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LICENCE SVT (L3) d’AGROFORESTERIE


Université Jean Lorougnon Guedé 2012/2013
UE GENETIQUE
ECUE 2 : Eléments de génie génétique et techniques de biologie
moléculaire (15h)

Rappels de L2 :
- Le principe transformant est transmissible (expérience de GRIFFITH, 1928),
- Le principe transformant est extractible (expérience de ALLOWAY, 1933),
- L’ADN est l’agent transformant (expérience d’AVERY et al. 1944).
- Réplication d’ADN (ADN matrice, ADN polymérase, primer, dNTP,…)
- Transcription ou synthèse de l’ARN (promoteur, initiation, élongation, terminaison)
- Traduction de l’ARNm (transfert de l’information génétique)

Première partie : Eléments de génie génétique

INTRODUCTION

Le génie génétique est une technique de manipulation de l’ADN qui


aboutit au clonage de gènes dont la réplication et l’expression sont assurées
par la cellule hôte. On obtient ainsi des organismes génétiquement modifiés
(OGM). Le premier OGM a été obtenu en 1982 par introduction du gène de
l’hormone de croissance de rat chez des souris qui sont ainsi devenues
"géantes" par rapport aux souris naturelles (44g contre 23g, Fig. 1). La
manipulation génétique peut se réaliser au niveau moléculaire par la
manipuler d’un gène existant dans la cellule, ce qui en modifie l’expression
à l’exemple du gène de croissance chez les saumons qui a permis d’obtenir
des poissons 11x plus gros que les saumons naturels (Fig. 2). Elle peut se
réaliser également au niveau cellulaire (capacité totipotente) qui a permis la
création de la brebis Dolly en 1995 et inauguré une nouvelle ère du génie
génétique. Dans ce cas, le clonage a été réalisé à partir de cellules de
glandes mammaires adultes et non de cellules non différenciées de fœtus.
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1. LES ECHANGES GENETIQUES ENTRE MICROORGANISMES


Les microorganismes notamment les bactéries et les virus sont des outils
indispensables en génie génétique où ils servent de vecteurs au transfert de
l’information génétique dans la cellule cible. Des échanges d’information
génétique ont lieu entre les virus et les bactéries d’une part et d’autre part
entre les bactéries suivant des modèles dont se sert le génie génétique pour
les transformations génétiques et les applications qui en découlent.

1.1. LES CYCLES DU PHAGE DANS LA BACTERIE


Les bactériophages sont des virus qui attaquent les bactéries dont ils
provoquent généralement la mort. Ce sont des virus à ADN qui infectent les
bactéries en injectant dans leur cytoplasme leur propre ADN viral qui peut
suivre alors 2 voies : la voie lytique où ils conduisent à la destruction de la
bactérie après s’être intensément multipliés ou la voie lysogène où l’ADN
viral s’intègre dans le chromosome bactérien. Les phages lytiques sont dits
virulents, les phages lysogènes sont qualifiés de tempérés.

1. 2. LES ECHANGES GENETIQUES ENTRE BACTERIES


Trois modèles sont utilisés par les bactéries pour échanger entre elles de
l’information génétique (Planche A).
a. La conjugaison bactérienne : est un phénomène d’échange direct du
matériel génétique entre deux bactéries qui entrent en contact au travers les
pili sexuels (F pili). Il y a une bactérie donatrice possédant un plasmide F
appelé aussi facteur F (bactérie F+) ou un chromosome intégrant le facteur F
(bactérie Hfr) et une bactérie réceptrice dépourvue du plasmide de fertilité F
(bactérie F-). L’ADN transféré dit exogénote est généralement bicaténaire et
les bactéries transformées peuvent être diploïdes partielles (mérozygotes)
ou haploïdes recombinées par intégration d’exogénote dans le chromosome
(Planches B et C).
Les croisements possibles sont: F- x F+ ou F– x Hfr
b. La transduction bactérienne : est un phénomène d’échange génétique
entre bactéries par intermédiaire des bactériophages (Planche D). Un phage
est dit transducteur lorsqu’il est capable d’encapsuler une partie de l’ADN de
bactérie lysogène (excision «imparfaite» du prophage) et de la transmettre à
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une bactérie réceptrice. On peut avoir une transduction spécialisée ou


localisée (ex : lysogène E. coli. Gal(λ)bio) et une transduction généralisée.
L’ADN de phage transducteur (exogénote) est double brin (mérozygote) et
s’incorpore dans l’endogénote par recombinaison homologue (haploïde
recombiné).
c. La transformation : est l’adsorption par la bactérie receveuse de
molécules d’ADN présentes dans le milieu qui l’entoure et provenant d’une
bactérie donneuse. La bactérie receveuse doit être «compétente» et
l’expression de l’endogénote introduit indique sa transformation (Fig. 3).

- Chez les bactéries Gram+ (ex : Streptococcus) l’exogénote bicaténaire se fixe


sur les récepteurs membranaires et seul un brin pénètre dans la receveuse
compétente. L’intégration de l’exogénote simple brin dans l’endogénote
donne une receveuse hétéroduplex.
- Chez les bactéries Gram- (ex : Haemophilus) l’échange est lieu entre les
souches apparentées. l’exogénote bicaténaire pénètre dans la receveuse via
les Transformasomes et seul un brin est incorporé dans une région
homologue du chromosome pour former une receveuse hétéroduplex.

Remarque : Ce dernier modèle est le plus utilisé en génie génétique pour


modifier le patrimoine génétique des espèces cibles. Toute fois, ces trois
mécanismes du transfert génétique peuvent servir à l’analyse génétique
bactérienne. Ex : Test de récessivité, test de complémentation fonctionnelle,
test de recombinaison,….

2. LES GRANDES ETAPES DE LA TRANSGENESE

2. 1. DEFIFNITIONS
Le processus de transformation génétique d'une cellule par introduction de
gène étranger est appelé transgenèse. Le gène étranger introduit constitue le
transgène. Il est transféré dans la cellule par l’intermédiaire d’un vecteur.
Des populations de cellules identiques qui descendent par mitoses
successives d'une cellule mère sans modification génétique constituent un
clone. Le génie génétique consiste à transférer de l’ADN extrinsèque dans
une cellule puis à multiplier en grand nombre la cellule transformée
obtenue, on parle alors de clonage génétique. Le gène intéressant qu’on veut
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cloner est le marqueur de transformation. Pour identifier les cellules


transformées dans le lot de l’ensemble des autres cellules, on utilise des
marqueurs de sélection pour suivre l'évolution de la transformation
(molécules fluorescentes ou gènes de résistance).
Exemple 1-Le gène GUS code pour la ß-galacturonidase, une enzyme qui
confère une coloration bleue aux cellules et qui n'existe pas naturellement
dans la plante (Fig.4).
Exemple 2- Le gène luc de la luciole code pour la luciférase qui réduit la
luciférine. La réaction s’accompagne d’une émission de fluorescence dans les
cellules transformées. Cette fluorescence peut être captée au niveau de la
plante grâce à une caméra spéciale (Fig.5).

2. 2. LE CLONAGE GENETIQUE
La transformation génétique en elle même est un processus technologique
qui se déroule en 4 grandes étapes (Fig. 6) :
1. isolement et purification du gène cible
2. insertion du gène cible dans un vecteur
3. Sélection de la cellule hôte transformée par le vecteur recombinant
4. amplification du vecteur et expression du transgène
Le vecteur recombinant inséré est reproduit de façon conforme à chaque
cycle cellulaire. On obtient des clones du vecteur recombinant qui est
amplifié en grande quantité. Le gène inséré peut être exprimé dans
l'organisme hôte. Dans le processus de transformation génétique, plusieurs
constituants cellulaires interviennent :
¾ les enzymes de restriction permettent de couper spécifiquement
l’ADN au niveau de certaines séquences qu’on qualifie de
palindrome et caractérisées par double axe symétrique (Tableau 1).
Selon l’organisme cible, la restriction enzymatique génère une
extrémité franche (EcoR II) ou une extrémité cohésive (boucle
collante, Hind II).
¾ la phosphatase alcaline empêche les vecteurs digérés par les
enzymes de restriction de se refermer avant la fin du clonage
¾ les ADN ligases permettent de souder les bouts de fragments d’ADN
¾ les ADN polymérases réalisent la synthèse in vitro de l’ADN
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¾ les vecteurs de clonage assurent le transfert de l’ADN étranger dans


la cellule à transformer. Pour les cellules eucaryotes supérieures,
on a les virus. Pour les procaryotes, on a les plasmides avec une
capacité de clonage de 15kb, les bactériophages avec une capacité
de clonage de 25kb. Les cosmides, qui sont une création artificielle
combinant les caractères avantageux des deux premiers, ont une
capacité de clonage de 50kb.

3. LA CONSTITUTION DE BANQUES DE GENES

Pour obtenir de l’ADN recombinant, on identifie un gène donné chez


un organisme par la génétique classique. On extrait le gène et on le digère
avec des enzymes de restriction pour obtenir des petits fragments de
restriction. On extrait également les vecteurs des bactéries et on les digère
par les mêmes enzymes de restriction qui ont servi à digérer le gène. On met
les vecteurs et les fragments de restriction en solution pour obtenir de l’ADN
recombinant. Les vecteurs recombinants sont ensuite réintroduits dans les
bactéries pour le clonage. A l’aide des marqueurs de sélection, un criblage
des clones contenant le gène est réalisé. Les clones obtenus peuvent être
utilisés pour la transformation génétique de l’organe cible (Fig. 7).
Deux types de banque d’ADN sont ainsi constitués :
► la banque génomique qui est une technique sans à priori dans laquelle on
digère la totalité d'un génome donné par des enzymes de restriction et
introduit chaque fragment dans un vecteur, puis dans un hôte approprié.
Une banque génomique est considérée représentative si elle contient, au
moins une fois, l’ensemble de séquence du génome. Plus les inserts seront
longs, plus faible sera le nombre des clones nécessaires.
Elle présente des avantages permettant de connaitre :
- les régions non transcrites des exons
- les séquences de régulation
- les gènes silencieux
- les introns
►la banque d'ADN complémentaire ou ADNc est un ensemble de clones
obtenus à partir de l'ARNm correspondant grâce à la transcriptase reverse
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isolée d’un rétrovirus. Elle permet de disposer d'une banque de gènes dont
on connaît les séquences et qui peuvent être utilisés immédiatement sans
criblage préalable.

4 - METHODES DE TRANSFERT DE L’ADN

Les méthodes de transfert de l’ADN utilisées en génie génétique sont


regroupées en méthodes directes et indirectes.

A. Transfert direct des gènes : Il consiste à introduire dans les cellules


cibles animales ou certaines espèces végétales réfractaires aux bactéries
Agrobacterium, des gènes d’intérêts. En effet, l’extrait d’ADN ou ADN nu est
mélangé avec les cellules végétales à transformer. Cependant, la préparation
préalable des protoplastes par digestion de la paroi cellulosique est
nécessaire. L’application des conditions physico-chimiques appropriées du
milieu provoque les perméabilisassions réversibles de la membrane
plasmique qui permettent à des molécules d’ADN de pénétrer dans les
protoplastes et d’atteindre le noyau où elles s’intègrent par recombinaison à
un chromosome de la cellule.

Quelques techniques qui permettent d’introduire l’ADN extrinsèque dans les


protoplastes sont:

□ Utilisation de polyéthylène glycol (PEG) : provoque des fusions entre


membranes plasmiques, la création temporaire des micropores et la
pénétration de l’ADN dans le cytoplasme des protoplastes.
□ Electroporation : appliquer au mélange ADN – protoplastes des chocs
électriques entrainant la déstabilisation de la structure du plasmalemme, le
passage de l’ADN via les pores créés et l’intégration de transgène dans
l’endogénote des cellules cibles.
□ Micro-injection : permet l’injection directe du gène dans le noyau des
cellules. Elle constitue une méthode très efficace et peut conduire à
l’obtention de 20% de cellules dans lesquelles le transgène est intégré.
□ Biolistique : l’introduction de matériel génétique est réalisée par
l’intermédiaire de microparticules enrobées d’ADN ou d’ARN et accélérées à
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grande vitesse dans un canon à particule, qui permet leur pénétration dans
les tissus ou cellules cibles. On parle du « canon à ADN » (Fig. 8).

B. Transfert indirect ou biologique de l’ADN : Il se fait principalement par


le biais du plasmide Ti qui dérive d’une bactérie du sol appelée :
Agrobacterium (A. tumefaciens et A. rhizogenes). Cette bactérie provoque chez
les plantes qu’elle infecte une maladie du nom de « Gale » du collet. Une fois
inséré dans l’ADN chromosomique de la plante, une partie de l’ADN
plasmidique appelée ADN-T dirige la synthèse d’hormones végétales
perturbant la régulation de la croissance des cellules infectées de la plante
(formation d’une tumeur) ainsi que la synthèse des molécules appelées
opines (octopine et nopaline : sources de carbone et d’azote pour la bactérie.
Les gènes codant pour les hormones et les opines sont exprimés dans la
plante. Par contre, ceux codant pour les enzymes qui dégradent les opines se
trouvent dans la bactérie.
Ce système est le seul connu à ce jour de transfert naturel de gènes entre
cellules procaryotes et eucaryotes (Fig. 9). Les bactéries Agrobacterium
contiennent des plasmides de grande taille (de l'ordre de 200kb) qui
comportent trois régions importantes dans l'infection des plantes (Fig. 10):
1- une origine de réplication
2- une région regroupant les gènes de virulence qui ont des fonctions
spécifiques dans l'évolution de l'infection
3- une région oncogène appelée ADN de transfert ou ADN-T contenant
les gènes responsables de la synthèse des opines (Tumeur ou gale).
C'est la région oncogène qui est transférée dans la cellule végétale lors de
l'infection. L’utilisation des bactéries Agrobacterium en génie génétique
consiste à éliminer la région oncogène et à la remplacer par le marqueur de
transformation. On obtient un plasmide désarmé.

Remarque : Lors qu’il y a intégration des gènes nouvellement introduit,


l’expression de ces transgènes est stable et héréditaire.
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5. QUELQUES APPLICATIONS DU GENIE GENETIQUE


Le génie génétique vise principalement 3 domaines d’activité : l’amélioration
des plantes, la production d’enzymes industrielles et la production de
protéines pharmaceutiques.

5.1. PRODUCTION DE PROTEINE INDUSTRIELLE


La technique consiste à cloner un gène intéressant dans un vecteur avec le
promoteur de la lactoglobuline. Ce vecteur est utilisé pour transformer un
ovule d’une brebis par la technique de la micro injection. L’ovule
recombinant est implanté chez une brebis pseudo gestante qui va donner
des descendants transgéniques chez lesquels l’expression du gène est limitée
uniquement aux tissus mammaires. La protéine exprimée dans le lait de la
descendance transgénique est extraite et purifiée par les méthodes
classiques (Fig. 11).

5. 2. AMELIORATION DES PLANTES


Les bactéries Bt (Bacillus thurigiensis) possèdent des propriétés insecticides
contre une large gamme d’insectes. Elles produisent des cristaux ou δ-
endotoxines lors de sa sporulation (conditions défavorables). Ces cristaux
protéiques attaquent les larves des insectes, obstruent leurs canaux digestifs
et bloquent leur alimentation en substances nutritives. Dans le même
temps, les spores des bactéries germent à l’intérieur des larves, ce qui se
traduit par leur mort. Les δ-endotoxines produites par les bactéries Bt sont
très nombreuses et très variées, ce qui facilite leur effet pesticide sur les
insectes et limite fortement l’apparition de types résistants.
Le gène Bt code pour 1178 acides aminés. Il a été séquencé, cloné dans
Agrobacterium tumefaciens puis utilisé pour transformer des cellules de
tabac. L’infection des plantes transgéniques par des larves d’insectes se
traduit par une résistance plus élevée par rapport aux plantes témoins (Fig.
12).
Une autre enzyme végétale appelée EPSPS (3' EnolPyruvate Shikimate 5'
Phosphate Synthase) joue un rôle important dans la photosynthèse mais est
sensible aux herbicides ROUNDUP, ce qui entraîne la mort des plantes
pulvérisées. On a identifié des bactéries offrant un bon niveau de résistance
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naturelle au glyphosate. Le gène bactérien de l’EPSPS a été séquencé et


cloné grâce à Agrobacterium tumefaciens dans le tabac. Les plants de tabac
régénérés après le transfert de l’ADN recombinant expriment dans leurs
cellules l’EPSPS bactérien naturellement résistant au glyphosate et l’EPSPS
végétal sensible On a ainsi conféré à la plante la résistance au glyphosate
(Fig. 13). La pulvérisation en champs montre que les maïs transformés
génétiquement survivent à des épandages normaux de glyphosate et non les
mauvaises herbes (Fig. 14).

5. 3. LA LUTTE CONTRE LE VIH SIDA


Le virus d’immunodéficience Humaine (VIH), responsable du syndrome
immunodéficitaire acquis (SIDA), est un rétrovirus. Classiquement pour une
infection, le rétrovirus injecte son ARN dans une cellule hôte. Cette molécule
d'ARN est utilisée pour copier un brin d'ADN appelé ADN- qui va servir à son
tour de matrice à la synthèse du second brin d’ADN appelé ADN+ grâce à
une enzyme spéciale, la transcriptase reverse. C’est cette capacité à
synthétiser l’ADN à partir de l’ARN qui a donné le nom rétrovirus à cette
famille virale. La molécule d'ADN bicaténaire ou provirus va s’intégrer de
façon stable dans le génome cellulaire et initier un processus de
transcription pour synthétiser l’ARN viral et la coque protéique (Fig. 15). Les
rétrovirus possèdent généralement 3 gènes mais les VIH possèdent 6 autres
gènes dont les rôles ne sont pas encore totalement élucidés. Certains de ces
gènes contiennent même des introns.
Les cellules cibles du VIH sont les cellules immunitaires notamment les
lymphocytes T porteurs du récepteur membranaire CD4. Une fois que le VIH
entre dans la cellule, la transcriptase reverse réalise la copie ADN du génome
viral qui va s’intégrer dans le génome cellulaire et favoriser la multiplication
en grand nombre du virus. Les virus matures ainsi libérés peuvent à leur
tour infecter d’autres cellules (Fig. 16). Ces cellules jouent un rôle important
dans la coordination de la défense immunitaire.
Grâce au génie génétique, une molécule proche de la thymine été créée: c’est
l'AZT (AZidoThymidine). L’AZT possède à la place du groupement 3’-OH
indispensable pour poursuivre la synthèse de l’ADN un groupement azide en
3’ (Fig. 17). Heureusement, la transcriptase reverse du VIH présente une
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grande affinité pour l’AZT alors que l’ADN polymérase préfère la thymine.
Lorsqu’on injecte de l’AZT au séropositif, son incorporation dans la chaîne
d’élongation de l'ADN à la place de la thymine lors de la copie ADN de l’ARN
viral bloque la synthèse. Les premiers essais ont montré des résultats
intéressants en termes d’efficacité sur la charge virale ou sur les virus
présentant des mutations.

5. 4. LA PRODUCTION DE PROTEINES PHARMACEUTIQUES


Exemple 1: l’insuline humaine comprend deux chaînes qui ont été clonées
séparément dans des cellules de la bactérie E. coli. Après la synthèse, elles
sont extraites, purifiées et mélangées pour reconstituer la molécule
d’insuline active. L’insuline est la première molécule transgénique autorisée
dans le commerce pour la santé de l’homme (Fig. 18). Elle est utilisée dans le
traitement du diabète.
Exemple 2: Le gène de la protéine de surface du virus de l’hépatite B a été
cloné et utilisé pour transformer des cellules eucaryotes de la levure de
boulangerie Saccharomyces cerevisiae. Les cellules transformantes
expriment la protéine virale et leur culture dans de grands fermenteurs
industriels a permis d’obtenir de grandes quantités de protéine qui sont
purifiées et commercialisées en tant que vaccin contre le virus de l’hépatite
B.

5. 5. LE DIAGNOSTIC DES MALADIES GENETIQUES ET LA THERAPIE GENIQUE


On recense environ 500 maladies génétiques congénitales dont certaines
touchent une population cible importante. Une détection précoce de ces
maladies est possible par prélèvement d’un peu de liquide du fœtus pour
une analyse des gènes, des protéines et des réactions biochimiques: c’est
l’amniocentèse. La thérapie génique, quant à elle ensuite, vise à introduire
des cellules porteuses d’un transgène dans des tissus dans le but de corriger
l’effet d’un gène déficient.
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Deuxième partie : Techniques de biologie moléculaire

Introduction
Les marqueurs morphologiques ont servi de base à la classification
scientifique de la diversité spécifique au sein du monde vivant. Cependant,
ils sont très peu polymorphes, de nature dominante et soumis à l’influence
du milieu, ce qui limite fortement leur utilisation. Par ailleurs, les marqueurs
protéiques (enzymatiques) qui révèlent un niveau de polymorphisme
acceptable ne sont que l’expression de la partie codante du génome des
organismes eucaryotes estimée entre 5 et 20%. Une grande partie du génome
reste ainsi inaccessible par l’électrophorèse enzymatique. Les techniques de
biologie moléculaire constituent un ensemble de méthodes qui ciblent l’ADN
et permettent d’étudier directement la diversité biologique des animaux et
des végétaux.

I. LES MARQUEURS GENETIQUES

Les marqueurs génétiques sont indépendants de leur environnement,


ce qui permet d’obtenir les mêmes résultats quelques soit les conditions
d’études. Ils renseignent sur le génotype et sont utilisables à tous les stades
de développement de la plante car l’information génétique est présente en
totalité dans toutes les cellules. Les principaux types de marqueurs
génétiques sont les marqueurs biochimiques et nucléiques (ADN). Les
caractéristiques principales des marqueurs génétiques sont les suivants :
► Polymorphe c'est-à-dire présenté une variabilité entre individus
► Insensible au milieu
► Sélectivement neutre : ses différents allèles n’ont pas d’effet sur le
génotype.
Les marqueurs génétiques donnent des bandes qu’on peut observer
sur un gel d’électrophorèse en agarose (Fig. 19) ou en polyacrylamide). Ils
sont transmis à la descendance et peuvent être interprétés en terme
d’allèles. On les appelle locus marqueur car on peut les localiser sur le
chromosome.
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Les marqueurs génétiques peuvent être de nature dominante (Fig. 20)


ou codominante (Fig. 21). Dans ce dernier cas, on ne peut pas distinguer les
hétérozygotes des homozygotes. On utilise les marqueurs génétiques pour
établir les profils ou les empreintes génétiques qui jouent un rôle important
dans des domaines aussi divers que les recherches de paternité,
l’identification de suspects dans les affaires criminelles, les études de
diversité génétique, etc.

II. L’EXTRACTION DE L’ADN GÉNOMIQUE

La réussite d’une analyse moléculaire requiert un extrait d’ADN.


L’obtention d’un bon extrait d’ADN génomique, en terme de quantité et de
qualité, repose sur l’exécution précise d’un procédure d’isolement
préalablement adapté à notre matériel eucaryote (animal ou végétal) ou
procaryote. En effet, les tampons d’extraction utilisés (Kit, Chelex,
Dellaporta, CTAB, Lysozyme, SDS,…) doivent être susceptibles non
seulement de lyser les parois squelettiques et les membranes cytoplasmiques
pour liber les différents organites cellulaires, mais aussi de protéger l’ADN
nu (voir TP).
Généralement, l’extrait d’ADN ou le lysat subit une phase de
purification par un traitement chimique (phénol-chloroforme) puis un autre
traitement enzymatique (Protéase K et ARNase). Dans le cas où la technique
d’analyse moléculaire n’exige pas une meilleure qualité d’extrait d’ADN
(1,8≤DOADN/DOProtéine≤2 = ADN pur), sa purification peut se limiter à une
simple centrifugation.
Les extraits d’ADN ainsi obtenus peuvent être directement analysés via
une digestion enzymatique (cas de RFLP) ou amplifiés in vitro par la
technique de PCR.

III. LA RÉACTION DE POLYMÉRISATION EN CHAÎNE (PCR)

La PCR (Polymerase Chain Reaction) est une réaction d’amplification du


matériel génétique réalisée dans un appareil spécifique dit Thermo-cycler ou
Amplificateur. L’amplification d’une séquence particulière d’ADN se réalise
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par l’action répétée d’une ADN polymérase. En effet, elle se déroule en


plusieurs cycles thermiques et permet de double à chaque cycle la quantité
d’ADN matrice. Les principales étapes sont les suivantes :
► Dénaturation de l’ADN
► Hybridation des amorces de part et d’autre de la séquence cible
► Synthèse et élongation du brin d’ADN complémentaire par la Taq
polymérase
L’ADN dupliqué entre dans une série de dénaturation / élongation pendant
plusieurs cycles (Fig. 22 a et b). La PCR permet au bout de quelques cycles
d’obtenir d’énormes quantités d’ADN. Ainsi au bout de y cycles, on obtient
2y+1 quantités de la molécule cible de départ (Fig. 23).
Toutes les étapes de polymérisation d’ADN in vitro doivent faire au
préalable l’objet d’une mise au point très stricte en fonction de l’espèce
étudiée avant toute utilisation en routine (Fig. 24).
► Les dénaturations se font à des températures élevées (94 à 90 °C)
indispensables pour ouvrir la double chaîne d’ADN. La dénaturation initiale
dure plus longtemps que les suivantes.
► L’hybridation des amorces sur les brins monocaténaires d’ADN est
toujours très rapide et se déroule à des températures plus basses (33 à 64
°C).
► La synthèse et la polymérisation des brins complémentaires d’ADN
se déroulent sous l’action de Taq polymérase et à des températures
moyennes (70 à 72 +C). L’élongation finale dure plus longtemps que les
élongations successives au cours des cycles de l’amplification.
La PCR est utilisée principalement à des fins d’amplification du
matériel génétique mais elle joue aussi un rôle important dans les
diagnostics.

IV - METHODES DE SEQUENÇAGE DES GENES

Plusieurs méthodes ont été mises au point pour identifier la séquence de


bases sur une molécule d'ADN, c’est le séquençage. Il s’agit de réaction de
polymérisation de l’ADN. A la fin de la réaction, on obtient des fragments de
différentes tailles qui couvrent toute la longueur de l’ADN à séquencer et qui
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vont être révélés sur un gel de polyacrylamide puis lues dans un


autoradiogramme. Les fragments migrent en fonction de leur taille, les plus
courts migrent plus vite que les plus longs. Le fragment le plus court
correspond à l'extrémité 5' et le plus long à l’extrémité 3’. Deux méthodes
courantes de séquençage sont utilisées:
¾ La méthode de Maxam-Gilbert dans laquelle on met dans la solution
de polymérisation des composés qui vont ajouter un groupe CH3 aux
bases nouvellement incorporées dans la chaîne de synthèse. Ce sont le
diméthylsulfate (DMS) pour les purines (G et A) et l'hydrazine pour les
pyrimidines (C et T). Cette méthylation permet de reconnaître et de
couper les bases nouvellement incorporées au cours de la synthèse. Le
séquençage se fait dans 4 tubes à essai où on détruit spécifiquement
une ou deux bases. La destruction simultanée de 2 bases dans un
même tube permet de confirmer les résultats de la destruction de base
unique dans les autres tubes (Fig. 25).
¾ La méthode de Sanger qui repose sur l'utilisation de
didéoxyribonucléosides triphosphates (ddNTP) qui différent des bases
normales (désoxyribonucléosides triphosphates ou dNTP) par la
substitution d'un hydrogène à la place du groupement OH en 3'.
L’incorporation d’un ddNTP à la place du dNTP correspondant entraîne
l'arrêt de la synthèse de l'ADN complémentaire au brin matrice (Fig.
26).

V. LES MARQUEURS CODOMINANTS

V. 1. La technique RFLP

V. 1. 1. Principe de la technique
Il repose sur le polymorphisme des fragments de restriction. Toutes les
variations des séquences d’ADN modifient les sites de coupure des enzymes
de restriction. Cela se traduit par des fragments de tailles différentes et
engendre un polymorphisme qui peut être interprété en terme de profil
génétique. La RFLP est une technique qui ne nécessite pas une amplification
préalable de l’ADN par PCR.
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Exemple: cas de l’anémie falciforme ou drépanocytose


La pathologie se caractérise au niveau moléculaire par la transition entre
une Adénine et une Thymine en position 20 dans le gène, ce qui pour
conséquence la disparition d’un site de reconnaissance de l’enzyme de
restriction MstII. Les individus porteurs de l’allèle déficient du gène
présentent un fragment plus long à cet endroit lors de la digestion par
l’enzyme MstII. L’électrophorèse montre chez ces individus un fragment de
restriction à migration lente inexistant chez les individus porteurs des allèles
normaux (Fig. 27). Un américain noir/40 et 40 personnes/100 en Afrique de
l’ouest sont porteurs de l’allèle malade du gène. La transition entre A et T
dans le gène se traduit par le remplacement du codon GAG par le codon
GUG chez l’ARNm. L’acide glutamique en position 6 est remplacé par la
valine parmi les 574 acides aminés qui forment cette protéine (l’hémoglobine)
constituée de deux chaînes α identiques de 141 acides aminés chacune et
deux chaînes β identiques de 146 acides aminés chacune. La modification a
lieu sur l’une des deux chaînes β.

V.1.2. Avantages et inconvénients de la RFLP

Les marqueurs RFLP sont très polymorphes et constituent la


technique de choix pour les travaux de cartographie comparée qui se sont
beaucoup développés ces dernières années. Dans le domaine de l'évolution
moléculaire, la RFLP permet la comparaison de cartes de restriction pour des
locus particuliers dans le but d'établir des phylogénies de gènes. C’est le
marqueur le plus utilisé dans les recherches de paternité. Aux Etats-Unis, la
technique RFLP est utilisée depuis longtemps pour vérifier les liens de
parenté entre les migrants et les résidents.
Les locus RFLP sont peu nombreux et ne présentent que 2 formes
(présence ou absence à un site donné). La mise en œuvre de la RFLP est
assez difficile, longue, coûteuse et demande une technicité élevée.
Notamment, lors que les fragments de digestion enzymatique font l’objet
d’hybridation avec des sondes marqués (ADNc, séquence clonée,….).
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V. 2. Les marqueurs microsatellites

Les microsatellites ou SSR (Simple Sequence Repeat ou Répétition de


Séquences Simples) sont des motifs répétés de nucléotides abondants dans le
génome surtout chez les eucaryotes. Le motif de base, constitué de 2 à 4
nucléotides en moyenne, est répété plusieurs fois dans le même sens : on
parle de répétitions en tandem. Ce marqueur doit être entouré de séquences
uniques de part et d’autre pour éviter toute ambiguïté (Fig. 28). A l’aide
d'amorces de séquence connue correspondant aux séquences qui les
entourent, on amplifie par PCR les microsatellites. La variation dans le
nombre de répétitions permet de détecter une variabilité entre les individus
analysés (Fig. 29).
Les marqueurs microsatellites ont un taux de polymorphisme très
élevé, un nombre élevé d’allèle par locus et un très haut niveau de
reproductibilité (Fig. 30). Cependant, ils sont très spécifiques et ne peuvent
pas être utilisé d’une espèce à l’autre. La mise au point des microsatellites
est également longue et nécessite des digestions de l’ADN génomiques
suivies de plusieurs séries de clonage pour extraire le motif de base.

VI. LES MARQUEURS DOMINANTS

VI. 1. Les marqueurs ISSR


La technique ISSR (Inter Simple Sequence Repeat) est très proche de la
technique des microsatellites. La région amplifiée par la PCR est représentée
par les séquences qui séparent 2 locus microsatellites (Fig. 31) et donne des
résultats interprétables en terme d’absence ou de présence de bandes (Fig.
32).
La technique ISSR présente l’avantage d’être applicable à du matériel
dont le génome est peu connu au contraire des microsatellites qui sont
spécifiques à des espèces données. Cette caractérisation en une méthode
très utilisée chez les espèces ayant été très peu étudiées. La technique ISSR
associe également l’universalité des marqueurs RAPD à la reproductibilité
des microsatellites.
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VI. 2. La technique RAPD

La RAPD (Random Amplified Polymorphic DNA) est une méthode qui


utilise des amorces arbitraires pour amplifier des segments du génome total.
Les 2 brins d’une amorce se fixent sur deux copies opposées de l’ADN cible
et amplifient cette région du génome. Les sites d’hybridation sont aléatoires
le long du génome. L’amplification n’a pas lieu s’il n’y a pas de site
d’hybridation ou si la distance séparant les 2 sites est trop longue. Les
amplifias de la PCR sont séparés sur un gel d’agarose où le polymorphisme
des sites d’hybridation des amorces observé se traduit par la présence ou
l’absence d’une ou des bandes chez les différents génotypes.
La RAPD est une méthode adaptée pour comparer différents génomes
dans le cas où des marqueurs spécifiques ne sont pas connus. L’abondance
des marqueurs RAPD dans le génome en fait une méthode très utilisée dans
l’établissement des cartes génomiques des différentes espèces ciblant l’ADN.
C’est la technique ADN de plus faible coût qui est disponible pour les études
génétiques. Le principal inconvénient de la RAPD réside dans sa faible
reproductibilité, ce qui nécessite une mise au point spécifique à chaque
laboratoire.

VI. 3. La technique AFLP

La technique AFLP (Amplified Fragment Length Polymorphism) est une


technique d’empreinte génomique qui associe la RFLP à la PCR. Sa
réalisation peut être résumée en trois phases importantes :
¾ Digestion totale de l’ADN génomique par deux enzymes de restriction
différentes dont l’une a des sites de coupure fréquents et l’autre des
sites de coupure rares. Msp I et EcoR I sont généralement utilisées.
¾ Ligation par une ligase T4 des bouts cohésifs avec un adaptateur
connu et spécifique à chaque endonuléase
¾ Amplification de l’ADN digéré et ligué via la PCR. Cette amplification
se déroule en deux étapes dites Pré-amplification (PCR1) et
Amplification sélective (PCR2).
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Les produits d’amplification de la PCR1 sont vérifiés sur un gel test


d’agarose. Tandis que ceux de la PRC2 sont séparés sur un gel de
polyacrylamide.
La technique AFLP produit un nombre très élevé de bandes (Fig. 33). Son
interprétation est un peu plus difficile que les techniques RADP et ISSR.
Contrairement à la RFLP, elle peut être utilisée sur des espèces dont les
séquences ne sont pas connues.

VII. Analyse comparée des marqueurs génétiques

RFLP SSR ISSR RAPD AFLP STS ou SNP


Type de marqueurs Enzyme/- sonde sonde sonde sonde Enzyme/- sonde
Nombre de illimité Quelques milliers Quelques milliers illimité Illimité
marqueurs
Polymorphisme mis élevé élevé élevé Très élevé Très élevé
en évidence
Caractérisation Locus codominants Locus codominants Locus dominants Locus dominants Locus
et révélés et révélés et révélés en et révélés en dominants et
génétique individuellement individuellement masse masse révélés en
masse
Principales Cartographie, Cartographie, Clonage Clonage Clonage
génétique génétique positionnel, positionnel, positionnel,
utilisations quantitative (QTL) quantitative (QTL) rétrocroisement rétrocroisement rétrocroisement
Reproductibilités Parfaite parfaite parfaite Faible Faible

STS (Sequence – tagged Sites) : Les séquences ciblées comme marqueurs


SNP (Simple Nucleotide Polymorphism) : Polymorphisme mononucléotidique

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