Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Organisation du manuel
Ce manuel est organisé en trois parties :
I. FONDEMENTS THÉORIQUES
Partie consacrée d’abord à une réflexion sur la littérature, ensuite
aux raisons et aux fins pour lesquelles les textes littéraires doivent
entrer dans la classe de FLE.
II. FICHES PÉDAGOGIQUES. CONSIDÉRATIONS
MÉTHODOLOGIQUES
Ce manuel étant destiné à l’autoformation, les 35 fiches
pédagogiques proposées sont précédées d’une réflexion
méthodologique organisée selon deux axes.
1er chapitre : Comment utiliser les fiches pédagogiques.
Il s’agit alors d’aider les enseignants destinataires à utiliser
immédiatement le matériel disponible qu’ils n’auraient qu’à
adapter à leur situation et à leur objectif particulier.
2e chapitre : Comment créer ses propres fiches pédagogiques
(idéalement dans une dynamique de groupe).
III. FICHES PÉDAGOGIQUES
ANNEXES
Ces trois parties sont complétées par des ANNEXES : tableaux,
glossaire, bibliographie.
Démarche du lecteur
Or, ce produit de l’acte littéraire, reflet d’un être singulier dans la
réalité lisible, visible, du langage, échappe maintenant, une fois
achevé, à son auteur pour rencontrer les autres. En s’emparant de
l’œuvre, ils la recréent par la lecture. C’est ce qu’explique Michel
Tournier : « À peine un livre s’est-il abattu sur un lecteur qu’il se
gonfle de sa chaleur et de ses rêves. Il fleurit, s’épanouit, devient
enfin ce qu’il est : un monde foisonnant où se mêlent
indistinctement – comme sur le visage d’un enfant les traits de son
père et de sa mère – les intentions de l’écrivain et les fantasmes du
lecteur. »5
Sans doute les lecteurs viennent-ils chercher la voix singulière,
unique, de l’auteur, mais sans doute aussi la leur : au-delà de cet
homme, et grâce à lui, c’est l’homme qu’ils rencontrent ; de là la
contemplation durable vouée aux œuvres qui échappent aux modes
et à l’air du temps pour se consacrer à la permanence des questions
et des émotions humaines. Écoutons encore Maurice Blanchot :
« L’auteur voit les autres s’intéresser à son œuvre, mais l’intérêt
qu’ils y portent est un intérêt autre que celui qui avait fait d’elle la
pure traduction de lui-même, et cet intérêt autre change l’œuvre (…)
l’œuvre devient l’œuvre des autres, l’œuvre où ils sont et où il n’est
pas, un livre qui prend sa valeur d’autres livres, qui est original s’il
ne leur ressemble pas, qui est compris parce qu’il est leur reflet. »6
Ainsi donc, ce que nous avons appelé « l’acte littéraire » ne suffit
pas pour qu’il y ait littérature. Il faut encore que cette première
démarche essentielle du créateur soit reconnue par celle des
lecteurs.
Tout d’abord, nous savons pertinemment que tout n’y est pas dit
sur la question. Il resterait d’autres caractéristiques de la littérature
à examiner. Nous en avons seulement rassemblé quelques-unes qui
entraînent nécessairement des implications pédagogiques.
Par ailleurs, chacun des éléments recensés mériterait un
développement plus ample, avec l’exposé de points de vue voisins,
parents mais différents, sur la question traitée, des exemples, etc.
Ce n’était pas compatible avec l’objectif et la taille de ce manuel.
Notre propos est modestement d’alerter le jeune enseignant, si ce
n’était déjà fait, et de lui fournir des pistes pour sa réflexion
personnelle.
On retiendra le schéma suivant :
1 La bibliographie à ce sujet, est abondante. Il est impossible d’en
rendre compte ici.
2 Une expérience menée auprès d’un groupe d’étudiants de FLE
français et allemands les invitait à attribuer selon des degrés le
qualificatif de « littéraire » à une vingtaine de textes courts sortis
de leur contexte et sans le nom des auteurs. Résultat éloquent :
l’extrait de Voyage au bout de la nuit n’était pas du tout littéraire,
alors qu’un texte sorti d’un guide touristique au style
particulièrement fleuri l’était tout à fait, signe que la réflexion sur la
littérature n’était pas superflue… Aucun n’avait refusé l’exercice,
ce qui était pourtant la seule attitude raisonnable.
3 Idéalement seulement, car cela ne va pas sans poser de
problèmes considérables à l’écrivain, qui connaît parfois le
sentiment d’impuissance à dire, ou sans aller jusque là, l’écueil
insidieux de la traîtrise du langage, car, comme le dit Brice Parain
« il y a du jeu dans les engrenages ».
4 Revue Critique, 1947. « Le règne animal »
5 Le vol du vampire. Gallimard, 1981
6 Revue Critique, 1947 « Le règne animal ».
7 Lire Sartre Qu’est-ce que la littérature Gallimard, 1948.
8 On s’extasie sur le fameux vers de Hugo dans Booz endormi
« Un frais parfum sortait des touffes d’asphodèles », sur
l’allitération et sa musique, qu’on dit source pure de sa beauté.
Mais on connaît peut-être aussi la plaisanterie très démonstrative
qui a couru : « Un fou furieux sauta du fossé sur Adèle ». Mêmes
allitérations, même rythme, mais personne ne se pâme, sinon de
rire, tant il est vrai qu’on ne peut faire abstraction de la
signification à l’intérieur d’un contexte. Plus sérieusement, on sait
que Valéry ne dit pas autre chose.
9 Jakobson distingue la fonction référentielle, la fonction
expressive, la fonction impressive, la fonction de contact (ou
phatique), la fonction de métalangage et la fonction esthétique (ou
poétique). Notions qu’il est indispensable de connaître. Consulter
le glossaire à la fin de l’ouvrage.
10 Roger Grenier.
11 On sait aussi ce qu’il advint des écrivains qui, par idéologie,
voulurent rejeter le travail esthétique pour ne conserver que la
fonction référentielle…
12 Barthes distingue la langue « un réflexe sans choix, la
propriété indivise des hommes et non pas des écrivains », le style,
qui « ne plonge que dans la mythologie personnelle et secrète de
l’auteur […] il n’est nullement le produit d’un choix, d’une réflexion
sur la Littérature et l’écriture ». « Il y a le choix général d’un ton,
d’un éthos, et c’est ici précisément que l’écrivain s’individualise
clairement parce que c’est ici qu’il s’engage […] Son écriture est
une façon de penser la Littérature ».
Chapitre 2 Pour quelles raisons
et
à quelles fins les
textes
littéraires doivent-ils
entrer dans la classe
de FLE ?
EXPLOITATION LINGUISTIQUE
EXPLOITATION LITTÉRAIRE
Trois éléments sont à considérer : l’enseignant dans sa fonction
même, les paramètres qui caractérisent l’apprenant, et l’activité
d’exploitation littéraire qui doit servir les deux partenaires, la littérature
et l’apprenant.
◗ Motivations et besoins
Ces deux paramètres ne concernent pas les apprenants quand c’est
l’enseignant qui a décidé l’exploitation littéraire occasionnelle d’un texte
appartenant à la littérature.
Ils concernent ceux qui suivent un cours de littérature comportant
un programme ou un certain nombre de séances. Ils sont très
différents selon que les études, dont le cours de littérature fait partie,
sont obligatoires ou volontaires.
Dans le premier cas, le cours de littérature se situe soit dans la
préparation d’études programmées dans des institutions françaises,
soit dans le prolongement d’études entamées ailleurs et s’y insère. Il
faut alors tenir compte des acquis (connaissance des textes, des
méthodes d’analyse), de la durée du programme, des besoins, parfois
exprimés par une institution partenaire. L’apprenant est évidemment
au centre des choix.
Dans le second cas, celui de l’élection volontaire d’un programme
comportant un cours de littérature, ou simplement d’un cours de
littérature, les motivations de l’apprenant sont variables : curiosité pour
une culture étrangère, goût prononcé pour un art qui relève de cette
culture, ou même, à côté de cette recherche de la rencontre avec
l’autre, volonté de mieux cerner sa propre identité. Sans doute faut-il
aussi tenir compte des acquis, de la durée du programme, des besoins
exprimés par l’étudiant. Là aussi, il est clair que l’enseignant met
l’apprenant au centre de ses préoccupations, mais il a plus de latitude.
L’Unité : l’œuvre
L’auteur l’a voulue telle qu’elle nous est présentée, avec un début,
une fin, et un cheminement qui y conduit. En d’autres termes, l’unité,
dans la littérature, c’est d’abord l’œuvre elle-même, entière. Si on veut
la comprendre, il importe sans aucun doute de comprendre chaque
chapitre ou tel ou tel extrait en eux-mêmes, mais il est capital de
comprendre leur place et leur rôle dans l’économie générale de
l’œuvre, ce que l’on peut résumer par une formule : tout fait sens.
C’est une évidence pour La Chute de Camus.
Prenons les chapitres 3 et 19 de Candide. Voltaire y fait la satire,
respectivement de la guerre, et de l’esclavage des noirs. Il importe de
comprendre ces chapitres en eux-mêmes, mais aussi, si l’on veut avoir
une idée de la signification globale de l’œuvre, de comprendre leur rôle
d’étapes dans le cheminement de la conscience du jeune Candide : il
s’est transformé entre ces deux épisodes, il ne dit plus « Maître
Pangloss me l’avait bien dit que tout est au mieux dans le meilleur des
mondes », mais « O Pangloss… C’en est fait, il faudra qu’à la fin je
renonce à ton optimisme. », « et il versait des larmes en regardant son
nègre ». Sa conscience est en route vers la conclusion « Cela est bien
dit, mais il faut cultiver notre jardin ».
Éventail de discours possibles
Reste à savoir comment interroger l’œuvre entière, l’édifice dans sa
globalité, avec quels outils. On dispose d’un éventail de discours
possibles.
Si l’on se réfère à la réflexion précédente sur la littérature, résumée
par un schéma, la question est d’abord de déterminer ce à quoi l’on va
s’intéresser, ce qui renvoie à un panorama de la critique. Il est hors de
propos d’entrer ici dans l’exposé d’un tel panorama. Outre le fait qu’il
faudrait commencer par un historique, le recensement de toutes les
familles de critiques reconnues et pratiquées aujourd’hui serait trop
long et, à ce stade de notre travail, nous éloignerait de l’essentiel. Il
s’agit seulement pour nous, pour le moment, de repérer le
fonctionnement et les orientations de la critique littéraire.
Revenons à la première ligne du schéma et considérons la famille de
critiques qui s’intéresse aux rapports entre le lecteur et l’œuvre.
Quelle que soit la façon dont elle se pratique, quelle que soit sa
dénomination, c’est de la critique impressionniste, celle du goûteur de
plats. De la plus simple et familière à la plus érudite, elle s’appuie sur
la notion de « valeur ». Tout le monde la connaît sous sa forme très
répandue, qu’on peut lire dans les journaux, les magazines, ou même
dans des revues spécialisées. Son auteur jauge, juge une œuvre en
avançant ses raisons, et dit s’il la trouve aimable ou non. On la
pratique couramment entre amis en s’invitant à lire telle œuvre qu’on a
aimée, ou à se dispenser de la lecture de telle autre qu’on a trouvée
mauvaise. L’interlocuteur sera parfois surpris ; c’est qu’il ne partage
pas l’enthousiasme ou le dégoût de son conseiller. Qui s’en étonnera ?
Car cette critique parle autant du lecteur que de l’œuvre lue, d’où le
qualificatif d’ « impressionniste », souvent utilisé pour la décrier. Elle a
son intérêt, et l’on sait qu’elle est très souvent pratiquée sous couvert
de mettre l’apprenant au centre de l’enseignement. Mais il nous semble
erroné de la faire entrer dans l’arsenal des méthodes pédagogiques.
Pour tout le monde dans la classe, enseignant et apprenants. Pour le
premier, il n’est pas l’objet du cours, quelle que soit la richesse de sa
personnalité. Il est facile d’en convenir. Pour les autres, le
raisonnement est plus subtil. Il oblige à s’interroger sur la finalité d’un
cours de littérature. Cela revient à se demander d’abord pourquoi on
lit. Rassemblons pêle-mêle toutes les raisons qu’on peut invoquer :
s’évader dans un univers étranger, rencontrer d’autres univers que le
sien, s’identifier à d’autres, dialoguer mentalement avec eux, aller vers
une meilleure connaissance de soi, dialoguer entre soi et soi, alimenter
une vie de l’imaginaire qui « double » la vie, ses événements et
sentiments vécus « pour de vrai ». La lecture, dont Proust dit qu’elle
est une amitié13 , nourrit la vie intérieure, toute personnelle, voire
secrète.
Dans un enseignement qui met l’apprenant au centre de ses
préoccupations, le cours de littérature a bien pour finalité de favoriser
cette rencontre entre une œuvre et les lecteurs-apprenants. Ce
dialogue peut avoir lieu immédiatement et/ou plus tard, à la faveur
d’autres lectures, d’autres expériences. Il est une affaire personnelle et
il n’y a pas de confession obligatoire pendant le cours, ni après
d’ailleurs, par le biais d’un exercice qui l’exigerait. Le cours n’ouvre pas
un droit à entrer dans le royaume secret de l’autre. Que cela soit
frustrant pour l’enseignant, c’est un fait : il a mis l’œuvre et l’apprenant
au centre de ses préoccupations, mais il a travaillé pour une fin qui lui
échappe, et qui lui échappe légitimement. Cela dit, il arrive qu’un
apprenant dise spontanément quel retentissement telle œuvre et tel
cours ont produit chez lui, parfois tout de suite, parfois beaucoup plus
tard. C’est un cadeau, qu’il faut recevoir comme tel. Lorsque ces
réactions personnelles surgissent, nous y reviendrons, il faut les
accueillir, notamment dans le premier contact avec le texte, mais en
prenant soin de les faire identifier comme telles. À la rigueur, il est
possible d’inviter les apprenants à communiquer leurs réactions en
proposant un tel sujet de production écrite, par exemple, mais à la
condition que ce soit parmi d’autres sujets. Ils pourraient choisir alors,
librement, de se livrer ou non. C’est ce qui est proposé dans les
Activités complémentaires des fiches. Ce que l’on vient d’évoquer ici,
c’est le retentissement personnel, affectif, qui fait écho à la
personnalité et à l’histoire propre de l’apprenant, et non pas le débat
d’idées. Il aura sa place dans une autre phase qui prolonge la leçon,
lors d’une activité de production orale au cours de laquelle l’enseignant
exerce un rôle d’animateur, ou par le biais d’une activité de production
écrite. Dans les deux cas, l’apprenant peut choisir, là aussi, de donner
son point de vue ou de le réserver.
Notion de grille d’analyse : « UNE vérité »
L’œuvre elle-même est aujourd’hui au centre de la critique. Nous
nous référons désormais à la suite du schéma :
✓ L’auteur ?
✓ Un personnage ?
Extérieur à l’événement ?
Impliqué dans l’événement ?
✓ Contenu ?
✓ Raison éventuelle de ce choix ?
Discours indirect libre (présence
simultanée du narrateur et du
personnage) :
✓ Contenu ?
✓ Intention ?
GENRES SPÉCIFIQUES
Un héros ?
Des épreuves ?
ROMAN Une situation hostile ?
D’AVENTURES Une rupture avec le passé ?
La clandestinité ?
Le succès malgré les épreuves ?
AUTOBIOGRAPHIE Le personnage
AUTOFICTION Sa position par rapport à l’auteur ?
Les procédés de la distanciation ?
Les raisons de la distanciation ?
Les limites de l’authenticité ?
Un témoignage ?
Une autojustification ?
Une dénonciation ?
Dimensions ?
Construction dramatique ?
NOUVELLE Source ? (fait divers ? Autre ?)
Nombre de personnages ?
Informations sur les personnages ?
Éléments de réalité ?
Éléments qui échappent à la réalité
CONTE Comment l’impossible est-il rendu
possible ?
Le héros ?
POÉSIE
Définie ?
FORME Libre ?
Images ?
FIGURES DE DISCOURS Métaphores ?
É
THÉÂTRE
Qui parle ?
Contenu des discours respectifs ?
Des silences signifiants ?
En quoi les discours ont-ils modifié la
situation entre le début et la fin de la
TEXTE
scène ?
Quelle est /quelles sont la/les fonctions
du langage ?
Ces discours proposent-ils une vision du
monde ?
NOTIONS COMMUNES
SUJET À déterminer.
OBJET À déterminer.
É
LITTÉRATURE Témoignage ?
ENGAGÉE Témoignage fiable ?
Les procédés de l’engagement ?
Dire : argumentation ? Montrer : récit ?
Les deux ?
Caractérisation : Satire ? Pamphlet ?
Réquisitoire ? Ironie ? Caricature ?
Les conclusions sont-elles fournies ?
Implicites ?
MODE DE Argumentation ?
PRODUCTION Chronologie ?
DU TEXTE Flux de conscience : addition,
juxtaposition, association d’idées,
d’images, de souvenirs… ?
APPARTENANCE
À Ex. : Existentialisme ? Réalisme ?
UN Naturalisme ? Nouveau roman ?
MOUVEMENT Romantisme ? Etc.
LITTÉRAIRE
COMIQUE
TRAGIQUE
DRAMATIQUE On utilise les définitions de ces notions
LYRIQUE Elles figurent dans le GLOSSAIRE.
FANTASTIQUE
MORAL
Remarques
Ces outils doivent servir à l’enseignant dès le stade de la préparation
de la compréhension de l’écrit. Tous les questionnements présentés ne
sont pas alors pertinents pour ce travail particulier, mais ce premier
travail de compréhension de l’écrit est fondamental pour l’enseignant
lui-même, parce qu’ il l’oblige à s’interroger sur tout, et d’abord sur le
langage, sur ses formes, sur le message qu’il véhicule, et sur
l’utilisation qui en est faite, à prendre du recul, et à estimer quels
centres d’intérêt il veut éventuellement privilégier pour un public qui
rencontre le texte pour la première fois.
Dans un texte, récit, descriptions, portraits, discours direct, etc. sont
souvent mêlés, imbriqués. Il faut pourtant les repérer, s’interroger sur
le traitement de chacun de ces éléments, considérer éventuellement
leur organisation, leur fonction, pour analyser le texte. Il y aura
nécessairement un temps où il faudra reprendre le texte dans son
déroulement et sa globalité.
Pour un extrait de roman, par exemple, tous les questionnements ne
sont pas pertinents. Il se peut qu’il n’y ait ni description, ni discours
indirect libre, par exemple. Nous avons essayé de considérer un
maximum d’éventualités.
Il peut être utile de recourir à plusieurs tableaux. Lorsqu’on examine
le texte de Jean Echenoz (FICHE 26), par exemple, l’examen du
discours fera vite comprendre que ce texte s’apparente au théâtre.
C’est le travail, la responsabilité de l’enseignant de faire un choix
pédagogique pour déterminer les centres d’intérêt qu’il choisit. Cela ne
le transforme évidemment pas en détenteur et transmetteur
autoproclamés de la seule vérité qui soit. Lorsqu’il choisit des centres
d’intérêt et les outils qui les servent, c’est qu’il pense qu’ils sont les
plus rentables pédagogiquement lors de la découverte d’un texte, qu’ils
favorisent la rencontre de l’apprenant avec ce texte dans un cadre
donné, cela ne signifie pas pour autant qu’il prétendra avoir fait le tour
de tout ce qu’on pouvait analyser, ni avoir abordé tous les angles
d’analyse. Cela ne signifie pas non plus qu’il le fasse de façon rigide en
un cours magistral, ni qu’il cantonne les apprenants à cette rencontre
qu’il aurait refermée sur cette première lecture. Nous verrons qu’il peut
très bien ouvrir le travail sur la coopération, la contribution des
apprenants et sur leur écoute. Nous y reviendrons dans le point
suivant et en méthodologie.
Il fait des choix, mais aussi il fait ce qu’il peut faire. Il faut en effet
remarquer que, puisqu’on travaille sur un extrait souvent court, il n’est
pas toujours possible d’utiliser tous les éléments qui constituent un
outil. Si nous reprenons l’exemple de la FICHE 1, on se réfère au genre
illustré par le texte, le théâtre ; mais on ne peut pas aller plus loin que
le statut des personnages, les signes autres que le langage utilisés par
Ionesco, alors qu’on sait pertinemment que l’étude de ce genre
comporterait bien d’autres rubriques.
Il faut enfin se rappeler que les outils ne constituent jamais une fin,
mais un moyen.
Ces outils et ces centres d’intérêt conviennent aussi à des
apprenants français ; on peut aussi avec eux entendre ensuite leurs
lectures du texte, mais le travail ne se déroule pas de la même
manière avec des apprenants étrangers, parce qu’on prend en compte
leur altérité.
◗ Autour de quels axes concevoir cette prise
en compte de l’altérité des apprenants ?
✓ Être conscient de ce qui tient à leur
appartenance culturelle, de ce qui fait
l’altérité du texte par rapport à eux.
• De leurs représentations de la France,
et/ou de celles des pays concernés
par le texte.
• Des représentations dans leur propre
culture : du corps, de la femme, de la
maternité, du couple, de la politique,
de l’argent, des clivages sociaux, de la
vision du monde dominante (Quel
enseignant de littérature ne s’est pas
trouvé devant des apprenants pour
qui l’athéisme, par exemple, est
impensé, culturellement, et
impensable …), etc.
• De la connaissance qu’ils ont de leur
propre culture et du recul qu’ils ont ou
n’ont pas pris.
• De leur situation dans le monde, ce qui
implique la notion de l’évaluation des
distances, par exemple, et de ce que
cela implique.
• De la pédagogie qu’ils ont connue :
méthodes, positions respectives de
l’apprenant et de l’enseignant, la
parole de l’enseignant, celle de
l’apprenant, les exercices pratiqués,
etc. On peut évoquer l’exemple limite,
mais bien réel, d’un groupe
d’apprenants formés à reproduire ce
qu’ils ont dû apprendre par cœur, et
qui sont déstabilisés par une
pédagogie de l’autonomie et de la
communication.
• De ce que les noms des personnages
leur sont parfois totalement étrangers,
qu’ils les identifient mal et qu’ils ont
de la peine à les retenir.
La liste n’est pas close.
Cette conscience est donnée par l’analyse du groupe : homogène ?
Hétérogène ? Culture d’origine ? Est-ce le premier contact avec une
autre culture, ou non ? L’activité se déroule en France ou dans le pays
des apprenants ?, etc. Elle conduira à des choix de comportements ou
de pratiques pédagogiques. L’absence de données précises dans le
cadre qui est le nôtre ici nous limite à évoquer les axes généraux d’une
réflexion à conduire. Il faut en outre être conscient qu’on peut passer à
côté de formes d’altérité qui vont se révéler et qu’on va soi-même
découvrir. Le dialogue interculturel vaut dans les deux sens.
✓ Compenser des ignorances
Il est facile de concevoir les ignorances spécifiques d’un
apprenant étranger qui concernent le contexte, auxquelles il
faudra remédier :
• données historiques : par exemple, les
femmes tondues à la Libération,
l’émergence de la société de
consommation en France dans les années
soixante, la guerre au Liberia et la
situation des enfants-soldats, le débat sur
la fin et les moyens dans l’après-guerre en
France, l’histoire d’un mouvement
littéraire, les thèses de Jdanov, le Sida en
France vers 1996…
• données sociologiques : par exemple, la
hiérarchie des classes sociales et la
mobilité sociale en France à une époque
donnée, l’école en France dans l’après-
guerre, la société martiniquaise dans les
années trente, les mentalités à une
époque et dans un lieu donnés…
• références culturelles : par exemple,
des références religieuses chrétiennes
inconnues d’un public japonais ou chinois.
Elles sont indispensables pour l’extrait de
La chute proposé dans la FICHE 35.
Il faut que toutes ces informations soient
nécessaires et rapportées au texte.
✓ Prévoir des procédures pour que les lectures
éventuelles des apprenants et leur altérité
s’expriment.
On se limite ici à signaler ces procédures. On reviendra
longuement sur la façon et le moment de les mettre en
œuvre dans la Partie II Fiches pédagogiques.
• Annoncer le projet pédagogique, les
objectifs du cours, la façon de
procéder : non seulement c’est une
première marque de respect du partenaire,
mais cette démarche fait qu’il va mieux
adhérer à une entreprise qu’il comprend.
• Accueillir les réactions, notamment
celles qui sont dues à l’altérité des
apprenants, pendant la découverte du
texte. (Cf. Première séquence, en Partie II
Fiches pédagogiques)
• Fournir les informations indispensables
à la compréhension.
• Animer le dialogue interculturel dans
la phase d’activités complémentaires.
FICHE N°.
L’AUTEUR : courte biographie
[Situation du texte dans l’œuvre]
Texte
Éventuellement information particulière
Notes en bas de page
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Repérage des faits de langue
On répertorie ici les faits de langue intéressants offerts
par le texte, par exemple :
1. Le passé composé
2. Le conditionnel, mode de l’imaginaire…
Compréhension de l’écrit
Sollicitations destinées à aider les apprenants à la
compréhension de l’écrit, par exemple :
1. Qui parle ?
2. Établissez la suite des actions qui composent le
récit…
Les corrigés figurent à la suite de chaque sollicitation.
Remarque
Cette fiche représente une fiche type. Elle montre le principe de sa
composition. Suggestion : on peut utilement se référer à quelques
fiches proposées en III. pour voir comment ce principe est illustré.
CRITÈRES DE CHOIX DES TEXTES
Ce choix répond au croisement de multiples contraintes.
◗ Auteurs
Il s’agit d’auteurs français et d’auteurs étrangers francophones du
XXème siècle essentiellement (3 auteurs du XIXème siècle). Certains
textes sont très récents et l’on a fait le pari qu’ils mériteraient
longtemps la contemplation des lecteurs…
Exploitation linguistique
Première séquence
L’objectif est que les apprenants prennent un premier contact
avec le texte et se familiarisent avec la tâche à accomplir, en
collectant toutes les données qui se raccrochent à des cadres
connus, fixes, de nature à les rassurer. Ces données sont
susceptibles de leur fournir un premier faisceau d’indices, une
première approche, et de créer une attente dont ils connaissent,
sinon la nature, du moins les contours.
Reste à savoir comment procéder, étant entendu qu’il est
impossible de proposer une durée unique, et même un déroulement
unique, valable pour tous les textes, de ce premier temps très
ouvert.
Première lecture du texte : Il est préférable qu’elle soit
silencieuse. Si celle-ci est faite par l’enseignant, elle propose déjà du
sens. La seule consigne clairement donnée est de repérer les mots
inconnus et de se servir, au besoin, des notes en bas de page. Elles
sont destinées à permettre la lecture du texte la plus fluide possible,
la moins hachée possible par des difficultés de langue : difficultés de
lexique dans la majorité des cas. La note ne reproduit pas le
dictionnaire ; son unique objectif est de donner le sens du mot dans
le texte, éventuellement sa référence culturelle, pour lever au plus
vite la difficulté de lecture. On a posé comme principe que cette
note était écrite dans la langue cible, le français.
Puis, l’enseignant s’assure de la compréhension du lexique
en répondant aux demandes éventuelles qui lui sont faites. On a
posé comme principe qu’on utilisait la langue cible, le français, mais
on sait que certains enseignants passent par la traduction pour des
apprenants homoglottes de niveau faible. Il peut parfois être utile de
s’assurer aussi d’un point de syntaxe, par exemple en demandant ce
que remplace un pronom (exemple FICHE 3).
Il invite ensuite les apprenants à communiquer, dans l’ordre
où elles viennent, leurs observations, permises par cette première
lecture. Elles peuvent concerner le genre (évident quand il s’agit de
théâtre ou d’un poème, par exemple, puisque cela se voit), le
narrateur, le ou les personnages, leur nom, le lieu où ils se trouvent,
le repérage de ce qui est dialogues/didascalies, du récit, de la
description, ce qui est dit ou fait, la langue (registre, mots
articulateurs, par exemple, éventuellement champ lexical)…, toutes
notions fixes et connues de tous. C’est pendant cette phase très
ouverte qu’on peut entendre des réactions personnelles de type
impressionniste. Il faut non seulement les entendre, mais, sans les
juger ni les rejeter, les faire reconnaître comme telles.
Chaque texte suscitant des observations particulières, il est
impossible d’une part de tout répertorier ici, d’autre part de faire une
liste, une sorte de grille fixe utilisable pour tout texte. C’est le
principe qui est à retenir : on se réfère à des notions qui sont autant
d’outils fixes appartenant déjà au bagage des apprenants, et dont le
maniement, dans ce premier temps, est destiné à créer un premier
éclairage rassurant avant l’élucidation plus rigoureuse qui va suivre.
C’est aussi dans cette phase du travail que l’enseignant
communique les éléments suivants, sans qu’il soit possible de
dire exactement à quel moment il les produit. Tout dépend de ce qui
surgit dans ce moment où l’on accueille ce qui vient « en vrac » des
apprenants.
Une courte biographie : Elle a surtout comme objet de situer
l’auteur dans le temps et dans l’espace, de tracer la grande ligne
d’un itinéraire.
La situation de l’extrait dans l’ouvrage : Il est indispensable
de donner aux apprenants les moyens de comprendre comment le
texte s’insère dans le fil d’une narration – c’est le cas le plus
fréquent – parfois dans l’exposé d’un raisonnement ou d’un itinéraire
(Camus, La Chute, ou Baudelaire, L’Invitation au voyage).
L’information particulière requise par certains textes et qui
constitue un préalable indispensable à la compréhension. L’extrait de
Zobel, par exemple, exige une information sur le contexte de la
Martinique dans les années trente. On rappelle que dans les fiches,
cette information balisée, sur l’histoire ou la société, est parfois à
aller chercher.
On fait enfin la synthèse des informations utiles recueillies pour
établir clairement les bases du travail qui suit.
Deuxième séquence
L’objectif ultime est de s’approprier le contenu informatif global du
texte, essentiellement pour déterminer clairement QUI ? OÙ ?
QUAND ? QUOI ? POURQUOI ? POUR QUOI ?, cette liste n’étant pas
d’une part exhaustive, d’autre part pertinente dans sa totalité pour
tous les textes, et de fournir des indices repérant les articulations
d’un raisonnement, ou, plus largement, la manière de progresser du
texte. Les apprenants doivent pouvoir, à la fin, faire un résumé qui
rende compte du texte.
Comment procéder ?
D’abord relecture du texte. Nous proposons une lecture à voix
haute, par l’enseignant.
On propose ensuite des sollicitations. Rubrique « Compréhension
de l’écrit ».
Elles jalonnent d’abord la progression du texte, les dernières
portent sur sa globalité. Il est donc important de les utiliser dans
l’ordre où elles sont présentées.
Elles reprennent, cette fois de façon systématique, organisée
selon les nécessités du texte, les indices récoltés dans le premier
temps. La très grande majorité reposent sur l’examen du texte :
elles doivent permettre une observation précise ou un relevé de
texte particulier. Quelques-unes sont ouvertes ; elles demandent à
l’apprenant de proposer une explication à ce qu’il vient d’observer.
Elles peuvent être utilisées de deux façons :
✓ Soit que l’enseignant les utilise pour une activité
de compréhension/réception de l’écrit pendant un
cours de langue. C’est l’option qui vient d’être
décrite.
✓ Soit que l’enseignant estime pouvoir faire faire ce
travail à des apprenants d’un bon niveau de
compétence linguistique après le premier temps.
Il utilise alors les sollicitations en préparation du
cours qui, lui, consistera en une vérification de la
compréhension, avec la consigne suivante : Vous
lisez maintenant le texte une seconde fois et vous
répondez dans l’ordre aux sollicitations
suivantes. Dans ce cas, le cours, lui, pourra alors
consister en une vérification de la compréhension
suivie soit d’activités complémentaires, soit de
l’exploitation littéraire (cf. infra), soit des deux.
Remarques
Leur nombre est variable d’une fiche à l’autre.
Elles ne comportent qu’une seule consigne à la fois.
Les corrigés se trouvent immédiatement à la suite de chaque
sollicitation. (sauf « réponse libre » pour les sollicitations
ouvertes).
Troisième séquence
Les Activités complémentaires peuvent faire l’objet d’une
troisième séquence.
Toutes les activités proposées mettent en jeu des compétences
répertoriées dans le CECR, et c’est à ce moment que certaines
d’entre elles vont, en outre, retrouver la prise en compte des
réactions et de l’altérité des apprenants.
Réception orale : Certaines fiches proposent l’écoute de textes
mis en musique.
Production orale quand on propose de dire un poème ou de
faire des exercices de phonétique.
C’est par les activités suivantes que le dialogue entre les
apprenants et le texte s’instaure dans la classe, que l’on touche à la
dimension interculturelle.
Production écrite, selon deux directions : argumentation et
création. On renvoie à toutes les fiches.
Interaction orale pour la classe, ou pour l’apprenant quand il
s’agit d’interpréter du théâtre, quand un débat est organisé sur le
message du texte, ou plus largement quand les apprenants
réagissent au texte et donnent leur(s) lecture(s).
Exploitation littéraire
◗ Éléments à utiliser
Les informations entourant le texte. On renvoie à ce qui vient
d’être dit.
La rubrique « Compréhension de l’écrit ». On renvoie à ce qui
vient d’être dit.
La rubrique « Exploitation littéraire ».
Une partie de la rubrique « Activités complémentaires ».
◗ Comment procéder ?
• Le travail de compréhension de l’écrit
doit impérativement avoir été fait avant
une exploitation littéraire : soit dans le
cadre d’un cours de langue, soit que le
niveau de compétence linguistique des
apprenants soit assez élevé pour qu’on
leur donne en préparation, après la
première séquence exposée plus haut, les
sollicitations de la deuxième séquence. On
vérifiera alors oralement au début du
cours d’exploitation littéraire que le
contenu du texte est compris.
• On utilise une préparation à la leçon
« Pour vous aider à préparer un
commentaire littéraire ».
Elle peut être utilisée par l’enseignant de deux
façons : soit comme un ensemble d’outils
pédagogiques dans le déroulement du cours lui-
même, soit donnée aux apprenants comme travail
préparatoire – difficilement possible avant le niveau
B1 – à faire avant le cours1 . Le « vous » du titre de
cette rubrique désigne donc soit les apprenants, soit
l’enseignant.
Elle se compose de sollicitations en nombre
variable selon les textes. Ces sollicitations visent à
préparer l’étude des centres d’intérêt du texte que
l’on a choisi de privilégier et qu’il est possible
d’étudier dans ce qui est un extrait.
Les corrigés se trouvent immédiatement à la suite
de chaque sollicitation.
◗ La leçon
Elle s’organise autour des centres d’intérêt du texte rassemblés
dans le Plan de leçon des fiches et va tirer parti de tout ce qui a été
fait en amont.
Le Plan de leçon comporte toujours plusieurs centres
d’intérêt. On a choisi de privilégier ceux qui sont vite accessibles
car ils prennent du recul par rapport au message que les apprenants
viennent de comprendre, à des observations qu’ils ont pu faire
confortées par les sollicitations. Dans chaque fiche, ces centres
d’intérêt sont présentés dans l’ordre qui semble le plus pédagogique.
Ils peuvent concerner :
• le message : on a identifié clairement des points
de vue sur un thème (par exemple2 , l’acculturation,
le relativisme culturel, l’enfance/l’âge adulte, les
pouvoirs de l’amour, un aspect de la condition
humaine, une vision du monde, un fait de société,
etc.) et l’objectif visé par ces points de vue. On a
pu aussi les rapporter à un courant de pensée.
• l’utilisation qui est faite du langage : du champ
lexical, des figures du discours, de l’énonciation,
etc., la construction du raisonnement…
• les caractéristiques d’un genre : par exemple,
pour le théâtre, on identifie les différents langages
– ou signes – utilisés, le statut des personnages,
l’utilisation qui y est faite du langage…
Remarques
Parmi les centres d’intérêt, certains concernent l’évaluation de la
validité du texte sur un plan culturel. La méthode qui doit permettre
cette évaluation a été longuement exposée. Rappelons qu’il s’agit
d’abord d’un travail littéraire : quelle est la position de l’auteur sur
tel ou tel fait ? On consulte ensuite les documents de type
« scientifique » sur ce fait ; c’est un travail qui ressortit à l’étude de
la civilisation. Enfin, on compare la position de l’auteur aux données
scientifiques. Si la finalité de cette procédure est bien littéraire (on
situe l’auteur et son texte dans l’histoire des idées, des
mentalités…), il n’en demeure pas moins qu’on a étudié la civilisation
pour cela, avec des moyens adaptés corrects.
Le fait que les Plans de leçon proposent plusieurs centres
d’intérêt ne signifie pas que l’enseignant veuille, ou même puisse,
tous les traiter. Il se peut par exemple, comme on l’a déjà vu, que le
niveau linguistique des apprenants, adapté pour la difficulté du
texte, soit trop limité pour tout ce qui est proposé. Dans ce cas, on
fait non seulement ce que l’on veut faire, mais aussi ce que l’on peut
faire… Il se peut aussi que tel point du Plan de leçon, comme la
versification par exemple, soit très éloigné des centres d’intérêt des
apprenants, et donc à négliger.
Les références au texte illustrant ces centres d’intérêt sont
signalées dans le Plan de leçon, mais elles n’y sont ni développées,
ni explicitées.
Ces Plans de leçon ne proposent aucun minutage. Ils peuvent
aussi être répartis sur plusieurs séances. Là encore, tout dépend
pour cela de l’analyse que l’enseignant aura faite du groupe que
constitue sa classe.
Sauf à utiliser les sollicitations de la préparation, les Plans de
leçon ne donnent pas d’indications sur les moyens pédagogiques à
mettre en œuvre pour servir ces centres d’intérêt. C’est le travail de
réflexion pédagogique de l’enseignant quand il prépare son cours et
qu’il l’adapte aux apprenants particuliers qui sont les siens. Pour des
raisons culturelles, par exemple, ils ne se comportent pas forcément
comme d’autres du même niveau linguistique, ce qui provoque le
recours à des moyens pédagogiques différents.
Le faible niveau de compétence linguistique des apprenants pose
le problème de la langue à pratiquer dans cette exploitation à visée
littéraire. Langue cible ? C’est la réponse idéale. Langue maternelle
des apprenants ? C’est parfois la réponse réaliste.
◗ Activités complémentaires
C’est à ce moment, après la leçon, que l’on propose précisément
de remettre au premier plan les apprenants et leur altérité, dans la
classe d’abord.
On a examiné le texte, c’est maintenant à leur voix de se faire
entendre et de réagir. Le rôle de l’enseignant est alors d’accueillir
des lectures et des réactions qui s’expriment, d’exploiter celles qui
s’offrent au débat collectif. C’est celui d’un animateur. Il va essayer
de recentrer les débats si de multiples directions sont lancées, ou de
proposer des sujets de discussion précis si ce n’est pas le cas. C’est
à cette dernière situation que les fiches espèrent répondre.
On retrouve une difficulté déjà signalée : ce type de prolongement
nécessaire en langue cible n’est possible que si les apprenants ont
un niveau de compétence linguistique suffisant. Les fiches des
niveaux les plus bas, qui se veulent réalistes et qui sont donc
modestes quant à l’exploitation littéraire des textes, proposent peu
d’activités complémentaires strictement littéraires. Cela ne signifie
pas que l’enseignant fasse totalement l’économie de ce moment où
les apprenants réagissent. Comme pour la leçon, il fait ce qu’il peut
faire, dans la langue qui sera efficace…
Ces activités ressortissent à toutes les formes d’exploitation
littéraire : travail sur le message, les genres, le schéma narratif, les
outils (image, métaphore, métaphore filée, caricature…), la
connaissance d’un auteur, d’un mouvement littéraire…
Ces activités ressortissent à de la production et de l’interaction
orales et croisent donc le travail de la langue.
À la suite de cette activité orale, des activités de production écrite
peuvent venir en complément.
• Production orale ou écrite quand il s’agit de débats
ou de réflexion sur un thème (par exemple, tout ce
qui est proposé autour de la littérature engagée, ou
sur l’acculturation), sur le point de vue de l’auteur
(par exemple, sur une vision du monde, sur les
mondes enfance/âge adulte), sur un genre
spécifique (par exemple, le fantastique)…
• Production écrite aussi quand il s’agit de création :
On a vu comment un texte était construit, et l’on
propose un travail d’imitation (FICHES 28, 31, par
exemple). On a utilisé les notions de « fin
fermée/fin ouverte » ; on propose de modifier le
texte et d’écrire une suite cohérente.
• Les propositions des fiches ne sont pas
accompagnées de consignes précises. C’est
pourtant à faire quand on propose un travail à des
apprenants, qu’on connaît leur niveau et ce qu’il est
légitime de leur demander. La plupart du temps, il
s’agit du nombre de mots.
Exploitation civilisationnelle
◗ Activités complémentaires
Elles consistent à demander aux apprenants de faire la recherche
de documents de type « scientifique ». Là encore, le niveau de
compétence linguistique est déterminant.
Les fiches prévoient des activités de ce type, mais ne sont pas
accompagnées de consignes précises. C’est pourtant à faire quand
on connaît le niveau des apprenants et ce qu’il est légitime de leur
demander. Par ailleurs, il est sans doute souhaitable de leur indiquer
les sources à utiliser, les rubriques à renseigner, et le volume
attendu des informations à recueillir.
◗ Les étapes
• 1re étape : Créer les rubriques « Informations
entourant le texte » et « Compréhension de l’écrit »
si ce n’est pas déjà fait.
[Monsieur et Madame Smith, des Anglais, sont chez eux, dans un intérieur
typiquement anglais. M. Smith lit le journal et Mme Smith fait de la couture.
Pendant un long moment, elle parle, parle, parle… M. Smith, lui, fait claquer sa
langue de temps en temps. Brusquement, il se met à parler, lui aussi.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
Plan de leçon
1. Un monde absurde, vide, fossilisé.
Apparence de réalisme que différents
éléments viennent anéantir :
• Le lieu : banal, mais pendule
impossible.
• Le discours : du français, oui, mais
des propos qui se détruisent.
Jamais le discours ne renvoie à une
pensée cohérente. C’est du bruit.
• Les gens : occupations banales,
mais leur langage et leur
conversation en font des
marionnettes incohérentes, vides.
2. Statut des personnages :
Aucune identité, aucune histoire, aucun
élément de psychologie.
Ils sont ce qu’ils disent et ne sont que
cela. Ils sont les supports d’un discours
absurde.
3. Le comique et la tragédie du langage.
• Sources du comique
Opposition entre ce qui est banal et
ce qui est aberrant.
Le grossissement du côté aberrant.
Des bouffons.
• Fonction du comique : révéler la
tragédie du langage.
4. Comment jouer ce texte :
S’appuyer sur l’écart entre le réalisme et
l’aberrant.
Grossir au maximum le côté aberrant.
✓ Jouer ce texte.
✓ Production écrite : inventer un
dialogue où les propos se
contredisent.
[La narratrice est une jeune fille. Elle raconte sa vie jusqu’à l’événement raconté
dans cet extrait. Elle a 18 ans. Elle n’a pas connu son père, résistant pendant la
guerre et aventurier, mort très vite. Il est devenu son héros. Sa mère ne s’est plus
occupée d’elle. Elle vit alors dans une école religieuse très stricte, et elle est
solitaire. Un jour, elle s’en échappe, trouve de petits emplois en espérant que la
vie va commencer. Mais les gens se servent d’elle. Enfin, elle est baby-sitter dans
une famille riche. Mais surprise ! Monsieur et un ami lui demandent un drôle de
baby-sitting…]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
4. Montre-t-elle de l’émotion ?
a. Quand elle agit ?
Non.
b. Quand elle raconte ce qui s’est passé ?
Non, elle donne la chronologie sèche.
c. Qu’en concluez-vous pour son état d’esprit au
moment où elle raconte cette histoire ?
Absence de regret et de remords.
Froideur qui contraste avec son ancienne
envie de vivre.
Plan de leçon
1. Bilan sec d’une vie à peine commencée.
• la répétition : « Même ».
• la certitude que rien ne changera.
« Toujours cinq doigts ».
• Pas de pathos.
2. Ses conclusions
Meurtre de Monsieur.
• Elle tue ce qui la tue. Jusque là elle
ne s’est jamais franchement
révoltée quand on l’excluait,
l’humiliait, qu’on se servait d’elle.
Ce meurtre est pour elle un acte de
vie.
• Elle commet une violence qui casse
cette répétition insipide.
Elle renonce à l’attente de la vie, à
l’espoir.
• Ce meurtre est le dernier acte de vie,
mais comme c’est le dernier, c’est une
forme de mort, donc une sorte de suicide.
3. Le titre : un guide de lecture.
Une inconnue : c’est ce qu’elle a toujours
été, pour tout le monde.
4. Fonction du récit.
Elle est la narratrice de son histoire et
dire/écrire est un acte, ce qui lui reste
quand tout a échoué dans sa vie. C’est
une métaphore de la littérature « Une
littérature désespérée, c’est une
contradiction dans les termes » (Camus).
[Dans une petite ville ordinaire, une étrange maladie se développe : de plus en
plus de gens se transforment en rhinocéros. Bérenger voit ses amis, ses collègues
et toutes les institutions de sa ville se métamorphoser. Il met un pansement sur
son front pour empêcher la corne de pousser. Enfermé chez lui, il est rejoint par
Daisy. Commence alors une vie de couple.]
Daisy
enlevant le pansement, malgré l’opposition de Bérenger
Toujours tes peurs, tes idées noires1 . Tu vois, il n’y a rien. Ton
front est lisse2 .
Bérenger, se tâtant3 le front
C’est vrai, tu me libères de mes complexes4 . (Daisy embrasse
Bérenger sur le front.) Que deviendrais-je sans toi ?
Daisy
Je ne te laisserai plus jamais seul.
Bérenger
Avec toi, je n’aurai plus d’angoisses5 .
Daisy
Je saurai les écarter.
Bérenger
Nous lirons des livres ensemble. Je deviendrai érudit6 .
Daisy
Et surtout, aux heures où il y a moins d’affluence, nous ferons de
longues promenades.
Bérenger
Oui, sur les bord de la Seine, au Luxembourg7 …
Daisy
Au jardin zoologique.
Bérenger
Je serai fort et courageux. Je te défendrai, moi aussi, contre tous
les méchants.
Daisy
Tu n’auras pas à me défendre, va8 . Nous ne voulons de mal9 à
personne. Personne ne nous veut du mal, chéri.
Bérenger
Parfois on fait du mal sans le vouloir. Ou bien on le laisse se
répandre10 .
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Réplique 2 S’agit-il d’une vraie question ?
Non ; question rhétorique.
2. Réplique 5 Que remplace le pronom « les » ?
tes angoisses.
3. Faites la liste des promesses de Daisy.
Je ne te laisserai jamais seul
Je saurai écarter tes angoisses.
Nous ferons de longues promenades.
4. Réplique 11 Rétablissez le lien logique dans la
dernière réplique de Daisy ?
Parce que, puisque.
5. Faites la liste des engagements de Bérenger.
Je n’aurai plus d’angoisses avec toi.
Nous lirons des livres ensemble.
Je deviendrai érudit.
Je serai fort et courageux.
Je te défendrai contre les méchants.
6. Réplique 12 Que remplace le pronom « le »
dans « sans le vouloir… » ?
Sans vouloir faire du mal.
7. Que remplace le pronom « le » dans « on le
laisse se répandre » ?
Le mal.
8. Quels sont les sujets abordés par les
personnages ?
La rhinocérite.
Les pouvoirs de l’amour.
9. Quel est le sujet principal ?
Les pouvoirs de l’amour.
10. Avec les renseignements que vous avez, que
pouvez-vous dire de cette maladie ?
Cette maladie fait que les hommes
perdent leur humanité.
Plan de leçon
1. La rhinocérite :
• Nature de la maladie : les êtres humains
perdent leur humanité. (C’est tout ce
qu’on peut dire selon ce texte).
• Bérenger est extrêmement inquiet : il
surveille son front, a donc peur d’en être
atteint, et il a conscience de sa
responsabilité « Parfois on le laisse se
répandre ». Il a conscience de la gravité
du mal.
• Daisy n’est pas inquiète. Elle se sent à
l’abri de la maladie, non concernée par
elle. Elle n’a pas conscience de la gravité
du mal puisqu’elle propose même des
promenades au jardin zoologique !
2. L’amour :
Ses pouvoirs
Il libère et il valorise l’image que l’on
a de soi.
Il grandit et améliore l’individu
Avec l’amour, un avenir radieux ?
Un thème de conte
Ici, thème réduit à sa caricature : les
promesses s’enfilent en quelques
répliques.
Une menace sur ces pouvoirs : le
décalage entre les deux personnages et la
légèreté de Daisy.
3. Forme théâtrale : les différents langages
théâtraux
Le texte (examiné au point précédent).
Le symbole visuel : le danger de
l’infection matérialisé par la crainte de voir
pousser une corne.
Le jeu des acteurs : scène d’amour
caricaturale : tout est dit en très peu de
phrases.
✓ Production écrite :
Vous partez dans un pays étranger pour
étudier sa langue et vous promettez à vos
parents d’y avoir une vie d’étudiant
modèle.
✓ Interaction orale :
Jouer ce texte en valorisant l’inquiétude
de Bérenger et la légèreté de Daisy.
en 1970)
L’auteur : Il a fait des études de lettres modernes et une
école de cinéma. Son activité s’exerce dans plusieurs
domaines : il est critique, scénariste, réalisateur et
écrivain. Dans ses œuvres pour la jeunesse, il traite
souvent des thèmes difficiles comme l’inceste, le suicide,
le mensonge des adultes, le SIDA (AIDS).
[Marcel est un garçon de 11 ans. Il a trois frères, Tristan, Pierrot et Léo, plus âgés
que lui. Voici l’événement qui va bouleverser sa vie et qu’on lui cache : Léo vient
d’annoncer à sa famille qu’il a le sida. On est en 1996]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension
de l’écrit
1. Qui fait le récit ?
Marcel.
2. À quel temps rapporte-t-il ce qui le concerne
pendant la scène qu’il raconte ?
Le passé composé.
3. §1 Pourquoi Marcel est-il étonné pendant la
scène racontée ?
Il est étonné à cause du silence inhabituel
de sa famille.
4. §1 Que décide-t-il de faire ?
Il se cache pour voir ce que cela veut
dire.
5. Quelle est l’importance des lieux de cette
scène ?
Marcel est caché ; les autres parlent.
Marcel apprend ce qu’on veut lui cacher.
6. Relevez le texte qui annonce que le récit est
celui d’un événement important pour Marcel.
§1 « j’ai vu », employé absolument.
7. Décrivez l’attitude de chaque membre de la
famille.
On relève le texte.
8. Qu’expriment ces attitudes ?
La peur et le chagrin.
9. Quel est le verbe qui, tout au long du récit,
exprime l’événement pour Marcel ?
J’ai vu.
10. En quoi la scène racontée est-elle un
événement pour Marcel ?
Il comprend que quelque chose de très
grave concerne Léo.
Il comprend que c’est un problème de
santé. Il comprend sans doute qu’il s’agit
du sida.
Il comprend qu’on veut le lui cacher.
Il découvre la vulnérabilité des adultes.
Deux : Vous ?
Un : Moi. Du compte-gouttes.
Un : Non.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Comment s’appellent les personnages ?
UN, DEUX.
2. Quel est le sujet de leur conversation ?
Réplique 1 : « Je me demande à quel
moment elles existent vos prétendues
gouttes ».
3. Quelle est la réponse de UN ?
« Elles existent quand il les fait sortir du
compte-gouttes. Avant cela, elles
n’existent pas. »
4. Réplique 5 : Que représente le pronom « il » ?
Le compte-gouttes.
5. Qu’est-ce qu’un trompette ?
La personne qui joue de la trompette.
6. Réplique 7 : Pourquoi cette addition est-elle
impossible ?
Elle est impossible parce qu’on ne peut
pas additionner des choses de nature
différente.
7. Réplique 11 : Que représente le pronom
« les » ?
Les gouttes.
8. Réplique 11 : Que représente le mot « ça » ?
La musique.
9. À quoi sert le compte-gouttes dans ce
dialogue ?
C’est un moyen visuel, simple et amusant
pour expliquer.
10. Quel est le véritable sujet de ce dialogue ?
C’est la musique.
Plan de leçon
1. Statut des personnages :
• Pas de nom, pas de sexe déterminé, pas
d’histoire.
• Ne sont que des supports pour le dialogue
dans lequel les rôles sont répartis.
• Conséquence : peuvent être interprétés
par des hommes et/ou des femmes, l’âge
et le physique n’ont pas d’importance.
Seule condition : que l’oreille de l’auditeur
puisse les identifier facilement pour que le
dialogue soit intelligible.
2. Un dialogue radiophonique :
• L’auteur a voulu que son texte sonne
dans l’air, comme la musique.
• Pour la musique : partition,
instrumentiste, musique qui sonne dans
l’air.
• Pour le dialogue : Le texte écrit
représente la partition, les acteurs sont
les instruments, la musique, c’est ce
qu’entendent les auditeurs.
• Même constat pour les spectacles vivants.
Exemple du théâtre : texte écrit, acteurs,
représentation. Avant la représentation,
ce n’est pas du théâtre, après la
représentation, il n’y a plus de théâtre.
3. Une fantaisie pédagogique :
• Le vrai sujet : Quand y a-t-il de la
musique ?
• Le compte-gouttes : un moyen
pédagogique amusant de conduire un
raisonnement par comparaison. C’est là
que réside la fantaisie.
• Le dialogue : un moyen de conduire un
raisonnement entre celui qui sait, qui
explique et celui qui ne sait pas, puis
comprend.
en 1919)
L’auteur : Il fait des études de lettres, participe à la
Résistance, et entre au journal Combat du temps de
Camus et Pascal Pia dont il restera un ami proche. À
partir de ce moment, il poursuit une carrière de
journaliste (jusqu’en 1960), d’éditeur et d’écrivain,
publiant des romans, des nouvelles, des essais, des
scenarii pour la télévision. Son œuvre, couronnée de
prix prestigieux, est traduite dans de nombreuses
langues.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
Début... sa voisine
1. Qui sont les personnages de l’histoire
racontée ?
Un homme et une femme. On ne connaît
pas leur identité.
2. Où sont-ils ?
Au café.
Assis sur une même banquette.
À deux tables différentes.
3. Qui raconte l’histoire ?
L’auteur est le narrateur.
4. Les connaît-il ?
Non, il se place dans une position où il
voit et entend, témoin invisible.
5. Observez le portrait de l’homme. Observez le
portrait de la femme. Quelle conclusion en
tirez-vous ?
Des gens ordinaires.
Assez semblables.
OBSERVEZ LE DIALOGUE.
4. Quelles informations l’homme donne-t-il sur
lui-même ?
Habite Genève.
Attend un train.
Est dans les affaires.
Aime la solitude, mais vit un moment
agréable.
Conclusion : Rien de franchement personnel.
5. Quelles informations la femme donne-t-elle
sur elle-même ?
Est de Genève.
Ne travaille pas dans le quartier de la
gare.
Aime la solitude, mais vit un moment
agréable.
Conclusion : Rien de franchement personnel.
6. Quels sont leurs points communs ?
Sont seuls.
Aiment la solitude, mais l’ont pourtant
rompue.
Il se lève… fin
OBSERVEZ LE DIALOGUE
8. L’homme et la femme souhaitent-ils se
revoir ?
Tentative pour poursuivre le rencontre.
Tentative avortée
8 Manque de moyen ? NON.
8 Manque d’audace ? OUI.
8 Manque d’envie ? PEUT-ÊTRE.
8 Jugement commun : C’est
dommage !
OBSERVEZ LES COMMENTAIRES DU
NARRATEUR
9. Pourquoi est-il inutile de rapporter la
conversation ?
Parce qu’elle est banale, conventionnelle.
10. Quelle est son analyse du comportement
final de la femme ?
Qu’y a-t-il pour lui derrière le récit des faits
observés ?
« Elle rêve… Le thé est froid » : en
d’autres termes, boire du thé n’était pas
l’essentiel. Quel rêve peut-elle bien faire
après cette rencontre sans suite ?
11. Que s’est-il passé dans le texte ?
L’auteur narrateur raconte et commente
une scène comportant :
Une conversation de bistrot entre un
homme et une femme,
Une tentative pour nouer une relation,
L’abandon de cette tentative.
Plan de leçon
1. Une scène banale
• L’homme et la femme : banals.
« Monsieur et Madame Tout le monde ».
• Une conversation de bistrot typique :
conventionnelle. L’homme et la femme
échangent des banalités, des lieux
communs, et donnent très peu
d’informations personnelles. Le langage
est utilisé dans sa fonction de contact.
• Scène objectivement banale et muette sur
ses protagonistes : on ne peut rien tirer
des informations, ni de la conversation
des personnages sur ce qu’ils pensent ou
veulent.
• Une rencontre anodine et sans suite. C’est
le degré zéro du spectaculaire, c’est une
sorte de non événement.
• Pourtant ce non événement est au cœur
de la nouvelle. Pourquoi ?
2. Le narrateur
Personnage central : C’est l’œil du narrateur qui
interprète la scène.
Sa vision :
• La solitude des êtres : un fait général, une
donnée fondamentale de la vie.
• Une réalité difficile à supporter.
• Le désir de la rompre : conversation
nouée, demande de poursuite par le
téléphone.
• Mais le rêve de vie est plus sûr que la
vie : la rencontre tourne court parce que
les protagonistes ne la veulent pas
vraiment. Ils sont tentés seulement et se
protègent des désillusions.
Une vision pessimiste de la vie exprimée avec
discrétion.
• Les personnages se protègent de la
souffrance possible ; ils n’expriment pas
de grandes douleurs et restent dans le
cadre d’une sociabilité sans risques. Ils
illustrent l’idée qu’à vivre peu, on souffre
peu.
• Un message à lire entre les lignes.
3. Une nouvelle
Conforme à la définition « Récit généralement
bref, de construction dramatique et présentant
des personnages peu nombreux et dont la
psychologie n’est guère étudiée que dans la
mesure où ils réagissent à l’événement qui fait
le centre du récit. »
À cela il faut ajouter que l’histoire racontée vaut
pour la valeur que l’auteur lui fait porter. Un fait
divers, par exemple, atteint une portée
générale dans la nouvelle.
Il s’agit bien d’un récit bref, de construction
dramatique : rencontre d’un homme et d’une
femme seuls, conversation pour briser la
solitude, tentative pour poursuivre la rencontre,
son échec voulu, séparation, rêverie de la
femme.
Mais les protagonistes sont si banals, leur
conversation si stéréotypée, la rencontre ne
débouchant que sur sa fin, que ce texte est le
récit d’un non événement. C’est un récit en
creux. Le texte vaut pour la vision de l’auteur
qui donne une autre dimension à cette scène
en creux.
Des lieux symboliques :
• Le café, lieu des rencontres de hasard,
ouvert sur tous les possibles.
• La gare : trains en partance vers un
ailleurs, vers du nouveau.
Fin ouverte ou fermée ?
• Les personnages ne se reverront pas :
leur rencontre est terminée. Il s’agit
donc d’une fin fermée.
• Mais l’auteur voit la femme rêver. On
n’en sait pas plus. Cela crée une
ouverture sur le contenu de la rêverie
et peut-être des développements
nouveaux dans la vie de cette femme.
III. ACTIVITÉS COMPLÉMENTAIRES
✓ Production écrite :
• Vous êtes témoin de la même
scène. Imaginez ce qui se passe
dans l’esprit des deux
protagonistes.
• Imaginez que cette fin n’est pas
fermée. Racontez.
✓ Interaction orale pour la classe :
• Reprenez le dialogue des deux
personnages.
• Déterminez des couples et jouez ce
dialogue.
[De jeunes garçons se trouvent dans un pensionnat. La vie y est ennuyeuse. L’un
d’eux s’appelle Daniel. C’est un solitaire, passionné par les aventures de Sindbad
le Marin. Il rêve de la mer, qu’il n’a jamais vue. Un matin, ses camarades
découvrent qu’il est parti. La police, tous les adultes le recherchent, mais on ne le
retrouvera jamais. Alors…]
Ils1 ont dit qu’il y avait comme cela, chaque année, des
dizaines de milliers de personnes qui disparaissaient sans laisser
de traces, et qu’on ne retrouvait jamais. Les professeurs et les
surveillants répétaient cette petite phrase, en haussant les
épaules2 , comme si c’était la chose la plus banale du monde,
mais nous, quand on l’a entendue, cela nous a fait rêver, cela a
commencé au fond de nous-mêmes un rêve secret et envoûtant3
qui n’est pas encore terminé.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
§1
Daniel a disparu. Les adultes disent qu’on ne le
retrouvera sans doute pas.
1. Que représente le pronom « nous » ?
Les camarades de Daniel.
2. Qui parle ?
Un des camarades de Daniel qui est en
quelque sorte leur porte-parole.
3. Quel est le mot qui vous indique la réaction
des camarades de Daniel ?
« Rêve ».
§2
4. Arrêtez-vous sur le mot « sûrement ». Les
enfants ont-ils la certitude absolue de ce qu’ils
disent ?
Non.
5. Trouvez un synonyme pour « sûrement »
dans le texte.
Probablement, vraisemblablement
6. Quelles sont les conditions de voyage
supposées par les enfants ?
Train de marchandises.
Daniel est couché sur le plancher.
Sa couverture : un morceau de toile à
sac.
Absence de bagages liés au passé.
7. Comment appelle-t-on quelqu’un qui voyage
comme Daniel ?
Un passager clandestin.
8. Quelles sont les caractéristiques de ces
conditions de voyage ?
Danger.
Inconfort.
Abandon de tout son passé. Daniel est
prêt pour du nouveau.
9. Que représente ce paragraphe par rapport à
ce que vous avez appris au premier ?
C’est le début du rêve des camarades de
Daniel.
10. Quel est le personnage principal de cette
histoire, Daniel ou ses camarades ?
« Nous », c’est-à-dire l’ensemble des
camarades de Daniel puisque c’est leur
rêve qui constitue l’histoire racontée.
Plan de leçon
1. Point de vue de Le Clézio : deux mondes
opposés
Le monde des adultes
• Morne, ennuyeux, enfermé.
• Monde à la sensibilité appauvrie :
les adultes sont résignés à la
disparition d’êtres humains ; ils
sont prêts à oublier Daniel.
Le monde des enfants
• Ils sont épris de nature, d’espace,
de liberté.
• Prisonniers dans la pension, ils
s’évadent et vivent par le rêve,
l’imagination.
• Ils ont besoin de croire Daniel
vivant et sont solidaires avec lui.
2. Daniel, héros d’un récit d’aventures aux
ingrédients traditionnels :
Lieu clos initial : le pensionnat, symbole
de la société dont il est l’émanation.
Évasion
Clandestinité
Rudesse des conditions de l’évasion.
Rupture totale avec le passé : Daniel
n’emporte que son livre.
Un rêve, une obsession : voir la mer.
Goût de l’aventure.
✓ Production écrite :
Les enfants ont commencé un rêve.
Ecrivez une suite.
Daniel est ramené au pensionnat par
les gendarmes quatre jours après son
évasion. Il raconte à ses camarades ce
qui s’est passé.
Y a-t-il un livre qui vous ait
particulièrement inspiré(e) ?
1 Les policiers.
2 En levant les épaules (geste que l’on fait pour montrer son
indifférence).
3 C’est un rêve qui séduit, qui captive très fort.
4 Endroit où plusieurs lignes de chemin de fer se croisent.
5 La porte n’est pas pleine, elle laisse passer la lumière.
6 En produisant un son aigu par le freinage.
7 Terrain en pente le long de la voie ferrée.
8 Seulement.
9 Sindbad le Marin (fait partie des Mille et Une Nuits). Titre réel : Les
Voyages de Sindibad le marin. Sindibad, riche marchand, raconte ses
aventures. Toujours dangereuses, elles se terminent toujours bien.
Ce récit appartient au genre merveilleux.
Fiche 8 J. Anouilh
(1910-1987)
L’auteur : Après des études de droit, il entre dans la
publicité, fait la connaissance de Prévert. En 1928, il
connaît une véritable révélation en assistant à une
représentation de Siegfried de Giraudoux. Il écrit des
pièces de théâtre qui portent une vision pessimiste de la
vie. Pendant la guerre, il adapte des pièces grecques,
connaît le succès et la polémique avec Antigone (jouée
en 1944). Il soutient Ionesco, Beckett, Dubillard. Son
œuvre se répartit en Pièces Noires, Roses, Grises,
Grinçantes, Secrètes, Farceuses, selon leur degré de
pessimisme. Toutes parlent de la nostalgie d’un monde
perdu, pur, idéal opposé au monde réel marqué par la
compromission.
[Après la mort d’Œdipe, ses deux fils, Etéocle et Polynice se sont entretués. Pour
mettre fin aux désordres du pays, Créon, le roi, a ordonné que le cadavre de
Polynice, le mauvais fils, pourrisse sur le sol, et que celui qui oserait lui rendre les
devoirs funèbres soit puni de mort. Antigone, elle, veut enterrer son frère. Elle
transgresse donc l’ordre et se fait prendre. Créon, son oncle, essaie de la sauver,
mais elle refuse. Il doit donc appliquer sa loi et la faire mourir. C’est alors
qu’Hémon, son fils et fiancé d’Antigone, surgit devant lui.]
Créon
…Chacun de nous a un jour, plus ou moins triste, plus ou moins
lointain, où il doit enfin accepter d’être un homme. Pour toi, c’est
aujourd’hui… Et te voilà devant moi avec ces larmes au bord de
tes yeux et ton cœur qui te fait mal — mon petit garçon pour la
dernière fois… Quand tu te seras détourné1 , quand tu auras
franchi ce seuil2 , tout à l’heure, ce sera fini.
Hémon, recule un peu et dit doucement.
C’est déjà fini.
Créon
Ne me juge pas, Hémon. Ne me juge pas, toi aussi.
Hémon, le regarde et dit soudain Cette grande force et ce
courage, ce dieu géant qui m’enlevait dans ses bras et me sauvait
des monstres et des ombres, c’était toi ? Cette odeur défendue et
ce bon pain du soir sous la lampe, quand tu me montrais des
livres dans ton bureau, c’était toi, tu crois ?
Créon, humblement3 .
Oui, Hémon.
Hémon Tous ces soins, tout cet orgueil4 , tous ces livres pleins de
héros, c’était donc pour en arriver là ?
Être un homme, comme tu dis, et trop heureux de vivre ?
Créon Oui, Hémon.
Hémon, crie soudain comme un enfant se jetant dans ses bras.
Père, ce n’est pas vrai ! Ce n’est pas toi, ce n’est pas aujourd’hui !
Nous ne sommes pas tous les deux au pied de ce mur5 où il faut
seulement dire oui. Tu es encore puissant, toi, comme lorsque
j’étais petit. Ah ! Je t’en supplie, père, que je t’admire6 , que je
t’admire encore ! Le monde est trop nu si je ne peux plus
t’admirer.
Créon, le détache de lui.
On est tout seul, Hémon. Le monde est nu. Et tu m’as admiré trop
longtemps. Regarde-moi, c’est cela devenir un homme, voir le
visage de son père en face, un jour.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Réplique 1 : « accepter d’être un homme ».
Quel sens donnez-vous à « homme » ?
Un adulte.
2. Réplique 1 : Selon Créon, comment vit-on ce
passage de l’enfance à l’âge adulte ?
On le vit douloureusement.
3. Réplique 3 : Quel jugement Créon craint-il ?
(Utilisez les informations dont vous disposez)
Créon n’a plus le choix : il doit appliquer
la loi et faire mourir Antigone. Il craint le
jugement de son fils pour cela.
4. Réplique 4 : Quelle image Hémon enfant a-t-il
de son père ?
Hémon a l’image d’un homme tout-
puissant et bon.
5. Réplique 8 : Pourquoi Hémon ne pourrait-il
plus admirer son père ?
Il vient de découvrir que son père a des
limites, qu’il n’est pas un héros tout-
puissant, qu’il est contraint à un acte
cruel.
6. Réplique 9 : « Voir le visage de son père en
face ». Que signifie ici « voir en face » ?
Il s’agit de voir vraiment ce qui existe, et
non d’avoir une vision déformée.
Plan de leçon
1. Une vision du monde
Donnée par deux moyens :
• Le discours du père à son fils.
• Les réactions du fils.
Quelle vision :
• L’enfance : monde protégé, factice,
un paradis à perdre.
• La vie adulte : plongée nécessaire
dans le réel. Il faut renoncer à tous
les mythes de l’enfance, à toutes
les constructions de l’esprit d’un
enfant.
• Le réel est laid.
• Les hommes ne sont pas des
héros, au contraire. Hémon
découvre l’impuissance et les
limites de son père.
• « Vivre avilit ».
• Solitude inhérente à la condition
humaine.
2. Une scène-clé
Elle dit et montre l’intensité de la douleur
du passage :
• Rôle de Créon :
• Il expose sa vision de la vie et
exhorte son fils à basculer dans
l’âge adulte. 2ème naissance,
naissance à la douleur de vivre.
• Un moment difficile : il montre ses
limites.
• Rôle de Hémon :
• Il prend conscience de ce passage
dans la douleur et la stupeur.
Un tournant dramatique :
• Enjeu immédiat de cette
discussion ? La vie d’Antigone.
Hémon ne la sauvera pas ; on le
sait en écoutant Créon.
• Enjeu concernant Hémon : Les
deux personnages sont d’accord
sur la vision de la vie. Créon a
accepté de basculer dans l’âge
adulte, mais que va faire Hémon ?
3. Forme théâtrale
• Importance capitale du langage.
Son efficacité.
• Importance du jeu : il faut montrer
les émotions : le désespoir froid du
père et la douleur du fils, qui perd
Antigone et plus encore.
III. ACTIVITÉS
COMPLÉMENTAIRES
✓ Interaction orale pour la classe OU
production écrite
• Imaginez la suite : Que va faire
Hémon ?
• Vous êtes Hémon et vous vous
révoltez. Racontez.
• Partagez-vous cette vision de la
vie ?
✓ Interaction orale : jouer la scène
Opposition entre le désespoir froid
du père et la violence du chagrin du
fils.
[Un petit garçon de six ans environ vit dans un endroit très isolé avec ses
parents. Il est passionné par le train de luxe qui passe tous les jours devant sa
maison. Il tombe gravement malade ; on croit qu’il va mourir. Le médecin a de
l’amitié pour lui.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1 S’est retourné.
2 De l’autre côté de l’Océan Atlantique.
3 Le fait d’éviter l’effort.
4 Faiblesse, manque de courage devant la difficulté.
5 Douleur, peine, souffrance.
Fiche 10 S. Beckett
(1906-1989)
L’auteur : Né en Irlande, dans une famille protestante, il
apprend très jeune le français, étudie les langues à Trinity
College, puis devient lecteur d’anglais à l’École normale
supérieure à Paris. Il fait la connaissance de Joyce. Il
enseigne en Irlande, puis s’installe à Paris et publie des
traductions. Pendant la guerre, il entre dans un réseau de
Résistance, travaille pour la Croix-Rouge irlandaise en
France.
[Deux clochards se trouvent sur une route, dans un paysage indistinct et désert. Ils
attendent Godot, personnage dont on ne sait rien.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Plan de leçon
1. Thème de l’attente
• Un fait : Deux hommes attendent Godot.
• Qui est Godot ? On ne le sait pas.
• Quel est l’objet de leur attente ? Ils ont fait
une prière à Godot, prière qu’il ne
définissent pas, sinon pour dire qu’elle n’est
pas précise.
• La réponse de Godot ? Pas de réponse, mais
des formules d’atermoiement.
• Seules certitudes : ils attendent et ils
parlent.
2. Le discours des deux personnages
• Volonté de l’entretenir, de le faire durer.
• Ressources : jeu de mots, synonymes, mots
passe-partout de la conversation, fausses
questions, addition de compléments,
humour.
• Accord tacite sur l’entreprise. Les
personnages se renvoient la balle.
• Conversation vide.
• Son but : exister ; on étire tant qu’on peut,
on refuse le silence. C’est un exercice
difficile : On le pratique et on peut se
reposer après. C’est la manifestation la plus
modeste de la conscience.
• Une gageure : comment réussir à parler
pour avoir parlé, et n’avoir rien dit.
3. Message et forme théâtrale : Un texte
métaphorique
• Une métaphore de la condition humaine :
Par leur dialogue, les personnages
illustrent la condition humaine selon
Beckett : l’attente, l’attente d’on ne sait
quoi, attente qui est vaine de toute façon,
et dont on sait qu’elle est vaine. C’est une
vision qui ressortit à l’absurde (sens
philosophique). Dans ces conditions, la
seule ressource de la conscience, c’est
une révolte minimale, modeste : parler
pour exprimer cette lucidité, empêcher le
silence de s’installer. Vladimir et Estragon
n’expliquent pas ces considérations
métaphysiques, ils les illustrent, ils les
jouent par un texte qui est donc
métaphorique.
• Une métaphore de l’acte d’écrire :
Vladimir et Estragon parlent et se
parlent ; c’est un acte social. Ils refusent
le silence. Beckett écrit du théâtre qui est
joué devant des spectateurs. L’écriture dit
l’absurde et par son existence même dit la
révolte de la conscience, illustrant par là
les propos de Camus « Une littérature
désespérée, c’est une contradiction dans
les termes. ».
• Le statut des personnages.
• Un miroir :
Les spectateurs sont partie prenante : ils
sont nécessairement présents pendant la
représentation, on ne joue pas dans une
salle vide. Ils écoutent ce discours qui
n’avance pas, qui existe seulement pour
exister. Ils attendent, et cette attente ne
leur apporte que cela : du temps a passé,
il s’est passé qu’il ne s’est rien passé, et
c’est cela que des êtres humains, eux
compris, se sont dit.
[Azur, un Européen, a été élevé avec son frère de lait, Asmar, par une nourrice
arabe. Elle a raconté la légende de la fée des Djinns aux deux enfants. Devenu
grand, Azur veut retrouver cette fée, mais arrivé dans un pays moyen oriental, il
subit la superstition des gens qui croient que les yeux bleus portent malheur. Il
décide donc de faire comme s’il était aveugle et se fait diriger par un autre
Européen depuis longtemps dans le pays, Crapoux, monté sur son dos.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Avec les explications qu’on vous a données et
les lignes 1 à 3, comment vous représentez-
vous les deux hommes ?
Azur porte Crapoux sur son dos.
Il a les yeux fermés.
Crapoux le guide et l’informe.
Crapoux mendie.
Il ne se donne pas la peine de bien
prononcer l’arabe.
Réplique 2
2. Que voit Crapoux ?
Il voit des éléments caractéristiques du
pays où il est, de sa culture.
3. Qu’en pense-t-il ?
Du mépris « pphh ».
4. Pour lui, qu’est-ce qui est bien ?
Les caractéristiques de sa culture
d’origine, européenne.
5. Que vous apprennent les lignes 12, 13 ?
Il y a beaucoup d’activités dans cette ville.
Il y a beaucoup d’artisans et de savoir-
faire.
6. Répliques 5 et 6 : Pourquoi ne voit-on pas la
princesse ?
Elle est enfermée. C’est la tradition, un
usage culturel.
Plan de leçon
1. Relativisme culturel.
Défini ici en négatif par Crapoux :
• Regard sur l’autre :
Ignorance de ce qu’il est.
Mépris et commisération.
Pour lui, l’autre se définit par des
manques « Ils n’ont pas… »
• Regard sur sa propre culture :
L’instaure a priori comme la référence
unique, le modèle.
Sentiment de supériorité.
Défini en positif par les conclusions à tirer :
• Il ne manque rien à l’autre. (faire la liste
en parallèle de « ce qu’il a »).
• Il est simplement différent.
• Il est stupide et dangereux d’instituer
une hiérarchie des usages et des valeurs.
2. Le vrai voyageur.
• Celui qui est curieux et ouvert à l’autre :
Azur.
• Crapoux s’est déplacé, mais n’a rien
appris, rien vu. Il est perdant.
✓ Compréhension/Réception de l’oral
pour la classe :
Visionner le film Azur et Asmar. Michel
Ocelot 2006. Existe en DVD. Diaphana
édition vidéo.
✓ Interaction orale pour la classe ou
production écrite :
• Commenter les images du film : la
ville où Azur et Crapoux arrivent, les
portraits de femmes, la maison de la
nourrice.
• Vous avez voyagé dans un pays dont
la culture est très différente de la
vôtre. Qu’est-ce que vous avez tiré
de cette expérience ?
• Ce texte est extrait d’un conte. Pour
le moment, Azur est aveugle. Relisez
les informations qui vous ont été
données et imaginez une suite à cet
extrait.
• Pour ceux qui n’ont pas voyagé :
vous pensez à un pays étranger. En
quoi le voyez-vous différent du
vôtre ?
1 Il récite un discours tout fait, sans réfléchir.
2 Discours de celui qui veut vendre quelque chose, par exemple.
3 Formule traditionnelle du mendiant.
4 Ancienne monnaie (l’histoire se passe au Moyen âge).
5 Des paquets, des sortes de rouleaux.
6 Instrument de musique, espèce de flûte simple.
7 Plat traditionnel du sud-ouest de la France.
8 Artisans qui donnent la couleur aux tissus.
9 Artisans qui fabriquent des paniers.
10 Expression idiomatique familière pour dire « très laid(e) ».
Fiche 12 J. Tardieu
(1903-1995)
L’auteur : Il a eu contact avec les écrivains de la jeune
NRF. Dans les années trente, il travaille aux Musées
nationaux, puis chez Hachette et en tant qu’écrivain, il
a d’abord essentiellement une activité de poète.
Pendant la guerre, il fait partie des écrivains résistants.
Après la guerre, il écrit pour le théâtre des pièces très
courtes, dont le sujet essentiel est le langage. Il
travaille à la Radiodiffusion française comme directeur
de France Musique. Cet écrivain – poète, essayiste,
dramaturge, critique d’art, traducteur (Goethe,
Höderlin) – bien que lié aux dramaturges du théâtre de
l’absurde, est moins connu qu’eux car il a beaucoup
pratiqué l’expérimentation.
Monsieur A
Mais, au fait3 ! Puis-je vous demander où vous…
Madame B, très précise et décidée.
Mais pas de ! Non, non, rien, rien. Je vais jusqu’au, pour aller
chercher mon. Puis je reviens à la.
Monsieur A, engageant et galant, offrant son bras.
Me permettez-vous de… ?
Madame B
Mais bien entendu ! Nous ferons ensemble un bout de.
Monsieur A
Parfait, parfait ! Alors, je vous en prie. Veuillez passer par ! Je
vous suis. Mais à cette heure-ci, attention à, attention aux !
Madame B, acceptant son bras, soudain volubile4 .
Vous avez bien raison. C’est pourquoi je suis toujours très. Je
pense encore à mon pauvre. Il allait, comme ça, sans, — ou
plutôt avec. Et tout à coup, voilà que ! Ah la la ! Brusquement !
Parfaitement. C’est comme ça que. Oh ! J’y pense, j’y pense !
Lui qui ! Avoir eu tant de ! Et voilà que plus ! Et moi je, moi je,
moi je !
Monsieur A
Pauvre chère ! Pauvre lui ! Pauvre vous !
Madame B, soupirant.
Hélas oui ! Voilà le mot ! C’est cela !
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Plan de leçon
1. Un langage convenu pour chacun des
personnages, une parole toute faite.
2. Un dialogue convenu : scène de séduction. Les
rôles sont distribués.
3. Fonction essentielle du dialogue : assurer la
fonction phatique du langage (ou fonction de
contact5 )
4. Une comédie
• Distribution des rôles, si convenus qu’il
n’est pas nécessaire de finir les phrases.
• Opposition entre le côté convenu des
gens et un langage fou tel qu’il est offert
ici.
• Conséquence : la scène est caricaturale,
burlesque.
5. La représentation
• Il faut jouer les didascalies, autre langage
théâtral.
• Elle doit exprimer par le jeu des acteurs le
côté caricatural et burlesque que dit le
texte tronqué.
1 Ordinaires, banals.
2 Dont le sens est très clair.
3 Formule orale, comme il y en a dans toutes les langues ; tant que
(OU puisque…) nous sommes là à discuter…
4 Elle parle beaucoup, avec rapidité et facilité.
5 Voir les fonctions du langage selon Jakobson.
Fiche 13 F. Mauriac
(1885-1970)
L’auteur : Il est né dans la haute bourgeoisie bordelaise,
catholique, conservatrice. Après des études de lettres, il
entre à l’École des Chartes, mais très vite se consacre
uniquement à son activité d’écrivain. Il écrit d’abord de
la poésie, mais c’est avec des romans où il peint et
critique son milieu qu’il connaît le succès. Il entre à
l’Académie Française en 1933, s’éloigne de plus en plus
des positions de son milieu, critique les fascistes, entre
dans la Résistance pendant la guerre. Il reçoit le prix
Nobel en 1952 et devient de plus en plus chroniqueur
politique.
[Né d’un mariage malheureux, Guillaume (Guillou) est complètement négligé par
sa famille, derniers représentants d’une classe sociale qui s’éteint, la petite
noblesse terrienne. Il est considéré comme arriéré et a été renvoyé de la pension
parce qu’il salit son lit la nuit. Comme il faut pourtant qu’il reçoive de l’éducation,
sa mère a obtenu que l’instituteur du village le rencontre. Dans l’extrait qui suit,
Monsieur Bordas, l’instituteur, emmène Guillou dans la chambre de son propre
fils, Jean-Pierre. L’histoire se passe dans l’entre-deux guerres.]
Le Sagouin (1951)
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. §1 : Pour Monsieur Bordas, Guillou est mieux
ou moins bien installé que son fils ?
Mieux installé que son propre fils.
2. Début du §2 : Quelles sont les réactions de
Guillou en découvrant la chambre de Jean-
Pierre ?
Étonnement extrême.
Regard sur sa propre chambre car il a
maintenant un élément de comparaison.
3. Milieu du §2 : Guillou évoque le lieu où il dort.
Quelles en sont les caractéristiques ?
C’est un débarras.
Ce n’est pas un lieu personnel.
C’est un lieu sale, puant, usé.
4. Fin du §2 : Quelles sont les caractéristiques de
la chambre de Jean-Pierre ?
C’est un lieu personnel.
C’est un lieu propre.
C’est un lieu doté d’une bibliothèque
personnelle, symbole de sa réussite
scolaire.
5. §3 : Quel sentiment Monsieur Bordas exprime
t-il ?
Il est fier de son fils.
6. §3 : Que signifie le geste de Guillou ?
Il découvre un monde merveilleux.
Il éprouve de l’admiration et du respect
pour ce monde.
7. Caractérisez le narrateur de cet extrait ?
Romancier omniscient.
8. Proposez un titre à cet extrait
Réponses libres.
À
6. À la lecture de ce texte, Guillou vous semble-
t-il arriéré ?
Réponse libre.
Plan de leçon
1. Une étape importante dans la conscience de
Guillou.
Il a une double révélation :
Celle de l’indignité de son traitement.
Celle de l’existence d’un autre
monde.
Par quels moyens :
Le commentaire de Monsieur Bordas.
Et surtout un élément de
comparaison : parallélisme (deux
enfants du même âge, mais
traitements opposés).
Prise de conscience brutale : « Pour la
première fois… » :
Choc émotionnel ; « n’en croyait pas
ses yeux ». Il effleure les livres.
Côté irréversible de l’expérience :
maintenant il sait. Existence d’un
« avant » et d’un « après ».
Moyens utilisés pour traduire cette
révélation et ses caractéristiques :
Le romancier narrateur.
Le discours indirect libre (Fin du §2).
2. Le lieu : traduction romanesque de la
situation du personnage.
Un enfant aimé (commenter la description
de la chambre de Jean-Pierre).
Un enfant à qui on dénie l’existence.
Symbolisme : il n’a aucun lieu à lui dans
le monde. Le lieu où il dort est un réduit
sale.
1 Bien sûr.
2 Pourtant.
3 Guillou est extraordinairement étonné par ce qu’il voit.
4 Guillou est le fils d’un noble. Il habite dans un château.
5 Très petite pièce, utilisée généralement pour le rangement.
6 Objet ayant la forme d’un corps de femme, utilisé par les
couturières.
7 Ce mannequin est debout.
8 Lit qu’on peut plier pour qu’il prenne moins de place. Il ne sert
pas souvent.
9 Enveloppe de tissu qui recouvre le mannequin.
10 Domestique que l’on appelle ainsi car elle est autrichienne.
11 Le petit tapis qui est près du lit de Guillou est très usé.
12 Ici, récipient utilisé la nuit pour faire ses besoins.
13 Récompenses données aux meilleurs élèves, la plupart du
temps des livres.
14 Touchait très légèrement.
15 Livre.
Fiche 14 C. Trénet
(1913-2001)
L’auteur : Ses parents se séparent en 1920 ; en 1928, il
part vivre à Berlin avec sa mère, qui a épousé le
réalisateur Benno Vigny. De retour à Paris, il fréquente
le milieu artistique, écrit des chansons avec le pianiste
suisse Johny Hess. Le duo se produit avec succès dans
des cabarets. À partir de 1937, Trénet se produit seul. Il
renouvelle considérablement le genre de la chanson,
introduisant les rythmes du jazz, la fantaisie, la joie de
vivre. À part une éclipse dans les années soixante, il a
toujours connu un immense succès, y compris à
l’étranger. Avec presque 1000 chansons, « le Fou
chantant » — surnom qu’on lui a donné dans les années
30 – a été, et reste, un monument de la chanson
française.
UNE NOIX
Une noix
Qu’y a-t-il à l’intérieur d’une noix ?
Qu’est-ce qu’on y voit
Quand elle est fermée ?
On y voit la nuit en rond
Et les plaines et les monts
Les rivières et les vallons1
On y voit
Toute une armée
De soldats bardés de fer2
Qui joyeux partent pour la guerre
Et fuyant3 l’orage des bois
On voit les chevaux du roi
Près de la rivière
Une noix
Qu’y a-t-il à l’intérieur d’une noix ?
Qu’est-ce qu’on y voit
Quand elle est fermée ?
On y voit mille soleils
Tous à tes yeux bleus pareils
On y voit briller la mer
Et dans l’espace d’un éclair
Un voilier noir
Qui chavire4
On y voit des écoliers5
Qui dévorent6 leurs tabliers7
Des abbés à bicyclette
Le Quatorze Juillet8 en fête
Et ta robe au vent du soir
On y voit des reposoirs9
Qui s’apprêtent10
Une noix
Qu’y a-t-il à l’intérieur d’une noix ?
Qu’est-ce qu’on y voit
Quand elle est ouverte ?
On n’a pas le temps d’y voir
On la croque11 et puis bonsoir12
On n’a pas le temps d’y voir
On la croque et puis bonsoir
Les découvertes.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Relisez les trois premiers vers. Vous, que
répondez-vous à la question ?
On ne voit rien.
2. Vers 4 à 13 : Combien de fois trouvez-vous le
verbe « voir » ?
3 fois.
3. Examinez la première réponse du poète à
« On y voit ». Qu’est-ce que cela représente ?
Des images du monde extérieur, de la
nature.
4. Examinez la deuxième réponse à « On y
voit ». Qu’est-ce que cela représente ?
Image d’une armée qui part pour la
guerre.
5. Examinez la troisième réponse à « On y
voit ». Qu’est-ce que cela représente ?
Image de chevaux courant près d’une
rivière pour échapper à l’orage.
6. Examinez le deuxième couplet. Combien de
fois trouvez-vous le verbe « voit » ?
4 fois.
7. Faites le même travail que pour le premier
couplet : examinez chaque réponse à « On y
voit ».
Image de soleils/les yeux d’une personne
aimée.
Image d’un voilier sur la mer.
Image d’enfants qui « mangent » leurs
tabliers.
Image de prêtres à bicyclette.
Image de fête de 14 juillet.
Image de la robe de la femme aimée qui
vole au vent.
Image d’une procession.
8. Ces images ont-elles un lien objectif entre
elles ?
Non, elles s’ajoutent les unes aux autres ;
elles se juxtaposent.
9. D’où proviennent-elles ?
De l’imagination et de la mémoire du
poète.
10. Examinez le 3e couplet. Que signifie
« Bonsoir les découvertes » ?
Il n’y a plus rien à découvrir.
11. Quelle est la contradiction apparente sur
laquelle repose le poème ?
On voit beaucoup d’images quand la noix
est fermée. L’imagination est ouverte.
On ne voit plus rien quand elle est
ouverte. La réalité est fermée.
Plan de leçon
1. Les images évoquées
Elles viennent de l’imagination du poète.
Comment l’imagination les a-t-elle élues ?
• Souvenirs stockés par la mémoire
et la sensibilité.
À quoi renvoient-elles ?
• à la beauté
• à l’enfance du poète
• à la culture française
Départ des soldats pour la
guerre 14/18
14 juillet en fête
Les écoliers
Les abbés à bicyclette
Les processions
• au sentiment amoureux
DONC, globalement, à la nostalgie de
l’enfance, de la jeunesse, du passé révolu.
Comment fonctionne cette imagination ?
• Par juxtaposition et addition.
• Sans limites : cela peut durer tant
que la noix est fermée et qu’on
sollicite le libre cours de
l’imagination.
2. Une métaphore filée
Une métaphore
• Définition de la figure de style :
« Substitution analogique, sans
qu’il y ait d’élément introduisant
formellement une comparaison.
Exemple : l’homme est un loup
pour l’homme » (Hobbes).
• Ici, qu’y a-t-il derrière la noix ?
Quel est le message de ce poème ?
Avant une expérience :
Imagination ouverte et sans
limites : la vraie richesse.
Pendant, puis après l’expérience :
expérience limitée, enfermée sur et
dans la réalité.
Une métaphore filée, c’est-à-dire
développée progressivement,
longuement. La comparaison implicite est
développée sur 3 couplets ; elle constitue
tout le poème.
3. Un poème
• Des strophes (dans une chanson,
« couplets »).
• Des rimes.
• Un procédé rhétorique
caractéristique de la poésie : la
métaphore.
• La chanson, refuge de la poésie
lyrique traditionnelle après
l’expérience surréaliste :
imagination, nostalgie.
• Mais absence de ponctuation :
héritage du surréalisme.
III. ACTIVITÉS COMPLÉMENTAIRES
✓ Compréhension/réception de l’oral :
écouter la chanson.
✓ Production écrite
• Imitation du poème : « Une noix,
qu’y a-t-il à l’intérieur d’une
noix ? ». À votre tour, répondez à
cette question.
• « Le voyage, c’est trois voyages :
celui qu’on imagine, celui qu’on
fait, ce qu’on en retient. ». Avez-
vous fait cette expérience ?
• Partagez-vous l’opinion du poète :
« Une noix… Quand elle est
ouverte, on la croque et puis
bonsoir les découvertes. » ?
• Quelles seraient pour vous les
images types de votre culture ?
✓ Production orale
Apprendre ce texte et le dire.
1 Petite vallée.
2 Recouverts d’une armure, d’une protection en métal.
3 Cherchant à échapper à l’orage.
4 Se retourne, se renverse.
5 Enfants qui vont à l’école.
6 Mangent.
7 Vêtement pour protéger les habits de ce qui peut les salir.
8 Fête nationale française.
9 Objets religieux chrétiens sur lesquels le prêtre pose l’hostie.
Souvent utilisé dans les processions. Image fréquente autrefois.
10 On prépare les reposoirs.
11 On l’écrase avec les dents pour la manger.
12 Ici, adieu ! Au revoir !
Fiche 15 T. Ben
Jelloun (né en 1944)
L’auteur : Après des études au lycée français de Tanger,
puis des études de philosophie à Rabat, il enseigne la
philosophie au Maroc. L’arabisation de l’enseignement
le conduit à Paris. Il y fait des études de psychologie,
écrit des articles pour Le Monde, devient docteur en
psychiatrie sociale. Il obtient le prix Goncourt en 1987.
Ses œuvres, écrites en français, connaissent le succès.
Elles sont traduites dans de nombreuses langues.
[La narratrice est née dans un village berbère marocain très pauvre. Son père
travaillait en France. À la suite d’un drame familial, il a emmené sa famille à Paris.
La jeune fille – elle a alors une dizaine d’années – analphabète jusque là, apprend
le français et va à l’école. Dans le récit qui suit, la nouveauté est passée. Elle a un
peu plus de onze ans et elle a fait des progrès]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
Plan de leçon
1. Les leçons de l’apprentissage d’une langue
étrangère
Méthodes d’apprentissage :
Listes par cœur : ici, conjugaison.
Méthode inopérante.
Une pratique liée à la vie : seule
méthode efficace.
Ce que cela révèle :
• La langue = partie intégrante d’une
culture. L’expérience de la
conjugaison montre que cet aspect
de la langue est lié à la notion du
temps tel qu’il est vécu dans une
culture.
• La découverte de l’altérité et du
relativisme culturel.
• À quelles conditions : l’acceptation
de son propre déterminisme
culturel et l’ouverture à l’altérité.
• Ce qu’elle permet : une étape
privilégiée vers l’acculturation.
• Acculturation : « adaptation d’un
individu à une culture étrangère
avec laquelle il est en contact ».
(Le Robert)
2. Les difficultés de l’acculturation
• L’erreur qui consiste à vouloir
oublier qui l’on est, à nier son
identité : « Je niais cette
présence » (celle du village).
• Le saut culturel : Les deux rythmes
de vie renvoient à des cultures
totalement différentes. L’écart est
considérable et il est difficile de les
faire coexister. C’est pourtant ce à
quoi il lui faut aboutir.
• Il faut assumer le fait d’avoir une
double identité, de porter les deux
cultures, de vivre le métissage
culturel, d’arriver à ce troisième
état.
1 J’ai compris.
2 Rejeter.
3 Oublier.
4 Être sur le même plan, être en harmonie avec…
5 Elle a expliqué plus haut que le temps du village ressemblait à
une corde avec trois nœuds, c’est-à-dire que le soleil rythmait trois
moments dans la journée, et donc trois activités liées à l’élevage. À
Paris, le temps est une corde avec beaucoup de nœuds serrés,
c’est-à-dire beaucoup d’activités.
6 Errait vaguement.
7 J’ai pénétré.
8 Au village, elle passait beaucoup de temps sous l’arbre, attendant
que son père revienne et espérant partir de là.
Fiche 16 P. Verlaine
(1844-1896)
L’auteur : Après le baccalauréat, il commence des
études de droit, mais s’intéresse surtout à la poésie. Il
devient employé de bureau à la mairie de Paris, publie
Les Poèmes Saturniens à 22 ans. Après quelques
années marquées par les amours passagères et l’alcool,
il se marie et continue à publier des poèmes ; mais le
mariage vole en éclats lors de sa liaison avec Rimbaud,
aventure qui le conduit à deux ans de prison en
Belgique. Il enseigne en Angleterre en 1877, puis rentre
en France. La fin de sa vie est marquée par l’alcoolisme
et des conditions de vie proches de la misère. Les
symbolistes considèrent son œuvre, très importante,
comme leur modèle.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
Vers 1 à 8
1. Strophe 1 Quelles sont les trois
caractéristiques du rêve ?
Il est fréquent.
Il est étrange.
Il est pénétrant.
2. Strophe 2 Quels sont les mots qui expliquent
pourquoi il dit « hélas » ?
« Et les moiteurs de mon front blême Elle
seule les sait rafraîchir, en pleurant. »
3. Relevez tous les éléments qui caractérisent la
femme.
Inconnue ; amour réciproque ; image
floue ; aimante, consolatrice.
4. Comment se construit ce portrait ?
Coordination, juxtaposition.
5. Vers 7 : Comment comprenez-vous « les
moiteurs de mon front blême » ?
Il ne s’agit pas d’une description de signes
visibles. Il s’agit de traduire son malaise
et ses souffrances psychologiques, son
état morbide par les connotations des
mots « moiteurs » et « blême ».
Vers 9 à 14
6. Vers 12 : Comment définissez-vous « le
regard des statues » ?
Il est souvent vide.
7. Relevez les caractéristiques de la femme
dans ces deux strophes.
Les cheveux, aucune information ; le
nom, le regard, la voix : des adjectifs et
des comparaisons qui renvoient à l’effet
de délectation morose produit sur le
poète.
8. Vers 2 : Revenez sur « une femme
inconnue ». Que pouvez-vous dire d’elle à la fin
du poème ?
Réponse libre.
Plan de leçon
1. Nature de l’expérience racontée
C’est une rêverie, c’est-à-dire une
production de l’imagination qui se laisse
aller selon ses lois propres et dont
Verlaine est le témoin coopérant,
complaisant.
L’objet de la rêverie n’est pas une femme
réelle dont il ne saurait rien ou presque :
• Image floue, vers 3 et 4.
• Physique ? évoqué pour être rejeté
immédiatement dans l’inintéressant
(vers 9) ou l’inexistant (vers 12).
• Larmes : elles n’existent qu’en
imagination et ne sont considérées
que du point de vue du rêveur : il
reçoit les larmes dont il a besoin.
• C’est un climat, une atmosphère.
Verlaine la définit par des adjectifs ou
des relatives qui renseignent sur ses
caractéristiques.
En fait, c’est un fantasme : « Toute
production de l’imagination par laquelle le
moi cherche à échapper à la réalité. » (Le
Robert). Le fantasme renvoie à celui qui
le produit.
2. Le fantasme et le rêveur
Rêverie née du besoin d’échapper à une
réalité pénible.
• Réalité : « les moiteurs de mon front
blême ». Les mots ne sont pas
utilisés pour leur sens, mais pour
leurs connotations : moiteurs et
blême.
• « elle seule, hélas » le comprend,
c’est dire que dans la réalité
personne ne le comprend.
C’est une rêverie signifiante pour la
personnalité du rêveur
• Obsession (« souvent »)
• « Rêve pénétrant » : expérience forte
• Complaisance pour le rêve qui
s’installe et se déroule aussitôt qu’il
est évoqué.
Les émotions recherchées
• Amour protecteur
• Compréhension
• Goût pour les sentiments mêlés, la
délectation morose.
Un portrait de Verlaine
• Cette rêverie est née du besoin
d’échapper à une réalité pénible.
• Ce fantasme est la projections par
l’imagination des frustrations de
l’auteur.
Il échappe à la réalité et y renvoie.
• Réalité et imaginaire se complètent
pour exprimer sa sensibilité, sa
personnalité de Saturnien.
3. Une expérience vivante et ses implications
poétiques
Glissement du récit à l’expérience vivante
• Récit : « Je fais souvent… »
• Rêve « en direct » : le démonstratif
annonce une expérience qui se
déroule en direct.
La structure syntaxique qui s’installe est
donc celle du rêve
• Construction par additions
successives, par juxtaposition.
• Constructions propres au style oral,
par exemple les reprises : « et
m’aime, et me comprend. Car elle
me comprend ».
Implications poétiques
• Le rythme est celui de la rêverie et
donc l’alexandrin n’est pas coupé
classiquement : voir rejets et
enjambements.
• Coexistence simultanée de deux
rythmes qui se conjuguent dans ce
poème
◗ Le rythme musical lié à la
forme d’un sonnet : 14 vers (2
quatrains sur deux rimes, une
strophe de six vers sur trois
rimes, séparés sur le papier en
deux tercets) alexandrins,
rimes ABBA ABBA CCDEDE.
◗ Le rythme psychologique lié à
la syntaxe de la rêverie.
• À quoi il faut ajouter les
allitérations qui créent dans la
phrase et dans le rythme des effets
secondaires importants vers 1 ;
vers 5 ; vers 6, 7 par exemple.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. L’expression « guerre tribale » convient-elle
à la définition qu’en donne Birahima ?
Non, il s’agit de factions.
2. Retrouvez le texte qui explique « Les bandits
de grand chemin se sont partagé le pays ».
Ils se sont partagé la richesse… les
hommes
3. Quelles sont les trois idées exprimées dans le
1er paragraphe ?
« Guerre tribale » : des bandits se sont
partagé le pays (richesses, territoire,
hommes)
Le monde entier les laisse faire
Chaque faction veut agrandir son pouvoir
4. Que représente le 2è paragraphe par rapport
au 1er ?
C’est un exemple, une application à la
situation du Libéria.
5. §3 : Pour Birahima quelle est la raison des
massacres et des pillages ?
Les soldats ne sont pas payés.
6. Quelles en sont les deux implications ?
Ils massacrent et ils pillent, puis
revendent leur butin à prix cassés.
Cette situation économique attire des
gens guidés par le lucre.
7. Faites maintenant le plan de l’exposé de
Birahima.
1. Définition de « guerre tribale ». §1.
2. Illustration : Le Liberia. §2.
3. Raison des massacres : les soldats ne
sont pas payés. §3.
É
4. Implications : Économie ravagée et
arrivée massive de profiteurs. §4.
8. Quels sont les liens logiques qui structurent
son exposé ?
« C’est pourquoi » : lien entre 1. et 2. Il
prend l’exemple de ce qui se passe au
Liberia ; cela illustre la définition qu’il a
donnée de « guerre tribale ».
« C’est pourquoi » : lien entre 3. et 4. Les
soldats ne sont pas payés, DONC (lien
implicite) ils pillent et massacrent. C’est la
raison qui entraîne deux implications en
cascade.
Plan de leçon
1. Une leçon de géopolitique
• Une définition de « guerre
tribale ».
• Application à une situation donnée,
située et datée : Le Liberia, à partir
de 1989 jusqu’à 2000 (date de
publication du livre).
2. Un réquisitoire
Ce que Kourouma dénonce :
• Un pays livré à la loi de la jungle, à
un pillage en règle de ses richesses
et de son économie.
• L’absence d’un état de droit,
l’effondrement de l’État.
• Les massacres.
• Les pillages.
• L’exploitation et la dégradation des
soldats, en particulier des enfants-
soldats.
• La lâcheté internationale.
• Le goût du lucre et l’immoralité des
profiteurs.
Qui dénonce-t-il ?
• Nommément : Doe, Taylor,
Johnson et El Hadji Koroma.
• Les gouvernements du monde
entier et probablement l’ONU.
3. Les moyens de la dénonciation
• Un raisonnement logique
(retrouver les articulations du
raisonnement)
• Fait de l’intérieur par un enfant-
soldat, protagoniste de l’histoire.
• Sans pathos : l’exposé des faits
suffit.
• Une écriture originale :
impropriétés signifiantes. Elles
obligent le lecteur à s’arrêter.
4. Ce texte : un exemple parfait de la littérature
témoignage
Rechercher de l’information auprès des
historiens (disponible sur Internet) sur la
guerre au Liberia.
Mettre cette information en parallèle avec
la dénonciation de Kourouma pour
évaluer
• Le degré de fiabilité de ce
témoignage.
• L’engagement de Kourouma.
[Jérôme et Sylvie ont respectivement 24 et 22 ans au début des années 60. Ils
abandonnent leurs études de sociologie et entreprennent des enquêtes de
psycho-sociologie (socio marketing) pour gagner leur vie. Comme beaucoup de
jeunes gens issus de la petite bourgeoisie, ils rêvent de posséder « les choses »
que le monde de la consommation identifie au bonheur.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Leur vie affective… étroitement : Que remplace le
mot « en » ?
L’économique.
2. Que représente le texte « tout donnait à
penser… réussites. » par rapport aux lignes
précédentes ?
Ce texte représente l’illustration du fait
que la vie affective de Jérôme et Sylvie
dépendait de l’économique, de l’état de
leurs finances.
3. Pourquoi Perec dit-il que la gêne de Sylvie et
Jérôme était « pire que la misère » ?
Lorsqu’on est dans la misère, on cherche
à satisfaire les besoins primaires, et on y
a bien du mal. On est très loin des désirs
de consommation. Jérôme et Sylvie sont
aux portes de la consommation, ils ont
des désirs, mais ne peuvent les satisfaire.
Les objets de leurs désirs sont à portée
de vue, mais inaccessibles.
4. Pourquoi parle-t-il de « miracles impossibles,
de rêves imbéciles » ?
« Miracles ». Il faudrait cela pour que leur
situation financière change ; or, c’est
impossible.
« Rêves imbéciles » : ils ont des rêves,
mais c’est faible et stupide parce que ces
rêves ne pourront jamais être réalisés.
5. Quel lien Sylvie et Jérôme font-ils entre
« l’argent, le confort, le bonheur » ?
L’argent donne le confort, qui donne le
bonheur.
6. Quel type de société Perec décrit-il ?
La société de consommation.
É
II. EXPLOITATION LITÉRAIRE
Plan de leçon
1. Une analyse de jeunes adultes, en France,
dans les années 60
Une catégorie sociale
Petite bourgeoisie (Voir les notes qui
précèdent le texte)
Totalement définie par son rapport à la
consommation
Et par voie de conséquence, par son
rapport à l’argent.
Ils veulent « être » par « l’avoir ».
2. Un point de vue critique
Vie rétrécie et donc déformée : n’est
centrée que sur un objectif, la quête de
l’être par l’avoir.
« Monde clos de leurs vies closes ».
Aliénation de leur humanité :
Le pôle de l’avoir dirige leur vie,
jusqu’à leur vie affective.
Abandon d’intérêt pour des
préoccupations humaines : le monde
et ses vicissitudes, la culture, les
autres, tous ces sujets sont très
secondaires.
Une erreur : Un bonheur illusoire,
• parce qu’ils sont tentés par la
consommation et qu’ils n’auront
pas les ressources pour y accéder
pleinement.
• parce que la voie qu’ils suivent :
obtenir l’être par l’avoir est un
leurre.
3. Un témoignage
À confronter à des documents de
sociologues. Voir III. Activités
complémentaires.
[Un soir comme tous les autres, et après beaucoup d’autres, Le Vieux et la Vieille
tentent de vivre et de supporter la condition humaine. Mais les vieilles recettes
sont usées et ils décident d’utiliser celle qu’ils gardaient en réserve jusqu’à
présent : un jour, le Vieux délivrera un message à l’humanité pour la sauver. Ce
sera ce soir. La pièce bascule : les invités « arrivent », quelques individus isolés
d’abord. Les deux vieux vont chercher des chaises. Qui est assis sur ces chaises ?
Un photograveur1 ? Non, personne, en fait… et c’est à ce néant assis sur des
chaises qu’ils tiennent, entre autres, ce discours :]
La vieille, au photograveur
Nous avons eu un fils… Il vit bien sûr… Il s’en est allé…
c’est une histoire courante…plutôt bizarre… il a abandonné ses
parents… il avait un cœur d’or2 … il y a bien longtemps… Nous
qui l’aimions tant… il a claqué la porte… Mon mari et moi nous
avons essayé de le tenir de force… il avait sept ans, l’âge de
raison, on lui criait : Mon fils, mon enfant, mon fils, mon
enfant… il n’a pas tourné la tête.
Le vieux
Hélas, non… non… nous n’avons pas eu d’enfant… J’aurais
bien voulu avoir un fils… Sémiramis aussi… nous avons tout
fait… ma pauvre Sémiramis, elle qui est si maternelle. Peut-être
ne le fallait-il pas. Moi-même j’ai été un fils ingrat3 … Ah !…
De la douleur, des regrets, des remords4 , il n’y a que ça… il ne
nous reste que ça…
La vieille
Il disait : Vous tuez les oiseaux ! Pourquoi tuez-vous les
oiseaux ?… Nous ne tuons pas les oiseaux… on n’a jamais fait
de mal à une mouche… Il avait de grosses larmes dans les yeux.
Il ne nous laissait pas les essuyer. On ne pouvait pas l’approcher.
Il disait : si, vous tuez tous les oiseaux, tous les oiseaux… Il
nous montrait ses petits poings… Vous mentez, vous m’avez
trompé ! Les rues sont pleines d’oiseaux tués, de petits enfants
qui agonisent5 . C’est le chant des oiseaux !… Non, ce sont des
gémissements6 . Le ciel est rouge de sang… Non, mon enfant, il
est bleu… Il criait encore : Vous m’avez trompé, je vous adorais,
je vous croyais bons… les rues sont pleines d’oiseaux morts,
vous leur avez crevé les yeux7 … Papa, maman, vous êtes
méchants !… Je ne veux plus rester chez vous… Je me suis jetée
à ses genoux… Son père pleurait. Nous n’avons pas pu
l’arrêter… On l’entendit encore crier : C’est vous les
responsables… Qu’est-ce que c’est responsable ?
Le vieux
J’ai laissé ma mère mourir toute seule dans un fossé8 . Elle
m’appelait, gémissait faiblement : Mon petit enfant, mon fils
bien-aimé, ne me laisse pas mourir toute seule… Reste avec
moi. Je n’en ai pas pour bien longtemps. Ne t’en fais pas,
maman, lui dis-je, je reviendrai dans un instant… j’étais
pressé… j’allais au bal, danser. Je reviendrai dans un instant. À
mon retour, elle était morte déjà, et enterrée profondément… J’ai
creusé la terre9 , je l’ai cherchée… je n’ai pas pu la trouver… Je
sais, je sais, les fils, toujours, abandonnent leur mère, tuent plus
ou moins leur père… la vie est comme cela… mais moi, j’en
souffre… les autres, pas…
La vieille
Il criait : Papa, maman, je ne vous reverrai pas…
Le vieux
J’en souffre, oui, les autres, pas…
La vieille
Ne lui en parlez pas à mon mari. Lui qui aimait tellement ses
parents. Il ne les a pas quittés un instant. Il les a soignés,
choyés10 … Ils sont morts dans ses bras, en lui disant : Tu as été
un fils parfait. Dieu sera bon pour toi.
Le vieux
Je la vois encore allongée dans son fossé, elle tenait du
muguet11 dans sa main, elle criait : Ne m’oublie pas, ne
m’oublie pas… elle avait de grosses larmes dans ses yeux, et
m’appelait par mon surnom d’enfant : Petit poussin, disait-elle,
petit poussin, ne me laisse pas toute seule, là.
La vieille
Il ne nous a jamais écrit. De temps à autre, un ami nous dit
qu’il l’a vu là, qu’il l’a vu ci, qu’il se porte bien, qu’il est un bon
mari…
Le vieux
À mon retour, elle était enterrée depuis longtemps.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Réplique 1 : Quelles informations la Vieille
donne-t-elle ?
Le couple a eu un fils.
À sept ans, ce fils a abandonné ses
parents.
Les parents ne voulaient pas cette
rupture.
2. Réplique 2 : Quelles informations le Vieux
donne-t-il ?
Le couple n’a pas eu d’enfant.
Le Vieux a été un fils ingrat.
Réplique 3
3. Rétablissez le dialogue entre le fils et ses
parents. Indiquez les parties du texte qui
seraient des didascalies.
4. Résumez les informations données par la
Vieille.
Le fils accusait ses parents d’être
méchants, de l’avoir trompé sur leur
nature.
La Vieille réfutait ces accusations qu’elle
ne comprenait pas.
Réplique 4
5. Quelles informations le vieux donne-t-il ?
Il raconte les circonstances de la mort de
sa mère.
Il explique pourquoi il l’a abandonnée :
« le bal ».
Il dit ses remords tardifs.
Il généralise les deux histoires que le
couple vient de raconter.
6. Que signifie « J’étais pressé, j’allais au bal
danser » ?
La métaphore du bal est souvent utilisée
pour LA VIE. Il a quitté sa mère pour aller
vivre sa vie.
Répliques 5 et 6
7. Quelle information la vieille donne-t-elle ?
Le Vieux a été parfait avec ses parents ;
ils sont morts dans ses bras.
8. Dans un premier temps, vous ne reprenez
que les propos de la Vieille. Qu’est-ce que vous
en apprenez ?
Ils ont eu un fils.
Ce fils les a quittés quand il avait sept
ans.
Il leur reprochait de tuer les oiseaux.
Elle nie toute culpabilité.
Le vieux a été un fils parfait, il a
accompagné ses parents mourants.
9. Dans un deuxième temps, vous ne lisez que
les propos du Vieux. Qu’est-ce que vous en
apprenez ?
Ils n’ont pas eu d’enfant.
Il a laissé sa mère mourir seule.
10. Vous avez constaté que les histoires
racontées par La Vieille et le Vieux ne sont pas
réalistes et qu’elles se contredisent l’une
l’autre. Où le message du texte est-il clairement
exprimé ?
« Je sais, je sais, les fils toujours
abandonnent leur mère, tuent plus ou
moins leur père… la vie est comme cela. »
Plan de leçon
1. Analyse du discours des personnages
Un seul message :
• Séparation inéluctable
parents/enfants : « Je sais, je
sais… Les fils, toujours,
abandonnent leur mère, tuent plus
ou moins leur père… La vie est
comme cela ».
• Découverte du mal par l’enfant qui
grandit, désillusion : « Papa,
maman, je vous croyais bons, vous
êtes méchants, vous m’avez
menti ».
• Douleur inéluctable des deux côtés.
Une répartition des rôles :
• Discours de La Vieille : elle tient le
rôle des parents.
• Discours du Vieux : il tient le rôle
des enfants.
La scène : un chant de souffrance sur ces
aspects de la condition humaine :
• Les deux discours ne s’annulent
pas : La vieille dit que le Vieux a
choyé ses parents, le Vieux dit
qu’ils n’ont pas eu d’enfant. C’est
une indication claire pour entendre
ou lire la scène autrement qu’avec
une grille réaliste.
• Cette scène est un chant à deux
voix, chacun chantant sa partie du
même « air », à ceci près que
l’ordre du langage est séquentiel.
2. Forme théâtrale
Statut des personnages :
• Ils ne sont que ce qu’ils disent.
(aucun élément de réalisme)
• Ils sont des supports.
Parenté avec l’opéra.
É
• Écouter l’air des cartes de Carmen
(opéra de Georges Bizet) Acte III,
tableau 1 : trio Frasquita,
Mercédès, Carmen puis lire le livret
(disponible sur Internet).
• Comparer à la scène des Chaises :
• Musique : dans le livret les paroles
sont écrites à la suite les unes des
autres. Mais elles sont simultanées
dans le chant.
• Les Chaises : ordre du langage,
nécessairement séquentiel.
✓ Interaction orale pour la classe OU
production écrite :
• Comparez ce texte à celui
d’Anouilh : qu’ont-ils en commun ?
• La désillusion est-elle inéluctable
lorsqu’on découvre le monde
adulte ?
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Strophes 1 et 2 : De qui parle Aragon ?
Il parle des gens simples malheureux.
Strophe 3
2. À qui s’adresse-t-il maintenant ?
Il s’adresse à ces gens simples,
malheureux, exploités.
3. Quel rapport y a-t-il entre les vers 1 et 2, 3 ?
Ces gens sont détruits physiquement,
vieillis avant l’âge, vraisemblablement par
le travail et les conditions de vie. Ils sont
exploités.
4. Qui est ce « on » du vers 1 ?
« On » représente ceux qui ont exploité
les pauvres.
5. Quel sentiment éprouve-t-il devant ces
pauvres gens ?
Il éprouve de la douleur (vers 4).
Strophe 4
6. Comment comprenez-vous le vers 2 ?
C’est une image pour évoquer la violence
du malheur, la guerre.
Strophe 5
7. Comment comprenez-vous le vers 1 ?
« Le ciel bleu » : image classique pour
évoquer la paix, le bonheur, l’espoir.
8. Vers 4 : qu’apporte cette comparaison ?
Cette comparaison introduit l’idée que
l’espoir de paix est à la fois réel parce
qu’on l’éprouve, et illusoire parce que
l’avenir meilleur, s’il existe, est lointain.
9. Strophes 6 et 7 : Quelle idée Aragon
développe-t-il ?
« Je suis bien votre pareil »
10. Dans la strophe 9, que faut-il comprendre
au vers 2 ?
Mon œuvre littéraire et mon action
militante au sein d’un parti politique, le
PCF.
11. Dans la strophe 10, que comprenez-vous au
vers 2 ?
C’est une allusion politique : société en
classes, avec le règne des riches sur les
pauvres, exploités par les premiers.
12. Strophes 8 à 12 : Quelle idée Aragon
développe-t-il ?
Il adresse une sorte de bilan amer au
monde des exploités :
Je suis totalement solidaire de votre sort,
de votre espoir,
Je milite en tant qu’homme et en tant
qu’écrivain pour vous, pour votre
libération.
Mais vous ne le savez pas. Mon œuvre et
mon action vous sont étrangères,
inconnues.
Plan de leçon
1. Un poète engagé
S’adresse aux opprimés
« Vous », tout de suite après la 3e
personne.
Gens humbles (strophe 1)
Marqués dans leur corps « Vos
apparences brisées ».
Exploités « Ce qu’on fait de vous »
(Strophe 3, vers 1), « Nous vivons
sous le même règne », Strophe 10,
vers 2).
Exprime sa solidarité
Sentimentale, affective (strophe 3,
vers 4)
Politique : Allusions qui se réfèrent à
son engagement politique
communiste « Ce qu’on fait de vous
hommes femmes »… « Nous vivons
sous le même règne ».
Il se range à leurs côtés (surtout
strophe 10) en se revendiquant
résolument « pareil à eux », faisant
siennes leurs souffrances et
partageant leurs espoirs d’une vie
meilleure.
Un engagement largement prouvé « mes
paroles… mes mains »
« Mes paroles » renvoie à toute
l’œuvre engagée écrite.
« Mes mains » renvoie à toutes les
actions militantes d’Aragon.
2. Une réflexion sur la littérature et le poète
engagés
• La fonction du poète : Aragon a
rêvé d’être utile, « une étoile » :
symbole de lumière et de guide par
ses écrits. Référence à une des
thèses de Jdanov : la fonction de
l’écrivain est d’être un artisan de la
révolution avec les outils qui sont
les siens, la littérature.
Les destinataires de cette
« mission » l’ont ignorée. Cette
voix des pauvres, pour les pauvres,
n’est pas entendue par eux.
• Constat et bilan désenchantés d’un
vieux poète militant : texte publié
en 1960, revu et corrigé par lui en
1968. La littérature engagée qu’il a
produite est inaccessible aux gens
qu’elle veut défendre ; c’est l’échec
douloureux de sa mission. C’est le
sens de la dernière strophe.
• Une fin de parcours engagé ?
Oui, si l’on considère le constat
d’échec. Mais, ce bilan et le chagrin
qu’il a fait naître s’adressent encore
aux mêmes destinataires : ultime
recours pour se faire entendre.
3. Genre : Poésie lyrique traditionnelle
Thèmes :
Fraternité, solidarité avec les
« damnés de la terre ».
Bilan de vie d’un vieil homme engagé
et d’un poète.
Forme :
Versification : octosyllabes. Depuis le
XVIe siècle, vers traditionnels de la
poésie lyrique.
Rimes embrassées, alternance rimes
féminines et rimes masculines.
Images : toujours simples à décoder.
Comparaisons.
Pour la classe
✓ Compréhension de l’oral :
Écouter ce texte chanté par Marc Ogeret
(Ogeret chante Aragon, second
intermède, titre 8 J’entends, j’entends.
EPM, 1992) ou par Jean Ferrat (nombreux
enregistrements).
✓ Interaction orale ou production écrite :
• Quel est, selon vous, le pouvoir de
la littérature engagée ?
• Certains affirment que la littérature
est toujours engagée. Comment
cela est-il possible ?
• Certains assurent que c’est la
fonction et le devoir de la
littérature de s’engager. Partagez-
vous cette conviction ?
• Quelle est, ou quelles sont, selon
vous la (les) fonctions(s) de la
littérature ?
• Quels sont aujourd’hui, les autres
arts qui peuvent s’engager ?
• Connaissez-vous de la littérature
engagée dans votre propre
culture ?
• Faites-vous une différence entre
art engagé et propagande ?
Expliquez.
• Retrouvez la ponctuation qui
respecterait les groupements de
mots et le sens du texte.
• Apprenez ce texte et dites-le.
1 Le miroir aux alouettes : image connue pour dire que c’est une
illusion. On chasse les alouettes en les attirant avec un miroir.
Fiche 21 A. Camus
(1913-1960)
L’auteur : Il est né en Algérie, alors française, dans un
milieu très pauvre, et n’a pas connu son père, mort à la
guerre. Sa mère, sourde, ne sait ni lire, ni écrire. Grâce
à un instituteur, il poursuit des études au lycée. Mais
atteint de tuberculose, il ne passe pas l’agrégation. Il
fait du journalisme, du théâtre et commence à publier.
En 1940, son journal ayant été interdit, il vient à Paris,
travaille à Paris-Soir, publie L’Étranger et un essai
philosophique, Le Mythe de Sisyphe. En 1943, il entre
au journal résistant Combat ; il écrit des pièces de
théâtre, connaît Sartre, devient lecteur chez Gallimard.
Après la guerre, il poursuit son activité littéraire en
publiant romans (très grand succès de La Peste),
théâtre, essais philosophiques, notamment L’Homme
révolté (1951), dans lequel il condamne, entre autres, le
stalinisme. C’est la rupture avec Sartre. Quand
commence la guerre d’Algérie, il est déchiré ; ses efforts
pour épargner la violence sur les civils sont incompris
des deux côtés. En 1956, il publie La Chute, œuvre dans
laquelle il vise ceux qui l’ont violemment critiqué, mais
pratique aussi une sorte d’autocritique. Il reçoit le prix
Nobel en 1957. Il meurt dans un accident de voiture en
1960. Depuis, et avec l’éclairage des événements
historiques, son œuvre connaît un succès constant.
[Meursault, Français d’Algérie, note les faits de sa vie depuis l’annonce de la mort
de sa mère. Il est allé aux obsèques, puis a rencontré Marie, qui est devenue sa
maîtresse. Il a aidé un voisin, Raymond Sintès. Cet homme a frappé, puis quitté
sa compagne, une femme arabe. Il a invité Meursault et Marie à passer le
dimanche à la plage. Le frère de la femme arabe est venu se battre avec Sintès.
Meursault, qui a pris le revolver de Sintès pour éviter un drame, marche sur la
plage. L’arabe sort un couteau. Meursault tire. C’est la première partie. Dans la
2ème partie, Meursault est en prison. Le procès a lieu. Il attend le jugement.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. « Une sonnerie a retenti » : Que signifie ce
signal ?
Le jury a fini. On va lire le jugement.
L’avocat peut rentrer dans la salle du
tribunal.
2. « La sonnerie a encore retenti » : Que signifie
ce second signal ?
Meursault doit maintenant entrer dans la
salle du tribunal pour entendre le
jugement.
3. Faites la liste des perceptions de Meursault
pendant qu’il est à l’extérieur de la salle.
Une sonnerie a retenti.
Des portes ont claqué.
Des gens couraient, je ne sais pas où.
J’ai entendu une voix sourde.
La sonnerie a encore retenti.
4. Comment qualifier ces perceptions ?
Auditives.
Successives.
5. Quelle est la première impression de
Meursault en entrant dans le box ?
Nouvelle sensation auditive : le silence.
6. Quelle est sa deuxième impression ?
« singulière sensation quand j’ai constaté
que le jeune journaliste avait détourné les
yeux ».
7. Est-ce une sensation ?
Non, c’est une manifestation de sensibilité
de Meursault.
8. Quel est le jugement ?
Meursault est condamné à mort.
9. « Il m’a semblé… considération » : S’agit-il
d’une sensation ?
Non, Meursault fait de l’analyse
psychologique sur une impression.
10. Les gendarmes… m’a emmené : Faites la liste
de tout ce que note Meursault.
Les gendarmes étaient très doux.
L’avocat… poignet.
Je ne pensais plus à rien.
Le président m’a demandé… ajouter.
J’ai réfléchi.
J’ai dit « non ».
On m’a emmené.
11. Quel est le lien entre toutes les notations de
Meursault ?
C’est uniquement un lien chronologique.
Ces notations rapportent une succession.
Plan de leçon
1. Mode de construction du texte
La chronologie :
Voir les marqueurs temporels
Il n’y a pas d’autre lien entre les faits
rapportés.
La juxtaposition, notamment de très
nombreuses indépendantes brèves.
La subordination :
Essentiellement des relatives
(fonction adjectivale), des
complétives d’objet.
Deux circonstancielles de temps.
Un seul lien de cause à effet : « Je
n’en ai pas eu le temps parce
que… ». La chronologie explique un
fait qui n’a pu avoir lieu.
2. La relation de Meursault, traduction du
sentiment absurde
Transposition philosophique : des notions
indispensables à connaître
• À la question : Quel est le sens de
ma présence dans le monde ?
plusieurs familles d’esprits
répondent que les événements
n’arrivent pas par hasard. Ils sont
enchaînés par une nécessité qui
conduit dans une direction.
• D’autres pensent que les
événements arrivent, mais que
d’autres auraient tout aussi bien pu
survenir, qu’il n’y a aucune
nécessité qui préside à leur
existence, que cette succession ne
suit pas une ligne qui les
enchaînerait. Cette famille d’esprits
croit que l’existence relève de la
contingence. Elle ressent
l’existence comme absurde.
• Dans ces conditions, tout ce que
l’on peut faire, c’est dire que les
événements ont eu lieu, les relater
sans en privilégier aucun.
Meursault, l’homme absurde. La forme
même de sa relation des événements
traduit le sentiment absurde :
• Il juxtapose les événements pour
n’en donner que la succession. Il
fait un compte rendu.
• À première vue, il ne s’implique pas
dans ce compte rendu.
• Cette succession ne privilégie
aucun événement.
• Aucune stratégie traditionnelle
dans le choix des propos rapportés
au style direct et au style indirect.
• Il utilise essentiellement le passé
composé, temps historique qui se
borne à dire que les événement
ont eu lieu.
3. Meursault, l’homme absurde, mais…
Chez Meursault, des éléments qui résistent au
sentiment absurde :
« Et cette singulière sensation…
avait détourné les yeux. »
« Il m’a semblé… considération. »
Meursault est accessible à la sensibilité, à
l’affectivité, à l’analyse psychologique même si
À
ce ne sont pas les éléments dominants du texte. À
côté du sentiment absurde qui fait de lui un homme
étranger au monde, et qu’il traduit par ce compte
rendu, il EST aussi au monde.
Ce texte : une illustration du titre, L’Étranger,
mais aussi l’annonce de la révolte finale de
Meursault. (Consulter L’Ère du soupçon, Nathalie
Sarraute)
L’INVITATION AU VOYAGE
Mon enfant, ma sœur,
Songe1 à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ses ciels2 brouillés3
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traitres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
Strophe 1
1. « Mon enfant, ma sœur » : comment
comprenez-vous cette adresse à la femme
aimée ?
Ces termes qui évoquent un lien familial,
de proximité, et de proximité
indestructible traduisent la force et la
nature du lien qui unit les amants. Marie
Daubrun est une sœur d’élection pour
Baudelaire.
2. Repérez le texte qui justifie le titre du
poème.
« Songe à la douceur / D’aller là-bas vivre
ensemble ! »
3. Que signifie d’abord « là-bas » ?
Ailleurs qu’ici.
4. Par quoi définit-il ce pays ?
Il le définit par « Les soleils mouillés / de
ses ciels brouillés » : vision de peintre.
5. Pourquoi dit-il « tes traitres yeux » ?
« Traitres », parce qu’ils sont « brillant(s)
à travers leurs larmes. ». Ils expriment
des émotions opposées, on ne sait pas à
quoi s’en tenir.
6. Pourquoi choisit-il ce pays ?
Il le choisit parce qu’il ressemble à Marie
Daubrun, parce qu’il est en
correspondance avec elle.
7. Après la première strophe, avez-vous une
idée du pays dont il s’agit ?
Réponse libre.
Strophe 2
8. Qu’indique le conditionnel des verbes
« décoreraient », « parlerait » ?
C’est le conditionnel de l’imagination, de
la représentation mentale.
9. Après le pays dans la strophe 1, de quel lieu
s’agit-il dans la strophe 2 ?
Il s’agit d’un intérieur.
10. Comment comprenez-vous « parlerait » ?
Tous les éléments évoqués provoquent
des sensations d’origines différentes ;
mais identiques dans la perception qu’en
a la sensibilité. Toutes ces perceptions
sont (seraient) en correspondance entre
elles et cette synesthésie permet
(permettrait) de vivre l’idéal dont rêve le
poète.
Strophe 3
11. De quel lieu s’agit-il dans cette strophe ?
Il s’agit d’un paysage extérieur qui
s’agrandit aux dimensions du monde.
12. Quelle est la place de la femme dans ce
lieu ?
Elle en est le centre.
13. Avez-vous une idée claire du pays dont il
s’agit ?
Réponse libre.
Plan de leçon
1. Un rêve heureux
Un rêve
• Ce n’est pas la réalité de ce qui est
vécu : « Songe à la douceur /
D’aller Là-bas vivre ensemble ». Ils
n’y sont pas. Là-bas signifie
d’abord un ailleurs.
• La strophe 2 est écrite au
conditionnel.
Un amour comblé
• L’amour ressenti par Baudelaire, la
femme aimée : sœur d’élection
(vers 1), au centre du monde
(strophe 3, vers 4, 5, 6)
• L’amour partagé.
• La plénitude, l’accomplissement
des êtres
◗ « Aimer à loisir / Aimer et
mourir ».
◗ Luxe, beauté des tableaux
(strophes 2, 3) le refrain
◗ La composition du poème :
élargissement des tableaux.
On passe du pays à un
intérieur, puis à une vision
très ouverte du monde
extérieur.
2. L’amour, moyen d’accéder à l’idéal par le jeu
des correspondances
« La nature est un temple où de vivants
piliers
Laissent parfois sortir de confuses
paroles »
Dans ce poème, Correspondances,
Baudelaire pose l’existence d’un
monde sacré, perçu par les seuls
poètes, qui entendent son langage
par le moyen des sensations qu’ils
perçoivent.
* Correspondances : Baudelaire parle
de correspondances quand des
sensations de nature et d’origine
différentes sont ressenties comme
semblables. C’est la définition de la
synesthésie. Voir le poème
Correspondances, dans lequel il
donne des exemples « Il est des
parfums frais comme des chairs
d’enfant / Doux comme les hautbois,
verts comme les prairies ». La
sensation olfactive est en
correspondance avec une sensation
tactile, auditive, visuelle.
Un art poétique : En faisant jouer les
correspondances dans l’amour, le poète
va parvenir à ce monde de l’idéal. C’est
l’objet même de la poésie de réaliser cette
démarche.
Dans l’invitation au voyage :
• La femme et le pays sont en
correspondance.
• Tous les éléments de l’intérieur
sont en correspondance les uns
avec les autres. Les sensations
qu’ils occasionnent constituent un
seul langage perçu par le poète.
• Cette femme, cet amour et tout ce
qui l’entoure constituent un moyen
parfait pour atteindre l’idéal.
Mais rêve…
Cette réalisation heureuse n’existe
qu’en projet, en invitation, dans un
poème.
3. Versification
Trois strophes, séparées par deux
refrains.
Vers : imparisyllabiques. Chaque strophe
est bâtie sur le rythme suivant : 5-5-7-5-
5-7-5-5-7-5-5-7. Cf. L’Art poétique de
Verlaine « De la musique avant toute
chose/ Et pour cela préfère l’impair/ Plus
vague et plus soluble dans l’air/Sans rien
en lui qui pèse ou qui pose. »)
✓ Production orale :
Dire ce poème en respectant le nombre
de pieds.
✓ Compréhension/réception de l’oral :
Écouter ce poème mis en musique par
Henri Duparc.
1 Pense, rêve.
2 Forme de pluriel utilisée en peinture.
3 Mélangés : soleil et nuages.
4 Brillants.
5 Rendus très lisses.
6 Parfum précieux extrait d’une substance venant du cachalot.
7 Pluriel de canal.
8 Bateaux.
9 Satisfaire.
10 Ton plus petit désir, autrement dit, tous tes désirs.
11 Ici, couleur jaune rougeâtre.
Fiche 23 V. Khoury-
Ghata (née en 1937)
L’auteur : Elle est née au Liban. Sa langue maternelle
est l’arabe ; elle a appris le français par son père. Après
des études de lettres, elle devient journaliste à
Beyrouth. Après son divorce, elle se remarie à un
Français et s’installe à Paris en 1972. Elle a écrit de
nombreux recueils de poèmes et des romans. Son œuvre
est reconnue et saluée par des prix.
[Une Française travaille depuis peu dans une ONG, dans un minuscule village
arabe très pauvre « entre la montagne et le désert ». L’équipe se compose du
Docteur Paul, de Gonzagues, un stagiaire, et d’Amina, une recrue locale, vieille
fille, un peu marginale dans ce village. « L’étrangère », comme l’appelle Amina,
est douloureusement confrontée à une autre culture, à la tradition,
essentiellement à ce qui touche la situation des femmes. Mouvement parallèle
pour Amina, confrontée à la situation d’une femme européenne. Ce sont ses
réactions que l’on voit ici.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Tous les Français de l’ONG sont désignés
comme « fonctionnaires ». Qu’est-ce que cela
implique du point de vue d’Amina ?
Ils ont tous une situation stable au sein
d’une organisation.
2. Selon Amina, dans quel domaine l’esprit des
femmes du pays a-t-il l’obligation de s’exercer ?
Les femmes sont confinées au domaine
de l’irrationnel, de la superstition.
3. Selon Amina, dans quel domaine l’esprit des
hommes peut-il s’exercer ?
Les hommes savent lire et écrire. Ils
peuvent donc lire le Coran, mais ce savoir
est une ouverture à beaucoup d’autres
domaines.
4. Amina compare l’activité des hommes à celle
des femmes. Quelle articulation logique utilise-
t-elle ?
Elle utilise « tandis que » qui marque
l’opposition.
5. Selon Amina, « l’étrangère » comprend-elle
la situation des femmes de ce pays ? Relevez le
texte qui vous éclaire sur ce point.
Non. Amina dit « Comment lui
expliquer… », §1, ce qui veut dire que ce
n’est pas facile, que c’est l’inégalité de
traitement qui sera difficile à faire
entendre.
6. Relevez le texte qui dit comment Amina
supporte sa condition de femme.
§2.
7. Quel est son souhait ?
Elle voudrait ressembler à l’étrangère, et
particulièrement savoir lire et écrire.
8. Comment comprenez-vous « un rêve qui
marche, mange et dort » ?
Le rêve d’Amina est incarné, réalisé par
cette femme réelle, « l’étrangère ».
II. EXPLOITATION LITÉRAIRE
2. Le personnage d’Amina :
a. Quelle est sa situation ?
Elle travaille avec les étrangers. Elle est
analphabète.
b. Quel regard porte-t-elle sur sa culture ?
Elle analyse la situation des hommes et la
situation des femmes. Elle est consciente
de l’inégalité et de l’injustice.
c. Quel regard porte-t-elle sur « l’étrangère » ?
L’étrangère est son « rêve éveillé ».
d. Quelle est sa situation psychologique ?
C’est une situation désespérée : elle sait
qu’elle ne saura jamais lire et écrire.
Plan de leçon
1. Deux mondes très éloignés l’un de l’autre.
Khouf :
• monde rural pauvre (présence
d’une ONG).
• Forte emprise de la religion
musulmane dans sa version la plus
intégriste, notamment pour ce qui
concerne la condition des femmes.
• Population peu éduquée :
◗ Les hommes accèdent à la
lecture, d’abord pour le
Coran, mais c’est un savoir
qui peut ouvrir sur d’autres
possibilités.
◗ Les femmes sont
analphabètes ; leur monde
leur interdit l’accès à la
lecture et les confine dans la
superstition, la magie.
Monde de « l’étrangère » :
• Monde riche.
• Monde éduqué : les gens savent
lire.
2. Conséquences du contact entre ces deux
mondes
Pour « l’étrangère » :
Elle a une situation stable, assise :
« Fonctionnaire ».
Pour elle, le saut culturel est difficile
à faire : elle semble ne pas
comprendre, d’après Amina, pourquoi
il y a tant d’analphabètes,
notamment toutes les femmes, et
Amina dit qu’elle aura du mal à en
expliquer la raison (§1).
Pour Amina :
• Contact révélateur par les prises de
conscience qu’il provoque :
◗ Sur l’autre : elle entend et
voit une femme qui pense et
vit autrement que celles de
son pays. Elle apprend
qu’une femme peut être
autre chose.
◗ Sur elle-même et son
monde : elle voit l’inégalité,
l’emprise de la superstition.
• Contact provocateur
◗ Désir de changement : elle
rêve de ressembler à cette
femme, de savoir lire et
écrire.
◗ Désespoir : son rêve est
impossible (§2).
◗ Solitude : elle n’est plus
comme les femmes du pays
et elle n’est pas comme
« l’étrangère ».
3. Un texte militant
Réquisitoire contre l’injustice de la
condition des femmes en pays musulman
intégriste.
Plaidoyer pour l’instruction des femmes.
Validité de l’opposition Nord/Sud faite
dans le texte ?
S’il s’agit du plan économique, il est
effectivement « plus avantageux » de
vivre au nord. Mais ce n’est pas le sujet
essentiel de ce texte. Ici, Vénus Khoury-
Ghata traite de la condition des femmes
en pays musulman intégriste. Les deux ne
se recouvrent pas exactement.
1 Personne qui occupe une fonction publique. Ici, elle est salariée
d’une ONG.
2 Français ; nom formé sur « Français » avec une terminaison
arabe que les Français d’Algérie (Pieds Noirs) donnaient aux
Français de France.
3 École coranique.
4 Objet auquel on attribue des pouvoirs magiques.
5 Le mari qui trompe sa femme.
6 Ensorceler.
7 Entrouverte.
8 Lavage d’une partie du corps comme purification religieuse.
9 Petit tremblement souvent accompagné d’une sensation de froid.
Ici, signe d’une grande émotion.
10 Image pour dire que le cerveau, très gêné par la grande chaleur,
n’est plus capable de fonctionner.
11 Village imaginaire, situé au sud du Maghreb, d’après les
références données dans le texte.
Fiche 24 M. Aymé
(1902-1967)
L’auteur : Titulaire du baccalauréat, il vient à Paris et
exerce différents métiers, dont le journalisme. Après le
succès de La Jument verte, il se consacre uniquement à
l’écriture. Son pessimisme, son ennui devant le monde
moderne le conduisent vers le merveilleux. Son œuvre,
reconnue, comporte des nouvelles, des romans, du
théâtre. Il a également travaillé pour le cinéma.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Il y avait… incommodé : Quel est le don de
Dutilleul ?
Il traverse les murs sans en être gêné.
2. Qu’en concluez-vous pour la suite de la
nouvelle ?
C’est un conte.
5. Il portait… melon : Portrait de Dutilleul.
C’est un homme banal.
4. Dutilleul venait d’entrer… muraille : Comment
Dutilleul découvre-t-il son don ?
Il le découvre par hasard, un soir de
panne d’électricité.
5. Cette étrange faculté… son cas : Comment
réagit-il ?
Il pense qu’il est malade.
6. Le docteur… thyroïde : Comment qualifier le
diagnostic du médecin ?
Il est faussement scientifique, fantaisiste,
invraisemblable.
7. Il prescrivit… fin : Comment qualifier la
prescription du médecin ?
Elle est invraisemblable et faussement
scientifique : « pirette » est un mot
inventé et le centaure n’existe pas.
Il recommande le surmenage : c’est un
trait ironique de la part de l’auteur qui se
moque des fonctionnaires, réputés peu
actifs (ronds-de-cuir).
Plan de leçon
1. Source du comique : Décalage entre réalisme
et invraisemblance, la fantaisie.
Éléments qui échappent au réalisme :
• Le don de Dutilleul.
• La consultation médicale :
◗ Aucun étonnement de la
part du médecin. Le don
extraordinaire est considéré
comme une maladie
ordinaire.
◗ Diagnostic et traitement
fantaisistes.
Éléments réalistes :
• Personnage de Dutilleul :
personnage traditionnel du rond-
de-cuir, banal, timoré, vieux jeu,
sans imagination et peu actif.
• Sa réaction : il se considère comme
malade et va donc consulter un
médecin.
• Le déroulement de la consultation
chez le médecin : Ecoute,
diagnostic, prescription.
2. Un conte fantastique
Un conte :
Les données de l’histoire qui commence
sont invraisemblables. Elles créent un
monde surnaturel, qui ne se rencontre
pas dans la réalité.
Un conte relevant du fantastique :
Le gente littéraire fantastique se
caractérise par l’introduction du surnaturel
dans un cadre réaliste. Ici, Dutilleul, la
banalité faite homme, évolue dans un
monde réaliste et voit soudain surgir le
surnaturel.
1 Bizarre, étonnant.
2 Gêné.
3 Lunettes sans branches se portant sur le nez.
4 Petite barbe sur le menton.
5 Entrée.
6 Il tâta plusieurs fois pour se diriger.
7 Reproches, critiques.
8 Ne manqua pas…
9 Fausse technicité médicale.
10 Conseilla. Le médecin note sa prescription de médicaments sur
un papier, une ordonnance.
11 Activité intense.
12 Fausse technicité scientifique. « Pirette » est un mot inventé.
13 Créature qui n’existe pas.
Fiche 25 J. Zobel
(1915-2006)
L’auteur : Il est né en Martinique, d’une mère employée
de maison et d’un père chauffeur de maître. Il est
d’abord élevé par sa grand-mère, qui travaille dans une
plantation. Il fréquente l’école de Petit-Bourg, puis le
lycée de Fort-de-France. Titulaire du baccalauréat, il
travaille au service des Ponts-et-Chaussées. Pendant la
guerre, il est maître d’internat au lycée. Il fait la
connaissance de Césaire, qui l’encourage. Après avoir
été attaché de presse du gouverneur Ponton (envoyé de
de Gaulle), il part à Paris en 1946, reprend des études à
la Sorbonne, est professeur. En 1957, il part au Sénégal
où il occupe des fonctions importantes. Retraité en
1974, il rentre en France, dans un village du Gard où il
meurt en 2006. Une large partie de son œuvre,
notamment La Rue Case-Nègres, est inspirée de la vie
martiniquaise, qu’il retrace avec authenticité.
…la Route Didier, tel qu’on prononçait ces trois mots, n’était-
ce pas ce qu’il y avait de plus désirable et de plus respectable !
Quartier prestigieux, ô combien !
En tout cas, la circonspection1 , le conformisme qui
marquaient l’attitude et les moindres propos des domestiques –
les seules personnes avec qui j’avais contact – en disaient assez
sur la soumission qu’ils vouaient2 à leurs maîtres et leur respect
pour ce lieu qu’ils s’appliquaient à ne troubler aucunement, se
méfiant de leur exubérance de nègres, et s’astreignant3 à vivre
aussi effacés que possible.
Pourtant on ne voyait presque pas les propriétaires de la Route
Didier.
Le matin et le soir, j’apercevais, au fond de luxueuses
automobiles qui sortaient silencieusement par les portails ou y
entraient, un homme tout rosé, mollement installé. Parfois,
c’était des femmes blanches, habillées comme des colibris4 . Ou
bien des enfants pareils à des anges de la Fête-Dieu5 . De temps
en temps aussi, je les entendais (les femmes surtout) jeter des
ordres à leurs domestiques d’une voix de pintade6 et avec un
accent qui – je ne sais comment – associait la platitude au
pédantisme7 .
L’existence de ces gens-là était la raison d’être essentielle des
locataires du Petit-Fond.
Je me trouvais avec ceux-ci au milieu d’une catégorie de
nègres que je ne connaissais pas encore.
Non, le Petit-Fond ne ressemblait quand même pas à la rue
Cases-Nègres, et je ne pouvais me retrouver avec mes nouveaux
voisins comme avec mes vieux amis du Petit-Morne ou de
Sainte-Thérèse.
Ceux de la rue Cases-Nègres et du Petit-Bourg, tels des
forçats8 , trimaient9 et s’épuisaient au profit de l’espèce des
békés ; ils les subissaient douloureusement, mais ils ne les
portaient pas dans leur cœur. Ils ne se prosternaient10 pas devant
eux. Tandis que ceux de la Route Didier formaient une catégorie
dévouée et cultivant avec dévotion la manière de servir les
békés.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
§2
1. De qui parle José, le narrateur ?
Il parle des domestiques des békés sur la
Route Didier.
2. Relevez les noms qui définissent l’attitude
des domestiques envers leurs maîtres et les
lieux qu’ils habitent.
« Circonspection, conformisme,
soumission à leurs maîtres, respect pour
ce lieu. »
3. Comment les domestiques se caractérisent-
ils eux-mêmes ?
« Exubérance de nègres. »
§4
4. Qui sont ceux dont parle le narrateur ?
Il parle des békés.
5. Qu’est-ce qui caractérise les hommes ?
La richesse, la couleur de peau, la
mollesse.
6. Relevez les traits qui caractérisent les
femmes.
« babillées comme des colibris, voix de
pintades, platitude, pédantisme. »
L’existence… Petit-Fond
7. Comment comprenez-vous cette phrase ?
« La raison d’être essentielle » : cela
signifie que, non seulement les
domestiques sont là parce qu’il y a des
békés à servir, mais qu’ils justifient leur
existence par celle de leurs maîtres. Cette
soumission existentielle est une grave
aliénation.
3 derniers §
8. Retrouvez les différentes catégories sociales
dont parle le narrateur et leurs caractéristiques.
Les békés : blancs, propriétaires
exploitant les noirs.
Les ouvriers des plantations : noirs,
exploités.
Les Pauvres de la ville (Sainte-Thérèse et
Petit-Morne).
Les domestiques de la Route Didier :
noirs, aliénés.
9. Quelle information le narrateur donne-t-il sur
lui-même ?
Il ne partage pas l’aliénation des
domestiques de la Route Didier.
Plan de leçon
1. Description des la société martiniquaise dans
les années 30
Les structures sociales et leur répartition
géographique
• Monde rural : Rue Cases-Nègres,
Petit-Bourg. Economie de la canne
à sucre. Propriétaires blancs békés,
personnel noir, pauvre.
• Monde pauvre de la ville : Petit-
Morne, Sainte-Thérèse.
• Békés : blancs, riches. Habitants du
quartier « prestigieux », La Route
Didier.
• Leur personnel de service : noirs,
habitant le Petit-Fond.
Les mentalités
• Personnel noir des plantations :
« Ils les (békés) subissaient
douloureusement, mais ils ne les
portaient pas dans leur cœur. »
• Békés : les femmes sont
arrogantes.
• Le personnel de service des békés
de la Route Didier : aliénation, se
privent eux-mêmes de leur
humanité, de leur dignité.
Peinture d’une société héritée de
l’histoire.
• Héritage de l’économie :
l’esclavage a été supprimé, mais
les noirs « triment » dans les
plantations.
• « Héritage des peaux » : les békés
possèdent et dirigent, les noirs
travaillent pour leur bénéfice.
• Héritage des mentalités : les
femmes des békés se croient
supérieures à leur personnel noir ;
ce personnel noir se croit inférieur
aux békés : Il y a encore du
chemin à faire pour que les uns et
les autres aient une vue plus
exacte et plus juste de l’humanité.
2. Fiabilité de cette peinture, de ce
témoignage ?
Rappel : ce texte est le témoignage d’un
auteur, c’est-à-dire, le message d’une voix
singulière.
Texte autobiographique : Comparer la
biographie fournie à ce texte.
Le point de vue de Zobel :
• Le jeune homme est conscient de
l’aliénation des noirs du Petit-Fond.
• Le narrateur juge :
◗ Les békés, surtout les
femmes (Voir leur portrait).
◗ Les noirs à leur service.
◗ La situation des noirs des
plantations, à peine mieux
que des esclaves, mais
conscients de leur sort.
Fiabilité de ce témoignage ?
• Rechercher de l’information sur
l’histoire de la Martinique,
notamment dans les années trente.
• Après comparaison :
◗ Peinture de la réalité.
◗ Mais, dans cette page,
généralisation de Zobel :
tous les personnels de
service pensaient-ils ainsi ?
◗ Dans cette page, rien sur la
catégorie des mulâtres.
Conclusion : toutes les réalités de la
Martinique de cette époque ne sont pas
dans cette page, mais globalement, c’est
un témoignage fiable.
3. Un texte engagé
Il dénonce des réalités en les exposant :
• Une société héritée du temps de
l’esclavage : réalités socio-
économiques
• Une société structurellement
inégalitaire où la couleur de la
peau joue un rôle majeur.
• Des mentalités qui ont encore
beaucoup à évoluer.
Une revendication implicite
• Reconnaissance de l’injustice, de
l’exploitation faite aux noirs.
• Reconnaissance de la dignité
humaine.
• Reconnaissance de l’identité créole.
1 Prudence.
2 Portaient avec beaucoup d’ardeur.
3 S’obligeant, se contraignant à…
4 Petits oiseaux tropicaux très colorés.
5 Lors de cette fête religieuse, les enfants étaient costumés en
anges.
6 Oiseau de basse-cour au cri désagréable.
7 Fait de celui/celle qui veut étaler son savoir.
8 Nom donné aux hommes condamnés aux travaux forcés.
9 Travaillaient très durement.
10 S’incliner dans une attitude d’adoration.
Fiche 26 J. Echenoz
(né en 1947)
L’auteur : Après des études, il s’installe à Paris en 1970.
Il publie son premier livre en 1979, reçoit le prix
Médicis en 1983 et le prix Goncourt en 1999 pour Je
m’en vais. Son œuvre, couronnée de nombreux prix,
s’inscrit dans la suite des recherches du nouveau
roman.
[Félix Ferrer, la cinquantaine, tient une galerie d’art moderne à Paris. Les affaires
ne marchent pas très bien. « Je m’en vais », dit-il à sa femme, Suzanne. Il vit
plusieurs liaisons, part dans le Grand Nord canadien rechercher des pièces de
grande valeur, revient, se les fait voler, subit une grave opération, retrouve son
bien. Les affaires reprennent, il est riche et il se lie avec Hélène. On est le 31
décembre ; les postiers viennent d’offrir un calendrier au couple qui leur a donné
une forte somme d’argent en remerciement.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Soulignez en bleu ce qui est strictement du
discours direct. Soulignez en vert ce qui est du
discours indirect.
…
2. Comment qualifiez-vous ce qui reste du
texte ?
Du discours indirect libre.
3. Qui parle dans le discours indirect libre ?
Le narrateur et le personnage.
4. Observez les proportions respectives des
trois types de discours ; que concluez-vous ?
Très peu de discours indirect.
La majorité du texte = discours direct +
discours indirect libre.
Une très grande proportion de discours
indirect libre par rapport au discours
direct.
5. Qui est le personnage principal ?
Hélène.
6. Quels sont les arguments d’Hélène pour ne
pas aller chez Réparaz ?
Ne pas être en couple.
Hésitation avant de plonger dans la vie de
couple installé.
7. Comment Ferrer réagit-il ?
Il est surpris.
Il accepte.
Il est désemparé.
Plan de leçon
1. « Une tentative modeste de description du
monde » (Echenoz)
Quel monde ici ? Celui du marché de
l’art : « Martinov…cote actuelle ».
Un couple d’aujourd’hui :
• L’histoire d’amour se défait, et ce,
à l’initiative de la femme.
• L’argent pervertit les rapports
humains.
É
• Évolution de la mentalité féminine :
C’est le confort, l’installation et la
durée qui font hésiter Hélène. C’est
une rupture avec des siècles
pendant lesquels la femme
recherchait l’installation, la durée.
Peur de l’engagement.
• Évolution de l’homme : il est
conciliant, mais surtout désemparé.
« Je ne sais pas. »
2. Un roman, mais…
Analyse des genres dans le texte.
• Récit fait par le romancier
narrateur, dialogue rapporté au
style indirect : un roman.
• Théâtre : dialogue (discours direct
+ discours indirect libre) et
didascalies ; c’est la majeure partie
du texte.
Glissements entre discours direct, indirect,
indirect libre.
Particularité des différents styles7 :
Dans le discours direct, le
romancier narrateur s’efface pour
mettre ses personnages sur le
devant de la scène.
Dans le discours indirect il est au
premier plan, ses personnages au
second.
Dans le discours indirect libre,
narrateur et personnages sont sur
le même plan. Le premier
accompagne ses créatures.
Conclusions :
• Le lecteur glisse constamment de
la conscience d’Hélène à celle de
Ferrer, à celle du romancier. (Voir
la FICHE 28, texte de Nathalie
Sarraute).
• Dans ce texte, on constate une très
grande présence du romancier
narrateur puisque discours direct et
indirect libre sont majoritaires.
• Présence du romancier : regard
ironique sur le monde qu’il raconte.
1 Client de la galerie.
2 Tout compte fait, tout bien considéré.
3 Peintre.
4 Estimation de valeur d’un peintre, par exemple.
5 Étant donné.
6 Annuler sa présence à la soirée.
7 Consulter L’Énonciation en linguistique française de D.
Maingueneau. Paris, Hachette Supérieur, 1994.
Fiche 27 A. Cohen
(1895-1981)
L’auteur : Il est né à Corfou (Grèce) dans la
communauté juive. Sa famille s’est réfugiée à Marseille
en 1900 à la suite d’un pogrom. Il a vécu ensuite en
Suisse où il a fait des études de droit, puis de lettres. Né
ottoman, il a obtenu la nationalité suisse en 1919. Il a
été haut fonctionnaire, puis a eu une activité
diplomatique pendant la guerre (Comité
Intergouvernemental pour la Protection des Réfugiés),
est devenu directeur d’institutions spécialisées aux
Nations Unies. Son œuvre – poèmes, romans – est très
marquée par l’inspiration juive.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Premier paragraphe
1. Quelle est l’illusion de ces femmes, selon
Cohen ?
Elles croient qu’elles seront toujours
vivantes.
2. Repérez tous les emplois de « toutes ».
Il y en a 6.
3. Examinez un par un les 5 premiers membres
de phrase commençant par « toutes ».
Quels traits de personnalité veut-il voir chez les
femmes ?
La satisfaction et la fierté de leur physique
(seins, derrière, bouche).
La volonté de provoquer le désir des
hommes.
La superficialité et la méchanceté. La
bêtise.
4. Examinez le dernier membre de phrase
commençant par « toutes » : Relevez les
termes qui marquent l’opposition à ce qui
précède :
Durable, à jamais/provisoires
silence/jacassantes/tout ce qu’elles font
pour susciter le désir des hommes +
médisantes.
Assagies, vertueuses.
5. Combien de phrases ce paragraphe
comporte-t-il ?
Une.
Deuxième paragraphe
6. Quelle définition donne-t-il des hommes ?
« Velus descendants
d’anthropopithèques ».
7. Selon lui, quel est le trait dominant de la
personnalité des hommes ?
« Adorateurs de la force, animal pouvoir
de meurtre ».
8. Quels exemples prend-il pour illustrer son
point de vue ?
Supporters irraisonnés de football.
Supporters fanatiques de coureur cycliste.
9. Comment les juge-t-il ?
Crétins, malheureux.
10. Combien de phrases ce paragraphe
comporte-t-il ?
Une.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Qui représente le pronom « Ils » ?
Les gens dans la rue.
2. Où sont-ils ?
Dans la rue, sur le trottoir.
3. §2 : De quoi s’agit-il quand l’auteur parle de
« remous » ?
Les gens marchent, puis ils s’arrêtent
devant des vitrines. Cela fait des
mouvements dans le flot de la circulation,
parfois des bouchons.
4. Que font-ils ?
Ils regardent une vitrine particulière : une
exposition de linge de maison et un
personnage avec des lumières
clignotantes.
5. Relevez le texte qui dit quel est leur
comportement devant la vitrine.
§3.
6. §4 : comment le texte décrit-il le
comportement des enfants ?
Leur comportement est différent de celui
des adultes. Ils n’ont pas la même
fascination qu’eux. Ils s’ennuient et
patientent.
Plan de leçon
1. La position du lecteur
Il s’identifie :
• Essentiellement à la conscience du
narrateur, au « je » qui dit « ils ».
C’est une conscience indéterminée
puisque le texte n’en dit rien.
• Mais aussi à « ils », et aux petits
enfants dans le dernier
paragraphe.
2. De quoi s’agit-il dans cette page ?
Ce qui est visible : des gens circulent
dans la rue, sur des trottoirs. Des groupes
s’arrêtent devant des vitrines, notamment
celle d’une exposition de blanc. Ils
regardent un éclairage clignotant. Ils
tiennent des enfants par la main. Il ne se
passe rien, il ne se dit rien. C’est une
scène très banale, passée, sans qu’on ait
d’éléments pour situer ce passé.
La vision du « je » narrateur :
• Il est le sujet principal de ce texte ;
il donne SA vision de la scène.
• Il peint l’invisible qu’il voit sous la
scène banale.
• Que voit-il ?
◗ « Ils » : groupe flou, indistinct,
sidéré par un spectacle sans
grand intérêt. Le narrateur voit
en eux « une sorte de
satisfaction désespérée ».
◗ L’état de « sous-conscience »
des adultes et celui des
enfants qui les accompagnent,
ces « petits mouvements,
petits tourbillons qui se
produisent sous la surface. Ce
sont des drames
microscopiques (…) toujours
internes, cachés, on ne peut
que les deviner à travers la
surface, à partir de nos
conversations et de nos
actions, des actions tout à fait
banales. ». Sarraute a appelé
ces mouvements des
« tropismes ». (Référence à la
réaction d’orientation des
plantes à la lumière, par
exemple.)
◗ Le rapport enfants/adultes :
Des intérêts divergents. Les
adultes sont captivés par un
spectacle publicitaire, les
enfants non. La satire affleure.
De plus, chacun est une
planète pour l’autre, la
solitude, un fait.
◗ Leur rapport n’est ni la
violence, ni l’agressivité, ni
même l’hostilité, mais une
sorte d’indifférence des
seconds aux premiers, de
patience contrainte pour les
enfants. C’est ce que Sarraute
appelle une « sous-
conversation ».
Une exploration nouvelle dans
l’histoire de l’écriture.
En choisissant de peindre l’invisible,
ces petits mouvements intérieurs
dont les protagonistes n’ont pas
forcément conscience, Nathalie
Sarraute est devenue une figure
majeure du nouveau roman pour
l’exploration de l’homme.
3. Comment N. Sarraute peint-elle cet
invisible ?
Vocabulaire, images et comparaisons
empruntés au bestiaire, au monde végétal
ou physique : déshumanisation de « ils »
dans les deux premiers paragraphes.
« Ils » sont décrits comme une sorte de
liquide désagréable circulant dans la rue,
sur le trottoir.
Distanciation par l’imparfait.
✓ Production écrite :
Un ami vient chez vous. Vous êtes
occupé(e) à un travail urgent. Il est très
ennuyé parce qu’il a besoin d’argent, et il
est gêné de vous demander de lui en
prêter.
• Racontez la scène une première
fois, en écrivant le dialogue qui
sonne dans l’air et ce qui se dit
dans votre tête dans le même
temps.
• Racontez la scène une deuxième
fois, en reprenant évidemment le
dialogue qui sonne dans l’air, et en
imaginant ce qui se dit dans la tête
de votre ami dans le même temps.
✓ Deux chefs d’état se saluent devant les
journalistes. Imaginez leur sous-
conversation.
✓ Vous êtes invité(e) dans une fête. Vous
êtes assis(e) dans un fauteuil, seul(e),
un verre à la main. Quelqu’un vous dit :
« À quoi tu penses ? », et vous
répondez « À rien ! ».
Est-ce bien sûr ? Essayez de vous
rappeler…
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Repérage des faits de
langue
• L’imparfait.
• Le passé simple.
Compréhension de l’écrit
Strophe 1, 2, 3, 4
1. Quelles informations donne la strophe 1 ?
Les personnages.
L’environnement et les circonstances.
2. Dans les strophes 2, 3, 4, qu’apprenons-nous
sur le jeune homme ?
Un adolescent mal à l’aise.
Sensualité non éveillée devant la femme.
3. Qu’apprenons-nous sur Rose ?
Une femme : vingt ans.
Sensualité.
Art de la séduction.
Strophe 5, 6, 7, 8
4. Que fait Rose ?
Elle provoque la sensualité de
l’adolescent.
5. Qu’y avait-il à voir que l’adolescent n’a pas
vu ?
Il fallait voir la beauté de Rose et son
invitation à l’amour.
6. Qui voit ce qu’il y avait à voir ?
C’est Hugo, l’homme fait, qui voit ce qu’il
y avait à voir.
7. Reprenez tout le texte : qu’est-ce qui
caractérise l’environnement des jeunes gens ?
C’est une invitation à l’amour.
8. Qui raconte cet épisode ?
L’homme fait.
Plan de leçon
1. Des portraits croisés
Un portrait masculin peu flatté :
L’adolescent qui ne sait encore rien et
Rose, la femme qui, elle, sait.
L’adolescent :
• Immaturité de son corps,
« froid comme les
marbres »,
• Immaturité de son regard,
insensible à la beauté, ne
voit pas l’invitation à
l’amour.
Rose :
• Elle recherche sciemment la
sensualité.
• Elle sait qu’elle est belle.
• Elle sait jouer de sa beauté :
maîtrise de la technique de
séduction et de la stratégie.
Elle joue sur le regard du
partenaire masculin pour
susciter le désir, et elle joue
du regard d’ingénue qui
laisse toute l’initiative à
l’homme.
L’adolescent et l’homme mûr.
L’adolescent qui ne sait pas et ne voit
pas.
Un portrait masculin d’homme fait :
l’homme qui voit et qui sait.
Il voit ce que l’adolescent n’a pas
vu : regard masculin, sensible à
la beauté de la femme :
sensualité tout à fait éveillée.
Il sait ce que signifie le
comportement de Rose :
l’invitation à l’amour.
Il voit le cadre, l’appel de Rose
et ce qu’il aurait dû ressentir et
faire.
2. Un poème d’homme fait.
Scène de son passé : vivacité du souvenir.
Regard de je présent à je passé :
Aucune complaisance pour
l’adolescent qu’il fut ; portrait assez
rare où un homme se montre
insuffisant pour une conduite
amoureuse.
Mais le présent rachète le passé,
l’homme fait lave la maladresse de
l’adolescent. Sa sensualité « voit », et
corrige la conduite de l’adolescent
par le regret : « J’y pense toujours. »
Cela permet un regard amusé,
moqueur, ironique.
3. Un poème du regard et du dit sans dire.
Le regard :
Composition du poème :
• Strophes 1, 2, 3, 4.
Circonstances et
informations sèches.
• Regard de Rose : vers 8.
• Regard des oiseaux
symboliques, merles et
rossignols.
• Strophes 5, 6, 8, 9. Scène
de séduction. « air ingénu »
de Rose, cécité de
l’adolescent, et regard
intelligent de l’homme fait.
• Strophe 10 : épilogue.
Regard tardif de l’adolescent
qui rejoint l’homme fait.
Le dit sans dire :
• Le discours qui sonne dans
l’air n’a rien à voir avec la
scène et ses enjeux.
• Rose ne dit rien, elle
s’exprime par sa conduite.
• Hugo, le poète qui écrit ce
poème, explique peu (vers
5), mais fait comprendre par
divers moyens :
Le déroulement de la
scène.
Le cadre : une invitation à
l’amour.
Les symboles : Merles et
rossignols.
Le sous-entendu,
l’implicite : Rose dit « n’y
pensons plus » et Hugo
« j’y pense toujours » :
aucune référence
grammaticale à « y »,
mais tout le monde
comprend de quoi il s’agit.
4. Versification.
Sept syllabes. On dit du vers de 7 syllabes
qu’il est boiteux, coupé généralement en
4+3 ou 3+4, « ce qui lui donne une allure
sautillante et saccadée, qui convient
parfaitement à certaines poésies
légères. » 9
Rimes croisées.
✓ Activités orales :
• Apprenez ce poème et dites-le en
respectant la versification.
(production)
• Pour la classe (interaction) :
comparez le portrait de Rose à
celui que Cohen fait des femmes
(FICHE 27).
✓ Production écrite :
• Chacun d’entre nous a été, un jour,
particulièrement maladroit,
emprunté, stupide.
Quand et à quelles conditions
accepte-t-on généralement de le
raconter ?
• Imaginez le scène racontée par
Rose dans son journal intime.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Quelle est la nature du mot « orange »,
adjectif de couleur ou nom commun désignant
un fruit ?
C’est un nom.
2. Comment comprenez-vous alors « mot
orange » ?
« L’école libre » : le mot représente une
réalité comparable à une orange, un fruit
plein, juteux, sucré, une friandise
luxueuse à cette époque.
3. Dis… tu sais : Analysez le contenu des paroles
du père de Denise.
Il a peur qu’elle ne sache pas s’adapter à
ce nouveau milieu, que son milieu
d’origine et ce qu’il implique, selon lui, de
manques pour le langage, le savoir, les
savoir-faire en général, la pénalisent.
4. Dis… perdre : Relevez les marques du style
oral familier.
« faudra bien… ». Ellipse de « il ».
« c’est les meilleurs » accord du verbe
non fait (Ce sont les meilleurs)
« Prête pas… ». Négation réduite à
« pas », ellipse de « ne ».
5. Quelles sont les marques de l’appartenance
sociale de Denise et de son père ?
La chanson « Viens poupoule ».
Le langage.
Les recommandations concernant l’argent.
Les vêtements du père.
L’enfant transportée sur la barre du vélo.
Les jeux de l’enfant.
6. Quels sont les jeux des petites filles de
l’école ?
Elles jouent à la poursuite et à la ronde.
7. Qui dit « Ce ne sont pas de vrais jeux » ?
C’est l’enfant.
8. Quels sont les jeux de Denise ?
Se construire une maison avec les casiers
à bouteille de la boutique de ses parents,
jouer à la mère, à cache-cache, au radio-
crochet radiophonique. Certains jeux
entraînent une brutalité que l’enfant
considère comme normale et qu’elle ne
voit pas dans la cour de récréation.
9. Soulignez ce qui est écrit au présent.
Il y a eu l’école libre… peur de rien.
Je n’ai pas envie… sans arrêt.
Plan de leçon
1. Le père : Une conscience sociale aliénée
Les marques de son appartenance
sociale : vêtements, vélo, chanson, forme
du langage, valeur de l’argent.
Le regard qu’il porte sur lui et sa classe
sociale : se regarde comme ignorant,
inférieur, et souffre du hiatus social (« Il
était malheureux »).
Le regard qu’il porte sur la classe sociale
de l’école libre : la considère comme
supérieure, aspire à y voir entrer sa fille,
sait qu’elle va devoir se couler dans ce
moule nouveau, étranger à lui, à son
monde.
Conscience sociale aliénée parce qu’il
accepte comme un fait une hiérarchie qui
le place en bas. Il se dépossède ainsi
d’une forme de dignité.
2. Denise enfant, en route vers l’acculturation
La découverte d’un autre monde :
• par le discours de son père : « mot
orange », l’école est assimilée à un
fruit coloré et luxueux. « Ça
ressemble à l’église » : domaine
étranger au monde quotidien, mais
paré de sacré, de merveilleux.
• par le contact à l’école. Elle
découvre des enfants (vêtements
et jeux) étrangers, un monde
nouveau, policé, avec lequel elle
n’a rien de commun.
La comparaison
• C’est son monde qui est vrai.
• Par opposition, elle juge ce monde
nouveau faux, artificiel. C’est
pourtant là qu’il va falloir vivre et
faire ce qu’il faut pour réussir.
Le premier stade de l’acculturation. –
« Acculturation : adaptation d’un individu
à une culture étrangère ». (Le Robert)
• Elle connaît maintenant l’existence
de deux mondes.
• Elle sait qu’elle va vivre dans les
deux.
• Elle sait qu’elle doit s’adapter au
nouveau.
Ce texte : le prélude à la déchirure
sociale.
3. Un roman autobiographique : une
autofiction ?
Une fiction : l’enfant s’appelle Denise
Lesur.
Une fiction nourrie par la vie et les
réactions d’Annie Ernaux enfant.
Comparez le texte à la biographie d’Annie
Ernaux.
Denise Lesur narratrice :
• Ce double d’Annie Ernaux permet à
la romancière une mise à distance
de son histoire et des sentiments
qu’elle a suscités en elle. Forme de
pudeur ?
• Il permet peut-être aussi de mettre
en avant le témoignage
sociologique, et par conséquent de
critiquer ces structures sociales
exposées dans leur injustice.
Conseil de guerre
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Où est l’enfant ?
Dans sa chambre.
2. Que fait-il ?
Il joue au fort avec les Indiens et les
tuniques bleues.
§1
3. Qui est « on » ?
L’auteur, un adulte.
4. Où est-il ?
Dans le couloir.
5. Pourquoi est-il seul ?
Il a fait sa toilette le dernier et les autres
sont partis au marché.
6. De quoi a-t-il envie exactement ?
Il a envie de se prouver qu’il est encore
capable de jouer comme un enfant.
7. Pourquoi est-il intimidé ?
Il doit retrouver des comportements qu’il
n’a plus depuis longtemps.
Plan de leçon
1. L’enfance telle qu’elle est vécue par l’enfant
Le jeu : une affaire sérieuse
• Pendant laquelle l’imagination règle
totalement la vie de l’enfant, qui
sait pourtant qu’il s’agit
d’imagination.
• Qui l’absorbe tout entier.
L’enfant n’est pas encore entré dans le
jeu social : il n’a aucune arrière-pensée,
ni aucun recul sur lui-même, sur l’image
qu’il donne, sur le regard d’autrui. C’est
une liberté absolue.
Regard de l’enfant sur l’adulte. Seule
préoccupation : est-il apte à entrer dans
mon jeu ?
Est-il un partenaire acceptable ?
Conclusion : l’enfant, un roi dans son
royaume.
2. L’enfance vue par l’adulte
Rôle de l’enfant dans la scène vécue par
l’adulte.
Sans même y penser, encore moins
le savoir, il le domine. C’est un fait.
Il provoque :
• la mémoire.
• la conscience claire d’un univers
perdu, le sentiment de tricher
désormais en faisant semblant de
jouer comme un enfant, en
pratiquant le double jeu.
• le sentiment d’une perte : en
perdant cette faculté de vivre fort,
totalement, dans et par
l’imaginaire, en entrant dans le jeu
social, il a perdu un univers
heureux.
• la nostalgie de cet univers.
• le sentiment de fragilité : l’adulte a
bien compris qu’il aurait bien pu
être refusé par l’enfant, banni,
« exilé » à tout jamais de l’univers
de l’enfance. Il sait la force et la
liberté de l’enfant.
3. Un moment heureux ?
Enjeu risqué : l’enfant va-t-il l’accepter
comme partenaire ? Il hésite, le
« soupèse ». Ce n’est pas gagné
d’avance.
Enjeu gagné : l’enfant l’a accepté.
Mais bonheur relatif :
• Par la conscience de ce qu’il
provoque.
• Parce que l’adulte joue un double
jeu ; il se rassure, mais il sait qu’il
triche.
• Parce que la dualité dans la
conscience est la preuve de
l’univers perdu.
4. Genre du texte
Fragment : Récit et méditation simultanée
sur soi occasionnée par la scène vécue :
différence majeure avec l’enfant qui, lui,
est totalement dans le jeu.
La distanciation dans l’écriture.
• L’acteur de cette scène : Philippe
Delerm.
• Le narrateur : l’écrivain, Philippe
Delerm.
• L’acteur et l’écrivain, ce sont deux
états de la même personne.
L’écrivain prend du recul pour
rendre compte de ce qu’a vécu
l’acteur. Cette distanciation est
traduite par l’emploi de « on »
pour désigner l’acteur.
III. ACTIVITÉS COMPLÉMENTAIRES
✓ Production écrite :
« Des filles qu’on n’osait pas aborder,
des vies qu’on désirait, des mots qu’on
ne savait pas trouver. »
• Analysez cette évocation de la
jeunesse.
• Comparez cette évocation de la
jeunesse à celle du poème de
Victor Hugo (FICHE 29).
• Comparez cette évocation de la
jeunesse à celle du texte de Jean
Anouilh (FICHE 8).
• Quelle différence semble-t-il y avoir
entre le jeune garçon évoqué par
la phrase suivante : « des filles
qu’on n’osait pas aborder, des vies
qu’on espérait, des mots qu’on ne
savait pas trouver » et l’enfant du
récit ?
Vous êtes avec un enfant de cinq
ans. Vous lui racontez une histoire
que vous inventez.
Racontez la scène en construisant un
récit mêlé à votre méditation
simultanée.
Comparez la forme de ce texte à
Pressentiments (FICHE 33).
1959)
L’auteur : Il a été très jeune de santé fragile. Après de
brillantes études, il est devenu ingénieur. Pendant la
guerre, il fréquente St-Germain-des-Prés, joue de la
trompette dans un orchestre de jazz amateur. Il
commence à écrire et à publier. Il abandonne son métier
d’ingénieur en 1947 pour ne se consacrer qu’à son
activité d’écrivain. Son œuvre comporte des romans, des
nouvelles, des contes, de la poésie, du théâtre, des
essais, des chansons, des articles sur le jazz. Il connaît
encore un très grand succès, notamment parmi les
jeunes.
[Colin et Chloé sont jeunes et ils s’aiment ; ils vivent le grand bonheur. Colin est à
la patinoire quand on l’appelle : Chloé a eu un problème. Lequel ? Il ne le sait
pas.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. §1 : Comment comprenez-vous « les gens,
devant ses yeux, s’inclinaient lentement, pour
tomber, (…), allongés sur le pavé » ?
Les gens ne tombent pas vraiment ; c’est
l’impression qu’a Colin en courant. Le
texte dit bien « devant ses yeux ».
2. §2 : Comment comprenez-vous « l’angle aigu
de l’horizon (…) se précipitait vers lui » ?
Il faut imaginer en trois dimensions ce
que voit Colin : un angle aigu est un
angle inférieur à 90 degrés. Colin court
dans la rue ; elle est bordée par les
maisons et par la perspective, son œil voit
un angle aigu. Comme il court très vite, il
a l’impression que cet angle se rapproche
de lui.
3.§2 : De quelle « pyramide » s’agit-il ?
De la même façon, le ciel forme aussi un
angle aigu. Entre le ciel et le sol, il a
l’impression de voir une forme de
pyramide.
§4
4. À partir de « pourquoi ça ne suffit pas »
jusqu’à la fin du paragraphe, qui parle ?
C’est la voix de Colin, ce qui se passe
dans sa conscience pendant qu’il court.
5. Découpez les différents moments de ce
morceau du texte.
– « Peut-être est-ce un accident… mais
non, Colin, n’entre pas ». Il imagine la
pire situation : elle est morte, il a tout
perdu.
– « Elle est peut-être blessée seulement…
l’odeur de ses cheveux ». Il imagine une
situation où elle est blessée, il n’a rien
perdu.
– « Jamais plus… ses cheveux. ». Il
retourne à la première phase : elle est
morte et il a tout perdu.
6. Relevez le passage qui donne la signification
de ce morceau du texte.
« Mais Colin ne savait pas, il courait, il
avait peur. »
✓ Production écrite :
Vous êtes à l’aéroport, vous attendez
un ami. Les passagers sortent et votre
ami n’est pas là. Écrivez ce qui se passe
dans votre tête.
✓ Production écrite ou interaction orale
pour la classe :
• Colin est jeune. Cette consciente
tragique vous paraît-elle fréquente
chez les jeunes, alors qu’on parle
souvent de l’insouciance de la
jeunesse ?
• L’écume des jours a eu et a encore
un grand succès auprès de la
jeunesse. Ce texte vous permet-il
de comprendre pourquoi ?
en 1954)
L’auteur : Anaïs Coste : pseudonyme d’une universitaire
spécialiste de Colette. Elle écrit des « fragments »
qu’elle regroupe en recueils, auxquels elle donne un
titre. Jusqu’à présent, elle n’a pas cherché à publier. Si
elle souhaite être lue, c’est par des lecteurs qu’elle
choisit et dont elle attend une lecture bienveillante, ce
qui ne signifie pas complaisante.
Pressentiments
L’Écriveraine
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. Qui est « elle » ?
L’enseignante.
2. Que signifie « voyait » ?
Grâce aux premiers signes de
vieillissement, elle se représentait, elle
avait présente à l’esprit l’image de vieille
femme qu’elle allait devenir, elle le savait.
3. Quelle est la métaphore de ce premier
paragraphe ?
La métaphore d’une embarcation qui
commence à prendre l’eau.
4. Elle observait… sourcil : Quel est son métier ?
Elle enseigne à l’université.
5. Dans cette peau… elle voyageait : Qui est « Elle »
dans « elle voyageait. » ?
L’enseignante.
6. Relevez les verbes qui décrivent ce
« voyage ».
« franchissait…suivait…longeait… »
7. Quelle est la métaphore principale de ce
paragraphe ?
C’est la métaphore d’un voyage dans un
paysage neigeux.
8. Relevez toutes les métaphores secondaires
dans le deuxième paragraphe.
« vallon… (empreintes de) pas…dunes
d’argile rose… »
9. d’autant plus… fragilité : Que représente le
pronom « elle » ?
« Perfection idéale ».
10. Troisième paragraphe : Que se passe-t-il dans
la tête de l’étudiante ?
Elle interprète le silence comme l’effet
d’une « diplomatie » de l’enseignante
pour lui présenter une insuffisance de son
travail.
11. Quel est le thème majeur de ce texte ?
La peur du vieillissement, de la perte de
la beauté.
12. Qui est le personnage principal ?
La narratrice.
13. Que déduisez-vous de l’imparfait du texte ?
Il introduit une distanciation entre la
narratrice et le personnage de la scène
rapportée, entre l’écrivain et
l’enseignante.
Plan de leçon
1. Une méditation traditionnelle ?
Thème de la fuite du temps et du
vieillissement.
Thème traditionnel, très présent dans
la littérature.
Thème de la jeunesse inconsciente
de ce déclin annoncé de la beauté.
Une écrivain-narratrice omnisciente ?
Il faut bien qu’il y ait un « je » de la
narratrice pour dire « elle » et
désigner chacune des deux
protagonistes, l’enseignante et
l’étudiante.
Cette narratrice est omnisciente : rien
n’est visible, mais elle sait
parfaitement ce qui se passe dans la
conscience de l’enseignante et dans
celle de l’étudiante.
2. Mais là n’est pas le texte
Un dédoublement qui ruine l’idée de
narrateur omniscient : la narratrice et
« elle » enseignante sont une seule et
même personne dans deux états
différents.
• L’enseignante regarde le visage de
l’étudiante. Elle vit et recherche
des impressions.
• La narratrice, elle, analyse les
impressions. Elle vit aussi, mais
autrement : elle prend du recul
pour comprendre et pour dire ce
« je » qu’elle était au moment de
la scène relatée.
Elle est alors écrivain. Elle traduit
cette mise à distance de l’analyse
par le pronom « elle »
et par l’imparfait. Elle interprète
l’attitude de l’étudiante : attitude
vraisemblable, mais peut-être
illustration de sa conviction : la
jeune fille ne sait ni que sa beauté
est fragile, ni qu’elle est l’objet de
nostalgie de la part d’une « sœur »
aînée. Il faut bien alors qu’elle
pense à quelque chose qui a
rapport à la situation pédagogique
où elles sont.
• Son activité en tant qu’écrivain est
évidente non seulement quand on
observe sa démarche d’analyse,
mais aussi, et peut-être surtout,
quand on considère les procédés
d’écriture mis en œuvre. Ils
correspondent à une recherche
proprement littéraire qui relève
d’une activité d’écrivain : lexique
d’une grande précision, densité de
la phrase, et surtout les
métaphores, dont deux sont des
métaphores filées.
Genre du texte.
Le thème : Une méditation lucide sur
soi conduite avec exigence et
pudeur.
Mais surtout : un texte poétique par
le recours aux métaphores. Un
texte de styliste.
✓ Production écrite :
• Ce thème de la nostalgie de la
beauté est-il présent dans votre
culture ?
• Que vous inspire le visage d’une
personne très âgée ?
• Quels sont les dangers du
« jeunisme » ?
• Quels rapports voyez-vous entre
chirurgie et soins esthétiques d’une
part et identité d’autre part ?
✓ Interaction orale pour la classe :
• Regardez le tableau de Rembrandt
(visible sur internet, National
Gallery) :
« Portrait of Aechje Claedr. ». C’est
le portrait d’une femme âgée.
Qu’est-ce qui fait la beauté de ce
tableau ?
1 Selon l’opinion.
2 Terme de navigation : rester dans la même direction.
3 Ici, profil en forme de courbe du visage.
4 Point le plus élevé.
5 Elle absorbait le plus possible…
6 Points qui valident la réussite à un examen universitaire.
7 Contestée : elle s’imagine que le professeur ne donne pas son
approbation à son travail.
8 Approbation.
Fiche 34 P. Éluard
(1895-1952)
L’auteur : Malade, il abandonne très vite ses études. Il
connaît le front en 1917, fait la connaissance de Breton et
d’Aragon en 1919. Il participe activement aux
mouvements dadaïste, puis surréaliste. Il entre au PCF en
1926, en est exclu en 1933, abandonne les surréalistes en
1938. Pendant l’Occupation, il entre dans la Résistance et
rejoint le PCF en 1942. Son poème, Liberté, très connu
aujourd’hui, est parachuté en France à des milliers
d’exemplaires. Après la guerre, il voyage et participe à de
nombreuses rencontres pour la paix. Son œuvre poétique,
dédiée à l’amour et à la politique, est considérée comme
une œuvre majeure du XXème siècle.
[Éluard a noté sur un carnet son émotion et sa colère devant une scène
vue au moment de la Libération de Paris, en 1944 : « Je revois des idiotes
lamentables tremblant de peur sous les rires de la foule. Elles n’avaient
pas vendu la France et elles n’avaient souvent rien vendu du tout. »
Ce poème a été publié dans le journal Les Lettres Françaises en 1944,
puis dans le recueil des poèmes de Résistance, Au Rendez-vous
allemand.]
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Vers 3 à 10
2. Reliez ces vers aux informations qui vous ont
été données.
C’est la scène qu’il a vue : une jeune femme
qu’on vient de tondre. Elle a peur.
3. Quels mots résument le jugement d’Eluard sur
la situation de la jeune femme ?
« malheureuse », « victime ».
4. Comment comprenez-vous « découronnée » ?
Sa tête a été rasée. Elle a perdu ses
cheveux, sa « couronne ».
5. Comment comprenez-vous le sentiment
exprimé dans le vers 2 ?
Le remords : il a vu ce qui était fait. Il aurait
sans doute voulu avoir empêché cela. Il se
sent une responsabilité collective dans ce
qui vient de se passer et regrette cette faute
commise.
Vers 10 à 11
6. Sur quelle opposition est bâtie cette strophe ?
Opposition entre la beauté et la laideur,
l’humiliation.
Vers 16 à 20
7. Comment comprenez-vous « souillée » ?
Elle est salie par la faute d’avoir aimé un
Allemand.
8. Qu’est-ce qui fait d’elle une victime dans ces
vers ?
C’est sa beauté.
Vers 21 à 24
9. Que représente cette scène vue pour Éluard ?
Cette scène est exemplaire de la situation,
de la condition des femmes en général.
Plan de leçon
1. Un poème de circonstance.
Il a été témoin direct. Ce qu’il a vu.
Une belle fille, dépassée par les enjeux de
l’histoire, tondue, humiliée, apeurée.
La scène se passe à la Libération de Paris,
en 1944, à la fin de l’Occupation.
Les réactions d’un témoin bouleversé.
• Il pense que la fille est doublement victime.
◗ Elle paie sa beauté : un Allemand
« amateur de beauté » l’a aimée.
◗ Elle paie cette faute dont elle n’a pas
vraiment conscience, et elle paie à la
place d’autres qui ont commis des
fautes bien plus graves de
collaboration avec l’ennemi.
• Il est scandalisé par la malhonnêteté de ce
transfert hypocrite de culpabilité, par cette
preuve de la bêtise conjuguée à la violence
et la lâcheté.
◗ Vers 1 : Il ne peut pas comprendre,
ce qui implique admettre, ce qu’il a
vu.
◗ Vers 2 : Par le remords, il assume la
responsabilité collective de cette
ignominie.
La fille était déjà tondue et maltraitée
lorsqu’il a vu ce spectacle, il n’y a pas
participé ; mais il l’a vu et il en sait
l’injustice. C’est cette double
conscience qui crée le remords.
• Il est bouleversé par ce qu’on a fait de la
fille.
On a saccagé sa beauté : elle était jeune,
fraîche, belle (strophe 2). On l’a
« défigurée », elle « ressemble aux morts ».
On l’a saccagée en tant que femme : On a
rasé sa chevelure, attribut et symbole de sa
féminité, on l’a « découronnée ». Elle est
symboliquement détruite dans son être de
femme.
On a saccagé sa dignité humaine : par le
traitement qu’elle a subi, mais aussi par « la
robe déchirée ».
• Il est ému par la fille.
Il éprouve de la pitié devant la détresse et la
peur de la fille : « La malheureuse »… « Au
regard d’enfant perdue ».
2. Une élégie.
• Définition :
Une élégie est une œuvre poétique
lyrique dont le thème est la plainte, la
déploration.
• Élégie à cette « enfant perdue ».
Le poète se souvient de ce qu’il a vu,
du regard et de l’état de cette fille et
il ne se tait pas. Il chante pour
dénoncer le scandale, pour dire ses
réactions, ses sentiments. Sans doute
est-ce une façon de vivre et de
dépasser le « remords » qu’il
éprouve.
Dénonçant le scandale et l’injustice
de ce qu’a subi cette fille, il lui rend
un peu sa dignité volée. Il faut se
rappeler la date de publication de ce
poème : au moment de la Libération
de Paris, c’est-à-dire peu après août
1944. C’est donc clairement un
poème de circonstance.
• L’ élégie à une femme s’élargit en une
élégie à la femme.
◗ Éluard sort du cadre historique et des
circonstances particulières. Il voit
dans cette femme et ce qu’elle subit
un symbole parfait de la condition
féminine.
◗ Il rend hommage à deux images de la
femme : la femme-victime et la
femme-mère, consolatrice et
protectrice.
• Forme poétique :
◗ Images et comparaisons.
◗ Des vers libres : vers courts, qui
donnent un rythme rapide et de la
densité.
◗ Des vers inégaux, à quoi il faut
ajouter des groupements de mots
générés par le sens, font varier le
rythme. Ces variations entraînent
l’accent sur certains mots ou groupes,
par exemple les vers 4, 14, 16, 18…
◗ Absence de ponctuation : héritage
surréaliste.
1 Punir.
2 Raser la chevelure.
3 Subjonctif de souhait sans « que ». Formule archaïque.
4 « qui voudra » est le sujet du verbe « comprenne ». Que celui qui
voudra comprenne…
5 Partie de la rue recouverte de blocs de pierre. Ici, sol de la rue faite
de cubes de pierre appelés « pavés ».
6 Salive rejetée par la bouche. Ici, image pour dire humiliation
violente.
7 Fraîche, vive, aimable.
8 Salie.
9 Entourer de tendresse.
Fiche 35 A. Camus
(1913-1960)
L’auteur : Voir fiche 21.
I. EXPLOITATION LINGUISTIQUE
Compréhension de l’écrit
1. En vous aidant des informations qui
précèdent le texte, dites ce que représente « la
vie glorieuse », « la rage et les soubresauts. » .
« La vie glorieuse » représente la
première partie de la vie de Clamence,
jusqu’au rire qui lui a révélé qu’il avait
participé au mal. Pendant cette période, il
se croyait défenseur des valeurs.
« Les soubresauts » représentent toutes
ses tentatives pour recouvrer l’innocence
jusqu’au moment où il constate leur
échec.
2. Quelle est la nouvelle conviction de
Clamence ?
« Il fallait vivre dans la culpabilité ».
3. Clamence raconte son itinéraire personnel.
Observez la forme-même qu’il utilise pour
exprimer ce que va être cette nouvelle phase de
sa vie. Que remarquez-vous ?
Il utilise l’imparfait qui se réfère à son
itinéraire passé, mais il emploie une forme
impersonnelle. Il ne rapporte pas cette
disposition à sa vie propre uniquement. Il
glisse à une formulation générale.
4. En général… accroupissement : Observez la
description de la cellule de malconfort. Qu’en
concluez-vous pour celui qui s’y trouve ?
Impossibilité de se tenir debout ou
couché : il est toujours entre deux
positions.
Véritable torture.
Torture éternelle.
5. Qu’en concluez-vous pour la métaphore « Il
fallait vivre dans le malconfort » ?
Torture irrémédiable et éternelle de la
conscience pour celui qui a découvert qu’il
participe au mal.
6. Cette cellule… si simple : relevez les mots qui
expriment l’opinion de Clamence sur cette
cellule ?
Elle a « d’ingénieuses dimensions », « Il y
avait du génie, et je pèse mes mots, dans
cette trouvaille si simple. »
Admiration provocatrice.
Plan de leçon
1. Bilan de l’itinéraire de Clamence.
« La chute est notre condition naturelle »
• Il faut prendre acte de l’échec de
toutes les tentatives pour recouvrer
l’innocence et renoncer à l’espoir
qu’elles représentaient.
• Il faut donc admettre la
participation au mal comme une
donnée fondamentale de la
condition humaine, quoi qu’on
fasse.
Implications : une conscience
douloureuse, puisqu’il faut donc vivre
• avec le sentiment de culpabilité
que notre condition naturelle
implique, ce qui signifie ne rien
faire, pour participer au mal le
moins possible.
• avec le désespoir que cette
conviction entraîne,
• et, au mieux, la nostalgie de cet
espoir vain.
2. Que signifie alors ce que fait Clamence ?
Clamence n’est plus avocat, mais il
« fait » ; il n’a pas renoncé à toute forme
d’action :
• Le seul fait de parler à des
interlocuteurs qu’il attend dans le
bar où il a ses habitudes est un
acte social.
• Analyse de son discours : il prétend
raconter son itinéraire, mais
l’analyse de son discours dans ce
texte montre clairement que ce
n’est pas son bilan personnel qu’il
fait, mais celui de l’humanité tout
entière.
L’interlocuteur est inévitablement
concerné par ce portrait tendu
comme un miroir.
En glissant de l’auto-accusation à
celle de tous les hommes, il
s’accomplit en jugepénitent.
Que peut-il attendre de cette action par le
discours ? Des réponses qui ne s’annulent
pas, mais qui s’ajoutent les unes aux
autres.
• Pour l’interlocuteur : le conduire au
même bilan que lui. Mais à ce point
de leurs rencontres, son
interlocuteur n’est sûrement pas
naïf, ce qui limite son succès.
• Pour lui :
◗ Diluer sa culpabilité dans la
culpabilité générale ? Mais
cela ne l’abolit pas.
◗ Jouer le prophète du
désespoir, l’anti Jean-
Baptiste, celui du Nouveau
Testament, qui annonçait la
venue du sauveur, et donc
la possibilité de recouvrer
l’innocence, de triompher du
mal et de la mort. À ce
compte, il pratique une
curieuse maïeutique en
faisant naître ses disciples
au désespoir et au triomphe
du mal, et il est tout au plus
une espèce de guide de
damnés, désespérés de
l’être. Il joue pour les autres
le rôle du rire dans sa
propre vie.
Ces deux motivations ne
trouveront jamais de
satisfaction : après cet
interlocuteur, il en faudra un
autre, puis un autre…
◗ Célébrer la nostalgie de son
espoir d’innocence : il se
met du bon côté, celui de la
lucidité douloureuse. C’est
son ultime façon de vivre sa
conscience tragique de la
condition humaine. Il a
besoin d’un partenaire pour
le dire et le redire. Son
discours sans cesse
recommencé est une
célébration pour chanter sa
nostalgie et sa souffrance.
L’ironie, la pudeur, la
provocation, le style soutenu
sont alors les ressources du
style pour masquer le
désespoir de son chant de
deuil.
3. La Chute dans l’œuvre de Camus
Un mythe de la situation littéraire
• Un parallèle évident
◗ Clamence parle. Il confisque
en quelque sorte la parole
puisqu’il raconte son
itinéraire pour répondre à la
question « Qu’est-ce qu’un
juge-pénitent ? »
/l’interlocuteur pense, sans
doute, émet des questions
ou des remarques – jamais
au discours direct dans la
nouvelle, seulement reprises
par Clamence – et surtout, il
écoute.
◗ Camus écrit La Chute / le
lecteur lit et pense ; il ne
peut intervenir.
• L’unité = l’œuvre entière
Le locuteur-écrivain a un projet :
son personnage, Clamence, veut
être juge-pénitent, tendre ce
portrait miroir à un interlocuteur-
lecteur qui, par un acte de
confiance en s’embarquant dans le
livre, perd peu à peu sa naïveté du
début pour rejoindre l’auteur à la
fin. La Chute démontre que l’unité,
c’est l’œuvre entière, que chaque
extrait du texte est à comprendre
dans l’économie de l’ensemble (ce
qui explique la masse
d’informations fournies).
• La littérature : un auteur/une
œuvre / des lecteurs
L’interlocuteur revient écouter
Clamence ; s’il ne revient pas,
Clamence n’a plus à qui parler. Le
lecteur continue à lire le livre. S’il
ne le fait pas, le livre fermé
n’existe plus. On a ici l’illustration
de la définition de la littérature
comme objet de la contemplation
des hommes, impliquant
nécessairement auteur / œuvre /
lecteurs. Cela n’est possible que si
le locuteur-auteur séduit par la
qualité de l’écriture, « le beau
style » qu’on a reproché à Camus
et sur lequel lui-même s’est
interrogé dans La Chute.
Une remise en question des œuvres
précédentes ?
• Non : il sait et dit depuis toujours
que le mal est et demeure. Voir
dans La Peste le personnage de
Tarrou et le dernier paragraphe du
roman. Camus ne renie pas le
docteur Rieux, il lui adjoint
Clamence, celui qui dit qu’il
participe aussi au mal, et qui vient
tempérer ce que La Peste avait de
très, trop, civique. C’est la réaction
d’un Camus blessé dont on a
violemment critiqué « la pensée de
midi, les tâches moyennes » La
Chute n’annule pas La Peste, elle
s’y ajoute.
• Une œuvre au cœur de la
littérature. Certes, Camus s’engage
tout entier dans ses œuvres, dans
son œuvre, mais on y trouve des
vérités qu’il avait à exprimer, des
choses qu’il avait à dire, non une
somme de sa vérité. Dans La
Chute, les circonstances ont fait
qu’il a voulu parler, non de toute sa
pensée, mais d’un aspect de sa
pensée.
Théâtre 1 A1 Adolescents/adultes
3 A1 Adolescents/adultes
5 A1 Adolescents/adultes
8 A2 Adolescents/adultes
10 A2 Adultes
12 A2 Adolescents/adultes
19 B1 Adolescents/adultes
Poésie 14 A2 Adolescents/adultes
16 B1 Adultes
20 B1 Adultes
22 B1 Adolescents/adultes
29 B2 Adolescents/adultes
34 C1/C2 Adultes
Roman 4 A1 Adolescents/adultes
13 A2 Adolescents/adultes
15 B1 Adolescents/adultes
17 B1 Adolescents/adultes
18 B1 Adolescents/adultes
21 B1 Adultes
23 B2 Adolescents/adultes
25 B2 Adolescents/adultes
26 B2 Adultes
30 B2 Adolescents/adultes
32 C1 Adolescents/adultes
35 C1/C2 Adultes
Nouvelle 2 A1 Adultes
6 A1 Adultes
7 A2 Adolescents/adultes
Conte 9 A2 Adolescents/adultes
11 A2 Adolescents/adultes
24 B2 Adolescents/adultes
« Fragments » 27 B2 Adultes
28 B2 Adultes
31 C1 Adolescents/adultes
33 C1/C2 Adultes
Annexe II Tableau par
niveau
Niveau Œuvre Auteur Public
Le Café devant la
gare de Cornavin (in R. Grenier Adultes
Nouvelle pour vous)
T. Ben
B1 Les Yeux baissés Adolescents/adulte
Jelloun
A.
Allah n’est pas obligé Adolescents/adulte
Kourouma
Discours à la
première personne L. Aragon Adultes
(III/ in Les Poètes)
L’Invitation au
C.
voyage (Les Fleurs du Adolescents/adulte
Baudelaire
mal)
Ô Vous frères
A. Cohen Adultes
humains
Vieille chanson du
jeune temps (Les V. Hugo Adolescents/adulte
Contemplations)
Pressentiments (in
A. Coste Adultes
L’Écriveraine)
Au Rendez-vous
P. Éluard Adultes
allemand