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La fonction du jeu symbolique

01/07/2006 - Lu 28430 fois

La fonction du jeu symbolique dans le développement du jeune enfant.


Mémoire de Licence 3, Sciences de l'Education, 2005 proposé par Violène.

 « Le jeu, c’est le travail de l’enfant, c’est son métier, c’est sa vie »


(Pauline Kergomard)
 « Le jeu devrait être considéré comme l’activité la plus sérieuse des enfants. »
(Montaigne)
 « L’homme qui ne joue pas a perdu pour toujours l’enfant qui était en lui. »
(Pablo Neruda)
 « ... cette époque où l’enfant, jouant avec tant d’ardeur et de confiance, se développe
dans le jeu, n’est-elle pas la plus belle manifestation de sa vie ? Elle est la
manifestation vraie de ses aptitudes pour la vie. On ne doit pas regarder le jeu comme
une chose frivole, mais comme une chose d’une profonde signification... Dans ces
jeux, choisis spontanément par l’enfant qui s’y livre avec tant d’ardeur, son avenir se
révèle aux yeux des éducateurs attentifs et intelligents... »
(Froebel)

Introduction :

Aujourd'hui, le jeune enfant occupe une place importante dans


notre société et le regard sur le monde de la petite enfance a fortement évolué. Le jeune enfant
est enfin reconnu comme un individu à part entière.
Cette évolution se retrouve à tous les niveaux de notre société en général comme en
particulier : au sein de la famille, des structures d’accueil, du monde médical et du domaine
psychologique, dans les formations de professionnels, etc. Même si la recherche dans ce
domaine et à tous les niveaux reste ouverte et qu’il y a encore du travail pour faire évoluer
certaines pratiques et certaines visions, du chemin a été parcouru.
L’intérêt pour l’étude du développement de l’enfant est grandissant. En tant qu’éducatrice de
jeunes enfants, je m’y intéresse fortement car il n’est pas envisageable d’accompagner
l’enfant sans avoir des connaissances sur celui-ci.

Tant d’enfants sont accueillis dans des institutions comme la crèche. Tant d’enfants de touts
âges et de toutes catégories sociales sont accompagnés quotidiennement dans leur
développement au sein de ces lieux de prise en charge quotidienne, chacun méritant d’être
traité comme un être à part, chacun ayant droit au respect, aux soins et à l’éducation. Il semble
alors essentiel de s’intéresser au développement de l’enfant sur tous les plans pour contribuer
à sa meilleure prise en charge possible et de faire circuler les connaissances dans les milieux
professionnels, dans ceux de la recherche, voir même aussi au niveau des instances
décisionnaires.

Je vais m’intéresser, ici, plus particulièrement au jeu symbolique chez le jeune enfant de 18
mois à 2 ans et demi. Avec l’acquisition de la permanence de l’objet, l’enfant a compris qu’il
existe en tant qu’individu différent des autres (individualisation/socialisation). Comment
l’enfant va-t-il assimiler à partir de là le monde qui l’entoure ? Quels apports les jeux
symboliques permettent-ils dans cette assimilation ? Quels enjeux ont-ils dans la construction
de sa personnalité ?

Afin de répondre au mieux à ces questions, je vais m’attacher à présenter la notion de petite
enfance, à définir ce qu’est un jeune enfant afin de comprendre l’intérêt des jeux symboliques
pour son développement, la construction de sa personnalité. Pour y parvenir, il me faudra
aussi définir ce qu’est le jeu et plus précisément le jeu symbolique. Je vais, pour cela,
m’appuyer entre autre sur les théories de Piaget, Wallon ainsi que sur celles de quelques
psychanalystes.

La fonction du jeu symbolique - Psychologie


cognitive
01/07/2006 - Lu 11156 fois

Chacune des étapes de la construction de l'intelligence sensorimotrice correspond à un


état de construction de la notion d'objet - Piaget.

I - La notion de petite enfance : les grandes étapes


B - Au niveau de la psychologie cognitive avec J. Piaget :

1- Fin du stade sensorimoteur et début du stade préopératoire (annoncé par le dernier


stade de la période sensorimotrice) :

Piaget accorde un intérêt certain pour les mouvements du jeune enfant. Il s’accorde à dire que
leur régularité et leur organisation sont suffisantes pour rendre compte de la nature des
schèmes 1 qui les sous-tendent.
Les schèmes sensorimoteurs associent la perception et l’action. Leur évolution s’effectue en 6
stades qui s’étendent sur les deux premières années de vie de l’enfant. « L’action
sensorimotrice se dégage ainsi graduellement des déterminations réflexes pour devenir
intentionnelle à partir de l’âge de 4 mois, puis, à partir de 12 mois, constituer des outils au
service de préhension du réel .2 » 3 Dans un dernier temps, dans le stade 6 (18 à 24 mois), on
voit naître les combinaisons mentales où l’action est évoquée en action, en particulier par
l’imitation.
A ce dernier stade, l’enfant est capable de se représenter mentalement ses actions. La
combinaison mentale des schèmes permet d’utiliser un schème donné (exemple : écarter un
obstacle) comme un moyen d’activer un autre schème (exemple : découvrir un objet caché).
De plus, l’enfant utilise des symboles, comme le langage, et il est capable d’utiliser l’imitation
différée. Celle-ci est définie comme la capacité à reproduire un comportement en l’absence de
son modèle, de manière différée dans le temps. Une telle compétence suppose que l’enfant
puisse se représenter mentalement une action ou une série d’actions.
Pour Piaget, le stade 6 est le trait d’union entre l’intelligence pratique et la pensée
symbolique. Ce stade annonce alors la période préopératoire.

La pensée de l’enfant est d’abord égocentrique, pas incapacité de se décentrer, c’est à dire de
prendre en compte le point de vue d’autrui, pour le coordonner avec le sien. L’égocentrisme
va se réduisant avec le développement.

Chacune des étapes de la construction de l’intelligence sensorimotrice correspond à un état de


construction de la notion d’objet, c'est-à-dire de la capacité de penser que l’objet conserve son
existence indépendamment de l’expérience perceptive actuelle.

2- La permanence de l’objet :

Au cours de la période sensorimotrice, les changements dans le développement cognitif se


concrétisent par la construction d’invariants.
L’invariant principal concerne l’existence d’un objet fixe, permanent. Il sert à de multiples
acquisitions et est indispensable pour l’organisation de l’espace, du temps ou des relations de
causalité entre les objets.

L’expression « permanence de l’objet » signifie que l’enfant admet qu’un objet continue
d’exister lorsqu’il quitte le champ perceptif. Concevoir cette permanence implique que
l’enfant soit capable d’en conserver une représentation mentale.

Piaget a décrit 6 stades dans la construction de cette permanence de l’objet, stades qui sont
parallèles à ceux de l’intelligence sensorimotrice.

 Stade1 : de la naissance à 2 mois : pas de réaction à la disparition de l’objet


 Stade 2 : de 2 à 3 mois : mimiques désappointées, pleurs mais pas de recherche de l’objet
 Stade 3 : de 6 à 8 mois : permanence pratique liée à l’action (anticipation), recherche dans
l’espace proche
 Stade 4 : de 6 à 12 mois : recherche de l’objet complètement caché
 Stade 5 : de 12 à 18 mois : maîtrise des déplacements visibles successifs
 Stade 6 : de 18 à 24 mois : maîtrise des déplacements invisibles

3- De nouvelles recherches sur la permanence de l’objet, parties des constatations de Piaget


mais les remettants en cause :

Il a été contesté la nécessité selon laquelle concevoir un objet permanent implique forcément
sa recherche active, car cette recherche demande à l’enfant une coordination complexe entre
la vision et la préhension, pour contrôler les mouvements des mains. Il est donc avancé qu’il
existe une intelligence perceptive antérieure à la forme d’intelligence sensorimotrice décrite
par Piaget. Après avoir effectué des expériences, il a été démontré que les enfants, à un âge
plus précoce que celui annoncé par la théorie piagétienne, réagissent perceptivement à la
disparition des objets. Les enfants très jeunes sont donc capables de concevoir l’existence
d’objets et d’évènements invisibles et ils utilisent très précocement des représentations
mentales.

4- Symbole et image mentale :

Pour Piaget, l’accès à la représentation et à la symbolisation ne se fait que dans le courant de


la seconde année de la vie de l’enfant. Ce n’est qu’à la fin de la période sensorimotrice que
l’enfant va accéder à la représentation par l’intermédiaire de l’image mentale (permanence de
l’objet). L’enfant entre alors dans la période de l’intelligence symbolique préopératoire. La
pensée sera dominée par la représentation imagée de caractère symbolique, c'est-à-dire que
l’enfant va traiter les images comme de véritables substituts de l’objet et il va penser en
effectuant des relations entre images. Il se comportera avec les images de la même manière
qu’avec les objets au stade sensorimoteur.
L’image mentale est construite en fonction de l’appréhension et de la compréhension de
l’individu, aussi elle sera fonction de ce que l’enfant aura assimilé du réel. Comme toute
construction dans le domaine de l’intelligence, celle-ci est active. Piaget dit que « les images
mentales (…) résultent d’une imitation intériorisée, leur analogie avec la perception ne
témoignant pas d’une filiation directe, mais du fait que cette imitation cherche à fournir une
copie active des tableaux perceptifs » 4

La pensée de l’enfant est d’abord égocentrique, pas incapacité de se décentrer, c’est à dire de
prendre en compte le point de vue d’autrui, pour le coordonner avec le sien. L’égocentrisme
va se réduisant avec le développement.

_______________________________________________
1
Un schème désigne ce qui, dans une action, est généralisable, transposable.
2
Coordination des moyens et des buts puis découvertes de moyens nouveaux par
expérimentation active.
3
LEHALLE H., MELLIER D., (2002). Psychologie du développement : enfance et
adolescence. Ed. Dunod
4
La Psychologie de l’enfant, PUF, Que sais-je ?

La fonction du jeu symbolique - Psychologie


affective
01/07/2006 - Lu 8291 fois

La qualité du milieu, de l'environnement va conditionner les apprentissages de l'enfant -


Wallon.
C- Au niveau de la psychologie affective avec Wallon :

1- Le chevauchement des stades : Etude des premiers stades :

L’enfant est d’abord confondu avec autrui et dépendant de l’autre. C’est cette confusion et
cette dépendance qui le rend social.

0-3 mois : symbiose physiologique ou stade d’impulsivité motrice :


Symbiose physiologique car la dépendance à l’autre est totale, les satisfactions dépendent
totalement de son entourage.
Le facteur humain joue un rôle essentiel.
Dans ce stade, il y a passage du physiologique au physique.
L’enfant ne fait pas la distinction entre les sensations internes et externes, ce qui entraîne la
confusion totale entre lui et l’autre. Cette confusion est aussi renforcée par sa dépendance
totale à l’autre.

3-9 mois : symbiose psychologique ou affective :


Prémices de l’émergence de la conscience de soi qui entraîne une différenciation progressive.
Privations, frustrations, attente : l’enfant va pouvoir associer ces manifestations et leur
conséquence (cris, pleurs, …) aux effets qui en découlent sur l’autre (réaction). Il va pouvoir
associer les deux et prendre conscience qu’il y a un autre (expérience de l’autre).
Il découvre donc qu’il va pouvoir agir sur autrui par l’émotion et le tonus postural.
Distinction de ce qui est de l’ordre de l’interne et de l’externe.
C’est donc l’ébauche du Moi, 1ère forme de conscience de soi.

9-18 mois : syncrétisme indifférencié :


Wallon parle de sociabilité incontinente
1er pas de la distinction moi/autrui
L’enfant prend conscience qu’il y a un autre mais il n’est pas encore complètement situé par
rapport à l’autre
Pôle passif / pôle actif : l’enfant n’a pas conscience qu’il ne peut pas être à la fois actif et
passif (faire et regarder faire), ce qui entraîne une confusion.

18-30 mois : syncrétisme différencié :


L’enfant commence à prendre conscience qu’il ne peut pas être à la fois (en même temps) le
pôle actif et le pôle passif (se termine au stade suivant)
L’enfant par le biais de l’émotion va participer à l’action, au plaisir de l’autre en étant passif.
Il a de la compassion pour l’autre :
Sympathie centrifuge : l’enfant a de la compassion pour l’autre, il partage l’émotion de l’autre

Sympathie centripète : il s’implique dans la situation en la vivant pour lui-même (ex : un


enfant tombe, on lui fait un pansement et l’autre tend son genou pour être soigné)

24-36 mois : stade des personnalités interchangeables :


Contrairement au stade du syncrétisme, l’enfant va participer avec l’autre à l’émotion qu’il
ressent, mais elle va s’avérer différente de ce que ressent l’autre.
C’est par le moyen de l’imitation que l’enfant va pouvoir partager l’émotion de l’autre, lui
faire comprendre qu’il partage ce qu’il vit
Wallon dit que ce stade traduit l’état de dispersion qui précède le moment où l’enfant saura
identifier solidairement sa personnalité et celle d’autrui. Il ne maîtrise donc pas encore
complètement la distinction entre moi et autrui.

2- La part de l’affectivité dans le développement et les apprentissages :

Wallon met l’accent sur le social. Dès la naissance, le bébé est capable de provoquer des
interactions.
Les apprentissages se font en relation avec l’autre.
La qualité du milieu, de l’environnement va conditionner les apprentissages de l’enfant.
L’outil des apprentissages pour l’enfant, selon Wallon, est l’imitation, qui est une réaction
sociale.

La fonction du jeu symbolique -


Psychanalyse: Freud
01/07/2006 - Lu 7323 fois

Freud définit des concepts essentiels et des stades pour la compréhension du


fonctionnement psychique de l'enfant et de l'individu d'une manière générale.

D- Au niveau psychanalytique :

1- Sigmund Freud (1856-1939) :

Il a théorisé le développement de l’enfant à partir des discours de patients adultes.

a- Concepts psychanalytiques de base :

Il a étudié le développement de l’appareil psychique. Il établit le concept de topique dans


lequel trois parties s’imbriquent :

 le « ça » : réservoir d’énergie des pulsions ;


 le « moi » apparaît progressivement : il établit un système défensif et adaptatif entre la
réalité externe et les pulsions ;
 le « surmoi » se construit progressivement et se précise vers 5-6ans : il représente
l’intériorisation des interdits.

Freud définit aussi des concepts essentiels pour la compréhension du fonctionnement


psychique de l’enfant et de l’individu d’une manière générale :

 Le principe de plaisir : En recherchant la réduction des tensions, l’enfant recherche le plaisir,


la satisfaction immédiate. C’est un processus primaire caractérisé par l’impatience et
l’impossibilité à se repérer dans le temps et l’espace. Il s’oppose au principe de réalité.
 Le principe de réalité : La prise en compte des limitations, des interdits, permet de savoir
attendre. C’est un processus secondaire. C’est la capacité à avoir un investissement des
capacités, de l’activité mentale (attendre, secondariser, c’est à plus long terme pouvoir se
concentrer). Pour résumer, on peut dire que quand le « moi » se structure et que le « ça »
contrôle, l’enfant sait différer ses attentes. Il est dont adapté à la réalité.
 Le concept de pulsion : La pulsion est porteuse de mouvement vers l’activité et la passivité.
Elle est une motion, un but, un objet et une source.

b- Les stades :

Le stade oral :
Le plaisir de succion est extrêmement intense et agréable (source : bouche, objets : biberon,
sein maternel, …)
Il existe deux sous-stades :

 de 0 à 6 mois : le stade oral primitif (absorption passive, prévalence de la succion) ;


 de 6 à 12 mois : le stade sadique oral ou stade oral tardif (croquer, mordre, détruire).

Ce stade oral est caractérisé par la relation objectale. C’est la manière avec laquelle le sujet
rentre en relation avec le monde qui l’entoure. C’est donc une relation basée sur l’oralité.

Le stade anal : (2 – 3 ans)


C’est la phase d’acquisition sphinctérienne. L’enfant s’exerce à la maîtrise et à l’emprise.
Ceci a un but pulsionnel qui est engendré par le plaisir et la satisfaction de la stimulation de la
zone anale. L’enfant considère que ses selles font parties de lui-même.
Là encore, nous pouvons dissocier deux sous-stades :

 la phase sadique anale expulsive = plaisir à expulser, à faire mal, à détruire et agresser, à
salir.
 la phase masochique anale rétentrice = plaisir à garder, retenir et s’attaquer à soi même, …

Le stade anal permet à l’enfant de s’organiser au niveau psychique à travers des couples
structurants : garder/retenir, actif/passif, soumission/opposition.

Le stade phallique : (3 – 4 ans)


Il s’agit là, de la théorie sexuelle infantile.
Tout commence à s’unifier et à se rejoindre au niveau des organes génitaux. Toutes les
pulsions s’unifient sur le même but les organes génitaux.
L’enfant prend conscience de la différence des sexes (complexe d’oedipe vers 4-7ans).

La fonction du jeu symbolique -


Psychanalyse
01/07/2006 - Lu 8713 fois

D.W Winnicott, R. Spitz, M. Klein, J. Lacan


2- Donald Woods Winnicott (1896-1971) :

Winnicott était un médecin qui s’intéressait à la psychanalyse. Il a travaillé auprès des


enfants. Il n’était pas pour la théorie même mais était pour la clinique, l’expérience, le
ressenti. Il était très attaché au fait, à l’intuition et l’expérience.
Il a développé la notion d’objet transitionnel car pour lui « un bébé tout seul ça n’existe pas ».

a- La fonction de l’environnement :

La santé mentale est liée à la notion de dépendance. Si les soins maternels sont suffisamment
bons, le bébé dépend de sa mère. Cette dépendance est nécessaire au bon développement et
les soins maternels évitent des distorsions.
Pendant les soins maternels, le « moi » de la mère remplace et soutient le « moi » du bébé qui
est inachevé. La mère éveille son enfant et aide les pulsions de vie à prendre le dessus sur les
pulsions de mort. Le chaos psychique de l’enfant ne peut s’organiser seul en bon et mauvais,
donc s’il subit de mauvais soins, cela entraîne une distorsion. Seul les bons soins permettent le
développement du psychisme.

b- La préoccupation maternelle :

La mère doit s’identifier au bébé (identification = empathie), doit arriver à sentir ce dont il a
besoin et être au plus près de lui pour le comprendre.
Cette empathie commence pendant la grossesse puis évolue vers la préoccupation maternelle
et infantile. C’est une « maladie normale de la mère » que de se donner entièrement à son
enfant. Il y a donc un changement de la mère, changement aussi dans sa relation au temps.

c- La fonction du miroir (différent de Lacan) :

Il pense que la mère a un rôle de miroir pour l’enfant, qu’elle lui apporte un support. Le bébé
se voit dans le visage de sa mère. Il y a un échange ludique entre la mère et l’enfant.
S’il y a un désintérêt et/ou une dépression de la mère, le bébé n’a pas en retour quelque chose
de plaisant et il va arrêter de donner car il ne reçoit pas. Ce qui peut entraîner des pathologies
de l’identité.

d- Le holding, le handling, l’objet presenting :

Il y a un apport indispensable de l’environnement qui doit intervenir de trois façons auprès du


”moi” de l’enfant :
- Le holding : c’est la façon dans l’enfant est porté, soutenu (maintenance physique et
psychique).
- Le handling : c’est la façon dont le bébé est traité, manipulé (soin du corps, caresse, etc.).
- L’objet presenting : c’est la capacité de la mère à mettre à la disposition de l’enfant l’objet,
ni trop tôt ni trop tard, pour lui permettre d’avoir l’impression de l’avoir créer.

3- René Spitz (1884-1974) :

Il s’est intéressé entre autre au développement de l’enfant de 0 à 2 ans. Il propose des étapes à
la genèse de la relation objectale et de la communication.
La relation objectale, c’est ce qui se passe entre l’enfant et l’autre (psychisme). Dans une
évolution dite normale, Spitz repère trois organisateurs :
 L’apparition du sourire
 La réaction d’angoisse face au visage de l’étranger
 L’apparition du non

Autour de ces trois organisateurs, Spitz découpe le développement de l’enfant de 0 à 2 ans en


quatre stades :

 jusqu’à 3 mois : stade de non différenciation (anobjectal) → Avant 3 mois, le bébé est dans
un stade de narcissisme primaire (tout est centré sur lui), où tout est chaotique et sans
durée.
 de 3 mois à 8 mois : stade préobjectal, phase de non différenciation → Durant ce stade,
apparaissent les deux premiers organisateur : le sourire et l’angoisse de l’étranger (au 8ème
mois).
 de 8 mois à 2 ans : Stade précurseur de l’objet → Le bébé pleure et se détourne des gens
qu’il ne connaît pas. Cette réaction témoigne de traces mnésiques et est caractéristique de
l’angoisse de l’étranger qui s’estompera petit à petit. Il voit le monde de deux façons : ce qu’il
connaît et ce qu’il ne connaît pas. Il distingue la mère de la « non mère ». L’enfant s’interroge
sur les personnes qu’il l’entoure et se demandent si elles vont rester, partir et réapparaître.
  A partir de 2 ans : stade de l’objet libidinal → Le « non » apparaît. L’enfant se distingue de sa
mère et s’ouvre socialement. Il commence à avoir des acquisitions conceptuelles et
symboliques. A travers le « non », le mécanisme qui se met en place est l’identification de
l’agresseur mais aussi une intériorisation des interdits qui lui permet à son tour de dire non.

4- Mélanie Klein (1882-1960) :

Elle décrit la limite émotionnelle et la vie fantasmatique. Elle va imaginer ce que pense le
bébé alors qu’il ne parle pas. Elle montre que l’activité psychique du bébé va être en
corrélation avec le corps car les fantasmes ressemblent à des sensations corporelles (=
premiers fantasmes naissent avec des pulsions corporelles).
Mélanie Klein pense qu’il existe dès la naissance un « moi » rudimentaire, immature, qui va
être d’emblé soumis à une tempête entre les pulsions de vie et les pulsions de mort. Il en
découle une angoisse. Ces angoisses sont issues du conflit des pulsions libidinales et
agressives. La manière dont le « moi » immature va gérer les angoisse doit permettre
d’atteindre un équilibre.
Le « moi » va passer de l’inorganisation à l’organisation psychique, de l’objet partiel à l’objet
total. La nature de l’angoisse change, elle est d’abord de persécution puis dépressive. Ensuite
les processus de réparation apparaissent.

5- Lacan (1901-1983) :

Il a continué l’œuvre de Freud et s’est intéressé au stade du miroir qui permet à l’enfant
d’accéder au « je » (stade du sujet). L’enfant se sent unifié, auteur et acteur de ses actes et
paroles. Il a le sentiment d’être lui-même.
Lacan découpe ce stade en trois étapes entre 6 et 18 mois et plus :

  A environ 6 mois, l’enfant reconnaît un être humain dans le miroir. Il voit une image de lui
mais comme un autre. Il confond le vrai et le réel. Puis cette image commence à être prise
pour la sienne et il essaye de l’attraper car il n’a aucune notion de l’image.
 Entre 6 et 18 mois, l’enfant comprend que son reflet n’est qu’une image et pas un être vivant
mais il ne se reconnaît pas encore. Il ne cherche plus à attraper l’image. Il a compris l’aspect
fictif et imaginaire de l’espace derrière le miroir.
 L’enfant comprend que cette image est une image et qu’en plus elle le représente. Il
comprend aussi cela des autres images. Le bébé jubile en se découvrant dans le miroir,
s’amuse, éclate de rire. Pour la première fois, il va se vivre, va se penser en tant qu’individu.
Il acquiert le « je » vers l’âge de 2 ans. Le sentiment d’existence passe par l’image, par la
médiation du corps.

Ce stade a un caractère prématuré, il vient aider et stimuler le développement de l’enfant qui


va progressivement se vivre unifié.
Lacan pense que cette image totale que l’enfant voit dans le miroir lui est structurante pour
son identité de sujet.

La fonction du jeu symbolique - La


formation du symbole
01/07/2006 - Lu 6355 fois

La formation du symbole: Le symbole vient toujours en lieu et place d'un objet manquant.

6- Formation du symbole :

D’un point de vue psychanalytique, « la formation du symbole est une activité du Moi,
cherchant à élaborer les angoisses nées de la relation du Moi avec l’objet » (Hanna Segal).
Le symbole vient toujours en lieu et place d’un objet manquant. Il ne peut jouer son rôle
compensateur pleinement qu’avec l’avènement de l’aptitude psychique du sujet à surmonter le
deuil ou la perte.

 - Pour S. Freud : l’expérience de la frustration (manque ou perte) fonde la possibilité


d’accomplissement hallucinatoire du désir et l’absence de la mère peut par exemple être
palliée ou maîtrisée par l’émergence d’un jeu symbolique tel que le jeu du « For Da » (jeu de
la bobine).

 - Pour D. Winnicott et A. Freud : le rôle de la frustration rentre aussi en ligne de compte dans
la mise en place de la symbolisation. Pour eux, le recours aux objets transitionnels constitue
la première manifestation de l’aptitude de l’enfant à symboliser puisque ces objets
transitionnels représentent en partie la fonction maternante, servent de défense envers
l’angoisse de séparation et reçoivent symboliquement la projection de toute l’ambivalence
de l’enfant.

 - Pour R. Spitz : le mécanisme d’identification de l’agresseur et l’acquisition du « non »


peuvent être interprétés comme des conduites symboliques à visée d’intériorisation d’une
image parentale que l’enfant doit d’abord reprendre à son compte avant de pouvoir
progressivement s’en dégager.

 - Pour M. Mahler : entre 15 et 24 mois, les jeux symboliques et transitionnels permettent à


l’enfant de lutter contre l’angoisse de ré-engloutissement par la mère en permettant
l’indivuation-séparation.
 - Pour M. Klein : les premières identifications projectives de la période schizo-paranoïde (0-3
mois) sont à l’origine de l’activité de penser et le point de départ du processus de formation
des symboles mais c’est seulement l’accès à la position dépressive (3-24 mois) et l’aptitude
au deuil qui permettront aux équations symboliques de devenir des symboles à part entière
susceptibles d’aider l’enfant à surmonter la perte. Quand l’enfant affronte les conflits de la
phase dépressive, on constate une conscience accrue de l’ambivalence, une atténuation des
mécanismes projectifs et une différenciation croissante entre le Soi et l’objet. Le Moi doit
désormais veiller de plus en plus à protéger l’objet contre sa propre agression et son propre
désir de le posséder par fusion. Cette prise de distance est une forte incitation à la
symbolisation.

La fonction du jeu symbolique - Le jeu


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Le jeu se suffit à lui-même. C'est une activité spontanée source de plaisir.

II- Le jeu symbolique :


A°- Q’est- ce que le jeu ? :

1- Généralités :

Dans la déclaration des droits de l’enfant, le jeu est définit comme un droit au même titre que
le « non-travail ». Il est donné au jeu une place spécifique dans l’éducation.

Les comportements qualifiés de ludique ne sont pas limités à l’espèce humaine. Ils sont plus
fréquents chez les animaux jeunes que chez les vieux. Des activités gratuites, chez l’animal,
apparaissent comme une préparation, une mise en place de conduites qui chez l’adulte sont
nécessaire à la survie. Le jeu serait donc une préparation à vide servant des fonctions de
l’espèce.

On peut parler d’un but du jeu. Il y a deux aspects :

 fermé sur lui-même (règles que l’enfant se donne) ;


 finalisé et social.

L’activité ludique est une mise en ordre d’activités spontanées, organisées selon un système
que l’enfant se propose à lui-même.
Il existe dans le jeu une simultanéité entre liberté et règle ainsi qu’entre plaisir et règle.
Dans le jeu, l’enfant utilise une situation, la transforme, lui attribue des significations qui lui
sont propres. Il essaye de contrôler la réalité, se donne l’illusion de contrôler la situation
quand il en est dépossédé.
Le jeu se suffit à lui-même. C’est une activité spontanée source de plaisir.
Quand on observe un enfant en situation de jeu, il a l’air sérieux. Et pourtant quand l’adulte va
l’interroger, il répondra : « je jouais ». Le jeu se définit à travers le plaisir de l’autorégulation,
la règle librement consentie et il ne relève pas d’obligation sociale.
La motivation dans le jeu n’est pas contrôlable.
A travers le jeu, l’enfant a des conduites exploratrices. L’environnement doit permettre ces
conduites exploratoires.

La plupart des auteurs sont d’accord sur les considérations suivantes :

 L’activité de jeu est commune à tous les humains, quel que soit leur âge, et aux animaux,
tout du moins au mammifères supérieures.
 Une certaine liberté est inhérente à l’activité ludique : le jeu ne peut être contraint, sous
peine de perdre son caractère de jeu. C’est sur ce point qu’il diffère des conduites soumises
aux contraintes de la réalité, immédiate ou distanciée.
 N’importe quelle activité peut donner lieu à des jeux, qu’elle relève des domaines
psychomoteurs, cognitif, socio-relationnel, qu’elle s’exerce de façon solitaire ou à plusieurs,
qu’elle utilise ou non des objets d’usage courant dans la vie quotidienne ou spécifiquement
destinés à l’usage de jouets. Les mêmes activités peuvent aussi ne pas accéder au statut de
jeu, si le sujet ne les accepte pas comme telles.
 Le jeu porte en lui-même sa finalité, c'est-à-dire qu’il ne saurait être soumis à des fins
utilitaires qui lui soient extérieures. C’est en cela qu’il se différencie du travail, rétribué ou
non.
 L’accord est total aussi quand au plaisir éprouvé par le joueur dans le jeu.

2- Support du jeu :

Les premiers jouets de l’enfant attirent l’attention (forme, volume, couleur, sonorité).
Au départ, l’enfant découvre le monde à travers l’oralité, par le toucher.
Progressivement, les objets sont différenciés du corps propre.
Les jouets sont intégrés dans l’environnement familier de l’enfant. Ils sont un repère stable et
ont une valeur d’échanges sociaux.
Vers 10 mois, la signification représentative du jouet va permettre à l’enfant de « faire
semblant ». Il y a un lien entre l’imaginaire et le réel.
Le matériel mis à disposition est important et peut avoir des caractéristiques plus ou moins
contraignantes et peut restreindre le champ des représentations.
Le jouet a un rôle de point de départ de l’activité et est plus ou moins structurant.

3- Classification des jeux en fonction de leur évolution :

Le jeu chez l’enfant présente deux caractéristiques fondamentales. La première est la place
très importante que le jeu occupe dans l’ensemble du temps de veille des enfants,
particulièrement avant l’âge de l’obligation scolaire.
La seconde est relative aux aspects chronologiques. En effet différents types de jeux
apparaissent, corrélativement aux étapes du développement cognitif de l’enfant. Au niveau
préverbal, on parle d’activités sensorimotrices. Le jeu va évoluer avec la pensée verbale et
intuitive entre environ 2ans et 7ans. Entre 7 et 11 ans le jeu correspond à l’intelligence
opératoire concrète. Et après 11 ans à l’intelligence opératoire abstraite.

Il y a deux classes de jeux :


 les jeux individuels : conquête du corps (jeux moteurs), conquêtes des choses (exemple : jeux
de manipulation) et jeux de rôle (métaphore des personnes et des choses).
 les jeux sociaux : jeux d’imitation simple, jeux à rôles complémentaires, jeux combatifs.

Les enfants jouent d’avantage devant les autres avant de jouer les uns avec les autres.

La fonction du jeu symbolique - Les


différentes formes de jeux
01/07/2006 - Lu 9028 fois

Dans les jeux, il y a trois étapes caractérisées par trois étapes de l'intelligence :
sensorimotrice, représentative et réfléchie.

4- Différentes formes de jeux : jeux d’exercices, de fictions, de constructions, etc. :

Dans les jeux, il y a trois étapes caractérisées par trois étapes de l’intelligence :
sensorimotrice, représentative et réfléchie.

Les jeux d’exercices :


Ils ne supposent aucune technique particulière et mettent en œuvre un ensemble varié de
conduites mais sans changer la structure de ces conduites telles qu’elles se présentent.
Ils ont pour simple but le plaisir du fonctionnement. Il n’y a pas de nécessité, ni
l’apprentissage d’une conduite nouvelle. Il n’y a pas non plus d’intervention du symbole, de
la fiction et des règles.
C’est le premier jeu à apparaître. Il caractérise le stade préverbal qui se situe avant
l’apparition du symbole. Il est donc essentiellement sensorimoteur.
Le jeu d’exercice peut aussi intéresser les fonctions supérieures comme par exemple le plaisir
de questionner.

Le jeu symbolique :
Le symbole implique la représentation d’un objet absent. Donc pour qu’il y ait jeu
symbolique, il faut que l’enfant ait l’accès à la représentation l’objet absent. Le symbole est
une comparaison entre un élément donné et un élément imaginé. Il y a une représentation
fictive.
L’enfant y prend plaisir quand il a commencé à se différencier de sa mère (la personne). Par
exemple, le jeu du « coucou » entraîne du plaisir et de la jubilation en lien avec l’angoisse de
l’absence de la mère.
Il existe un lien subjectif entre le signifiant et le signifié.
Le jeu symbolique n’existe pas chez l’animal. Il n’apparaît qu’au cours de la deuxième année
du développement de l’enfant. Mais il existe des intermédiaires entre les jeux d’exercices et le
jeu symbolique.
La plupart des jeux symboliques mettent en œuvre des mouvements et des actes complexes.
Ils sont à la fois sensorimoteurs et symboliques. Les fonctions du jeu symbolique s’écartent de
celles des jeux d’exercices. Ca peut être de la compensation, la réalisation d’un désir, la
régulation d’un conflit, une façon pour l’enfant de se soustraire à la réalité.
Les jeux de règles :
- La règle suppose des interactions sociales ou au moins des relations internes individuelles.
Si la règle est violée, il y a faute.
Ces jeux ont le même contenu que les précédents.
La règle témoigne d’une organisation collective des activités ludiques.
Les jeux de règles apparaissent par étapes successives qui s’imprègnent l’une de l’autre.

- A partir d’un moment, chez l’enfant, il n’y a plus de jeux sans règle. La règle devient
impérieuse et elle amène une sorte de socialisation.
Même dans les jeux fonctionnels les plus élémentaires, on a l’impression que l’enfant se pose
une série de difficultés.
La règle diffère de la nécessité pratique (ex. : saut en hauteur).
Ils correspondent à un besoin de compétition chez l’enfant qui met en jeu l’amour propre, le
besoin de difficultés. A ce niveau là, intervient le social.
La tricherie est décrite comme la ruine du jeu mais parfois elle peut devenir une sorte
d’émulation pour l’enfant et pour les autres dépister la tricherie, la soupçonner, peut-être une
sorte de stimulant. Entre le respect de la règle et la tricherie, le plaisir du jeu peut se déplacer.
Dans le jeu de règle, il y a intervention de la fiction qui est différente de l’imaginaire. La
fiction est consciente, connue et reconnue par l’enfant. En fait l’enfant sait mais il joue avec la
réalité à sa guise et il se plait à imaginer que la personne en face est trompée (complicité).
Le rôle du hasard vient remettre en question le succès mérité. Il apporte de l’imprévu, de la
diversité et permet de remettre en question ce qu’on fait, ce qu’on va faire.
L’enfant par le hasard s’affranchie de conditions trop connues. Le hasard va renverser l’ordre
de la vie courante pour changer la hiérarchie des choses. Il va grâce au hasard pouvoir
s’affranchir de conditions imposées par la vie réelle.
Le jeu donne la possibilité de changer la place des choses momentanément.
L’intervention du succès, sur le plan purement fonctionnel entraîne une supériorité de ses
aptitudes. Le désir de gagner est très présent et le fait de ne pas triompher peut abolir le désir
de jouer. Quand il y a succès, l’adulte ne doit pas intervenir avec une récompense sinon
l’enfant va rechercher autre chose et le jeu disparaît.

Les jeux de constructions :


Ils permettent à l’enfant de reproduire des modèles et aussi d’investir des formes.
Le problème de ces jeux : Quand l’enfant construit un objet réellement : le signifiant finit par
se confondre avec le signifié lui-même. En fait le symbolique se confond avec l’imitation. Il
en est de même pour le dessin, le modelage, les jeux de rôles, etc.

Les jeux fonctionnels :


Ils apparaissent dès les premiers mois, sans but utilitaire mais pour le plaisir de la répétition,
de l’exploration d’une fonction venant d’apparaître. Il s’agit d’une simple exploration d’une
activité sensorimotrice.
Le plaisir lié aux gazouillis a une fonction dans le développement du langage. Le jeune enfant
sélectionne les sons.
Les activités fonctionnelles sont poursuivies pour elles-mêmes.

Les jeux de fiction :


L’enfant sort d’une réalité pratique et se livre à des simulacres de certaines activités, soit des
siennes soit de personnages adultes de son entourage.
Les jeux d’acquisition :
Ils traduisent chez l’enfant le désir d’apprendre, de développer ses aptitudes en s’identifiant à
ce qu’il voit faire autour de lui. L’enfant répète sous une forme fictive ce qu’il connaît déjà
puis tente d’acquérir des capacités nouvelles.

Les jeux de fabrication :


Ils surviennent quand l’enfant est capable de modifier les objets de son entourage. A l’âge ou
l’enfant peut se servir des objets mais aussi les détruire pour en construire d’autres.

La fonction du jeu symbolique - Définition


et fonction
01/07/2006 - Lu 11325 fois

Le jeu est une activité essentielle du jeune enfant: "l'assimilation du réel au moi, sans
contraintes ni sanctions" - Piaget.

5- Définition générale sur le jeu de l’enfant :

Le jeu est une activité libre menée pour le plaisir de l’activité elle-même. Dans la
terminologie de Winnicott (1971), elle relève des phénomènes transitionnels car si le jeu se
déroule dans le monde physique, et donc avec des contraintes externes, l’enfant est cependant
« maître du jeu » et l’activité ludique résulte de motivations et d’un contrôle internes. En
même temps, le jeu se situe aux frontières des compétences cognitives, c’est-à-dire au-delà
des aptitudes parfaitement maîtrisées (car le jeu doit réserver quelques surprises et une activité
surentraînée n’est pas un jeu) mais en deçà de compétences trop difficilement accessibles.
Ainsi définies, les activités de jeu débutent dès la période sensori-motrice, comme l’avait
souligné Piaget (1945) en décrivant les jeux d’exercices relatifs à ce niveau. Par la suite, les
jeux d’exercices ne disparaissent pas mais certains jeux deviennent « symboliques ».
Piaget considère que le jeu représente une forme d’adaptation dans laquelle l’assimilation
l’emporte largement sur l’accommodation.

6- Jouer c’est apprendre :

Le jeu est une activité essentielle du jeune enfant ; il est maintenant reconnu comme l’un des
facteurs de son développement.
Si l’on regarde l’enfant jouer, il est facile de constater que son jeu est parfois imagination,
parfois apprentissage, que dans son jeu imaginaire même, l’enfant agit à l’exemple des
adultes, se libère des tensions affectives, équilibre son caractère et développe ses possibilités
d’expression, en un mot crée sa personnalité et fait, à sa manière, l’apprentissage de la vie.

7- Le jeu pour assimiler le réel :

Wallon affirmait clairement que l’enfant ne devient pas social : il l’est. Il grandit en
interrelation complexe avec les éléments culturels et sociaux de son environnement et
particulièrement grâce à l’activité non contrainte du jeu : « jeux fonctionnels, jeux de fiction,
jeux d’acquisition et jeux de fabrication ». Les choix se modifient avec l’âge, en fonction du
développement cognitif et relationnel. Mais le jeu reste (par opposition à une activité adaptée,
utilitaire) « un exercice gratuit, libre, d’une ou plusieurs fonctions, pour le seul plaisir de ce
fonctionnement, ou avec des buts désintéressés ». C’est dans cette seule mesure que l’enfant
peut s’y éprouver lui-même dans toute la diversité de ses aptitudes, en interaction avec la
mère, ses proches, puis les autres enfants, à travers l’imitation ou les jeux de rôles, expression
qui souligne encore la dimension sociale du jeu.
Il est indispensable que l’enfant puisse disposer de ce secteur d’activité qui, pour Piaget et ses
continuateurs, n’est pas « l’adaptation au réel mais au contraire l’assimilation du réel au moi,
sans contraintes ni sanctions ».

Le jeu est un moyen privilégié d’expression de l’enfant, c’est une sorte de langage pour lui.
Le fait de s’exprimer, c’est quelque chose de spontané chez l’enfant mais ce n’est pas toujours
quelque chose de possible.
Le jeu et le dessin spontané rentrent dans le monde imaginaire qu’on laisse à l’enfant, alors
que les apprentissages relèveraient d’avantage du monde de la réalité dont l’adulte se sentirait
responsable. Et pourtant, l’imaginaire et le réel sont le fruit d’une construction chez l’enfant
qui s’appuie sur les interactions enfant/adulte.
Même s’ils paraissent s’opposer, l’imaginaire est intimement lié à la réalité. C’est justement
l’accès à l’imaginaire qui va permettre à l’enfant de s’inscrire dans la réalité. C’est par l’accès
à l’imaginaire qu’il construit son psychisme et qu’il pourra se séparer car il prend conscience
qu’il n’est pas confondu avec sa mère. Ce n’est que quand il est séparé psychiquement et
physiquement que l’enfant prend conscience de la réalité.
Cette différenciation rend possible l’imaginaire qui se donne à voir par l’angoisse de
l’étranger (deuxième organisateur de Spitz) au huitième mois. C’est aussi ce que Winnicott
appelle les phénomènes transitionnels qui font partis du monde de l’illusion.
L’expérience de la perte avec l’angoisse que ça suscite va permettre à l’enfant de se construire
psychiquement. La pathologie montre que seul peuvent jouer les enfants qui sont accessible
(ce qui ne veut pas dire submerger) par l’angoisse, par le sentiment d’impuissance et de
dépendance.
Tout ce qui est simulacre, fiction, jeux symboliques, tout ce qui tourne autour du merveilleux
représentent des techniques pour juguler l’angoisse, des moyens pour l’aménager. Donc des
moyens techniques qui sont inaccessibles par le bébé avant le deuxième semestre de sa vie.

8- Les critères du jeu :

Le jeu est spontané et empreint de la notion de plaisir. A travers celui-ci, il y a une réalisation
immédiate de plaisir comme nous venons de le voir mais aussi de besoin. Il est aussi une
marque d’organisation psychique et cognitive. De plus, il permet à l’enfant de libérer des
conflits qui l’habitent, l’angoissent, etc.
Le jeu est éducatif dans la mesure où il lui permet de s’éprouver lui-même, mais les
contraintes viennent de l’intérieur et non de l’extérieur. Il n’est pas dirigé en opposition à
l’activité et il trouve sa fin en lui-même.

La fonction du jeu symbolique - Le jeu


symbolique
01/07/2006 - Lu 8760 fois

A travers le jeu symbolique, l'enfant a accès au monde de la représentation.


Piaget, Wallon, Bruner.

B- Le jeu symbolique :

1- Généralités :

Dans les jeux symboliques, entre 18 mois et 6 ans, l’enfant va puiser dans sa vie courante
pour la représenter le plus souvent de manière exagérée. Il va assimiler le réel au « moi » pour
fortifier ce dernier. Ces jeux de « faire semblant » ou de fiction sont un moyen d’exprimer des
sentiments et de les explorer. Ils lui servent surtout à plier la réalité à ses besoins affectifs et
intellectuels. L’enfant renforce donc son « moi » global, affectif et cognitif. Il traduit ce qui
l’a touché, marqué, vit et revit des émotions. Cela suppose qu’il les reconnaisse, les contrôle,
les codifie, c'est-à-dire fasse fonctionner son intelligence et la développe de cette manière. A
travers le jeu symbolique, l’enfant a accès au monde de la représentation car le symbole
implique la représentation d’un objet absent. Le symbole est une comparaison entre un
élément donné et un élément imaginé. Il y a une représentation fictive. Le lien entre le
signifiant et le signifié est subjectif.
Les jeux symboliques n’apparaissent qu’au cours de la deuxième année du développement de
l’enfant. Mais il existe des intermédiaires entre les jeux symboliques et les jeux d’exercices :
notamment le symbole en acte ou en mouvement sans représentation (exemple : le rituel du
coucher) qui sera ensuite mimé sans l’objet : c’est le début de la représentation.
La plupart des jeux symboliques mettent en œuvre des mouvements et des actes complexes.
Ils sont à la fois sensorimoteurs et symboliques. A travers ces jeux, l’enfant peut être dans la
compensation en réalisant son désir (régulation du conflit), ce qui est une façon pour lui de se
soustraire à la réalité.

2- Pour Piaget :

Le jeu symbolique, au-delà de l’aspect structurant qu’il confère à la pensée, répond à des
besoins principalement affectifs. Il constitue un moyen d’expression propre à l’enfant.
Le système de symboles propre au jeu symbolique est emprunté à l’imitation à titre
d’instrument (exemple : les jeux de faire semblant) mais l’imitation est poursuivie pour elle-
même et utilisée en tant que moyen évocateur au service de l’assimilation. Le jeu symbolique
n’est donc pas seulement assimilation du réel au Moi de l’enfant (comme le jeu de règles)
mais assimilation assurée par un langage symbolique construit par le Moi au gré des besoins.
Cette fonction symbolique du jeu ne consiste donc pas seulement à exprimer et à nourrir les
différents intérêts et besoins conscients de l’enfant mais c’est toute la dynamique inconsciente
qui imprègne le jeu symbolique.
« D’une manière générale (…), la pensée symbolique nous donne un exemple
particulièrement intéressant de connexion entre l’affectivité et les fonctions cognitives. Mais,
même dans ces formes primitives de liaisons entre la pensée et l’affectivité, nous retrouvons
cette correspondance, ce parallélisme que nous avons constaté à tous les niveaux en ce sens
que la pensée symbolique est déjà une forme de pensée et non pas exclusivement une
structure affective » 5.
3- Pour Wallon :

L’imitation est l’acte par lequel un modèle est reproduit. L’existence d’une représentation du
modèle en est la condition nécessaire. L’apparente précocité de l’imitation empêche
d’admettre une antériorité de la représentation, pourtant nécessaire. C’est que l’imitation ne se
présente qu’à l’état constitué où ses rapports avec la représentation du modèle sont désormais
évidents.
L’imitation « vraie » n’est pas issue du mouvement mais de la posture, laquelle accompagne
aussi bien le mouvement que la perception. La posture est sous-tendue par le tonus, support
du mouvement qui s’effectue et en prépare la suite. Mais la posture est aussi à mettre en
relation avec la perception. Lorsque l’enfant observe le monde qui l’entoure, il est en état
d’imprégnation perceptivo-motrice. L’intervalle entre l’imprégnation et la reproduction peut
être plus ou moins long. Non seulement l’imprégnation devance la reproduction mais elle peut
être supérieure aux capacités d’exécution. Cette imitation n’est pas en effet une copie trait
pour trait d’un modèle présent aux yeux du sujet ou à son esprit, sous forme de représentation.
Cette préparation à l’action n’est pas une représentation.
L’imitation proprement dite n’intervient pas avant la deuxième moitié de la première année.

4- Pour Bruner :

Il revendique l’influence de Vygostki particulièrement sur un point : on ne peut concevoir le


développement humain autrement que comme un processus d’assistance, de collaboration,
entre un enfant et un adulte, l’adulte agissant comme un médiateur de la culture. L’immaturité
permet l’éducabilité, et celle-ci repose notamment sur le jeu et l’imitation. Pour lui,
l’imitation est fondamentale et prépondérante dans le développement de l’enfant. Elle assure
une fonction d’apprentissage. L’enfant apprend parce qu’il observe, regarde l’autre. Il ne peut
imiter si l’autre ne donne pas. C’est ce qui va naître de la relation qui va porter l’enfant à
apprendre, à imiter. Il faut qu’à l’intérieur de cette relation, il émane des choses suffisamment
bonnes, porteuses, pour construire l’enfant, pour qu’il acquière des compétences.
5
Piaget : extrait d’un de ses cours professés à la Sorbonne. [Citation extraite de « Le
Développement affectif et intellectuel de l’enfant », B. Golse.]

La fonction du jeu symbolique - Le jeu


symbolique (suite)
01/07/2006 - Lu 8910 fois

L'imitation constitue le pôle accommodateur du moi au réel, le jeu symbolique en


constitue le pôle assimilateur.

5- Le sous-stade de la pensée symbolique (2 à 4ans) et jeux symboliques :

Vers 18 mois-2ans, on assiste à « l’éclosion de comportements » ( ) qui, pour Wallon comme


pour Piaget, sont la manifestation de la pensée symbolique : l’imitation différée, le jeu
symbolique, le dessin et le langage. L’image mentale n’est pas de l’ordre des comportements
observables mais on peut déduire son existence des conduites symboliques qu’elle autorise.
Comment un enfant de 2 ans et demi pourrait-il jouer au docteur, en l’absence de modèle, si le
modèle n’était pas présent en représentation ?

Piaget considère la fonction symbolique (qu’il suggère d’appeler fonction sémiotique) comme
« la capacité d’évoquer des objets ou des situations non perçus actuellement, en se servant de
signes ou de symboles » (Piaget et Inhelder, 1963). Signes et symboles servent donc à
évoquer le réel, comme signifiants du réel (le signifié) auquel ils renvoient, mais dont ils se
différencient.

Le symbole est différencié de l’objet ou de la situation qu’il symbolise, représente. Il peut


présenter une certaine ressemblance avec le signifié. « Les symboles, en tant que motivés,
peuvent être construits par l’individu à lui seul, et les premiers symboles du jeu de l’enfant
sont de bons exemples de ces créations individuelles, qui n’excluent naturellement pas les
symbolismes collectifs ultérieurs. » (Piaget et Inhelder, 1966, 5ème éd.). Le signe, outre la
distanciation par rapport au signifié, présente la caractéristique d’être arbitraire.
On trouve au cours de la période sensorimotrice des activités qui, bien que ne reposant pas sur
des représentations, renvoient à une réalité plus complète que l’ici et maintenant perceptible.
Les significations ainsi conférées le sont grâce à des indices, indifférenciés du signifié, dont
ils constituent un aspect, une partie, un antécédent temporel, le résultat d’une cause. Avec le
sixième sous-stade de la période sensorimotrice, et surtout dans la période suivante, apparaît
un ensemble de conduites, particulièrement de jeux, « […] qui implique l’évocation
représentative d’un objet ou d’un événement absent et qui suppose par conséquent la
construction ou l’emploi de signifiants différenciés, puisqu’ils doivent pouvoir se rapporter à
des éléments non actuellement perceptibles aussi bien qu’à ceux qui sont présents » (Piaget et
Inhelder, 1966, 5ème éd.).

Le jeu symbolique, ou jeu de « faire semblant », revêt une importance considérable. Pour
Piaget, il marque l’apogée du jeu enfantin, en ce qui rempli mieux que tout autre la fonction
essentielle du jeu, pour deux raisons. En premier lieu, l’obligation de s’adapter à un monde
physique et social que l’enfant ne peut encore dominer ne lui permet pas de satisfaire ses
besoins affectifs et intellectuels : « il est donc indispensable à son équilibre affectif et
intellectuel qu’il puisse disposer d’un secteur d’activités dont la motivation ne soit pas
l’adaptation au réel mais au contraire l’assimilation du réel au moi, sans contraintes ni
sanctions : tel est le jeu, qui transforme le réel par assimilation plus ou moins pure aux besoin
du moi […] » (Piaget et Inhelder, 1966, 5ème éd.). La seconde raison tient également d’une
nécessité de compenser les contraintes du réel. L’instrument essentiel de l’adaptation sociale
est le langage auquel l’enfant doit s’adapter, dans les formes qui lui sont imposées. L’enfant a
besoin d’un moyen d’expression propre, « […] système de signifiants construits par lui et
ployables à ses volontés : tels est le système des symboles propres au jeu symbolique,
empruntés à l’imitation à titre d’instruments. L’imitation est simplement utilisée comme
moyen évocateur : tel est le jeu symbolique. Il y a une assimilation du réel au moi mais une
assimilation assurée par un langage symbolique construit par le moi et modifiables au gré des
besoins » (Piaget et Inhelder, 1966, 5ème éd.). Comme on vient de le voir, alors que
l’imitation constitue le pôle accommodateur du moi au réel, le jeu symbolique en constitue le
pôle assimilateur, les conduites intelligentes adaptées résultant d’une combinaison
s’assimilation et d’accommodation.
La chronologie de l’apparition de différents types de jeux symboliques s’avère associée à
celle des progrès de l’intelligence avec cependant moins de rigueur.
Entre 18 mois et 2 ans, l’enfant met en œuvre dans ses conduites des schèmes déjà bien
maîtrisés mais utilisés pour le jeu de façon symbolique. C’est ainsi qu’il fait semblant de
manger, qu’il prend la posture habituelle de l’endormissement, etc. Le schème est donc utilisé
en dehors de ses buts et contextes habituels. Ce type de jeu ne concerne que l’enfant lui-même
dans un premier temps. Progressivement, il y intégrera un partenaire fictif (faire manger sa
poupée) puis des objets disponibles qu’il substitue symboliquement à l’objet impliqué dans le
jeu (ex : un cube pour une voiture).
Entre 3 et 4 ans, les jeux symboliques deviennent plus complexes, plus variés, impliquant
davantage de personnages, en de véritables scènes où s’échangent rôles et répliques. A cet
âge, le jeu symbolique a pour fonction essentielle de libérer l’enfant des contraintes de
l’accommodation au réel, en assimilant le réel au moi, fonction au est dévolue chez l’adulte à
la rêverie. Le jeu symbolique donne à l’enfant une occasion de revivre en les transposant des
situations qui se sont avérées désagréables dans la réalité, il exerce de ce fait une fonction
cathartique en permettant la réalisation de désirs et la liquidation de conflits.

La fonction du jeu symbolique - Analyse


01/07/2006 - Lu 8257 fois

Les jeux ne montrent pas la réalité objective que vit l'enfant mais la réalité psychique. Les
jeux sont un moyen d'accès au vécu de l'enfant.

D- Analyse :

Lorsqu’on veut traiter des jeux d’enfants, il est difficile de ne pas évoquer le « fort-da »10, ou
jeu de la bobine observé par Freud chez son neveu d’un an et demi. L’enfant passait son
temps à jeter ses jouets loin de lui, sous le lit, etc. En même temps, il émettait un « fort »11 .
Un jour, Freud le vit jouer avec une bobine en bois entourée d’une ficelle. L’enfant jetait la
bobine par-dessus son lit derrière les rideaux où elle disparaissait, tout en s’écriant « fort ».
Puis il tirait sur la ficelle pour faire réapparaître la bobine en disant « da »12. Freud a interprété
ce jeu de « disparition-retour » comme une manière pour l’enfant de mettre en scène les
disparitions et retours de sa mère et par là même de devenir actif par rapport à cet événement
au lieu de simplement le subir.
Freud interprète ce jeu du « fort-da » en lui donnant son sens profond : il lui parait évident que
la disparition et la réapparition de la bobine représente le départ et le retour de la mère.
Comme les enfants vivent douloureusement cette séparation, ils la reproduisent
symboliquement de façon répétitive. La joie de ces retours joués leur permet de supporter
l’attente du retour réel. Ils aiment tous les jeux qui se répètent. Les « coucou, me voilà »
recommencés indéfiniment sont un autre exemple de ces situations par lesquelles ils
aménagent la séparation et se montrent capables d’agir intérieurement sur un monde extérieur
qu’ils appréhendent mal. Le jeu apparaît donc nettement comme une espace psychique dans
lequel l’enfant peut faire le lien entre présence et absence, dedans et dehors, lui et les autres.
Dans cet espace qui apprivoise le manque, il ne se pose pas la question du vrai ou du faux, et
pénètre dans un univers singulier situé entre le réel et l’imaginaire où il peut déplacer,
représenter, jouer ses émotions : c’est l’univers symbolique.
Château discerne deux voies de développement de l’imaginaire :

 la fiction dans la lignée du simulacre ;


 le merveilleux qui répond au goût de l’étonnement de l’enfant.

Il semble que c’est parce que l’enfant peut faire comme si qu’il peut supporter l’introduction
de l’étranger au sein de la relation duelle (dualité). Il y a quelque chose de l’ordre de la
triangulation.
Plus tard, il y a une nouvelle triangulation qui est celle de l’oedipe. C’est à ce moment qu’il
va y avoir réminiscence, réactivation de l’angoisse de l’étranger. Ces angoisses font ressurgir
toutes les angoisses archaïques vécues au sein de la relation duelle. L’enfant ne peut
réellement en profiter que s’il a à faire avec l’étranger pour revivre ces angoisses. S’il ne le
peut pas, il ne pourra pas continuer à progresser dans sa prise de conscience de l’autre. C’est
toute l’intériorisation de l’autre qui se fait de 6 mois à 7 ans. A ce moment là, les jeux de
l’enfant sont révélateurs de ce qui se passe pour lui au niveau intrapsychique. On observe une
confusion du réel et de l’imaginaire. Les jeux vont avoir une valeur identificatoire. Les jeux
ne montrent pas la réalité objective que vit l’enfant mais la réalité psychique. C'est-à-dire
qu’ils ne reflètent pas la réalité quotidienne de l’enfant mais une réalité subjective. Les jeux
sont un moyen d’accès au vécu de l’enfant.

Au départ, il y a une confusion entre l’imaginaire et le réel dans les jeux qui tournent autour
de l’imitation. L’enfant ne reproduit pas une copie conforme mais transcrit ce qu’il perçoit de
l’autre qui est purement individuel.
On ne peut pas parler de mensonge chez l’enfant à ce moment de sa vie. L’âge des fictions et
des fabulations ne connaît pas le mensonge car celui-ci implique une distinction bien établie
entre le réel et l’imaginaire que l’enfant n’a pas encore.
L’enfant utilise dans ces jeux quelque chose de l’ordre de la distorsion du réel, cela signifie
que l’enfant à cet âge ne connaît pas la véritable création.
L’imaginaire est essentiel à la construction de la personnalité et va être complètement
dépendant de l’environnement culturel. Il a sa place dans la réalité dans la mesure où ça va
permettre à l’enfant de régler des conflits.

L’intériorisation psychique de la séparation signifie en même temps d’autres jeux : la capacité


de se mettre à la place de l’autre, l’imitation, l’identification. On retrouve cette idée dans
l’observation d’Arthur qui imite à sa manière la séparation qu’il vit avec sa mère chaque
matin.
Vers 1 ou 2 ans, l’enfant aime imiter sa mère, par exemple quand elle lui coupe les ongles
comme dans la première observation avec Pauline, Axelle et Louka, ou dans la troisième
observation où Léa joue le rôle de la mère qui nourrit son enfant. Quand l’enfant, comme pour
l’exemple de la nourriture, a intériorisé le rôle, il est capable ensuite de se nourrir lui-même
et, peu à peu, de devenir en quelque sorte sa propre mère en sachant prendre soin de lui
même.
D’emblée, l’intensité et la dimension vitale du jeu sautent aux yeux. « Peut-être sommes-nous
en droit de dire que tout enfant qui joue se crée un monde à lui, ou plus exactement transpose
les choses du monde où il vit dans un ordre nouveau tout à sa convenance. Il serait alors
injuste de dire qu’il ne prend pas ce monde au sérieux ; tout au contraire il prend très au
sérieux son jeu, il y emploie de grandes quantité d’affect. Le contraire du jeu n’est pas le
sérieux mais la réalité. » Cependant, l’enfant ne se sépare pas de la réalité en jouant, puisqu’il
utilise « les chose palpables et visibles du monde réel » pour ensuite donner libre cours à son
imagination.
S’il est facile de voir que les enfants jouent par plaisir, il est beaucoup plus difficile de
s’apercevoir que les enfants jouent pour maîtriser leur angoisse ou pour maîtriser des idées et
des pulsions qui conduisent à l’angoisse si elles ne sont pas contrôlées. Dans le jeu d’un
enfant, l’angoisse est toujours un facteur.

Donner l’occasion à l’enfant d’expérimenter la permanence de l’objet (c'est-à-dire qu’un objet


qu’il ne voit pas continue d’exister), et donc les disparitions suivies de retour, est
particulièrement important. Certains enfants inventent eux même ces jeux. Car comme l’écrit
Freud à propos du jeu de la bobine : « il est bien sûr indifférent pour juger de la valeur
affective de ce jeu de saisir si l’enfant l’avait lui-même inventé ou s’il se l’était approprié
après que quelque chose le lui eut suggéré ». Ce qui est certain, c’est que lorsqu’un jeu
correspond au besoin d’un enfant, il s’en saisit quitte à le transformer pour qu’il réponde au
mieux à son désir, à son intérêt.
Dans les jeux du dedans/dehors, vide/plein, contenant/contenu, sont une manière
d’expérimenter la permanence de l’objet mais à ce moment les enfants s’inscrive aussi dans
l’espace transitionnel décrit par Winnicott, espace entre le dedans et le dehors, « dans cet
intermédiaire qui se situe entre la réalité intérieure de l’individu et la réalité partagée du
monde extérieure »13, l’aire du jeu, mais aussi plus tard de l’expérience culturelle.
Il y a un renversement de la passivité en activité. Il s’agit d’un véritable travail psychique qui
ne transforme pas la réalité physique mais qui transforme la réalité subjective du joueur. Il
utilise une pulsion à d’autre fin.
Pour que l’enfant puisse réellement jouer seul, avoir une vie fantasmatique propre, une
activité symbolique, il est nécessaire d’avoir pu à un moment partager une complicité avec un
adulte maternant. Pour pouvoir se séparer psychiquement de l’adulte, il faut que l’enfant est
vécu une fusion, une relation sécurisante avec un adulte suffisamment bon pour que le jeu
spontané remplisse sa fonction. Pour qu’il y ait jeu symbolique, il faut un espace transitionnel.

Les enfants jouent d’abord seuls ou avec la mère. Ils ne réclament pas immédiatement que
d’autres enfants leur tiennent lieu de compagnons de jeu. C’est en grande partie par le jeu,
dans lequel les autres enfants assument des rôles préconçus, qu’un enfant commence à
permettre à ces autres enfants une existence indépendante. Le jeu fourni un cadre pour le
début des relations affectives et permet donc aux contacts sociaux de se développer.
Les jeux vont servir de médiation entre les enfants et les adultes mais aussi entre les enfants
eux-mêmes. Au lieu d’envahir le tout petit de son affectivité, l’adulte va plutôt chercher à lui
proposer un matériel diversifié sur lequel l’enfant va exercer son action créatrice. En
manipulant ces objets externes, ce sont aussi des représentations internes qu’il manipule et
cherche à maîtriser à sa manière, construisant ainsi son identité.
Le jeu va aussi fournir à l’enfant un cadre privilégié pour la rencontre avec ses pairs et
permettre le développement de ses relations sociales. D’un simple rapport d’imitation, celles-
ci vont se complexifier avec des jeux où l’imaginaire va prendre une place de plus en plus
importante.
Dans les relations sociales qu’établit l’enfant et dans le processus de construction de son
identité, vient souvent un temps où il est important pour lui de se mesurer à l’autre. L’adulte
peut alors proposer des jeux qui vont permettre de médiatiser cette confrontation où l’enfant
lui-même peut en élaborer avec ses pairs.
A travers les jeux symboliques, ce sont la construction des relations sociales mais aussi le
concept de temps qui s’élaborent.
Une grande partie de la vie de l’enfant est remplie par le jeu. Pour l’adulte, des expériences
extérieures ou intérieures peuvent s’avérer pleines de richesse, mais pour l’enfant ce qui est
riche se trouve surtout dans le jeu et le fantasme. De même que l’expérience de la vie
développe la personnalité des adultes, le jeu développe la personnalité des enfants lorsqu’ils
jouent seuls ou lorsque d’autres enfants ou bien des adultes apportent des inventions dans le
jeu. Les enfants élargissent progressivement leur capacité de voir la richesse du monde réel
extérieur. Le jeu, c’est la preuve continue de la créativité, qui signifie la vie.
Le jeu mène vers une unification et une intégration générale de la personnalité.

______________________________________
10
FREUD, « Au-delà du principe de plaisir », dans Essais de psychanalyse.
11
« parti » en allemand.
12
« voilà » en allemand.
13
D.W. Winnicott, (1978). Jeu et réalité. Ed. Fayot, Paris

La fonction du jeu symbolique - Conclusion


01/07/2006 - Lu 5105 fois

Le jeu est un mode de socialisation essentiel au développement de l'enfant.


L'enjeu du jeu pour le « je ».

Conclusion :
Si les jeux symboliques connaissent leur apogée entre 2 ans et 5 ou 6 ans, cela ne signifie pas
pour autant qu’ils disparaissent ensuite. Moins fréquents chez le grand enfant, l’adolescent et
l’adulte, ils sont plus complexes, utilisent des systèmes de significations de plus en plus
codés. De plus, le jeu est un mode de socialisation essentiel au développement de l’enfant. Il
revêt des formes différentes selon les cultures mais, dans tous les cas, la ligne de démarcation
entre le ludique et le sérieux, voire le grave, reste floue.

Le jeu accompagne la vie humaine à tous les âges et sous toutes les latitudes. Quand il
manque – dans la dépression ou la maladie par exemple – quelque chose manque à la vie, ou
peut-être que la vie elle-même alors manque toute entière : des contraintes trop fortes pèsent
sur la personne et l’empêchent d’exercer le libre jeu de l’imaginaire. Un espace gratuit de
rêverie fait alors défaut.
On ne sait pas trop quand commence et quand finit le registre symbolique du jeu. Des
découvertes ludiques du nourrisson avec son corps et le corps de l’autre, aux compétions des
adultes qui ressemble parfois à un théâtre, il y a des mondes. Mais une parenté originelle
existe entre les jeux malgré leur diversité et leur complexité. Pendant longtemps, le jeu a été
étudié comme une activité secondaire de distraction – s’opposant au sérieux de la vie. Or,
comme nous l’avons vu, il est évident aujourd’hui qu’à travers lui c’est la possibilité de vivre
qui se constitue.

Je rejoins Winnicott lorsqu’il dit que « ce qui importe avant tout c’est de montrer que jouer
c’est une expérience : toujours une expérience créative … une forme fondamentale de Vie ».
L’enjeu du jeu pour le « je » est énorme. Et, dans les lieux d’accueil de la petite enfance tel
que la crèche parentale, les adultes ont un rôle essentiel à tenir pour offrir aux enfants le cadre
et le matériel nécessaires pour que cette expérience puisse avoir lieu et de la manière la plus
riche possible.
« L’enfant n’est pas un problème ! Bien au contraire, il porte en lui les solutions que nous
cherchons. Mettons-nous à l’école de l’enfant, qui a tant à nous apprendre ! Loin de tout
laxisme, il s’agit là d’une ascèse exigeante : se mettre à l’écoute de la petite voix intérieure
qui nous parle dans chaque enfant. Pour mieux trouver des issues aux impasses de notre
monde actuel, si fier de lui et pourtant enferré dans tant de pièges et de violences. » 14
Nous apprenons des autres, de nos expériences, des circonstances, de notre plein gré ou par
hasard… Apprendre ne constitue pas seulement le commandement principale de l’humanité,
c’est aussi une partie intégrante de l’être humain. Echanger, jouer, communiquer et recevoir
des connaissances, à tous les niveaux de notre condition humaine, constitue l’essence même
de l’évolution.
Alors laissons à l’enfant le temps de grandir, laissons lui la part de jeux dont il a besoin.
Aujourd’hui, la tendance serait de cadrer toutes les activités de l’enfant, à mon avis c’est une
erreur. Quels adultes deviendront nos enfants, si ils n’ont pas le temps et l’espace nécessaire
pour se développer, construire leur identité, leur personnalité ?

_________________________________
14
Renilde Montessori, Education sans frontière

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