priorité accordée à ce type d'alimentation. La composition du lait
de mère est adaptée de manière idéale au nourrisson et aucun aliment artificiel ne peut l'égaler. Ce
mode d'allaitement est économique. Le renforcement des liens affectifs entre la mère et l'enfant qu'il
provoque est intensément bénéfique pour l'épanouissement de ces deux êtres. Certains ont
décrit une diminution de l'incidence de l'eczéma, de l'asthme, de la rhinite allergique et de la mort
subite
du nourrisson, chez les enfants ayant été nourris au sein. Enfin, un possible rôle préventif ultérieur
sur l'athérome et l'hypertension artérielle a été évoqué.

Les inconvénients sont rares et peuvent être le plus souvent résolus. La parfaite disponibilité de
la mère demandée par l'allaitement maternel est une des raisons souvent évoquée pour l'arrêt
prématuré de ce type d'alimentation. Une sécrétion lactée insuffisante est souvent due à une erreur
- 119 -
technique ou une perturbation affective de la mère qu'il suffit de corriger. L'ictère au lait de mère

- 119 -
(lié à la présence dans le lait d'un inhibiteur de la glycuroconjugaison hépatique) contre-
indique rarement la poursuite de l'allaitement. Quant à la pathologie mammaire secondaire à
l'allaitement (distension douloureuse des seins, crevasses, voire abcès du sein), elle doit être
prévenue par la vidange suffisante des seins au cours des tétées et des précautions d'hygiène
rigoureuses.

La supériorité de l'allaitement maternel sur tout autre type d'alimentation du nouveau né et du


jeune nourrisson reste indiscutable, et ceci malgré les améliorations permanentes apportées dans la
composition des laits artificiels. Tous les moyens devront donc être réunis pour assurer la réussite
d'un allaitement au sein.

II) ALLAITEMENT ARTIFICIEL


1) Les laits industriels ou aliments lactés diététiques (ALD) pour nourrissons

Lorsque l'allaitement maternel est refusé ou contre-indiqué, le nouveau né sera nourri avec un
lait artificiel : ces aliments lactés diététiques sont des dérivés industriels du lait de vache dont la
composition a été modifiée pour se rapprocher du lait de référence qu'est le lait humain.

La composition du lait de vache est en effet bien différente de celle du lait de femme. Il est en
effet :
- moins sucré,
- 3 fois plus riche en protéines,
- 4 fois plus riche en calcium,
- 6 fois plus riche en phosphore.

Il présente également d'importantes différences qualitatives :


- présence de protéines allergisantes (bêta-lactoglobulines),
- richesse en caséine,
- absence d'immunoglobulines et d'oligosaccharides,
- pauvreté en acide linoléique et en fer.

Ainsi, le lait de vache utilisé tel quel est inadapté à la physiologie du nouveau né et du
nourrisson. En conséquence, il doit subir de nombreuses modifications au cours de la fabrication
des aliments lactés destinés aux nourrissons pour être adapté à leurs capacités métaboliques et
digestives.

er
On distingue deux groupes de laits industriels (ALD) pour nourrissons : les ALD 1 âge,
ème
destinés aux nourrissons jusqu'à l'âge de 4 mois et les ALD 2 âge, destinés aux nourrissons âgés
de plus de 4 mois.

- 120 -
er
La composition des ALD est réglementée en France par les arrêtés du 1 juillet 1976 et du 30
er
mars 1978. Depuis le 1 janvier 1993, la réglementation française est elle-même soumise aux

- 120 -
directives de la commission européenne publiées au Journal Officiel des communautés européennes
du 14 mai 1991. Ces directives distinguent :
er
- les "préparations pour nourrisson" (correspondant aux ALD 1 âge),
destinées à l'alimentation particulière des nourrissons pendant les 4 à 6 premiers mois de
vie et répondant à elles seules à leurs besoins nutritionnels ;
ème
- les "préparations de suite" (correspondant aux ALD 2 âge), destinées à
l'alimentation
particulières des nourrissons de plus de 4 mois et constituant le principal élément liquide d'une
alimentation progressivement diversifiée.

er
a) Les ALD 1 âge

er
Ces aliments sont destinés aux nourrissons de moins de 4 mois. La composition des ALD 1 âge
se rapproche beaucoup de celle du lait de femme. Néanmoins, ils n'en sont que des
substituts imparfaits, ne serait-ce que par leur teneur en protéines animales potentiellement
allergisantes et par l'absence des différents facteurs de protection anti infectieux
(immunoglobulines, lysozyme, lactoferrine, lactotransferrine). Mais, sur le plan strictement
nutritionnel, ils sont adaptés à la maturation fonctionnelle des différents systèmes de
digestion-absorption intestinale, d'épuration rénale et d'inter-conversion métabolique du nouveau
né et du jeune nourrisson. Enrichis en acides gras essentiels, souvent en fer, ayant une teneur en
minéraux et vitamines adaptée, ils permettent à eux seuls de couvrir tous les besoins
nutritionnels du nouveau né au cours des quatre premiers mois de la vie, à l'exception de la
vitamine D. En effet, malgré l'arrêté de février 1992 qui stipule que tous les ALD doivent être
supplémentés en vitamine D, cette supplémentation ne permet pas de
er
couvrir les besoins journaliers en cette vitamine. Les ALD 1 âge apportent 40 à 100 UI de
vitamine D pour 100 kilocalories ; sur cette base, une consommation journalière de 720 ml de lait
er
1 âge fournit environ 300 UI par jour. Une supplémentation médicamenteuse en vitamine D reste
donc nécessaire ; elle sera prescrite par le pédiatre (cf. chapitre : prévention du rachitisme).

ème
b) Les ALD 2 âge

Ils sont destinés aux nourrissons âgés de 4 mois et plus dont

l'alimentation est diversifiée.

er
Ils diffèrent des ALD 1 âge essentiellement par leur plus forte teneur en protéines et en
minéraux (plus particulièrement en calcium et en sodium) et par leur enrichissement obligatoire en

- 121 -
fer (voir tableau XI).

er ème
Comme les ALD 1 âge, les ALD 2 âge sont enrichis en vitamine D selon le même dosage
(40 à 120 UI/100 kcal). Cet enrichissement ne suffit pas à lui seul de couvrir les besoins journaliers
ème ème
en vitamine D. L'utilisation des ALD 2 âge, à partir du 5 mois, période de la diversification
de l'alimentation, permet de prévenir les carences en calcium, en fer, en acide linoléique, et de limiter

- 121 -
les apports excessifs en saccharose, sodium et protéines que l'on peut observer chez les
ème
enfants nourris avec du lait de vache demi écrémé. Aussi est-il conseillé d'utiliser les ALD 2
âge jusqu'à l'âge de 1 an.

ème er
Les ALD 2 âge se reconstituent de la même manière que les ALD 1 âge : 1 mesure arasée
de poudre pour 30 ml d'eau.

ème
A l'heure actuelle, il existe de plus en plus d'ALD du 2 âge présentés sous forme liquide prête
à l'emploi d'utilisation plus facile.

2) La préparation des biberons répond à des règles rigoureuses. Celle-ci doit s'effectuer avec un
maximum d'hygiène afin d'éviter toute contamination microbienne : lavage des mains lors de toute
manipulation, stérilisation des biberons et tétines par ébullition ou à l'aide d'un stérilisateur
du commerce, préparation, au mieux extemporanée, des biberons et conservations au frais des
biberons préparés à l'avance. La reconstitution des laits est universelle : une mesure rase de
poudre de lait pour 30 ml d'eau, aboutissant généralement à une reconstitution entre 13 et 15
%. Les eaux peu minéralisées (Evian, Volvic) seront préférées afin de ne pas majorer la
charge électrolytique administrée à l'enfant.

3) La prise du biberon s'effectue chez un enfant en position surélevée (jamais couchée) et dans une
ambiance calme. La durée d'une tétée est d'environ 15 minutes, mais le rythme propre à
chaque enfant doit être respecté. En cas de refus d'alimentation, il ne faut jamais chercher à forcer
un enfant
à finir un biberon, surtout s'il s'endort (risque de fausse route).

Les quantités de lait ingérées sont progressivement croissantes en fonction de l'âge. Après un
ème
premier biberon précoce (avant la 6 heure de vie), les quantités journalières proposées sont de 90
ème
à 140 ml le premier jour puis augmentées de 60 à 70 ml par jour jusqu'au 7 jour, et de 60 à 70 ml
par semaine jusqu'à la fin du premier mois. Au-delà, une formule simple permet d'évaluer la
quantité quotidienne de lait à administrer (Q), en fonction de poids de l'enfant (P) :
P( g)
Q(ml)  
250
10

Ces quantités proposées n'ont qu'une valeur d'indication, elles doivent être diminuées ou
augmentées en fonction de l'appétit et de la courbe de poids du nourrisson.
4) Le nombre et le rythme des biberons doivent être fixés par l'enfant lui-même, cela consistant à le
nourrir "à la demande". Classiquement, le nourrisson prend 6 repas par jour les deux premiers mois
(parfois 7 les premières semaines), à intervalles plus ou moins réguliers, puis passe spontanément à
- 122 -
ème
5 repas après le 2 mois. Les horaires des repas ne doivent pas non plus être rigides mais fonction

- 122 -
des demandes du nourrisson ; ainsi, la nécessité d'un biberon nocturne supplémentaire est fréquente
er
le 1 mois car le rythme nycthéméral du nouveau né est mal établi.

III) DIVERSIFICATION DE L'ALIMENTATION


Après une période initiale dite d'alimentation lactée exclusive, le régime du nourrisson est
diversifié.

1) Raisons de la diversification
Les besoins hydriques du nourrisson diminuent progressivement avec l'âge, l'introduction
d'aliments solides permet de diminuer les apports hydriques tout en préservant les apports
énergétiques. Grâce à l'introduction des fibres (pectines, hémicelluloses, cellulose...), la
diversification de l'alimentation du nourrisson permet la maturation de la fonction colique
(par l'arrivée de substances de lest) et la modification de la flore colique. La diversité des aliments
et de leur consistance conduit à l'éducation du goût et de la mastication.

2) Age de la diversification
Il reste discuté car si le nourrisson est capable de tolérer une alimentation diversifiée dès l'âge de
3 mois, il possède aussi les capacités d'adaptation à un allaitement maternel presque exclusif
pendant près d'un an. Nous avons vu qu'il n'y avait pas de raisons nutritionnelles pour la
diversification précoce de l'alimentation : le lait de mère couvre, en effet, tous les besoins
nutritionnels (sauf ceux en vitamine D et en fer) du nourrisson jusqu'à l'âge de 9 mois, voire 1 an, et
er
les ALD 1 âge couvrent tous les besoins du nourrisson (sauf ceux en

vitamine D) jusqu'à la fin du


ème
4 mois. De plus, l'introduction trop précoce d'une alimentation variée expose à certains
risques : sensibilisation aux protéines alimentaires, maldigestion par immaturité des enzymes
digestives, colopathie par immaturité colique. La tendance actuelle est de retarder l'âge de la

diversification au 6ème mois pour les nourrissons exclusivement au sein, et au 5ème mois pour les
autres.

3) Modalités de la diversification
Il ne faut introduire qu'un aliment nouveau à la fois, en laissant un intervalle de quelques jours
entre chacun, pour à la fois détecter une éventuelle intolérance au nouvel aliment administré, mais
aussi permettre à la flore colique de se modifier lentement. Les quantités seront progressivement
augmentées. L'introduction des divers groupes d'aliments s'effectue selon un ordre bien précis.

- 123 -
Ce sont les légumes qui sont introduits en premier. Tous les légumes peuvent être
utilisés à condition d'être bien cuits et finement mixés ; les petits pots de légumes
homogénéisés du commerce répondent parfaitement à cette préparation. L'introduction se fera en
diluant les légumes dans le lait, d'abord en faible quantité (1 cuillère à soupe dans un des
biberons) puis augmentés

- 123 -
progressivement. L'introduction des légumes apporte
essentiellement des polysaccharides (hydrolysés en partie par la cuisson
prolongée), des fibres végétales (dissociées par la cuisson et le mixage), des vitamines et des sels
minéraux.

L'introduction des fruits peut se faire une quinzaine de jours plus tard. De la même façon, tous
les fruits peuvent être utilisés à condition d'être cuits et mixés (compotes) ou homogénéisés (petits
pots). L'idéal est de profiter de l'introduction des fruits pour essayer l'alimentation à la cuillère, mais
si l'enfant refuse la cuillère, on pourra, comme pour les légumes, diluer les fruits finement mixés ou
homogénéisés dans un des biberons de lait en commençant également par de faibles quantités (1-2
cuillères à soupe). Les fruits apportent essentiellement des glucides (notamment du saccharose et du
fructose, qui introduisent le goût sucré), des fibres (pectines, hémicellulose) et des vitamines.

La diversification est achevée, une quinzaine de jours plus tard, par l'introduction des aliments
riches en protéines : viandes, poissons, œufs. Pour les viandes, il est préférable de débuter par les
viandes maigres (bœuf, veau, agneau, cheval, poulet, jambon maigre) et de retarder l'introduction
des viandes grasses (porc, mouton, charcuterie), plus difficiles à digérer. Pour le poisson, il
convient aussi de choisir au début les poissons maigres (carrelet, colin, limande, merlan, raie, sole,
turbot) plutôt que les poissons gras (hareng, sardine, saumon, thon) qui sont aussi de
digestion difficile. Pour l'œuf, son introduction s'effectuera en dernier, après s'être assuré que
viandes et poissons sont bien tolérés ; on débutera par le jaune et si sa tolérance est
satisfaisante, on pourra
ème
introduire le blanc après le 6 mois. Ces aliments riches en protéines seront introduits, soit dans le
biberon contenant les légumes (il faut utiliser la viande elle-même, finement mixée, le jus de viande
n'ayant pas de valeur nutritive appréciable), soit directement à la cuillère. Chacun de ces aliments ne
sera donné qu'à un seul des repas quotidiens (habituellement à midi) et jamais ensemble.
L'introduction des viandes, poissons, œufs assure un apport essentiellement protidique (ce qui limite
leur consommation en excès) mais aussi lipidique, phosphaté et minéral (surtout fer et cuivre).
Le passage de 5 à 4 repas quotidiens tout autant que l'utilisation de la cuillère se feront selon la
ème
volonté de l'enfant. Ils sont proposés à l'enfant vers le 5-6 mois et poursuivis s'ils sont acceptés.
La consommation de morceaux dépend du développement de la dentition.

4) Lait et laitages
er
L'âge de la diversification est marqué par le passage d'un ALD 1 âge (ou de
ème ème
l'allaitement maternel) à un ALD 2 âge qui s'effectue au début du 5 mois.
L'importance des besoins en calcium impose, au moment de la diversification et jusqu'à l'âge de 2
ans, un apport lacté équivalent
- 124 -
à au moins un demi litre de lait de vache, soit sous forme de lait, soit sous forme de produits laitiers
: cela suppose que tout repas sans lait devra être suivi de la consommation d'un dessert lacté. Les

- 124 -
ème
ALD 2 âge doivent être préférés au lait de vache pur afin d'éviter une carence en acides
gras essentiels, et surtout en fer.

5) Farines
er
Il est important de distinguer les farines dites 1 âge, caractérisées par l'absence de
gluten et l'hydrolyse préalable de l'amidon qu'elles contiennent (farines maltées, dextrine-
maltosées ou dextrinées), et les farines contenant du gluten. Il n'existe aucune raison nutritionnelle
véritable pour prescrire des farines aux nourrissons. La prescription des farines peut tout au plus
être justifiée par :
la possibilité d'augmenter les apports caloriques sans élever l'osmolalité de l'alimentation, la
sensation de satiété qu'elles entraînent (cela pouvant permettre de moduler le rythme des tétées et de
supprimer les fringales nocturnes), l'accélération de la maturation amylasique pancréatique qu'elles
provoquent, le ralentissement du transit intestinal qu'elles induisent grâce à la viscosité des
bouillies. La prescription des farines doit respecter l'âge d'immaturité amylasique. La maturation de
la sécrétion amylasique pancréatique n'est complète qu'à l'âge de 6 mois ; cependant, l'hydrolyse
er
partielle des amidons des farines 1 âge autorise une introduction plus précoce. Il reste
néanmoins admis que l'introduction des farines ne doit pas se faire avant l'âge de 3 mois et doit être
ème
différée, au mieux, au 5 mois, c'est-à-dire à l'âge de la diversification. Les modalités de
prescription des farines doivent obéir à deux principes : elles sont débutées par de faibles quantités
(3-6 g/jour) puis augmentées progressivement en fonction des besoins et de la tolérance ; et
ème
surtout, les farines contenant du gluten ne sont données qu'à partir du 6 mois. Si la
tolérance de ces farines est satisfaisante, les autres farineux pourront être débutés, en
commençant par le riz (dont l'amidon est plus facile à digérer, surtout s'il est bien cuit) et en
poursuivant par les pâtes (élaborées à partir de la farine de blé, donc très riches en gluten), les
biscuits et le pain, dont la consommation sera étendue
en fonction des possibilité de mastication du nourrisson.

B - CONDUITE PRATIQUE DE L'ALIMENTATION DU NOURRISSON NORMAL


I) PERIODE LACTEE EXCLUSIVE
1) Allaitement maternel
L'allaitement maternel doit se conformer au principe de l'alimentation à la demande, sa conduite
pratique est donc spécifique à chaque enfant, en fonction du rythme qu'il fixera lui-même.

er
L'allaitement mixte associe des tétées au sein et des biberons de lait artificiel (1 âge), dont le
volume et le nombre sont fonction de l'âge du nourrisson, de son appétit, de sa courbe pondérale et
du nombre quotidien de mises au sein.
- 125 -
Le sevrage est progressif ; exemple d'un nourrisson de deux mois ayant cinq tétées par jour :
er
- remplacer une tétée par un biberon de 150 ml d'ALD 1 âge;

- 125 -
- tous les 3-4 jours, remplacer une tétée par un biberon équivalent ;
- le sevrage s'effectue ainsi en 15 à 20 jours.

La surveillance de l'allaitement maternel repose sur :


- le comportement de l'enfant, qui après chaque tétée doit s'endormir satisfait et repu ;
- les selles, qui sont de 3 à 6 par jour, suivant habituellement les tétées, semi-liquides, jaune
d'or et d'odeur aigrelette ;
- la courbe de poids, appréciée par une pesée hebdomadaire au début puis plus espacée, qui
doit être régulièrement ascendante (la prise de poids est d'environ 25 g par jour les 3 premiers mois
et 20 g par jour les 3 mois suivants).

2) Allaitement artificiel
Comme lors de l'allaitement maternel, le régime en allaitement artificiel doit aussi être
libre. Néanmoins, une conduite pratique précise, n'ayant cependant qu'une valeur d'indication,
doit être proposée aux parents.

- premier mois :
er
.1 jour : 6-7 x 15-20 ml
ème
.2 jour : 6-7 x 30 ml
ème
.3 jour : 6-7 x 40 ml
ème
.4 jour : 6-7 x 50 ml
ème
.5 jour : 6-7 x 60 ml
ème
.6 jour : 6-7 x 70 ml
ème
.7 jour : 6-7 x 80 ml
ème
.2 semaine : 6-7 x 80-90 ml
ème
.3 semaine : 6-7 x 90-100 ml
ème
.4 semaine : 6-7 x 100-110 ml.

- deuxième, troisième et quatrième mois


ème er
Le 7 biberon éventuel doit disparaître à la fin du 1 mois. Le passage de 6 à 5
ème
biberons quotidiens peut être proposé au début du 3 mois.

ème
.2 mois : 6 x 110-130 ml
ème
.3 mois : 5 x 150-170 ml
ème
.4 mois : 5 x 170-190 ml.
- 126 -
- surveillance

- 126 -
Elle est identique à celle des enfants en allaitement maternel, à la différence près que les selles
des nourrissons nourris par ALD sont moins fréquentes (2 à 4 selles/jour), moins liquides (selles
grumeleuses) et de couleur plus foncée.

II) DIVERSIFICATION DE L'ALIMENTATION


- cinquième et sixième mois

ème er
Cette période est marquée par de nombreux changements. Dès le début du 5 mois, l'ALD 1
ème
âge est remplacé par un ALD 2 âge et les légumes sont introduits dans le biberon de midi
(une cuillère à soupe), le passage à quatre repas quotidiens peut alors être proposé. Une
quinzaine de jours plus tard, les fruits sont introduits, soit le midi, soit au goûter (1-2 cuillères à
soupe), il est alors opportun d'essayer l'alimentation à la cuillère (compote de fruits). Alors que
la quantité des légumes et des fruits proposés est progressivement augmentée, l'introduction
des viandes et poissons est effectuée dans le repas de midi (10 g dans le biberon ou à la
cuillère), suivie de celle d'un demi jaune d'œuf. En cas d'utilité, quelques cuillères de farine
peuvent être ajoutées dans un
des biberons de lait (habituellement celui du matin) (tableau II).

- 127 -
ème
Tableau II : menu type d'un régime diversifié au cours du 6 mois
Matin ème
biberon 210 ml ALD 2 âge (+ 6 cuillères à café de farine)
Midi
150 g de légumes en purée
+ 15-20 g de viande ou poisson (30-40 g si viande homogénéisée en pot) ou ½
jaune d'œuf
Goûter + 1 yaourt ou un petit suisse ou 60 g de fromage blanc
+ 50-100 g de compote de fruits

ème
biberon 210 ml ALD 2 âge
Soir
ou 1 yaourt ou un petit suisse ou 60 g de fromage blanc
+ 50-100 g de compote de fruits

ème
biberon 210 ml ALD 2 âge (+ 6 cuillères à café de farine)
ou 1 potage de légumes (180-200 g)
+ 1 laitage
+ 50 g de compote de fruits (facultatif)

- à partir du septième mois


La diversification de l'alimentation est poursuivie, en variant au maximum les goûts et en
laissant l'enfant s'adapter spontanément aux habitudes de la famille. Toutefois, 3 principes
fondamentaux doivent être suivis :
- respecter les goûts de l'enfant, le refus de certains aliments ne doit pas entraîner de conflits
ni de "forcing" alimentaire, les goûts de l'enfant pouvant d'ailleurs être très changeants au cours du
temps ;
- assurer un équilibre alimentaire identique à celui de l'adulte, avec les
quelques particularités pédiatriques développées dans ce chapitre et dans celui rapporté
aux besoins alimentaires du nourrisson et du jeune enfant ;
- adapter les quantités proposées aux besoins énergétiques, variables d'un enfant à l'autre.
L'enfant pourra manger seul dès qu'il le désirera, et les morceaux seront introduits quand sa
dentition le permettra.

III) PRINCIPALES ERREURS ALIMENTAIRES


Le plus classique est le "forcing" alimentaire. Il faut bien informer les mères qu'il ne faut jamais
forcer un enfant à finir un repas, ni compenser par le suivant un repas incomplètement ingéré. La
variabilité de l'appétit et des besoins caloriques de l'enfant doit être respectée. Une telle erreur est
souvent retrouvée au cours des anorexies du nourrisson.

- 128 -
Les erreurs de reconstitution des ALD doivent être évitées grâce à un enseignement
rigoureux
du mode de préparation des biberons. Elles se font rarement dans le sens d'une dilution
excessive qui, d'ailleurs, est généralement compensée par le nourrisson lui-même qui boit des
quantités de lait plus importantes. Par contre, la préparation de biberons trop concentrés
est plus fréquente et habituellement moins bien tolérée. Il peut s'agir soit d'une
mauvaise compréhension des prescriptions (dont notamment l'utilisation de mesures
pleines au lieu de mesures rases), soit du désir d'obtenir une performance dans la vitesse
de croissance de l'enfant. La tolérance est parfois excellente, et l'erreur passe alors
inaperçue, mais sa recherche et sa correction doivent être systématiques devant tout
trouble digestif inexpliqué.
L'utilisation excessive ou trop précoce des farines conduit non seulement à une
courbe de poids flatteuse, prédisposant à l'obésité ultérieure pour certains, mais aussi à
une dyspepsie de fermentation colique. Les dextrines et amidons non digérés des farines
induisent la production, par
la flore colique, d'acides organiques qui entraînent un météorisme abdominal et une diarrhée
acide ;
ces polysaccharides non digérés peuvent aussi, du fait de leur poids moléculaire élevé
diminuant l'appel d'eau dans la lumière intestinale, être à l'origine d'une constipation.

En plus des carences (fer, acides gras essentiels) que peut entraîner l'utilisation trop précoce
du
lait de vache, il faut signaler la possibilité de troubles digestifs par maldigestion. La
tendance putréfactive du lait de vache provoque habituellement une constipation (1-2
selles/jour) avec, cependant, accentuation de la vulnérabilité colique à la moindre agression,
source de diarrhée.

Il convient de se méfier d'un excès d'apport protidique. Celui-ci est ordinairement le


fait de l'ingestion excessive de viandes et poissons et/ou du maintien d'un apport lacté trop
important. Un régime hyperprotidique peut entraîner une colopathie avec syndrome
diarrhéique.

Enfin, des règles d'hygiène alimentaire doivent être respectées chez le nourrisson. Il faut
éviter
la consommation excessive d'aliments à goût sucré afin de ne pas développer une
certaine préférence pour ce type de goût, qui pourrait entraîner un dégoût relatif des
autres aliments et provoquer ainsi d'importants déséquilibres nutritionnels. Il est inutile
d'ajouter de sel dans les préparations alimentaires, le nourrisson s'adaptant aisément à
une alimentation peu salée. Le grignotage entre les repas peut conduire à une obésité par
excès d'apport calorique et déséquilibre généralement le régime du nourrisson.

La fréquence trop grande de ces erreurs souligne l'intérêt d'un enseignement rigoureux et
permanent auprès des familles, des principes et de la conduite pratique de l'alim

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