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ECUE : F511

UE : Gestion financière internationale


Parcours : Licence Fondamentale « Finance »
Semestre 5 – Septembre 2023/Janvier 2024
Enseignante : Madame Myriam Trabelsi – El Gharbi
myriam.trabelsi@isgb.ucar.tn

CHAPITRE 5 – LES TECHNIQUES DE COUVERTURE


CONTRE LE RISQUE DE CHANGE

Le risque de change se définit comme le risque de perte ou de gain que peut subir un agent économique, à
l’occasion de ses transactions avec l’étranger, et à cause des variations des taux de change.
Pour se couvrir contre le risque de change, il existe :
- Des techniques internes de couverture (section 2)
- Des techniques de couverture sur le marché interbancaire (section 3)
- Des techniques de couverture sur les marchés dérivés (section 4)

1. Le risque de change : définition, naissance et mesure


Pour parler de risque de change, il faut que 3 éléments soient présents :
• Des transactions avec l’étranger : ces transactions peuvent être soit commerciales (exportation ou
importation de biens et services), soit financières (exportation ou importation de capitaux. Par exemple :
emprunts ou prêt à l’étranger, souscription à une augmentation de capital d’une filiale installée à l’étranger,
encaissement de dividende de la part d’une filiale installée à l’étranger, investissement direct en portefeuille
étranger, etc.).
• Des opérations libellées en devises : cela signifie que, si l’on importe ou exporte en monnaie nationale, on
ne subit pas de risque de change.
Exemple : l’exportateur tunisien qui facture en dinar tunisien ses ventes en Algérie ne subit pas de risque de
change et ce, quelle que soit l’évolution de la parité TND/ALD ; le risque de change est entièrement subi par
le partenaire algérien.
• Un décalage entre la date à laquelle l’opération est conclue et la date à laquelle le flux financier positif ou
négatif intervient. Le risque naît dès que la décision d’achat ou de vente est prise et que la commande est
passée, c’est-à-dire dès la naissance de l’engagement commercial ou financier. Le risque court entre la
date de la comptabilisation de la facture et celle du règlement.
Exemple : si on achète au comptant des marchandises en Allemagne, celles-ci seront payées sur la base du
cours au comptant de EUR/TND ; ce cours est connu, il n’y a donc pas de risque. Toutefois, si l’achat est
effectué à crédit, le règlement sera effectué sur la base du cours de EUR/TND à l’échéance c’est-à-dire sur
la base du cours futur au comptant qui n’est pas encore connu.

Exemple : le 20/10/2021, un importateur tunisien achète des marchandises pour 100.000 EUR. Le règlement
de la facture est prévu dans 3 mois. Le cours comptant est EUR/TND = 3,2720. A l’échéance, le cours de
l’EUR/TND peut être < ou > cours au comptant.
Si le cours futur au comptant est > au cours au comptant (par exemple EUR/TND = 3,2790), il y a une perte de
change = (3,2790 - 3,2720) x 100 000 = 700 TND.

Afin de gérer le risque de change qu’elle court, l’entreprise va calculer sa position de change de transaction. La
position de change est définit comme la différence entre les créances en devises et les dettes en devises.
POSITION DE CHANGE = CREANCES EN DEVISES – DETTES EN DEVISES
Si Créances > Dettes à La position est positive à La position de change est dite longue.
Si Créances < Dettes à La position est négativeà La position de change est dite courte.
Si Créances = Dettes à La position est fermée.

Le risque de change que l’entreprise subit n’est pas le même selon que la position est longue, courte ou fermée.

Lorsque la position est longue, l’évolution contre laquelle l’entreprise veut se protéger est celle d’une
baisse du cours de la devise. Si cette baisse intervient, elle se traduit par un manque à gagner à l’échéance
(des encaissements en moins).

Lorsque la position est courte, l’entreprise cherche à se prémunir contre le risque de hausse du taux de
change de la devise dans laquelle est libellée sa dette. Si la hausse intervient, cela se traduira par une
augmentation des décaissements.

Lorsque la position est fermée, l’entreprise ne subit pas de risque de change, puisque ses créances
compensent parfaitement ses dettes.

La position de change de transaction se calcule devise par devise et échéance par échéance.
Cela signifie que, si on a des transactions libellées en n devises, et correspondant à m échéances, on aura :
n x m positions de change
Il est possible de déterminer la position de change totale de l’entreprise, en convertissant en monnaie nationale
les différentes positions et en les additionnant.

Exemple : Une société tunisienne a réalisé les opérations suivantes :


Le 01/10 : importation pour 100.000 EUR de marchandise échéance 1 mois, et exportation pour 70.000 EUR
de marchandise échéance 2 mois.
Le 15/10 : importation pour 100.000 EUR de marchandise à fins du mois.
Combien existe-t-il de postions de changes. Quels sont-elles ?
Dans la pratique, les entreprises ne se couvrent pas systématiquement contre les risques de change. Elles
peuvent en effet décider de se couvrir totalement, ne pas se couvrir du tout ou se couvrir partiellement.
Nous allons étudier le cas où les entreprises décident de se couvrir entièrement contre le risque de change.
Le but de la couverture du risque de change est de connaitre aujourd’hui quelle sera la contrepartie dans
sa monnaie des entrés ou des sorties de devises dans le futur.
Il faut donc tout d’abord définir une monnaie de référence pour l’entreprise considérée. Pour l’entreprise, la
monnaie de référence est la monnaie dans laquelle est exprimée la valeur de l’entreprise. Si l’entreprise n’est
pas cotée, la monnaie de référence est celle dans laquelle les états financiers sont établis. Si l’entreprise est
cotée sur un marché boursier, la monnaie de référence est a priori la monnaie de cotation.
Les entreprises ont le choix entre plusieurs techniques de couverture contre le risque de change

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2. Les techniques internes de couverture contre le risque de change
Les entreprises ont la possibilité de recourir à un certain nombre de techniques internes pour se couvrir contre
le risque de change. Ces techniques ne nécessitent pas le recours à une banque ou à un marché spécialisé.

2.1. Le choix d’une monnaie de facturation

Pour éviter de subir le risque de change, la solution la plus simple est de procéder à une facturation dans la
monnaie nationale. Mais la facturation en monnaie nationale n’est pas toujours possible, car les intérêts des
exportateurs et des importateurs sont diamétralement opposés.
Si l’entreprise peut choisir la devise de facturation de ses ventes ou de ses rentrées d’argent futures, elle
prendra une devise forte, c'est-à-dire une devise qui a tendance à s’apprécier par rapport à sa monnaie de
référence.
Inversement, lors de l’établissement du prix d’achat ou de sorties d’argent futures, elle doit choisir une devise
faible, c'est-à-dire une devise qui doit normalement se déprécier par rapport à sa monnaie de référence.

2.2. L’indexation monétaire

Pour se protéger contre le risque de change, une autre possibilité pour l’entreprise est d’inclure dans les contrats
des clauses monétaires qui permettent d’adapter le prix d’achat ou le prix de vente à l’évolution des cours des
devises. Trois types de clauses peuvent être envisagés :

a. Les clauses d’adaptation des prix proportionnelle aux fluctuations de change

Si le cours de la monnaie de facturation s’élève, le prix de l’exportation ou de l’importation est réduit. Si le cours
de la monnaie baisse, le prix de l’exportation ou de l’importation est augmenté.
Exemple : un exportateur tunisien conclut un contrat commercial de 100.000 USD payable dans 6 mois, sur la
base aujourd’hui d’un taux de USD 1 = TND 2,8000. Il prévoie avec son partenaire une clause d’adaptation des
prix proportionnelle aux fluctuations de change. Que devient alors le prix de l’exportation si le taux de change
dans 6 mois est de USD 1 = TND 2,900 ? Et s’il est de USD 1 = TND 2,7000 ?

b. Les clauses d’adaptation des prix proportionnelle aux fluctuations de change avec franchise

L’exportateur et l’importateur acceptent que la hausse ou la baisse du cours de la devise de facturation se


répercutent sur les prix, mais uniquement au-delà d’une franchise librement déterminée par les cocontractants.
Cette franchise peut être de 2%, 5%, etc.
Exemple : en reprenant l’exemple précédente et en y ajoutant une franchise de 4%, quand débute les
ajustements de prix ?

c. Les clauses de risque partagé

L’exportateur et l’importateur s’engagent à supporter chacun une partie de la variation du taux de change
susceptible de se produire entre la date de facturation et la date de paiement. Généralement, le partage se fait
par moitié.
Exemple : On reprend le même exemple que précédemment, en prévoyant une clause de risque partagé 50%-
50%. Si le taux de change, à l’échéance, est de USD 1 = TND 2,7000, quel sera la perte ou le gain de change
de chaque partie ?

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2.3. Le termaillage

Cette méthode de couverture du risque de change, relativement artisanale, consiste pour l’entreprise à accélérer
ou retarder ses échéances en fonction de ses anticipations concernant l’évolution du taux de change.

Anticipation sur l’évolution du taux de change Importations Exportations


Hausse Accélérer le paiement* Retarder le paiement*
Baisse Retarder le paiement Accélérer le paiement
Dans le cas *, il faut tenir compte du fait que l’entreprise aurait pu placer le montant et recevoir dessus des
intérêts ou lieu de payer rapidement ou recevoir plus tard le règlement. Il s’agit d’un coup d’opportunité.

2.4. L’escompte pour règlement au comptant

Cette technique ne peut être utilisée que pour les risques de change nés d’une position longue (entreprises
exportatrices). Elle consiste à accorder à leurs clients étrangers des escomptes (des réductions) afin de les
encourager à effectuer un règlement au comptant. Le taux d’escompte doit tenir compte du fait que l’entreprise
a la possibilité :
• D’investir le montant reçu en avance dans son cycle d’exploitation. On tient donc compte du taux de
rendement interne (TRI) de l’entreprise.
• De recourir à une couverture externe notamment à des ventes à terme.
Exemple : Une entreprise tunisienne possède une créance sur une entreprise américaine qui s’élève à
1.000.000 USD et dont le règlement est prévu dans 6 mois. L’entreprise hésite entre une couverture à terme et
un escompte pour règlement au comptant. Les conditions sur les marchés sont :
- Cours spot : USD 1 = TND 2,8210 – 2,8250
- Taux d’intérêt 6 mois sur le TND = 6% - 6 ½ %
- Taux d’intérêt 6 mois sur l’USD = 3% - 3 ¼ %
- Taux de rendement interne (TRI) annuel de l’entreprise = 15%
Quel est le taux d’escompte maximal, noté t, que l’entreprise peut accorder à son client américain ?

3. Les techniques de couverture sur le marché interbancaire


Une fois que l’entreprise a passé en revue les différentes méthodes de couverture internes, elle peut envisager
de se couvrir sur le marché interbancaire, c’est à dire auprès des banques.

3.1. Le marché interbancaire à terme (forward)

• Pour l’entreprise exportatrice, qui a une position longue en devise, le risque de change est celui d’une
baisse du cours de la devise. Pour se couvrir, elle peut vendre à terme le montant de sa créance et
déterminer ainsi avec précision la somme en monnaie locale qu’elle recevra ultérieurement.
• Pour l’entreprise importatrice, qui a une position courte en devise, le risque de change est celui d’une
hausse du cours de la devise. Pour se couvrir, elle peut acheter à terme le montant de sa dette et
déterminer ainsi avec précision la somme en monnaie locale qu’elle devra payer ultérieurement.
Pour obtenir des taux de change à terme, l’entreprise (quel soit importatrice ou exportatrice) s’adresse à sa
banque. Elle peut accepter ou refuser le taux de change à terme que la banque lui propose. Si l’entreprise
accepte le taux de change à terme proposé par la banque, elle transfère son risque de change vers la banque.

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A son tour, pour se protéger contre le risque de change, la banque fixe le taux de change à terme acheteur ou
vendeur selon les modalités qu’on a vu lors des deux chapitre précédents (opération d’emprunt, puis de change
au comptant, puis de prêt qui peuvent être synthétisés dans la relation de PTI couverte).
Mais en choisissant une couverture à terme classique, l’entreprise s’interdit de profiter d’une évolution favorable
de la devise (hausse de la devise si elle est exportatrice, baisse de la devise si elle est importatrice). On peut
donc penser que l’entreprise est.
Donc, la couverture à terme manque de souplesse, puisqu’elle représente un engagement ferme ne permettant
pas de profiter des évolutions favorables du change. C’est pourquoi d’autres instruments, comme les options,
ont été inventés.

3.2. Les avances en devises

L’avance en devise est une technique de financement du commerce international ; mais elle est également
utilisée comme méthode de protection contre le risque de change. Elle ne peut être utilisée que par les
entreprises qui ont des positions longues c’est à dire les entreprises exportatrices.
Pour se couvrir au moyen d’une avance en devises, l’entreprise exportatrice demande une avance à sa banque,
en monnaie nationale, correspondant à la créance qu’elle possède sur son client étranger.
A son tour, la banque va :
- Emprunter une somme en devise dont la valeur acquise est égale au montant de la créance de l’entreprise
(intérêts post comptés).
- La somme ainsi empruntée est vendue au comptant contre monnaie nationale. Cette somme en monnaie
nationale va être versée à l’entreprise qui va l’utiliser dans son cycle d’exploitation.
- A l’échéance, l’entreprise est payée par son client. La somme reçue est versée à la banque qui l’utilise
pour rembourser l’emprunt contracté. Ainsi, ni la banque ni l’entreprise ne sont exposées au risque de
change.
Exemple : Une entreprise exportatrice italienne a une créance de 100.000 USD, payable dans 6 mois. Elle
demande une avance en devise à sa banque. Les conditions sur les marchés sont :
- Taux d’intérêt à 3 mois sur le dollar américain : 5% - 6%
- Taux de change au comptant : USD 1 = EUR 1,1040 – 50
Comment se passe cette opération ?

La principale différence entre cette technique et la couverture à terme réside dans le fait que l’entreprise
encaisse immédiatement et non pas à l’échéance le produit de son exportation. Ainsi l’avance en devise permet
de réaliser en même temps une couverture contre le risque de change et un financement d’exportations, ce que
n’autorise pas le change à terme.

4. Les techniques de couverture sur les marchés dérivés


Pour se couvrir contre le risque de change, l’entreprise peut aussi recourir aux produits dérivés.

4.1. La couverture par les futures

Les futures sont semblables aux contrats forward, sauf qu’ils sont négociés sur des marchés organisés, c’est à
dire des bourses (et non sur des marchés de gré à gré). Les futures sont donc des contrat forward standardisé.

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Pour se couvrir contre le risque de change, une entreprise :
- importatrice peut acheter des future sur devises
- exportatrice peut vendre des futures sur devises

Cinq critères permettent de différencier les forwards, des futures :


Futures Forward
Standardisation Contrat standardisé Contrat sur mesure
Liquidité Forte Inexistante
Livraison exceptionnelle
Livraison Livraison des devises à l’échéance
Position liquidée à l’échéance
Faible (dépôt de garantie et appel de
Risque de contrepartie Fort
marge)
Protection Imparfaite, peu couteuse et réversible Parfaite, couteuse et non réversible

4.2. La couverture par les options

Les options sont différentes des contrats futures (et forward) car elle donne le droit (et non l’obligation) d’acheter
ou vendre des devises.

Il existe deux types d’options : les options d’achat (CALL) et les options de vente (PUT). Et deux stratégies :
acheteur d’options ou vendeur d’options.
- L’acheteur d’un CALL (un PUT) acquiert le droit d’acheter (de vendre) une certaine quantité de devises, à
un prix déterminé (appelé prix d’exercice) et à une date donnée.
Il doit, en échange de ce droit, verser immédiatement au vendeur une prime ou prix de l’option (premium)
- Le vendeur d’un CALL (un PUT) s’engage à vendre (à acheter) une certaine quantité d’ASJ, à un prix
déterminé, en cas d’exercice de l’option par l’acheteur.

Seul l’acheteur de l’option a la possibilité de décider d’acheter ou non, de vendre ou non l’ASJ. En contrepartie
de ce choix, il doit payer une prime au vendeur au moment de la conclusion du contrat. Le vendeur n’a rien à
débourser puisqu’il n’a pas le choix.

Selon la date d’exercice, il existe deux sortes d’options : les américaines et les européennes.
- Les américaines peuvent être exercées à tout moment (avant l’échéance) pendant leur durée de vie.
- Les européennes ne peuvent être exercées qu’à la date d’échéance du contrat (pas avant).
Les éléments caractéristiques des options sont : prix d’exercice (taux de change fixé à la date initiale), la nature
de l’option (CALL ou PUT), la date d’exercice et la prime.

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