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SECRETARIAT GENERAL
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UNIVERSITE CATHOLIQUE DE L'AFRIQUE DE L'OUEST (UCAO)
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UNITE UNIVERSITAIRE A BOBO-DIOULASSO (UUB)
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UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHES EN SCIENCES JURIDIQUES, POLITIQUES ET


HUMAINES (UFR/SJPH)
MENTION: SOCIOLOGIE

MEMOIRE DE FIN DE CYCLE

Présenté en vue de l’obtention du

DIPLOME DE MASTER

SPECIALITE : DEVELOPPEMENT SOCIAL

THEME : APPROCHE SOCIOANTHROPOLOGIQUE DE


L’ADHESION AU DON BENEVOLE DE SANG DANS LA
VILLE DE OUAHIGOUYA

Présenté par :
SAWADOGO Nabonswindé François Dieudonné
Directeur du Mémoire : Ferdinand Bouma BATIONO, Maître de conférences
Département de sociologie, université Ouaga1 Professeur
Joseph KI-ZERBO

Année académique 2013-2014

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DEDICACE
A la mémoire de mon oncle Feu Abbé Mathieu SAWADOGO.

ii
REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier très sincèrement tous ceux qui ont collaboré étroitement à la
réalisation de ce mémoire. Nous remercions particulièrement :
- Docteur Bouma Fernand BATIONO, notre directeur de mémoire qui a guidé notre travail
en suivant notre démarche et nos recherches. Il a répondu à nos multiples sollicitations et
nous a permis de surmonter les difficultés rencontrées.
- Messieurs Abdoulaye SAWADOGO et Lamoussa SOMA, attachés de santé en
épidémiologie au Centre Hospitalier Régional de Ouahigouya pour le croisement et le
traitement de nos données à l’informatique ;
- Merci à Monsieur Christophe ZONGO, inspecteur du secondaire pour la lecture d’une
première version du document et les commentaires forts utiles.
- Monsieur Omar OUEDRAOGO, Directeur du lycée Jean Piaget et Madame la Fondatrice
de l’Association Bilifou Bilifou pour leur aide à l’acquisition d’ouvrages fort utiles pour notre
travail de recherche ;
- Monsieur Martin OUEDRAOGO, Sociologue au Fonds Permanent pour le Développement
des Collectivités Territoriales du Nord pour l’appui professionnel, les suggestions et
surtout les encouragements ;
- Monsieur Lassané NASSA, Infirmier Diplômé d’Etat à Bobo-Dioulasso et son épouse pour
m’avoir accueilli et facilité mon déplacement à l’université Catholique d’Afrique de l’Ouest
unité de Bobo- Dioulasso ;
- Mesdemoiselles Sarata OUEDRAOGO et Celia DAH, Secrétaires au CHR pour leur
contribution dans la saisie ;
- Aux personnes ressources et intervenants dans la promotion du don de sang à
Ouahigouya pour le soutien et les services multiformes ;
- A toute la population de Ouahigouya qui s’est prêtée volontiers à nos questions et à nos
échanges malgré leurs occupations ;
- A nos amis, parents, collègues et promotionnaires qui nous ont été d’un appui
incommensurable ;
Qu’ils trouvent ici le fruit de leurs efforts conjugués.

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AVANT PROPOS
Ce document a été élaboré dans le cadre d’un mémoire de Master II de recherche en
sociologie à l’Université Catholique d’Afrique de l’Ouest (UCAO) unité de Bobo-Dioulasso. Le
sujet aborde les aspects socioculturels qui entravent la volonté des populations de donner
leur sang dans la ville de Ouahigouya. Dans une société qui est dynamique et non statique,
nous pensons que les sciences sociales peuvent contribuer à mieux comprendre les facteurs
sociaux et culturels qui impactent l’adhésion au don de sang. Le document est subdivisé en
deux(02) parties : une première partie consacrée au cadre théorique et à la méthodologie et
une seconde partie réservée à la présentation et à l’analyse des données.
L’UCAO n’entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce
mémoire. Les informations fournies dans le présent travail n’engagent que son auteur.

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SOMMAIRE
DEDICACE……………………………………………………………… …………………………………………………II
REMERCIEMENTS………………………………………………………………………………………………………III
AVANT PROPOS………………………………………………………………………………………………………... IV
SOMMAIRE……………………………………………………………………………………………………………….. V
LISTE DES TABLEAUX………………………………………………………………………………………………..
VIVIVII
SIGLES ET ABREVIATIONS…………………………………………………………………………………………….
778
RESUME……………………………………………………………………………………………………………………
889
INTRODUCTION…………………………………………………………………………………………………………
101011
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE…………………………………………
121213
CHAPITRE I :CADRE THEORIQUE DE
L’ETUDE………………………………………………………………….131314
CHAPITRE II :METHODOLOGIE………………………………………………………………………………………
333334
DEUXIEME PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSIONS……………………………………………………………
393940
CHAPITRE I: REPRESENTATIONS SOCIALES DU SANG ET ADHESION AU DON BENEVOLE DE
SANG……………………………………………………………………………………………………………………414
142
CHAPITRE II: ADHESION AU DON BENEVOLE DE SANG ET INTERACTIONS ENTRE PERSONNEL DE
SANTE ET DONNEURS DE SANG…………………………………………………………………………………...
474749
CHAPITRE III: TYPOLOGIES DE CONTRAINTES ET ADHESION AU DON BENEVOLE DE SANG……….
494951
CONCLUSION……………………………………………………………………………………………………………
565657
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………………………………………...
595960
ANNEXES…………………………………………………………………………………………………………….......62
6263
TABLE DES
MATIERES………………………………………………………………………………………………..696970

Page v
LISTE DES TABLEAUX
TABLEAU 1 : VARIABLES ET INDICATEURS ------------------------------------------------------------------------- 27
TABLEAU 2 : EVOLUTION DE LA POPULATION URBAINE DE 1916 A 2006 ------------------------------- 33
TABLEAU 3 : TABLEAU RECAPITULATIF DE L’ECHANTILLON ----------------------------------------------- 36
TABLEAU 4 : REPARTITION DES ENQUETES SELON L’AGE ------------------- ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.41
TABLEAU 5 : REPARTITION SELON LE SEXE --- ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.ERREUR ! SIGNET
NON DEFINI.41
TABLEAU 6 : REPARTITION SELON LE STATUT MATRIMONIAL -------------- ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.42
TABLEAU 7 : REPARTITION SELON LA PROFESSION --- ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.ERREUR !
SIGNET NON DEFINI.42
TABLEAU 8 : REPARTITION SELON LA CONFESSION RELIGIEUSE --------- ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.43
TABLEAU 9 : REPARTITION SELON LE NIVEAU D’ETUDE ----------------------- ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.43

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SIGLES ET ABREVIATIONS
CHR : Centre Hospitalier Régional
CNHU : Centre National Hospitalier Universitaire
CNTS : Centre National de Transfusion Sanguine
CRTS : Centre Régional de Transfusion sanguine
FISCRCR : Fédération Internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant
Rouge
PNLP : Programme National de lutte contre le Paludisme
VIH : Virus de l’immunodéficience humaine

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Résumé
L’hôpital de la ville de Ouahigouya est confronté à un problème d’approvisionnement en
produits sanguins. En effet, les besoins d’approvisionnement pour les services de santé de
la ville sont assurés par un petit nombre de volontaires. Le don de sang se fait généralement
dans un cadre familial pour sauver un membre de la famille. En outre, des croyances, des
normes sociales subsistent toujours quant à la volonté d’offrir son sang pour sauver des vies.
Quelles sont les contraintes sociales liées à l’adhésion au don bénévole de sang dans la ville
de Ouahigouya ? L’objectif du travail vise à analyser ce qui pourrait empêcher le don
bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya. Ce questionnement nous amène à formuler
l’hypothèse principale selon laquelle il y a des contraintes sociales à l’adhésion au don
bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya.
Pour répondre à cette question et vérifier l’hypothèse nous avons utilisé une approche
qualitative à laquelle soixante-cinq (65) personnes ont été interviewées. Une observation
directe a été réalisée pour compléter les entretiens effectués avec les différents acteurs.
Les résultats montrent que les répondants ont une attitude favorable à l’adhésion au don
bénévole de sang. Toutefois, des logiques socioculturelles demeurent : les non donneurs et
les anciens donneurs de sang ont évoqué la peur de voir le sang, la perception de ne pas
avoir un volume suffisant de sang dans l’organisme comme contraintes au don bénévole de
sang. Ils ont évoqué également les représentations du VIH/ sida qui influencent la collecte du
sang car la maladie reste incurable, liée au sang et est classée parmi les maladies dites
honteuses. Les donneurs et anciens donneurs ont évoqué les interactions avec les
prestataires de santé et les aspects d’ordre pratique comme entre autre, la peur des aiguilles,
la mauvaise qualité de l’accueil, la commercialisation du sang aux patients dans la structure
sanitaire, l’insuffisance de l’information sur le don de sang. En conclusion, on retient que
l’adhésion au don bénévole de sang est liée à des facteurs socioculturels et à l’utilisation du
sang dans les structures sanitaires.
Mots clés : contraintes sociales, adhésion, don de sang, représentations, Ouahigouya.

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Summary

The hospital of the city of Ouahigouya is confronted with a supply problem in blood
products. Indeed, the needs for supply for the health services of the city are assured by a
small number of volunteers. The gift of blood is generally made in a family frame to save a
member of the family. Besides, faiths, social standards always remain as for the will to offer
its blood to save lives. What are the social constraints bound to the membership in the
voluntary gift of blood in the city of Ouahigouya? The objective of the work aims at analyzing
what could prevent the voluntary gift of blood in the city of Ouahigouya. This questioning
brings us to formulate the main hypothesis according to which the social constraints
compromise the membership in the voluntary gift of blood in the city of Ouahigouya. We
emitted the hypotheses according to which the social representations of the blood and the
interactions of the persons receiving benefits of health with the donors explain the low
membership to the voluntary gift of blood. We also support that the constraints in the voluntary
gift of blood are diverse and vary according to the status of the investigated.

To verify the hypotheses we used a qualitative approach in which sixty five (65) people
were interviewed. A direct observation was realized to complete this qualitative approach.
The results show that the guarantors have an attitude favorable to the voluntary gift of blood.
However, the not donors and the former blood donors evoked the fear of seeing the blood,
the perception to have no sufficient volume of blood as constraints in the voluntary gift of
blood. They also evoked the representations on the HIV / AIDS which influence the collection
of the blood because the disease remains incurable, bound to the blood and is classified
among the shameful said diseases. The donors evoked aspects of order practical as among
others, the fear of needles, the bad quality of the welcome the marketing of the blood to the
patients in the sanitary structure, the insufficiency of the information about the gift of blood.
In conclusion, we hold that the membership in the voluntary gift of blood is bound to
sociocultural factors and to use of the blood in the sanitary structures.
Keywords: social constraints, Membership, Gift of blood, representation, Ouahigouya.

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INTRODUCTION
La transfusion sanguine joue un rôle essentiel dans la prise en charge des patients. En effet,
elle est utilisée lors des actes médicaux et chirurgicaux. Elle est également pratiquée en
maternité et en pédiatrie. En outre, le sang est indispensable dans le traitement des maladies
cancéreuses et les maladies héréditaires graves. Ainsi, le sang permet de sauver et
d’améliorer la vie des malades. C’est sans doute conscient de l’intérêt du sang dans la prise
en charge des patients que les pays s’organisent pour le rendre disponible dans les hôpitaux.
Toutefois, dans de nombreux pays, le sang n’est toujours pas disponible. Les centres de
transfusion sanguine sont confrontés à des pénuries de sang. En effet, dans plusieurs pays,
les besoins d’approvisionnement en sang pour les services de santé sont comblés par des
dons de sang provenant d’un petit nombre de volontaires. C’est pour exprimer cette
insuffisance de donneurs de sang que la Directrice du Centre National de Transfusion
Sanguine(CNTS) du Burkina Faso Dahourou (2013) affirmait : « donner son sang, c’est
sauver des vies. Mais la réalité palpable et impitoyable est qu’il n’ya pas suffisamment de
donneurs de sang. Sur cent(100) personnes au Burkina Faso, on peine à trouver un (1) seul
donneur ». La situation devient de plus en plus préoccupante au Burkina Faso car on note
une certaine stagnation des chiffres de collecte alors que les besoins en produits sanguins
ne font que croitre1.De même, il n’est pas rare d’entendre aujourd’hui des mythes autour du
sang et de la pratique du don de sang dans les populations des villes et campagnes. La
direction de la communication et de la promotion du don de sang a notifié des raisons
communément évoquées pour ne pas donner le sang telles que « j’ai peur de donner mon
sang », « je n’ai pas assez de sang pour en donner » au niveau de la population générale
burkinabé2.
L’hôpital de Ouahigouya est confronté à des difficultés de disponibilité du sang. En écoutant
les stations radio de la ville, plusieurs communiqués radiophoniques font état de malades en
attente du sang.
Cette situation n’est pas sans conséquences sur la prise en charge des patients car de
nombreux besoins en produits sanguins demeurent insatisfaits.

1 Le projet BKF/020 « appui au plan stratégique de la transfusion sanguine », étude des contraintes liées au
don de sang au Burkina Faso, année 2014

2 Direction de la communication et de la promotion du don de sang du CNTS du Burkina Faso

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Malgré la sensibilisation sur le don de sang bénévole, les populations sont réticentes à donner
leur sang. Certains donneurs potentiels (surtout les jeunes) n’interviennent que dans le cadre
d’un don de remplacement lié au besoin d’un membre de leur famille ou d’un proche. En effet,
la méfiance persiste par rapport au don du sang au niveau des populations de Ouahigouya
d’où une faible adhésion au don bénévole de sang. Or, l’Organisation Mondiale de la Santé
(OMS) et la Fédération Internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge
(FISCRCR) en 2008,réaffirmaient leur objectif commun qui est de promouvoir une culture
mondiale qui permettra d’obtenir 100% de dons de sang volontaires et non rémunérés dans
l’ensemble des pays du monde (FISCRCR,2008 ; OMS,2008). Cette recommandation se
justifie par la fréquence élevée des risques infectieux observés chez les donneurs rémunérés
et familiaux.
Plusieurs facteurs font obstacles au don de sang dans la ville de Ouahigouya mais, notre
travail de recherche aborde les contraintes sociales et culturelles. C’est cette réalité sociale
que nous souhaitons interroger. Quelles sont les contraintes sociales qui influencent
l’adhésion des populations au don bénévole de sang à Ouahigouya ? Pour mieux aborder le
sujet, le document a été subdivisé en deux (02) parties. La première partie présente le cadre
théorique et la démarche méthodologique, la deuxième partie est consacrée à la présentation
des résultats de l’étude et des discussions.

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PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

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CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE DE L’ETUDE
I.1.Revue de littérature
Il nous est apparu fondamental de faire le point des approches théoriques qui ont déjà été
menées sur la question à travers une investigation documentaire présentée de façon
thématique.

I.1.1. Théories et approche sociologiques du don de sang


Des auteurs ont analysé la question du don de sang par une approche sociologique en
utilisant des théories sociologiques. Ainsi, Titmuss (1971), s’inspirant de la conception du don
proposé par Mauss, considère le don de sang comme une interaction sociale. En effet, le don
de sang est considéré comme l’action d’un individu ou d’un groupe d’individus (donneurs)
envers une autre personne ou groupe de personnes au sein d’une société. Toutefois, il
reconnait que le don moderne est différent du don archaïque décrit par Mauss (1923). De
même Godbout (1992,2000), en se basant sur l’approche conceptuelle du don dans les
sociétés archaïques de Mauss a montré que le don est un principe d’échange de première
importance dans les sociétés modernes. Selon Godbout (2000), le don de sang ne serait plus
reçu comme un don puisqu’il lui manquerait, entre autres, la relation personnelle inhérente
au don ainsi que la troisième obligation, rendre. Henrion (2003) analyse le don de sang à la
lumière du recevoir et du rendre. A l’issue de son enquête, il illustre que le don de sang est
accueilli par certains comme allant de soi, d’autres le perçoivent comme vecteur des
caractères du donneur. Le don de sang est appréhendé comme un don unilatéral. Godbout
est critique en vers le rôle de l’Etat qui ne stimulerait pas les dispositions altruistes de l’individu
car l’intervention étatique « rompt les réseaux de don en favorisant des comportements
individualistes et technocratiques » (Godbout, 1992 :78).Selon lui, le don de sang ne
fonctionne pas grâce à l’Etat, mais malgré son intervention et les institutions sanitaires
impliquées dans sa circulation le transforment en un produit qui dénature l’esprit du don.
Certains auteurs ont soutenu que la pratique du don de sang est un héritage qui se transmet
dans la famille. Ainsi, Lee et coll. (1999) ont montré dans une étude comparant don de sang,
bénévolat et don de charité que le don de sang est la forme de don la plus influencée par la
socialisation familiale.

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Les enquêtes de Piliavin et Callero (1991) ont également montré l’influence de la famille et
des traditions familiales au premier don. Les études de Simpson (2011) ont révélé que le don
de sang peut même devenir un acte patriotique. Au Sri Lanka, plusieurs donneurs de sang
comprennent leur don comme un geste de solidarité en reconnaissance du sacrifice des
soldats pendant la guerre civile qui a secoué cette nation. Quant à Healy (2006), il a observé
des écarts entre les taux de don de sang dans les différents pays et milite pour une approche
structurelle des phénomènes. Il fait l’hypothèse que les différences dans la nature des
régimes institutionnels d’approvisionnement en sang n’auront pas seulement des impacts sur
la taille et les caractéristiques sociodémographiques des donneurs, mais sur la nature du don
lui-même, sur le sens qui lui est accordé. Pour Charbonneau et coll. (2014), le don de sang
est un geste socialement construit, qui prend sens au sein des réseaux sociaux, des groupes
et des communautés auxquelles appartiennent les individus. Piliavin et Callero (1991)
partagent cette opinion en considérant le don de sang d’un point de vue plus collectif. Des
sociologues ont également utilisé le concept de capital social pour étudier la pratique du don
de sang. Ce qui leur a permis de comprendre l’influence des réseaux sociaux sur
l’engagement social des personnes et leurs pratiques du don et de la solidarité. Ainsi,
Alessandrini (2007), en s’inspirant de la conceptualisation de cette notion par Bourdieu,
Coleman et Putnam, a cherché à mesurer les aspects sociaux et civiques des interactions
sociales. Pour Alessandrini (2007), les donneurs de sang participent davantage à des
activités de groupe et font plus de bénévolat que les non-donneurs. Pour d’autres auteurs, le
don de sang et la transfusion sanguine constituent un champ d’action stratégique spécifique.
Les médecins, les hôpitaux, la Croix- Rouge étant les acteurs sociaux de premier plan dans
l’émergence de ce champ. C’est ainsi que Meyer et Rowan (1997) illustrent que l’enjeu
premier pour ceux qui dominent le champ du don de sang et la transfusion sanguine est donc
de faire la démonstration que le système fonctionne et que les produits sanguins sont
disponibles et sécurisés. En somme, plusieurs théories et concepts ont été utilisés pour
analyser le don de sang. Certains auteurs se sont intéressés aux motivations des donneurs
de sang. D’autres en revanche avaient pour centre d’intérêt les contraintes liées au don de
sang.

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I.1.2. Contraintes liées au don de sang
Pour parler des obstacles au don de sang, on note qu’ils sont multiples et d’origines diverses :
les représentations sociales, culturelles et religieuses du sang, les peurs, le manque de
temps, le manque d’information, les contraintes socio - économiques, les facteurs
organisationnels, l’accessibilité géographique et culturelle.

I.1.2.1. Représentations sociales du sang.


Dans ce domaine, Titmuss (1971) rappelle que le sang a eu un sens symbolique et religieux
fort dans toutes les cultures et les sociétés durant des siècles et que certains auraient préféré
la mort plutôt que de recevoir du sang d’un groupe ethnique différent. Il démontre que les
raisons de ne pas donner du sang sont à peu près semblables partout : elles sont nourries
par des mythes et des peurs autour du sang. Fonteyn (2004), dans une enquête sur les
perceptions du don bénévole de sang en République Démocratique du Congo, illustre que le
don de sang touche à l’utilisation du sang dans certains rituels magico-religieux, tels que les
pactes de sang. La complexité du sang et des différents usages liés au sang sont également
des obstacles au don de sang. Abondé (2007) relevait que les pratiques mystiques faites du
sang constituent des contraintes au don de sang bénévole au Benin.
Bourgois (2010) montre que les progrès de la science n’éradiquent pas les représentations
magico-religieuses, et qu’au sein des univers les plus techniques de la médecine, les
dimensions dites « irrationnelles » sont agissantes. Elle en tire une conclusion à savoir que
la transfusion et le don de sang sont des actes culturels et symboliques. Tran (2012) partage
le même avis en montrant que pour bon nombre de personnes, le sang est perçu d’une
manière beaucoup plus complexe qu’un simple liquide organique circulant dans les veines
du corps. Pour l’auteur, le sang et la pratique du don de sang ont souvent une signification
qui varie énormément selon chaque culture parce que le sang fait partie du corps humain et
entretient la vie. Le sens symbolique ou la croyance entourant ce dernier prend parfois une
ampleur considérable par l’influence de la tradition, de la culture ou de la religion. Pour Meyer
(2005), la symbolique du sang reste encore fortement associée à l’identité d’un individu ou
d’une collectivité aux questions de lignage, de descendance, d’hérédité et de race et participe
à l’organisation sociale. Binet(1988) aborde dans le même sens en montrant que le sang est
toujours référé à quelque chose d’autre, par exemple la religion, la médecine ou la politique,
il est rarement identifié uniquement comme un simple liquide organique.
Selon Tison et al. (2007), la réticence de la communauté chinoise à faire un don de sang
s’explique par la perception du sang comme symbole de l’identité familiale, un héritage
ancestral qu’on ne partage pas facilement ou couramment avec des inconnus.

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Plusieurs conceptions au sang et à la pratique du don de sang de la communauté africaine
s’apparentent aussi à celles de la communauté chinoise comme l’a souligné Agbovi et al.
(2006) dans une étude réalisée sur le don du sang dans la population togolaise. Pour ces
auteurs, le sang est fortement associé à la notion de famille et de lignage et a souvent un
caractère sacré, de telle manière qu’on le partage seulement entre les membres de la famille.
Piliavin et Callero (1991) utilisant un cadre d’analyse de l’application du concept de normes
sociales inspiré de Gouldner (1960) citent l’exemple des Témoins de Jéhovah où le don de
sang n’est pas une pratique valorisée. Dans le même ordre d’idées, les convictions
religieuses ont été notifiées comme obstacle au don de sang en Afrique. Ainsi, Pour Agasa
et Likwela (2008), les convictions religieuses étaient citées comme une des raisons pour ne
pas donner du sang pour 11,1% des sujets enquêtés. Selon ces auteurs, outre les témoins
de Jéhovah, les croyances religieuses ont été invoquées aussi par des fidèles de certaines
sectes religieuses en République Démocratique du Congo, et au Nigéria. Pour sa part,
Atondé (2007) a noté que les convictions religieuses sont également un des obstacles au don
bénévole de sang au Bénin. Selon l’auteur, la position des témoins de Jéhovah face au don
de sang a été confirmée et explicitée lors de ses entretiens. D’après les témoins de Jéhovah
la vie et l’esprit de l’homme sont dans le sang et la loi divine qui prescrit selon Lévitique
17 :13-14 que « Ne mangez le sang d’aucune créature car la vie de toute créature, c’est son
sang ; quiconque en mangera sera retranché. » doit être respectée. L’auteur a également
signalé le refus de don de sang chez certains fidèles des Assemblées de Dieu et des églises
évangéliques évoquant cette parole de la Bible comme un interdit au don de sang au Bénin.
Plusieurs facteurs liés aux représentations socioculturelles constituent des obstacles au don
comme l’a souligné certains auteurs, d’autres par ailleurs ont fait références aux différentes
peurs pour expliquer la réticence ou le refus de donner le sang.

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I.1.2.2. Les peurs
Des études indiquent que des peurs sont mentionnées comme principales raisons pour ne
pas donner le sang. Ainsi, Pour Agasa et Likwela (2008), diverses peurs ont constitué près
du tiers des motifs de refus de donner du sang à Kisangani : peur du dépistage VIH, peur de
tomber malade, peur de perdre la force physique et spirituelle et peur des aiguilles. Plusieurs
autres études africaines dont celles de Lowink et al. (2012), Agbovi et al. (2006), Tagny et al.
(2010) ont relevé des facteurs similaires comme obstacles au don bénévole de sang. Tran
(2012) fait savoir que la liste des effets dissuasifs cités dans les recherches est longue :
l’anxiété envers le don, les inquiétudes des effets du don sur la santé en général, la peur de
découvrir que l’on souffre d’une maladie, la peur de la vue du sang, la peur d’être contaminé,
l’inaccessibilité liée aux déplacements ou aux heures d’ouverture des centres de collecte.
Quant à certains auteurs, le manque de temps est une contrainte au don de sang bénévole.
I.1.2.3. Le manque de temps
Dans une analyse comparant des non-donneurs et des donneurs occasionnels de sang,
Duboz et Cuneo (2012) confirment que le manque de temps est une contrainte importante
pour les donneurs occasionnels. Ambroise et al. (2010) ont également souligné le risque de
perte de temps comme frein au don de sang en France : conséquences du don sur l’emploi
du temps du donneur, impossibilité de pratiquer certaines activités. Cependant, une des
raisons généralement évoquées pour ne pas donner le sang par certaines populations est
l’insuffisance de l’information.

I.1.2.4. Insuffisance de l’information


L’insuffisance de l’information a été évoquée comme obstacle au don de sang bénévole par
plusieurs auteurs. Ainsi, Yao (2007) pense que depuis le début de la guerre de 2002, la Côte
d’Ivoire vit une pénurie de sang et cela a pour cause un déficit communicationnel au plan
interne et externe. Atondé (2007) abonde dans le même sens en disant que les messages
d’information par rapport au don de sang ne parviennent pas à la masse de population au
Bénin et les jeunes ne sont pas préparés pour le don de sang.
Pour Atondé (2007), les jeunes n’ont pas connaissance du rôle du sang prélevé, les
conditions de conservation, les bienfaits du don de sang pour le receveur et l’éthique du don
de sang. De même, Abondé (2007) a noté que le déficit de communication entre le personnel
de prélèvement et les donneurs constituent un frein au don bénévole de sang au Bénin. Nebié
et al. (2007) partagent cet avis en disant qu’il y a un besoin de formation du personnel qui
n’arrive pas à créer l’indispensable confiance qui peut garantir la véracité des réponses des
donneurs.

Page 17
Fonteyn (2004) a observé lors d’une enquête socio-anthropologique sur les motivations et
obstacles au don de sang bénévole à Kinshasa que les donneurs de sang ne recevaient
aucune information sur les effets secondaires du don de sang. L’insuffisance de l’information
fait que certaines populations pensent que le sang est vendu dans les hôpitaux du Burkina
Faso. Roamba 3 (2012) se demande si le sang gracieusement offert par des milliers de
donneurs bénévoles est vendu car certains malades ou parents de malades affirment avoir
bel et bien déboursé de l’argent pour acquérir le sang. Si l’insuffisance de l’information est un
obstacle au don de sang, les contraintes socio-économiques ont été évoquées pour ne pas
donner le sang.

I.1.2.5. Contraintes socio-économiques et don de sang


Les contraintes socio-économiques ont été abordées dans la littérature comme obstacle au
don de sang. Dans ce domaine, Agas et Likwela (2008) ont montré que les contraintes socio-
économiques ont constitué près de la moitié des raisons de refus de donner bénévolement
du sang sur un échantillon de 1067 individus habitant Kisangani. Pour ces auteurs, cette
raison semble dépendre en grande partie du pouvoir que l’on attribue au sang sur la santé
d’un individu : les uns craignent qu’un don éventuel de sang déséquilibre leur état de santé
qu’ils estiment fragile ; les autres pensent qu’en étant dans cette situation, leur don devrait
plutôt être rémunéré afin de leur permettre d’accéder à une alimentation capable de
« reconstituer » la quantité de sang donné. Hollingsworth et Wildman (2004) mentionnent la
possibilité que d’autres activités de la vie quotidienne tiennent les femmes occupées d’où la
faible participation des femmes au don de sang.
Alessandrini (2007), par contre, pense que cette faible participation des femmes au don de
sang est liée aux problèmes d’anémie, les réactions physiques plus intenses au don de sang,
les problèmes liés à la limite de poids minimum, l’arrêt suite à la grossesse, l’allaitement.
Misje et al. (2010) indiquent que celles qui ne donnent plus de sang citent plutôt les obstacles
pratiques ou l’inconfort par rapport au don plutôt qu’une baisse de motivation comme raison
de leur non-continuité de la pratique. Les conditions socio-économiques peuvent constituer
des contraintes au don de sang mais d’autres facteurs comme ceux organisationnels n’en
constituent pas moins des obstacles au don de sang.

I.1.2.6. Facteurs organisationnels et don de sang


Pour ce qui est des facteurs organisationnels, Ferguson (1996) mentionne que ce sont
généralement le temps d’attente, les exclusions temporaires, l’inaccessibilité due aux heures
d’ouverture des collectes.

3Courrier Confidentiel numéro 24, publié le 23 décembre 2012

Page 18
En 1996, Ferguson observait déjà l’importance des contraintes organisationnelles, car elles
expliquaient 17% de la variance de l’intention. Popovsky (2006) cite les facteurs
logistiques (temps, inaccessibilité) comme obstacle au don de sang. En plus des facteurs
organisationnels, l’accessibilité géographique et culturelle sont des contraintes au don de
sang comme l’ont si bien noté certains auteurs.

I.1.2.7. Accessibilité géographique et adhésion au don de sang


La position du centre de transfusion peut être un obstacle au don de sang. Sur cette question
Atondé (2007) fait savoir que l’installation de la banque de sang au sein du Centre National
Hospitalier Universitaire (CNHU) dans le département du littoral au Bénin est perçue par
certains des enquêtés comme un obstacle au don bénévole de sang parce que sa position
ne facilite pas le déplacement ; non seulement il faut prévoir les frais de déplacement mais
aussi il faut s’y rendre aux heures de services et les jours ouvrables afin de pouvoir faire le
don de sang. Tran (2012) a montré l’importance et l’impact des différents lieux de collecte
dans la pratique du don de sang chez la population issue des communautés ethnoculturelles
à Montréal. Tout en reconnaissant l’accessibilité géographique comme une barrière au don
de sang chez ces communautés, Tran (2012) a souligné que l’accessibilité culturelle est aussi
un frein au don de sang car certains donneurs interviewés choisissaient un autre endroit en
dépit d’une distance éloignée.
Pour Tran (2012), une des explications à ce comportement se retrouve dans les facteurs
culturels qu’il a classés en trois dimensions : les raisons qui motivent les donneurs à la
participation, la manière dont la communication est perçue et les liens familiaux et
communautaires présents dans les collectes.
Une étude réalisée par le projet BKF/020, un projet d’ « Appui au plan stratégique de la
transfusion sanguine » au Burkina Faso, a relevé qu’une des raisons avancées pour ne pas
donner le sang est l’éloignement des centres de transfusion sanguine. L’enquête américaine
de Matthew et al. (2007) confirme que pour les donneurs occasionnels l’accessibilité au
centre de collecte joue un rôle de premier plan. Les participants à leurs focus groups affirment
que la tenue de collectes au travail, à l’église ainsi que dans d’autres endroits fréquentés tels
les supermarchés, augmenteraient les chances de redonner. Cependant des études
remarquent qu’une des principales raisons mentionnées par les non- donneurs pour ne pas
avoir donné du sang auparavant est simplement que personne ne les a invités à le faire
(Duboz et coll., 2010 ; Bednall et Bove, 2011). En somme, plusieurs raisons ont été évoquées
par les populations pour ne pas donner le sang. En effet, l’étude de Bednall et Bove (2011)
montre que les donneurs et les non-donneurs ont des perceptions très différentes sur les
réticences au don de sang.

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Chez les donneurs, seuls deux (2) facteurs recueillent plus de 25% des réponses : la
difficulté de concilier le don de sang avec les autres aspects de la vie tels que le travail, la
maternité, l’allaitement. Chez les non-donneurs, neuf (9) facteurs ont recueilli plus de 25%
de réponses: la perception de n’avoir pas un volume de sang suffisant ou qu’on leur prélèvera
trop de sang (47.6%), la peur des répercussions physiques (35.3%), la peur des aiguilles
(33,3%),la peur d’impact négatif sur la santé (27.9%),la peur de contamination (27.9%), une
bouche-à-oreille défavorable de la part d’autres donneurs (32.3%), un faible engagement
personnel (29,8), les aspects pratiques (25,6%). Si certains auteurs se sont intéressés aux
contraintes liées au don de sang, d’autres ont plutôt abordé les raisons qui inciteraient les
populations à donner leur sang. l’étude menée par Bigot (2007) a montré que les éléments
qui pourraient davantage inciter les français à donner leur sang sont : si cela permettait de
soigner un membre de sa famille ou un proche (80% de la population y seraient sensibles),
s’il y avait une catastrophe ou une urgence médicale (78%), si les donneurs savaient que leur
sang est rare et recherché (71%), s’ils avaient la certitude que leur sang peut sauver des vies
(68%).
Godin et al. (2004) ont montré, dans une étude sur les déterminants de l’intention de faire un
don de sang parmi la population générale au Québec, que la présence de certaines
conditions facilitantes telles que si donner du sang prenait moins de temps, être informé que
les réserves de sang sont basses, favoriseraient la formation d’une intention plus positive. Ils
ont également abouti à la conclusion selon laquelle le degré de satisfaction envers le dernier
don de sang favoriserait l’intention de faire un don de sang dans les six (6) mois.
Il se dégage dans la littérature que plusieurs facteurs sont à l’origine de la réticence des
populations à donner leur sang. Nous constatons cependant que la majorité des études ont
été réalisées en Amérique et en Europe et auprès de populations étudiantes. De plus, ces
études n’ont pas suffisamment mis l’accent sur l’influence de la famille et de la communauté
sur le don de sang. Ces études, même si elles sont intéressantes, ne traduisent pas les
réalités du Burkina Faso. Cette revue de littérature nous a permis de mettre en évidence les
approches théoriques pour aborder notre objet de recherche.

I.2. Problématique
La transfusion sanguine permet, dans les structures sanitaires, de répondre aux besoins des
patients anémiés. En effet, les anémies constituent un problème de santé publique dans la
Page 20
plupart des pays. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estimait que 24 ,8% de la
population mondiale était anémiée en 20084. Ces anémiés sont essentiellement dues à des
maladies infectieuses (tuberculose, VIH) parasitaires et génétiques.
Au Burkina Faso, le problème des anémies est d’autant plus crucial que le paludisme,
maladie fortement anémiant, constitue la première cause de mortalité de la population. Selon
le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP), 6,9 millions de cas de paludisme
ont été enregistrés en 2013 au Burkina Faso avec 7600 décès5.
Au Centre Hospitalier Régional (CHR) de Ouahigouya, la létalité du paludisme chez les
enfants de 05 ans est sensiblement élevée. Elle était de 4,69 % en 2008 6. A cela s’ajoutent
la malnutrition, les accidents de causes diverses, les accouchements et les morsures de
serpent.
La plupart de ces anémies sont sévères et nécessitent une prise en charge urgente dont le
dernier recours est la transfusion sanguine. Sans transfusion sanguine, il est difficile, voire
impossible, de remédier à une hémorragie massive, et de nombreuses interventions
chirurgicales comporteraient des risques.7
Les autorités sanitaires du Burkina Faso, conscientes de cette situation et sur
recommandation de l’OMS, ont opté par décret N° 2000- 449/ PRES/P M/ MS du 26
septembre 2000, portant création d’un Centre National de transfusion sanguine (CNTS) puis
des Centres Régionaux de Transfusion Sanguine (CRTS) respectivement à Ouagadougou,
Bobo-Dioulasso, Koudougou, Fada-Ngourma, dans le but de rendre les produits sanguins
labiles disponibles en quantité et en qualité.
En dépit de ces efforts, force est de constater une non disponibilité de façon permanente du
sang. Ce qui entraîne une insatisfaction générale des besoins en sang. En effet, il ressort de
nos entretiens exploratoires que le déficit est réel au CNTS du Burkina Faso et cela est dû à
l’insuffisance des donneurs. Une moyenne de 15 à 20 dons est enregistrée par jour au centre
fixe du CRTS de Ouagadougou alors que le besoin journalier de la ville et de ses environnants
est de 120 poches et peut atteindre 145 poches8 en période hivernale.

Les rapports annuels du CNTS font ressortir un taux assez faible de donneurs de sang parmi
la population générale. Celui-ci se situe aux alentours de 0,35%, alors qu’il en faudrait 1à 2%
selon les estimations de l’OMS pour couvrir les besoins du pays 9 .Le Bulletin semestriel

4Prévalence de l’anémie dans le monde, 1993 à 2005, OMS, 2008


5 Dieudonné Zoungrana, Aujourd’hui au Faso du lundi 28 Avril 2014, p.2
6Rapport du service de la planification et de l’information hospitalière du CHR /Ouahigouya 2008
7 S.R. Hollan et all. Gestion des services de transfusion sanguine, OMS 1991
8Le Pays N° 5267 du vendredi 28 au 30 décembre 2012
9Le projet BKF/020 « appui au plan stratégique de la transfusion sanguine », étude des contraintes liées au don de sang au Burkina Faso, année 2014

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d’information et de rétro information de l’hôpital de Ouahigouya N° 012 du 1er septembre
2012 relevait que près du tiers des décès maternels est dû à l’anémie10.
Le Centre Hospitalier Régional de Ouahigouya, seule structure chargée de collecter du sang
pour la ville connaît des difficultés d’approvisionnement en sang. Le rapport de 2008 de la
banque de sang montre que sur 2 166 poches de sang demandées seulement 1 582 poches
ont été satisfaites soit un déficit de 584 poches. Le rapport du 1 er trimestre 2014 montre
également que sur 728 donneurs enregistrés au cours de cette période, vingt (20) sont des
donneurs de sang bénévoles11.
En somme, l’offre ne couvre pas la demande en sang à l’hôpital de Ouahigouya. Cette
situation est par ailleurs observée dans plusieurs pays d’Afrique comme l’a souligné une
étude en 2006 qui relevait que seulement 41,5% des besoins en sang pour la région africaine
de l’OMS sont couverts12.Pour pallier l’insuffisance de sang, l’hôpital de Ouahigouya concilie
les dons volontaires de sang et les dons de sang familiaux. En dépit de cette volonté affichée,
on observe que les populations n’adhèrent pas au don de sang et par voie de conséquence
le sang n’est pas suffisamment disponible. Ainsi, il faudrait s’interroger sur les contraintes
liées à l’adhésion au don de sang par les populations à Ouahigouya.
A l’hôpital de Ouahigouya, 3 966 personnes avaient besoin du sang en 201413. Pour répondre
aux besoins en sang, une moyenne de 11 dons par jour est nécessaire. Cependant les
donneurs bénévoles se font rares comme l’atteste les statistiques de 2009 de la banque de
sang. En effet, 439 donneurs bénévoles ont été enregistrés sur un total de 2 569. Pour pallier
le déficit en sang l’hôpital fait recours aux donneurs de sang familiaux qui représentaient
82.91% des donneurs de sang en 2009. Or l’OMS a recommandé à tous les pays du monde
de promouvoir le don de sang volontaire, anonyme et non rémunéré.

10 Le Bulletin semestriel d’information et de retro information de l’hôpital de Ouahigouya, N° 012 du 1er septembre 2012
11Rapport du 1er trimestre 2014 de la banque de sang de l’hôpital de Ouahigouya
12RFI, santé et médecine, journée mondiale du sang 2013
13Rapport d’activité 2014 du CHR de Ouahigouya page 73

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Le rapport 2007 de l’OMS soutient que seuls les dons de sang réguliers par des donneurs
volontaires et bénévoles permettent d’assurer un approvisionnement suffisant en sang
sécurisé. Les mêmes sources indiquent que de nombreux pays en voie de développement
font encore un appel aux donneurs de compensation pour un membre de la famille, ou aux
donneurs rétribués relativement peu sûrs. Ce faisant, l’insuffisance des donneurs de sang
bénévoles est une réalité dans les pays en développement. En effet, selon le rapport de
l’OMS de 200714sur la sécurité transfusionnelle, le taux moyen de don est de 38,1 pour1000
dans les pays développés et 2,3 pour 1000 dans les pays en développement. Pourtant Jean
Jacques le frère et Philippe Rouge soutiennent que, depuis les travaux de Mauss en 1923,
le don est le fondement du lien social. Aussi, l’entraide et la solidarité sont-elles les valeurs
liées généralement au don. Dans son Essai sur le don, Mauss (1923) indique que le refus du
don est l’équivalent d’un refus du lien social. A Ouahigouya, le lieu de collecte fixe du sang
est le centre hospitalier régional situé à environ 7km du centre-ville. Des collectes mobiles
sont souvent réalisées dans les lycées, les brigades des sapeurs-pompiers, les régiments
militaires, les églises et mosquées et tout autre lieu identifié par les associations.
L’information sur le don de sang reste insuffisante et l’hôpital avait organisé des émissions
radiophoniques en 2010.Le nombre de personnes connaissant l’importance du don bénévole
pour la réserve de la banque de sang est faible. La population ne comprend l’importance de
maintenir cette réserve de la banque de sang que quand un membre de leur famille ou un
proche est dans le besoin. De même, certains habitants de la ville de Ouahigouya ne sont
pas suffisamment informés sur les besoins réels de leur hôpital en sang et ne connaissent
pas les critères pour être donneur de sang. Les rapports entre les individus à Ouahigouya
sont surtout basés sur une ascendance commune. Les groupes sociaux entretiennent des
liens d’alliance à plaisanterie et sont fondés sur la parenté réelle, c'est-à-dire la
consanguinité. La consanguinité, selon Ghasarian (1996), crée incontestablement des liens
profonds. Toutefois les relations d’échange matrimonial entre les groupes sociaux sont de
type endogamique. C’est ainsi que dans cette ville, les forgerons et le mossi d’une part, les
griots, les peulh et les yarcé d’autre part ne se marient pas.

14 Faits et chiffres, rapport sur la sécurité transfusionnelle, OMS, 2007

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Les logiques en termes d’échange symbolique comme le don de sang dans ces groupes
sociaux se basent jusqu’à présent sur les liens familiaux et la parenté. Malgré cette stratégie
de jumeler les dons bénévoles et familiaux, les collectes fixes et collectes mobiles, le sang
n’est pas suffisamment disponible à l’hôpital de Ouahigouya. C’est ainsi que nous
chercherons à comprendre les obstacles au don bénévole de sang dans le contexte de
dynamiques de solidarités dans les villes, de persistance des peurs liées à la pandémie du
VIH/sida et des difficiles relations avec les prestataires de santé. En effet, les publications qui
ont porté sur les contraintes liées au don de sang au Burkina Faso ont orienté les réflexions
sur les obstacles médicaux. Elles ont aussi porté sur le déficit crucial du sang et des pistes
de solutions ont été proposées. Toutefois, elles n’ont pas suffisamment mis l’accent sur une
approche théorique au niveau anthropologique, symbolique et sur les aspects sociaux du
sang et du don de sang. Pour reprendre les mots de Charbonneau (2012), disons que « le
sang n’est vraiment pas une substance biologique dépourvue de ses caractères sociaux,
culturels et religieux, il demeure le générateur d’une parenté symbolique» (Charbonneau,
2012 :27).Le sang et les différents usages du sang suscitent beaucoup d’interrogations car
les cultures l’investissent de représentations. Le sang possède plusieurs dimensions. A la
fois symbolique, empirique, il renvoie à la parenté, à la religion, à la pureté. Certaines
personnes ne se prêtent une assistance mutuelle que s’ils se sont juré la confiance. Pour
tenter de consolider ce vide et s’inspirant de la règle essentielle de Durkheim (1960) à savoir
que « le social s’explique par le social », nous orienterons notre recherche sur la
connaissance des contraintes liées à l’adhésion au don de sang à Ouahigouya. Ce faisant, il
nous apparaît nécessaire de poser, dès le départ une question qui servira de premier fil
conducteur à la recherche.
 Quelles sont les contraintes sociales liées à l’adhésion au don bénévole de sang dans
la ville de Ouahigouya ? A partir de cette question principale de recherche, nous
souhaitons interroger les points suivants :
o Quelles sont les représentations socioculturelles de l’adhésion au don bénévole
de sang dans la ville de Ouahigouya ?
o Les interactions entre le personnel de la banque de sang et les donneurs de
sang influencent-elles l’adhésion au don bénévole de sang ?
o N’existe-t-il pas d’autres contraintes sociales au-delà des représentations
socioculturelles et les interactions avec le personnel ?

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I.3. Objectifs de la recherche
I.3.1. Objectif général de la recherche
L’objectif principal de la présente recherche est de contribuer à l’étude des contraintes
sociales liées à l’adhésion au don bénévole de sang à Ouahigouya.
I.3.2. Objectifs spécifiques
- Analyser les représentations socioculturelles et symboliques qui influencent l’adhésion au
don bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya.
- Décrire les interactions entre le personnel de la banque de sang du CHR de Ouahigouya
et les donneurs de sang dans la faible adhésion au don bénévole de sang.
- Faire une typologie des contraintes sociales qui empêchent l’adhésion au don bénévole
du sang à Ouahigouya.
- I.4. Hypothèses de recherche
Par rapport à nos préoccupations, nous émettons des hypothèses qui guideront notre
recherche. Ces hypothèses qui apportent d’emblée des éléments de réponses à nos divers
questionnements seront vérifiées par le terrain.

Hypothèse principale :
Les contraintes sociales et culturelles orientent l’acceptabilité au don bénévole de sang à
Ouahigouya.

I.4.1. Hypothèse secondaire 1 :


Les représentations sociales, culturelles, religieuses et symboliques du sang influencent
l’adhésion des populations au don bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya.

I.4.2. Hypothèse secondaire 2 :


Les interactions entre le personnel de la banque de sang et les donneurs (potentiels et/ou
réels) régulent les comportements sociaux dans l’adhésion au don bénévole de sang à
Ouahigouya.

I.4.3. Hypothèse secondaire 3 :


L’adhésion au don bénévole du sang à Ouahigouya intègre d’autres types de contraintes
sociales notamment la commercialisation du sang, les aspects pratiques du don de sang à
l’hôpital, l’accessibilité géographique, l’information, et les changements sociaux.

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I.5. Variables
La variable dépendante est : l’adhésion au don bénévole de sang.
Les variables indépendantes sont : les représentations sociales, culturelles, religieuses et
symbolique du sang, les interactions entre le personnel de la banque de sang et les donneurs
de sang, la diversité de contraintes, la différence de contraintes entre les donneurs, les non
donneurs et les anciens donneurs de sang.
I.6. Relations et organisation des variables, indicateurs

Tableau 1 : Tableau 1 : Variables et indicateurs

VARIABLES INDICATEURS

Les représentations sociales, - Symbolique du sang


culturelles, religieuses et - Liens de sang entre lignage, famille, parenté
symboliques du sang. - Constructions communautaires du sang
- Usage du sang, valeurs attribuées au sang
Nombre de donneurs bénévoles de sang, dons à
des inconnus, solidarité familiale
- Nombre de femmes/hommes, peur de voir le
sang, pas assez de sang.
- Nombre de groupes sociaux
- Nombre de donneurs de sang familiaux,
- Avantages du don de sang
- Inconvénients du don de sang.
- Nombre de refus de donner
- Nombre de personnes ayant accepté la
transfusion sanguine
- Nombre de donneurs par conviction religieuse
- Nombre de religion
Les interactions entre le personnel - qualité de l’accueil
de la banque de sang et les - insuffisance d’information
donneurs de sang. - usage du sang
Contraintes liées à l’utilisation du - Vente du sang
sang à l’hôpital - Utilisation à des fins mystiques
Contraintes liées aux aspects - Peurs des aiguilles, d’attraper le VIH, de découvrir
pratiques son statut VIH

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- Condition d’hygiène, la durée du don de sang, les
horaires du don, le temps d’attente
Différence de contraintes entre - Donneurs, non donneurs de sang, anciens
donneurs, non donneurs et anciens donneurs
donneurs
Contraintes liées l’accessibilité - Distance
géographique
Contraintes liées à l’information - Nombres d’enquêtés informés du don de sang
- Nombre d’enquêtés non informés du don de sang
Changements sociaux - Individualisme, égoïsme,
- solidarité sélective

I.7. Définition des concepts


La sociologie interprétative/compréhensive, inspirée de Weber, soutient qu’on ne peut jamais
analyser un phénomène social sans appareil conceptuel (Charbonneau, 2014 :50). Il est par
conséquent nécessaire de définir les concepts.
 Le sang : le sang est un tissu vivant qui distribue aux cellules du corps humain tout ce
dont elles ont besoin pour s’y maintenir en vie. En moyenne, le corps humain contient de cinq
à six litres de sang (Fondation Héma-Québec, 2006). Le sang est une ressource unique pour
laquelle la science moderne n’a pas encore trouvé de substitut artificiel. Pour Roux (1998),
toute définition du sang appelle son contraire. Le sang souille et purifie, il est masculin et
féminin, faste ou funeste, bienfaisant ou dangereux, et le répandre peut être crime ou acte
sacré. Or, selon lui, devant le sang, l’humanité en règle générale, a réagi de la même façon.
Le sacrifice sanglant fut universel, et s’il a disparu très tôt dans le monde judéo-chrétien, il
atteignit le sommet de l’horreur chez les Aztèques. Quant à Bernard (1990), le sang est à la
fois objet de fascination et d’inquiétude, familier et mystérieux, infiniment proche puisque
participant du plus intime de notre chair.
Le sang exprime la force, le courage. Il est le témoin de la transmission héréditaire des vertus.
Les héros refusent de mêler leur sang par des mariages imprudents au sang des filles
inférieures. Cros(1990) parle du tabou du sang chez les Lobi et partage l’avis de Roux.
S’inscrivant dans la lignée de Durkheim, Makarius (1974) rappelle que le tabou du sang est
le premier des tabous duquel découlent tous les autres. Pour elle, le sang menstruel est
considéré comme une matière dangereuse et interdite mais, souvent, il sert de talisman et
on lui attribue des vertus magiques. Les rituels du sang aboutissent à l’idée que le sang
éloigne tout ce qui est mauvais et on passe vite à l’idée que le sang attire tout ce qui est bon.

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C’est pourquoi cette auteure pense qu’on surdétermine alors le pouvoir du sang qui apparait
comme ambivalent, à la fois dangereux et bénéfique.
Cette ambivalence est au cœur, selon elle, des tabous. La définition du sang de Roux sera
utilisée tout le long de notre recherche.
 Le don : le don se définit comme un acte gratuit, ce qu’on donne à quelqu’un sans
s’attendre à une récompense en retour. Cette conception du don s’oppose à celle qui domine
en sciences sociales, où le don est traditionnellement réduit à un échange intéressé. Pour
Mauss (1923), le don est un mode de distribution et d’échange propre à la société archaïque
et prend la forme du don et du contre-don. C’est ainsi que Mauss pense que dans le don, il y
a, à la fois, obligation de donner, de recevoir et surtout de rendre. Le concept de « hau » est
évoqué par Mauss pour rappeler que le cadeau offert garde en lui quelque chose du donateur.
Ce faisant, le don est un phénomène sociologique.
Strauss (1948), reprenant les études de Mauss (1923), pense que l’échange dans les
sociétés archaïques n’est pas seulement économique et apparaît comme un système de
prestations totales et les femmes, par conséquent, peuvent être des objets d’échange. Pour
Strauss (1948), les structures de parentés sont liées très fortement aux formes de l’échange.
C’est pourquoi il parle d’échange restreint et d’échange généralisé .Pour sa part, Ghasarian
(1996) soutient que les principes de fonctionnement et les structures sociales des sociétés
traditionnelles ne peuvent être véritablement compris sans se référer à la parenté. Selon cet
auteur, pour survivre dans ces sociétés, les individus doivent nécessairement former des
groupes de coopération. Par conséquent, la sécurité et le destin d’une personne sont entre
les mains de ses apparentés. La parenté engendre une entraide qui est vitale pour des
activités comme la chasse, l'agriculture, la guerre, etc. Pour Godbout (1992), le don affecte
positivement ou négativement l’identité, notamment celle du receveur.
Selon Caillé (2000 :124), le don est défini comme « toute prestation de biens ou de services
effectuée, sans garantie de retour, en vue de créer, entretenir ou régénérer le lien social ».
Dans notre recherche, il est question de don de sang selon les principes de bénévolat, de
volontariat, de l’anonymat. Or, le don et l’échange de sang comme l’indique Boetsch (2011)
sont ritualisés à leur fondement car le don de sang sert non seulement dans la constitution
de liens fraternels entre les hommes (par mélange de sang ou par échange de femmes) mais
aussi dans les rapports avec le divin ou avec le monde des morts (sacrifice
humains/animaux). La définition du don selon caillé (2000) est considérée tout au long de
notre recherche.
 Les représentations sociales :ce concept désigne l’ensemble des idées, des
images, des croyances que les individus ont sur quelque chose .Selon le Dictionnaire

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de Ferréol(2002), c’est le savoir de sens commun, socialement élaboré et partagé,
construit pour la pratique et qui concourt à la structuration de notre réalité.
Une représentation est aussi la représentation de quelqu’un, lui-même en rapport avec
d’autres sujets.
Pour Abric (1988), la représentation est le produit et le processus d’une activité mentale par
laquelle un individu ou un groupe reconstitue le réel auquel il est confronté et lui attribue une
signification spécifique. Leroy (1992) pour sa part, définit un lien entre les représentations de
l’individu et le processus d’action produit par ses comportements. Différents auteurs tels que
Leyens (1997), Mucchielli (1985), De Ketele (1981), prônent une idée commune ; les
représentations déterminent nos attitudes et nos comportements. Les représentations
sociales sont aussi individuelles que collectives.
Les représentations sociales sont nées du concept sociologique de représentations
collectives énoncé par Durkheim (1898).C’est avec Moscovici (1961) que le concept de
représentation sociale s'élabore véritablement.
Pour nous et à la suite de Jodelet, les représentations sociales sont l’ensemble des idées,
des éléments informatifs, cognitifs, idéologiques, normatifs, croyances, valeurs, attitudes,
opinions, images qui permettent d’éclairer les faits sociaux (Jodelet ,1984). Mais ces
éléments sont toujours organisés sous l'espèce d'un savoir disant quelque chose sur l'état de
la réalité.
 La solidarité : étymologiquement, la solidarité appartient au langage juridique (milieu
du XVème siècle) qui signifie « commun à plusieurs, chacun répondant du tout ». Par
extension, le mot solidarité renvoie à la notion de solidité. Il indique aussi qu’il s’agit « d’un
sentiment qui pousse les hommes à s’entraider ».La notion de solidarité fait appel à la parenté
Durkheim(1893).Il distingue la solidarité mécanique (par similitude : exemple du clan ou de
la tribu) et la solidarité organique (principe de différenciation dans les sociétés occidentales).
Pour Paugam (2008), la solidarité constitue le socle de ce que l’on pourrait appeler l’homo
sociologicus : l’homme lié aux autres et à la société non seulement pour assurer sa protection
face aux aléas de la vie, mais aussi pour satisfaire son besoin vital de reconnaissance, source
de son identité et de son humanité. La définition de Paugam est retenue tout au long de notre
recherche.
 Les interactions sociales : dans l’acception courante, ce concept désigne une
relation interhumaine par laquelle une intervention verbale ou une attitude, une expression
significative ou une action provoquent une action en réponse qui retentit sur l'initiateur
(échanges).
Pour (Morin ,1977 :p.51), « les interactions sont des actions réciproques modifiant le
comportement ou la nature des éléments, corps, objets, phénomènes en présence ou en
Page 29
influence ».Selon Marc et Picard (Vocabulaire de la psychosociologie, 2006),ce concept ne
fait pas l'objet d'une définition unique "mais présente au contraire une certaine dispersion
sémantique": il désigne tantôt un processus, tantôt un objet, tantôt
un point de vue(notamment dans la perspective interactionniste) pour appréhender des
phénomènes relationnels.
Les interactions peuvent être :
 positives : coopération, participation, adaptation, intégration, émulation.

 négatives : conflit, lutte, rivalité, ségrégation, discrimination, insulte.

 ambivalentes : compétition, concurrence.

Pour Park et Burgess(1907), l’idée d'interaction n'est pas une notion de sens commun. « elle
représente l'aboutissement d'une réflexion longuement développée par les êtres humains,
dans leur inlassable effort pour résoudre l'antique paradoxe de l'unité dans la diversité, de
l'un et du multiple, pour trouver loi et ordre dans le chaos apparent des changements
physiques et des événements sociaux – et pour découvrir ainsi des explications au
comportement de l'univers, de la société et de l'homme ». Ce concept a été développé par
différents courants théoriques : l’interactionnisme symbolique Mead (1934) et l’école de
Chicago, l’ethnométhodologie Goffman (1971), la théorie de déviance Becker (1995). Ces
différents courants au-delà de la diversité de leurs approches, ont tous montré que c’est dans
et par l’interaction que se façonne l’identité sociale de l’individu, ainsi que son caractère
norme et déviant. Dans notre recherche les interactions sociales sont l’ensemble des gestes,
des regards, des paroles, des attitudes et comportements que les agents de santé
entretiennent avec les donneurs de sang.
 Parenté : ce concept désigne non seulement les rapports entre individus établis par la
naissance, la consanguinité mais aussi par l’adoption. Pour Durkheim(1893) la parenté
à laquelle donne lieu l'adoption ne s'étend pas au-delà de l'adoptant et de l'adopté.
Quant à Eideliman (2007) derrière l’appellation de parenté se cache tout un système
de représentations (distinction des parents et des non-parents, celles de différentes
classes de parents), de comportements (les attitudes à adopter varient en fonction de
la nature de la relation avec telle personne) et d’affectivité (des sentiments découlent
de ces différentes relations). Weber (2005) précise que dans la filiation on trouve des
relations de solidarité qui préservent le groupe de la dissolution et l’individu de
l’exclusion. La parenté joue un rôle essentiel dans la vie sociale. Pour Ghasarian
(1996), les principes de fonctionnement et les structures sociales des sociétés
traditionnelles ne peuvent être véritablement compris sans se référer à la parenté.

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Dans ces sociétés, l’organisation sociale coïncide avec l’organisation sociale, économique et
politique. Pour cet auteur (1996), les groupes sociaux sont fondés sur la parenté réelle
(consanguinité) ou fictive (l’adoption) et sur les relations d’alliance. Pour lui, le terme de
parenté est pratiquement une étiquette sur laquelle on peut fixer une conduite basée sur le
respect ou la familiarité ou l’hostilité, les droits et /ou les devoirs, la plaisanterie ou l’évitement
(Ghasarian, 1996 :199) . La conception de la parenté définie par Ghasarian est retenue au
cours de notre recherche.

I.8. Justification et intérêt de l’étude

I.8.1. Justification du choix du thème de l’étude


Nous avons choisi ce thème dans un contexte où la demande des hôpitaux du Burkina Faso
en produits sanguins a tendance à augmenter d’année en année tandis que le nombre de
donneurs de sang diminue. Malgré les sensibilisations sur l’utilité du sang dans les hôpitaux,
beaucoup de gens sont encore réticents à donner leur sang. Aujourd’hui, les politiques
nationales et internationales en matière d’approvisionnement en sang recommandent les
donneurs bénévoles et volontaires. Or, il est difficile de convaincre une personne de donner
son sang volontairement pour un inconnu (Caillé et Godbout 1992) avec les modifications
des structures de nos sociétés où la tendance est à l’individualisme au détriment de la
solidarité. Le sang est une ressource précieuse, sa symbolique, son don font appel à des
représentations et logiques sociales, culturelles et religieuses. Il est alors nécessaire de
s’intéresser à la dynamique et aux contraintes liées au don de sang. L’étude sur l’adhésion
au don de sang a retenu notre attention pour des raisons suivantes :

I.8.2. Intérêt et motivation personnelle


Etant travailleur à la banque de sang de l’hôpital de Ouahigouya nous avons été
personnellement sensibles aux décès causés par le manque de sang notamment en pédiatrie
et en maternité. Nous avons constaté que la population n’adhère pas suffisamment au don
bénévole de sang. La majorité des dons de sang s’effectuent dans le cadre d’un don de
remplacement face à la demande d’un membre de la famille. Pour nous, il faudrait clarifier,
donner les pistes de réflexion pour comprendre les contraintes sociales à cette adhésion.
La présente étude nous a permis de mettre en pratique les méthodologies de la recherche
et d’analyser les contraintes liées au don de sang à Ouahigouya en produisant des
connaissances dans le domaine de la sociologie et l’anthropologie de la santé.

I.8.3. Intérêt scientifique


Cette recherche permet d’apporter de nouveaux éclairages théoriques sur les perceptions et
logiques (réels ou perçus) en relation avec le don de sang. Ces connaissances pourront être

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exploitées pour favoriser la mise en place de facteurs facilitant le don de sang ainsi que le
développement d’une meilleure perception du don de sang dans la ville de Ouahigouya.
Durkheim n’a-t-il pas écrit : « nous estimons que nos recherches ne méritent pas une heure
de peine si elles ne devaient avoir qu’un intérêt spéculatif »15 ? En outre, elles peuvent être
exploitées pour des publications et des conférences. La recherche sur le sang et le don de
sang fait appel à différents secteurs de formation. Au cours de cette recherche nous avons
intégré des réflexions issues de plusieurs disciplines notamment la médecine,
l’anthropologie, la sociologie, la philosophie, la psychologie. L’interdisciplinarité favorise une
meilleure structuration des recherches et une meilleure approche des problèmes et de la
production des connaissances académiques.

15Durkheim E : « De la division du travail social », Paris, PUF, 1960, P.14

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CHAPITRE II :METHODOLOGIE
Toute recherche scientifique nécessite l’application de méthodes et techniques pour aboutir
à un résultat conforme aux questions posées. En effet, les méthodes et techniques aident le
chercheur dans l’analyse et le traitement des données pour les besoins de son étude.
II.1. Zone d’étude
Notre étude est réalisée dans la ville de Ouahigouya, dans la partie nord du Burkina Faso.
La ville de Ouahigouya correspond aux coordonnées géographiques 2,30° de longitude ouest
et 13,35 de latitude nord. Elle est située sur la nationale n°02, axe reliant Ouagadougou à
Mopti au Mali soit à 181 km de Ouagadougou, à 222 km de Mopti et à 57 km de la frontière
du Mali16.
L’évolution de la population de la commune de Ouahigouya n’a pas été uniforme comme le
révèle le tableau ci-après.

Tableau 2 : Evolution de la population urbaine de 1916 à 2006

Années 1916 1926 1935 1954 1961 1975 1985 1996 2006

Population
3 000 4 800 6 314 7 100 13 000 27 184 38 902 52 193 73 153
(habitants)
Accroissement
4,8 3,1 0,6 9,0 5,4 3,6 2,7 3,1
moyen annuel (%)
Source : Michel IZARD C et INDS/ RGPH 1975, 1985, 1996, 2006

L’évolution de la population de Ouahigouya a été marquée par une croissance modérée


jusqu’à la fin des années 1950. L’explosion démographique interviendra à la faveur de la
suppression du travail forcé. Elle prendra également de l’ampleur avec la fin de la deuxième
guerre mondiale entraînant le retour des combattants. Cet accroissement de la population
n’est pas en corrélation avec le nombre de donneurs de sang souhaité en vue de résoudre
le problème de disponibilité du sang à l’hôpital de Ouahigouya.
Avec les résultats du recensement général de la population et de l’habitat de 2006, la
commune de Ouahigouya, dans ces limites territoriales actuelles, comptait 125 030 habitants
répartis comme suit : 73 153 dans la ville (49,7% d’hommes, 50,3% de femmes) et 51 877
dans les 37 villages (47,5% d’hommes, 52,5% de femmes).
Au plan ethnique, selon le recensement de 1996, la population de l’agglomération urbaine
était dominée à 85, 6% par les mossé. Venaient ensuite les peuls (5,8%), les samo (3,2%) et
les marka (2,4%).

16Plan communal de développement Ouahigouya, 2009-2013, p.14

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Pour l’actuel territoire de la commune de Ouahigouya, on peut considérer que les ethnies
sont toujours représentées selon ces proportions. Les différents sociaux ethniques qui
existent dans la commune de Ouahigouya sont des sociétés lignagères. Avec la diversité des
courants religieux et culturels, on distingue plusieurs formes de mariage. Les différents
groupes ethniques peuvent contracter des mariages entre eux. Cependant les Peulhs
observent une forte endogamie en admettant le mariage des cousins parallèles alors que
cette forme de mariage est proscrite dans les autres groupes sociaux ethniques. Le mariage
entre certains groupes sociaux est proscrit. Selon les données du recensement 2006, les
musulmans représentaient 95,8 %, les catholiques 2.2%, les animistes 01%, les protestants
0,6%, les autres : 0,4 %.
Le plan d’action 2013 du CHR de Ouahigouya montre que la banque de sang enregistre le
plus grand nombre d’examens. Toutefois, la plupart des transfusions sont réalisées sur des
dons de sang parentaux. Ce qui ne permet pas au CHR de répondre avec diligence aux
besoins en sang des services à cause de l’insuffisance de stocks disponibles.

Figure 1 : carte géographique de la ville de Ouahigouya

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II.2. Population d’étude :
La population cible est toute personne de la ville de Ouahigouya dont l’âge est compris entre
18 et 60 ans. Cette tranche d’âge a été retenue parce qu’elle est une des conditions établies
par les directives nationales des bonnes pratiques transfusionnelles au Burkina Faso ( décret
n° 2014-589/MS du 09 juin 2014 portant directives nationales des bonnes pratiques
transfusionnelles)pour donner du sang au Burkina Faso. Cette population cible comprend
cinq(5) catégories d’acteurs :
- Une catégorie de répondants ayant déjà donné du sang au moins une fois. (considérés
comme donneurs) ;
- un groupe constitué de ceux n’ayant jamais donné leur sang (non donneurs de sang) ;
- Un groupe composé des anciens donneurs de sang ;
- Le personnel technique et administratif du CHR de Ouahigouya : médecins,
pharmaciens, infirmiers, technologistes biomédicaux, gestionnaires et administrateurs
des hôpitaux ;
- Des responsables d’associations des donneurs de sang.

II.3. Echantillonnage/ Echantillon de l’étude


La méthode d’échantillonnage est un sondage non probabiliste faisant appel à un échantillon
à choix raisonné. En prenant en compte la saturation , nous avons interviewé vingt-cinq (25)
individus n’ayant jamais donné du sang (non- donneurs), vingt-cinq(25) ayant déjà donné au
moins une fois du sang (donneurs)et sept (07) anciens donneurs de sang. En ce qui concerne
le personnel administratif et médicotechnique du CHR de Ouahigouya, le choix est fait en
tenant compte des aspects suivants :
- Le responsable chargé de la gestion des collectes de sang et son adjoint soit deux (2)
acteurs sur trente (30) agents de l’administration ;
- Pour le personnel médical et technique, quatre individus(4) sur deux cent trente et un
(231) ont été retenus parce que leur service est demandeur ou collecteur de sang. Ce
sont les agents de santé des services des urgences médico-chirurgicales, de la
maternité, de la pédiatrie, du laboratoire ;
- Deux (2) responsables de l’association des donneurs de sang BEOOGNERE de
Ouahigouya ont été interviewés. Le tableau ci- dessous représente la description de
l’échantillon de notre étude.

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Tableau 3 : Récapitulatif de l’échantillon

Catégorie de personnes Effectifs Homme Femme


Donneurs 25 14 11
Non donneurs 25 16 9
Personnel administratif 2 1 1
Personnel services techniques (Urgences médico-
4 2 2
chirurgicales, Pédiatrie, maternité, laboratoire)
Responsables d’associations 2 2 0
Anciens donneurs 7 5 2
Total 65 40 25

L’échantillon est composé de 65 individus soit 40 hommes et 25 femmes.

II.4. Méthodes, techniques et outils de collecte des données

II.4.1. Approche qualitative


Nous avons utilisé l’approche qualitative a été utilisée au cours de cette recherche en rapport
avec notre questionnement de départ qui est d’étudier les contraintes liées à l’adhésion au
don bénévole de sang en mettant en exergue les représentations sociales, culturelles liées
au sang et au don de sang. Dans notre recherche, l’approche repose sur un échantillon non
représentatif de la population. L’objectif est de montrer que les contraintes sociales liées à
l’adhésion au don bénévole de sang existent dans la ville de Ouahigouya mais, nous ne
cherchons pas à les quantifier.

II.4.2. Recherche documentaire


Les recherches documentaires ont été effectuées tout au long des différentes étapes de la
recherche. C’est ainsi que nous avons consulté des ouvrages, des revues, des rapports, des
thèses dans des bibliothèques et sur internet. Ces documents consultés ont abordé des
thématiques suivantes : le don du sang, le sang, le don en général, les représentations
sociales de la maladie, la culture et l’anthropologie, la sociologie.

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II.4.3. Outils de collecte des données
Des guides d’entretiens semi-directifs ont été utilisés pour chaque catégorie d’enquêtés (cf.
Annexes, pages 65 à 68). Ils ont été élaborés à l’aide de l’approche anthropologique « étique-
émique » (Pelton, 1970) et structurés autour des thématiques suivantes : les représentations
sociales du sang et du don bénévole du don de sang, les contraintes liées à l’adhésion au
don bénévole de sang. L’approche émique reflète les conceptions populaires de la maladie
et de la santé dans un contexte culturel donné. Selon Massé (1995) elle respecte «les
principes et les valeurs propres à un acteur donné dans une culture donnée.»
L’approche éthique respecte les conditions de la recherche scientifique caractérisée par une
connaissance rationnelle, objective et indépendante de l'observateur ; elle renvoie à la
dimension universelle du savoir médical (Massé, 1995).
De même une grille d’observation a été conçue et aborde les différentes étapes du don de
sang au laboratoire du CHR de Ouahigouya. Pour Fassin (1990 :40) « Entretien et
observation ne s'opposent aucunement. Il est même inconcevable de réaliser un travail
ethnologique (et peut-être également sociologique) sans cette double approche qui consiste
à vérifier par l'observation des faits ce qui est dit par les informateurs et à analyser ce que
l'on voit à la lumière des explications données par les acteurs. Le risque est d'ailleurs moins
de négliger l'entretien que l'observation, plus longue, plus exigeante, et l'une des erreurs
fréquemment commise au début est de s'en tenir exclusivement à ce que disent les gens de
leurs coutumes, de leurs comportements, de leurs institutions, de leur organisation sociale,
sans confronter leur discours avec l'observation directe : or c'est justement dans ces
décalages entre le dire et le faire - de même qu'entre les différents points de vue - que se
trouvent fréquemment les clés de la compréhension des faits sociaux».

II.5. Enquête de terrain


Elle s’est déroulée en deux phases : la phase exploratoire et la phase opérationnelle.
II.5.1. Phase exploratoire
Les premiers jours de l’exploration ont commencé par les demandes d’autorisation adressées
respectivement au Président de la délégation spéciale de la commune de Ouahigouya et au
Directeur général du CHR de Ouahigouya présentées en annexe. Après l’obtention des
autorisations, nous avons commencé les enquêtes comme prévu le 25 juin 2015. Auparavant,
nos guides d’entretien ont fait l’objet d’un pré-test le 15 juin à Séguénega, commune située à
55 km de Ouahigouya. Cette démarche nous a permis de revisiter certaines questions du
guide d’entretien de s’assurer de leur degré d’adéquation, de précision et surtout de la
compréhension de la part des enquêtés.

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II.5.2. Terrain ou phase opérationnelle
Cette étape a consisté à la collecte de données sur le terrain.
Nous avons commencé par la population de la ville de Ouahigouya à savoir les donneurs, les
non donneurs, les anciens donneurs, ensuite les responsables des associations et enfin les
agents de l’hôpital. Les lieux de la collecte des données pour le premier groupe d’acteurs a
été le domicile et l’hôpital entre 15 heures et 18 heures. L’entretien avec les responsables de
l’association s’est déroulé au siège entre 15heures et 17 heures. Pour les prestataires de
santé l’entretien s’est réalisé dans la matinée entre 10 heures et 12 heures 30mm. La durée
de chaque entretien a varié entre 30 minutes et 1 heure. Les entretiens ont été enregistrés,
retranscrits et résumés dans un document Word.
II.6. Considérations éthiques
Pour prendre en compte les aspects éthiques de la recherche nous avons pris des
dispositions pour respecter les conditions de la recherche scientifique. En effet, au début de
chaque entretien nous avons non seulement insisté oralement sur le consentement libre,
éclairé et le droit de se retirer mais aussi sur le respect de la confidentialité des résultats.
II.7. Traitement et analyse des données
La technique d’analyse des données qualitatives est celle de l’analyse de contenu
thématique. Elle a consisté au traitement manuel des informations recueillies en dégageant
des thèmes centraux. Dans l’analyse thématique nous avons utilisé l’approche de Quivy et
Campenhoudt (2006).
Il s’agit d’une part de procéder à l’analyse catégorielle en comparant les fréquences de
certaines caractéristiques évoquées (contraintes exprimées) et d’autre part à l’analyse de
l’évaluation qui porte sur les jugements formulés par le locuteur. Cette méthode d’analyse a
facilité la présentation et l’interprétation des résultats de la méthode qualitative.
II.8. Difficultés / limites de l’étude
Une des difficultés rencontrées dans l’étude est la réticence à répondre à certaines questions
notamment celles relatives aux relations entre les agents de la banque de sang et les
donneurs de sang lié à notre statut de prestataire de santé. Outre cette difficulté, il fallait faire
face au refus d’enregistrer les propos chez la plupart des interviewés malgré nos explications
sur l’utilisation des données à des fins de recherche. Par ailleurs notre étude présente des
limites qu’il convient de noter : la méthode d’échantillonnage non probabiliste par quotas tout
en permettant à l'intervieweur le soin de déterminer qui sera échantillonné donne lieu à des
biais de sélection.

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DEUXIEME PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSIONS

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Cette partie présente les résultats et discussions de notre recherche dans laquelle nous
analysons d’abord les représentations du sang exprimées par les enquêtés en vue de montrer
comment celles-ci peuvent constituer des contraintes sociales à l’adhésion au don bénévole
de sang. Nous décrivons ensuite comment les interactions entre le personnel de la banque
de sang et les donneurs influencent le don bénévole de sang, nous terminons par
l’identification des typologies de contraintes sociales qui compromettent l’adhésion au don
bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya. Les résultats de la présente étude ont permis
de dégager les principales contraintes de l’adhésion au don bénévole de sang dans la ville
de Ouahigouya. A la lumière du nombre de contraintes identifiées, nous pouvons affirmer que
la démarche adoptée a été efficace. En analysant les résultats nous avons décrit et agrégé
les données en rapport avec le don bénévole de sang. La discussion des résultats a consisté
à donner un sens en lien avec notre problématique de recherche et à analyser les pistes de
recherche auxquelles ces résultats nous conduisent. Pour y parvenir, revenons à notre
question de recherche qui était la suivante : quelles sont les contraintes sociales à l’adhésion
du don bénévole de sang ? Nous avons émis l’hypothèse principale selon laquelle les
contraintes sociales et culturelles orientent l’acceptabilité au don bénévole de sang à
Ouahigouya. Nous pensons également que les représentations socioculturelles et
symboliques du sang affectent l’adhésion au don bénévole du sang. Nous y ajoutons que les
interactions entre le personnel de santé et les donneurs influent sur l’adhésion au don
volontaire de sang. Nous émettons enfin l’hypothèse selon laquelle les contraintes au don de
sang sont diverses et varient selon le statut des enquêtés. C’est dans ce sens que cette partie
traite les trois (3) aspects des contraintes sociales liées à l’adhésion au don bénévole de
sang.

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CHAPITRE I : Représentations sociales du sang et
adhésion au don bénévole de sang
II.1. Représentations sociales du sang
Les perceptions du sang exprimées par nos enquêtés sont multiples et variées. Pour la
plupart des personnes interrogées (donneurs, non donneurs, anciens donneurs de sang,
hommes et femmes) le sang est le symbole de la vie et de la mort comme l’attestent les
discours des enquêtés :
« Le sang est comme l’essence dans une moto, sans carburant elle tombe en panne, sans
sang c’est la mort » (ON, instituteur, 40 ans, non donneur 25/06/2015).
« Le sang est la source de la vie, donc il est précieux » (L S, étudiante, 26ans, donneuse
25/06/2015).
« Le sang est une denrée vitale et précieuse » (S O, Particulier, 45 ans, ancien donneur
26/06/2015). « Le sang c’est la vie, sans sang on ne peut pas parler de vie humaine. » (O, S,
cultivateur, 48 ans, donneur 10/07/2015). Pour certains répondants le sang a un lien avec la
famille.
II.1.1. Sang et liens familiaux
Le sang est également considéré par les donneurs, non donneurs et anciens donneurs de
sang comme « l’idiome dominant » Carsten (2011) par lequel s’expriment les relations de
parenté. Il établit un lien entre les individus issus du même père, de la même mère et du
même ancêtre éponyme d’où les expressions utilisées par un des enquêtés pour exprimer
les liens de sang :
« Nous sommes du même « kurwiiri » pour dire que nous sommes du même père, ou nous
sommes du même « pendé » en lien avec la même mère , il est sacré.» (O S, cultivateur,
48ans, donneur, 2 fois). Un lien existe également entre le sang et la communauté à laquelle
on appartient.20/07/2015
« J’ai donné mon sang quand les ressortissants de Yako vivant à Ouahigouya ont organisé
une collecte de sang. » (ZR, cultivateur 26 ans, donneur, 1 fois 20/07/2015). Comme les
perceptions du sang, les différents usages faits du sang humain exprimés par les répondants
sont variés : il s’agit des usages thérapeutiques, magico-religieux, mystiques.
II.1.2. Sang et rites thérapeutiques
Le sang est utilisé à des fins thérapeutiques. C’est le point de vue exprimé par un des
répondants : « Le sang est utilisé pour sauver des vies humaines dans les hôpitaux, c’est
pourquoi chacun doit donner le sang » (RR, élève 20 ans, donneur, 1fois 01/07/2015).
Le sang est également utilisé pour réaliser des examens du groupe sanguin, du test du sida.
Les propos de ces deux non donneurs de sang le soulignent :

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« Le sang est utilisé pour effectuer des bilans de santé. J’étais parti un jour pour faire le test
du diabète et du sida et l’infirmier m’a fait une prise de sang » (TO, instituteur, 34 ans non
donneur). « Le sang est utilisé pour soigner les malades à l’hôpital. » (KH, ménagère, 30ans,
non donneuse 07/07/2015).
II.1.3. Sang, rites mystiques et rites magico-religieux
Selon certains enquêtés, le sang est utilisé à des fins mystiques. C’est dans ce sens que
deux enquêtés non donneurs déclarent que :
« Il semble que certains utilisent le sang à des fins pécuniaires et renforcent leur pouvoir »
(S.M. instituteur, 43ans, non donneur 08/07/2015).
« Le sang est utilisé pour faire des gris-gris dans le but d’avoir beaucoup d’argent », (ZA,
Instituteur 35 ans, non donneur 10/07/2015).
Le sang est également utilisé pour des rites magico-religieux comme affirme cet enquêté :
« Le sang est utilisé dans les rites d’initiation (ZA, Instituteur 35 ans, non donneur
10/07/2015).
En somme, il ressort de l’analyse des représentations sociales que les usages du sang sont
d’ordre médical, mystique, magico-religieux. Ces représentations sociales ne constituent-
elles pas des contraintes à l’adhésion au don bénévole de sang ?
II.2. Influence des représentations socioculturelles et religieuses du
sang sur l’adhésion au don de sang
II.2.1. Représentations socioculturelles du sang et adhésion au don de sang.
Les résultats de l’étude montrent que la totalité des enquêtés ayant déjà donné leur sang et
la plupart de ceux n’ayant jamais donné leur sang ont une attitude favorable au don bénévole
de sang. Un enquêté disait : « Eh bé, le don bénévole de sang est un geste solidaire,
patriotique, qui sauve des malades. Il faut donner son sang parce qu’un jour toi-même ou tes
proches auront besoin.» (SF, étudiante, 22 ans, donneuse, 11/07/2015). Un autre
ajoutait que le don de sang est « un bon système qui sauve les malades » (BM, 23 ans, élève,
non donneur). Et que « Celui qui est en bonne santé doit donner son sang. » car c’est « Un
geste charitable 11/07/2015 ». Ces opinions sont partagées par les anciens donneurs, les
agents de santé et les responsables des associations de donneurs bénévoles de sang. Le
don bénévole de sang est donc socialement valorisé par les enquêtés. La quasi-totalité des
enquêteurs expriment des opinions favorables à l’adhésion au don bénévole de sang. Par
ailleurs, des non donneurs, des anciens donneurs pensent que le don de sang n’est pas
compliqué. Ce geste de don de sang devrait aller de soi. Cependant le passage à l’acte de
don bénévole de sang est lié à des contraintes.

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Nos observations au cours de l’étude nous ont permis de constater que la population de
Ouahigouya n’adhère pas suffisamment au don bénévole de sang.
Par ailleurs la grande majorité de ceux qui donnent leur sang sont des hommes. La plupart
des adhésions au don de sang se font dans le cadre d’un don pour sauver un parent comme
l’atteste un des enquêtés.
« Aucun parent n’est tombé malade, c’est pourquoi je n’ai pas encore donné mon sang. Le
jour qu’un membre de ma famille aura besoin du sang je vais donner».( LP, non donneur,
30ans 11/07/2015). Plusieurs raisons expliqueraient ce refus de faire le don de façon
bénévole comme souhaitent les praticiens du savoir médical.
Plusieurs facteurs empêchent les enquêtés de s’engager à la pratique du don bénévole de
sang. Les contraintes évoquées spontanément diffèrent selon que l’on est donneur, non
donneur ou ancien donneur. Pendant que les non donneurs de sang et anciens donneurs
évoquent plus les contraintes socioculturelles, les donneurs de sang interrogés ne citent que
les contraintes liées aux aspects pratiques du don à l’hôpital.
Selon les non donneurs et les anciens donneurs de sang les représentations socioculturelles
du sang sont évoquées pour expliquer l’adhésion au don bénévole de sang. Il faut noter la
récurrence de la peur de voir le sang et la perception de ne pas disposer assez du sang dans
son corps comme freins au don de sang. Voici des extraits tirés des entrevues des non
donneurs et anciens donneurs de sang sur les contraintes au don de sang : j’ai peur de voir
le sang et surtout mon propre sang, c’est pourquoi, je ne souhaite pas donner mon sang (NA,
cultivateur, non donneur, 26 ans 11/07/2015). Pour R M, ménagère 39 ans, non donneur, « la
peur de voir le sang est une contrainte au don de sang, d’ailleurs je n’ai pas assez de sang
pour donner et j’ai peur de la couleur rouge du sang », « Je fume et je bois, mon sang est
plein d’alcool, je n’ai pas assez de sang 12/07/2015» disait JB, 29 ans, gardien non donneur.
Les anciens donneurs évoquent également les représentations du sang comme freins au don
de sang. C’est le cas de ZH, un ancien donneur de sang, « j’ai 45 ans, je pense qu’à cet âge
je ne produis pas un bon sang». S B, une ancienne donneuse de sang, 38 ans soutient qu’elle
n’a pas assez de sang « je n’ai pas assez de sang, je donnais mon sang quand j’étais jeune
fille mais depuis mon premier accouchement je ne donne plus mon sang 14/07/2015 ». Un
autre répondant parle des représentations culturelles du sang comme contraintes au don de
sang. Voici ce qu’il en pense à propos du don bénévole de sang à Ouahigouya « au Yatenga
ici, y a des gens qui ne veulent pas que leur sang soit mêlé à d’autres personnes. Le
phénomène de castes existe toujours ici malgré l’islam et le christianisme ; il y a des familles
qui ne se marient toujours pas entre elles. » (K B, non donneur, 46 ans 20/07/15.)
Le sang reste intimement lié à la famille comme l’atteste un des enquêtés lorsqu’il déclare
que «Je ne donne mon sang qu’à un membre de ma famille. Même l’argent, penses-tu qu’on
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peut donner de l’argent à quelqu’un qu’on ne connait pas ? » (S.S., non donneur, cultivateur,
20 ans, 20/07/15). C’est pour montrer cette influence de la famille sur la pratique du don
bénévole de sang qu’un Professeur nous a expliqué ce qui suit : « Nous avons réalisé un don
de sang au lycée et il fallait s’inscrire à l’avance. A la veille, beaucoup d’élèves s’étaient
inscrits, près de quatre cent (400). Le jour de la collecte, une centaine s’était présentée. Nous
avons cherché à comprendre et certains élèves ont affirmé que leur parent leur avait dit de
ne pas donner le sang » (T I, Professeur, non donneur, 38 ans, 20/07/2015). Les données du
rapport d’activité de 2014 du Centre Hospitalier Régional de Ouahigouya confirment cette
tendance du don familial de sang. En effet, sur 4245 poches collectées, 3982 proviennent de
donneurs familiaux et la plupart sont de sexe masculin. En outre, sur la question de savoir
« avez-vous encouragé les membres de votre famille à donner son sang à un inconnu ? »,
une minorité des non donneurs disent l’avoir fait. Par contraste, une majorité des donneurs
affirment avoir encouragé les membres de leur famille à faire le don bénévole de sang. Une
partie des agents de santé partagent cette vision. C’est dans cette optique qu’affirme un agent
de santé « les considérations culturelles sont des obstacles à l’adhésion au don bénévole de
sang. Jusqu’ à présent, certains ne veulent donner leur sang qu’à des parents proches. Ils
préfèrent garder leur sang pour qu’en cas de besoin d’un membre de leur famille, ils puissent
le satisfaire ». SP, 42 ans, infirmier 21/07/2015. Dans la même logique un prestataire de
santé pense que « des convictions personnelles, des croyances culturelles peuvent expliquer
la non adhésion au don bénévole de sang. Ils sont libres de donner à qui ils veulent. Le choix
est vite fait entre un parent et quelqu’un qu’on ne connait pas. » Z A, attachée de santé de
santé 44 ans 22/07/2015.
II.2.2. Représentations religieuses du sang et adhésion au don bénévole de
sang
Dans la ville de Ouahigouya plusieurs religions sont pratiquées. Certaines religions
encouragent le don du sang. C’est ainsi que des adeptes organisent des collectes de sang
dans leur lieu de prière. D’autres en revanche déconseillent la pratique du don de sang. C’est
dans ce sens que soutient un des répondants :
« Ma religion ne m’autorise pas à donner du sang ni à recevoir du sang. Le sang est le
symbole de la vie. La bible dit de ne manger du sang d’aucune créature. Or la transfusion
consiste à absorber d’une manière ou d’une autre du sang. Nous avons besoin des soins de
qualité sans transfusion sanguine. Le seul sang qui sauve c’est le sang de Jésus. Pour de
plus ample renseignement je vous donne cette brochure » (O.E., étudiante, 29 ans
15/07/2015).
Bien que la grande majorité des non donneurs, des anciens donneurs, des donneurs de sang
et les responsables d’association n’évoquent pas la religion comme contrainte au don
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bénévole de sang, quelques prestataires de santé pensent que les convictions religieuses
compromettent l’adhésion au don de sang.
C’est le cas de ZS et OJ qui reconnaissent que la religion est un facteur limitant l’adhésion
au don de sang dans la ville de Ouahigouya. « Je pense que certaines personnes n’adhèrent
pas au don de sang à Ouahigouya par convictions religieuses. Vous n’êtes pas sans ignorer
que certaines religions ne font pas la promotion du don de sang. » (ZS, 36 ans, infirmier,
23/07/2015.)
« Les croyances religieuses sont des raisons qui empêchent les populations de donner le
sang. En fait, certaines religions n’encouragent pas leurs fidèles à donner leur sang. » ( OJ
attachée de santé 44 ans 22/07/2015). Malgré cette attitude favorable au don bénévole de
sang constatée chez les enquêtés, ceux-ci expriment des contraintes liées à l’acte qu’il
convient d’interpréter.
Les répondants font référence aux représentations populaires du sang lorsqu’ils s’expriment
sur les contraintes liées au don bénévole de sang. En effet, les enquêtés ont des
représentations du sang qui conditionnent son don. Selon Charbonneau (2012) le sang n’est
vraiment pas une substance comme une autre. Il vient du corps humain et est chargé de
représentations culturelles, sociales et religieuses. Une représentation sociale est toujours
définie par un contenu : informations, images, normes et modèles, opinions, croyances,
attitudes, valeurs. Mais, une représentation est aussi, et de manière inséparable, la
représentation de quelqu’un (Jodelet, 1984). Ainsi, la peur de voir le sang, la perception de
ne pas avoir assez de sang dans l’ organisme, la symbolique du sang qui est lié à la famille,
au lignage ainsi que de son usage sont des contraintes couramment évoquées par les non
donneurs et les anciens donneurs de sang pour ne pas donner le sang.IL se pose la question
de savoir comment partager une partie de leur corps qu’est le sang selon les principes
fondamentaux de bénévolat, de volontariat et d’anonymat prônés par la médecine moderne.
Nos résultats montrent que le sang revêt des symboles profonds qui limitent son don. En
effet, nos enquêtés ont montré que des mythes, des superstitions et des croyances
religieuses sur le sang subsistent et demeurent des contraintes au don bénévole de sang.
Par conséquent ces représentations sont des contraintes à vaincre en vue de la promotion
du don de sang. Les représentations sociales, culturelles et religieuses et symboliques du
sang sont parmi les contraintes pour lesquelles les répondants ne donnent pas leur sang de
façon bénévole. En ce sens, nos résultats sont similaires aux travaux antérieurs. En effet,
Durkheim (1897) propose de s’intéresser aux croyances associées à la prohibition de
l’inceste.
Il remarque en effet que celle-ci s’accompagne toujours de la crainte du sang. C’est que le
sang aurait des vertus magiques qui obligeraient à en fuir le contact et même la simple vue.
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Cependant, interroge Durkheim, « si les vertus magiques attribuées au sang expliquent
l’exogamie, d’où viennent-elles elles-mêmes ? […]
La réponse à cette question se trouve dans le principe même sur lequel repose tout le
système religieux dont l’exogamie dépend, à savoir le totémisme » (Durkheim, 1897 : 99).
Titmuss (1971), note que les raisons de ne pas donner du sang sont nourries par des mythes
et des peurs autour du sang. Charbonneau et al. (2012), Agas et Likwela (2008) ont
mentionné respectivement les facteurs socio- culturels et religieux comme contraintes au don
bénévole de sang au Québec et en République démocratique du Congo. La perception de
ne pas avoir le sang tant évoquée par les répondants est surtout remarquable chez les
enquêtés de plus 40 ans. Pour les chinois du Québec, les raisons avancées par les adultes
de plus que 40 ans pour ne pas donner le sang proviennent d'une ancienne croyance issue
de leur médecine traditionnelle qui considère que le sang qui se régénère est de moins bonne
qualité que le sang d’origine. Donc le don du sang nuirait à la santé des donneurs de sang.
Pour la plupart des donneurs enquêtés le don de sang s’inscrivait dans le cadre d’une
obligation familiale c'est-à-dire « donner son sang » pour sauver un membre de sa famille.
Nos résultats montrent que le sang est perçu non pas comme un liquide simple qui circule
dans l’organisme mais une substance plus complexe et symbolique. Si le sang est partagé
dans un système de volontariat, de bénévolat et de l’anonymat dans les pays occidentaux,
dans la ville de Ouahigouya la pratique du don de sang se fait généralement dans le cadre
des solidarités familiales. Le sang est fortement lié à l’identité d’un individu et aux relations
de lignage, de descendance. Cette observation concorde avec les travaux de
Durkheim(1897) sur la question du lignage .Il déclarait que « les membres du clan se
considèrent comme formant une seule chaire […] et cette chaire est celle de l’être mythique
d’où ils sont tous descendus » (Durkheim, 1987 : 100). Le caractère sacré, divin, attribué à
l’ancêtre mythique se retrouve donc dans le sang des membres du clan. Or, ajoute encore
Durkheim, « le tabou [étant] la marque mise sur tout ce qui est divin » (Durkheim, 1897
:102).Comme nous l’avons constaté à travers nos résultats le sang est une ressource si
précieuse que la majorité des enquêtés ne donnent qu’aux membres de la famille ou à des
proches.
La famille reste donc un facteur important dans la pratique de don de sang. Tison et al. (2007)
démontrent que la réticence de la communauté chinoise à faire un don de sang s’explique
par la perception du sang comme un symbole lié à la famille.
Selon Sutterluty (2006), une grande partie des populations de l’Europe centrale perçoivent
le sang également de cette manière.
Le don de remplacement est encore fortement pratiqué en Inde malgré une politique nationale
pour supprimer cette pratique entre membres de la famille.
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A Trinidad et Tobago, Parmasad note que donner son sang à un inconnu n’est pas une idée
partagée par tout le monde. Quant à Agovi et al. (2006) le sang est fortement associé à la
notion de famille et de lignage et a souvent un caractère de sacré qu’on le partage seulement
entre les membres de la famille. En donnant le sang à un membre de leur famille, le don est
matérialisé car certains de nos enquêtés veulent savoir à qui est destiné leur geste. Si
certaines personnes sont favorables à donner leur sang à des inconnus, nos résultats ont
montré que la majorité de la sous population des personnes n’ayant jamais donné du sang
sont réticentes. Par conséquent, la réserve de la banque de sang de l’hôpital se trouve
affectée d’où des pénuries fréquentes en produits sanguins. Contrairement à la médecine
moderne qui préconise les dons volontaires anonymes c’est à dire des dons de sang à des
inconnus (Godbout et Caillé, 1992), nos enquêtés ont des logiques qui prônent des solidarités
familiales autour du don de sang. L’idée de partager son sang sans tenir compte des
particularismes sociaux, culturels et religieux dans un esprit de solidarité planétaire n’est pas
acceptée par certains enquêtés. Nous assistons donc dans la ville de Ouahigouya à une
solidarité restreinte dans le cadre du don de sang c’est-à-dire des solidarités de proximités
(Roth, 1996).Les résultats montrent également que les donneurs et les anciens donneurs de
sang mettent en exergue leurs interactions avec le personnel de la banque de sang comme
freins à l’adhésion don bénévole de sang à Ouahigouya.

CHAPITRE II : Adhésion au don bénévole de sang et interactions


entre personnel de santé et donneurs de sang
Parmi les contraintes sociales liées à l’ adhésion au don bénévole de sang dans la ville de
Ouahigouya, la plus préoccupante, bien que la plus inaperçue est celle des relations difficiles
entre le personnel de la banque de sang et les donneurs de sang. En effet, les relations
difficiles évoquées dans le cadre des soins de santé touchent également les donneurs de

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sang. Les conséquences des interactions entre les prestataires de santé et les donneurs de
sang sont souvent irréparables à cause des informations relayées de bouche à oreille dans
la ville. C’est dans sens que des opinions émises pendant notre enquête ont montré que la
mauvaise qualité de l’accueil est le facteur commun cité comme frein au don de sang par les
anciens donneurs et les donneurs de sang. Voici le témoignage que nous avons recueilli des
donneurs de sang :

«Certains agents de la banque de sang ne sont pas accueillants, ils sont arrogants, ils te
chassent souvent. Un jour j’ai envoyé un parent qui avait besoin du sang. Le docteur m’a dit
de trouver des gens pour donner le sang car le sang manque. J’ai trouvé une personne plus
moi. Il m’a dit que deux personnes c’est insuffisant, il faut cinq personnes. Or, je ne peux
trouver cinq personnes. Où trouver des gens cette nuit. Malgré mes explications il ne m’a pas
écouté » (OJ, 36 ans donneur,25/06/2015) qui a voulu citer des noms, un autre a fait
référence à leurs moyens de déplacement et à leur taille.
« Une fois, j’ai rencontré le Monsieur qui a la moto x, il n’est pas du tout accueillant, il néglige
les gens. Ce que les docteurs ne comprennent pas, tu peux ne pas résoudre le problème de
quelqu’un mais si l’explique clairement la personne va comprendre. Si lui manque de respect
ah là …»
« Le Monsieur grand de taille là n’est pas facile, tu arrives, on dirait la bagarre, il faut que
l’hôpital soit regardant au niveau de l’accueil, si non les donneurs vont fuir. Il ne prend même
pas le temps de t’écouter. Un jour ma femme avait besoin du sang, j’ai amené le papier remis
par la sage-femme pour aller chercher le sang au laboratoire. A peine pris le document, il m’a
répondu il n’y a pas de sang et il est rentré dedans, je ne pouvais même plus le parler »
(Donneur, 37 ans 26/06/2015). Les témoignages de certains enquêtés montrent qu’ils
connaissent bien les prestataires de la banque de sang du CHR de Ouahigouya. Par contre
certains enquêtés sont satisfaits des conditions d’accueil comme l’atteste les opinions émises
par ceux-ci :

« Les agents de santé sont accueillants, ils font un bon boulot. Le jour de mon don de sang,
il y avait beaucoup de gens qui étaient là pour le problème de sang pour leurs malades. J’ai
donné mon sang et après, l’agent de santé m’a donné une poche de sang. C’est quelqu’un
qui respecte les gens. Que Dieu le garde longtemps dans ce travail et augmente son savoir
» (Donneur, 27 ans, 10/07/2015). « Les agents sont gentils, le jour de mon don, on s’est
entendu avant qu’il me prélève. Il m’a tout expliqué. Il a dit qu’on peut donner et puis le
numéro ne correspond à mon malade. Il a aussi dit qu’il fait le test du sida et un rendez-vous

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m’a été donné pour savoir des résultats des tests et le numéro de mon sang : c’est mardi et
jeudi soir. J’ai duré ce jour mais mon malade a été bien servi.» (Donneur, 42 ans, 20/07/2015).
Nos observations directes nous ont permis de constater l’existence de problèmes au niveau
de l’accueil des donneurs. Certains donneurs n’ont pas hésité à manifester leur
mécontentement face à certains propos des agents de la banque de sang. De même, nous
avons constaté que la collation n’était pas suffisante. Des donneurs qui avaient des vertiges
n’ont pas eu de boisson. La banque de sang est intégrée au laboratoire d’analyses
biomédicales et les prestataires de santé ne sont pas suffisamment préparés pour les
activités de don de sang. Nos observations au cours de l’enquête nous ont également permis
de constater que les agents de santé sont souvent débordés par une forte demande en
produits sanguins. Les accompagnants et les malades ne sont pas satisfaits comme ils le
souhaitent. Les interactions entre le personnel de santé et les donneurs de sang contribuent
à une faible adhésion au don de sang en ce sens que la mauvaise qualité de l’accueil ne
favorise pas la fidélisation des donneurs de sang. Aussi, la mauvaise qualité de l’accueil est
un facteur d’inaccessibilité des soins comme le montrent Jaffré et Olivier De Sardan (2003
:105) « l’accessibilité n’est pas liée exclusivement et principalement des facteurs financiers :
c’est plutôt la mauvaise qualité de l’accueil qui est fortement en cause. Autrement dit, l’accès
aux services de santé du point de vue des usagers est largement influencé par la qualité des
interactions avec les agents de santé », La mauvaise qualité de l’accueil est plus exprimée
par les donneurs et les anciens donneurs. Cette situation pourrait s’expliquer par l’expérience
effective vécue par les donneurs de sang et les anciens donneurs de sang lors de la collecte
de sang.

CHAPITRE III : Typologies de contraintes et adhésion au don


bénévole de sang
IV.1. Contraintes en rapport avec l’utilisation du sang à l’hôpital
L’utilisation du sang dans l’hôpital de Ouahigouya a été évoquée par les non donneurs et
anciens donneurs de sang comme contrainte au don de sang. Les opinions émises par ces
enquêtés explicitent la méfiance vis-à-vis des agents de santé par rapport à l’utilisation du
sang à d’autres fins. Voici les témoignages des non donneurs de sang et anciens donneurs :
« je ne donne pas mon sang parce que le sang collecté est vendu aux patients. De plus, la
prise en charge des donneurs de sang n’est pas à la hauteur » (O R, Intendant, non donneur,
37 ans). Un autre répondant partage le même sentiment quand il dit que « je ne donne pas
mon sang pour deux (2) raisons : la peur que mon sang soit vendu et la peur que mon sang
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soit utilisé à des fins mystiques. » Il ajoute que « dans un pays où la corruption a atteint tous
les secteurs de la vie, on n’en sait jamais » (S.Z., instituteur, non donneur, 35 ans,
08/07/2015).
Plusieurs non donneurs de sang ont affirmé que le sang est vendu dans les hôpitaux. Un seul
ancien donneur pense que le sang est vendu « le sang est vendu à l’hôpital (hésitations).
Partout, les gens cherchent l’argent. Je ne dis pas que c’est tous les agents de santé qui le
font, mais, il faut reconnaitre qu’il ya certains, ce n’est pas facile hein. » (O K, ancien donneur,
46 ans,20/07/2015). Une partie des prestataires de santé interrogés partagent cette vision.
La position de cette attachée de santé est typique « la déformation de l’information fait que
certains parlent de vente de sang à l’hôpital. En, les frais d’examen sont considérés comme
frais de sang. Il faut clarifier ces deux aspects pour qu’on puisse savoir la vraie information.
Peut-être c’est que c’est vrai (rires) mais personne ne peut confirmer ça. Certains
accompagnants peuvent être victimes de cette mauvaise gestion du sang. » O, J attachée
de santé 44 ans,22/07/2015. Au-delà des contraintes liées aux représentations sociales du
sang et des interactions entre le personnel et les donneurs, d’autres contraintes relatives à
la gestion du sang, aux aspects pratiques du don de sang et aux changements sociaux
compromettent l’adhésion au don bénévole de sang. C’est ainsi que les études de Fonteyn
(2004), Bourgeois (2010), Atondé (2007) montrent que les différents usages du sang c’est à
dire les prescriptions et les proscriptions qu’il suscite font que la population est réticente au
don bénévole de sang. Il ressort de nos entretiens que le sang est vendu. Or, le sang a une
valeur symbolique et ambivalente. Si le sang est vendu peut-on parler de don ?

Malgré un poster affiché à la porte du laboratoire du CHR de Ouahigouya indiquant que le


sang n’est pas vendu, une majorité des enquêtés affirment que le sang est vendu et se
positionnent contre la vente du sang. Toutefois à notre connaissance rares études ont intégré
les représentations sociales du sang, les interactions avec les prestataires de santé et
l’utilisation du sang dans à l’hôpital dans la même analyse comme nous le faisons dans cette
étude sur l’adhésion au don bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya.
IV.2. Contraintes liées aux aspects pratiques du don de sang et adhésion au
don bénévole de sang
Plusieurs contraintes liées aux aspects pratiques du don de sang ont été soulignées par les
donneurs et les anciens donneurs de sang. Il s’agit des risques de contracter certaines
maladies notamment le VIH, la peur de découvrir sa maladie en donnant le sang, les
conditions d’hygiène, la peur des aiguilles, l’absence de collation.

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IV.2.1. Don de sang et VIH : perception des enquêtés
Les témoignages de nos enquêtés montrent que le VIH/sida reste une maladie redoutable.
C’est pourquoi certains de nos enquêtés ont toujours peur de connaitre leur statut sérologique
à travers le don de sang. Des donneurs et des non donneurs affirment avoir peur d’être
dépisté du VIH en donnant leur sang. Comme illustre ce témoignage de G N « la maladie là
même n’a pas de médicament, elle est liée au sang et au sexe » (27 ans, non donneur
25/06/2015). « Le sida a fait que les gens ont peur de donner le sang » (Donneur, 32 ans
26/06/2015). Les agents de santé et les responsables des associations des donneurs de
sang pour la plupart pensent que la peur de découvrir la sérologie VIH au cours du don de
sang est une contrainte à l’adhésion au don de sang. Les propos de ce prestataire de santé
et d’un responsable d’une association de donneurs de sang sont illustratifs :
« La peur de connaitre son statut sérologique empêchent la population d’adhérer au don de
sang. Certains préfèrent ne pas connaitre leur sérologie VIH. C’est l’ignorance dans la
sécurité. » OP attaché, 37 ans 22/07/2015
« Le sida est venu compliquer le don de sang. Tout le monde sait qu’en prélevant le sang, on
va faire le test du sida, donc chacun a peur de donner son sang. » M Z, Responsable d’une
association de donneurs de sang 23/07/2015
La crainte de la maladie par les enquêtés justifie que ces derniers ne sont même pas prêts à
recevoir leur résultat. Ce point de vue est partagé par un agent de santé « Nous estimons
qu’environ 55% des donneurs de sang ne reviennent pas pour recevoir les résultats du test
VIH post don. La peur du VIH demeure dans les esprits. »
La crainte d’attraper le sida lors de la collecte est présente dans les opinions des donneurs
et les anciens donneurs d’où leur regard sur les conditions du prélèvement pendant le don.
Les informations collectées montrent que les conditions d’hygiène du don de sang sont bien
perçues par les donneurs enquêtés. Pour S G, (Donneur éducateur de jeune enfant, 45 ans
20/07/2015), les conditions d’hygiène font que je suis réticent à donner mon sang de peur
que par imprudence j’attrape le sida. ».Cependant, la plupart des donneurs enquêtés trouvent
que les conditions d’hygiène lors des collectes de sang sont satisfaisantes.
Selon la majorité des donneurs comme YN, donneur, 29 ans, 20/07/2015 « la salle de
prélèvement est propre, les agents de santé nettoient le site de prélèvement avec de l’alcool
avant de prélever le sang. Les conditions d’hygiène lors du prélèvement sont bonnes et
surtout le nouvel hôpital est propre. » Nos observations directes au cours de l’étude nous ont
permis de relativiser l’application des conditions d’hygiènes lors du don de sang. En effet,
certains agents réutilisent le tampon imbibé d’alcool servi pour aseptiser le site de
prélèvement. Par contre, les aiguilles, les poches de collecte de sang sont à usage unique.
Une autre contrainte évoquée par les anciens donneurs est l’absence de collation pendant la
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collecte de sang. Les propos de OD le soulignent « il n’y a plus de boisson et de sardine
comme avant. C’est vrai qu’on ne donne pas son sang à cause de ça, mais ça peut rendre le
don de sang plus intéressant. ».38 ans, ancien donneur 19/07/2015. Dans les cinq groupes
où a été menée l’enquête, les résultats montrent que tous ont déjà entendu parler du
VIH/sida. Cependant, la maladie demeure préoccupante malgré l’existence des traitements
anti retro viraux. En effet, des stéréotypes liés au VIH demeurent dans la ville de Ouahigouya.
Ce faisant, certains de nos enquêtés ne connaissent pas leur statut sérologique. Aussi, les
peurs de contracter le VIH et de connaitre son statut sérologique sont prégnantes au sein
des enquêtés. Un échantillon de réponses à cet effet est illustratif : certains donneurs comme
V.S. disent que « le sida n’est pas une maladie comme les autres », et d’autres non donneurs
comme YANK affirment : « on peut facilement dire qu’on a le palu mais pas le sida 01/07/2015
».
Le VIH/sida a accentué la désaffection des populations pour le don de sang. Les registres
dans lesquels le sang est évoqué empruntent les représentations sociales et culturelles de
l’infection du VIH/sida. L’apparition du VIH a changé la conception que les populations
faisaient du sang. En effet, cette maladie mortelle et incurable a rappelé aux hommes le
danger de contracter un mal par le biais du sang. Aussi, les enquêtés ont-ils évoqué la peur
d’attraper le VIH au cours du don de sang et la peur de connaitre leur statut sérologique du
VIH comme des freins à l’adhésion au bénévole de sang.

L’épidémie du sida constitue encore un problème de santé publique avec des représentations
liées à cette maladie. Ainsi, les stéréotypes font que le VIH n’est pas comme les autres
maladies. C’est pourquoi la majorité des répondants ne connaissent pas leur statut
sérologique du VIH. Ils ont peur qu’on découvre leur statut en donnant leur sang.
Les malades infectés par le VIH ne vivent pas en dehors de la société à laquelle ils
appartiennent. Les hommes ont des représentations sociales et culturelles du VIH qui
généralement culpabilisent les malades. La santé dans ce contexte renvoie aux croyances,
aux valeurs et aux coutumes qui sont culturellement pratiquées. Si le don bénévole de sang
est un acte de solidarité d’où sa dimension sociale, l’aspect mortifère du VIH et les
représentations de cette maladie influencent la pratique du don de sang. L’angoisse
d’attraper des maladies incite certains donneurs de sang à s’intéresser à l’hygiène et aux
matériels utilisés lors des collectes de sang. La plupart de nos réponds sont satisfaits des
conditions d’hygiène et le matériels utilisés. Atondé (2007) a montré dans son étude que
certains enquêtés doutaient du matériel utilisé lors des collectes de sang au Bénin. Certains
avaient peur d’être contaminés par une maladie d’où leur réticence au don de sang.

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IV.2.2. La peur des aiguilles, une contrainte qui n’est pas marginale chez les non
donneurs
La peur des aiguilles est une des contraintes les plus fréquemment évoquées par les non
donneurs. De même, les anciens donneurs la citent comme frein au don bénévole de sang.
Ces trois extraits d’entrevues donnent un aperçu des opinions de non donneurs et d’anciens
donneurs de sang. « L’aiguille est tellement grosse que j’ai peur » mentionne z s, 46 ans,
ancien donneur 18/07/2015. Un autre enquêté évoque également la peur des aiguilles
comme contrainte au don de sang « j’ai peur des aiguilles, je ne veux pas qu’on me
pique. » Ms, un non donneur de sang, 39 ans .S I (cultivateur, 26 ans, non
donneur19/07/2015), un participant à l’enquête affirme qu’il a la peur des aiguilles et la
douleur de la piqure.
Les non donneurs et anciens donneurs de sang interviewés dans le cadre de notre étude
mentionnent donc la peur des aiguilles comme une contrainte à l’adhésion au don de sang.
Mais la peur des aiguilles, mentionnée, n’est-elle pas aussi le reflet d’une croyance culturelle
ancienne et bien peu « rationnelle » portant sur la crainte et le dégoût associés au
franchissement de la frontière du corps dont on doit protéger l’intégrité (Douglas, 1966)?

Une autre contrainte liée aux aspects pratiques du don est la gestion du temps d’attente lors
des collectes du sang.
Des donneurs de sang pensent que le temps d’attente est long.
Voici les témoignages des donneurs « Dans l’hôpital il n’ya pas de représentation du centre
de transfusion sanguine, je constate que les agents de santé sont débordés si bien que la
collecte ne se fait pas dans les meilleures conditions. Le temps d’attente est très long »
(Donneur, plus de 4 dons, attaché en droits humains, 41ans 15/07/2015). Aussi la perte de
temps s’est-elle révélée comme obstacle au don bénévole de sang dans la présente étude.
Le processus du don de sang semble être long. De plus, l’activité du don de sang est intégrée
dans un laboratoire effectuant d’autres examens de routine. Ce faisant, certains donneurs
peuvent perdre du temps et gardent pas conséquent une mauvaise image.
IV.3. Insuffisance de l’information et adhésion au don bénévole de sang
Une des contraintes sociales à l’adhésion au don bénévole de sang dans la ville de
Ouahigouya est la méconnaissance de la pratique du don de sang. Une partie des non
donneurs disent qu’ils ne savent pas qu’on peut faire un don volontaire de sang.

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« Je ne sais pas qu’on peut aller donner son sang comme ça. Pour moi, c’est quand un parent
a besoin de sang qu’on fait appel aux membres de la famille. Personne ne m’a sollicité
d’abord. Si on peut le faire, un jour je partirai donner mon sang.» (RI, non donneur 30 ans,
cultivateur 17/07/2015 )
« Honnêtement, je ne sais pas qu’on peut donner le sang à quelqu’un qu’on ne connait pas.»
(SP, non donneur 38 ans, cultivateur 19/07/2015)
Quelques prestataires de santé partagent cette vision.
« La méconnaissance du don bénévole de sang fait que la population n’adhère pas. En fait
c’est l’ignorance ». Un responsable d’une association de donneur de sang de Ouahigouya
est également d’avis que la méconnaissance est une contrainte à l’adhésion au don de sang
« Ceux qui ne veulent pas donner leur sang ne comprennent pas le don de sang. Ils n’ont
pas les vraies informations sur la pratique ». Nos résultats montrent que certains enquêtés
ne savent pas qu’on peut donner le sang bénévolement et dans l’anonymat. L’information sur
le don de sang reste insuffisante. Dans la littérature, l’insuffisance de l’information au sujet
du don de sang a été notifiée par des auteurs.
Selon Yao (2007), Atondé (2007) l’insuffisance de l’information est une des barrières au don
bénévole de sang.
IV.4. Accessibilité géographique et adhésion au don de sang
La distance n’en demeure pas moins un frein au don bénévole de sang telle que exprimée
par les répondants. Le lieu de don de sang dans la ville de Ouahigouya est l’hôpital situé à
environ sept (7) km du centre comme nous l’avons souligné dans la problématique.
C’est pourquoi, certains pensent qu’on ne peut faire autant de sacrifices de façon bénévole.
Selon les non donneurs et les anciens donneurs de sang interrogés, l’éloignement de l’hôpital
du centre-ville est une contrainte à l’adhésion au don bénévole de sang à Ouahigouya.
« L’hôpital est tellement éloigné de la ville qu’il est difficile de se déplacer pour un acte
gratuit. » (MS non donneur 39 ans, 11/07/2015)
« L’hôpital est très distant de là où je loge. Il faut un litre pour un aller-retour. Je pense que
pour que les populations adhèrent au don de sang il faut créer un lieu de prélèvement en
plein centre-ville.» (Z S ancien donneur, 46ans14/07/2015.)

IV.5. Adhésion au don bénévole de sang et changements sociaux


Selon les agents de santé interrogés, les changements sociaux intervenus dans nos sociétés
expliqueraient la faible adhésion au don bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya. Ils
mentionnent l’égoïsme, l’individualisme comme frein au don de sang. Il est à souligner
qu’aucune autre catégorie d’enquêtés ne fassent recours à ces changements pour expliquer
la faible adhésion au don de sang en dehors des agents de santé. Les positions de ces

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prestataires de santé le montrent bien. « Nous vivons dans un monde où l’égoïsme et
l’individualisme sont en train de se développer. Les gens ne pensent qu’à eux-mêmes. S’ils
n’ont pas d’intérêt en donnant le sang, ils ne le feront pas. Je pense que c’est une des raisons
qui font que les gens n’adhèrent pas au don de sang. Certains ne veulent donner leur sang
qu’à des parents proches. » (OA, 38 ans attaché de santé 22/07/2015.)
« Selon moi, l’égoïsme est la raison qui empêchent les gens de donner leur sang. C’est un
choix délibéré pour certains de ne pas donner. Ils n’ont souvent pas de raisons valables. C’est
pourquoi, je pense que ceux qui acceptent donner le sang sont des personnes charitables. »
K F attachée de santé, 44 ans, 22/07/2015. Les agents de santé ont évoqué l’égoïsme et
l’individualisme pour expliquer la faible adhésion au don de sang.
Les mêmes raisons ont été avancées par Villien (1985 :7) pour expliquer la désaffection au
don de sang lorsqu’il déclare « En période difficile, on se replie sur soi, on refuse de penser
à la mort. Or le sang fait penser à la mort ».

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CONCLUSION
Le don bénévole de sang est apprécié aussi bien chez les donneurs, les non donneurs, des
anciens donneurs que chez les responsables des associations de donneurs de sang et les
prestataires de santé. Il permet d’améliorer la prise en charge des patients. Toutefois, notons
l’existence d’un hiatus entre les représentations et la réalité dans l’adhésion au don de sang.
Les contraintes compromettent l’adhésion au don bénévole de sang dans la ville de
Ouahigouya. Dans la présente étude, les résultats montrent que les représentations
socioculturelles du sang telles que la vue du sang, la perception de ne pas avoir assez de
sang et le lien de sang avec la famille sont des contraintes à l’adhésion au don bénévole de
sang. Les résultats montrent également le rôle éminemment important des prestataires de
santé dans l’adhésion au don du sang car la mauvaise qualité de leur accueil a été notifiée
par une majorité des donneurs et des anciens donneurs. Les résultats ressortent les
différences de contraintes sociales de l’adhésion au don bénévole de sang entre les non
donneurs, les donneurs et anciens donneurs de sang. Cependant, les résultats de notre
recherche ne peuvent pas être extrapolés à la population générale de la ville de Ouahigouya.
Toutefois nous pouvons identifier d’ores et déjà des contributions à la recherche provenant
de nos travaux. En effet, cette recherche a nécessité une approche pluridisciplinaire d’où la
combinaison des approches disciplinaires sociologique, anthropologique, biomédicale. Cette
approche est privilégiée compte tenu du caractère exceptionnel du sang empruntant des
considérations de la parenté, de l’ethnicité, de la religion, de la biomédecine. Par conséquent,
l’étude de l’objet « sang » nécessite l’utilisation des différents ordres de savoir. La méthode
qualitative a été utilisée dans l’objectif de mieux comprendre les représentations et attitudes
sur le sang, le don bénévole de sang et de modéliser les contraintes liées à son don. C’est
ainsi que pour ce présent mémoire la méthode qualitative par entretien et par observation a
été réalisée pour explorer et expliquer les représentations sociales du sang et les contraintes
au don bénévole de sang. Les résultats de l’enquête montrent que la pratique du don de sang
ainsi que l’usage du sang à des fins médicales ne sont que le reflet du social, du culturel et
du religieux. Cette étude est pertinente en ce sens qu’elle apporte de nouvelles
connaissances sur les obstacles à l’adhésion au don bénévole de sang. Ces connaissances
peuvent servir pour développer des stratégies en vue de promouvoir la pratique du don
bénévole de sang. Toutefois, il existe, comme dans toute recherche, des faiblesses à prendre
en compte dans l’interprétation de nos résultats. La saturation des données surtout chez les
anciens donneurs de sang n’est pas assurée pour ce présent mémoire. C’est pourquoi nous
devons prendre en considération cette observation dans l’analyse des données.
Cependant, l’utilisation de la technique de triangulation Denzin (1978) en combinant les
entretiens, les observations et en diversifiant les participants à l’enquête est une manière de
Page 56
renforcer la fiabilité des résultats. Nos résultats obtenus sur le terrain ne s’écartent pas des
hypothèses émises dans le cadre théorique. Nous pouvons donc soutenir que nos résultats
font dans le sens des trois hypothèses. Toutefois nos hypothèses doivent être nuancées car
à l’analyse des résultats nous avons constaté que les contraintes sociales, culturelles et
religieuses et les contraintes médicales et d’ordre pratique ne sont pas contingents et
s’infiltrent mutuellement. Ce mémoire nous a donc permis d’analyser les représentations du
sang, du don de sang ,d’identifier et de mieux comprendre les contraintes liées à l’adhésion
au don bénévole de sang dans la ville de Ouahigouya. Ces différentes contraintes influencent
le don bénévole de sang. Ainsi, certains pensent qu’on ne peut pas donner son sang à un
inconnu. Dès lors, peut-on compter sur les dons bénévoles de sang dans une société
moderne où les solidarités sont plus rationnelles ? Les solidarités restreintes ne sont-elles
pas celles qui marchent dans le cadre du don de sang ? Une autre question qui mériterait
d’être explorée plus avant est celle du lien entre les jeunes et l’adhésion au don bénévole de
sang.
A l’issue de cette étude nous formulons les recommandations suivantes à la direction de
l’hôpital de Ouahigouya et au Ministère de la santé:
RECOMMANDATIONS
Les recommandations présentées ci-dessous visent essentiellement à donner des pistes
d’intervention afin de convaincre la population à surmonter les contraintes liées au don de
sang : A cet effet, nous pensons qu’il faudrait développer des stratégies de communication
et de marketing qui visent à diminuer les barrières et obstacles (réels ou perçus) au don
bénévole de sang. Il s’agit surtout de :
1. Formuler des messages qui rassurent la population que le sang donné bénévolement
n’est pas vendu une majorité des non donneurs pensent que le sang donné gratuitement est
vendu.
2. Développer des messages invitant à partager le sang sans tenir compte des
particularités familiales, raciales, sociales, culturelles, religieuses, ethniques en insistant sur
les avantages liées au don bénévole de sang. Cette recommandation est pertinente d’autant
plus que la majorité des donneurs enquêtés affirment avoir donné à un membre de leur
famille. Elle est d’autant plus pertinente que 93% des donneurs de sang en 2014 au CHR
de Ouahigouya sont des donneurs familiaux.
3. Matérialiser la destination du don (témoignages de bénéficiaires et de donneurs
bénévoles de sang).
4. Le don du sang touche à l’intégrité physique de la personne. Lui sont, en effet,
attachées de nombreuses peurs liées à la peur des piqûres, du sang ou de contracter des
maladies (Lemmens et al. 2009). C’est donc un acte associé à un risque physique perçu
Page 57
élevé. Il faut, dès lors, convaincre les non donneurs et donneurs de surmonter leur peur des
aiguilles et du sang et démentir encore l’idée reçue selon laquelle il y aurait des risques de
transmission virale ou infectieuse lors du don.
5. Convaincre la population de la ville de Ouahigouya à réaliser le test de dépistage du
VIH d’autant plus des non donneurs ont peur de connaitre leur statut sérologique en donnant
leur sang.
6. Informer précisément les populations sur le temps nécessaire pour réaliser un don de sang.
7. Améliorer la qualité de l’accueil certains enquêtés qui ne pratiquent plus le don de
sang évoquent comme raison cette variable. Une meilleure qualité de l’accueil va fidéliser
certainement les donneurs.
8. Encourager les donneurs fidèles à être des ambassadeurs du don de sang.
9. Rendre fonctionnel le Centre Régional de Transfusion sanguine de Ouahigouya (Ministère
de la santé).

Page 58
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages généraux
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BRITTEN A-F-H., 1992, L’organisation d’un service de transfusion sanguine. OMS, 161
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ROUX J-P., 1998, le sang : mythes, symboles et réalités, Fayard, 407p.

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une thèse de doctorat ou tout autre travail universitaire à l’ère du Net Paris, 196 p.
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QUIVY R. & VAN CAMPENHOUDT L., 2006, Manuel de recherches en sciences
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Ouagadougou, thèse de médecine, Université de Ouagadougou, 65 p.
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au Burkina Faso : états des lieux et proposition de solutions. Master complémentaire en
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septembre 2014.
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doctorat à l’université Paris 4 ,1 page
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http://www.revuedumauss.com.fr/Pages/MMAUSS.html
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EIDELIMAN, J-S., 2007, « les anthropologues et l’idéologie du sang, comment définir
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de sang parmi la population générale du Québec, rapport de recherche présenté à Hem-
Québec, 49 p
.

Page 61
ANNEXES
Annexe 1 :

Guide d’entretien au près des donneurs, des non donneurs et anciens donneurs de
don de sang.

Ce guide d’entretien est élaboré dans le cadre d’un mémoire pour l’obtention d’un Master en
sociologie option développement social à l’université Catholique d’Afrique de l’Ouest (UCAO)
Bobo- Dioulasso. IL a pour but de cerner les obstacles sociaux et culturels au don bénévole
de sang à Ouahigouya. Nous vous prions de bien vouloir répondre à nos questions ci-
dessous. Veuillez prendre note que les données et informations recueillies sont
confidentielles et seront utilisées uniquement à des fins de recherche.
I. Représentations socioculturelles, religieuses et symboliques du sang
 Perception du sang
 Qualificatifs donnés au sang
 Liens de sang
 Peur du sang
 Usage du sang
 Croyances aux rites magico- religieux
II. Représentations du don bénévole de sang
 Opinion sur le don bénévole de sang
 Qualificatifs attribués au don bénévole de sang
 Contexte, circonstance du don de sang
III. Contraintes socioculturelles et religieuses liées au don bénévole de sang
 Influence des représentations du sang sur le don de sang
 Lien entre la religion et le don bénévole de sang
 Influence de la famille sur le don de sang
 Impact du VIH sur le don bénévole de sang
 Opinion sur les différentes étapes du don de sang (appréciation de l’accueil du
personnel, enregistrement, prise des constantes, prélèvement, collation)
 Informations connues sur le don bénévole de sang
 Raisons qui vous empêchent de donner bénévolement votre sang (les non donneurs)
 Raisons avancées pour ne pas continuer à faire le don bénévole de sang (anciens
donneurs)
 Raisons qui pourraient vous empêcher de donner votre sang (donneurs de sang)

Page 62
Annexe 2 :

GUIDE D’ENTRETIEN AUX PERSONNELS DES SERVICES UTILISATEURS DES


PRODUITS SANGUINS ET AUX PERSONNELS ADMINISTRATIFS

Ce guide d’entretien est élaboré dans le cadre d’un mémoire pour l’obtention d’un Master en
sociologie option développement social à l’université Catholique d’Afrique de l’Ouest (UCAO)
Bobo Dioulasso. Il a pour but de cerner les obstacles sociaux et culturels au don bénévole
de sang à Ouahigouya. Nous vous prions de bien vouloir répondre à nos questions ci-
dessous. Veuillez prendre note que les données et informations recueillies sont
confidentielles et seront utilisées uniquement à des fins de recherche.

Nom enquêteur

Numéro questionnaire

I. IDENTITE DE L’ENQUETE

Age Sexe Statut matrimonial

Niveau d’étude Confession religieuse

Profession

II. Représentations sociales, culturelles et religieuses liées au don de sang

. Images associez-vous au don de sang ?

. Que pensez des donneurs bénévoles de sang ?

Que pensez des non donneurs de sang ?

III. Contraintes socioculturelles et religieuses liées au don bénévole de sang

- Combien de malades ont refusé du sang par conviction religieuse dans votre
service ?(2014)

- Selon vous pourquoi la population de Ouahigouya n’adhère pas au système de don


volontaire de sang ?

Veuillez recevoir nos sincères remerciements pour votre disponibilité.

Page 63
Annexe 3 :

GUIDE D’ENTRETIEN AUX RESPONSABLE DE LA BANQUE DE SANG


DEOUAHIGOUYA
Ce guide d’entretien est élaboré dans le cadre d’un mémoire pour l’obtention d’un Master en
sociologie option développement social à l’université Catholique d’Afrique de l’Ouest (UCAO)
Bobo Dioulasso. IL a pour but de cerner les obstacles sociaux et culturels au don bénévole
de sang à Ouahigouya. Nous vous prions de bien vouloir répondre à nos questions ci-
dessous. Veuillez prendre note que les données et informations recueillies sont
confidentielles et seront utilisées uniquement à des fins de recherche.
Nom enquêteur
Numéro questionnaire
I-IDENTITE DE L’ENQUETE
Age Sexe Statut matrimonial
Niveau d’étude Confession religieuse
Profession
II. Représentations sociales, culturelles et religieuses liées au don de sang
- Quelles images associez-vous au don de sang ?
- Que pensez des donneurs bénévoles de sang ? Que pensez des non donneurs de
sang ?
III. Contraintes sociales, culturelles et religieuses liées au don bénévole de sang
- Selon vous quelles sont les raisons qui les empêchent de donner leur sang ?
- Combiens de donneurs de sang sont revenus pour les résultats des examens post
don ?
- Combien de donneurs bénévoles de sang avez reçu en 2014 ?
- Combien de donneurs familiaux avez reçu en 2014 ?
- Combien de poches avez-vous éliminées pour maladies ? (VIH)
- Combien de femmes ont donné leur sang en 2014 ?
Veuillez recevoir nos sincères remerciements pour votre disponibilité.

Page 64
Annexe 4 :

GUIDE D’ENTRETIEN A L’ENDROIT DES RESPONSABLES DES


ASSOCIATIONS DES DONNEURS BENEVOLES DE SANG

Ce guide d’entretien est élaboré dans le cadre d’un mémoire pour l’obtention d’un Master en
sociologie option développement social à l’université Catholique d’Afrique de l’Ouest (UCAO)
Bobo- Dioulasso. IL a pour but de cerner les obstacles sociaux et culturels au don bénévole
de sang à Ouahigouya. Nous vous prions de bien vouloir répondre à nos questions ci-
dessous. Veuillez prendre note que les données et informations recueillies sont
confidentielles et seront utilisées uniquement à des fins de recherche.
Nom enquêteur
Numéro questionnaire
I-IDENTITE DE L’ENQUETE
Age Sexe Statut matrimonial
Niveau d’étude Confession religieuse
Profession
II. Représentations sociales, culturelles et religieuses liées au sang et au don de
sang
- Pourquoi avez-vous choisi la promotion du don de sang ?
- Quelle perception avez-vous du sang ?
- images associez-vous au don de sang ?
- Que pensez des donneurs bénévoles de sang ?
- Selon vous, quelles sont leurs motivations ?
- Que pensez des non donneurs de sang ?
III. Contraintes sociales et culturelles liées au don bénévole de sang
- Selon vous quelles sont les raisons qui les empêchent de donner leur sang ?
Veuillez recevoir nos sincères remerciements pour votre disponibilité.

Page 65
Annexe 5 : GRILLE D’OBSERVATION DIRECTE

 L’accueil
 L’enregistrement
 La prise des constantes
 Le prélèvement
 La collation

Page 66
Annexe 6 : autorisation d’enquête

Page 67
Annexe 7 : autorisation d’enquête

Page 68
TABLE DES MATIERES
DEDICACE----------- ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- IIII
REMERCIEMENTS --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------III
ÉPIGRAPHE--------- ------------------------- ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.IV
AVANT PROPOS--- -------------------------------------------------------------------------------------------------------------- IVIVV
SOMMAIRE---------- --------------------------------------------------------------------------------------------------------------- VVVI
LISTE DES TABLEAUX ------------------------------------------------------------------------------------------------------- VIVIVII
SIGLES ET ABREVIATIONS----------------------------------------------------------------------------------------------------- 778
RESUME-------------- ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 889
INTRODUCTION---- ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 101011
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE ----------------------------------------- 121213
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE DE L’ETUDE ------------------------------------------------------------- 131314

I.1.Revue de littérature ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 131314


I.1.1. Théories et approche sociologiques du don de sang ------------------------------------------------------------- 131314
I.1.2. Contraintes liées au don de sang. ----------------------------------------------------------------------------------- 151516

I.2 Problématique ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 202022

I.3. Objectifs de la recherche --------------------------------------------------------------------------------------------------- 252526


I.3.1. Objectif général de la recherche ------------------------------------------------------------------------------------ 252526
I.3.2. Objectifs spécifiques -------------------------------------------------------------------------------------------------- 252526

I.4. Hypothèses de recherche --------------------------------------------------------------------------------------------------- 252526


I.4.1. Hypothèse principale : ------------------------------------------------------------------------------------------------ 252526
I.4.2. Hypothèse secondaire 1 :--------------------------------------------------------------------------------------------- 252526
I.4.3. Hypothèse secondaire 2 :--------------------------------------------------------------------------------------------- 252526
I.4.4. Hypothèse secondaire 3 :--------------------------------------------------------------------------------------------- 252526

I.5. Variables ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 262627

I.6. Relations et organisation des variables, indicateurs ------------------------------------------------------------------ 262627

I.7. Définition des concepts ----------------------------------------------------------------------------------------------------- 272728

I.8. Justification et intérêt de l’étude. ----------------------------------------------------------------------------------------------- 31


I.8.1. Justification du choix du thème de l’étude. ----------------------------------------------------------------------------- 31
I.8.2. Intérêt et motivation personnelle ----------------------------------------------------------------------------------- 313132
I.8.3. Intérêt scientifique ---------------------------------------------------------------------------------------------------- 313132
CHAPITRE II : METHODOLOGIE ------------------------------------------------------------------------------------------- 33

II.1. La zone d’étude --------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 33

II.2. Population d’étude : ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 35

II.3. Echantillonnage/ Echantillon de l’étude --------------------------------------------------------------------------------- 35

II.4. Méthodes, techniques et outils de collecte des données ---------------------------------------------------------------- 36


II.4.1. Approche qualitative -------------------------------------------------------------------------------------------------------- 36
II.4.2. Méthodes de recherche ------------------------------- Erreur ! Signet non défini.Erreur ! Signet non défini.36
II.4.3. Recherche documentaire --------------------------------------------------------------------------------------------------- 36
II.4.4. Outils de collecte des données -------------------------------------------------------------------------------------------- 37

II.5. Enquête de terrain. ----------------------------------------------------------------------------------------------------------- 37


II.5.1. Phase exploratoire. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 37

Page 69
II.5.2. Terrain ou phase opérationnelle ------------------------------------------------------------------------------------------ 38

II.6. Considérations éthiques ----------------------------------------------------------------------------------------------------- 38

II.7. Traitement et analyse des données ---------------------------------------------------------------------------------------- 38

II.8. Difficultés / limites de l’étude ----------------------------------------------------------------------------------------------- 38


DEUXIEME PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSIONS -------------------------------------------------------------------- 39
CHAPITRE I : CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DES ENQUETES. -------- ERREUR !
SIGNET NON DEFINI.ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.41
CHAPITRE II :REPRESENTATIONS SOCIALES DU SANG ET ADHESION AU DON BENEVOLE DE
SANG.----------------- ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 414145

II.1. Représentations sociales du sang ------------------------------------------------------------------------------------ 414145


II.1.1. Sang et liens familiaux ----------------------------------------------------------------------------------------------- 414145
II.1.2. Sang et rites thérapeutiques. ----------------------------------------------------------------------------------------- 414145
II.1.3. Sang, rites mystiques et rites magico-religieux ------------------------------------------------------------------ 424246

II.2. Influence des représentations socioculturelles et religieuses du sang sur l’adhésion au don de sang -- 424246
II.2.1. Représentations socioculturelles du sang et adhésion au don de sang. --------------------------------------- 424246
II.2.2. Représentations religieuses du sang et adhésion au don bénévole de sang ---------------------------------- 444448
CHAPITRE III : ADHESION AU DON BENEVOLE DE SANG ET INTERACTIONS ENTRE PERSONNEL
DE SANTE ET DONNEURS. ------------------------------------------------------------------------------------------------ 474752
CHAPITRE IV : TYPOLOGIES DE CONTRAINTES ET ADHESION AU DON BENEVOLE DE SANG
494953

IV.1. Contraintes en rapport avec l’utilisation du sang à l’hôpital. ---------------------------------------------------- 494953

IV.2. Contraintes liées aux aspects pratiques du don de sang et adhésion au don bénévole de sang ------------- 505054
IV.2.1 Don de sang et VIH : perception des enquêtés ------------------------------------------------------------------------ 515154
IV.2.2. La peur des aiguilles, une contrainte qui n’est pas marginale chez les non donneurs ------------------------- 535356

IV.3. Insuffisance de l’information et adhésion au don bénévole de sang --------------------------------------------- 535357

IV.4. Accessibilité géographique et adhésion au don de sang ------------------------------------------------------------ 545457

IV.5. Adhésion au don bénévole de sang et changements sociaux ------------------------------------------------------ 545458


CONCLUSION-------- ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 565659
BIBLIOGRAPHIE--- ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 595961
ANNEXES------------ ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 626264
TABLE DES MATIERES ----------------------------------------------------------------------------------------------------- 696971

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