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1ere année Master : Biochimie et Biologie Moléculaire Bio-Ingénierie des Biomolécules

Manipulations génétiques
La synthèse in vitro de molécules d'ADN biologiquement actives, dont l'information génétique
provenait de deux sources différentes, a été réalisée pour la première fois par Chang et Cohen en
1973. Ces auteurs ont réussi à épisser les fragments de 2 plasmides puis à introduire cet ADN
composite dans des cellules d'Escherichia coli ; l'ADN ainsi introduit s'est répliqué et a exprimé
l'information provenant des deux plasmides parentaux. Ainsi, une étape nouvelle a été franchie dans
les possibilités de la génétique.

I. Principes généraux

Le génie génétique permet la « manipulation » des acides nucléiques et des processus dans lesquels
ils sont impliqués. Ses techniques sont basées sur l'utilisation artificielle des mécanismes naturels et
trouvent des applications nombreuses : études théoriques, méthodes d'analyse, et surtout, insertion
de matériel génétique étranger au sein d'un génome sans utiliser les processus naturels de sexualité
ou de parasexualité. Grâce au génie génétique il est possible de fournir à une cellule une
information génétique totalement nouvelle qui n'appartient pas à l'espèce. Cette méthodologie
présente des possibilités quasi illimitées : il est théoriquement possible de fournir à un micro-
organisme, mais aussi à une cellule animale ou végétale l'information nécessaire à l'expression
d'une propriété intéressante, par exemple la production d'une protéine à intérêt médical ou
industriel.

Divers types de manipulations sont utilisables pour effectuer des transferts génétiques « non
naturels » :

 les fusions cellulaires induites (fusion de protoplastes, cytoduction). Ces opérations peuvent
être considérées comme des adaptations des processus sexuels.

 les micro-injections de chromosomes ou de noyaux. Ces opérations sont essentiellement


appliquées aux organismes eucaryotes supérieurs et ne font pas intervenir de micro-
organismes ;

 le transfert de molécules d'ADN éventuellement modifiées : c'est le véritable ingénierie de


l'ADN. Le transfert aboutit ou non à une véritable recombinaison qui est dite homologue si
l'exogénote appartient à la même espèce ou hétérologue dans le cas contraire.

On appelle clonage d'un gène l'isolement, le transfert et la multiplication éventuelle d'un gène dans
une cellule hôte. L'ADN qui en résulte contient des parties étrangères et est appelé ADN
recombinant. L'organisme récepteur est appelé « organisme génétiquement modifié » (OGM).

Lorsque l'on se place dans des conditions favorables à l'expression du gène transféré, il est possible
d'obtenir la synthèse de la protéine concernée qui est dite « recombinée ».

L'opération implique la réussite de 5 opérations successives :

1. il faut isoler le gène à transférer, ce qui suppose une manipulation plus ou moins fine de
l'ADN ;

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2. il faut trouver un moyen de le faire pénétrer dans la cellule hôte. Ceci implique souvent la
recherche d’un transporteur génétique convenable (vecteur), capable de se répliquer et de
répliquer le segment d'ADN étranger qui lui a été attaché ;

3. la molécule d'ADN (ou le vecteur qui la porte) doit être introduite dans une cellule
réceptrice appropriée en partait état de fonctionnement ;

4. il faut disposer d'une méthode de sélection permettant d'isoler un clone de cellules


réceptrices contenant l'ADN hybride parmi une énorme population de cellules sauvages.
Cette quatrième étape est souvent la plus problématique. Les méthodes de rupture et
d'épissure des molécules d'ADN ont une valeur assez générale. Les vecteurs sont spécifiques
d'un groupe microbien plus ou moins important. Le crible est souvent particulier et doit être
imaginé pour chaque opération nouvelle ;

5. dans le cas où le but final des manipulations est l'expression du gène transféré sous forme de
production d'une protéine, il convient de savoir la récupérer et la purifier. Cette étape fait
appel à des techniques classiques mais peut être délicate. Par ailleurs, il est intéressant de
pouvoir produire et purifier aisément le gène clone pour en effectuer l'étude au niveau
moléculaire. La connaissance de la séquence de l'insert peut être précieuse pour
l'amélioration ultérieure de l'expression du gène.

1. Préparation de l’ADN à cloner

Le but de l'opération est l'obtention de fragments d'ADN portant le (ou les) gène(s) que l'on désire
transférer. L'ADN à cloner peut être obtenu de plusieurs façons : ADN génomique, complémentaire
ou artificiel (figure 01). Ils doivent ensuite être éventuellement modifiés (coupure avec formation
d'un bout collant, utilisation de fragments liants synthétiques, d'homopolymères...) pour faciliter
leur intégration dans un vecteur. Dans ce cas, il faut évidemment coordonne les deux opérations de
modification de l'ADN donneur et du vecteur.

Figure 01 : Voies d'obtention de l'ADN à cloner.

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1.1. Préparation d'ADN génomique

Une solution consiste à extraire l'ADN cellulaire, à le purifier, et à obtenir des fragments parmi
lesquels se trouvera le fragment intéressant : cet ADN est dit génomique (ADNg). Elle est utilisable
pour le clonage de gènes issus d'un génome simple pour lequel la probabilité pour qu'un fragment
d'ADN contienne le gène recherché n'est pas trop faible (clonage de gènes procaryotes). Dans le cas
de gènes eucaryotes (surtout eucaryotes supérieurs), la complexité du génome et La présence d'une
grande masse d'ADN parasite (introns et des grandes zones non codantes) rend cette méthode très
aléatoire.

Cette option nécessite une lyse cellulaire qui se fait par choc osmotique sur des cellules entières ou
sur des protoplastes, par sonication, par variation de pression (décompression), par broyage... . Les
cellules végétales et animales sont relativement faciles à détruire à l'aide d'un broyeur-
homogénéisateur.

La sonication est le procédé le plus utilisé pour les bactéries. Pour les levures et moisissures il est
préférable d'utiliser un broyeur à billes. Selon le type d'extraction, l'ADN peut être isolé soit
directement, soit après la séparation de fractions acellulaires.

La purification des acides nucléiques s'effectue en utilisant diverse méthodes : la plus utilisée est
l'ultracentrifugation préparative. Des méthodes de séparation chimique utilisant divers produits
(EDTA, SDS, LiCl, sarcosyl. protéinase K, phénol, chloroforme, ARNase...) sont également
employées. Les fragments obtenus peuvent être analysés par électrophorèse sur agarose ou polya-
crylamide, généralement avec visualisation au bromure d'éthidium (agent intercalant fluorescent) et
récupérés à partir du gel.

1.2. Préparation d'ADN complémentaire à partir d'ARN messager

Une deuxième solution consiste à obtenir une séquence d'ADN complémentaire (ADNc) à partir
d'un ARN messager en utilisant la transcriptase reverse des rétrovirus. Cette méthode est bien
adaptée au clonage de gènes eucaryotes dans une cellule procaryote, car seules persistent les zones
codantes au niveau des ARN messager secondaires.

La première étape consiste en l'obtention de l'ARN messager concerné : elle peut être compliquée,
dans certains cas, par sa très faible concentration.

L'ARN messager isolé est mis en présence de transcriptase réverse et d'un mélange de nucléotides.
Il se forme un ADN monocaténaire complémentaire. Les hybrides ADN-ARN sont ensuite traités à
la soude pour détruire le brin d'ARN. Par l'action de la transcriptase, l'ADN synthétisé possède, à
son extrémité 3’, une structure en épingle à cheveu (hairpin loop). Cette structure, qui joue le rôle
d'amorce, permet la synthèse de la chaîne complémentaire d'ADN en présence d'ADN polymérase.
La boucle de l'épingle est ensuite éliminée par la nucléase SI (figure 02). L'ADNc produit doit être
purifié en gradient de saccharose pour isoler les doubles brins complets qui sédimentent le plus. Des
homopolymères complémentaires peuvent être utilisés lors de la préparation des ADNc. Ils sont
ajoutés aux extrémités 3' après obtention du premier brin d'ADN. Après élimination de l’ARNm,
l'homopolymère complémentaire est ensuite utilisé comme amorce pour obtenir la synthèse du
deuxième brin.

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Figure 02 : préparation de l’ADNc

II. les enzymes de restriction et de modification


1. Les endonucléases de restriction

Une enzyme de restriction est une endonucléase à site de coupure très précis. Elle reconnaît
généralement une séquence palindromique et coupe les brins d'ADN entre des bases déterminées
de cette séquence.

Quand les sites de coupure sur les deux brins sont en vis-à-vis, les fragments générés sont à bords
francs, quand ils sont décalés, les fragments obtenus sont chevauchants ou débordants en 5' ou en
3' (tableau. 01). La coupure par une ou plusieurs enzymes de restriction fournit des fragments
d'ADN de différentes tailles. Ces fragments peuvent être facilement analysés par électrophorèse sur
gel. Les différents fragments obtenus sont utiles pour établir la carte de restriction d'un ADN.

La première enzyme de restriction à site de coupure spécifique fut découverte par Hamilton Smith
en 1970. Elle a été extraite de la bactérie Haemophilus influenzae et nommée Hind II,

Depuis, plusieurs centaines d'enzymes de restriction ont été découvertes, Les séquences reconnues
par ces enzymes comportent en général 4 à 6 paires de bases (tableau 01).

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TABLEAU 1. Sites de reconnaissance et de clivage de quelques enzymes de restriction.

2. Autres endonucléases

Elles n'ont pas la spécificité de site des endonucléases de restriction. Certaines, comme l'ADNase I
du pancréas de bœuf, n'attaquent que l'ADN ; cette enzyme coupe l'ADN par entaille simultanée des
deux chaînes en donnant des bouts francs. D’autres n'attaquent que l'ARN. Les plus utilisées sont
l'ARNase H d'Escherichia coli (il sert à éliminer la chaîne d'ARN après la synthèse du cDNA sous
l'action de la transcriptase reverse). l'ARNase pancréatique hydrolyse après les nucléotides
pyrimidiques, celle du phage T1 après la guanine, alors que celle du phage U2 hydrolyse
préférentiellement au niveau de l'adénine. Enfin, quelques endonucléases dégradent aussi bien
l'ADN que l'ARN : certaines, comme la nuclease S1 d'Aspergillus oryzae, sont beaucoup plus
actives sur les simples brins que sur les duplex (figure 3b). La nucléase SI est beaucoup utilisée
pour éliminer les extrémités simples brins de fragments d'ADN pour obtenir des bouts francs.

3. Exonucléases

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La plus utilisée est l'exonucléase III d'Escherichia coli qui retire les nucléotides aux extrémités des
duplex d'ADN. Associée à la nucléase S1, l'exonuclease III permet de « grignoter » les fragments
d'ADN. L'exonucléase du bacteriophage 1 permet, au contraire, une excision en 5' (figure 3c). Il
existe aussi des exonuclease actives sur l'ARN: phosphodiesterase de venin de serpent et
phosphodiestérase de rate de porc. La première est la plus utilisée: elle dégrade les molécules d'AR
à partir de leur extrémité 3'.

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Figure 3 : Les enzymes de coupure


a) endonucléases de restriction (les flèches indiquent le lieu de coupure).
b) Autres endonucléases.
c) Exonucléases.

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4. Phosphatases alcalines

Ces enzymes éliminent les phosphates 5' terminaux des molécules d'ADN (ou d'ARN). Les plus
utilisées sont les phosphatases alcalines de veau (CAP) et celle de E. coli (BAP). Elles servent
principalement à « empêcher » un plasmide de refermer sur lui-même après ouverture du site
d'insertion par l'action d'une enzyme de restriction. Ce mécanisme est illustré par la figure 4.

Figure 4 : Phosphatase alcaline


a) Mécanisme.
b) Restauration de la phosphorylation par une kinase (permettant la ligation).
c) Rôle dans l'insertion d'un ADN dans un plasmide pour éviter la récircularisation.

5. Les enzymes de synthèse

5.1. ADN polymérases « classiques »

Diverses enzymes de ce type sont utilisées pour greffer des nucléotides à l'extrémité d'une chaîne :
elles nécessitent la présence d'un brin modèle (figure 5a). Certaines possèdent d'autres activités, en

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particulier des activités exonucléase. Les ADN polymérases de E. coli (Pol I, Pol II et Pol III)
possèdent toutes les trois une activité polymérase (5' → 3') en présence d'une amorce (primer) et de
désoxynucléotides triphosphates (dXTP). Les enzymes Pol I et Pol II sont impliquées dans les
réparations d'ADN et l'enzyme Pol III l'est dans la phase de duplication de l'ADN. La plus
importante est l'ADN polymérase I d'Escherichia coli qui possède les deux activités exonucléase (3'
et 5' en absence de nucléotides). L'ADN polymérase du phage T4 possède deux types d'activité. En
absence de dXTP, elle a une activité exonucléase 3' → 5' alors qu'en présence de ces
oligonucléotides, une activité d'élongation 5' → 3' est observée si l'on a une amorce. La Taq
polymérase de Thermus aquaticus, très thermorésistante est utilisée dans le cadre de la technique
PCR.

Figure 5 : Enzymes de synthèse


a) Polymérase. b) Ligases.

5.2. Transcriptase reverse

La transcriptase reverse du virus de la myéloblastose aviaire (virus à ARN) à une propriété


particulière : c'est une ADN polymérase dont le modèle est l'ARN Cette enzyme permet l'obtention
d'une molécule d'ADN mono, puis double brin à partir d'un ARN messager. Elle est beaucoup
utilisée pour le clonage à partir des ARNm (cDNA : ADN complémentaire). Ce schéma
d'utilisation est illustre par la figure 6.

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Figure 6: Transcriptase reverse


a) Principe de fonctionnement pour la synthèse de cDNA (ADN complémentaire).
b) Utilisation pour synthèse à partir d'un ARNm particulier, c) Insertion d'un ADNc an sein
d'un plasmide.

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5.3. Ligases

Les ligases catalysent la liaison phosphodiester entre des extrémités 3' et 5' adjacentes : elles ont
pour fonction de réparer les coupures dans les brins d'ADN double brin. Une ADN ligase ne peut
généralement joindre les extrémités libres de 2 fragments d'ADN double brin que si un nombre
suffisant de bases complémentaires assure un minimum de cohésion à l'ensemble (figure 3b). Les
plus utilisées sont l'ADN ligase d'Escherichia coli à spectre assez réduit et celle du bactériophage
T4 à spectre plus large : elles sont ATP-dépendantes. La ligase d’Escherichia coli ne soude avec
efficacité que des doubles chaînes possédant un brin collant complémentaire et permet donc de lier
les ADN coupés par une même enzyme telle que Eco RI, Bam Hl. Cla I, Bgl II ou Sal I. Par contre,
celle de T4 est utilisable pour la ligation de molécules à bouts francs obtenues avec des
endonucléases de restriction qui cassent l'ADN sans donner des extrémités monobrins cohésives ou
résultant d'une rupture mécanique (par simple agitation dans un mixeur).

5.4. Transférase terminale

La transférase terminale de thymus de veau (terminal deoxynucleotidyltransferase) permet d'ajouter


des nucléotides à l'extrémité 3' de l'ADN : elle ne nécessite pas de brin modèle. Elle agit comme
une ADN polymérase par « ajout » en 3' OH d'une chaîne d'ADN d'au moins trois résidus
identiques. Cette enzyme est beaucoup utilisée dans la technique de « queuttage » pour obtenir des
bouts cohésifs. Cette technique est illustrée par la figure 6c).

6. Autres enzymes

La polynucléotide kinase du bactériophage T4 est utilisée pour phosphoryler l'ADN ou l'ARN à


partir d'ATP (figure 4b). La méthylase Eco RI est utilisée pour la protection des sites sensibles à ce
type d'endonucléase. La polyA polymérase est utilisée pour l'addition de résidus polyA à l'extrémité
des chaînes ou pour le marquage de l'ARN au P32,

III. Vecteurs de clonage et cellules hôtes

1. Les vecteurs procaryotes (Plasmides, des bactériophages ou des cosmides)

Un vecteur de clonage est une molécule d'ADN qui peut intégrer un ADN étranger pour permettre
son transfert dans une cellule hôte. En règle générale, les vecteurs sont de petite taille, et se
répliquent de façon efficace en produisant de nombreuses copies du fragment d'ADN inséré. Il
existe de nombreux vecteurs de clonage, et le choix s'effectue selon la taille du fragment à cloner et
la cellule dans laquelle il sera transféré (Tableau 3).

TABLEAU 3 : Vecteurs de clonage chez E. coli.

1. Les vecteurs procaryotes

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1.1. Plasmides

Un plasmide est une molécule d'ADN circulaire extrachromosomique présente chez la plupart des
procaryotes et chez quelques eucaryotes. Les plasmides se multiplient de façon indépendante au
sein des cellules hôtes et sont transmis de manière régulière au fur et à mesure des divisions,
Chaque plasmide contrôle de façon autonome son propre « nombre de copies ». Généralement ce
nombre varie de 1 à 60 copies de plasmides par cellule.

Les plasmides diffèrent également par leur taille comprise entre 5 et 400 kpb. La perte d'un
plasmide est définitive, la cellule s'avérant incapable de le régénérer de novo. Elle peut cependant
en acquérir d'une autre bactérie ou le recevoir directement par le processus de la transformation.
Les plasmides ne représentent qu'une infime partie du génome bactérien (0,5 à 3 %). Ils codent des
caractères généralement importants qui ne sont habituellement pas codés par le chromosome
bactérien. C'est le cas des gènes de résistance aux antibiotiques, des gènes codant des toxines
(bactériocines, etc.).

1.1.1. Le plasmide pBR322

Figure 07. Carte du plasmide pBR322. Les sites existant à un seul exemplaire sur ce plasmide sont
indiqués en gras.

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- Structure

Le plasmide pBR 322 a été construit de toutes pièces en empruntant aux plasmides naturels certains
de leurs éléments.

Son origine de réplication, de type bactérien est à contrôle relâché, cette origine provient du
plasmide pMB1: Ce plasmide peut être présent à raison de 10 à 20 copies par cellule dans des
conditions standard de culture. Si la culture est faite en présence de chloramphénicol qui bloque la
réplication du chromosome bactérien mais pas celle du plasmide, ce dernier peut s'accumuler
jusqu'à près de 1000 copies par cellule.

Il porte également deux gènes de résistance à des antibiotiques. Le gène bla code la β-lactamase qui
dégrade l'ampicilline. Une bactérie portant pBR322 pourra donc pousser en présence de cet
antibiotique : elle est devenue [AmpR] alors qu'une bactérie sans plasmide est tuée par l'ampicilline
[AmpS]. Le gène tet confère la résistance à la tétracycline.

- Mode d'emploi

Le pBR 322 remplit parfaitement son rôle. Les bactéries qui le reçoivent peuvent être sélectionnées
sur un milieu additionné d'ampicilline.

Il possède de nombreux sites uniques de clonage : digéré par une enzyme de restriction (ex :
BamHI), il est linéarisé et ne comporte qu'un seul fragment avec des extrémités cohésives. Il peut
être religué avec un autre fragment d'ADN présentant des extrémités cohésives compatibles. Cette
réaction à deux molécules est raisonnablement probable.

Pratiquement, dans un tube, on effectue la digestion du plasmide par BamHI. La nucléase est
inactivée par la chaleur. Dans le tube on a alors des plasmides linéarisés et un reste de plasmide non
coupé (rendement<10%). Dans le même tube on ajoute l'ADN à insérer et on fait agir une ligase
(voir ci-dessous). On obtient un plasmide recombiné où le gène tet est interrompu par l'ADN
étranger. Dans le tube coexistent deux sortes de plasmides : le plasmide natif portant bla et tet
fonctionnels et les plasmides recombinés portant le gène bla fonctionnel et tet interrompu par un
fragment étranger.

Figure 08. Les deux types de plasmides dans le tube après ligation.

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Lorsque ces plasmides vont transformer des bactéries réceptrices sensibles à l'ampicilline et à la
tétracycline, on va obtenir 3 types de bactéries : celles qui n'ont pas été transformées de 50 à 90%)
qui sont restées sensibles à l'ampicilline ; celles qui ont reçu un plasmide natif qui sont devenues
résistantes à l'ampicilline et à la tétracycline et celles qui ont reçu un plasmide recombiné qui sont
devenues résistantes à l'ampicilline mais sont restées sensibles à la tétracycline. En deux étapes on
va pouvoir repérer ces dernières. Toutes les bactéries sont étalées sur un milieu contenant de
l'ampicilline. Celles qui poussent sont répliquées sur milieu additionné d'ampicilline et de
tétracycline. Celles qui poussent ont reçu un plasmide natif. Celles qui ont reçu un plasmide
recombiné sont récupérées sur la matrice (tableau 4, figure 9).

Tableau 4. Les différents types de bactéries et la façon de les distinguer

bactérie plasmide Résistance croissance sur croissance sur


Ampicilline Ampicilline et
Tétracycline
bact. [AmpS] aucun Aucune - -
bact. [AmpS] pBR natif à l'ampicilline et à + +
la tétracycline
bact. [AmpS] pBR recombiné à l'ampicilline + -

Figure 09. Sélection des bactéries transformées et repérage des bactéries portant un plasmide
recombiné

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1.1.2. Le plasmide pUC18

Figure 10. Carte du plasmide pUC18 /19.

Le plasmide pBR322 nécessite un repérage des clones portant des plasmides recombinés XE
"plasmides recombinés" en deux étapes. On a mis au point une nouvelle famille de plasmides qui ne
nécessitent plus qu'une étape : les pUC. Un plasmide pUC est un plasmide pBR dans lequel on a
remplacé le gène de résistance à la tétracycline (qui sert à repérer les plasmides recombinés) par un
gène bactérien lacZ qui code la β-galactosidase (revoir l'opéron lactose). Cette enzyme a pour
propriété d'hydrolyser le lactose en glucose et galactose. Un produit non toxique pour la cellule
bactérienne est également un substrat de la β-galactosidase : le Xgal.

Les plasmides pUC ont également un site de clonage situé dans le début du gène lacZ (en réalité
toute une série de tels sites dans la zone MCS pour multiple cloning sites).

Donc un plasmide pUC natif apportera le gène lacZ fonctionnel et une bactérie qui le portera,
cultivée sur milieu additionné de Xgal deviendra bleue alors qu'un pUC recombiné aura perdu
l'intégralité de son gène lacZ et la bactérie qui le portera donnera un clone qui restera blanc (tableau
5, figure 11). Il faut évidemment que la souche bactérienne utilisée ait perdu l'activité de sa β-
galactosidase.

Tableau 5. Les différents types de bactéries et la façon de les distinguer.

croissance couleur du
bactérie plasmide résistance état du gène sur clone sur
lacZ Ampicilline Xgal
bact. [AmpS] aucun Aucune délété - pas de clone
bact. [AmpS] pUC natif à l'ampicilline fonctionnel + bleu
bact. [AmpS] pUC à l'ampicilline interrompu + blanc
recombiné

Figure 11. Sélection des bactéries transformées portant un plasmide pUC recombiné.
La capacité maximum de ces plasmides est de 10kbp d'ADN étranger.

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1.2. Le Bactériophage

Le bactériophage (est un virus bactérien dont l'infection peut avoir deux effets mutuellement
exclusifs : la lyse de la bactérie ou la lysogénie c'est à dire le maintien sous forme passive de l'ADN
(intégré au génome bactérien) et la survie de la bactérie. La voie suivie dépend du dosage de
plusieurs facteurs de régulation codés par le génome phagique dans les stades précoces de
l'infection.

1.2.1. Cycle de vie

Figure 12. Cycles du bactériophage

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1.2.2. Carte génétique

L'ADN double brin du bactériophage contient 48 502 paires de nucléotides qui codent 50 à 60
protéines différentes. Le passage de la forme linéaire (dans la particule phagique libre) à la forme
circulaire (dans l'ADN après injection dans la cellule hôte) est due à la présence aux extrémités de
la molécule linéaire de bouts collants de 12 nucléotides (les extrémités cos) (figure 13). Dans ce
génome se trouve une région où l'on n'a jamais identifié ni mutants ni gènes, c'est la région non
essentielle b2. Elle est immédiatement suivie par les gènes nécessaires pour la lysogénie mais pas
pour le cycle lytique. L'ensemble fait à peu près 10 kbp.

Figure 13. Carte génétique du bactériophage

Figure 14. Assemblage automatique des éléments de purifiés.

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A la fin du cycle lytique, on peut lyser artificiellement la bactérie et récupérer les pièces détachées
du phage (têtes et queue) et ADN (constitué de séquences cos séparées par 40 à 50 kbp). Ces trois
éléments purifiés mis dans in tube, sans extrait acellulaire sont capables de donner des
bactériophages parfaitement fonctionnels en s'assemblant automatiquement.

1.3. Le bactériophage comme vecteur

Ces propriétés du bactériophage ont permis de concevoir un nouveau vecteur à partir de capable de
transporter plus d'ADN étranger que les plasmides pBR et pUC.

La région b1 puisqu'elle n'est pas essentielle peut être remplacée par un fragment d'ADN d'une taille
équivalente. On a alors un vecteur de remplacement de taille voisine de celle du génome naturel du
bactériophage.

On peut également construire un prophage avec les bras gauche (22kbp) et droit (9kbp), sans la
région non essentielle. Un tel prophage possède une origine de réplication autonome et est capable
de se multiplier dans une cellule mais l'emballage ne peut se faire car l'ADN ne mesure que 31kbp,
ce qui est insuffisant (minimum requis 38kbp, maximum 54kbp). Pour que l'emballage se fasse il
faut religuer les deux bras avec un fragment d'ADN étranger qui mesure de 9 à23kbp. On a alors un
vecteur à insertion (figure 15).

Figure 15. Le bactériophage l utilisé comme vecteur de remplacement.

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Figure 16. Bactériophage utilisé comme vecteur d'insertion

1.4. Les cosmides

Dans la recherche de vecteurs ayant une capacité plus grande on a ensuite construit des hybrides
entre les plasmides et le bactériophage (figure 17).
Ils possèdent venant de plasmides
 leur origine de réplication
 un gène conférant un résistance à un antibiotique
et venant de les extrémités cos et donc l'aptitude à être emballés automatiquement dans un
mélange de têtes et queues de .

Figure 17.Schéma d'un cosmide (les éléments viennent des vecteurs précédents)

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Dans le cosmide de la figure 17, dans le site multiple de clonage on a placé de part et d'autre du site
de clonage BamHI, des promoteurs phagiques afin de pouvoir transcrire et traduire un gène de
l'ADN étranger, qu'il soit inséré dans un sens ou l'autre. Un cosmide ayant une taille de 4 à 6kbp en
moyenne et devant attendre de 38 à 54 kbp pour son assemblage automatique a donc une capacité
de l'ordre de 45 kbp (figure 19).

Figure 19. Mode d'emploi d'un cosmide pour la constitution d'une banque.

1.5. Chromosomes artificiels

1.5.1. Le vecteur pYAC

Les chromosomes artificiels (ou minichromosomes) sont des structures qui copient les
chromosomes de la cellule hôte eucaryote et se répartissent régulièrement lors des divisions, comme
les chromosomes naturels. On y retrouve donc les éléments essentiels des chromosomes :

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1. une origine de réplication qui est en phase avec les origines chromosomiques naturelles.
2. une région centromérique qui assure la migration correcte du minichromosome
3. un site unique de clonage
4. un ou plusieurs marqueurs de sélection (un par élément constitutif).

Ces chromosomes artificiels ont une capacité très augmentée d'accepter de l'ADN étranger (voir le
tableau 03). On en a construit pour les bactéries : Bacterial Artificial Chromosome (BAC), pour la
levure, YAC et on est en train d'en mettre au point pour les mammifères, MAC.

Le smide YAC "plasmide YAC" (figure 20), est un vecteur navette puisqu'il peut se répliquer aussi
bien dans une cellule de levure que dans une cellule bactérienne. A l'état natif c'est un plasmide
circulaire qui comporte de l'ADN de deux origines

 de pBR 322 il a reçu l'origine bactérienne de réplication (colE1) et le gène de résistance à


l'ampicilline.
 des chromosomes de levure il a reçu une origine de réplication chromosomique :
Autonomous Replication Site (ARS), qui assure la reproduction de l'ADN dans une cellule
de levure ; une région centromérique chromosomique (CEN).
 Il a aussi deux régions télomériques d'origine chromosomique qui protégeront les extrémités
du minichromosome après recombinaison. Chaque partie du pYAC porte un marqueur de
sélection utilisable dans la levure : ce sont les formes fonctionnelles de gènes qui codent des
enzymes nécessaires dans la synthèse d'acides aminés ou de bases azotées.

allèle u+ du gène U qui confère le phénotype [ura+] à un mutant (u-)


allèle a+ du gène A qui confère le phénotype [ade+] à un mutant (a-)
allèle h+ du gène H qui confère le phénotype [his+] à un mutant (h-)
allèle t+ du gène T qui confère le phénotype [trp+] à un mutant (t-)

Figure 20 : Carte d'un plasmide YAC.

Une double digestion de ce plasmide par BamHI et Sma libère trois fragments : l'un contient t+,
ARS et CEN ainsi qu'un télomère, le second contient u+ et un télomère et le troisième uniquement
h+. Ces fragments étant de taille différente on peut les séparer par électrophorèse sur gel d'agarose
et récupérer les deux premiers que l'on mélange avec des gros fragments à intégrer ayant des
extrémités cohésives compatibles. Après action de la ligase on a un minichromosome recombiné qui
a perdu h+ mais qui possède encor t+ et u+. Par contre il a perdu a+ car ce gène est maintenant
interrompu par l'ADN étranger

21 Dr MECHAI ABDELBASSET
1ere année Master : Biochimie et Biologie Moléculaire Bio-Ingénierie des Biomolécules

Figure 21. Le mini chromosome après ligation.

Il faut choisir une souche de levure portant des mutations qui inactivent les gènes a, h, t et u. Elle
présentera 4 auxotrophies [ade-, ura-, his-,trp-]. Après avoir reçu un pYAC natif ou un
minichromosome, les cellules transformées seront devenues [trp+, ura+, his+, ade+], et si elles ont
reçu un minichromosome recombiné elles seront [his-, ade-,trp+,ura+]. La combinaison de ces 4
marqueurs permet de distinguer ce qu'a reçu chaque clone cellulaire.

Figure 22. Construction d'une banque avec un YAC comme vecteur.

Un des problèmes que l'on rencontre souvent avec les YAC c'est que sur un même minichromosome
on trouve des gènes de l'ADN étranger qui ne sont pas voisins dans l'organisme d'origine. C'est que
2 fragments non contigus ont été intégrés dans le minichromosome. On parle alors de chimère car
l'image que l'on a de l'ADN de la banque ne reflète pas celui de l'organisme de départ.

22 Dr MECHAI ABDELBASSET
1ere année Master : Biochimie et Biologie Moléculaire Bio-Ingénierie des Biomolécules

Figure 23. Formation d'une chimère.

1.5.2. Le vecteur pBAC

Le projet de séquençage du génome humain a été commencé à l'aide de YAC mais pour éviter ce
genre de problème les BAC ont peu à peu remplacé les YAC qui ne sont actuellement presque plus
utilisés.

Les BAC sont des ADN circulaires, comme un chromosome bactérien, dont l'origine de réplication
est issue de l'épisome sexuel F de E. coli (figure 24) .

Figure 24. Exemple de chromosome artificiel bactérien, BAC.

23 Dr MECHAI ABDELBASSET
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OriS est l'origine de réplication de l'épisome F. Les gènes parB et parA également de l'épisome
servent à la répartition correcte du plasmide dans les cellules filles. Le gène repE code l'enzyme de
réplication spécifique de l'épisome. CosN vient du bactériophage lambda. Ce site est reconnu et
ouvert par la terminase in vitro. CmR d'origine plasmidique code la résistance au chloramphénicol.
Ce plasmide est à faible nombre de copies (comme le facteur sexuel F).

2.6. Les vecteurs d'eucaryotes supérieurs

Les vecteurs de transfert de l'ADN dans les cellules d'eucaryotes supérieurs sont les virus. Les
principaux sont les virus de la vaccine, le virus SV40, les adénovirus, les baculovirus et les
rétrovirus.
Ces derniers sont des virus à ARN qui pénètrent à l'intérieur de la cellule eucaryote,
convertissent leurs génomes en ADN par la transcriptase inverse. L'ADN est ensuite intégré
dans le génome hôte grâce à l'intégrase virale. Les gènes viraux gag, pol et env peuvent être
enlevés et remplacés par l'ADN à cloner qui sera dont définitivement intégré dans la cellule (fig.
25).

Figure 25 : Structure typique du génome d'un rétrovirus.

L'ARN du rétrovirus comporte à chaque extrémité de longues séquences répétées terminales LTR
(Long Terminal Repeat). La partie centrale contient une séquence gag qui code une glycoprotéine
de structure, une séquence pol codant la transcriptase inverse, une séquence int responsable de la
biosynthèse d'une intégrase qui intervient dans l'insertion de l'ADN viral dans ADN cellulaire, et
une séquence env qui code une protéine de l’enveloppe virale.

2. Les cellules réceptrices

2.1. Récepteurs bactériens

Les souches qui vont être transformées, doivent posséder un certain nombre de qualités : elles
doivent être de bons récepteurs pour l'ADN donneur et cette transformation doit être stable, elles
doivent si possible être bien connues au point de vue génétique, elles doivent se cultiver facilement,
être robustes et peu exigeantes, avoir de bons paramètres de développement. Il est préférable
qu'elles ne soient pas pathogènes et ne fassent pas apparaître de substances toxiques dans le milieu.
Certaines de ces conditions sont importantes lorsque l'on désire l'expression des gènes clones pour
une production industrielle de protéines recombinées).
Pour les récepteurs procaryotes 2 bactéries sont surtout utilisées :

2.1.1. Escherichia coli

Cette espèce, parfaitement connue au point de vue génétique, permet l'utilisation d'un très grand
nombre de vecteurs, tant bactériophages que plasmides. Elle convient parfaitement pour les travaux
fondamentaux (librairies de gènes). Pour des applications industrielles, on peut reprocher à
Escherichia coli le caractère entéropathogène de certaines souches, le fait qu'elle libère dans le
milieu des substances toxiques (aminés, indole) et qu'elle soit incapable de réaliser les maturations
post-traductionnelles (glycosylation, carboxylation, phosphorylation) qui sont nécessaires pour
l'activité biologique ou la stabilité de nombreuses protéines eucaryotes. Enfin, il y a fréquemment

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blocage des protéines formées dans l'espace périplasmique, ce qui se traduit par des difficultés
d'excrétion et donc de récupération (figure 27).

Figure 27. Schéma du clonage chez E. coli et chez la levure avec un cosmide (pBTI 1 -DNA)
La fraction encapsulée est au maximum de 52 kb.

2.1.2. Bocillus subtilis

Cette espèce est un peu moins bien connue qu'Escherichia coli au niveau génétique et les vecteurs
utilisables sont moins nombreux. Par contre, elle ne possède aucun des inconvénients cités plus haut
: elle est Gram+, ne possède pas d'endo-toxines et est bonne excrétrice. De plus, les protéines
synthétisées ne contiennent pas de résidu méthionine N-terminal, On peut toutefois reprocher un
manque de stabilité aux souches transformées de Bacillus subtilis ainsi que la présence d'une
activité proléolytique qui peut être gênante pour les produits formés.

2.1.3.Autres espèces

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D'autres souches bactériennes sont utilisables : elles appartiennent aux genre Clostridium,
Corynebacterium, Pseudomonas, Streptomyces...

3. Récepteurs eucaryotes

3.1. Saccharomyces cerevisiae

II s'agit de la levure la mieux connue au niveau génétique et elle possède de nombreux vecteurs.
Elle ne présente aucun des inconvénients mentionnés pour Escherichia coli ou Bacillus subtitis. Elle
est apte à assembler les polypeptides et à réaliser des modifications post-traductionnelles, en
particulier la glycosylation. Son caractère eucaryote la rend en principe parfaitement apte à une
transformation par de l'ADN eucaryote, mais la complexité du génome eucaryote (régulation de
l'expression) peut entraîner des difficultés.

3.2. Autres levures ou moisissures

Parmi les levures, il est possible d'utiliser Schizosaccharomyces pombe, Yarrowia lipolytica,
diverses espèces de Candida, Pichia (P. postons), Kluyveromyces, Hansenula... Des moisissures
comme Aspergillus nidulans ou Tolypocladium géodes présentent un intérêt potentiel car elles sont
aptes à réaliser des glycosylations de type eucaryote supérieur.

4. Cellules animales ou végétales

Leur utilisation se heurte à des problèmes multiples. La plupart des difficultés sont liées à la culture
de ces cellules, mais également à la complexité du génome et des régulations.

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LES TECHNIQUES DE BIOLOGIE MOLECULAIRE

1. Séquençage des acides nucléiques

La connaissance de l'organisation de l'ADN a nécessité le développement de méthodes permettant le


séquençage des acides nucléiques. Les études ont d'abord concerné des fragments d'ADN puis des
gènes entiers et enfin l'intégralité d'un chromosome.

Le premier acide nucléique qui fut séquencé est l'ARNtAIa de levure en 1964. L'obtention des
fragments d'ADN s'est effectuée par l'emploi d'enzymes qui coupent l'ADN en des sites spécifiques,
les endonucléases de restriction. L'une des méthodes de séquençage de fragments d'ADN, la
méthode de Sanger, met en œuvre une étape de dénaturation des deux brins, une hybridation avec
une amorce marquée radioactivement et une élongation par une ADN polymérase en présence de
didésoxyribonucléosides triphosphate (ddNTP). Ces molécules peuvent être normalement
incorporées dans un brin d'ADN en élongation grâce à leur extrémité 5' triphosphate mais ne
peuvent former de liaison phosphodiester avec le nucléoside triphosphate suivant. Lorsqu'une faible
quantité d'un ddNTP est présente (ddATP par exemple) en plus des quatre dNTP nécessaire pour la
polymérisation (dATP, dCTP, dGTP et dTTP), plusieurs fragments marqués sont générés. Ils
correspondent tous à fragments portant un résidu ddATP à l'extrémité 3'. En répétant l'expérience
pour les autres ddNTP et en séparant les différents fragments d'ADN de chaque réaction de
polymérisation par électrophorèse sur gel de polyacrylamide (séparation selon la taille des
séquences), il est possible de déduire la séquence du fragment d'ADN de départ (fig. 28).

Figure 28 : principe du séquençage de l'ADN selon la méthode de Sanger en présence des 4


ddNTP. Noter que la séquence établie expérimentalement est la séquence complémentaire de la
séquence initiale à déterminer.

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2. Réaction de polymérisation en chaîne (PCR)

Mise au point dans les années 80, la technique de réaction polymérisation en chaîne ou PCR
(pour Polymérisation Chain Reaction) a ouvert de nouvelles voies dans l'étude et l'analyse acides
nucléiques et des gènes. Cette technique permet d'amplifier en nombre très élevé de copies une
séquence particulière d'ADN (ou parfois d'ARN), ce qui facilite grandement son étude et son
exploitation.
La PCR est basée sur le même principe de réplication que celui qui est naturellement utilisé par les
cellules pour dupliquer l'ADN. Les brins d'ADN matrice sont obtenus par chauffage (dénaturation)
(fig 29).

La PCR nécessite :

1. de faibles quantités d'ADN (moins de 1 µg) possédant la séquence cible à amplifier ;


2. les deux amorces nucléotidiques complémentaires des séquences qui encadrent la cible
à amplifier ;
3. l'ADN polymérase ;
4. un mélange des quatre dNTP {dATP, dTTP, dCTP et dGTP)

2.1. Réalisation pratique de la PCR

Après dénaturation thermique (94 °C, 5 min) du fragment d'ADN (matrice), l'hybridation des
amorces sur les brins matrice est effectuée a une température bien précise. Cette étape est très
importante car, selon la température choisie, la spécificité d'hybridation basée sur l'appartement

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A/T, G/C sera plus ou moins bonne. L'ensemble est amené à la température de 72 °C, température
optimale de fonctionnement de l'ADN polymérase Taq. Cette polymérase est extraite de la souche
Thermus aquaticus, une bactérie qui vit dans des sources chaudes. Elle reste stable à 94 °C,
température de dénaturation de l'ADN, ce qui autorise plusieurs cycles PCR sur le même
échantillon (fig. 30).

Figure 30 : technique de PCR

3. Techniques d'hybridation des acides nucléiques

L'une des techniques majeures dans l'analyse d'un gène est la technique de transfert selon
Southern du nom de son inventeur, E.M. Southern.

L'ADN séparé est transféré du gel d'électrophorése sur un filtre de nitrocellulose ou une membrane
de nylon. Une sonde d'ADN connu (ADN marqué radioactivement par exemple) est mise au contact
de la réplique et hybridée par complémentarité aux fragments d'ADN étudiés (fig. 31).

L'autoradiographie de la membrane révèle des bandes correspondant aux fragments d'ADN qui se
sont hybrides avec la sonde. Par cette technique de transfert et d'hybridation, il est possible de
réaliser une carte de restriction d'un fragment d'ADN, c'est-à-dire de déterminer la position des
sites de restriction au sein de cet ADN. Cette technique est intéressante pour mettre en évidence les
remaniements génétiques (délétions par exemple}, l'organisation des gènes les uns par rapport aux
autres sur un chromosome et donc la disposition des groupes de gènes fonctionnellement
apparentés. La technique de transfert-hybridation de Southern est également intéressante pour la
recherche de séquences apparentées.

La même technique de transfert peut être appliquée aux ARN. On parle dans ce cas de transfert de
type Northern.

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2. Expression des facteurs transférés


Lors d’un clonage, il n'est pas toujours nécessaire que le gène cloné puisse s'exprimer, par
exemple s'il s'agit simplement de constituer une librairie de gènes. Par contre, si le but recherché
est la production industrielle d'une protéine, il faut obligatoirement qu'il y ait expression du gène
et que cette expression soit la plus efficace possible.

Par contre il n'est pas toujours nécessaire que la fonction s'exprime : on peut (et c'est un cas
fréquent) rechercher l'accumulation ou l'excrétion d'une protéine (indépendamment de
l'expression de son activité) ; on peut au contraire souhaiter l'expression dans le nouveau cadre
cellulaire, ce qui suppose un environnement favorable (dans ce cas, c'est la souche avec sa
nouvelle propriété qui est intéressante, pas la protéine proprement dite). Il faut rappeler qu'il
existe des différences fondamentales dans la structure du matériel génétique des cellules

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procaryotes et eucaryotes et certains mécanismes de fonctionnement. Les étapes de la synthèse


protéique sous le contrôle du gène ont été mises en évidence vers les années 60 ; le gène est
dans un premier temps transcrit en ARNm qui est traduit au contact des ribosomes en une
molécule protéique. Chez les procaryotes il y a continuité parfaite entre le gène et la protéine
qui en résulte. Par contre, chez les eucaryotes, il existe très souvent une structure discontinue du
gène et une étape supplémentaire apparaît dans la biosynthèse de la protéine : l'excision
épissage (figure 24).

L'expression d'un gène cloné a été mise pour la première fois en évidence en 1974 par Chang
et Cohen qui ont montré qu'un gène provenant de Staphylococcus aureus (résistance à
l'ampicilline) s'exprime chez Escherichia coli. Par ailleurs, Struhl et al en 1976 et Vapnek et al
en 1977 ont montré que des gènes originaires de Saccharomyces cerevisiae et de Neurospora
crasa s'exprimaient chez E. coli.

Figure 24 : Etapes de la synthèse protéique chez les eucaryotes

7.1. Facteurs influant sur l'expression

L'expression d'un gène est sous le contrôle de nombreux facteurs dont les plus importants sont des
facteurs de régulation au niveau génétique. Il faut donc que le gène transféré se trouve dans un
environnement favorable : ceci peut être résolu au niveau de la cellule réceptrice mais également au
niveau de la conception du vecteur. Une bonne expression dépend d'un grand nombre de critères.
Dans la mesure du possible, la totalité des facteurs favorables devront être cumulés.

- Incorporation

Le vecteur doit être incorporé facilement et à haut niveau dans la cellule hôte et sa sélection doit
être aisée : ceci dépend du choix du couple de base vecteur/ récepteur et de la présence dans le
vecteur de marqueurs de sélection. L'incorporation d'un plasmide est parfois gênée par la

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préexistence dans la cellule de plasmides d'une autre nature : pour y pallier, il faut utiliser une
souche réceptrice adéquate.

- Stabilité

Le vecteur doit être stable, c'est-à-dire qu'il doit bien se perpétuer dans la descendance de la cellule
hôte. Certains plasmides montrent une instabilité ségrègationnelle : ils ne se répartissent pas
correctement dans les cellules filles. Cette situation se rencontre avec des plasmides présents en
petit nombre de copies. On peut y remédier en remplaçant la séquence concernée (par) du plasmide
par la séquence correspondante d'un plasmide plus efficace. On peut aussi utiliser une pression de
sélection en introduisant dans le plasmide un gène pour lequel la souche hôte sera déficiente (par
exemple le gène valS de la valyl-ARNt synthétase).

- Réplication

Le vecteur doit avoir une bonne réplication ; il n'est pas suffisant qu'un site de réplication (réplicon)
soit présent, encore faut-il qu'il soit efficace. Il faut privilégier les vecteurs qui permettent
l’obtention d’un grand nombre de copies du gène transféré : plasmides (ou cosmides) à forte
amplification, bactériophage lytique... Dans la mesure du possible, l'intégration du vecteur au
chromosome doit, sauf circonstances particulières, être évitée. Ceci se produit dans le cas de
bactériophages tempérés : pour cette raison, les zones de λ codant pour le cycle lysogénique ne sont
pas intéressantes (sauf souches à répresseur du cycle lytique inactivable). Pour une bonne
expression, il faut avoir un bactériophage en phase lytique, mais il faut prévenir la lyse des cellules
en supprimant (ou inactivant) les gènes concernés. Lorsque l'on est obligé d'utiliser un vecteur peu
stable, l'intégration peut constituer la seule solution. Pour compenser la perte d'efficacité qui en
résulte, on peut procéder à l'intégration de plusieurs copies par la technique d’intégration dirigée.

- Transcription

Une bonne expression nécessite une transcription efficace : ceci dépend de la présence d'un
promoteur puissant mais également de l'absence de phénomènes de répression mal contrôlables,
comme la répression catabolique. Il est pratique d’introduire dans le vecteur un promoteur efficace
qui sera transmis en même temps que le gène et sera utilisé pour sa transcription. On utilise surtout
des promoteurs d'Escherichia coli, comme lac uv5, trp, λ, P2, ompF... Ceux de Bacillus subtilis sont
beaucoup moins puissants. Saccharomyces cerevisiae possède des promoteurs très efficaces (gènes
de la phosphoglycérate kinase, de la galactokinase, de la glycéraldéhyde-P déshydrogénase...). Des
promoteurs d'autres levures sont aussi utilisables (promoteur AOX de l'éthanol oxydase de Pichia
pastori). Les problèmes de répression catabolique peuvent être résolus par l'utilisation de mutants
bien choisis de la souche réceptrice ou de promoteurs insensibles.

- Traduction

La traduction doit également être très efficace, ce qui dépend de la fixation au ribosome et d'une
bonne séquence de lecture. Le site de fixation au ribosome est différent chez les organismes
procaryotes et eucaryotes. Le site compatible avec le gène transféré doit être introduit dans le
vecteur. De plus, il doit être présent à un bon emplacement et à une bonne distance du gène. Une
bonne lecture dépend de l'interprétation de la bonne séquence de triplets (il existe 3 séquences,
décalées chacune d'un nucléotide). Comme il est parfois difficile de connaître a priori la bonne
solution, il est parfois nécessaire de construire trois vecteurs correspondant aux trois cadres de
lecture et de tester chacun d'entre eux. Si l'ADN cloné est d'origine synthétique, la nature des

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codons choisis, pour représenter un acide aminé, joue un grand rôle pour une lecture efficace (il faut
les choisir en fonction de la souche).

- Facteurs post-traductionnels

La protéine synthétisée doit être opérationnelle et facilement récupérable : ceci dépend du choix de
l'hôte mais aussi d'une technologie appropriée. Il est absolument indispensable que la protéine
formée ne soit pas transformée dans un mauvais sens ou dégradée. Les activités protéasiques de
l'hôte doivent être absentes ou bien connues et contrôlées : à ce sujet l'obtention de mutants sans
activité protéasique est parfois souhaitable. L'activité d'une protéine dépend de modifications post-
traductionnelles qui ne peuvent être réalisées dans tous les hôtes. Par ailleurs, les conditions
physicochimiques du cytoplasme sont importantes. L'utilisation de promoteurs et de séquences
additionnelles procaryotes pour le clonage de gènes eucaryotes chez une bactérie peut entraîner
divers problèmes : la présence et la nature du codon d'initiation va entraîner l'adjonction d'un résidu
méthionine en position C- terminale sur les protéines produites, ce qui peut nuire à leur activité. Il
peut arriver que la protéine fabriquée se révèle toxique pour l'hôte : il faut alors trouver un biotype
résistant (par mutagénèse) ou, en cas de résultat négatif, changer de souche réceptrice.

- Excrétion

La récupération de la protéine dépend essentiellement d'une bonne excrétion, propriété variable


selon les hôtes. L'excrétion peut être obtenue spontanément par utilisation de récepteurs microbiens
à fortes activités exocellulaires : c'est le cas chez les bactéries pour diverses espèces de
Streptomyces et Bacillus. Les performances intrinsèques de la souche réceptrice sont très
importantes. On voit que le choix de l'hôte est décisif. Chez les bactéries Gram -, il est fréquent que
les protéines s'accumulent en granules insolubles dans le cytoplasme ou dans l'espace
périplasmiquc. De même, la levure Kluyveromyces lactis utilisable comme récepteur forme
fréquemment des corps d'inclusion difficiles à renaturer. Ce fait n'est pas forcément défavorable car
il peut faciliter la purification. La faculté d'excrétion peut être introduite en utilisant des signaux
d'excrétion. Ces signaux existent dans les séquences codant pour les protéines exocellulaires de
certaines espèces. Il est possible d'introduire une telle séquence avec le gène à exprimer (signaux
d'excrétion puissants comme ceux de l'α-amylase de Bacillus amyloliquefaciens ou de la β-
lactamase de Bacillus licheniformis). Si la protéine excrétée ou récupérée est obtenue sous forme
d'un précurseur, une technique simple de préparation doit être disponible. De nombreuses protéines
eucaryotes sont excrétées sous forme glycosylée : cette opération pouvant être très spécifique est
obtenue à l'aide d'hôtes eucaryotes.

7.2. Vecteurs d'expression

On appelle vecteur d'expression, un vecteur spécialement construit pour permettre une


expression optimale c'est-à-dire une production importante de la protéine codée par le gène
cloné. Des vecteurs plasmidiques d'expression sont présentés sur la figure 10e, un vecteur
phagique sur la figure 18b. Un vecteur d'expression doit comporter : le gène à exprimer, un
promoteur puissant avec les séquences CAAT, TATA, les séquences d'initiation de la
transcription et de la traduction, avec éventuellement, une séquence de contrôle et des sites «
enhancer », un signal de fin de copie, si possible un signal d'excrétion, un réplicon puissant, et
enfin, un ou 2 gène(s) de résistance à des antibiotiques pour faciliter la sélection. De plus, la
présence d'une séquence « polylinker » est intéressante car elle facilite l'intégration de l'ADN à
exprimer.

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7.3. Expression par formation de protéines mixtes

L'ensemble promoteur signaux de contrôle nécessaire à l'expression peut être obtenu en utilisant
la séquence complète d'un gène puissamment exprimé dont on retire la séquence de structure
(au moins en grande partie) pour la remplacer par celle du gène étranger (figure 25). Certains
vecteurs favorisent l'expression par leur aptitude à permettre la synthèse de protéines mixtes : le
plasmide pEX2, qui porte le promoteur phagique cro associé au gène lacZ d'Escherichia coli,
permet la synthèse de protéines de fusion : β-galactosidase-protéine X (figure 26). Cette
méthode permet de satisfaire à la plupart des conditions favorables parmi celles énumérées plus
haut. Elle est utilisée pour permettre l'expression de gènes eucaryotes, et plus particulièrement
eucaryotes supérieurs (généralement animaux), transférés dans une cellule procaryote.

Figure 25 : Expression par formation de protéines mixtes

Figure 26 : vecteurs d'expression:

7.4. Méthodes de contrôle de l'expression

Le contrôle de l'expression peut être réalisé en utilisant un système régulé permettant une
conduite précise et efficace par l'expérimentateur. Les promoteurs associés à un opérateur sous
contrôle négatif sont particulièrement pratiques. Un bon exemple est celui de l'utilisation du

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promoteur-opérateur lac d’Escherichia coli, généralement dans un plasmide. Dans ce cas, la


souche transformée réagira au signal « lactose » qui est un inducteur du système. L'ajout de
lactose déclenchera l'expression et donc la production de la protéine désirée. Si l'on utilise le
promoteur-opérateur trp, où se produit une répression par le tryptophane, le contrôle peut se
faire par passage à des conditions de dérépression, obtenue en ajoutant au milieu de l'acide β-
indolacétique qui est un analogue structural du tryptophane.

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4.3. Production de protéines à intérêt médical et industriel

4.3.1. Biosynthèse de l'insuline

II s'agit d'un des premiers cas d'exploitation pratique du génie génétique. L'insuline est une hormone
pancréatique qui a une utilisation médicale très importante pour le traitement du diabète. Sa
production à partir de pancréas animaux est longue et coûteuse. L'insuline est un polypeptide
composé de deux chaînes (chaîne A composée de 21 acides aminés, donc codée par 63 bases, et
chaîne B de 30 acides aminés, donc codée par 90 bases) réunies par des ponts disulfure (figure 27a).

Le gène insuline code pour un polypeptide appelé prépro-insuline. Ce polypeptide se compose d'une
séquence signal impliquée dans l'excrétion et d'un précurseur : la pro-insuline. Dans la pro-insuline,
les chaînes A et B sont séparées par un polypeptide composé de 35 acides aminés, polypeptide qui
est éliminé au moment de la transformation en insuline. Différentes approches sont possibles pour
la production d'insuline par génie génétique. Une des plus efficaces (méthode d'Itakura) fait
intervenir les étapes suivantes (figure 27b) :
1. synthèse séparée par traduction inverse de séquences d'ADN correspondant aux peptides A
et B et contenant à chaque bout des sites de restriction ;
2. introduction séparée de ces séquences dans des plasmides pBR322, vecteur d'expression
contenant le promoteur et une partie de la région codante lacZ, ainsi que le site de fixation
au ribosome (on peut aussi utiliser le promoteur trp) ;
3. introduction des vecteurs dans Escherichia coli ;
4. culture des deux souches obtenues avec production des 2 protéines mixtes β-gal-A et β-gal-
B (ou selon le cas. trp-A et trp-B) ;
5. isolement des peptides A et B par voie chimique (bromure de cyanogène) et synthèse de
l'insuline.
Cette insuline est commercialisée depuis 1982. Il faut signaler qu'il existe de nombreuses autres
méthodes de fabrication.

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Figure 27 : Production d'insuline


a) Structure de l'insuline et de ses précurseurs.
b) Technique d'Itakura.

4.3.2. Biosynthèse de la somatostatine (SRIF)

La somatostatine, peptide composé de 14 acides aminés, est une hormone de l'hypotalamus


utilisée dans le traitement du nanisme. Itakura a réussi à synthétiser une chaîne d'ADN artificiel
comportant les codons correspondant à cette séquence d'acides aminés, précédée par la séquence
reconnue par l'enzyme de restriction Eco RI et le codon méthionine et suivie par des codons
d'arrêt et la séquence reconnue par l'enzyme de restriction Bam HI. Cet ADN synthétique est
fixé dans le plasmide pBR 322 accroché à une partie du gène de structure de la β-galactosidase.
Ce plasmide peut être introduit dans un clone d'Escherichia coli et s'y maintenir (20 à 30
plasmides par cellule). La cellule produit alors une protéine hybride : fragment de β-
galactosidase, méthionine, somatostatine. Le bromure de cyanogène possède la propriété de
détruire la méthionine et de libérer la somatostatine. Il est possible de produire ainsi jusqu'à 1
mg de somatostatine par litre de culture bactérienne : c'est la quantité de cette hormone qui peut
être extraite d'environ 5 millions de cervelles de mouton. Cette hormone, commercialisée depuis
1985 peut être également produite par d'autres procédés.

4.3.3. Biosynthèse de la somatotrophine (STH)

Cette hormone de croissance humaine provient de l'hypophyse. Il s'agit d'un polypeptide de masse
moléculaire 22 kDa constitué de 191 acides aminés et contenant deux ponts disulfure. Il est produit
naturellement à partir d'un précurseur, polypeptide de 217 acides aminés incluant une séquence
signal d'excrétion (figure 28). La séquence correspondant au peptide de 191 acides aminés a été
clonée chez Escherichia coli en utilisant de l'ADNc couplé à une séquence d'initiation et au

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promoteur lac. Dans ces conditions, on obtient de la méthiosomatotrophine (le codon


supplémentaire d'initiation est traduit en méthionine). Ce produit pose un problème car si on l'utilise
tel quel, il a une activité normale mais déclenche chez le sujet traité l'apparition d'anticorps. La
présence de la méthionine ne semble pas être directement responsable de ce fait ; son action pourrait
être indirecte par l'intermédiaire d'un repliement particulier du peptide. Une solution consiste à
réaliser une modification enzymatique de la méth-STH en STH.

Le clonage du gène complet a été aussi réalisé chez Escherichia coli en utilisant un oligonucléotide
synthétique correspondant aux acides aminés 1 à 24. Le précurseur complet contenant la séquence
signal est produit, modifié en peptide actif mais non excrété : il s'accumule dans le périplasme.
L'excrétion peut cependant être obtenue par un choc osmotique.

Figure 28 : Production de somatotrophine


a) Structure de la STH.
b) Méthode de production.
ADNc modifié : ADNc correspondant aux 191 acides aminés de la protéine active.

4.3.4. Biosynthèse de l’interféron

Weissman a réussi à isoler, à partir de leucocytes infectés par des virus, de l'ARNm comportant,
entre autres, celui de l'interféron. En fait il en existe trois types : α (leucocytes), β (fibroblastes) et γ.

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Ces substances interviennent dans les mécanismes de défense de l'organisme et sont actives contre
les infections virales. Il s'agit de glycoprotéines de 20 kDa dont la concentration dans le sang
humain est très faible (0,5 mg/l), ce qui rend leur préparation impossible en quantité importante. Le
clonage du gène de l'interféron α (1000 paires de bases) a été réalisé chez Escherichia coli par
l'intermédiaire d'un plasmide (pNVC, dérivé de pBR322 contenant le promoteur trp d’Escherichia
coli, le site ribosomique et le codon d'initiation AUG). De l'ADNc a été obtenu à partir d'ARNm de
cellules leucocytaires infectées par des virus. Ce clonage a nécessité un travail considérable : un très
grand nombre de clones bactériens transformés (104) ont dû être sélectionnés par hybridation (cette
opération a toutefois été simplifiée par une technique de groupage). L'expression du gène de
l'interféron α est encore améliorable : toutefois, il a permis d'obtenir des concentrations très
largement supérieures à celles obtenues à partir de leucocytes !

La production d'interféron peut aussi être obtenue chez Aspergilus nidulans et A. niger en utilisant
le promoteur de la glucoamylase ou celui de l’ethanol déshydrogénase. De même, le clonage chez la
levure (avec le promoteur PGK. dans le plasmide pMA 301-1) permet la production d'interféron α.

4.3.5. Production de protéines virales

Ces protéines antigéniques sont utilisées comme vaccins : il s'agit généralement de la protéine
dénaturée de la capside virale.

- Hépatite B

Le clonage du gène de l'antigène de surface de l'hépatite B (HBs Ag) a été réalisé chez la levure en
utilisant un plasmide hybride et le promoteur de la glyceraldéhyde-P déshydrogénase. L'ADN viral
a d'abord été cloné grâce au plasmide hybride chez Escherichia coli où il est incapable de
s'exprimer mais où il a été amplifié. Il a été ensuite transmis à la levure (Saccharomyces cerevisiae
ou Pichia pastoris) où il peut s'exprimer, ce qui permet la synthèse de particules de Dane qui
contiennent la protéine de surface. Ces particules permettent d'obtenir un vaccin par injection à un
singe (figure 29).

Figure 29 : Production du vaccin de l'hépatite B

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a) Structure de la STH
b) Méthode de production.
ADNc modifié : ADNc correspondant aux 191 acides aminés de la protéine active.

- FMDV

Le gène de la protéine du virus FMDV du bétail (Pool and Mouth Disease Virus) a été cloné chez,
Escherichia coli grâce à de l'ADNc. Cette opération a permis de connaître la séquence de la
protéine et de fabriquer un vaccin synthétique sur la base de ces données.

- Autres antigènes viraux

Divers antigènes viraux ont été clonés avec succès chez la levure : hémagglutinine du virus de
l'influenza (dans le plasmide avec promoteur ADH1 ), glycoprotéine d'enveloppe du virus
d'Epstein-Barr (sous forme de protéine fusionnée avec le promoteur MFa l ou avec le promoteur
GAL 10), protéines du virus du sarcome de Roux, du rétrovirus HTLV III... La production de la
neuraminidase peut être obtenue par clonage chez Streptomyces.

4.3.6 Enzymes

De nombreuses enzymes, et particulièrement d'exoenzymes, qui sont obtenues traditionnellement


grâce à des mutants hyperproducteurs et hyperexcréteurs peuvent actuellement être produites à
partir d'OGM.

Des pectinases et cellulases peuvent être produites par Escherichia coli après clonage de gènes issus
d'Erwinia chrysanthemi. De même, des cellulases et pectinases fongiques peuvent être produites
après clonage chez la levure. L'expression de diverses enzymes fongiques (amylases, protéases,
lipases d'autres espèces ou genres fongiques) a été également obtenue chez A, oryzae (sous
promoteur fort).

Chez Bacillus la transformation homologue ou hétérologue peut être largement utilisée pour la
production de protéines, en particulier d'enzymes. La β-amylase de Bacillus stearothermophilus,
très efficace et dotée de propriétés particulières, a été clonée chez Bacillus subtilis où son
expression est meilleure et avec lequel elle est plus facile à produire. De même, l'amylase de
Bacillus coagulons a été clonée avec succès chez Escherichia coli. L'α-amylase de Bacillus
megaterium ou de Bacillus stearothermophilus peut aussi être produite chez Bacillus subtilis. Le
gène de la glucoamylase d'Aspergillus awamori code pour deux enzymes (dont l'une dérive de
l'autre par modification post-traductionnelle). Le clonage a été réalisé à partir d'un ARNm par
l'intermédiaire d'ADNc chez Escherichia coli. Ce clonage a été réalisé également chez la levure.

La chymosine, appelée présure, est très employée dans l'industrie laitière : il s'agit d'une protéase
sécrétée par la caillette du veau. Un précurseur est synthétisé : il s'active dans le milieu gastrique
acide par perte d'un peptide de 42 acides aminés. Il existe des alternatives microbiennes à
l'utilisation de la présure : protéases de Endothia parasitica. Mucor miehei ou Mucor pusillus. Une
autre solution consiste à faire synthétiser la présure par un micro-organisme. Le gène de la
chymosine a été clone avec succès chez Escherichia coli, chez la levure (Kluyveromyces lactis)
ainsi que chez des moisissures. La production de chymosine a été obtenue chez Aspergilius
nidulans, A. awamori et A. niger en utilisant le promoteur de la glucoamylase ou celui de l'éthanol
déshydrogénase.

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La subtilisine (protéase de Bacillus alcalophilus utilisée dans les détergents) ainsi que d'autres
hydrolases peuvent être clonées et produites par Bacillus subtilis. Le gène de rendo-l,4-β-D-
glucanase de Bacillus subtilis a été clone chez Escherichia coli, Saccharomyces cerevisiae et
Schwanniomy-ces alluvius, avec une bonne expression dans ce dernier cas. L'amélioration de
souches bactériennes productrices de chitinases peut se faire par insertion de gènes dans un
plasmide multicopies (chez Serratia marcescens) ou par mutagénèse par transposon (chez Serratia
liquefaciens). Le clonage chez Escherichia coli permet la production de la glucose-6P
déshydrogénase, de l'acide lactique oxydase, de la sarcoïne oxydase. Le clonage chez la levure a
permis la production de phospholipase A2. L'invertase de Pichia pastoris a été clonée chez S.
cerevisiae.

4.4. Autres exemples de production de peptides ou protéines

Les substances suivantes qui sont commercialisées ou en cours de qualification peuvent être citées :

- vaccin de l'hépatite B (vaccination) ( 1986) ;


- érythropoïétine (traitement de l'anémie) (1988) ;
- interleukine 2 (maladie du système immunitaire) (1989) ;
- vaccin anti-coqueluche (1989) ;
- facteur VIII (traitement de l'anémie) (1993) ;
- activateur de plasminogène (défense contre la thrombose).

Il faut aussi signaler que de nombreux produits pour le diagnostic et la thérapie génique sont en
cours d'élaboration.

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