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Inga Walc-Bezombes
Pour nous, près de deux cents ans plus tard, il s’agira plutôt de tenter
une relecture de textes célèbres, aujourd’hui tombés parfois dans
l’oubli, mais à la portée considérable et déjà très célèbres dès leur
parution.
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1
En Pologne, pour des raisons de politique intérieure, mais aussi de rapports avec les
monarchies voisines (la Russie de Catherine II, l’Autriche de Joseph II et la Prusse
de Frédérique le Grand), la Révolution française fut suivie de très près par les élites
politiques et intellectuelles. Les parents de Mickiewicz appartiennent à une noblesse
pauvre et déclassée et ceux de Sáowacki sont liés de près aux milieux d’enseignants
et professeurs de Krzemieniec et Vilno ; dans un cas ou dans l’autre, il s’agit de
milieux particulièrement attentifs aux évènements, bien que nous ne puissions pas
parler d’« engagement révolutionnaire ».
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Puis, comme le dit assez justement Hugo : « L’Orient (…) est devenu une
préoccupation générale »4… Les débuts des jeunes poètes s’échelonnent
de 1820 à 1830 et prennent la forme d’odes ou de ballades : en 1820,
Mickiewicz publie à Vilnius son Ode à la jeunesse ; deux ans plus tard,
Hugo édite à Paris Odes et poésies diverses ; en 1822, Mickiewicz
rassemble ses poèmes dans un volume intitulé Ballades et romances,
lui aussi édité à Vilnius ; quant à l’Ode à la Liberté, la première œuvre
de Sáowacki, elle est publiée en 1830 en pleine insurrection à Varsovie.
Leurs poèmes orientalistes appartiennent donc à une œuvre déjà mûre
du point de vue stylistique et constituant dans leur parcours une étape
importante.
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1
Mickiewicz travaille à partir des originaux et de traductions en français. Il
consulte l’ouvrage de Sylvestre de Sacy, Chrestomathie arabe, Paris, 1826 et traduit
« Almotenabbi » à partir de l’arabe, Le Pacha renégat à partir du turc, et adapte
Champharis et Arihman et Ormuz.
2
Voir sur le silence d’Hugo au sujet de la conquête de l’Algérie : http://groupugo.
div.jussieu.fr.
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La révolte en Grèce...
1
Jan (Iwan) Mazepa KoáodyĔski (env. 1644-1709) qui aurait été puni d’une façon
inhabituelle après avoir été pris in ßagranti delicto par un mari trompé : il aurait
été renvoyé chez lui, nu et ligoté à un cheval. Ses aventures ont été décrites par
Jan Chryzostom Pasek, son rival à la cour du roi de Pologne. Par la suite, l’histoire
inspire Voltaire (Histoire de Charles XII) qui la rend plus dramatique en faisant
chevaucher le malheureux non plus à travers des « broussailles », mais par la steppe
ukrainienne jusqu’au pays tatare. C’est cette image qui sera reprise par Byron (1819)
et Hugo (1829), puis transformée par Pouchkine dans son poème Poltava publié en
1829, lequel inspirera à son tour Tchaćkovski avec Mazeppa, un opéra composé en
1884.
2
Juliusz Sáowacki, PodróĪ do Ziemi ĝwiĊtej z Neapolu.
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1
Société philanthropique en faveur des Grecs créée en 1821.
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Ce sont les écrivains qui ont soulevé la foule en faveur d’un peuple
resté – personne n’en doutait – héroïque et élégant »1.
C’est la manière dont Hugo dans Les Orientales, puis Sáowacki dans
Lambro se saisissent des évènements grecs qui nous intéressera plus
particulièrement.
« On est déçu de voir que toutes ces nouvelles tendances qui indiquent
un changement dans la conception que les Français pouvaient se faire
de l’Orient ne se réßéchissent que très peu dans les œuvres purement
littéraires. (...) Même un sujet d’actualité, comme la guerre grecque,
qui inspire des odes sans nombre, est présenté dans un langage et sous
la même forme que si on n’avait aucun sentiment de la couleur locale
de l’Orient »3.
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1 Le Courrier français, 1er juillet 1826 cit. d’après La Grèce en révolte, p. 57.
2 Le texte de cet article non publié à l’époque a été édité dans V. Hugo, Œuvres
complètes, édition Massin, t. 2, p. 983-986.
3 Étaient exposées entre autres les œuvres suivantes de David : Mars désarmé par
Vénus (Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, dimensions : 308 x 265), La
mort de Socrate (Metropolitan Museum of Art, New York, dimensions : 130 x 196),
La colère d’Achille (Kimbell Art Museum, Fort Worth, États-Unis, dimensions :
105 x 145), Le Serment des Horaces (Musée du Louvre, dimensions : 330 x 425).
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1
Constantin Kanaris (Canaris) (?-1877) – ofÞcier de marine, héros de l’insurrection
grecque, célèbre pour ses exploits dans les batailles navales contre la ßotte ottomane.
Après l’indépendance, député, puis premier ministre de la Grèce.
2
Voir le commentaire d’Élisabeth Barineau, accompagnant le poème « Canaris »,
V. Hugo, Les Orientales, édition critique, par Élisabeth Barineau, Paris, Librairie
Marcel Didier, 1954.
3
Outre les lithographies ou almanach vendus au proÞt des Grecs, une production
d’objets usuels : assiettes, vases, tapisseries a véhiculé le soutien pour l’insurrection
en reproduisant parfois des images devenues célèbres comme le Jeune Grec défendant
son père d’Ary Scheffer.
4
La Liberté guidant son peuple d’Eugène Delacroix a été présentée au Salon de
1831.
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1
On trouve dans les œuvres de jeunesse de Sáowacki deux sortes d’inspiration
orientale : les personnages historiques ou le mode de vie des peuples voisins de la
Pologne (Cosaques, Tartares), comme pour Jan Bielecki ou bien le monde de l’islam
comme pour Arab, tous deux publiés en 1832.
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1
Rigas (Rhigas) (1757-1798) – écrivain et scientiÞque grec, entre au service de
l’administration phanariote, sert de traducteur lors des contacts avec le consulat
français. Sous l’inßuence de la Révolution, Rigas écrit un projet de Constitution pour
une future Grèce libre et Thourios, chant de guerre devenu vite populaire. Considéré
comme un des premiers organisateurs des mouvements indépendantistes grecs, il fut
arrêté par les Autrichiens, livré aux autorités ottomanes et exécuté.
2
Paweá Herz, Portret Sáowackiego, Warszawa, 2009, p. 62.
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Voyage rêvé ?
1
A. Mickiewicz, Pan Tadeusz ou la dernière expédition judiciaire en Lituanie.
Scènes de la vie nobiliaire des années 1811 et 1812 en douze chants. Traduit du
polonais par Robert Bourgeois, Montricher, 1992 :
Traîner sur les pavés de Paris pareils songes O tem Īe dumaü na paryskim bruku,
Quand mon oreille bruit des clameurs, des Przynosząc z miasta uszy peáne stuku,
mensonges
Montant de la cité, projets intempestifs, PrzeklĊstw i káamstwa, niewczesnych
zamiarów,
Querelles de damnés, plaintes, regrets Za poznych Īalów, potĊpieĔczych swarów!
tardifs !
Malheur aux exilés ! Une foule ennemie, Biada nam, zbiegi, ĪeĞmy w czas morowy
Puisqu’ils se sont enfouis pendant LĊkliwe nieĞli za granicĊ gáowy!
l’épidémie,
Sent en les côtoyant sa peur s’exaspérer Bo gdzie stąpili, száa przed nimi trwoga,
Et chacun d’entre eux voit un pestiféré. W kaĪdym sąsiedzi znajdowali wroga,
Les enchaînant enÞn dans d’étroites AĪ nas objĊto w ciasny krąg áaĔcucha
limites,
On voudrait les voir rendre à Dieux l’âme au I kaĪą oddaü co najprĊdzej ducha.
plus vite.
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Arrêté en 1823, puis condamné, le jeune poète passe d’abord six mois
en prison. Il est ensuite autorisé à la quitter à condition de signer un
document dans lequel il s’engage d’une part à ne pas divulguer des
informations sur le procès et l’instruction dont il a fait l’objet, d’autre
part, à informer à l’avenir les instances appropriées de l’existence de
toute association ou société non autorisée par le gouvernement dont
il aurait eu connaissance... Sur environ 226 suspects, il y a eu plus
de cent condamnations à des peines de prison, d’exil, d’exclusion de
l’Université ou d’emploi au service de l’État. Parmi les condamnés
se trouvaient des étudiants, mais aussi des jeunes scientiÞques ou
enseignants ayant étudié essentiellement à l’Université de Vilnius,
dont l’excellence tant dans les domaines de sciences humaines
et de sciences exactes a permis par la suite à nombre d’entre eux
d’occuper des postes importants dans la recherche ou l’administration
russe1.
1
Voir à ce sujet notamment : Daniel Beauvois, Wilno, polska stolica kulturalna
zaboru rosyjskiego 1803-1832, Wrocáaw, 2010 ; ainsi que Z. Wójcik, « Wkáad
Ignacego Domeyki i innych Þlaretów wileĔskich do nauki », in : Zwoje, nr. 41.
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Loin d’être un cas isolé, cet exemple nous intéresse pour deux raisons :
assez naturellement les jeunes gens condamnés à l’exil déployaient une
grande énergie pour garder des contacts et à se tenir informés du sort
de leurs amis et proches. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la
circulation de la correspondance, certes parfois chiffrée ou indirecte,
mais favorisant les échanges d’informations restait assez importante
tant parmi ceux qui se retrouvaient en Russie, que plus tard, parmi
ceux, qui comme Mickiewicz, seraient autorisés à la quitter. Ensuite,
pour les spécialistes en sciences humaines, l’étude et la spécialisation
en philologie orientale ont été perçues comme une des carrières
scientiÞques ou diplomatiques ouvrant dans la Russie de l’époque des
possibilités de carrières intéressantes. Ainsi, sans que cela fût leur projet
initial, l’étude des langues orientales est devenue pour certains lauréats
de l’Université de Vilnius, condamnés à de longs séjours en Russie,
une des perspectives de carrière ou bien un nouveau centre d’intérêt.
Durant son séjour à Saint-Pétersbourg, Mickiewicz a rencontré, entre
autres, Józef SĊkowski2, grâce à qui il entreprend l’étude des langues
orientales, ainsi que des traductions de poèmes arabes et persans et
fait connaissance de Mirza DĪafar Topcza-Basza et d’Ivan Kozlow,
poètes et plus tard traducteurs des Sonnets de Crimée respectivement
en persan et en russe.
1
L’enseignement des langues orientales s’inscrit au départ comme auxiliaire de
l’exégèse, pour tenter une autonomisation par la suite. Sont enseignés selon les
périodes : l’hébreu, le syrien, l’arabe, le persan. En 1822 est créé un cercle de
spécialistes arabisants auquel appartiennent : SĊkowski, Kowalewski, Bobrowski et
ChodĨko, voir : D. Beauvois, op. cit., p. 256-257.
2
Józef SĊkowski (1800-1858) en 1822 est déjà professeur de l’université de Saint-
Pétersbourg en langues arabe et turque, plus tard se spécialisera en égyptologie.
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personnages sont-ils pour autant des êtres à part entière ? Deux voix du
poète ? Ne serait-il pas possible de lire les échanges entre ce « pèlerin
– exilé » et ce « mirza » – noble guide ou sage Tatar comme celle des
héritages complémentaires composant la culture polonaise qui par ses
échanges séculaires avec les peuples musulmans a su « écouter » et
parfois « entendre » les voix venues de ses conÞns orientaux ?
Mais avant que le poète ne reparte avec la certitude de sa vocation et
de son talent, il y a encore un échange bref, mais poignant au bord du
précipice de Tchoufout-Kalé :
« Le Mirza
Lâche la bride, prie – et détourne la tête !
Qu’ici ta raison cède, (…)
– Porte ailleurs ton regard (…)
Le Pèlerin
Mirza, j’ai regardé ! Dans ce monde entrouvert,
J’ai vu… J’en pourrai parler qu’après la mort :
Il n’est, chez les vivants, pas de mots pour le dire ! »1.
1
Adam Mickiewicz, « Chemin au-dessus du précipice de Tchoufout-Kalé » in :
Sonnets de Crimée suivi de Sonnets d’amour et autres textes, traduits du polonais et
présentés par Roger Legras, L’Âge d’Homme, Lausanne, 2000.
Le Mirza Mirza
Lâche la bride, prie – et détourne la tête ! Zmów pacierz, opuĞü wodze, odwróü na bok
lica,
Qu’ici ta raison cède, à ton cheval, le pas : Tu jeĨdziec koĔskim nogom swój rozum
powierza;
Voici ce brave, affermi, de l’œil sonder Dzielny koĔ! patrz, jak staje, gáąb okiem
le bas, rozmierza,
Plier le genou, crocher de son sabot l’arête, UklĊka, brzeg wiszaru kopytem pochwyca,
Suspendu ! – Porte ailleurs ton regard : s’il I zawisnąá – Tam nie patrz, tam spadáa
se jette Ĩrenica,
En ce puits d’Al-Kahir, le fond il n’atteindra ! Jak w studni Al-Kairu, o dno nie uderza.
Ne montre rien du doigt : tu n’as pas d’aile I rĊką tam nie wskazuj – nie masz u rąk
au bras ! pierza;
Que même ta pensée un saut ne se permette : I myĞli tam nie puszczaj, bo myĞl jak
kotwica,
(…)
Le Pèlerin Pielgrzym
Mirza, j’ai regardé ! Dans ce monde Mirzo, a ja spojrzaáem! Przez Ğwiata
entrouvert, szczeliny
J’ai vu… J’en pourrai parler qu’après la Tam widziaáem – com widziaá, opowiem – po
mort : Ğmierci,
Il n’est chez les vivants, pas de mots pour le Bo w Īyjących jĊzyku nie ma na to gáosu.
dire !
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Parmi les œuvres suivantes écrites juste après Les Sonnets, lorsque le
poète quitte son exil Þgure la IIIe partie des Aïeux, œuvre majeure du
romantisme polonais dans laquelle la question de la vocation du poète
est une des questions primordiales.
Les Orientales de Victor Hugo sont une ballade et une rêverie qui ne
contiennent même pas de description de voyage, fut-il imaginaire.
Mais, travaillant parfois à partir d’une documentation visuelle, Hugo
recourt souvent à l’énumération des caractéristiques des lieux, comme
dans le poème « Grenade », de manière à créer un rythme enivrant
1
Barineau, op. cit., p. 5, 11.
2
Victor Hugo, Les Orientales, XXXVI : Rêverie.
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« Tout fuit, tout disparaît. Plus de minaret maure, / Plus de sérail ßeuri,
plus d’ardente Gomorrhe, / Qui jette un reßet rouge au front noir de
Babel ! / C’est Paris, c’est l’hiver (...) »2.
L’expérience du désert...Sáowacki
Né à Krzemieniec et grandi à Vilnius, Sáowacki contrairement à
Mickiewicz a pu voyager en tant que jeune homme. Ce n’étaient pas tous
lointains, mais grâce aux relations familiales il a pu visiter les environs,
mais également se rendre à Jytomyr ou à Bar3 avant d’entreprendre
à dix-huit ans un premier grand voyage qui l’a mené entre autres à
1
Victor Hugo, Les Orientales, XXXI : Grenade.
2
Victor Hugo, Les Orientales, XLI : Novembre.
3
Villes situées dans l’Ukraine actuelle, respectivement à environ 700 et 900 km de
Vilnius.
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Odessa. Par son entourage familial, Sáowacki fut sensibilisé dès son
plus jeune âge à la « question orientale » sous ses divers aspects.
Ainsi Ludwik Spitznagel1, son ami le plus proche, ancien camarade
de collège, devint très tôt un orientaliste extrêmement prometteur,
connaissant plusieurs langues anciennes et vivantes, dont le persan,
le turc et l’arabe. Le premier – et peut-être le plus grand amour de
Sáowacki – fut Ludwika ĝniadecka, Þlle d’un professeur de l’université
de Vilnius et ami de la famille du Sáowacki. De son côté, la famille de
la jeune Þlle s’est vue conÞer l’éducation des enfants de Jan Potocki2,
grand orientaliste, voyageur et auteur de plusieurs récits de voyage3
et du Manuscrit retrouvé à Saragosse, instigateur de la création à
Vilnius d’une école des langues orientales4. Jan Potocki fut également
l’oncle d’un autre enfant terrible de la famille – Wacáaw Rzewuski5,
1
Ludwik Szpitznagel (Spitznagel) (1805-1827), ami d’enfance de J. Sáowacki. Après
des études à Krzemieniec et à Vilnius, il approfondit l’étude des langues orientales à
Saint-Pétersbourg où il rencontre Mickiewicz. Nommé consul russe à Alexandrie, il
se donne la mort à l’âge de 22 ans à la suite d’une déception amoureuse.
2
Après une séparation difÞcile d’avec son épouse, Jan Potocki a placé durant une
période ses enfants auprès de ĝniadecki.
3
Jan Potocki, Voyage en Turquie et en Égypte, 1788 (traduction polonaise de Julian
Ursyn Niemcewicz, PodróĪ do Turek i Egiptu, 1789), Voyage dans l’Empire de
Maroc, 1792.
4
Jan Potocki souhaitait convaincre le prince Czartoryski de la nécessité de suivre
l’exemple français et de créer une école des langues orientales ; pour de raisons
diverses ces conseils ne furent pas suivis ; cependant les enseignements de langues
anciennes et de langues orientales à l’université de Vilnius ont permis à plusieurs de
ses lauréats d’occuper des postes importants dans ce domaine.
5
Wacáaw Rzewuski, Emir Tadj al-Fahr (1784-1831). Parallèlement à une carrière
d’ofÞcier dans l’armée autrichienne, Rzewuski édite avec J. Hammer une des
premières revues en Europe consacrée aux questions orientales – Fundgruben des
Orients (1810-1819), puis séjourne dans la propriété familiale en Podolie (SawraĔ)
qu’il transforme à son goût pour y adopter le mode de vie selon les principes du
Coran. Lors du Congrès de Vienne, il présente au tsar Alexandre Ier et à la reine
du Wurtemberg un projet d’expédition en Arabie en vue de développement des
croisements de chevaux arabes et européens. Entre 1817 et 1819, il effectue un grand
voyage (Constantinople, Syrie, Damas, Mecque, Alep) aÞn d’acquérir des chevaux
destinés aux écuries des monarques et grands aristocrates. Criblé de dettes malgré la
réussite de son expédition, il retourne à SawraĔ et séjourne également en Russie, où il
rencontre probablement Mickiewicz lors de son séjour en Crimée. Rzewuski participe
à l’insurrection de 1830 et périt dans la bataille de Daszów en mai 1831. Son corps n’a
jamais été retrouvé. Selon la légende apparue après sa disparition et toujours présente
dans cette région au début du XXe siècle sous forme de ballades racontées par les
paysans, Emir aurait fui en Orient pour un jour revenir... et apporter la liberté.
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1
F. R. Chateaubriand, Itinéraire de Paris à Jérusalem, Paris, 1811 ; A. Lamartine,
Voyage en Orient, Paris, 1835.
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Le seul poème de cette période qui ait été publié avant sa mort à
Genève est le « Tombeau d’Agamemnon » comportant une vision
extrêmement critique de la Pologne : des raisons de son déclin, puis
de l’échec de son insurrection. Ce poème se termine par une adresse
amère ; Sáowacki y exhorte sa patrie à répondre à ses critiques et
constate qu’elle ne pourrait que le maudire...
1
Idem, « Conversation avec les pyramides ».
2
Le 29 novembre 1830 fut le jour où éclata l’insurrection de novembre à Varsovie ;
cette inscription est attestée par d’autres voyageurs de l’époque. L’original du poème
diffère un peu, nous donnons ici la traduction d’après : Poètes illustres de la Pologne
au XIXe siècle. Deuxième série : Lenartowicz, Krasinski, Slowacki ; Nice, Paris,
Cracovie, 1881 ; http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5839206q/f473.texte
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Épilogue
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1
Parmi les artistes : Boulanger, Benjamin-Constant, Gérôme ; les compositeurs :
Berlioz, Liszt, Wagner, Saint Saëns, Masset, Bizet ; voir : A. Laster, D. Glaize, Les
Orientales, Illustrations et Musique, Paris, 2002.
2
Parti en mission secrète en septembre 1855 et tentant de faire reconnaître la légion
polonaise formée dans l’Empire ottoman aÞn qu’elle puisse participer à la guerre de
Crimée sous un commandement polonais, inßuer sur son déroulement et poser dans
les négociations la question de l’indépendance de la Pologne, Mickiewicz tombe
malade et succombe en quelques semaines.
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