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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Chapitre 1 : La mémoire

1. The modal model of memory (modèle modal)

Ce modèle a été introduit par Richard Atkinson et Richard Shiffrin (1968). Certaines parties du modèle sont
toujours bien acceptées aujourd’hui. Il y aurait, selon eux, 3 types de registres en mémoire :
• La mémoire à long terme
• La mémoire à court terme
• La mémoire sensorielle : iconique (visuelle) et échoïque (auditive)

Les informations (input) entrent d’abord dans les registres de mémoire sensorielles. Il y en a beaucoup trop
dans l’environnement pour qu’elles soient toutes traitées et donc au fil des registres on perd de plus en plus
d’informations, c’est le filtrage. Elles sont ensuite stockées pour toute la vie dans la mémoire à long terme,
contrairement à la mémoire à court terme où elle ne reste pas longtemps (15-20 secondes). L’output c’est la
réponse, le comportement qu’on effectue (ex : chercher le nom de notre ami sur Facebook).

Quand l’information passe de la MCT vers la MLT, c’est l’encodage ou l’acquisition. Cela peut être
intentionnelle ou incident (ex : l’encodage à long terme se fait de manière involontaire, comme un enfant qui
apprend le langage)

De la MLT à la MCT : c’est le processus de récupération (retrieval).

Les processus de contrôle comme la recherche en MLT peut aider à déterminer comment on va aller
récupérer l’information en MLT et quelle information on cherche. L’attention joue aussi un rôle, elle va aider
à sélectionner l’info sur laquelle on se focalise, c’est-à-dire sur les infos pertinentes. Il y a aussi des processus
de « chunking » (grouper des infos ce qui permet de mieux mémoriser).

Quel est le point commun entre tous ces registres ?

La mémoire c’est le traitement de l’information qui n’est plus présente. Mais elle influence le présent et le
futur. C’est aussi l’effet de toutes nos expériences passées sur les actions et les pensées présentes et futures.
La mémoire traite des choses qui ne sont plus là mais cela nous influence quand même dans le présent et
dans le futur.

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2. Les différents registres en mémoire

a) La mémoire sensorielle (MS)

C’est le premier traitement d’une information qui a déjà disparu (ex : trainées de lumière d’un feu de bengale
dans la nuit). Mais ce registre retient l’information peu de temps car si les informations sensorielles étaient
retenues plus longtemps que quelques millisecondes, on serait envahi d’informations dans le registre
sensoriel. C’est un phénomène adaptatif car cela nous permet de passer à autre chose (ex : on entend ce que
la prof dit, c’est momentané donc on peut entendre la suite du discours).

Comment peut-on mesurer la quantité́ d’info qui est stockée dans cette MS et comment peut-on mesurer
leur durée ?

Mémoire iconique : L’expérience de Sperling.


Il a mesuré la capacité de la mémoire iconique. Il demande au participants combien de
lettres ils ont retenu, il constate que les participants en rapporte en moyenne 4,5 mais
il y avait des biais. En effet, le fait de rappeler les lettres à l’expérimentateur peut nous
faire oublier celles qu’on avait retenues au départ.

Pour essayer de mesurer la capacité plus proche de la réalité, il a introduit une petite aide. Il facilite le rappel
en donnant un indice de rang des lettres (son qui représente une ligne). On remarque après ça que les
participants rapportent 3,3 lettres en moyenne par rangée. Ce qui veut dire que puisqu’ils ne connaissaient
pas quelle rangée ils allaient rapporter, ils ont retenu 3,3 lettres par rangée, ils avaient donc retenu 9 à 10
lettres parmi les 12 ! On est donc capable de retenir énormément d’informations brièvement. On a donc
37,5% vs 82,5% avec l’indice de rappel de rang.

Comment on peut faire pour mesurer combien de temps les informations sont stockées dans la mémoire
iconique ?

Sperling a utilisé la 3e étape mais au lieu de présenter les sons


directement après les lettres, il a fait varier l’intervalle entre
le délai de la fin de l’écran avec les lettres et le son pour voir
comment la performance de rappel évolue. Cela a confirmé le
fait que la mémoire iconique une durée très brève.

En abscisse, on a le délai de la fin de l’écran avec les lettres et


le son (VI) et en ordonnée le nombre estimé de lettres
disponibles en mémoire (VD). On remarque que la
performance diminue. Plus on attend avant de dire à la
personne quelle rangée elle doit rappeler, moins elle se
rappellent des lettres présentent sur l’écran, ce qui fait qu’on
arrive à la même performance que quand on n’aide pas la
personne avec le son.

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Et en modalité auditive ? :
Mémoire échoïque : the four eared-man (l’homme à 4 oreilles) de Moray. Il a utilisé
ces méthodes avec des stimuli auditifs. Il a utilisé des lettres présentées via des haut-
parleurs. La difficulté ici est que les lettres ne peuvent pas être prononcées en même
temps, elles doivent être dites de façon séquentielle. Les haut-parleurs présentaient
1 à 4 lettres et les 4 haut-parleurs ne pouvaient pas fonctionner tous en même temps
(seulement 3 par exemple).

On demande aux sujets de rapporter le plus de lettres possibles. Il y a le rapport général et le rapport partiel
(où il y a une aide « light cue »).

On voit qu’on a le même genre de pattern de résultats. Sans indice, ils rapportent moins d’informations. Cela
indique que, bien qu’ils ai retenus plus d’informations, le fait de les avoir rapporté fait qu’ils oublient des
informations entre temps. Plus le délai s’allonge et moins les personnes sont capables de rapporter des
lettres.

En conclusion : si on a un stimulus, une image qui nous vient de l’environnement, on arrive de façon brève
de se représenter le monde de façon plutôt complète. La mémoire sensorielle a une grande capacité (on
stocke beaucoup d’informations) mais de façon très brève (< 500ms).

b) La mémoire à court terme (MCT)

Williams James (1890) est le père fondateur de la psychologie scientifique et cognitive. Une de ses intuition
était que la mémoire se divise en 2 parties :
• La mémoire primaire (aujourd’hui = MCT) c’est là où les évènements sensoriels se trouvent stockées et
c’est un concept proche de la conscience (les informations qu’on possède en tête à un moment donnée).
• La mémoire secondaire (aujourd’hui = MLT) c’est où les informations sont stockées de façon plus longue
et permanente.

Baddely (2009): selon lui la MCT est un système impliquée dans le stockage d’un petit nombre d’informations
pour une période de temps assez brève (15 à 20s). Ce système est assez fragile et sensible à la distraction

La capacité de la MCT se mesure par des tests d’empan :


Il y a le Digit Span (empan de nombres) : on dit des chiffres et la personne doit répéter, on augmente le
nombre de chiffres jusqu’à ce que la personne se trompe et n’arrive plus à répéter les chiffres de manière
correcte.
Selon Miller, la MCT a une capacité́ d’un nombre magique avec le magical number, en moyenne les personnes
sont capable de retenir 7 ± 2 items (entre 5 et 9). La répétition mentale peut être impliquée dans cette tâche.

Un empan peut se faire de manière auditive si on lit des lettres ou des chiffres à la personne mais également
de manière visuelle avec des objets présentés sur un écran.

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Il y a également la manière visuo- spatial, avec le Corsi block-tapping test. L’expérimentateur montre des
objets et la personne doit reproduire la séquence dans le même ordre. Dès que le personne se trompe, on
dit donc que son empan visuo-spatial est de X.

Pour la capacité de la MCT visuel, on a la tâche de détection de changement :

On montre une image avec des carrés


de couleurs, puis un écran blanc, puis
un écran différent ou identique au
premier. Il faut que la personne dise
si l’image est identique ou non (en
faisant varier le nombre d’erreurs
dans l’image).

En VD, on a le pourcentage de réponses correctes (de 50% = ½ au


hasard à 100%) et la VI est la taille de l’écran (nombre de carrés
représentés à l’écran). Plus il y a de carrés à l’écran, moins les
personnes sont capables de juger si le deuxième écran est le même
que le premier. Jusqu’à 3 carrés de couleurs, 100% de performance
mais à 4 carrés de couleurs, la performance est moins bonne. En
MCT, on peut retenir moins d’informations, ce chiffre magique de 7
est plutôt de 3 ou 4.

Le concept de Chunking - Miller (1956) :


C’est un concept où on doit regrouper des infos pour la conserver en MCT, en effet, il
est plus facile de retenir en faisant des groupements de lettres, de chiffres ou bien en
donnant une signification à ceux-ci. Cela nous permet de retenir l’information de
manière plus durable et plus solide C’est bien plus efficace que le chiffre magique de
Miller.

Chunk : collection d’éléments associés les uns avec les autres et qui ont une signification

Qu’est ce qui est important dans ce que l’on peut stocker en MCT ? Est-ce un nombre d’items ou une quantité
d’information ? Et quel est le rôle de la signification ?

Pour le nombre d’items ou la quantité d’information on a la tâche de détection de changement de Alvarez


et Cavanagh (2004) :
Il y a un premier écran suivi d’un écran blanc, puis d’un deuxième et il faut dire s’il s’agit du même écran
qu’au départ. Ce qui varie c’est le type d’items présentés à l’écran (ex : des lettres, des symboles japonais,
des taches, des cubes, des objets familiers, etc.)
Les symboles japonais perdent de la signification pour ceux qui ne parlent pas cette langue, on ne s’aide que
de la forme dans ces cas-là. Cela peut être dur aussi pour les cubes car il faut aussi retenir les différentes
couleurs de ceux-ci en plus de la position.
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Il y a 3,7 de rappel pour les lettres, 4,4 pour les symboles,


seulement 2,8 pour les symboles japonais, 2 avec les
taches et 1,6 avec les cubes. Moins il y a de signification
associée à l’image, moins on est bon. Avec des objets de la
vie quotidienne (1ère ligne), on est meilleur car ce sont des
choses qu’on connaît (2,6 > 1,6 - la performance des
cubes). Etonnamment on n’est pas meilleur avec des
objets usuels qu’avec des symboles japonais…

Comment mesurer la MCT et combien de temps peut-elle maintenir de l’information ?

La tâche de Brown-Peterson permet de répondre à cette question. C’est une tâche qui est économique et
facile à créer soit même. Elle permet d’évaluer les capacités de mémoire des patients. Dans cette procédure,
le clinicien prononce 3 lettres (ex : CHJ) que le patient doit mémoriser et immédiatement après on donne un
chiffre (ex : 506) et à partir de cela, le participant doit commencer à décompter à l’envers tout haut par trois
(ex : 506, 503, 500, etc.). Après, on demande à la personne de rappeler les lettres avec une intervalle allant
de 0 à 20 secondes. Les résultats montrent que + on attend avant de demander à la personne de rappeler les
lettres, moins la performance est bonne.

Les résultats :
Abscisse : on a l’intervalle de rappel (de 3 à 18 sec)
Ordonné : on a la probabilité de rappel, c’est la proposition des cas dans
lequel les personnes rappelle les lettre correctement
On remarque que, plus on attend avant de rappeler les lettres et moins
la probabilité que les sujets ont de rappeler les lettres correctement est
grande. La performance chute donc au fil du temps. Attention, il faut
savoir que la performance provient de la moyenne de plusieurs
réponses a plusieurs essaie (on demande de faire la tache plusieurs fois).

Peterson en déduit que la trace mnésique en MCT se détériore au fil du


temps comme si la représentation mentale s’éffilochait pour finir par
disparaitre. Seulement, plus tard, Keppel et Underwood, on remit
l’interprétation de Peterson en question. Ils se sont demandés si il n’y
avait pas plutôt une interférence qui venait embrouiller les patients au
fur et à mesure de la tâche. Pour vérifier leur hypothèse ils ont pris
uniquement les résultats du premier essai afin de voir si on avait le
même pattern de performance. Ils ont ensuite observer que la
performance reste assez élever indépendamment de la longueur de
l’intervalle.

ð A partir de cela, on peut conclure que l’information peut rester en MCT plus longtemps que ce que l’on
avait conclu avant.

Ainsi, comment interpréter ce déclin lorsque l’on considère plusieurs essais mit ensemble ?
Quand on rappelle les lettres , dû au fait que les sujets ne peuvent pas se les rappeler mentalement, ils se
rappellent les lettres de l’essai précédant plutôt que de l’essai en cours. Ils deviennent donc de moins en
moins correct au fil du temps. Les lettres sont oubliées à cause du phénomène d’interférence proactive : les
apprentissage passé interfèrent avec les nouveaux. Ex : Quand on apprend une nouvelle langue on a des
interférence avec les langues que l’on connait déjà. Ce phénomène ne se produit pas uniquement avec des
lettres mais aussi avec des mots. Au fur et à mesure des essais on voit que la probabilité de rapporter la liste
des mots diminuent au fil du temps.

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Rappel :
Nous avons vu que les mémoire sensorielle : grande capacité et durée plus brève (>500ms).
Mémoire à court terme : faible capacité (+/- 4 items) et durée plus longue (15-20sec).

c) La mémoire de travail (MDT)

Certains auteurs ont trouvé que le modal modèle n’était pas satisfaisant dû à de nombreuse choses. Le focus
était sur le stockage sans aller plus loin. Le transfère de la MCT à la MLT dépendait de la répétions mais ce
n’est pas toujours le cas, cela ne garantit pas le stockage en MLT (comme pour les infos non pertinentes pour
nous). Un autre problème est que, bien que les registres de mémoire sensorielle soit distinguer des modalité
sensorielle, pour la MCT il n’y avait pas ces distinctions.

Définition de la MDT (Baddeley et Hitch)


Un système de traitement de l’information avec des capacités limités et un stockage temporaire dans lequel
on manipule l’information dans ces système. Cela nous permet de réaliser des tâches complexes
(compréhension du langage, raisonner sur l’info..). On ne stocke plus l’information passivement mais on
revient dessus et on en fait quelque chose (ex : un enfant qui apprend à lire ou réaliser des calculs mentaux).

Il y a donc l’apparition du Working Memory Model de Alan Baddely.

Ce modèle distingue 3 différentes parties : l’administrateur centrale (liée à l’attention) et ses 2 systèmes
auxiliaire/esclave étant la boucle phonologique (traitement de l’informations verbale et auditive) et le capin
visuospatiale (traitement de l’information visuel et spatiale)

• La boucle phonologique `

Le registre phonologique contient les sons du langage. C’est avec ce registre qu’on fait de la récapitulation
articulatoire (répétition subvocale : répéter l’information pour la maintenir en tête).

Quand cette information est visuelle, il faut une étape supplémentaire : la conversion (recodage
phonologique) des mots et des lettres du support visuel en sons.
Quelques effets qui prouvent l’existence et la validité de ces concepts théoriques :

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- L’effet d’écoute inattentive : c’est le fait que le rappel d’items verbaux (lettres,
mots, chiffres) est perturbé lorsqu’il y a la présentation d’un matériel verbal autre
qui est présenté en même temps, qu’il soit significatif ou non. Cet effet fait appel
au registre phonologique puisque l’on voit que des sons et infos verbales
provenant de différentes sources peuvent être en conflit et se mélanger dans ce
registre. La mémoire s’en trouve fortement perturbée. Ainsi, devrait-on étudier
dans le silence complet ? Une expérience montre que cet effet se manifeste avec
de la musique mais il faut du matériel verbal, s’il n’y a que de l’instrumental c’est
OK.

- Effet de similarité phonologique : la mémorisation d’une liste de lettres est plus difficile et l’empan est
plus petit lorsque les items ont une sonorité similaire que si on devait retenir une liste de lettres qui ont
des sonorités différentes. Cet effet serait lié à ce registre et donc au maintien et au stockage de ces
informations phonologiques dans lequel des informations semblables se confondraient, seraient
compliquées à distingue et donc à récupérer. Cet effet n’est pas le signe d’un problème de mémoire mais
au contraire, cela montre que le registre phonologique fonctionne bien.

- Effet de longueur du mot : lorsqu’on demande à des gens de mémoriser des listes mots, ils en
mémorisent d’autant + lorsqu’ils sont courts que lorsqu’ils sont longs. On doit donc se répéter les mots
pour les retenir mais les participants retiennent-ils mieux les mots courts à cause du nombre de syllabes
ou à cause de la durée de prononciation ? Certains auteurs ont réalisé une expérience pour répondre à
cette questions en utilisant deux listes contenant des mots ayant le même nombre de syllabe mais une
des listes contenait des mots qui étaient plus long à prononcer. On constate que si on prend plus de
temps à répéter mentalement un mot, on a plus de chance d’oublier les autres mots que les mot plus
courts. Cet effet est lier au phénomène de récapitulation articulatoire er a ces répétitions mentales.

- Effet de suppression articulatoire : si on demande d’écouter une liste de mots à


mémoriser mais qu’on demande de répéter tout haut une syllabe (ex : bla-bla-bla) cela
altère la capacité à mémoriser les mots prononcés par l’expérimentateur. Puisque notre
processus de récapitulation articulatoire est occupé par la syllabe bla on ne peut pas se
répéter la liste de mots que l’expérimentateur est en train de lire.

Lorsqu’on doit lire une liste de mots en même temps que l’on répète la syllabe, on remarque que l’info
verbale provenant du visuel n’arrive pas à rentrer dans le processus de récapitulation articulatoire.

Est-ce un phénomène de double tâche ou est-ce vraiment lier au fait que


l’on fait face à du matériel verbal dans les deux cas ? Une expérience dans
laquelle le participant doit taper du pied en même temps (et non pas
répéter une syllabe) a été menée. On voit que taper du pied n’altère pas la
capacité de mémoriser la liste de mots.

Dans d’autres expériences on voit que cet effet peut abolir certains des
autres effets vus auparavant. Pour l’effet de longueur du mot, on voit qu’il
disparait lorsqu’on répète une syllabe puisque notre processus de
récapitulation articulatoire est occupé. Il n’y a donc plus d’importance que
les mots soient longs ou courts car dans tous les cas on aura moins de
chances de s’en rappeler (que la présentation soit visuelle ou auditive, la
longueur du mots ne fera plus de différences).

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- Enfin, on voit que ce phénomène de suppression articulatoire aboli l’effet


de similarité phonologique, seulement lorsque les mots sont présentés
de façon visuelle car il y a une étape supplémentaire de conversion
phonologique donc que les mots soient similaires ou pas, ils n’ont pas
l’occasion d’aller dans le registre phonologique alors que quand la
présentation est auditive, ils ont une chance d’aller directement dans le
registre phonologique.

Applications pratiques ?
Comment la connaissances de ces effets peut nous aider à être meilleur clinicien ?
ð Quand un patient nous parle et que en même temps on pense à autre chose, on risque de les écouter
moins efficacement et de moins nous rappeler.

• Le calpin visuo spatial

Il est chargé de maintenir l’info visuelle ainsi que du processus l’imagerie mentale (= capacité de nous
rappeler des aspects visuelle de certain objet ou endroit sans que ceux-ci soit présent physiquement).

La tâche de rotation mentale peut être utilisée : un personne voit deux objets et doit juger si l’objet de droite
correspond à l’objet de gauche. Pour réaliser cet tache on doit effectuer la rotation de l’objet de façon
mentale. Dans ce genre d’expérience plus l’angle de rotation est grand, plus la personne a besoin de temps
pour réaliser la tache

Il y a aussi le Brook’s tasks (la tâche de Brooks) : on présente un certain pattern à un participant (lettre F)
qui indique le point de départ et le participant doit faire le contour de la lettre mentalement puis la lettre
disparait. Ensuite le patient doit reconstituer le chemin et même temps répondre à la question : est-ce que
l’on se trouve sur un coin, à l’extrémité inférieur ou supérieur ou entre les deux ?

Soit il réalise cette double tâche en parlant (manière verbale), soit en pointant sur un tableau (manière visuo-
spatiale) à chaque étape, il pointe oui ou non. Il a plus de chances de se tromper que s’il doit dire à voix haute
à l’expérimentateur où il se trouve sur la lettre. Il y a une capacité limité pour la mémoire visuo-spatiale.

Une autre expérience est réalisée, on donne une phrase aux participants et pour chaque mot de la phrase, il
doit dire si c’est un nom ou pas et il donne soit la réponse de manière verbale, soit de manière visuo-spatiale.
A nouveau, les performances sont moins bonnes quand les 2 tâches impliquent les deux même types de
traitement.

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La tâche de détection de changement : on présente des carrés de couleur pendant une durée brève, puis
après un blanc, un écran identique ou différent du premier.

La manipulation est de faire varier le nombres de carrés de couleurs. Plus le nombre de carrés est élevé et
moins les participants donnent des réponses correctes.

Avant chaque essai, ils ont demandé aux participants de lire 2 chiffres sur un écran, de les mémoriser et
ensuite les rappeler (charger leur mémoire de travail). Le fait que les participants doivent mémoriser des
chiffres avant de voir cette configuration de carrés, cela ne fait pas de différence car on est face à des
modalités différentes (visuelle (calepin visuo-spatiale) et verbale (boucle phonologique)). Le fait que la
récapitulation articulatoire soit occuper par des chiffre n’interfère pas avec le maintien en mémoire des truc
visuelle.

• L’administrateur central

Il s’agit de l’agent de police de la MDT, il coordonne comment les 2 autres système esclaves/auxiliaires
travaillent, le relais l’un de l’autre, comment l’attention est orientée vers une tâche, etc. Cet administrateur
central permet également de centrer l’attention sur quelque chose de particulier au détriment du reste, de
diviser notre attention entre 2 tâches différentes et de de faire passer notre attention d’une chose a une
autre. Son siège est dans le cortex préfrontal et les patients qui ont des problèmes cérébraux au niveau de
ce cortex préfrontal ont des difficultés a centrer leur attention ou à passer d’une tâche à une autre.

Exemple : La tâche de Wisconsin Card sorting test :


Des cartes sont présentées devant la personne. La personne tire une carte et choisit sur
quelle autre carte elle doit poser sa propre carte. Le sujet n’a pas de consignes, elle ne
sait pas quelle est la réponse correcte. L’expérimentateur répond juste par « oui » ou par
« non » quand la personne a fait son choix. Normalement, après 2-3 essais/erreurs la
personne sait quelle est la réponse. Après quelques essais, l’expérimentateur sans
prévenir, change la règle. Les essais deviennent donc incorrects. Il faut s’adapter et
recommencer ce processus essais/erreurs. On voit que ceux qui ont des problèmes au
niveau cortex préfrontal, ont un problème de persévérance, elles n’arrivent pas à trouver
la nouvelle règle quand les règles changent, ils ont du mal à s’adapter.

Certes le cortex préfrontal est un des sièges de l’administrateur central mais il y a d’autres sites où cette
capacité de la mémoire de travail peut se manifester :

Vogel et al (2005) : Il a utilisé une variation de la tâche de détection de changement pour examiner l’activite
cérébrale chez des personnes ayant des capacités de MDT faibles ou élevées. C’est une tâche de détection
de changement :

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.Les participants doivent dire si l’écran est le même par


rapport à avant suite à un changement. Subtilité
supplémentaire, il y a un écran supplémentaire avant l’essai
avec une flèche qui pointe vers la gauche ou droite, cela veut
dire qu’ils ne doivent prendre en compte que la partie gauche
ou droite de l’écran et ne pas se soucier du reste. Subtilité
supplémentaire ici, ce qui est présenté dans la partie
pertinente de l’écran peut varier. Il y 3 couleurs qui
représentent 3 conditions (bleu, rouge ou noir) la personne
reçoit comme instruction de s’occuper des traits de couleur
rouge p.ex. Le nombre de traits peut varier.

o Une condition possible (pas représentée ici) où les 4 items sont de la même couleur (rouge).
o Une autre condition (représentée ici) où deux items sont pertinents, accompagnés de deux
distracteurs (traits bleus).
ð La consigne est de se préoccuper d’une couleur et d’un côté de l‘écran.

Résultat :
On observe, sur les graphiques, l’activité électrique au niveau occipital et pariétal (avec les aires visuelles du
cortex et les aires dédiées à l’attention). On voit sur les 2 graphiques qu’il y a des différences entre les
personnes avec une haute et une basse capacité en MDT. Plus la courbe est élevée et plus le cerveau travaille
pour réaliser cette tâche.

Chez les personne qui ont une haute capacité, l’activité cérébrale est plus élevée quand il y a 4 items (courbe
bleu), que quand il n’y a que 2 items (courbe noir) , ou 4 items dont 2 qu’il faut ignorer (courbe rouge).

Chez les personnes avec une capacité faible, les chose sont différentes. L’activité cérébrale est plus élevéz
quand il y a 4 items mais l’activité cérébral est aussi élevée quand il y a 4 items dont 2 à ignorer. Cela veut
dire que les personnes avec une faible capacité de MDT ont du mal à gérer ce à quoi elles doivent faire
attention quand il y a un stimulus visuel (distracteur). Elles ne vont pas pouvoir s’empêcher de mémoriser
aussi les items bleus alors qu’elles doivent mémoriser les traits rouges uniquement.

ð Ce n’est pas seulement la quantité d’items qui est importante pour mesurer la capacité de MDT mais
c’est aussi la capacité à se débarrasser des choses non pertinentes.

Parfois, les chercheurs ajoutent des connaissances via les recherches et c’est notamment ce qu’a fait
Baddeley en revisitant ce modèle avec son Working memory model :

ð Il a ajouté le buffer épisodique (responsables de l’expérience consciente). C’est la notion de « présent


psychologique ».

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d) La mémoire à court terme et à long terme sont-ils deux systèmes séparés ?

Rappel : Le Modèle Modal


Selon ce modèle, l’information peut passer de la MCT à la MLT dans les deux directions. Lorsqu’un évènement se passe
il peut être encodé dans la MLT et on acquiert des connaissances. Ex : quand je discute avec quelqu’un je prends des infos
en MLT pour pouvoir effectuer une tâche à un moment donné ou comprendre certaines informations.

La mémoire à long terme est un système de maintien de l’info pour de plus ou moins longues périodes de
temps. On distingue :
- La mémoire épisodique : ce sont les évènements vécus
- La mémoire sémantique : ce sont les connaissances factuelles du monde, on ne se rappelle pas d’où elles
viennent et à quel moment on les a acquises
- La mémoire procédurale : elle est liée aux actions

Comment savoir quand la MCT s’arrête et la MLT commence ?


Quand on repense à notre premier jour passé à l’école, quand on a commencé nos études etc. Comment
savoir quand l’un s’est terminé et l’autre a commencé ?
Il y a des auteurs qui disent qu’il ne faut pas distinguer les 2 et que c’est juste une échelle de temps. D’après
Melton la MCT et MLT sont sur des points différents sur un continuum et que ce n’est pas nécessaire de
distinguer les deux On verra que ce n’est plus le cas.

Si on réfléchit d’aujourd’hui, à ce qu’on a mangé à midi, avant-hier, on arrive à se rappeler de ces éléments
mais plus on va en arrière, moins on se souvient. Il y a aussi beaucoup d’aspects de la journée qu’on oublie
tellement c’est répétitif parce que on les fait quotidiennement. Le fait que les évènements sortent de
l’ordinaire ou pas va avoir un impact différent sur comment ils sont mémorisés.

Voici des données expérimentales qui nous indiquent que les deux mémoires sont séparées.

• Murdoch : l’effet de position sérielle

Il a établi une expérience simple où on a une liste de 20 mots que l’on lit, un par un, à au participant avec un
rythme monotone. Ensuite la personne doit rappeler le plus grand nombre de mots et l’écrire sur un papier.
On compte ensuite quel mot a été rappelé et à quelle position il a été mis (d’où le nom position sérielle). La
place que le mot occupe sur la liste a toute son importance. Le sujet a une tache de rappel libre, sans indice,
dans l’ordre qu’elle veut.

Résultat :
Pour l’axe des ordonnées : % de mots rappelés, donc la probabilité de rappeler les mots.
Pour l’axe abscisses : positon sérielle, la place que le mots occupe sur la liste de 1 jusqu’à 30.

On observe typiquement ce genre de courbe : une bonne performance au début de la liste , à la fin de la liste
et une performance intermédiaire pour les mots du milieu. Pour les 2 parties avec une performance élevée on
a : l’effet de primauté (l’avantage des premiers mots de la liste) et l’effet de récence (le bénéfice des mots
les plus récents de la liste).

Pourquoi ces effets ? Car les mots du début, on se les répète mentalement et
les mots de la fin on les a toujours en tête et sont peut-être toujours en MDT.
Il faut démontrer ces hypothèses… Les mots de la fin de la liste subissent
l’interférence proactive (interférence des informations anciennes sur les
nouvelles), les mots du début ne subissent que l’interférence rétroactive
(interférence des mots appris après), les mots du milieu subissent les 2
interférences.

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On a aussi l’effet de Rundus : Même procédure expérimentale. On a cette même courbe (en rouge) avec
l’effet de position sérielle (effet de primauté et effet de récence). En bleu, on a une autre condition où
l’expérimentateur présente une autre liste de mots à ses participants en les prononçant avec 5 secondes
d’intervalles. Pendant ces intervalles, le participant doit dire tout haut ce qu’il faisait dans sa tête pour se
rappeler le mot (histoire qu’il ne se rappelle pas le mot en tête). On remarque que à chaque fois que l’on
rajoute un mot, le participant recommence la liste du début, ajoute le mot, et essaie de se répéter la liste.
Donc les mots du début ont plus de chance d’être répétés tout haut. Par contre pour les derniers mots, les
participants ont eu moins de chance de les répéter (moins de 3 fois par rapport aux mots du début qui sont
répétés environ 11 fois).

ð Il y a 2 aspects pour expliquer cet effet de position sérielle : la répétition des mots pour les mots au début
et le fait que les mots à la fin sont toujours en MDT et en MCT.

Comment tester cette hypothèse que les derniers mots sont toujours en MDT ?
On peut demander au sujet d’attendre avant de répéter les mots, mais il faut
s’assurer que la personne est « occupée » pour l’empêcher de répéter
mentalement les mots. Il faut donc introduire une tâche suppl. Ex : compter à
l’envers ! Pour vérifier cela, on a une liste de 20 mots et le % moyen de rappel.
Il y a 3 conditions différents : pas de délai, 15 secondes de délai et 30 secondes
de délai. Pendant ce délais la personne doit compter à l’envers. On a la preuve,
grâce à cette expérience, que les mots sont mieux rappeler à la fin car ils sont
restés en MDT. Dans les conditions avec délais et comptage à l’envers, l’effet de
récence a disparu !

On a aussi vérifié cela avec cette expérience où il y a deux conditions :


1) les mots sont présentés avec une cadence lente (entre les mots) et
2) la présentation est rapide (ronds blancs).

Il y a des différences de performance : avec la cadence rapide, les


sujets ont moins de temps pour se répéter les mots et donc moins de
chance de se rappeler des mots (du milieu), et inversement pour la
cadence lente.

ð On peut aussi faire l’hypothèse que les mots du début ont transité vers la MLT, à force d’être répétés.

Est-ce suffisant pour conclure que MCT/MDT et MLT sont des systèmes distincts ?

Pas sûr car certains auteurs ont montré qu’il existe aussi des effets de position sérielle en MLT (ex : résultats
sportifs - rugby games : on se rappelle mieux des premiers matchs et des derniers, et un peu moins des matchs
intermédiaires). Il nous en faut donc plus pour conclure qu’il y a une différence.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Quelles sont les différences de représentation en MCT et MLT ?

• Le codage

C’est la façon dont l’info est représentée. On peut ainsi voir si ces infos et leur représentation sont
comparable ou sont de nature différente entre la MCT et la MLT :
- Au niveau visuel : on a des codages qui sont semblables. Si on a vu une info brève (ex. tâches de Vogel)
on peut se faire une représentation visuelle en MCT et on fait appel aux mêmes genres de
représentations en MLT. Visuellement il n’y a donc pas trop de différence.

- Au niveau phonologique, (la sonorité des choses et de l’aspect verbal), on a des distinctions. En MCT , il
y a des effets de similarité phonologique (des mots ou des lettres qui se ressemblent au niveau de la
sonorité étaient désavantagés quand on doit les rappeler par rapport à ceux avec des sonorités
différentes). Au niveau du codage donc la façon dont l’info est représentée en MLT, il y a les voix, la
musique. Un exemple de codage auditif à long terme : on écoute un album de musique dans le même
ordre, quand une chanson de termine, la chanson d’après est déjà dans notre tête avant de commencer.
C’est les infos de la MLT qui revient en MCT (indicée par la fin de la chanson précédente), la fin de la
chanson nous rappelle ce qui vient par la suite.

- Au niveau du codage sémantique : c’est la façon de se représenter une info du monde, non plus sur les
caractéristiques physiques mais plutôt sur leur signification (leur sens). Il est vraiment conseillé de
comprendre les infos plutôt que de les apprendre par cœur. Dans le codage sémantique, reformuler une
info va favoriser la mémorisation.

En terme de similarite phonologique, on voit donc que dans les tâches de mémorisation à court terme de
lettres ou de mots, il y a un phénomène de similarité phonologique. On a donc une preuve qu’en MCT l’info
est codée et représentée de manière phonologique, sur base des traits physiques qui sont liés à la sonorité.

ð La sonorité et les traits physiques sont donc importantes en MCT.

Et est-ce qu’en MLT ces deux aspects ont leur importance ou pas ? Quid de la signification ?

Expérience de Wickens et al :
Ils sont recrutés 2 groupes de participants et leur ont demandé de retenir plusieurs petites listes de 3 mots
et ensuite de les rappeler. Voici les différents essais :

Il y a un intervalle de 15 secondes durant lequel on compte à l’envers, avant de répéter les mots (ils sont
donc toujours en MCT). On remarque qu’il y a un lien sémantique entre les mots et les listes (ex : fruit avec
poire, banane, citron). Ils font partie de la même catégorie.

Résultat :
Il y a une interférence proactive, la probabilité de se rappeler des mots
diminue au fur et à mesure des essais et de l’expérience. C’est peut-être dû au
fait qu’on a les mêmes groupes sémantiques.
ð Lien avec la sonorité (mots qui se rassemblent selon leur catégorie et donc
on fait des erreurs au fil du temps). La « similitude », la « ressemblance »
créée une interférence.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Comment voir si cette interférence est dû au fait qu’on est dans la même catégorie ?`
Wickens et al ont refait l’expérience en changeant la catégorie sémantique. Dans l’essai n4 , les 2 groupes
ont la même liste de mots.

Résultats : Dans les 2 groupes pour les 3 premières listes, ça diminue, il n’y a donc pas de différences entre
les fruits et les métiers, les résultats sont comparables. Mais arrivée à la liste n4, où s’opère le changement
de catégorie, les performances s’améliorent. C’est la levée de l’interférence proactive, elle est abolie par ce
changement de catégorie.

ð On voit qu’ici, les aspects sémantiques peuvent avoir une pertinence au niveau de la MCT également.

On peut aussi faire des tests pour savoir s’il y a un codage sémantique ou plus superficiel lié au trait physique.

En 1967, Sachs a demandé à ses participants d’écouter un long texte sur Galilée. Ensuite on demande aux
participants de réaliser un test de reconnaissance avec un QCM à 4 propositions. Il en conclut qu’il est donc
utile de se centrer sur la signification plutôt que d’étudier par cœur.

On a aussi une expérience de Baddeley en 1966 où il a comparé MLT et MCT, et le codage dans ces deux
types de mémoire. Il a demandé à des participants d’étudier des listes de mots et les rappeler. Dans une
situation, les listes de mots étaient phonologiquement similaires vs. dissimilaires et dans l’autre
sémantiquement similaires vs. dissimilaires.
On a vu qu’en MCT, lorsque tous les mots sont similaires, on a aussi cet effet d’interférence et la performance
diminue. Mais on n’a pas vu ce qui se passait quand il y a des mots dissimilaires.

Pour tester la MCT : il a demandé à ses participant de faire du rappel immédiat. Il a trouvé qu’on a un effet
de similarité phonologique et pour le niveau sémantique il n’y a pas d’effet. Les mots sont rappelés de la
même manière qu’ils soient similaires ou dissimilaires de manière sémantique. Que les mots appartiennent
à la même catégorie ou pas, dans la MCT cela n’a pas d’importance.

Pour la MLT, on ajoute un délai : dans une autre condition, il demande de réaliser une autre tâche pendant
20 min (discuter, faire des calculs mentaux, lire un texte etc). On voit l’effet inverse, après 20 min de délai,
la similarité phonologique des mots n’a plus d’importance. Mais on voit que la signification prend plus
d’importance. Les mots sémantiquement similaires sont mieux rappelés que ceux qui appartiennent à des
catégories dissimilaires. La catégorie indice la personne sur la catégorie à rappeler, et facilite donc le rappel.

Þ Les effets s’inversent

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En résumé :1
§ Il est possible d’avoir un codage, de se représenter les choses de manière visuelle que ce soit en MCT ou
en MLT.
§ Nous avons vu avec l’expérience de Baddeley : pour la sonorité, il y a un codage qui se base dessus
surtout en MCT et moins en MLT. Inversement, pour la signification et l’aspect sémantique en MCT cela
a un petit rôle et pour le MLT cela est important.

• Neuropsychologie
On voit que si une lésion qui touche une zone, dont on sait qu’elle traite un type d’info, peut aussi causer un
problème (ou pas) à un autre système qu’on suppose être différent. Pour vérifier cela, on peut trouver des
patients avec un problème dans un certain type de tâche mais pas de problème dans l’autre et voir si on
trouve des patients avec des difficultés inverses. Cela permet d’observer si ces capacités reposent sur des
systèmes différents ou pas. Et donc si on veut savoir si la MCT et la MLT sont différents il faut aller voir les
patients avec des lésions cérébrale en MCT et pas en MLT et inversement.

Il y a double dissociation chez des patients cérébrolésés :

a) Ablation (HM) ou lésion de l’hippocampe (Clive wearing)


Ce sont des patients qui ont des lésions hippocampiques graves :
Cas HM : c’est une personne qui présentait des problème épileptiques invalidantes et donc , pour résoudre
cela, ils ont décidé de lui enlever les hippocampes qui sont le siège de ses crises sans se rendre compte qu’il
y aurait des conséquence désastreuses (plus de souvenirs à long terme).
Clive wearing : il a eu une infection de type virale qui s’est attaquée à son lobe temporale et des
hippocampes. La conséquence est qu’il n’est plus capable de former de nouveaux souvenirs à long terme.

ð MCT fonctionnelle mais plus de nouveaux souvenirs à long terme

b) Patients avec les difficultés inverses donc une MLT intacte avec une MCT déficitaire ?

Le cas de K.F qui a une MLT intacte mais une MCT déficitaire.
L’empan de chiffres (2) et l’effet de récence sur la courbe de position sérielle (pas d’avantage pour les
derniers mots d’une liste à retenir) sont réduits.

Conclusion : Cela prouve donc que MCT et MLT sont bien distincts.

1
Quand on parle de « traits physiques » c’est lié à la vision, l’audition, etc. = caractéristiques liées aux stimuli, aux
images, etc. Ex. si on comprend le cours, son aspect n’a plus d’importance…
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• Neuro-imagerie

Quel est le rôle de L’hippocampe en MCT ?

Expérience de Ranganath et D’Esposito :


On sait que l’hippocampe qui possède un rôle important pour la formation de la
MLT. Ici, ils se sont demandés si l’hippocampe avait également un rôle dans la MCT
ou pas. Dans leur expérience, il présentent un premier visage à des participants
pendant 1sec puis il y a un délai de 7 sec, ils en présentent un second. Les
participants doivent juger si la personne est la même que celle qui est présentée
au début. Pendant le délai, ils doivent maintenir la photo en MCT pour ensuite la
comparer avec la deuxième. Le facteur supplémentaire ici c’est que : soit tous les
visages étaient nouveaux (courbe bleue) ou soit c’était des visages familiers
(courbe orange).

On voit que, au fil du temps, même si c’est une tâche de MCT, pendant que le sujet maintient cette
information en mémoire de manière mentale il y a quand même une activité dans l’hippocampe, et surtout
si le visage est nouveau. La MCT repose donc elle aussi, en partie, sur le travail des hippocampes. Dans ce cas
on pourrait se dire que l’hippocampe a un rôle important dans l’acquisition d’infos nouvelles (+ d’activité
dans le cas de visages inconnus).

Conclusion :
On peut considérer que les chercheurs pensent qu’il y a des interactions
entre les 3 registres en mémoire. Rappelons-nous, pour le modèle modal
on avait les 3 boîtes l’une après l’autre et il n’y a avait pas d’interaction entre
la mémoire sensorielle et la MLT . Aujourd’hui l’information peut circuler
dans tous les sens, p.ex. la MLT peut influencer la manière dont on perçoit
l’information présente dans les registres sensoriels et la MLT influence la
MCT. (ex : apprendre langue étrangère, la MLT influence les registres
sensoriels en français on sait faire la distinction des sonorité (ein et an) mais
pour un anglophone il n’y a pas cette distinction, il aura du mal, il manque
une connaissance à long terme). )

e) La mémoire à long terme (MLT)

Introduction : Clive wearing (vidéo)


Clive Wearing a l’impression d’être conscient pour la première fois à chaque instant. Il a toujours l’impression qu’il
rencontre des êtres humains pour la première fois. Il a une série d’info en MLT (langage, faits, piano, etc.) mais il ne se
rappelle pas avoir fait certaines expériences (corporelles, actions).

Une première distinction de la MLT a été faite par Endel tulving dans les années 80 :

§ La mémoire sémantique : ce sont les connaissances accumulées depuis notre enfance sur le monde, ce
sont des faits (ex : capitale des pays, présidents d’un pays, alphabet etc). Dans le cas de Clive Wearing, il
se rappelle qu’il est marié a Deborah.. Lorsque qu’on se rappelle ces infos, on n’a pas forcément d’infos
liées au moment où l’on a acquis l’info pour la 1ère fois. Les informations sont décontextualisées
§ La mémoire épisodique : ce sont des événements dont on se souvient, des événements vécus et que l’on
peut revivre mentalement comme si on voyageait dans le temps. On fait référence à la conscience
autonoétique (self-knowing). Dans le cas de Clive Wearing, c’est cette composante-là qui pose problème,
bien qu’il se rappelle qu’il est marié il ne se rappelle pas du jour de son mariage.

ð La mémoire épisodique et sémantique conservent des info différentes mais on a aussi une expérience
différentes lorsqu’on se rappelle de ces différents types d’infos.
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Au niveau des preuves scientifique pour savoir si on a bien deux types de système de mémoire à long terme
et si cela fait sens de les distinguer on trouve des doubles dissociations chez des patients qui ont des
problèmes à certaines zones cérébrales:
§ KC a eu des dommages au niveau des hippocampes après un accident de moto. Chez lui, les aspects
sémantiques sont préservés mais il a une mémoire épisodique déficitaire, il ne peut plus se former de
nouveaux souvenirs sur des expériences vécues.
§ Une patiente italienne, a eu le phénomène inverse suite à un problème d’encéphalite. Les aspects
épisodiques sont préservés (ex : elle est capable de se rappeler ce qu’elle a fait hier) mais elle a des
problèmes au niveau des informations sémantiques (ex : au moment de faire ses courses, elle a des
difficultés avec sa liste car elle ne se rappelle plus de la signification des mots sur sa liste. Elle a aussi du
mal à se rappeler des célébrités ou des faits quotidiens)

ð Cela indique une double dissociation et des systèmes de mémoire qu’il fait sens de distinguer.

Mais ce n’est pas suffisant de baser des conclusions uniquement sur des patients cérébrolésés car les lésions
peuvent s’étendre à d’autres zones cérébrales, d’autres peuvent être préservées, etc. Donc c’est dur de
conclure de manière très claire. Il y a donc eu d’autres expériences :

Il y a eu l’expérience de Levine et al qui ont tenté de voir si on peut trouver des régions du cerveau distinctes
associées à ces 2 types de mémoire à long terme. Ils ont demandé aux participants, deux semaines le début
de l’expérience, de s’enregistrer en racontant des évènements personnels vécus (info épisodiques) ou de se
rappeler des informations qu’ils connaissent sur des faits publics (infos sémantiques). Ensuite, ils sont mis
dans un scanner en leur rejouant les enregistrements d’eux-mêmes pour voir s’ils revivent leur expérience
mentalement (voyage dans le temps). On ne s’attend pas à cela avec des infos sémantiques.

On voit des zones distinctes impliquées dans les deux


types d’informations. Les zones en jaune sont celles qui
sont activées quand on leur joue les enregistrements
d’évènements personnels (épisodique). Et les zones en
bleu sont celle activées suite aux enregistrements
d’évènements publics (sémantiques). En regardant les
résultats, on se rend compte qu’il y a donc bien des
zones distinctes qui s’activent dans les deux types de
mémoire. Mais bien que les deux types de mémoire se
rapportent à des zones distinctes, il y a aussi des zones
communes.

Il faut savoir qu’il y a des interactions entre ces 2 types de mémoire, ce que je sais sur
le monde va influencer ce que je vis et inversement. Mais il existe aussi la mémoire
autobiographique. Elle concerne la mémoire de notre vie et des évènements qu’on a
vécus. Elle se compose d’informations de la mémoire épisodique et sémantique. On a
des événements personnels mais aussi des faits que l’on connait sur nous-mêmes (ex
: infos liées à notre vie personnelle : j’ai étudié à l’Uliege..., mes cours préférés étaient,
je me souviens d’un ou deux examens oraux spécifiques etc.).

Il y a des interactions entre les 3 systèmes. Au niveau de la mémoire sémantique on peut avoir des souvenirs
auto-biographiquement significatifs (ex : si je suis fan d’un chanteur, si je l’ai vu en concert, je serai plus
susceptible de me rappeler des infos factuelles sur cette personne).

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Qu’est-ce qu’on mémorise, qu’est-ce qu’on oublie, pourquoi certaines infos sont oubliées et d’autre pas etc. ?

Si on vous demande « Qu’avez-vous mangé au souper ? », on n’a pas de mal à répondre pour les jours qui
sont récents mais au fil des jours, on oublie. Mais le repas du mariage du cousin, on sen souvient peut-être…
Les évènements qu’on vit au jour le jour s’effilochent et partent dans l’oubli. Mais si on vous demande :
« Quel est votre plat préféré ? » c’est une connaissance de type sémantique donc on se rappelle bien.

Certains chercheurs ont mis au points des procédures pour étudier si les souvenirs sont factuelles ou si elles
peuvent-être associées à des évènements vécues. Cette procédure « remember know » est mis dans un test
de reconnaissance.

Il ne faut pas confondre un test de rappel et un test de reconnaissance !


Test de rappel : rappeler une liste de mots, chercher les infos en mémoire
Test de reconnaissance : on présente l’info à la personne et on lui demande si l’info est familière ou pas (des
noms, mots, visages, un évènement etc.) ou on lui demande si elle reconnait ceux -ci. La personne a 3
possibilité de réponses :
§ Nouveau (non).
§ Know (familière, simple à avoir)
§ Recollection (souvenir conscient) : le fait d’être en plus capable de se rappeler d’avoir vu un visage ou
un nom dans un certain contexte, se rappeler du contexte et/ou d’un événement. Cette réponse
recollection peut concerner les contextes de la vie réelle ou les contextes de l’expérience en tant que tel.
On a un souvenir conscient de l’évènement , du moment où on l’a appris.

Ex : Procédure « remember » / « know » : On demande si les participants se rappellent la démission du


premier ministre de John Key. Ils répondent soit :
§ Je ne sais pas
§ Je sais : « Il a démissionné en décembre 2016, en évoquant des raisons familiales »
§ Recollection : « Je me souviens avoir été surprise en entendant la nouvelle à la radio, un matin en me
rendant au travail » (inclut des souvenirs sur la situation dans laquelle l’info a été apprise).

Il existe un exemple de cas d’une étude qui a utilisé la procédure du « remember


know » pour savoir comment les souvenirs évoluent au fil du temps. C’est
l’expérience de Petrican et al (concernent les évènements publics) : C’est un test de
reconnaissance. Ils ont fait appel à des participants âgés (+ de 60 ans) pour étudier
la destinée de leurs souvenirs au fil du temps. On a sur l’axe y (ordonnées), la
proportion de souvenirs et les courbes en :
• Vert : remember, je me souviens du moment où j’ai appris l’info (contexte)
• Bleu : je sais
• Rouge : je ne sais pas

On remarque que pour les infos plus récentes (10 ans ou moins), ils se rappellent de beaucoup de choses et
que la proposition de « know » est plus élevée que les réponses « remember ». Pour les souvenirs plus
lointains (40-50 ans), il y a + d’évènements dont ils ne sont pas au courant (on oublie au fil du temps). On voit
aussi qu’il y a toujours un % de souvenirs dont les personnes sont au courant mais par contre le % de réponses
« remember » diminue !

En conclusion, plus les souvenirs sont lointains et moins on se rappelle des détails associés à notre expérience
de l’événement, ou du moment où on a appris l’info. C’est la sémantisation des souvenirs éloignés mais
aussi pour des périodes plus courtes. Plus un fait s’est passé il y a longtemps, plus il y a des chances qu’on se
rappelle uniquement de cet évènement de manière factuelle en oubliant les détails personnels associés à cet
événement.

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Est-ce dû à l’âge élevé des participants ? Un élément de réponse : non, on retrouve ce phénomène (de
sémantisation) pour des périodes bien + courtes, comme par exemple, des événements qui se sont passés il
y a 1 semaine. On observe également ce genre de déclin, de détails épisodiques, etc on retient plutôt des
faits (ex : on se rappelle des choses importantes qui se sont passés la semaine passée, mais on ne se rappelle
pas de détails, en particulier si ce sont des actions répétitives).

Dans cette étude de Pétrican et al, ils ont testé des personnes âgées « jeunes » (58-69 ans) et des personnes
âgées « plus âgées » (74-85 ans). On voit des différences qui se marquent sur les taux de reconnaissance des
évènements. On voit que, de manière générale, les participants + jeunes se rappellent un peu mieux que les
personnes plus âgées. Les taux de réponses remember sont assez faibles comparés aux réponses know.
Lorsqu’on compare les deux groupes, on voit une petite tendance : les personnes + jeunes parmi les
personnes âgées ont + de réponses remember (barres rouges). On ne constate pas cela pour les réponses
know. Et c’est parfois l’inverse. Dans certaines décennies, les personnes plus âgées des âgées ont parfois
tendance à juste savoir – know que les événements ont existé.
On observe une courbe que l’on appelle la reminiscence bump : on a tendance à mieux se rappeler
d’événements qui se sont passés lorsqu’on avait 20 ans car c’est une période marquante de la vie (+ de
changements, d’évènements etc).

Alors, est-ce un effet du passage du temps ou du vieillissement ?

Dans leur étude, Clarys et al, ont demandé à des participants d’étudier une liste de mots puis ils les ont
soumis à une tâche de reconnaissance dans laquelle ils devaient préciser s’ils savaient que le mot était un
mot qu’ils avaient étudié parmi des mots nouveaux ou s’ils se rappelaient du moment où ils ont étudié le mot
en particulier au moment de la phase d’apprentissage.

On a 3 groupes :
§ Participants jeunes ( 30 ans en moyenne)
§ Participant âges (66 ans moyenne)
§ Participants plus âgés (77 ans de moyenne)

On observe que la distribution des réponses remember, know et la reconnaissance totale. Dans une tâche de
reconnaissance, lorsque on reconnait un item correctement, on appelle ça un « hit » mais les participants
peuvent se tromper (dire qu’ils ont étudié les mots alors que non), c’est ce qu’on appelle les fausses alarmes.
Il faut soustraire ce dernier des hits. Cette méthode oblige les participants à distinguer ce qu’ils ont étudié
de ce qu’ils n’ont pas étudié, la mesure capture bien la possibilité de se tromper.

Comment peut-on interpréter les résultats ? Les résultats montrent que chez les participants + âgés, il y a +
de réponses know, ils savent qu’ils ont vu les mots mais ne se rappellent plus du contexte. Chez les jeunes il
n’y a pas de différence entre know et remember. Pour le taux de reconnaissance totale, on voit qu’il n’est
pas si ≠ entre jeunes et plus âgés, mais la nature du souvenir est un peu différente et est plus factuelle (moins
de détails épisodiques) chez les personnes âgées.
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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

En conclusion, chez tout le monde les souvenirs perdent leur aspect recollectif (détails épisodiques, associées
aux évènements) au fur et à mesure du temps. On perd les détails associés aux événements. En effet, en
vieillissant, la reconnaissance est relativement préservée (mais cela repose sur de la familiarité, on sait qu’on
a étudié l’item, pas plus) et il y a un déclin du processus recollectif (c’est la capacité d’associée un mot ou un
évènement avec le contexte dans lequel on l’a appris, ou avec des infos liées au lieu, le moment, etc.).

Le fait d’apprendre des connaissances, se produit souvent ainsi, tout ce que l’on sait on l’a appris à un
moment, mais ce n’est pas toujours utile de se rappeler du contexte où on l’a appris. Ce n’est donc pas une
mauvaise chose de ne pas se rappeler des détails, car si c’était le cas on serait encombré. Cette acquisition
de connaissance se fait toujours dans un contexte mais on n’a pas toujours besoin de s’encombrer du
contexte pour réutiliser nos connaissances plus tard.

Est-ce que les processus remember et know constituent-ils des formes distinctes de reconnaissance ?
Reflètent-ils ≠ niveaux de certitude ?

1) Lorsque on demande à des participants de juger de leur certitude en plus de leurs réponses à un test de
reconnaissance, donc ils doivent dire sur une échelle de 1 à 5 à quel point ils sont sûr de leurs réponses,
on voit qu’Il n’y a pas de lien évident avec la nature de la réponse. On peut être très sure d’une info que
l’on sait avoir étudié, tout comme on peut être sûre d’avoir étudier un mot et se rappeler en plus du
contexte.

Une autre façon de savoir si ces processus sont différents ou pas, c’est de voir si des manipulations
expérimentales les affectent de la même manière ou pas ? Ce n’est pas le cas.

2) On voit que certaines manipulations expérimentales affectent uniquement le taux de réponses


remember mais pas know. Par exemple, dans une tâche d’apprentissage d’une liste de mots :

§ Le niveau de traitement va affecter le taux de réponses remember sans affecter le taux de réponses
know. Donc lorsque on demande a des participants de faire un jugement sémantiques par rapport à
un jugement phonologique, ils vont être plus susceptibles de se rappeler le contexte lorsque le
jugement est sémantique alors que ça va pas changer le taux de réponses know.
§ De même lorsque on est dans une situation de double tâche, cela va influencer le taux de réponses
remember. Ils font deux choses en même temps : apprendre une liste de mots + une autre chose
comme faire des calculs mentaux. On voit que, cette fois, le taux de réponses remember diminue suite
à cette double tâche par rapport à une situation contrôle où on ne fait qu’une seule tache de
mémorisation.
§ Lorsque l’on est dans une situation d’apprentissage intentionnel (on dit aux participants explicitement
qu’ils doivent mémoriser une liste de mots et qu’on va l’interroger par après). Cela augmente le taux
de réponses remembrer par rapport à une situation d’apprentissage incident (dans laquelle le
participant est confronté à une liste de mots mais sans être prévenu qu’il doit les mémoriser).
§ On voit que la fréquence des mots a un effet sur le taux de réponses remember mais pas sur le taux
de réponses know. Lorsque des participants doivent étudier des listes de mots rares, ils vont être plus
susceptibles d’avoir des réponses remember que lorsque on demande de mémoriser des mots plus
fréquents.

3) L’inverse existe-t-il ? Observe-t-on des manipulations qui vont changer le taux de réponses know sans
influencer le taux remember ? Toujours dans une tâche d’apprentissage d’une liste de mots. Lorsque on
présente de façon subliminale des mots avant la phase de reconnaissance, après avoir étudier les mots,
les participants vont être plus susceptible de savoir qu’ils ont vu les mots mais cela ne va pas affecter leur
taux de réponses remember.

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Donc ici on voit qu’on a des formes de reconnaissance qui sont de natures différentes

On peut aussi regarder ce qui se passe niveau du substrat cérébral


et voir sir les deux types de reconnaissance sont sous-tendus par des
aires distinctes ou pas. On voit qu’il y a certaines aires cérébrales
communes et d’autres qui sont distinctes. Au niveau des réponses
recollectives, lorsque on se rappelle des détails d’un événement, les
aires cérébrales sensorielles sont très actives (ce qui soutient l’idée
que l’on peut revivre l’événement avec les évènements sensoriels
associés comme le contexte visuel, les sons etc.).

De plus, des régions cérébrales qui sont associées au fait de se


souvenir d’éléments du passé sont activées en même temps que
des aires activées lorsque l’on se projette dans le futur.

Tout ce qu’on a vu jusqu’à présent comme distinction entre mémoire épisodique, sémantique et
autobiographique concerne la mémoire explicite qu’on appelle aussi mémoire déclarative. Toutes ces formes
de mémoire et de souvenirs sont conscientes, on peut aller les rechercher de manière volontaire. On parle
aussi pour les souvenirs liés à la mémoire sémantique, de conscience noétique (on sait ce que l’on sait et on
peut rechercher l’information) et pour la mémoire épisodique on parle aussi de conscience autonoétique, à
cela s’ajoute notre expérience personnelle, c’est la conscience d’avoir vécu un évènement et de pouvoir le
revivre mentalement. Lorsque l’on test ces deux types de mémoire on se réfère aussi à la notion de familiarité
(savoir) et la recollection (capacité à se rappeler l’évènement de manière plus précise avec des détails
épisodiques associés sur le lieu, le moment etc.)

On a vu aussi qu’il existe des interactions entre ces systèmes. Ex : nos connaissances du passé affectent notre
vécu du moment et nos souvenirs épisodiques.

Et pour la mémoire autobiographique, c’est un système multidimensionnel qui incorpore des informations
sémantiques et épisodiques avec beaucoup d’informations liées au contexte, des infos sensorielles,
spatiales et émotionnelles.

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f) La mémoire implicite

Comme on a vu Clive Wearing, bien qu’il a du mal à former de nouveaux


souvenirs et se rappeler du passé, il est capable d’effectuer de nombreuses
tâches (ex : jouer piano, écrire). La mémoire implicite concerne donc ce
type d’apprentissage lié à des capacités plus « corporelles ». Ce genre de
mémoire peut être qualifiée de non-consciente ; on a des difficultés de
retrouver de manière explicite comment on réalise certaines tâches.

Des tâches comme taper à l’ordi, conduire, etc font référence à la mémoire
procédurale et elles sont difficiles à expliciter. Ce type de mémoire procédurale
est impliquée également dans le langage et la capacité à détecter les règles de
grammaire implicites. Dans le cas de H.M, on voit que bien qu’il ne soit plus
capable d’apprendre nouvelles infos sur sa vie de tous les jours, il reste
néanmoins capable d’apprendre de nouvelles tâches malgré ses déficits en
MLT. Ex : il ne se rappelait pas avoir fait cette tâche de dessin en miroir mais
au fur et à mesure, il s’est amélioré dans la tâche.

Ensuite, vient la notion de priming (= amorçage) : ce phénomène survient lorsque le fait d’avoir rencontré
un matériel/stimulus auparavant facilite l’exécution d’une tâche par après ou change la façon dont on va
traiter un autre stimulus par après. Il n’y a pas besoin de faire référence à la rencontre antérieure (ma
performance s’améliore sans qu’on dise que cela a un rapport avec ce que l’on on a fait auparavant) ni à la
recollection consciente de la rencontre antérieure.

Challenge ! Justement il faut éviter les contaminations de la mémoire explicite dans les résultats !

Par exemple, dans une tâche de complètement de fragments de mots de Tulving et al. ont demandé aux
participants d’étudier une longue liste de mots assez rares (96). Après, ils ont été testés dans une tâche de
reconnaissance, ils leur demandaient s’ils se souvenaient avoir étudié certains mots ou pas. De plus, il y avait
une tâche de mémoire implicite qui est une tâche où ils devaient compléter des fragments : (A _ _ A _ _ I N),
ils doivent compléter les blancs pour former des mots complets. Le fait d’avoir étudié certains de ces mots
auparavant va faciliter la capacité ultérieure à compléter les fragments. Le priming survient si on est meilleur
pour compléter un mot qu’on a étudié auparavant par rapport à un mot nouveau qu’on n’aurait pas étudié
dans la liste présentée en premier lieu.

Ils ont testé les participants à 2 moments ≠ : soit 1h ou 7j après avoir étudié la liste.

On s’attend à un effet de priming dans la tâche si les performances sont meilleures pour les mots que l’on a
étudiés avant. Mais comment saurait-on si cette performance est due au fait que le participant se rappelle
avoir vu le mot dans la liste ? On pourra parler d’effet de priming et qu’on est bien dans un type de mémoire
implicite si on a une indépendance stochastique dans les réponses, c’est le fait que si on se rappelle
reconnaître le mot mais que l’on n’arrive pas à compléter le fragment ou inversement, on ne se rappelle pas
avoir vu le mot mais on complète le mot, on voit qu’il y a une indépendance pour notre performance aux
deux types de tâches pour un mot donné. Le fait de se souvenir d’un mot en particulier ne veut pas dire qu’on
va le retrouver lorsque on complète le fragment et inversement certains mots pour lesquels on a réussi a
compléter les fragments, on ne les auraient pas forcément reconnus dans la tache de reconnaissance. Ici on
peut être rassuré que le participant qui a un effet de priming pour un mot donné ce n’est pas dû au fait qu’il
se rappelle de ce mots en particulier puisqu’il ne l’a pas reconnu

Lorsque on met tous les mots ensemble et que l’on regarde la probabilité moyenne de s’en rappeler ou de
compléter le fragment de manière correcte, voici ce qu’on observe :

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Les résultats montrent que la capacité à reconnaitre les mots


diminue au fil du temps comparé à la capacité de complètement
de fragments qui est plus stable dans le temps. Il y a là une
indépendance fonctionnelle. C-a-d que notre manipulation
expérimentale, le fait d’avoir des tests qui sont plus ou moins
éloignés dans le temps, suite à l’apprentissage, on voit que cette
manipulation a un effet différent sur la tâche de mémoire
explicite et sur la tâche de mémoire implicite. Le passage du
temps altère la performance en mémoire explicite, elle diminue
fortement alors que le passage du temps n’affecte pas tellement
la performance en mémoire implicite et on voit que l’effet de
priming persiste.

Une autre manière d’étudier la mémoire implicite est de faire appel à des participants amnésiques ; ceux-ci
ne sont pas capables de former de nouveaux souvenirs en mémoire à long terme, ils ne peuvent pas se
rappeler explicitement d’événements précis. Ici on, s’intéresse au priming de répétition. Dans leur étude,
Graf et al. ont demandé aux participants de juger 10 mots (de dire que soit ils aiment ou n’aiment pas un
mot en particulier), c’est une situation d’apprentissage incident, il réalisent simplement un jugement sans
savoir qu’ils doivent les mémoriser. Puis ils leur ont demandé de rappeler le + de mots possibles (dans une
tâche de rappel libre) ou on leur demande de compléter des racines de mots (T A B _ _). Y a-t-il une
facilitation ?

Dans cette expérience, il y avait 3 groupes de participants : patients amnésiques (syndrome de Korsakoff),
patients traités pour alcoolisme (pas de syndrome) et patients sans amnésie ou d’antécédents
d’alcoolisme. Les résultats montrent que dans la tâche de rappel libre, les amnésiques ont bien un problème
en MLT par contre dans la tâche de complément de mots, on voit que la mémoire implicite intervient. Les
amnésiques font aussi bien que les sujets contrôles. De plus, leur performance est améliorée (barre/zone
grise) grâce au jugement de mots même s’ils ne s’en souviennent de manière explicite. (= priming)

En résumé, pour tester la mémoire implicite et être sûre que c’est bien ça qu’on mesure, il faut essayer
d’éviter que la mémoire explicite contamine les résultats. Pour ce faire, il y a plusieurs méthodes telles que
l’étude de patients amnésiques, les tâches d’apprentissage incident (pas au courant qu’ils vont devoir
rappeler les mots + tard) ou d’autre tâches qui ne font pas appel explicitement appel à la mémoire explicite
comme les tâches de complément de racines de mots et enfin l’utilisation de la contrainte temporelle
(répondre le + vite possible).

Dans la vie quotidienne, la mémoire implicite peut se manifester de manière embêtante, c’est bien d’en être
conscient, surtout dans la situation actuelle (fake news). Le fait d’avoir rencontré une info auparavant même
si on nous a dit qu’elle était fausse, peut nous influencer + tard en nous rendant + susceptible de juger que
l’info est correcte : propaganda effect.

Il y aussi l’effet de simple exposition : être exposé à un objet va nous rendre + susceptible d’en avoir un
jugement + favorable. Ex : la nouvelle couleur du mur sera un kaki pas beau, mais le fait de le voir tous les
jours va faire qu’au fil du temps on va l’aimer.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

3. Construction de la mémoire

L’information peut voyager entre MCT et MLT. On va étudier deux concepts :


• Encodage/acquisition : MCT => MLT
• Récupération : MLT => MCT

Nous avons parlé de processus de répétition (subvocale p.ex.), on parle de répétition de « maintien » (ex : un
numéro de téléphone avant d’appeler). Ce type de répétition n’est PAS très efficace pour conserver l’info de
manière durable. D’autres processus sont préférables et effectuent des traitements plus élaborés. Nous
avons aussi parlé de se centrer sur la signification des choses, créer et trouver des liens pour mémoriser
l’information.

Hyde et Jenkins (1969) ont demandé à leurs participants de mémoriser des listes de mots. Un 1er groupe
devait effectuer un jugement sur le caractère agréable ou pas du mot (sémantique), tandis qu’un 2nd groupe,
les participants devaient détecter la présence des lettres e et g dans les mots (traitement plus superficiel, pas
besoin de la sémantique). Les auteurs ont vu que cette manière de traiter les mots affectait le rappel
(rappeler soi-même, de manière active les mots) et la reconnaissance des mots.

a) Théorie des niveaux de traitement

De là Craik & Lockhart, ont développé la théorie des niveaux de traitement de l’information.

Selon leur théorie, la profondeur du traitement que l’on effectue sur de l’information va influencer la
capacité de mémoriser cette info. Ils font la distinction entre des traitement superficiels et des traitements
plus profonds. Les traitements + profonds (sémantiques) vont créer des traces mnésiques + solides et +
durables que les traitements + superficiels (traits physiques). Ils nous parlent de la nature du codage de l’info
plutôt que de la quantité en tant que telle.

Ils ont demandé à leurs participants de réaliser différentes tâches sur des listes de mots qui n’avaient aucun
lien entre eux et ici l’apprentissage était incident (participants pas prévenus que l’on testait leur mémoire).

1) Dans le premier groupe : ils devaient réaliser une tâche supposée superficielle (juger si le mot est écrit
en majuscule ou minuscule). C’est un traitement physique de l’aspect des mots.
2) Dans le deuxième groupe : ils devaient réaliser un jugement phonologique (décider si des mots rimaient
avec un autre mot)
3) Dans le troisième groupe : ils devaient réaliser un jugement sémantique (supposer plus profond que les
2 précédents) et faire un jugement catégoriel (lire des listes de noms d’animaux et juger si l’animal est
un poisson ou pas).
4) Dans le quatrième groupe : ils devaient réaliser un jugement sémantique et décider si un mot peut
correctement convenir dans une phrase ou pas (ex : j’ai rencontré un ... dans la rue, ici le mot ami peut
convenir)

ð L’idée est que du premier traitement jusqu’au quatrième traitement, on doit réaliser des traitements de
+ en + profonds.

En regardant le % de reconnaissance correcte, on constate que les


traitements + superficiels mènent à des % de reconnaissance plus faibles
et à l’inverse les + profonds sont meilleurs (90% de chance de se rappeler
d’un mot pour lequel on a du juger s’il convient dans une phrase précise).

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Quel est le rôle du niveau d’élaboration ?

Ils se sont également demandé si le niveau d’élaboration, au moment de l’encodage, importait en plus de la
nature du traitement en tant que tel. Ils ont créé une tache où le niveau de traitement sémantique était
équivalent mais avec un niveau d’élaboration différent (càd à quel point il faut fournir un type de traitement
donné).

Les participants doivent juger si un mot cible peut compléter correctement une phrase simple (moins
élaborée) qu’on compare avec une phrase plus complexe (fournir un traitement plus élaboré). Les résultats
montrent une meilleure performance pour les items exigeant un traitement + élaboré à réaliser. Donc de là
, ils concluent que la profondeur du traitement importe mais le niveau d’élaboration, donc, le travail à
fournir est important également. En d’autres termes, il ne suffit pas de recourir à un encodage sémantique,
ce n’est pas le seul élément important dans la façon dont on va retenir l’information mais c’est aussi la
richesse d’encodage des stimuli (le travail, l’élaboration qu’on a fournie pour réaliser la tâche lors de
l’apprentissage)

Problèmes ?

1) Pas de mesure claire de la profondeur du traitement : cette distinction reste utile mais il y a quelques
problèmes avec cette approche du niveau de traitement car le niveau de traitement et sa profondeur
sont un peu déterminés comme ça par les chercheurs sans avoir de base. On suppose que juger une rime
est un traitement plus profond que juger si un mot est écrit en majuscule ou pas, on suppose que juger
si un mot convient dans une phrase est plus profond que s’ils riment entre eux mais au final on n’a pas
de preuve de cela. Certains auteurs ont débattu sur les types de traitement et leur profondeur dans
différentes taches ou ils sont supposés être mis en œuvre. On pourrait se dire que ça marche en,
regardant le graphique (vu précédemment) mais le danger c’est qu’on entre dans un raisonnement
circulaire ; on postule qu’au départ les traitements sont profonds puis avec le graphique on dit qu’on a
raison. C’est problématique.

2) Un autre problème avec cette approche c’est que l’on s’est vraiment centré sur le processus d’encodage,
ce que l’on fait quand on apprend l’info en négligeant ce qui se passe au moment où on recherche
l’information, et au moment où on la récupère (ce qui se passe au moment de la récupération à son
importance et la correspondance entre ce qui se passe à l’encodage et ce qui se passe à la récupération
a son importance et une pertinence dont il faut tenir compte).

Quelques exemples supplémentaires de facteurs qui peuvent influencer l’encodage :

• Effet de génération : Slameka & Graf se sont demandés si le fait de demander à des participants de
générer des infos par eux-mêmes allait ensuite les aider à rappeler l’info de manière + efficace. Dans
leur expérience, le 1er groupe doit lire des paires de mots associes (ex : roi et couronne) , la tâche est
passive, une simple tache de lecture, tandis que le 2nd groupe , la tâche est plus active, on présente
un premier mot avec la racine du second mot et ceux-ci doivent doit générer le second mot sur base
du premier et des premières lettres du second mot (les mots sont reliés de manière sémantique).
Ensuite, dans un test de mémoire, les participants devaient rappeler le 2e mot sur base du 1er mot.
On constate que le rappel du 2nd est bien meilleur dans le 2e groupe que dans le 1er groupe. Donc le
fait d’avoir généré soi-même un mot sémantiquement relié à un premier mot va nous rendre +
susceptible de se rappeler de ce même mot par après. On peut appliquer ce type de résultats dans
nos propres études en essayant de générer des liens, trouver de la signification (générer de l’info)
pour être plus susceptible de mieux mémoriser l’information jusqu’à l’examen et peut-être plus tard
aussi...

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

§ Effet d’autoréférence : par Rogers et al, consiste au fait de mieux mémoriser de l’info si on la relie à
soi-même. Ils ont présenté une liste d’adjectifs (traits de personnalité) à leurs participants (ex :
curieux, agréable etc.) et donc ils devaient réaliser différents types de tâches sur ces listes d’adjectifs,
dans un premier cas on a un traitement plutôt physique (juger si les mots sont présentés en
majuscule ou pas, si les mots riment, s’ils sont des synonymes et si les mots peuvent s’appliquer à
nous même ou pas). Ici le participant relie les listes d’adjectif à lui-même et réfléchit si ça s’applique
bien à lui. Les résultats montrent que les participants qui ont dû juger si les adjectifs se rapportaient
à eux ou pas s’en souviennent mieux. Dans cette tâche on va récupérer de l’info en mémoire et donc
en faisant ça on crée des liens en mémoire et cela nous aide.

b) La récupération

On va rechercher de l’info en MLT pour l’amener à la conscience et s’en servir. Avant de pouvoir utiliser une
connaissance, il faut aller la chercher en mémoire. D’ailleurs de nombreux problème de mémoire sont dus à
des problèmes de récupération. (ex : phénomène du mot sur le bout de la langue).

Dans une expérience, Tulving s’est intéressé à ce processus de récupération. Il a proposé une liste de mots à
étudier à ses participants et ensuite il leur a demandé de se soumettre à une tache de rappel à 3 reprises. Il
a constaté qu’à chaque chance donnée aux participants, on avait ≠ combinaisons de mots dont les
participants se rappelaient. Ex : lors de l’essai 1, on se rappelle de mots différents dont on ne se rappelle pas
à l’essai 2 etc. Il y a différentes combinaisons de mots à chaque essai. Les mots sont en mémoire, mais on ne
les récupère pas… On voit dans les 3 essais que seule la moitié des mots se recoupe. Ainsi, cela démontre
que certains mots étaient temporairement inaccessibles et pas récupérés mais ont pu être récupérés à un
autre moment.

Une chose qui peut nous aider à récupérer des infos : les indices de récupération. Par exemple, si on doit
lister de tête les gens qui étaient avec nous en primaire, on va en lister moins que si on avait une ancienne
photo de classe sous les yeux. Ces indices peuvent faire appel à différentes modalités sensorielles (odeurs
etc.). Autre exemple, parfois lorsque je quitte ma maison, j’ai l’impression d’oublier quelque chose ou quand
je devais faire quelque chose, je ne me rappelle plus quoi mais j’ai l’intuition que cela a un rapport avec ma
cuisine donc j’y vais et je me rappelle que je devais sortir quelque chose du frigo, on peut donc s’aider soi-
même en se mettant dans une situation qui constitue un indice de récupération.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Dans une tâche de Tulving & Pearlstone, les participants faisaient du rappel indicé càd qu’ils apprenaient
une liste de 48 mots qui appartenaient à 12 catégories différentes (animaux, fruits, profession etc.). Dans un
1er groupe, les participants doivent rappeler le + de mots parmi ceux qu’ils ont appris parmi les 48 (rappel
libre) tandis que dans un 2e groupe, les participants devaient faire une tâche de rappel indicé (donc on leur
donne un indice pour récupérer l’infos, à savoir le nom des catégories). On voit que dans ce cas-ci, les
participants rappellent 75% des mots contre 40% pour la tâche de rappel libre.

à Les indices nous aident à récupérer les mots/souvenirs qui étaient disponibles mais pas accessibles.
L’information était là mais le fait de donner une aide va aider à récupérer l’information qu’on avait bien
encodée.

On a une tendance à spontanément organiser les infos au moment du rappel. La raison c’est que ces
catégories sont des indices de récupération (c’est utile à savoir et à comprendre pour nos études
notamment).

Dans leur expérience, Roediger & Karpicke se sont demandés si le fait de se tester pouvait aider à mémoriser
l’information ou pas. Les participants commencent tous par lire un passage d’un texte puis ils doivent
résoudre des problèmes de maths pendant 2 min (pour ne pas avoir la possibilité de répéter l’information).
Ils sont ensuite divisés en 2 groupes : un groupe relecture (ils ont l’occasion de relire le passage une seconde
fois) et un groupe qui est soumis à un test de rappel.

Ensuite après différents délais (5min, 2 jours ou 2 semaines après), ils ont testé la mémoire des participants
avec un autre test de rappel. Ils étaient dans la même situation où ils devaient rappeler le plus d’information
du passage. La seule différence c’est qu’un groupe a pu relire le texte, donc être confronté à l’information et
les autres non

ð Les résultats montrent que le groupe 2 (testing), après un certain délai, a une meilleure performance que
ceux qui ont relu l’information une deuxième fois. Lire le plus n’est pas le mieux…

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

c) La correspondance des conditions de l’encodage et de récupération

§ La spécificité de l’encodage a été abordé par Tulving et Thomson. Elle nous aide à constater que l’info
est toujours encodée dans un certain contexte (on ne l’apprend pas dans le vide). Ce contexte spécifique
peut être encodée en même temps que l’info qui y est liée, cette info contextuelle peut servir d’indice
de récupération.

Ces indices de récupération et ces infos contextuelles peuvent nous aider à retrouver de l’info dans les
situations dans la vie quotidienne (c’est une façon d’étudier la mémoire qui est beaucoup moins artificielle
que dans les laboratoires). Exemple : une personne raconte un récit ; il a perdu ses grands-parents durant son
enfance et depuis il a des difficultés à se rappeler d’évènements vécus avec eux. Un jour il décide, à l’âge
adulte de passer devant la maison de ses grands-parents. Ce contexte peut l’aider à retrouver des infos
auxquelles il n’a pas réussi à repenser avant. Il va, par exemple, se rappeler de certains souvenirs comme la
première fois, où il a appris à rouler en vélo, les odeurs etc. Le contexte est important est lié aux événements
que l’on vit

Pour tester cette idée, que le contexte aide à récupérer de l’info, Baddeley et Godden on fait une expérience
(amusante). Ils ont pris des personnes dans un club de plongée et ils ont demandé à la moitié d’entre eux
d’étudier une liste de mots, dans leur tenue de plongée, au bord de la piscine (donc sur terre) et à l’autre
moitié d’étudier la liste sous l’eau. L’aspect important ici est, pour le moment du rappel, on divise à nouveau
ces 2 groupes en 2 : la moitié rappelle les mots dans les mêmes conditions que durant l’apprentissage et
l’autre moitié est mise dans une situation différente de la situation de l’apprentissage (autrement dit si c’était
sur terre ils rappellent les mots sous l’eau et inversement).

Axe x : l’endroit où le rappel se passe (terre ou eau)


Axe y : VD = proposition de mots correctement rappelés
Les différentes couleurs représentent le lieu où l’étude s’est
produite (terre ou eau)

Résultat : on voit que les personnes qui ont appris les mots sur terre
sont meilleures quand elles se les rappellent sur terre que sous l’eau
(barres vertes) et les personnes qui ont appris sous l’eau et qui font
le rappel sous l’eau sont meilleures aussi (ligne bleu).

ð On a une interaction. Les conditions d’apprentissage et leur correspondance avec les conditions de rappel
sont importantes.

§ On obtient un effet similaire mais avec les « états internes » : State-dependent learning

C’est le fait que les états internes peuvent constituer un avantage. On peut parler d’état physiologique (ex :
état de conscience) et émotionnel (ex : humeur). Ils ont fait une expérience où ils ont demandé à des
participants d’apprendre une liste de mots. Il y a un groupe qui l’apprenait après avoir bu de l’alcool et un
autre groupe ne buvait pas Ensuite on leur demande de rappeler des mots soit en étant sous le même état
que pendant l’apprentissage soit dans un état différent. On constate que le rappel est meilleur lorsque les
états correspondent. Lorsque on est testé avec des états qui ne correspondent pas cela diminue la
performance.

§ Cette fois on étudie le type de traitement qu’on fait sur du matériel pendant l’encodage et à la
récupération. C’est pour cela que l’on parle de traitement adapté au transfert. Moris et al ont mené
une tâche où on est face à une situation d’encodage où l’apprentissage est incident. L’expérience se
passe ainsi :

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

§ Groupe 1 : on demande aux participants si un mot (cible) rime avec un autre mot (groupe rimes)
o Exemple « ______ rime avec pain. » - train ? dent ?
§ Groupe 2 : le traitement est lié à l’analyse de la signification du mot (on demande si un mot cible
peut s’insérer dans une phrase de façon correcte)
o Exemple « Le _____ a un moteur argenté. » - train ? dent ?

Le lendemain on leur demande de récupérer l’info avec deux tâches différentes :


§ Tâche 1 : Les participants sont confrontés à un test de reconnaissance dans lequel ils doivent dire si
les mots font partie des mots auxquels ils ont été confrontés le jour avant
§ Tâche 2 : Les participant devaient juger si les mots présentés rimaient avec les mots présentés le jour
avant (dans cette tâche ils ne retrouvent pas le mot en mémoire mais ils doivent se rappeler du type
de rime qu’ils ont vu le jour avant)

Résultat : on a une interaction. La performance est liée au type de traitement


qu’on a réalisé pendant l’apprentissage incident. On voit que lorsque
l’encodage est sémantique dans un test standard de reconnaissance, la
reconnaissance est meilleure que lorsque on a fait un jugement de rime. Par
contre si on doit juger si les mots riment avec ceux d’avant, la performance est
meilleure chez ceux qui avait fait une tâche de rime au moment de l’encodage
que chez les participants qui ont fait une tache de jugement sémantique.

ð Remise en question supplémentaire de la théorie de niveau de traitement


qui nous parlait de niveau de profondeur de l’encodage. On voit ici qu’il faut
nuancer cela.

C’est le genre de traitement qu’on réalise au moment de la récupération qui importe et aussi le fait qu’il
corresponde ou non avec le type de tâche qu’on faisait au moment de l’encodage.

Le traitement adapté au transfert : la rétention de l’info dépend de la pertinence du codage de ces infos par
rapport à ce qu’on va nous demander dans une épreuve de récupération. La meilleure façon d’encoder une
info dépend des caractéristiques de la tâche de rappel ou de la tâche de reconnaissance.

d) Processus de consolidation

C’est un processus lié à la formation des souvenirs. L’idée est apparue quand on a réalisé que les souvenirs
sont assez fragiles au moment de leur création.

Muller et Pilzecker ont fait une expérience. Ils présentent des listes de syllabes sans signification (ex : TA, TO)
à 2 groupes et leur demande de les étudier. Ils constatent que lorsqu’ils laissent un délai de 6 min entre 2
listes a étudier, la performance de rappel était meilleure ; que lorsque les 2 listes devaient être étudiées
séquentiellement sans délais. Ici on a un phénomène d’interférence.
ð Cela nous montre que les nouvelles traces mnésiques sont fragiles. Lorsque on vient d’être confronté à
une nouvelle info elle n’est pas encore fixée dans notre mémoire.

La consolidation est processus de transformation des traces mnésiques fragiles et malléables (on les oublie
facilement) en des traces plus permanentes et plus résistantes aux perturbations (plus solides).

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Il y a 2 types de consolidation au niveau cérébral :


1) La consolidation au niveau synaptique qui constitue des
changements structurels au niveau des synapses et des
neurotransmetteurs qui se situent sur une échelle temporelle de
quelques minutes à quelques heures.
2) La consolidation au niveau systémique qui s’étend sur une
échelle temporelle plus longue (mois à années) et qui constitue
des transformations à des échelles plus larges et plus globales au
niveau cérébrale. C’est une réorganisation des circuits
neuronaux

Au niveau de la synapse, Donald Hebb a décrit le


processus de consolidation. Lorsque l’on est confronté
à une nouvelle info, on a des échanges de
neurotransmetteurs qui s’effectue dans la synapse et
qui aident l’info à passer d’un neurone a un autre. Si
l’info est répétée et représentée mentalement, la
réponse se fait plus rapidement et efficacement. Il y a
aussi plus d’échanges entre les neurones. Le fait de
revoir mentalement cette info plus tard va renforcer la
communication entre les neurones. On parle de
potentialisation à long terme. Cfr cours Physio.

Lorsque on est confronté à un évènement, on a une combinaison d’un nombre élevé de neurones qui
subissent cette consolidation de manière simultanée. Il y a une conception qui dit que les souvenirs seraient
représentés par un ensemble de neurones - pattern spécifique qui déchargent suite à un objet, un stimulus.
(ex : je vois le visage de mon amie X , il y a un ensemble de neurones spécifique qui s’active. Si je vois mon
amie Y , c’est d’autre neurones qui s’activent. C’est ce réseau/pattern de neurones différent lié à chaque
visage qui me permet de reconnaitre une personne et de me représenter leurs traits de visage en mémoire).

Au niveau de la consolidation systémique, on peut revenir au cas de HM, le patient amnésique dont les
hippocampes ont été enlevés et qui était incapable de créer de nouveau souvenirs épisodiques en MLT, on
se demande donc, puisqu’il n’a plus d’hippocampe, est ce que ceux-ci ont un rôle à jouer dans la
consolidation ?
Certains chercheurs ont développé un modèle standard de la consolidation qui concerne les réorganisations
systémiques. L’info serait mémorisée comme suit : lorsque l’on est confronté à un évènement, ces nouvelles
infos vont activer différentes aires corticales liées à différentes modalités sensorielles, nos états
émotionnelles, etc (aire visuelle, auditives, liées au langage etc.) et l’hippocampe serait la structure qui
coordonne l’activité entre toute ces activations corticales.

Au fil du temps lorsque on est confronté à la même info


ou qu’on repense à nos souvenirs, ces liens entre
l’hippocampe et les aires corticales deviendrait de moins
en moins fort mais les liens qui n’existaient pas
auparavant entre les aires corticales se créeraient et se
renforceraient. Finalement les liens qui existent entre les
hippocampes et les aires corticales finissent par
s’estomper et disparaitre. On aurait alors des réseaux
d’activation plus forts et connectés au niveau cortical.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Exemple : lorsque on subit des traumatismes crâniens, on remarque


une amnésie graduée : les souvenirs lointains sont préservés mais les
souvenirs proches du traumatisme sont dégradés. Il existe 2 types
d’amnésie : rétrograde (souvenirs avant la blessure) et antérograde
(après la blessure – pas de nouveaux souvenirs). L’explication de cette
amnésie graduée serait liée à la force des connexions corticales :
lorsque l’on vient d’être confronté à de l’info, il n’y a pas encore de
liaison, ce qui nous rend plus susceptible de ne pas nous rappeler de
l’info.

Au fil du temps les connections se renforcent et cela préserve nos souvenirs plus éloignés dans le temps. On
observe aussi, dans les cas de démence quand il y a un problème mnésique c’est généralement pour les
événements qui sont plus proches. Les souvenirs plus lointains seraient préservés grâce aux connexions plus
robustes au niveau cortical.

Selon ce modèle standard de la récupération : les hippocampes


- seraient impliqués dans la formation des souvenirs,
- serviraient à réactiver ceux-ci et au fur et à mesure qu’ils se consolident,
- seraient de moins en moins impliqués voire plus du tout nécessaires pour les souvenirs lointains.

Un autre modèle de consolidation est le modèle des traces multiples (il remet en question le modèle
précédant) . Selon ce modèle, les hippocampes sont surtout importants dans la récupération de souvenirs
épisodiques, tous, qu’ils soient récents ou lointains. Dans une étude d’imagerie de Gilboa, quand on présente
aux participants des photos qui ont été prises dans leur vie à différents moments, on voit que les
hippocampes sont actifs et ce, que les photos soient récentes ou pas.

Autre étude pour tester ce modèle des traces multiples, Viskontas et al. ont mené une étude dans laquelle
ils présentent des pairs d’objets (ex : fantôme et bouche à incendie) et les participants doivent s’imaginer
une interaction entre les 2. Ils sont confrontés à ces paires d’objets pendants 6sec et il y en a 150. Plus tard,
sur base des paires de mots, les participants doivent réaliser une tâche de reconnaissance remember-know.
Ils doivent juger si la paire d’objets a été présentée ou pas et spécifier s’ils se rappellent de l’interaction qu’ils
ont imaginée quand ils ont vu la paire (réponse remember) ou s’ils se rappellent juste de la paire sans autres
détails (réponse know). Ce test est réalisé soit 10 min après soit 1 semaine après. On enregistre l’activité
cérébrale des sujets (scanner).

Les résultats montrent que le taux total de réponses correctes diminue avec le temps mais que le taux de
remember diminue alors que le taux de know augmente. Ici, on voit bien que la sémantisation des souvenirs
survient aussi sur des échelles temporaires assez courtes (on se rappelle de l’info mais pas du contexte).
L’hippocampe reste impliquée/activée pour les traces mnésiques épisodiques (réponse type remember).
Lorsque on a oublié le contexte, l’hippocampe n’est plus impliqué.

En rouge : RR (réponses remember


10min après et une réponse également
remember 1 semaine après)

En bleu : RK (réponses qui étaient


remember 10min après et qui sont
devenues une réponse know 1 sem.
après)

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Pour Clive Wearing, on a vu qu’il a une constance factuelle (il se rappelle du nom de son épouse, quel métier
il faisait etc.) et il est capable de créer de nouveaux souvenirs (il sait qu’il vit dans une institution et que si il
veut parler à sa femme il doit l’appeler etc.). C’est au niveau de la mémoire épisodique qu’il a des soucis (il
ne se rappelle pas du jour de son mariage etc.) On pense que chez lui, la sémantisation du souvenir se fait
directement Le reste de son cerveau est intact. Lorsqu’il est confronté à des infos, ça va activer toutes les
zones corticales liées aux différentes modalités sensorielles donc il est possible que, de manière plus lente
que la normal, il forme des souvenirs de par l’activité corticale. Il lui manque juste les hippocampes qui lui
permettent de faire ces connexions plus rapidement . Il se rappelle des faits bruts sans avoir d’infos liées au
contexte qui y est associé.

Consolidation et le sommeil : Le sommeil est important et cela a été montré par Gais et al :

Ils ont demandé à des étudiants d’étudier des paires de mots de vocabulaires en
anglais-allemand et ils les ont séparés en 2 groupes :
§ Groupe 1 : devaient aller dormir 3H après avoir étudier la liste de mots.
§ Groupe 2 : devaient aller au lit 10H après avoir étudier la liste de mots.

NB : Le test était réalisées entre 24H et 36h après l’étude, après qu’ils ait tous eu eu le
temps de dormir.

Résultat : On observe le % d’oubli du vocabulaire : On voit que l’oubli est beaucoup plus bas chez le groupe
qui a eu l’occasion de dormir après avoir étudié la liste que chez les autres (groupe 2 – éveil).

Différentes explications ont été amenées comme par exemple le fait qu’au niveau physiologique, le sommeil
favoriserait la consolidation. Lorsque l’on dort, on n’a plus aucune interférence. On n’apprend plus d’autres
infos, on a plus d’évènements qui se passent et qui viennent perturber les traces mnésiques que l’on vient
de créer (qui sont, rappelons-le, assez fragiles, donc si on apprend un truc le matin, on a toute la journée
pour être confronté à d’autres infos qui vont interférer avec ce qu’on a appris avant). Le fait de dormir nous
permet donc de bloquer les interférences et de laisser le processus de consolidation de faire son travail afin
de fortifier les souvenirs.
On constate cette effet dans notre vie quotidienne avec les rêves qui sont souvent constituées de morceaux
d’évènements de la journée. Les rêves mettent en lien une personne qu’on a rencontré avec autre chose
etc.. Ces mélanges reflètent le fait que notre cerveau travaille pour consolider les infos qu’on a
emmagasinées durant la journée.

Le processus de consolidation permettrait de renforcer les traces mnésiques qui sont assez fragile (elles sont
plus susceptibles d’être transformées, oubliées), en des traces plus permanentes et plus résistantes aux
perturbations. Mais les théories actuelles parlent aussi de reconsolidation : lorsqu’on repense à un souvenir,
cela créerait une porte ouverte, une fragilité, dans nos souvenirs car quand on y repense, il est susceptible
d’être transformé, modifié etc. Lorsque on réactive un souvenir on ouvre la porte au fait d’introduire des
infos non correctes. On voit donc que la nature de la mémoire est constructive, les souvenirs ne sont pas
stockés de façon permanente, ils peuvent être changés.

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4. La mémoire autobiographique (MA)

La mémoire autobiographique c’est la mémoire de notre histoire de vie, l’ensemble de nos souvenirs
personnels. C’est un domaine de recherche relativement récent.

En 1978, Ulric Neisser critiqua l’approche de laboratoire et veut étudier la mémoire avec une approche plus
écologique et donc étudier les souvenirs dans des situations de la vie réelle.

La MA est devenue, avec le temps, un des champs les plus actifs de l’étude de la mémoire humaine. Il y a une
augmentation importante depuis les 10 dernières années.

a) La structure de la mémoire autobiographique

On a vu la distinction classique entre la mémoire sémantique et la mémoire épisodique. La mémoire


autobiographique comporte à la fois ces deux types de mémoires.

Un modèle plus détaillé a été proposé par M.Conway. Il conçoit la MA avec 3 composantes
principales (périodes de vies, évènements généraux et évènements spécifiques) qui mémorisent et
organisent des info par rapport à notre passé et qui sont plus ou moins abstraits :

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Le schéma montre 3 systèmes qui interagissent et s’influencent l’un l’autre :


§ La mémoire épisodique : elle permet d’encoder et de maintenir en mémoire des événements
spécifiques (uniques se produisant dans un contexte spatio-temporel précis dans notre passé
personnel - lieu et contexte donné). Les évènements qui sont stockées en ME sont assez courts
(quelque secondes, minutes ou heures) mais on considère que, par définition, un souvenir épisodique
dure une journée maximum. Le souvenir de ce type d’évènement a recours aux détails expérientiels
qui a lieu dans le passé (aspects sensoriels-perfectifs, cognitifs et affectifs). Il y a une importance des
images mentales (surtout visuelles) quand on se souvient d’un moment, chez la plupart des gens elle
est prédominante. L’ensemble des éléments nous donne le sentiment de revivre le passé (conscience
autonoétique). La plupart des souvenirs épisodiques deviennent inaccessibles après quelques jours
(seuls quelques événements sont maintenus à long terme), ils sont vite oubliés. Selon Conway, les
souvenirs maintenus à plus long terme, seraient ceux associés à des connaissances plus abstraites,
sémantiques.

§ La base de connaissances autobiographiques : ce sont des connaissances générales (sémantiques) sur


notre vie personnelle. Elles sont de 2 types :

1) Les périodes de vie, ce sont des grands chapitres de vie (ex : quand j’étais à l’école primaire)

2) Les événements généraux qui sont soit des événements répétés donc une représentation générale
d’expérience qu’on a fait plusieurs fois dans le passé, elle résume les points communs entre les
différentes expériences sans se souvenir d’un moment en particulier (ex: les dimanches je vais chez
ma grand-mère ou quand je vais à la piscine) ; soit des événements étendus dans le temps (ex :
mes vacances en Italie l’été passé).
Ces connaissances sont organisées de manière hiérarchique : les événements généraux sont nichés
dans les périodes de vie. Cette structure permet d’organiser nos connaissances et les localiser dans
le temps et nos histoires de vie. Elle permet également d’organiser nos souvenirs en thèmes et en
périodes.

Exemple : La période où j’étais en thèse de doctorat : il y a eu pleins


d’évènements généraux liés à ce moment-là. Cette période de vie
organise une série de chose selon le thème. On peut ainsi les
localiser dans le temps. Les souvenirs épisodiques lorsqu’ils sont liés
à ces connaissances autobiographiques (donc mis en MLT) vont être
nichés au sein de ces périodes de vie et des évènement généraux.

§ Concept de soi : (plus haut niveau de la hiérarchie) c’est l’ensemble des représentations
sémantiques (abstraites) de nos caractéristiques personnelles telles que nos traits de personnalité,
valeurs, croyances, buts, etc. Ce ne sont pas des souvenirs mais ce sont nos caractéristiques qui sont
décontextualisées (pas localisés dans le temps). Des chercheurs ont vu que chez des patients
amnésiques qui sont incapables de se souvenir d’évènements personnels (épisodique) mais ils
conservent des connaissances de leur traits de personnalite, ils savent se définir (définition abstraite
sémantique d’elle-même) Elle se distingue donc des connaissances autobiographique ou sémantique
mais ce concept iinfluence l’encodage et la récupération de l’info dans la base de connaissances
autobiographiques et la mémoire épisodique (souvenirs en accord avec l’image de soi). Cette image
de soi façonne nos souvenirs et influence ce dont on va se souvenir. Des biais vont faire que l’on
mémorise des infos en accord avec l’image de nous-même.

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Ces 3 types de connaissances qui constituent la MA sont associées à des substrats cérébraux (en partie)
distincts et spécifique. On a ici une méta-analyse d’imagerie cérébrale qui met en évidence les régions liées
à la ME, aux connaissances autobiographiques et au concept de soi.

EAM = mémoire épisodique


SAM = sémantique
CS = concept de soi

ð Ces 3 types de connaissances sont sous tendus par des régions cérébrales différentes. La MA est un
système de mémoire complexe qui implique différentes connaissances et qui est dans un vaste réseau
cérébral.

b) Qu’est-ce qu’un souvenir autobiographique spécifique ?

Par définition , un souvenir autobiographique spécifique est le souvenir d’un événement unique s’étant
produit un jour particulier (< 24h). Ce souvenir comporte des éléments épisodiques mais aussi des
connaissances autobiographiques + générales qui permettent de localiser ces événements dans notre
contexte de vie. De plus, il y a un pattern d’activation transitoire au sein de la mémoire autobiographique
(processus constructif plutôt que reproductif) – on peut se souvenir d’un même événement de ≠ manières.
Ex : J’ai un souvenir, une image mentale où je me trouve enfant à la plage en train de construire un château
de sable, ce sont des éléments épisodiques ensuite je me rappelle qu’à ce moment-là, j’étais en primaire, c’est
une connaissance autobiographique (quand l’événement s’est produit).
ð Un souvenir contient donc une image mentale (élément) épisodique et une connaissance
autobiographique plus générale.
Autre élément important lorsqu’on parle de souvenirs, c’est que l’activation de ces deux types de
connaissances est transitoire. Un souvenir ce n’est pas comme une cassette qu’on réécoute plusieurs fois de
la même manière. Un souvenir est un ensemble d’information au sein de la MA mais ce pattern d’activation
transitoire est à chaque fois récrée dans le présent, ce qui explique pourquoi on peut se souvenir d’un même
événement de plusieurs façons différentes à chaque fois. C’est une reconstruction à partir d’infos en ME et
en MA.

c) Les méthodes d’investigation de la mémoire autobiographique

La plupart des recherches sur la mémoire ont pris le parti d’étudier la mémoire en laboratoire avec des infos
qu’on mémorise (liste de mots etc.) ce qui permet de contrôler l’exactitude de l’info qui est rappelée dans
une expérience. Mais pour les souvenir autobiographique c’est compliqué d’appliquer cet méthode-là, il y a
d’autres méthodes :

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• La méthode des mots-indices de Galton-Crovtiz

C’est une de méthodes qui est la plus utilisée. Au début Galton s’intéressait aux associations. Il a créé des
fiches avec des mots puis faisait des expériences sur lui-même. Il s’auto présentait un mot et écrivait toutes
les premières idées qui lui venaient en tête en se chronométrant Il a ensuite remarqué que dans certains cas,
il a des souvenirs passés qui lui revienne en tête.

Suite à ça, Crovitz et Schifman ont utilisé la même méthode mais un peu différemment. L’idée est de
présenter un par un, à des participants, une série de mots et pour chaque mot ils leur demandent de fournir
un souvenir (un jour donné et dans un contexte donné) en réponse à un mot indice. On peut manipuler
différentes dimensions des mots (ex : la valeur émotionnelle d’un mot qui sera soit positive, négative ou
neutre) et on peut aussi mesurer différents types de chose en suscitant des souvenirs de la sorte (ex : mesurer
en combien de temps ils se remémorent un souvenir, si c’est un évènement plutôt spécifique ou général
etc.). On peut ainsi, à travers cette méthode, évaluer diverses caractéristiques des souvenirs mais cette
méthode ne permet pas de voir si les souvenirs récupérés sont exacts ou non car on n’a pas de contrôle sur
ce qui a réellement été vécu dans le passé. Il y a donc eu une autre méthode pour régler ce problème-là.

• La méthode de l’agenda

Chaque jour, les personnes doivent tenir un agenda et on leur demande, chaque jour durant une période
donnée, de noter 2 événements qu’ils ont vécus durant la journée et évaluer les caractéristiques de
l’événement (importance, familiarité, etc.). Après un délai donné, on présente un indice qui se réfère à un
des souvenirs de la personne et ainsi, on peut vérifier l’exactitude des souvenirs car il y a une trace écrite.

Idem pour la méthode de l’appareil photo, plus récente, c’est une technique d’enregistrement qui capture
automatiquement des évènements en situation réelle (prise de photos automatiques lors des événements).
Ce qui permet d’avoir un enregistrement encore plus précis de ce qui s’est passé.

d) Processus de récupération des souvenirs

Comment sont construits/récupérés les souvenirs ? Les recherches ont identifié 2 modes principaux de
récupération :
§ Directe : un indice (interne ou externe) active directement un souvenir spécifique. C’est quand un
souvenir se produit de manière rapide et automatique sans qu’on ait cherché à l’évoquer à l’aide
d’un indice (ex : on se balade dans la rue, on croise quelqu’un qu’on a pas vu depuis longtemps et on
se rappelle d’une expérience qu’on a vécu avec la personne dans le passé).

§ Générative : utilisation de connaissances autobiographiques générales pour accéder à un souvenir


spécifique. Quand on cherche à se souvenir d’un évènement particulier, on va devoir accéder à des
connaissances autobiographiques plus générales avant de se rappeler d’un souvenir plus spécifique

Si on nous demande de récupérer un souvenir spécifique (à un


moment donné dans un contexte précis en réponse à un indice,
comme par exemple le mot vacances), on se rappelle d’un souvenir
en rapport avec le mot (je me rappelle quand j’ai été en vacances).
On a donc accédé à un évènement général (étendu).

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Pour trouver un souvenir spécifique, on va continuer à chercher en


mémoire. Si je me rappelle être allé à Venise lors d’un WE et que j’ai
fait une balade, on a là un processus de récupération générative : on
passe par des évènements généraux pour accéder à un évènement
spécifique

La plupart du temps on utilise la récupération générative et on passe via la base de connaissances


autobiographiques. Dans la récupération directe, on accède directement à la mémoire épisodique.

Haque et Conway ont fait une expérience pour mettre en évidence ces deux types de récupération :

On a un groupe de participants et pour chaque essai on leur demande de récupérer un évènement par
rapport à un mot-indice. Après différents délais, ils interrompent la tâche et leur demandent ce qu’ils ont en
tête à ce moment-là précis. Ils ont fait ça très tôt après le processus de récupération (2, 5 ou 30 sec) et ont
ensuite classé ce que le sujet avait à l’esprit en 2 catégories (évènement spécifique ou connaissance
autobiographique plus générale)

Résultat :
Délai de 2 sec : évènements plus généraux sont + présents mais il
y a aussi des évènement plus spécifiques (récupération directe).
Après le délai 5 sec : cela s’inverse progressivement.

Cela démontre bien que, progressivement, on a accès à des événements spécifiques mais que l’on accède
d’abord à des connaissances générales.

e) Distribution temporelle des souvenirs autobiographiques

Est-ce qu’on se souvient mieux de certaines périodes de vie que d’autres ?

On peut constater qu’il y a un effet de récence, càd qu’on se


souvient plus des événements récents de notre passé que
ceux qui sont plus lointain. Il y a une diminution des
souvenirs avec le temps. On peut constater qu’il y a très peu
de souvenirs pour les premières années de la vie, c’est la
période d’amnésie infantile. On a aussi
proportionnellement plus de souvenirs pour la fin de
l’adolescence et le début de l’âge adulte (entre 15 et 20 ans),
c’est le pic de réminiscence (reminiscence bump).

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Cela a été mis évidence dans pas mal d’études. Une étude p.ex. avec la méthode des mots indices, on
récupère un grand nombre de souvenirs en réponses à différents mots indices. Les chercheurs leur ont aussi
demandé de dater les souvenirs rappelés. Il y avait 2 groupes différents : les participants jeunes et les
participants + âgées.

Résultats :
Pour les 10 premières années de vie, dans les 2 groupes, il y a une diminution des souvenirs (c’est l’amnésie
infantile). Chez les personnes + âgées, il y a aussi l’effet de récence et le pic de réminiscence (plus de souvenirs
vers 20 ans).

Comment expliquer ce pic de réminiscence ?

§ Hypothèse identitaire : idée que cette période est importante pour la constitution de la
représentation de soi, de l’identité. Ainsi, ce qui a contribué à la construction de l’identité est mieux
rappelé.
§ Hypothèse cognitive : période où il se passe beaucoup de choses/changements (effet de nouveauté).
§ Hypothèse des scripts de vie culturels : dans une culture donnée, on a des prescriptions (ce qui est
attendu d’une vie typique) qui sont assez fréquentes. Les événements définis culturellement sont
plus fréquentes dans cette période de Vie (étude, couple, maison, etc).

Ces hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives.

f) Qu’est ce qui favorise la construction des souvenirs et leur maintien en mémoire ?

Si on prend l’exemple du petit déjeuner qu’on a pris ce matin, on peut s’en rappeler maintenant mais dans
quelques jours ça sera plus compliqué de s’en rappeler. Il y a donc des évènements qui ne sont pas maintenus
en mémoire autobiographique.

• Émotion et mémoire
Nous n’enregistrons pas en mémoire toutes les infos auxquelles nous sommes confrontés. Il est important
de pouvoir faire le tri entre ce qui est nécessaire et ce qui ne l’est pas (économie). Et l’émotion joue un rôle
dans ce processus car elles permettent de sélectionner des infos importantes à encoder et maintenir en
mémoire.

Comblain, D’Argembeau et Van der Linden on fait une étude pour


comparer différentes caractéristiques des souvenirs (positif,
négatif ou neutre). Ils ont utilisé une échelle de 1 à 7 pour évaluer
les souvenirs (évènement de vivacité, visuel, lieu et moment). On
voit que les émotions qu’elles soient positives ou négatives
permettent de mieux retenir les infos.

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A niveau cérébral, l’amygdale est une structure qui joue un rôle important dans les processus émotionnels,
et qui va moduler la mémorisation d’information émotionnelle. Il y a aussi des hormones (ex : du stress,
comme l’adrénaline etc.) qui activent l’amygdale et cette activation renforce le stockage et le maintien des
infos stockées en mémoire notamment en mémoire épisodique.

Les souvenirs flash (flash bulb memories) concernent le souvenir détaillé des circonstances dans lesquelles
nous avons pris connaissance d’une nouvelle surprenante et importante. Les chercheurs qui ont fait les
premières études sur ce type de souvenirs ont mis évidence que les personnes rapportent des infos détaillées
- canoniques (dont la plupart des gens se souviennent) à savoir lieu, activité en cours, personnes présentes,
émotion, suite de l’événement, etc. Déclenché par un événement public, mais les souvenir flash sont
personnels.

Brown et kulik ont formulé une hypothèse. Selon la valeur émotionnelle de l’évènement il y a déclenchement
d’un mécanisme de now-print, qui nous permet d’enregistrer le souvenir de manière détaillée et on le
maintient en mémoire de manière persistante. Mais cette hypothèse a été remise en cause, des recherches
par la suite ont démontré que nos souvenirs peuvent contenir des erreurs, des omissions et des distorsions.

Neisser et Harsh ont fait une expérience pour démontrer ces erreurs. : cette expérience porte sur l’accident
de la navette spatiale Challenger en 1986. Cet évènement a été une chose marquante pour les gens à
l’époque. Ils ont comparé le rappel de ce souvenir (flash) de l’évènement directement après l’événement,
puis 2 ans après. Ils leur ont demandé dans les 2 cas comment est-ce qu’ils avaient appris cette nouvelle (TV,
radio etc).

Voici les résultats :


§ Un jour après : 21% de personnes disent avoir appris la nouvelle à la TV
§ 2,5 – 3 ans après : 45% disent l’avoir appris à la TV
ð Les % ont changé, il y a donc des distorsions

Talarico et Rubin ont fait une expérience après l’attentat du 11 septembre 2001. Un jour après, on pose des
questions sur les attentats du 11 septembre (évènement flash) ou sur un événement ordinaire (dans les
qques jours précédent cet événement). Ils ont évalué les caractéristiques de ces deux types de souvenirs
après certains délais. Voici les résultats :

On voit qu’il y a une diminution des détails avec le temps autant pour l’événement ordinaire que pour
l’attentat. Cependant, quand on a évalué leur croyance dans l’exactitude du souvenir, on voit qu’avec le
temps il y a une augmentation pour l’événement flash alors qu’il y a une diminution pour l’événement
ordinaire. L’impression subjective qu’on a pour un souvenir d’un évènement flash ne correspond pas toujours
à l’évènement qui s’est réellement produit

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Il y a eu également une étude réalisée en Belgique sur les souvenirs flash de la mort du roi Baudoin. Ils ont
évalué différentes dimensions et ont montré que on se souvient mieux de certaines choses quand elles sont
nouvelles, si l’événement est important (il a une valeur émotionnelle plus grande) et le fait de se souvenir
fréquemment de quelque chose fait qu’on s’en rappellera mieux à long terme.

g) Fonctions de la mémoire autobiographique

La MA a 3 fonctions :

§ Identitaire : rôle que la MA joue dans la construction du soi, d’une image de soi cohérente. Dans
cette fonction interviennent les souvenirs définissant le soi, ce sont des souvenirs qui ont une valeur
émotionnelle importante et auxquels on repense souvent, qui nous ont marqué, appris quelque
chose. Le processus de raisonnement autobiographique est le fait que quand on va repenser à des
événements importants de notre vie, on va se souvenir du contenu concret, du contexte, etc, et on
va y réfléchir pour en extraire du sens (on va les lier avec d’autres évènements de notre vie). On va
donc ainsi se construire un récit de vie en reliant certains événements qui ont eu de l’importance
pour nous., c’est notre récit de vie, notre identité narrative.

§ Sociale : le fait de partager des souvenirs avec les autres nourrit les relations sociales. Cela permet
aussi d’apprendre des autres, de créer de l’empathie, de l’intimité etc.

§ Directive : utilisation de nos expériences, de nos souvenirs pour gérer notre comportement, prendre
des décisions. Cela permet de nous projeter dans le futur, d’anticiper toutes sortes de situations. On
va se concentrer sur cette dernière fonction.

On a essayé de comprendre comment notre mémoire nous permet de nous projeter dans le futur et ainsi de
gérer nos comportements, nos décisions etc. L’idée qu’il existe un lien entre la mémoire du passé et
l’imagination du futur n’est pas récente. Déjà dans la mythologie où il existe un Dieu romain (Janus) qui voyait
le passé et le futur en même temps. Il y a plein de champs de la psychologie qui ont appuyé l’idée qu’il existe
un lien entre le passé et le futur :

Chez des patients amnésiques et notamment chez le patient K.C., Tulving remarque que celui-ci n’a pas de
souvenirs épisodiques mais qu’il est comme coincé dans le présent car il ne sait pas non plus imaginer le
futur. On voit donc ici un lien entre passé et futur.

Il y a eu aussi des expériences chez des personnes « normales », Addis et Al ont fait une expérience où les
participants étaient mis dans un scanner et on leur propose une série de mots-indices sur un écran. Dans une
première condition, on leur demande de se souvenir d’un évènement spécifique pour chaque mot-indice. On
inclut une deuxième condition où en réponse à d’autres indices, on leur demande d‘imaginer un évènement
spécifique qui pourrait se passer dans leur futur personnel en réponse à ce mot-indice. Pendant ce temps-là
on mesure activité cérébrale (IRM fonctionnelle)

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Les résultats démontrent que les zones activées chez les personnes qui pensent au passé sont les mêmes qui
s’activent chez les personnes qui imaginent un événement qui pourrait se produire dans le futur. On recrute
les mêmes processus cognitifs et donc les mêmes régions cérébrales dans les 2 cas.

Comment expliquer ce lien ?

Pour pouvoir imaginer quelque chose et donc se projeter dans le futur, on va puiser dans nos expériences
passés stockées en mémoire. On ne peut pas imaginer quelque chose dont on n’a jamais fait expérience, oui
on peut s’imaginer des choses nouvelles mais pour cela on va quand même puiser dans nos expériences
passées, extraire des détails et les recombiner de manière nouvelle.

ð On se base sur des infos stockées en mémoire pour se projeter dans le futur

Shacter et Addis : l’hypothèse de la simulation épisodique constructive. Selon eux la mémoire épisodique
joue un rôle essentiel car elle nous permet de récupérer des éléments d'expériences passées et de les
recombiner de manière flexible pour créer de nouvelles représentations d'événements qui pourraient se
produire dans le futur. Il y a donc un rôle des connaissances autobiographiques dans la projection future.

Concrètement on récupère certains détails comme un lieu, un objet, une action etc. qui peuvent venir
d’expériences différentes et on les recombine de manière nouvelle. Ex : on s’imagine en train de jouer avec
un ami dans un parc alors qu’on n’a jamais vécu cela, mais on connait le parc, on connait notre ami et on a
déjà joué au football. On utilise donc bien nos expériences passées notamment de la mémoire épisodique

Mais ce n’est pas suffisant ! Comme on l’a vu, un souvenir autobiographique se compose toujours de deux
types d’info : des éléments épisodiques mais aussi son contexte autobiographique. De la même manière,
lorsqu’on se projette, on ne s’imagine pas des scènes de manière aléatoire, on a des connaissances générales
sur nous-même et sur notre vie, qui sont non seulement orientées vers le passé mais aussi dirigées sur le
futur, sur nos attentes générales. Les buts personnels jouent un rôle important et définissent les grandes
périodes de notre vie.

Des chercheurs se sont intéressé à cela :

Comme on l’a vu, quand les personnes se souviennent d’évènements passés, elles accèdent à des
expériences autobiographiques générales puis ensuite à des évènements spécifiques. Mais est-ce que c’est
pareil quand on se projette dans le futur ?

On a demandé à des personnes, en réponse à des mots indices, de se remémorer des évènements passés et
d’imaginer des évènements qui pourraient se passer (dans leur futur personnel) en réponse à ces mots. Ils
ont ensuite regardé quel type d’info s’active au début du processus. Voici les résultats :

Pour les évènements passés : il y a + d’évènements généraux produits avant


de se rappeler des évènements spécifiques.

Pour les évènements futurs : il y a + d’évènements générales produits avant


de produire des évènements spécifiques.

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Exemple, dans une autre étude, on demande à une personne de


verbaliser tout ce qui lui vient à l’esprit quand on lui présente un mot-
indice : Il identifie un ami en particulier, donc une info sémantique
personnelle. Puis sur base de ça, il accède à un évènement général qui
va se produire dans le futur (étendue dans le temps). Ensuite la
personne identifie un évènement spécifique puis pourrais se produire
pendant ses vacances.

ð Processus de construction génératif

Pour les évènements futurs, ce qui est important, ce sont les détails épisodiques et nos connaissances
autobiographiques plus générales pour les situer dans nos vies. Il y a 2 éléments principaux :
• Éléments épisodiques (simulation d’évènement – créer une représentation mentale d’un événement).
On fait ça pour le passé mais pour le futur aussi.
• Nos connaissances autobiographiques plus générales sont des connaissances pour le passé mais on a
étendu ce modèle au futur. On a des périodes de vie anticipées et des événement généraux qui font
partie de ces périodes, qui dépendent de nos projets et cela va modeler la manière dont on va se projeter
dans le futur.

5. Oubli et erreurs de mémoire

a) Les 7 péchés de la mémoire

Daniel Schacter définit 7 péchés de la mémoire (2003) :

§ Trois types d’omissions (ce qui est attrait à l’oubli) :


o Fugacité : c’est le caractère transitoire de certains souvenirs. Au fil du temps on oublie
certaines choses de la vie quotidienne.
o Distraction : c’est le fait de ne pas avoir fourni suffisamment d’attention face à une nouvelle
info et donc elle n’a pas bien été encodée
o Blocage : le mot sur le bout de la langue en est un exemple. Le terme est quelque part dans
la mémoire au moment même mais il y a une difficulté à récupérer l’info.

§ Trois types de distorsions : suggestibilité, erreur d’attribution et biais

§ Persistance : c’est le problème opposé à l’omission : c’est le fait que l’on garde trop d’infos en tête
qui ne sont plus nécessaires et dont on ne veut plus se souvenir. Il y a dans la littérature quelques
cas de personnes qui se plaignent de ne pas pouvoir oublier. Cela pose des problèmes inattendus.
Dans le cas de AJ par exemple, qui retient tous les éléments autobiographiques. Toute ces infos
qu’elle garde en tête lui permettent de rejouer sa vie dans sa vie actuelle. Cela crée une surcharge,
elle a des difficultés de raisonnement, à trouver des solutions, problème de manque de créativité
etc. Donc avoir une bonne mémoire ce n’est pas toujours utile, ça peut être handicapant. Il y a aussi
dans le cas de stress post-traumatique (PTSD), lorsqu’on a vécu un évènement où on craint pour sa
vie ou pour celle de quelqu’un d’autre, on peut avoir des problèmes de persistance, où l’élément
revient h24 en tête de façon involontaire.

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Voici un 1er exemple d’omission : Bahrick et al nous montre que l’on


peut conserver certaines infos assez longtemps mais cela dépend de la
façon dont cela est testé. Ils ont demandé aux participants de se
remémorer les personnes faisant partie de leur classe à l’époque. Il leur
a demander de rappeler le nom de leurs camarades de classe (rappel
libre) ou une tâche de reconnaissance en appariant des photos avec les
prénoms de leur camarade par exemple. On voit que certaines infos
sont bien préservées au fil du temps mais on observe un oubli. Les
résultats montrent que, en particulier, la tâche de rappel libre tend à
diminuer au fur et à mesure du temps. Par contre, dans des tâches de
reconnaissance, c’est forcément + simple car on ne doit pas aller
récupérer l’info, on doit juste dire si elle est vrai ou fausse, on voit que
les performances sont un peu préservées même si elles diminuent au fil
du temps.

Un autre exemple de fugacité nous a été donné par Linton avec la méthode du journal ou de l’agenda. Ici, il
propose un test où il se testait lui-même et ce qu’il se passe c’est que chaque jour il écrivait 2-3 événements
qui s’étaient déroulés durant la journée sur un côté d’une carte et sur l’autre côté il écrivait un petit indice
pour se rappeler de quoi il s’agissait. Ils mélangent ensuite les cartes et de temps en temps il en tire une et
essaye de rappeler les événements via l’indice et la date qu’il avait noté auparavant.

Les résultats : sur l’axe des x on a l’âge des items (le temps écoulé depuis
que l’évènement a été marquer sur la carte) et les couleurs représentent
le nombre de fois que la carté a été tirée. Il tire les cartes au hasard et
donc une carte peut avoir été tirée + de fois qu’une autre. On voit donc
que plus le temps est passé depuis l’évènement et plus le % de détails
oublié est grand (en moyenne 65% de détails ou d’évènements ont été
oubliés après 4 ans et demi). On voit aussi que le fait d’être confrontée
plusieurs fois à la description de l’évènement (tirer les cartes plusieurs
fois), fait qu’on se rappelle de + de détails et que l’oubli diminue.
L’important à retenir c’est qu’au fil du temps les infos sont oubliées
(courbe verte).

b) L’oubli en MLT

L’oubli en MLT peut résulter de problèmes à tous les niveaux de traitement :


§ Encodage : elle est liée à l’attention et certains facteurs peuvent le perturber. (ex : stress)
§ Stockage
§ Récupération : mots sur le bout de la langue , une info n’est pas dispo si on a pas suffisamment
d’indice pour la récupérer

Pour expliquer les oublis en mémoire, la théorie du déclin a été proposée avec la loi du non usage : moins
on se rappelle des choses et moins on les récupère en mémoire et elle finisse par s’effilocher au fil du temps
jusqu’à disparaitre.

Mais, comme on l’a déjà vu, il y a une autre théorie qui est celle de l’interférence : les infos sont dispos mais
la récupération est gênée par d’autres infos. Il y a des interférences proactives (due à des infos apprises
auparavant) et rétroactives (due à des infos apprises ultérieurement).

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

c) Les distorsions mnésiques

Il y a 3 types de distorsions :
§ Suggestibilité
§ Erreur d’attribution
§ Biais

Les distorsions mnésiques nous font prendre conscience que les souvenirs ne sont pas toujours corrects et
cela peut avoir des conséquences dramatiques (ex : : lorsque la police interroge des témoins qui ont assisté à
un crime ou les victimes d’un crime etc)

Nos souvenirs ne sont pas des enregistrements de la réalité mais ce sont des constructions à partir d’infos
qui viennent de l’événement original (inputs perceptifs, les pensées qu’on a eues, les émotions) mais il peut
y avoir d’autres influences qui viennent s’ajouter pour transformer le souvenir original !

Un facteur assez important c’est le monitoring de source, càd la capacité et ce processus qui nous permet
d’attribuer une source à une trace mnésique, à des connaissances, des idées, des croyances, etc. C’est la
capacité de se rappeler d’où l‘info nous est connue, d’où elle vient, à quel moment ça s’est passé, etc.

Les erreurs de monitoring de source peuvent se présenter sous la forme de :


o Mauvaise attribution de source : mettre des paroles dans la bouche de la mauvaise personne.
o Cryptomnésie c’est le fait de penser être à l’origine d’une création alors que, sans le vouloir, on a
copié une œuvre qui existait déjà (plagiat inconscient).

Jacoby et al ont testé la mauvaise attribution de source avec une expérience en laboratoire : « Becoming
famous over night ». Dans cette expérience, ils demandent aux participants de lire des noms de personnes
inconnues (ex : Sebastian Weisdorf, Valerie Marsh, Adrian Marr etc.) Ensuite ils sont confrontés à un test de
mémoire avec soit des noms de personnes célèbres, soit les noms d’inconnus qu’ils ont lus juste ou soit des
nouveaux noms de personnes non célèbres. Ils doivent juger si le nom est familier ou non soit directement
après, soit après un délai de 24h. Ils ont constaté qu’avec un test de mémoire immédiat, il n’y a pas trop
d’erreurs, cependant après un délai de 24h ils commencent à se tromper en disant que les noms inconnus
(non-célèbres) le sont. Les personnes sont donc devenues « célèbre » du jour au lendemain car les
participants ont eu un problème d’attribution de sources lié à la familiarité. Ils avaient le sentiment de
familiarité mais ils n’étaient plus certains de leurs sources et c’est ça qui pose problème. Car lorsqu’ils ne
sont plus capables de distinguer la source de la familiarité cela amène des erreurs, ils pensent que les noms
qui leur sont familiers sont des noms de personnes célèbres
ð la familiarité peut donc nous induire en erreur.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

NB : Cela peut expliquer des phénomènes vus auparavant comme le fait de lire des fake news. Quand on va
revoir l’info par après si on ne se rappelle plus de la source, l’info va nous paraitre familière donc on va croire
que c’est vrai !

Les problèmes de mauvaise attribution de source peuvent aussi se présenter sous forme de biais tels que les
stéréotypes de genre. Dans une expérience de Marsh et al, les participants doivent lire des déclarations
accompagnées de leurs auteurs qui portaient des noms neutres, on ne peut pas dire si c’est un homme ou
une femme. Les déclarations ont été associées soit à des stéréotypes de type masculin ou de type féminin
(ex : Chris dit « j’ai décoré la table pour Noël » ou Chris « Je suis plutôt relax »). Après avoir lu celles-ci, les
participants doivent faire une pause de 5 minutes (où ils faisaient autre chose pour ne pas se répéter les infos
en tête) et puis on leur révèle le genre (ex : Chris est un homme et Pat est une femme). Ensuite, on demande
aux participants de faire une tâche de monitoring de source où on leur montre les déclaration sans les auteurs
et ils doivent se rappeler de quel auteur il s’agit. Le but est de voir s’ils font + ou – d’erreurs en fonction de
si ça colle avec le stéréotype de genre ou pas.

Les résultats montre une interaction typique. Quand la déclaration correspond au stéréotype, les
participants sont meilleurs pour attribuer la source que quand la déclaration ne correspond pas aux
stéréotypes D’ailleurs, on remarque que les biais sont absents pour les déclarations non-genrées. Et, si on
prévient les sujets, avant le test de mémoire, que les stéréotypes de genre peuvent les influencer ou les
induire en erreur, on voit les biais s’atténuer. Donc ces erreurs sont effectuées de manière automatique
quand on n’y réfléchit pas, mais si on nous mets en garde on est capable de réfléchir + et donc de récupérer
l’info de manière + correcte. Même si ces biais mènent à des erreurs, dans la vie quotidienne les stéréotypes
peuvent aussi être une aide pour la mémoire, ce n’est pas forcement toujours délétère.

Un autre exemple de biais est l’impact des connaissances préalables et des schémas qui peut se démontrer
dans l’expérience de Brewer & Treyens dans laquelle les participants qui se présentaient dans le labo, sont
d’abord amenés à patienter dans un bureau durant quelques minutes (on invente une raison pour les faire
attendre). Ensuite, ils sont amenés dans le laboratoire et on leur demande de passer un test de mémoire
dans lequel ils doivent rappeler des objets qui étaient présents dans le bureau où ils ont attendu. Les sujets
ont des intrusions, ils se rappellent d’objets qui n’étaient pas présents. Ils se rappellent notamment de livres
alors qu’il n’y en avait pas. Cela fait référence à un schéma classique d’un bureau !

ð Ils ont donc été influencés et biaisés par leurs connaissances préalables avec toute une série de bureaux
habituels dans lesquels se trouvaient sans doute des livres.

Parallèle avec les souvenirs flash : on a vu qu’avec certains cas de souvenirs flash (ex : attentat 11
septembre), après quelques années les participants pensaient voir appris l’info a la TV alors qu’initialement
ils avaient dit avoir appris l’info par d’autre personnes. Cela peut correspondre à un cas où des schémas
viennent nous biaiser Les participants incorporent ces connaissances, ces schémas dans leur rappel d’info et
les mélangent avec ce qui s’est réellement passé.

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Faux rappel et reconnaissance : Paradigme DRM (Deese, Roediger et Mc Dermott) avec une expérience
réalisée en laboratoire de manière artificielle afin étudier l’occurrence des faux souvenirs. Les participants
mémorisent une liste de mots qui référent à un mot cible. En réalité, les participants étudient plusieurs listes
de mots se rapportant à différents concepts puis on mélange les mots et on leur demande de faire des tests
de reconnaissance sur ces mots. Exemple : on a une liste de mots qui se réfèrent au mot sommeil (ex : bed,
awake, tired, dream, wake etc.) mais dont le mot sommeil ne fait pas partie. Les personnes se trompent en
pensant que le mot sommeil était compris dans la liste alors que non.

Exercice fait en classe : Liste lue en classe : « lit, repos, éveillé, fatigué, rêve, veille, nuit, couverture, somnoler,
dormir, ronfler, oreiller, paix, bailler, réveil, draps, matin ». Les intrusions sont entourées en rouge sur le nuage
de mots. « Lit » : effet de primauté.

§ Suggestibilité

Ce type de distorsion réfère au fait que des sources d’information externes peuvent venir influencer la façon
dont on se souvient d’un évènement vécu ou dont on a été témoin.

Elisabeth Loftus a proposé le concept d’effet de désinformation : le fait d’apporter des infos incorrectes à
une personne après qu’il ait vécu un évènement peut modifier les souvenirs que la personne a de
l’évènement.

Dans son étude, Lotfus présente un slide show (une suite de dias) qui représente un évènement , qui implique
une voiture et son comportement sur la route avec en plus, la description de l’évènement qui est en train de
se dérouler . Il y a 2 groupes :
o Groupe de participants neutres: on demande : « Une autre voiture a-t-elle dépassé la Datsun rouge
pendant qu’elle était arrêtée au Stop ? »
o Groupe de participants « Misleading postevent information (MPI) » : c’est le groupe auquel on a
donné une info trompeuse après l’évènement. On leur pose une question qui contient une info
erronée qui (peut-être) va les induire en erreur par après : « Une autre voiture a-t-elle dépassé la
Datsun rouge pendant qu’elle était arrêtée au cédez le passage » (il n’y avait pas de « cédez le
passage »).

Ensuite on leur demande de faire un test de reconnaissance et donc de reconnaitre les dias qu’ils ont vues. Il
y a une image réelle et une autre qui a été transformée afin de les faire correspondre à l’info erronée.

Les participants qui ont été confrontés à l’info trompeuse (groupe expérimentale) vont avoir + tendance à
sélectionner l’image erronée car ils sont influencés par les infos qui ont été données dans les
questions erronées.

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Dans une autre expérience similaire, Loftus utilise la même procédure sauf qu’ici, on présente des dias en
couleur. On voit un piéton qui a été heurté par une voiture rouge tandis qu’une voiture verte est passée à
côté sans s’arrêter. Ensuite, on pose une série de 12 questions. On demande au groupe MPI si la voiture
bleue avait un porte ski sur le toit ou pas. Les participants passent ensuite un test de reconnaissance après
20min où ils doivent choisir, sur une roue chromatique, la couleur de la voiture qui est passée sans s’arrêter.

Résultats : les participants du groupe neutre, qui n’ont donc pas eu la question erronée, choisissent la couleur
correct (verte) tandis que les participants MPI, qui ont été confrontés à une question avec une info erroné,
choisissent une couleur qui se rapproche du bleu.

On voit donc que même s’ils ont eu l’info visuelle, une info verbale peut
changer le souvenir de ce qu’ils ont vu.

En tout, si on rassemble toutes les nuances de bleu : 48% des participants MPI
choisissent une nuance de bleu contre 16% chez le groupe contrôle !

Dans une 3e expérience, Lotfus et Palmer présentent aux participants une vidéo d’un accident de voiture.
Ensuite, différentes questions leur sont posées. On ne va plus inclure une info erronée mais on va changer la
façon dont on va formuler nos questions. Il y a 2 groupes différents :
o Premier groupe : on demande : « A quelle vitesse les voitures roulaient-
elles lorsqu’elles se sont heurtées ? »
o Deuxième groupe : on demande : « A quelle vitesse roulaient les voitures
lorsqu’elles se sont écrasées l’une contre l’autre ? » On voit que ici, que le
verbe désigne une violence plus forte du choc.
o Troisième groupe : Pas de question sur la vitesse

On se demande si la façon dont on formule nos questions vont biaiser le souvenir des participants concernant
la vitesse estimée. Voici les résultats :
La vitesse estimée est ≠ en fonction du verbe utilisé ! La vitesse
augmente en fonction de la vitesse impliquée dans le mort utilisé ! Ceci
nous montre aussi que la façon de formuler les choses peut faire une
grande différence sur la manière dont les personnes se rappellent des
choses et donc il faut faire attention (ex : lorsque l’on interroge des
témoins, il faut essayer de formuler les choses de manière neutre pour
pas influencer les personnes). Formuler les choses de manière neutre,
lorsque l’on interroge des témoins !

Une semaine + tard, on demande aux participants de revenir et ont leur


demande s’ils ont vu du verre brisé sur le sol (la réponse « non » est la réponse
correcte). Les résultats montrent que chez ceux qui ont eu la question
comprenant le verbe le moins violent il y a 14% de personnes qui disent oui
contre 32% chez ceux qui ont eu un verbe plus violent. Il y a aussi quand même
12% d’erreurs pour le groupe contrôle. Cela est dû ai fait qu’après une semaine,
on oublie des détails et on se rappelle de choses que l’on n’a pas vu car ce sont
les schémas et les connaissances antérieures ont influencé ces personnes (nos
connaissances antérieures d’un accident normal interfèrent avec nos souvenirs
ð On fait appel à nos schémas pour combler les trous des détails qu’on n’a pas vu.

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Il y a aussi des procédures utilisées en laboratoire qui ont démontré que l’on peut implanter des souvenirs
d’évènements précoces chez des participants alors qu’ils ne les ont jamais vécus. Dans leur expérience,
Hyman & al. ont d’abord contacté les parents des participants afin de prendre connaissance de quelques
événements qu’ils ont vécu durant leur enfance Après, ils rapportent ces événements aux participants et ils
doivent raconter l’évènement en donnant le plus de détails dont ils se rappellent. Parmi ces évènements,
l’expérimentateur glisse un évènement qui est faux, qu’ils n’ont jamais vécus.

Voici la retranscription de la première conversation entre l’expérimentateur et un participant (à gauche) et


la retranscription deux jour après, quand le participant revient au laboratoire et l’expérimentateur repasse
en revue les différents souvenirs en demandant s’ils se rappelle de choses en + (à droite) :

Au début, le participant dit qu’il ne se souvient pas du faux souvenir mais deux jours après, il dit s’en souvenir
et il a même construit toute une histoire autour de cela. Il a comblé les trous de cet évènement qui ne s’est
jamais passé en construisant des infos partielles sur les infos que l’expérimentateur a fournies. On a donc
démontré que 30% des participants développent de faux souvenirs partiels ou complets.

On voit aussi que même des évènements qui sont potentiellement plus choquants peuvent donner lieu à des
faux souvenirs parce que lorsqu’on dit que ceux-ci étaient soi-disant rapportés par leurs parents, cela crée
une confiance qui les induit encore plus en erreur.

A travers différentes expériences et en fonction de la plausibilité de l’évènement, on a un taux de faux


souvenirs qui varie entre 0 et 50% chez les participants. Cela peut même être des souvenirs plus
exceptionnels.
Exemple : faire un tout en ballon dirigeable avec Wade et al avaient utilisé photos trafiquées comme
support. Ils ont pris une photo d’un ballon dirigeable et une photo du participant plus jeune qu’ils
ont retouchée ensemble. A partir de cela on a vu que le participant se construit un souvenir qui
n’existe pas !

Il faut donc faire attention dans la pratique : dans les témoignage oculaire car il peut arriver que les
personnes se rappellent de choses qui ne se sont jamais passées et la psychothérapie avec les biais de
confirmation où la personne en thérapie retrouve des infos qui n’existent pas et cela peut venir du fait qu’on
pourrait avoir des a priori sur les personnes, on se dit qu’une tel chose a dû se passer (abus sexuel p.ex.) et
donc on en vient à poser des questions orientés après un évènement qui peuvent modifier la façon dont un
témoin se souvient de l’évènement, il peut même commencer à se souvenir de choses qui ne se sont pas
passées. On appelle ça le biais de confirmation.

ð Donc éviter les questions tendancieuses et les suggestions !

Qu’est ce qui advient de la trace en mémoire originale ? Est-elle détruite par la nouvelle trace ou est-ce que
différentes traces peuvent être traitées en même temps ou bien est-ce qu’elles sont en compétition de telle
sorte qu’on ne sait plus laquelle est la bonne ?

Une première explication est que l’on est face à une interférence rétroactive : la question trompeuse (donc
la nouvelle info) va venir faire oublier l’info originale. Une seconde explication est l’erreur de monitoring de
source : les 2 traces mnésiques existent en mémoire mais on ne sait plus quelle info est correcte.
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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Voici deux expériences qui testent ces 2 explications :

1) Dans une expérience de Lindsay qui a pour but de tester l’effet du rôle du monitoring de source,
elle utilise des slide shows où les participants voient un homme qui vole un ordi et une voix de femme
qui décrit la scène est présentée en même temps.

§ Ensuite, deux jours après, on présente à un 1er groupe la même narration narrée par la même
femme mais on y incorpore des éléments incorrects qui ne correspondent pas à ce qui a été
présenté initialement. C’est une condition difficile car on présente deux types d’infos qui sont
en contradiction l’une à la suite de l’autre mais qui sont racontées par la même personne. Deux
jours après, les participant de ce groupe sont confrontés à un test de mémoire, on leur demande
de décider si telle ou telle déclaration est correcte et correspond avec ce qu’ils ont vu MAIS on
leur dit : « attention la deuxième histoire comporte des infos incorrectes, ignorez-les ! » et ils
doivent donc les nier et ne se baser que sur ce qui a été présenté initialement.

§ Dans un 2e groupe, les participants sont mis dans une situation moins difficile car ils sont
confrontés à cette narration erronée deux jours après le slide show (juste avant le test de
mémoire) et elle est racontée par une voix d’homme (cela permet aux participants de bien
différencier les deux histoires). A nouveau, tous les participants sont confrontés à un test de
mémoire où on leur dit que dans la 2nd histoire il y avait des infos incorrectes et qu’ils doivent
donc se baser sur la narration initiale.

Résultats : Pour les participants de la condition la plus facile (2e groupe) , on a 13% d’erreurs (MPI) contre
27% chez les participants de la condition difficile (1er groupe).
1) On voit donc que la trace originale et une nouvelle trace peuvent coexister mais dans la condition difficile,
ils ont + de mal à distinguer les info correctes et incorrectes (mauvaise attribution de sources).

2) Dans une autre expérience de Lindsay et Johnson, ils vont plus loin :

Il y a 3 phases :
§ Phase 1 : les participants étudient la photo (visuel) d‘un bureau désordonné contenant beaucoup
d’éléments.
§ Phase 2 :
o Le groupe contrôle entend une narration (audio) correcte des éléments présents dans le bureau.
o Par contre pour le groupe expérimental, on leur présente aussi une narration du bureau mais avec
des éléments incorrects.
§ Phase 3 : on demande aux participants de juger si des items était présents dans la photo originale
ou pas.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

On présente :
• 8 éléments qui étaient sur la photo uniquement,
• 8 éléments qui étaient dans le texte uniquement,
• 8 éléments qui étaient dans le texte et sur la photo et
• 8 éléments nouveaux qui ne se trouvaient nulle part.

Ensuite, ils font une tâche de reconnaissance (O/N) où ils doivent dire si les items étaient présents ou
pas. L’élément en + dans cette expérience qui n’est pas présent dans la précédente c’est que les
participants font une tache de monitoring de source : est-ce que vous vous rappeler avoir vu (texte) ou
entendu cet info (audio) ? Cela encourage les participants à faire la différence entre les 2 types d’infos.

Items du texte
attribués à l’image

Résultat :
Sur la photo de droite, on a les résultats pour la tâche de reconnaissance simple (à gauche) et la tâche de
reconnaissance de la source (à droite).
Pour la tâche de reconnaissance simple : il y a + d’erreurs dans le groupe expérimentale que dans le groupe
contrôle. Pour la tâche de reconnaissance de la source : ça se stabilise, il n’y a plus de différences entre les
deux groupes.
On voit donc que lorsque les participants répondent sans se poser de question (tâche de reconnaissance
simple) ,ils font beaucoup d’erreurs quand ils ont été induit en erreur. Par contre, si on leur dit de faire
attention à la source de l’info (tâche de reconnaissance de la source), on voit que le fait d’avoir été trompé
n’a plus d’effet. Ils peuvent rappeler la source de manière correcte, qu’ils aient été induits en erreur ou pas.

Des traces conflictuelles peuvent coexister en mémoire mais quand on réfléchit à la source, l’effet de
désinformation peut être réduit. Mais est-ce naturel ?

Le problème du témoignage oculaire : on est souvent face à une grande multiplicité des sources.

Voici un exemple avec les témoins où les victimes qui doivent aller rapporter des infos plusieurs fois, ils
doivent répéter la même histoire à des policiers etc. Et ceux-ci peuvent également venir rajouter des
évènements. On en vient se demander est-ce que je m’en rappelle vraiment ou est-ce que c’est le policier
qui l’a rajouté ? Donc toutes ces infos qui viennent de pleins de sources différentes peuvent se mélanger. Et
les témoins se souviennent de choses différentes par rapport à la première fois où ils ont rapporté les
évènements à la police. Pour éviter ce genre de soucis il faut encourager les personnes à identifier les sources
(d’où viennent les infos ?).

Dans les témoignages oculaires les témoins peuvent être influencés de plusieurs manières (ex : lorsqu’ils
témoignent face à la police ou face à la cour de justice). De plus, il y a souvent une mauvaise compréhension
du fonctionnement de la mémoire chez les jurés (et juges). D’autant plus que les témoins ont souvent vécus
et rappellent des événements dans des conditions non-idéales. Il y a souvent 2 suppositions :

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o Une 1ère supposition est que le témoin a pu voir l’événement de manière optimale (mais ce n’est pas
toujours le cas).
o Une 2nd supposition est qu’il se souvient de son observation et va pouvoir décrire avec précision ce
qu’il a vu ainsi que l’auteur des faits (mais ce n’est pas forcément le cas, les témoins peuvent faire
des erreurs et celles-ci peuvent être amplifiées selon la manière dont on va interroger les sujets).

Voici un exemple avec une expérience de Kersten & Earles avec une erreur d’identification de témoins :
Une femme a été violée et arrive à la police, on lui demande d’identifier l’auteur parmi des photos, elle dit
ne pas être sûre, qu’elle ne se rappelle pas de sa tête car la pièce était trop sombre. Mais les voisins ont
rapporté avoir vu un homme Walter Snyder juste à côté de sa maison avant l’acte. La police a donc demandé
d’identifier le suspect parmi des photos (dont Snyder). Ensuite quand on lui a demandé de voir des suspects,
elle a paniquée en voyant Snyder et a dit que c’était lui. Il a donc été jugée coupable et a reçu une peine de
45 ans de prison sur base de ce témoignage. Des années plus tard, la famille de Snyder ont demandé de ré
analyser les traces ADN car elles n’étaient pas analysable à l’époque, ils ont aussi analyser les échantillons
de sperme. Et grâce à ça, ils ont réussi à démontre que Snyder n’était pas l’auteur du viol, alors, qu’il avait
déjà passer 7 ans en prison !

Pourquoi cela est arrivé ?


La personne après avoir vu la photo et ensuite après avoir vu les personnes, a juste ressenti un sentiment de
familiarité qui l’a induite en erreur. Elle ne l’avait pas reconnu la première fois et a dit qu’elle n’a pas pu voir
le visage correctement durant le crime.

Il y a également des chercheurs impliqués dans : « l’innocence projet » , qui, avec la technique d’analyse
d’ADN, réexaminent des dossiers de personnes qui ont été mise en prison. Grâce à eux, ils ont réussi à
découvrir 324 cas où la personne n’était pas coupable !

Lorsque l’on regarde les raisons pour lesquelles les personnes se sont retrouvées en prison par erreur, on
voit que 72% des emprisonnements sont dû à des témoignage oculaires de personne qui se sont trompées.
Donc c’est important de comprendre les erreurs que l’on peut faire dans ce cas-là. On doit également
expliquer aux juges et aux jurés le fonctionnement de la mémoire car ils peuvent être influencés par des
facteurs comme la confiance que possède le témoin par rapport à ses souvenirs du crime. Si quelqu’un à l’air
d’être sûre, ils ont tendance à vouloir condamner le présumé coupable même si le témoin à tort. Si quelqu’un
est moins sûr son témoignage aura moins de crédit jusque parce qu’il est moins confiant alors qu’il donne
peut-être des infos plus correctes.

Il y a aussi le fait les témoins ont vécu et rappellent des évènements dans des conditions non-idéales et
peuvent être encore influencer par après. Être devant une cour c’est quelque chose de stressant, surtout
qu’il y a des avocats de la défense qui sont là pour nous déstabiliser.

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L’erreur de Snyder peut s’appeler une erreur de conjonction : on mélange deux infos comme si elles étaient
liées au même évènement. Et cela a été décrit par Ross et al avec cet exemple : Un agent de gare a été
braqué et il avait faussement accusé un client (un marin) car il l’a confondu avec le voleur. Ayant vu le marin
plusieurs fois en train d’acheter des billets à son guichet, il a par après confondu l’évènement (braquage) et
le fait d’avoir vu le client dans d’autres circonstances. Il l’a donc accusé alors qu’il n’était pas coupable.

Ils ont reproduit une expérience en laboratoire : Ross & al présentent une histoire aux participants :
• Dans le groupe contrôle une vidéo dans laquelle une enseignante (femme) lit une histoire à ses
étudiants tandis que,
• Dans le groupe expérimental c’est un enseignant (homme) qui lit une histoire à ses étudiants.

Ensuite, les 2 groupes voient une vidéo où l’enseignante (femme) qui se fait voler par un homme.

Puis les sujets passent un test où ils doivent reconnaitre le voleur à partir de plusieurs photos : soit (à gauche)
on a 3 photos dont l’une est l’enseignant (homme) mais le vrai voleur n’est pas présent. Soit (à droite) ils sont
tous les deux présents (voleur et enseignant).
Résultat :
(A droite) les participants qui ont vu l’enseignant-homme
dans la première partie de la vidéo vont être (un peu) plus
susceptibles de le choisir comme responsable du vol, que
les participants qui ont vu une enseignante-femme dans la
première partie. C’est un effet de familiarité.
(A gauche) le voleur n’est pas présent dans les photos.
L’enseignant-homme est choisi à 60% comme étant le
voleur pour le GE (qui a entendu cet homme comme
professeur), c’est 3x plus que le GC qui ont vu la femme
comme professeur.

On parle ici erreur de conjonction ; les personnes sont familières avec le visage de l’enseignant et vont faire
une erreur d’attribution de source sur base de cette familiarité.

NB : Les erreurs de conjonction peuvent même arriver entre personnes de sexes différents ! Ainsi qu’entre des
événements séparés dans le temps !

Exemple d’influence que les témoins peuvent subir lorsqu’ils sont entrain de rapporter des faits (Wells et
Bradfield) :

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On demande à un témoin de désigner le coupable dans une série de photos. On voit que le témoin n’est pas
sûre, il fait un choix par défaut (le numéro 2) et l’officier lui répond juste « okey ». Quelques mois mois après,
durant le procès, il demande si c’est bien l’individu numéro 2 qui est coupable et le témoin répond que oui
et qu’il est sûr, qu’il n’a pas d’hésitation. On voit donc que le simple fait que l’officier ai suggéré que sa
réponse est correcte (en disant Okay) peut avoir influencé le témoin et l’avoir rendu plus confiant dans son
jugement.

Cela a été testé en laboratoire avec l’étude de Wais et Bradfield : Ils


montrent à des participants une vidéo qui représente une scène de
crime. Après, on leur demande de choisir le criminel parmi plusieurs
photos d’individus (le criminel n’apparait pas parmi celles-ci). Ce qu’on
fait varier dans les 2 groupes c’est le feedback qu’on leur donne : un tiers
des participants reçoit un feedback positif, un tiers un feedback négatif
et un tiers ne reçoit rien. Ensuite, on leur demande à quel point ils sont
confiants dans leurs souvenirs et leur choix.
On voit que les participants à qui on a dit qu’ils avaient raisons (FB positif)
sont beaucoup + confiants que les autres (disent être confiants en
moyenne 5,4 sur 7). Les jurés sont ainsi influencés par la confiance du
témoin. Il s’agit de l’effet de feedback post-identification.

Cela montre que répondre de manière positive à une personne, même si elle se trompe, peut la rendre plus
confiante. Cela pose problème, car comme on l’a vu précédemment, une personne va se présenter à la cour
et témoigner en se montrant confiante et va aussi influencer les jurées qui seront + confiants dans les récits
de la personne.

Autre type de problème qui se pose au moment d’un témoignage : c’est le problème de la réactivation. Dans
une expérience de Chan et al, les participants visionnent une séquence de la série 24H et ensuite ils étaient
divisés en 2 groupes :
o Soit ils jouaient à Tetris (c’est une tâche distractive).
o Soit ils passent un test de rappel directement après avoir regardé la vidéo (ils ne recevaient pas de
feedback pour leur réponses).

Ensuite, pour les 2 groupes on présente une séquence audio de 8 min qui présente le même évènement qu’ils
ont vu auparavant mais avec des infos incorrectes. Enfin Ils devaient réaliser une tâche de rappel indicé et
dire si oui ou non certains éléments étaient passés dans la vidéo initiale.

Résultats :
Les personnes qui ont été testées directement
après avoir vu la vidéo, vont avoir tendance à
faire + d’erreur par après que les personnes qui
n’ont pas été testées directement après, elles
jouaient à Tetris (50% d’erreurs contre 30%).

Mais pourquoi être testé directement après la vidéo entraîne qu’ils ont fait + d’erreur ?
La différence c’est qu’ici, on a de l’info incorrecte qui est présentée immédiatement après le premier test. A
ce moment-là, la trace mnésique de l’évènement est + fragile (car elle a été « testée » une première fois).
Donc on est + susceptible de transformer le souvenir original et donc d’être influencé par les infos incorrectes.

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Cette répétition (via le premier test) augmente la suggestibilité et l’effet de désinformation ?


Il y a une étape de désinformation qui suit les premières questions sur l’évènement. Quand on réfléchit à la
question et qu’on est ensuite confrontés à des infos incorrectes, la personne va être encore + susceptible de
se rappeler de la mauvaise info. L’effet provient de l’effet combiné du premier test et de la présentation
d’infos incorrectes juste après. On parle ici de reconsolidation : le 1er test a réactivé (rafraichi et fragilisé) des
souvenirs. Cela a ouvert la porte à subir une influence des infos incorrectes qui ont suivi directement après.

Voici une procédure de parades et d’identification dans une expérience de Lindsay et


Wells : démo : on attend dans une banque et on voit un homme entrain de dire à son
collègue qu’il va arnaquer des gens. Cela nous inquiète, on va donc à la police et ils nous
demande qui est le coupable :

Ils présentent d’abord la première série de photos (le coupable ne se trouvent pas sur les photos) et une
deuxième série de photos ou le coupable s’y trouve (personne C). Voici les résultats :

Lorsque l’auteur n’est pas présent dans le line up, les participants vont avoir tendance à choisir quelqu’un
d’innocent si les autres personnes présentées ont une similarité basse avec l’apparence du suspect (on voit
que sur la première série, la personne D « sort du lot » car c’est la seule qui n’a pas de cheveux et donc il
ressemble « plus » au suspect). Par contre, ils vont avoir moins de chance de choisir quelqu’un d‘innocent si
toutes les personnes ont le même type de visage (similarité haute), comme on peut le voir dans la série 2.

On voit donc qu’il y a une influence des photos présentée sur le choix du témoin. Le fait que la personne
suspecte soit parmi des individus similaires a un meilleur impact que si il « sort du lot ». Mais il y a une
difficulté dans cela, c’est que les personnes peuvent changer d’apparence ! Ex : Abdeslam Salah qui a changé
de coupe de cheveux et sa pilosité faciale quand il était recherché. Cela l’a aidé à ne pas se faire repérer en 4
mois.

NB : Généralement, les personnes ne sont pas très bonnes en reconnaissance de visage surtout quand
l’apparence change

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.Il y a une expérience sur l’effet du changement d’apparence sur la


reconnaissance des visages fait par Devue et al : Ils ont utilisé des
personnages de la série GOT car il y a énormément de personnages et
donc beaucoup de visages à mémoriser. On choisit des personnes qui
disent être bonnes en reconnaissance de visage. Ils font donc un test de
reconnaissance. 90 acteurs connus ont été mélangés avec 90 inconnus.
Les acteurs étaient aussi séparés en fonction de leur importance dans la
série (héros principaux, acteurs moins importants etc).

Voici les résultats : Ce qu’on voit c’est qu’en termes de


reconnaissance correcte, pour les acteurs principaux, tout le
monde les reconnait quand leur apparence est semblable à
celle dans la série. Mais quand quelque chose change dans leur
physique, il y a une chute du taux de reconnaissance . Les taux
de reconnaissance diminuent en fonction de l’importance du
personnage dans la série et les taux de reconnaissance des gens
peu importants dans la série était presque au niveau des
fausses alarmes (ils disent qu’un inconnu est un acteur alors que
non). Les résultats sont également présentés en fonction du
type de reconnaissance ‘identification, nom, familiarité, etc).

Enfin, tout en bas, on a les erreurs, c.-à-d. que les sujets pensaient avoir reconnu les personnes de la série
mais c’est erroné.

Il faut donc faire attention à certaines éléments important dans les parades d’identification :

o Dire au témoin que l’auteur peut ne pas être présent !


o Il faut prévenir qu’ils ne doivent pas se sentir obliger de répondre
o Utiliser des leurres similaires au suspect sinon cela peut les induire en erreur
o Présentation séquentielle plutôt que simultanée, cela permet d’éviter les jugements relatifs (la
personne compare tous les visages)
o Il faut que l’officier soit « aveugle » (il ne sait pas qui est le suspect correct) pour administrer la parade
+ obtenir du témoin un jugement de certitude immédiatement.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Chapitre 2 : La résolution des problèmes

1) Qu’est-ce qu’un problème ?

Un problème c’est une situation dans laquelle l’état actuel et un but/état désiré sont séparés par un obstacle
à surmonter. La façon de contourner l’obstacle n’est pas immédiatement évidente. Par exemple : réussir ses
études, trouver un travail ou un logement, apaiser un conflit, trouver un cadeau pour une amie, aller chercher
un visiteur à la gare, repas du soir…

Au début, la résolution de problème a surtout été étudiée chez l’animal. Köhler a étudié ce qu’on appelle
l’insight chez le chimpanzé (l’expérience de ce qui fait tilt), on cherche une solution pendant un certain
temps, puis d’un coup, la solution survient. Il y a eu une expérience sur ce phénomène : ils ont mis un
chimpanzé dans une pièce avec des bananes pendues au plafond, mais c’est trop haut, il n’arrive pas à les
atteindre. Au début, il se met dans un coin, il râle etc. puis au bout d’un moment, il va comprendre qu’il peut
empiler les caissons placés dans la pièce afin d’atteindre les bananes.

On peut aussi préciser notre définition du mot problème :

§ On peut se pencher sur des problème précis et bien définis (well-défined). Ce sont des problèmes
pour lesquelles il y a une stratégie et une solution bien claires qui existent.
§ Dans la vie quotidienne, les problèmes sont assez vagues et mal définis (ill-defined). il n’y a souvent
pas qu’une seule stratégie claire pour régler un problème (il y en a parfois plusieurs) et il n’y pas
toujours de solutions disponibles..
§ Il y a aussi des problèmes de connaissances plus générales, il n’y a pas de connaissances spécifiques
requises pour résoudre ce problème, tout le monde pourrait les résoudre (« knowledge-lean »).
§ Il y a aussi des problèmes plus spécifiques pour lesquels une expertise ou des connaissance plus
profondes sont requises. (ce sont + ce type de problèmes qu’on aura en tant que professionnel)

En laboratoire les domaines ont été étudiés via des problèmes généraux (qui peuvent être résolus par tout
le monde) et bien définis.

2) L’approche gestaltiste

Selon les gestaltistes, la résolution de problèmes peut être productive ou reproductive :


§ Reproductive : c’est la réutilisation d’expériences ou de solutions antérieures qui peuvent soit
faciliter la résolution de problèmes, soit rendre le problème plus difficile à résoudre ! C’est appliquer
des solutions qui ont déjà fonctionné dans le passé à des nouveaux problèmes. Si c’est une situation
comparable, cela facilite la résolution mais si le problème est seulement en apparence similaire, cela
peut nous induire en erreur.
§ Productive : C’est ici qu’on parle du problème de type insight et de la restructuration du problème
à résoudre. On génère de nouvelles solutions et souvent la personne confrontée au problème doit
restructurer le problème et changer sa représentation.

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Ex : Le problème du cercle

On nous demande combien mesure le x. Tout d’abord, on voit un cercle divisé en quadrants par de fines
lignes verticales et horizontales. On voit aussi des lignes épaisses qui forment un petit triangle dans le
quadrant supérieur gauche. Mais, par la suite, on voit ce même cercle divisé en quadrants par de fines lignes
verticales et horizontales et on voit un petit rectangle qui se trouve dans le quadrant supérieur gauche, avec
une diagonale x qui est = à r.

ð Notre représentation initiale (triangle, lignes, etc) nous à bloqués car elle nous a empêchés de réaliser
qu’on peut voir les choses autrement (rectangle), et de recréer une nouvelle représentation du
problème. Il faut ici se représenter un rectangle au lieu du triangle de base et le x est donc la diagonale
de ce rectangle.

C’est ce dont on parle lorsque on fait référence au terme de restructuration : changer la représentation qu’on
se fait du problème afin d’aboutir à un insight càd la réalisation soudaine, la solution est la devant nos yeux.
L’insight a un caractère brusque lié à la découverte de la solution

Il y a de 2 types d’obstacles à la résolution de problèmes :


§ Fixité = tendance à se focaliser sur une caractéristique spécifique du problème, empêchant d’arriver
à une solution (ex : dans le cas du cercle on est focalisé sur un triangle)
§ Mental set = c’est l’état d’esprit dans lequel on est, l’idée préconçue sur la manière d’approcher un
problème pour le résoudre de par sa ressemblance superficielle avec d’autres problèmes similaires.

La modification de la représentation du problème (apport des Gestaltistes) (Ohlsson) : Les blocages dans les
problèmes de type insight surviennent car le problème est mal représenté, il y a 3 façons de changer sa
représentation du problème :

§ Relâchement des contraintes : lorsque on est en train de résoudre un problème on a des inhibitions
(ce qui est permis ou pas). Et le fait de se libérer de ces contraintes et d’ouvrir la porte à la recherche
d’autre solutions nous permettent de trouver des solutions plus créatives.
§ Ré-encodage : c’est le fait de rejeter une interprétation donnée de la situation en faveur d'une autre
interprétation (ex : problème du cercle)
§ Élaboration : on a des nouvelles infos concernant le problème qui peuvent nous aider à le résoudre.
C’est la prise en considération d'un indice présent dans l'environnement, mais ignoré jusque-là (ex :
lors de la présentation du problème du cercle, la prof nous a aidés en nous donnant un indice, on a
ensuite eu une nouvelle élaboration grâce à une nouvelle info).

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Voici quelques exemples qui permettent d’illustrer ces changements de représentation, d’abord pour la
fixité :

Ex1 : le problème des deux cordes (Maier)


Le participant est dans une pièce avec deux cordes pendues au plafond. Le
but du participant est de tenir les 2 cordes en même temps mais elles sont
trop éloignées pour pouvoir le faire. Pour l’aider, il y a dans la pièce des objets
disponibles : chaise, tenaille, boîte en carton, etc. La solution : ici, le sujet
doit attacher la tenaille à une corde qui va se balancer, telle un pendule. Il y
a eu seulement 39% de réussite dans un laps de temps de 10 minutes !

C’est un problème qui fait appel à la notion de fixité fonctionnelle, càd la difficulté à percevoir les objets en
dehors de leur usage habituel. En effet, la tenaille n’est pas perçue comme un objet pouvant servir de poids,
elle sert à saisir. Pour l’utiliser comme un poids, il faut se départir de sa fonction traditionnelle.

Ex2 : le problème de la chandelle (Dunker) :


Le sujet doit attacher la chandelle au mur alors qu’il dispose d’une chandelle, d’une boite de punaises ainsi
que d’une pochette d’allumettes. Il doit vider la boite de punaises afin de l’utiliser comme support pour
attacher la chandelle au mur (moins de 50% des personnes trouvent la solution). Encore une fois, on a cette
notion de fixité fonctionnelle qui revient : une boîte pleine renforce l’idée que c’est un objet servant à
contenir. D’ailleurs, Adamson a fait une expérience où il a été démontré que, lorsque les sujets sont face à
une boite déjà vidée (« boxes empty » en vert), ils ont moins de mal à résoudre le problème (voir graphique).

Ex 3 : Le problème des 9 points

Il faut réussir à relier les 9 points avec 4 traits sans lever le bic du papier.
Encore une fois, ce qui constitue un obstacle est la fixation que l’on se
fait mentalement sur la forme suggérée par les points. Mentalement on
se contraint à rester dans la forme proposée par les points. C’est en
changeant la représentation, en relâchant les contraintes, en réalisant
qu’on peut sortir de ce cadre que l’on arrivera à résoudre le problème.

Ex 4 : La fixité sémantique
Une femme vivant dans une petite ville a marié 20 hommes différents de cette ville. Tous ces hommes sont
toujours en vie, et la femme en question n’a jamais divorcé. Pourtant, elle n’a jamais enfreint la loi. Comment
est-ce possible? Réponse : C’est la maire ou la bourgmestre de la ville…

Il y a ici une ambiguïté sur le terme « marié », il faut ré encoder la représentation de ce terme, il peut être
comprit comme « épouse » ou « unir des gens par l’acte du mariage ».

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Et maintenant voici des exemples pour le mental set effect . Rappelons-nous c’est la tendance à réagir à un
nouveau problème par une approche qu’on a déjà utilisée dans le passé pour des problème en apparence
similaire, cela peut mener à chercher des solutions compliquées à des problèmes simples. Par habitude, à
force d’appliquer des solutions compliquées, le sujet ne voit plus la solution simple du nouveau problème
(ex : les programmeurs savent faire du code très compliqué et pourrait donc appliquer un code + compliqué
que nécessaire comparativement à un novice qui a moins d’expérience).

Ex 1 : Le problème des allumettes

Les équations qui sont représentées par les allumettes sont fausses et il faut bouger une des allumettes pour
qu’elles soient correctes. Puisqu’on a 2 équations qui nous sont présentées et qui se suivent, on se base sur
la 1ère afin de résoudre la 2nd, ce qui nous a ralenti car ce n’est pas le même type de résolution pour le premier
on doit changer des chiffres alors que pour le deuxième on change le signe et l’égalité.

Olligner et al nous disent qu’il y a facilitation quand le même type d’insight est impliqué d’un problème à
un autre mais il y a interférence quand un ≠ type d’insight est impliqué.

Des auteurs ont d’ailleurs montré que des patients qui ont des lésions frontales – le lobe frontal étant
responsable de l’imposition de contraintes et le fait de gérer les problèmes – sont meilleurs que ceux qui
n’ont pas de lésions (82% vs. 43%) car ils n’ont pas d’inhibition qui vont les bloquer dans la résolution des
problèmes.

Ex 2 : Problème des carafes (Luchins)


Il y a 3 récipients qui sont donnés et les participants doivent obtenir un volume désirée(ex : pour le problème
1 le volume désiré est de 100cL et la solution est de faire : B – A – 2.C)

Certains participants ont été confrontés à tous les problèmes tandis que d’autres n’ont été confrontés qu’aux
problèmes 7 et 8. Parmi les participants qui ont dû résoudre toute la 1ère série de problèmes, seulement 23%
changent de résolution pour aller vers une + simple, la majorité continu de résoudre le problème avec une
soustraction complexe alors que ils peuvent la résoudre avec une addition simple. Le deuxième groupe qui a
été seulement confronté aux problèmes 7 et 8 ont tous (100%) utilisé la solution la plus simple.
On est face à ce problème de mental set où on persiste à utiliser une solution compliquée et ça même si on
pourrait switcher vers une solution plus simple.

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Pour conclure, selon les gestaltistes, la résolution de problèmes implique + que la simple reproduction de
réponses apprises. Elle dépend de la façon dont le problème est représenté (elle peut notamment créer des
blocages et empêcher de trouver la solution) :
- La manière optimale de résoudre des problèmes (surtout lorsqu’ils sont de type insight) implique ce
processus de restructuration (changer la représentation, les contraintes, etc)
- Une dépendance trop grande envers les expériences passées peut mener à l’échec par cet aspect de fixité
fonctionnelle ou par les mental set effects (préconception).

Toutefois cette approche Gestaltiste présente des limites :

• En effet, ce concept d’insight et ses conditions d’apparition peuvent être floues. D’autres auteurs ont mis
en place des moyens de différencier les problèmes de type insight et ceux qui ne le sont pas.

Prenons pour exemple l’expérience suivante : alors qu’un groupe est


confronté à des procédures d’insight (cercle, allumettes, etc) et qu’un autre
est confronté à de l’algèbre (il y a une procédure spécifique, une solution
unique et bien définie). Les participants doivent tous juger à quel point ils
pensent être proches de la solution (sur une échelle de 0 à 7). Résultat : Pour
les problèmes bien définis (algèbre), les participants se jugent près de la
solution (la montée de la courbe est plus graduelle) tandis que ceux qui sont
dans un problème de type insight en sont moins certains (ils restent plus
longtemps dans une hésitation avant d’arriver à 7).

• De plus, les gestaltistes se sont centrés sur les ≠ des problèmes avec ou sans insight alors que ceux-ci
ont également des points communs.

3) Approche de la théorie du traitement de l’information - Newell & Simon

Selon cette approche, on va s’intéresser aux ≠ étapes qui interviennent dans la résolution de problème. Dans
cette approche on peut faire une analogie avec la recherche de ≠ voies vers une solution (analogie avec un
labyrinthe). La structure d’un problème serait constituée d’un ensemble d’états : état initial, états
intermédiaires et état recherché. On s’intéresse aux étapes de traitement pour passer de l’état initial jusqu’à
l’état recherché.

Selon les auteurs, pour résoudre un problème, comme pour se déplacer dans un labyrinthe, il faut
entreprendre des actions. On parle d’application d’opérateurs : ce sont des actions permettant de passer
d’un état du problème à un autre. Par exemple, prendre un avion pour se rendre de A à B est un opérateur.

Une tâche célèbre permet de représenter ce concept : la tour de Hanoï : Le but du problème est de parvenir
à reproduire la même pile sur la dernière tige alors que les règles à respecter sont :
1. On ne peut déplacer qu’un disque à la fois
2. On ne peut pas déplacer un disque qui a des disques au-dessus de lui
3. Un disque ne peut jamais être placé sur un disque plus petit que lui-même

A chaque état, plusieurs opérateurs peuvent être appliqués, générant potentiellement de nombreux
nouveaux états. Le schéma de droite est l’espace-problème qui représente l’ensemble des étapes/états
possibles (tous), il décrit la représentation abstraite du problème.

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La meilleure solution est représentée par les 7 déplacements que l’on voit dans l’espace problème sur la
droite :

Dans la vie quotidienne on a rarement des types de problème avec un espace-problème qui est disponible et
toutes les étapes ne sont pas formulables de manière aussi claire que dans ces cas ci. Dans le cas de la tour
de Hanoï, on est dans un problème bien défini et c’est pour ça qu’on peut décrire toutes les étapes, pour les
problème plus vagues et moins définis, on ne peut pas toujours bien se représenter toutes les étapes
possibles.

Pour en revenir à cet exemple de la tour de Hanoi, comme il y a plusieurs actions alternatives à chaque étape,
les participants vont généralment utiliser ≠ types de stratégies en utilisant de méthodes heuristiques, pour
passer d’état en état, de l’état initial à l’état recherché.

C’est différent du terme algorithme qui est une procédure qui, si elle est appliquée correctement, mène de
façon certaine à la résolution (si elle est possible). Il faudrait donc examiner systématiquement tous les états
possibles de l’espace-problème via la répétition d’opérations simples. Ex : si on nous demande de trouver
tous les noms d’oiseau qui sont écrit avec 5 lettres, on pourrait générer toutes les combinaisons possibles de
5 lettres et ensuite aller chercher les mots qui se rapportent au terme d’oiseau. Mais on n’utilise pas cette
stratégie en tant qu’humain. Cette procédure est couteuse en termes de temps. C’est surtout approprié pour
les problèmes bien définis pour lesquels l’espace-problème est connu.

On utiliserait plutôt les heuristiques c’est une procédure empirique, qu’on peut faire par essai et erreur sur
base de l’expérience et de nos observations. Mais contrairement à l’algorithme, les heuristiques ne vont pas
toujours garantir qu’on va trouver la solution. L’avantage est qu’on va gagner du temps à ne pas explorer
toutes les voies et les étapes qui ne sont pas nécessaires. On gagne en temps et en effort et de manière
générale, elles sont assez efficaces (car assez régulièrement payantes). De plus, on peut essayer plusieurs
heuristiques – en changer. L’algorithme est couteux en temps et pour un être humain c’est ennuyeux de
passer tout en revue et ça ne s’applique pas forcement lorsque on est face à un problème plus complexe sans
solution bien précise.

Voici quelques exemple d’heuristiques :

§ Analyse fin-moyens : c’est le type d’heuristique le plus fréquent et efficace.


Il s’agit d’une stratégie visant à réduire la ≠ entre l’état initial et l’état recherché. L’important est de
toujours garder le but en tête et de considérer les contraintes liées aux problèmes.
Dans le cas où on applique cette heuristique, on va évaluer la différence entre l’état dans lequel on se
trouve pour le moment (soit état initial ou un état engendré/courant) et l’état recherché. Puis on va
réfléchir à des sous-buts (états intermédiaires) pour réduire cette différence. A chaque étape
intermédiaire, on va choisir un opérateur pour atteindre le but courant avec lequel on est occupé (« sous-
but »)

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Ex : dans le cas de la tour de Hanoï, on peut établir les sous-buts suivants :


- Libérer le grand disque pour pouvoir le placer sur la barre 3
- Mettre le petit disque sur la barre 3 et le moyen sur la barre 2 (1er sous-but atteint)
- Libérer la barre 3 pour y placer le grand disque (placer le petit disque sur le moyen) ;
- Déplacer le grand disque sur la barre 3 ; libérer le disque moyen ; etc.).
Ce type d’heuristiques peut comporter certaines difficultés car des fois, on semble s’éloigner
temporairement du but mais on doit maintenir le but final en tête pour ainsi déterminer les étapes qui
permettent de l’atteindre même si temporairement on s’en éloigne un peu.

§ Progress monitoring : cet heuristique consiste à évaluer la vitesse de progression vers le but. Ainsi, si
on a l’impression que l’on est trop lent, on peut choisir une autre stratégie. Cependant, cela peut induire
en erreur. C’est le cas du problème des 9 points, on a initialement beaucoup de progrès en restant dans
la forme suggérée par les 9 points donc on continue mais cela nous induit en erreur.

Cela a été démontré par des chercheurs qui ont mis au point le problème des 13
points : ça pourrait paraitre plus complexe sauf que les points sont arrangés de telle
sorte qu’ils indiquent aux participants comment résoudre le problème. C’est plus
facile à résoudre que celui des 9 points.

§ Disponibilité : cet heuristique-ci consiste à se baser sur la 1ère solution qui nous vient à l’esprit. La
difficulté d’un problème est jugée selon la difficulté à trouver cette 1ère solution. La disponibilité est liée
à l’illusion de savoir qui est une surestimation du degré de connaissance. Certains émettent l’hypothèse
que c’est la raison pour laquelle la psychologie est perçue comme facile.

Exemple :

Il y a une multiplication avec un 0, quand on l’a repéré on va pouvoir résoudre l’équation facilement, ce
sera juste X=75. Mais ce n’est peut-être pas la première solution qui nous est venue à l’esprit, on s’est
d’abord dit que c’est dur, on ne va pas essayer de le résoudre mais quand on remarque le 0 la solution
nous apparait directement et on juge le problème simple…

Cette heuristique est souvent liée à l’illusion de savoir : si on a facilement accès à des infos en réponse à
une question, on va surestimer le degré de connaissance qu’on a par rapport à une problématique. Si on
demande à des participants de juger leurs connaissances sur un vélo, ils vont avoir tendance à surestimer
leurs connaissances car quand on leur demande d’expliquer précisément comment un vélo fonctionne,
ils se rendent compte qu’ils ne connaissent pas autant de détails qu’ils pensaient. Ils changent leur
évaluation du problème et juge le problème plus dur et leur connaissance moindre.

C’est peut être une raison pour laquelle la psychologie est perçue comme facile car on est tous un peu
psychologue de marché, si des personnes nous évoquent des problèmes auxquels les psy sont confrontés,
il est facile pour eux d’avoir des idées superficielles sur comment tous les psys peuvent résoudre tel ou
tel problème. Mais si on leur demande des détails, des manières plus méthodiques, ils se rendraient
compte qu’ils ne connaissant pas autant de chose qu’ils pensaient savoir.

§ Transfert analogique : c’est le fait d’exploiter des similarités entre un problème actuel et des problèmes
résolus dans le passé. C’est ainsi qu’Ernest Rutherford a utilisé l’analogie du système solaire (terre tourne
autour du soleil) pour expliquer la structure de l’atome (les électrons « orbitent » autour du noyau).

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En résumé Théorie de l’espace-problème :


§ Lorsqu’ on résout un problème il y a souvent un nombre important de voies possible à explorer et il
faut trouver la voie la plus efficace pour passer d’un état initial a l’état recherché. Cela nous permet
de résoudre problème
§ Espace-problème = l’ensemble des états générés par des opérateurs légaux (i.e. respectant les
règles).
§ Nécessite d’encoder les passages « légaux ». Challenge pour la mémoire…

On peut finalement définir la résolution des problèmes :

La mise en œuvre de tous ces processus est soumise aux limites du système cognitif :
§ Capacité de mémoire de travail (elle va nous limiter dans notre capacité à résoudre des problèmes
complexes)
§ Certains processus de contrôle vont nous aider à résoudre des problèmes. L’attention va nous
permettre de nous focaliser sur des éléments pertinents et ne pas nous concentrer sur ceux qui ne
sont pas pertinents. La planification nous aide également (ex : Tour de Hanoï où il faut réfléchir aux
implications de chaque action pour voir si ça ne va pas nous emmener trop loin de la solution)
§ Vitesse à laquelle le système enregistre l’info et la récupère en MLT pour résoudre le problème.

Pour nous aider on va utiliser nos connaissances antérieures. Mais on l’a vu avec les gestaltistes, le problème
doit être comparable pour pouvoir faire cela. Un problème peut se présenter lorsqu’on est face à un
problème différent mais dont la similarité peut nous induire en erreur. Il faut se départir de la comparaison,
et chercher des solutions différentes. On peut alors utiliser certaines heuristiques.

Le transfert analogique consiste à exploiter des similarités qu’on trouverait entre un problème actuel et un
problème résolut dans le passé

Dans les études en laboratoire sur le transfert analogique, souvent on a un problème cible, qui est le
problème actuel à résoudre et on va essayer de déterminer si l’existence d’un problème source (= problème
similaire illustrant une façon de résoudre le problème cible) peut nous aider à résoudre le problème cible.

4) Le transfert analogique est donc une facilitation à résoudre le problème cible par une exposition
au problème source.

Ex 1 : Problème de l’échiquier écorné (Kaplab et Simon)


On a un échiquier de 64 cases auquel on enlève 2 cases (un échiquier normal peut
être recouvert de 32 dominos). La question posée est : Peut-on couvrir l’échiquier
écorné avec 31 dominos (avec 2 cases de coin en moins) ?

Il y a plusieurs conditions (utilisées par les auteurs) :


§ Une grille de 64 cases vierges (fond blanc)
§ Un échiquier habituel avec des cases noires et blanches
§ Un échiquier avec des cases où il est écrit « noir » et « rose »
§ Un échiquier avec des cases où il est écrit « pain » et « beurre »

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Il y a aussi un groupe où en premier lieu on leur présente ce problème source (le problème du mariage russe):

On se demande est-ce que cette histoire nous permet de résoudre le problème de l’échiquier ?
La réponse est oui ! Par analogie, grâce à ce problème source, on va avoir un indice qui va attirer notre
attention sur un élément particulier qui nous permettra de résoudre le problème cible. Cela attire notre
attention sur l’importance de la parité des cases, il n’y a pas que le nombre qui est pertinent. Une autre
manière de réfléchir au problème est de réaliser qu’un domino va toujours couvrir une paire de cases noirs
et rouge, comme la paire homme-femme du problème source. La réponse à la question du problème est
donc : non, ce n’est pas possible de couvrir l’échiquier avec 31 dominos car pour pouvoir le faire il faut enlever
une case noire et une case rouge. Dans notre problème, les cases sont toutes les deux rouges et donc ça ne
permet pas cet arrangement.

Remarque : Ils ont remarqué, dans cette étude, que la condition la plus dure est celle du damier vierge
(uniforme blanc). Par contre, le fait d’avoir des mots qui indiquent les couleurs (rose et noir) attire l’attention
sur le fait que c’est un élément pertinent et donc cela aide à la résolution, pareil pour la condition beurre-
pain.

Ex2 : Problème des radiations de Duncker (Gick & Holyoak)


On lit cette histoire aux participants :

Ils demandent ensuite : Quelle procédure pourrait être utilisée pour détruire la tumeur à l’aide des rayons
sans détruire les tissus sains ? La réponse à la question est : il faut faire converger les rayons à partir de
différents endroits vers la tumeur comme ça ensemble, ils détruiront la tumeur sans abimer les tissus sains.

ð C’est un problème (très) difficile que seulement 10% des participants arrivent à résoudre

Ils ont ensuite présenté une autre histoire (problème source) à un autre groupe, avant de présenter l’histoire
de la radiation, en indiquant que c’est une histoire à mémoriser. C’est l’histoire de la forteresse :

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Il y a des indices dans cette histoire : elle parle de faire converger un petit groupe de soldat au même
endroit et au même moment pour qu’ils soient suffisamment forts pour détruire la forteresse et sans faire
de dommage au passage

Résultats :
§ Quand on leur dit de mémoriser cette histoire avant d’écouter l’autre histoire, donc quand il n’y a pas
une demande explicite d’utiliser l’histoire de la forteresse pour résoudre le problème des radiations, il y
a 30% de résolution correctes (au lieu de 10%)
§ Lorsque qu’on invite les participants explicitement à se servir de l’histoire de la forteresse les
performances sont doublées, en effet on a 75% de résolutions correctes (performance 2X plus grande
que la 1ère condition)

ð Dans les deux cas, on peut dire qu’ils ont la même information en MLT mais la mise en correspondance
n’est pas automatique. Il faut inviter les participants à aller chercher une analogie.

La résolution analogique ne va pas de soi, certaines personnes ne voient pas qu’il y a des éléments pertinents
qui permettent de trouver la bonne réponse. Cela peut nous donner des idées pour la résolution de problème
de la vie quotidienne même si ce type de raisonnement analogique ne tombe pas toujours du ciel. Parfois
c’est utile de trouver des éléments qui peuvent ressembler à un problème actuel afin de nous aider à le
résoudre.

Selon Glick et Holtoeak, il y 3 étapes utiles dans la résolution de problème par analogie :

§ Encodage : dans cette étape on se construit des représentations mentales des situations mise en jeu
dans les problèmes sources et cibles. L’aspect important c’est la détection de la situation source
comme analogie pertinente de la situation cible → c’est une étape cruciale et c’est aussi la plus
difficile.
D’autre études ont montré qu’une grande similarité entre les 2 problèmes (source et cible) peuvent
nous aider à trouver une analogie pertinente afin de trouver le problème. Les indices peuvent
également aider.

§ Mise en correspondance : il faut aller chercher les éléments dans les 2 types de problèmes (source
et cible) et les connecter. Il faut donc détecter les correspondances et les mettre en connexion. (Ex :
se rendre compte que la forteresse et la tumeur sont semblables).

§ Transfert des connaissances : pousser plus loin la mise en correspondance pour générer des règles
pouvant s’appliquer à la situation cible pour atteindre une solution.

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Ces étapes peuvent interagir sans suivre un ordre strict comme présenté ici.

Dans la résolution de problème par analogie il y a un rôle important de la similarité. Il peut y avoir
différents types qui interviennent dans les problèmes cible/source :
§ Similarité superficielle, il y a des détails non pertinents communs aux deux problèmes. C’est la plus
facile mais c’est aussi celle qui peut nous induire en erreur !
§ Similarité structurelle : on a des relations causales entre des éléments qui sont partagées par les
deux problèmes (ex : dans le problème de l’échiquier les 2 éléments retirés doivent constituer une
paire ho/fe ou noir/rouge).
§ Similarité procédurale : on pourra faire le lien entre des procédures ou actions qui peuvent être
générées pour mener à résolution concrètes du problème.

→ Ces deux dernières sont plus faciles à appréhender lorsqu’on doit générer des analogies soi-même.

5) Quelques applications concrètes et validité écologique


La validité écologique est le fait qu’on se demande si toutes les connaissances qu’on obtient à partir de ce
genre d’expérience peuvent s’appliquer à la vie réelle ou pas. Les obstacles et stratégies apparaissant dans
les tâches de labo se retrouvent-ils dans les problèmes quotidiens ? Ex : Des ressemblances superficielles
entre les symptômes nous amènent à comparer des patients, et nous éloignent du but jusqu’à ce que l’on
change de stratégie.
Qui de l’utilisation des heuristiques dans la vie quotidienne ? : Ex : un patient a des TOCs. Une solution
évidente, faire de l’exposition. Les rituels se manifestent différemment. On recommence de nouvelles
expositions. L’application de l’heuristique de disponibilité (1ère idée dispo) aidé par le progress monitoring
pose problème. Prendre du recul ! On constate que les TOCs sont liés à l’anxiété de harcèlement à l’école. Il
faut donc s’attaquer à la source.

Il y a une variabilité individuelle dans la façon de résoudre les


problèmes. Lemaire & Arnaud ont démontré une variabilité
individuelle dans le fait de résoudre des problèmes
arithmétiques, les façons de faire sont différentes d’une
personne à l’autre. Ex : 12 + 46, comment fais-je ?

L’expertise une grande habileté ou compétence dans une ou plusieurs tâches spécifiques dans un domaine
particulier. Celle-ci aide à la résolution de problèmes associée à leur domaine et dans certains cas, les
solutions peuvent parfois être simplement récupérées en mémoire à long terme (plus de résolution, on peut
directement les appliquer sans devoir réfléchir).

Par exemple, concernant le jeu d’échec, il parait qu’il faut + de 10.000 heures de pratique pour devenir un
maitre au jeu d’échec. Ericsson & al ont démontré que ceux-ci avaient des stocks de configuration de pièces
en MLT (templates d’environ 10 pièces). Cela leur permet de planifier et calculer leurs coups en ayant ± 3
templates en tête. On peut faire le lien entre les templates et la technique de chunking (cfr. chapitres sur la
mémoire).Lorsque l’on teste la mémoire des joueurs experts et celle des joueurs débutants, pour la
configuration de pièce sur l’échiquier, on voit que l’on a un grand avantage chez les experts lorsque les
arrangements de pièces correspondent à des configurations légales (respectant les règles du jeux). Ils sont
capables de mémoriser le placement de ± 16 pièces contre 4 chez les novices. Par contre, lorsqu’on présente
des configurations sur des échiquiers non-légaux mais aléatoires, on voit une diminution des performances
dans les 2 groupes ; l’avantage des experts a disparu. Cela prouve que les experts n’ont pas une meilleure
mémoire que le novices mais qu’ils ont simplement une meilleure façon d’organiser l’info qui est pertinente
et significative dans le contexte du jeu pour lequel ils ont une grande expertise.

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Une autre étude de Chi et al s’intéresse à l’expertise : 24 problèmes de physiques sont présentés aux
participants qui doivent les grouper selon leur ressemblance. Il y avait des professeurs de physique et des
novices. Les classements s’organisent de manières ≠ dans les 2 groupes :
§ Les profs de physique regroupent les problèmes sur base de leur similarité structurelle (ex :
conservation de l’énergie, …)
§ Les novices vont plutôt produire des regroupements sur des aspects de similarité superficielle (ex :
présence d’un ressort, d’un plan incliné, …).
Tandis que les experts passent + de temps à analyser un problème et les non-experts se lancent + rapidement.
On peut faire l’hypothèse que les experts vont utiliser des heuristiques de type fin-moyens pour analyser le
problème. La performance des experts est supérieure car ils possèdent de larges stocks de connaissances
bien organisées dans un domaine. Toutefois, il est a noté que l’expertise n’est pas toujours transférable à
d’autres domaines (ex : en tant que psy, face à différents types de pathologie, certaines procédures
marcheront pour un patient mais ne seront pas applicable à d’autres cas). Les experts se caractérisent par
une organisation des connaissances sur base de principe structurel et une analyse plus approfondie de la
structure des problèmes. Parfois ils ont recours à des solutions stockées en MLT, même si c’est un avantage
et un gain de temps, cela peut induire un manque de flexibilité et de créativité et donc induire en erreur
dans le cas de problèmes qui ressemblent mais de manière superficielle.

Questions à garder en tête en tant que clinicien :


§ Un patient a sa stratégie individuelle de résolution de problèmes !
§ Blocages potentiels ?
§ Rapport coût-bénéfice de vos heuristiques ?
§ Rester flexible si nécessaire ?
§ Conscience du domaine d’expertise (problème transférable ?)

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Chapitre 3 : Jugement, prise de décision et raisonnement

1. Définitions
§ Jugement : processus d’évaluation de la probabilité d’événements sur base d’informations incomplètes.
Par exemple : quand on se demande, quelle est la chance de réussir la session de juin ? Quelle est la
sympathie/fiabilité de telle connaissance ? Sécurité de telle voiture ? etc.

§ Prise de décision : le fait de choisir parmi plusieurs alternatives.


Par exemple : Quelles études choisir ? Qui inviter à ma fête ? Quelle voiture acheter ? etc. Elle va s’opérer sans
avoir toutes les infos à disposition et il faut trouver une façon optimale de choisir entre plusieurs alternatives
en fonction l’info que l’on a.

§ Raisonnement : tirer des conclusions à partir des informations à disposition.


Il y a plusieurs façons de raisonner, parfois l’information peut être complète et parfois elle peut être
incomplète. Par exemple : Si on ne ramène pas un livre à temps à la bibliothèque, on reçoit une amende. Je
rends mon livre à retard, donc je reçois une amende (= raisonnement de type logique)

Dans la vie quotidienne, ces trois processus interagissent sans cesse :

Le choix se base sur des jugements et/ou des raisonnements


On peut juger la qualité d’une décision qu’on a prise par le passé. On commencera à parler d’erreurs qu’on
a effectuées dans ces cas, c’est souvent les erreurs qu’on fait lorsqu’on utilise les processus cognitifs pour
comprendre les mécanismes cognitifs sous-jacents.

La qualité d’une décision tend à être jugée sur base de ses conséquences, mais ceci n’est pas toujours
pertinent. Une décision peut être pertinente sur base des infos disponibles au moment où elle est prise
indépendamment des conséquences. Ex : un chirurgien annonce que l’opération fut un succès mais
malheureusement le patient est décédé. Dans ce cas-là, pour juger l’opération il faut juste tenir compte de ce
qu’il s’est passé durant opération et pas après (donc la conséquence).

2. Biais rétrospectif
Le biais rétrospectif (hindsight bias) est la tendance à surestimer la prédictibilité d’une décision ou d’un
événement une fois les conséquences connues.
Ex : On dit : « Je le savais ! », alors que sur le moment on n’était pas si sûr… Pour évaluer la qualité d’une
décision ou juger un comportement, il est plus juste d’examiner les infos dont la personne disposait sur le
moment.

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Ce biais est assez fréquent et contribue à des erreurs de jugement telles que le blâme des victimes (victim
blaming) : lorsque quelque chose de négatif arrive à quelqu’un on a tendance à lui dire que c’est de sa faute
car il n’a pas pris les bonnes décisions ou qu’il n’a pas eu un comportement « malin », etc. Mais cela n’est
pas correct du point de vue de la situation car si on ne connaissait pas les conséquences on n’aurait peut-
être eu un jugement différent. Cela a été démontré dans des expériences :

Expérience de Carli (1999) :

Les participants lisent un texte avec une histoire dont le but est de se faire une impression des personnages.
Il y a plusieurs évènements qui se passent (voir le texte). Ensuite, il y a 3 alternatives - fins possibles que les
participant doivent choisir pour la suite. Et enfin, une semaine se passe puis les participants viennent au labo
afin de répondre à différents questionnaires (mémoire, biais rétrospectif et un questionnaire de dénigrement
de la victime et de son comportement).

Le test de mémoire (QCM) avec 3 alternatives possibles qu’ils doivent choisir sur base de leur souvenir de
l’histoire. Ce QCM a été conçu de façon à ce que certains choix correspondent à un stéréotype associé au viol
(ex : la personne s’habille d’une telle manière et donc cela provoque le viol) ou des stéréotypes associés au
mariage. On constate qu’il y a plus de choix erronés d’alternatives correspondants au stéréotype (du viol /
mariage). Exemple : Scénario viol, alors on choisit : Pam est habillée de façon provoquante ; elle porte une
robe ; Peter n’a pas eu de relations sexuelles depuis longtemps ; même si ces éléments n’étaient pas présents.
On voit donc que même si le début était commun pour tout le monde, l’événement et ses détails sont
reconstruits en fonction de la fin donnée à l’histoire. Une petite phrase à la fin peut donc influencer tout ce
qui s’est passée dans l’histoire auparavant.
Il y a des liens à faire sur ce que l’on a vu sur la mémoire et son aspect reconstructif. On peut incorporer
des éléments qui correspondent à des stéréotypes et être biaisés sur cette base-là.
L’auteur constate qu’il y a aussi un biais rétrospectif : la fin lue une semaine avant est jugée plus probable
que les alternatives. Donc quand on leur demande quelle est la probabilité que l’histoire se termine ainsi,
ceux qui ont eu l’histoire qui se termine par le viol vont juger que le scénario du viol était plus probable et
ceux qui ont eu l’histoire qui se termine par le mariage vont juger que le mariage était le scénario le plus
probable. Ceci montre encore que l’info que les participants ont reçues à la fin, influence le jugement de
tout le reste de l’histoire.
Pour le dénigrement de la victime : dans ce questionnaire on demande aux participants de juger les
caractères des personnages (Pam et Peter). Le caractère de Pam est jugé moins favorablement dans le
scénario viol par rapport au scénario du mariage. Ce dénigrement est d’autant plus fort quand le viol est
perçu comme causé par son comportement.

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Conclusion : un petit morceau d’info qui survient à la fin de l’histoire va influencer tout notre traitement de
l’histoire qu’on a reçue initialement et cela même si les groupes ont reçu les mêmes infos au départ. Cette
info en plus à la fin change la façon dont ils se souviennent de l’histoire, le jugement de la probabilité d’un
évènement donné et le jugement des personnages !

Ce biais rétrospectif est assez fréquent (si on n’y réfléchit pas). Il survient de manière automatique et c’est
dû à la difficulté d’ignorer les nouvelles infos une fois connues (conséquence-fin de l’histoire). Ces infos sur
la conséquence d’une histoire influencent le rappel des infos originales qu’on devait évaluer.
NB : faire le lien avec les schémas et biais mnésiques dus aux stéréotypes et les aspects reconstructifs des
souvenirs.

3. Le jugement
On peut se baser sur des heuristiques pour faire des jugements, en effet ils nous permettent d’être plus
rapide à effectuer un jugement sans se casser la tête, par opposition aux algorithmes où on tient compte de
toutes les infos.
Un mécanisme prédominant du jugement se base sur le raisonnement inductif : c’est le fait de se baser sur
les observations passées, sur une accumulation de donnés afin de tirer des conclusions probables (celle-ci
n’est pas forcement vraie, elle peut être vraie dans la majorité des cas mais pas toujours).
Ex : la prof utilise une gourde et donc elle se soucie de l’environnement. Cette hypothèse est assez probable
car on a observé que nos amis qui se soucient de l’environnement utilisent une gourde, mais ce n’est pas
forcément vrai, peut être que la prof est juste radine et qu’elle ne veut pas acheter des bouteilles sans arrêt.
Dans le raisonnement inductif on part d’observations spécifiques dont on essaie de tirer des infos
générales. Ces conclusions sont probables cependant ce sont de hypothèses dont les adéquations doivent
être vérifiées car elles ne sont pas toujours correctes (ce raisonnement peut se rapproche de la démarche
scientifique).
NB : Le raisonnement déductif, en opposition avec le raisonnement inductif, est un processus de
raisonnement logique où on part du plus général au plus spécifique. On tirera dans ce cas-là des conclusions
logiques car l’info nécessaire est à disposition
Lorsque on procède à un raisonnement inductif, c’est une bonne idée de tenir compte de la force des
éléments inductifs. Par exemple, j’observe que tous les corbeaux que j’ai vus à Liège étaient noirs. Les
corbeaux vus en vacances en Ecosse étaient noirs aussi, conclusion : Il y a de fortes chances que tous les
corbeaux soient noirs. Autre exemple : j’observe que le soleil s’est levé chaque matin à Liège, conclusion : le
soleil se lèvera demain matin à Liège.
Plusieurs facteurs contribuent à la force d’un argument inductif :
- La représentativité des observations : le soleil à Liège est-il représentatif ? est-ce qu’on peut faire
une généralisation pour d’autres villes ?
- Le nombre d’observations : le levée du soleil c’est tous les jours, aussi loin que je m’en rappelle. Il y
a donc un nombre important d’observations.
- La qualité des preuves : Est-ce que les observations que j’ai faites sont fiables ou pas pour tirer des
conclusions ?
Le raisonnement inductif nous aide à prédire des évènements futurs pour guider notre comportement sur
base d’observations passées. Le rôle des expériences antérieures est important. Ce raisonnement est
constamment utilisé et souvent automatique. Ex : dans l’amphi, avant de m’assoir je n’ai pas testé la chaise
pour voir si elle allait supporter mon poids,

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4. Les heuristiques
Vu qu’on n’a pas suffisamment de ressources (attention et mnésiques) pour rassembler toutes les infos
nécessaires ni pour en tenir compte, on va donc utiliser des heuristiques afin de réaliser des jugements. Les
heuristiques sont des raccourcis qui permettent d’atteindre des conclusions rapides qui sont souvent
pertinentes et mènent souvent à des réponses correctes mais ce n’est pas toujours le cas.
Les exemples de causes possibles de décès proposées ont servi d’indices de récupération que l’on connait
et nous donnent l’impression que la probabilité est plus élevée.
Expérience de Mandel (2005) : Il demande à ses participants : « Quelle est ma probabilité de mourir lors de
vos prochaines vacances d’été ? » est jugée moins probable que la question « Quelle est ma probabilité de
mourir d’une maladie, d’un accident de voiture, d’un crash en avion, ou de toute autre cause pendant vos
prochaines vacances d’été ? »
a. Dans les jugements qui se basent sur des heuristiques, les jugements dépendent de la façon dont les
questions sont formulées.

a) Heuristique de disponibilité :
Les événements dont on se souvient plus facilement sont jugés comme plus probables que les événements
dont on se souvient moins bien.
Expérience de Tyersky & Kahneman (1973) : On demande à participant si c’est plus probable de trouver mot
qui commence par la lettre R ou des mots dont le 3e lettre est R. Résultat : 70 % choisissent la 1ère option (ex :
run, rain, real), même si elle est 3X moins fréquente que la 2ème (ex : word, car, arranged). On peut
comprendre ce phénomène car en termes de mémoire, c’est plus facile der trouver des exemples de mots
sur base de la première lettre que de se baser sur la 3e lettre.

Expérience de Lichtenstein et al (1978) : on demande à des participants de dire quelle est la cause est de
décès la plus fréquente entre 2 mots (ex : Homicide vs Appendicite). On voit que quand c’est une cause dont
on entend souvent parler, ils sont plus corrects dans leur jugements :

Les cause de décès qui retiennent l’attention sont jugées plus fréquentes que d’autres. (Ex : le botulisme a
mené à 41% de choix erroné et c’est à cause du fait que c’est moins connu que l’asthme).
Quelles sont les sources qui influencent nos jugements ?
Pachur et Al ont testé 3 sources de disponibilité de l’info qui influencent nos jugements :
1) Expérience personnelle
2) Expérience totale (expérience personnelle + couverture médiatique)
3) Heuristiques d’affect : pour la mesurer ils ont demandé aux participants de juger la crainte qu’ils
ont envers diverses causes de décès possible

Ce qui influence le plus leur jugement de probabilité des personnes est leur expérience personnelle (si on
a été confronté à une cause et pas une autre, on va avoir tendance à juger la cause qu’on a connu comme
plus probable). L’affect est un prédicteur important car plus une cause nous fait peur et plus on la juge
probable.

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b) Heuristiques de représentativité :
Les jugements sont réalisés sur base de la ressemblance entre un événement/un item et un autre item ou
un groupe donné.
La probabilité que A soit un membre du groupe B est déterminée par la ressemblance des propriétés de A
avec les propriétés associées au groupe B.
Exemple : On tire au hasard un homme dans la population américaine. Cet homme est Robert, il porte des
lunettes, parle calmement et lit beaucoup. Est-il plus probable que Robert soit bibliothécaire ou fermier ?
Sur base de ces infos, il est plus probable qu’il soit fermier car aux USA il y a plus de fermiers que de
bibliothécaires ! Fait connu des sujets ? Mais on peut être influencé par le fait que Robert ait des
caractéristiques stéréotypes de bibliothécaire (lunettes, calme, lit beaucoup, etc.).
Cette proportion de personnes qui appartient à un groupe donné ou d’évènement donnée s’appelle le taux
de base : proportion relative de différents groupes dans la population (ex : % de fermier ou de bibliothécaire)
ou la probabilité attendue d’un événement. On va avoir tendance à formuler notre jugement sur base de ce
stéréotype (heuristique de représentativité) et oublier de tenir compte que dans la population il y a + de
fermiers que de bibliothécaires.
La négligence du taux de base est un exemple d’utilisation de l’heuristique de représentativité.

Donc sur base de l’heuristiques de représentativité, on peut souvent ignorer lors de jugements de probabilité
de base ! Exemple : dans un groupe de 100 personnes, il y a 70 avocats et 30 ingénieurs. Quelle est la
probabilité qu’une personne choisie au hasard soit un ingénieur ? On répondra : 30%. Mais si on dit : « Jack
est un homme de 45 ans tiré de ce groupe. Il est marié avec quatre enfants. Il est généralement conservateur,
prudent et ambitieux. Il ne s'intéresse pas aux questions politiques et sociales et consacre la plupart de son
temps libre à ses nombreux hobbies, tels que la menuiserie, la voile et les énigmes mathématiques ». Quelle
est la probabilité que Jack soit ingénieur ? On a tendance à dire que c’est plus probable qu’il soit ingénieur
car avoir vu des infos descriptives va influencer nos jugements qui vont prendre le dessus sur la répartition
des différents groupes de population. La description de Jack nous fait plus penser à un ingénieur qu’à un
avocat du coup on néglige le fait que parmi les 100 personnes, il y a plus de chances de tomber sur un avocat.
C’est le phénomène de négligence du taux de base.

On utilise le taux de base quand c’est la seule info disponible, mais il tend à être négligé en présence d’infos
descriptives (correspondant à un stéréotype). Le fait de recevoir des informations descriptives sur une
personne va influencer notre jugement et cela peut prendre le dessus sur la répartition des groupes dans la
population.

• Base rate neglect et théorème de Bayes

Rappel : La négligence du taux de base est un exemple d’uilisation de l’heuritsitque de représentativité. Le


taux de base c’est la proportion relative de diférents groupes dans la population, la probabilité attendue
d’un événement.
Expérience de Kahneman & Tversky (1972), ils lisent ce texte aux participants :
Un taxi est impliqué dans un délit de fuite. Il y a deux compagnies de taxi dans la ville, Vert et Bleu. 85% des
taxis de la ville sont verts et 15% sont bleus. Un témoin a identifié le taxi comme un bleu. La Cour teste sa
capacité à identifier la couleur dans les conditions de visibilité pertinentes. Le témoin identifie la couleur
correctement dans 80% des cas et se trompe dans 20% des cas (« vert » si bleu et vice versa). Quelle est la
probabilité que le taxi impliqué dans l’accident soit bleu plutôt que vert ?

b. Le taux de réponse majoritaire = 80% et le taux de réponse correcte : 41%

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Probabilité que le taxi soit bleu étant donné que le témoin dit bleu (théorème de Bayes) :

La réponse = 41% de chances que le taxi soit bleu

La probabilité d’être réellement infecté par le covid quand le test XYZ est positif (chiffres fictifs) :

La réponse = 96% de chances d’être infecté

La probabilité d’être infecté par le covid quand le test XYZ est positif (chiffres fictifs) :

La réponse = 26% d’être réellement infecté

Le taux est beaucoup plus bas dans le cas réel. On voit que le test a gardé les mêmes propriétés mais ce qui
a changé c’est la probabilité d’être réellement infecté. Quand le taux d’infection est bas, les faux positifs ont
plus de poids. Ceci nous montre que le taux de base est important à prendre en compte et qu’on peut
facilement se tromper si on n’en tient pas compte.

Expérience de Walters et al : Cette erreur peut être également commise par des professionnels dans la
pratique clinique. Ici on doit évaluer le risque de récidive d’un prisonnier masculin dans les deux ans, pour
savoir si on peut le libérer ou pas. On fait passer des tests de risque à chaque prisonnier qui nous donnent
une indication. Mais on doit aussi tenir compte du taux de base de récidive (dans une population
équivalente). La population équivalente ce sont des hommes canadiens. En l’occurrence, après libération, ils
ont 38,5% de chances de récidiver dans les 2 ans. Il faut prendre ce taux de base en compte pour calculer le
risque de récidive d’un prisonnier. On constate dans cette étude composée d’experts et d’étudiants, que le
taux de récidive (taux de base) est correctement pris en compte par seulement 20% des personnes ! Dans
51% des cas ils surestiment le risque. Certaines personnes (2/3) disent qu’ils tiennent compte du taux de
base. Mais parmi ces 2/3 des participants, seulement 1/3 en tiennent compte de manière correcte. C’est
quelque chose d’important à garder en tête quand on commet une erreur de jugement dans la vie
quotidienne car cela peut avoir un impact sur les autres.
L’attention est portée sur les info individualisantes au détriment du taux de base. On se focalise plus sur les
stéréotypes que sur le taux de base. Mais il peut être mieux pris en compte dans une situation familière et
dans une situation dans laquelle il y a une grande motivation à être correct. On fait alors moins d’erreur dans
ces deux situations. Ex : On dit a de participant qu’ils vont faire un test de salive qui indique une maladie s’il
devient bleu. Dans ce cas-là ils vont être + motivé à trouver si le test rapporte une erreur ou pas.

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• Erreur de conjonction

C’est une autre erreur liée à l’heuristique de représentativité.

Tversky et Kahneman (1983), lisaient la proposition suivante au participant :

Pourquoi ? Car le descriptif de Linda s’apparente à certains stéréotypes de personnes


qui s’intéressent au féminisme, mais c’est une erreur de conjonction. Il est toujours
moins probable d’être banquière et féministe que d’être juste banquière. Les
banquiers féministes sont un sous-groupe de tous les banquiers. Il est donc plus
probable que Linda soit banquière tout court.

c. La violation de la règle est donc due à l’usage de l’heuristique de représentativité (stéréotypes).

Cependant cette erreur de conjonction peut jouer un rôle en pratique dans note
profession. Voici un exemple dans le domaine des ressources humaines : quand on
fait face à quelqu’un qui a souvent changé de job au cours de sa vie, on peut se dire
que c’est une personne conflictuelle. Mais c’est plus probable que la personne
change juste de job sans être conflictuelle que l’inverse car ce groupe de personnes
qui change souvent de job et qui génère des conflits est un sous-groupe plus petit
que celui des personnes qui changent juste de job.

Lorsqu’on est face à des patients c’est pareil, on pourrait associer le fait d’avoir été
maltraité pendant l’enfance à un diagnostic du trouble de la personnalité borderline. Sans
d’autres infos il faut se méfier car ce le groupes de personnes maltraitées à l’enfance avec
borderline est plus petit (donc moins probable) que les groupe qui sont uniquement
borderline.

Donc, la probabilité de la conjonction de deux évènements (A et B) ne peut être plus haute que la probabilité
d’un élément seul (A ou B seuls)

• Biais de confirmation

Expérience de Wason 1960, il dit au participants :

On vous donnera trois numéros qui se conforment à une règle simple que j'ai en tête... Votre but est de
découvrir cette règle en écrivant des séries de trois nombres avec les raisons de votre choix. Après avoir noté
chaque ensemble, je vous dirai si vos nombres sont conformes ou non à la règle. Lorsque vous serez
convaincu d'avoir découvert la règle, vous l'écrirez et me direz ce qu'elle est.

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On doit découvrir la règle qui s’applique à ces 3 chiffres : 2 , 4 , 6 ...


Les participants testaient une règle en proposant des chiffres à l’expérimentateur pour voir si elle se
confirmait. Quand ils pensaient être sûr de la règle, ils énonçaient la règle à l’expérimentateur qui leur disait
si c’était correct ou non. Quand ce n’était pas correct ils redonnaient une série de 3 chiffres pour voir si elle
colle avec une règle ou pas.

ð Seulement 21% ont énoncé la règle correctement dès la première tentative. Et 28% ne trouvent jamais
la règle.

L’aspect important ici c’est que pour trouver la règle et être certain de celle-ci, il faut créer des séquences
qui ne satisfont pas à notre hypothèse, il faut essayer de falsifier la règle. Il aurait été possible qu’on ait une
idée en tête, une hypothèse, comme le fait de toujours avoir des incréments de deux, si on s’obstine avec
cette règle en proposant toujours que des séries qui augmentent de 2, l’expérimentateur nous dirait toujours
que ça correspond à la règle mais c’est un biais de confirmation car on cherche à tout prix à confirmer la règle
que l’on a en tête. Il faut donc falsifier la règle qu’on a en tête et utiliser plutôt l’approche de falsification que
celle de la vérification.

Exemple : Si j’ai en tête que la règle = incrément de 2, je falsifie en


proposant d’autres incréments comme : 1,2,3. Si mon hypothèse est que
ce sont des nombres croissants, je donne des séries de chiffres
décroissants comme : 3,2,1

Le biais de confirmation consiste à favoriser les infos qui confirment une hypothèse au détriment de celles
qui vont l’invalider. Ça pose problème car on voit le monde en fonction de nos croyances et on ne se met
jamais dans une situation qui dissuade notre croyance, car on cherche toujours des infos confirmatoires.
Ex : Un clinicien cherche à confirmer qu’un patient borderline a été abusé comme le veut notre
croyance, et s’il essaye sa croyance, en faisant des suggestions à la personne, elles vont peut-être
influencer la personne et commencer à perturber la mémoire qu’elle a de son passé (comme on l’a
vu auparavant dans le cours)

Il faut avoir une certaine méfiance face à ces biais et savoir rester dans une approche de falsification afin de
tester les choses de manière scientifique. Car comme l’a dit Karl Popper : « Une théorie est scientifique ssi
elle est falsifiable ». C’est ce qu’il faut garder en tête tous les jours dans le métier de chercheurs

c) Schéma récapitulatif

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Les préjugés et les stéréotypes peuvent former des heuristiques qui vont influencer nos jugements. Ces
heuristiques sont utiles car nous avons des limitations mnésiques. On ne peut pas prendre en compte toutes
les infos à disposition et on ne peut pas se rappeler de toutes les infos pertinentes pour faire de jugements
corrects. Les heuristiques permettent de donner de jugements rapides et sans effort (cela est utile vu qu’on
fait des jugements sans cesse tous le jours). Elles nous aident à ne pas être débordé en permanence.
L’avantage, contrairement à des algorithmes qui prennent en compte toutes les infos, elles peuvent être
utilisées même lorsqu’on a très peu d’infos à disposition car on peut se servir de nos vieux stéréotypes pour
faire des jugements qui la plupart du temps seront plutôt corrects.

5. Théorie des deux processus


Kahneman nous a propose cette théorie de deux processus qui permet de mettre en lien tous ces modes de
fonctionnement des processus rapides et des processus plus délibérés. Il nous propose qu’il y ait un premier
type de processus (système 1) et un deuxième type de processus (système 2) :

Selon cette théorie, les processus de type 1 permettent de générer une intuition sur un jugement. Ce
jugement réalisé de manière rapide peut être remis en question par une analyse plus délibérée et rationnelle
(processus analytique de type 2).

Voici un 1er exemple : « Une batte et une balle coûtent 1.10$ au total. La batte coûte 1$ de + que la balle.
Combien coûte la balle ? »
d. La réponse intuitive est 0.10$ mais c’est faux car dans ce cas la différence entre la batte (1$) et la balle
(0.10$) est de 0.90$. La réponse correcte est ainsi 0.05$. Il faut donc mettre en œuvre une méthode plus
consciente pour aboutir à la bonne réponse.

En voici un autre : « Cela prend 5 minutes pour 5 machines de fabriquer 5 objets. Combien de temps
mettraient 100 machines à fabriquer 100 objets ? »
e. La réponse intuitive est 100 minutes mais la réponse correcte est 5 minutes, il faut là aussi mettre en
œuvre une méthode plus consciente pour trouver la bonne réponse.

De Neys reprend le problème de Linda la banquière (cf p.74) pour tester cette théorie des 2 processus. Il
constate que les participants qui répondent correctement (système 2 : « banquière ») prennent 40% de
temps en + que ceux qui répondent incorrectement (système 1 : « banquière féministe »). On voit donc bien
que le système 1 à l’œuvre donne une réponse rapide mais pas forcément correcte face au système 2 qui est
plus lent mais qui donne une réponse + correcte. De Neys décide de mettre les participants dans une
condition de double tâche et donc les participants devaient répondre au problème de Linda tout en réalisant
une autre tâche. On constate que les erreurs dans cette condition sont + nombreuses qu’en simple tâche
(9,5% de réponses correctes vs. 17%). Le fait d’être en double tâche nécessite plus de ressources cognitives
qu’en simple tâche, où toutes les ressources cognitives sont disponibles pour répondre le problème, ce qui
facilite la recherche de la réponse.

Dans une autre expérience, De Neys s’est intéressé à la négligence du taux de base de manière astucieuse, il
décide de créer un conflit entre les 2 systèmes. Dans la situation expérimentale, les participants sont
confrontés à cette proposition : « Une étude a testé 1000 participants. Il y avait 4 hommes et 996 femmes.
On tire au hasard une personne, Dominique. Dominique a 23 ans et termine des études d’ingénieur. Le
vendredi, Dominique aime aller jouer au billard avec ses amis en buvant des bières ». Lorsqu’il demande aux

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

participants de dire si c’est + probable que Dominique soit un homme (système 1 : stéréotype) ou une femme
(système 2 : taux de base – processus plus rationnel) il obtient 20% de réponses correctes.

En condition de contrôle il obtient 95% de réponses correctes. Condition contrôle (sans conflit) : « Une étude
a testé 1000 participants. Il y avait 4 hommes et 996 femmes. On tire au hasard une personne, Dominique. »

Il faut ici tenir compte du taux de base (il y a plus d’hommes que de femmes), il est donc plus probable que
Dominique soit une femme. Les stéréotypes font appel à ce système intuitif qui nous induit en erreur.

En plus de ces 2 conditions (expérimentale avec conflit et contrôle sans conflit), ils ont demandé à leurs
participants de donner des jugements de certitude en demandant à quel point ils étaient sûrs de leurs
réponses (sur 1 à 10). Dans la condition avec conflit, ils étaient moins sûrs (70 % de certitude) que ceux de la
condition contrôle (79% de certitude). Cela nous indique que même s’ils donnent une réponse intuitive en
étant influencés par les stéréotypes, le taux de base exerce une influence au niveau implicite et moins
conscient. Ils détectent l’existence d’un conflit entre le système 1 et 2 ce qui diminue leur certitude par
rapport à leur réponse.

ð La distinction entre le 2 systèmes n’est peut-être pas aussi claire que ce que l’on pensait, peut-être qu’ils
communiquent à un niveau implicite.

En résume : Le processus de type 1 donne des réponses intuitives au problème souvent sur base
d’heuristiques. Ça fournit des réponses rapides qui peuvent être évaluées et éventuellement corrigées par
des processus de type 2 qui sont plus délibérés mais qui demandent plus d’effort.

Une autre question vient à nous, ces deux processus (1 et 2) opèrent-ils toujours de manière séquentielle ?
Et est-ce que cette distinction est catégorique ?

Dans leur expérience, Pennycook & Thompson se sont demandé si on pouvait remettre en question cette
théorie. Ils créent, eux aussi, un conflit entre les 2 systèmes, ils proposent ce texte suivant aux participants :
« Une étude a testé 1000 participants. Il y avait 955 infirmier(e)s et 5 docteurs. On tire au hasard une
personne, Paul. Paul a 34 ans. Il vit dans une belle maison dans une banlieue chic. Il s’exprime bien et
s’intéresse à la politique. Il s’investit beaucoup dans sa carrière ». Les participants doivent dire si c’est +
probable que Paul soit docteur (système 1 : stéréotype) ou infirmier (système 2 : taux de base) ?
Sauf que l’astuce est que les participants doivent donner 2 réponses ; ils disent d’abord ce qui leur vient en
1er à l’esprit, puis donnent une seconde réponse + délibérée.
La prédiction des auteurs est que si le traitement est sériel (type 1 précédant le type 2), ils diront d’abord
« docteur » puis « infirmier ».

Ce qu’ils ont constaté c’est que :


§ ±50% des 1ères réponses tiennent compte du taux de base en répondant « infirmier »
§ Si changement de réponse il y a, 30% tiennent + compte du taux de base que dans la réponse initiale
§ MAIS, 23% tiennent moins compte du taux de base dans leur deuxième réponse, ce qui est étonnant

Les auteurs concluent que cette idée selon laquelle les réponses tenant compte du taux de base s’appuient
toujours sur le système 2 et les réponses tenant compte des infos descriptives s’appuient sur le système 1
est incorrecte. Le traitement semble + flexible que cela.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

De Neys a donné un modèle de logique intuitive : le Logical intuition model, qui dit que le système 1 se base
sur de heuristiques mais serait aussi capable de donner des traitement logiques et basiques. Ces traitements
d’heuristiques intuitifs et logiques seraient suivis par des traitements plus délibérés lorsqu’un conflit est
détecté entre plusieurs sources d’infos. Donc par défaut, on utilise des heuristiques et des règles de logique
simple mais lorsqu’il y a un problème on met en place un système jugement plus délibéré, analytique et lent.
Cela a du sens du point de vue des ressources cognitives. Car lorsque on peut se contenter d’un système peu
couteux pour obtenir des réponses on se restreint à ça mais lorsque on voit un soucis on met en œuvre des
processus plus couteux en termes d’énergie

6. La prise de décision

La prise de décision est le fait de choisir plusieurs alternatives ou plusieurs plans d’action possible.

Est-ce une chance de vivre à une époque où les possibilités et choix sont si nombreux ou cela surcharge-t-il le
système de prise de décision ? (Schwartz, 2004)

Certaines personnes pensent que cette multitude de choix peut surcharger notre système cognitif et nous
compliquer la vie inutilement. D’autres pensent qu’il ne faut rien faire, voici des exemple de tendance à
l’inaction dans une situation de prise de décision :

• Status quo bias


C’est la tendance à l'inaction dans une situation de prise de décision. Ce biais peut être influencé par la
manière dont les choix sont présentés, et ce qui va ou pas, encourager la personne à effectuer une action.

Exemple avec le don d’organe : il y a des pays, comme les USA, où il faut demander concrètement pour être
donneur d’organe car « par défaut » on ne l’est pas. Dans ce pays, même si 85% des personnes sont
favorables au fait de donner ses organes, seulement 28% passent à l’action et se prononcent comme
donneur. Dans d’autres pays comme la Belgique ou la France, tout le monde est donneur « par défaut » et
pour être retirer de la liste il faut faire une action, donc se désinscrire. Dans ces pays seulement 1% des
personne demandent à être retirés de la liste.

On se demande aussi si c’est le genre de connaissances dont les politiciens peuvent se servir pour avoir des
mesures qui sont bénéfiques à tous ou pas.

• Biais d’omission
C’est un autre biais lié à l’inaction, c’est une composante plus émotionnelle car c’est la préférence pour le
risque de dommage par l'inaction par rapport au risque de dommage par l'action : « Je préfère que quelque
chose se passe mal alors que je n’ai rien fait que plutôt faire quelque chose qui déclenche une conséquence
négative. » Ce biais d’omission peut se manifester même lorsque la balance des avantages penche en faveur
de l'action plutôt que de l'inaction.

Exemple avec la vaccination : dans une vieille expérience de Ritov & Baron (1990), ils demandent aux
participants ce qu’ils font quand on leur demande de vacciner leur enfant contre la grippe s’ils savent que :

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- Il y 10 chances sur 10.000 pour un enfant de mourir de la grippe.


- Et le vaccin éradique à 100% le risque d’attraper la grippe mais il a des effets secondaires
potentiellement fatals.

On demande ensuite à la personne quel est le risque de décès acceptable lié au vaccin pour eux ?
Ils acceptent qu’il y ait 5 chances de décès sur 10.000 si l’enfant n’est pas vacciné

On constate donc que le vaccin est refusé même quand le risque est moindre (6 à 9/10.000) que celui lié à la
maladie (10/10.000).

• Pertes et gains
On prendrait des décisions pour maximiser les chances de bénéfices et minimiser les chances de pertes. Mais
est-on capable de peser les bénéfices et les risques de pertes correctement ?
Différents auteurs ont testé les participant avec ces différents types de problèmes :

Problème 1 : Tirages à pile ou face : On vous offre 200€ si c’est pile et vous perdez 100€ si c’est face. Acceptez-
vous ? Le gain moyen attendu = 50 euros par tirage (200 x 5 – 100 x 5), pourtant beaucoup refusent.

Problème 2 : Préférez-vous un gain sûr de 800€ ou 85% de chances de gagner 1000€ et 15% de chances de
ne rien gagner ? La chance de gain est + élevée dans la deuxième option mais les gens choisissent la première :
(800€ x 1 = 800€ comparé à 1000€ x 0,85 + 0 x 0,15 = 850€).

Problème 3 : Préférez-vous une perte sûre de 800€ ou 85% de chances de perdre 1000€ et 15% de chances
de ne rien perdre ? Les gens préfèrent perdre potentiellement 1000€ que 800€ car avec ce choix on a une
petite chance de ne rien perdre (15%), mais quand on fait les calculs, la perte possible est plus grande dans le
deuxième cas que dans le premier !

Donc, intuitivement on n’est pas hyper bon pour prendre des décisions de ce type-là. Il y a ces processus de
type 1 et de type 2 (vus auparavant) qui sont mis en place, on a des préférences sur le moment même, mais
quand on réfléchit un peu plus, on va être capable de prendre une décision rationnelle.

• Théorie de la perspective de Kahneman et Tversky

Cette théorie tente d’expliquer comment les humains prennent des décisions. Souvent, pour prendre une
décision, on identifie un point de référence qui généralement, représente notre état actuel et on cherche à
améliorer cet état et à éviter les risques. En plus on est plus sensible aux pertes qu’aux gains potentiels, qui
est l’aversion pour la perte. La possibilité de perdre quelque chose nous semble plus grave que l’équivalent
en positif en gain.

L’aversion pour la perte peut mener à prendre une décision plus risquée si celle-ci implique la possibilité
d’éviter les pertes (cf problème 3 ci-dessus).

On peut représenter cela de manière graphique. Si on a une perte


donnée ou un gain sur l’axe des X et la valeur subjective sur l’axe
des Y. On a une courbe en S car l’effet négatif d’une perte est
supérieur à l’effet positif d’un gain. Une perte va donc être ressenti
comme plus négatif et désagréable qu’un gain (opposé).

ð L’effet négatif d’une perte est supérieur à l’effet positif d’un


gain.

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• Effet de cadrage (framing effect)


Les décisions sont influencées par des aspects de la situation qui ne sont pas pertinents comme la formulation
d’un problème, la manière dont il est présenté :

La formulation est différente dans les deux problèmes, dans le premier programme on parle de sauver les
gens et dans le deuxième programme on parle de personnes qui vont mourir. Cela influence la manière dont
les participants vont prendre des décision et cela s’appelle l’effet de cadrage.

Quand on a une formulation positive, le choix sera l’option déterministe et quand on a une formulation
négative le choix sera l’option probabiliste. L’effet de cadrage peut s’expliquer par l’aversion pour la perte.
Les décisions prises par les participants cherchent à éviter des pertes « sûres » en termes de décès.

Dans une expérience, Wang et al. (2001) ont montré que l’effet de cadrage survient lorsqu’il y a un enjeu
pour la personne, les enjeux ont de l’importance (grand impact) : quand l’enjeu dans le problème est de 6
milliards de vies humaines, on observe un effet de cadrage mais quand ce sont des extra-terrestres il n’y pas
d’effet de cadrage. Donc le fait de se sentir concerné et l’aspect émotionnel donnent lieu à cet effet de
cadrage

Dans une autre expérience, Wang (1996) à étudié le rôle de facteurs sociaux et moraux, il a utilisé une version
modifiée du problème de la maladie, avec (seulement) 6 patients :

L’hypothèse de Wang c’est que finalement il y a une justice que les participants prennent en compte lorsque
la décision s’applique à leurs proches. Ils se demandent « qui choisir ? » et c’est peut-être plus juste que tout
le monde soit soumis au même destin plutôt que de faire un « choix ».
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Certains auteurs se sont demandé si on pouvait éliminer l’effet de cadrage. C’est ce que Almashat et al
(2008) se sont demandé et la réponse est oui car quand les participants sont encouragés à réfléchir au
problème en listant les avantages et désavantages de chaque option et en justifiant leur décision, on voit que
cet effet de cadrage disparait (Syst. 1 vs. Syst. 2). Les participants réalisent que les choix sont équivalents et
que donc finalement il n’y a plus de préférence envers un type d’option en particulier

• Sunk-cost effect
C’est un autre type d’effet dont on peut tous faire l’expérience. C’est la tendance à poursuivre une entreprise
une fois qu’on a investi des ressources en temps, argent ou efforts (Arkes & Ayton, 1999, p. 591). On a
tendance à persévérer dans l’entreprise dont on ne veut plus, juste pour justifier nos efforts et
l’investissement qu’on a déjà fourni. Voici d’autres exemple pour illustrer cela : regarder un mauvais film
jusqu’à la fin, continuer des études qui nous déplaisent, rester dans une relation insatisfaisante, s’accrocher
à sa théorie pour un scientifique, etc.

Dans une expérience, Dawes (1988) a demandé à des personnes de répondre à un problème pour mettre cet
effet en évidence :
Deux personnes ont payé une avance non remboursable de $100 pour la réservation d’un weekend. En
chemin, les deux personnes commencent à se sentir malades et pensent qu’elles seraient mieux à la maison.
Doivent-elles faire demi-tour ?

La réponse fréquente : « Non, pour éviter de perdre $100. » mais sans se rendre compte que lorsque on va
se rendre là-bas, on ne sera pas bien et en plus cela va encourir des frais supplémentaires comme manger à
l’extérieur, le carburant etc. Finalement ce n’est pas la décision la plus rationnelle car la perte est moins
grande si on n’y va pas !

Cet effet est présent car c’est dur de justifier ses actions auprès des pairs, d’être jugé « bête » parce qu’on a
perdu $100 sans en profiter. Donc l’effet est dû à notre contexte social et au besoin de se justifier.

On constate aussi que lorsqu’on propose des problèmes semblables à des enfants ou certains animaux (souris
ou corbeau) seraient moins affectés par ce biais que les adultes humains (Arkes & Ayton, 1999).

• Rôle des facteurs émotionnels dans la prise de décision

Dans une expérience de Shiv et al (2005), ils testent si les émotions, telles que l’anxiété, nous rendent plus
prudents (aversion à la perte et au risque) . Ils ont comparé 3 groupes différents de participants dans une
simple tache de tirage à pile ou face. Les 2 différents groupes sont :

- Patients avec lésions de régions liées aux émotions (amygdale typiquement)


- Patients avec lésions non liées aux émotions
- Contrôles sains
Ensuite , les participants reçoivent 20 dollars et doivent parier sur 20 tirages. A chaque tirage ils devaient
prendre la décision suivante :
- Garder $1
- Jouer : $1 perdu si pile et gain de $1.5 si face

La meilleure stratégie est de jouer, car au fil de tirage le gain moyen de $.25 par tirage. Voici les résultats des
différents groupe après qu’ils aient soit investi et gagné soit investi et perdu :

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NB : « Tirage précédent » = ce qui s’est passé au tirage précédent (gagné ou perdu). Le chiffre indique le
pourcentage de sujets qui ont joué.

Pour les patients avec lésions liées aux émotions, ils sont plus susceptibles de rejouer qu’ils aient perdu ou
gagné au tour précédent. Pour les deux autres groupes on a des choix différents en fonction de ce qui s’est
passé au tour précédent. Ils jouent moins quand ils ont perdu au tour précédent

Il y a donc quelque chose qui se passe au niveau émotionnel. En jouant à chaque tour on a un gain positif,
mais malgré ça, les patients contrôle (avec lésion et sains), ne tiennent pas compte de cet aspect logique et
sont influencés par leur émotion.

Donc l’aversion au risque est lie à l’émotion. D’après certains auteurs, elle dépendrait de la peur.

L’activité de l’amygdale (liée à l’émotion) servirait de frein et de mise en garde pour ne pas prendre trop de
risque dans la vie, ce qui peut avoir des effets assez bénéfiques (De Martino et al., 2010). Dans des situations
artificielles, la prise de risque est bénéfique mais dans des situations plus complexes, c’est plus utile d’avoir
une inhibition liée à la peur. Cette aversion nous empêche de prendre des décisions insensées qui peuvent
nous mettre en danger. Ex : bien que l’absence d’aversion au risque avantage les patients dans la tâche de
pile ou face, elle les désavantage sans doute dans de nombreuses situations de prise de décision importantes
dans leur vie quotidienne.

7. Le raisonnement

• Relations entre recherche en psychologie du raisonnement et logique

Au début, quand les personnes se sont intéressées au raisonnement il y avait un lien assez étroit entre logique
et psychologie. L’idée de départ était que le raisonnement humain suivait des règles logiques (tel qu’elle peut
se faire en maths etc.) et que les humains sont capables d’effectuer ces raisonnements logiques. Mais
évidemment, ce n’est pas vraiment le cas, les humains commettent des erreurs et ces mécanismes ne font
pas toujours intervenir la logique…

Les erreurs seraient des « ratés » dus aux limitations de la mémoire, de l’attention, etc.

• Rappel de certaines définitions :


Raisonnement : tirer des conclusions à partir des informations à disposition.
Raisonnement déductif : un processus de raisonnement logique partant du plus général vers le plus
spécifique. Toute l’info nécessaire est à disposition pour tirer des conclusions logiques.
≠ Raisonnement inductif : On part d’observations spécifiques pour tirer des conclusions générales. Mais les
conclusion ne sont pas toujours correctes, ce sont des hypothèses dont l’adéquation doit être vérifiée avec
des observations supplémentaires et avec une démarche de falsification afin de mettre les hypothèses à
l’épreuve correctement.

Une autre manière de contraster ces deux types de raisonnement :


Dans le raisonnement déductif, les conclusions d’un raisonnement suivent des prémices avec certitude. Donc
on va parler d’inférence déductive : ce sont des inférences qui à partir de prémices vraies ne peut conduire
qu’à une conclusion vraie.
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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Dans le raisonnement inductif : la conclusion ne suit pas nécessairement les prémices, même si elles sont
vraies. Ex : il y a des corbeaux noirs à Liège donc je conclus que tous les corbeaux sont noirs. Ce n’est pas vrai
alors que mes observations le sont.

• Syllogismes
Dans l’étude du raisonnement déductif, il y a un outil auquel on fait souvent appel ; les syllogismes. Ceux-ci
sont souvent constitués de 2 prémices (affirmations) suivies d’une conclusion. La tâche du participant
consiste à juger si la conclusion est valide sur base des prémices ? La validité de la conclusion que le sujet
doit juger dépend seulement de sa capacité à découler logiquement des prémices. Donc le fait que ça
s’applique ou pas dans le monde réel, que ce soit plausible ou pas est non pertinent dans le jugement que le
participant doit poser.

a) Déduction liée à la quantification

Par quantification on veut parler de formule dans ce genre : « Tous les philosophes lisent des livres ». On
quantifie les philosophes en disant que c’est tout le groupe de philosophes. La plupart d’entre nous, sans
réfléchir, seraient prêts à croire une telle affirmation. Mais pour un logicien, cela signifierait que nous croyons
qu’on ne peut pas trouver un philosophe qui ne lise pas de livre… Or, il y a eu des philosophes avant que les
livres existent. Dans le langage commun, nous utilisons « tous » pour signifier « la plupart », « la grande
majorité » alors que pour les logiciens « tous » recouvre l’ensemble des philosophes que l’on peut trouver
dans le monde.

Ce genre de formulation peut s’utiliser dans les problèmes utilisés pour les participants dans les expériences
sur le raisonnement.

Voici un autre exemple : « Aucun médecin n’est pauvre ». Alors qu’il est possible de trouver des médecins
qui le sont, c’est une formulation qui n’est pas correcte du point de vue logique. En disant cela, nous voulons
en fait dire : « Il y a très peu de médecins pauvres » ou « la probabilité de trouver un médecin pauvre est très
faible ».

Lorsqu’on s’intéresse à la capacité de raisonner, il faut se mettre dans ce mode de langage plus formel qui
est utilisé par le logicien.

Cependant, la recherche sur le raisonnement s’est surtout intéressée à la façon dont nous pouvons raisonner
à partir de l’interprétation strictement logique de ces termes. En particulier, intérêt pour une forme de
déduction liée à la quantification : les syllogismes catégoriques. Il y a quatre types d’énoncés qui sont
régulièrement utilisés :
§ Les prémices universelles affirmatives : tous les A sont B, on parle de l’ensemble des éléments qui
constitue le groupe A.
§ Les prémices universelles négatives : aucun A n’est B
§ Les prémices particulières affirmatives : certains A sont B, on ne parle que de certains membres du
groupe A.
§ Les prémices particulières négatives : certains A ne sont pas B, on parle de certains membres du
groupe B.

Avec ces différents types de prémices on formule différents types de problèmes et voit dans quelle mesure
les participants tirent des conclusions logiques ou pas.

Illustration : Cela peut mener à des performances différentes, pour ces 4 types de prémices on peut
envisager un nombre des situations variables.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

A : L’universel affirmative (tous les A sont B), on a 2 situations


possibles : le groupe A se confond parfaitement avec le groupe
B ou bien le groupe A est un sous-groupe de B !
E : L’universel négative (aucun A n’est B) : on a 2 groupes
séparés et pas d’autre manière de représenter cela.
I : Particulière affirmatives (certains A sont B) : Il existe
plusieurs manières d’interpréter, on a 4 situations qui peuvent
correspondre à cette formulation : on a les 3 premières qu’on
a déjà vu précédemment, plus la dernière où on peut avoir une
intersection entre les 2 groupes (A et B) avec certains A qui
sont B (ou certains B qui sont A).
O : Prémices négatives (certains A ne sont pas B) : on a 3
façons de représenter correctement cette formulation.

Dans les expériences proposées a des participants, un syllogisme catégorique contient généralement 2
prémices et une conclusion que les participants doivent évaluer et décider si c’est valide du point de vue
logique ou pas.

Par exemple : « Tous les A sont B. Tous les B sont C. Donc tous les A sont C ». La plupart des gens considèrent,
à raison, que ce syllogisme est valide, ce qui est juste.

Beaucoup acceptent aussi le syllogisme suivant : « Certains A sont B. Certains B sont


C. Donc certains A sont C ». Or, cette conclusion n’est pas valide. Les humains ont du
mal à réfléchir en termes abstraits. Si on remplace les lettres par de concepts familiers,
A par femmes, B par schizophrènes et C par hommes, on obtient : « Certaines femmes
sont schizophrènes. Certains schizophrènes sont des hommes. Donc certaines femmes
sont des hommes ». On voit que c’est beaucoup plus facile ainsi.

Cet autre syllogisme dont la conclusion est souvent acceptée à tort : « Tous les A sont B.
Tous les C sont B. Donc tous les A sont C ». De manière graphique, on voit aisément que
cette conclusion n’est pas valide :

Par contre il existe des syllogismes qui sont plus facile à évaluer comme : « Tous les A sont
B. Certains C sont B. Donc certains A sont C ». Cette situation a une conclusion qui n’est pas
valide et les participants ont plus facile à rejeter la conclusion. Remplaçons les lettres par
des concepts : « Tous les pingouins sont noirs et blancs. Certains films sont noirs et blancs.
Donc certains pingouins sont des films… »

Il y a des formulations avec lesquelles les participants humains s’en sortent mieux que d’autre.
Mais quelles sont les mécanismes qui mènent à ces erreurs ?

• La théorie de l’inversion
Selon la théorie de l’inversion, les participants auraient tendance à procéder à des
inversions non valides de propositions. Si on se repenche sur les 4 types de prémices,
on voit que certaines peuvent être inversées tout en restant valide et d’autres pas…
Par exemple, on a tendance à supposer que si « tous les A sont B » alors « tous les B
sont A » ou que si « certains A ne sont pas B » alors « certains B ne sont pas A ».

On notera que l’inversion de l’affirmative universelle (« tous les A sont B ») et de la négative particulière
(« certains A ne sont pas B ») ne sont pas valides.

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CEMAN Anita & HANSEN Herbert Cognition et langage (B2 Q2) 2021-2022

Par contre, l’inversion de la négative universelle (« aucun A n’est B » = « aucun B n’est A ») et de l’affirmative
particulière (« certains A sont B » = « Certains B sont A ») sont valides, ces deux types de prémices peuvent
être inversés tout en restant valides.

• La théorie de l’ambiguïté
NB : cette théorie n’est pas mutuellement exclusive avec la précédente.
Selon la théorie de l’ambiguïté, les participants peuvent tirer des conclusions inadéquates parce qu’ils
encodent les prémices de façon incomplète. Il peut y avoir plusieurs manières différentes de visualiser les
choses et ils n’envisagent pas toutes les possibilités impliquées par les prémices, ce qui entraine des erreurs.

Pour pouvoir raisonner de manière logique, il faut combiner chaque interprétation possible de la 1ère
prémices avec chaque interprétation possible de la 2nde prémices pour tester la conclusion et voir si elle est
valide. C’est difficile pour nous, les êtres-humains (comparativement aux machines), de faire cela en raison
des limitations de notre mémoire de travail. Cela est difficile de garder toute les possibilités en tête.

Exemple : voici un problème : « Tous les carrés sont gris. Certains objets gris ont un bord épais ». Le sujet doit,
par exemple, vérifier la conclusion : « Certains carrés ont un bord épais ». Le sujet peut inspecter ce qui se
passe dans le modèle qu’il a imaginé et juger si la conclusion est vraie (cf. image de droite). Le problème est
qu’il y a d’autres interprétations des prémices pour lesquelles la conclusion ne tient pas. On rencontre donc
un problème lorsque les personnes vont générer une seule interprétation mentale possible. Il faut donc
arriver à s’imaginer les différentes possibilités.

• La théorie des modèles mentaux

Ce problème a mené à la théorie des modèles mentaux. Selon cette théorie, la principale source d’erreurs
de raisonnement est un traitement incomplet de l’information et les interprétations varient d’une personne
à une autre.
Soit il y a génération d’un seul modèle lorsque les prémices sont compatibles avec plusieurs modèles, soit il
y a absence de prise en considération de toutes les conclusions qui peuvent être tirées de chacun des
modèles imaginés.
Exemple précédent : il n’y a pas d’information sur le fait que les carrés ont des bords épais ou pas, donc les
2 types de représentation mentale sont valides. Mais il peut y avoir différentes situations comme ceci pour
répondre aux problèmes. On doit donc pouvoir se créer différentes représentations et en fonction de ces
différentes représentations, on peut tirer différentes conclusions tirées de différents modèles.
Donc cette absence de prise en considération de toutes les conclusions qui peuvent être tirées de chacun
des modèles imaginés peut mener à des erreurs de raisonnement :

Une des prédictions de cette théorie : lorsqu’on est confronté à des prémices où il manque des informations
ou bien lorsque les informations sont ambiguës (avec différentes significations possibles), il y a plus de
modèles mentaux que l’on peut générer et donc la tâche de jugement sera difficile à effectuer.

Dans une expérience de Johnson-Laird, on présente aux participants des ensembles de prémices qui peuvent
donner lieu à des nombres différents de représentations mentales. Dans certains cas il y a une seule manière
de se représenter ce qui est décrit dans les prémices, et dans d’autres cas il y a 2 ou 3 manières :

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Résultats :
§ 92% si la génération d’un seul modèle est nécessaire
§ 42% si génération de 2 modèles
§ 28% si génération de 3 modèles

Plus il y a de modèles mentaux qu’on peut se créer à partir de prémices, moins les participants sont capables
de réaliser les jugements de logique de manière correcte. En effet, avec un seul modèle mental, on voit que
les performances sont bonnes et les performances chutent lorsqu’il y a plusieurs interprétations possibles
dans la situation.

• Le rôle du contenu
Selon le point de vue traditionnel, on raisonne tous comme des logiciens, le contenu d’un syllogisme ne
devrait pas avoir d’influence sur le processus de raisonnement. Cependant, cette manière de penser a été
remise en question. Il existe des effets de contexte sur la capacité des personnes à formuler des
raisonnements logiques et il y aurait un impact des connaissances antérieures, des croyances, des désirs, etc.
Les prémices compatibles avec nos connaissances, croyances ou désirs vont avoir tendance à être plus
facilement accepter indépendamment qu’elles soient valides du point de vue logique.

Dans une étude classique, Lefford compare ≠ situations : il présente soit des syllogismes ayant un contenu
émotionnellement neutre, tels que : « Toutes les baleines vivent dans l’eau. Tous les poissons vivent dans
l’eau. Donc tous les poissons sont des baleines » ; soit des syllogismes de même structure ayant un contenu
politiquement ou émotionnellement prégnant, tels que : « Tous les communistes ont des idées radicales.
Tous les leaders syndicaux ont des idées radicales. Donc tous les leaders syndicaux sont communistes ».

Résultat : Pour les syllogismes émotionnellement neutres, on voit que cette conclusion n’est pas valide du
point de vue logique car les baleines et les poissons représentent des groupes bien distincts. On est capable
d’évaluer la conclusion plutôt correctement quand c’est neutre. Pour les syllogismes politiquement ou
émotionnellement chargés, les personnes font plus d’erreurs !

La plausibilité a aussi son importance, une autre étude a été menée sur l’évaluation des performances de
sujets confrontés à 4 types de syllogismes :
§ Syllogisme valide à contenu plausible : « Aucun chien policier n’est vicieux. Certains chiens bien
entraînés sont vicieux. Donc, certains chiens bien entraînés ne sont pas des chiens policiers ». C’est
valide au niveau logique et le contenu est plausible, donc on a tendance à l’accepter…
§ Syllogisme valide à contenu non-plausible : « Aucune denrée nutritive n’est bon marché. Certains
cachets de vitamines sont bon marché. Donc, certains cachets de vitamines ne sont pas des denrées
nutritives ». Cela parait moins plausible, pourtant le syllogisme est valide...
§ Syllogisme non-valide à contenu plausible : « Aucune substance addictive n’est bon marché.
Certaines cigarettes sont bon marché. Donc, certaines substances addictives ne sont pas des
cigarettes ». Conclusion non valide mais contenu plausible…

§ Syllogisme non-valide à contenu non-plausible : « Aucun millionnaire ne travaille dur. Certaines


personnes riches travaillent dur. Donc, certains millionnaires ne sont pas des personnes riches ». Le
contenu n’est pas plausible et le syllogisme n’est pas valide non plus. Cette concordance va nous
aider à juger cette conclusion comme non-valide

On peut le représenter avec un diagramme : « Aucun A n’est B. Certains C sont


B. Donc, certains A ne sont pas C ».

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Dans une étude où l’on compare ces 4 situations qui mettent en balance validité et plausibilité, on obtient
les résultats ci-dessous :
Les personnes ont tendance à accepter les conclusions + souvent
comme valides lorsqu’elles sont plausibles. Lorsqu’il s’agit de
conclusions non-valides, aucune ne devrait être acceptée, pourtant on
voit que les personnes l’acceptent dans 71% des cas quand c’est
plausible et 10% quand c’est non-plausible.

La plausibilité peut induire en erreur, et peut nous conduire à accepter des raisonnements qui ne sont pas
corrects d’un point de vue logique.
Cette influence constitue le biais de croyance qui est cette tendance à accepter des conclusions plausibles
qui sont invalides ou rejeter des conclusions non-plausibles qui sont valides.

• Raisonnement conditionnel
Les énoncés conditionnels sont des assertions du type : « si p alors q ». On a dans ce cas deux parties à la
formulation :
§ Si p : « Si j’ai terminé mon travail avant 17 heures » à antécédent.
§ Alors q : « Alors j’irai à la piscine ce soir » à conséquent.

De là on peut utiliser deux règles d’inférence :


§ Modus ponens : permet d’inférer le conséquent (q) à partir de l’antécédent (p). Si la proposition p
est vraie, on peut conclure que la proposition q l’est aussi. Exemple de règle = « S’il pleut, Nancy est
mouillée. » « Vu qu’il pleut. Nancy est mouillée ».
§ Modus tollens : spécifie qu’étant donné les infos « si p alors q ». Donc si « non-q » (autrement dit, q
est faux), on peut inférer que p est faux. Exemple : « S’il pleut, Nancy est mouillée. Elle n’est pas
mouillée donc il ne pleut pas ». La négation du conséquent veut dire que le conséquent est faux donc
on peut conclure que l’antécédent l’est aussi. Il s’agit d’une conclusion logiquement valide qui
pourrait heurter parce que dans la vie courante, ce type de conclusion n’apparaît pas tout-à-fait
certaine. Infère la négation de l’antécédent (non-p) à partir de la négation du conséquent (non-q)

On constate que lorsqu’on teste des participants avec ces 2 types de règles, ils ont plus de mal à évaluer les
problèmes qui répondent au modus tollens que celui du modus ponens. Une des raisons c’est que dans la vie
quotidienne, on ne réfléchit pas en terme absolu comme les logiciens. Il est + difficile de raisonner avec de
l’info négative (modus tollens) que positive (modus ponens).

Dans ce type de situation, une erreur fréquente de raisonnement est le déni de l’antécédent : « S’il pleut,
Nancy est mouillée. » On me dit « Il ne pleut pas. » Donc « Nancy n’est pas mouillée ». A partir du fait que
l’antécédent est faux (il ne pleut pas), ont conclu que le conséquent n’est pas vrai. On croit qu’on peut tirer
une conclusion valide sur q à partir des énoncés « si p alors q » et « non-p ». Mais rien ne dit dans la règle
que Nancy ne peut pas être mouillée pour d’autres raisons (ex : car elle est à la piscine). Cet erreur consiste
à tirer une conclusion erronée sur base de l’antécédent (d’où le nom).

Si p alors q => Non-p alors Non-q Déni de l’antécédent

Une autre erreur fréquente est l’affirmation du conséquent : « S’il pleut, Nancy est mouillée. » On me dit
Nancy est mouillée. » Donc « Il pleut ». Cette erreur de raisonnement consiste à croire qu’on peut conclure
que p (le conséquent) est vrai à partir des énoncés « si p alors q » et « q ». Ceci n’est pas valide, q est vrai ne
peut pas forcément dire ce qui se passe au niveau de p. Encore une fois, Nancy peut être mouillée pour
d’autres raisons.
Si p alors q => q alors p Affirmation du conséquent

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a) Syllogismes conditionnels

Exemple de tâche qui reprend différentes combinaisons et les participants doivent juger si les propositions
sont : toujours, parfois ou jamais vraies. On utilise une situation abstraite (neutre) afin que les participants
ne soient pas influencés par le contenu. Rappel : le contenu peut nous aider à raisonner de manière correcte
pi nous aider en erreur.

On a ces règles avec à chaque fois l’antécédent et le conséquent :

Pour le 1 : « la balle roule vers la gauche » (=antécédent) est vrai donc on conclut que par le modus ponens
que la conclusion est vraie (car si on a p qui est vrai alors on a q qui est forcément vrai).

Pour le 2 : « la balle roule vers la gauche » (=antécédent), n’est pas vrai car si elle roule vers la gauche,
forcément la lampe ne s’allume pas. Cette conclusion ne peut pas être vraie (donc fausse).

ð Ces deux premières règles correspondent au modus ponens

Pour la 7 : « La lampe ne s’allume pas donc la balle roule vers la gauche » est fausse car par modus tollens vu
que la lampe ne s’allume pas, la balle ne peut pas rouler vers la gauche.
On a non-q donc on doit conclure non-p.

Pour la 8 : « La lampe ne s’allume pas donc la balle ne va pas vers la gauche », c’est toujours vrai car si elle
va vers la gauche la lampe s’allume dans tous les cas.

ð Ces deux dernières règles correspondent au modus tollens.

Pour la 3 et la 6 : la réponse est parfois vraie. Dans la 3 p.ex. on voit : « la balle ne roule pas vers la gauche
donc la lampe s’allume » peut-être que parfois la lampe s’allume pour d’autre raison (donc la réponse sera
vraie). On ne peut pas conclure car on n’a pas assez d’information.

Résultat : Pourcentage de réponses pour les huit types de syllogismes conditionnels. L’astérisque indique la
bonne réponse.

Pour le 1 et la 2 (modus ponens), il y a : 100 % de réponses correct.

Pour la 3 et la 6 (réponses parfois vraies) : 79 et 77% de réponses


correctes.

Pour la 7 et 8 (modus tollens) : il n’y a que 77% et 57% de réponses


correctes. Donc il y a quand même 23% et 39% de gens qui se
trompent !

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En exercice repérer les deux types d’erreurs évoqués précédemment (pour les situations 7 et 8) : pour
rappel on a parlé de :
- Affirmation du conséquent
- Déni de l’antécédent

Pourquoi les participants commettent des erreurs ?


Le « Si » est interprété de manière inadéquate. Avec un « si » l’énoncé est unidirectionnel, de p vers q. Or
les participants interprétent l’énoncé comme s’il s’agissait d’un énoncé biconditionnel, c’est-à-dire
interprétable dans les deux sens, un énoncé comprenant l’expression “si et seulement si”.

Par exemple:

“La coopération reprendra si et seulement si (ssi) la démocratie est rétablie”


n’est pas équivalent à
“Si la démocratie est rétablie alors la coopération reprendra”.

Dans le second cas, la coopération pourrait reprendre pour différentes raisons. Alors que dans le 1er cas,
c’est uniquement si la démocratie est rétablie que la coopération reprendra. Avec un “ssi” on peut aller dans
les deux sens (p vers q et q vers p) alors qu’avec un “si” on va de p vers q mais on ne sait pas de q vers p).

Dans les énoncés biconditionnels (ssi), quand la proposition p est vraie, la proposition q l’est aussi. De même,
quand la proposition p est fausse, la proposition q l’est aussi. On a une relation d’équivalence. Cette erreur
d’interprétation pourrait expliquer les erreurs commises pour les problèmes 3 à 6.

Dans les énoncés conditionnels , on a une relation d’implication alors que dans les énoncés biconditionnels
on a cette relation d’équivalence :

Dans l’implication :
Si p est vrai alors q est vrai, c’est compatible avec notre règle.
Quand p est vrai et q n’est pas vrai on a une violation de la règle,
ce n’est plus compatible.

1=vrai
0= faux

Dans l’équivalence : quand état de p = 1 et état de q = 1 :


comptabilité avec notre règle. De même quand l’état de p = 0 et
l’état de q = 0.

Dans l’implication : Si les patients ont à la pathologie X alors ils montrent le signe Y
Dans l’équivalence : Si est seulement si les patients on la pathologie X alors ils montrent le signe Y.

b) Testing d’hypothèses

• Tâche de sélection de Wason :

On a des cartes posées sur la table, qui peuvent être retournés. Chacune possède un chiffre sur une face et
une lettre sur l’autre face. Tâche : Le participant doit déterminer quelle carte il est nécessaire de retourner
pour évaluer une règle.

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La règle ici est la suivante :

« si il y a une voyelle sur la face d’une carte alors il y a un chiffre pair sur l’autre face de la carte »

ð Si p alors q, c’est un raisonnement conditionnel

Raisonnement : On retourne la carte E car on a une voyelle et si la règle est respectée on aura un chiffre pair
de l’autre côté. On ne peut pas choisir K car on ne sait pas ce qu’il y a derrière les consonnes. La règle ne nous
le dit pas ! Et retourner la carte 4 ? On ne sait pas ce qu’il se passe dans cette direction… Si on a un chiffre
pair, la règle ne dit pas que l’on aura une voyelle de l’autre côté… Et pour la carte 7, on a un chiffre impair et
on regarde si on a une voyelle de l’autre côté ou pas, si c’est le cas on verra que la règle n’est pas respectée.

Réponse : les cartes à retourner sont la carte E et 7.

• Étude de synthèse (Oakford et Chater) :

Ils ont rassemblé toute les études et les articles de recherche où la tâche de Wason a été utilisée et ils ont
rassemblé tous les résultats ensemble.

Résultat : En moyenne la carte E (réponse correcte) a été choisie par 89% des participants. La carte 7, qui
est la moins facile à déterminer, a été retournée par 25% des participants. Les cartes « inutiles » qui ne
permettent pas de tester la règle ont été retournées par 16% (pour la K) et 62% (pour la 4) des participants.
Ils ont pris cette carte car sans doute ils veulent tester les 2 aspects du problème, sans se rendre compte que
ce n’est pas la meilleure technique. Ils sont dans une démarche de vérification et pas dans celle de la
falsification. Rappel : pour tester une hypothèse la meilleure méthode est de tenter de la falsifier.

Comment expliquer ce taux de réussite aussi faible ?

Ils sont victimes du biais de confirmation qui consiste à chercher des informations qui confirment notre
hypothèse (qui confirme la règle) plutôt que de chercher des informations qui l’infirme.

A nouveau, si on utiles des termes qui sont un peu plus familiers,


comme ici par exemple : avec une pathologie X qui a pour
conséquence un symptôme Y, on voit que les participants ont plus
de facilité pour choisir les bonnes cartes pour répondre à ce
problème.

Le fait que des informations soient mises en des termes plus


familiers va parfois nous aider à raisonner de manière plus logique.
Mais ça peut nous induire en erreur aussi lorsque l’information est
plausible mais qu’il y a un conflit avec la validité logique.
Fréquemment les personnes tombent dans le piège et font des
erreurs de raisonnement. Les personnes confondent implication
et équivalence.

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Exemples de questions d’examen :

Réponse : b
Au fil du temps on perd les détails épisodiques. Plus ils sont éloignés dans le temps et plus ils nous semblent familiers.

Réponse : c
Phénomène de plagiat inconscient, on a l’impression d’avoir eu une idée, alors que qurlqu’un l’a déjà eue. On confond
avoir eu l’idée et avoir été confronté à l’idée.

Réponse : b
Dans la rép. b) on a un épisode précis. Piège à la réponse d), c’est une connaissance sémantique, un fait. Aller en
vacances ne correspond pas à un épisode précis.

Réponse : a
Les cubes sont les items pour lesquels la capacité en MDT est la plus faible. Dans la rép. c) les chinois sont meilleurs que
les NZ pour les cubes, or il n’y a aucune raison. C’est donc la réponse a).

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