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Chapitre 2 : Le rapprochement comptabilité financière –

comptabilité de gestion

La mise en place d’un système de calcul de coût répond à la nécessité de disposer


d’informations économiquement permettant d’assurer le suivi de la gestion de l’entreprise et
de prendre des décisions adéquates.

Les informations contenues dans les documents comptables sont saisies et traitées selon une
logique autre que celle nécessaire pour l’obtention des informations sur les coûts. Il s’agit
donc de traiter les informations comptables de façon à obtenir des données sur les coûts qui
satisfont les besoins des gestionnaires.

Cette procédure consiste à :

- exclure certaines charges du calcul des coûts et du coût de revient : les charges non
incorporables

- modifier le montant de certaines charges : les charges d’usage et les charges


abonnées

- ajouter d’autres charges non contenues dans la comptabilité financière : les charges
supplétives

Section 1 : Procédures de traitement des charges de la comptabilité financière

1.1 Les charges non incorporables

1.1.1 Définition

La non incorporation des charges repose sur le principe selon lequel les charges qui ne
reflètent pas le fonctionnement réel des entreprises ou qui ont un caractère exceptionnel ou
antérieur ou postérieur à la période de calcul de coût ne feront pas partie des charges de la
comptabilité de gestion.

1.1.2 Les catégories de charges non incorporables

Bien qu’il n’existe pas de liste exhaustive des charges non incorporables, nous pourrons
retenir les catégories de charges suivantes :

- les charges se rapportant à une période différente du calcul des coûts ;


- les charges exceptionnelles et à caractère extraordinaire ; (compte 67)
- l’impôt sur les bénéfices (compte 69)
- certaines catégories de provisions (notamment toutes les provisions pour risques et
charges)
1.2 Les charges qui sont retenues pour un montant différent de leur montant comptable

1.2.1 Les charges d’usage ou les amortissements analytiques

Certaines charges de la comptabilité financière sont déterminées selon des considérations


fiscales ou autres, alors qu’en comptabilité analytique de gestion les décideurs souhaitent
disposer de charges calculées selon une optique technico-économique ; c’est notamment le
cas des dotations aux amortissements.

Du point de vue comptable, l’amortissement correspond à une dépréciation irréversible des


immobilisations. Cette perte de valeur peut être due à l’utilisation, au temps ou à
l’obsolescence technologique.

Le taux d’amortissement ainsi que la méthode adoptée obéissent beaucoup plus à des
considérations financières et fiscales qu’à des considérations économiques reflétant l’usage
réel de l’immobilisation. L’amortissement comptable ne traduit pas nécessairement le coût
d’utilisation réel de ce facteur de production ou d’exploitation.

Pour ces raisons l’incorporation des charges d’amortissement aux coûts et aux coûts de
revient doit obéir aux considérations suivantes :

- la charge d’amortissement en comptabilité analytique de gestion ou charge d’usage est


calculée non pas sur sa valeur historique (valeur d’achat) mais plutôt sur sa valeur
actuelle ou de remplacement ;

- la durée d’usage d’une immobilisation est une durée probable ou conventionnelle. Elle
peut être différente de sa durée normale d’utilisation ;

- la charge d’usage est incorporée aux coûts tant que l’immobilisation est utilisée et
même si du point de vue comptable elle est complètement amortie.

Exemple :

Un équipement de production a été acquis le 01/01/N pour une valeur HT de


100.000DT Le taux d’amortissement pratiqué est de 25% (c.a.d. durée de vie = 4 ans)

Quelle serait la charge d’usage à incorporer au 31/12/N+3 et au 31/12/N+4 si la


valeur de remplacement de ce matériel à ces dates est respectivement de 120.000DT et
123.000DT et que la durée de vie probable est de 6 ans ?

Solution :

Date d’amortissement Amortissement comptable Charge d’usage


31/12/N+3 100 000 × 25% = 25 000 120 000 / 6 = 20 000
31/12/N+4 0 car complètement amorti en N+3 123 500 / 6 = 20 500

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1.2.2 Les charges abonnées

Certaines charges enregistrées en comptabilité financière couvrent des périodes différentes


de celles retenues pour l’établissement des coûts et des coûts de revient : ce sont des
charges périodiques tel que les charges de consommation d’électricité, d’eau, de
téléphone, des assurances, etc.

Pour calculer les coûts il faut imputer à chaque période de calcul une partie de ces coûts
en répartissant le montant de ces charges sur les périodes concernées.

Exemple :

Les charges suivantes sont extraites du journal de l’entreprise au 31/03/N :

Electricité : 93 000DT facture du 1er trimestre N


Loyer de l’usine : 15 000DT du premier trimestre N

Quel est le montant de ces charges à incorporer aux coûts du mois de mars ?

Solution :

Charge Montant à incorporer


Service extérieur (électricité) 93 000 / 3 = 31 000
Service extérieur (loyer) 15 000 / 3 = 5 000

1.2.3 Les charges supplétives :

Les charges supplétives ne sont pas enregistrées en comptabilité financière, néanmoins elles
sont prises en compte dans le calcul du coût de revient ; généralement ces charges
correspondent à la rémunération de ressources employées pendant la période de calcul mais
qui selon la logique comptable n’ont pas été saisies en tant que tel.

Deux types de charges supplétives sont calculées la plupart du temps :

- La rémunération du travail de l’exploitant individuel


- La rémunération conventionnelle des capitaux propres

De façon générale le taux de la rémunération ainsi que le montant des capitaux propres
servant de base à cette rémunération sont laissés à la discrétion de l’entreprise.

En conclusion, nous pouvons présenter le schéma et les égalités suivantes :

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Charges non
incorporables

Charges
enregistrées par la
comptabilité
financière
Charges
incorporables
aux coûts

Charges
supplétive
s

charges de la comptabilité charges incorporables


financière + charges non incorporables
- charges non incorporables - charges supplétives
+ charges supplétives
= charges incorporables = charges de la comptabilité financière
(c'est à dire charges de la
comptabilité analytique de
gestion)

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Section 2 : Les différences d’incorporation et le rapprochement entre
résultats comptables et analytiques

2.1 Les différences d’incorporations sur les charges

Le traitement effectué sur les charges de la comptabilité financière donne lieu à des
différences d’incorporation sur :

- les charges non incorporées


- les charges d’usage
- les charges abonnées
- les charges supplétives

Cette différence d’incorporation permet d’établir une relation entre les charges de la
comptabilité financière et celles de la comptabilité analytique de gestion.

Soit :

Ccf = les charges de la comptabilité financière


Cca = les charges de la comptabilité analytique
DIC = la différence d’incorporation sur les charges

Ccf = Cca + DIC avec DIC >0 ou <0

2.2 La différence d’incorporation sur les produits

Comme pour les charges, les produits enregistrés en comptabilité financière ne seront pas tous
retenus par la comptabilité analytique de gestion pour le calcul du résultat analytique.

Seuls les produits découlant de l’activité normale seront pris en considération. Ainsi les gains
à caractère exceptionnel, relatifs à une période antérieure à celle pour laquelle le coût est
calculé ou provenant d’une activité étrangère à l’activité essentielle de l’entreprise ne seront
pas retenus pour le calcul du résultat analytique.

Ce traitement donne lieu à des différences d’incorporation sur les produits.

Soit :

Pcf = produits de la comptabilité financière


Pca = produits de la comptabilité analytique de gestion
DIP = différences d’incorporation sur les produits

Pcf = Pca + DIP

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2.3 La concordance entre résultat de la comptabilité comptable et résultat analytique

Le résultat de la comptabilité financière est en quelque sorte le résultat officiel. Le


rapprochement consiste donc à partir des résultats de la comptabilité analytique de gestion
pour les rapprocher de celui de la comptabilité financière

Soit :
Rcf : résultat de la comptabilité financière
Rca : résultat de la comptabilité analytique de gestion

On a :

Rcf = Pcf – Ccf

Rcf = (Pca + DIP) – (Cca + DIC)

Rcf = Pca – Cca + DIP – DIC

Rcf = Rca +DIP - DIC

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Section 3: Applications

Application n°1 : La société “REVOLON”

La société « REVOLON » a implanté un système de comptabilité analytique qui lui permet de


calculer mensuellement ses coûts de revient.

A la fin du mois de décembre N, le total des charges enregistrées pour le mois s’élève à
95 000DT.

Ce montant comprend entre autres :

- l’amortissement des frais d’augmentation du capital pour l’année qui s’élève à


4500DT considéré comme non incorporable ;

- une provision pour litige de 1 000DT enregistrée en Novembre et qui a été augmentée
de 50% en Décembre;

- le montant de la facture d’électricité du dernier trimestre N réglée en Décembre qui


s’élève à 1 200DT ;

- le montant des impôts sur les bénéfices qui s’élèvent à 7500D ;

Par ailleurs il faut tenir compte de la rémunération des capitaux propres qui s’élèvent à
240 000DT. Le taux conventionnel retenu est de 10% l’an.

Travail à faire : déterminer le montant des charges à incorporer en comptabilité analytique


de gestion pour le mois de décembre N.

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Solution :

Le montant des charges à incorporer en comptabilité analytique du mois de décembre N ne


doit correspondre qu’aux charges relevant du fonctionnement normal de l’entreprise pendant
ce mois.

1- charges non incorporables :

Frais d’augmentation de capital 4 500


Dotation aux provisions pour litiges 500
Impôt sur les bénéfices 7 500
Total charges non incorporables 12 500

2- Les charges abonnées :

Seul le montant de la consommation d’électricité du mois de décembre doit être retenu


En retenant l’hypothèse d’une consommation uniforme dans le temps, la part de la
consommation à imputer au mois de décembre serait : 12 000/3 = 4000

Il faut donc retrancher 2*400 = 800DT déjà comptabilisés et correspondant aux


consommations d’octobre et novembre

3- Les charges supplétives :

Rémunération conventionnelle des capitaux propres = 240 000*10%*1/12 = 2 000DT

En conclusion :

charges de la comptabilité financière 95 000


- charges non incorporables 12 500
- différence sur charges abonnées 800
+ charges supplétives 2 000
= charges incorporables à la comptabilité 83 700
analytique de gestion

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Application n°2 : Les établissements « Brenta »

Au 31/12/N la direction générale des Etablissements « Brenta » désirent connaître le montant


des charges de la comptabilité analytique de gestion en vue de dégager le coût de revient de
ses produits. Le service concerné dispose pour cela d’une balance simplifiée obtenue après
inventaire physique et travaux de fin d’exercice et avant impôt sur les bénéfices de l’exercice
N:

Comptes Soldes Débiteurs Soldes Créditeurs


Capital 150 000
Emprunts et dettes assimilées 50 000
Provisions pour risques et charges 20 000
Fournisseurs 35 000
Dettes à plus d’un an 15 000
Constructions 120 000
Matériel et outillage 95 000
Matériel de transport 80 000
Stock matière 35 000
Clients 15 000
Banque 25 000
Caisse 15 000
Amortissements 75 000
Achats consommés 185 000
Services extérieurs 60 000
Autres services extérieurs 45 000
Charges de personnel 169 000
Charges financières 18 000
Pertes extraordinaires 8 000
Dotations aux amortissements 40 000
Dotations aux provisions 35 000
Ventes 600 000
Total 945 000 945 000

Par ailleurs vous disposez des informations suivantes :

- les primes d’assurances non liées à l’exploitation s’élèvent à 2 000D


- un matériel était complètement amorti à la date du 31/12/N-1 ; cependant il a été
utilisé durant toute l’année N. Sa valeur de remplacement est de 12 000DT et sa durée
de vie est de 6 ans ;
- le taux de rémunération du capital est estimé à 10% l’an ;
- l’impôt sur les bénéfices de l’exercice N s’élève à 6 000DT
- les dotations aux provisions sont considérées comme non incorporables.

Travail à faire :

1- déterminer le résultat comptable net d’impôt


2- déterminer les charges de la comptabilité analytique de gestion et le résultat
analytique
3- Etablir une relation entre le résultat comptable net d’impôt et le résultat
analytique

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Solution :

1- Détermination du résultat comptable net d’impôts :

Produits 600 000DT


Charges comptables 560 000DT
Impôts sur le bénéfice 6 000DT
Résultat comptable net d’impôt 34 000DT

2- Détermination des charges et du résultat analytique :

a- Charges non incorporables

Primes d’assurance non liées à l’exploitation 2 000


Dotations aux provisions 35 000
Pertes extraordinaires 8 000
Impôts sur le bénéfice 6 000
Total charges non incorporables 51 000

b- Charges incorporées pour un montant différent de leur montant comptable ou


charges calculées

Coût d’usage du matériel = 12 000 / 6 = 2 000

c- Charges supplétives

Rémunération des capitaux propres = 150 000 * 10% = 15 000

d- Résultat analytique :

Ventes 600 000


charges de la comptabilité financière (impôts inclus) 566 000
-charges non incorporables 31 000
+coût d’usage du matériel 2 000
+charges supplétives 15 000
Total charges de la comptabilité analytique de 532 000
gestion
Résultat analytique 68 000

3- Relation entre résultat comptable et résultat analytique :

Rcf = Rca +DIP - DIC

Donc Résultat comptable = Résultat comptabilité analytique de gestion + différence


d’incorporation

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Différence d’incorporation sur :

Charges non incorporables 51 000


Charges calculées 2 000
Charges supplétives 15 000
Total différence d’incorporation 34 000

Et on vérifie que :

Résultat analytique 68 000


- Résultat comptable 34 000
Différence d’incorporation 34 000

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