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Bibliothèque
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Tangente Hors-série n° 51
les mathématiques
des assurances
Tous concernés, assurément !
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les mathématiques
de l'assurance
Mathématiques des assurances : les mal aimées ?
Analyse, probabilités, statistiques :
pour comprendre l'assurance
Des actuaires et des journaux
Couuerture accident
Les particuliers essaient de mettre leurs proches à
l'abri, les entreprises tentent de se prémunir contre
les risques financiers ou ... climatiques ! Comment les
assureurs évaluent-ils les primes associées à chaque
type de couverture ?
Nouvelle : À l'Institut
intergalactique, on assure !
En bref
5,11,22,34,39,52,57,67,107,113,117, 137,141
Notes de lecture
Problèmes
Solutions
(suite du sommaire au verso)
Hors-série n°57. Les maths de l'as-
les horizons nouueaux
Notre société est de plus en plus exigeante en matière
de couverture de risques, et de nouveaux champs
d'application des assurances apparaissent
régulièrement. Les produits classiques doivent
évoluer vers plus de flexibilité.
les retraites
Le vieillissement des populations est un fait. Les
systèmes de retraite doivent évoluer pour équilibrer
cotisations des actifs et paiements des retraités, à qui
il faut garantir une fin de vie digne.
Le cas belge
En Belgique comme en France, la couve11ure « sécurité sociale » diffère selon le statut de chacun.
Les travailleurs salariés sont assurés en matière de maladie et d'invalidité, d'allocations familiales,
cle chômage, de pension de retraite, de vacances annuelles, d'accidents du travail et de maladies
professionnelles. Chaque mois, employeurs et travailleurs versent des cotisations clans les caisses de
la Sécurité sociale. L'État intervient par le biais d'un subside. L'Office national de sécurité sociale
(ONSS) répartit ces montants entre les établissements publics chargés de redistribuer l'argent entre les
différentes caisses de paiement que sont les mutualités, les syndicats, et les fonds cl ' allocations fami-
liales. L'assurance soins de santé et indemnités (ASSI), aussi appelée « assurance obligatoire», est la
branche de la Sécurité sociale qui regroupe le remboursement des soins de santé et l'indemnisation de
l'incapacité de travail ou de l'invalidité. Les indépendants ont un régime propre pour lequel ils paient
des cotisations calculées en fonction de leur revenu . L'Institut national d'assurance sociale pour travail-
leurs indépendants (INASTI) chapeaute l'ensemble, perçoit l'argent et le répartit. Les travailleurs des
services publics ont leur propre régime de sécurité sociale, mais mêmes droits que les salariés du privé.
peuvent aider à donner du sens au x dans le temps. Ces contrats sont géné-
mathématiques . Alors ? Pourquoi ne ralement conclus pour 20 ou 30 ans,
pas les diffuser plus largement ? parfois plus.
En gros, deux principaux champs d ' ap- Les mathématiques de l' assurance vie
plication sont couverts par les assureurs : doivent do nc intégre r simultané ment :
- des contrats d 'assurances vie, - des aspects financiers à long terme,
- des contrats couvrant des événe- - des aspects viagers.
ments ponctuels, regroupés sous I' ap- Ces deux éléments , soumis à des
pellation I.A.R.D. pour « Incendies , vari ati ons diffi c ile me nt prév isibles ,
Accidents et Risques Divers ». nécess ite nt le reco urs au calcul des
probabilités . Des pans entiers de ce
Ces de ux branches sont structurel- domaine des mathématiques se sont
lement différe ntes et demandent des développés et se développent encore
outils mathé matiques distincts. M ais grâce aux nécessités actuarielles. Il a
là ne se limite pas la manne des appli- fallu construire de nouveaux modèles
cati ons et des champs de recherche. financiers dont la variété et la com-
Les organismes assureurs ont des obli- plexité ont atteint des sommets depuis
gations strictes et une utilité sociale quatre décennies. Les théories de la
indéniabl e qui leur interdit la faillite capitali sation et de l'actualisation sto-
qui serait une catastrophe pour des chastiques sont nées de cette nécessité
millions de citoyens. Il faut donc déve- dans les années 1980 , en utili sant et en
lopper et mettre en application des développant la notio n d ' intégrale sto-
méthodes efficaces et innovantes de chastique prévisible, tout en affinant le
gestion dans un environnement écono- concept de semi-martingale qui com-
mique mou vant et instabl e. bine et unifie mathématiques discrètes
et continues.
les multiples facettes Mai s certains modèles plus simples
de l'assurance uie pourraient intégrer les programmes de
cours du lycée (vo ir encadré et article
Les contrats d'assurance vie couvrent page 12) .
de ux types de risque ; celui de survie
et celui de décès. Contrats IHRD :
On constate que l ' appellation cou- les mauuais conducteurs existent !
rante fait état de la plu s agréable de
ces éventualités . Ces contrats garan- À l'encontre des contrats vi agers qui
ti ssent le paiement de capitaux ou de s'étalent sur des décennies, les contrats
rentes soit à l' assuré lui-même, comme cou vrant des faits de nature acciden-
c'est souvent le cas pour la couverture telle se situent dan s le court terme. La
« vie », soit à ses ayant droits , ce qui plupart sont renouvelables annuelle-
est touj ours le cas pour la couverture ment. Les aspects fin anciers en sont
« décès». donc absents. Mais ici aussi les cher-
Po ur obtenir la garantie du verseme nt cheurs et les didacticiens sont gâtés et
de ces capitaux, les assurés s' engagent les citoyens concernés. Les accidents,
à payer soit une prime unique, soit incendies et catastrophes sont heure u-
une succession de primes échelonnées sement des événe ments rares. Ce type
application adaptées.
Loin de ces distributions élaborées, la
simple observation de statistiques d 'ac-
cidents d ' auto fournit une utilisation
des distributions binomiales en univers
réel. Dans la majorité des manuels sco-
laires, les applications proposées pour
la binomiale sont aitificielles , ou alors
elles usent et abusent du théorème
de Moivre-Laplace*. Car lors de la
réalisation d ' un grand nombre d'ex-
périences identiques et indépendantes, sinistres survenus dans le passé et dont
les calculs relatifs aux probabilités de l' issue est le plus souvent différée pour
cette distribution tendent rapidement des raisons diverses. Là encore, des
vers une indétermination. méthodes originales doivent être mises
Mais en observant des assurés tous les en place pour garantir le paiement des
jours et en comptabilisant par exemple sommes dues aux assurés comme aux
les jours avec et sans accident d'auto, tiers.
on vérifie que seules quelques proba-
bilités doivent être explicitement cal- Des méthodes de gestion
culées et qu'elles peuvent l'être sans pour [r)assurer les assureurs
recours aux théorèmes limites. Les
conclusions qui découlent de ce travail Au -delà de la sophistication des
sont parlantes du point de vue socio- contrats, 1' un des principaux pro-
logique : il y a de bons et de moins blèmes académiques en actuariat est la
bons conducteurs. Cette constatation mise en place de modèles d' estimation
justifie la mise en place de systèmes de de la probabilité de ruine d'une com-
tarification tenant compte du passé de pagnie, conditionnellement à sa poli-
chaque conducteur. On peut aussi tes- tique de tarification. Cette probabilité
ter l'efficacité de ces systèmes de tari- n'est évidemment jamais strictement
fications a posteriori et vérifier qu'elle nulle : il n'est pas totalement impos-
coïncide avec la notion mathématique sible, par exemple, que presque tous
cl ' élasticité. les assurés d'une même compagnie
décèdent en un laps de temps fort
Si les contrats « accidents » sont de court; il n'est pas non plus impossible
courte durée, il n' en est pas de même qu ' un grand nombre d'automobilistes
des conséquences des sinistres qu ' ils de la même compagnie soient tous
sont censés couvrir. Il convient donc responsables d'accidents fort coûteux
de gérer les provisions visant à couvrir la même année. Mais ces événements
les règlements à venir des différents sont fort peu probables.
Hnalyse, probabilités,
statistiques
pour comprendre l'assurance
Les programmes du secondaire n'incluent que rarement des
applications dans le domaine de l'assurance. C'est regrettable,
car de telles applications donnent du sens aux mathématiques,
tout en participant à l'éducation citoyenne de chacun !
L
es mathématiques de la finance et
des assurances offrent tout un et logarithmes
panel d'applications concrètes de
nombreux points des programmes. On peut Comment intéresser les jeunes aux mathé-
y trou ver des études de fonctions , des matiques ? En leur parlant d ' argent! Et
illustrations interprétables de l'algèbre d ' argent dans la durée. Est-il préférable
comme de l'analyse, et bien évidemment de posséder l 000 € aujourd'hui ou de
de belles applications en calcu l des pro- posséder une promesse de paiement de
babilités et en statistiques. Pourquoi ces 1 000 € dans un an ? La réponse à cette
matières sont-elles presque toujours question est-elle évidente? La situation
absentes de nos cours ? La connaissance financière actuelle est bien particulière :
des méthodes actuarielles devrait parti- elle se caractérise par des taux très bas,
ciper à l'éducation citoyenne en formant voire parfois même négatifs.
les élèves aux principes de calcul de Voyons comment tout cela peut se « mathé-
toute une gamme de contrats auxquels nous matiser ». Un placement bancaire clas-
sommes confrontés au cours de notre sique se concrétise par le calcul progressif
existence. Certains contrats d'assurances d ' un intérêt , qui rémunère le service
couvrent plusieurs décennies, ce sont les rendu, qui est proportionnel au montant
contrats de couverture« vie». Ils doivent placé C et à la durée t du placement et
inclure une dimension temporelle. D'autres dont le coeffic ient de proportionnalité
sont à durée très limitée , c'est le cas des est un certain taux d ' intérêt i. La valeur
contrats de couverture « accident », renou- en tout instant t du capital C est donnée
velables annuellement. Mais tous nous par la relation
offrent de belles illustrations mathéma- C(t) = C + Cit = C(l + it), qui traduit
tiques en univers réel. l 'ajout de l' intérêt au principal.
tout cas une application concrète d'une une durée donnée. Un montant V rem-
fonction exponentielle pour laquelle tout boursé en n mensualités a au taux men-
calcul de durée se traduit par une intro- suel i se traduit par la relation élémentaire
duction explicite de la notion de logarithme, suivante:
qui prend ici le sens concret de « durée V = ~ (1- (1 + i)" ) .
de placement » . Ajoutons à cela l'usage l
QQQ] -r - - --
■
0. 006 '
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0 0.002 0.004 0.006 0.008 0 .0 12 0.0 14 0,016
Mortalité Homm1os
-1
-2 -:-----·-----~---
-2.5
-3
3.sL-
Logarithme des taux de mortalité des hommes (en bleu) et des femmes (en rouge).
miner les facteurs actuariels liés au sexe tère donc pas l'ordre de grandeur des
comme critère de calcul des tarifs. Il en « prévisions ». En première approxi-
découle que les tarifs de couverture via- mation (au pour mille près) , on peut
gère des hommes et des femmes sont à écrire : « Le taux de décès des femmes
présent identiques. en âge de travailler est égal à 43 % du
taux de décès correspondant des
Inégaux face à la mort hommes.» On peut noter Y= 0,4327 X.
En matière de viager, le sexe fort est le
Mais hommes et femmes sont-ils égaux sexe féminin ! Le best jït de Pearson
devant la mort ? Représentons graphi- tend à représenter deux variables X et
quement les taux de décès observés en Y sur un pied d'égalité. C'est bien le
France courant 2012 en prenant en compte cas des taux de mortalité des hommes et
les personnes en âge d'exercer une acti- des femmes. Dans un autre ordre d'idée
vité professionnelle (les 20-65 ans) en est la droite de régression qui distingue
mettant en abscisse les taux de mortalité une variable explicative X et une variable
des hommes et en ordonnée ceux des dépendante Y.
femmes d'âge identique. Ce graphique Le même exemple numérique propose
est visible en bas de page précédente. une illustration de l'usage des loga-
Une relation de proportionnalité semble rithmes et des droites de régression dans
apparaître. le plan. Les taux de mortalité présen-
Pour la mettre en évidence , étudions le tent des variations d ' ordre de grandeur
modèle linéaire que Pearson qualifiait (de 1 à 1 000) qui rendent leur repré-
de bestfit, à savoir l'égalité des variables sentation graphique non efficiente. En
réduites, plus simple à obtenir mais très passant aux logarithmes (ici en base 10),
différente de la droite de régression on voit apparaître une représentation
X-x Y- y quasi linéaire, qui constitue une illus-
S, Sv tration d'autant plus intéressante des
Son équation est régressions linéaires qu'elle va de pair
Y= 0,4327 X+ 0,000046. avec la mise en place d'un modèle_ Les
Les taux de décès observés varient de taux de mortalité évoluent donc expo-
quelques pour 10000 à 1 ou 2 %. Le nentiellement. On le lit sur le graphique
te1me indépendant de notre relation n' ai- ci-dessus , qui représente les logarithmes
des taux de mortalités des 30-65 ans. se sont vu remplacées , dans la plupart
Pourquoi a-t-on exclu les moins de 30 des applications , par des distributions
ans de la modélisation? La réponse est normales ou Poisson , grâce aux effets
comportementale : les jeunes adultes de salutaires de s théorèmes de Moivre-
20 à 30 ans sont généralement respon- Laplace et de Poisson.
sables de plu s d ' accidents de voiture Mais que reste-t-il alors de la distribu-
avec dégâts corporels. Les jeunes hommes tion initiale, si ce n'est quelques appli-
de 20- 25 ans ont également des ten- cations artificielles dans les cours du
dances suicidaires. La « bosse des acci- secondaire ? L'actuariat accident nous
dents et des suicides» est incompatible livre là un cadeau inattendu .
avec la modélisation exponentielle. Voilà Notons À le nombre moyen d' accidents
de quoi faire apparaître des aspects socio- observés par unité de temps dans un por-
logiques particulièrement intéressants tefeu iIle (voir le second dossier de ce
et qui ne sont visibles qu'au travers des hors-série). Pour chaque intervalle de
mathématiques ! temps t,,/ suffisamment petit , on quanti-
À paitir de toute base de données et après fie la probabilité d'observer un accident
passage aux logarithmes , on peut modé- sur un intervalle de durée t,,/ par À6t,
liser l' évolution des taux de mortalité celle de n'observer aucun accident par
d 'une population par application de la 1 - Àt,,/ ( en nég)jgeant la probabilité d 'ob-
régression linéaire simple. server plus d'un accident) . La quantifi-
cation de la probabilité d ' observer k
la loi binomiale en situation accidents coïncide bien avec une distri-
-- -- ---------
bution binomiale B(n, À6t) pour laquelle
La distribution binomiale pose problème les probabilités A prennent la forme
dès que l' on passe à ses applications et explicite suivante :
que le nombre d'expériences considé- 1
rées augmente. Les calculs explicites Pk = k!(:~k)!(Utt(i-Ut)"-k .
des probabilités font intervenir des pro-
duits d'exponentielles de base stricte- Le paramètre k est forcément petit (il
ment inférieure à l et des factorielles. varie de O à 4 ou 5 grand maximum) et
Les premières tendent rapidement vers seules les premières probabilités doivent
zéro, les secondes explosent tout aussi vite. être explicitement calculées. Voilà un
Leurs produits ont donc une fâcheuse excellent exercice !
tendance à se transformer, concrètement, Il faut calculer explicitement p 0 , p 1, p 2 ,
en quantités indéterminées. Il y a belle p 3 et p 4 et calibrer le tout. En travaillant
lurette que les distributions binomiales par jours, on pose 6t = 1 / n = l /365. Le
pai·ai11ètreÀ s'ajuste simplement en comp-
tabilisant le nombre d ' accidents décla-
Nombre Fréquences observées rés dm1s un po1tefeuille déterminé. Traitons
d'accidents en Belgique une statistique belge qui comprend peu
0 0,906557 de valeurs (voir le tableau ci-contre).
1 0,086376
2 0,006581 On postule que par jour le nombre moyen
3 0,000402 d' accidents est 365 fois plus petit et que
4 0,000084 chaque assuré ne peut être responsable
que d ' un seul accident pai· jour. L' ob-
Moyenne 0,10108 servation d'un assuré pendant un an
Sommes 1 0,99999992
Des actuaires
et des journauM
Le XIXe siècle est celui de la presse : en 1810, on ne compte
qu'un seul journal de mathématiques, le Journal de
mathématiques pures et appliquées (les fameuses Annales de
Gergonne). À la fin du siècle, des dizaines de journaux
coexistent à destination des professeurs, chercheurs, élèves,
ingénieurs ... et des assureurs.
Franck Jovanovic :
"les actuaires ont ioué un rôle imnortant en finance. ,,
Spécialiste du modèle de marche aléatoire dans la théorie financière,
Franck Jovanovic est professeur de finance à l'University of Leicester
School of Management (Royaume-Uni). Sa démarche scientifique mêle
la théorie financière, l'histoire des sciences, la sociologie des sciences et
l'épistémologie.
Pouvez-vous nous en dire plus sur les travaux de Henri Lefèvre, fondateur du Journal
des placements financiers?
Henri Lefèvre (1827- vers 1885) est un auteur important dans le développement des sciences sociales
au XIXe siècle, en particulier la« science de la bourse» (ou finance) et les sciences comptables. Il a beaucoup
œuvré pour créer des sciences sociales et moderniser la société. Il souhaitait que la France rattrape son
retard vis-à-vis de ses voisins. Il fut fortement influencé par le programme d'Auguste Comte.
En 1869, il fonde avec des associés l'Agence centrale de l'union financière et dirige son organe de
presse, le Journal des Placements Financiers. À cette époque, les journaux financiers proposent à
leurs lecteurs de gérer leurs placements financiers ! Ce type de service, qui intéressait les provin-
ciaux ne pouvant se rendre régulièrement à Paris, a été à l'origine de nombreux scandales financiers:
des journaux faisaient miroiter des rendements particulièrement élevés dans l'unique but d'extor-
quer leurs lecteurs ...
Le Journal des placements financiers n'a paru que pendant deux ans, mais il a joué un rôle important
dans le développement des idées en finance. Lefèvre y propose un outil pour analyser rapidement les
résultats d'opérations financières complexes, en particulier les combinaisons d'options. Un contrat
d'option confère le droit, et non l'obligation, de vendre ou d'acheter un actif (financier ou physique)
à un prix défini à l'avance (le prix d'exercice), à une date fixée appelée échéance. Ainsi, on peut déter-
miner une stratégie, selon ses besoins, où l'on réalise un gain lorsque les cours fluctuent au-delà d'un
certain intervalle et une perte si les cours restent dans cet intervalle. Il devient très complexe de cal-
culer le résultat de combinaisons d'options. C'est en cela que sa méthode graphique est innovante, et
reste utilisée aujourd'hui !
Propos recueillis par N. V.
p [e - (1 + ~ )"•]
1 0
= taux de l'inli:r~l de I frn11c (').
Hssurance terrorisme
le cadre législatif en France
En France, la garantie de couverture des conséquences résultant d'attentats et d'actes de terrori sme est
obligatoire pour toutes les polices d'assurance de type « dommages», et cela depuis 1986. Légalement,
la notion de terrorisme recouvre celle d' attentat, d' acte de sabotage, tout en incluant les risques consé-
cutifs aux grèves , émeutes ou mouvements populaires, ou même les risques de guerre. Les articles
L-126-2 et R-126-2 du Code des assurances précisent explicitement que cette obligation de couverture
concerne tous les contrats dommages d'incendie aux biens situés sur le territoire national et également
les contrats garantissant les dommages aux véhicules à moteur terrestres , aériens ou maritimes. Le
champ d'application de la garantie obligatoire s'étend aux actes de terrorisme commis à l'aide de subs-
tances nucléaires, bactériologiques, chimiques, ou radiologiques. En outre, depuis la loi du 23 janvier
2006, la garantie s'étend également aux dommages matériels subis sur le territoire national qui pour-
raient résulter d'un attentat commis au-delà des frontières , comme dans le cas d'une contamination par
des substances chimiques. En sommes-nous plus (r)assurés pour autant ?
les conséquences
du 11 septembre 2001 En Belgique
Face à la réalité de terrain, l'obligation de Quand la loi définit le terrorisme
couverture des risques liés au terrorisme En Belgique, une loi du 1er mai 2008 prévoit
ne va pas sans problème. Suite aux atten- que certains types d'assurances doivent obli-
tats terroristes du 11 septembre 2001, qui gatoirement couvrir les dommages consé-
avaient provoqué l'anéantissement des deux cutifs au terrorisme. Sont concernées, les
tours du World Trade Center de New York, assurances accidents du travail, toutes les res-
la majorité des groupes mondiaux de réas-
ponsabilité civile auto, ou couvrant les risques
surance décidèrent d'exclure les risques les
d'incendie ou d'explosion dans des lieux pu-
plus importants de la couverture terrorisme
blics, les assurances incendie risques simples,
initialement prévue. Cette décision mit évi-
les assurances accidents, hospitalisation et les
demment les assureurs français, légalement
assurances vie. Le législateur y donne une
tenus de couvrir l'ensemble des dommages
définition intéressante et fort complète de la
causés par les actes de terrorisme (voir
ci-dessus), dans une position difficile. Elle notion de terrorisme. Le premier alinéa de
conduisit dès le 1er janvier 2002 à la créa- l'article 2 considère en effet comme terroriste
tion d'une structure de marché destinée toute « action ou menace d'action organisée
à pallier cette absence de réassurance au dans la clandestinité à des fins idéologiques,
niveau international : le Gareat (Gestion de politiques, ethniques ou religieuses, exécutée
l'assurance et de la réassurance des risques individuellement ou en groupe et attentant à
attentats et actes de terrorisme), qui mit en des personnes ou détruisant partiellement ou
place un schéma de co-réassurance mutuelle totalement la valeur économique d 'un bien
entre ses adhérents, lesquels bénéficient matériel ou immatériel, soit en vue d'impres-
alors d'une couverture illimitée. Cette der- sionner le public, de créer un climat d'insé-
nière est rendue possible par l'intervention curité ou de Jaire pression sur les autorités,
de la CCR (Caisse centrale de réassurance) soit en vue d'entraver la circulation et le
qui jouit de la garantie de l'État. Voilà donc fonctionnement normal d'Un service ou d'une
les compagnies couvertes ! Peut-on en dire entreprise ». Nous voilà prévenus !
autant de leurs clients ?
naissance et éuolution
des tables de mortalité
À l'origine des tables de mortalité, il y avait le souci de se
prémunir contre les épidémies de peste. Elles ont ensuite
été utilisées pour évaluer les rentes viagères avant d'évoluer
lentement vers leur visage d'aujourd'hui, poussées par des
contraintes parfois contradictoires.
Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre
Malgré cet exemple antique, dans le prévue, chacun pour 1 € de rente an-
monde moderne, le denier fut généra- nuelle. L ' organisme devra débourser
lement indépendant de l'âge jusqu ' à 436 € à l'ensemble des survivants
la fin du XVII° siècle. Edmond Halley l' année suivante puis 427 € ... jusqu ' à
(1656-1742) se posa la question de 20 € la dernière année. Nous obtenons
trouver le denier idéal dans son Esti- une somme de 9613 € pour 445 per-
mation de la mortalité du genre hu- sonnes ce qui fait un denier de 22 .. .
main. Il montra l'importance des tables pratiquement celui d'Ulpien ! Ce ré-
de mortalité pour la détermination du sultat suppose toutefois un placement
denier à appliquer, et également le fait sans intérêt.
qu ' on ne pouvait estimer la mortalité
moyenne en utilisant les chiffres de L'organisme peut faire un calcul plus
villes comme Londres où les mouve- juste, mais plus risqué, en actualisant
ments de populations étaient impor- les sommes qu'il aura à verser. Par
tants : trop de gens venaient y mourir exemple, s'il peut placer son argent
sans y être nés. Pour une estimation au taux de 5 %, une rente de 1 € à
correcte, il choisit des tables faites à verser dans un an demande de provi-
Breslau en Silésie, une ville loin des sionner aujourd'hui une somme de :
mers et des passages, d'après les re- 1 / 1,05 = 0,95238 . .. €. De même,
gistres des années 1687 à 1691 . la même rente à verser dans deux
ans demande la somme actuelle de :
Halley en déduisit « la chance qu 'une l / 1,05 2 =0,90729 ... € et ainsi de suite.
personne de tel âge vive jusqu'à tel En reprenant les calculs précédents, on
autre âge » . Par exemple, la chance trouve un denier de 12, effectivement
qu'a un homme de 40 ans de vivre très courant à la fin du xv11° siècle. Bien
jusqu'à 4 7 ans est le rapport de 377 entendu, celui-ci varie selon les taux
(nombre d'hommes de 47 ans selon la d ' intérêts financier :
table) par 445 (nombre d ' hommes de
40 ans) , soit environ 85 %. Sa proba-
Taux 0 % 1 % 2 % 3% 4 % 5 %
bilité de mourir dans la même période
est donc d'environ 15 %. Denier 22 19 17 15 13 12
30
Faillites de l'Hôtel-Dieu
et des Incurables
Vers 1670, l'Hôtel-Dieu, ainsi que d'autres institutions charitables
comme les Incurables, modifièrent leur financement en passant d'un
système de « donations en échange de pensions » à des ventes de
rentes viagères. Une faillite en résulta en 1689. Elle a souvent été pré-
sentée comme la conséquence d'une mauvaise évaluation des deniers
à utiliser qui, en particulier, n'auraient pas tenu compte de l'âge.
En fait, les actes notariés de constitution de rentes montrent le
contraire: le denier dépendait de l'âge, même si ce n'était pas systé-
matique. Par exemple, à 40 ans il variait de 12 à 20 avec une moyenne
de 15 ; or le denier 15 à 40 ans correspond au taux de 3 % dans nos
calculs, ce qui est raisonnable à une époque où les taux étaient souvent
de5%.
La faillite n'avait pas pour origine une mauvaise évaluation du de-
nier des rentes en fonction de l'âge, mais d'un autre point important
des assurances : la gestion des provisions, dont une partie suffisante
doit être liquide. Des avoirs mal évalués peuvent provoquer des catas-
trophes. La conséquence fut qu'en 1690, un décret royal interdit aux
institutions charitables de vendre des rentes viagères.
Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre Âge Nombre
l'ahk de mortalité L'âge exact au décès étant inconnu, o n loir estimer celle des vivants fait pénétrer
dl' la genératmn née le situe au milieu de l' année en cours. dans le domaine de la prévision.
l'll 1850. Pour le calcul de l' âge moyen au décès , Comment savoir combien d'enfants ve-
15 095 sont affectés de 0 ,5 an , 5 550 de nant de naître mourront à l'âge de dix
1,5 an , 2 364 de 2,5, etc. En divisant ans par exemple ? En fait, on l' estime
le rés ultat final par 100 000, on trou ve à partiJ des taux de m01talité de l' année
une moyenne de 41 ans et demi. en cours. Plus précisément, on calcule
Le calcul est similaire si on cherche le quotient de mortalité des deux sexes
1'espérance de vie de ceux qui ont sur- à chaque âge grâce à des estimations de
vécu à le ur première année. On trouve population et de décès. En l'absence de
alors 4 8 ans (soit 49 en tout) . Si on ex- toute migration (voir en encadré son in-
clut les morts de nourrissons , la vé ri - Auence), l'idée est très simple. Le l er jan-
table espérance de vie de la générati on vier 2009, on comptait 440428 hommes
née en 1850 est de près de 50 ans , y de 40 ans et 815 décès d ' hommes de
compris les morts à la guerre. 40 ans pendant l' année 2009. Le quo-
tient de mortalité des hommes de 40 ans
les « tables du moment » est donc estimé au rapp01t des deux
nombres, soit 1,850 %o.
Cette façon historique d' établir les tables La méthode est fi able si on pe ut appli-
de m01talité ne permet pas le calcul de quer la loi des grands nombres . Ses ré-
l'espérance de vie d'un bébé venant de sultats sont fantaisistes quand ce n ' est
naitre, mais seulement celle de ceux dont pas le cas, particulièrement pour les
la génération entière est décédée. Vou- grands âges.
Comprendre
les tables de mortalité
Pour un actuaire, les tables de mortalité constituent l'outil
central permettant de calculer les primes ou les provisions en
assurance vie. Elles permettent aussi à chacun d'estimer
facilement ses chances de survie à tout âge.
Pour construire une table de mortalité , « brute » . Une telle table présente géné-
l'actuaire se base d ' abord sur des sta- ralement des irrégularités statistiques.
tistiques démographiques ; à partir de On en déduit alors une table ajustée qui
données s tatistiques provenant par peut par exemple suivre une loi mathé-
exem ple d ' un recensement de la popu- matique bien préci se . On calibre ensuite
lation d ' un pays donné , on construit au mieux les paramètres de cette loi pour
d ' abord un e table de mortalité dite approcher la table brute d ' origine.
Quant à la probabilité pour une personne d'âge x d'être encore en vie dans n années, c'est :
l
=..Lt!!..
Il PX l
X
des tab les séparées pour les hommes et Par exemple, on peut penser qu ' un client
pour les fe mmes. Remarquons que dan s se protégeant fo rtement en cas de décès
ce domaine, la segmentation stati stique ama une santé plus fragile que la moyenne
se he urte parfois à des principes juri- de la population! À l'opposé, un ass uré
diques de non-discrimination ! so uscrivant une rente viagère aura une
On pourrait a uss i e nvisager de tenir bonne idée de sa santé ! Les ass ureu rs
compte d'autres critères de segmentation, peuvent ainsi être amenés à devoir adap-
comme le type de métier o u les habi- ter les tables de mortalité utilisées pour
tudes de vie (fumeur/ non-fumeur, acti- la tarification de leurs produits et même
vités sportives , ... ). parfoi s à utiliser des tables de mortalité
différentes pour différents produits (par
Lorsqu'u ne table de mortalité est utili- exemp le un e table po ur des produits
sée à des fins d'assurance, il convient d'être couvrant le décès , une autre tab le pou r
attentif aux effets dits d 'anti sélection. des produits de type épargne retraite et
Les c lients ac hetant un type de produit une troisième table pour les produits de
chez un ass ureur n' auront pas néces- rentes viagères). On parle auss i parfois
saireme nt le même comportemen t de de tables d'expérience lorsqu ' un ass u-
mortalité que la population générale. reur, plutôt que d ' utiliser une table géné-
rale de population, se base sur ses propres En vue de prendre en compte cette
statistiques pour établir une table de dimension d'évolution temporelle, les
mortalité qui lui est propre et qui est actuaires utilisent des tables dites pros-
adaptée à rythme régulier. pectives, qui dépendent non seulement
de l'âge mais aussi de la génération à
Éuolution de la longéuité laquelle l'assuré appartient (tables par-
et tables prospectiues fois appelées « par génération »). Cette
façon de procéder oblige évidemment
Les tables de mortalité classiques telle l'actuaire à faire des prévisions quant
que définies précédemment sont une à l'évolution future de la longévité . Les
photographie à une date donnée des conditions de survie entre 60 et 65 ans
conditions de survie d'une population . d'un assuré aujourd'hui âgé de 20 ans
Extrapoler dans le futur les chances de (donc né en 1996), seront différentes
survie d'un individu sur ces bases revient de conditions actuelles de survie des
à considérer que la mortalité par âge personnes entre 60 et 65 ans ; elles
demain sera identique à celle observée seront aussi différentes des conditions
aujourd'hui. de survie dans cette même classe d'âge
Considérons par exemple une personne pour quelqu'un âgé aujourd'hui de 45
âgée aujourd'hui de 20 ans . Pour cal- ans (donc né en 1971). Elles doivent
culer sa probabilité de survie entre 60 et donc faire l'objet d'une projection,
65 ans, on va se baser sur les condi- tenant compte à la fois des conditions
tions de survie des personnes ayant de survie actuelle et de la tendance à
aujourd'hui entre 60 et 65 ans ! Il est l'amélioration de la longévité. On en
clair pourtant qu'en 40 ans, la longévité vient donc à développer, par cohortes,
risque d'évoluer ! Sa mortalité ne sera une table de mortalité spécifique qui
pas celle des seniors d'aujourd'hui. est indicée sur l'année de naissance.
À titre d'exemple , le tableau ci-dessous Les tables ainsi construites sont à deux
donne, pour la Belgique et la France, dimensions : l'âge et l'année de naissance
l ' évolution par sexe (H = hommes, de chaque individu. Mais ceci est une
F = femmes) du quotient de mortalité autre histoire.
qx pour 3 catégories d'âges (sources : P.D.
statistiques INS et INSEE) lors de la
première décennie de ce siècle ; il montre
clairement que la mortalité est un phé-
nomène évolutif dans le temps, même à
relativement court terme :
h,o::.;~t1J:._~~.'::}iiF'R~:-~:;r,·
pas selon des proportions exactes, ni selon
des.fi·actions. De là procède la table suivante,
à savoir que sur 100 il en meurt:
L'espérance de vie est un concept étrange et généralement mal compris: elle ne représente
en rien une quelconque moyenne de durée résiduelle de vie ! Prenons une personne de
20 ans. Étudions pendant deux ans les taux de mortalité observés des personnes de 20 ans
et plus dans une population donnée. Ceci se fait en notant, pour chaque catégorie d'âge
x, le taux de décès observé qx, calculé entre deux anniversaires successifs (ce qui explique
pourquoi il faut deux ans). C'est à partir de ces taux que l'on va déterminer l' « espérance de
vie». Le problème est que ces taux de mortalité ont été mesurés dans une population don-
née à un moment fixé. Or ces observations évoluent. Depuis plus d'un siècle, les taux de
mortalité ont considérablement baissé, et cela de manière non uniforme. Dans quarante
ans, notre individu aura 60 ans. Rien ne permet d'anticiper aujourd'hui ce que sera dans
quarante ans le taux de mortalité d'une personne de 60 ans. Les modèles projectifs les
plus audacieux tentent d'anticiper l'évolution des mortalités des dix ou vingt prochaines
années, sans certitude de validation. Or l'espérance de vie de notre jeune de 20 ans au-
jourd'hui est calculée au moyen du taux de mortalité des personnes de 60 ans aujourd'hui !
Le calcul effectué, même s'il est étayé au moyen d'un raisonnement mathématique, n'est
en rien représentatif d'une quelconque réalité.
E
n observant une population semblent pas significativement diffé-
pendant deux ans, on peut, pour rentes. En fait, le graphique ne per-
chaque catégorie d'âge naturel met pas de visualiser des différences
x, comptabiliser exactement le nombre néanmoins significatives étant donné
de décès occurrent entre deux anniver- les différences d'ordre de grandeur
saires successifs et donc estimer des des mesures, variant de quelques pour
taux de décès, noté qx. La même opé- 10 000 à plusieurs di zaines de pour-
ration peut être effectuée sur trois ou cents. Un passage aux coordonnées
quatre ans de manière à obtenir deux semi-logarithmiques est donc indi s-
ou trois observations que l'on peut lis- pensable (voir encadré).
ser par moyenne arithmétique ou pon-
dérée (en tenant compte par exemple Ce type de modèle a été introduit
des effectifs). Le graphique ci-dessous, vers 1860 par l'actuaire britannique
disponible sur le site de l ' Insee, repré- William Matthews Makeham (1826-
sente ces taux de mortalité en France, 1891) et est souvent utilisé en assu-
pour l 'ensemble de la population, rance vie. Il consiste à considérer
tous sexes confondus, au voisinage de non les taux de décès, mais bien leur
l' année 2010 (observations effectu ées représentation instantanée. À partir des
entre 2009 et 2011 ). taux de décès observés, on modélise
l 'évolution d ' une population fictive
Taux de mortalité France 201 O La tendance à la crois- d' individus qui obéiraient aux obser-
sance exponentielle vations que l'on vient d'effectuer.
semble manifeste Partant d'une population de cardinal
mais les observations l0 = S0 = 100 000 (ou 1000 000), on
des taux de motta- construit une « table de survivants » à
lité associées aux l'âge x, notée lx ou Sx, de la manière
moin s de 50 ans ne suivante : Sx + 1 = (1 - q) Sx = P.,Sx,
© In stit ut nati o na l de la sta ti stiq ue et de s étud es é co nomiques
On peut voir l'exponentielle s' comme régression linéaire simple dont on peut
une représentation du taux de survie mesurer objectivement la pertinence
aux accidents pendant x années, indé- par sa détermination (pourcentage de
pendamment de l'âge et des maladies. variance expliquée par le calibrage et
Les deux exponentielles successives le modèle). On retient donc la valeur
imposent deux passages aux loga- s qui maximise cette détermination.
rithmes successifs. Pour plus de com- Dans le cas de notre échantillon, les
modité, on peut convenir de travailler observations transformées sont effecti-
avec les quantités 1 / P, qui, strictement vement presque linéaires et conduisent
supérieures à 1, vont permettre ce à une détermination maximale de
double passage sans trop de précau- 99,5 % pour s = 0,999696. Le modèle
tions. En utilisant les notations précé- est visualisé ci-dessous (graphique 1).
dentes, on trouve :
1 - J c"- cx+ I La fonction détermination prend en
7-----;g effet un maximum unique dans l'inter-
Un premier passage aux logarithme valle de définition des, comme on peut
livre: le voir sur le graphique 2.
1n( ;J =- lnpx = - lns + cx(l - c) lng.
L'équation obtenue permet le calibrage
Il faut à présent supposer que le taux du modèle. L'équation retenue est
de survie est inférieur au taux de sur- Y = 0,097119237 X - 10,78243,
vie par accident, ce qui semble intui- qui nous permet de calculer
tif (mais non nécessairement observé c = e0 -097 119237 = 1, 10199 .. . Le modèle
expérimentalement !). Cette hypothèse table donc sur une croissance d'un peu
permet un second passage aux loga- plus de 10 % par an du taux de morta-
rithmes, qui fournit : lité, ce qui est loin d 'être négligeable !
ln (lns - lnp) = xlnc + ln ((1 - c)lng). On calcule enfin :
Cette expression permet de recourir à la - 10, 78243)
g = exp ( = 0, 99979646 ...
méthode de régression linéaire simple, 1_ c
pourvu que l'on ait une « idée » de la Quant à la constante d' intégration k,
valeur du paramètre s. C'est le cas, elle s'ajuste évidemment en fonction
puisque ce taux de survie par accident de la population initiale arbitraire choi-
doit être strictement supérieur à tous les sie, /0 . On représente enfin ce que
taux de survie observés et qu'il est for- donne notre lissage en le comparant
cément strictement inférieur à 1. Ceci aux observations. La rupture de ten-
nous livre une fourchette étroite dans dance observée entre les moins et les
laquelle faire varier le paramètre. Pour plus de 65 ans est bien visible.
chaque valeur de s, on effectue une D.J.
Calculs tontiniers
La tontine est un système de mutualisation de l'épargne avec
répartition des bénéfices aux survivants. Elle peut servir à
illustrer les rouages les plus simples des calculs d'actuariat.
la tarification
des assurances uie classiques
Les couvertures d'assurance vie sont des outils privilégiés
pour qui veut acquérir un bien immeuble, protéger sa famille
ou se garantir un avenir confortable. Comment tarifer des
contrats à long terme dans un univers financier instable, pour
des populations dont les conditions de survie évoluent à tout
moment?
L
es actuaires classen t généra- L' ass ureur promet une somme fixe
leme nt les produits d ' assu- en cas de survenance d ' un évène-
rance vie en plusieurs fa milles. ment aléatoire lié à la vie de l'assuré
Voyons ici les assurances vie clas- (décès, survie) ; l'assuré s'engage,
siq ues. Il s'agit en fait de produits lui , à verser des primes, fixées dès le
proposés par les assureurs depuis plu- départ. Ces produits présentent une
sieurs siècles ! Ils sont basés sur des assez grande rigidité : le client doit
engagements bien précis de la part de payer sa prime à date fixe, sans faci li-
l' ass ureur et du preneur d' ass urance. tés de paiement éventuelles et, de son
tant à verser à intervalles réguliers (par On peut enfin envisager une assurance décès de type
exemple une fois par an) un montant vie entière, qui paie un capital fixe au décès, à quelque
fixe a tant que l'assuré est en vie. moment que celui-ci se produit. Dans ce cas, l'assureur
L'opération s'arrête à son décès. Si paie dans tous les cas, l'incertitude étant le moment de
l'on envisage par exemple un rente ce paiement. La prime unique pure a la même forme que
constante de 1 € payable à la fin
celle de l'assurance temporaire mais la somme, plutôt
de chaque année pour un assuré âgé
que de s'arrêter après n termes , se pomsuitjusqu'à l'âge
aujourd'hui de x années, on aura a_r =
Px V + 2Px v<2> + 3Px v<3 ) +. . . (la somme
ultime de la table de mortalité.
our les opérations de geme «v ie», de fair -valu e dans de fu tures normes
Si à la fin du XIXe siècle un nouveau-né pouvait espérer vivre 43,3 ans ou 46,5 ans, selon qu'il
était de sexe masculin ou féminin, un siècle plus tard, cette espérance atteint 74,8 et 81,2 ans.
De même, un travailleur atteignant l'âge de 65 ans et cessant ses activités professionnelles
peut espérer profiter de sa retraite pendant 15,6 ans (contre 19,9 ans pour une travailleuse)
dès la fin du xxesiècle, alors que leurs survies moyennes n'excédaient pas 10,7 et 11,6 années
un siècle plus tôt.
Le tableau ci-dessus présente les espérances de vie à la naissance et à 65 ans en utilisant des
tables statiques et prospectives en fonction de l'année de naissance.
D'autres méthodes du même type mais plus complexes combinent l'évolution de la morta-
lité d'un ensemble de pays européens de même niveau économique et la mortalité d'un pays
donné. Les actuaires belges, précédés par ceux des Pays-Bas, ont ainsi présenté en 2015 de
nouvelles tables de mortalité prospectives.
blance des paramètres a,, f3x et K , doivent dans l'immédiate après-guerre s'écar-
être obtenues à l' aide d ' un algorithme tent des observations voisines et d ' autre
itératif co mpte tenu de la présence du part les progrès de la médec ine (mi se
terme bi linéaire f3x X K 1. Cette méthode au point des sulfa mides et des antibio-
n ' im pose pas q ue to utes les do nnées tiques) ont modifié la mortalité de façon
so ient di sponibles pour tous les âges et significati ve.
toutes les années considérés , ce qui pe ut Des précaution do ive nt également être
être utile pour les âges très élevés . Les pri ses sou s pe ine de surestimer l' amé-
paramètres ax, f3x et K 1 ayant été obte- lioration de la longévité. Les projections
nus pour des valeurs de t < 2001 , il reste clans le temps ont été limitées à l'année
à analyser la série chronologique des K , 2070 ; les estimati ons à très long terme
pour extrapo ler les valeurs de K 1 pour des taux in stantanés de mortalité pré-
t> 2000 (on utili se les méthodes dites de sentent trop d'incertitude et n'ont que peu
Box et Jenkins). d ' application pratique immédiate pour
le calcul des opérations de rentes.
Les tables de mo1talité prospecti ves pré- Po ur la mortalité des âges é le vés , la
sentées en encadré plus loin ont été obte- modélisation dev ient p lus hasarde use .
nues en se basant sur des données s'étalant Il fa ut constate r que le no mbre d ' ob-
de 1950 à 2000 . U tili ser des observa- se rvation s e st sin guli ère ment réduit.
ti ons plus anciennes poserait un double U n mod è le sp éc ifiqu e po urrait être
prob lème: d ' une part , les décès relevés développé .
58
l}lJea(tQil ~rn
Les risques maritimes
à l'origine des assurances
Les assurances sont nées dans l'Antiquité du désir des
marchands de se prémunir des fortunes de la mer. Aucune
mathématique n'aidait alors à calculer une prime équitable.
Étrangement, les premiers calculs mathématiques précis ont
abouti à des faillites de compagnies d'assurance !
r-------------------------------------,
Marie Jean Antoine un autre. » Une condition pour cela :
Nicolas de Caritat, il doit s'agir des fortunes de la mer, et
marquis non de sa faute.
de Condorcet
(1743-1794). naufrages et pirates : un pari risqué
L
attestation la plus ancienne
d'une mutualisation des vendre du vin dans des villes préci-
risques maritimes se trouve sées dans le contrat. Au retour, les
dans le Talmud de Babylone qui , dans emprunteurs devaient rendre la somme
sa forme écrite, date du ve siècle mais prêtée, plus 225 drachmes pour mille.
est probablement très antérieur sous En revanche, en cas de perte, ils ne
forme orale. On y lit : « Les marins devaient rien au créancier. Le contrat
peuvent convenir entre eux que, si l'un s'apparentait ainsi plus à un pari qu 'à
perd son navire, on lui en construira une assurance. Cependant, même si
l'intérêt de 22,5 % ne venait pas d'un
calcul statistique, il était censé récom-
penser le risque pris. Ce type de prêt à
intérêt maritime fut ensuite progressi-
vement adopté par le droit romain sous
le nom de nauticumfoenus, pour fina-
lement être consacré dans le Digeste
de Justinien (vie siècle), l'ultime com-
pilation du droit romain del ' Antiquité.
Dans l'Occident chrétien, il devint le
prêt à la grosse aventure. Ce système
évolua avec des accords entre prêteurs
pour mutualiser les risques, ce qui le
rapprocha d ' une véritable ass urance,
jusqu'à ce qu'une « décrétale » du
pape Grégoire IX l' interdise comme
usuraire en 1236.
Cette interdiction permit la naissance
de l'assurance proprement dite au x1ve
siècle. Entretemps, le prêt maritime
prit la forme d ' un contrat de vente ... le uerdict des probabilités Pierre-Simon
où l'acheteur ne payait la marchandise de Laplace
que si elle n'atTivait pas à bon port ! Les premiers calculs mathématiques (1749-1827).
Dans le cas contraire, la vente se trou- portant sur les primes d'assurance
vait annulée et l'acheteur recevait une datent de cette époque, qui est aussi
compensation. celle du début du calcul des probabi-
lités. On les trouve sous la plume de
En Italie, dès le début du x1ve siècle, Nicolas de Condorcet dans la célèbre
l'ass urance devint une opération Encyclopédie méthodique de Diderot
courante, associée à l ' affrètement et de d 'Alembert, à l'article intitu-
d ' un navire, contractée pour couvrir lé « assurances (maritimes) » . Suite
les risques sur les marchandises en aux nombreuses faillites de compa-
mer au départ, puis également sur gnies d'assurances au moment de la
terre. Dans les actes notariés, le crise financière de la « Compagnie des
montant de la prime était égal à la mers du Sud » de 1720, Condorcet se
valeur des marchandises mais , en demande comment fixer le montant
fait, la somme payée était moindre. de la prime pour rendre la probabilité
Cette coutume explique son paie- de faillite de l'assureur négligeable. Il
ment anticipé, d 'o ù vient le mot est ainsi amené à étudier la probabi-
prime (qui signifie « en premier » ) . lité que, parmi n navires, moins de m
La prime était en général très éle- fassent naufrage sachant que chacun
vée, double en mer que sur terre. a une probabilité p de faire naufrage.
En France, par une ordonnance de En théorie, le calcul est relativement
1681 , Colbert incita les marchands à simple. Examinons-le dans le cas où
mutualiser leurs risques en se grou - la probabilité qu ' a un navire de faire
pant, en plus grand nombre possible. naufrage est de 5 %. Sur dix navires,
la probabilité qu ' aucun ne fasse nau- cette probabilité soit proche de 1, par
frage est de 0,95 10 , soit environ 60 %. exemple égale à 99 %. La solution à ce
La probabilité qu'un navire particulier problème viendra avec Pierre-Simon
fasse naufrage et les autres non est de Laplace et son approximation de
de 0,95 9 x 0 ,05, donc la probabilité la loi binomiale par la loi normale. En
que l ' un des dix, non spécifié, fasse effet, une approximation de P(X !, m)
naufrage est de 10 x 0 ,95 9 x 0,05 ,
, ( m-np )
soit environ 31 %. La probabilité que est donnee par <f> j np( 1
_ p) , où
deux spécifiés fassent naufrages est de
0 ,95 8 X 0,05 2 . Le nombre de couples <f> (x) = b , jxexp(-t 2 )dr est la
y 2n: - oo
de bateaux dans un ensemble de dix
bateaux étant égal à 10 x 9 / 2 (soit fon ction de répartition de la loi normale.
45) , la probabilité que deux d 'entre
eux , non spécifiés, fassent naufrage
est de 45 x 0 ,95 8 x 0 ,052, soit environ
7,5 %. La probabilité qu ' au plus deux
fassent naufrage est donc égale à la
somme 0,95 10 + 10 x 0 ,95 9 x 0 ,05 + <l>(x)
45 x 0 ,95 8 x 0 ,052, soit à 98,8 %. Ici ,
l' assureur a une estimation du risque X 4
à prendre. Si 1,2 % de risque de faire Cl> (x) est égale à l'aire en jaune
faillite lui semble acceptable, il suffit sous la courbe de Gauss.
de provisionner pour 20 % de pertes
(2 / l 0) , et non pour 5 % comme un
calcul simpliste pourrait le faire pen- Cette formule peut sembler compli-
ser, cela si le nombre d'assurés est quer le problème ; cependant, même si
suffisamment important pour appliquer les valeurs de la fonction <D ne peuvent
la loi des grands nombres. être calculées de façon exacte, <D peut
être représentée graphiquement (d'une
les calculs de Laplace part) et tabulée (d'autre part), ce qui
a été fait à 1'époque, par exemple par
On retrouve les calculs qui ont amené Chrétien Kramp (1760- 1826).
Jacques Bernoulli (1654- 1705) à intro-
duire la loi binomiale, qui représente la Ces calculs entrepris par Condorcet
probabilité de k succès dans une série pour les assurances maritimes peuvent
de n expériences dont la probabilité de s'appliquer à toutes les assurances non
chacune est identique, égale à p : vies , comme les assurances incendies
P(X = k) = C) pk( 1 - p )'.-k_
ou, de nos jours, les assurances auto-
mobiles. Les bases des mathématiques
La probabilité P(X !, m) qu'au plus actuarielles de ce secteur étaient donc
m navires sur n fassent naufrage est en place au début du x1xc siècle.
Prendre en compte
les éuènements rares
Des modèles en cascade
Heureusement, les catastrophes sont rares. Il en est ainsi
pour les accidents d'avion, les incendies, les raz-de-marée et
les tremblements de terre. Mais les évènements rares ont leur
inconvénient : ils ne satisfont pas aux conditions d'application
du théorème central limite ...
E
n matière de probabilités, la La probabilité pk cherchée est donc la
distribution binomiale est bien somme de ces probabilités identiques,
connue. Elle postule la répéti- ce qui donne :
tion de n expériences aléatoires iden- pk= k!(nn~k)! pk( l - p)n-k
tiques et indépendantes à deux issues
possibles, que l'on nomme réussite (R)
ou échec (E). On peut calculer expli- Heureusement, les accidents
citement la probabilité pk de voir se sont rares!
réaliser exactement k réussites et n - k
échecs, dans quelque ordre que ce soit. Que se passe-t-il dans le cas des évè-
Si p quantifie la probabilité de réussite nements rares ? En fait , que se passe-
lors d' une expérience, la probabilité t-il lorsque la probabilité p de R est
associée à l'une des suites comprenant proche de zéro (c'est par exemple le
exactement k réussites « R » et n - k cas de l'observation d'un accident) ?
échecs « E » est égale au produit des Observons le portefeuille des assurés
probabilités associées à chaque ré- d' une compagnie d'assurances, cou-
sultat, étant donné l' hypothèse d' in- verts pour un certain type de risque
dépendance, soit pk( 1 - p) ll-k. Deux d'accident, pendant une durée T.
réali sations de successions R et E com- Décomposons cet intervalle en une
prenant exactement k « R » possèdent succession de n intervalles de temps de
la même probabilité (les expériences durée l'-,.t. Supposons dans un premier
sont identiques). De telles expériences temps le portefeuille homogène, et
constituent, relativement aux autres notons À le nombre moyen d'accidents
expériences, des évènements disjoints. observés par unité de temps dans ce
5 0.000001 0,00005 1
(1781-1840).
Sommes 0,9999999633
RÉFÉ RENCES
• Hasard et probabilités. Bibliothèque Tangente 17, 2005.
• Les statistiques. Bibliothèque Tangente 4, 2009.
• Dossier« Les paris » . Tangente 136, 2010.
• Les probabilités au cœur de la modernité. Tangente SUP 73- 74, 2014.
( tJ Economie ■
est consacré aux problèmes de tarification et de gestion des provisions.
On y retrouve toutes les méthodes de tarification a priori et a posteriori en
RC automobile, le fameux « bonus- malus», en passant par la théorie de la Mathématiques
crédibilité , le tout complété par un chapitre important consacré aux théories de l'assurance non-vie.
des catastrophes. Les différentes approches du provisionnement sont Michel Denuit
présentées en parallèle avec un développement intéressant de différentes et Arthur Charpentier,
méthodes de simulation dont l ' utilité dans la gestion des indemnisations Deux tomes.
différées est fondamentale. Cet ouvrage constitue un livre très complet mais Édition Economica,
réservé aux personnes possédant une culture mathématique certaine. 2004. 90 euros.
Comment
• •
tarifer • •
apr1or1... sans apr1or1
Un nouvel assuré représente assurément (!) une inconnue.
Comment évaluer d'emblée le risque qu'il va représenter pour
la compagnie d'assurance? C'est là tout le rôle des critères
de tarification a priori. Mais ces critères sont-ils vraiment
efficaces?
A
tes-vo us vraiment certain(e) de catégorie d 'âge , la zone géographique ...
seau beaucoup
plus dense et
la saturation ... Anem ag ne
- Au!rlc ne
de la plupart 10ot-.:::::~ --"'s?~~"""....._;.:=;:::::------ - -- - - - -----j
Belg ique
- Danemark
voque un com-
portement
imprudent
chez certains
automobilistes
o-------.--------------------
1990 1995 2000 2005 2010 2015
pressés.
La tarification a posteriori
Une belle application
des chaînes de markou
Comment calculer les primes de chaque assuré en fonction du
risque propre qu'il représente ? Les méthodes de tarification a
posteriori prennent en compte le comportement individuel pour
le calcul de ses primes futures. Mais les systèmes utilisés dans
le domaine de l'automobile sont-ils réellement efficaces?
Derrière le bonus,
T
ous ceux qui conduisent une voi-
ture sont confrontés à l'obligation des chaînes de markou
de souscrire une assurance res-
ponsabilité civi le (RC) couvrant les Le critère a posteriori paraît plus objec-
dégâts matériels et corporels pouvant tif puisqu'il consiste à observer le com-
être occasionnés aux tiers. Ce type de cou- portement de l' assuré en comptabilisant,
verture est tarifé à partir d ' échelles de chaque année, le nombre d ' accidents en
primes calculées selon deux modes com- tort à mettre à son crédit (ou à son débit ?) .
plémentaires : le mode a priori, en fonc- Le nombre d ' accidents en droit pour-
tions de critères plus ou moins arbitraires rait également être pri s en compte : ce
(voir le précédent article), et le mode a renseignement apporte énormément d' in-
posteriori , qui évolue en fonction du formations sur le comportement du
comportement individuel de chaque conducteur !
conducteur. Sur la base des critères a priori , l' orga-
Parmi les critères a priori, on retiendra nisme assureur détermine une première
le type de véhicule et sa puissance, l'âge prime qui pourra éventuellement aug-
du conducteur, son lieu de résidence , sa menter l'année suivante (si l'assuré est
profession , la date d'émission de son responsable d'accidents), ou diminuer (s'il
permis de conduire. Certains d'entre n'est responsable d'aucun) . L'assureur
eux sont loin d'être indépendants, comme doit établir une échelle de tarification
l'âge du conducteur et la date d'émission définissant différents niveaux de primes ,
de son permis. En prenant en compte notés de O (bonus maximum) à s (contri-
ces deux critères , les compagnies d'as- bution maximum) . Le niveau d'entrée dans
surance pénalisent doublement les plus Je système , n (0 < n < s) , doit aussi être
jeunes , même s'il faut admettre que Je déterminé . Ces niveaux de primes repré-
comportement de certains est à risque . sentent pleinement les états du système
'
Hl'Institut intergalactique,
on assure!
L'Institut intergalactique est le temple de l'excellence où exerce
le redouté professeur Phi. Kylie Ravera nous conte leurs aven-
tures. La rentrée commence avec un choix délicat
quelle compagnie d'assurance choisir?
L
'Institut intergalactique a beau se situer dans leurs offres et prendre les inscriptions. »
un espace-temps globalement paisible, libéré Bêta déchiffre le panneau : « Les assurances Tourix
de bon nombre des tracas résu ltant des pas- seront là de JO h à Ilh et les assurances Zérorix de
sions humai nes, il ne s'en est pas pour autant affran- 14 h à 15 h . Laquelle dois-je choisir ?
chi de la tradition millénaire dite « de la lourdeur - Elles proposent des prestations similaires, répond
bureaucratique». Réussir les tests d'entrée, qui per- Alpha, mais elles diffèrent en termes de prix. Je ne
mettent d ' intégrer l'Institut , n'est qu ' une première sais pas laquelle est la moins chère. »
étape avant l'admission définitive . Celle-ci exige Bêta fa it une petite grimace. « Si je ne choisis pas
d'accomplir un parcours épineux dans des méandres Tourix, j e serai obligé de prent:b·e Zérori.x, quel que
administratifs où le risque de rester embourbé existe soit son prix. Et sije prends Tourix ,je ne pourrai pas
bel et bien. revenir sur ma décision si Zérorix est moins chère.
Bêta a pris un peu de retard avec la constitution de son - Tu as exactement une chance sur deux de faire le
dossier, et même si les cours ont commencé depuis meilleur choix » approuve A lpha.
plusieurs jours , il se débat encore avec la liste des Une petite voix s'élève alors : « Pas forc ément ... »
pièces à fownir. En bon camarade, Alpha a décidé de Les deux amis se tournent vers Epsilon, leur jeune
l'aider en revoyant avec lui le contenu du dossier. camarade. Elle rougit, un peu confuse de s'être mêlée
« Visa longue durée pour la planète Prépaterra ... OK. à lew· conversation.
Carnet de vaccinations à jour ... OK. Quatre photos « Pourquoi dis-tu ça ? lui demande Alpha avec curio-
holographiques .. . OK. Relevés de tes notes de maths sité.
sur les dix dernières années ... OK. Mais j e ne vois - Eh bien, imaginons que tu fixes à l'avance un prix
pas de certificat d'assurance. » que tu juges raisonnable pour l'assurance. Si jamais
Bêta lève un sourcil : « Quelle assurance ? l'offre de Tourix est inférieure ou égale à ce prix, tu
- Une assurance contre toutes les tuiles qui peuvent l 'acceptes . Sinon, tu prends celle de Zérorix. »
nous tomber dessus sur Prépaterra. Un accident de
navibus, une attaque de frelons des marais, une épidé- Cher lecteur, voyez-vous en quoi ce raisonnement
mie de rhume qui rend bête ... C'est vite arrivé. rend la probabilité de faire le meilleur choix supé-
- Zut, grommelle Bêta,j'ai complètement oublié de rieure à 1 / 2? Par ailleurs, comment détermineriez-
m 'occuper de ça. Et je dois impérativement ren;/re vous un « prix raisonnable » si l'on n'a aucune idée
mon dossier avant la fin de la journée sous peine de la couverture de ri que ?
d'être renvoyé de l'Institut! « Bon , conclut Bêta après les explications d 'Epsilon ,
- Tu as de la chance , fait remarquer Alpha en dési- je ne sais pas pour Tourix et Zérorix, mais toi, on
gnant un panneau cl' affichage où défilent des annonces peut dire que tu assures. »
publicitaires , il y ajustement deux compagnies d 'as-
surance qui viennent ici aujourd'hui pour présenter Solution en page 171
la prime technique ■
■
u(X)
u(X - g)
X- g X' X X +g X
La quantité X' représente la« richesse certaine» dont l'utilité est égale à la richesse espérée de
la loterie. La différence l't = X - X' représente le prix que l'investisseur est prêt à payer pour
éviter de devoir participer à la loterie : c'est la prime de risque. Le développements en série de
Taylor de u(X - g) et de u(X + g) jusqu'à l'ordre 2, et celui de u(X') = u(X - n) jusqu'à l'ordre
1, conduisent à la relation suivante :
u"(X) g2
Jt= - - - - x - .
u'(X) 2
Le premier facteur est le coefficient d'aversion absolue au risque. Le second dépend de la dis-
persion du résultat de la loterie.
74 n 5 . Les m th ura ce
CCIDENT
S est défini via une étape intermédiaire sera unjom ou l'autre ruiné avec probabilité
T. L' itérativité signifie que l 'o n peut 1). Par ail leurs , si le principe de prime de
calculer la prime en l' évaluant dans un coût maximal est appliqué, il n' y a plus
premier temps conditionnellement à aucune raison de s' assurer: il serait moins
l'étape intermédiaire H(S IT), et en coûteux de suppOiter simplement le 1isgue.
appliquant ensuite à ce résultat (aléatoire , C'est donc vers d ' autres structures qu ' il
puisque fonction de T) , la même faut se tourner. Pour la propriété de non-
fonctionnelle H . dépas se ment du coût maximum , des
Cela s'écrit: H[H(S IT)] = H(S). contre -exemp les pour (b) , (c) et (d)
Ainsi , lorsque le coût total est la so mme s' obtiennent facile ment en prenant des
des coûts d 'un ce1tain nombre N (aléatoire) paramètres suffisamment grands. Quant
de sinistres, le coût total à la prime d ' utilité nulle (e) , elle satisfait
S = X 1 + ... + X Ndevient une somme de cette propriété en raison de la croissance
variables aléatoires compOitant un nombre de la fonction d ' utilité:
aléatoire de termes. La propriété d'itérativité La propriété du chargement de sécurité
exprime alors que
H(S) = H[H(SIN)] u(O) = E[u(c - S)] ~ E[u(c - Ms)J = u(c - Ms)-
= H[H(XI + ... + XNIN)] .
Si l ' on s uppose que les X J sont non négatif est satisfaite par la prime
indépendants et identiquement distribués d' utilité nulle (e) et par la prime de valem
(de loi commune X) et que le nombre moyenne qui , vu la concavité de u et
de sinistres N est indépendant des X1, et l'inéga lité de Jensen , s'écrit::
si la propriété d 'additivité est satisfaite , d ' où E(S) ~ c vu la croissance de u. Le
alors la relation précédente devient plus
simplement H(S) = H[N x H(X)]. u(O) = E[u(c - S)] ~ u[E(c - S)] = u[c - E(S)],
Le paradoxe de Saint-Pétersbourg
C'est la présence du risque qui fait que l'on ne peut se conten-
ter de prendre l'espérance mathématique d'une variable comme
valeur de sa fonction d'utilité. Ceci fut clairement mis en évidence
par Daniel Bernoulli en 1732 au moyen du célèbre paradoxe de
Saint-Pétersbourg. La question posée par le mathématicien est
la suivante : « Quelle somme seriez-vous prêt à miser pour parti-
ciper au jeu suivant? Je réalise une suite de lancers d'une pièce
de monnaie et je vous donne deux euros si pile apparaît pour la
première fois au premier lancer, quatre euros si pile apparaît pour
la première fois au deuxième lancer, huit euros si pile apparaît
pour la première fois au troisième lancer, et ainsi de suite.Je vous
donnerai donc 2" euros si pile apparaît pour la première fois au
nème lancer. » Faites un sondage autour de vous ! La plupart des personnes interrogées accep-
teront de miser une petite somme (au moins deux euros), mais répugneront à investir un mon-
tant important en raison du risque élevé de ce jeu : en misant vingt euros, par exemple, le joueur
sera perdant avec probabilité
1 1 1 1 15
-+-+-+ - =-=0 9375.
2 4 8 16 16 '
Il ne gagnera donc qu'a,,ec 6,25 chances sur 100. Cependant, l'espérance de gain de ce jeu est
infinie:
E(gain) = z.2" ( -1 )" =1 + 1 +1 + ...
11.el 2
C'est la seule aversion au risque qui justifie la décision du joueur.
n 5 • Les at s ran e
(1) (2) (3) (4) (5)
Chargement Coût lnv. par
Prime Additivité Itérativité
de sécurité maximum translation
(a) pure OK OK OK OK OK
(b) d ' espérance OK NON NON OK NON
(c) de variance OK NON OK OK NON
(d) d'écart type OK NON OK NON NON
(e) d ' utilité nulle OK OK OK NON NON
exponentielle OK OK OK OK OK
(j) de valeur moyenne OK OK NON NON OK
(g) de quantile NON OK OK NON NON
(h) de coût maximal OK OK OK OK OK
L.E.
-~ . . .,
Hors-série n°57. Les maths des assurances Tangente 79
ACTIONS par J.-L. Bertrand et B. Finas
Se protéger
contre les risques
météorologiques
Chaque jour, on prend des décisions en fonction du temps qu'il
fait. Les ventes et donc l'économie de millions d'entreprises
dans le monde sont ainsi exposées aux aléas de la météo. Heu-
reusement, il est devenu possible de s'assurer également contre
ce type de risque.
L
'actu alité fa it la part be ll e aux ce qui se traduit par un coût pour l'éco-
évènements cli matiques extrêmes no mie de 534 milliards de do ll ars, alors
que sont tempêtes, torn ades ou que le coût des catastrophes naturelles
inondati o ns. Si les catastrophes natu - n'a pas dépassé 20 milliards de dollars en
relles , heure usement rares , ont effecti- 2014. Avec le changement climatique ,
ve ment un coût lié à la destruction des cette variabilité a pratique ment doublé
bi ens , les anomalies quotidiennes de la en trente ans et les scientifiques s' ac-
météo, c'est-à-dire les différences entre cordent à dire qu 'elle va continuer à aug-
la météo observée et sa valeur norm ale, mente r. D e l ' a nal yse du ri squ e à la
sont beaucoup plu s fréqu entes et ont un conception de produits fin anc iers pour
impact cumulé et récuJTent beaucoup plus compenser les ent:rep1ises en cas de météo
important sur les finances des entrepri ses . défavorable , la gestion du ri sque météo-
Au x États-Uni s par exe mpl e, la varia- rolog iqu e fa it appe l aux co mpéte nces
bilité cl imatique tourne autour de 3,5 % , imbriquées de météorologues, c limato-
log ues, stati sti cie ns, ana lys tes , info r-
m a ti c ie n s, e t a c tu a ir es . Mo d è les,
algorithmes et mathématiques sont au
Il n~y a aucun cœur du métier de sociétés comme Meteo
élément arbitraire Protect, entreprise française créée en 2011
dans l'assurance indicielle et aujourd ' hui leader e uropéen de cette
activité en ple in essor.
Mesurer la météo-sensibilité
des entreprises
Avant de mettre en place une couverture financière , il faut comprendre la relation entre
météo et chiffre d'affaires (ou rendement, ou coûts de production ... suivant les cas).
Pour ce faire, on confronte les données de l'entreprise aux données météorologiques,
avec un objectif double : trouver l'indice météo le plus représentatif et exprimer la
relation mathématique. Il faut parfois faire appel à des outils statistiques de modéli-
sation sophistiqués car la météo n'est pas une donnée ordinaire : l'impact sur les
ventes de glaces de deux semaines à 10°C, puis de deux semaines à 30°C, n'est pas le
même que celui de quatre semaines à 20°C. Il y a des effets de seuil , et le comporte-
ment n'est pas nécessairement linéaire.
Il faut également prendre en compte la distribution géographique du risque car les
entreprises vendent ou achètent en général sur des zones étendues qui nécessitent le
choix de plusieurs stations météo.
Enfin, celui qui prend le risque en bout de chaîne est en général un réassureur ou un
fonds de gestion spécialisé.
tion que l' on déplace de quelques mètres Quand la relation mathématique est éta-
sont autant d ' éléments qui provoquent blie , on y injecte en général entre trente
des discontinuités, des ruptures d'ho- et quarante années de données météo his-
mogénéité, des données manquantes ou toriques pour calculer le montant de pe1te
des valeurs abenantes, qu'il faut traiter moyen et le montant de perte maximum
pour pouvoir utiliser la totalité del 'his- causés par la météo, ainsi que la fré-
torique. Ainsi, par exemple, Meteo Pro- quence de ces pe1tes. En s' appuyant sur
tect utilise des algorithmes pour nettoyer le passé , on cherche à évaluer le risque
et reconstruire ces historiques. La météo à venir. C'est ici qu'intervient le chan-
étant très locale, et les stations de mesure gement climatique : il faut prendre en
n'étant pas présentes partout, l'entreprise compte les tendances pour ne pas sur-
fait également appel à des modèles météo- ou sous-estimer le risque encouru. Sui-
rologiques de prévisions numériques afin vant les cas , on utilise des corrections
de reconstruire les conditions météoro- linéaires, de Loess* (LOcal regrESSion*)
logiques historiques locales n'importe ou encore polynomiales. Le prix de la cou-
où sur la planète (voir le dossier « Les ve1ture con-es pond in jïne à l'espérance
maths de la météo » dans Tangente 160). du montant moyen de la prime, à laquelle
C'est ce que l'on appelle la descente s'ajoutent divers coûts de fonctionne-
d'échelle. Ce travail est aujourd' hui rendu ment.
possible grâce aux technologies de cal-
cul informatique distribué, qui permettent D- J.-L. B. & B.F.
l'exécution en temps réel des procédures
de collecte, de traitement et de production *Modèle de régression locale qui repose sur
de données météo nécessaires à l' éva- la mét hod e des « plus proches voisins » .
luation et au transfert des risques météo
des entreprises.
le marché restreint
mais lucratif
des plaisanciers
Tous les secteurs d'assurances ne visent pas à toucher la
plus grande partie de la population. Bien au contraire.
Certains assureurs se spécialisent dans un segment
bien particulier: celui des plus nantis . C'est le cas de la très petite population
des propriétaires de yachts . Depuis quelques années, des contrats ciblent non
seulement les plaisanciers, propriétaires ou non de leur bateau, mais aussi les
professionnels du nautisme , les yacht managers et aussi, dans la filière com-
merciales, les courtiers, les yacht brokers pour utiliser la terminologie en usage
dans ce milieu très fermé. Leur sont proposés des contrats couvrant pertes et
avaries, frais d'assistance et de sauvetage, responsabilité civile, vol total ou
partiel, protection juridique et même assistance 24 heures sur 24. Une couver-
ture « faute inexcusable » est également disponible, ce qui est un comble !
On aurait vraiment tort de se priver des plaisirs de la navigation.
---
'1 --
L
a poss ib ili té d 'acc umuler de gros problèmes , tant scientifiques
d'énormes quantités de données qu 'éthiques. C'est vrai en assurance vie
concernant chacun des assurés à une époque où l 'accès à l' ADN de
d'une compagnie d'assurances et d 'utiJjser chacun va sans doute devenir possible ,
cette inf01mation à des fins conctmentielles mettant ainsi en évidence, au mépris du
et commercia les va modifier respect de la vie privée, des variations de
significativement les méthodes de risque de développement de maladies
tarification dans la décennie à venir. En ou des faiblesses génétiq ues . C'est
fait, personne ne sait vraiment dire également vrai en responsabilité civile
aujourd'hui à quoi précisément ressemblera automobile dès lors que l'on équipera
un contrat d ' assurance dans dix ans ! tous les véhicules de boîtes noires
Pour pouvoir profiter des avantages emegistrant systématiquement tous les
inhérents au Big Data (le « déluge de comportements mesurables des
données »), il va falloir s' assurer de la conducteurs, sans tenir compte des
maîtrise de modèles mathématiques et circonstances extérieures pouvant ou
algorithmiques sophistiqués afin de non justifier des agissements qualifiés
traduire une grande quantité d' info1mation a priori de déviants ou dangereux. Mais
en un processus de quantification du ce n' est pas tout : en affinant la mesure
risque efficace et adapté à chaque contrat. du risque , on risque tout simplement de
Cette évolution ne se fera pas sans poser faire disparaître le caractère mutualiste
de l' assurance et donc de lui ôter tout
intérêt social ou même commercial : si
Une étude fine de la géométrie chacun cotise pour couvrir très exactement
des espaces euclidiens de grande son propre risque , quel intérêt présente
dimension est incontournable. encore le contrat? Dès lors que tous les
2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
Dimension n
Datanomics . Simon Chignard et Loui s-David Benyayer, FYP, Le Big Data . Pierre Delort , Presses uni versi-
160 pages , 20 15 , 20 euros. ta ires de France , 128 pages, 2015, 9 euros.
L
es produits d'assurance vie Un contrat d'assurance vie classique
classique ont longtemps domi- est donc un produit financier à cash
né les marchés d'assurance. Ils jlows rigides, contractuellement conve-
ont été construits dans une optique de nus par les deux parties qui s'engagent
protection et de prévoyance ; ils en- toutes les deux fortement : les primes
gendrent de par leur conception des en- sont fixées et à date fixe ; les capitaux
gagements très stricts, tant de la part du assurés sont fixés. Les formes plus mo-
preneur d ' assurance que de l'assureur. dernes d 'assurance vie vont tendre à ré-
Dans un contrat classique d'assurance duire plus ou moins la fixité de ces en-
vie à primes périodiques, le preneur gagements aussi bien d'ailleurs du côté
d'assurance est tenu de payer la prime du client que de celui de l' assureur.
initialement prévue aux dates initiale- Même s' ils contiennent une part assu-
ment prévues. Il ne peut pas facilement rantielle de protection en cas de décès
fices existent, elle est déterminée par ces cinquantaines dernières années.
l'assureur sans que l'assuré ne puisse Cette évolution peut être vue du point
facilement la reconstituer à l'aide de du vue du client comme un progrès,
données objectives des marchés finan- dans la mesure où des gammes plus
ciers. Au contraire, dans les produits variées, plus claires et mieux adaptées
financiers de type fonds d' investisse- lui sont proposées. Mais simultané-
ments, SICA V ou autres placements, ment, l'assureur s'est aussi dégagé de
l'épargnant reçoit le rendement réel cenains engagements, notamment en
de ses placements tel qu'il découle des termes de garantie de rendement sur
prestations des actifs et après prélève- le long terme ! On pourrait donc parler
ments de frais de gestion, normalement de situation donnant-donnant : le client
clairement mentionnés. s'engage à moins mais l'assureur éga-
lement ! Par ailleurs, ces produits, en
Une assurance vie classique peut ap- se concentrant sur le volet épargne,
paraitre comme un produit simple et ont souvent rendu assez marginale la
transparent, les cash-flows à payer par dimension de prévoyance associée à
les deux parties tout au long du contrat la couverture en cas de décès et qui
étant connus dès la souscription du fait normalement partie du label d'une
contrat. Par contre, il est très difficile assurance vie. Les esprits grincheux
pour le client d'apprécier la rentabi- pourraient donc objecter qu'à trop
lité effective du produit et le coût des vouloir se rapprocher des produits de
frais implicites. La liquidité de ces type bancaire, l'assurance vie a perdu
produits pose aussi question : le calcul son âme! Ces évolutions n'en sont pas
de la valeur de rachat du contrat, dans moins une tendance inéluctable sur la
l' hypothèse où le client désire récupé- plupart des marchés.
rer son épargne avant la fin normale
de son contrat, est souvent loin d'être Les deux grandes familles de produits
évidente ! On est loin de mécanismes modernes, alternatifs aux produits
de produits financiers concurrents, ac- classiques, sont d'une part les produits
compagnés à tout moment de valeurs flexibles de type « Universal life » (vi-
de marché objectives et observables. sant à répondre aux exigences de flexi-
bilité et de transparence) et les produits
les trois défis des nouueaux produits en unités de compte de type« unit-lin-
d'assurance uie ked » (s'adressant au rendement). Ces
produits spécifiques font l'objet des
La comparaison avec ces produits deux articles qui suivent.
concurrents a amené les assureurs à re-
modeler l'offre de produits en tentant P.D.
de répondre à différents défis posés :
les défis de la flexibilité, du rendement
et de la transparence.
L
a transparence n'est pas taujours • ces primes sont inscrites avec date de
ce qui caractérise l 'assurance . valeur dans la provision du contrat ;
Celle de la gamme Universal life • des frais de gestion sont explicitement
a un double avantage pour le client : elle retirés du compte ;
lui permet de comprendre le mécanisme • le coût d'une couvetture décès com-
de fonctionnement , mais aussi tous les plémentaire éventuelle est prél evé du
détails, comme le niveau des frais ou le compte ;
montant des intérêts. • les retraits éventuels sont pris en compte ;
Un produit d'assurance vie classique • en fin d 'année le compte est crédité de
semble loin de cette transparence . Pour- l' intérêt garanti et de l'éventuelle parti-
tant il en contient les ingrédients de base. cipation bénéficiaire.
La valeur du compte devient la provi- Le tout se traduit par un décompte annuel
sion mathématique du contrat ; les ver- fourni au client de type :
sements sont les primes ; les retraits
éventuels peuvent être des rachats par- {>rovi!!ions au i 'anvier 2014 53200
tiels ; il y a bien des frais intégrés au Primes versées en 2014 5000 €
produit et le contrat est crédité d 'inté- Frais sur primes (2%) -100 €
rêts au taux technique garanti accompa- Coût couverture décès - 83 €
gné le cas échéant d ' une participation Retraits 0€
bénéficiaire. Le défi a donc été de redes- Intérêt garanti 1250€
siner le produit pour mieux faire appa- Participation bénéficiaire 525 €
raitre une logique voisine de celle du Frais de gestion - 250 €
compte d 'épargne. [Provision au 31 décembre 2014 59542€
D
ans les contrats d ' assurance vie cédent) une couverture décès complé-
« en unités de compte » (appe- mentaire dont le coût sera alors prélevé
lés aussi liés à des fonds d'in- chaque année dans la provision du contrat.
vestissement) , l'assuré choisit le (ou les)
fonds dans lequel sa prime est investie ; nombre d'unités x ualeur de l'unité
il en recevra le rendement total après per-
ception de frais par l' assureur, a priori Pourquoi le nom « en unités de compte » ?
sans garantie minimale. Contrairement Parce que tous les éléments du contrat
aux produits classiques d'assurance vie où sont exprimés en nombre de parts d'un
le rendement a souvent un caractère dis- fonds d'investissement, avec deux don-
crétionnaire fixé par l'assureur et une nées importantes: la valeur d'une unité
transparence limitée pour le client, ces et le nombre d'unités . Chaque fois que l'on
contrats délivrent la rentabilité réelle effectue un versement, ce paiement en
des fonds dans lesquels les versements euros est converti en nombre d'unités
ont été investis. Le cours de ces fonds qui vient augmenter le nombre déjà exis-
étant souvent publié , le client peut en tant pour ce contrat. Les versements effec-
cours de contrat suivre l'évolution de ses tués par les clients dans un fonds n'en
avoirs, mais aussi modifier sa stratégie affectent pas la valeur de l'unité. À tout
en passant d ' un fonds à l'autre (parfois moment , la valeur en euros du contrat
moyennant frais). est égale au produit du nombre d'unités
Cette flexibilité et cette transparence per- par la valeur d'une unité. Mais si le nombre
mettent de donner au contrat d 'assurance d'unités est garanti, leur valeur non !
vie une dynamique comparable aux pro- Comme dans un fonds d'investissement,
duits financiers les plus performants ; le elle peut changer tous les jours.
client choisira en fonction de son aversion En vue d'offrir une certaine sécurité,
pour le risque le meilleur portefeuille. notamment en cas de forte baisse des
Bien sûr, il bénéficiera des plus-values marchés financiers, ce1tains produits com-
mais aussi subira les moins-values enre- prennent une garantie minimale ; par
gistrées par le fonds d'investissement. exemple celle de récupérer au moins la
Il existe deux modalités: à prime unique somme des versements effectués. Une
ou à primes régulières. En cas de vie de telle garantie a évidemment un coût (com-
l'_a ssuré à l'échéance, celui-ci reçoit la parable à la valeur d ' une option), qui
valeur de son compte, valeur versée au sera, comme la couverture décès , pré-
bénéficiaire en cas de décès prématuré . levé de la provision ou qui viendra en
On peut également prévoir comme dans déduction du rendement attribué au contrat.
les produits Universal life (voir article pré- P.D.
Les deux règles de fonctionnement des contrats en unités sont les suivantes : le nombre d'unités Nit) du
client i ne va changer qu'en cas de nouveau versement ou en cas de retrait effectués par lui ; la valeur de
l'unité U(t) ne changera pas en cas de versements ou de retraits effectués par des clients mais elle évoluera
en fonction de l'évolution des rendements des actifs composant le fonds.
l'assurance dépendance
Depuis plusieurs années, les pays européens enregistrent un
glissement démographique se traduisant par l'augmentation du
taux de personnes âgées dans leurs populations. Ce phénomène,
essentiellement dû à la baisse du taux de mortalité, va
malheureusement de pair avec une augmentation importante
du nombre de personnes en état dit « de dépendance ».
w m w oo 100
Une enquête menée par l'INSEE il y a Pourcentages de dépendance des plus de 60 ans.
quelques années auprès d ' un échantillon
représentatif de la population française Un modèle logarithmique
regroupant plu s de 20000 personnes
90 100
considéra comme dépendantes , les per-
sonnes confinées à domicile et celles
pour lesquelles au moins trois des critères
sui vants étaient observés : utilisation
d ' une canne , difficultés à ouvrir une
porte ou un robinet , à monter ou des-
cendre un escalier, à s' habiller, à suivre
une conversation , à souffrir de difficulté
d'élocution , ou enfin présence de troubles -3,5
de mémoire.
-4 ·- -- -------- - --- -- ---- --- --------- - -------------------- ------------ -
Logarithme du taux de dépendance.
[
p;"
0
0
p;i q_:" q;i
p:
0
0
1
q:
l
En indiçant a l'état d'activité et icelui de dépendance, la matrice des probabilités de transition
après un an des états vivant/actif, vivant/invalide, mort/actif, mort/invalide est :
0 .
0 0 0 1
On n'est pas en présence d'une chaîne de Markov, les probabilités de transition variant en fonc-
tion de l'âge de l'individu. Les 6 paramètres de la matrice doivent être estimés pour tout âge à
partir de l'information disponible (deux tables de survie), et des conditions de cohérence en
matière de probabilité : elles doivent être positives et la somme de chaque ligne de la matrice
doit être égale à 1. Ces conditions laissent encore plusieurs degrés de liberté et des hypothèses
complémentaires doivent être avancées. On fait tout d'abord l'hypothèse de statique : la pro-
babilité qu'un individu valide d'âge x aujourd'hui, devienne invalide entre l'âge x + k et l'âge
x + k + 1 est égale à la probabilité aujourd'hui pour un individu d'âge x + k de devenir invalide
dans l'année. Cette hypothèse est évidemment critiquable.
On va également supposer le décès et l'entrée en état d'indépendance répartis uniformément
sur l'année (contradiction avec le modèle mais simplification usuelle).
On suppose également que l'entrée en dépendance n'accroît pas localement le risque de décès.
Enfin, on va supposer que la probabilité de décès des personnes dépendantes peut être estimée
à partir de la mortalité de la population entière par hypothèse de surmortalité. Mathématique-
ment, deux variantes se retrouvent dans la littérature.
On peut poser q~ = qx+a· La probabilité de décès d'un invalide d'âge x est égale à la probabilité
de décès d'une personne quelconque plus âgée (valide ou non), d'âge x + a.
On peut aussi supposer que : q~ = pqx.
La probabilité de décès d'un invalide d'âge x serait égale à la probabilité de décès d'une per-
sonne quelconque (valide ou non) multipliée par un coefficient strictement supérieur à 1. Le taux
P!
de surmortalité est alors p - 1. Voilà la seconde ligne de la matrice calculée car = 1 - q~.
Le calcul de p/a peut se faire au moyen de la table des 1/a : étant donnée l'hypothèse de non
retour à l'état d'actif, cette table est bien une table de survie des actifs. On calcule donc:
z;:1
Px
aa
=ra
X
Parmi les invalides d'âge x, le nombre de survivants après un an, (âge x + 1) est i!.zi!. La diffé-
rence zi!+i -i!.zi! représente le nombre d'actifs entrés e.n invalidité dans leur x" année et demeu-
rés en vie. On en tire : ai
Px =
1;+1 - P:
l"a
.z;
X
On a supposé que la transition vers l'état d'invalidité n'affectait pas la probabilité de survie, et
que cette transition va s'opérer, en moyenne, après 6 mois. Cette hypothèse nous permet d'écrire
(uniformité du risque annuel): q;i = (p_:i +q:i). ~.
On a également :
60 70 80 90 100
--0,5
- 1
- 1,5
-2
- 2,5
aa
/ "" ]
....!±!.._
. z;a . de « miracle médical » .
X [
Soit A;; la valeur de la prime unique pure couvrant le Il faut donc mettre en place la matrice qui
versement d 'une unité au moment de l'entrée en dépen- va décrire les probabilités de transition .
dance d'un individu d'âge x: Pas faci le, car de nombreux paramètres,
qu 'on ne peut évaluer de manière objec-
tive, vont être nécessaires.
C'est l 'objet du premier encadré .
On calcule enfin le capital différé et la rente pour un indi-
vidu invalide en étendant les notations usuelles : Une fois cette matrice établie, voilà les
assureurs prêts à tarifer des contrats ( voir
encadré « Calcul des primes ») . Mai s
que d'hypothèses successives non véri-
La valeur de la rente s'obtient par sommation : fiables empiriquement !
D.J.
Prouisionner
et gérer ses réserues
Les contrats vie sont de longue durée. Les primes échelonnées
s'accumulent et les compagnies doivent thésauriser celles-ci
afin d'être à même d'assumer le paiement des capitaux prévus
contractuellement. Ceci implique un calcul précis et une
gestion active de leurs réserves.
........__ /
3,25'11o
llloul
elle disposer pour
être à mê me de
fo nds et de pl acement !
•••••••••••••••••••
• •
: Référen,es •
•
• •
•• Théorie des j eux, stratégies et ••
•• tactiques. Bibliothèque Tangente ••
• 46, 2013. •
•• Maths et politique. Bibliothèque ••
• Tangente 45, 2012. •
•• Dossier « Géographie humaine » . ••
: Mathématiques et géographie , :
• Bibliothèque Tangente 40, 2010. •
• Dossier « Les ressources finan- •
•• cières ». Tang ente SVP 77-78 , ••
: 2014. :
• •
• •
•• •••••••••••••••••
L
a gestion de certains s111 1stres un matériau stati stique structuré sous
peut s'étaler, on l'a vu dans forme de « triangles de développe-
le précédent article, sur plu- ment temporel » des règlements, des
sieurs années. Chaque compagnie provisions et de leur somme (qui est
d 'assurance est donc tenue de comp- nommée charge totale estimée des
tabiliser au passif de son bilan un sinistres).
certain montant, appelé provision
pour sinistres à régler (PPSR) , des- Un maillon de la chaîne
tiné au règlement futur et progressif
des s ini stres su rvenus. Le montant Mais voyons plutôt un exemple numé-
des provisions nécessaires à la cou - rique, portant sur les règlements des
verture de l' ensemb le des sini stres s.inistres (relatifs à une certaine garan-
représente les e ngagements financiers tie octroyée par une compagnie à ses
de la compagnie envers ses assu rés ou assurés). Limitons-nous aux années de
des tiers. Le défi est de taille car ces survenance de sinistres 2009 à 20 14.
PPSR peuvent atteindre plusieurs fo is Pour simplifi er et fai re ressortir les
le montant an nuel des primes encais- mécanismes clés, admettons que tous
sées : il faut que l'évaluation de ces les sin istres seront totalement clôturés
provisions fasse l'objet d ' une attention à l' issue de la six ième année cl ' ob-
particulière et d'une estimation auss i servation. li fa udra revenir sur cette
préc ise que possible. La méthode d'es- hypothèse puisqu'il tombe sous le sens
timation globale des provisions la plus que, bien souvent, les sin istres ne sont
utilisée par les actua ires porte le nom pas totalement réglés après six années
de méthode Chain Ladder ( « mail- d'obse rvation I En cause, notamment :
lons de la chaîne » ). Elle repose sur la consolidation parfois très lente des
a.)
Années d'observation (1 à 6)
Prov ision s
2 3 4 5 n. = 6
a.)
u 2009 872 940 989 l033 0
C
Cl
C
a.)
2010 898 967 1022 1067 45
>
~
déboursées et pouvant, en cas d ' irré- Dans le cas de notre exemple, la com-
gularité, présenter un bi ais sensible. pagnie doit provisionner 1189 unités
Appliquon s ce coefficient de déve- monétaires.
loppe ment au montant des paiements
effectués dès la première année pour Élargissons l'horizon !
les sinistres survenu s en 2014, à savoir
C 201 u On obtient une estimation des u
"
paiements cumulés lors de la deuxième
année d ' observation (exercice calen-
daire 2015) re lative ment aux sini stres
~·\__ l0"1.on1,.0U
de survenance 2014 :
ê 20 142 = l ,675 X 469 = 786. k~-
• cotff_.-t1,~
~~-..i
- •--
-..Oet.o
• f....,..:ion,11,
'"~r.t,6"
De la même manière, on calcule suc- Ju squ 'à prése nt, tou s les sini stres
cess ivement les coefficients de déve- étaient réglés à l' issue de la sixième
loppement, qui permettent de com- année. Cette hypothèse est fortement
pléter le tableau de proche en proche restrictive. En réalité, les sini stres
et de calculer les montants à provi- vo nt souve nt donner lieu à des règle-
sionner année par année. Ces derniers ments bien au-delà ! Co,runent pro-
sont égaux aux différences entre les céder pour envisager d ' aller jusqu ' à
montants estimés après six ans et les la dixième an née d ' observation ? Il
réali sations déjà observées. Ainsi, pour faut estimer les coeffic ients de déve-
2012 , un montant total de 1150 unités loppeme nt sui vants. Voyons com-
monétaires a été prévu, dont seul s 969 ment ceux-c i évoluent (vo ir le gra-
ont été effectivement réglées. Il faut phique ci-dessus). Une modéli sation
donc provisionner la différence, soit au moye n d'une fonction pui ssance
181 unités monétaires. Lorsque toutes inverse du type y = 13 + K x---« semble
les prov isions partielles o nt été calcu- appropri ée. li est réaliste de supposer
lées , il ne reste plus à la compag nie qu ' en horizo n infini la totalité des
qu 'à en effectuer la sinistres sera effectivement réglée, ce
somme. qui permet de poser 13 = l. Le modèle
prend alors la fo rme y = l + K x---« .
Un passage aux logarithmes livre
ln (y - 1) = lnK - a ln x; ce nouveau
modè le permet une régress ion linéaire
à partir des observations transformées.
On obtient K = 0,5504 et a= - 1,68 16.
Ce paramétrage permet d' estimer cer-
ta ins coeffic ients de déve loppement :
ê 6,7 = 1,027, ê 718 = 1,021 , ê 819 = l ,017 et
ê ~110 = 1,014. Le produit de ces coef-
ficients de développement porte
le no m de tail fa ctor (« fac-
teur de traîne » ). Dans le
cadre de notre exemple, il
va ut 1,0805. Ce fac-
ÉVITER LA RUINE
la méthode de Bornhuener-Ferguson
Si l'on souhaite modifier les estimations obtenues par la méthode chain ladder, en intégrant dans
les calculs une information sur la sinistralité attendue par exercice de survenance, alors on peut
utili ser la méthode introduite en 1972 par Ronald Bornhuetter (1932-2008) et Ronald Ferguson.
En assurance non vie, le niveau de si nistralité s'exprime par le rapport « montant des sinistres »
sur « prime acquise» , que l'on nomme loss ratio. Pour l'exercice i, on note Pa; le montant des
primes acquises et S; la sinistralité attendue ; le loss ratio est donc donné par S; / Paï Mais ce
rapport n' intègre pas les modifications d'ordre de grandeur brutale du portefeuille. Supposons
que pour les sinistres de 2014, un retard dans la gestion des sinistres entraîne une diminution
anormale des paiements effectués cette même année. Dans ces conditions, l'application d ' un
coefficient moyen de développement calculé à partir des exercices précédents va sous-estimer
la charge attendue pour cette année. La méthode de Bornhutter et Ferguson (B-F) corrige ce
biais en introduisant dans le calcul de la charge espérée des si nistres une information exogène
sous la forme d ' un « Joss ratio attendu» plus crédible que le précédent, en utilisant la formule :
Il n'y a aucune simplification à faire, le loss ratio intervenant étant attendu (exposant A) et
différent de son observation. Avec nos notations, l' indice i représente l'année de survenance du
sinistre, le temps n la dernière année d' observation (20 14) et l'horizon m = 10. Les quantités
C;,,,+I-i sont donc les montants figurant sur la diagonale et concernent les sinistres déjà réglés. La
grande parenthèse donne le pourcentage du montant total à régler non encore liquidé, comme
une proportion, corrigée par le loss ratio attendu, des primes perçues.
Appliquon s cette méthode à notre exemple. On constate une modification importante apportée
par la méthode B-F à l'estimation de la charge espérée des sinistres, calculée par la méthode
« chain ladder », qui passe en 2014 de 11 35 à 1549 unités monétaires. Les charges des autres
années ont également été corrigées.
"
C
0)
2010 898 967 1022 1067 1153 13 1
>
~
::l 2011 936 1008 1063 1110 1200 192
"'
0)
v 2012 969 1044 1101 1150 1242 273
"'
0)
'"
C
2013 932 1004 1059 1106 1195 279
C
<( 2014 886 954 1006 1051 1135 666
Coeffic ie nts de
1,675 1,127 1,077 1,054 1,044 l ,0805 1625
déve lo pp e me nt
teur doit à présent être appliqué à la pothèse où les sinistres de l' année de
charge totale estimée par exercice de survenance 2014 feraient l' objet d ' un
survenance à l' issue de la sixième règlement plus rapide que les sinistres
année pour obtenir une estimation de des exercices antérieurs (2009 à 201 3),
la charge totale des sinistres à l' issue on conçoit fort bien que les coefficients
de la dixième observation. de développement obtenus selon les
exercices 2009 à 2013 , appliqués aux
Numériquement, cette aug me ntation règlements de l'exercice 2014, vont
de plu s de 8 % des débours de la com- surestimer considérablement la charge
pagnie se traduit par un accroissement à l ' ultime (observation 10) de ces
parfaitement calculable des provisions sinistres.
à acter. Ainsi, pour l'année 2012, le
montant total estimé passe à l 242 La méthode chain ladder appliquée
unités monétaires (1150 x 1,0805 ). Et uniquement sur les paiements cumulés
la provision pour cet exercice devient peut donc entraîner une sous-estima-
1242 - 969 = 273 unités monétaires. tion importante de la charge totale
On constate que cette extension de des sinistres , objet de l' analyse. Si le
l' hori zon a un effet très signifi catif de p011efeuil1e est composé pai1iellement
la provision totale à prévoir : elle passe de sini stres très importants , fortement
de 11 89 à 1625. provisionnés, n' ayant à l' instant de
l'analyse fait l'objet d ' aucun paiement,
Détecter les sinistres lourds cette méthode va ignorer ces sinistres
importants . Il est donc nécessaire d'ap-
La vali dité des résultats obtenus par pliquer également la méthode sur le
cette méthode repose sur deux hypo- triangle de développement de la charge
thèses , gui ne sont pas nécessairement totale (pa iements majorés des pro-
vérifiées. La première est ce ll e de visions). La comparaison, par année
la constance du tau x d ' inflati on des de survenance, des résultats issus des
règ lements du triangle des données deux estimations permet de détecter la
(triangle supérieur) et des règ lements présence de tels sinistres et d'y réser-
futurs estimés (triang le inférie ur). La ver un traitement particulier.
seconde porte sur la constance des
cadences de règlement des sinistres F.V.
d'une observation à l' autre. Dans l' hy-
vec le temps qui passe, chaque montants aléatoires. Pour l' intervalle
Gardons l'espérance!
Le surplus initial u0 pour la compagnie Si X est une variable aléatoire, de fonction de répartition
correspond à ses réserves libres à l 'in- Fx, la fonction génératrice des moments de X est une
stant initial. Sa « fonction surplus » U, fonction mx usuelle de la variable réelle s, définie for-
est alors définie par u0 + et - S,. mellement par la relation suivante :
Si l'on désigne par , 1, , 2 ... les instants
(aléatoires) de survenance des sinis-
tres, alors la figure suivante est une
représentation possible de l'évolution Le domaine de cette fonction est l'ensemble des valeurs
du processus de surplus. des où l'espérance est finie. Pour une variable aléatoire
continue possédant une densité de probabilité j ~, on peut
faire un calcul explicite :
u,
mx(s)= 1:= e"'}<(x)dx.
E( ~')= ~o + c - ˵
qui , sur le long terme, sera négatif,
sauf si la quantité c - Àµ est positive.
Pour cette raison, on introduit la notion
de chargement de sécurité 8, défini par
la relation c = (1 + 8) Àµ. On définit Ce coefficient d'ajustement (qui est
ensuite le coefficient d'ajustement R une valeur de t) permet de calculer
comme solution strictement positive une borne supérieure pour notre prob-
de l'équation du temps À+ et= Àm_/t). abilité de ruine, ce qui est déjà un
On constate que le membre de gauche résultat intéressant : c'est l'inégalité de
de cette équation est linéaire alors Cramer-Lundberg, qui nous apprend
que le membre de droite, constitué de que 'P (u 0) ~ cR110
•
La ruine de l'assureur
Le théorème de la ruine du joueur affirme
qu'un joueur doit finir ruiné s'il joue sans
s'arrêter à un jeu équitableJ à partir du
moment où son adversaire est plus riche
que lui. Un assureur peut-il finir ruiné?
Sriniuasa Uaradhan
et les éuènements rares
Le mathématicien indien Varadhan a été récompensé par le
prix Abel pour ses « contributions fondamentales à la théorie
des probabilités et en particulier à la création d'une théorie
unifiée des grandes déviations ». Cette étude des occurrences
d'évènements rares est particulièrement pertinente dans la
gestion des réserves de l'assureur.
Ce texte est a théorie des probabilités a pour La théorie des grandes déviations étu-
adapté de deux
articles parus
dans Tangente 118
L ambition d'analyser des situa-
tions régies par le « hasard ».
Jacob Bernoulli établit au xv 111e siècle
die l'occurrence de tels évènements
rares et leur vitesse de décroissance. Ce
sujet a des applications concrètes dans
(septembre la loi des grands nombres, qui sti- des domaines aussi divers que la phy-
2007) et dans pule que la moyenne d'une longue sique, la biologie, l'économie, les sta-
Tangente 121 série de tirages aléatoires est générale- tistiques , l' informatique et l'ingénierie.
(mars 2008). ment proche de la valeur attendue. Par Quelles sont les réserves de capitaux
exemple la moyenne d'une longue série nécessaires à une compagnie d' as-
de jets de pièces (pile ou face) donnera surances pour garder la probabilité
environ 1/2 (soit 50 %) de« pile ». d'une incapacité de payer en des-
Mais qu'en est-il de la probabili- sous d'un niveau acceptable ? Cette
té d'avoir, par exemple, 90 % de question appartient au domaine des
«pile» ? Elle n'est pas nulle, même si grandes déviations.
elle décroît très vite avec le nombre n
de tirages ! L'origine du problème ...
log!
chocs une petite impulsion. Le mou-
/ (r) = log 2 + r log r + (1 • r ) log{ ! • r) vement brow nien des mathématiciens
/(x) = 2 (x • ~ )' est une idéalisation du précédent : des
chocs infi nitésimaux sont reçus en per-
manence ; tous les points de la trajec-
toire sont des poi nts anguleux. C'est
0%
l' ingrédient obligé de tous les modèles
La fonction de taux d'un jeu d ' évolution continue et aléatoire.
de pile ou face et son approximation
quadratiquef(x) : écart pour les Varadhan imaginera quelques années
grandes déviations. plus tard le principe des grandes dé-
viations (PGD), qui repose sur l' hypo-
Cette fo nction est symétrique, par dé- thèse de l'existence d ' une telle fo nction
fin ition du jeu, par rapport à 1/2. La de taux I (r) , dénommée aujourd ' hui
fi gure montre que pour les grandes dé- fo nction de Donsker-Varadhan . Son
viations, elle s' écarte de l' approx ima- analyse fo urnit de nombreuses infor-
tion quadratique j(x), qui correspond mations sur le système étudié. En par-
à une gaussienne . Notons que, dans ce ti culi er, on peut obtenir à partir de cette
cas, r = l / 2 est la seule valeur annulant fo nction caractéri stique des bornes ex-
la fo nction de taux I (r ), ce qui corres- ponentiell es sur la probabilité d'évène-
pond à la loi des grands nombres . ments rares .
Il
La banque Dexia fut créée en 1996 par fu sion entre le Crédit Communal de Belgique
(une institution plus que centenaire et qui avait la confiance du public) et le Crédit
Local de France (fondé en 1987). Des rêves de grandeur conduisent les dirigeants de
l'entreprise à l'acquisition répétée d'institutions bancaires américaines, israéliennes,
canadiennes ou turques.
Dexia devient en quelques années leader mondial sur le marché des
services financiers au secteur public, opérant dans la quasi -totalité des
pays de l'Union européenne, avant de sombrer dans l'un des plus grands
scandales financiers européens , supérieur à celui du Crédit Lyonna is.
En 2008, dans le contexte de la fameuse crise des subprimes, Dexia est
mi se sous pression au vu de ses relations d'affaire avec le groupe Fortis. L'action du groupe chute
de 20 à 1,85 € en moins d'un an. Mais le groupe comptait pl us de 20000 employés. Il avait partie
liée avec un grand nombre de communes. Fin 2011 , les États belge, français et luxembourgeois in-
jectèrent plusieurs milliards d'euro dans l'entreprise au bord de la faillite, pour éviter son naufrage,
grevant d'autant les dettes publiques déjà conséquentes. Dexia fut
scindée en une « Bad bank » reprenant plus de 80 milliards d'eu-
ros d'actifs« toxiques» et financée à pl us de 60 % par l'état belge,
véritable épée de Damoclès aujourd'hui encore, et des entités plus
saines dont a émergé en 2012 la banque actuelle Belfius.
a Belfius
Tangente Hors-série n°57. Les maths des assurances
EN BREF
··-···
;,·
FORTIS
croître démesuré-
ment qui habitait
le groupe AG (voir
ci-contre), couplée à celle de rému-
nérer excessivement ses action-
naires, conduisit ses gestionnaires
à l'acquisition d' actifs à fort ren-
dement, mais en conséquence éga-
lement fort risqués. Cet état n'était Yves Leterme .
pas connu des actionnaires. Jusqu 'à
fin septembre 2008, Fortis passait La chute de Fortis, qui perdit 95 % de sa valeur
pour être l'une des institutions les en un an, entraîna celle de l'indice BEL20 en
plus sûres en Europe, supportant Belgique, avec une perte de 53,7 %, ce qui cor-
à elle seule une part importante respond à près de cent milliards d'euros, qui se
de l'indice BEL20 en Belgique. sont ainsi « volatilisés ». Mais tous les détenteurs
En moins de dix jours, le géant d'actifs Fortis n'étaient pas également informés.
s'est écroulé, sauvé in extremis par Des soupçons de délits d'initiés pesèrent sur bien
une nationalisation partielle par la des actionnaires qui avaient liquidés leurs actifs
Belgique et le Luxembourg et une très opportunément un peu avant la débâcle
vente bradée à la BNP Paribas. Les (voir ci-contre).
gestionnaires arrogants furent pure- Il y a plus grave encore. Yves Leterme, Premier
ment et simplement déposés. ministre en exercice, fut contraint de remettre la
Mais dans l'esprit de beaucoup de démission de son gouvernement le 19 décembre
citoyens, la vénérable institution 2008, suite aux déclarations du président de la
passait pour un géant indestruc- Cour de cassation, qui affirmait avoir « des indi-
tible, et ses actifs pour des place- cations importantes » précisant que le gouverne-
ments « de bon père de famille ». ment de M. Leterme aurait tenté de faire pression
Les conséquences de la faillite de sur la justice dans le dossier de démantèlement
l'entreprise sont donc socialement de Fortis, au bord de la faillite. Ce gouvernement
terribles : beaucoup de bas de laine
est donc tombé pour « soupçons d'influence de
se retrouvent vidés de leur contenu.
l'exécutif sur la magistrature dans la procédure
De plus, le sauvetage in extremis
judiciaire contestant la vente de Fortis à BNP
de l'institution par nationalisation
Pari bas » . On n'imagine pas les conséquences
d'une mauvaise gestion de ses actifs financiers
accroît d 'autant la dette de l'État
quand on est un géant de l'assurance!
belge.
Il y a garantie...
et garantie
Une des caractéristiques de l'assurance vie par rapport à
d'autres formes d'épargne est d'offrir aux clients des garanties
sur de très longues durées. Mais il existe différentes formes de
garantie, qu'il n'est pas toujours facile de comparer.
L
es produ its d 'assurance vie ont di verses, ne sont pas toujours clairement
une double fonction. Déjà, ce sont exp licitées . Il n 'est dès lors pas inutile
des produits d 'ass urance : ils de tenter d'en décrypter leurs mécaniques
visent à protéger le client ou ses ayants parfois un peu secrètes et cachées !
droit contre certains risques liés à la vie
humaine (par exemple le risque de décès Décrypter les petits caractères
prématuré dans une assurance temporaire
décès, ou le risque de longévité dans une Concentrerons-nous sur les produits
rente viagère) . Ensuite, ce sont des produits d'assurance vie à taux garanti (parfo is
financiers , dans la mesure où ils contiennent appelés contrats en euros) : ils constituent
le pl us souvent une fonction d'épargne l'archétype du produit à garantie. Le
significative. rendement octroyé par l' assureur aux
En tant que produit d'épargne , un contrat produits à taux garanti se fait en deux
d 'ass urance vie se distingue d 'autres étapes.
formes d'épargne (par exemple de type Première étape : l'assureur garantit sur
bancaire), ne serait-ce que par la façon l'épargne un taux d'intérêt minimum,
d'attribuer le rendement au client. En appelé taux technique . Il s'agit do nc
particulier , deux éléments jouent d' une garantie a priori annoncée au client
généralement un rôle capital et spécifique : lors de la souscription du contrat. Ces
d ' une part , le caractère long terme des contrats étant généralement à long terme ,
produits, souvent destinés à une épargne l' assureur peut être amené à s'engager
en vue de la retraite; d 'autre part, la s ur de trè s longue s périod es ; on
présence de nombreuses garanties de comprendra sans peine qu ' il proposera
rendement visant à protéger le client et un taux garanti prudent, généralement
assurer une rentabil ité minimale de inférieur aux attentes de rendement sur
l 'épargne (l'ass ureur retrouvant ainsi sa les marchés ...
fonction d 'ass urer et de prendre des L'octroi d'un rendement basé sur ce taux
risques, y compris dans la sphère des technique prudent conduit naturellement
investi sse ments !). Ces garanties, très l'ass ureur à réaliser a posteriori des
La gestion actif-passif
La richesse d'une compagnie d'assurances se mesure par la
différence entre les flux financiers futurs actualisés générés
par son passif et son actif. Chaque compagnie est donc
attentive à certains éléments exogènes, comme le taux
d'intérêt, susceptibles de perturber son équilibre financier.
'
L
cx pre~s io n risqu e de taux de la valew- d'une obligation ou d' une série
recouvre l ' ensemble des de flux actualisés relativement au taux
co n séquences financières pratiqué sur le marché ? Les répo nses à
induites par une variation du taux d'intérêt ces questions vont nous men e r aux
sur la richesse d'une compagn ie concepts de duration, de convex ité et
d ' assurances. C'est en effet l'une de ses d ' ALM (asset liability management, ou
préoccupations majeures. Les engagements gestion actif- passif en français) .
actés au passif de son bilan sont couverts
à l ' actif de son bilan par les valeurs S'immuniser contre les taux d'intérêt
représentatives de ces engagements . Ces
dernières sont majoritairement constituées
de titres obligataires. Quelles sont les
condition s d'immunisation d'un
1=0 /= 1
investissement obligataire contre une
-1000 30 30 30 1030
variation du taux d'intérêt pratiqué sur
le marché pour des instruments financiers
identiques ? Quelle est la « sensibilité »
Valeurs t= 2 t= 3 t =3,82677 t= 4
r = 0,02 1080 ,02 1101,62 1119 ,76 1123 ,65
r= 0,03 1060,9 1092,73 1119,76 1125 ,51
r = 0,04 1042,34 1084,03 1119,76 1127 ,39
1,04 1,04
On calcule aisément le nouveau rendement
x de l'actif sous modification de taux ,
+0(±~)(1+,-)
+l=I (1 r)
0 1
- =0,
puisque notre investissement de 1000 €
nous donnera 1084,03 € après trois ans : d'où la valeur donnée dans le texte.
1000(1 + x) 3 = 1084,03 , Par ailleurs, en limitant au premier
soit x = 0 ,027261 = 2,7 % environ. ordre le développement en série de
Les tableaux ci-contre donnent Taylor de V(O, r) au voisinage du
différentes valeurs de l'actif et de son taux initial r0 , on obtient :
rendement pour des échéances comprises _ D(r0 )
entre 2 et 4 et des rendements compris V(O,r) - V(O,r0 )---V(O,r0
)(r-r0 ).
l+r0
entre 2 et 4 % .
Il existe un instant de liquidation, à savoù·
t = 3 ,82677 années, tel que le rendement obligataire conserve un rendement au
de l'investi ssement obligataire est moins égal à son rendement initial de
« immunisé » contre une faible variation 3 % . Cet instant particulier D fut introduit
du taux d 'i ntérêt. À cet instant de par l'économiste canadien Frederick
liquidation D , la valeur de l'investissement Robertson Macaulay en 1938 sous le
mo d IJ;{';,ee
' D M = -D(1ô-) , ca1cu l ee
' au taux
1+r0 en arrondissant au centime d ' euro près.
initial r0 , on peut noter (voir encadré), pour La valeur approchée de l' obligation en
une petite variation l-,,r du taux (r = r 0 + t = 0 en utilisant duration et convexité
!-,,r) : modifiées fait passer l' erreur absolue de
Valeur Exacte
Erreur commise
par approximation
linéaire
ro r taux
(1 + r)
l= l
1
-
1
•
égale à T (T + 1).
Développons cette fonction en série de Taylor au voisinage
Honorer ses engagements du taux initial r0 :
, V"(O,r0 ) ( 2
V(O,r) = V(O , r0 )+ V (0,r0 )(r - r0 )+ r - r0 ) •
La durati on et la convex ité d ' une série 2
de flu x financiers tiennent un rôle Le terme du premier ordre a déjà été calculé.
T
dé termin a nt dan s la recherche et la ~ t(t + l)IF
Il reste à expliciter V"(O, r0), soit ,,L,, +2' '
conservation d ' un équilibre entre l' actif t=1 (l+r)
et le p ass if d ' une co mpagni e lorsqu e
l' intérêt se porte sur les conséq uences
financières d'une vaiiation du taux d' intérêt
sur sa richesse. Une compagnie collecte
des primes . Elle est dès lors redevable
d 'engagements, inscrits à son pass if sous
fmme de provisions techniques, vis-à-vis
de ses ass urés. E n co ntr epart ie, la
compagnie possède à son actif des valeurs ce qui permet d'écrire :
représentatives placées et cotées sur le
marché financier. Le différentiel entre
la valeur actualisée de ses engagements
reprise au passif, VP(0 , r), et la valeur
ac tuali sée à l 'ac tif de ses avo ir s,
VA(0, r) , re présente la ri chesse de la richesse GAP(0 , r) contre une variation
compagnie, souvent appelée GAP(0 , r) du taux d ' intérêt pratiqué sur le marché.
pour gap actifpassif Un des objectifs de Prenons un assure ur qui vend un bon de
la gestion actif- passif est de protéger la capitalisation d ' une durée de trois ans à
=0 ,24.
etGAP (0;0,06) = ( 250 + 250, + 2503) ·
1,06 J,06 - 1,06
Si le taux du marché augmente de 1 %,
-5788 , 1= 6,5. le GAP devient (toujours en euros) :
• Les}y']):èmes de retrait·:·
moint1i15 :r_n~jns,,Jtomb
· --
ent-~voliie rp°'riur""é
,..et paie · ,
---- __ .
, ..,.
· s retraités, dont4e·no _
.
Un uieillissement irréuersible
de la population
En France, le problème des retraites est d'actualité du fait du
vieillissement de la population. Les réponses apportées par les
différents pays développés passent par un allongement de la
durée de cotisation et une diminution des taux de remplacement.
Photo de
cou verture du
numéro de
Variances sur
le sujet.
(AfoJ.l~
Hors-série n°57. Les maths des assurances Tangente
par Daniel Temam
Répartition
ou capitalisation
les clés pour comprendre
Comment calculer les pensions versées aux retraités ? Dans le
système par répartition, les salariés et leurs employeurs
payent des cotisations. Dans le système par capitalisation, le
futur retraité se constitue un capital. Mais en pratique,
comment limiter le déficit des retraites ?
a retraite dite par« répartition»
retraites complémentaires en
France. Les cotisations ver-
sées par un salarié ou en son
nom lui donnent des po ints .
La retraite complémentaire
)) qu ' il touchera sera fo ncti on
des points qu ' il aura acquis ,
ce qui fait ressembler le sys-
tème de ce point de vue à un
système par capitali sati on.
M ais les cotisations versées
so nt immédi atement utili-
CAiovrJlé
sées , comme dans le cas de
pen s io n qu ' il touchera . Les so mmes la répartition . De même , dans certains
recueillies pour son compte sont placées systèmes de capitalisation , le montant des
sur les marchés fin anciers.Au temps où futures retraites est prédéfini , et ne ri sque
les bourses étaient en fo1te croissance, ces donc pas de subir les aléas des marchés
sommes se revalorisaient constamment. financiers. Mais le système peut deve-
D ans les périodes moins favora bles , nir déficitaire. Il faut alors un moyen
quand la bulle Internet a éclaté, pui s au d ' assurer le versement des retra ites pro-
moment de la crise des subprùnes , les mi ses. Aux É tats-Uni s, un organisme
perspectives sont apparues beaucoup public , la Pension Benefit Guaranty Cor-
moins favora bles. Par ailleurs , certai ns poration , a été ainsi mis en pl ace. Il est
retraités ont perdu tout leur capital à la financé par des primes d ' ass urance ver-
suite de malversation s financi ères. Ce sées par les em ployeurs.
fut le cas pow· les salariés d'Enron , quand
cette soc iété a fait faillite. Il est apparu li reste un aspect moin s apparent sur
alors que les diri geants de cette société leq uel les deux systèmes se rejoignent.
avaient vidé les fonds de pension qui Po ur une période donnée , une ann ée
devaient verser les futures retraites de par exempl e , tous les bi ens et serv ices
leurs salari és. produits le sont par les actifs . Mai s il s
Un autre probl ème est que les salariés, doi ve nt les partager avec les retraités
surtout qu and ils commencent leur vie qui , grâce à leur pension s, et quelle que
active, ne cotisent pas suffisamment : so it la façon dont elles ont été déter-
cela n 'a rien d 'étonnant , leur retraite minées , en consomment une parti e de
leur paraît bien loin. C'est pourquoi les ces bien s et services . Quand la propor-
entreprises versent des compléments , tion de retraités augmente, avec le vieillis-
fonction des so mmes versées par les sement de la population et la baisse de
salariés , et toutes les sommes versées la natalité, le problème de ce partage
donnent généralement droit à des avan- prend une acuité croissante. Les actifs
tages fiscaux. peuvent trouver la part des retra ité s
excess ive: les retraités de leur côté ne
Le choix de systèmes mixtes veul ent pas la voir baisser , et ils di spo-
sent d'une force électorale pour fa ire
En pratiqu e, de nombreux sys tè me s entendre leur voix ...
mi xtes ont été mi s en place dans tous D.T.
les pays. C'est le cas par exemple les
I
X X 1 X , OU :
\
• i désigne le taux d'actualisation,
• 1 + t représente le taux d'indexation de la cotisation ,
• P 1(x) représente la probabilité de vie dans un an (voir ci-
dessus) .
Le versement de cette somme précise donne droit au paie-
ment d'une rente viagère différée den années d' un mon-
tant annuel constant de
l+t
r2 = r1 x - -. x Pi(x).
1+ l
Et ainsi de suite pour les années x + 2 (rente r 3), x + 3
(rente r 4) ... x + n - 1 (renter,,) . Un diagramme des flux
Probabilité de uie est représenté ci-dessous.
Les calculs li és aux retra ites utilisent des La rente R finalement obtenue est la somme
données intitulées probabilités de vie . On R = r 1 + r2 + r 3 + ... + r11 •
les définit de la manière sui vante . Si lx désigne
le nombre de survivants d'âge x d'une popu- Il est maintenant possible de calculer la cotisation indexée
lation fermée , alors la probabilité PJx) qu ' une à un taux de t par an, donnant lieu à une rente viagère de
personne âgée de x années aujourd ' hui so it 1 euro différée den années à l'âge x. La cotisation annuelle
vivante dan s n. a nnées es t égale à à payer à l'âge x (et à indexer ensuite au taux t) est a/x) / R.
P (x) - lx+,,
Il - l .
,\'
Ce que
On peut alo rs calc uler (po ur n et n' d e ux l'adhérent
reçoit
en tiers) qu e
fx+11+11 ' l.î+11 {(x+ 11 )+11 ' R R
--=-X---
[X
l X
P11 (x + n).
JJ.
(âge
Axe du te mps
a, (1 + t)a,
Ce que
atteindre l 'âge x + n, puis pati e nter n' années l'adhé re nt
e nsuite ... paie
du marché : les risques financ iers liés à dès sa mise à la retraite, tout en étant
la seule capitali sation peuvent s'avérer couverts par les cotisations des actifs
considérables. L 'épargne seule ne garantit présents) . Chacun se retrouve titulaire
pas une retraite aisée avec certitude. d'un compte mais ce dernier, virtuel ,
Une autre (r)évolution structurelle a été est un intermédiaire de calcul et non un
proposée par la Suède : le système des vrai compte d'épargne. Dès l'âge de la
comptes notionnels . Selon le Larousse, retraite, ces comptes virtuels sont convertis
l'adjectif « notionnel » qualifie ce qui en rentes viagères au moyen de calculs
se rapporte à une notion, à un concept. actuariels .
Dans le cas présent, un bon synonyme Ainsi , un simple f01malisme mathématique
en serait virtuel, ou , pourq uoi pas , met en évidence de façon nette les seules
mathématique . Reprenons nos deux stratégies pouvant être mises en place dans
fonctions C 1(t) et Cit) , modélisant le régime des retraites par répartition.
respectivement l' entrée et la sortie du Si l'on désire maintenir un ce1tain niveau
régime des pensions. Le passage aux de solidarité, les solutions au vieillissement
comptes notionnels consiste à maintenir de la population ne sont pas légions : il
un système de répartitions mais en le faut soit augmenter les cotisations , soit
basculant vers un régi.me en contributions diminuer les prestations , soit modifier la
définies. En d'autres termes , la fonction durée d ' act ivité des citoyens (ce qui
C 1(t) est connue et l'on doit reconstruire rev ient à faire les deux). Les actifs vont
en permanence P de manière à équilibrer cotiser plus longtemps et donc plus. Ils
entrée et s01tie. Au niveau du fmancement, toucheront moins longtemps une retraite
tout est semblab le au système actue l et et toucheront donc moins . Mais les effets
les cotisations des actifs servent toujoms de cette st ratégie sont bénéfiques
à financer les retraites. La différence économiquement et socialement. La
se situe au niveau du calcul des retraites. prise en compte de la pénibilité de
Aujourd 'hui , ce ca lcu l est une fonction certaines tâches , autorisant une retraite
complexe des derniers salaires, de la anticipée , atténue ce que la mesure
durée de la carrière , de certains plafonds , pourrait avoir d ' inhumain .
ce qui entraîne de véritables casse-tête Enfin, rappelons quelles furent les bases
quand le futur retraité a changé plusieurs du premier modèle du système de retraite
fois de statut (fonctionnaire, indépendant, par répartition . Il est du à une initiative
salarié). L ' idée est de considérer que prise en 1889 par le chancelier allemand
toutes les fonctions successives d'un Otto Eduard Leopold von Bismarck
actif lui permettent d'engranger un e (1815- 1898). Il aurait demandé à son
épargne fictive capitalisée tout aussi conse.ill er : « À quel âge fa ut-il fixer
fictivement sur un compte - le fameux l'âge de la retraite pour qu'on n'ait jamais
compte notionnel - qui lui garantira un à la verser ? » « À 65 ans » lui fut-il
certain niveau de retraite. Attention , répond u. Quelle aurait été la réponse du
dans ce système , ce niveau de retraite conseiller auj ourd ' hui ?
est variable et sera recalculé régulièrement
de manière à maintenir l'équilibre entre D.J.
C 1 et C 2 (les comptes notionnels étant
construits de façon à réaliser un équilibre
permanent entre les contributions versées
par chaque actif tout au long de sa
carrière et les prestations qu ' il recevra
késako 7
Le fonds de pension est un fonds d'investissement spécifique
à la retraite par capitalisation. L'objectif était à l'origine de
prendre en charge tous les besoins des salariés afin de les
rendre dépendants de l'employeur et de prévenir la
syndicalisation. Qu'en est-il de nos jours ?
n.fonds de pension est un fonds des actifs dans un cadre indépendant de
Prestations ou cotisations ?
On trouve cieux types de fonds de pen-
sion : les fonds de pension à prestations
définies, qui sont la plus ancienne forme
de fonds de pension, et les fonds de pen-
sion à cotisations définies. Le fonds à pres-
tations définies s'engage à payer des
prestation s cl ' un montant prédéterminé
selon le mode de calcu l adopté par le
fonds (par exemple , 2 % du salaire de
fin de carrière par nombre d'années d'an-
tA"îollNE cienneté). La charge du financement
les droits sont bloqués ou perdus en cas le plus gros fonds de pension
de changement d 'employeur. est japonais !
À partir des années 1980 se dé ve lop-
pent les fonds de pension à cotisations Lorsque l'on évoque les fonds de pen-
définies. Le contexte économique change, sion, on pense immédiatement aux fonds
la période de crise favori se la mobilité américains, qui détiennent 35 % de l'en-
des travailleurs, et on constate qu 'une par- cours des troi s cents plus gros fonds de
tie impo1tante des salariés affiliés aux fonds pension du monde. Cependant , nombre
à prestations définies n'a jamais perçu de pay s possèdent des fonds de pen-
de pe nsion. La lég islation concernant sion, qu 'iJs soient d'entreprise ou publics .
les fonds à prestation s définies se dur- Ainsi, contre toute attente, le plus gros
cit alors. Le développement des fonds d'entre eux (en termes d 'encours détenu)
à cotisations définies doit permettre à est japonai s : le fonds de pension publi c
cette époq ue d 'encourager la mobilité japonais déti ent près de 1 300 milliards
des salariés en leur permettant de conser- de dollars d'actifs, soit 9,3 % de l'en-
ver le bénéfice de l'épargne accumulée cours mondi al, qui s'élève actuellement
en cas de changement d'employeur, de à 14000 mi l liard s de dollars ! Le
financer les entreprises, notamment les deuxième plu s gros fonds de pension
PME (petites et moye nnes entrepri ses) , est le fonds public norvégien , avec 712 ,6
en autorisant qu ' une partie des actifs milliards de dollars d 'actifs . Les États-
soit investie dans l'entrepri se initiatrice Unis restent cependant le pays le plu s
du fonds de pension . important : il compte cent vingt-quatre
des trois cents plus gros fonds de pen-
sion mondi aux, ce qui représente 35 %
Les fonds de pension ne peuvent de l'enco urs mondi a l. Le plus connu
d'entre eux est Calpers ; il couvre les
p lus ignorer l'impact sociétal employés de l' État de Californie. L'en-
de leurs placements. cours tota l des trois cents plus gro s
les fonds
de pension américains
Les salariés américains peuvent se voir proposer une retraite
par capitalisation. La gestion de cette pension peut être
réalisée directement par les employeurs au sein d'un fonds de
pension ou être externalisée en ayant recours à des produits
viagers vendus par les compagnies d'assurance vie.
Retraites en Belgique :
à la découuerte des trois piliers
Préparer sa retraite en Belgique demande à être au fait de la
législation. Une connaissance approfondie des trois piliers et des
modalités fiscales qui leur sont associées est un avantage certain
pour le futur retraité pour qui quelques calculs sont nécessaires.
'
L
âge de la retraite en Be lgique ri ère, ce qui fait qu ' aucun nouveau tra-
est fi xé auj ourd ' hui à 65 ans, vaill e ur ne po urra en bé néfi c ier durant
en attendant qu ' il n'augmente la péri ode tra nsito ire. Le tex te spéci-
in éluctabl e me nt. Ju squ ' au l er juill et fi e qu ' il faut une can-ière de trente-huit
201 3 , le départ à la retraite anti cipée ans en 201 3, de trente-neuf ans en 2014
était poss ibl e dès l'âge de 60 ans, so us et de quarante ans en 2015 pour prétendre
certaines conditions et en ne percevant à un e retra ite a nti c ipée . U n rég ime
qu ' une partie de la retrai te légale com- propre à la Belg ique , le RCC (Rég ime
pl ète . Dans le but de décourager ces de chô mage avec compl é ment d 'en-
départs anticipés , le gouvernement belge trepri se) , est éga le me nt modi fié, ten-
a décidé la mi se en pl ace d' une série de dant progressivement à ex iger jusqu ' à
mesures modifi ant ces conditions. Dans q uarante ans de carrière. Ma is ce RCC
le même temps, les rég imes fiscaux des vari e selon les co nventi ons collecti ves
deuxième et troisième piliers ont également de travail et introduit une di ffére nce
été corrigés . basée sur le sexe du trav a illeur , les
dames de vant travaille r e ntre troi s et
Les piliers concernés se pt a ns de mo in s qu e les mess ie urs
se lo n les conventions . Ce rég ime était
En ce qui co ncerne le pre mier pilier (la mi e ux connu il y a qu e lqu es ann ées
retraite légale) , l'âge minimal au tori sant so us ! ' appe ll ati on de pré-pension . On
un e retra ite anticipée est augme nté de peut s' interroge r sur la confo rmité de
six mois chaque année , po ur atte indre ces mesures avec les prescriptions « éga-
62 ans dès 2016 . Les durées de carri ère 1itari stes » prônées (avec ra ison ) par
nécessa ires pour pouvo ir bénéfi c ier de l'Euro pe .
la mesure sont allongées . Mathé mati- Le deuxième pilier (celui des retraites com-
quement , cette dernière mesure est amu- pl éme ntaires) regroupe les régimes de
sa nte pui sq u' e lle consiste à accroître pension extra-l égaux iss us de l'acti vité
cl ' un an tous les ans la durée de car- profess ionne lle . Iljouit d ' un traitement
fiscal avantageux mais prévoit des dis- cipée mai s concerne les travailleurs en
positions distinctes pour les indépen- RCC . Pour faire s im p le, les capitaux
dants et les salariés. Les travailleurs de pension complémentaire perçus à 60
indépendants , dirigeants d 'entreprise ou o u 61 ans dans le cadre des RCC sont
titul aires d ' une profession libérale, peu- taxés à 20 % et 18 % (au lieu de 16,5 %
vent se constituer une pension complé- précédemment). Comme précédemment ,
mentaire libre pour indépendants (ou les capitaux perçu s e ntre 62 et 64 ans
PCLI) , qui prévoit la constitution d ' un seront taxés à 16 ,5 % et ceux perçu s à
capital libérable dès leur mise à la retraite, 65 ans , sous cond iti on d 'activité jus-
tout en garanti ssant une couverture en qu 'à cet âge, ne sont to ujours taxés qu 'à
cas de décès prématuré . Les primes sont 10 % . À tous ces taux , il convient d 'ajou-
assimilées à des cotisations sociales et ter les décimes add iti o nne ls commu-
constituent des charges professionnelles naux (en Belgique, les taxes communales
totalement déductibles . Cette mesure sont ca lcu lées se lon une fraction de
permet à l' indépendant de récupérer jus- l' impôt total) . Les taxes comm unales
qu ' à 53 % des primes versées et de payer varie nt entre O et 8 % par commune ,
moins de cotisations sociales (qu i sont celles abritant les citoyens aisés étant sou-
calculées s ur le revenu profes sionnel vent mo ins chères que les autres. Ainsi
moins le montant des primes). Un régime pour un taux de 20 % assorti de 6 % de
particulier est également mis en place pour décimes additionne ls, notre citoyen
les profession s médicales qui bénéfi- payera une taxe g lobale calculée sur
cient d ' une intervention finan c ière de base de 0 ,2 x 1,06 = 0 ,2 12 , so it 21 ,2 %
l' Institut national d ' assurance maladie du capital touché. Et ce n 'est pas tout.
inva]jclité (IN AMI) , et qui peuvent affec- li y a encore la cotisation à l' INAMI ,
ter cette intervention (en tout ou en par- qui s'élève à 3,5 % et celle , variable
tie) à la consti tuti on de leur PLCI. (entre O et 2 %), dite de solidarité, per-
Par le biai s de l' ass urance-groupe o u ç ue par !' Office national des pensions
du fonds de pension , ce1tains ernployems (ONP). Plaignons le citoyen belge qui ,
peuvent financer une pen s ion complé- après une dure vie de labeur (et d ' im-
mentaire pour leurs travailleurs. Dan s pôts), se voit encore une dernière fois
les faits , il s ' agit d'une forme de salaire surtaxé . (En fait, iI ne s'agit pas de la
différé, mais le système concerne sur- dernière fo is : lors de son décès, l' im-
tout les grandes entreprises et n 'est pas pôt rattrapera une fo is encore son conjoint
encore généralisé. Pour donner un ordre en taxant toutes ses économies . . . ) Mais
de grandeur, après un e carrière com- ne l' encourageons pas pour autant à
plète , le montant versé p ar une ass u- s'exiler en France, où le nouveau régime
rance-groupe est en moyenne de 70 000 ,€ inauguré en janvier 20 l l (sous et par Sar-
avant impôts. Les nouvelles mes ures kozy) est encore plus défavorable.
prises par le gouvernement Di Rupo
touchent certai ns de ces fo nds de pen- Les fonc ti onnaires belges bénéficient
sion en accroissant clans certain s cas le d ' un premier pilier nettement plus solide
niveau de taxation sur les montants per- que les autres et cet état de fait est sou-
çus. Assez curieusement, l'augmentation vent cr itiqu é. C ' est o ubl ier q ue ces
de la fiscalité sur les sommes générées retraites moins maigres constituent en fait
par les fonds de pension lors de la mise des sa laires différés : le premier et le
à la retraite à 60 ou 61 ans n' est pas seco nd pilier des employés de l'État
liée à l'obtention d'une pension anti- sont confondus.
Retraites ■
■
C
il faut donc constru ire des modèles
l' espérance de vie n'est pas un mathématiques intégrant cette évo lution.
indicateur fiable pom l'estimation Hélas I Le s façons de procéder so nt
de la longévité d ' une population . Une multipl es et ne donnent pas des résul tats
des fa iblesses de ce paramètre très usité comparab les.
est l'hypothèse du caractère statique des
taux de mo1talité. Considérons par exemple Diminution régulière de la mortalité
le calcul en 2010 de l'espérance de vie
d'un homme de 65 ans. Ce calcul s'appuie Le caractè re évo lutif des probabilités
sur la probabilité de décès d ' un homme de décè s est un e réalité o bse rvab le
de 65 ans en 2010 , sur la probab ilité de e mpiri q u eme nt. No to n s q (x, t) la
décès d ' un hom me de 66 ans en 20 10 , probabilité de décès dan s l'année qui
puis de 67 ans en 20 10 , et ainsi de suite. suit d' un indi vidu d ' âge x à l' instant t.
Toutes les données nécessaires à ce calcul On note p (x , t) = 1 - q (x , t) la probabilité
sont estimables à partir d'observations qui complémentaire dite « de SLffvie » pendant
un an. Le graphique situé en tête d'article ce qui se passe de dix ans en dix ans si
représente de dix ans en dix ans l'évolution l ' on fait l'hypothèse que les mortalités
des fréquences observées de décès dans constatées à l'instant t expliquent les
la population française masculine entre mortalités à l'instant t + 10. On arrive
1980 et 2010. Les différences d'ordre aux trois graphes suivants , aux allures
de grandeur de ces taux demandent une presque linéaires (encore que présentant
présentation en coordonnées semi- systématiquement une légère concavité
logarithmique. Les fréquences observées vers le haut) :
de mortalités varient en effet de quelques
pour dix-mille à plusieurs dizaines de '-" ~ - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - ,
L' échelle identique des trois graphiques supérieur à 1 %. On peut alors , sous
rend bien visible la diminution globale cette hypothèse très simple , estimer les
de la mortalité. On constate que les taux de morta lité futurs à tout moment
régressions linéaires successives exprimant entre 2010 et 2020 pour la catégorie
les mortalités en t + 10 en fonction des d'âge concernée et recalculer une
mortalité en t donnent des équations espérance de vie prospective. Des calculs
presque identiques , assorties chacune identiques peuvent être faits pour la
d'ordonnées à l'origine négligeables population féminine , pour la population
face à l'ordre de grandeur des taux de toute entière et pour différentes catégories
mortalités observés. Ces équations d ' âges.
prennent approximativement la forme Voyons à présent comment se comp01tent
suivante : les mortalités des personnes du h·oisième
q(x, t + 10) = 0,9q(x, t). âge de la population toute entière, hommes
et femmes regroupés. La législation
Ceci revient à dire, en gros, que de dix européenne condamnant toute
ans en dix ans, on constate un coefficient discrimination sur base du sexe , les
d ' atténuation des taux de mortalité de caisses de retraite sont contraintes de
l ' ordre de 10 % , correspondant à la tarifer sur base de ces observations. En
valeur (1 - pente de la droite de coordonnées semi-logarithmiques, on
régression). On peut alors émettre arrive à des représentations quasiment
l'hypothèse que cette évolution se linéaires . Cette constatation a conduit
reproduira et que les mortalités des 60- l'actuaire britannique William Makeham
90 ans vers 2020 sera approximativement (1826-1891) à modéli ser non pas les
égale à 90 % de la mortalité actuelle « probabilités de décès » mais bien des
(2010 : dernière base de données « taux instantanés de décès », sous forme
disponible sur le site de l ' Insee). En d ' une exponentielle liée à l'âge, assortie
faisant l ' hypothèse d ' un coefficient d ' un taux de décès accidentel supposé
d ' atténuation annuel constant À, on peut constant. Le modèle ainsi proposé
poser: n'introduit que troi s paramètres
q(x, 2010 + t) = À. 1 q(x, 2010). indépendants, dont on peut espérer
Nos observations conduisent à poser modéliser l'évolution afin de procéder à
À. 10 = 0,9 , ce qui nous donne À= 0,9895, la construction des tables prospectives.
donnant un taux de diminution un peu On définit le « taux de mortalité
instantané » pour un âge donné comme
le taux de décès par unité de temps pour
'f un horizon infiniment cou1t (présentation
1
tétant supposé fixé (la dérivée est prise Les coefficients de détermination
relativement à la variable x caractéiisant (puissance explicative du modèle en
l 'âge). En choisissant un accroissement termes de variance) sont
suffisamment petit , on peut négliger les exceptionnellement élevés, montrant la
effets de l'évolution du taux de mortalité. pertinence du modèle de Makeham pour
Pour rendre compte de ses observations, les plus de 60 ans. Hélas ! L'évolution
Makeham a proposé le modèle suivant : des paramètres ne présente aucune tendance
µ/t) = A (t) + a (t)c (t)" régulière et ne permet pas une projection
Le paramètre A(t) rend compte du taux crédible autorisant la construction de
de décès accidentel à l ' instant t, tables prospectives. On constate pour
indépendamment de x. Le paramètre a 2010 une très nette diminution du
caractérise la population concernée, paramètre caractérisant la population
tandis que c quantifie l 'accroissement initiale (a) , compensée par une forte
annuel de taux de décès lié au augmentation du taux de croissance de
vieillissement (c (t) > 1 quel que soit t). la mortalité (c). Ceci implique, entre
Voyons quel est le lien entre ce taux autres, que l'on peut s'attendre à une
instantané de mortalité et les fréquences croissance du taux de mortalité des
observées de décès classiques. On constate personnes les plus âgées (plus de 95 ans).
que les deux notions coïncident pour Ceci ne peut être vérifié : les statistiques
& = 1 (qui est loin d 'être proche de de l'Insee ne donnent aucun chiffre pour
zéro !) dans l'équation de définition. les plus de 99 ans.
L' intégration du taux insta ntané de Travaillons à présent directement sur
mortalité sur un intervalle de longueur toutes les observations des fréquences
unité livre plus précisément : observées de décès durant la période
p(x , t) = (1- q(x, t)) = exp(-{ ,Ll,+,, (u)du). 1990-2010 pour une catégorie d 'âge
bien particulière. Le graphique en page
suivante reprend l'évolution des taux
Des méthodes d 'ajustement classiques de mortalité des Français et des Françaises
permettent le calibrage des paramètres de 70 ans. On constate une diminution
qui viennent d'être introduits à toute systématique mais non régulière de ce
série d'observations. On vérifie que le taux de mortalité , ce qui n'impose pas
passage du taux de décès instantané à la de modèle exclusif. L'idée des actuaires
fonctions des survivants fait intervenir est de considérer que la diminution des
deux exponentielles successives. La taux de mortalité suit une exponentielle
fonction S est donc une « exponentielle négative (de façon à éviter la survenance
d ' exponentielle » et le calibrage par de taux négatifs) tendant non vers zéro
régression paramétrique fait intervenir mais vers une mortalité minimale
deux passages aux logarithmes successifs. incompressible.
Rassurez-uous
en résoluant ces énigmes
HS5701 - Catastrophe naturelle v HS5703 - Cryptarithmes vv
Dans quel ordre faut-il mettre les frag- Dans un cryptarithme, chaque lettre
ments suivants pour former un pro- remplace toujours le même chiffre et
verbe indien ? deux lettres différentes remplacent
1. la fourmi, toujours deux chiffres différents. De
2. est une plus, un nombre non nul ne commence
3. pour jamais par un O.
4. inondation l. Résolvez ce cryptarithme, qui pos-
5. la rosée sède trois solutions.
HS5702 - Déforestation v A s s u
+ A s s u
M . Dubois achète une forêt à 60 €
R A N C E
le m 2. Mais à la suite d'un incendie,
il perd 800 m 2. Il décide de revendre 2. Trouvez la plus grande valeur
72 € le m 2 le reste de forêt et fait un possible de la PRIME.
bénéfice de 12 %.
pR 1 M E
Quelle était la superficie initiale de la
forêt (en m2)? + A s s u
R A N C E
HS5704 - le banquet vv
Hl'Institut intergalactique, on assure ! Les paradoxes en théorie des probabilités sont nom-
breux. Ils sont aussi le plus souvent apparents.
Si P est le prix que l'on juge raisonnable, il existe Ce qui permet d'associer rationnellement des pro-
trois cas de figure : babilités à des évènements, c'est l'information dont
1) Si Tourix et Zérorix proposent tous les on dispose . Lorsque cette information est modifiée,
deux un prix supérieur à P, Zérorix sera choisie et les probabilités le sont aussi. Dans le délicieux
sera dans un cas sur deux moins chère que Tourix. petit exemple que nous propose Kylie Ravera, on
2) Si Tomix et Zérorix sont toutes les deux pait tout d'abord de l'hypothèse selon laquelle on ne
moins chères que P, Tourix sera choisie et ce sera dispose d'aucune information sur le prix de la cou-
là aussi le choix le moins cher dans un cas sur verture d'assurance qui est à souscrire. De même,
deux. on ne dispose d'aucun renseignement sur les deux
3) Si l'une des assurances est moins chère compagnies d'assurances en concurrence en ce qui
que Pet que l'autre est plus chère , la stratégie garan- concerne leurs niveaux de prix sur le marché. Cette
tit de faire le meilleur choix. absence d'inf01mation conduit à probabiliser uni-
formément et à associer, à chaque éventualité face à
Dans les deux premiers cas , Bêta a une chance sur laquelle on se retrouve , la même probabilité 1 / 2.
deux de choisir l'offre la plus avantageuse. Dans le Mais , dès que l'on propose un prix P jugé raison-
troisième cas, dont la probabilité est non nulle, il nable, la situation est significativement modifiée .
est toujours gagnant. La probabilité globale de faire Le fait d'introduire le prix P, qu'il soit pertinent ou
le meilleur choix est donc strictement supérieure à non, constitue de fait une information. Les proba-
1/ 2. bilités doivent donc évoluer en conséquence.
Cette histoire est adaptée d'un paradoxe mentionné Si l'information est mauvaise (P beaucoup trop
par Jean-Paul Delahaye dans son ouvrage Au pays grand , ou bien beaucoup trop petit) , la probabilité
des paradoxes (Belin , 2008). de bien choisir reste égale à 1 / 2 : ce sont les deux
K.R. premiers cas envisagés dans la solution. Lorsque
l'information est pertinente (troisième cas), c'est-à-
dire lorsque P est conforme au prix du marché (et
donc proche des prix effectivement demandés), la
probabilité de faire le bon choix augmente signifi-
cativement. Le fait que P soit choisi « au hasard »
ne modifie pas les choses. L'introduction d'un prix
« raisonnable » Pest dans tous les cas, que ce prix
soit pertinent ou non , considéré comme un accrois-
sement d'information. Une position stratégique
s'avère donc systématiquement avantageuse.
D.1.
Ta.ngente
Publié par les Éditions POLE
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01 47 07 51 15 - fax : 01 47 07 88 13
par Michel Criton SOLUTIONS
.;
Ona : V
~
20 V
72(x - 800)- 60x = 0,12 x 60x. ~
10 ~
On en déduit que x = 12 000 m2 . ~
Cauchy 1
1
HS5703-
l. Le premier cryptarithme possède trois solu-
tions: Le premier automobiliste arrivera à Schwar-
9664 + 9664 = 19328; tz à 17h30 et le second à 19h30.
9 773 + 9773 = 19546;
9882 + 9882 = 19 764. 3. Les dix derniers kilomètres ont pris un quart
d'heure au troisième automobiliste. Il est
2. Le second cryptarithme possède une solu- donc sorti du bouchon à 17 h 15. Le bouchon
tion unique : mesurait alors 2,5 km.
89 764 + 2550 = 92314. Comme la vitesse de l'automobiliste est
égale à celle de la remontée du bouchon, il
a parcouru le bouchon en un quart d' heure.
HS5704 - Il est possible d'espacer régulière- Il est donc entré dans le bouchon à 17 h et
ment les six tables avec seulement neuf mètres il avait alors parcouru 39,25 km en cin-
de déplacements (voir la figure). quante-neuf minutes.
Cet automobiliste est donc parti de Cauchy à
16 h01.
6) on descend le bébé dans l'un des paniers HS5709 - Roméo devra partir au plus tard à
(15 kg) ; 7h 18 min 45 s.
7) on descend la femme du veilleur (105 kg), Si Roméo part avec son vélo de course, quel
en mettant son mari, le bébé et le chien dans est le point du parcours où il sera équivalent
l'autre panier (90 kg) ; pour lui de continuer à pied ou bien de revenir
8) on descend le bébé dans l'un des paniers chercher le VTT de Maïté ? En désignant par x
(15 kg); le nombre de minutes nécessaires pour revenir
9) on descend le chien dans l'autre panier à son point de départ, on aboutit à l'équation
(30 kg), en remontant le bébé (15 kg) ; le x / 6 + x + 15 = x / 6 + (60 - x), qui admet
chien reste au rez-de-chaussée avec sa maî- pour solution x = 22,5. Roméo effectuera donc
tresse ; le trajet en au plus 22,5 / 6 + 37 ,5 minutes , soit
10) on descend le bébé dans l'un des paniers 41,25 min.
(15 kg) ; le bébé est récupéré au rez-de-
chaussée par sa maman ;
11) le veilleur descend (45 kg), en remontant le HS5710 - Soit x le nombre (inférieur à 60) de
chien (30 kg) ; métiers à tisser nécessaires à une tâche. 60 cas
12) on descend le chien (30 kg), en remontant sont à envisager.
le bébé (15 kg) ; Si un métier ne fonctionne pas, le bénéfice est
13) on redescend le bébé. de 3x.
Si deux métiers ne fonctionnent pas, le bénéfice
est encore de 3x.
HS5708 - Le diagramme ci-dessous aidera
notre voyageur à prendre sa décision. Les petits Si 60 - x métiers ne fonctionnent pas, le béné-
carrés représentent les options de l'assureur, les fice est toujours de 3x.
ronds sont les événements extérieurs probabi- Si 60 - x + l métiers ne fonctionnent pas, le
lisables. bénéfice est de 3 (x - 1) - 1.
n Si 60 - x + 2 métiers ne fonctionnent
pas, le bénéfice est de 3 (x - 2) - 2.
J'emporte
mon manteau :
La somme de ces bénéfices divisée
18+40E par 60 donne un bénéfice moyen de
le temps le temps (l 78x - 2x2) / 60. Cette expression at-
change ne change
pas teint son maximum pour x = 44,5.
0,1
0,9
il fait On en déduit que le fabricant doit
froid
18+80€ 18€ 21 employer en permanence qua-
(location)
rante-quatre tisserands.
40E 40E 80€ OE
(location)