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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr.

Arnaud de BISSY 2020/2021

FISCALITÉ DE L’ENTREPRISE

TITRE UNIQUE : L'IMPOSITION DES BENEFICES DES


SOCIETES
Au plan fiscal toutes les sociétés ne sont pas traitées de la même manière du point de vue de
l’imposition de leurs bénéfices. On distingue les sociétés soumises à l’IS et les sociétés qui relèvent
de l’IR.

Ces deux sociétés sont très différentes, les sociétés de capitaux sont soumises à l’IS et les sociétés
de personnes relèvent de l’IR. Elles sont également différentes par la nature de l’impôt qui
s’applique et les conditions d’application de cet impôt.

Lorsqu’une société est soumise à l’IS, elle est considérée comme un contribuable à part entière,
c’est elle qui calcule son bénéfice imposable (BI), qui calcule son impôt sur les sociétés et qui le
paie. Ces sociétés sont nommées sociétés opaques car elles forment un écran entre l’administration
fiscale et les associés. l’AF ne voit que la société en tant que personne morale.

Lorsqu’une société relève de l’IR, elle est dite transparente ou semi-transparente. l’AF aperçoit les
associés derrière la société, elle va imposer les associés et non la société. La société n’est pas
considérée comme un être juridique à part entière faisant obstacle entre ce que voit l’administration
et ses associés. Le bénéfice est calculé au niveau de la société à partir de la comptabilité tenue par
celle-ci mais ensuite le résultat est imposable non pas au nom de la société mais au nom des
associés de cette société, d’où cette transparence.

Les sociétés de personnes sont des personnes morales mais elles ne sont pas imposées à l’IS.
Personnalité morale ne rime pas avec personnalité fiscale.

Il existe des personnes morales qui ne sont pas des sociétés mais qui sont soumises à l’IR ou à l’IS
(les associations sont par principe soumises à l’IS ; les GIE sont soumis à l’IR, ils relèvent du
régime de la semi-transparence, etc).

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Chapitre 1 : Les sociétés qui relèvent de l’IR


Ces sociétés suivent un régime de semi-transparence fiscale parce que le législateur ne leur
reconnait pas une pleine et entière personnalité fiscale dès lors que le propre d’une personne est
d’être titulaire de droits et d’obligations, y compris d’obligations fiscales. Ce n’est pas la société qui
est débitrice de son impôt mais ses associés.

La transparence fiscale est un régime assez subtil, qui pose quelques problèmes car c’est une fiction
et que chaque fois que le droit fiscal se détache de la réalité juridique, cela pose des difficultés. Ce
régime peut néanmoins présenter de nombreux avantages.

Par exemple, la SNC est une société de personnes qui est fiscalement semi-transparente, elle
implique une responsabilité illimitée des associés. Ce type de forme sociale présente de nombreux
avantages, notamment celui de la souplesse de fonctionnement, le propre des sociétés de personnes
est d’être souvent des sociétés familiales, ce sont des sociétés moins complexes à faire fonctionner
que les sociétés de capitaux. La responsabilité illimitée des associés peut également être perçue
comme un avantage. En pratique il n’y a pas de réelle société à risque limité car il est difficile pour
une société d’obtenir un prêt si le gérant ou les associés ne se portent pas garant. Une banque
préfèrera prêter à une SNC car elle sait qu’en cas de problème elle pourra se retourner contre les
associés.
La semi transparence fiscale est un avantage, ce sont les associés qui sont les débiteurs de l’impôt
sur les bénéfices. Les résultats remontent aux associés, c’est la remontée des déficits ou la remontée
des bénéfices.

Section 1 : La notion de semi-transparence fiscale

Ce régime de semi-transparence propre aux sociétés de personne n’est pas récent dans notre droit. Il
a été institué en 1923 car il n’y a pas de raison de traiter différemment les sociétés de personnes, qui
sont souvent des sociétés de famille, des entreprises individuelles. L’idée a été d’étendre le régime
des entreprises individuelles aux sociétés de personnes et de leur faire profiter des avantages
propres à l’IR. On fait comme si les sociétés de personnes étaient des sociétés individuelles à
plusieurs.

Il faut distinguer entre trois notions :


- La transparence : la vraie transparence est très rare, elle consiste à nier complètement toute
personnalité fiscale à la société. La société n’est ni la débitrice de son impôt ni la débitrice de
quelque impôt que ce soit (taxe foncière, etc). Ce type de société a quasiment disparu de notre
droit, il n’en existe qu’un seul type, ce sont les sociétés de multi propriété ou multi jouissance. Il
s’agit de sociétés propriétaires de logements en bord de mer ou dans les stations balnéaires dont
on peut acheter des titres ce qui octroie le droit d’occuper le logement pendant une certaine
période dans l’année. Le logement reste la propriété de la société mais ce n’est pas de la location.
- La semi-transparence : les sociétés semi-transparentes sont plus fréquentes, il s’agit
essentiellement de sociétés de personnes (SNC, sociétés civiles etc). On calcule le résultat au
niveau de la société et on l’impose au niveau des associés. Tous les autres impôts sont imposés
au niveau de la société.
- La translucidité : c’est une adaptation de la semi-transparence. Selon ce régime, les revenus de
ces sociétés (pour la plupart sociétés d’investissement) ne sont imposés au niveau de la société
que si elle ne les distribue pas. Si la société distribue les revenus qu’elle encaisse, à ses associés,
ses revenus ne sont pas imposés à son niveau. En revanche, si elle ne les distribue pas, si elle se
contente de réinvestir les revenus qu’elle a perçu, elle devra payer un impôt sur ces revenus.

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Paragraphe 1 : Le mécanisme de la semi-transparence fiscale

On calcule un résultat au niveau de la société à partir de sa comptabilité et si l’entreprise a fait un


bénéfice, celui-ci sera imposé au niveau des associés. Si l’entreprise a fait un déficit, celui-ci
remonte également aux associés.

L’article 60 CGI prévoit qu’il faut appliquer les mêmes règles que celles applicables aux entreprises
individuelles. Il renvoie à l’article 8 CGI concernant les sociétés de personnes. On applique alors le
corps de règles dépendant de l’activité de l’entreprise (BIC, BNC ou BA). Il faut alors dans un
premier temps qualifier l’activité de la société.

N.B : La règle est complètement différente pour les sociétés soumises à l’IS car on applique
toujours les règles des BIC quelle que soit l’activité de la société.

L’associé est réputé avoir appréhendé les résultats sociaux au jour de la clôture de l’exercice. C’est
une fiction purement fiscale. C’est une règle qui est d’ordre public. Il est possible de modifier la
date de clôture de l’exercice pour modifier la date de préhension des résultats de l’exercice à
condition que l’administration fiscale ait été destinataire de ladite modification.
‣ CE, 28 mars 2012,Vaillant : Le CE a néanmoins rappelé qu’en toute hypothèse il n’est pas
possible de déroger au principe de l’appropriation des résultats au jour de la clôture de
l’exercice.

Sur quel montant de bénéfice va être imposé chaque associé de la société ? Les droits de chaque
associés sont ceux résultant du pacte social. Chaque associé est imposé sur une quote part du
bénéfice et ce à hauteur de ses droits dans le capital de la société (par exemple, un associé qui a
40% des droits sera imposé sur 40% du montant du bénéfice).
‣ CE, 26 avril 1976 : Il est possible d’assouplir cette règle au moyen d’une convention contraire
uniquement si l’acte a été passé avant clôture de l’exercice et que cet acte a date certaine.

Paragraphe 2 : Les effets de la semi-transparence

Une société ne peut pas être soumise à l’IR puisque ce sont ses associés qui sont imposables. La
société relève de l’IR. De plus, ce n’est parfois par l’IR qui s’applique, tout dépend de la situation et
de la nature de l’associé de la société.

Par exemple une société de personnes a trois associés, une personne physique qui possède 30% du
capital, une société anonyme qui possède 50% du capital et une SNC qui possède 20% du capital.
La société de personnes réalise un bénéfice d’un million d’euros.
La personne physique va être imposée sur 30% x 1 millions d’euros = 300 000 euros. Elle est
assujettie à l’impôt sur le revenu donc on applique l’IR sur 300 000 euros.
La SA va être imposée sur 50% x 1 million d’euros = 500 000 euros. C’est une société de capitaux,
elle est donc soumise à l’IS sur 500 000 euros.
La SNC va être imposée sur 20% x 1 millions d’euros = 200 000 euros. La SNC n’a pas plus de
personnalité fiscale que la société dont elle possède une partie du capital, donc on ne peut pas
l’imposer directement. Les débiteurs de l’impôt seront les associés de la SNC à hauteur de leur droit
dans le capital de la SNC. Si eux-mêmes sont des SNC, on remonte indéfiniment jusqu’à ce que
cette remontée des résultats se termine, cad jusqu’à ce que le résultat échoie à un associé doté de la
personnalité fiscale (soit une PP soit une PM soumise à l’IS).

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Si l’entreprise est déficitaire, les associés vont prendre leur quote part de déficit, qu’ils pourront
imputer sur leur propre revenu. C’est le grand avantage des sociétés de personnes. Cette
caractéristique est particulièrement importante dans le cadre des groupes de sociétés.
Un groupe de sociétés est constitué d’une société mère qui possède une participation dans une
société filiale. Imaginons qu’il s’agisse de deux sociétés anonymes, elles sont toutes les deux
soumises à l’IS. Si la société mère crée un bénéfice de + 100 et la fille fait un déficit de - 100, la
société mère paiera un IS sur les 100 et la filiale ne paiera pas d’impôt sur les bénéfices car elle ne
fait pas de bénéfice. Le déficit de -100 ne peut pas remonter à la société mère car les deux sociétés
sont fiscalement opaques, il y’a donc une déperdition fiscale. Les déficits sont gérés au niveau de la
filiale.

La compensation entre le bénéfice et le déficit peut néanmoins se réaliser de deux manières :


- Un mécanisme législatif : le régime de l’intégration fiscale. La loi permet de former un groupe
intégré avec au moins une mère et une filiale, on fait comme si ces deux sociétés n’en formaient
qu’une. Ces deux sociétés sont autorisées à additionner leurs résultats. En l’espèce le résultat est
alors égal à 0. Ce régime est très encadré, il faut notamment que la société mère possède 95% du
capital de sa filiale.
- Le mécanisme de la semi-transparence : la remontée des pertes. Si la filiale est une société de
personnes qui relèvent donc de l’IR, les déficits de la filiale vont remonter à la mère qui va
pouvoir imputer sa quote part de déficit sur ses propres bénéfices. Cette possibilité ne peut pas
être contestée par l’administration fiscale sur le terrain de l’abus de droit.
‣ CE, 15 février 2016, Sté Leader Price : la transformation d’une SA en SNC ne constitue pas un
abus de droit, c’est l’expression de la liberté de gestion des entreprises.

Le droit fiscal fait une distinction entre deux types de profits : les profits ordinaires découlant de
l’exploitation qui conduisent au résultat courant et les profits exceptionnels (plus ou moins values
de cession). Une entreprise est amenée à céder des biens qu’elle possède, elle peut alors réaliser des
plus ou moins values. Si les plus values sont à court terme, elles sont imposées au taux plein. Si les
plus values sont à long terme, elles sont imposées au taux réduit de 12,8% (plus 17,2% de
prélèvements sociaux = 30% au total). Ces plus values professionnelles remontent, de la même
manière que le bénéfice, aux associés. Les sociétés de personnes peuvent être exonérées sur le
fondement de l’article 151 septies CGI qui prévoit le régime des petits entreprises, ce régime permet
l’exonération de toutes les plus values de toutes les petites entreprises (les recettes doivent être
mesurées au niveau de la société de personnes pour déterminer si c’est une petite entreprise et non
pas au niveau des associés).

Paragraphe 3 : Les limites de la semi-transparence

La semi-transparence fiscale n’est pas sans limite car on ne peut pas faire comme si la société de
personne n’existait pas. C’est une personne morale qui a des obligations fiscales notamment.
Aujourd’hui, la doctrine qui prévaut est de reconnaître une forme de personnalité fiscale à la société
de personnes. Elle n’est certes pas le redevable de l’impôt mais la jurisprudence et une majorité
d’auteurs considèrent que la société reste le contribuable.

En semi-transparence, la société est le redevable des impôts autres que celui sur les bénéfices, elle
doit donc payer la TVA, les impôts locaux, la taxe foncière etc.

Par ailleurs, il a été jugé par le CE que pour l’application des conventions fiscales internationales, il
faut apprécier la résidence d’un contribuable en raisonnant par rapport au siège de la société et non
pas par rapport au domicile de ses associés.

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Les sociétés de personnes tiennent une comptabilité à partir de laquelle le résultat imposable est
calculé. Toutes les obligations fiscales et comptables pèsent sur la société et non pas sur les
associés.

En matière de contrôle fiscal, la vérification de comptabilité est menée avec la société et non pas
avec les associés.
‣ CE, 22 juillet 1977 : La Jp consacre depuis longtemps, la règle de l’unicité de la procédure de
détermination de l’impôt.
Le contrôle fiscal est bien mené avec la société et ce même s’il aura des effets chez les associés s’il
aboutit à une rectification des bénéfices.

Section 2 : Le domaine d’application de la semi-transparence fiscale

La semi-transparence fiscale concerne principalement les sociétés de personnes, c’est le domaine


d’application matériel de l’impôt.
Au niveau territorial, il y a un concentré de difficultés provenant de l’affrontement entre la réalité
de l’existence d’une PM et la fiction fiscale qui est que la société fonctionne en semi-transparence.

Paragraphe 1 : Le champ d’application matériel

A. Les groupements relevant par nature de la semi-transparence fiscale

Les sociétés de personnes bénéficient par nature de la semi-transparence fiscale :

Les sociétés civiles sont des sociétés de personnes. Néanmoins les fausses sociétés civiles (société
civile par la forme qui exerce une activité commerciale) ne relèvent pas de l’IR mais sont soumises
à l’IS, exception faite des sociétés civiles de moyens (sociétés civiles dont l’objet consiste à mettre
des moyens matériels, humains à disposition de leurs associés, ce sont des sociétés de services). La
mise à disposition de moyens est de nature commerciale, donc ces sociétés devraient être soumises
à l’IS, mais par exception, elles relèvent de l’IR et ne peuvent pas opter pour l’IS.

On retrouve également :
‣ Les sociétés commerciales (SNC, sociétés en commandite simple, etc),
‣ Les sociétés en participation : n’ont pas la personnalité juridique donc l’identité des associés doit
être révélée à l’administration fiscale et leur responsabilité doit être illimitée,
‣ Les GIE,
‣ Les sociétés créées de faits.

B. Les groupements relevant de la semi-transparence fiscale par option

Les EURL sont des SARL avec un seul associé, il s’agit donc de sociétés de capitaux. Par nature,
ces EURL sont plus proches des entreprises individuelles que des SARL, ce sont souvent des
entrepreneurs individuels qui se sont mis en société. Ces EURL ont le régime fiscal des entreprises
individuelles si elles ont été créées par une personne physique, elles relèvent donc de l’IR de plein
droit. Si les EURL ont été constituées par une personne morale, elles sont soumises à l’IS de plein
droit.

Des sociétés relevant de l’IS par nature, peuvent opter pour l’IR et donc bénéficier du régime de
semi-transparence fiscale. Historiquement, une société relevant de l’IR peut toujours opter pour
l’IS, en revanche lorsqu’une entreprise est à l’IS, en principe elle ne peut pas opter pour l’IR. Le
sens de la législation est de faire en sorte qu’un maximum d’entreprises soit à l’IS. Cette législation
a pour but d’encourager l’IS car l’IR est d’application parfois complexe et c’est aussi un instrument

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de défiscalisation important par la remontée des déficits qu’il entraine. Aujourd’hui les choses ont
bien évolué, le législateur admet qu’une société qui opte pour l’IS puisse retourner à l’IR et il a
également créé de nouvelles passerelles pour qu’une société à l’IS puisse opter pour l’IR.
Une société à l’IS par nature ne pouvait pas opter pour l’IR historiquement, sauf dans le cas des
SARL de famille visées à l’article 239 bis AA CGI. Les sociétés de famille sont généralement des
sociétés de personnes donc on a admis la possibilité pour ces SARL d’opter pour le régime de semi-
transparence.
L’article 239 bis AB CGI étend cette possibilité aux PME récentes ou PME en phase d’amorçage
depuis une loi du 4 aout 2008.

1. Les SARL de famille

Pour que l’option soit possible, les SARL de famille doivent remplir deux conditions :
‣ Être une SARL de famille : SARL constituée entre proches parents. La loi considère que les
proches parents sont des parents en lignes directes (ascendant/descendant) ou des frères et soeurs
ou des conjoints (mariés ou pacsés) à l’exclusion des concubins.
‣ Avoir une nature commerciale, industrielle, artisanale ou agricole. Il est admis en Jp qu’une
société puisse exercer une autre activité si cette autre activité est simplement accessoire et
complémentaire.

Si ces deux conditions sont réunies, la SARL peut opter pour l’IR. L’option doit être notifiée au
service des impôts avant le début de l’exercice concerné par l’option. Cette option doit être signée
par l’ensemble des associés et comporter un ensemble d’information sur la société. L’option doit
impérativement être approuvée par l’ensemble des associés car ce sont les associés qui sont
débiteurs de l’impôts sur les bénéfices.

Cette option dure aussi longtemps qu’elle n’a pas été révoquée. Si la société revient à l’IS, elle ne
pourra plus opter à nouveau pour l’IR. L’option est un droit qui ne s’exerce qu’une fois au cours de
la vie sociale.

Les conditions requises pour opter doivent être respectées pendant toute la durée de l’option.

2. Les PME récentes

L’option des PME en phase d’amorçage (SA, SARL et SAS) résulte d’une loi du 4 aout 2008. Cette
option est différente au niveau de ses conditions et de ses effets.

La loi subordonne l’option à 5 conditions :


‣ Les titres de la société ne doivent pas être cotés sur un marché règlementé
‣ Le capital et les droits de vote doivent être détenus pour 50% au moins par des personnes
physiques dont 34% par des dirigeants.
‣ La société doit exercer à titre principal une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole
ou libérale.
‣ Elle doit employer moins de 50 salariés et réaliser un chiffre d’affaires annuel ou un total de
bilan inférieur à 10 millions d’euros
‣ Elle doit avoir été créée depuis moins de 5 ans.

Le seuil de 50 salariés soulève souvent une difficulté pratique, c’est l’effet de seuil. Pour un salarié,
on est amené à passer d’une catégorie à une autre. La loi est très tolérante, désormais le
franchissement du seuil de 50 salariés est pris en compte seulement si le seuil a été dépassé ou
atteint pendant 5 années civiles consécutives.

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L’option est valable pour une période de 5 exercices seulement. Cette option doit être exercée dans
les trois premiers mois de l’exercice d’application de l’option. Par ailleurs, l’option requiert
l’accord de tous les associés. Cette option étant limitée dans le temps, au bout de 5 ans la société
revient automatiquement à son impôt naturel, cad l’IS. L’option pour l’IR n’est pas reconductible.

La possibilité donnée à une entreprise de fonctionner en semi-transparence fiscale en début de vie


n’est pas innocente, généralement les sociétés au début de leur vie sont susceptibles de générer des
pertes. Grâce à la semi-transparence, ces déficits vont pouvoir remonter aux associés qui pourront
les imputer sur leur propres revenus. La semi transparence est un avantage en début de vie sociale.

Paragraphe 2 : Le champ d’application territorial

Les règles de territorialité sont complexes. Elles concernent notamment les sociétés de personnes à
dimension internationale.

Il faut faire une opposition entre les sociétés de personne à l’IR et les sociétés de capitaux à l’IS.
L’impôt sur les sociétés est d’application territoriale, les bénéfices réalisés en France seront imposés
en France et ceux imposés à l’étranger seront imposés à l’étranger.
L’impôt sur les revenus est d’application mondiale, à partir du moment où un contribuable est
résidant de France, il est imposé en France aussi bien sur ses revenus français que sur ses revenus
étrangers.

Par ailleurs, dans le cadre de l’IR, le risque est que l’Etat étranger impose les revenus issus de son
territoire, donc il peut potentiellement y avoir une double imposition d’un même revenu. Ce sont les
conventions fiscales internationales qui règlent la question (Convention internationale sur les
doubles impositions de revenus). Les conventions internationales considèrent que pour certains
revenus, c’est le pays de résidence du contribuable qui a compétence pour imposer le revenu.

La question fut posée de savoir ce qu’était un contribuable : la société ou l’associé ? Le débiteur de


l’impôt est l’associé. La situation était complexe lorsque par exemple les associés d’une société
française résident à l’étranger. La Convention fiscale internationale prévoit que c’est l’Etat de
résidence du contribuable qui a compétence pour imposer les revenus, mais concrètement qui est le
contribuable au sens de la convention internationale ? Si c’est la société, c’est la France qui peut
imposer les bénéfices de l’entreprise. Si ce sont les associés, ce sont les Etats étrangers qui peuvent
imposer les bénéfices.

Deux thèses se sont affrontées :


‣ La thèse de la translucidité fiscale considère qu’il faut résonner par rapport aux associés
‣ La thèse de la personnalité fiscale considère que les associés ne sont que les débiteurs de l’impôt,
la personne fiscale est la société.

‣ CE, 11 juillet 2011, Sté Quality Invest : le CE a tranché la question de manière incontestable,
il juge que la société de personnes doit être considérée comme résidente de France au sens de la
convention fiscale. Il faut donc résonner par rapport à la société installée en France, qui est le
contribuable au sens de la Convention fiscale internationale. C’est alors l’Etat français qui est
compétent pour imposer les résultats de la société française.

Section 3 : Le particularisme des sociétés semi-transparentes

Les sociétés relevant de l’IR présentent de nombreuses originalités inhérentes tant à leur nature de
PM qu’à leur semi-transparence fiscale. Toutes les difficultés proviennent d’une confrontation entre
la réalité juridique (personnalité morale) et la fiction (pas de personnalité fiscale).

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Ces particularités s’articulent autour du régime des parts sociales et du calcul des bénéfices
imposables.

Paragraphe 1 : Le régime des parts sociales

En pratique, il y a deux difficultés : les plus values de cession de parts et le démembrement des
parts sociales.

A. Les plus values de cession

L’article 151 nonies CGI prévoit que les parts sociales détenues par un associé exerçant son activité
professionnelle au sein d’une société dont les bénéfices sont imposés dans la catégorie des BIC, des
BNC ou des BA, sont considérées par la loi fiscale comme faisant partie de l’actif professionnel
personnel de l’associé, distinct de l’actif social.

Cette disposition est une fiction fiscale. La réalité juridique est que l’associé exerce une activité
dans la société dans laquelle il détient des parts. Les parts sociales qu’il possède font partie de son
patrimoine privé d’un point de vue juridique. Le droit fiscal considère que ces parts sociales, malgré
leur caractère personnel en droit civil, ont un caractère professionnel. C’est comme si ces parts
avaient la nature d’actif professionnel au sens comptable. C’est une présomption irréfragable.
Cette fiction ne joue que si l’associé exerce une activité professionnelle dans la société. La loi
fiscale prévoit que par extension, on considère que les parts de l’associé deviennent des parts
professionnelles.

La Jp a été amenée à se pencher sur l’application des textes pour définir ce qu’est l’exercice d’une
activité professionnelle au sein de la société. La Jp est assez souple sur les conditions de la mise en
oeuvre du texte. Il n’est pas exigé que l’activité professionnelle consiste à gérer la société.
‣ CE, 8 juin 2016, Monsieur et Madame Langry : un contribuable exerce une activité
professionnelle dans la société même s’il n’effectue que des tâches d’exécution telles que
l’accueil téléphonique, la réception des commandes, le suivi des règlements, etc.

Le fait que les parts aient un caractère professionnel engendre trois séries de conséquences :

Le cas des contribuables qui empruntent pour acquérir leurs parts sociales : historiquement, ces
contribuables étaient maltraités par la loi. La Jp et l’administration considéraient qu’un associé ne
peut déduire les intérêts d’emprunt de ses revenus que si l’emprunt servait à acquérir des biens
professionnels. La Jp avait alors considéré que cela était applicable lorsqu’un associé exerce son
activité professionnelle dans une société semi-transparente. Le législateur est venu encadrer cette
solution Jp, dans le contexte des intérêts d’emprunt pour acquérir des parts sociales. Lorsqu’un
associé emprunte de l’argent qui lui sert à acheter ses parts, l’emprunt est professionnel s’il exerce
son activité dans la société, les charges d’emprunt deviennent donc des charges professionnelles qui
peuvent venir en déduction de la quote part de bénéfices auxquels a droit l’associé.

Lorsque les titres sont cédés à titre gratuit, le cessionnaire doit payer des droits de donation ou de
succession. S’il s’agit de parts professionnelles, le cessionnaire peut déduire de ses revenus, le
montant qu’il a payé.

Les cessions de titres et de plus values : si les titres sont professionnels, la plus value de cession est
professionnelle. L’article 151 septies prévoit que les petites entreprises ne sont pas imposées sur les
plus values. Les seuils qui caractérisent les petites entreprises sont appréciés au niveau des
détenteurs des droits (au niveau de la participation de l’associé). Si le régime des petites entreprises

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ne s’applique pas, on applique celui des plus values professionnelles. Les plus values à long terme
sont imposées au taux de 30% (12,8% + 17,2% de contributions sociales). Les plus values à court
terme sont imposées au taux plein de l’IR.

Ce qui pose problème est le calcul de la plus value. La cession de titre entraine une plus ou moins
value. La plus value est la différence entre le prix de vente et le prix d’achat. La plus value provient
du fait que la société a fait des bénéfices qui n’ont pas été distribués aux associés, ce qui a majoré la
valeur des titres. La majoration des bénéfices a donc déjà été imposée. Si l’associé qui vend ses
titres est imposé à la plus value, il y a double imposition. La qualification est différente (plus value
ou remontée des bénéfices) mais le profit est le même. Il y a un risque symétrique de double
déduction des pertes. Le CE considère qu’il faut corriger ce problème en 1970. Il a réaffirmé cette
position en 1991 avec une autre méthode de correction.
‣ CE, 16 février 2000, Sté anonyme des établissements Quemener : cet arrêt vient fixer la
règle retenue. Il faut corriger la plus value et notamment le prix de revient. Le prix de revient
des parts cédées est égal à leur valeur d’acquisition telle que majorée des bénéfices déjà imposés
ou des pertes antérieures comblées par l’associé et minorée des déficits déjà déduits ainsi que
des bénéfices ayant donnés lieu au profit de l’associé à des répartitions.
‣ CE, 9 mars 2005, Baradé : Transposition aux plus values privées de la Jp du 16 février 2000.

Exemple : un associé unique d’une société vend ses parts un an après la souscription.
01/01/N : souscription des parts à valeur nominale de 100 euros.
31/12/N : 400 euros de bénéfices dont 200 euros de distribués.
01/01/N+1 : l’associé vend ses parts au prix que vaut la société, cad 300 euros (capital social +
bénéfices non distribués). Le prix de vente des parts est de 300 euros, le prix d’achat est de 100
euros. L’associé fait une plus value de 200 euros. Fiscalement, ces 200 euros seront imposés deux
fois si la plus value n’est pas corrigée, puisqu’ils faisaient partie des 400 euros de bénéfices qui sont
remontés aux associés. Il faut alors faire une correction du prix de revient. Le prix de cession reste
le même.
==> 300 - (100 + 400 - 200) = 0 euros de plus value.

B. Le démembrement de propriété des parts sociales

Au terme de l’article 8 CGI ce sont les associés qui sont imposés sur les bénéfices de la société dans
la proportion de leur participation au capital social de l’entreprise. Quand il y a un démembrement
de propriété, il y’a deux associés potentiels : un nu-propriétaire et un usufruitier.

En droit des sociétés, c’est l’usufruitier qui reçoit les dividendes. En droit fiscal, un débat s’était
engagé en en doctrine dans les années 1990, entre ceux qui faisaient prévaloir la spécificité fiscale
et ceux qui s’alignaient sur le droit des sociétés. Certaines sociétés ne distribuent pas les dividendes,
donc dans cette seconde théorie on se retrouve avec un associé qui ne reçoit rien mais qui paie.

Le législateur est intervenu par l’article 78 de la loi du 2 juillet 1998 qui complète l’article 8 CGI.
En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l’usufruitier est soumis
à l’impôt sur le revenu pour la quote part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui
confère sa qualité d’usufruitier. Le nu-propriétaire n’est pas soumis à l’IR à raison du résultat
imposé au nom de l’usufruitier.
C’est donc l’usufruitier qui est imposé sur sa quote part de bénéfices, il est considéré comme
associé au sens du droit fiscal. Le nu-propriétaire n’est pas imposé sur ses bénéfices.

L’article ne précise pas ce qu’il se passe en cas de déficit ou de plus value, cad en cas de bénéfice
exceptionnel. L’administration fiscale considérait que c’est le nu-propriétaire qui devait être imposé

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sur les résultats exceptionnels et profiter du déficit fiscal. Elle maintient que c’est le nu-propriétaire
qui est associé en principe.
‣ CE, 8 novembre 2017 : Le CE a adopté une position différence concernant les déficits. C’est
l’usufruitier qui peut déduire, de ses revenus, la part de déficit correspondant à ses droits. En
l’espèce, la décision concernait un déficit foncier (société immobilière semi transparente).

Il est possible d’aménager par contrat la répartition du bénéfice entre le nu-propriétaire et


l’usufruitier. Cette convention, pour être opposable à l’administration fiscale, devra avoir été
conclue et enregistrée avant la clôture de l’exercice.

Paragraphe 2 : Le calcul du bénéfice imposable

Il faut dans un premier temps calculer le résultat fiscal de la société de personnes. Pour cela, il faut
déterminer un corps de règles à partir duquel on va calculer ce résultat (BIC, BNC ou BA). Il faut
ensuite déterminer la quote part qui reviendra aux associés.

A. La qualification du bénéfice imposable

Quel corps de règles faut-il appliquer (BIC; BNC, BA, revenus fonciers) ? Il faut regarder l’activité
de l’entreprise.

Certaines entreprises ont plusieurs activités, dans ce cas il faut regarder si un corps de règle domine
l’autre, si les activités sont équivalentes, il faut appliquer les deux corps de règles.

L’article 238 bis K I CGI dispose que lorsque des droits dans une société ou un groupement
mentionnés aux articles 8 (sociétés de personnes) ou 239 quater (GIE) sont inscrits à l’actif d’une
personne morale passible de l’IS ou d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou
agricole imposable à l'impôt sur le revenu de plein droit selon un régime de bénéfice réel, la part de
bénéfice correspondant à ces droits est déterminée selon les règles applicables au bénéfice réalisé
par la personne ou l'entreprise qui détient ces droits.

Exemple : Une société de personnes (art 8 CGI) possède deux associés, une personne physique et
une SA soumise à l’IS. L’article 238 bis K I prévoit que pour calculer la quote part de bénéfices de
la SA, il faut appliquer les règles de la SA et non pas les règles qui dépendent de l’activité de la
société de personnes.
Si la société de personnes est une SCI qui exerce une activité de location immobilière, cad une
activité foncière, normalement, on calcule le bénéfice en appliquant les règles des revenus fonciers.
Chaque associé prend sa quote part de revenus fonciers en fonction de sa participation au capital. Si
l’associé personne physique a 40% du capital, logiquement il récupère 40% du revenu foncier sur
lesquels il sera imposé. Pour la SA, l’article 238 bis K I s’applique, il faut donc appliquer les règles
de la SA. La SA est à l’IS, si elle possède 60% du capital, elle sera imposée sur 60% du bénéfice de
la SCI calculé selon les règles BIC car en IS on applique obligatoirement les règles des BIC.
La SCI doit alors tenir deux comptabilités, une comptabilité de caisse pour calculer le revenu
foncier et une comptabilité commerciale pour calculer son BIC. Elle calcule d’abord un revenu
foncier, l’associé personne physique en prendra 40% puis un bénéfice avec les règles BIC, l’associé
personne morale en prendra 60%.

C’est une règle donc les origines sont mal connues. C’est une règle anti-évasion pour éviter qu’une
société puisse utiliser comme elle le souhaite les différentes catégories, au mieux de ses intérêts.

B. Les charges déductibles et les produits imposables

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Si on applique les règles des BIC, l’article 60 CGI prévoit que ce sont les mêmes règles que pour les
entreprises individuelles qui s’appliquent.
Depuis l’abandon de la théorie du bilan en fiscalité, seules les charges nécessitées par l’exercice de
la profession peuvent être déduites et seuls peuvent être rattachés au bénéfice les produits en lien
avec l’activité.

La rémunération de l’entrepreneur individuel n’est pas déductible car le commerçant est rémunéré
par les bénéfices, les rémunérations qu’il se verse doivent être réintégrées dans les bénéfices
imposables, c’est une anticipation d’appréhension de bénéfices. Pour les sociétés de personnes, les
rémunérations perçues par les dirigeants associés ne sont pas déductibles.

Une entreprise propriétaire d’un bien peut l’amortir sur sa valeur d’acquisition, ces amortissements
viennent constater la dépréciation du bien. Ces amortissements sont déductibles du bénéfice
imposable. Il y a un plafonnement lorsque l’entreprise propriétaire du bien le donne en location. En
comptabilité, le bien est amorti sur la valeur d’acquisition du bien, elle déduira les annuités
d’amortissements de ses bénéfices chaque année selon le plan d’amortissement prévu. En
comptabilité il faut déclarer les loyers reçus en produits et enregistrer les charges d’amortissement
calculées normalement. Le droit fiscal a eu à faire face à des montages à but défiscalisant, il
suffisait, pour dégager du déficit fiscal de manière artificielle, d’acheter un bien très cher, de
l’amortir (charges importantes) et de le louer pas cher uniquement pour des raisons fiscales. Les
loyers sont inférieurs aux amortissements, donc les produits sont inférieurs aux charges, du déficit
sera dégagé. Il a été décidé de plafonner les amortissements au montant des loyers, on ne peut pas
déduire plus d’amortissement qu’on déclare de loyers. Il faut donc réintégrer extra comptablement
les amortissements excédentaires. Cette règle est applicable si l’entreprise est une société de
personnes.

Certaines règles ne concernent que les sociétés de personnes et pas les entreprises individuelles. En
droit des sociétés, un associé peut prêter de l’argent à sa société, c’est un apport en compte courant.
Ce prêt d’associé est rémunéré par un intérêt de compte courant d’associé. Le droit fiscal se méfie
des prêts d’associés car lorsqu’une société a besoin d’argent, elle peut se financier par son capital
(augmentation de capital) ou par l’emprunt. Le financement par le capital est rémunéré par des
dividendes, le financement par l’emprunt est rémunéré par des intérêts. Les dividendes ne sont pas
déductibles contrairement aux intérêts. Fiscalement, il vaut mieux, à montant égal, verser un intérêt,
que la société pourra déduire de son bénéfice. Les entreprises ont tendance à emprunter plutôt qu’à
se recapitaliser, ce qui ne plait pas aux administrations fiscales. Il y a donc un plafonnement des
intérêts des comptes courant d’associés.
Pour qu’une société puisse déduire les intérêts de compte courant d’associé, le capital doit avoir été
intégralement libéré. Ceux qui ont souscrits au capital doivent avoir payé ce qu’ils avaient promis.
Il y a un taux d’intérêt maximum qui varie régulièrement en fonction de la date de clôture de
l’exercice. Le droit fiscal a décidé de renvoyer à un taux bancaire. La règle est que les intérêts ne
doivent pas excéder la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements
de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises d’une durée initiale supérieure à deux ans.
Pour les exercices clos le 31 décembre 2020, le taux plafonds s’établit à 1,18%. L’entreprise fixe
son taux d’intérêt comme elle l’entend mais elle ne pourra pas déduire plus de 1,18% d’intérêt. Tout
ce qui est au-dessus devra être réintégré dans le bénéfice imposable.

C. Le calcul de la quote part du résultat

Il faut répartir le bénéfice calculé entre les associés. Cette répartition s’effectue entre tous les
associés présents à la clôture de l’exercice.
Les rémunérations non déductibles fiscalement, cad les intérêts excédentaires de compte courant
d’associé et les rémunérations d’associés qui exercent une activité dans la société, doivent être

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

déduites du résultat à répartir entre les associés sinon un associé sera imposé sur le revenu d’un
autre. Ces rémunérations ne seront rajoutées qu’à la part de l’associé concerné.
Exemple : une SNC relevant de l’IR possède deux associés personnes physiques, A a 40% des
droits et B a 60% des droits. Les deux associés exercent une activité dans l’entreprise. L’associé A
reçoit une rémunération de 20 000 euros, plus 8000 euros de charges sociales. L’associé B a une
rémunération de 15 000 euros et la société prend en charge 6000 euros de charges sociales.
L’associé B a prêté de l’argent à sa société, il reçoit 10 000 euros d’intérêts de compte courant
d’associé dont 2000 euros excédentaires.
Le bénéfice fiscal de la société est de 100 000 euros, cad après réintégration de toutes les charges
non déductibles fiscalement.
Avant de répartir les 100 000 euros, il faut calculer un résultat à répartir : 100 000 - les avantages
personnels non déductibles = 100 000 - (20 000 + 8000 + 15 000 + 6000 + 2000) = 100 000 - 51
000 = 49 000.
L’associé A prend 40 % x 49 000 = 19 600. On ajoute ses avantages personnels, cad 20 000 donc au
total, il perçoit 39 600 euros. On n’ajoute pas les charges sociales car elles sont déductibles du
revenu imposable. Sur le principe, il faudrait rajouter les 8000 puis les déduire.
L’associé B prend 60 % x 49 000 = 29 400 + 15 000 + 2000 = 46 400 euros.

Les entreprises qui n’adhèrent pas à un centre de gestion agréé doivent majorer leurs bénéfices
imposables de 25%. Cette majoration est en cours de suppression, pour les revenus de 2020 elle est
de 20%, pour 2021, elle est de 15% et pour 2022 elle est de 10%. Elle sera définitivement
supprimée à partir de 2023.
Dans l’exemple, il faut multiplier les résultats par 1,20 si on considère que ce sont les revenus de
2020 (46 400 x 1,20 et 39 600 x 1,20).

Ces montants seront à rattacher aux résultats individuels des associés.

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Chapitre 2 : Les sociétés soumises à l’IS

L’impôt sur les sociétés possède un champ d’application important, il a spécifiquement été créé
pour les sociétés. L’intitulé prête à confusion car il n’y a pas que les sociétés qui peuvent être
soumises à l’IS mais également toutes les personnes morales exerçant une activité lucrative sur le
territoire français, ce qui comprend des groupements qui ne sont pas formellement des sociétés.

Les sociétés soumises à l’IS sont des groupements opaques. Cette opacité fiscale signifie que le
résultat imposable est calculé au niveau de la société puis ce résultat est imposé au niveau de la
société. La société possède la pleine et entière personnalité fiscale. En cas de déficit, la perte reste
au niveau de la société, elle ne remonte pas chez les associés. Les associés ne sont pas perçus
comme les débiteurs de l’impôt sur le bénéfice.

l’IS a normalement pour effet de simplifier le calcul du bénéfice imposable car contrairement aux
sociétés à l’IR, on n’a pas à se demander quel corps de règles il faut appliquer pour calculer le
bénéfice. Il n’y a pas de travail de qualification à faire, quelle que soit l’activité de la société, les
règles des BIC s’appliquent.

L’IS est perçu à un taux strictement proportionnel, c’est un pourcentage du bénéfice imposable,
alors que l’IR est un impôt progressif par tranche.

l’IS suit, ces dernières décennies, une courbe descendante. Pendant très longtemps, l’IS était perçu à
un taux de 50% donc les sociétés devaient restituer la moitié de leur bénéfices à l’Etat, on disait que
l’Etat était le premier actionnaire des sociétés tant le taux était important. Le premier janvier 1993,
le taux a été fixée à 33,33%, les entreprises devaient restituer 1/3 de leurs bénéfices à l’Etat. En
1993, la France était un des pays en Europe où le taux d’IS était parmi les moins élevés.

Progressivement, avec l’élargissement de l’Union Européenne, le taux d’IS français est apparu
comme plus élevé que la moyenne européenne. Il avait été calculé en 2015 que la moyenne des taux
d’impôt sur les sociétés en Europe se situait légèrement en dessous de 25%. En moyenne, le taux
des pays de l’OCDE tournait autour de 24%.
NB : certains pays connaissent plusieurs taux d’IS, donc ces moyennes sont des approximations.
Certains pays connaissent un double taux selon que les bénéfices sont distribués ou pas ou selon que
l’entreprise est originaire du pays en question ou pas. Aux Etats-Unis et en Allemagne, il existe des
impôts locaux et des impôts fédéraux, les sociétés doivent alors payer un impôt fédéral national et
des impôts locaux.

Ces dernières années, la France s’est retrouvée à contre courant de l’évolution européenne.
l’Allemagne a fait sa révolution fiscale en 2000 avec un taux à 15% mais c’est un pays fédéral donc
il faut ajouter à ce taux fédéral des impôts locaux. En Espagne et aux Pays bas le taux est de 25%,
en Irlande le taux est de 12,5% ce qui attire les GAFA.
Dans le monde, les taux d’IS sont assez disparates, par exemple 30% au Japon, 25% en Chine, 21%
aux Etats Unis suite à la révolution fiscale en 2017, etc.

La France connait depuis une vingtaine d’années, un taux d’IS réduit pour les PME (15% depuis
2002). C’est un taux qui s’applique sur un bénéfice plafonné à 38 120 euros (chiffre fixé à 200 000
francs en 2001). Les produits de la propriété industrielle sont imposés à 10%. Certaines plus values
à long terme des sociétés sont exonérées, par exemple celles sur les cessions des titres de
participation.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

À l’inverse, la France avait eu une pratique de contributions additionnelles à l’IS qui venaient
augmenter le taux d’impôt sur les sociétés. Ces contributions avaient parfois des affectations
budgétaires particulières comme le budget de la sécurité sociale. La plupart de ces contributions ont
été supprimées, sauf la contribution pour les grosses sociétés au taux de 3,30% instituées par la loi
de financement pour 2000. Cette contribution se calcule sur le montant d’IS à payer et non pas
directement sur le bénéfice.

Les pouvoirs publics ont pris la décision d’initier une baisse progressive de l’IS, une trajectoire a
été établie, trajectoire dont le but est d’arriver à un taux de 25% en 2022.

Section 1 : Le champ d’application de l’IS

Le domaine d’application de l’IS concerne un maximum de groupements, le champ d’application


matériel est assez large. A contrario, le champ d’application territorial est assez restreint, seules sont
imposées à l’IS les sociétés réalisant un bénéfice en France.

Paragraphe 1 : Le champ d’application matériel

La philosophie de la loi a été de mettre un maximum de groupements dans le champ de l’IS.


Beaucoup de groupements sont par nature soumis à l’IS. Le législateur a favorisé le passage de l’IR
à l’IS. Des sociétés ne sont pas obligatoirement soumises à l’IS mais qui peuvent opter pour son
application.

A. L’assujettissement obligatoire

L’article 205 du CGI prévoit que « il est établi un impôt sur l’ensemble des bénéfices ou des
revenus réalisés par les sociétés et autres personnes morales désignées à l’article 206. Cet impôt est
désigné sous le nom d’impôt sur les sociétés. »

L’article 206 CGI définit largement le domaine d’application de l’IS, on peut en déduire que,
essentiellement, sont soumis à l’IS les groupements dont les membres ne sont pas indéfiniment
responsables des pertes sociales, cad des groupements à risque limité.
Cela concerne :
‣ Les sociétés de capitaux (SA, SAS, SASU, SCA pour la totalité de leurs bénéfices),
‣ Les SARL (les EURL constituées par une personne physique sont à l’IR alors que celles
constituées par une personne morale sont à l’IS),
‣ Certaines sociétés de personnes ou assimilées : Société en commandite simple pour la part qui
revient aux associés commanditaires. Les sociétés en participation sont normalement à l’IR mais
si l’administration ne connait pas les associés ou qu’ils ont une responsabilité limitée, l’IS
s’applique. Les sociétés civiles sont à l’IR mais les fausses sociétés civiles (forme civile mais
avec activité commerciale) relèvent de l’IS de plein droit,
‣ Les EPIC sont à l’IS sur la totalité de leur résultat alors que les EPA ne sont imposés que sur les
revenus de leur patrimoine. Exemple d’EPIC : Opéra de Paris, CNES, cité de la science, etc.
‣ Les coopératives sont des groupements soumis à l’IS avec pour particularité qu’ils peuvent
déduire les ristournes accordées à leurs membres.

L’article 206 vise au delà de ces groupements à responsabilité limitée, toute personne morale se
livrant à des activités lucratives sur le territoire nationale. C’est une catégorie balaie.
‣ CE, 22 janvier 2020, Etat du Koweit : l’Etat du Koweit a été soumis à l’IS en France en tant
qu’il exerce une activité de nature lucrative.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Les associations sont susceptibles d’être soumises à l’IS. En réalité, l’article 207 5° bis CGI prévoit
que sont exonérées d’IS les personnes morales à but non lucratif pour des opérations à raisons
desquelles elles sont exonérées de TVA. Le critère d’assujettissement est le caractère lucratif de
l’activité. Il est fait un lien entre l’assujettissement à la TVA et à l’IS, ce sont des impôts
commerciaux dont le sort est souvent commun.
Les associations sont par principe des groupements à but non lucratif, elles ne sont alors pas à l’IS
de droit commun. Elles sont soumises à l’IS dans des conditions très particulières, elles sont
seulement imposées sur leurs revenus patrimoniaux (revenus de placements). Elles peuvent placer
des fonds imposés à un taux de 24% pour les investissement immobiliers, de 10% pour les
obligations et de 15% pour les dividendes d’actions.
Les fausses associations (celles qui ont une activité lucrative) tombent dans l’IS de droit commun.
La difficulté en pratique est de faire la différence entre les vraies associations et les fausses
associations. Des critères ont été développés par la Jp, comme la gestion intéressée ou
désintéressée.

Lorsqu’une association a deux activités, une activité purement associative non lucrative et une
activité lucrative accessoire (ex association sportive), la loi prévoit une franchise de 72 000 euros,
cad que si une association a des recettes commerciales ne dépassant pas 72 000 euros par année
civile, elle est exonérée d’impôts commerciaux sur les résultats issus de cette activité. Si cette
activité accessoire génère des recettes plus importantes, la loi permet de sectoriser l’activité
commerciale, seule cette activité sera imposée à condition que ce qui est accessoire ne devienne pas
principal. Si l’activité commerciale devient plus importante que l’activité associative, on bascule
dans une imposition totale à l’IS.

B. L’assujettissement sur option

Un groupement relevant de plein droit de l’IR peut opter pour l’IS. L’idée du législateur a été de
faciliter le passage de l’IR à l’IS car l’IS est conçu comme étant l’impôt de droit commun des
sociétés. En principe, tout groupement à l’IR peut opter pour l’IS, exception faite des GIE et des
sociétés civiles de moyens (SCM) qui ne peuvent pas opter pour l’IS.

Cette option doit être exercée avant la fin du troisième mois de l’exercice dans les conditions
prévues par les statuts. À défaut de prévisions statutaires, il faut l’autorisation de tous les associés.
Les pouvoirs publics peuvent accorder des rallonges de délai pour opter, dans des contextes
économiques particuliers (cas du Covid). L’option doit être notifiée au service des impôts du lieu du
principal établissement.

Pendant longtemps, l’option était irrévocable, une entreprise qui avait opté pour l’IS ne pouvait plus
revenir en arrière. L’option durait alors aussi longtemps que la société ne prend pas fin pour l’une
des causes prévues à l’article 1847-7 CC (causes de dissolution). Cet effet irrévocable était très
critiqué car il était paralysant, bcp de sociétés n’optaient pas, par peur de le regretter. Il y a eu une
évolution de la législation sur le droit à l’erreur qui tend à être reconnu aux contribuables. Dans ce
cadre, la loi de finance pour 2019 (28 décembre 2018) a mis fin au caractère irrévocable de l’option
pour l’IS, l’article 239-1 CGI précise qu’il est possible de renoncer à l’IS pendant les 5 premières
années de l’option. La renonciation à l’option peut alors intervenir jusqu’au cinquième exercice
suivant celui au titre duquel l’option a été exercée, au delà de ces 5 ans l’option devient irrévocable.
Cette renonciation à l’option doit être adressée au service des impôts auprès duquel est souscrite la
déclaration de résultat de l’entreprise.

Une fois qu’un contribuable a usé de sa faculté de renoncer à l’option pour l’IS, il ne lui est plus
possible d’opter de nouveau pour l’IS. C’est un droit qui ne peut s’appliquer qu’une fois.

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L’option est possible à n’importe quel moment de la vie de l’entreprise. En cas de transformation de
société de capitaux en société de personnes, s’opère un basculement de l’IS vers l’IR. L’entreprise
transformée peut souhaiter demeurer à l’IS, dans ce cas, elle peut opter pour l’IS dans les trois mois
qui suivent la transformation. Si elle n’opte pas dans les 3 mois, l’option ne sera plus possible avant
15 ans.

C. Les situations d’exonération

Certaines sociétés peuvent prétendre à une exonération de l’IS pour diverses raisons tenant
notamment à une implantation territoriale particulière que les pouvoirs publics ont souhaité
encourager, au caractère nouveau de l’activité ou encore à un statut particulier comme le cas des
jeunes entreprises innovantes.

Lorsque le législateur décide d’exonérer une société d’impôt sur les bénéfices, ces exonérations sont
valables en IR et en IS et sont limitées dans le temps. Elles sont considérées comme des aides d’Etat
par le droit communautaire car elles sont susceptibles de fausser le jeu de la concurrence. L’Etat
doit notifier à la Commission Européenne son projet de législation, qui donnera son aval à ce projet.
Si l’exonération est donnée sans l’aval de la Commission Européenne, l’Etat peut être condamné à
payer l’impôt à la place de l’entreprise.

Les aides de minimis ne nécessitent pas l’aval de la Commission Européenne, néanmoins elles sont
plafonnées à 200 000 euros par période de 3 ans. Ce plafond concerne les exonérations de tous
types, cad fiscales ou sociales. Les exonérations peuvent porter sur les impôts locaux, sur les impôts
sur les bénéfices ou sur les charges sociales.

1. Les entreprises nouvelles

Le régime des entreprises nouvelles est un régime ancien prenant place à l’article 44 sexies CGI. Il
existe depuis 1988, il a évolué dans le temps. Au départ il était extrêmement avantageux, non pas
par l’exonération qu’il conférait mais par le fait qu’il suffisait à une entreprise d’être nouvelle pour
prétendre à l’exonération.

Depuis 1995, la nouveauté ne suffit plus, il faut que l’entreprise soit située sur une zone d’aide à
finalité régionale (anciennement zones éligibles à la prime d’aménagement du territoire). Ce sont
des zones aidées économiquement, définies par voie règlementaire.
L’entreprise doit également en principe exercer son activité sur cette zone, il ne s’agit pas de
s’implanter fictivement sur ces zones AFR. Néanmoins, il existe des dérogations légales ou
administratives, par exemple on ne peut pas traiter les prestataires de service comme les entreprises
de ventes. Pour les activités non sédentaires, les avantages sont maintenus lorsque les opérations
externes n’excèdent pas 15% du chiffre d’affaires.

La question des entreprises nouvelles a posé tellement de problèmes que c’était le premier chef de
contentieux fiscal à une époque. Les avantages n’étaient pas conditionnés sur l’exercice d’un
territoire donné au début.
Selon la législation, trois conditions doivent être réunies pour être une entreprise nouvelle :
‣ L’entreprise ne doit pas être détenue directement ou indirectement par d’autres sociétés pour plus
de 50% des droits sociaux. Ce critère ne vaut que pour les sociétés.
‣ L’entreprise doit exercer une activité commerciale ou artisanale au sens de l’article 34 du CGI
(définit les BIC). Les activités non commerciales sont en principe exclues du dispositif, cad les
activités civiles. Néanmoins, en réalité, cette exclusion ne joue pas pour toutes les activités. Les
activités civiles professionnelles peuvent bénéficier de l’exonération (professions libérales) à

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certaines conditions, notamment la société doit être soumise à l’IS et employer au moins trois
salariés.
‣ L’activité doit être réellement nouvelle. Ce qui doit être nouveau n’est pas l’entreprise mais
l’activité. Si une nouvelle structure est créée pour exploiter une ancienne activité, l’exonération
ne s’applique pas. Cette exigence permet d’exclure deux types d’entreprises, les entreprises
créées pour la reprise d’entreprise préexistante et les entreprises qui ne sont que le prolongement
d’une activité préexistante.

Les entreprises créées pour reprendre des entreprises préexistantes ne peuvent pas bénéficier de
l’exonération d’IS ou d’IR (exemple : transformation en société d’une entreprise individuelle). Pour
qu’il y ait reprise d’entreprise préexistante, la Jp prévoit que cela suppose une identité d’activité et
une communauté d’intérêts entre les deux entreprises. L’identité d’activité n’est pas suffisante car
cela peut être le fruit du hasard, le critère de communauté d’intérêts permet de caractériser la reprise
d’activité (ex : deux concessionnaires automobiles qui se succèdent l’un à l’autre).
‣ CE, 1 juin 2001, Sté Auto-Leader / CE, 13 décembre 2002, Sté PAN Auto : Le CE se
contente d’une simple identité de clientèle, peu importe si le personnel ou les actifs ne sont pas
repris.
C’est au jour de la création qu’il faut se placer pour apprécier s’il y a eu ou non reprise d’une
activité préexistante. Il importe peu qu’une entreprise qui crée une nouvelle activité, reprenne plus
tard, une autre activité.

Les entreprises qui ne sont que le prolongement d’une activité préexistante : Un contentieux mettait
en cause les réseaux de distribution sélectif (franchise, partenariats, etc). Un franchisé exerce-t-il
une activité nouvelle ?
‣ CE, 8 septembre 1999, Pelfrene : par principe un franchisé ne fait pas qu’étendre une activité
préexistante, c’est une entreprise nouvelle sauf si l’entreprise est placée en situation de
dépendance économique.
Par principe un franchisé dépend plus ou moins du franchiseur économiquement donc ce critère doit
être apprécié in concreto. Le législateur dans le cadre de la loi de finance pour 2000 a consacré cette
Jp à l’article 44 sexies. Il faut donc analyser le contrat de franchise pour déterminer s’il existe une
dépendance économique.

L’exonération est limitée dans le temps et est doublement plafonnée. Elle est plafonnée par les
plafonds communs en matière d’exonération de bénéfices mais également par le plafond de minimis
(200 000 euros par période de trois ans).

L’exonération dure 5 ans selon un mode dégressif, l’exonération est à hauteur de 100% des
bénéfices pour les deux premières années, de 75% pour la troisième année, 50% pour la quatrième
et 25% pour la cinquième année. Il s’agit d’un plafond d’exonération qui s’exprime en pourcentage
des bénéfices.

La loi plafonne l’avantage en impôt à 200 000 euros par période de trois exercices fiscaux, cad que
le plafond ne s’exprime pas en pourcentage du bénéfice mais en niveau d’exonération. Ce plafond
est apprécié de manière glissante, une entreprise ne peut pas bénéficier d’une exonération
supérieure à 200 000 euros pour les trois derniers exercices, cela se calcule chaque année (il faut
« regarder dans le rétroviseur » chaque année). Il faut prendre en compte les aides reçues au titre
d’un exercice et celle des deux années précédentes.

Le régime des entreprises nouvelles devait prendre fin en 2020 mais la dernière loi de finance a
prolongé le régime de deux ans, donc il peut s’appliquer pour les entreprises créées jusqu’au 31
décembre 2022.

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2. Les zones d’exonération

Certains auteurs parlent de morcellement du territoire fiscal, voire que la France est un paradis
fiscal du fait de la tendance des pouvoirs publics à multiplier les zones d’exonération du territoire.

Parmi ces zones, on retrouve :


‣ Les zones franches urbaines,
‣ Les pôles de compétitivité : regroupement d’entreprises sur un territoire donnée. À Toulouse, il
existe le Cancéropôle, Aerospace constellation et Agrimip. Il en existe 70 sur le territoire
français. Il n’est plus possible d’en créer car le numerus clausus a été atteint.
‣ Les bassins d’emplois à dynamiser,
‣ Les bassins urbains à dynamiser,
‣ Les zones de développement prioritaires,
‣ Les zones de restructuration de la défense,
‣ Les zones de revitalisation rurales.

La dernière loi de finance a également prolongé l’application des régimes d’exonération des zones
d’exonération jusqu’en 2022.

Les zones franches urbaines sont prévues par l’art 44 octies CGI. C’est un régime ancien créé par la
loi du 14 novembre 1996 dite « Pacte de relance pour la ville ». Cette appellation fait référence à
toutes les villes franches qui existaient sous l’ancien régime et qui bénéficiaient de l’exonération
des impôts royaux. Plusieurs séries de zones franches ont été créées, le dernier dispositif résulte de
la loi de finance pour 2014. Dorénavant ce dispositif s’intitule zone franche urbaine territoire
entrepreneur (ZFU-TE). La loi de 2014 a modifié le régime dans un sens restrictif, elle a réduit la
durée d’exonération de 14 ans à 8 ans. Le plafond d’exonération a également été divisé par deux, on
passe de 100 000 euros à 50 000 euros. L’exonération est dégressive, elle est totale pendant 5 ans
puis la 6ème année elle est de 60%, la 7ème année de 40% et la huitième année de 20%.
L’avantage n’est plus accordé aujourd’hui que sous la réserve d’une clause d’embauche, il est exigé
de l’entreprise qu’elle emploie essentiellement des salariés qui résident sur la ZFU.

3. Les statuts particuliers

Le législateur a souhaité prévoir un régime de faveur pour certaines entreprises en particulier. C’est
notamment le cas de la loi de finance pour 2004 qui a créé le statut de jeune entreprise innovante.

Sont considérées comme jeunes entreprises innovantes (JEI), les PME dont le capital est détenu à
50% par des personnes physiques ou par des JEI, âgées de moins de huit ans, réalisant des dépenses
de recherches représentant au moins 15% du total des charges de l’exercice fiscalement déductibles
et qui exercent une activité réellement nouvelle au sens de l’article 44 sexies.

Les JEI bénéficient d’une exonération d’impôt sur les bénéfices totale pour la première année et à
hauteur de 50% pour la seconde année. Ce régime a été prorogé par la dernière loi de finance, il
peut donc s’appliquer aux JEI créées jusqu’au 31 décembre 2022.

L’article 44 septies prévoit un régime d’exonération des sociétés créées pour reprendre une
entreprise industrielle en difficulté. Cette disposition a été modifiée plusieurs fois car elle est très
peu utilisée en pratique. Cet article prévoit que les sociétés créées pour reprendre des entreprises qui
font l’objet d’une cession dans le cadre d’une procédure collective sont exonérées d’IS pendant
deux ans. Cette exonération s’applique dans la limite du plafond de minimis. Il existe des plafonds
spécifiques plus élevés dans certaines situations.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Ce régime est très peu utilisé parce qu’il concerne uniquement les ventes d’actifs des entreprises à
la barre du tribunal, or en pratique quand on veut reprendre une entreprise on rachète les droits
sociaux et non les actifs, fiscalement ça coute moins cher en droits de mutation de racheter des titres
plutôt que des actifs. Une entreprise qui fait des déficits peut les reporter dans le temps, les
entreprises ont alors souvent des stocks de report déficitaires important donc si l’entreprise est
découpée les déficits sont perdus alors qu’avec le rachat de titres, les déficits subsistent.
L’administration fiscale exige que l’activité continue chez le repreneur de manière exclusive, le
repreneur doit seulement exercer cette activité sans la modifier, or économiquement ça n’a pas de
sens, puisque l’entreprise était en faillite. L’entreprise reprise est déficitaire donc l’exonération de
l’IS n’est pas nécessaire les premières années. Ce régime a néanmoins été reconduit jusqu’au 31
décembre 2021.

Paragraphe 2 : Le champ d’application territorial

On fait application du principe de territorialité. Si une entreprise s’implante à l’étranger, à quel Etat
convient-il de rattacher ses bénéfices / pertes ? Le principe est que c’est l’Etat du lieu
d’implantation qui a la compétence d’imposition des résultats de l’entreprise. Si l’entreprise recrute
du personnel localement, les charges sociales seront celles du droit local. L’entreprise française qui
s’implante à l’étranger aura tendance à s’établir dans un pays où les règles fiscales et sociales sont
plus favorables qu’en France.

Les pouvoirs publics français ont mis en oeuvre un arsenal législatif destiné à lutter contre la
localisation artificielle des entreprises, ceci dans le cadre de la lutte contre l’évasion fiscale
internationale.

A. Le principe de territorialité de l’IS

l’IS est d’application territoriale, cad que seuls sont soumis à l’IS français les bénéfices réalisés en
France. Les bénéfices réalisés à l’étranger, même par des entreprises françaises ne sont pas soumis à
l’IS français.

Selon l’article 209 I CGI les bénéfices soumis à l’IS sont déterminés en tenant compte uniquement
des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France et des bénéfices dont l’imposition
est attribuée à la France par une convention internationale sur les doubles impositions.

L’idée sous-tendue par cette disposition est l’imposition des bénéfices réalisés en France sur la base
du droit interne ou sur la base du droit conventionnel.

1. Contenu du principe

Deux situations doivent être distinguées selon qu’on applique les textes de droit français ou qu’on
se situe dans un cadre conventionnel.

Lorsqu’on applique les textes français, l’article 209 I CGI prévoit qu’on doit imposer en France les
bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France.
Le CE a décidé qu’une entreprise est considérée comme exploitée en France dans trois situations :
‣ Lorsque l’entreprise dispose, en France, d’un véritable établissement cad une structure locale
avec une comptabilité propre,
‣ Lorsque l’exploitation se résume à un représentant détaché en France s’il peut juridiquement
engager la société étrangère : c’est la théorie de l’agent dépendant, cad un mandataire qui peut
représenter la société qui l’emploie et qui est juridiquement dépendant de la société.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

‣ Lorsque les opérations forment un cycle commercial complet, par exemple un achat-revente de
marchandises en France.

Ces critères sont réversibles, ils sont applicables pour caractériser une exploitation en France mais
également pour caractériser une exploitation à l’étranger.

Les conventions fiscales internationales (Conventions fiscales sur les doubles impositions) se
fondent sur la convention modèle OCDE. Ces conventions retiennent l’établissement stable comme
critère de rattachement des résultats.
L’article 7-1 de la convention modèle OCDE prévoit que « les bénéfices d’une entreprise d’un Etat
contractant ne sont imposables que dans cet Etat à moins que l’entreprise exerce son activité dans
l’autre Etat par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est installé. Si l’entreprise exerce son
activité d’une telle façon, les bénéfices de l’entreprise sont imposables dans l’autre Etat mais
uniquement dans la mesure où ils sont imputables à l’établissement stable.»

Cet article pose le principe selon lequel tous les résultats d’une entreprise sont imposés dans son
pays d’origine à l’exception des résultats provenant d’un établissement stable étranger qui doivent
être rattachés à cet établissement et être imposés à l’Etranger. Chaque Etat impose les résultats qui
ont été réalisés sur son territoire, c’est le principe de territorialité. Ce principe s’oppose au principe
de mondialité applicable à l’IR, qui veut que le contribuable domicilié en France soit imposé aussi
bien sur ses revenus français que sur ses revenus étrangers, d’où le risque de double imposition.

L’article 7-1 fait référence à la notion d’établissement stable comme critère de rattachement. Les
définitions conventionnelles renvoient, pour la caractérisation d’un établissement stable, soit à la
notion d’établissement soit à la notion de représentant. Le critère du cycle commercial complet ne
s’applique pas dans les conventions internationales.

Le droit conventionnel définit l’établissement comme une installation fixe d’affaires, cad en
pratique un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine, un atelier, une mine, un puit de
pétrole, une carrière, etc.

Pour déterminer le résultat imposable, il faut utiliser la comptabilité de l’établissement stable s’il est
suffisamment autonome. En revanche, si l’établissement ne tient pas de comptabilité, il faut
reconstituer le résultat imposable à partir de la comptabilité de la société principale, par une sorte
d’extrapolation, il sera possible de reconstituer le résultat de l’établissement étranger.

Les sociétés étrangères exerçant une activité en France sont imposables en France si elles disposent
d’un établissement stable. En pratique, on observe souvent que la société étrangère exerce une
activité en France par l’intermédiaire d’une filiale immatriculée en France. Cette société ne dégage
quasiment pas de bénéfices alors que l’activité est rentable car elle s’est arrangée avec la société
mère pour faire en sorte que les bénéfices soient réalisés à l’étranger. Il y a une distorsion entre la
localisation de la filiale et la localisation des bénéfices. L’administration fiscale française considère
qu’il est possible de considérer la filiale française comme un établissement stable de la société mère
étrangère, à condition de pouvoir prouver que la société filiale constitue, au sens de la convention
fiscale, le représentant de la société mère. Pour cela elle doit remplir deux conditions, d’une part
être un représentant au sens juridique, cad quelqu’un qui a le pouvoir d’engager autrui et d’autre
part être en situation de dépendance. L’idée de l’administration fiscale française est de considérer
que le bénéfice a été réalisé en France.
‣ CE, 20 juin 2003, Sté Interhome AG : Le CE a admis la solution proposée par l’administration
fiscale. La Sté Interhome française a été considérée comme le représentant de la société mère
Suisse Interhome AG

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

‣ CE, 31 mars 2010, Sté Zinner Ltd : une société britannique avait une filiale en France. La
filiale française peut-elle être analysée comme étant l’établissement stable de la société mère
étrangère ? Les faits mettaient en oeuvre un contrat de commission, la société française était le
commissionnaire de la société britannique. Le CE s’est demandé si le commissionnaire peut être
considéré comme un agent dépendant. L’agent dépendant est le bras de la société étrangère, cad
le prolongement naturel et juridique de la société. Le CE a analysé le contrat de commission au
sens du droit français, il en a déduit que même si le contrat est conclu pour le compte du
commettant, il n’engage pas directement ce dernier vis-à-vis des contractants du
commissionnaire. Le commissionnaire ne représente donc pas le commettant au sens juridique.
Le CE juge que le commissionnaire ne peut pas constituer l’établissement stable du commettant.

Les GAFA paient, proportionnellement à leur taille, très peu d’impôts sur les bénéfices. Cela résulte
d’une série de décisions stratégiques prises par ces sociétés. Les Etats n’arrivent pas à capter les
profits du numérique.

L’affaire Google : Google est une société installée en Irlande, elle possède des filiales dans divers
Etats, notamment en France. Google France a la taille d’une PME. Google France est liée avec
Google Irlande par un contrat de prestation par lequel la société française réalise des prestations de
marketing et d’assistance à la vente, elle reçoit un pourcentage des recettes de Google Irlande. Les
sociétés faisant appel à Google ne signent pas les contrats avec Google France mais avec Google
Irlande, ce qui lui permet de faire ses bénéfices en Irlande. L’administration française a essayé de
faire juger que Google France constituait l’établissement stable de Google Irlande. Pour cela, il
fallait convaincre les juges que Google France est l’agent dépendant de Google Irlande. Google
France ne signe pas les contrats, donc Google Irlande disait qu’elle n’est pas représentée par la
filiale française, donc juridiquement il n’y a pas de représentation. Google a obtenu gain de cause
jusqu’en appel. L’affaire n’est pas allée jusqu’au Conseil d’Etat. Les deux parties ont transigé (465
millions d’euros payés par Google).

‣ CE, plénière, 11 novembre 2020, Conversant International Ltd : dans une affaire similaire à
Google, le CE a donné raison à l’administration fiscale française. Le CE relève que si en effet la
société Irlandaise fixe des modèles de contrats conclus avec les annonceurs, et notamment fixe
les conditions tarifaires générales, « le choix de conclure un contrat avec un annonceur et
l’ensemble des tâches nécessaires à sa conclusion, relèvent des salariés de la société française.
La société Irlande se bornant à valider le contrat par une signature qui présente un caractère
automatique. » Dans les faits, on peut dire que la société française est le représentant de la
société Irlandaise même si elle ne signe pas les contrats.

2. Évolution du principe

Les Etats ont le plus grand mal à capter les profits des entreprises numériques (GAFA). Les Etats
ont deux possibilités :
‣ Soit se baser sur la notion d’établissement stable, cette solution n’est pas adaptée à une économie
numérique.
‣ Soit considérer que l’établissement stable ne fonctionne pas, celui-ci étant déterminé comme
une installation fixe d’affaires. Le domaine du numérique n’a pas de frontières donc les
installations fixes ne sont pas nécessaires.

Une taxe GAFA a été adoptée par une loi du 24 juillet 2019, c’est une taxe sur les services
numériques. Il ne s’agit plus d’imposer les bénéfices de l’entreprise étrangère mais d’imposer le
chiffre d’affaires réalisé en France, cad les recettes réalisées sur le territoire national. Cette taxe
impose les services d’intermédiations cad la mise à disposition d’une interface numérique
permettant aux utilisateurs d’interagir entre eux et les prestations de ciblage publicitaire. Pour être

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

imposé, il y a un seuil de chiffre d’affaires nécessaire à atteindre. Cette taxe est égal à 3% du
montant HT du total des encaissements relatifs aux services imposés.

Cette taxe préfigure ce que ne veulent surtout pas les GAFA. Dans l’immédiat, hormis cette taxe
GAFA qui concerne en réalité très peu de sociétés, la France n’impose les entreprises que sur le
principe de l’établissement stable. Cette notion d’établissement stable est en train d’être modifiée,
l’idée de créer un établissement stable numérique a notamment été abandonnée. Les Etats veulent
alors élargir la notion d’établissement stable prévue par les conventions internationales afin que
soient pris en compte les actes préparatoires aux contrats (cf solution Conversant).

l’OCDE a mis en oeuvre une convention multilatérale qui, si elle est adoptée, va permettre de
modifier les conventions bilatérales existantes sans renégociation. Il suffira de modifier la
convention multilatérale, par ricochet, toutes les conventions bilatérales des Etats adhérents à la
convention multilatérale, seront modifiées. La France a déjà ratifié cette Convention.

3. Portée du principe

Selon le principe de territorialité, si une société française réalise des bénéfices étrangers par
l’intermédiaire d’une exploitation étrangère, elle n’est pas imposée en France sur les bénéfices
étrangers. Parallèlement, si cette exploitation étrangère fait des déficits, elle ne peut pas imputer ses
déficits étrangers sur ses bénéfices français.

Si une société française exploite à l’étranger, on suppose ici que l’entreprise française est
bénéficiaire et l’entreprise étrangère est déficitaire. L’entreprise française pouvait accorder une aide
à l’entreprise étrangère, c’était souvent une aide mère-fille. Cette possibilité permettait de réduire le
bénéfice français et de réduire le déficit de la filiale étrangère sans pour autant entrainer de déficit
au niveau local, c’est la théorie des vases communicants.
Depuis 2012, le principe est que les aides à caractères financiers ne sont plus déductibles des
résultats imposables. Une mère ne peut plus déduire une aide financière qu’elle verse à sa filiale,
que cette filiale soit française ou étrangère. Il y a néanmoins deux exceptions : si la filiale est en
difficulté au sens du droit des procédures collectives et s’il s’agit d’une aide commerciale, par
exemple un fournisseur peut venir en aide à son client et un client peut venir en aide à son
fournisseur.

Le régime des provisions pour implantation permettait à une entreprise française de déduire une
provision lorsqu’elle s’implantait à l’étranger car elle était souvent déficitaire du fait des
investissements nécessaires à cette implantation. Ce régime a été supprimé en 2004.

Un régime permettait à une PME française d’utiliser les déficits d’une succursale ou d’une filiale à
95% européenne sous certaines conditions. Ce régime avait été institué en 2009 et a été abrogé en
2013.

Le régime des bénéfices consolidés ou des bénéfices mondiaux permettait, sur agrément, à une
société française d’additionner les résultats de toutes ses filiales françaises et étrangères, à condition
qu’elle possède au moins 50% du capital de ses filiales et qu’elle contienne un agrément. Cela
permettait à une société française de faire des économies fiscales considérables. Ce régime a pris fin
en 2011, les sociétés qui étaient en cours d’agrément se sont donc vu retirer cet agrément du jour au
lendemain.

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B. La lutte contre l’évasion fiscale

Il ne faut pas confondre optimisation fiscale, évasion fiscale et fraude fiscale. L’optimisation fiscale
est parfaitement légale.

La fraude fiscale est un délit pénal, c’est la soustraction frauduleuse à l’impôt, un revenu ou un bien
a été dissimulé par le fraudeur de manière volontaire.

L’évasion fiscale se situe entre l’optimisation et la fraude. Un contribuable a réalisé des montages
en apparences réguliers mais qui lui ont permis de contourner la loi, qui normalement aurait dû
s’appliquer. On est dans le domaine de l’abus de droit.

L’évasion fiscale internationale passe souvent par la localisation artificielle d’un bénéfice à
l’étranger. Une société veut s’implanter à l’étranger, dans un pays où les impôts sont moindres.
Cette société a la possibilité de se délocaliser mais cela a un coût important. Certaines personnes ont
alors l’idée de délocaliser le bénéfice à la place de délocaliser l’entreprise. Pour cela, les entreprises
font appel à des techniques d’évasions fiscales qui prennent la forme d’un transfert indirect de
bénéfices à l’étranger, à une filiale locale étrangère qui va être imposée à la place de la société
française. La société peut aussi utiliser des sociétés relais à l’étranger qui vont avoir pour seul objet
d’exercer l’activité qu’aurait dû exercer l’activité française. Les TIB et les sociétés relais sont les
deux techniques d’évasion fiscale les plus utilisées, ces deux techniques sont prévues par le CGI.

Les régimes fiscaux utilisés pour lutter contre l’évasion fiscale internationale reposent sur une
technique présomptive qui permet un renversement de la charge de la preuve, les entreprises
devront prouver qu’elles sont innocentes. Les règles sont susceptibles d’être aggravées lorsque
l’Etat étranger servant d’appui à la société française est un paradis fiscal.

En droit, on parle de pays à fiscalité privilégiée et d’Etat non coopératif, et non pas de paradis
fiscal. Un pays à fiscalité privilégiée (article 238 A CGI) est un paradis fiscal, cad un pays où
l’impôt est notablement moins élevé qu’en France. Le législateur a exigé une différence de plus de
50% entre l’impôt payé en France et celui payé à l’étranger. Depuis le 1er janvier 2020, la
différence exigée n’est plus que de 40%.

Les Etats non coopératifs sont des Etats qui ne communiquent aucune information fiscale avec les
autres Etats. Les Etats non coopératifs étaient des Etats non membres de l’UE et qui ont fait l’objet
d’une évaluation en matière d’échanges de renseignements par l’OCDE. C’était également des Etats
qui n’ont pas conclu, avec la France, une convention d’assistance administrative ni signé une telle
convention avec au moins 12 Etats ou territoires. Chaque année la France publie par voie d’arrêté
une liste des Etats non coopératifs. Depuis 2018, les conditions pour faire partie de cette liste ont
évoluées. Désormais, les pays de l’UE peuvent figurer sur cette liste. Ont été ajoutés à cette liste, les
pays qui figurent sur la liste noire de l’UE.
En 2020, 5 pays figuraient sur liste des ETC selon le droit français : Anguille, les Bahamas, les îles
Vierges britanniques, les Seychelles et le Panama. À ces pays s’ajoutent ceux de la liste noire de
l’Union Européenne : les Fidji, Guam, les Îles Vierges américaines, le Sultanat d’Oman, les Samoa
américaines, les Seychelles, Trinité-et-Tobago, le Vanuatu.

1. Les transferts indirects de bénéfices

Il faut imaginer un groupe de sociétés dont certaines sont situées en l’étranger. Une société
française fait des bénéfices importants. Cette société a des filiales installées sur des territoires sur
lesquels l’impôt est plus faible. L’idée est de transférer indirectement le bénéfice français à ces
filiales. Il faut réduire le bénéfice français et augmenter le bénéfice étranger. Pour cela, il faut

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

majorer les charges françaises au profit des sociétés étrangères ou minorer les produits français au
profit des sociétés étrangères.

Si l’entreprise est vérifiée, elle peut être sanctionnée sur la théorie de l’AAG. Néanmoins la preuve
de l’AAG repose normalement sur les épaules du vérificateur. Des textes français anti-évasion
reposent sur une présomption, la loi présume l’existence d’un AAG dans ce contexte.

Le vérificateur peut soit se fonder sur l’article 57 CGI soit sur l’article 238 A CGI. Le plus efficace
est l’article 238 A mais il est plus contraignant au niveau de sa mise en oeuvre.

• Le contrôle des prix de transfert (article 57 CGI) :

L’article 57 vise spécifiquement les bénéfices indirectement transférés « par des entreprises qui sont
sous la dépendance ou qui contrôlent des entreprises situées hors de France ». Il s’agit de bénéfices
indirectement transférés entre sociétés qui appartiennent à un même groupe et dont l’une au moins
est située à l’étranger. Peu importe que ce soit la société française qui contrôle la société étrangère
ou la société étrangère qui contrôle la société française.

Si cette condition est remplie, la loi précise que le transfert indirect de bénéfices peut être réalisé
« par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente soit par tout autre moyen ».

L’administration doit démontrer qu’une société française contrôle une société étrangère ou est
contrôlée par elle. La condition de dépendance n’est pas exigée si la société étrangère est établie
dans un pays à fiscalité privilégiée ou dans un ETNC (Etat ou Territoire non Coopératif).
L’administration doit ensuite démontrer qu’il y a eu une majoration ou une diminution des prix
d’achat et de vente, cad qu’il y a eu un transfert indirect des bénéfices.

Par exemple, une société française achète des produits à sa filiale étrangère pour les revendre en
France. Le transfert indirect du bénéfice peut se faire en majorant les prix d’achat. Cela fait baisser
le bénéfice français et permet de majorer le bénéfice étranger.

Il n’est pas toujours facile pour l’administration fiscale de démontrer l’écart de prix. La Jp estime
que pour que le comparatif soit pertinent, il faut faire référence à un prix de pleine concurrence. Il
faut faire comme si le vendeur et l’acheteur n’étaient pas liés, l’administration fiscale donc doit
faire référence au prix normal du marché pour déterminer l’écart de prix. Ce principe de prix de
pleine concurrence est très critiqué par les fiscalistes et particulièrement dans un contexte de crise
économique.
Il se peut que l’administration fiscale n’arrive pas à trouver de prix de comparaison normal, dans ce
cas elle doit établir un écart injustifié entre le prix et le produit.

Si l’administration fiscale arrive à démontrer l’écart de prix, l’article 57 s’applique, il revient à la


société française de prouver qu’il n’y a pas eu d’AAG. La présomption est simple, l’entreprise peut
démontrer que l’avantage qui a été servi obéissait à des nécessités commerciales normales et qu’il
ne s’agissait pas pour elle de transférer son bénéfice à l’étranger ni de faire de l’évasion fiscale.

Le législateur a cherché à aider l’administration dans son contrôle fiscal afin de lui faciliter son
travail de recherche et d’identification de l’évasion. Ces dernières années, les obligations
documentaires de toute nature à la charge des entreprises ont été multipliées. Par exemple, au cours
d’une vérification de comptabilité, si l’administration réunit des éléments qui lui permettent de
penser qu’il y a eu un transfert indirect de bénéfices, elle peut demander à l’entreprise de lui fournir
toutes informations sur la formation de ses prix à l’international. Elle va lui demander de justifier

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

ses prix d’achats ou de ventes. L’entreprise est obligée de répondre au risque d’être sanctionnée par
une amende (article L13B LPF).

L’article L13AA LPF oblige les entreprises d’une taille suffisante (celles dont le CA ou l’actif est
au moins égal à 400 millions d’euros) à tenir à la disposition de l’AF, un ensemble de documents
qui permet de justifier les politiques de prix de l’entreprise. Ces entreprises doivent être, en
permanence, capables de justifier des prix à l’international.
Pour certaines de ces entreprises, elles doivent envoyer, chaque année, ces pièces à l’administration,
du moins une version allégée de ces pièces et non pas seulement les tenir à disposition.

L’article 223 quinquies CGI prévoit le reporting pays par pays, cad l’obligation qu’ont les
multinationales françaises de déclarer, tous les ans, à l’administration, la répartition pays par pays
des bénéfices de toutes les entreprises du groupe.

L’article L80B LPF prévoit la procédure d’accord préalable en matière de prix de transfert, qui peut
être intéressante pour l’entreprise. Les entreprises françaises en relation avec des entreprises
étrangères ont de très fortes chances de subir un contrôle fiscal. L’entreprise peut de son propre
chef, se rapprocher de l’administration et s’entendre avec elle sur son prix. L’administration
intervient dans le contrat, qui devient alors tripartite. Si l’administration fiscale donne son accord,
elle ne pourra pas se dédire. C’est une procédure d’accord tacite donc si l’AF ne répond pas, elle est
considérée avoir donné son accord. Cette procédure avait notamment été utilisée par Airbus.

• Le contrôle des rémunérations (art 238 A CGI) :

L’article 238 A CGI prévoit que les rémunérations de services ou de capitaux à destination d’une
entreprise installée sur le territoire d’un Etat à fiscalité privilégiée (paradis fiscal) sont présumées
constituer un transfert indirect de bénéfices au profit de l’entreprise étrangère. L’article 238 A
s’intéresse aux bénéfices indirectement transférés.

Il revient à l’administration fiscale de démontrer que le régime fiscal du pays concerné est bien plus
avantageux que le régime fiscal qui aurait été appliqué en France. Le texte exige une différence de
plus de 40% entre l’impôt acquitté à l’étranger et celui dont l’entreprise aurait été redevable en
France. Rapporter la preuve de cet écart n’est pas facile car le Conseil d’Etat considère que ce n’est
pas seulement une question de différence de taux. L’impôt sur les sociétés est le bénéfice multiplié
par le taux, donc le bénéfice est aussi à prendre en compte. Le CE est très exigeant en ce qui
concerne la comparaison de la situation française et de la situation étrangère. Il faut aussi tenir
compte d’autres impositions prévues par la législation étrangère mais non applicables en France.

L’article 238 A vise certaines opérations limitativement énumérées qui peuvent constituer des
transferts de bénéfices : les intérêts, les arrérages (revenus des rentes) et autres produits des
obligations (les créances, dépôts et cautionnements), les redevances de cession ou concessions de
licences d’exploitation, de brevet d’invention, de marque de fabrique, procédés ou formules de
fabrication et autres droits analogues et les rémunérations de services.

Si la présomption de transfert de bénéfices est simple. Le contribuable peut la renverser en


démontrant l’effectivité du service rémunéré et le caractère normal de cette rémunération. Si le
contribuable n’y parvient pas, la présomption joue, toutes les rémunérations transférées ne seront
pas déductibles du résultat imposable.

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2. La lutte contre les sociétés « relais »

Une société relais est une société qui n’a pas d’activité propre, elle est constituée à l’étranger dans
le cadre d’un schéma d’évasion fiscale pour recevoir des profits passifs (revenus de capitaux ou
revenus mobiliers essentiellement) à la place de la société française.

Une société française perçoit des revenus de capitaux imposés à l’IS en France. Cette société va
constituer une filiale à l’étranger, qui est une société relais, pour recevoir à sa place les revenus de
capitaux. Le lieu d’implantation de la société relais est un pays dans lequel les revenus de capitaux
ne sont pas imposés ou sont imposés bcp plus faiblement qu’en France. Il faut trouver un moyen
pour rapatrier les fonds vers la société française. Pour cela, le régime des sociétés mères s’applique,
tout dividende servi par une filiale, même étrangère, à une société mère française est quasiment
exonéré. Ce montage est prévu par l’article 209 B CGI.

Les Etats en Europe ont du mal à se protéger fiscalement contre les montages d’évasion fiscale
internationale car bcp de ces dispositifs sont tombés sur sous le coup des principes de liberté de
circulation et d’établissement des capitaux.

L’article 209 B CGI prévoit que lorsqu’une personne morale établie en France, passible de l’IS,
détient plus de 50% des droits d’une entité située dans un pays à régime fiscal privilégié au sens de
l’article 238 A, les bénéfices de l’entreprise étrangère sont réputés constituer des revenus de
capitaux mobiliers pour la société française à proportion des droits détenus. Les bénéfices de
l’entreprise étrangère sont imposés en France à proportion des droits détenus par la société mère
française.

L’article 209 B ne peut pas s’appliquer si l’entreprise étrangère est située sur le territoire de l’UE
car un tel dispositif serait contraire aux principes de l’UE. L’administration fiscale peut toujours
démontrer qu’il s’agit d’un montage artificiel destiné à contourner la loi française, la présomption
ne s’applique pas.
Si l’entreprise est située en dehors de l’UE, la présomption s’applique, la présomption est simple, le
contribuable doit rapporter la preuve que les entreprises estrangères ont un objet et effet autre que
de permettre la localisation des bénéfices dans un pays à fiscalité privilégiée.

Section 2 : L’assiette de l’IS


Il y a une différence fondamentale entre les sociétés soumises à l’IS et les sociétés soumises à l’IR.
Quelle que soit l’activité de la société soumise à l’IS, son bénéfice imposable doit être calculé à
partir des règles des BIC. Lorsque la société relève de l’IR, son bénéfice imposable est calculé en
fonction de son activité.

Paragraphe 1 : Le régime des plus-values professionnelles

A. Le régime ancien

Un PV ou MV professionnelle est l’enrichissement / l’appauvrissement d’une entreprise, qui fait


suite à la cession d’un actif immobilisé.

Jusqu’en 1997, le régime fiscal en IS des plus-values professionnelles était très proche de celui qui
s’appliquait en impôt sur le revenu.

Les PV à long terme étaient imposés à un taux réduit de 19% (16% en IR), au lieu de 33, 33%. Les
PV professionnelles à court terme étaient imposés au taux plein de 33,33%. Ce régime de faveur a

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été institué pour donner la possibilité aux entreprises d’investir sans pour autant payer un impôt trop
important. Pour des biens non amortissables, la différence entre le court et long terme tient en la
durée de détention.

Il n’y avait pas de régime d’exonération pour les petites entreprises, il n’était pas non plus possible
d’étaler les PV à court terme sur trois ans. Si l’entreprise voulait bénéficier du régime du long
terme, elle devait doter la réserve spéciale des plus-values à long terme pour un montant égal à la
PV réalisée sous déduction de l’impôt payé.

Ce taux de 19% ne s’applique quasiment plus, il ne s’applique aujourd’hui qu’à certaines plus-
values immobilières des sociétés soumises à l’IS (par exemple une société qui cède des bureaux
destinés à être transformés en logements).

A. Le régime issu de la loi du 10 novembre 1997

À compter des exercices ouverts depuis le 1er janvier 1997, le régime des PV à long terme cesse de
s’appliquer pour l’ensemble des cessions des éléments d’actifs sauf pour certains régimes
particuliers.

Les PV à long terme des entreprises soumises à l’IS sont désormais imposés au taux plein. Les MV
à long terme deviennent déductibles du bénéfice imposable au taux plein.

Deux régimes ont survécu:


‣ Le régime des PVLT sur cession des titres de participation
‣ Le régime des cessions ou concessions de brevets ou d’inventions brevetables.

Concernant la cession ou concession de brevet, le régime des PVLT continue de s’appliquer aux
produits de la propriété industrielle qu’il s’agisse d’une cession de brevet ou d’une concession de
licence de brevet. La concession n’est pas une vente donc il ne devrait pas y avoir de PV, ce sont
des redevances qui sont encaissées et non un prix. Ces redevances profitent néanmoins du régime
des PVLT, elles sont imposées à 19%. Ce régime requiert que les actifs vendus ou cédés soient
détenus depuis au moins deux ans.

La notion de titre de participation s’oppose à la notion de titre de placement. Dans un bilan


comptable, les titres de participation correspondent à de l’actif immobilisé et les titres de
placements correspondent à de l’actif circulant. L’idée de la loi a été de maintenir le régime du long
terme pour les PV sur cession de titres de participation.
L’article 219 CGI prévoit que sont considérés comme des titres de participation par le droit fiscal,
les titres considérés comme tel par le droit comptable et ceux considérés comme tel par le CGI.

Au sens du droit comptable, l’article R123-184 du code de commerce prévoit que constituent des
participations, les droits dans le capital d'autres entreprises, matérialisés ou non par des titres, qui,
en créant un lien durable avec celles-ci, sont destinés à contribuer à l'activité de la société
détentrice. Ce qui est essentiel est l’existence d’un lien durable et l’exercice d’une influence sur la
société. Cet article ajoute que sont présumés être des participations, les titres représentant une
fraction du capital supérieure à 10%.

27
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Le droit fiscal considère que sont des titres de participation, les titres acquis dans le cadre d’une
OPA ou d’une OPE ainsi que les titres qui ouvrent droit au régime des sociétés mères mais
seulement si la société mère possède au moins 5% des droits de vote de la société émettrice.

B. Le régime issu de la loi du 30 décembre 2004

Il s’agit d’aller plus loin que la loi de 1997, en ce qui concerne les cessions de titres de participation
et les produits de la propriété industrielle. Le gouvernement fait adopter un amendement
« scélérat »

L'amendement dit Copé prévoit l’exonération des PVLT de cession des titres de participation. La
vente de titres de participation consiste principalement à vendre des filiales. Cette mesure a été
présentée comme un instrument devant permettre aux sociétés de se restructurer dans des conditions
fiscales avantageuses.

La loi de finance du 30 décembre 2004 contient un ensemble de mesures concernant les PV


professionnelles. Ces mesures vont progressivement entrer en vigueur entre 2005 et 2007. Le
régime des PVLT professionnelles est divisé en deux, il y a un régime de droit commun qui
concerne les droits de la propriété industrielle et le régime spécial des cessions de titres de
participation.

Le régime de droit commun implique que les produits de la propriété industrielle sont imposés au
taux réduit de 15%. Ce régime des PVLT sur les droits de propriété industrielle se divise en
deux :

Les PV sur cession de brevet et les PV sur redevances de concession de brevet. Ces deux régimes
profitent du taux de 15% si les droits de PI sont détenus depuis au moins deux ans. Le taux réduit
s’applique sans que la société n’ait à doter la réserve spéciale des PVLT.
Il existait des conditions d’application spécifique dans l’un et l’autre cas, notamment pour les PV
sur cession de brevet, il ne fallait pas que les deux entreprises soient sous la dépendance l’une de
l’autre. Cette condition n’était pas requise s’agissant des licences d’exploitation de brevet. Ce
régime des PVLT des propriétés industrielles a été abrogé à compter des exercices ouverts depuis le
1er janvier 2019. Ce régime a été détaché du régime des PV professionnelles et fait désormais
l’objet d’un traitement fiscal particulier qui est celui des droits de la propriété industrielle, et qui se
voit appliquer un taux de 10%.

Le régime spécial des cessions de titre de participation est maintenu, une société qui vend des titres
de participation, qu’elle possède depuis au moins deux ans, est exonérée sur la PV de cession. Cette
exonération n’est pas complète, en échange la société doit réintégrer dans son bénéfice imposable
une quote part pour frais et charges d’un montant égal à 5% du résultat net des plus-values au
départ. Cette quote part a évolué depuis 2012, elle est désormais fixée à 12% du résultat brut des
PV.

En pratique, une entreprise au cours d’un exercice peut être amenée à réaliser des cessions de titres
de participation. Elle va réaliser des PV ou des MV pour certains titres. Elle doit compenser entre
elles les PV et MV à long terme et les PV et MV à court terme. Elle dégage une plus value nette à
CT ou à LT.

Par exemple : une entreprise réalise une PVLT de 60 pour un titre A et une MVLT de 30 pour un
titre B. Après compensation, on constate qu’elle réalise une PVLT nette de 30. Cette PVLT est
exonérée d’impôt. Cette PVLT doit être déduite extra-comptablement. La société doit réintégrer une

28
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

quote part pour frais et charges de 12% de la PV brute. 12% x 60 = 7,20. Enterprise doit réintégrer
7,20 extra-comptablement.

Contrairement à ce que souhaitait l’administration, si une société a réalisé une MV nette mais
qu’elle a réalisé une PV brute, elle n’a pas à réintégrer la quote part de 12% sur PV brute. En
revanche, si l’entreprise réalise une MV nette d’ensemble, elle est perdue pour l’entreprise, elle ne
peut pas la déduire donc il faut la réintégrer dans le bénéfice imposable.
Les provisions pour dépréciations de titres de participation ne sont pas déductibles. En revanche, la
reprise de la provision n’est pas imposable.

Paragraphe 2 : Le régime des charges financières

Les charges financières sont les intérêts d’emprunt. Quand une entreprise emprunte de l’argent, elle
reçoit un capital et à l’échéance elle doit restituer le capital et payer les intérêts. Le remboursement
du capital n’est pas une charge, elle ne peut pas déduire du résultat les fonds qu’elle rembourse. Elle
ne s’appauvrit pas car elle n’a plus de dettes en remboursant son capital. Elle s’appauvrit, en
revanche, du montant des intérêts versés, ce sont donc des charges.

Le législateur a souhaité encadrer la déduction des charges financières car les sociétés françaises
souffrent de la sous capitalisation et du surendettement. La société a souvent des capitaux propres
assez faibles mais de gros emprunts. L’emprunt a un très gros avantage sur le financement en fonds
propres : si une société se finance sur fonds propres, elle augmente son capital, les investisseurs
seront rémunérés par dividendes, or cela suppose que l’entreprise fasse des bénéfices mais surtout
les dividendes ne sont pas des charges déductibles, ils sont considérés comme une utilisation du
résultat. Si l’entreprise emprunte, elle rémunère son prêteur par des intérêts, qui sont considérés
comme des charges déductibles. D’un point de vue fiscal, une société a plus d’intérêt à se financer
par emprunt que par fonds propres. Parfois les entreprises n’ont pas le choix, mais dans certains
groupes de sociétés il y a des stratégies fiscales de surendettement permettant de diminuer de
manière substantielle les bénéfices imposables. C’est contre cela que le législateur se bat de plus en
plus férocement.

La législation sur les charges financières a fait l’objet de plusieurs évolutions complexes.

A. Le régime historique des intérêts de compte courant d’associés

Historiquement, c’est le premier régime d’encadrement des charges financières qui a vu le jour.

Jusqu’en 2007, les intérêts versés à des associés PP ou PM étaient déductibles sous trois limites :
‣ L’article 39 CGI prévoit que le capital doit être intégralement libéré : si une société veut déduire
les intérêts qu’elle verse à l’associé, son capital doit être intégralement libéré, tous les associés,
dont le prêteur, doivent avoir libéré l’apport qu’ils ont fait, c’est la libération des apports (étape 1
: souscription au capital ; étape 2 : libération du capital).
‣ Le taux d’intérêt est plafonné à un taux bancaire, ce taux est égal à la moyenne annuelle des taux
effectifs moyens pratiqués pour les établissements de crédit pour des prêts à taux variables aux
entreprises d’une durée initiale supérieure à deux ans. Pour les exercices clôturés le 31 décembre
2020, le taux est de 1,18%.
‣ La limite de sous capitalisation : le montant des avances était plafonné à une somme au plus
égale à 1,5 fois le montant du capital social pour les intérêts servis au dirigeant de droit ou de fait
ou aux associés détenant plus de 50% des droits. Le plafond ne se fait pas sur le taux d’intérêt
mais sur l’assiette, sur le montant du capital prêté. Une société ne peut pas emprunter fiscalement
plus d’1,5 fois le montant de son capital social. On estime qu’au-delà de cette proportion,
l’entreprise est sous-capitalisée.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Cependant, cette troisième limite ne s’appliquait pas en matière de compte courant bloqué (l’associé
s’engage à laisser à disposition de la société les fonds pour une certaine période) ni pour les avances
d’une société mère au sens de l’article 145 du CGI. Le législateur ouvrait une brèche dans cette
exception, la limite de sous capitalisation ne s’appliquait pas dans les groupes puisqu’elle ne
s’appliquait pas aux avances consenties par une mère à sa filiale.
En 2007, il a été décidé que la limite de sous capitalisation s’appliquera dans les groupes. La
troisième limite ne concerne plus que les groupes, cad les avances mères à filles. Si on se situe hors
groupe, seules les deux premières limites s’appliquent. La limite de sous capitalisation ne
s’appliquera que dans les groupes car c’est dans les groupes qu’on trouve les disproportions les plus
importantes, souvent pour des raisons de stratégies financières et fiscales.

C. Le nouveau régime de plafonnement général des charges financières

C’est un régime qui s’applique à compter des exercices ouverts depuis le 1er janvier 2019. Entre
2012 et 2019, une double évolution s’est produite.

La limite de sous capitalisation a été perfectionnée. Plusieurs limites de sous capitalisation ont été
mises en place durant cette période.

Le rabot fiscal : le législateur s’est tourné vers d’autres législations (notamment allemande) qui ont
institué depuis longtemps un système de barrière d’intérêt. Il a été décidé qu’une entreprise ne peut
pas déduire plus de 75% de ses charges financières, pour autant que ses charges soient au moins
égales à 3 millions d’euros.
Les entreprises soumises à l’IS ne peuvent déduire leurs charges financières nettes que dans une
limite égale à 30% du résultat avant impôts, amortissements et provisions. C’est l’EBITDA fiscal
(earnings before interest, taxes, depreciation, and amortization = bénéfice avant intérêts, impôts,
dépréciation et amortissement). L’idée est d’empêcher les entreprises de déduire davantage pour
lutter contre les stratégies de surendettement des sociétés.

Ce qui est plafonné sont les charges financières nettes, cad les intérêts tels que diminués des
produits financiers de l’exercice. Le montant des charges financières nettes se comprend comme
étant celui des seules charges déductibles après application des limites traditionnelles. Il faut
distinguer deux situations. Si la condition liée à la libération du capital est remplie, la déductibilité
des intérêts versés à un associé est plafonnée à un montant d’intérêt calculé en appliquant le taux
plafond des intérêts de compte courant d’associés. S’agissant des intérêts versés à une entreprise
liée, la déductibilité des intérêts est limitée au taux plafond ou au taux du marché s’il est supérieur.

Le plafond institué par la loi de 2019 va venir plafonner ou sur-plafonner les intérêts qui, peut-être,
ont déjà été atteints par les limites précédentes.

Pour les intérêts qui restent déductibles après l’application de ces deux limites, le législateur a
institué un plafond égal au montant le plus élevé entre 30% du résultat avant impôts,
amortissements et provisions ou 3 millions d’euros par exercice. Le résultat fiscal correspond au
résultat soumis à l’IS avant imputation des déficits et applications du dispositif de déduction des
charges financières nettes. Le résultat ainsi défini devra être majoré des charges financières entrant
dans le calcul des charges financières nettes, des dotations aux amortissements et aux dépréciations
déductibles et des plus-values de cession d’actifs soumises au taux réduit de l’IS. Ce résultat doit
être minoré des produits financiers entrant dans le calcul des charges financières nettes, des reprises
sur dépréciations ou amortissements imposables et des moins values sur cession d’actif soumises au
taux réduit des PVLT.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Exemple : une entreprise enregistre au cours de l’exercice N :


6 millions d’euros d’amortissements,
4 millions d’euros de dépréciation,
1 million d’euros de reprises sur dépréciation,
8 millions d’euros de charges financières,
2 millions d’euros de produits financiers,
Son résultat fiscal est de 3 millions d’euros.
L’entreprise peut-elle déduire la totalité de ses charges financières ou est-elle atteinte par le
plafond ?

Il faut d’abord calculer les charges financières nettes, cad celles qui peuvent être atteintes par la
règle du plafonnement. Ces charges financières nettes sont de 8 millions d’euros sous déduction des
produits financiers que l’entreprise reçoit (2 millions d’euros) soit un total de 6 millions d’euros.

Il faut ensuite calculer le plafond fiscal. L’entreprise peut choisir soit 3 millions d’euros soit 30% de
l’EBITDA fiscal.
l’EBIDTA fiscal est le résultat fiscal (3 millions d’euros) auquel on réintègre des charges : les
amortissements (6 millions d’euros), les dépréciations (4 millions d’euros) et les charges financières
nettes (6 millions d’euros). On soustrait à l’EBIDTA les produits : les reprises sur dépréciation (1
millions d’euros). Au total l’EBIDTA est de : 3M + (6M + 4M + 6M) - 1M = 18 millions d’euros.
30% x 18 millions = 5,4 millions d’euros.
L’entreprise a 6 millions d’euros de charges financières nettes, le plafond est soit de 3 millions
d’euros soit de 5,4 millions d’euros. La plafond de 3% d’EBIDTA est plus avantageux en l’espèce.
Il faut donc réintégrer 6 millions - 5,4 millions = 600 000 euros.

Lorsque l’entreprise est en situation de sous-capitalisation, les plafonds sont abaissés de manière
significative, ils passent à 1 millions et à 10% de l’EBITDA fiscal.
Le législateur a introduit deux assouplissements : la possibilité de reporter les intérêts non
déductibles dans le temps et sans limitation de durée (dans l’exemple précédant les 600 000 euros
pourront être déduits dans le temps jusqu’à épuisement) et l’entreprise peut utiliser sa capacité de
déduction inemployée pendant 5 ans. Si l’entreprise a des charges financières inférieures au
plafond, le delta entre ce qui excède les charges financières et le plafond peut être reporté, ce qui
vient augmenter le plafond de l’année suivante et ce jusqu’à la cinquième année.

Paragraphe 3 : Le régime des aides entre sociétés

Une aide est un avantage qui prend soit la forme d’une subvention (aide financière directe) soit la
forme d’un abandon de créance. Lorsqu’une entreprise en aide une autre, sans contrepartie, c’est un
acte anormal de gestion pour l’AF. Il n’est pas de l’usage des affaires de se faire des cadeaux,
l’entreprise qui accorde l’avantage attend quelque chose en retour. L’aide sans contrepartie est une
libéralité considérée comme un AAG. En principe, une entreprise ne peut pas accorder d’aide
fiscalement déductible à une autre entreprise. Néanmoins, la Jp avait considéré qu’une entreprise
pouvait justifier une libéralité de deux manières :
‣ Soit elle accorde une aide à une entreprise pour des motifs commerciaux, c’est l’aide pour des
motifs commerciaux. Par exemple, un fournisseur abandonne sa créance afin de préserver leurs
relations commerciales. Par cela, l’entreprise aidante s’est aidée elle-même.
‣ Soit elle accorde une aide à caractère financier, lorsque l’entreprise aidante a un intérêt financier.
C’est le cas d’une société mère qui accorde une aide à sa filiale en difficulté. Cette aide lui
permet de protéger sa participation.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

La loi de sauvegarde du 16 mai 2005 a donné lieu à l’article 39-1 8° CGI dans lequel la loi autorise
une entreprise à déduire les aides consenties à une entreprise en difficulté. L’entreprise n’a pas à
démontrer son intérêt à l’opération.

La loi du 16 aout 2012 a supprimé la déduction des aides à caractère financier. Le régime des aides
est un instrument d’optimisation fiscale extrêmement puissant. Dans les groupes de sociétés, les
sociétés s’accordaient des aides pour lisser les résultats.
Par exemple : Une société mère bénéficiaire de 100 qui possède une filiale déficitaire de -100 à
hauteur de 100%. La société mère paie un impôt sur les sociétés mais la filiale ne paie pas d’impôt
car elle est structurellement déficitaire. La société mère peut verser une aide de 100 à sa filiale, ce
qui lui permet de ne pas payer d’IS. La filiale qui reçoit la subvention ne fait pas de bénéfice même
avec l’aide donc elle ne paie pas non plus d’IS.

À compter des exercices clos depuis le 4 juillet 2012, une société ne peut plus déduire une aide à
caractère financier, le législateur a seulement maintenu la déduction des aides à caractère
commercial (art 39-13 CGI).

A. Le principe : la déduction des seules aides à caractère commercial

La notion d’aide à caractère commercial n’est pas définie par la loi. On peut considérer qu’une aide
est à caractère commercial lorsqu’elle trouve sa cause dans les relations commerciales qui unissent
les entreprises. Il s’agit soit de maintenir des débouchés (une entreprise aide un client) soit de
préserver une source d’approvisionnement (une entreprise aide un fournisseur).
L’entreprise devra démontrer que le fournisseur ou le client était en danger, sa disparition aurait mis
en danger l’entreprise elle-même. L’aide commerciale est déductible en totalité chez l’entreprise
aidante et imposable en totalité chez l’entreprise qui la reçoit.

L’article 39-1 8° CGI n’a pas été abrogé, il fait double emploi avec la Jp et avec le principe de la
déduction des aides à caractère commercial. Cet article a un domaine d’application plus restreint car
selon ce texte sont déductibles les abandons de créance à caractère commercial consentis ou
supportés dans le cadre d’un plan de sauvegarde ou de redressement ou d’un accord de conciliation.
La conciliation ayant été ajoutée à l’article par la loi de finance pour 2021.
Cet article consiste pour l’entreprise à la dispenser d’avoir à faire la preuve de l’intérêt de
l’opération.

L’aide relative à l’abandon de loyer : Souvent les entreprises sont locataires de leurs locaux, elles
paient des loyers qui constituent de lourdes charges. Le législateur est intervenu en 2020 par une loi
du 25 avril qui a admis en déduction du bénéfice imposable les abandons de loyers consentis entre
le 15 avril et le 31 décembre 2020, afférents à des immeubles donnés en location à une entreprise
qui n’a pas de lien de dépendance avec le bailleur. La période a été prorogée jusqu’au 31 décembre
2021 par la loi de finance du 21 décembre 2020. Cette même loi de finance a en plus institué un
crédit d’impôt au profit des bailleurs qui consentent au plus tard le 31 décembre 2021 des abandons
de loyers au titre du mois de novembre 2020 à leurs locataires particulièrement touchés par les
mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, cad les entreprises faisant l’objet d’une
interdiction d’accueil du public. Ce crédit d’impôt est égal à 50% du montant du loyer abandonné.

Les aides non commerciales ne sont pas déductibles. Une aide à caractère financier est une aide qui
est motivée par la participation que détient une société dans le capital d’une autre société.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Lorsqu’une société mère accorde à sa filiale une aide, tout en sachant qu’elle entretient avec cette
filiale des relations commerciales, quelle est la véritable nature de l’aide ?
‣ CE, 7 février 2018, Sté Fce Frais : une société holding fournissait des prestations
commerciales à ses filiales. Le CE a considéré que l’aide est à caractère commerciale au regard
des faits en l’espèce. Il faut analyser le caractère prépondérant de l’aide.

B. L’exception légale : la déduction des aides aux entreprises en difficulté

Depuis 2012, le législateur admet à l’article 39-13 al 2 que l’exclusion des aides non commerciales
ne s’appliquent pas aux aides consenties dans le cadre d’une procédure de conciliation ou aux aides
consenties aux entreprises pour lesquelles une procédure de sauvegarde, redressement ou
liquidation judiciaire est ouverte.

Il s’agit en pratique d’une aide consentie par une société mère à sa filiale avec laquelle elle
n’entretient pas de relations commerciales.

La Jp considérait qu’une société mère pouvait déduire l’aide accordée à sa filiale car elle a un
intérêt à lui venir en aide, celui de la préservation de ses titres. La loi considère que cette aide
financière ne peut pas être déduite sauf si la filiale est en difficulté au sens des procédures
collectives.
La Jp a apporté une limitation à la déduction : l’aide peut être déduite que dans la limite de son
appauvrissement. Si l’aide a pour effet d’augmenter la valeur de la participation, elle n’est pas
déductible car le propre d’une aide est une d’être une charge, un appauvrissement. L’aide peut être
déductible jusqu’à ce que l’aide permette de rétablir les comptes de la filiale à 0, si la filiale
s’enrichit, la fraction excédentaire n’est pas déductible car les titres ont pris de la valeur donc la
société mère s’enrichit. Seule la partie rendant positive la situation de la filiale n’est pas déductible,
sauf à hauteur des titres que la mère ne possède pas. La mère peut déduire à hauteur des titres
possédés par d’autres associés. Le législateur à l’article 39-13 al 3 CGI prévoit que l’aide n’est
déductible « qu’à hauteur de la situation nette négative de l’entreprise qui en bénéficie et pour le
montant excédant cette situation nette négative à proportion des participations détenues par d’autres
personnes que l’entreprise qui consent les aides. »

Exemple : SM apporte une aide à la SF de 1000. La SM détient 90% des parts de la SF. L’actif net
de la SF passe de -600 à +400. Sur les 1000 qu’elle a accordé, la SM peut déduire tout ce qui ne
rend pas positive la situation nette donc 600 + 10% x 400 = 640.

L’article 216A CGI prévoit que la partie excédentaire de l’aide qui n’est pas déductible chez la Sté
mère cesse d’être imposable chez la filiale à condition qu’elle prenne l’engagement d’augmenter
son capital en numéraire au profit de sa mère et ce pour un montant au moins égal à l’aide consentie
avant la clôture du second exercice suivant.

Paragraphe 4 : Les autres produits et les autres charges

L’assiette de l’IS est la même que l’assiette de l’IR en BIC, sauf cas particuliers (plus values,
charges financières, abandon de créance).

Les produits financiers perçus par une société, dividendes notamment, doivent impérativement être
rattachés au résultat imposable. Il n’y a pas de possibilité de les sortir du résultat imposable pour
qu’ils soient imposés dans leur catégorie naturelle (revenu des capitaux mobiliers). Une société à
l’IS qui reçoit des dividendes doit les laisser dans son résultat imposable, mais c’est un avantage si
la société peut bénéficier du régime des sociétés mères. Quand une société mère reçoit des
dividendes de sa filiale, elle est exonérée d’impôt sur ces dividendes.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

La taxe sur les véhicules des sociétés (TVS) est payée par les sociétés pour les voitures de tourisme
dont elles sont propriétaires. Cette TVS n’est pas déductible des résultats imposables à l’IS. Elle
doit être réintégrée extra-comptablement. Pour une entreprise relevant de l’IR, cette taxe est
déductible.

Les sociétés cotées font parfois l’objet de mesures qui peuvent sembler sévères fiscalement mais qui
tiennent au fait qu’il s’agit de sociétés très importantes. Ces sociétés versent souvent des
rémunérations différées à leurs dirigeants. Ces rémunérations sont versées à l’issue des fonctions
des dirigeants, ce qui leur permet d’augmenter sensiblement leurs revenus (indemnité de cessation
des fonctions ou parachute dorés, les pensions, les retraites chapeaux, etc). Ces rémunérations sont
encadrées fiscalement, la loi a fixé un plafond de déduction fixé à trois fois le plafond annuel de
sécurité sociale, en 2020 cela correspond à 123 408 euros. La fraction excédentaire de ces
rémunérations doit être réintégrée dans le bénéfice imposable à l’IS.

Section 3 : L’imposition des résultats

l’IR repose sur une déclaration des contribuables et c’est l’administration fiscale qui calcule l’IR
que doit payer le contribuable. Lorsqu’il s’agit d’une société à l’IS, c’est la société qui doit calculer
elle-même son impôt. Elle doit le faire sous le contrôle de l’administration, elle doit déclarer à l’AF
son résultat imposable, ce qui permettra à l’AF d’exercer son droit de contrôle.

La société soumise à l’IS doit déclarer et payer spontanément son IS, elle ne doit pas attendre que
l'AF le lui réclame. Le paiement de l’IS fait l’objet d’acomptes en cours d’exercice, avant même
que le résultat soit calculé. Ces acomptes viendront s’imputer sur l’IS calculé en fin d’exercice.

Si une société réalise un déficit, en IR ce déficit remonte aux associés comme les bénéfices. En IS,
la société est opaque donc les déficits restent au niveau de la société, la loi a institué un système de
report des déficits. La société peut reporter ce déficit sur d’anciens bénéfices ou sur de futurs
bénéfices.

Paragraphe 1 : La déclaration fiscale

L’entreprise doit, chaque année, souscrire une déclaration de résultats et ce dans les trois mois de la
clôture de l’exercice comptable. Il y a une rallonge d’un mois pour les sociétés qui clôturent le 31
décembre, la déclaration de résultat doit être souscrite au plus tard le deuxième jours ouvré suivant
le 1er mai. Beaucoup de sociétés clôturent le 31 décembre, les cabinets comptables se retrouvent
donc avec énormément de travail à cette période de l’année, d’où l’existence de cette rallonge.

Cette déclaration fiscale prend la forme d’un imprimé qui porte le numéro 2065 et qui est adressée
aux services fiscaux du lieu du principal établissement de la société.

Dans le cadre de la crise sanitaire, l’AF a accordé des délais de déclaration pour les sociétés. Il y a
en pratique une certaine tolérance pour ne pas pénaliser les sociétés qui n’auraient pas déclarés leurs
résultats dans les délais impartis.

Aujourd’hui, les déclarations de résultats se font obligatoirement par voie électronique, quelle que
soit la taille des entreprises.

L’entreprise doit adresser à l’AF une liasse fiscale lors de sa déclaration. Cette liasse est un
ensemble de documents permettant à l’AF d’exercer son droit de contrôle. Cette liasse est plus ou
moins dense selon que la société relève du régime réel normal ou du régime simplifié d’imposition.
Le régime micro-entreprise n’existe pas en IS.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

La liasse fiscale comprend l’imprimé 2065, des documents comptables (bilan, compte de résultats,
tableaux d’amortissements, tableau 2058A qui permet le passage du résultat comptable au résultat
fiscal) et des documents juridiques (la liste des principaux associés, les comptes rendus des
délibérations du CA ou de l’AG, etc). Si la société prétend à des crédits d’impôt ou à des réductions
d’impôt, elle doit fournir les documents justificatifs.

Le relevé détaillé des frais généraux (imprimé 2067) est un imprimé qui liste certaines dépenses qui
sont particulièrement surveillées par l’AF : rémunération des 10 ou 5 personnes les mieux payées de
la société selon qu’elle a plus ou moins 250 salariés, les frais de voyage pour ces mêmes personnes
s’ils excèdent 15 000 euros, les dépenses et charges afférentes aux véhicules mis à leur disposition,
les dépenses et charges relatives aux immeubles non professionnels.

Paragraphe 2 : Le calcul et le paiement de l’IS

A. Le calcul de l’IS

Il y a deux temps pour calculer l’IS :


‣ Le calcul de l’IS brut correspondant à l’assiette x taux
‣ Le calcul de l’IS net correspondant à l’IS brut auquel on soustrait les crédits et réductions
d’impôts dont peut se prévaloir l’entreprise.

1. l’IS brut

Le taux de l’IS a été longtemps stable, il est actuellement en baisse. Pendant longtemps, ce taux
était de 50%. Au début des années 1990, il y a eu une première baisse qui a amené le taux de l’IS à
33, 33% en 1993. Le taux de l’IS devra être de 25% en 2022.

En dehors de ce taux de droit commun, il existe des taux particuliers d’IS pour certains produits :
‣ PVLT à 19% en matière immobilière,
‣ Les produits de la propriété industrielle sont taxés à 10% en IR et en IS,
‣ Un taux pour les PME de 15% qui s’applique depuis 2001. En 2001 il était de 25%, il est passé à
15% en 2002. Ce taux de 15% ne s’applique que sur la fraction des bénéfices qui n’excède pas
38 120 euros. Pour la fraction excédentaire, le taux de droit commun s’applique.

Ces PME au sens du CGI sont des entreprises qui remplissent les trois conditions suivantes :
‣ Elles réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 7 630 000 euros. Dès 2021, ce chiffre d’affaires est
porté à 10 millions d’euros, pour les exercices ouverts en 2021,
‣ Le capital doit être entièrement libéré,
‣ Le capital doit être détenu pour au moins 75% par des personnes physiques ou par des PME
telles que définies par le CGI.
Il n’y a pas de restriction quant à la forme de la société, il peut s’agir d’une société soumise à l’IS
de plein droit ou d’une société qui a opté pour l’IS. Il n’y a pas de restriction non plus en ce qui
concerne l’activité de la société.

Concernant le taux de droit commun, les lois de finances de 2017 et 2018 ont changé le taux. En
2017, il a été décidé que l’IS devait se stabiliser à 28% en 2020. En 2018, l’objectif a été fixé
d’atteindre 25% en 2022. Le taux réduit PME n’a pas été modifié.

Pour les exercices ouverts en 2020, le taux est de 28%. Si c’est une PME, le taux de 15%
s’applique. Pour les entreprises dont le CA est au moins égal à 250 millions d’euros, le taux est de
31% uniquement sur la fraction du bénéfice supérieure à 500 000 euros.

35
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Pour les exercices ouverts en 2021, le taux est de 26,5%. Le taux PME s’applique également. Pour
les entreprises dont le CA excède 250 millions d’euros, le taux est de 27,5% sur la totalité du
bénéfice.

Pour les exercices qui ouvriront en 2022, le taux d’IS sera de 25% pour toutes les sociétés sauf les
PME.

Au début des années 2000, le taux d’IS a été augmenté officieusement par la création de
contributions additionnelles à l’IS. La plupart de ces contributions a aujourd’hui disparu. La
contribution sociale additionnelle à l’IS a survécu. Cette contribution est perçue au taux de 3,30%
de l’IS brut, aussi bien l’IS perçu au taux plein que celui perçu au taux réduit des PME. Cette
contribution se calcule sur l’IS brut après application d’un abattement de 763 000 euros. Elle n’est
pas due par toutes les sociétés mais seulement par celles qui ne sont pas considérées comme étant
des PME au sens du CGI. Cette contribution est payée comme l’IS, aux mêmes dates que l’IS, au
moyen de quatre acomptes. Elle n’est pas déductible du résultat imposable.

Exemple : une société à l’IS qui n’est pas une PME. Elle a réalisé un bénéfice de 3 millions d’euros.
Son IS brut est de 28% x 3M = 840 000 euros.
L’assiette est de : 840 000 euros - 763 000 euros = 77 000.
On applique la contribution sociale de 3,30% : 77 000 x 3,30% = 2541 euros.

2. l’IS net

l’IS net est l’IS brut tel que diminué des réductions d’impôt et des crédits d’impôt. Les réductions
d’impôt et les crédits d’impôt viennent s’imputer sur l’impôt. Si le crédit d’impôt est supérieur à
l’impôt, l’Etat doit rembourser la différence au contribuable. Le crédit d’impôt permet le
mécanisme de la compensation Si le contribuable ne possède qu’une réduction d’impôt, l’excédant
n’est pas remboursable par l’Etat. La réduction d’impôt ne met pas en oeuvre un système de
compensation mais seulement d’imputation.

Les crédits d’impôt peuvent être classés en deux catégories :


‣ Les crédits d’impôt constituant une technique permettant d’éviter une double imposition des
revenus. Par exemple, si un contribuable est un imposé en France sur un revenu étranger mais
que l’Etat étranger retient déjà un impôt chez lui, cette retenue d’impôt formera un crédit d’impôt
en France.
‣ Les crédits d’impôt constituant des aides fiscales, par exemple le crédit d’impôt recherche, le
crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE supprimé en 2019), etc. Dans le cadre de la gestion
des déficits, le crédit d’impôt pour report en arrière des déficits permet aux sociétés de bénéficier
d’une créance sur l’Etat à hauteur du trop payé d’impôt.

B. Le paiement de l’IS

l’IS est payé au moyens de quatre acomptes en cours d’exercice. À l’issue de l’exercice, lorsque le
résultat sera connu, se produira une régularisation de l’IS. Ces acomptes sont perçus à des dates
invariables quelle que soit la date de clôture de l’exercice : 15 mars, 15 juin, 15 septembre, 15
décembre. Selon la date de clôture, l’ordre des acomptes ne sera logiquement pas le même.

Le montant de ces acomptes est égal à un quart de l’IS de référence, qui est le résultat de l’exercice
précédant. Pour les très grandes entreprises (CA > 250 millions d’euros), le quatrième acompte
n’est pas calculé par rapport à l’IS de référence (IS de l’année précédente) mais par rapport à une
projection du résultat de l’année en cours.

36
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Le taux d’IS est divisé par 4 puis on l’applique au résultat de l’exercice précédant. Par exemple en
2020, pour un taux d’IS à 28% chaque acompte est égal à 7%. En 2021, chaque acompte est égal à
6,625%. En 2022, chaque acompte sera égal à 6,25%.

Le taux de 15% des PME (3,75% par acompte), la cotisation de 3,30% (0,825 par acompte) et le
taux de 10% de la propriété industrielle (2,5% par acompte) sont aussi payés par quatre acomptes.

À l’issue de l’année, la régularisation s’effectue au moment de la déclaration des résultats. Une fois
que le résultat de l’exercice en cours est connu, si l’IS définitif est supérieur à la somme des
acomptes, la société doit verser un complément, s’il est inférieur, l’Etat doit rembourser le trop payé
d’acompte dans les 30 jours qui suivent la demande de l’entreprise.

Paragraphe 3 : Le traitement fiscal des déficits

Les sociétés soumises à l’IS sont des sociétés opaques donc les déficits ne remontent pas aux
associés. Les déficits sont gérés au niveau de la société. La société devra dire ce qu’elle fait de ces
déficits car ils ne sont pas perdus. Le droit fiscal a prévu le report des déficits en avant, cad sur des
bénéfices futurs, ou en arrière, sur des bénéfices passés. Traditionnellement, le report des déficits se
faisait en avant, puis le législateur a prévu le report en arrière ou carry back.

Les règles de report des déficits se sont durcies en 2011 et 2012.

A. Le report en avant des déficits

1. Les modalités du report

L’article 209-I al 3 CGI dispose que le déficit d’un exercice constitue une charge de l’exercice
suivant, sauf option pour un report en arrière des déficits.

L’entreprise, lorsqu’elle a calculé son résultat comptable sur l’imprimé 2058A, a dégagé un déficit
au titre de l’exercice N. Ce déficit de l’année N s’impute sur les bénéfices des années N+1 et
suivants. Le déficit fiscal d’une année constitue une charge s’imputant sur les bénéfices des années
N+1 et suivant de manière extra comptable.

Si une entreprise a fait un déficit pour son activité courante et une plus-value nette à long terme
pour ce même exercice taxée au taux réduit, il est possible d’imputer ce déficit sur cette plus value.
Néanmoins, il vaut mieux garder du déficit pour le déduire au bénéfice taxé au taux plein des
années suivantes.

Autrefois les déficits fiscaux se périmaient au bout de 5 ans. Depuis 2004, les déficits fiscaux ne se
périment plus, ils sont reportables sans limitation de durée. Tant que l’entreprise existe, elle a la
possibilité d’utiliser ses stocks de déficit en report d’imputation.

La loi du 19 septembre 2011 a plafonné le montant du report. Depuis les exercices clos à compter
du 21 septembre 2011, le déficit constaté au titre d’un exercice ne peut être déduit du bénéfice de
l’exercice suivant que dans la limite de 1 million d’euros majoré de 50% du bénéfice excédant ce
seuil (60% jusqu’en 2012).
Par exemple : une société soumise à l’IS fait un déficit de 1,8 million d’euros au titre de l’exercice
N. La société fait un bénéfice de 1,8 million d’euros en N+1.
Avant 2011 : l’entreprise pouvait imputer la totalité de son déficit, donc le résultat imposable était
de 0 euros.

37
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Depuis 2011 : l’entreprise peut imputer 1 million + 50% du bénéfice excédant ce seuil (50% x 800
000 euros = 400 000). Le maximum est de 1,4 million d’euros. L’entreprise a un résultat imposable
de 400 000 euros. Il reste un excédant de déficit de 400 000 euros à imputer. Cet excédant pourra
être imputé sur le bénéfice réalisé en N+2 et suivants.
La fraction non imputée est reportable sur les exercices suivants selon les mêmes modalités et sans
limitation de durée.

Le législateur est intervenu pour améliorer la situation des entreprises en difficulté, cad des
entreprises faisant l’objet d’une procédure de S, RJ ou LJ ou qui sont bénéficiaires d’un accord
homologué par le tribunal ou constaté par le président du tribunal. Ces entreprises, lorsqu’elles ont
bénéficié d’un abandon de créance de la part de leurs créanciers, peuvent majorer la part fixe du
montant de l’aide accordée. La part fixe est de un million plus le montant de l’aide qui leur a été
accordée.

Le texte initial ne précisait pas qui pouvait bénéficier de cette aide donc il a été réécrit en 2016 pour
prévoir qu’il s’agit des sociétés auxquelles ont été consentis les abandons de créance.

Mécaniquement, la part variable est réduite puisqu’elle est de 50% de la différence entre le bénéfice
réalisé et la partie fixe. L’article 209-I al 4 CGI prévoit cette situation.

Par exemple : une entreprise réalise en N un déficit de 2,7 millions d’euros et un bénéfice de 2
millions d’euros en N+1. Ce bénéfice tient compte d’un abandon de créance de 800 000 euros dont
elle a bénéficié.
La partie fixe du déficit est de 1M + 800 000 euros = 1,8 million d’euros.
La partie variable est de 50% x (2 M - 1,8M) = 100 000 euros.
Maximum imputable : 1,8 M + 0,1 M = 1,9 M d’euros.
Reste : 2,7M - 1,9M = 800 000 euros. Cette fraction excédentaire du déficit pourra être reportée
sous les mêmes limites, sans limitation de durée sur les bénéfices des exercices suivants.

La loi de finance rectificative pour 2020 du 25 avril 2020 ajoute que pour les entreprises ayant
bénéficié d’abandons de loyers déductibles et qui ont été consentis depuis le 15 avril 2020 jusqu’au
30 juin 2021, le plafond d’un million d’euros est majoré du montant de ces abandons de créance. Il
n’est pas nécessaire que l’entreprise bénéficiaire soit en difficulté au sens du droit des procédures
collectives. Cette mesure prend place à l’article 209-I al 5 CGI.

2. Les conditions du report

Il faut, pour que le report s’applique, que l’entreprise qui impute un déficit soit la même que celle
qui a réalisé ce déficit. C’est la condition d’identité de l’entreprise. Il n’y a pas identité d’entreprise
lorsqu’il y a eu cessation d’entreprise, cad que l’entreprise initiale a cessé d’exister pour faire place
à une autre entreprise.

Il y a quatre cas de cessation d’entreprise en droit fiscal :

Il y a cessation d’entreprise au cas de transformation avec création d’un être moral nouveau. Toute
transformation de société n’est pas une cessation, il faut qu’il y ait création d’un être moral
nouveau.
‣ CCass, chambre commerciale, 7 mars 1984, Le Joncour : le simple changement de forme
social n’emporte pas création d’une nouvelle personne morale.

Il y a cessation d’entreprise au cas de changement de régime fiscal, cad si une société n’est plus
soumise à l’IS. Par exemple si une Sté de capitaux se transforme en Sté de personnes ou qu’elle a

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

opté pour le régime de la semi-transparence. Chaque fois que la société passe de l’IS à l’IR, il y a
une situation de cessation d’entreprise et donc perte des déficits en report.

Il y a cessation d’entreprise au cas de changement d’activité. Le changement d’objet social ou


d’activité réelle emporte cessation d’entreprise. La structure et le régime fiscal restent inchangés.
Le CE avait initialement développé une Jp libérale.
‣ CE, 18 mai 2005, SARL Sophie B : « l’exercice par une société du droit au report déficitaire
est subordonné, notamment à la condition qu’elle n’ait pas subi, dans son activité réelle, de
transformation telle qu’elle ne serait plus en réalité la même ». Il ne peut y avoir de changement
d’activité que si ce changement est total. En l’espèce, une société exerçait une activé de vente de
vêtements sous l’enseigne Benetton. Cette société avait arrêté son activité pendant 30 mois et
avait repris une nouvelle activité sous l’enseigne Sport 2000. Sport 2000 voulait utiliser les
déficits de Benetton. Le CE considère qu’il n’y a pas de changement d’activité tel que cela
engendrerait une cessation d’activité. Le CE observe qu’il n’y a pas de différence entre vendre
des vêtements sous l’enseigne Sport 2000 ou sous l’enseigne Benetton.

Le législateur est intervenu par une loi du 16 aout 2012 applicable aux exercices clos depuis le 4
juillet 2012, codifiée à l’article 221-5 a et b CGI. Le a) prévoit qu’il y a cessation d’activité en cas
de disparition des moyens de production. Le b) prévoit qu’il y a cessation d’activité au cas
d’adjonction ou d’abandon d’activité.

Au cas de disparition des moyens de production, la disposition prévoit deux sous-cas :


‣ La disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation pendant une
période de plus de douze mois (vise la SARL Sophie B), avec la possibilité pour l’entreprise
d’obtenir un agrément si l’interruption et la reprise de l’activité sont justifiées par des raisons
autres que fiscales,
‣ La disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation lorsqu’elle
est suivie de la cession de la majorité des droits sociaux. Il n’y a pas de dérogation possible dans
cette situation.

Au cas d’adjonction ou d’abandon d’activité :


‣ Il y a cessation au cas d’une adjonction d’activité lorsque cela entraine au titre de l’exercice de sa
survenance ou de l’exercice suivant une augmentation de plus 50% du chiffre d’affaires ou de
l’effectif moyen du personnel et des montants bruts des éléments de l’actif immobilité et ce par
rapport à l’exercice précédant.
‣ Il y a cessation au cas d’abandon ou de transfert même partiel d’une activité ou de plusieurs
activités existantes, lorsque cela entraine au titre de l’exercice suivant une diminution de plus de
50% du chiffre d’affaires ou de l’effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de
l’actif immobilisé.
Dans un cas comme dans l’autre, il peut être portée exception à la cessation sur agrément lorsqu’il
est démontré par l’entreprise que ces évolutions étaient indispensables à la poursuite de l’activité et
la pérennité des emplois.

Enfin, il y a cessation d’activité lors d’une fusion absorption ou d’une scission de société. Les
patrimoines de la société absorbante et de la société absorbé sont confondus, la société absorbante
ne peut plus utiliser le déficit de la société absorbée. Certaines sociétés étaient absorbées seulement
parce qu’elles étaient déficitaires. Les déficits de la société absorbée, ne peuvent pas en principe
être transférés à la société absorbante. La fusion absorption est un cas de péremption des déficits.
Néanmoins il existe deux exceptions :
‣ L’entreprise peut bénéficier d’un agrément administratif qui sera accordé de plein droit si des
conditions sont réunies. Cela lui permettra de transférer les déficits de l’absorbé à l’absorbante
(art 209-II 1° CGI)

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

‣ L’article 209-II 2° prévoit que si certaines conditions sont réunies, le transfert des déficits pourra
être dispensé d’agrément.

L’article 209-II 1° CGI : le législateur prévoit que l’agrément est accordé de plein droit si quatre
conditions sont réunies :
‣ Il faut que la fusion soit placée sous le régime fiscal de faveur, qui se traduit par un différé
d’imposition.
‣ L’entreprise doit être capable de justifier la fusion par des considérations économiques et pas
seulement fiscales.
‣ Il faut que l’activité transférée soit poursuivie par la société absorbante pendant trois ans au
moins.
‣ Il faut que l’activité à l’origine des déficits n’ait pas subi de changement significatif pendant la
période de constatation des déficits.

L’article 209-II 2° CGI : la loi de finance pour 2020 a prévu une dispense d’agrément si quatre
conditions cumulatives sont réunies :
‣ Il faut que la fusion soit placée sous le régime fiscal de faveur qui se traduit par un différé
d’imposition.
‣ Le montant cumulé des déficits doit être inférieur à 200 000 euros.
‣ Les montants transférés ne doivent pas provenir de la gestion d’un patrimoine immobilier ni de la
gestion d’un patrimoine mobilier.
‣ La société absorbée ne doit pas avoir cédé ou arrêté l’exploitation d’un fonds de commerce ou
d’un établissement durant la période au cours de laquelle les montants transférés ont été
constatés.

B. Le report en arrière ou carry back

Le carry back a été introduit par la loi de finance pour 1986. Il a évolué de manière assez restrictive.

1. Les conditions du report

Traditionnellement le report en arrière était limité à une imputation des déficits sur les bénéfices des
trois derniers exercices. L’idée était qu’une entreprise puisse imputer les déficits constatés au titre
de l’exercice N sur ses bénéfices N-3, N-2 et N-1.
Les bénéfices sont diminués à postériori ce qui entraine un recalcule des bénéfices imposés
antérieurement. Il n’y avait pas de plafonnement quant au montant.

La loi du 19 septembre 2011 est venue considérablement restreindre les possibilités de report en
arrière. On ne peut imputer les déficits d’un exercice que sur les seuls bénéfices de l’exercice
précédent. Le montant du report est plafonné à 1 million d’euros. Ce régime est fixé par l’article
220 quinquies du CGI.

Les conditions restent inchangées :


‣ Le report en arrière n’est possible que si les bénéfices d’imputation ont donné lieu au paiement
effectif de l’IS. Il s’agit aussi bien des bénéfices imposés au taux normal que des bénéfices
imposés au taux réduit des PME, à l’exclusion des PVLT taxées au taux réduit.
‣ Ces déficits doivent être imputés sur des bénéfices qui n’ont pas été distribués aux associés.
‣ Le report en arrière n’est pas possible sur un bénéfice qui a donné lieu à un IS payé aux moyens
d’un crédit d’impôt.
‣ Le report en arrière ne peut pas être exercé au titre d’un exercice au cours duquel intervient une
cession ou une cessation totale de l’entreprise, une fusion ou une opération assimilée ou une LJ
de la société.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

‣ En revanche, la Jp admet le report en arrière des déficits sur des bénéfices qui ont été rectifiés
après coup par l’administration fiscale.

La Jp s’était posée la question de savoir si une entreprise devait immédiatement opter pour le report
en arrière d’un déficit ou si elle pouvait opter plus tard, lors d’un exercice ultérieur.
‣ CE, 30 juin 1997 / CE, 19 décembre 2017 : le CE a jugé que l’entreprise n’est pas obligée
d’opter immédiatement pour le report en arrière, sachant que l’option tardive ne modifie pas les
bénéfices d’imputation.

Le législateur a mis un terme à cette Jp, modifiant l’article 220 quinquies par la loi du 19 septembre
2011. Désormais, l’option pour le report en arrière doit être exercée au titre de l’exercice au cours
duquel le déficit est constaté et dans les mêmes délais que ceux prévus pour la déclaration de
résultat de l’exercice. Cette règle s’applique pour les déficits des exercices clos à compter du 21
septembre 2011.
Sur un plan strictement formel, l’option pour le report en arrière des déficits est formalisée sur le
tableau fiscal 2058-A.

2. Les modalités du report en arrière

L’idée est de réduire a postériori le bénéfice qui a été déclaré par la société. Cela entraine un
recalcule de l’impôt et donc un taux versé d’IS. Le taux versé d’IS constitue alors une créance de la
société contre l’Etat, c’est ce qu’on appelle une créance de carry back.

Cette créance est égale au déficit qui a pu être imputé multiplié par le taux d’IS applicable sur le
bénéfice d’imputation. Si le bénéfice d’imputation déclaré a été imposé avec deux taux différents,
par priorité, le déficit sera imputé sur le bénéfice imposé au taux plein puis sur le bénéfice imposé
au taux réduit, ce qui permet d’avoir la créance fiscale la plus élevée.

Exemple 1 : Une entreprise a réalisé un déficit de 3 millions d’euros en N. En N-1, elle a réalisé un
bénéfice de 9 millions d’euros. Elle choisit de reporter le déficit en arrière. La créance de carry back
est égale à 1 millions d’euros x le taux d’IS en vigueur (1M x 33,33 % = 333 333 euros). l’Etat doit
donc rembourser 333 333 euros à la société.
Il lui reste 2 millions d’euros de déficit qu’elle peut reporter en avant, sachant que ce report est
plafonné à 1M + 50% du bénéfice excédant ce seuil.

Exemple 2 : en 2020, une PME réalise un déficit de 200 000 euros. En 2019, elle a réalisé un
bénéfice de 300 000 euros. L’entreprise a pu bénéficier du taux réduit d’IS à 15% à hauteur de 38
120 euros. Pour le reste, 261 880 euros, elle s’est vue appliquer le taux plein (28%). Elle peut
reporter la totalité de son déficit.
Elle commence à reporter son déficit sur la partie imposée au taux plein : imputation de 200 000
euros. La créance de carry back est de 200 000 x 28% = 56 000 euros.

La créance de carry back est une réelle créance au sens du droit civil, l’Etat est débiteur du montant
nominal de la créance. Cette créance figure à l’actif du bilan de la société. Cette créance n’est, en
revanche, pas cessible mais elle peut être donnée en garantie dans les conditions prévue par la loi
Dailly.
En principe, la créance de carry back n’est pas remboursable immédiatement. Elle a normalement
une utilisation assez simple, elle va servir à payer l’IS dû par la société au cours des cinq années
suivantes. Ce n’est qu’à l’issue de cette période de cinq ans que l’Etat remboursera ce qu’il reste de
la créance. La législation a présenté une lacune, il n’était rien prévu pour les sociétés qui faisaient
l’objet d’un R ou d’une LJ, la créance n’était pas remboursée immédiatement. La LF pour 2004 a
prévu que les Sté faisant l’objet d’une S, d’un RJ ou d’une LJ peuvent obtenir le remboursement

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

anticipé de leur créance dès l’ouverture de la procédure (art 220 quinquies I al 5, CGI). La LF pour
2021 a étendu cette possibilité aux procédures de conciliation.

Le législateur, en période de crise économique, donne parfois la possibilité aux entreprises de se


faire rembourser leur créance sans attendre la fin de la période quinquennale et sans que la Sté soit
en difficulté au sens des PC. Cela a été le cas en 2008 après la crise financière et c’est aussi le cas
pour la crise économique actuelle. La loi du 30 juillet 2020 prévoit la possibilité pour les
entreprises, de se faire rembourser immédiatement leur créance de carry back. Cette demande de
remboursement est applicable aux créances de carry back nées d’une option exercée lors d’un
exercice clos au plus tard le 31 décembre 2020.

Section 4 : Les distributions de bénéfice

Les Sté soumises à l’IS sont opaques fiscalement, elles jouent pleinement leur rôle de personne
fiscale. Les personnes à l’IR ne peuvent pas fiscalement distribuer leur bénéfice, les associés
appréhendent directement le bénéfice.
Les sociétés à l’IS distribuent des dividendes qui sont des revenus de capitaux mobiliers pour les
associés. L’opacité des sociétés soumises à l’IS s’applique à des sociétés qui n’ont pas de
personnalité morale mais qui sont soumises à l’IS sur option (ex société en participation), ces
sociétés peuvent donc distribuer des dividendes.

En droit fiscal, il y a deux types de distribution des bénéfices alors qu’en droit des sociétés il n’y a
qu’un seul type, les dividendes. En droit fiscal, en plus des dividendes qui sont des distributions
officielles, on retrouve les distributions officieuses, irrégulières ou présumées des bénéfices. Les
distributions officieuses ne sont pas nécessairement décidées en AG ni distribuées aux associés.

Paragraphe 1 : Les distributions officielles

On se place ici du côté de l’associé et non pas de la société. Il y a eu trois époques différentes,
néanmoins quelle que soit l’époque, la problématique est toujours restée la même : la double
imposition économique des bénéfices.

Par exemple : une société réalise un bénéfice de 100. Son IS est de 33, 33 euros à un taux de
33,33%. Il reste donc à distribuer 66,67 euros. Un associé reçoit 66,67 euros. Cet associé est imposé
à l’IR sur le dividende reçu, au taux de 50%. Il paie 50% x 66,67 = 33,33 euros. Il reste 33,33 euros
à l’associé. Il y a une double imposition économique, plusieurs contribuables sont imposés sur le
même revenu (ne pas confondre avec la situation où un même contribuable est imposé plusieurs fois
sur un même revenu par des Etats différents).

Le régime de l’avoir fiscal s’est appliqué de 1965 à 2005 : l’avoir fiscal est un crédit d’impôt qui
permettait de lutter contre la double imposition économique des revenus.

Entre 2005 et 2018, un système d’abattement s’est appliqué. Depuis 2018, ce système d’abattement
a été largement remis en cause par la technique du taux faible : les contribuables sont imposés à un
taux plus faible la deuxième fois. Cette technique s’appelle le prélèvement forfaitaire unique (PFU),
néanmoins les contribuables peuvent toujours opter pour le système d’abattement.
Les changements de régimes fiscaux interviennent en général lors d’un changement de régime
politique.

A. Le régime antérieur à 2005 : l’avoir fiscal

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

L’avoir fiscal est un crédit d’impôt. L’ancien article 158 bis CGI prévoyait que tout associé qui
percevait des dividendes avait droit, en plus du dividende, à un crédit d’impôt (avoir fiscal) égal à la
moitié du dividende reçu. Cette créance est la restitution, à l’associé, de l’IS qui a déjà été payé sur
les bénéfices. L’avoir fiscal joue comme un revenu imposable, il faut donc le rajouter au revenu
déclaré. L’avoir fiscal joue son rôle de crédit d’impôt, il va venir en réduction de l’impôt à payer.

Exemple : une société réalise un bénéfice de 100. Son IS est de 33, 33 euros. Il reste donc à
distribuer 66,67 euros. Un associé reçoit 66,67 euros. L’associé doit déclarer le montant du
dividende et de l’avoir fiscal (66,67+ 50% x 66,67 = 100). L’associé a donc reconstitué le bénéfice.
l’IR brut est de 50% x 100 = 50. L’avoir fiscal joue ici comme un revenu imposable. l’IR net est de
50 - le crédit d’impôt (33,33) = 16,67. Il y a donc un prélèvement de 50% au total. L’avoir fiscal a
réussi à effacer l’IS comme s’il n’avait jamais eu lieu et à faire comme s’il n’y avait qu’un IR à
50%. L’avoir fiscal permet d’effacer l’IS, néanmoins il n’est pas envisageable de supprimer
totalement l’IS car les Sté ne distribuent pas obligatoirement tout leur bénéfice.

L’avoir fiscal s’est heurté à plusieurs difficultés. Le texte attachait l’avoir fiscal au dividende, un
contentieux sur le terme « dividende » est alors apparu. Le texte n’accordait l’avoir fiscal qu’au
dividende distribué par des Sté françaises, la question de la compatibilité de cette législation avec
les principes de l’UE s’est alors posée.
Dans certains cas les sociétés ne paient pas d’IS (ex les sociétés nouvelles), donc elles distribuent
un bénéfice qui n’a pas supporté l’IS, l’avoir fiscal n’est alors pas mérité. Un précompte mobilier a
été inventé. Ce précompte est un impôt permettant de reprendre l’avoir fiscal.

En 2003, l’abrogation de l’avoir fiscal a été votée. Comme le changement est important, le nouveau
régime ne s’est appliqué qu’à partir de 2005.

B. Le régime applicable de 2005 à 2017 : l’abattement fiscal

L’avoir fiscal a été remplacé par un système d’abattement fiscal. Cet abattement était originellement
de 50%, puis il est passé à 40% en 2006.

Exemple : une société réalise un bénéfice de 100. Son IS est de 33, 33 euros. Il reste donc à
distribuer 66,67 euros. Un associé reçoit 66,67 euros. Cet associé déclare 66,67 - l’abattement de
50% (50% x 66,76 : 33,33) = 33,33 euros. L’associé déclare donc 33,33 euros. Son IR est de 50% x
33,33 = 16,67. Le prélèvement global (IS + IR) est de 50%.

L’avoir fiscal bénéficiait aux PP et aux PM. Les sociétés mères qui encaissaient des dividendes de
leur filiale avaient droit à l’avoir fiscal. À la suite d’une évolution historique, le taux de l’avoir avait
diminué pour les PM alors qu’il était resté de 50% pour les PP. À la veille de la réforme, les
sociétés n’avaient quasiment plus droit à l’avoir fiscal. Néanmoins, les Sté avaient droit au régime
des Sté mères qui étaient bien plus avantageux.
L’avoir fiscal était un mécanisme couteux pour le trésor public, c’était une créance contre l’Etat.
Chaque fois que le législateur crée un crédit d’impôt, il crée une source d’évasion fiscale, l’avoir
fiscal permettait donc à des personnes de prétendre à ce crédit d’impôt alors que normalement elles
n’y avaient pas droit (trafic de crédit d’impôt).
La notion de dividende a posé plusieurs problèmes donc le législateur l’a remplacée par le terme de
« revenus distribués ».

L’abattement de 50%, ramené à 40% dès 2006, s’applique aux revenus distribués en vertu d’une
décision régulière des organes compétents de la société. Des difficultés se sont également posées
sur le terme de « décision régulière », notamment en cas d’irrégularités. Le CE rappelé à
l’administration fiscale que toutes les irrégularités ne se valent pas, il existe des irrégularités graves

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

(ex : distribution des dividendes par le dirigeant sans passer par l’AG) et des irrégularités qui ne
sont pas graves (ex : faute d’orthographe dans le nom de l’associé).

‣ CJCE, 17 septembre 2004, Petri Manninen : décision rendue à propos de l’avoir fiscal
finlandais. La CJCE a considéré qu’il n’était pas possible de réserver l’avoir fiscal aux
distributions des seules sociétés Finlandaises.
Cette décision devait donc aussi s’appliquer en France mais la législation avait été modifiée dès
2003 donc la question de compatibilité de l’avoir fiscal avec le droit européen ne se posait plus.

L’abattement s’applique aux distributions de Sté françaises ainsi qu’aux distributions faites par des
Sté originaires de pays membres de l’UE et de pays non membres de l’UE mais qui ont signé une
convention fiscale d’assistance administrative avec la France.

À l’occasion d’une alternance politique en 2012, une évolution s’est produite à compter des revenus
de 2013 : lors d’une distribution des dividendes, le débiteur des dividendes doit prélever à la source
un montant des dividendes de 21%. Ce prélèvement à la source est en réalité un simple acompte
d’IR. Ce prélèvement forfaitaire est non libératoire, il ne libère pas le contribuable de l’impôt sur le
dividende mais il l’oblige à payer plus tôt 21% de ce dividende. Ce taux viendra ensuite s’imputer
sur l’impôt final. Cet acompte est une avance d’impôt faite à l’Etat.

Exemple : une société réalise un bénéfice de 100. Son IS est de 33,33 euros. Il reste donc à
distribuer 66,67 euros. Un associé reçoit 66,67 euros. La société doit retenir 21% x 66,67 = 14
euros. L’associé reçoit en réalité 66,67 - 14 = 52,67euros . Mais il doit néanmoins déclarer 66,67
euros, il n tient pas compte de l’acompte pour faire sa déclaration.
Son dividende imposable peut bénéficier d’un abattement de 40% : 66,67 - 40 x 66,67 = 40.
Son IR (taux de 50%) est de : 50% x 40 = 20.
Il faut déduire l’acompte de l’IR : 20 - 14 = 6.

C. Le régime applicable depuis 2018 : le prélèvement forfaitaire unique

À la faveur d’une autre alternance politique, le régime des placements financiers a évolué de façon
substantielle. L’idée a été de soumettre tous les revenus financiers (dividendes, intérêts
d’obligations, PV sur cession de titre) à un régime unique qui se caractérise par un taux unique,
dérogatoire de l’IR. Le prélèvement forfaitaire unique (PFU) est au taux de 30% à la place de l’IR.
Ce taux se décompose en deux : un impôt de 12,8 % correspondant à l’IR et des prélèvements
sociaux de 17,2%.

Les prélèvements sociaux (CSG et CRDS) existaient avant cet impôt. Le régime applicable avant
2018 ne disparait pas complètement, il devient seulement optionnel, le contribuable peut opter pour
l’IR progressif. S’il opte pour l’IR progressif il récupère l’abattement de 40% sur les dividendes.

Par ailleurs, le PFU ne met pas fin aux prélèvements forfaitaires non libératoires. Dans tous les cas,
le PFNL sera prélevé à la source, mais il est désormais de 12,8% et non plus de 21%. Le PFNL est
en réalité de 30%, autrefois il était de 21% plus les prélèvements sociaux qu’il aurait fallu appliquer
à l’exemple plus haut.
Si l’associé n’opte pas pour l’IR progressif, le PFU est égal au PFNL, donc le contribuable ne doit
plus rien à l’Etat. Si en revanche, il opte pour l’IR, il faut calculer l’IR au barème progressif puis
déduire le PFNL du montant à payer.

Certains contribuables modestes peuvent être dispensés du prélèvement à la source. Le revenu fiscal
de référence doit être inférieur à 50 000 euros ou 75 000 euros selon que le contribuable est

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

célibataire ou soumis à imposition commune (marié ou pacsé). Les contribuables doivent formuler
cette demande avant le 30 novembre de l’année précédente (30 novembre 2020 pour 2021).

Exemple : dividende de 50 versé à un associé PP. L’établissement payeur doit retenir à la source le
PFNL sauf si l’associé lui a demandé d’en être dispensé : 30% x 50 = 15 euros. Il faut verser en
compte 50 - 15 = 35 euros. Le contribuable doit néanmoins déclarer 50 euros, il ne faut pas tenir
compte du montant retenu à la source.
Deux hypothèses :
Soit le PFU s’applique : 30 % x 50 = 15. Le contribuable ne doit rien à l’Etat puisque les 15 ont
déjà été prélevé au titre du PFNL.
Soit le contribuable a opté pour l’IR (taux à 20%) : 20% x ( 50 x 0,60) = 6. Le 0,60 correspond à
l’abattement de 40%.
Il faut tenir compte des prélèvement sociaux : 6 + 17,2 x 50 = 8,6.
Le contribuable doit 8,6 + 6 = 14,6.
Le contribuable avait déjà payé 15 au titre du PFNL donc il a une créance contre l’Etat de 0,40.

Présentation différente :
PNFL sans cotisations sociales : 12,8 x 50 = 6,4.
IR progressif sans cotisations sociales : 20% x ( 50 x 0,60) = 6.

Si l’associé est une personne morale, la société mère suit le régime d’exonération des sociétés mères
à raison des dividendes reçus de leur filiale.

Paragraphe 2 : Les distributions officieuses

L’article 109-I CGI qualifie de revenus réputés distribués tous les bénéfices ou produits qui ne sont
pas mis en réserve ou incorporés au capital (1°) et toutes les sommes ou valeurs mises à la
disposition des associés et non prélevées sur les bénéfices (2°).

Dans le premier cas la loi pose une présomption d’existence de bénéfices distribués. Dans le second
cas, le législateur pose une présomption de qualification de bénéfices distribués, des sommes mises
à la disposition des associés ne sont pas des dividendes officiellement mais elles sont qualifiées
comme tel par la loi. L’idée est de considérer que tout ce qui sort de la société à destination d’un
tiers est présumé être du dividende.

A. La présomption d’existence des bénéfices distribués (article 109-I 1°)

Tous les bénéfices qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital sont présumés avoir été
distribués. La société a trois possibilités pour utiliser son bénéfice : soit elle le met en réserve, soit
elle l’incorpore au capital social soit elle le distribue.

Par exemple une société fait l’objet d’un contrôle comptable. La Sté déclare avoir fait un bénéfice
de 100 mais le vérificateur considère qu’elle a fait un bénéfice de 120. Les 20 de différence sont
donc considérés être du dividende distribué.

Ce raisonnement déductif ne vaut que s’il y a eu effectivement une sortie d’actif, cad un
désinvestissement.
‣ CE, 29 septembre 1989, Venutolo : l’administration reprochait à un commerçant d’avoir
minoré ses stocks. Son bénéfice imposable a donc été majoré. l’AF ne pouvait pas se servir de
l’article 109-I dans cette situation car il n’y a eu aucun désinvestissement, c’était un simple jeu
d’écriture, il n’y a pas eu de sortie d’actif.

45
Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

À supposer qu’il y ait un désinvestissement, encore faut-il que l’administration démontre que le
contribuable a eu la disposition de ce revenu. La Jp est venue au secours de l’AF grâce à la théorie
du maitre de l’affaire. Le maitre de l’affaire est le contribuable qui maitrise son affaire et qui a donc
le contrôle de son entreprise. On peut à l’évidence dire que c’est lui qui a bénéficié de la sortie de
l’actif. En pratique, il s’agit souvent d’un associé majoritaire et qui exerce une fonction de direction.
Ce maitre de l’affaire est présumé avoir eu la disposition des sorties d’actif.
‣ CE, Plénière, 22 février 2017 : il ne faut pas que l’administration fiscale ait de doute sur
l’appréhension. En l’espèce il y’avait deux maitres de l’affaire donc il y avait un doute.

Le CGI envisage des applications classiques au travers de son article 111. L’article 111 prévoit que
sont notamment qualifiées de revenus distribués les distributions occultes (c) et les distributions
camouflées (d).

La distribution camouflée est un avantage servi à un tiers et qui apparait clairement en tant que tel
dans les comptes. Le cas typique est la rémunération excessive du dirigeant, si lors d’un contrôle
l’AF considère que le dirigeant est trop payé, il faut réintégrer la somme en trop pour rehausser le
résultat imposable. L’article 109 I s’applique car le bénéfice supplémentaire n’est ni dans le capital
ni dans les réserves puisqu’il a été distribué au dirigeant. Le dirigeant est alors imposé comme si
cette somme était un dividende. Le dirigeant a déclaré honnêtement tout son salaire, il y a une
requalification d’une partie de son revenu donc il fallait déclarer une partie en tant que salaire et une
autre partie en tant que revenu mobilier. Les règles des revenus de capitaux mobiliers ne sont pas
les mêmes que les règles des traitements et salaires. Le dirigeant peut prétendre aux avantages
fiscaux des dividendes. Le dirigeant peut être au PFU (30% tout compris) ou opter pour l’IR
progressif mais dans ce cas il n’a pas droit à l’abattement de 40% comme il ne s’agit pas d’un
dividende. Par ailleurs, dans les deux cas, il devra subir une majoration de 25% de son revenu
imposable. Cette majoration résulte d’une intégration dans le barème de l’IR d’un abattement de
25% pour les salariés, donc ceux qui ne sont pas salariés se voient appliquer une majoration.

Les distributions occultes peuvent se subdiviser en deux :


‣ Les distributions ne figurant pas du tout en comptabilité (caisses noires servant à alimenter des
dépenses illicites). Les caisses noires n’apparaissent pas du tout dans les comptes. Les paiements
se font généralement en liquide. On parle d’avantage occulte.
‣ Les donations indirectes à un tiers (ex la vente d’actif pour un prix minoré). On parle de
rémunération occultes.
‣ CE, 28 février 2001, Thérond : le CE confère un caractère autonome à l’article 111 c) du CGI.
Dans l’esprit des rédacteurs, cet article n’est qu’une application de l’article 109 I. La
jurisprudence imagine une autre lecture des textes. Cette valeur autonome permet à l’article 111
c) de se détacher du 109 I CGI. Il n’est alors pas nécessaire que la distribution présumée soit la
conséquence d’un rehaussement de bénéfice. L’article 109 I exige que le résultat soit
bénéficiaire. Si le bénéficiaire n’est pas associé, l’article 109 II ne peut pas s’appliquer. Le CE
s’est donc échappé de ces deux articles. Le CE considère que l’administration doit rapporter
l’écart de valeur et l’intention libérale, cad la volonté d’avoir voulu gratifier une personne.
Le CE a jugé à plusieurs reprises que l’intention libérale est présumée lorsque les parties sont en
relation d’intérêt ou lorsqu’elles sont unies par des liens familiaux.

Si une distribution occulte apparait, les rémunérations et les avantages occultes sont majorés de
25%.

La distribution occulte fait intervenir une difficulté pour l’AF lorsque le bénéficiaire n’est pas
identifié. L’article 117 CGI prévoit que le vérificateur doit demander à la société toute indication
complémentaire sur les bénéficiaires de la distribution occulte. La Sté a 30 jours pour répondre au
vérificateur, à défaut elle sera passible d’une amende de 100% ou de 75% des sommes réputées

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

distribuées. L’amende de 75% correspond à la situation dans laquelle la Sté a déclaré cet avantage
mais se refuse à dénoncer la personne qu’elle a gratifié. Si le vérificateur a découvert l’existence de
la distribution occulte, l’amende de la Sté est de 100% des sommes distribuées. Cette amende est
prévue à l’article 1759 CGI.

La Sté est la débitrice légale de la Sté mais les dirigeants sociaux de droit ou de fait sont
solidairement responsables de son paiement.

La désignation par la Sté du bénéficiaire ne crée pas contre lui une présomption d’appréhension.
L’administration ne pourra pas imposer le bénéficiaire si elle ne démontre pas qu’il a effectivement
appréhendé les sommes que lui a octroyé la société.

B. La présomption de qualification des bénéfices distribués

Ici, un flux financier ou matériel à destination d’un associé n’a pas été prélevé sur les bénéfices. Ce
flux est présumé être un revenu distribué. L'art 109 I 2° prévoit que sont présumées être des revenus
distribués toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés et non prélevées sur les
bénéfices.
Les articles 111 a) et 111 b) illustrent ces cas de présomption de qualification. L’article 111 a)
prévoit le cas des prêts ou avances consenties aux associés et le b) prévoit le cas des sommes ou
valeurs attribuées aux porteurs de parts bénéficiaires ou de fondateur au titre de rachat de ces parts.

Tout prêt ou avance consenti par une Sté à un associé est présumé être une distribution de bénéfice.
La Sté ne peut normalement pas prêter de l’argent à ses associés. Cet article illustre le cas des
sommes versées sur les comptes courants d’associés.

Il ne s’agit que d’une présomption simple, les associés peuvent démontrer qu’il s’agissait bien d’un
prêt et non pas d’une distribution et qu’ils ont notamment remboursé ce prêt.

La Jp des piscines : lors d’une vérification de comptabilité d’un constructeur de piscines, le


vérificateur avait constaté que la société avait construit chez son dirigeant une piscine. Le
vérificateur considère qu’il y a un flux matériel au profit du dirigeant associé. Cet avantage n’a pas
été prélevé sur les bénéfices. Les conditions de la loi sont réunies, il s’agit d’une valeur mise à la
disposition d’un associé non prélevée sur le bénéfice, cette valeur constitue une distribution de
bénéfice. Le dirigeant a essayé de démontrer que ce n’est pas une distribution de bénéfice car c’est
une piscine de démonstration, donc ce n’est pas un avantage personnel mais une contrainte. La
CAA de Nantes le 2 octobre 1998 n’a pas été convaincue car la piscine a été construite chez lui et
qu’il habitait à plus de 40km du siège de l’entreprise. Un arrêt du CE du 5 février 1988 avait admis,
dans un cas de figure similaire, que ce n’était pas un avantage personnel car le dirigeant habitait à
proximité du siège de l’entreprise.

L’article 109 I 1° prévoit une présomption d’existence d’un bénéfice distribué, il n’y a pas
nécessairement de flux. L’article 109 I 2° qualifie un flux existant.

Dans le cadre du 2° de cet article :


‣ Les sommes réputées distribuées ne doivent pas avoir été prélevées sur les bénéfices,
‣ Les bénéficiaires de la distribution doivent être associés, il faut un lien entre la qualité de la
personne et la distribution
‣ La présomption porte sur les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés. La mise à
disposition est une condition de mise en oeuvre du 109 I 2°,mais dans le cadre du 109 I 1° c’est
une condition d’imposition du bénéficiaire et non une condition de mise en oeuvre.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Section 5 : Les groupes de sociétés

Un groupe est constitué d’une société mère avec une ou plusieurs filiales. La fiscalité est
extrêmement concernée par les groupes de sociétés. La fiscalité est probablement la matière qui a le
plus développé la notion de groupe.

Les aides consenties au sein d’un groupe constituent une source d’évasion fiscale extrêmement
importante. Les aides se constituent entre sociétés liées, cad entre sociétés d’un même groupe.

Le législateur a dû créer des régimes spéciaux en faveur des groupes de sociétés en raison de deux
situations :
‣ L’opacité fiscale des sociétés à l’IS : si une société qui a réalisé un bénéfice le distribue à un
associé, il y a une double imposition des bénéfices liée à l’opacité fiscale. Les bénéfices sont
imposés au niveau de la société qui a généré le bénéfice et au niveau de la société qui reçoit le
bénéfice, donc l’opacité va entrainer une double imposition économique.
‣ Si une société exerce deux activités, une activité bénéficiaire et une activité déficitaire, le déficit
généré par une activité se compense par le bénéfice généré par l’autre activité. Deux sociétés,
bénéficiaire et déficitaire, ne peuvent pas compenser leurs résultats si elles sont opaques. Le droit
fiscal apparait donc ici comme une atteinte à la liberté de gestion.
calx
Le législateur s’est senti obligé d’offrir, dans les deux situations, un régime de groupe :
‣ Le régime des sociétés mères et filiales qui permet l’exonération chez la mère des dividendes qui
lui sont servis par sa fille
‣ Le régime de l’intégration fiscale permettant la compensation des bénéfices et des pertes, des
membres du groupe.

Pour qu’un système de compensation existe, la législation exige un lien capitalistique très fort entre
les membres du groupe. La loi exige un lien capitalistique de 95%.
Dans le régime des sociétés mères, l’idée n’est pas de faire comme s’il y avait une seule société
mais de répondre au problème de la double imposition économique donc le lien capitalistique
demandé est de 5% seulement.

Paragraphe 1 : Le régime des sociétés mères et filiales

Une Sté mère est une Sté qui possède une participation significative dans le capital de sa filiale. En
droit des sociétés, l’article L233-1 du code de commerce prévoit qu’une société est considérée
comme la filiale de sa mère si elle est possédée à plus de 50%. Le droit fiscal est bcp moins
exigeant, la détention de 5% du capital suffit (art 145 CGI).

Ce régime des Sté mères résulte en grande partie de la transposition d’une directive communautaire
du 23 juillet 1990 sur les Sté mères et filiales d’Etats membres différents. Cette directive a été
refendue par une directive du 30 novembre 2011.
Afin d’éviter une double imposition des bénéfices, la directive prévoit que les dividendes perçus par
une Sté mère nationale, de ses filiales communautaires, dont elle détient au moins 10% du capital,
doivent :
‣ Soit être exonérés moyennant la réintégration d’une quote part pour fais et charges liée à la
gestion de la participation qui peut être forfaitisée à 5% des bénéfices distribués ;
‣ Soit être imposés en déduisant l’impôt payé à l’étranger par la filiale.

La France était très en avance sur cette directive. Depuis 1920, la France avait déjà un régime mère
fille qui permettait d’exonérer les dividendes perçus par une mère française de ses filiales françaises

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

ou étrangères dès lors qu’elle détient une participation de 5% dans le capital de sa filiale (situation
des dividendes entrants). La France a donc choisi l’exonération moyennant réintégration d’une
quote part pour frais et charges.

Lorsque la filiale est française mais la Sté mère étrangère (situation des dividendes sortants), l’Etat
de la source prélève une retenue à la source pour les flux sortants. Cette retenue à la source est un
impôt. La directive, dans cette situation de dividendes sortants transfrontaliers, a prévu une
extension se caractérisant par une exonération de retenue à la source.

Le législateur a doté le CGI de dispositifs dits anti-abus dont le but est de lutter contre une
utilisation abusive du régime des sociétés mères.

A. L’exonération d’impôt sur les sociétés

Les sociétés mères (SM) telles que définies à l’article 145 sont exonérées d’IS sur les dividendes
reçus de leurs filiales françaises et étrangères. Les effets de l’exonération sont prévus par l’article
216 CGI.

1. Les conditions de l’exonération (rat 145 CGI)

L’article 145 CGI dispose que le régime des SM s’applique au titre de participations détenues par
les Sté soumises à l’IS en France au taux normal ou au taux réduit des PME.

• Les conditions relatives aux titres :

Les titres doivent exister sous la forme nominative, l’article 145 précisant que s’il s’agit de titres au
porteur ils doivent être déposés ou inscrits dans un compte titre tenu par un intermédiaire financier
figurant sur une liste prévue par le CGI.

Ces titres doivent représenter au moins 5% du capital social de la filiale. Ce pourcentage s’apprécie
au jour du paiement des dividendes.
‣ CE, Plénière, 24 novembre 2014, Sté Artemis : Le seuil de 5% se calcule à partir d’une
détention directe de la participation. La filiale distribue les dividendes à une société
intermédiaire semi-transparente. Le dividende se retrouve chez la mère par le biais de la semi-
transparence. Le CE n’a pas appliqué le régime des Sté mères à cette situation car la
participation est indirecte.

Les titres doivent être détenus en pleine propriété ou en nue-propriété. Les titres simplement
détenus en usufruit sont donc exclus. Cette formulation est issue de la loi de finance rectificative
pour 2015 du 29 décembre 2015 qui est venue consacrer une évolution Jp :
‣ CJCE, 22 décembre 2008 : Les titres simplement détenus en usufruit par la mère ne peuvent
bénéficier du régime mère-fille. Cette question a été très discutée. Le commissaire du
gouvernement avait voté pour l’application du régime mère-fille.
‣ CE, 20 février 2012, Sté Participasanh : le CE a exclu du régime mère-fille les titres détenus
en usufruit du fait de l’absence de droit de vote de l’usufruitier.

C’est l’usufruitier qui reçoit les dividendes, donc il y a une incohérence apparente à cette
formulation. C’est néanmoins une incohérence relative dans la mesure où les nu-propriétaires
reçoivent parfois des dividendes lorsqu’il s’agit de distributions exceptionnelles.

Il existe une exception à la règle des 5% en pleine propriété ou en nue propriété. Une participation
d’au moins 2,5% dans le capital et 5% des droits de la Sté émettrice suffit à condition que la Sté

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

participante soit contrôlée par un ou plusieurs organismes non lucratifs. C’est une exception posée
par la loi de finance rectificative du 29 décembre 2015. En contrepartie, la Sté mère doit conserver
les titres pendant cinq ans au lieu de deux ans. On retrouve notamment cette situation lorsque le
dirigeant fondateur d’une Sté décède sans postérité, la participation est alors transférée à une
fondation, c’est le cas des laboratoires Pierre Fabre.

Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire que la Sté mère soit titulaire des droits de vote d’une manière
générale, sauf dans la situation des Sté contrôlée par des organismes non lucratifs. Autrefois, la loi
exigeait la détention de 5% du capital et des droits de vote. Cela avait une conséquence lorsque la
Sté mère était privée des droits de vote par la loi. Le droit des sociétés prive parfois un associé de
ses droits de vote, c’est notamment le cas des actions d’auto-contrôle, cad les participations
circulaires où une Sté possède une participation dans une société qui possède une participation dans
une autre société qui elle-même possède une participation dans la première société ce qui amène
une Sté à voter par l’intermédiaire de ses participations dans d’autres sociétés.
Il y a eu une évolution Jp en la matière. La loi du 29 décembre 2016 a modifié l’article 145 pour
abandonner la condition relative au droit de vote.

Les titres doivent être conservés deux ans par la mère, sauf exception de la participation de 2,5%
(détention pendant 5 ans). Cette exigence a soulevé diverses difficultés notamment la question de
savoir si la société peut, dès la première année de détention des titres, bénéficier de l’exonération
légale dès lors qu’elle conserve pendant deux ans sa participation, ou si elle doit attendre deux ans
avant de bénéficier du régime mère fille. La Jp était favorable à l’application du régime mère-fille
dès la première année, l’important était que la Sté conserve ses titres pendant deux ans. Si la durée
de deux ans n’est pas respectée, la mère doit verser au Trésor, dans les trois mois de la cession, la
somme dont elle a été exonérée, majorée d’un intérêt de retard. Aujourd’hui l’administration fiscale
a consacré cette jurisprudence des juges du fond.
S’est également posée la question de savoir si cet engagement de conservation de deux ans devait
s’appliquer à tous les titres détenus par la mère ou seulement aux titres permettant à la mère de
bénéficier de ce statut. Dans la seconde situation il suffirait de conserver pendant deux ans les 5%
pour que la Sté mère puisse bénéficier de l’exonération pour tous les titres.
‣ CE, 15 décembre 2014, Sté Technicolor : l’obligation de conservation des titres pendant deux
ans concerne les seuls titres de participation permettant à une Sté d’être qualifiée de Sté mère et
non l’ensemble des tires pour lesquels l’exonération des dividendes est demandée. Il suffit de
détenir 5% du capital de sa filiale pendant deux ans pour être exonéré sur la totalité du
dividende qui se rapporte à tous les titres détenus, même si les autres titres sont détenus depuis
moins de deux ans.

• Les conditions relatives aux Sté :

Le but du régime des Sté mères est d’éviter la double imposition des bénéfices économiques dans
les groupes.

Le régime spécial des Sté mères ne s’applique que si la mère est soumise à l’IS au taux normal, cad
soit le taux plein soit le taux réduit des PME.
La filiale doit être à l’IS, si elle est semi-transparente elle ne distribue pas de dividendes au sens du
droit fiscal puisque l’associé est réputé appréhender les bénéfices à la clôture de l’exercice (théorie
de l’appropriation, article 8 CGI).

Peu importe que la Sté mère soit une Sté ou un groupement d’une autre forme y compris un
groupement à but non lucratif mais ayant dans les faits une activité lucrative, pourvu que ce
groupement soit imposé au taux normal de l’IS. Une association peut très bien être une Sté mère au

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sens de la législation fiscale, cela suppose qu’elle soit à l’IS et donc qu’elle ait une activité
lucrative.
Les associations non lucratives sont exonérées d’IS mais uniquement sur leur bénéfice courant, elles
paient un IS sur leur revenu mobilier, les dividendes sont imposés à 15%. Si ce sont de fausses
associations, elles deviennent soumises à l’IS dans les conditions de droit commun mais cela leur
permet de récupérer l’exonération de dividende reçu, le régime est donc plus favorable pour ces
associations.

Concernant les distributions transfrontalières, peu importe que la Sté mère reçoive des dividendes
de filiales françaises ou étrangères (UE et non UE). Il existe une exception pour les filiales
implantées dans un Etat ou territoire non coopératif, le régime mère fille ne s’applique pas. Cette
exception a été contestée par le biais d’une QPC par l’association française des entreprises privées.
‣ CCel, QPC, 20 janvier 2015, AFEP : Le CCel a validé cette exclusion avec une réserve
d’interprétation, « le contribuable doit pouvoir apporter la preuve de ce que la prise de
participation dans une société installée dans un tel Etat, correspond à des opérations réelles qui
n’ont ni pour objet ni pour effet de permettre, dans un but de fraude fiscale, la localisation de
bénéfices dans un tel Etat ou territoire ».

Si des dividendes ont été prélevés sur des bénéfices n’ayant pas été soumis à l’IS chez la filiale, ou
si cette filiale est étrangère à un impôt de l’IS français, ces distributions ne devraient pas pouvoir
bénéficier, chez la mère d’une exonération sur le fondement du régime des Sté mères et filiales car
l’esprit de la loi est d’éviter la double imposition. Si ces bénéfices sont imposés pour la première
fois chez la mère, il n’y a pas double imposition économique.
La difficulté s’est posée dans le cadre des acomptes sur dividendes. Un acompte sur dividende est la
possibilité donnée aux Sté de distribuer en avance, en cours d’exercice, à leurs associés, un acompte
sur dividende. C’est un procédé dérogatoire. Certains tribunaux avaient jugé qu’un acompte
supérieur au résultat distribuable ne devrait pas pouvoir bénéficier du régime des sociétés mères
(TA de Montreuil, 1 juillet 2014).
‣ CE, 12 avril 2019, Cie de St Gobain : le CE décide que les acomptes sur dividendes peuvent
bénéficier du régime mère fille même s’ils excèdent le montant du bénéfice distribuable de la
filiale à la clôture de l’exercice.

Si la filiale a pu déduire de ses bénéfices les dividendes distribués, il n’y a pas double imposition
des bénéfices, donc le régime des Sté mères ne devrait pas s’appliquer. Un dividende n’est pas une
charge pour la société mais une utilisation de bénéfice. Les dividendes peuvent provenir de
l’étranger, il existe des régimes hybrides (mi emprunt mi fond propre) dans certains pays étrangers
permettant de déduire les dividendes versés. La France n’admet pas ce type de régime.
Depuis 2015, l’article 145 pose explicitement que sont exclus du régime mère-fille les produits des
titres d’une Sté dans la proportion où les bénéfices ainsi distribués sont déductibles du résultat
imposable de cette société.

2. Les modalités de l’exonération (art 216 CGI)

L’article 216 prévoit que les dividendes reçus par les Sté mères sont exonérés d’IS.

Historiquement le régime des sociétés mères a été construit comme une option. Si une Sté mère
voulait être exonérée des dividendes reçus, elle devait opter lors de sa déclaration de bénéfice sur le
tableau 2058-A , pour ce faire, il suffisait à la Sté d’enlever le dividende de son bénéfice imposable.
Les sociétés avaient le choix entre le régime des sociétés mères et le régime de l’avoir fiscal.
L’avoir fiscal a été supprimé en 2005, les sociétés se plaçaient donc logiquement sous le régime des

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Sté mères. En Jp s’est posée la question de savoir ce qu’il se passerait si la société oublie de déduire
ce dividende, pourrait-elle former réclamation a posteriori ? Si on considère que le régime des SM
est une option, en théorie le choix de ne pas opter est une décision opposable au contribuable. À
l’inverse si on considère que ce régime n’est plus une option compte tenu de l’évolution historique,
mais une demande, alors la Sté pourrait former une réclamation a posteriori.
‣ CE, 20 décembre 2017, Sté Worns et Cie : l’option pour le régime des SM peut être exercée a
posteriori pourvu que ce soit dans le délai légal de réclamation. Le CE considère donc que ce
régime est toujours une option.

En contrepartie de ce régime d’exonération, la société doit réintégrer dans ses bénéfices une quote
part pour frais et charges de 5% du montant des dividendes reçus, liée à la gestion de sa
participation.

Dans certaines situations, la quote part pour frais et charges est réduite à 1% du montant de la
participation. Cela concerne :
‣ Les groupes intégrés : la quote part est réduite à 1% lorsqu’il s’agit d’une redistribution à la mère
du groupe. Cette quote part n’est pas neutralisable. Normalement, les opérations à l’intérieur du
groupe doivent être neutralisées.
‣ Les distributions, à une mère française, de filiales installées dans un pays de l’UE ou de l’espace
économique européen qui a conclu une convention d’assistance administrative en vue de lutter
contre la fraude ou l’évasion. Ces filiales doivent remplir les conditions pour être membre de ce
groupe, si elles étaient établies en France.
‣ Même si la mère n’est pas membre d’un groupe intégré, ce régime s’applique aux dividendes qui
lui sont servis par une filiale étrangère soumise à un impôt équivalent à l’IS dans l’UE ou
l’espace économique européen. Cette filiale doit remplir les conditions pour être membre de ce
groupe si elle était établie en France, autres que celle d’être soumise à l’IS en France, sauf si la
non appartenance au groupe est uniquement due à une absence des options ou des accords
nécessaires à l’application de l’intégration fiscale.

Ce montant de 5% est un forfait, la mère recevant des dividendes de sa filiale est obligée de
réintégrer ce forfait de 5%. Même si la mère démontre qu’elle a eu moins de 5% de frais et charges,
elle est obligée de réintégrer 5%.

Si une Sté mère reçoit un dividende auquel est adjoint un crédit d’impôt, elle doit calculer cette
quote part de 5% sur le montant cumulé des dividendes et du crédit d’impôt. Il est possible que
lorsqu’une Sté mère française reçoit un dividende d’une filiale étrangère, elle ne reçoive pas
forcément la totalité du dividende parce que l’Etat de la filiale prélève une retenue à la source, qui
va diminuer le montant des dividendes reçus par l’associé. Généralement, par convention entre les
deux pays, il est prévu que la retenue à la source pratiquée à l’étranger forme un crédit d’impôt en
France, afin d’éviter une double imposition du dividende. Dans cette hypothèse, il est prévu que la
réintégration de la quote part pour frais et charges se calcule sur le montant du dividende net reçu
augmenté du crédit d’impôt (retenu à la source).

Exemple : Une société reçoit 50 000 euros de dividendes d’une filiale française et 20 000 euros de
dividendes de sa filiale étrangère. La convention entre la France et le pays d’implantation de la
filiale étrangère prévoit l’application d’une retenue à la source sur le dividende étranger.
La société française recevra 20 000 - 15% x 20 000 (retenu à la source) = 17 000 euros net.
Au titre du régime des Sté mères, elle est autorisée à déduire de son résultat imposable les
dividendes exonérés : 50 000 + 17 000 = 67 000 euros.
Elle doit réintégrer : 5% x 70 000 (dividendes + crédit d’impôt) = 3 500 euros.

B. L’exonération de retenue à la source

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Lorsque les dividendes quittent le territoire d’un pays à destination de résidents étrangers, l’Etat de
la source prélève une retenue à la source car il estime que le revenu étant originaire de son pays, il a
le droit de prélever cette retenue pour tous les revenus sortants. Cela concerne la plupart des
revenus néanmoins par exemple il n’y a pas de retenu à la source pour les intérêts de revenus
mobiliers, de capitaux, etc.

L’article 119 bis CGI prévoit une retenue à la source à toutes les distributions de bénéfices,
officielles ou présumées, quittant le territoire français à destination d’un associé étranger.

Néanmoins, afin d’encourager la constitution de groupes européens, la directive du 23 juillet 1990 a


prévu l’exonération de cette retenue à la source si certaines conditions sont réunies. Cette
exonération est prévue à l’article 119 ter CGI.

1. Le régime général de la retenue à la source

Actuellement (depuis 2018), la France prélève une retenue à la source sur les dividendes sortants de
12,8% lorsque le bénéficiaire est une personne physique et de 30% lorsque le bénéficiaire est une
personne morale. Depuis le 1er janvier 2020, le taux applicable aux personnes morales a commencé
à baisser, il va suivre le taux normal de l’IS. En 2020, il était de 28%, en 2021, il est de 26,5% et en
2022 la retenue à la source sera de 25%.
Il existe des taux dérogatoires. Le taux est de 15% si le bénéficiaire est un organisme à but non
lucratif. Il est de 75% si les revenus sont payés à l’étranger dans un Etat ou territoire non coopératif.

La retenue à la source a historiquement posé un problème de compatibilité avec le principe de


liberté d’établissement de l’UE. En cas de distribution de dividendes domestiques (Sté française à
un associé français), si l’associé recevant est une Sté mère française, elle peut être exonérée sur le
terrain du régime des Sté mères, à 95%. En revanche, si la filiale française distribue un dividende à
la Sté mère étrangère, l’Etat français va prélever une retenue à la source sur le dividende sortant. La
Sté étrangère va recevoir un dividende diminué du montant de la retenue à la source. Si la Sté mère
étrangère est sur le territoire de l’UE et qu’elle ne peut pas se prévaloir d’une disposition
conventionnelle lui permettant de ne pas être imposée sur le dividende reçu, elle se retrouve
désavantagée car elle va être imposée sur un dividende alors que si elle avait été en France elle
aurait été exonérée. La CJCE a été saisie d’une question préjudicielle sur la compatibilité de la
retenue à la source avec le principe de liberté d’établissement.
‣ CJCE, 14 décembre 2006, Sté DENKAVIT : « un Etat ne peut pas taxer fusse par une retenue
à la source les dividendes versés à une Sté mère non résidente, alors qu’il exonère les
dividendes versés à une Sté mère résidente ». La CJCE procède en deux temps. Elle s’est
d’abord demandée si la retenue à la source peut être considérée comme un impôt à part entière.
Elle considère que c’est le cas, car cet impôt vient diminuer le revenu reçu. Puisque c’est un
impôt, est-ce normal d’imposer une mère étrangère alors qu’une mère française est exonérée ?
La CJ répond par la négative car c’est contraire au principe d’établissement.

2. Le régime propre aux Sté mères (art 119 ter)

L’exonération de retenue à la source concerne les Sté de capitaux imposables en France qui
distribuent des dividendes à une Sté mère dont le siège est situé sur le territoire de l’UE.

Pour cela, en application de la directive communautaire, le législateur posait au départ une exigence
de 25% de participation. Cette exigence ne pouvait pas tenir, compte tenu de la Jp DENKAVIT, car
en droit français interne, 5% de participation suffit pour être exonéré. Il a donc été initié une baisse
de la participation qui s’est stabilisée à 10% depuis 2009.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Désormais, selon l’article 119 ter du CGI, le taux de participation est ramené à 5% lorsque la
personne morale qui est le bénéficiaire effectif des dividendes détient des participations satisfaisant
aux conditions prévues à l’article 145 et si elle se trouve privée de toute possibilité d’imputer la
retenue à la source prévue à l’article 119 bis (convention fiscale prévoyant un crédit d’impôt).
Ce seuil de 10% qui peut être ramené à 5%, comme pour le régime mère fille, requiert que les titres
soient détenus en pleine propriété ou en nue propriété. Les titres doivent être détenus depuis deux
ans au moins pour pouvoir bénéficier de cette exonération de retenue à la source. La Sté peut
immédiatement profiter de l’exonération si elle s’engage à conserver les titres pendant deux ans.

C. Les dispositifs de lutte contre l’évasion fiscale dans les groupes de sociétés

Le législateur a prévu des armes anti-évasion dans le CGI. On en traitera deux : les clauses anti-
abus (art 205 A) et les dispositifs dits anti-hybrides (art 205 B et suivants CGI).

1. La clause générale anti-abus (article 205 A)

Ce n’est pas une clause mais un article du CGI.

Le régime des Sté mères est absolument dérogatoire du droit commun. Elle a un avantage fiscal
colossal car elle ne paie pas d’impôt sur les dividendes reçus de ses filiales. Certaines sociétés
développent des montages pour arriver à bénéficier de cet avantage.

Le montage dit de la coquille vide : une Sté A dispose de fortes réserves. Une société B achète les
titres de la Sté A afin d’en prendre le contrôle. La Sté B va faire voter une distribution massive des
réserves pour vider A de sa substance afin qu’elle devienne une coquille vide. Le régime des Sté
mères s’applique, donc les dividendes sont exonérés d’impôt. Les titres achetés par B ne valent plus
rien puisque la société cible n’a plus de réserve. B va donc passer une provision pour dépréciation
de sa participation. Elle reçoit un bénéfice distribué sur lequel elle est n’est pas imposée et elle
déduit une provision pour dépréciation de sa participation qui n’est pas méritée car elle ne s’est pas
appauvri puisque la dépréciation des titres est compensée par les dividendes reçus.
‣ CE, 17 juillet 2013, Sté Garnier Choiseol Holding : le CE a jugé qu’il y a un abus de droit par
le but exclusivement fiscal de l’opération et par le détournement de la loi. Le régime des Sté
mères a été détourné de ses fonctions.

Le législateur s’est emparé de la question et a inséré une clause anti-abus du régime des Sté mères
dans le CGI à l’article 145. Ce dispositif a été repris et élargi comme un dispositif anti-abus de l’IS
de manière générale à l’article 205 A.

Selon cet article, l’application de la clause anti-abus nécessite la réunion de deux conditions :
‣ Le montage ou la série de montages est mis en place avec pour objectif principal l’obtention d’un
avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable.
‣ Le montage ou la série de montages n’est pas considéré comme authentique ce qui signifie qu’il
n’a pas de justification économique.Un montage est considéré comme non authentique dans la
mesure où il n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité
économique.

C’est une arme qui vient en complément de l’article L64 LP (abus de droit). Dans l’abus de droit, il
faut démontrer le but exclusivement fiscal, ce qui serait le cas en présence d’actes fictifs ou de
montages frauduleux dans un but exclusivement fiscal.

Le législateur a mis en place une procédure de mini abus de droit (art L64 A LPF). Cette procédure
permet de sanctionner des montages à but principalement fiscal comme l’article 205A. Selon

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

l’administration, le mini-abus de droit ne s’applique pas à l’IS car c’est l’article 205A qui
s’applique.

2. Les dispositifs anti-hybrides (art 205 B et suivants)

Les dispositifs anti-hybrides sont les dispositifs anti-évasion les plus récents. Ces dispositifs
figurent aux articles 205 B, 205 C et 205 D qui ont été introduits dans le CGI par la loi de finance
de 2020. Ces dispositifs ont pour origine les directives de 2016 et 2017, dites directives ATAD.

Un montage est dit hybride lorsqu’il met à profit un caractère asymétrique dans une relation
financière. On obtient ces effets asymétriques dans deux situations :
‣ Déduction non inclusion : par l’effet d’une déduction chez un contribuable sans que l’autre
contribuable ne soit imposé,
‣ Double déduction : par l’effet d’une déduction de la même charge chez deux contribuables

La déduction non inclusion est la plus répandue. Si un contribuable déduit une charge suite à une
dépense alors généralement un autre contribuable sera imposé sur cette dépense. Ce qui est une
charge pour l’un est un produit pour l’autre. Le caractère asymétrique survient lorsqu’il y a une
déduction chez l’un mais pas d’imposition chez l’autre.
L’hypothèse classique est le cas d’un pays qui admet la déductibilité des dividendes versés par une
filiale à une Sté mère française, du résultat imposable de cette filiale. Les dividendes devraient être
imposés en France mais ils sont exonérés au titre du régime des Sté mères. Il y a déduction à
l’étranger et non inclusion en France.
Ce type de montage peut tomber sous le coup des dispositifs anti-hybrides. Les deux partenaires
économiques doivent être liés l’un à l’autre (entreprises associées).
La sanction est qu’il faut opérer une correction sur le résultat qui a été anormalement minoré. Par
exemple, le revenu perçu par l’associé français qui a été exonéré sera imposé.

Paragraphe 2 : Le régime de l’intégration fiscale

Le régime de l’intégration fiscale est récent dans le droit interne. Il est applicable depuis le 1er
janvier 1988. Il est régi par les articles 223A et suivants CGI.

L’esprit de ce régime consiste à faire comme si un groupe de sociétés n’en formait qu’une. On nie
la personnalité fiscale des filiales qui composent ce groupe, pour faire apparaitre la personnalité du
groupe. C’est le groupe qui est redevable de l’impôt, le débiteur est la Sté mère.

En France il y aurait actuellement entre 20 000 et 30 000 groupes intégrés. Ce régime ne concerne
pas que les très grosses sociétés.

L’intégration permet d’assurer une meilleure gestion fiscale du groupe grâce à la compensation des
bénéfices et des pertes des sociétés membres du groupe. Il y’a un résultat de groupe, pour cela il
faut additionner tous les résultats de tous les membres du groupe. Il y’a donc compensation entre les
bénéfices et les déficits.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Le régime de l’intégration permet de faire apparaitre un résultat de groupe. On fait comme s’il n’y
avait qu’une seule entité, comme si les Sté membres du groupes n’avaient pas de personnalité
morale. La conséquence étant que ces sociétés ne peuvent pas avoir de relation juridique entre elles,
on traite ces sociétés comme des succursales. In fine, les opérations intra-groupes sont neutralisées
pour faire apparaitre un vrai résultat de groupe.

Les conditions légales pour intégrer ce régime de groupe sont draconiennes.

A. Les conditions d’application du régime

Il faut remplir deux catégories de conditions :


‣ Il doit s’agir d’un véritable groupe au sens de la loi,
‣ La mère doit opter effectivement pour ce régime

1. La notion de groupe

Il ne peut y avoir de groupe que si les Sté qui en sont membres remplissent certaines conditions :

Condition 1 : Les sociétés doivent être soumises à l’IS en France dans les conditions de droit
commun. Une société qui bénéficie d’un régime d’exonération particulier prévu par le droit français
ne peut pas faire partie d’un groupe intégré tant qu’elle bénéficie de ce régime. Cela a été jugé à
propos de l’article 44 septies prévoyant l’exonération d’une entreprise créé pour reprendre une
entreprise en difficulté. Normalement, il est assez logique qu’on ne puisse intégrer que des Sté
françaises.
‣ CJCE, 14 décembre 2005, Marks & Spencer : M&S est une société de droit britannique qui
avait installé des filiales dans toute l’Europe. Cette société était fiscalement intégrée en Grande-
Bretagne. Ne peuvent faire partie du groupe intégré britannique que les Sté britanniques. À la
suite de difficultés économiques des filiales européennes, certaines filiales ont fermé. La société
entendait contester l’impossibilité d’utiliser les pertes de ses filiales européenne. La CJ considère
que l’exclusion des filiales étrangères pour l’application du régime de groupe britannique ne
constitue pas, par principe, une incompatibilité au droit d’établissement, sauf si les moyens mis
en oeuvre excèdent les objectifs poursuivis. En l’espèce, il est relevé que les filiales étrangères
déficitaires n’avaient pas pu imputer les pertes locales ce qui semblait trop sévère pour la CJ.
‣ Tribunal administratif de Montreuil, 17 janvier 2019, Lucien Barriere : le groupe français
peut déduire les pertes d’une filiale belge en liquidation dès lors que ces pertes ne sont plus ou ne
peuvent plus être utilisées en Belgique.
‣ CA de Versailles, 23 juin 2020 : la CA a infirmé la décision du TA de Montreuil.

Condition 2 : Les exercices comptables doivent être d’une durée de 12 mois et les dates d’ouverture
et de clôture doivent être identiques. Tous les exercices comptables de toutes les sociétés doivent
coïncider afin d’avoir un résultat comptable unique. Il est possible de modifier les dates d’ouverture
et de clôture du groupe si cela est fait symétriquement pour toutes les Sté du groupe.

Condition 3 : La loi exige que la société mère possède dans chacune de ses filiales une participation
de 95% des droits financiers et des droits de vote. Cette exigence est assouplie par le fait que cette
participation peut être indirecte par l’intermédiaire de filiales ou d’établissements stables du groupe.
Il faut multiplier deux participations successives pour obtenir une participation indirecte.

Exemple : A a une participation de 80% dans B et B a une participation de 80% de C. A possède


une participation de 64% dans C. Le CGI prévoit que lorsqu’une entreprise a 95% de participation
cela équivaut à 100%. Donc dans cette exemple si B a une participation de 95% dans C. A a une
participation de 80% dans A.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Exemple : Un groupe avec une Sté mère A possédant 95% d’une filiale F1, 95% d’une filiale F2 et
5% d’une filiale F3. F1 possède une participation de 70% dans F3 et F2 possède une participation
de 20% dans F3.
La Sté mère peut intégrer F1 et F2 car elle possède directement 95% dans leurs capital. Elle ne
possède que 5% directement dans F3 mais elle peut compléter cette participation par ses
participations indirectes. Elle possède 70% indirectement par le biais de F1. Elle possède également
20% par le biais de F2. La Sté mère a une participation indirecte de 95% (5% + 70% + 20%).

Une difficulté est apparue lorsque dans une participation indirecte, il y a une filiale étrangère entre
deux sociétés françaises.
Une Sté mère française possède 99% dans une filiale étrangère. La filiale étrangère possède une
filiale française à 99%. Une société étrangère est prise en sandwich entre deux sociétés françaises.
Autrefois la législation française interdisait de faire un groupe entre la société mère et la filiale
française. La filiale étrangère n’est pas intégrée car elle n’est pas à l’IS en France. Le CE a saisi la
CJCE d’une question préjudicielle :
‣ CJCE, 27 décembre 2008, Sté Papillon : la CJCE a estimé que le régime français de
l’intégration fiscale est incompatible avec le droit communautaire en ce qu’il interdit à une Sté
mère résidente, d’inclure dans le groupe une sous-filiale résidente détenue par l’intermédiaire
d’une filiale non résidente.
Suite à cette Jp le législateur (LF rectificative pour 2009) a autorisé l’intégration d’une filiale
française détenue par l’intermédiaire d’une filiale étrangère.

La société intermédiaire ne peut pas faire partie du groupe intégré mais elle doit néanmoins
posséder les mêmes caractéristiques que les Sté membres du groupe :
‣ Elle doit être résidente d’un Etat de l’UE ou de l’espace économique européen ayant signé une
convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative avec la France,
‣ Elle doit être détenue directement ou indirectement à 95% par la Sté tête de groupe
‣ Elle doit être soumise à un impôt équivalent à l’IS dans son pays de résidence.

Ce type de groupe est appelé groupe papillon ou variante de l’intégration verticale classique, dans le
jargon fiscal.
On peut imaginer que la filiale française F possède deux filiales à 99%. Si tel est le cas, la filiale a
une option pour le groupe : intégration verticale classique entre une mère française F et ses deux
filiales françaises ou intégration verticale variante papillon en désignant la société mère française
comme tête de groupe et non pas la filiale française F.

Condition 4 : La société mère ne doit pas être elle-même détenue directement ou indirectement à
95% au moins par une autre PM imposable à l’IS en France. C’est la société qui a le grade le plus
élevé qui doit être à la tête du groupe.
Par exemple, si une société mère française qui a deux filiales (F1 et F2), a sa propre mère (société
grand mère) qui la possède à 99%, c’est la société grand mère qui doit être tête de groupe. Si la
société grand-mère était à l’IR, la société mère serait tête groupe. Idem si la société mère française
est détenue par une société grand-mère étrangère même si elle est soumise à l’IS.
Si la société mère est détenue indirectement à 99% par une société « arrière grand-mère » soumise à
l’IS en France, en principe, elle ne peut pas être tête de groupe. Dans ce cas, 99% ne vaut pas 100%
comme vu plus haut, il faut multiplier tous les pourcentages entre eux. La loi a prévu une exception
dans ce schéma, un groupe intégré peut être formé alors même que la mère est possédée à plus de
95% par une société soumise à l’IS en France.

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La société mère devait nécessairement être située en France. Si une société étrangère possède deux
filiales française à 95%, peut-il y avoir intégration entre les sociétés soeurs ? C’est le problème de
l’intégration horizontale entre soeurs ou entre cousines.
‣ CJUE, 12 juin 2016, X. AG : la CJ a jugé que les articles 49 et 54 du traité fondamental de
l’UE s’opposent à une législation (ici néerlandaise) qui refuse le régime d’entité fiscale unique
(régime de l’intégration) à des sociétés soeurs résidentes du dit pays au motif que la société
mère n’a pas de siège ou d’établissement stable dans cet Etat.

En France, le CE admettait que les sociétés filiales puissent être intégrées si la mère étrangère a un
établissement stable en France. La France à la suite de cette décision a dû modifier son régime.
La loi de finance rectificative de 2014 (29 décembre 2014) a modifié l’article 223 A, désormais il
est permit une intégration fiscale horizontale entre sociétés françaises soeurs ou cousines filiales
d’une même entité établie dans un Etat membre de l’UE ou dans un Etat ayant signé une convention
d’assistance administrative.

Désormais, à coté de l’intégration fiscale verticale, il peut y avoir une intégration fiscale
horizontale. Selon les textes, une société française peut devenir la société mère d’un groupe intégré
en se constituant seule redevable de l’IS de groupe qu’elle forme avec ses sociétés soeurs ou
cousines françaises lorsque leur capital est détenu de manière continue au cours de l’exercice à 95%
au moins par une entité mère non résidente, qui est elle-même une société ou un établissement
stable directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés ou d’établissements stables
étrangers. Ces différentes entités non résidentes doivent être soumises à un impôt équivalent à l’IS
français dans un Etat de l’UE ou de l’espace économique européen qui a conclu avec la France une
convention d’assistance administrative.

Illustration : une EMNR (entité mère non résidente) se situe dans un pays de l’UE ou de l’espace
économique européen. Cette EMNR possède 95% de deux filiales (F1 et F2) soeurs. Ces deux
soeurs peuvent former un groupe horizontale entre collatérales. L’EMNR n’est pas intégrée dans le
groupe mais cela ne doit pas faire obstacle à l’intégration française horizontale. Il faut décider
quelle société sera la tête de groupe, celles-ci étant de même grade. C’est la mère étrangère qui
désigne généralement la tête de groupe.

La loi envisage la possibilité d’avoir deux sociétés à l’étranger : l’EMNR qui possède deux sociétés
intercalées situées à l’étranger, ces dernières possédants des filiales en France. Les filiales
françaises cousines peuvent être intégrées à un groupe.

L’entité mère étrangère est exclue du périmètre du groupe français mais les conditions
habituellement requises d’une société mère française dans le cadre d’une intégration verticale
doivent être respectées et appréciées à son niveau. L’entité mère étrangère ne doit pas elle-même
être détenue à 95% par une autre personne soumise à l’IS en France.
Illustration : si l’EMNR est détenue à 95% par une société française à l’IS. Dans ce cas l’EMNR
serait une société intermédiaire, on serait dans le cadre d’un schéma d’intégration verticale type
papillon.

Si une EMNR possède 4 filiales (F1, F2, F3 et F4) à 95%, la loi permet aux filiales de constituer
soit un groupe horizontal soit plusieurs groupes horizontaux, par exemple un groupe entre F1 et F2
et un autre groupe entre F3 et F4.

2. L’option de la société mère

L’intégration fiscale se fait uniquement sur option. Si la société mère opte, l’option dure cinq ans.
L’option doit être notifiée à l’AF avant l’expiration du délai de dépôt de la déclaration des résultats

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de l’exercice précédant celui au titre duquel le régime de l’intégration fiscale doit s’appliquer (dans
les 3 mois d’ouverture de l’exercice comptable). Au bout de cinq ans, l’option est renouvelée par
tacite reconduction sauf manifestation contraire de la mère. La mère peut dénoncer l’option dans un
délai de trois mois suivant la période quinquennale.

La mère peut mettre fin à un groupe à tout moment. Le CGI permet à la mère d’évincer
annuellement ses filiales, elle peut les intégrer ou les désintégrer. Si la mère décide d’évincer toutes
ses filiales, le groupe n’existe plus. Donc la mère peut mettre fin au groupe même en cours de
période quinquennale.

En période de crise économique ou sanitaire, le législateur intervient pour prolonger la durée pour
opter. En 2020, l’option a été possible jusqu’à la fin du mois de mai 2020.

Les filiales sont solidairement responsables du paiement de l’IS. Si la mère ne paie pas,
l’administration fiscale peut s’adresser aux filiales pour le paiement de l’IS de groupe. Néanmoins,
l’AF ne peut pas leur demander plus que ce qu’elles auraient payé si elles n’étaient pas membre du
groupe.
Les filiales doivent alors donner leur consentement à l’intégration fiscale. Cela est assez relatif,
elles n’ont pas les moyens de s’opposer à la volonté de la mère qui les possède à au moins 95%.

L’intégration prend la forme d’une convention d’intégration fiscale entre membres du groupe.
Chacune des sociétés du groupe devra signer cette convention d’intégration. En pratique, par
mesure de précaution, les sociétés doivent respecter la procédures des conventions règlementées. La
convention d’intégration doit être approuvée en AG d’associés.

La mère est libre de déterminer à sa guise le champ d’application de l’intégration fiscale. La mère
n’est pas obligée d’intégrer toutes les filiales qu’elle déteint directement ou indirectement à plus de
95%. La mère peut modifier le périmètre de l’intégration à chaque exercice de la période
quinquennale d’option. Ce changement de périmètre doit être notifié à l’AF dans les trois mois de
début d’exercice.

En intégration horizontale, il faut choisir une mère intégrante française qui formulera une option
dans les conditions habituelles dans les mêmes délais. Néanmoins, l’entité mère non résidente et le
cas échéant les sociétés étrangères intercalées devront donner leur accord à cette intégration fiscale
horizontale.

B. Le régime fiscal

1. L’imposition des bénéfices ordinaires (le résultat de groupe)

Tout le régime repose sur la compensation des résultats de chacune des entités membres du groupe.
Il faut additionner les résultats qu’ils soient positifs ou négatifs de chacune des sociétés membres du
groupe. C’est la globalisation des résultats individuels, sous réserve de la réintégration de certaines
charges ou de la déduction de certains produits dans un but de neutralisation. La mère est
responsable du paiement de l’IS de groupe, c’est la débitrice légale de l’impôt de groupe.

• La globalisation des résultats individuels :

Dans un premier temps, toutes les sociétés calculent et déclarent leurs résultats fiscaux dans les
conditions habituelles en faisant abstraction de l’intégration fiscale.

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

Dans un second temps, la société mère va globaliser à son niveau les résultats obtenus, sous
réserves de quelques particularités. Elle paiera ensuite l’IS de groupe.

Normalement, les charges financières (intérêts d’emprunts) sont plafonnées. En théorie, chaque
société devrait appliquer à son niveau le plafonnement des charges financières. Par exception, les
sociétés n’ont pas à appliquer le régime de plafonnement, c’est le rôle de la mère du groupe qui le
fera à son niveau. C’est au niveau du groupe qu’il faut établir le montant des charges financières
nettes, faut déterminer l’EBITDA fiscal ou le seuil de 3 millions d’euros.

C’est le même principe qui s’applique concernant les produits de la propriété industrielle : c’est la
mère qui a la possibilité d’opter pour le taux de 10% pour l’imposition de ces produitqu’ils.

• La neutralisation des opérations intra-groupe :

Jusqu’à récemment, toutes les aides intra-groupes étaient neutralisées (abandons de créances et
subvention) qu’elles soient déductibles ou pas.

Depuis les exercices ouverts le 1er janvier 2019, les aides intra-groupes ne sont plus neutralisées.
Lorsque l’aide n’est pas déductible, cela a pour conséquence de majorer le résultat imposable du
groupe.

Les distributions de dividendes intra-groupes sont les dividendes versés par une Sté du groupe à une
autre Sté du groupe (souvent d’une filiale à la mère ou entre sociétés du groupe).
Si les distributions sont éligibles au régime mère-fille, les dividendes sont exonérés d’IS donc il
n’est pas nécessaire de les neutraliser sous réserve de la quote part pour frais et charges de 5%.
Désormais, en intégration, la réintégration pour frais et charges est de 1% mais cette quote part n’est
plus neutralisable.
Si les distributions ne sont pas éligibles au régime mère-fille (dividendes distribués entre filiales
généralement), les dividendes sont déclarés par la société qui a reçu les dividendes. Les dividendes
sont neutralisés à 99% seulement par symétrie avec les dividendes exonérés.

Dans la situation où une société du groupe détient une créance contre une autre société du groupe, si
la société débitrice connait des difficultés de telle sorte que la créancière peut ne pas recouvrer sa
créance, il faut passer une provision pour dépréciation de la créance en comptabilité (c’est une
perte). La société débitrice va probablement être en déficit. Le droit fiscal, dans le régime de
l’intégration, enregistre une double déduction car les deux sociétés font partie du même groupe
(provision pour dépréciation et déficit). Il faut alors réintégrer cette provision afin d’éviter la double
déduction.

• Le paiement de l’IS de groupe :

Chacune des sociétés calcule le bénéfice imposable comme si elle faisait partie d’un groupe. La
mère est ensuite redevable de tous les impôts. La tête de groupe globalise à son niveau tous les
résultats de ses filiales, il en résultera un bénéfice ou un déficit de groupe. S’il s’agit d’un bénéfice,
la mère paiera l’IS de groupe calculé au taux normal, ou au taux réduit de 15% pour les PME dans
ce cas, le groupe doit être une PME, il faut prendre en compte l’ensemble du chiffre d’affaire des
sociétés membres du groupe, la condition liée au capital est appréciée au niveau de la mère
seulement.
S’il s’agit d’un déficit, le déficit de groupe peut être reporté en arrière ou en avant dans les
conditions communes. Les filiales de groupes déficitaires doivent transférer à la mère leur nouveaux
déficits (ceux nés pendant la période d’intégration), ces filiales peuvent disposer de stocks de
déficits reportables avant leur intégration. Ces anciens déficits ne peuvent pas être transférés à la

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Fiscalité de l’entreprise 2 / Pr. Arnaud de BISSY 2020/2021

mère, ils restent au niveau des filiales. Le but est d’éviter que l’intégration de certaines filiales soit
uniquement motivée par leur caractère déficitaire. Ces stocks de déficit ne sont pas perdus, ils sont
utilisables uniquement au niveau de la filiale.

La loi ne règle pas les modalités de répartition de la charge fiscale entre la mère et les filiales. La
mère paie l’IS mais elle ne supporte pas totalement l’IS. La contribution des filiales au paiement de
l’IS ne remet pas en cause le principe selon lequel la mère est redevable de l’IS. Sur la base de la
convention d’intégration, la mère peut se retourner contre ses filiales pour leur demander de
contribuer au paiement de l’IS de groupe.
Dans la pratique il y’a plusieurs types de conventions (type 1, type 2, etc) qui prévoient les moyens
de contribution personnelle de chaque filiales. L’administration fiscale considérait dans sa doctrine
qu’une société mère devait constater, contre ses filiales, une créance correspondant à l’IS qu’elles
auraient payé si elles n’avaient pas été membres du groupe. Si la mère réclamait à ses filiales une
somme inférieure à ce montant, l’AF considérait que c’était un abandon de créance injustifié à
hauteur de la différence.
‣ CE, 12 mars 2010, Sté Wolseley Zenters France : la différence entre le montant réclamé par
la mère à ses filiales et la proportion d’IS qu’elles auraient dû payer en l’absence d’intégration
ne constitue pas une subvention indirecte (abandon de créance) à condition qu’elle ne porte
atteinte ni à l’intérêt social propre de chaque société ni aux droits des associés minoritaires.

Actuellement il est admis qu’une Sté puisse être amenée à payer moins qu’elle ne l’aurait dû en
l’absence d’intégration, en revanche la société mère ne peut lui demander de payer davantage.

2. Le régime des PV de cession

Il faut distinguer selon qu’il s’agit de PV internes ou de PV externes. Cela résulte de la


neutralisation nécessaire des opérations internes au groupe. Les opérations externes ne sont pas
neutralisées. Une PV résulte de la cession d’une immobilisation à un tiers. Selon que la PV est
réalisée par une cession à un membre du groupe ou par une cession à un tiers, le régime n’est pas le
même.

• Les PV internes :

Ces PV doivent être neutralisées sur le plan fiscal. Elles doivent être comptabilisées par la société
cédante. Elles devront ensuite être déduites du résultat d’ensemble du groupe. S’il s’agit de PV à
long terme suivant un régime particulier, elles devront être déduites de la PVLT nette d’ensemble
du groupe. Les MV sont réintégrées dans le résultat du groupe pour être neutralisées.

L’imposition ne sera effective que plus tard, lors de la cession du bien hors du groupe ou lorsque la
société quittera le groupe. On fera référence à la valeur d’origine du bien pour calculer la PV.

Les cessions de biens amortissables : lorsqu’une société du groupe acquiert un bien d’une autre
société du groupe, elle le paie au prix normal donc elle l’inscrit dans sa comptabilité à sa valeur
historique (prix d’achat) et amortie ce bien sur le prix d’achat. Pour préserver la neutralité de
l’opération de cession, il faut aussi neutraliser le supplément d’amortissement lié par la cession à
l’intérieur du groupe.
Exemple : un bien est vendu 500 à une Sté du groupe (F2) par une autre société du groupe (F1). La
valeur comptable est de 300.
La PV de F1 est de 200 (500 - 300). Cette PV interne doit être neutralisée lors du calcul du résultat
de groupe.
F2 va amortir le bien sur le prix payé (500). Amortissement linéaire sur 5 ans au taux de 20% : 100
euros à déduire par an. Il faut neutraliser une partie de cet amortissement car s’il n’y avait pas eu de

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cession le bien aurait été amorti sur 300. Il y’a 200 de supplément de base d’amortissement, il faut
donc neutraliser l’amortissement correspondant à ces 200 : 200 x 20% = 40 par an. Ces 40 doivent
être neutralisés.

PVLT sur cession de titres de participation : ces cessions sont exonérées donc il n’est pas nécessaire
de les neutraliser. Néanmoins, l’exonération se fait sous réserve de la réintégration d’une quote part
de 12%. Autrefois, la quote part devait être neutralisée. Depuis 2019, cette quote part n’est plus
neutralisable.

• PV externes :

Les PV externes résultent de la cession d’une immobilisation à un tiers, non membre du groupe. Ces
PV sont d’abord comptabilisées au niveau de la société cédante. Puis la mère globalisera à son
niveau les PV à court terme et les PVLT ou MVLT. Il faut appliquer sur ces PVLT le taux prévu
par la loi (Cf cours sur les PVLT).

3. Le régime des distributions de dividende

Il faut distinguer entre les distributions internes et les distributions externes. Toutes les opérations
internes doivent être neutralisées.

• Distribution interne :

Si les dividendes peuvent être exonérés dans le cadre du régime des sociétés mères, ces dividendes
sont exonérés dans le résultat individuel de la mère, il n’est donc pas nécessaire de les neutraliser.
En revanche, la quote part pour frais et charges de 1% n’est pas neutralisable.

Si les distributions ne peuvent pas bénéficier du régime des sociétés mères, elles doivent être
déclarées dans le résultat individuel de la société. Ces distributions doivent être neutralisées au
niveau de la mère du groupe. Cette neutralisation s’opère à 99% seulement.
La neutralisation s’opère uniquement si la distribution provient d’une Sté membre du groupe depuis
plus d’un exercice. La distribution s’effectue en général en N sur les bénéfices de N-1.

• Distribution externe :

Ces distributions suivent le régime de droit commun. En fonction du statut de l’associé, son régime
fiscal va varier. Si l’associé est une personne physique, il choisira entre le PFU (30%) ou l’IR
progressif avec abattement de 40%.

Si un membre du groupe reçoit un dividende d’un non membre, le régime de droit commun
s’applique. Tout dépend si la société peut être considérée comme une société mère. Si elle peut
bénéficier de ce régime, elle est exonérée sur les dividendes reçus, moyennant la réintégration d’une
quote part de 5% qui n’est pas neutralisable.

4. Le régime des sorties de groupe et la cessation du groupe

Quand une société quitte le groupe ou quand le groupe cesse d’exister (cessation de groupe), cela
entraine la déneutralisation de toutes les opérations internes ayant été neutralisées.

La sortie de groupe peut se faire lorsqu’une filiale quitte le groupe soit par sa propre décision soit
involontairement parce qu’elle ne remplie plus les conditions nécessaires.

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Un groupe cesse d’exister quand la mère le décide (ne renouvelle pas l’option) ou quand la mère
quitte le groupe volontairement ou involontairement (ne remplie plus les conditions). Si la mère
n’est plus à l’IS en France, il est toujours possible de basculer vers une intégration horizontale.

La sortie est présumée avoir lieu le premier jour de l’exercice au cours duquel s’est produit
l’évènement ayant entrainé la sortie ou fin du groupe.

Toutes les opérations qui ont été neutralisées en cours de groupe doivent être déneutralisées, cela
concerne les aides déduites jusqu’en 2019 (ne sont plus neutralisables depuis 2019) et les PV ou
MV internes. Toutes les PV deviennent imposables dans les conditions de droit commun. Les
dividendes exonérés ne sont pas concernés par la déneutralisation.

Les conventions d’intégration prévoient souvent que lorsqu’une filiale, qui a transféré ses déficits à
la mère, quitte le groupe, elle perçoit une indemnité compensant la perte de ses droits sur ces
déficits. L’administration fiscale estimait que cette indemnité devait être imposée chez la filiale. Le
CE a jugé le contraire.
‣ CE, 11 décembre 2009, Sté GE Healthcare Clinical Systems : l’indemnité n’est pas
imposable au niveau de la filiale ni déductible chez la mère. Le CE considère que si l’indemnité
n’est pas imposable c’est parce qu’elle compense une surcharge future d’IS qui n’est pas
déductible.

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