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Introduction :
Tant d’enfants sont accueillis dans des institutions comme la crèche. Tant d’enfants de touts
âges et de toutes catégories sociales sont accompagnés quotidiennement dans leur
développement au sein de ces lieux de prise en charge quotidienne, chacun méritant d’être
traité comme un être à part, chacun ayant droit au respect, aux soins et à l’éducation. Il semble
alors essentiel de s’intéresser au développement de l’enfant sur tous les plans pour contribuer
à sa meilleure prise en charge possible et de faire circuler les connaissances dans les milieux
professionnels, dans ceux de la recherche, voir même aussi au niveau des instances
décisionnaires.
Je vais m’intéresser, ici, plus particulièrement au jeu symbolique chez le jeune enfant de 18
mois à 2 ans et demi. Avec l’acquisition de la permanence de l’objet, l’enfant a compris qu’il
existe en tant qu’individu différent des autres (individualisation/socialisation). Comment
l’enfant va-t-il assimiler à partir de là le monde qui l’entoure ? Quels apports les jeux
symboliques permettent-ils dans cette assimilation ? Quels enjeux ont-ils dans la construction
de sa personnalité ?
Afin de répondre au mieux à ces questions, je vais m’attacher à présenter la notion de petite
enfance, à définir ce qu’est un jeune enfant afin de comprendre l’intérêt des jeux symboliques
pour son développement, la construction de sa personnalité. Pour y parvenir, il me faudra
aussi définir ce qu’est le jeu et plus précisément le jeu symbolique. Je vais, pour cela,
m’appuyer entre autre sur les théories de Piaget, Wallon ainsi que sur celles de quelques
psychanalystes.
Piaget accorde un intérêt certain pour les mouvements du jeune enfant. Il s’accorde à dire que
leur régularité et leur organisation sont suffisantes pour rendre compte de la nature des
schèmes 1 qui les sous-tendent.
Les schèmes sensorimoteurs associent la perception et l’action. Leur évolution s’effectue en 6
stades qui s’étendent sur les deux premières années de vie de l’enfant. « L’action
sensorimotrice se dégage ainsi graduellement des déterminations réflexes pour devenir
intentionnelle à partir de l’âge de 4 mois, puis, à partir de 12 mois, constituer des outils au
service de préhension du réel .2 » 3 Dans un dernier temps, dans le stade 6 (18 à 24 mois), on
voit naître les combinaisons mentales où l’action est évoquée en action, en particulier par
l’imitation.
A ce dernier stade, l’enfant est capable de se représenter mentalement ses actions. La
combinaison mentale des schèmes permet d’utiliser un schème donné (exemple : écarter un
obstacle) comme un moyen d’activer un autre schème (exemple : découvrir un objet caché).
De plus, l’enfant utilise des symboles, comme le langage, et il est capable d’utiliser l’imitation
différée. Celle-ci est définie comme la capacité à reproduire un comportement en l’absence de
son modèle, de manière différée dans le temps. Une telle compétence suppose que l’enfant
puisse se représenter mentalement une action ou une série d’actions.
Pour Piaget, le stade 6 est le trait d’union entre l’intelligence pratique et la pensée
symbolique. Ce stade annonce alors la période préopératoire.
La pensée de l’enfant est d’abord égocentrique, pas incapacité de se décentrer, c’est à dire de
prendre en compte le point de vue d’autrui, pour le coordonner avec le sien. L’égocentrisme
va se réduisant avec le développement.
2- La permanence de l’objet :
L’expression « permanence de l’objet » signifie que l’enfant admet qu’un objet continue
d’exister lorsqu’il quitte le champ perceptif. Concevoir cette permanence implique que
l’enfant soit capable d’en conserver une représentation mentale.
Piaget a décrit 6 stades dans la construction de cette permanence de l’objet, stades qui sont
parallèles à ceux de l’intelligence sensorimotrice.
Il a été contesté la nécessité selon laquelle concevoir un objet permanent implique forcément
sa recherche active, car cette recherche demande à l’enfant une coordination complexe entre
la vision et la préhension, pour contrôler les mouvements des mains. Il est donc avancé qu’il
existe une intelligence perceptive antérieure à la forme d’intelligence sensorimotrice décrite
par Piaget. Après avoir effectué des expériences, il a été démontré que les enfants, à un âge
plus précoce que celui annoncé par la théorie piagétienne, réagissent perceptivement à la
disparition des objets. Les enfants très jeunes sont donc capables de concevoir l’existence
d’objets et d’évènements invisibles et ils utilisent très précocement des représentations
mentales.
La pensée de l’enfant est d’abord égocentrique, pas incapacité de se décentrer, c’est à dire de
prendre en compte le point de vue d’autrui, pour le coordonner avec le sien. L’égocentrisme
va se réduisant avec le développement.
_______________________________________________
1
Un schème désigne ce qui, dans une action, est généralisable, transposable.
2
Coordination des moyens et des buts puis découvertes de moyens nouveaux par
expérimentation active.
3
LEHALLE H., MELLIER D., (2002). Psychologie du développement : enfance et
adolescence. Ed. Dunod
4
La Psychologie de l’enfant, PUF, Que sais-je ?
L’enfant est d’abord confondu avec autrui et dépendant de l’autre. C’est cette confusion et
cette dépendance qui le rend social.
Wallon met l’accent sur le social. Dès la naissance, le bébé est capable de provoquer des
interactions.
Les apprentissages se font en relation avec l’autre.
La qualité du milieu, de l’environnement va conditionner les apprentissages de l’enfant.
L’outil des apprentissages pour l’enfant, selon Wallon, est l’imitation, qui est une réaction
sociale.
D- Au niveau psychanalytique :
b- Les stades :
Le stade oral :
Le plaisir de succion est extrêmement intense et agréable (source : bouche, objets : biberon,
sein maternel, …)
Il existe deux sous-stades :
Ce stade oral est caractérisé par la relation objectale. C’est la manière avec laquelle le sujet
rentre en relation avec le monde qui l’entoure. C’est donc une relation basée sur l’oralité.
la phase sadique anale expulsive = plaisir à expulser, à faire mal, à détruire et agresser, à
salir.
la phase masochique anale rétentrice = plaisir à garder, retenir et s’attaquer à soi même, …
Le stade anal permet à l’enfant de s’organiser au niveau psychique à travers des couples
structurants : garder/retenir, actif/passif, soumission/opposition.
a- La fonction de l’environnement :
La santé mentale est liée à la notion de dépendance. Si les soins maternels sont suffisamment
bons, le bébé dépend de sa mère. Cette dépendance est nécessaire au bon développement et
les soins maternels évitent des distorsions.
Pendant les soins maternels, le « moi » de la mère remplace et soutient le « moi » du bébé qui
est inachevé. La mère éveille son enfant et aide les pulsions de vie à prendre le dessus sur les
pulsions de mort. Le chaos psychique de l’enfant ne peut s’organiser seul en bon et mauvais,
donc s’il subit de mauvais soins, cela entraîne une distorsion. Seul les bons soins permettent le
développement du psychisme.
b- La préoccupation maternelle :
La mère doit s’identifier au bébé (identification = empathie), doit arriver à sentir ce dont il a
besoin et être au plus près de lui pour le comprendre.
Cette empathie commence pendant la grossesse puis évolue vers la préoccupation maternelle
et infantile. C’est une « maladie normale de la mère » que de se donner entièrement à son
enfant. Il y a donc un changement de la mère, changement aussi dans sa relation au temps.
Il pense que la mère a un rôle de miroir pour l’enfant, qu’elle lui apporte un support. Le bébé
se voit dans le visage de sa mère. Il y a un échange ludique entre la mère et l’enfant.
S’il y a un désintérêt et/ou une dépression de la mère, le bébé n’a pas en retour quelque chose
de plaisant et il va arrêter de donner car il ne reçoit pas. Ce qui peut entraîner des pathologies
de l’identité.
Il s’est intéressé entre autre au développement de l’enfant de 0 à 2 ans. Il propose des étapes à
la genèse de la relation objectale et de la communication.
La relation objectale, c’est ce qui se passe entre l’enfant et l’autre (psychisme). Dans une
évolution dite normale, Spitz repère trois organisateurs :
L’apparition du sourire
La réaction d’angoisse face au visage de l’étranger
L’apparition du non
jusqu’à 3 mois : stade de non différenciation (anobjectal) → Avant 3 mois, le bébé est dans
un stade de narcissisme primaire (tout est centré sur lui), où tout est chaotique et sans
durée.
de 3 mois à 8 mois : stade préobjectal, phase de non différenciation → Durant ce stade,
apparaissent les deux premiers organisateur : le sourire et l’angoisse de l’étranger (au 8ème
mois).
de 8 mois à 2 ans : Stade précurseur de l’objet → Le bébé pleure et se détourne des gens
qu’il ne connaît pas. Cette réaction témoigne de traces mnésiques et est caractéristique de
l’angoisse de l’étranger qui s’estompera petit à petit. Il voit le monde de deux façons : ce qu’il
connaît et ce qu’il ne connaît pas. Il distingue la mère de la « non mère ». L’enfant s’interroge
sur les personnes qu’il l’entoure et se demandent si elles vont rester, partir et réapparaître.
A partir de 2 ans : stade de l’objet libidinal → Le « non » apparaît. L’enfant se distingue de sa
mère et s’ouvre socialement. Il commence à avoir des acquisitions conceptuelles et
symboliques. A travers le « non », le mécanisme qui se met en place est l’identification de
l’agresseur mais aussi une intériorisation des interdits qui lui permet à son tour de dire non.
Elle décrit la limite émotionnelle et la vie fantasmatique. Elle va imaginer ce que pense le
bébé alors qu’il ne parle pas. Elle montre que l’activité psychique du bébé va être en
corrélation avec le corps car les fantasmes ressemblent à des sensations corporelles (=
premiers fantasmes naissent avec des pulsions corporelles).
Mélanie Klein pense qu’il existe dès la naissance un « moi » rudimentaire, immature, qui va
être d’emblé soumis à une tempête entre les pulsions de vie et les pulsions de mort. Il en
découle une angoisse. Ces angoisses sont issues du conflit des pulsions libidinales et
agressives. La manière dont le « moi » immature va gérer les angoisse doit permettre
d’atteindre un équilibre.
Le « moi » va passer de l’inorganisation à l’organisation psychique, de l’objet partiel à l’objet
total. La nature de l’angoisse change, elle est d’abord de persécution puis dépressive. Ensuite
les processus de réparation apparaissent.
5- Lacan (1901-1983) :
Il a continué l’œuvre de Freud et s’est intéressé au stade du miroir qui permet à l’enfant
d’accéder au « je » (stade du sujet). L’enfant se sent unifié, auteur et acteur de ses actes et
paroles. Il a le sentiment d’être lui-même.
Lacan découpe ce stade en trois étapes entre 6 et 18 mois et plus :
A environ 6 mois, l’enfant reconnaît un être humain dans le miroir. Il voit une image de lui
mais comme un autre. Il confond le vrai et le réel. Puis cette image commence à être prise
pour la sienne et il essaye de l’attraper car il n’a aucune notion de l’image.
Entre 6 et 18 mois, l’enfant comprend que son reflet n’est qu’une image et pas un être vivant
mais il ne se reconnaît pas encore. Il ne cherche plus à attraper l’image. Il a compris l’aspect
fictif et imaginaire de l’espace derrière le miroir.
L’enfant comprend que cette image est une image et qu’en plus elle le représente. Il
comprend aussi cela des autres images. Le bébé jubile en se découvrant dans le miroir,
s’amuse, éclate de rire. Pour la première fois, il va se vivre, va se penser en tant qu’individu.
Il acquiert le « je » vers l’âge de 2 ans. Le sentiment d’existence passe par l’image, par la
médiation du corps.
La formation du symbole: Le symbole vient toujours en lieu et place d'un objet manquant.
6- Formation du symbole :
D’un point de vue psychanalytique, « la formation du symbole est une activité du Moi,
cherchant à élaborer les angoisses nées de la relation du Moi avec l’objet » (Hanna Segal).
Le symbole vient toujours en lieu et place d’un objet manquant. Il ne peut jouer son rôle
compensateur pleinement qu’avec l’avènement de l’aptitude psychique du sujet à surmonter le
deuil ou la perte.
- Pour D. Winnicott et A. Freud : le rôle de la frustration rentre aussi en ligne de compte dans
la mise en place de la symbolisation. Pour eux, le recours aux objets transitionnels constitue
la première manifestation de l’aptitude de l’enfant à symboliser puisque ces objets
transitionnels représentent en partie la fonction maternante, servent de défense envers
l’angoisse de séparation et reçoivent symboliquement la projection de toute l’ambivalence
de l’enfant.
1- Généralités :
Dans la déclaration des droits de l’enfant, le jeu est définit comme un droit au même titre que
le « non-travail ». Il est donné au jeu une place spécifique dans l’éducation.
Les comportements qualifiés de ludique ne sont pas limités à l’espèce humaine. Ils sont plus
fréquents chez les animaux jeunes que chez les vieux. Des activités gratuites, chez l’animal,
apparaissent comme une préparation, une mise en place de conduites qui chez l’adulte sont
nécessaire à la survie. Le jeu serait donc une préparation à vide servant des fonctions de
l’espèce.
L’activité ludique est une mise en ordre d’activités spontanées, organisées selon un système
que l’enfant se propose à lui-même.
Il existe dans le jeu une simultanéité entre liberté et règle ainsi qu’entre plaisir et règle.
Dans le jeu, l’enfant utilise une situation, la transforme, lui attribue des significations qui lui
sont propres. Il essaye de contrôler la réalité, se donne l’illusion de contrôler la situation
quand il en est dépossédé.
Le jeu se suffit à lui-même. C’est une activité spontanée source de plaisir.
Quand on observe un enfant en situation de jeu, il a l’air sérieux. Et pourtant quand l’adulte va
l’interroger, il répondra : « je jouais ». Le jeu se définit à travers le plaisir de l’autorégulation,
la règle librement consentie et il ne relève pas d’obligation sociale.
La motivation dans le jeu n’est pas contrôlable.
A travers le jeu, l’enfant a des conduites exploratrices. L’environnement doit permettre ces
conduites exploratoires.
L’activité de jeu est commune à tous les humains, quel que soit leur âge, et aux animaux,
tout du moins au mammifères supérieures.
Une certaine liberté est inhérente à l’activité ludique : le jeu ne peut être contraint, sous
peine de perdre son caractère de jeu. C’est sur ce point qu’il diffère des conduites soumises
aux contraintes de la réalité, immédiate ou distanciée.
N’importe quelle activité peut donner lieu à des jeux, qu’elle relève des domaines
psychomoteurs, cognitif, socio-relationnel, qu’elle s’exerce de façon solitaire ou à plusieurs,
qu’elle utilise ou non des objets d’usage courant dans la vie quotidienne ou spécifiquement
destinés à l’usage de jouets. Les mêmes activités peuvent aussi ne pas accéder au statut de
jeu, si le sujet ne les accepte pas comme telles.
Le jeu porte en lui-même sa finalité, c'est-à-dire qu’il ne saurait être soumis à des fins
utilitaires qui lui soient extérieures. C’est en cela qu’il se différencie du travail, rétribué ou
non.
L’accord est total aussi quand au plaisir éprouvé par le joueur dans le jeu.
2- Support du jeu :
Les premiers jouets de l’enfant attirent l’attention (forme, volume, couleur, sonorité).
Au départ, l’enfant découvre le monde à travers l’oralité, par le toucher.
Progressivement, les objets sont différenciés du corps propre.
Les jouets sont intégrés dans l’environnement familier de l’enfant. Ils sont un repère stable et
ont une valeur d’échanges sociaux.
Vers 10 mois, la signification représentative du jouet va permettre à l’enfant de « faire
semblant ». Il y a un lien entre l’imaginaire et le réel.
Le matériel mis à disposition est important et peut avoir des caractéristiques plus ou moins
contraignantes et peut restreindre le champ des représentations.
Le jouet a un rôle de point de départ de l’activité et est plus ou moins structurant.
Le jeu chez l’enfant présente deux caractéristiques fondamentales. La première est la place
très importante que le jeu occupe dans l’ensemble du temps de veille des enfants,
particulièrement avant l’âge de l’obligation scolaire.
La seconde est relative aux aspects chronologiques. En effet différents types de jeux
apparaissent, corrélativement aux étapes du développement cognitif de l’enfant. Au niveau
préverbal, on parle d’activités sensorimotrices. Le jeu va évoluer avec la pensée verbale et
intuitive entre environ 2ans et 7ans. Entre 7 et 11 ans le jeu correspond à l’intelligence
opératoire concrète. Et après 11 ans à l’intelligence opératoire abstraite.
Les enfants jouent d’avantage devant les autres avant de jouer les uns avec les autres.
Dans les jeux, il y a trois étapes caractérisées par trois étapes de l'intelligence :
sensorimotrice, représentative et réfléchie.
Dans les jeux, il y a trois étapes caractérisées par trois étapes de l’intelligence :
sensorimotrice, représentative et réfléchie.
Le jeu symbolique :
Le symbole implique la représentation d’un objet absent. Donc pour qu’il y ait jeu
symbolique, il faut que l’enfant ait l’accès à la représentation l’objet absent. Le symbole est
une comparaison entre un élément donné et un élément imaginé. Il y a une représentation
fictive.
L’enfant y prend plaisir quand il a commencé à se différencier de sa mère (la personne). Par
exemple, le jeu du « coucou » entraîne du plaisir et de la jubilation en lien avec l’angoisse de
l’absence de la mère.
Il existe un lien subjectif entre le signifiant et le signifié.
Le jeu symbolique n’existe pas chez l’animal. Il n’apparaît qu’au cours de la deuxième année
du développement de l’enfant. Mais il existe des intermédiaires entre les jeux d’exercices et le
jeu symbolique.
La plupart des jeux symboliques mettent en œuvre des mouvements et des actes complexes.
Ils sont à la fois sensorimoteurs et symboliques. Les fonctions du jeu symbolique s’écartent de
celles des jeux d’exercices. Ca peut être de la compensation, la réalisation d’un désir, la
régulation d’un conflit, une façon pour l’enfant de se soustraire à la réalité.
Les jeux de règles :
- La règle suppose des interactions sociales ou au moins des relations internes individuelles.
Si la règle est violée, il y a faute.
Ces jeux ont le même contenu que les précédents.
La règle témoigne d’une organisation collective des activités ludiques.
Les jeux de règles apparaissent par étapes successives qui s’imprègnent l’une de l’autre.
- A partir d’un moment, chez l’enfant, il n’y a plus de jeux sans règle. La règle devient
impérieuse et elle amène une sorte de socialisation.
Même dans les jeux fonctionnels les plus élémentaires, on a l’impression que l’enfant se pose
une série de difficultés.
La règle diffère de la nécessité pratique (ex. : saut en hauteur).
Ils correspondent à un besoin de compétition chez l’enfant qui met en jeu l’amour propre, le
besoin de difficultés. A ce niveau là, intervient le social.
La tricherie est décrite comme la ruine du jeu mais parfois elle peut devenir une sorte
d’émulation pour l’enfant et pour les autres dépister la tricherie, la soupçonner, peut-être une
sorte de stimulant. Entre le respect de la règle et la tricherie, le plaisir du jeu peut se déplacer.
Dans le jeu de règle, il y a intervention de la fiction qui est différente de l’imaginaire. La
fiction est consciente, connue et reconnue par l’enfant. En fait l’enfant sait mais il joue avec la
réalité à sa guise et il se plait à imaginer que la personne en face est trompée (complicité).
Le rôle du hasard vient remettre en question le succès mérité. Il apporte de l’imprévu, de la
diversité et permet de remettre en question ce qu’on fait, ce qu’on va faire.
L’enfant par le hasard s’affranchie de conditions trop connues. Le hasard va renverser l’ordre
de la vie courante pour changer la hiérarchie des choses. Il va grâce au hasard pouvoir
s’affranchir de conditions imposées par la vie réelle.
Le jeu donne la possibilité de changer la place des choses momentanément.
L’intervention du succès, sur le plan purement fonctionnel entraîne une supériorité de ses
aptitudes. Le désir de gagner est très présent et le fait de ne pas triompher peut abolir le désir
de jouer. Quand il y a succès, l’adulte ne doit pas intervenir avec une récompense sinon
l’enfant va rechercher autre chose et le jeu disparaît.
Le jeu est une activité essentielle du jeune enfant: "l'assimilation du réel au moi, sans
contraintes ni sanctions" - Piaget.
Le jeu est une activité libre menée pour le plaisir de l’activité elle-même. Dans la
terminologie de Winnicott (1971), elle relève des phénomènes transitionnels car si le jeu se
déroule dans le monde physique, et donc avec des contraintes externes, l’enfant est cependant
« maître du jeu » et l’activité ludique résulte de motivations et d’un contrôle internes. En
même temps, le jeu se situe aux frontières des compétences cognitives, c’est-à-dire au-delà
des aptitudes parfaitement maîtrisées (car le jeu doit réserver quelques surprises et une activité
surentraînée n’est pas un jeu) mais en deçà de compétences trop difficilement accessibles.
Ainsi définies, les activités de jeu débutent dès la période sensori-motrice, comme l’avait
souligné Piaget (1945) en décrivant les jeux d’exercices relatifs à ce niveau. Par la suite, les
jeux d’exercices ne disparaissent pas mais certains jeux deviennent « symboliques ».
Piaget considère que le jeu représente une forme d’adaptation dans laquelle l’assimilation
l’emporte largement sur l’accommodation.
Le jeu est une activité essentielle du jeune enfant ; il est maintenant reconnu comme l’un des
facteurs de son développement.
Si l’on regarde l’enfant jouer, il est facile de constater que son jeu est parfois imagination,
parfois apprentissage, que dans son jeu imaginaire même, l’enfant agit à l’exemple des
adultes, se libère des tensions affectives, équilibre son caractère et développe ses possibilités
d’expression, en un mot crée sa personnalité et fait, à sa manière, l’apprentissage de la vie.
Wallon affirmait clairement que l’enfant ne devient pas social : il l’est. Il grandit en
interrelation complexe avec les éléments culturels et sociaux de son environnement et
particulièrement grâce à l’activité non contrainte du jeu : « jeux fonctionnels, jeux de fiction,
jeux d’acquisition et jeux de fabrication ». Les choix se modifient avec l’âge, en fonction du
développement cognitif et relationnel. Mais le jeu reste (par opposition à une activité adaptée,
utilitaire) « un exercice gratuit, libre, d’une ou plusieurs fonctions, pour le seul plaisir de ce
fonctionnement, ou avec des buts désintéressés ». C’est dans cette seule mesure que l’enfant
peut s’y éprouver lui-même dans toute la diversité de ses aptitudes, en interaction avec la
mère, ses proches, puis les autres enfants, à travers l’imitation ou les jeux de rôles, expression
qui souligne encore la dimension sociale du jeu.
Il est indispensable que l’enfant puisse disposer de ce secteur d’activité qui, pour Piaget et ses
continuateurs, n’est pas « l’adaptation au réel mais au contraire l’assimilation du réel au moi,
sans contraintes ni sanctions ».
Le jeu est un moyen privilégié d’expression de l’enfant, c’est une sorte de langage pour lui.
Le fait de s’exprimer, c’est quelque chose de spontané chez l’enfant mais ce n’est pas toujours
quelque chose de possible.
Le jeu et le dessin spontané rentrent dans le monde imaginaire qu’on laisse à l’enfant, alors
que les apprentissages relèveraient d’avantage du monde de la réalité dont l’adulte se sentirait
responsable. Et pourtant, l’imaginaire et le réel sont le fruit d’une construction chez l’enfant
qui s’appuie sur les interactions enfant/adulte.
Même s’ils paraissent s’opposer, l’imaginaire est intimement lié à la réalité. C’est justement
l’accès à l’imaginaire qui va permettre à l’enfant de s’inscrire dans la réalité. C’est par l’accès
à l’imaginaire qu’il construit son psychisme et qu’il pourra se séparer car il prend conscience
qu’il n’est pas confondu avec sa mère. Ce n’est que quand il est séparé psychiquement et
physiquement que l’enfant prend conscience de la réalité.
Cette différenciation rend possible l’imaginaire qui se donne à voir par l’angoisse de
l’étranger (deuxième organisateur de Spitz) au huitième mois. C’est aussi ce que Winnicott
appelle les phénomènes transitionnels qui font partis du monde de l’illusion.
L’expérience de la perte avec l’angoisse que ça suscite va permettre à l’enfant de se construire
psychiquement. La pathologie montre que seul peuvent jouer les enfants qui sont accessible
(ce qui ne veut pas dire submerger) par l’angoisse, par le sentiment d’impuissance et de
dépendance.
Tout ce qui est simulacre, fiction, jeux symboliques, tout ce qui tourne autour du merveilleux
représentent des techniques pour juguler l’angoisse, des moyens pour l’aménager. Donc des
moyens techniques qui sont inaccessibles par le bébé avant le deuxième semestre de sa vie.
Le jeu est spontané et empreint de la notion de plaisir. A travers celui-ci, il y a une réalisation
immédiate de plaisir comme nous venons de le voir mais aussi de besoin. Il est aussi une
marque d’organisation psychique et cognitive. De plus, il permet à l’enfant de libérer des
conflits qui l’habitent, l’angoissent, etc.
Le jeu est éducatif dans la mesure où il lui permet de s’éprouver lui-même, mais les
contraintes viennent de l’intérieur et non de l’extérieur. Il n’est pas dirigé en opposition à
l’activité et il trouve sa fin en lui-même.
B- Le jeu symbolique :
1- Généralités :
Dans les jeux symboliques, entre 18 mois et 6 ans, l’enfant va puiser dans sa vie courante
pour la représenter le plus souvent de manière exagérée. Il va assimiler le réel au « moi » pour
fortifier ce dernier. Ces jeux de « faire semblant » ou de fiction sont un moyen d’exprimer des
sentiments et de les explorer. Ils lui servent surtout à plier la réalité à ses besoins affectifs et
intellectuels. L’enfant renforce donc son « moi » global, affectif et cognitif. Il traduit ce qui
l’a touché, marqué, vit et revit des émotions. Cela suppose qu’il les reconnaisse, les contrôle,
les codifie, c'est-à-dire fasse fonctionner son intelligence et la développe de cette manière. A
travers le jeu symbolique, l’enfant a accès au monde de la représentation car le symbole
implique la représentation d’un objet absent. Le symbole est une comparaison entre un
élément donné et un élément imaginé. Il y a une représentation fictive. Le lien entre le
signifiant et le signifié est subjectif.
Les jeux symboliques n’apparaissent qu’au cours de la deuxième année du développement de
l’enfant. Mais il existe des intermédiaires entre les jeux symboliques et les jeux d’exercices :
notamment le symbole en acte ou en mouvement sans représentation (exemple : le rituel du
coucher) qui sera ensuite mimé sans l’objet : c’est le début de la représentation.
La plupart des jeux symboliques mettent en œuvre des mouvements et des actes complexes.
Ils sont à la fois sensorimoteurs et symboliques. A travers ces jeux, l’enfant peut être dans la
compensation en réalisant son désir (régulation du conflit), ce qui est une façon pour lui de se
soustraire à la réalité.
2- Pour Piaget :
Le jeu symbolique, au-delà de l’aspect structurant qu’il confère à la pensée, répond à des
besoins principalement affectifs. Il constitue un moyen d’expression propre à l’enfant.
Le système de symboles propre au jeu symbolique est emprunté à l’imitation à titre
d’instrument (exemple : les jeux de faire semblant) mais l’imitation est poursuivie pour elle-
même et utilisée en tant que moyen évocateur au service de l’assimilation. Le jeu symbolique
n’est donc pas seulement assimilation du réel au Moi de l’enfant (comme le jeu de règles)
mais assimilation assurée par un langage symbolique construit par le Moi au gré des besoins.
Cette fonction symbolique du jeu ne consiste donc pas seulement à exprimer et à nourrir les
différents intérêts et besoins conscients de l’enfant mais c’est toute la dynamique inconsciente
qui imprègne le jeu symbolique.
« D’une manière générale (…), la pensée symbolique nous donne un exemple
particulièrement intéressant de connexion entre l’affectivité et les fonctions cognitives. Mais,
même dans ces formes primitives de liaisons entre la pensée et l’affectivité, nous retrouvons
cette correspondance, ce parallélisme que nous avons constaté à tous les niveaux en ce sens
que la pensée symbolique est déjà une forme de pensée et non pas exclusivement une
structure affective » 5.
3- Pour Wallon :
L’imitation est l’acte par lequel un modèle est reproduit. L’existence d’une représentation du
modèle en est la condition nécessaire. L’apparente précocité de l’imitation empêche
d’admettre une antériorité de la représentation, pourtant nécessaire. C’est que l’imitation ne se
présente qu’à l’état constitué où ses rapports avec la représentation du modèle sont désormais
évidents.
L’imitation « vraie » n’est pas issue du mouvement mais de la posture, laquelle accompagne
aussi bien le mouvement que la perception. La posture est sous-tendue par le tonus, support
du mouvement qui s’effectue et en prépare la suite. Mais la posture est aussi à mettre en
relation avec la perception. Lorsque l’enfant observe le monde qui l’entoure, il est en état
d’imprégnation perceptivo-motrice. L’intervalle entre l’imprégnation et la reproduction peut
être plus ou moins long. Non seulement l’imprégnation devance la reproduction mais elle peut
être supérieure aux capacités d’exécution. Cette imitation n’est pas en effet une copie trait
pour trait d’un modèle présent aux yeux du sujet ou à son esprit, sous forme de représentation.
Cette préparation à l’action n’est pas une représentation.
L’imitation proprement dite n’intervient pas avant la deuxième moitié de la première année.
4- Pour Bruner :
Piaget considère la fonction symbolique (qu’il suggère d’appeler fonction sémiotique) comme
« la capacité d’évoquer des objets ou des situations non perçus actuellement, en se servant de
signes ou de symboles » (Piaget et Inhelder, 1963). Signes et symboles servent donc à
évoquer le réel, comme signifiants du réel (le signifié) auquel ils renvoient, mais dont ils se
différencient.
Le jeu symbolique, ou jeu de « faire semblant », revêt une importance considérable. Pour
Piaget, il marque l’apogée du jeu enfantin, en ce qui rempli mieux que tout autre la fonction
essentielle du jeu, pour deux raisons. En premier lieu, l’obligation de s’adapter à un monde
physique et social que l’enfant ne peut encore dominer ne lui permet pas de satisfaire ses
besoins affectifs et intellectuels : « il est donc indispensable à son équilibre affectif et
intellectuel qu’il puisse disposer d’un secteur d’activités dont la motivation ne soit pas
l’adaptation au réel mais au contraire l’assimilation du réel au moi, sans contraintes ni
sanctions : tel est le jeu, qui transforme le réel par assimilation plus ou moins pure aux besoin
du moi […] » (Piaget et Inhelder, 1966, 5ème éd.). La seconde raison tient également d’une
nécessité de compenser les contraintes du réel. L’instrument essentiel de l’adaptation sociale
est le langage auquel l’enfant doit s’adapter, dans les formes qui lui sont imposées. L’enfant a
besoin d’un moyen d’expression propre, « […] système de signifiants construits par lui et
ployables à ses volontés : tels est le système des symboles propres au jeu symbolique,
empruntés à l’imitation à titre d’instruments. L’imitation est simplement utilisée comme
moyen évocateur : tel est le jeu symbolique. Il y a une assimilation du réel au moi mais une
assimilation assurée par un langage symbolique construit par le moi et modifiables au gré des
besoins » (Piaget et Inhelder, 1966, 5ème éd.). Comme on vient de le voir, alors que
l’imitation constitue le pôle accommodateur du moi au réel, le jeu symbolique en constitue le
pôle assimilateur, les conduites intelligentes adaptées résultant d’une combinaison
s’assimilation et d’accommodation.
La chronologie de l’apparition de différents types de jeux symboliques s’avère associée à
celle des progrès de l’intelligence avec cependant moins de rigueur.
Entre 18 mois et 2 ans, l’enfant met en œuvre dans ses conduites des schèmes déjà bien
maîtrisés mais utilisés pour le jeu de façon symbolique. C’est ainsi qu’il fait semblant de
manger, qu’il prend la posture habituelle de l’endormissement, etc. Le schème est donc utilisé
en dehors de ses buts et contextes habituels. Ce type de jeu ne concerne que l’enfant lui-même
dans un premier temps. Progressivement, il y intégrera un partenaire fictif (faire manger sa
poupée) puis des objets disponibles qu’il substitue symboliquement à l’objet impliqué dans le
jeu (ex : un cube pour une voiture).
Entre 3 et 4 ans, les jeux symboliques deviennent plus complexes, plus variés, impliquant
davantage de personnages, en de véritables scènes où s’échangent rôles et répliques. A cet
âge, le jeu symbolique a pour fonction essentielle de libérer l’enfant des contraintes de
l’accommodation au réel, en assimilant le réel au moi, fonction au est dévolue chez l’adulte à
la rêverie. Le jeu symbolique donne à l’enfant une occasion de revivre en les transposant des
situations qui se sont avérées désagréables dans la réalité, il exerce de ce fait une fonction
cathartique en permettant la réalisation de désirs et la liquidation de conflits.
Les jeux ne montrent pas la réalité objective que vit l'enfant mais la réalité psychique. Les
jeux sont un moyen d'accès au vécu de l'enfant.
D- Analyse :
Lorsqu’on veut traiter des jeux d’enfants, il est difficile de ne pas évoquer le « fort-da »10, ou
jeu de la bobine observé par Freud chez son neveu d’un an et demi. L’enfant passait son
temps à jeter ses jouets loin de lui, sous le lit, etc. En même temps, il émettait un « fort »11 .
Un jour, Freud le vit jouer avec une bobine en bois entourée d’une ficelle. L’enfant jetait la
bobine par-dessus son lit derrière les rideaux où elle disparaissait, tout en s’écriant « fort ».
Puis il tirait sur la ficelle pour faire réapparaître la bobine en disant « da »12. Freud a interprété
ce jeu de « disparition-retour » comme une manière pour l’enfant de mettre en scène les
disparitions et retours de sa mère et par là même de devenir actif par rapport à cet événement
au lieu de simplement le subir.
Freud interprète ce jeu du « fort-da » en lui donnant son sens profond : il lui parait évident que
la disparition et la réapparition de la bobine représente le départ et le retour de la mère.
Comme les enfants vivent douloureusement cette séparation, ils la reproduisent
symboliquement de façon répétitive. La joie de ces retours joués leur permet de supporter
l’attente du retour réel. Ils aiment tous les jeux qui se répètent. Les « coucou, me voilà »
recommencés indéfiniment sont un autre exemple de ces situations par lesquelles ils
aménagent la séparation et se montrent capables d’agir intérieurement sur un monde extérieur
qu’ils appréhendent mal. Le jeu apparaît donc nettement comme une espace psychique dans
lequel l’enfant peut faire le lien entre présence et absence, dedans et dehors, lui et les autres.
Dans cet espace qui apprivoise le manque, il ne se pose pas la question du vrai ou du faux, et
pénètre dans un univers singulier situé entre le réel et l’imaginaire où il peut déplacer,
représenter, jouer ses émotions : c’est l’univers symbolique.
Château discerne deux voies de développement de l’imaginaire :
Il semble que c’est parce que l’enfant peut faire comme si qu’il peut supporter l’introduction
de l’étranger au sein de la relation duelle (dualité). Il y a quelque chose de l’ordre de la
triangulation.
Plus tard, il y a une nouvelle triangulation qui est celle de l’oedipe. C’est à ce moment qu’il
va y avoir réminiscence, réactivation de l’angoisse de l’étranger. Ces angoisses font ressurgir
toutes les angoisses archaïques vécues au sein de la relation duelle. L’enfant ne peut
réellement en profiter que s’il a à faire avec l’étranger pour revivre ces angoisses. S’il ne le
peut pas, il ne pourra pas continuer à progresser dans sa prise de conscience de l’autre. C’est
toute l’intériorisation de l’autre qui se fait de 6 mois à 7 ans. A ce moment là, les jeux de
l’enfant sont révélateurs de ce qui se passe pour lui au niveau intrapsychique. On observe une
confusion du réel et de l’imaginaire. Les jeux vont avoir une valeur identificatoire. Les jeux
ne montrent pas la réalité objective que vit l’enfant mais la réalité psychique. C'est-à-dire
qu’ils ne reflètent pas la réalité quotidienne de l’enfant mais une réalité subjective. Les jeux
sont un moyen d’accès au vécu de l’enfant.
Au départ, il y a une confusion entre l’imaginaire et le réel dans les jeux qui tournent autour
de l’imitation. L’enfant ne reproduit pas une copie conforme mais transcrit ce qu’il perçoit de
l’autre qui est purement individuel.
On ne peut pas parler de mensonge chez l’enfant à ce moment de sa vie. L’âge des fictions et
des fabulations ne connaît pas le mensonge car celui-ci implique une distinction bien établie
entre le réel et l’imaginaire que l’enfant n’a pas encore.
L’enfant utilise dans ces jeux quelque chose de l’ordre de la distorsion du réel, cela signifie
que l’enfant à cet âge ne connaît pas la véritable création.
L’imaginaire est essentiel à la construction de la personnalité et va être complètement
dépendant de l’environnement culturel. Il a sa place dans la réalité dans la mesure où ça va
permettre à l’enfant de régler des conflits.
Les enfants jouent d’abord seuls ou avec la mère. Ils ne réclament pas immédiatement que
d’autres enfants leur tiennent lieu de compagnons de jeu. C’est en grande partie par le jeu,
dans lequel les autres enfants assument des rôles préconçus, qu’un enfant commence à
permettre à ces autres enfants une existence indépendante. Le jeu fourni un cadre pour le
début des relations affectives et permet donc aux contacts sociaux de se développer.
Les jeux vont servir de médiation entre les enfants et les adultes mais aussi entre les enfants
eux-mêmes. Au lieu d’envahir le tout petit de son affectivité, l’adulte va plutôt chercher à lui
proposer un matériel diversifié sur lequel l’enfant va exercer son action créatrice. En
manipulant ces objets externes, ce sont aussi des représentations internes qu’il manipule et
cherche à maîtriser à sa manière, construisant ainsi son identité.
Le jeu va aussi fournir à l’enfant un cadre privilégié pour la rencontre avec ses pairs et
permettre le développement de ses relations sociales. D’un simple rapport d’imitation, celles-
ci vont se complexifier avec des jeux où l’imaginaire va prendre une place de plus en plus
importante.
Dans les relations sociales qu’établit l’enfant et dans le processus de construction de son
identité, vient souvent un temps où il est important pour lui de se mesurer à l’autre. L’adulte
peut alors proposer des jeux qui vont permettre de médiatiser cette confrontation où l’enfant
lui-même peut en élaborer avec ses pairs.
A travers les jeux symboliques, ce sont la construction des relations sociales mais aussi le
concept de temps qui s’élaborent.
Une grande partie de la vie de l’enfant est remplie par le jeu. Pour l’adulte, des expériences
extérieures ou intérieures peuvent s’avérer pleines de richesse, mais pour l’enfant ce qui est
riche se trouve surtout dans le jeu et le fantasme. De même que l’expérience de la vie
développe la personnalité des adultes, le jeu développe la personnalité des enfants lorsqu’ils
jouent seuls ou lorsque d’autres enfants ou bien des adultes apportent des inventions dans le
jeu. Les enfants élargissent progressivement leur capacité de voir la richesse du monde réel
extérieur. Le jeu, c’est la preuve continue de la créativité, qui signifie la vie.
Le jeu mène vers une unification et une intégration générale de la personnalité.
______________________________________
10
FREUD, « Au-delà du principe de plaisir », dans Essais de psychanalyse.
11
« parti » en allemand.
12
« voilà » en allemand.
13
D.W. Winnicott, (1978). Jeu et réalité. Ed. Fayot, Paris
Conclusion :
Si les jeux symboliques connaissent leur apogée entre 2 ans et 5 ou 6 ans, cela ne signifie pas
pour autant qu’ils disparaissent ensuite. Moins fréquents chez le grand enfant, l’adolescent et
l’adulte, ils sont plus complexes, utilisent des systèmes de significations de plus en plus
codés. De plus, le jeu est un mode de socialisation essentiel au développement de l’enfant. Il
revêt des formes différentes selon les cultures mais, dans tous les cas, la ligne de démarcation
entre le ludique et le sérieux, voire le grave, reste floue.
Le jeu accompagne la vie humaine à tous les âges et sous toutes les latitudes. Quand il
manque – dans la dépression ou la maladie par exemple – quelque chose manque à la vie, ou
peut-être que la vie elle-même alors manque toute entière : des contraintes trop fortes pèsent
sur la personne et l’empêchent d’exercer le libre jeu de l’imaginaire. Un espace gratuit de
rêverie fait alors défaut.
On ne sait pas trop quand commence et quand finit le registre symbolique du jeu. Des
découvertes ludiques du nourrisson avec son corps et le corps de l’autre, aux compétions des
adultes qui ressemble parfois à un théâtre, il y a des mondes. Mais une parenté originelle
existe entre les jeux malgré leur diversité et leur complexité. Pendant longtemps, le jeu a été
étudié comme une activité secondaire de distraction – s’opposant au sérieux de la vie. Or,
comme nous l’avons vu, il est évident aujourd’hui qu’à travers lui c’est la possibilité de vivre
qui se constitue.
Je rejoins Winnicott lorsqu’il dit que « ce qui importe avant tout c’est de montrer que jouer
c’est une expérience : toujours une expérience créative … une forme fondamentale de Vie ».
L’enjeu du jeu pour le « je » est énorme. Et, dans les lieux d’accueil de la petite enfance tel
que la crèche parentale, les adultes ont un rôle essentiel à tenir pour offrir aux enfants le cadre
et le matériel nécessaires pour que cette expérience puisse avoir lieu et de la manière la plus
riche possible.
« L’enfant n’est pas un problème ! Bien au contraire, il porte en lui les solutions que nous
cherchons. Mettons-nous à l’école de l’enfant, qui a tant à nous apprendre ! Loin de tout
laxisme, il s’agit là d’une ascèse exigeante : se mettre à l’écoute de la petite voix intérieure
qui nous parle dans chaque enfant. Pour mieux trouver des issues aux impasses de notre
monde actuel, si fier de lui et pourtant enferré dans tant de pièges et de violences. » 14
Nous apprenons des autres, de nos expériences, des circonstances, de notre plein gré ou par
hasard… Apprendre ne constitue pas seulement le commandement principale de l’humanité,
c’est aussi une partie intégrante de l’être humain. Echanger, jouer, communiquer et recevoir
des connaissances, à tous les niveaux de notre condition humaine, constitue l’essence même
de l’évolution.
Alors laissons à l’enfant le temps de grandir, laissons lui la part de jeux dont il a besoin.
Aujourd’hui, la tendance serait de cadrer toutes les activités de l’enfant, à mon avis c’est une
erreur. Quels adultes deviendront nos enfants, si ils n’ont pas le temps et l’espace nécessaire
pour se développer, construire leur identité, leur personnalité ?
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14
Renilde Montessori, Education sans frontière