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Françoise Darses
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SUMMARY
In this paper, we analyse the discussions that are held collectively between
various stakeholders in manufacturing (operators, foremen, etc.) during a mee-
ting aimed at redesigning production line equipment. Our analysis focuses on the
argumentation dimension of these exchanges. The meeting follows a prescribed
approach whereby the problem-solving process is divided into two phases : one is
devoted to problem analysis and the other is devoted to solution search. First, we
divided the meeting into episodes which had clearly delimited opening and clo-
sing statements. Then, we extracted the different components of argumentation.
In this situation, arguments can be criteria, a description of operating modes, a
description of current devices, or a simulation of possible solutions. Our results
show that a great majority of arguments are criteria. There is a greater necessity
for the use of « non-criteria » arguments during the problem analysis phase, espe-
cially for arguments which relate to the operating modes. During the solution
search phase, the use of criteria is complemented with other types of argument in
equal proportion. We also studied how arguments are combined within episodes.
During the solution search phase, combinations of most criteria are made ; these
are then articulated with other types of argument. During the problem analysis
phase, one fourth of the combinations give more importance to other types of
argument. We argue that this highlights a change in the purpose of the argu-
mentation process. During problem analysis, argumentation is developed in
order to clarify the problem and establish a common ground. To meet this objec-
tive, criteria must be complemented by arguments that relate more to the descrip-
tion of the context. During the solution search phase, the objective is to push
towards a given solution. This fosters a dialectic function for argumentation.
Criteria would be better adapted to this purpose. Our results contribute to
research into collective decision-making and argumentation tools.
Key words : Collaborative design, Argumentation, Criteria, Integration of viewpoints.
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I. UN BESOIN CROISSANT
I. D’ENVIRONNEMENTS COOPÉRATIFS MÉDIATISÉS
I. SOUTENANT LES ÉCHANGES ARGUMENTATIFS
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1. Diversement qualifiée selon les structures organisationnelles choisies et la taille des entre-
prises – conception matricielle, ingénierie concourante, conception intégrée, etc.
2. Le Kanban est la méthode la plus connue ; pour une présentation, voir Molet (1998).
3. Ce sont par exemple les gestionnaires de contenu (qui offrent un accès partagé aux don-
nées et aux documents relatifs au produit ou au projet), les systèmes de gestion de données techni-
ques (SGDT) qui se présentent sous la forme de bases de données métier accessibles par des portails
d’entreprise ou les workflows qui organisent et contrôlent le séquencement et l’enchaînement des
tâches. Pour une présentation voir Lonchamp (2003).
L’argumentation en conception collective 319
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communications distantes ou de la limitation des fonctionnalités des
outils de coopération asynchrone, les actuels environnements coopératifs
restreignent fortement, voire interdisent, les discussions relatives au projet
de conception (Détienne, Boujut, & Hohmann, 2004 ; Zacklad, Lewko-
wicz, Boujut, Darses, & Détienne, 2003).
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Dès les années 1970, Rittel (1972, cité par Buckingam Shum, Mac
Lean, Bellotti, & Hammond, 1997) a constaté l’importance des processus
argumentatifs dans les activités de conception d’artefacts. À sa suite, de
nombreux auteurs (Buckingham Shum & Hammond, 1994 ; Fischer,
Lemke, McCall, & Morch, 1996 ; Mac Lean, Young, Bellotti, & Moran,
1996 ; Moran & Carroll, 1996 ; Trousse & Christiaans, 1996 ; Olson
& Olson, 1992 ; Stumpf & McDonnell, 2002) ont montré que l’argu-
mentation endosse de multiples fonctions qui sont centrales dans le pro-
cessus de conception. Ils soulignent qu’argumenter, c’est un moyen de
comprendre le problème, d’analyser l’espace de conception, de construire
des hypothèses communes, de développer un processus de confrontation
de points de vue et de délibération aboutissant à la prise de décision. C’est
au travers de l’argumentation que sont examinées les propositions de
solutions, qu’elles sont évaluées et que des alternatives sont proposées,
que des buts sont définis. Les explications et les justifications qui sont
fournies au cours de l’argumentation (Baker, 1996, 1998, 2000 ; Kar-
senty, 1999, 2000) servent à construire un contexte cognitif partagé parce
qu’elles clarifient les hypothèses de travail, les propriétés des objets du
domaine, les contraintes liées à chaque métier de la conception et les
objectifs de chacun. Les points de vue dissemblables sont examinés sur la
base de processus argumentatifs et c’est ainsi que les coconcepteurs
convergent progressivement vers une solution.
320 F. Darses
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Ces principes ont conduit à développer des outils d’aide destinés à
soutenir le processus d’argumentation en conception. Les plus connus,
regroupés dans le courant de la logique de conception (traduit de design
rationale), sont présentés dans l’ouvrage emblématique coordonné par
Moran et Carroll (1996). Ces systèmes argumentatifs visent deux objec-
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III. UNE APPROCHE RHÉTORIQUE
III. DE L’ARGUMENTATION
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Pourtant, un groupe de coconcepteurs se livre aussi à une activité de négo-
ciation au cours de laquelle on avance des opinions plus ou moins stabili-
sées (déterminées par un point de vue métier ou par une position statu-
taire, par exemple) pour asseoir sa position (Cahour, 2002 ; Cross
& Clayburn-Cross, 1996). Cette approche qui apparente l’argumentation
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IV. POSITION DU PROBLÈME ET OBJECTIFS
loppés les outils d’aide à la conception, les arguments sont les contraintes
et les critères pour et contre, généralement exprimés à un niveau abstrait
(par exemple : sécurité, fiabilité). Les autres formes argumentatives utili-
sées au cours des délibérations des coconcepteurs, qui sont en rapport
direct avec le contexte de l’activité et les objectifs d’action des protagonis-
tes (conformément à l’approche rhétorique présentée ci-dessus) et qui
relatent des témoignages, des retours d’expérience ou des faits, ne sont
usuellement pas rapportées dans ces modèles. Ce parti pris se justifie par
le souci d’une simplification de la représentation des arguments, visant à
rendre facilement accessible et utilisable ces graphes construits à des fins
de capitalisation des connaissances (Karsenty, 2001 b).
On peut cependant s’interroger sur la pertinence de cette simplifica-
tion lorsque l’outil argumentatif est destiné à aider la prise de décision col-
lective. Là, il peut être nécessaire de préserver la diversité des formes
argumentatives, dont l’agencement et la combinaison peuvent jouer un
rôle important dans la dynamique de convergence des points de vue.
L’étude que nous présentons ici a pour objectif d’évaluer la part que pren-
nent ces diverses formes argumentatives dans un débat de conception,
comparativement aux critères. On analysera leur nature et on examinera
comment les arguments sont combinés pour étayer les positions adoptées
par les concepteurs au cours d’une réunion de conception.
Dans cet article, nous abordons également l’effet d’un facteur peu étu-
dié, qui est la phase de résolution du problème. En effet, dans la situation que
nous avons étudiée, les cadres de l’entreprise avaient imposé aux groupes
de reconception de suivre une méthode de résolution de problème obli-
geant à procéder à l’analyse du problème avant de commencer la recherche
de solution. Cette dichotomie entre les deux types d’activité est une pres-
cription classique en entreprise, qu’on a discutée dans Darses (1997). Or
à notre connaissance, l’effet de ce facteur « phase de résolution du pro-
blème » sur le processus argumentatif n’a jamais été examiné. Nous fai-
sons l’hypothèse que le développement de l’argumentation sera affecté par
le type d’activité cognitive suscité par l’une ou l’autre phase de résolution.
Nous vérifierons l’existence de cet effet.
V. TERRAIN D’ÉTUDE
L’entreprise où nous avons réalisé notre étude est filiale d’un grand
groupe français de la métallurgie. Elle fabrique des tubes soudés inoxy-
dables à destination de l’automobile, de la chimie, de l’agroalimentaire,
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du mobilier médical, de la navigation de plaisance et de l’architecture de
bâtiment. La fabrication compte environ 60 personnes, dont une quaran-
taine d’opérateurs qui travaillent en (3 × 8), plusieurs contremaîtres, un
chef d’atelier, deux agents des méthodes et des outilleurs. La fabrication
de tubes se réalise sur des lignes TIG (du nom du procédé de soudure),
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en trois phases, dont seules les deux premières ont été étudiées du point
de vue de l’argumentation :
• L’analyse du problème est guidée par l’application de la méthode
QQOQCC, qui impose de répondre aux questions « Qui, Quoi, Où,
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faite (sur la base des transcriptions) afin de lever quelques incertitudes
sur certains éléments techniques débattus. La transcription in extenso de
la réunion a fourni un corpus de 65 pages, dont le codage complet a été
établi en s’appuyant sur la méthodologie d’analyse de protocoles de
conception COMET. Cette méthodologie, décrite en détail dans Falzon et
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VI . 3. DÉFINITION DES ARGUMENTS
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1. Cette méthode, mise en œuvre avec C. Sauvagnac, a permis d’obtenir une robustesse satis-
faisante du codage. Le taux d’accord interjuges mesuré par le coefficient Kappa n’a cependant pas
été calculé.
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TABLEAU 1
Catégorisation des critères selon deux dimensions orthogonales :
le niveau d’abstraction auquel l’artefact est évoqué
et le registre de référence auquel appartient le critère
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NIVEAU D’ABSTRACTION
Conduite Le délai va être long Ça, ça fait beaucoup Si tu passes par les
de projet de travaux travaux neufs, on
engendrés n’aura toujours
rien dans un
REGISTRE DE RÉFÉRENCE
mois
Process L’efficacité Mettre du jeu Avec une seule
des billes, ça doit au galet c’est polisseuse, on
pas être terrible faisable si on garde peut pas nettoyer
un réglage un cordon mal
corroyé
Modes L’intérêt, c’est la Garder les vis Là y a plus à viser
opératoires rapidité de dépôt accessibles tous les trous
Conditions L’important, Travailler en même Ça n’empêche pas
de travail c’est la sécurité temps sur les qu’il faudra
points entrants toujours porter
l’axe
Option Refabriquer les têtes Penser à la hauteur Si y a pas d’espace
de solution de dressage sur un du bac et si la campagne
principe de est longue, alors
montage simple la graisse s’accu-
mulera et la
flotte coulera
devant
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— Description de procédures et de modes opératoires : Ces arguments sont
fondés sur l’autorité que confère la compétence de l’opérateur qui
connaît les « bonnes pratiques » opératoires. Ils relatent également des
expériences partagées par tous au sujet des modes opératoires de
démontage/montage des outillages. Enfin, ces arguments décrivent des
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TABLEAU 2
Transcription d’un épisode et codage correspondant.
La longueur de cet épisode est de 12 composants,
formés d’un énoncé d’ouverture, d’un énoncé de clôture
et de 10 arguments
Transcription and coding of an episode.
This episode is 12 components lenght. It is made of an opening statement,
a closing statement and 10 arguments
Transcription Codage
Agent des Méthodes : Bon, là, le problème, c’est le Formulation de but [ouverture]
parallélisme des axes
Chef Atelier : [Le problème, c’est qu’]on est obligé Description 1 d’une procédure
de régler le parallélisme
Chef Atelier (suite) : ... comme il y a des lumières Description 1 d’un dispositif
dans les chapes...
Agent Méthodes : Faudrait que chaque extrémité Description 2 d’un dispositif
d’axe soit à chaque tour
Chef Atelier : Parce qu’il y a la chape, la lumière Description 3 d’un dispositif
qui est ici avec la vis ici en bout. Et puis l’axe, il
se trimbale là-dedans. Alors le problème c’est
qu’il ne va qu’en butée, et donc quand le tube
vient bouter le galet, l’axe vient en butée contre
la vis
Opérateur : Il est toujours proche de son extrémité Description 4 d’un dispositif
de lumière, quand il est réglé
Opérateur (suite) : ... Mais disons qu’il n’y a pas Critère 1
beaucoup de tolérance
Opérateur (suite) : Il y a aussi que, quand on passe Description 2 d’une procédure
l’axe, à cause des épaulements, il faut être sûr
qu’il passe sans raccrocher la vis
Chef Atelier : Bon, le problème, c’est que le critère Critère 2
de réalisation de ça, c’est l’économie masquée
Chef Atelier (suite) : ... et économiser l’acier [...] Critère 3
Opérateur : Il est quand même nécessaire de Critère 4
conserver un réglage, parce que...
Agent Méthodes : Donc on va mettre « axe de... » Synthèse [clôture]
330 F. Darses
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Agent Méthodes] Le problème, c’est que // [Critère 1 - Opérateur] il n’y
a pas de guidage de l’axe // [Critère 2 - Opérateur] il faut tout faire à
l’œil // [Mode opératoire 1 - Opérateur] il faut aligner le galet, il faut
mettre en place une bague, enfin je sais pas comment on peut appeler
ça // [Mode opératoire 2 - Opérateur] il y a tout un tas de choses qui
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VII. RÉSULTATS
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posant argumentatif (critère ou autre composant argumentatif) et ceux
qui n’en incluent aucun. On a nommé les premiers « épisodes argumenta-
tifs » puisqu’ils comportent au moins un argument, par opposition aux
seconds qui sont dits « non argumentatifs ».
On dénombre 34 épisodes argumentatifs et 4 épisodes non argumen-
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VII . 2. LONGUEUR ET DENSITÉ ARGUMENTATIVE DES ÉPISODES
EN FONCTION DE LA PHASE DE RÉSOLUTION
TABLEAU 3
Comparaison des épisodes – décrits selon leur longueur,
le nombre moyen d’arguments et leur densité argumentative
en fonction de la phase de résolution du problème
Comparison of the episodes – described in terms of length,
mean number of arguments and argumentative density
according to the problem solving phase
Longueur moyenne
d’un épisode (L) Nombre moyen Densité
(en nombre d’arguments (A) argumentative (A/L)
Phase de résolution de composants) par épisode par épisode (en %)
On constate que les épisodes sont comparables les uns aux autres du
point de vue de leur longueur, qu’ils soient construits pour analyser le
problème ou pour construire une solution (différence non significative,
test de Student : t(32) = 0,73 ; p > .47).
Concernant la densité argumentative, on note que le recours à des
composants argumentatifs est plus important durant la recherche de solu-
tion (trois quarts des composants d’un épisode sont argumentatifs) que
lors de l’analyse du problème (deux tiers des composants d’un épisode
sont argumentatifs). Mais cet effet de la phase de résolution du problème
sur la densité argumentative, manifeste au cours de la réunion étudiée, n’a
pu être généralisé aux autres réunions de même type menées durant les
deux années du processus de reconception d’outillages (test de Student
non significatif : t(32) = 1,48 ; p > .14).
Dans cette section, nous comparons l’utilisation qui a été faite des dif-
férents arguments à l’intérieur de chaque épisode, en examinant l’effet de
la phase de résolution du problème. Vu l’importance donnée aux critères
L’argumentation en conception collective 333
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par les recherches du domaine, on souhaite notamment évaluer la part
d’utilisation de ce type de composant argumentatif, relativement aux
autres arguments.
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que la dichotomie introduite par la méthodologie entre deux phases suc-
cessives de résolution contrecarre l’intrication spontanée qui s’opère
cognitivement entre analyse et évaluation du problème/génération
de solution. Cela corrobore de nombreuses études cognitives du proces-
sus de conception (voir par exemple Darses, 1997 ; Visser, Darses,
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res / autres arguments et avons classé les épisodes en quatre classes en
fonction de ce ratio :
— classe A : épisodes dans lesquels les critères sont absents, les seuls
arguments utilisés étant ceux décrits en VI . 3 . B ;
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Durant cette dernière phase de résolution du problème, la proportion
d’épisodes qui sont constitués uniquement de critères (classe D) n’est pas
négligeable puisqu’elle représente un épisode sur cinq. Dans ces cas, les
coconcepteurs argumentent en énonçant une succession de critères
qui s’enchaînent les uns aux autres, comme dans l’exemple suivant (en
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italique) :
« [Chef Atelier] On a un gros tube mince, non ? On risque pas de le défor-
mer ? // [Opérateur 1] On le déforme si on a besoin de le corriger fort, on le
déforme de toute manière, hein ? // [Opérateur 2] Là, tu peux plus calibrer
avec ça ? // [Opérateur 1] Ah ben non, on peut pas le calibrer, j’ai bien com-
pris. // [Techn. Méthodes] Mais c’est tranquille aussi, plus de tuyaux à mon-
ter. // [Opérateur 1] Oui, mais c’est pas dit que ça serait très pratique,
hein ? // [Techn. Méthodes] Non ! Non ! Mais, ça n’empêche qu’on peut
faire des essais là-dessus et puis... // [Opérateur 2] Ouais, ça vaut le coup
d’essayer. // »
Pour ce qui concerne cette réunion, les arguments autres que les critè-
res (descriptions de procédures, de dispositifs et de solutions futures)
semblent mobilisés comme des « renforçateurs » plutôt que comme des
éléments centraux de l’argumentation, lesquels sont les critères. On doit
cependant nuancer cette interprétation, notamment pour les activités
d’analyse du problème. Durant cette activité, il y a tout de même dans la
réunion étudiée un quart des épisodes qui sont construits sur une base
d’arguments « non-critères ». Analyser le problème, c’est donc faire plus
qu’établir une liste des critères qui devront être satisfaits au cours de la
conception. C’est aussi formuler des arguments qui, par leur nature, par-
ticipent à construire collectivement le contexte de la tâche, l’environne-
ment matériel et les paramètres de la situation de travail dans lequel le
processus de conception prend place. Ces arguments-là vont permettre à
chacun d’expliquer son point de vue, comme l’ont montré Baker (1998)
et Karsenty (2000), mais aussi de l’expliciter. Nous faisons l’hypothèse
que les critères répondent incomplètement à ces objectifs de clarification
du problème et d’établissement d’un référentiel commun qui caractérisent
cette phase de conception. Ils ne sont pas les meilleurs arguments qui per-
mettent à tous les acteurs de la décision de partager, à l’issue de cette
phase d’analyse, une vision de l’état du problème à résoudre. Les argu-
ments autres que les critères procèdent donc d’un objectif coopératif, qui
prévaut sur un objectif dialectique.
En revanche, nos résultats laissent penser que, durant le travail de
recherche de solution, la formulation de critères est le mécanisme préfé-
rentiellement choisi pour soutenir l’argumentation. Les participants pro-
cèdent en accumulant une grande diversité de « raisons », énoncées sous
la forme de critères complémentaires et variés. Cette accumulation serait
utilisée comme le moyen de renforcer le point de vue avancé, dans
l’objectif d’orienter les décisions. Cette manière d’argumenter serait
développée dans une visée dialectique, qui primerait sur la visée coopéra-
tive. L’objectif n’est plus d’établir une base commune de représentation
mais de remporter l’adhésion des partenaires sur la sélection des
solutions.
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VII . 4 . B. Le rôle des locuteurs dans la combinaison des arguments
Dans cette section, on rapporte comment on a exploré l’effet éven-
tuel de la phase de résolution du problème sur la production (indivi-
duelle ou croisée) des combinaisons d’arguments. Notre hypothèse,
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fondée sur une perception intuitive des réunions, était que les arguments
seraient plus souvent agencés par le même acteur lorsqu’il s’agit
d’analyser le problème, tandis qu’ils seraient plus souvent combinés
entre eux par des locuteurs différents au cours de la recherche de solu-
tion. L’idée est que cette dernière phase, par sa fonction dialectique,
susciterait des oppositions, des désaccords ou des alliances qui s’ex-
primeraient par des chassés-croisés d’arguments, tandis que l’analyse du
problème prédisposerait, par sa fonction coopérative, à combiner indivi-
duellement les arguments afin d’exposer au mieux les divers aspects
d’un problème.
Quelques difficultés méthodologiques rendent cette analyse difficile,
notamment du fait que les combinaisons d’arguments peuvent être parfois
très longues, associant successivement quatre ou cinq arguments, voire
plus comme dans l’exemple suivant : « [Critère 1 - Opérateur 1] Et là, ça
n’empêche pas qu’il faudra toujours le porter. // [Critère 2 - Opérateur 2]
Oui, mais il n’y a plus rien à viser. // [Procédure 1 - Opérateur 2] Là il faut
viser les entretoises, les roulements et tout. // »
Pour limiter ces difficultés, nous avons choisi de ne traiter dans cette
étape exploratoire que les combinaisons formées de deux arguments
appartenant à des types distincts. Ainsi, on n’analysera pas les combinai-
sons de critères [Critère 1] + [Critère 2]. Dans l’exemple précédent, on
retiendra donc seulement l’agencement [Critère 2] + [Procédure 1].
Nous avons dénombré toutes les combinaisons formées de deux argu-
ments non similaires, en précisant si les deux arguments étaient exprimés
par la même personne ou bien par deux interlocuteurs successifs. Ce
dénombrement ne tient pas compte des formulations de composants
argumentatifs qui seraient isolées dans l’épisode. Compte tenu des faibles
effectifs, il n’a pas été possible de valider inférentiellement la portée de ces
résultats.
Du point de vue des combinaisons d’arguments, les résultats (fig. 4)
prolongent ceux présentés dans les sections précédentes. Dans la réunion
étudiée, la combinaison préférée pour analyser le problème est [Cri-
tère] + [Procédure]. Les autres combinaisons sont quasiment inexistan-
tes. Lors de la recherche de solution, les combinaisons d’arguments sont
plus diverses, bien que l’avantage reste à [Critère] + [Procédure]. On
retrouve l’importance des représentations associées aux dispositifs utilisés
dans l’environnement de travail, rapportée en VII . 3, au travers de la
combinaison [Critère] + [Dispositif actuel] qui est beaucoup utilisée lors
de la recherche d’une solution alors qu’elle l’est très peu en analyse du
problème.
Du point de vue de la construction – individuelle versus croisée – de
ces combinaisons, on peut difficilement interpréter nos résultats même
d’un simple point de vue descriptif. La combinaison [Procédure] + [Dis-
positif actuel] est, dans cette réunion, formulée préférentiellement par le
L’argumentation en conception collective 339
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même locuteur : pour convaincre son auditoire, le locuteur associe la
description du mode opératoire à celle de l’outillage auquel il s’applique.
L’avantage global donné aux formulations croisées est si léger qu’on
peut difficilement en dégager une tendance concernant l’effet de la
phase de résolution du problème sur le mode de production (indivi-
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VII . 5. SYNTHÈSE
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TABLEAU 4
Synthèse des mécanismes argumentatifs mobilisés dans la réunion étudiée,
en fonction de la phase de résolution du problème.
Un astérisque signale les résultats qui ont pu être généralisés
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*Même longueur
*Même densité argumentative
Les résultats que nous avons présentés dans cette étude confirment
que l’activité collective de conception s’appuie sur un processus
d’argumentation omniprésent. Cela rejoint des études faites dans d’autres
L’argumentation en conception collective 341
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situations de résolution de problème, comme celle de Quignard (2001)
qui évaluait à 84 % de l’ensemble des interactions la part argumentative
de la résolution d’un problème de sciences physiques réalisée à distance.
Ce processus d’argumentation, et les délibérations collectives qui
l’accompagnent, sont à la croisée de multiples facteurs (psychosociaux,
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VIII . 1. TYPES
D’ARGUMENTS UTILISÉS
DURANT LA RÉUNION DE RECONCEPTION
Nous avons identifié la diversité des arguments mobilisés par les parti-
cipants d’une réunion de conception : au côté des critères sont utilisés
divers types d’arguments qui se rapportent au contexte opérationnel de la
tâche, à son environnement matériel et aux outils imaginés pour le futur.
Le recours à ces arguments-là s’inscrit dans un procédé de cadrage du réel
et de mise en contexte, décrit en III . 2. De ce fait, leur nature dépendra de
la classe de situations et du contexte spécifique du problème. Cette diver-
sité des formes argumentatives n’a certes jamais été réfutée par les travaux
réalisés autour des outils d’aide à l’argumentation (§ II) mais elle n’a peut-
être pas été considérée à sa juste mesure, l’accent étant mis sur la formula-
tion explicite des critères pro et cons. Un des intérêts de notre étude est
d’avoir examiné tous les types d’arguments sur lesquels se fonde le pro-
cessus de convergence vers la solution.
À cet égard, nous regrettions en IV que les graphes argumentatifs utili-
sés dans les modèles d’argumentation accordent trop d’importance aux
critères et sous-estiment l’importance des autres arguments, cela pouvant
conduire à une simplification excessive du processus décisionnel. Nos
résultats ne nous donnent pas tout à fait raison puisqu’ils confirment la
place centrale que tiennent les critères dans le processus argumentatif. Ce
sont non seulement les arguments les plus utilisés, mais aussi ceux autour
desquels se construisent presque toutes les combinaisons d’arguments.
Toutefois, notre appréciation de l’importance des critères s’appuie sur
une acception élargie de cette catégorie d’argument. Elle est usuellement
restreinte à la formulation abstraite et générique des propriétés de
l’artefact. Or nous y avons inclus toutes les formulations de référents éva-
luatifs, même quand elles s’exprimaient à des niveaux d’abstraction variés
(§ VI . 3). L’élargissement de cette acception renforce la prééminence des
critères comme arguments.
Ces résultats contribuent à préciser la notion de point de vue. Un
point de vue n’est pas seulement une combinaison de critères, c’est une
construction argumentative qui associe et qui agence des représentations
complémentaires : des critères formulés à divers niveaux d’abstraction et
342 F. Darses
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sur des registres de référence différents, mais aussi des arguments « non-
critères » se rapportant au contexte de la situation (ici, procédures induites
par les modes opératoires ou descriptions de dispositifs utilisés).
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utilisés, et corrélativement, par les objectifs de l’argumentation. Un quart
des échanges argumentatifs qui soutiennent la phase d’analyse du pro-
blème sont fondés sur des arguments parmi lesquels les critères sont
minoritaires. Ce sont principalement les arguments décrivant les procédu-
res de travail et les modes opératoires qui sont mobilisés durant cette
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phase, articulés autour des critères. Cela témoigne de la volonté des locu-
teurs de fournir des explications détaillées sur les diverses dimensions du
problème. Nous avons estimé que l’argumentation se développe ici dans
un objectif coopératif, visant à établir un référentiel commun.
Le moindre recours (voire l’absence, dans un épisode sur cinq) à cette
catégorie d’arguments que l’on constate en phase de recherche de solution
révèle, selon nous, un changement d’objectif dans la dynamique décision-
nelle du groupe. Le processus argumentatif se concrétise par une accumu-
lation de critères et un agencement de ces critères entre eux. Le recours
aux autres types d’arguments diminue, proportionnellement à l’ensemble
des arguments utilisés. Selon nous, cela dénote d’un abandon de la visée
coopérative pour une visée dialectique, développée pour asseoir une posi-
tion et défendre (ou attaquer) un choix de conception.
Il serait particulièrement intéressant de tester l’invariance de ce
contraste de tonalité argumentative entre les deux phases de résolution du
problème aux réunions similaires à celle que nous avons étudiée, ainsi
qu’à d’autres situations de résolution collective de problème différant par
leur méthode de résolution du problème. Si elle était avérée, les outils
d’aide à l’argumentation pourraient encourager la formulation de certains
types d’arguments plutôt que d’autres en fonction de la phase (ou de
l’activité) de résolution de problème.
Aujourd’hui, les activités argumentatives sont pour la plupart menées
en face à face. Elles sont contrôlées par des régulations collectives ainsi
que par les procédures décisionnelles prescrites par l’organisation. Mais
l’accroissement des organisations en entreprise étendue incite de plus en
plus à mener ces débats à distance, médiatisés par des outils collaboratifs
souvent peu aptes à soutenir les interactions argumentatives. L’analyse
cognitive que nous avons proposée dans cet article contribue aux efforts
de recherche qui sont développés pour assister ces nouvelles situations de
travail.
REMERCIEMENTS
L’auteur remercie Catherine Sauvagnac qui a participé à la méthode du
double codage décrite en section VI . 3, ainsi que Marion Wolff pour ses indica-
tions sur les traitements statistiques (dont la responsabilité de l’interprétation
incombe à l’auteur). Ce texte a également bénéficié des stimulants commentaires
de Janine Rogalski et d’un expert anonyme.
344 F. Darses
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BIBLIOGRAHIE
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RÉSUMÉ
Cet article présente une analyse des échanges argumentatifs menés par des
concepteurs réunis pour reconcevoir des outillages en métallurgie. Nous avons
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